XVe législature
Session extraordinaire de 2019-2020
Séance du jeudi 09 juillet 2020
- Présidence de M. Hugues Renson
- 1. Projet de loi de finances rectificative pour 2020
- Seconde partie (suite)
- Avant l’article 18 (amendements appelés par priorité)
- Amendement no 1795
- M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- M. Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics
- Amendement no 1133
- M. Éric Woerth, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- Amendements nos 2417, 1212, 1801 et 1214
- Article 18 (appelé par priorité)
- M. Éric Girardin
- M. Éric Coquerel
- Amendements nos 710, 1049, 1101, 1050, 2123, 358, 1478, 616, 883, 1068, 1200, 677 rectifié, 807 rectifié, 1457 rectifié, 1094, 1095, 398, 21, 311, 1092, 1264, 1500, 1956, 1072, 165, 669, 1692, 1915, 863, 361, 865, 1575, 2280, 1620, 1312, 1942, 1313, 1051, 439, 882, 228, 711, 1234, 1909, 1917, 1623, 1619, 1585, 618, 230, 363, 702, 780, 1066, 1067, 1189, 1365, 1482, 1740, 1794, 1984, 2055, 1261, 768, 89, 97, 1197, 1242, 2232, 1407, 813, 168, 634, 1053, 1069, 522, 620, 1125, 400, 1064, 399, 2356, 2357, 1309, 570, 712, 1073, 166, 1307, 1668, 1074, 169, 1966, 2151, 681, 1239, 170, 1052, 1235, 1860, 1308, 1669, 1573, 364, 705, 804, 1775, 1967, 2316, 1664, 1612, 638, 1683, 1938, 1316, 1906, 2155, 1905, 2146 et 1353
- Sous-amendement no 2474
- Suspension et reprise de la séance
- Article 18 (appelé par priorité - suite)
- Avant l’article 18 (amendements appelés par priorité)
- Seconde partie (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
1e séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures.)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances rectificative pour 2020 (nos 3074, 3132).
Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement no 1795 portant article additionnel avant l’article 18, examiné par priorité.
Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement no 1795 portant article additionnel avant l’article 18, examiné par priorité.
La parole est à Mme Samantha Cazebonne, pour soutenir l’amendement no 1795.
Il vise à encadrer les formes que peut prendre l’aide aux familles dont les enfants sont scolarisés dans des établissements français à l’étranger. Celle-ci doit en effet répondre aux besoins d’adaptation à la situation induite par la crise du covid. Grâce aux subventions prévues, les établissements pourraient, en plus de prodiguer un soutien financier aux familles en grande difficulté, adopter quatre types de mesures très attendues, relatives à la formation à l’enseignement à distance, à l’équipement numérique des établissements, à l’accompagnement personnalisé des élèves en difficulté et bien sûr à l’application des protocoles sanitaires. Il convient d’envoyer un message fort à toutes les familles qui font confiance au réseau des établissements d’enseignement français à l’étranger car elles ont connu des conditions d’enseignement parfois très difficiles.
La parole est à M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission.
Je partage l’objectif visé par l’amendement, madame la députée, et j’y donnerai donc un avis favorable, même si je ne suis pas certain qu’il relève du domaine législatif – il est même peu normatif, à vrai dire.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics, pour donner l’avis du Gouvernement.
Avis favorable du Gouvernement parce que cet amendement permettra, malgré les réserves plutôt légitimes du rapporteur général, de sérier les dispositifs d’aide à destination des établissements d’enseignement français à l’étranger.
La parole est à M. Frédéric Petit.
Je suis ravi par les deux avis que je viens d’entendre. Les mesures prévues sont historiques : c’est la première fois que l’État ajoute, pour ces 522 établissements, l’équivalent d’un tiers d’année de subventions publiques. Il est capital que la représentation nationale contribue ainsi à soutenir ce réseau. Je soutiens donc cette aide exceptionnelle, mais celle-ci doit s’accompagner de moyens de contrôle tout aussi exceptionnels, à la hauteur de l’effort qu’accomplit la nation.
La parole est à M. Vincent Ledoux.
Il est en effet tout à fait légitime de s’assurer que les 50 millions supplémentaires alloués à l’Agence pour l’enseignement français à l’étranger et les 50 millions d’avances de trésorerie bénéficieront bien aux établissements qui en ont le plus besoin, quelle que soit leur catégorie. L’amendement de Mme Cazebonne a le mérite, à cet égard, de souligner la logique du plan de soutien au réseau des établissements français à l’étranger, qui, outre les 100 millions d’euros inscrits dans ce PLFR, comprend également les 22 millions d’euros que l’AEFE redéploie au sein de son budget par des annulations ou des reports de crédits. Les premières mesures prises depuis la crise par l’Agence vont donc dans le sens attendu, et je ne pense pas – même si cela restera à vérifier – qu’il y ait un risque qu’elle utilise une partie de ces aides pour satisfaire ses besoins internes au détriment des établissements privés. Quoi qu’il en soit, je remercie le Gouvernement pour son approche de la question.
(L’amendement no 1795 est adopté.)(Applaudissements sur les bancs des groupes MODEM et Agir ens, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 1133.
Cet amendement dont notre collègue Gilles Carrez est le premier signataire vise à soutenir les grands établissements patrimoniaux et muséaux, qui ont subi des pertes de recettes importantes – 80 millions d’euros pour le Louvre, 60 millions d’euros pour le Centre des monuments nationaux, 40 millions d’euros pour le château de Versailles. En effet, ces établissements n’ont pas pu réduire leurs charges à due concurrence puisqu’ils n’ont pas accès au régime d’activité partielle. Or il faut qu’ils puissent préserver leur programme d’investissements. À cette fin, Gilles Carrez propose d’expérimenter un financement par l’emprunt auprès du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations. L’autorisation d’emprunt serait subordonnée au fait que l’établissement dispose en longue période d’un budget financé pour une part significative par ses ressources propres, ce qui en garantira le remboursement.
L’expérimentation, d’une durée de trois ans, permettrait de déroger à l’interdiction pour les organismes divers d’administration centrale de contracter un emprunt supérieur à douze mois ainsi qu’aux règles d’emploi du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations, lequel finance aujourd’hui prioritairement le logement social. En finançant les investissements des grands opérateurs de notre patrimoine par des prêts à maturité longue, l’épargne populaire du livret A continuerait de remplir sa mission d’intérêt général, avec toutes les garanties de sécurité et de rentabilité que les Français attendent. Quel est l’avis de la commission ? Cet amendement de notre collègue Gilles Carrez soulève la question importante de la doctrine d’emploi du livret A, un débat auquel nous ne pourrons pas échapper au moment de la relance. Actuellement, ces fonds, qui ne sont pas inépuisables, financent des projets à utilité sociale ou environnementale. Faut-il en diversifier l’usage en permettant aux établissements publics culturels et patrimoniaux d’en bénéficier sous la forme d’emprunts ? L’idée est loin d’être idiote, mais il faut d’abord déterminer comment flécher utilement cette épargne réglementée au service de la puissance publique et de la reconstruction de notre pays. À ce stade, ce sera donc une demande de retrait dans l’attente du débat de fond, éventuellement lors de l’examen du prochain projet de loi de finances, à la rentrée. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je partage la position du rapporteur général : le débat sur la mobilisation de l’épargne est nécessaire, mais il doit être mené globalement dans le cadre du prochain PLF et du plan de relance, et ne pas se limiter à une catégorie d’établissements, aussi importants soient-ils.
D’ailleurs, le ministère de la culture et celui des comptes publics ont déjà répondu présents en allouant aux établissements concernés, dont le niveau de recettes a été très fortement affecté par la crise, des aides et des avances dont le montant a été calculé en fonction du niveau de leur trésorerie. Dans le cadre du PLF pour 2021, le ministère de la culture prépare d’autres mesures de soutien destinées à les accompagner durablement. Jusqu’à présent, le Gouvernement a donc apporté des réponses plutôt ponctuelles et de court terme, mais nous aurons ultérieurement le débat sur la mobilisation de l’épargne. Avis défavorable. Madame Louwagie, retirez-vous l’amendement ? Non puisque c’est celui de Gilles Carrez, monsieur le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Nous allons bientôt défendre, dans le même esprit, un amendement visant à créer un livret semblable au livret A mais destiné à collecter une partie de l’épargne supplémentaire constituée pendant la crise du covid – dont la Banque de France évalue le montant, à terme, à 100 milliards – pour la drainer vers l’investissement, en espérant que l’autre partie ira naturellement vers la consommation. Un instrument financier spécifique serait en effet plus attractif. La parole est à M. M’jid El Guerrab. Au sein de la Caisse des dépôts, la question de l’évolution de l’utilisation des encours du livret A se pose depuis des années. Il est vrai qu’aujourd’hui, le cadre est figé et qu’on n’a même pas pu y toucher dans le cadre de la loi PACTE, la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises. C’est dommage parce que la crise exceptionnelle que nous vivons justifierait de ne plus consacrer exclusivement ce fonds d’épargne au logement social et d’en diriger une partie vers l’investissement productif. La Caisse des dépôts s’y emploie déjà sur ses fonds propres à travers différents instruments, mais cela demeure insuffisant. Je suis d’accord avec le président Woerth : il faut aller plus loin et faire plus fort, notamment en faveur de l’investissement productif. À cet égard, l’amendement paraît très utile. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz. J’ai bien noté que les réponses du rapporteur général et du ministre ne constituaient pas une fin de non-recevoir. M. le rapporteur général appelle en effet à étudier dans le cadre du projet de loi de finances les perspectives ouvertes par cet amendement, M. le ministre ajoutant que beaucoup a déjà été fait en ce domaine. Mais ce qui a été fait est très ponctuel et ne concerne pas l’investissement alors que l’amendement propose d’orienter vraiment l’épargne vers celui-ci. La différence est là. Ne pourrait-on pas décider cette expérimentation qui a du sens et qui est suffisamment cadrée pour éviter les dérives ? Le court terme, c’est bon pour passer la crise, mais il y a un vrai besoin de favoriser les investissements de long terme, ce qui suppose un outil adapté et un support spécifique. (L’amendement no 1133 n’est pas adopté.) Je suis de plusieurs amendements, nos 2417, 1212, 1801 et 1214, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement no 2417. S’ajoutant aux dispositions que nous avons déjà prises pour soutenir les établissements d’enseignement français à l’étranger, il propose que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1er octobre, « un rapport présentant les conséquences budgétaires de la crise liée à la pandémie de covid-19 sur la diplomatie culturelle et d’influence française ainsi que sur l’enseignement français à l’étranger ». Son contenu reprend celui des amendements déposés sur le même sujet, dont je demande en toute logique le retrait. La parole est à M. M’jid El Guerrab, pour soutenir l’amendement no 1212. Je suivrai bien sûr M. le ministre puisque mon amendement a la même finalité. Je confirme ce qu’a dit mon collègue Frédéric Petit : les aides accordées exceptionnellement à l’AEFE peuvent être qualifiées d’historiques. Et il est impossible d’imaginer qu’elles ne fassent pas l’objet d’un contrôle spécifique afin d’en assurer l’efficacité et d’éviter tout malentendu, d’autant qu’il est généralement reproché à l’Agence d’avoir un fonctionnement un peu trop opaque.
Je retire l’amendement. (L’amendement no 1212 est retiré.) La parole est à M. Vincent Ledoux, pour soutenir l’amendement no 1801. J’ai déposé cet amendement dans la continuité de mes travaux en tant que rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l’État ». J’ai montré depuis dans un rapport que si nous apportons des crédits supplémentaires importants dans ce PLFR au réseau d’enseignement français à l’étranger, c’est à chaque poste diplomatique d’apporter un soutien ponctuel aux instituts français et alliances françaises en redéployant les crédits qui lui sont attribués.
Le risque, cependant, est qu’une telle politique, aussi adaptée soit-elle, entraîne la réduction de l’enveloppe consacrée aux bourses, pourtant indispensables à l’attractivité universitaire de notre pays et à la coopération avec les pays du Sud. Il nous faudra donc avoir une vision globale des redéploiements auxquels les postes diplomatiques auront procédé afin d’assurer un chaînage vertueux entre ce PLFR et la loi de finances initiale pour 2021. Nous pourrons ainsi tenir pleinement compte des conséquences de la crise et ajuster au plus fin les crédits destinés à soutenir les opérateurs culturels et à financer les bourses d’études en France afin d’éviter d’avoir à procéder à nouveau, l’an prochain, à des mouvements de crédits trop importants. Je remercie le ministre Le Drian d’avoir entendu ma demande et je retire cet amendement au profit de celui du Gouvernement. (M. Frédéric Petit applaudit.) Très bien ! (L’amendement no 1801 est retiré.) La parole est à M. M’jid El Guerrab, pour soutenir l’amendement no 1214. Depuis la crise, nous recevons des dizaines de témoignages sur les difficultés d’attribution des dotations – dans l’exposé sommaire, je prends l’exemple de l’école d’Erbil. Le Parlement doit savoir comment l’argent est réparti. Cela étant, je retire l’amendement. (L’amendement no 1214 est retiré.) Quel est l’avis de la commission ? L’amendement du Gouvernement est bien pensé puisqu’il permet de répondre à plusieurs demandes formulées dans les autres amendements. Mon avis sera donc favorable. La parole est à M. Frédéric Petit. L’amendement du Gouvernement reprend des amendements qui ont été soumis de manière assez insistante au ministre de l’Europe et des affaires étrangères après avoir été adoptés à l’unanimité par la commission des affaires étrangères.
Il est souvent question de l’Agence de l’enseignement français à l’étranger, mais, comme l’a fait M. M’jid El Guerrab, je voudrais rendre hommage aux parents qui sont en première ligne dans les écoles, à Erbil, en Afrique ou ailleurs. Il importe que nous puissions vérifier que l’aide leur parvient.
Enfin, j’ai noté la date de remise du rapport et j’en déduis – cela va sans dire mais cela va mieux en le disant – que celle-ci interviendra avant l’examen du projet de loi de finances initiale. La parole est à M. Charles de Courson. Les personnels qui assurent l’enseignement français à l’étranger sont-ils payés actuellement ? J’ai été étonné de recevoir des lettres m’informant qu’ils ne l’étaient plus, au Liban notamment. Est-ce exact ? Un rapport est bienvenu, mais si des mesures d’urgence s’imposent, le Gouvernement les a-t-il prises ? La parole est à Mme Samantha Cazebonne. Vous pouvez être rassuré, tous les enseignants sont payés. Au Liban, des difficultés spécifiques se posent… Cela fait trois mois qu’ils ne sont pas payés ! …mais de ce que j’en sais, les enseignants y sont payés aussi. Cela dépend des statuts. (L’amendement no 2417 est adopté.)
L’expérimentation, d’une durée de trois ans, permettrait de déroger à l’interdiction pour les organismes divers d’administration centrale de contracter un emprunt supérieur à douze mois ainsi qu’aux règles d’emploi du fonds d’épargne de la Caisse des dépôts et consignations, lequel finance aujourd’hui prioritairement le logement social. En finançant les investissements des grands opérateurs de notre patrimoine par des prêts à maturité longue, l’épargne populaire du livret A continuerait de remplir sa mission d’intérêt général, avec toutes les garanties de sécurité et de rentabilité que les Français attendent. Quel est l’avis de la commission ? Cet amendement de notre collègue Gilles Carrez soulève la question importante de la doctrine d’emploi du livret A, un débat auquel nous ne pourrons pas échapper au moment de la relance. Actuellement, ces fonds, qui ne sont pas inépuisables, financent des projets à utilité sociale ou environnementale. Faut-il en diversifier l’usage en permettant aux établissements publics culturels et patrimoniaux d’en bénéficier sous la forme d’emprunts ? L’idée est loin d’être idiote, mais il faut d’abord déterminer comment flécher utilement cette épargne réglementée au service de la puissance publique et de la reconstruction de notre pays. À ce stade, ce sera donc une demande de retrait dans l’attente du débat de fond, éventuellement lors de l’examen du prochain projet de loi de finances, à la rentrée. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je partage la position du rapporteur général : le débat sur la mobilisation de l’épargne est nécessaire, mais il doit être mené globalement dans le cadre du prochain PLF et du plan de relance, et ne pas se limiter à une catégorie d’établissements, aussi importants soient-ils.
D’ailleurs, le ministère de la culture et celui des comptes publics ont déjà répondu présents en allouant aux établissements concernés, dont le niveau de recettes a été très fortement affecté par la crise, des aides et des avances dont le montant a été calculé en fonction du niveau de leur trésorerie. Dans le cadre du PLF pour 2021, le ministère de la culture prépare d’autres mesures de soutien destinées à les accompagner durablement. Jusqu’à présent, le Gouvernement a donc apporté des réponses plutôt ponctuelles et de court terme, mais nous aurons ultérieurement le débat sur la mobilisation de l’épargne. Avis défavorable. Madame Louwagie, retirez-vous l’amendement ? Non puisque c’est celui de Gilles Carrez, monsieur le président. La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Nous allons bientôt défendre, dans le même esprit, un amendement visant à créer un livret semblable au livret A mais destiné à collecter une partie de l’épargne supplémentaire constituée pendant la crise du covid – dont la Banque de France évalue le montant, à terme, à 100 milliards – pour la drainer vers l’investissement, en espérant que l’autre partie ira naturellement vers la consommation. Un instrument financier spécifique serait en effet plus attractif. La parole est à M. M’jid El Guerrab. Au sein de la Caisse des dépôts, la question de l’évolution de l’utilisation des encours du livret A se pose depuis des années. Il est vrai qu’aujourd’hui, le cadre est figé et qu’on n’a même pas pu y toucher dans le cadre de la loi PACTE, la loi relative à la croissance et la transformation des entreprises. C’est dommage parce que la crise exceptionnelle que nous vivons justifierait de ne plus consacrer exclusivement ce fonds d’épargne au logement social et d’en diriger une partie vers l’investissement productif. La Caisse des dépôts s’y emploie déjà sur ses fonds propres à travers différents instruments, mais cela demeure insuffisant. Je suis d’accord avec le président Woerth : il faut aller plus loin et faire plus fort, notamment en faveur de l’investissement productif. À cet égard, l’amendement paraît très utile. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz. J’ai bien noté que les réponses du rapporteur général et du ministre ne constituaient pas une fin de non-recevoir. M. le rapporteur général appelle en effet à étudier dans le cadre du projet de loi de finances les perspectives ouvertes par cet amendement, M. le ministre ajoutant que beaucoup a déjà été fait en ce domaine. Mais ce qui a été fait est très ponctuel et ne concerne pas l’investissement alors que l’amendement propose d’orienter vraiment l’épargne vers celui-ci. La différence est là. Ne pourrait-on pas décider cette expérimentation qui a du sens et qui est suffisamment cadrée pour éviter les dérives ? Le court terme, c’est bon pour passer la crise, mais il y a un vrai besoin de favoriser les investissements de long terme, ce qui suppose un outil adapté et un support spécifique. (L’amendement no 1133 n’est pas adopté.) Je suis de plusieurs amendements, nos 2417, 1212, 1801 et 1214, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l’amendement no 2417. S’ajoutant aux dispositions que nous avons déjà prises pour soutenir les établissements d’enseignement français à l’étranger, il propose que le Gouvernement remette au Parlement, avant le 1er octobre, « un rapport présentant les conséquences budgétaires de la crise liée à la pandémie de covid-19 sur la diplomatie culturelle et d’influence française ainsi que sur l’enseignement français à l’étranger ». Son contenu reprend celui des amendements déposés sur le même sujet, dont je demande en toute logique le retrait. La parole est à M. M’jid El Guerrab, pour soutenir l’amendement no 1212. Je suivrai bien sûr M. le ministre puisque mon amendement a la même finalité. Je confirme ce qu’a dit mon collègue Frédéric Petit : les aides accordées exceptionnellement à l’AEFE peuvent être qualifiées d’historiques. Et il est impossible d’imaginer qu’elles ne fassent pas l’objet d’un contrôle spécifique afin d’en assurer l’efficacité et d’éviter tout malentendu, d’autant qu’il est généralement reproché à l’Agence d’avoir un fonctionnement un peu trop opaque.
Je retire l’amendement. (L’amendement no 1212 est retiré.) La parole est à M. Vincent Ledoux, pour soutenir l’amendement no 1801. J’ai déposé cet amendement dans la continuité de mes travaux en tant que rapporteur spécial de la mission « Action extérieure de l’État ». J’ai montré depuis dans un rapport que si nous apportons des crédits supplémentaires importants dans ce PLFR au réseau d’enseignement français à l’étranger, c’est à chaque poste diplomatique d’apporter un soutien ponctuel aux instituts français et alliances françaises en redéployant les crédits qui lui sont attribués.
Le risque, cependant, est qu’une telle politique, aussi adaptée soit-elle, entraîne la réduction de l’enveloppe consacrée aux bourses, pourtant indispensables à l’attractivité universitaire de notre pays et à la coopération avec les pays du Sud. Il nous faudra donc avoir une vision globale des redéploiements auxquels les postes diplomatiques auront procédé afin d’assurer un chaînage vertueux entre ce PLFR et la loi de finances initiale pour 2021. Nous pourrons ainsi tenir pleinement compte des conséquences de la crise et ajuster au plus fin les crédits destinés à soutenir les opérateurs culturels et à financer les bourses d’études en France afin d’éviter d’avoir à procéder à nouveau, l’an prochain, à des mouvements de crédits trop importants. Je remercie le ministre Le Drian d’avoir entendu ma demande et je retire cet amendement au profit de celui du Gouvernement. (M. Frédéric Petit applaudit.) Très bien ! (L’amendement no 1801 est retiré.) La parole est à M. M’jid El Guerrab, pour soutenir l’amendement no 1214. Depuis la crise, nous recevons des dizaines de témoignages sur les difficultés d’attribution des dotations – dans l’exposé sommaire, je prends l’exemple de l’école d’Erbil. Le Parlement doit savoir comment l’argent est réparti. Cela étant, je retire l’amendement. (L’amendement no 1214 est retiré.) Quel est l’avis de la commission ? L’amendement du Gouvernement est bien pensé puisqu’il permet de répondre à plusieurs demandes formulées dans les autres amendements. Mon avis sera donc favorable. La parole est à M. Frédéric Petit. L’amendement du Gouvernement reprend des amendements qui ont été soumis de manière assez insistante au ministre de l’Europe et des affaires étrangères après avoir été adoptés à l’unanimité par la commission des affaires étrangères.
Il est souvent question de l’Agence de l’enseignement français à l’étranger, mais, comme l’a fait M. M’jid El Guerrab, je voudrais rendre hommage aux parents qui sont en première ligne dans les écoles, à Erbil, en Afrique ou ailleurs. Il importe que nous puissions vérifier que l’aide leur parvient.
Enfin, j’ai noté la date de remise du rapport et j’en déduis – cela va sans dire mais cela va mieux en le disant – que celle-ci interviendra avant l’examen du projet de loi de finances initiale. La parole est à M. Charles de Courson. Les personnels qui assurent l’enseignement français à l’étranger sont-ils payés actuellement ? J’ai été étonné de recevoir des lettres m’informant qu’ils ne l’étaient plus, au Liban notamment. Est-ce exact ? Un rapport est bienvenu, mais si des mesures d’urgence s’imposent, le Gouvernement les a-t-il prises ? La parole est à Mme Samantha Cazebonne. Vous pouvez être rassuré, tous les enseignants sont payés. Au Liban, des difficultés spécifiques se posent… Cela fait trois mois qu’ils ne sont pas payés ! …mais de ce que j’en sais, les enseignants y sont payés aussi. Cela dépend des statuts. (L’amendement no 2417 est adopté.)
La parole est à M. Éric Girardin.
La crise sanitaire a pour conséquence une grave crise économique et sociale. Un plan massif de soutien a été adopté ; les nombreux dispositifs déployés ont permis aux entreprises de résister et aux salariés de continuer à percevoir des revenus, mais la crise n’a pas eu les mêmes répercussions selon les secteurs d’activité économique.
La filière agricole a ainsi résisté de manière particulière, offrant même une continuité de production alimentaire qui a permis à chacun de continuer à se nourrir – que ses acteurs en soient vivement remerciés. Ce secteur n’a pas licencié mais plutôt recherché des employés ; il n’a donc pas eu recours au chômage partiel ; il a continué de verser des salaires et d’acquitter des charges sans bénéficier pour autant des divers dispositifs instaurés.
La filière viticole a subi une rupture de marché provoquée par la fermeture administrative des cafés, hôtels, restaurants et par la fermeture des frontières. Au sein de celle-ci, les vendeurs de raisin au kilogramme ne sont pas immédiatement affectés par la crise économique mais ils le seront par répercussion l’année prochaine.
La filière agricole, dans son ensemble, est confrontée au problème suivant : elle doit continuer à acquitter des charges – elle devra d’ailleurs assumer les reports de charges qui auront été concédés – et à faire face à l’endettement bancaire ainsi qu’aux charges d’activité courantes.
Elle représente 60 milliards d’euros de chiffre d’affaires dont 13 milliards à l’export, 700 000 emplois et un soutien considérable à l’économie des territoires.
Je plaide pour l’instauration d’un dispositif spécifique, adapté à cette filière, pour l’aider à passer le cap et à poursuivre son développement au bénéfice des territoires. La parole est à M. Éric Coquerel. L’article 18 est important puisqu’il fonde une partie des aides aux entreprises sur des exonérations de cotisations sociales patronales. Nous y sommes très clairement opposés car il revient à transférer aux comptes sociaux le coût de la crise du covid-19. Il transforme une dette de l’État en dette sociale.
Or l’économiste Michaël Zemmour l’a très bien montré dans une tribune récente dans Le Monde , si nous pouvons débattre de la manière de gérer la dette de l’État – nous proposons de la transformer en dette perpétuelle avec taux d’intérêt négatif : Éric Woerth affirmait récemment que le stock de la dette ne serait jamais remboursé et que seuls les intérêts le seraient –, ce n’est pas vrai de la dette sociale.
La dette sociale – stock et intérêts – sera inévitablement payée. Autrement dit, reporter sur les comptes sociaux les conséquences financières de la crise coûtera plus cher. En outre, cela comporte plusieurs risques : d’abord, l’État compensera-t-il intégralement, au centime d’euro près, le montant des exonérations ? On peut en douter : je rappelle que dans le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, 3 milliards d’euros n’ont pas été compensés. Ensuite, les exonérations concernent des mécanismes de solidarité nationale dont chacun constate qu’ils ont été plus indispensables encore pendant la crise qu’ils ne le sont en temps normal.
La solution ne réside pas dans les exonérations mais dans la fiscalité : il faut revenir sur la suppression de l’ISF et l’instauration de la flat tax afin de financer, sans toucher aux comptes sociaux, un dispositif de soutien aux entreprises adapté aux problèmes auxquels elles sont confrontées, et comprenant le cas échéant des aides directes. C’est le rôle de l’État.
Nous voterons donc contre l’article 18. Nous en venons à l’examen des amendements. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 710. L’amendement vise à étendre au forfait social, dont j’avais proposé la suppression hier, le champ des exonérations prévues à l’article 18. Ce serait une mesure forte dans la période actuelle. Quel est l’avis de la commission ? Je développerai longuement ma première réponse, pour aller plus vite ensuite, afin d’expliquer ce qui motive très souvent un avis défavorable sur les amendements.
L’article 18 est probablement le cœur du texte. L’exonération de cotisations sociales pour certains secteurs d’activité qu’il prévoit est inédite et n’est pas dépourvue d’une certaine fragilité juridique. Nous devons, en effet, définir, en collaboration avec le pouvoir réglementaire, les secteurs susceptibles de bénéficier d’exonérations de charges. C’est à cet exercice d’équilibriste que nous essaierons de nous livrer ensemble dans les prochaines heures.
L’article 18 ne prévoit pas seulement des exonérations de charges. Celles-ci peuvent concerner, pour une période de quatre mois, les entreprises de moins de 250 salariés dont l’activité principale relève des secteurs du tourisme, de l’hôtellerie, de la restauration, du sport, de la culture, du transport aérien et de l’événementiel ; pour une période de trois mois, les entreprises de moins de 10 salariés qui ont été fermées.
Les entreprises de moins de 50 salariés ne bénéficiant pas des exonérations précédemment mentionnées peuvent compter sur un autre filet de sécurité : la remise partielle de leurs dettes sociales, que la commission a étendue aux travailleurs indépendants et aux travailleurs non-salariés agricoles.
Enfin, toutes les entreprises, sans exception, qui le souhaitent peuvent solliciter un plan d’apurement leur permettant d’étaler le paiement de leurs dettes sociales jusqu’à trente-six mois.
L’article 18 est donc un véritable couteau suisse. L’accompagnement qu’il propose ne s’adresse pas uniquement aux entreprises relevant des seules listes S1 – secteurs prioritaires – et S1 bis – secteurs dépendant des précédents ayant subi une importante baisse de leur chiffre d’affaires. Sa portée est bien plus large ; il représente une aide de 4 milliards d’euros – et les pertes de recettes, monsieur Coquerel, sont bien compensées par des crédits budgétaires.
Qu’est-ce qui permet à ce dispositif de respecter l’égalité devant l’impôt et donc d’être conforme à la Constitution ? À cet égard, la limitation dans le temps est très importante. La période d’exonération doit correspondre à celle pendant laquelle l’activité des entreprises dans les secteurs prioritaires comme dans les secteurs dépendants a été empêchée : entre mars et juin ou entre mars et mai selon la taille des entreprises. Toute prolongation de cette période – de nombreux amendements ont été déposés dans ce but – risquerait de porter atteinte au principe d’égalité devant l’impôt.
De même, pourquoi certains secteurs sont-ils visés et pas d’autres ? Pourquoi l’agriculture ou le bâtiment ne figurent-ils pas parmi les secteurs prioritaires ? Parce qu’ils ne répondent pas au critère de l’empêchement d’activité. Cela ne signifie pas que ces secteurs ne connaissent pas de difficultés économiques, ni qu’ils ne doivent pas être aidés et accompagnés – de nombreuses mesures ont été prises en ce sens –, mais ils n’ont pas été empêchés sur le plan administratif. La nuance est primordiale pour garantir la validité juridique des exonérations de charges.
Toute proposition visant à appliquer le dispositif à d’autres secteurs sera laissée à l’appréciation du pouvoir réglementaire – je demanderai systématiquement le retrait des amendements et l’avis du ministre sur la possibilité d’étendre le champ d’application par décret. Mais j’appelle votre attention sur le respect des critères objectifs que sont l’empêchement et la dépendance à un secteur empêché pour une entreprise ayant subi une baisse de chiffre d’affaires de 80 %.
Ces considérations sont importantes car je ne voudrais pas que le texte adopté rende impossible l’exonération de charges sociales pour les secteurs prioritaires et dépendants. Il s’agit d’une belle mesure, franche, et d’intérêt général. Les secteurs qui ne sont pas concernés doivent être soutenus autrement.
Je vous propose en quelque sorte de conclure un contrat moral sur ce sujet. Si les aides en faveur des autres secteurs vous apparaissent insuffisantes, il faut travailler à de nouvelles mesures et je vous accompagnerai volontiers dans cette tâche, comme je l’ai fait depuis le début de la crise.
Je le reconnais, il est difficile de choisir des secteurs – le débat a eu lieu en commission, avec le président de la commission, notamment. Nous prenons un risque juridique mais la mesure est, selon moi, juste et équilibrée. Nous devons aller au bout de cette logique afin que la réponse à la crise soit la plus adaptée à la réalité, en particulier en tenant compte de l’empêchement d’activité qui a caractérisé la période de confinement que nous avons vécue.
Mon avis est donc défavorable. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.) Quel est l’avis du Gouvernement ? M. le rapporteur a dit l’essentiel. Il a mentionné les divers niveaux d’exonération – pour les TPE de moins de dix salariés qui font l’objet d’une fermeture administrative ; pour les secteurs les plus concernés par l’arrêt de l’activité, le plus emblématique étant celui des cafés, hôtels, restaurants – mais aussi la possibilité de remise de dettes sociales au cas par cas pour les entreprises de moins de 50 salariés ou encore le mécanisme d’apurement des dettes sociales accessible à toutes les entreprises. Toutes ces mesures constituent un effort sans précédent.
Il faut souligner le caractère inédit d’une exonération de cotisations aussi massive : comme M. le rapporteur général l’a souligné, ce sont un peu plus de 3,5 milliards d’euros qui seront compensés auprès des organismes de sécurité sociale. Il s’agit là, me semble-t-il, d’un point important du débat.
Nous avons voulu construire l’article en y intégrant le maximum d’éléments susceptibles de le sécuriser : il n’y aurait rien de pire, pour les acteurs économiques concernés, qui attendent ces dispositions avec une extrême impatience, que les mesures que nous adoptons soient remises en cause du fait d’une fragilité. La volonté – louable, certainement – de couvrir tous les secteurs irait à rebours des éléments de sécurisation que nous avons prévus, à savoir le caractère temporaire et extrêmement sectorisé du dispositif et les critères définis pour prendre en considération le degré de dépendance à un secteur prioritaire. Ce dernier doit être élevé, sous peine d’instaurer un régime général d’aides, ce qui nous mettrait en difficulté à la fois sur les plans constitutionnel et conventionnel, au vu du régime d’aides directes en vigueur dans l’Union européenne.
Nous savons que beaucoup de secteurs et d’organisations professionnelles souhaitent que nous modifiions l’article pour y intégrer un champ d’activité ou un autre. Ces demandes peuvent être légitimes – nous ne le remettons nullement en cause –, mais y accéder fragiliserait la disposition que nous proposons et rendrait extrêmement aléatoire son application pour accompagner les secteurs les plus en difficulté.
Un mot enfin sur la méthode : comme M. le rapporteur général l’a évoqué, l’article 18 comporte de nombreux renvois à des textes réglementaires. Il ne s’agit pas de priver la représentation nationale de son travail d’élaboration des listes – je songe notamment aux listes de codes NAF, la nomenclature d’activités françaises, que nous avons déjà évoquées à l’occasion de l’examen d’autres articles –, mais ces renvois ont deux objectifs.
Le premier a trait à la technicité du sujet : nous devons pouvoir affiner très précisément les exonérations accordées, ce que les textes réglementaires nous permettent de faire le plus facilement, ou plutôt – le terme n’étant pas très bien choisi – le plus efficacement possible. Surtout, le renvoi à un texte réglementaire permet d’améliorer et de faire évoluer le dispositif sans revenir devant la représentation nationale – non pas que nous ne souhaitions pas le faire, mais nous savons que les délais d’examen des lois sont plus longs et peuvent donc se révéler, en cas d’urgence, moins pertinents que des modifications réglementaires. Tel est le principal argument en faveur de cette méthode.
Ces éléments nous conduisent – comme celle du rapporteur général, ma réponse est un peu longue, mais je serai plus bref par la suite, monsieur le président – à émettre des avis défavorables à la plupart des amendements proposés, en vertu de notre volonté farouche de faire en sorte que cette disposition, inédite dans son ampleur et sa nature, soit adoptée et surtout s’applique dans les meilleures conditions, au bénéfice de l’ensemble des secteurs économiques concernés. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.) La parole est à Mme Véronique Louwagie, qui a eu la chance d’obtenir des avis extrêmement détaillés en réponse à son amendement. Pour autant, je ne suis pas certaine d’avoir entendu des arguments très précis…
Vous indiquez que le dispositif proposé est inédit ; mais je crois que la crise l’a été également. Oui, bien sûr. Au demeurant, le montant d’exonérations de charges que vous annoncez – 3,5 milliards d’euros, même si j’ai bien compris que l’article dans son ensemble portait sur un total de 4 milliards d’euros –, reste très nettement inférieur aux 37 milliards d’euros de report de charges, puisqu’il représente à peine 10 % de cette somme. Or si des entreprises ont eu recours à ce report de charges, c’est qu’elles en avaient besoin. Les charges reportées s’ajouteront pourtant, à partir de septembre, aux autres charges dues à cette date. Il serait donc faux de prétendre que l’effort est important, car il reste inférieur au montant des reports de charges.
Vous évoquez ensuite la manière dont vous avez retenu les activités qui ouvriront droit aux exonérations de charges – nous aurons l’occasion d’en reparler au cours de l’examen des prochains amendements, présentés par Éric Woerth. Vous estimez qu’il est juste d’avoir retenu certains secteurs d’activité, notamment ceux ayant fait l’objet d’une fermeture administrative. J’estime au contraire que c’est très injuste. Ainsi, une entreprise faisant face à une diminution de chiffre d’affaires et à des difficultés équivalentes, parce qu’elle n’aurait pas fait l’objet d’une fermeture administrative, n’aurait pas le droit à une exonération de charges ? Vous évoquiez le domaine du bâtiment, qui n’a pas fait l’objet de fermetures administratives, en expliquant que son activité n’était pas empêchée. Dans les faits, ce fut pourtant bien le cas. Non. Les salariés du bâtiment ne pouvaient pas se rendre sur les chantiers, car un grand nombre d’entreprises et même de particuliers refusaient de les accueillir.
Nous sommes en profond désaccord sur l’ensemble de ces éléments, et votre notion de justice ne me semble pas du tout à la hauteur. (L’amendement no 710 n’est pas adopté.) Je suis saisi de quatre amendements, nos 1049, 1101, 1050 et 2123, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements, nos 1049, 1101 et 1050 peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. le président de la commission des finances, pour les soutenir. Cet amendement et les deux amendements de repli qui lui font suite ont été signés par l’ensemble des élus du groupe Les Républicains, comme l’a souligné Véronique Louwagie.
L’article 18 instaure une bonne mesure – que nous avions proposée depuis longtemps, mais il est vrai nous avons toujours un temps d’avance : à un certain stade, il faut accorder des exonérations de charges et ne pas se contenter de reports. Nous proposons toutefois de procéder autrement.
D’abord, j’estime que la sectorisation est une erreur, car on court toujours après les manques. Vous avez établi une liste S1 puis une liste S1 bis et défini des activités connexes – bientôt viendront les activités connexes des activités connexes : on constate clairement que la crise entraîne des réactions en chaîne dans l’économie et qu’il est très difficile de définir les secteurs concernés. Le dispositif que vous proposez est donc injuste, contrairement à ce que vous prétendez. Il est aussi fragile juridiquement, alors même que vous cherchez à assurer sa sécurité juridique – ce qui est bien naturel.
Une mesure juste, que nous vous proposons d’adopter au travers de l’amendement no 1049, consisterait à prendre en considération, pour toutes les entreprises de moins de 250 salariés, indépendamment de leur secteur d’activité et qu’elles aient ou non été fermées administrativement, l’intensité avec laquelle la crise les a frappées, laquelle se vérifie par la perte de chiffre d’affaires. Cette dernière serait ainsi le juge de paix.
Le taux de perte de chiffre d’affaires à partir duquel une entreprise peut prétendre à une exonération de charges ne doit d’ailleurs pas être décidé par l’administration. Or le texte de l’article 18 ne précise pas quel serait le niveau de perte retenu : vous en renvoyez la fixation au pouvoir réglementaire du Gouvernement. C’est pourtant un point essentiel : de la même façon que le Parlement ne s’en remet pas au Gouvernement et à l’administration pour décider du taux de l’impôt, il doit fixer le pourcentage de perte de chiffre d’affaires à partir duquel l’exonération de charges s’appliquera. J’ai cru comprendre que vous comptiez retenir le taux de 80 % – peut-être pourrez-vous nous le confirmer.
Nous proposons que les entreprises ayant subi une perte de chiffre d’affaires supérieure à 70 % pendant la période bénéficient d’une exonération de charges totale. En deçà de ce taux, un mécanisme de lissage s’appliquerait et l’exonération serait proportionnelle à la perte de chiffre d’affaires. Je rappelle que, même si nous avons complètement perdu nos repères avec la crise, une perte de 20 % ou 30 % de chiffre d’affaires pour une entreprise est déjà considérable. Les sociétés concernées doivent donc bénéficier de réductions ou d’exonérations de charges sociales à due concurrence. Le dispositif serait alors juste pour l’ensemble des entreprises françaises.
Pour les entreprises supérieures à 250 salariés, nous vous proposons d’accorder ces exonérations au cas par cas, comme le ministre le fait déjà pour les grandes entreprises.
Les deux amendements suivants sont des amendements de repli. L’amendement no 1101 ne mentionne pas les entreprises de plus de 250 salariés, qui ne sont donc plus concernées par l’exonération. L’amendement no 1050 ne tend plus à supprimer les secteurs – puisque vous voulez absolument sectoriser – mais vise à instaurer une baisse des charges proportionnelle à la perte de chiffre d’affaires lorsque cette dernière reste inférieure à 70 %. La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l’amendement no 2123. Il s’inscrit dans la même veine que ceux défendus par le président Woerth. Notre collègue Lise Magnier propose en effet une exonération totale de charges pour les entreprises ayant perdu au moins 80 % de leur chiffre d’affaires.
Pour les entreprises dont la perte représente entre 50 % et 80 % du chiffre d’affaires, il est proposé d’accorder une exonération proportionnelle à la perte – par exemple de 60 % pour une entreprise ayant perdu 60 % de son chiffre d’affaires. Une telle disposition nous semble plus juste pour l’ensemble des secteurs fortement affectés par la crise sanitaire. Quel est l’avis de la commission sur les amendements ? Comme promis, je serai bref sur ces demandes d’extension de l’ensemble des catégories d’entreprises ou des secteurs concernés. Vous avez tous les deux très bien posé le débat, mais nous avons trouvé, à travers la rédaction de l’article 18, un équilibre qui reflète nos choix en la matière et qui est donc verrouillé.
Madame Louwagie, vous m’interrogez sur la différence entre les 4 milliards d’euros d’exonérations de charges accordées et les reports de charges, qui dépassent 30 milliards d’euros. Il me semble important de souligner que l’exonération définitive de charges est un acte très fort de la puissance publique, qui doit être réservé aux secteurs prioritaires. Les autres entreprises pourront toujours reporter les paiements de leurs charges jusqu’au retour à meilleure fortune et à la reprise. L’administration a été très flexible sur ce point. J’émettrai en revanche systématiquement un avis défavorable aux amendements proposant d’étendre le dispositif à de nouveaux secteurs ou de modifier la taille des entreprises concernées, pour les raisons déjà évoquées précédemment.
Je signalerai enfin, d’un mot, que l’exonération de charges au prorata de la perte de chiffre d’affaires me semble extrêmement complexe. Il ne me paraît pas pertinent de créer un tel dispositif.
Avis défavorable à l’ensemble des amendements. Quel est l’avis du Gouvernement ? Les auteurs des amendements me pardonneront un avis lapidaire : je partage les arguments du rapporteur général, comme j’ai eu l’occasion d’en donner les raisons il y a un instant. Avis défavorable, pour préserver la logique qui a présidé à la rédaction de l’article. La parole est à M. le président de la commission des finances. Ce que nous proposons n’est pas plus compliqué que votre dispositif, qui prévoit des exonérations, des reports d’échéances, et toute une panoplie de mesures, à tel point qu’il sera très difficile, pour les entreprises, de s’y retrouver. Son application risque en outre d’être extrêmement injuste d’un département à l’autre. Le couteau suisse que vous évoquiez risque, en réalité, d’être un couteau sous la gorge pour de nombreuses entreprises, qui ne sauront pas comment elles seront traitées.
Il me semble beaucoup plus juste d’instaurer une exonération proportionnelle à la baisse de chiffre d’affaires lorsque cette dernière est inférieure à 70 % – cette exonération devant être intégrale pour les entreprises dont la perte excède ce taux 70 %, qui est considérable. Une entreprise ayant perdu 30 % de son chiffre d’affaires bénéficierait ainsi d’une exonération de 30 % de charges. Cela n’a rien de compliqué ; c’est même d’une logique absolument imparable. La sectorisation de l’exonération est une mesure très injuste et toujours incomplète.
Enfin, j’insiste pour que le taux de perte de chiffre d’affaires donnant droit à exonération soit mieux précisé. Je veux que l’Assemblée nationale fixe un taux et que les parlementaires prennent leur responsabilité. Retenir un seuil de 80 % n’aurait pas de sens : il est beaucoup trop élevé ! Une entreprise ayant perdu ne serait-ce que 75 % de son chiffre d’affaires est déjà une entreprise complètement fermée. Toute personne ayant déjà travaillé en entreprise ou géré une mairie le sait : une perte budgétaire de 75 % est considérable !
C’est une drôle d’idée que de laisser au Gouvernement le soin de définir ce seuil, alors que la survie de nombreuses entreprises est en jeu. Comme la fixation du taux de l’impôt, cette tâche relève du Parlement. La parole est à M. Charles de Courson. Monsieur le jeune rapporteur général, ces exonérations sectorielles ont déjà été tentées, dans le cadre du plan textile, sous Pierre Mauroy : cela remonte à un certain temps, mais cela a été fait. Cette tentative s’est mal terminée, comme vous le savez, puisque le programme d’aides, que nous n’avions pas notifié à l’Union européenne, a été condamné par la Commission.
L’approche que vous avez adoptée présente d’énormes risques de contentieux et d’annulations, monsieur le ministre délégué, puisque, à situation économique équivalente, une entreprise bénéficiera ou non d’exonérations, en fonction du secteur d’activité auquel elle appartient. Vous souhaitez en outre intervenir par le biais du pouvoir réglementaire, ce qui aggravera encore la situation.
Le deuxième problème est celui de l’eurocompatibilité du dispositif. Vous affirmez dans l’étude d’impact que le problème ne se pose pas, puisque le plafond de 200 000 euros que l’Union européenne applique aux aides que l’État peut apporter aux entreprises a été porté à 800 000 euros pour les entreprises ayant rencontré des difficultés du fait de la crise sanitaire. Mais ce plafond s’appliquera aux secteurs d’activité que vous aurez vous-même retenus. Comptez-vous notifier ces choix à Bruxelles, comme vous devez le faire ? Je souhaite être éclairé sur ce point.
L’approche consistant à accorder une exonération proportionnelle à la chute du chiffre d’affaires présente un grand avantage : elle n’entraîne aucun risque constitutionnel ou de recours sur les actes réglementaires que vous pourriez prendre – en tout cas, je ne vois pas comment de tels recours seraient possibles.
À l’inverse, l’approche sectorielle me semble très dangereuse – alors même que tout le monde s’accorde sur l’objectif poursuivi. Ainsi, votre dispositif concerne les bars, mais pas les viticulteurs – à moins que ce débat ne conduise à les y inclure. Pourtant, ces derniers n’avaient plus personne à qui vendre pendant le confinement, les bars représentant 80 % de la clientèle des vignerons indépendants… Merci, monsieur de Courson. Je rappelle que le temps de parole est de deux minutes. Nous allons nous efforcer de le respecter afin de pouvoir avancer dans la discussion.
La parole est à Mme Véronique Louwagie. Monsieur le rapporteur général, vous parlez d’un équilibre « verrouillé », mais c’est vous qui vous êtes enfermés dans cette logique. Vous définissez par ailleurs des secteurs prioritaires, mais la priorité ne serait-elle pas plutôt de soutenir toutes les entreprises qui ont connu une diminution de chiffre d’affaires, comme le suggérait à juste titre le président Éric Woerth ? C’est à l’ensemble de l’économie que vous donneriez ainsi la priorité.
Quant à la complexité, les éditeurs de logiciels de paie et les personnes qui gèrent les ressources humaines y sont habitués. Ils ont déjà dû s’adapter aux évolutions récentes et seraient donc tout à fait capables de le faire à nouveau si vous acceptiez nos propositions.
Votre approche est incomplète et va susciter de l’insatisfaction et entraîner des problèmes économiques dans les territoires. Si nous voulons lancer un mouvement de relance et soutenir toute l’économie, la perte de chiffre d’affaires semble le critère le plus pertinent. La parole est à Mme Cendra Motin. Nous avons pris la décision de faire cesser l’activité dans des pans entiers de notre économie. À notre demande, des chefs d’entreprise ont dû fermer leur entreprise sans même savoir quand ils pourraient la rouvrir. Ceux-là, qui ont mis fin à toute activité et perdu la totalité de leur chiffre d’affaires, nous allons les aider par une exonération complète. D’autres ont également dû cesser leur activité, non parce que nous en avions pris la décision, mais parce cette activité dépendait fortement de celle des entreprises ayant subi une fermeture administrative – je pense notamment aux fournisseurs des restaurants. Nous devons également les aider.
Vous voudriez, madame Louwagie, que nous appliquions cette exonération à toutes les entreprises, mais nous n’avons pas décidé de fermer toutes les entreprises. Bon nombre d’entre elles n’ont cessé leur activité que pendant une ou deux semaines, le temps de se mettre en ordre de marche pour faire face à cette crise inédite. Elles ont certes perdu une partie de leur chiffre d’affaires, mais elles ont pu rétablir leur résultat par la suite.
En outre, certaines entreprises ne facturent pas tout de suite. Comment pourrions-nous savoir si les entreprises concernées n’ont pas poursuivi leur activité tout en reportant une partie de leur facturation – pas nécessairement dans leur propre intérêt, du reste, mais au titre du crédit interentreprises, qui a pu en aider d’autres avec lesquelles elles travaillent ? Dans une telle hypothèse, la perte faciale de chiffre d’affaires qu’elles ont pu connaître justifie-t-elle une exonération à la même hauteur ? Elles ont certes pu aider d’autres entreprises, mais nous les aidons aussi par d’autres dispositifs plus adaptés.
Enfin, ma petite expérience de gestionnaire de paies m’oblige à vous dire que ce que vous proposez, madame Louwagie, n’est pas possible. C’est infaisable – et, qui plus est, ce n’est pas contrôlable par l’administration. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne. Comme M. Coquerel, je suis opposé par principe à ces exonérations de charges patronales et je souhaiterais avoir la confirmation qu’elles seront compensées par des crédits budgétaires.
Quant au débat qui nous occupe, la proposition de nos collègues du groupe Les Républicains est beaucoup plus pragmatique que celle du Gouvernement. Des pertes de 25 %, 30 % ou 40 % de chiffre d’affaires affectent la totalité des marges et placent les entreprises dans une situation difficile. Si vous voulez les aider, soyez concrets et pragmatiques. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. Cet article 18 est bien conçu et bien équilibré. Il faut distinguer entre les entreprises qui n’ont aucun espoir de retrouver leur chiffre d’affaires, et pour lesquelles les exonérations semblent légitimes, de celles qui ne connaissent qu’un décalage dans leurs résultats. Certes, ces dernières ont pu connaître une érosion de leur chiffre d’affaires, mais l’article, rappelons-le, prévoit également la possibilité d’étaler le paiement des charges. En outre, cette disposition s’ajoute aux mesures prises en matière de chômage partiel et au PGE, le prêt garanti par l’État. Quelle que soit notre expérience, nous avons tous des contacts avec les entrepreneurs locaux, qui tous ont salué ces mesures. Ils font d’ailleurs preuve de responsabilité et ne courent pas nécessairement après les mesures d’exonération de charges.
L’article 18, tout perfectible qu’il soit, est bienvenu, d’autant qu’il est bien calé et lisible. Au contraire, le dispositif proposé par les amendements me semble marqué par une certaine complexité. (Les amendements nos 1049, 1101, 1050 et 2123, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Je suis saisi de quatre amendements, nos 358, 1478, 616 et 883, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 358 et 1478 sont identiques.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 358. Monsieur Mattei, comme les responsables d’entreprise, nous saluons le dispositif de soutien proposé par l’article 18, qui va dans le bon sens. Cependant, certaines entreprises n’ont pas compris que l’exonération ne s’appliquerait qu’à certains secteurs et qu’elles ne pourraient pas en bénéficier. Le réveil risque d’être difficile.
Même si l’activité redémarre en cette période estivale, le secteur du tourisme a été profondément affecté par la crise et le reste encore aujourd’hui. Pour prendre en considération cette situation particulière, l’amendement no 358 de ma collègue Émilie Bonnivard propose de prolonger jusqu’au 31 décembre 2020 la période d’emploi sur laquelle portent les exonérations de cotisations sociales. L’amendement identique no 1478 de Mme Pascale Boyer est défendu.
Il en est de même des amendements nos 616 de M. Stéphane Buchou et 883 de M. Michel Vialay.
Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable, pour des raisons que vous comprenez bien désormais.
Il est cependant important que nous soyons au moins tous d’accord sur les termes du débat.
Pour reprendre l’exemple cité par M. de Courson, si les bars constituent la clientèle principale d’un viticulteur et que ce dernier a vu son chiffre d’affaires amputé de 80 %, il entre de fait dans la catégorie visée par la liste S1 bis – les viticulteurs n’en sont aucunement exclus –, et il sera donc exonéré de charges sociales. Il en est de même pour un viticulteur qui vend une partie de sa production au secteur des cafés, hôtels et restaurants et en exporte l’autre partie – ce qui est fréquent s’agissant du champagne – : dès lors que les deux composantes de sa clientèle ont été empêchées d’acheter, au point qu’il a connu une perte de chiffre d’affaires de 80 %, il bénéficie des exonérations. Tout doit donc être clair : aucun secteur empêché de vendre du fait de l’arrêt de l’activité de ses clients ne saurait être exclu du dispositif. Vous savez ce que cela représente, 80 % du chiffre d’affaires ? C’est énorme! (Les amendements identiques nos 358 et 1478, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) (Les amendements nos 616 et 883, repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) L’amendement no 1068 de M. Boris Vallaud est défendu. (L’amendement no 1068, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 1200. Au-delà de la conjoncture générale liée à la crise, les entreprises, en Corse, souffrent de l’insularité et doivent assumer divers surcoûts. L’amendement de notre collègue Paul-André Colombani vise donc à appliquer le dispositif d’exonération de cotisations patronales à l’ensemble des entreprises corses de moins de 250 salariés, sur une durée s’étendant jusqu’au 31 décembre 2020. Quel est l’avis de la commission ? Au-delà de la question géographique, que je puis tout à fait entendre, se pose le problème de la durée. J’ai bien précisé qu’il était très important de calquer la durée d’exonération sur celle du confinement, sans la prolonger jusqu’à la fin de l’année. Avis défavorable, donc. (L’amendement no 1200, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 677 rectifié, 807 rectifié, 1457 rectifié, 1094, 1095, 398, 21, 311, 1092, 1264, 1500, 1956 et 1072, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 677, 807 rectifié et 1457 rectifié sont identiques, ainsi que les amendements nos 21, 311, 1092, 1264, 1500 et 1956.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 677. Vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur général, le bâtiment n’est pas concerné par le dispositif d’exonérations de charges sociales. Les entreprises de ce secteur ont pourtant connu des diminutions importantes de leur chiffre d’affaires et, si elles n’ont pas été soumises à des fermetures administratives, du moins ont-elles été empêchées de se rendre sur certains chantiers, et n’ont donc pu poursuivre leur activité durant une longue période. Et lorsque cette activité a repris, elles ont dû subir des charges plus lourdes qu’auparavant en raison de l’application des gestes barrières et des mesures sanitaires appropriées. Il importe donc que le secteur du bâtiment, qui est présent dans tous nos territoires, représente un très grand nombre d’emplois et peut fortement contribuer à la relance économique, fasse partie de ceux concernés par le I de l’article 18. L’amendement vise donc à ce que les entreprises de ce secteur puissent bénéficier des exonérations de charges pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2020. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 807 rectifié. Comme l’a très bien rappelé Mme Louwagie, la mise en place des mesures de précaution sanitaire pour la protection des salariés sur chantier a donné lieu à un surcoût important, de l’ordre de 10 à 20 %, qui – étant bien sûr rarement partagé avec le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre – incombe la plupart du temps aux entreprises du bâtiment, un secteur particulièrement touché par la crise sanitaire, notamment dans ma région, l’Occitanie.
Pour éviter à ces entreprises de connaître de trop grandes difficultés, voire la faillite – et les licenciements économiques des salariés qui les accompagnent –, nous vous proposons de prendre en charge les surcoûts liés à la crise sanitaire, estimés à 11,7 milliards d’euros, en procédant à l’annulation des charges sociales des entreprises des secteurs du BTP pour l’année 2020. La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1457 rectifié. Souvenez-vous : le 15 mars dernier, on demandait aux Français de rester chez eux mais en même temps, Mme Pénicaud, alors ministre du travail, disait aux personnes travaillant dans le secteur du BTP qu’ils devaient retourner au travail, qu’il était urgent de s’y remettre pour maintenir l’économie à flot. Comme l’ont dit plusieurs collègues, notamment Mme Louwagie et Mme Ménard, certaines entreprises ont alors rencontré des difficultés pour approvisionner les chantiers et pour aller sur le terrain en raison du refus de certains clients. À travers l’amendement de mon collègue Guy Bricout, notre groupe demande que soient pris en charge les surcoûts liés à l’instauration de mesures de précautions supplémentaires face au covid-19. Je suis saisi de deux amendements, nos 1094 et 1095, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à Mme Sylvia Pinel, pour les soutenir. Dans le même esprit que les amendements soutenus précédemment, le no 1094 porte sur les nombreux surcoûts liés à la crise sanitaire dans le secteur du BTP. On a beaucoup évoqué la mise en place des gestes barrières et des mesures de protection des salariés des entreprises du BTP, mais les entreprises ont également fait face à des surcoûts indirects, du fait notamment de la perte de productivité et de rendement due aux nouvelles conditions de travail, des variations du coût des matières premières ou des produits manufacturés ou encore de la prolongation de la durée de location du matériel de chantier.
Ces surcoûts, de l’ordre de 10 à 20 % d’après les estimations, figurent parmi les multiples facteurs – aux côtés entre autres de la baisse de la commande publique – qui expliquent que ces entreprises aient, aujourd’hui encore, du mal à redémarrer. Il est donc important que nous les accompagnions dans cette période en procédant à l’annulation des charges sociales, et ce afin d’éviter de nombreux licenciements. Je précise que plusieurs organisations professionnelles nous ont déjà signalé que beaucoup de licenciements avaient dû être opérés et que de nombreux emplois restaient menacés.
Le no 1095 est un amendement de repli, aux termes duquel ne bénéficieraient des exonérations que les entreprises ayant perdu au moins 50 % du chiffre d’affaires. L’amendement no 398 de M. Stéphane Viry et l’amendement no 21 de M. Pierre Cordier sont défendus.
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l’amendement no 311. Dans la continuité des amendements précédents, il vise à prévoir des exonérations de cotisations et de contributions ainsi que des remises de dettes pour les entreprises du BTP – un secteur qui, rappelons-le, emploie 2 millions de salariés et représente 11 % du PIB, et dont l’activité a été fortement affectée au début de la crise : elle a été réduite de 88 % début avril. La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 1092. Il a été déposé par mon collègue M. Colombani. Je ne peux que répéter ce qui a été dit par les intervenants précédents : compte tenu du poids important du BTP et du rôle considérable qu’il joue dans la relance de l’activité économique, nous proposons d’étendre les mesures exceptionnelles d’exonération de cotisations et contributions sociales ainsi que de remises de dettes aux employeurs et aux travailleurs indépendants relevant de ce secteur. Les amendements nos 1264 de Mme Huguette Tiegna et 1500 de M. Martial Saddier sont défendus.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 1956. L’activité dans le secteur du BTP a en effet reculé de 88 % début avril, ce qui est énorme. Or toutes les entreprises de ce secteur n’ont pas la chance d’être localisées à Béziers, où il a été décidé que la commune prendrait en charge, dans des limites raisonnables bien sûr, les surcoûts liés aux mesures de protection sanitaires imposées par l’épidémie de covid-19. Toutes les communes n’ont cependant pas les moyens d’en faire autant. Il me semble donc très important que le Gouvernement soutienne, au niveau national, les entreprises du bâtiment pour relancer l’activité économique, comme le fait Béziers à son échelle. La parole est à Mme Sylvia Pinel, pour soutenir l’amendement no 1072. Il est identique au no 1095, mais limite l’application des exonérations à la durée de la crise sanitaire, soit entre le 1er février et le 31 mai 2020. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ? L’exemple du BTP illustre parfaitement notre débat sur les listes S1 et S1 bis : qu’un secteur n’y figure pas ne signifie pas qu’il n’a pas souffert de la crise. Tout le monde a conscience que la crise sanitaire a eu des conséquences sur tout l’écosystème du bâtiment – entreprises, sous-traitants, fournisseurs – et entraîné un ralentissement, voire l’arrêt de l’activité, ce qui s’est traduit par une baisse du chiffre d’affaires et des problèmes de trésorerie. Nous avons donc pris des mesures pour aider les entreprises. Mais cela ne peut pas passer par les dispositions de l’article 18 : comme nous l’avons dit au début de l’examen de cet article, le respect de la Constitution implique de faire une différence entre les secteurs contraints à une fermeture administrative et qui, pour cette raison précise, figurent dans la liste des secteurs prioritaires, et ceux qui ont subi une baisse d’activité due à la situation sanitaire ou à une externalité négative. Mais les conséquences sont les mêmes ! Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas aider ces derniers, madame Louwagie. Mais c’est bien ce distinguo – que l’on pourra juger bassement juridique – qui permet d’accorder à certains secteurs 4,5 milliards d’exonérations de charges. Les listes S1 et S1 bis rassemblent des secteurs empêchés ou dépendant des secteurs empêchés, ni plus ni moins.
Cela étant, nous ne laissons pas de côté les entreprises du BTP. Sans même parler des mesures de droit commun dont elles peuvent déjà bénéficier, comme le dispositif de chômage partiel ou les prêts garantis par l’État, nous avons pris des mesures spécifiques pour les soutenir, comme la modification de la trajectoire de suppression de l’avantage fiscal lié au gazole non routier – à l’origine une demande du secteur du BTP – ou l’augmentation des avances sur marchés publics, des mesures dont je me félicite car il était important d’aider ces entreprises à résoudre leurs problèmes de trésorerie. Le Gouvernement a donc pris les mesures d’urgence qu’appelait la situation du secteur du BTP, lequel devra être en mesure de rebondir rapidement pour que, avec l’accès à de nouveaux marchés, l’activité reprenne.
L’exonération de charges n’est cependant pas possible pour les entreprises du BTP car elles n’ont pas été empêchées de travailler même si, dans les faits, je le reconnais, la baisse d’activité a été forte. Je le répète, nous devons limiter la liste des secteurs prioritaires à ceux qui ont été empêchés ou dépendant des secteurs empêchés. Cela peut certes créer des frustrations, mais les autres secteurs ne sont pas oubliés pour autant. Quel est l’avis du Gouvernement ? Ma tâche est à la fois frustrante et simple : étant parfaitement d’accord avec l’ensemble des arguments avancés par M. le rapporteur général, je partage son avis sur la totalité des amendements. Et je rappelle à mon tour que le BTP a bénéficié d’aides, qui seront complétées dans le cadre du plan de relance, notamment pour faire face aux surcoûts des marchés publics liés à la crise du covid-19, notamment aux aménagements nécessaires des postes de travail.
Nous tenons à préserver l’équilibre général de l’article – même si j’entends bien que cet équilibre, et la logique qui le sous-tend, est contesté, notamment par Mme Louwagie – car nous considérons que cette construction est la plus solide. Les consultations que nous menons, notamment avec le SGAE, le Secrétariat général des affaires européennes, nous incitent à penser que cette proposition n’entre pas en contradiction avec les règles communautaires mais que des problèmes pourraient se poser, de ce point de vue, si nous allions plus loin, par exemple en proposant un cadre plus large et en ajoutant d’autres secteurs à la liste. La parole est à Mme Véronique Louwagie. Je le répète, le groupe Les Républicains approuve les dispositions de l’article 18 – il avait proposé des dispositifs analogues lors des premier et deuxième PLFR. À nos yeux, cependant, ce que vous avez présenté comme une mesure de justice n’en est pas une, puisque tous les secteurs affectés par la crise ne sont pas traités de la même façon. Cela constitue une profonde divergence entre nous.
J’ai cru comprendre, à travers vos propos, monsieur le ministre délégué, que le contenu des listes S1 et S1 bis, rendu public par un communiqué de presse du Gouvernement du 10 juin dernier, était susceptible d’évoluer. Qu’en est-il exactement ? La parole est à M. le ministre délégué. Je répéterai l’engagement que j’avais pris au moment de l’examen de l’article 3 : si ces listes devaient être modifiées, ce serait plutôt dans le but d’y ajouter un secteur que nous aurions négligé de prendre en considération. Toutes les activités citées dans le communiqué de presse auquel vous avez fait allusion bénéficieront du dispositif d’exonération, mais nous nous gardons la possibilité d’en compléter la liste par voie réglementaire si cela s’avérait nécessaire. (Les amendements identiques nos 677 rectifié, 807 rectifié et 1457 rectifié ne sont pas adoptés.) (Les amendements nos 1094, 1095 et 398 successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 21, 311, 1092, 1264, 1500 et 1956 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 1072 n’est pas adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 165, 669, 1692, 1915, 863, 361, 865, 1575, 2280, 1620, 1312, 1942, 1313 et 1051, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 165, 669, 1692 et 1915 sont identiques, de même que les amendements nos 361, 865, 1575 et 2280.
La parole est à M. Jacques Cattin, pour soutenir l’amendement no 165. Il est défendu. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 669. Il concerne la période d’exonération des cotisations sociales. Nous vous proposons de ne pas retenir, comme échéance, la date 31 mai 2020 mais plutôt, pour tous les secteurs liés au tourisme comme l’hôtellerie, la restauration, le sport, la culture, le transport aérien, l’événementiel, la date du 31 octobre 2021. Il s’agit en effet de donner à ces secteurs des perspectives pour rebondir et participer au mieux à la relance. L’amendement no 1692 de M. Benoit Potterie est défendu.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 1915. Il est vrai que le secteur touristique a été très lourdement touché par la crise sanitaire – paralysé pendant le confinement, il peine à se relever. La baisse globale d’activité est d’environ 33 %, dont cinq points pour les seuls secteurs liés au tourisme. L’hébergement et la restauration restent les plus affectés avec une diminution de 90 % de leur activité. J’ai eu l’occasion de discuter, en fin de semaine dernière, avec des propriétaires de campings du littoral biterrois : pour eux, la saison est très compromise ; le mois de juillet ne s’annonce pas bon du tout et si le mois d’août promet d’être un peu meilleur dans l’hypothèse où il n’y aurait pas de deuxième vague, leur situation reste très compliquée. Et pourtant, il y a peu, la France était encore une des destinations favorites des vacanciers : en 2018 nous avons accueilli 89,4 millions de visiteurs étrangers – un chiffre en hausse par rapport à 2017.
Le choc dû à la crise sanitaire ne doit pas porter un coup fatal à un secteur qui emploie directement ou indirectement plus de 2 millions de personnes. C’est pourquoi il semble indispensable de prolonger la période d’exonération jusqu’au 31 octobre 2021. La parole est à M. Yves Daniel, pour soutenir l’amendement no 863. Depuis le début de la crise sanitaire et les interdictions administratives de rassemblement, la filière événementielle a estimé les pertes d’activité à environ 15 milliards d’euros. Au-delà du chiffre d’affaires réalisé, les foires agricoles et commerciales contribuent au développement économique, social et écologique des territoires, en particulier des territoires ruraux – ce qui n’est pas forcément chiffrable. Si les entreprises et les associations sont mises à mal, c’est donc le territoire et les acteurs concernés qui en subiront les conséquences.
Le texte prévoit que l’exonération de cotisations patronales ne dépassera pas le mois de mai 2020 pour les entreprises de moins de 250 salariés et le mois d’avril pour celles de moins de 10 salariés. Le présent amendement a donc pour objet de prolonger la période d’exonération jusqu’en juin 2021. Très bien, excellent ! L’amendement no 361 de Mme Véronique Louwagie est défendu.
La parole est à M. Yves Daniel, pour soutenir l’amendement no 865. Par cet amendement de repli, nous ne demandons plus le report de l’exonération des cotisations jusqu’en juin 2021 mais jusqu’en décembre 2020. La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 1575. Cet amendement de notre collègue Acquaviva vise à maintenir l’exonération de charges jusqu’à la fin de l’année 2020, ce qui représenterait une bouffée d’oxygène en attendant la reprise. La parole est à M. Buon Tan, pour soutenir l’amendement no 2280. Malgré les dispositifs mis en place par l’État depuis le début de la crise, certains secteurs, comme celui du tourisme, sont devenus très fragiles avec un risque de faillites très important. La reprise de l’activité n’y sera que très progressive – étalée sur plusieurs mois, voire plusieurs années. La saison a commencé et nous constatons en effet l’absence presque totale de touristes américains ou asiatiques. Le secteur souffre déjà d’une perte de chiffre d’affaires de plus de 40 milliards d’euros. Beaucoup d’entreprises ne tiendront pas jusqu’à l’an prochain. C’est pourquoi nous proposons de prolonger la période d’exonération de charges patronales qui représentent souvent l’un des postes budgétaires les plus importants. Le minimum que nous puissions faire est donc de prolonger cette exonération jusqu’au 31 décembre 2020. Les amendements nos 1620 et 1312 de Mme Pascale Fontenel-Personne, 1942 de M. Mohamed Laqhila et 1313 de Mme Pascale Fontenel-Personne sont défendus.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 1051. Cet amendement de M. Pupponi vise à différencier la période de référence de l’exonération de cotisations patronales selon la classification des territoires en zone verte ou orange. En effet, les employeurs présents dans les départements d’Île-de-France, de Guyane et de Mayotte, n’ont pas pu reprendre tout de suite une activité normale. Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements ? Ces amendements, voisins de ceux présentés précédemment par Mme Louwagie, visent à prolonger la période d’exonération des cotisations patronales. Il faudra probablement, d’une manière ou d’une autre, étendre la durée des aides en faveur des secteurs les plus touchés. Nous l’avons déjà proposé avec l’activité partielle, dont la prolongation est envisagée, nous le ferons sans doute avec le fonds de solidarité, peut-être aussi avec les reports de charges… Reste que la durée de la période d’exonération de charges doit bien être calquée sur celle du confinement, à savoir trois mois ou quatre mois selon les secteurs. Ce souci de cohérence me conduit à émettre un avis défavorable sur l’ensemble des amendements. Toutefois, j’y insiste, nous n’allons pas cesser du jour au lendemain d’aider ces secteurs d’activité : dès lors que prendra fin l’exonération de charges, il faudra bien sûr continuer de les accompagner dans la relance. Quel est l’avis du Gouvernement ? Si nous tenons, comme vient de le souligner le rapporteur général, à ce que la période d’exonération soit calée sur celle du confinement – en tout cas sur la période d’empêchement de l’activité –, nous gardons néanmoins bien présentes à l’esprit les difficultés que ces secteurs peuvent rencontrer après le confinement. C’est pourquoi des dispositifs, évoqués par le rapporteur général, ont été prévus pour les accompagner. Ainsi, un crédit de cotisations pourra être utilisé par les entreprises concernées pour apurer des retards ou bien pour régler des cotisations à venir. Ce crédit a été calculé sur la base des salaires versés pendant la première partie de l’année. Nous avons trouvé cet outil – outre ceux que je qualifierais presque de droit commun même s’ils ont un caractère exceptionnel comme l’aide à l’activité partielle de longue durée – pour soutenir les entreprises concernées au cours des mois qui viennent. Avis défavorable. La parole est à M. le président de la commission des finances. J’ai sous les yeux un avis de l’URSSAF de l’Oise, adressé à un restaurant de Senlis, dans ma circonscription. J’imagine que de nombreux restaurants, dans maints endroits, sont dans ce cas. Les cotisations provisionnelles pour 2020 sont nulles pour les mois d’avril, mai, juin et juillet. Mais, à partir du 5 août, ce restaurant devra payer 2853 euros contre 1576 euros auparavant. C’est-à-dire que, d’un coup, à partir du mois d’août, les cotisations URSSAF doublent presque. Les URSSAF entendent donc procéder à un rattrapage de la période de report.
Certes, si le PLFR est voté, l’URSSAF refera ses calculs mais il est assez curieux d’envoyer ce type de document aux comptables des milliers de restaurants en France. Le moins que l’on puisse dire est que cela fragilise des chefs d’entreprise. En outre, la situation n’est pas claire.
Il en va de même pour les 20 % de crédit d’impôt ou de cotisations sociales sur la masse salariale : pardon, monsieur le rapporteur général, mais cette mesure, assez rarement prise, n’est pas non plus très claire. C’est une mesure de trésorerie, je suppose, mais je n’en comprends pas très bien la finalité. La parole est à Mme Véronique Louwagie. Je confirme qu’un grand nombre d’entreprises, sinon toutes, ont reçu un tel échéancier de la part des URSSAF, lequel prévoit en effet le recouvrement, à partir du mois d’août, de tous les montants ayant été reportés. Je crois même que certaines entreprises ont fait l’objet de prélèvements dès le 5 juin dernier.
Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur général, que les entreprises seraient aidées ; mais elles ont besoin dès aujourd’hui d’avoir des perspectives. Or ce troisième PLFR ne leur apporte pas de visibilité. C’est bien dommage et il faut y remédier si vous voulez que la relance soit la plus forte possible. La parole est à M. le ministre délégué. Le président Woerth avait promis de me transmettre une copie de ce document de l’URSSAF : c’est chose faite et nous allons donc pouvoir l’examiner.
Nous avons mis en place, avec les URSSAF, un système de report automatique des échéances applicable pendant la période de crise la plus dure – la période de confinement. Ce report n’est désormais plus automatique et général mais il est de droit si l’entreprise le demande. Par ailleurs, comme l’a présumé le président Woerth, les URSSAF tiendront compte des dispositions votées par le Parlement et reverront les notifications attribuées.
Quant au crédit de cotisations de 20 % de la masse salariale versée pendant la première partie de l’année, il est plus qu’une mesure de trésorerie : c’est une possibilité de paiement que nous donnons aux entreprises sur la base de salaires qu’elles ont versés et qui, jusqu’à présent, ne donnaient pas lieu à crédit d’impôt. Ce n’est ni une avance ni un prêt, c’est un crédit d’impôt, donc, d’une certaine manière, de l’argent que nous rendons aux entreprises pour faire face aux échéances à venir ou régulariser des retards. C’est donc une véritable aide que nous accordons aux entreprises concernées. Nous répondons ainsi au moins en partie à la demande de ceux qui défendent des amendements visant à prolonger la période d’exonération de cotisations. La parole est à M. Charles de Courson. Monsieur le ministre délégué, vous ne vous êtes pas exprimé sur l’amendement plein de bon sens déposé par M. Pupponi.
Votre choix de caler le calendrier des exonérations sur celui des mesures administratives est logique. Lorsque ces dernières se sont appliquées plus longtemps, l’exonération doit être prolongée. Mais alors, pourquoi ne pas avoir procédé de même pour les territoires classés « orange » qui ne comprenaient plus que l’Île-de-France, la Guyane et Mayotte – nous examinerons d’ailleurs ultérieurement des amendements relatifs à ces deux derniers territoires ?
M. le rapporteur général a un peu évoqué le crédit d’impôt, mais vous avez observé une grande discrétion sur le sujet. Vous me direz si je me trompe, mais je crois que le problème est simplement qu’on ne peut pas supprimer les cotisations sociales des salariés. Le crédit d’impôt est un moyen de contourner la jurisprudence constitutionnelle selon laquelle les cotisations sociales des salariés leur appartiennent. Oui ! On ne peut pas les supprimer, mais vous trouvez un moyen de le faire en créant un crédit d’impôt. Pourquoi ne pas le dire simplement ? Je crois que tout le monde comprendrait. (Les amendements identiques nos 165, 669, 1692 et 1915 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 863 n’est pas adopté.) (Les amendements identiques nos 361, 865, 1575 et 2280 ne sont pas adoptés.) (Les amendements nos 1620, 1312, 1942, 1313 et 1051, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 439, 882, 228, 711, 1234, 1909, 1917, 1623 et 1619, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 439 et 882 sont identiques, de même que les amendements nos 228, 711, 1234, 1909 et 1917.
Les amendements identiques nos 439 de Mme Marie-Christine Dalloz et 882 de M. Michel Vialay sont défendus.
Dans la seconde série d’amendements identiques, l’amendement no 228 de M. Fabrice Brun est défendu.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 711. Après que nous avons abordé la question des secteurs d’activité et du calendrier, nous en venons à celle de la taille des entreprises. Alors que l’article 18 exclut du champ de la mesure d’exonération celles de plus de 250 salariés, nous vous proposons de ne pas prendre en compte ce critère et de permettre que la mesure s’applique quel que soit le nombre de salariés.
Si vous aviez précédemment retenu les amendements de M. Éric Woerth et du groupe Les Républicains visant à seulement prendre en compte la baisse d’activité de chaque entreprise, vous n’auriez pas besoin d’une approche par critères, qu’il s’agisse du secteur d’activité ou de la taille de l’entreprise. L’amendement no 1234 de M. Frédéric Descrozaille est défendu.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1909. Il est identique à celui que vient de défendre Mme Louwagie. Le groupe UDI et indépendants soutient le principe de l’article 18. Je l’ai dit il y a de nombreuses semaines : je salue les initiatives prises par le Gouvernement pour soutenir l’économie de façon générale. Cela dit, notre travail de député consiste aussi à appeler l’attention du rapporteur général et du Gouvernement sur des secteurs qui auraient été oubliés ou sur des difficultés rencontrées sur le terrain.
Le plafond de 250 salariés est un problème. Tout d’abord, pendant la période de crise sanitaire, certains secteurs ont connu un arrêt total de leur activité. Je pense notamment au commerce de gros des viandes et son industrie, pour les entreprises spécialisées dans la restauration hors foyer et l’événementiel. Ces secteurs, dont les codes de la nomenclature d’activités française sont NAF 4632A et 1011Z, ont été oubliés. Nous voulons qu’ils soient intégrés dans la liste des secteurs dépendant des secteurs prioritaires – liste S1 bis. Ensuite la reprise ne s’effectue pas instantanément, elle est très molle.
L’amendement vise donc à réparer un oubli en permettant que les entreprises de plus de 250 salariés bénéficient du filet de sécurité que constituent les mesures d’exonération de l’article 18. Dernier amendement de cette série d’amendements identiques, l’amendement no 1917 de M. Paul Christophe est défendu.
Il en est de même des amendements nos 1623 et 1619 de Mme Pascale Fontenel-Personne.
Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements en discussion commune ? Avis défavorable. Il est important que nous ciblions bien les entreprises de type PME. Je sais bien que les 250 salariés ne sont qu’un seuil possible pour les qualifier – la définition communautaire est par exemple plus large puisqu’elle prend en compte le chiffre d’affaires et le total du bilan –, mais nous avons fait au plus simple en ne retenant que ce critère.
Il me semble nécessaire de conserver ce plafond. Je note d’ailleurs des positions contradictoires : vous défendez, d’un côté, certains amendements qui limitent aux entreprises de moins de 10 salariés le bénéfice de plusieurs de vos propositions d’exonération, et, de l’autre, vous voulez supprimer le plafond de 250 salariés.
Nous pouvons collectivement nous mettre d’accord sur le fait que les PME doivent être les cibles prioritaires de mesures de soutien proposées à l’article 18.
Monsieur Benoit, vous avez raison, il faut alerter sur les secteurs d’activité qui auraient pu être oubliés. Nous en parlions hier : Mme Bergé évoquait, pour ce qui concerne l’événementiel, de métiers souvent oubliés ou périphériques, comme celui des guides. Il revient au pouvoir réglementaire de réparer ces oublis, et nos échanges doivent le permettre.
Votre amendement ne comporte pas de code NAF, pas plus que les autres. Je le prends donc comme un amendement d’appel pour que l’on s’assure que les secteurs concernés soient pris en compte.
J’ajoute que je soutiendrai un amendement visant à opérer un suivi fin et exhaustif de tous les codes NAF inscrits dans les listes S1 et S1 bis, listes que le Gouvernement transmettra à la représentation nationale par l’intermédiaire du président et du rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’être totalement transparent sur la façon dont ces listes sont dressées. Chacun pourra vérifier que tous les secteurs d’activité qu’il considère objectivement comme devant appartenir aux listes S1 et S1 bis y figurent bien. Quel est l’avis du Gouvernement ? Le Gouvernement a le même avis défavorable, pour les mêmes raisons. Nous souhaitons un dispositif le plus ciblé possible. La parole est à M. Charles de Courson. Je m’interroge sur le plafond de 250 salariés au regard du seuil communautaire d’autorisation des aides d’État. J’ai fait un petit calcul : si l’on considère une entreprise de 250 salariés et un salaire brut mensuel moyen de 3 000 euros, on obtient une masse salariale de 750 000 euros, ce qui signifie qu’avec une cotisation salariale d’environ 40 %, l’exonération peut atteindre 300 000 euros par mois. Autrement dit, sur la période, vous percutez le seuil communautaire. Une notification à Bruxelles deviendrait donc obligatoire. Comment tout cela s’articule-t-il ? La parole est à M. Thierry Benoit. J’ai bien noté la volonté de transparence exprimée par le rapporteur général et le ministre délégué s’agissant de l’insertion de codes NAF dans les listes S1 et S1 bis. C’est important, de même que la grande vigilance et l’attention extrême qu’ils porteront aux secteurs sensibles évoqués.
Je suis plus inquiet pour les entreprises familiales. Député de Bretagne, je pense à des outils industriels comme des abattoirs, des ateliers de découpe ou transformation. Je sais qu’ils sont en grande difficulté et que leur inquiétude est forte. J’imagine très bien ce qu’il peut se passer au mois de septembre ou d’octobre. C’est pour cela que j’insiste et que j’appelle votre attention sur le plafond des 250 salariés. Il y a, en Ille-et-Vilaine ou dans les Côtes-d’Armor, des entreprises familiales qui sont des ateliers de proximité dans lesquels travaillent 280 ou 300 salariés. Ce tissu industriel est précieux et j’aimerais que le Gouvernement examine la question du plafond de 250 salariés avec la plus grande attention. La parole est à M. le ministre délégué. Monsieur Benoit, je répète que le Gouvernement est particulièrement attentif à ce sujet. Nous serons vigilants.
Monsieur de Courson, j’espère pouvoir vous rassurer. Nous avons bien conscience qu’au-delà de 800 000 euros par entreprise, une notification est obligatoire. Mais si un plafonnement est nécessaire pour sécuriser le dispositif, nous ne sommes pas obligés de l’inscrire dans la loi, il peut figurer dans un décret.
Vous estimez que le seuil risque d’être atteint assez rapidement : permettez-moi de relativiser cette appréciation. L’entreprise de 250 salariés que vous prenez en exemple aurait atteint le niveau d’exonération que vous évoquez à condition que la totalité des salariés aient maintenu leur activité. Or notre dispositif est destiné aux entreprises qui, ayant connu des chutes d’activité très importantes, ont dû avoir recours au chômage partiel qui ne donne pas lieu à cotisations. En conséquence, le risque d’atteindre le seuil qui nous obligerait à une notification est réduit. Il n’y aura aucun cas ? Je ne sais pas combien il y en aura. Nous travaillons encore sur le sujet avec le SGAE de manière à le sécuriser. Nous avons la possibilité, si cela était nécessaire, d’avoir recours à un texte réglementaire. (Les amendements identiques nos 439 et 882 ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 228, 711, 1234, 1909 et 1917 ne sont pas adoptés.) (Les amendements nos 1623 et 1619, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Jacques Cattin, pour soutenir l’amendement no 1585. De nombreux députés comptent des communes touristiques dans leur circonscription. Depuis le déconfinement, l’activité des magasins de souvenirs est profondément touchée par le faible nombre de touristes, même dans les destinations habituellement très fréquentées. Je connais un magasin employant cinq salariés dont le chiffre d’affaires, qui est généralement de 1 000 euros en juin, est tombé à 50 à 100 euros par jour le mois dernier. Vous conviendrez qu’il y a un problème !
Il est plus que normal que ces commerces soient pris en compte dans le plan tourisme – c’est l’objet de mon amendement. Avec une clientèle composée à 95 % de touristes, ils sont les vitrines de nos produits régionaux et de l’artisanat local.
Je remercie les nombreux députés de différentes sensibilités politiques qui ont cosigné mon amendement. Quel est l’avis de la commission ? Nous avons déjà débattu de ce sujet en commission. Je vous avais rejoint pour dire que la question est d’importance. Nous sommes bien dans la situation que nous évoquions avec M. Thierry Benoit : le risque est qu’il y ait des « trous dans la raquette ». Il faut faire attention à ce que ces magasins de souvenirs, dépendants du secteur du tourisme, soient bien inscrits dans la liste des secteurs prioritaires ou dans celle des secteurs qui en dépendent.
Comme je l’ai dit au début du débat sur l’article, ce genre de situations exige des mesures non législatives, mais réglementaires ; je me tourne donc vers le Gouvernement pour m’assurer que le type de magasins correspondant au code NAF que vous citez dans l’exposé sommaire est bien inclus dans le dispositif, comme cela devrait être le cas. Je vous rejoins sur la nécessité de les rendre éligibles à l’exonération de charges sociales. Si les éclaircissements du Gouvernement montrent que l’amendement est satisfait, j’en demanderai le retrait. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je confirme d’abord que dans l’exemple que vous citez, si l’entreprise emploie cinq salariés et qu’elle a fait l’objet d’une obligation de fermer pendant la période de confinement, elle est éligible au dispositif d’exonération de charges, qui va jusqu’à dix salariés pour les entreprises fermées par décision administrative, quel qu’en soit le secteur d’activité, dès lors qu’elles ont été mentionnées dans le décret du 15 mars.
Pour ce qui est du code NAF, nous serons vigilants et veillerons à ce que les magasins de souvenirs dont l’activité est liée au tourisme soient bien couverts et accompagnés. Nous travaillerons à la fois sur le décret et sur la doctrine car un même code NAF peut regrouper des activités très différentes. Parmi les magasins de souvenirs, certains sont intimement liés à l’activité touristique ; d’autres – nous pouvons tous en convenir – le sont beaucoup moins. Nous ferons très attention à ce point. Retirez-vous l’amendement, monsieur Cattin ? Si je le retire, il faut que ma préoccupation soit prise en compte ! La parole est à M. le président de la commission des finances. Je voudrais redire à quel point le débat que provoque M. Cattin est important. Dans la mesure où certaines activités seront forcément laissées de côté, le dispositif a un aspect absurde et donc injuste ; il aurait mieux valu prévoir une « voiture-balai », pour un niveau équivalent de coûts. Tout lister, c’est une méthode typiquement française : si on est sur la liste, c’est bien ; si on n’y est pas, c’est un problème, alors on organise le rattrapage en créant des exceptions pour ceux qui ne sont pas sur la liste. Honnêtement, vous avez choisi un drôle de procédé ! Madame Ménard, j’ai cru comprendre que vous ne souhaitiez pas que l’amendement soit retiré. Vous avez la parole ! Je remercie M. Cattin pour avoir déposé l’amendement – que j’ai cosigné –, et M. le rapporteur général et M. le ministre délégué pour s’être montrés compréhensifs. Je vous appelle à la vigilance car depuis le dépôt de l’amendement, nous avons été plusieurs fois interpellés par un collectif des commerces de souvenirs qui perçoit le fait de ne pas faire partie du dispositif d’aide comme une injustice incompréhensible. Comment peut-on retenir les offices de tourisme et non les boutiques de souvenirs, qui vivent à 95 % des achats de touristes, principalement étrangers ? Plus les touristes viennent de loin, plus ils restent longtemps dans la région, et plus ils achètent des souvenirs. Ce n’est évidemment pas l’habitant local qui ira acheter le mug avec le dessin de la cathédrale ou de l’abbaye ! Il est vraiment important de rendre ces commerces éligibles à l’exonération. (L’amendement no 1585 est retiré.) La parole est à M. Bertrand Bouyx, pour soutenir l’amendement no 618. Il vise à inclure dans les dispositifs de soutien les entreprises publiques locales, qui participent à la vie de nos territoires et de nos offices de tourisme. Quel est l’avis de la commission ? L’amendement est satisfait puisqu’il n’y a aucune distinction de nature juridique entre les entreprises que vous citez et les autres ; elles seront donc pleinement éligibles. Je propose le retrait. (L’amendement no 618, ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.) Je suis saisi d’une série d’amendements identiques.
L’amendement no 230 de M. Fabrice Brun est défendu.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 363. Il vise à étendre à l’agriculture l’exonération de charges que vous proposez à l’article 18. Comme vous le savez, l’ensemble du secteur a été fortement touché par la crise ; c’est en particulier le cas de la production fromagère et laitière. Je pense aux fromages d’appellation d’origine protégée – AOP – et d’indication géographique protégée – IGP –, au camembert et au beaufort. Très affectés par la crise, les producteurs ont subi des pertes de recettes importantes et vivent une situation compliquée. Pour se relancer, la filière a besoin d’accompagnement. C’est pourquoi nous proposons, par le présent amendement, d’étendre le bénéfice de l’exonération aux productions agricoles, notamment à la filière laitière et fromagère AOP. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 702. Il est identique à celui de ma collègue Bonnivard. Aux termes de l’article 18, tel qu’il est rédigé, l’agriculture ne fait pas partie des secteurs bénéficiaires ; or les producteurs de lait et de fromages AOP sont en difficulté car il s’agit de produits périssables et impossibles à congeler. Cette filière a déjà subi beaucoup de préjudices et il est important de la soutenir. Elle n’est pourtant pas retenue dans les listes S1 et S1 bis. L’amendement propose de faire bénéficier l’agriculture des exonérations de cotisations sociales. L’amendement no 780 de Mme Frédérique Lardet est défendu.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 1066. À l’instar d’autres collègues, notre groupe a déposé le présent amendement – dont nous avons discuté hier – pour appeler l’attention sur la situation très hétérogène dans l’agriculture, notamment dans la viticulture. En effet, les producteurs ont continué à travailler, mais ils ne peuvent plus vendre certains produits ; c’est en particulier le cas des produits viticoles, ce qui pose problème aux vignerons indépendants.
Monsieur le ministre délégué, vous nous aviez promis qu’on résoudrait le problème grâce à un amendement que vous déposeriez ce matin, mais si j’ai bien compris, il est encore en gestation. Pourriez-vous nous en dire un peu plus ? Nous serions prêts à retirer notre amendement au profit du vôtre. La gestation, avez-vous expliqué, est un peu lente, mais vous ne désespériez pas d’avoir un bel enfant en fin de matinée ou en début d’après-midi… Un accouchement au forceps ! L’amendement no 1067 de Mme Gisèle Biémouret est défendu.
La parole est à M. M’jid El Guerrab, pour soutenir l’amendement no 1189. Étant du Cantal, je ne peux pas éviter de parler d’agriculture ! Le secteur agricole a été sévèrement touché par la crise sanitaire, certains métiers ayant souffert du confinement. La mobilisation du secteur a été exceptionnelle et a permis d’éviter toute situation de pénurie. Il convient de rendre grâce à nos agriculteurs en leur permettant de bénéficier de cette exonération. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l’amendement no 1365. Avec l’amendement de mon collègue Sébastien Jumel, nous proposons d’intégrer l’agriculture, plus particulièrement la filière laitière, au plan de soutien exceptionnel et aux mesures d’allégement de cotisations – même si d’autres secteurs, comme la viticulture, sont également à retenir. Durant la crise et encore aujourd’hui, la filière laitière a fait face à une situation sans précédent : les producteurs ont dû consentir des arrêts de fabrication et de collecte dans près d’une vingtaine de filières d’appellation ; 10 % des producteurs se sont retrouvés en situation de grande détresse ; la moitié des filières AOP et IGP ont d’ores et déjà dû recourir à des dons alimentaires pour éviter de jeter leurs produits. En effet, la vente de fromages, notamment à la coupe, a plongé de près de 60 % au plus fort de la crise.
Les difficultés persistent aujourd’hui avec la baisse prolongée du prix du lait. Au sein de la filière laitière, les productions sous signe de qualité et d’origine sont allées jusqu’à opérer des destructions de produits face à la perte de débouchés. L’avenir des fromages normands, si chers à mon collègue Sébastien Jumel – le camembert, le livarot, le neufchâtel ou encore le pont-l’évêque – est particulièrement fragilisé ; près de 1 000 tonnes de fromage sont encore menacées de destruction à court terme si aucun débouché n’est trouvé.
Sans bénéficier d’un soutien franc de l’Union européenne, la filière s’est résignée à constituer des stocks de lait écrémé en poudre et de beurre, avec pour corollaire la baisse durable des cours. Ce stockage massif interroge également sur la capacité d’écoulement dans les mois à venir.
Confrontée à l’assèchement des débouchés, la filière laitière a conduit une opération de réduction volontaire de la collecte de lait en contrepartie de la création d’un système d’indemnisation professionnelle – un fonds d’indemnisation doté de 10 millions d’euros et financé à 75 % par les producteurs. Dans ce contexte, le ministre de l’agriculture et de l’alimentation s’était engagé à soutenir les fromages sous signe de qualité, annonçant que la filière laitière serait éligible, dans ce nouveau PLFR, aux exonérations de cotisations. Bien qu’insuffisante pour compenser les besoins réels des acteurs, cette annonce de compensation était attendue par la filière. La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1482. Il s’agit, comme l’ont dit les collègues, de rendre les productions agricoles sous signe de qualité éligibles aux exonérations de cotisations sociales. La parole est à M. Jacques Cattin, pour soutenir l’amendement no 1740. Le 9 juin dernier, le ministre de l’agriculture s’était engagé à soutenir l’éligibilité de la filière agricole. Les producteurs de fromages sous signe de qualité étant souvent de très petites structures familiales, il serait bon de leur permettre de bénéficier des exonérations. La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l’amendement no 1794. Notre groupe a également déposé un amendement pour soutenir le secteur agricole. Je ne reviendrai pas sur les arguments déjà évoqués, considérant l’amendement défendu. Excellent ! La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 1984. Le 9 juin dernier, lors des questions au Gouvernement, M. Didier Guillaume, alors ministre de l’agriculture et de l’alimentation – il n’a pas été récompensé pour son engagement ! –, avait affirmé sa volonté de soutenir les fromages sous signe de qualité et annoncé que dans le cadre du nouveau PLFR, la filière laitière serait éligible aux exonérations de cotisations. Cette annonce était très attendue par la filière qui a l’impression, malgré l’engagement ministériel de début juin, d’avoir été mise de côté, alors même que la perte de rémunération des producteurs est évaluée à environ 17 millions d’euros. Le présent amendement permettrait d’y remédier. L’amendement no 2055 de Mme Fannette Charvier est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements identiques ? Après le cas du BTP, arrêtons-nous sur celui de l’agriculture afin d’expliquer pourquoi il est cohérent que certains secteurs d’activité entrent dans le champ d’application de l’article 18 et d’autres non.
L’objectif est de rester cohérent. Les exploitations agricoles n’ayant pas été fermées administrativement, il est normal qu’elles ne soient pas intégrées dans la liste S1 – je n’aime pas trop le terme de secteur « prioritaire », qui laisserait à penser que l’agriculture n’est pas un secteur prioritaire alors qu’elle est évidemment l’une de nos priorités, une activité sur laquelle nous comptons pour relancer notre économie. Si elle ne figure pas dans la liste S1, c’est parce que les exploitations agricoles n’ont pas fermé – je crois que tout le monde sera d’accord sur ce point.
Plusieurs secteurs d’activité liés à l’agriculture ou à la viticulture sont en revanche inclus dans la liste S1 bis des secteurs dépendant des activités listées en S1 : culture de la vigne, vinification, fabrication de cidre et de vins de fruits, fabrication de bière, fabrication de malt, production de fromages sous appellation d’origine contrôlée ou indication géographique protégée – AOP et IGP –, horticulture. Ces secteurs agricoles dépendants pourront bénéficier d’une exonération de charges sociales en cas de baisse substantielle de leur chiffre d’affaires – évaluée pour l’instant à 80 %. C’est trop ! Les autres pourront toujours bénéficier de remises de dettes et de plans d’apurement, dans les conditions définies par l’article 18. En commission, nous avons d’ailleurs élargi aux indépendants et aux travailleurs non salariés agricoles, la possibilité de demander des remises de dette.
Le secteur agricole n’est donc pas oublié par l’article 18, mais il est traité de manière cohérente avec les dispositions prévues dans cet article, notamment en matière d’exonérations de charges.
Pour le reste, l’agriculture n’a évidemment pas été mise de côté pendant cette crise, plusieurs plans ayant complété les dispositifs de droit commun : soutien aux filières viticole, horticole et laitière, dont nous avons parlé lors de l’examen des derniers projets de loi de finances rectificative ; aides aux produits laitiers et à la viande afin de répondre notamment à la question des stocks ; soutien à la main-d’œuvre – je ne reviens pas sur la plateforme « Des bras pour ton assiette ».
Soyons clairs : depuis le début de la crise, l’agriculture est au cœur des préoccupations du Gouvernement et de la majorité. Il n’y a eu en la matière aucun oubli et aucune mise de côté.
Je suis donc défavorable à ces amendements, par souci de cohérence : comme le BTP, l’agriculture ne peut pas être intégrée dans la liste S1, mais il en est fait mention dans la liste S1 bis, dans le cadre des critères fixés. Les secteurs énumérés dans cet article pourront ainsi bénéficier des 4,5 milliards d’euros d’exonérations de charges prévues, sans que soit mise en péril la faisabilité de cette volonté politique. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je ne vais pas revenir sur notre volonté de préserver la cohérence du dispositif – volonté que partage M. le rapporteur général. J’insisterai plutôt sur les secteurs intégrés dans la liste S1 bis.
Nous avons pris cette précaution pour couvrir par le dispositif d’exonérations les acteurs de l’agriculture dont une majorité de clients a été littéralement empêchée de réaliser son activité : par exemple, ceux qui travaillent uniquement ou quasi exclusivement avec l’hôtellerie ou avec la restauration privée ou collective. Ceux-là ont pu voir disparaître l’essentiel de leurs débouchés, du jour au lendemain, du fait de la fermeture administrative des entreprises de leurs clients.
D’autres producteurs agricoles – et c’est tant mieux ! – ont été beaucoup moins affectés par la crise, voire ne l’ont pas été du tout, parce que les modes de commercialisation de leurs produits sont très différents de ceux que je viens d’évoquer.
Nous avons donc voulu inscrire les secteurs affectés dans la liste S1 bis, et non pas allonger la liste S1, afin de bien accompagner ceux d’entre eux qui ont été les plus touchés par la crise.
Pour les mêmes raisons que M. le rapporteur général, je suis défavorable à ces amendements identiques. La parole est à M. le président de la commission des finances. Encore une fois, vous construisez un monde artificiel : pour figurer sur la liste S1 bis, il faut vraiment avoir subi une très forte baisse du chiffre d’affaires. 80 % ! Les collègues présents considèrent-ils qu’un recul de 50 % est une très forte baisse ? Dans un monde normal, sans doute. Dans le vôtre, il faut un recul de 80 %, c’est-à-dire presque une réduction ultime du chiffre d’affaires. Autant dire juste avant la mort ! C’est un débat absurde, en total décalage avec les réalités. La parole est à M. Philippe Gosselin. Le président Woerth montre bien toute la difficulté de ce fractionnement entre les listes S1 et S1 bis.
Sur le papier, le fait d’être inclus dans la liste S1 bis peut paraître favorable aux activités agricoles que vous avez mentionnées. Je ferai toutefois deux objections : d’abord, cela ne concerne que certaines activités, alors que toute l’agriculture souffre, notamment la filière laitière ; ensuite, avec le critère retenu pour être éligible – une baisse de 80 % du chiffre d’affaires –, on n’est plus dans le sauvetage, on fait à peine de la réanimation pour accompagner vers une forme de mort quasi certaine.
Sachant qu’une baisse de 50 % du chiffre d’affaires perturbe déjà énormément une entreprise, le critère d’une baisse de 80 % ne tient pas la route. Il faut que vous entendiez cette demande, conforme aux propos tenus par le ministre de l’agriculture dès le 9 juin, et qui correspond à une attente très forte du monde agricole, du monde rural ainsi que de nos concitoyens. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne. Quand j’entends qu’on ne serait pas éligible à ce dispositif si on n’a pas subi une baisse d’au moins 80 % de son chiffre d’affaires, je me dis que ce n’est pas sérieux. Pensez-vous qu’un producteur de fromage, par exemple, qui a perdu 50 %, 60 % ou 70 % de son chiffre d’affaires n’est pas affecté par la crise ? Le nouveau monde est vraiment loin du vrai monde ! La parole est à Mme Émilie Bonnivard. Ce projet de loi de finances rectificative, où figurent les exonérations de cotisations, a suscité beaucoup d’attentes : les acteurs de tous les secteurs économiques nous interrogent presque tous les jours à son propos. Or il risque de provoquer chez eux une réelle déception.
Comme mes collègues, je m’étonne du niveau de perte de chiffre d’affaires exigé pour être éligible au dispositif. J’ignore quel sera le nombre de bénéficiaires au total, mais je pense qu’il y aura un décalage très net entre la communication et les effets réels sur la filière agricole.
À cette occasion, j’appelle votre attention sur les effets violents de l’évolution des aides liées à la politique agricole commune, la PAC, au cours des années à venir : baisse de 10 %, dès l’année prochaine, de toutes les aides surfaciques du premier pilier : baisse de 25 % du financement des mesures du second pilier. Comment notre agriculture va-t-elle tenir dans ce contexte de crise, de baisse des productions, de contraction des marchés et, dès l’année prochaine, d’incertitude absolue concernant le budget de la PAC, qui lui permet de fonctionner ? La parole est à M. Charles de Courson. Monsieur le ministre, vous ne voulez pas – hélas !, allais-je dire – inscrire le taux de 80 % dans la loi, mais vous serait-il possible, par voie réglementaire, de prévoir une exonération totale de charges lorsque la baisse du chiffre d’affaires est supérieure à 80 % et de créer une deuxième tranche, d’exonération dégressive, à partir de 50 % ou 60 % de baisse ? Tel que rédigé, le texte vous permettrait-il de faire cela par voie réglementaire ? La parole est à M. Michel Castellani. En appui aux amendements déposés par mes collègues Acquaviva, Dubié et Lassalle, je tiens à souligner les difficultés considérables d’application de ce texte.
Nous parlons ici d’un secteur structurellement en crise, dans lequel des dizaines de milliers de personnes souffrent tous les jours dans leur entreprise et ont des revenus dérisoires. Je voudrais dire un mot de soutien à tous les éleveurs, à tous les producteurs agricoles, qui sont indispensables à la vie quotidienne de chacun d’entre nous et dont on connaît les conditions sociales extrêmement dégradées.
Prendre en considération une perte de 80 % des revenus, pour une grande partie de ces exploitations, ça n’a aucun sens ! La parole est à M. le rapporteur général. Revenons sur ce seuil de perte de chiffre d’affaires, afin que l’on ne tire pas de notre débat une conclusion qui serait contraire à l’objet de l’article.
L’article 18 est nécessaire et bienvenu, nous sommes tous d’accord là-dessus. Il est excellent ! Nous sommes d’accord avec l’ouverture qui est faite ! Par facilité ou sécurité, on aurait pu s’en tenir à la liste S1 : ceux qui, ayant fermé, n’ont pas pu travailler sont exonérés de charges. Au moment de la construction du texte, ce point a fait débat ; j’ai pour ma part insisté pour que soient inclus les secteurs dépendants, selon le principe de la chaîne de valeur, de ceux qui ont fermé. Très bien ! Puisque les cafés ont fermé, les viticulteurs qui vendent aux cafés doivent être aidés de la même manière. Par ricochet ! Très bien ! Il convenait donc de caractériser la notion de dépendance. C’est pourquoi nous avons fixé le seuil à une baisse de 80 % du chiffre d’affaires. Peut-il être abaissé un peu ? Oui !
La filière agricole a ainsi résisté de manière particulière, offrant même une continuité de production alimentaire qui a permis à chacun de continuer à se nourrir – que ses acteurs en soient vivement remerciés. Ce secteur n’a pas licencié mais plutôt recherché des employés ; il n’a donc pas eu recours au chômage partiel ; il a continué de verser des salaires et d’acquitter des charges sans bénéficier pour autant des divers dispositifs instaurés.
La filière viticole a subi une rupture de marché provoquée par la fermeture administrative des cafés, hôtels, restaurants et par la fermeture des frontières. Au sein de celle-ci, les vendeurs de raisin au kilogramme ne sont pas immédiatement affectés par la crise économique mais ils le seront par répercussion l’année prochaine.
La filière agricole, dans son ensemble, est confrontée au problème suivant : elle doit continuer à acquitter des charges – elle devra d’ailleurs assumer les reports de charges qui auront été concédés – et à faire face à l’endettement bancaire ainsi qu’aux charges d’activité courantes.
Elle représente 60 milliards d’euros de chiffre d’affaires dont 13 milliards à l’export, 700 000 emplois et un soutien considérable à l’économie des territoires.
Je plaide pour l’instauration d’un dispositif spécifique, adapté à cette filière, pour l’aider à passer le cap et à poursuivre son développement au bénéfice des territoires. La parole est à M. Éric Coquerel. L’article 18 est important puisqu’il fonde une partie des aides aux entreprises sur des exonérations de cotisations sociales patronales. Nous y sommes très clairement opposés car il revient à transférer aux comptes sociaux le coût de la crise du covid-19. Il transforme une dette de l’État en dette sociale.
Or l’économiste Michaël Zemmour l’a très bien montré dans une tribune récente dans Le Monde , si nous pouvons débattre de la manière de gérer la dette de l’État – nous proposons de la transformer en dette perpétuelle avec taux d’intérêt négatif : Éric Woerth affirmait récemment que le stock de la dette ne serait jamais remboursé et que seuls les intérêts le seraient –, ce n’est pas vrai de la dette sociale.
La dette sociale – stock et intérêts – sera inévitablement payée. Autrement dit, reporter sur les comptes sociaux les conséquences financières de la crise coûtera plus cher. En outre, cela comporte plusieurs risques : d’abord, l’État compensera-t-il intégralement, au centime d’euro près, le montant des exonérations ? On peut en douter : je rappelle que dans le dernier projet de loi de financement de la sécurité sociale, 3 milliards d’euros n’ont pas été compensés. Ensuite, les exonérations concernent des mécanismes de solidarité nationale dont chacun constate qu’ils ont été plus indispensables encore pendant la crise qu’ils ne le sont en temps normal.
La solution ne réside pas dans les exonérations mais dans la fiscalité : il faut revenir sur la suppression de l’ISF et l’instauration de la flat tax afin de financer, sans toucher aux comptes sociaux, un dispositif de soutien aux entreprises adapté aux problèmes auxquels elles sont confrontées, et comprenant le cas échéant des aides directes. C’est le rôle de l’État.
Nous voterons donc contre l’article 18. Nous en venons à l’examen des amendements. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 710. L’amendement vise à étendre au forfait social, dont j’avais proposé la suppression hier, le champ des exonérations prévues à l’article 18. Ce serait une mesure forte dans la période actuelle. Quel est l’avis de la commission ? Je développerai longuement ma première réponse, pour aller plus vite ensuite, afin d’expliquer ce qui motive très souvent un avis défavorable sur les amendements.
L’article 18 est probablement le cœur du texte. L’exonération de cotisations sociales pour certains secteurs d’activité qu’il prévoit est inédite et n’est pas dépourvue d’une certaine fragilité juridique. Nous devons, en effet, définir, en collaboration avec le pouvoir réglementaire, les secteurs susceptibles de bénéficier d’exonérations de charges. C’est à cet exercice d’équilibriste que nous essaierons de nous livrer ensemble dans les prochaines heures.
L’article 18 ne prévoit pas seulement des exonérations de charges. Celles-ci peuvent concerner, pour une période de quatre mois, les entreprises de moins de 250 salariés dont l’activité principale relève des secteurs du tourisme, de l’hôtellerie, de la restauration, du sport, de la culture, du transport aérien et de l’événementiel ; pour une période de trois mois, les entreprises de moins de 10 salariés qui ont été fermées.
Les entreprises de moins de 50 salariés ne bénéficiant pas des exonérations précédemment mentionnées peuvent compter sur un autre filet de sécurité : la remise partielle de leurs dettes sociales, que la commission a étendue aux travailleurs indépendants et aux travailleurs non-salariés agricoles.
Enfin, toutes les entreprises, sans exception, qui le souhaitent peuvent solliciter un plan d’apurement leur permettant d’étaler le paiement de leurs dettes sociales jusqu’à trente-six mois.
L’article 18 est donc un véritable couteau suisse. L’accompagnement qu’il propose ne s’adresse pas uniquement aux entreprises relevant des seules listes S1 – secteurs prioritaires – et S1 bis – secteurs dépendant des précédents ayant subi une importante baisse de leur chiffre d’affaires. Sa portée est bien plus large ; il représente une aide de 4 milliards d’euros – et les pertes de recettes, monsieur Coquerel, sont bien compensées par des crédits budgétaires.
Qu’est-ce qui permet à ce dispositif de respecter l’égalité devant l’impôt et donc d’être conforme à la Constitution ? À cet égard, la limitation dans le temps est très importante. La période d’exonération doit correspondre à celle pendant laquelle l’activité des entreprises dans les secteurs prioritaires comme dans les secteurs dépendants a été empêchée : entre mars et juin ou entre mars et mai selon la taille des entreprises. Toute prolongation de cette période – de nombreux amendements ont été déposés dans ce but – risquerait de porter atteinte au principe d’égalité devant l’impôt.
De même, pourquoi certains secteurs sont-ils visés et pas d’autres ? Pourquoi l’agriculture ou le bâtiment ne figurent-ils pas parmi les secteurs prioritaires ? Parce qu’ils ne répondent pas au critère de l’empêchement d’activité. Cela ne signifie pas que ces secteurs ne connaissent pas de difficultés économiques, ni qu’ils ne doivent pas être aidés et accompagnés – de nombreuses mesures ont été prises en ce sens –, mais ils n’ont pas été empêchés sur le plan administratif. La nuance est primordiale pour garantir la validité juridique des exonérations de charges.
Toute proposition visant à appliquer le dispositif à d’autres secteurs sera laissée à l’appréciation du pouvoir réglementaire – je demanderai systématiquement le retrait des amendements et l’avis du ministre sur la possibilité d’étendre le champ d’application par décret. Mais j’appelle votre attention sur le respect des critères objectifs que sont l’empêchement et la dépendance à un secteur empêché pour une entreprise ayant subi une baisse de chiffre d’affaires de 80 %.
Ces considérations sont importantes car je ne voudrais pas que le texte adopté rende impossible l’exonération de charges sociales pour les secteurs prioritaires et dépendants. Il s’agit d’une belle mesure, franche, et d’intérêt général. Les secteurs qui ne sont pas concernés doivent être soutenus autrement.
Je vous propose en quelque sorte de conclure un contrat moral sur ce sujet. Si les aides en faveur des autres secteurs vous apparaissent insuffisantes, il faut travailler à de nouvelles mesures et je vous accompagnerai volontiers dans cette tâche, comme je l’ai fait depuis le début de la crise.
Je le reconnais, il est difficile de choisir des secteurs – le débat a eu lieu en commission, avec le président de la commission, notamment. Nous prenons un risque juridique mais la mesure est, selon moi, juste et équilibrée. Nous devons aller au bout de cette logique afin que la réponse à la crise soit la plus adaptée à la réalité, en particulier en tenant compte de l’empêchement d’activité qui a caractérisé la période de confinement que nous avons vécue.
Mon avis est donc défavorable. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.) Quel est l’avis du Gouvernement ? M. le rapporteur a dit l’essentiel. Il a mentionné les divers niveaux d’exonération – pour les TPE de moins de dix salariés qui font l’objet d’une fermeture administrative ; pour les secteurs les plus concernés par l’arrêt de l’activité, le plus emblématique étant celui des cafés, hôtels, restaurants – mais aussi la possibilité de remise de dettes sociales au cas par cas pour les entreprises de moins de 50 salariés ou encore le mécanisme d’apurement des dettes sociales accessible à toutes les entreprises. Toutes ces mesures constituent un effort sans précédent.
Il faut souligner le caractère inédit d’une exonération de cotisations aussi massive : comme M. le rapporteur général l’a souligné, ce sont un peu plus de 3,5 milliards d’euros qui seront compensés auprès des organismes de sécurité sociale. Il s’agit là, me semble-t-il, d’un point important du débat.
Nous avons voulu construire l’article en y intégrant le maximum d’éléments susceptibles de le sécuriser : il n’y aurait rien de pire, pour les acteurs économiques concernés, qui attendent ces dispositions avec une extrême impatience, que les mesures que nous adoptons soient remises en cause du fait d’une fragilité. La volonté – louable, certainement – de couvrir tous les secteurs irait à rebours des éléments de sécurisation que nous avons prévus, à savoir le caractère temporaire et extrêmement sectorisé du dispositif et les critères définis pour prendre en considération le degré de dépendance à un secteur prioritaire. Ce dernier doit être élevé, sous peine d’instaurer un régime général d’aides, ce qui nous mettrait en difficulté à la fois sur les plans constitutionnel et conventionnel, au vu du régime d’aides directes en vigueur dans l’Union européenne.
Nous savons que beaucoup de secteurs et d’organisations professionnelles souhaitent que nous modifiions l’article pour y intégrer un champ d’activité ou un autre. Ces demandes peuvent être légitimes – nous ne le remettons nullement en cause –, mais y accéder fragiliserait la disposition que nous proposons et rendrait extrêmement aléatoire son application pour accompagner les secteurs les plus en difficulté.
Un mot enfin sur la méthode : comme M. le rapporteur général l’a évoqué, l’article 18 comporte de nombreux renvois à des textes réglementaires. Il ne s’agit pas de priver la représentation nationale de son travail d’élaboration des listes – je songe notamment aux listes de codes NAF, la nomenclature d’activités françaises, que nous avons déjà évoquées à l’occasion de l’examen d’autres articles –, mais ces renvois ont deux objectifs.
Le premier a trait à la technicité du sujet : nous devons pouvoir affiner très précisément les exonérations accordées, ce que les textes réglementaires nous permettent de faire le plus facilement, ou plutôt – le terme n’étant pas très bien choisi – le plus efficacement possible. Surtout, le renvoi à un texte réglementaire permet d’améliorer et de faire évoluer le dispositif sans revenir devant la représentation nationale – non pas que nous ne souhaitions pas le faire, mais nous savons que les délais d’examen des lois sont plus longs et peuvent donc se révéler, en cas d’urgence, moins pertinents que des modifications réglementaires. Tel est le principal argument en faveur de cette méthode.
Ces éléments nous conduisent – comme celle du rapporteur général, ma réponse est un peu longue, mais je serai plus bref par la suite, monsieur le président – à émettre des avis défavorables à la plupart des amendements proposés, en vertu de notre volonté farouche de faire en sorte que cette disposition, inédite dans son ampleur et sa nature, soit adoptée et surtout s’applique dans les meilleures conditions, au bénéfice de l’ensemble des secteurs économiques concernés. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.) La parole est à Mme Véronique Louwagie, qui a eu la chance d’obtenir des avis extrêmement détaillés en réponse à son amendement. Pour autant, je ne suis pas certaine d’avoir entendu des arguments très précis…
Vous indiquez que le dispositif proposé est inédit ; mais je crois que la crise l’a été également. Oui, bien sûr. Au demeurant, le montant d’exonérations de charges que vous annoncez – 3,5 milliards d’euros, même si j’ai bien compris que l’article dans son ensemble portait sur un total de 4 milliards d’euros –, reste très nettement inférieur aux 37 milliards d’euros de report de charges, puisqu’il représente à peine 10 % de cette somme. Or si des entreprises ont eu recours à ce report de charges, c’est qu’elles en avaient besoin. Les charges reportées s’ajouteront pourtant, à partir de septembre, aux autres charges dues à cette date. Il serait donc faux de prétendre que l’effort est important, car il reste inférieur au montant des reports de charges.
Vous évoquez ensuite la manière dont vous avez retenu les activités qui ouvriront droit aux exonérations de charges – nous aurons l’occasion d’en reparler au cours de l’examen des prochains amendements, présentés par Éric Woerth. Vous estimez qu’il est juste d’avoir retenu certains secteurs d’activité, notamment ceux ayant fait l’objet d’une fermeture administrative. J’estime au contraire que c’est très injuste. Ainsi, une entreprise faisant face à une diminution de chiffre d’affaires et à des difficultés équivalentes, parce qu’elle n’aurait pas fait l’objet d’une fermeture administrative, n’aurait pas le droit à une exonération de charges ? Vous évoquiez le domaine du bâtiment, qui n’a pas fait l’objet de fermetures administratives, en expliquant que son activité n’était pas empêchée. Dans les faits, ce fut pourtant bien le cas. Non. Les salariés du bâtiment ne pouvaient pas se rendre sur les chantiers, car un grand nombre d’entreprises et même de particuliers refusaient de les accueillir.
Nous sommes en profond désaccord sur l’ensemble de ces éléments, et votre notion de justice ne me semble pas du tout à la hauteur. (L’amendement no 710 n’est pas adopté.) Je suis saisi de quatre amendements, nos 1049, 1101, 1050 et 2123, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements, nos 1049, 1101 et 1050 peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. le président de la commission des finances, pour les soutenir. Cet amendement et les deux amendements de repli qui lui font suite ont été signés par l’ensemble des élus du groupe Les Républicains, comme l’a souligné Véronique Louwagie.
L’article 18 instaure une bonne mesure – que nous avions proposée depuis longtemps, mais il est vrai nous avons toujours un temps d’avance : à un certain stade, il faut accorder des exonérations de charges et ne pas se contenter de reports. Nous proposons toutefois de procéder autrement.
D’abord, j’estime que la sectorisation est une erreur, car on court toujours après les manques. Vous avez établi une liste S1 puis une liste S1 bis et défini des activités connexes – bientôt viendront les activités connexes des activités connexes : on constate clairement que la crise entraîne des réactions en chaîne dans l’économie et qu’il est très difficile de définir les secteurs concernés. Le dispositif que vous proposez est donc injuste, contrairement à ce que vous prétendez. Il est aussi fragile juridiquement, alors même que vous cherchez à assurer sa sécurité juridique – ce qui est bien naturel.
Une mesure juste, que nous vous proposons d’adopter au travers de l’amendement no 1049, consisterait à prendre en considération, pour toutes les entreprises de moins de 250 salariés, indépendamment de leur secteur d’activité et qu’elles aient ou non été fermées administrativement, l’intensité avec laquelle la crise les a frappées, laquelle se vérifie par la perte de chiffre d’affaires. Cette dernière serait ainsi le juge de paix.
Le taux de perte de chiffre d’affaires à partir duquel une entreprise peut prétendre à une exonération de charges ne doit d’ailleurs pas être décidé par l’administration. Or le texte de l’article 18 ne précise pas quel serait le niveau de perte retenu : vous en renvoyez la fixation au pouvoir réglementaire du Gouvernement. C’est pourtant un point essentiel : de la même façon que le Parlement ne s’en remet pas au Gouvernement et à l’administration pour décider du taux de l’impôt, il doit fixer le pourcentage de perte de chiffre d’affaires à partir duquel l’exonération de charges s’appliquera. J’ai cru comprendre que vous comptiez retenir le taux de 80 % – peut-être pourrez-vous nous le confirmer.
Nous proposons que les entreprises ayant subi une perte de chiffre d’affaires supérieure à 70 % pendant la période bénéficient d’une exonération de charges totale. En deçà de ce taux, un mécanisme de lissage s’appliquerait et l’exonération serait proportionnelle à la perte de chiffre d’affaires. Je rappelle que, même si nous avons complètement perdu nos repères avec la crise, une perte de 20 % ou 30 % de chiffre d’affaires pour une entreprise est déjà considérable. Les sociétés concernées doivent donc bénéficier de réductions ou d’exonérations de charges sociales à due concurrence. Le dispositif serait alors juste pour l’ensemble des entreprises françaises.
Pour les entreprises supérieures à 250 salariés, nous vous proposons d’accorder ces exonérations au cas par cas, comme le ministre le fait déjà pour les grandes entreprises.
Les deux amendements suivants sont des amendements de repli. L’amendement no 1101 ne mentionne pas les entreprises de plus de 250 salariés, qui ne sont donc plus concernées par l’exonération. L’amendement no 1050 ne tend plus à supprimer les secteurs – puisque vous voulez absolument sectoriser – mais vise à instaurer une baisse des charges proportionnelle à la perte de chiffre d’affaires lorsque cette dernière reste inférieure à 70 %. La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l’amendement no 2123. Il s’inscrit dans la même veine que ceux défendus par le président Woerth. Notre collègue Lise Magnier propose en effet une exonération totale de charges pour les entreprises ayant perdu au moins 80 % de leur chiffre d’affaires.
Pour les entreprises dont la perte représente entre 50 % et 80 % du chiffre d’affaires, il est proposé d’accorder une exonération proportionnelle à la perte – par exemple de 60 % pour une entreprise ayant perdu 60 % de son chiffre d’affaires. Une telle disposition nous semble plus juste pour l’ensemble des secteurs fortement affectés par la crise sanitaire. Quel est l’avis de la commission sur les amendements ? Comme promis, je serai bref sur ces demandes d’extension de l’ensemble des catégories d’entreprises ou des secteurs concernés. Vous avez tous les deux très bien posé le débat, mais nous avons trouvé, à travers la rédaction de l’article 18, un équilibre qui reflète nos choix en la matière et qui est donc verrouillé.
Madame Louwagie, vous m’interrogez sur la différence entre les 4 milliards d’euros d’exonérations de charges accordées et les reports de charges, qui dépassent 30 milliards d’euros. Il me semble important de souligner que l’exonération définitive de charges est un acte très fort de la puissance publique, qui doit être réservé aux secteurs prioritaires. Les autres entreprises pourront toujours reporter les paiements de leurs charges jusqu’au retour à meilleure fortune et à la reprise. L’administration a été très flexible sur ce point. J’émettrai en revanche systématiquement un avis défavorable aux amendements proposant d’étendre le dispositif à de nouveaux secteurs ou de modifier la taille des entreprises concernées, pour les raisons déjà évoquées précédemment.
Je signalerai enfin, d’un mot, que l’exonération de charges au prorata de la perte de chiffre d’affaires me semble extrêmement complexe. Il ne me paraît pas pertinent de créer un tel dispositif.
Avis défavorable à l’ensemble des amendements. Quel est l’avis du Gouvernement ? Les auteurs des amendements me pardonneront un avis lapidaire : je partage les arguments du rapporteur général, comme j’ai eu l’occasion d’en donner les raisons il y a un instant. Avis défavorable, pour préserver la logique qui a présidé à la rédaction de l’article. La parole est à M. le président de la commission des finances. Ce que nous proposons n’est pas plus compliqué que votre dispositif, qui prévoit des exonérations, des reports d’échéances, et toute une panoplie de mesures, à tel point qu’il sera très difficile, pour les entreprises, de s’y retrouver. Son application risque en outre d’être extrêmement injuste d’un département à l’autre. Le couteau suisse que vous évoquiez risque, en réalité, d’être un couteau sous la gorge pour de nombreuses entreprises, qui ne sauront pas comment elles seront traitées.
Il me semble beaucoup plus juste d’instaurer une exonération proportionnelle à la baisse de chiffre d’affaires lorsque cette dernière est inférieure à 70 % – cette exonération devant être intégrale pour les entreprises dont la perte excède ce taux 70 %, qui est considérable. Une entreprise ayant perdu 30 % de son chiffre d’affaires bénéficierait ainsi d’une exonération de 30 % de charges. Cela n’a rien de compliqué ; c’est même d’une logique absolument imparable. La sectorisation de l’exonération est une mesure très injuste et toujours incomplète.
Enfin, j’insiste pour que le taux de perte de chiffre d’affaires donnant droit à exonération soit mieux précisé. Je veux que l’Assemblée nationale fixe un taux et que les parlementaires prennent leur responsabilité. Retenir un seuil de 80 % n’aurait pas de sens : il est beaucoup trop élevé ! Une entreprise ayant perdu ne serait-ce que 75 % de son chiffre d’affaires est déjà une entreprise complètement fermée. Toute personne ayant déjà travaillé en entreprise ou géré une mairie le sait : une perte budgétaire de 75 % est considérable !
C’est une drôle d’idée que de laisser au Gouvernement le soin de définir ce seuil, alors que la survie de nombreuses entreprises est en jeu. Comme la fixation du taux de l’impôt, cette tâche relève du Parlement. La parole est à M. Charles de Courson. Monsieur le jeune rapporteur général, ces exonérations sectorielles ont déjà été tentées, dans le cadre du plan textile, sous Pierre Mauroy : cela remonte à un certain temps, mais cela a été fait. Cette tentative s’est mal terminée, comme vous le savez, puisque le programme d’aides, que nous n’avions pas notifié à l’Union européenne, a été condamné par la Commission.
L’approche que vous avez adoptée présente d’énormes risques de contentieux et d’annulations, monsieur le ministre délégué, puisque, à situation économique équivalente, une entreprise bénéficiera ou non d’exonérations, en fonction du secteur d’activité auquel elle appartient. Vous souhaitez en outre intervenir par le biais du pouvoir réglementaire, ce qui aggravera encore la situation.
Le deuxième problème est celui de l’eurocompatibilité du dispositif. Vous affirmez dans l’étude d’impact que le problème ne se pose pas, puisque le plafond de 200 000 euros que l’Union européenne applique aux aides que l’État peut apporter aux entreprises a été porté à 800 000 euros pour les entreprises ayant rencontré des difficultés du fait de la crise sanitaire. Mais ce plafond s’appliquera aux secteurs d’activité que vous aurez vous-même retenus. Comptez-vous notifier ces choix à Bruxelles, comme vous devez le faire ? Je souhaite être éclairé sur ce point.
L’approche consistant à accorder une exonération proportionnelle à la chute du chiffre d’affaires présente un grand avantage : elle n’entraîne aucun risque constitutionnel ou de recours sur les actes réglementaires que vous pourriez prendre – en tout cas, je ne vois pas comment de tels recours seraient possibles.
À l’inverse, l’approche sectorielle me semble très dangereuse – alors même que tout le monde s’accorde sur l’objectif poursuivi. Ainsi, votre dispositif concerne les bars, mais pas les viticulteurs – à moins que ce débat ne conduise à les y inclure. Pourtant, ces derniers n’avaient plus personne à qui vendre pendant le confinement, les bars représentant 80 % de la clientèle des vignerons indépendants… Merci, monsieur de Courson. Je rappelle que le temps de parole est de deux minutes. Nous allons nous efforcer de le respecter afin de pouvoir avancer dans la discussion.
La parole est à Mme Véronique Louwagie. Monsieur le rapporteur général, vous parlez d’un équilibre « verrouillé », mais c’est vous qui vous êtes enfermés dans cette logique. Vous définissez par ailleurs des secteurs prioritaires, mais la priorité ne serait-elle pas plutôt de soutenir toutes les entreprises qui ont connu une diminution de chiffre d’affaires, comme le suggérait à juste titre le président Éric Woerth ? C’est à l’ensemble de l’économie que vous donneriez ainsi la priorité.
Quant à la complexité, les éditeurs de logiciels de paie et les personnes qui gèrent les ressources humaines y sont habitués. Ils ont déjà dû s’adapter aux évolutions récentes et seraient donc tout à fait capables de le faire à nouveau si vous acceptiez nos propositions.
Votre approche est incomplète et va susciter de l’insatisfaction et entraîner des problèmes économiques dans les territoires. Si nous voulons lancer un mouvement de relance et soutenir toute l’économie, la perte de chiffre d’affaires semble le critère le plus pertinent. La parole est à Mme Cendra Motin. Nous avons pris la décision de faire cesser l’activité dans des pans entiers de notre économie. À notre demande, des chefs d’entreprise ont dû fermer leur entreprise sans même savoir quand ils pourraient la rouvrir. Ceux-là, qui ont mis fin à toute activité et perdu la totalité de leur chiffre d’affaires, nous allons les aider par une exonération complète. D’autres ont également dû cesser leur activité, non parce que nous en avions pris la décision, mais parce cette activité dépendait fortement de celle des entreprises ayant subi une fermeture administrative – je pense notamment aux fournisseurs des restaurants. Nous devons également les aider.
Vous voudriez, madame Louwagie, que nous appliquions cette exonération à toutes les entreprises, mais nous n’avons pas décidé de fermer toutes les entreprises. Bon nombre d’entre elles n’ont cessé leur activité que pendant une ou deux semaines, le temps de se mettre en ordre de marche pour faire face à cette crise inédite. Elles ont certes perdu une partie de leur chiffre d’affaires, mais elles ont pu rétablir leur résultat par la suite.
En outre, certaines entreprises ne facturent pas tout de suite. Comment pourrions-nous savoir si les entreprises concernées n’ont pas poursuivi leur activité tout en reportant une partie de leur facturation – pas nécessairement dans leur propre intérêt, du reste, mais au titre du crédit interentreprises, qui a pu en aider d’autres avec lesquelles elles travaillent ? Dans une telle hypothèse, la perte faciale de chiffre d’affaires qu’elles ont pu connaître justifie-t-elle une exonération à la même hauteur ? Elles ont certes pu aider d’autres entreprises, mais nous les aidons aussi par d’autres dispositifs plus adaptés.
Enfin, ma petite expérience de gestionnaire de paies m’oblige à vous dire que ce que vous proposez, madame Louwagie, n’est pas possible. C’est infaisable – et, qui plus est, ce n’est pas contrôlable par l’administration. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne. Comme M. Coquerel, je suis opposé par principe à ces exonérations de charges patronales et je souhaiterais avoir la confirmation qu’elles seront compensées par des crédits budgétaires.
Quant au débat qui nous occupe, la proposition de nos collègues du groupe Les Républicains est beaucoup plus pragmatique que celle du Gouvernement. Des pertes de 25 %, 30 % ou 40 % de chiffre d’affaires affectent la totalité des marges et placent les entreprises dans une situation difficile. Si vous voulez les aider, soyez concrets et pragmatiques. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. Cet article 18 est bien conçu et bien équilibré. Il faut distinguer entre les entreprises qui n’ont aucun espoir de retrouver leur chiffre d’affaires, et pour lesquelles les exonérations semblent légitimes, de celles qui ne connaissent qu’un décalage dans leurs résultats. Certes, ces dernières ont pu connaître une érosion de leur chiffre d’affaires, mais l’article, rappelons-le, prévoit également la possibilité d’étaler le paiement des charges. En outre, cette disposition s’ajoute aux mesures prises en matière de chômage partiel et au PGE, le prêt garanti par l’État. Quelle que soit notre expérience, nous avons tous des contacts avec les entrepreneurs locaux, qui tous ont salué ces mesures. Ils font d’ailleurs preuve de responsabilité et ne courent pas nécessairement après les mesures d’exonération de charges.
L’article 18, tout perfectible qu’il soit, est bienvenu, d’autant qu’il est bien calé et lisible. Au contraire, le dispositif proposé par les amendements me semble marqué par une certaine complexité. (Les amendements nos 1049, 1101, 1050 et 2123, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Je suis saisi de quatre amendements, nos 358, 1478, 616 et 883, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 358 et 1478 sont identiques.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 358. Monsieur Mattei, comme les responsables d’entreprise, nous saluons le dispositif de soutien proposé par l’article 18, qui va dans le bon sens. Cependant, certaines entreprises n’ont pas compris que l’exonération ne s’appliquerait qu’à certains secteurs et qu’elles ne pourraient pas en bénéficier. Le réveil risque d’être difficile.
Même si l’activité redémarre en cette période estivale, le secteur du tourisme a été profondément affecté par la crise et le reste encore aujourd’hui. Pour prendre en considération cette situation particulière, l’amendement no 358 de ma collègue Émilie Bonnivard propose de prolonger jusqu’au 31 décembre 2020 la période d’emploi sur laquelle portent les exonérations de cotisations sociales. L’amendement identique no 1478 de Mme Pascale Boyer est défendu.
Il en est de même des amendements nos 616 de M. Stéphane Buchou et 883 de M. Michel Vialay.
Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable, pour des raisons que vous comprenez bien désormais.
Il est cependant important que nous soyons au moins tous d’accord sur les termes du débat.
Pour reprendre l’exemple cité par M. de Courson, si les bars constituent la clientèle principale d’un viticulteur et que ce dernier a vu son chiffre d’affaires amputé de 80 %, il entre de fait dans la catégorie visée par la liste S1 bis – les viticulteurs n’en sont aucunement exclus –, et il sera donc exonéré de charges sociales. Il en est de même pour un viticulteur qui vend une partie de sa production au secteur des cafés, hôtels et restaurants et en exporte l’autre partie – ce qui est fréquent s’agissant du champagne – : dès lors que les deux composantes de sa clientèle ont été empêchées d’acheter, au point qu’il a connu une perte de chiffre d’affaires de 80 %, il bénéficie des exonérations. Tout doit donc être clair : aucun secteur empêché de vendre du fait de l’arrêt de l’activité de ses clients ne saurait être exclu du dispositif. Vous savez ce que cela représente, 80 % du chiffre d’affaires ? C’est énorme! (Les amendements identiques nos 358 et 1478, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) (Les amendements nos 616 et 883, repoussés par le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) L’amendement no 1068 de M. Boris Vallaud est défendu. (L’amendement no 1068, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 1200. Au-delà de la conjoncture générale liée à la crise, les entreprises, en Corse, souffrent de l’insularité et doivent assumer divers surcoûts. L’amendement de notre collègue Paul-André Colombani vise donc à appliquer le dispositif d’exonération de cotisations patronales à l’ensemble des entreprises corses de moins de 250 salariés, sur une durée s’étendant jusqu’au 31 décembre 2020. Quel est l’avis de la commission ? Au-delà de la question géographique, que je puis tout à fait entendre, se pose le problème de la durée. J’ai bien précisé qu’il était très important de calquer la durée d’exonération sur celle du confinement, sans la prolonger jusqu’à la fin de l’année. Avis défavorable, donc. (L’amendement no 1200, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 677 rectifié, 807 rectifié, 1457 rectifié, 1094, 1095, 398, 21, 311, 1092, 1264, 1500, 1956 et 1072, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 677, 807 rectifié et 1457 rectifié sont identiques, ainsi que les amendements nos 21, 311, 1092, 1264, 1500 et 1956.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 677. Vous l’avez rappelé, monsieur le rapporteur général, le bâtiment n’est pas concerné par le dispositif d’exonérations de charges sociales. Les entreprises de ce secteur ont pourtant connu des diminutions importantes de leur chiffre d’affaires et, si elles n’ont pas été soumises à des fermetures administratives, du moins ont-elles été empêchées de se rendre sur certains chantiers, et n’ont donc pu poursuivre leur activité durant une longue période. Et lorsque cette activité a repris, elles ont dû subir des charges plus lourdes qu’auparavant en raison de l’application des gestes barrières et des mesures sanitaires appropriées. Il importe donc que le secteur du bâtiment, qui est présent dans tous nos territoires, représente un très grand nombre d’emplois et peut fortement contribuer à la relance économique, fasse partie de ceux concernés par le I de l’article 18. L’amendement vise donc à ce que les entreprises de ce secteur puissent bénéficier des exonérations de charges pour la période du 1er janvier au 31 décembre 2020. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 807 rectifié. Comme l’a très bien rappelé Mme Louwagie, la mise en place des mesures de précaution sanitaire pour la protection des salariés sur chantier a donné lieu à un surcoût important, de l’ordre de 10 à 20 %, qui – étant bien sûr rarement partagé avec le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre – incombe la plupart du temps aux entreprises du bâtiment, un secteur particulièrement touché par la crise sanitaire, notamment dans ma région, l’Occitanie.
Pour éviter à ces entreprises de connaître de trop grandes difficultés, voire la faillite – et les licenciements économiques des salariés qui les accompagnent –, nous vous proposons de prendre en charge les surcoûts liés à la crise sanitaire, estimés à 11,7 milliards d’euros, en procédant à l’annulation des charges sociales des entreprises des secteurs du BTP pour l’année 2020. La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1457 rectifié. Souvenez-vous : le 15 mars dernier, on demandait aux Français de rester chez eux mais en même temps, Mme Pénicaud, alors ministre du travail, disait aux personnes travaillant dans le secteur du BTP qu’ils devaient retourner au travail, qu’il était urgent de s’y remettre pour maintenir l’économie à flot. Comme l’ont dit plusieurs collègues, notamment Mme Louwagie et Mme Ménard, certaines entreprises ont alors rencontré des difficultés pour approvisionner les chantiers et pour aller sur le terrain en raison du refus de certains clients. À travers l’amendement de mon collègue Guy Bricout, notre groupe demande que soient pris en charge les surcoûts liés à l’instauration de mesures de précautions supplémentaires face au covid-19. Je suis saisi de deux amendements, nos 1094 et 1095, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à Mme Sylvia Pinel, pour les soutenir. Dans le même esprit que les amendements soutenus précédemment, le no 1094 porte sur les nombreux surcoûts liés à la crise sanitaire dans le secteur du BTP. On a beaucoup évoqué la mise en place des gestes barrières et des mesures de protection des salariés des entreprises du BTP, mais les entreprises ont également fait face à des surcoûts indirects, du fait notamment de la perte de productivité et de rendement due aux nouvelles conditions de travail, des variations du coût des matières premières ou des produits manufacturés ou encore de la prolongation de la durée de location du matériel de chantier.
Ces surcoûts, de l’ordre de 10 à 20 % d’après les estimations, figurent parmi les multiples facteurs – aux côtés entre autres de la baisse de la commande publique – qui expliquent que ces entreprises aient, aujourd’hui encore, du mal à redémarrer. Il est donc important que nous les accompagnions dans cette période en procédant à l’annulation des charges sociales, et ce afin d’éviter de nombreux licenciements. Je précise que plusieurs organisations professionnelles nous ont déjà signalé que beaucoup de licenciements avaient dû être opérés et que de nombreux emplois restaient menacés.
Le no 1095 est un amendement de repli, aux termes duquel ne bénéficieraient des exonérations que les entreprises ayant perdu au moins 50 % du chiffre d’affaires. L’amendement no 398 de M. Stéphane Viry et l’amendement no 21 de M. Pierre Cordier sont défendus.
La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l’amendement no 311. Dans la continuité des amendements précédents, il vise à prévoir des exonérations de cotisations et de contributions ainsi que des remises de dettes pour les entreprises du BTP – un secteur qui, rappelons-le, emploie 2 millions de salariés et représente 11 % du PIB, et dont l’activité a été fortement affectée au début de la crise : elle a été réduite de 88 % début avril. La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 1092. Il a été déposé par mon collègue M. Colombani. Je ne peux que répéter ce qui a été dit par les intervenants précédents : compte tenu du poids important du BTP et du rôle considérable qu’il joue dans la relance de l’activité économique, nous proposons d’étendre les mesures exceptionnelles d’exonération de cotisations et contributions sociales ainsi que de remises de dettes aux employeurs et aux travailleurs indépendants relevant de ce secteur. Les amendements nos 1264 de Mme Huguette Tiegna et 1500 de M. Martial Saddier sont défendus.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 1956. L’activité dans le secteur du BTP a en effet reculé de 88 % début avril, ce qui est énorme. Or toutes les entreprises de ce secteur n’ont pas la chance d’être localisées à Béziers, où il a été décidé que la commune prendrait en charge, dans des limites raisonnables bien sûr, les surcoûts liés aux mesures de protection sanitaires imposées par l’épidémie de covid-19. Toutes les communes n’ont cependant pas les moyens d’en faire autant. Il me semble donc très important que le Gouvernement soutienne, au niveau national, les entreprises du bâtiment pour relancer l’activité économique, comme le fait Béziers à son échelle. La parole est à Mme Sylvia Pinel, pour soutenir l’amendement no 1072. Il est identique au no 1095, mais limite l’application des exonérations à la durée de la crise sanitaire, soit entre le 1er février et le 31 mai 2020. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ? L’exemple du BTP illustre parfaitement notre débat sur les listes S1 et S1 bis : qu’un secteur n’y figure pas ne signifie pas qu’il n’a pas souffert de la crise. Tout le monde a conscience que la crise sanitaire a eu des conséquences sur tout l’écosystème du bâtiment – entreprises, sous-traitants, fournisseurs – et entraîné un ralentissement, voire l’arrêt de l’activité, ce qui s’est traduit par une baisse du chiffre d’affaires et des problèmes de trésorerie. Nous avons donc pris des mesures pour aider les entreprises. Mais cela ne peut pas passer par les dispositions de l’article 18 : comme nous l’avons dit au début de l’examen de cet article, le respect de la Constitution implique de faire une différence entre les secteurs contraints à une fermeture administrative et qui, pour cette raison précise, figurent dans la liste des secteurs prioritaires, et ceux qui ont subi une baisse d’activité due à la situation sanitaire ou à une externalité négative. Mais les conséquences sont les mêmes ! Cela ne veut pas dire qu’il ne faut pas aider ces derniers, madame Louwagie. Mais c’est bien ce distinguo – que l’on pourra juger bassement juridique – qui permet d’accorder à certains secteurs 4,5 milliards d’exonérations de charges. Les listes S1 et S1 bis rassemblent des secteurs empêchés ou dépendant des secteurs empêchés, ni plus ni moins.
Cela étant, nous ne laissons pas de côté les entreprises du BTP. Sans même parler des mesures de droit commun dont elles peuvent déjà bénéficier, comme le dispositif de chômage partiel ou les prêts garantis par l’État, nous avons pris des mesures spécifiques pour les soutenir, comme la modification de la trajectoire de suppression de l’avantage fiscal lié au gazole non routier – à l’origine une demande du secteur du BTP – ou l’augmentation des avances sur marchés publics, des mesures dont je me félicite car il était important d’aider ces entreprises à résoudre leurs problèmes de trésorerie. Le Gouvernement a donc pris les mesures d’urgence qu’appelait la situation du secteur du BTP, lequel devra être en mesure de rebondir rapidement pour que, avec l’accès à de nouveaux marchés, l’activité reprenne.
L’exonération de charges n’est cependant pas possible pour les entreprises du BTP car elles n’ont pas été empêchées de travailler même si, dans les faits, je le reconnais, la baisse d’activité a été forte. Je le répète, nous devons limiter la liste des secteurs prioritaires à ceux qui ont été empêchés ou dépendant des secteurs empêchés. Cela peut certes créer des frustrations, mais les autres secteurs ne sont pas oubliés pour autant. Quel est l’avis du Gouvernement ? Ma tâche est à la fois frustrante et simple : étant parfaitement d’accord avec l’ensemble des arguments avancés par M. le rapporteur général, je partage son avis sur la totalité des amendements. Et je rappelle à mon tour que le BTP a bénéficié d’aides, qui seront complétées dans le cadre du plan de relance, notamment pour faire face aux surcoûts des marchés publics liés à la crise du covid-19, notamment aux aménagements nécessaires des postes de travail.
Nous tenons à préserver l’équilibre général de l’article – même si j’entends bien que cet équilibre, et la logique qui le sous-tend, est contesté, notamment par Mme Louwagie – car nous considérons que cette construction est la plus solide. Les consultations que nous menons, notamment avec le SGAE, le Secrétariat général des affaires européennes, nous incitent à penser que cette proposition n’entre pas en contradiction avec les règles communautaires mais que des problèmes pourraient se poser, de ce point de vue, si nous allions plus loin, par exemple en proposant un cadre plus large et en ajoutant d’autres secteurs à la liste. La parole est à Mme Véronique Louwagie. Je le répète, le groupe Les Républicains approuve les dispositions de l’article 18 – il avait proposé des dispositifs analogues lors des premier et deuxième PLFR. À nos yeux, cependant, ce que vous avez présenté comme une mesure de justice n’en est pas une, puisque tous les secteurs affectés par la crise ne sont pas traités de la même façon. Cela constitue une profonde divergence entre nous.
J’ai cru comprendre, à travers vos propos, monsieur le ministre délégué, que le contenu des listes S1 et S1 bis, rendu public par un communiqué de presse du Gouvernement du 10 juin dernier, était susceptible d’évoluer. Qu’en est-il exactement ? La parole est à M. le ministre délégué. Je répéterai l’engagement que j’avais pris au moment de l’examen de l’article 3 : si ces listes devaient être modifiées, ce serait plutôt dans le but d’y ajouter un secteur que nous aurions négligé de prendre en considération. Toutes les activités citées dans le communiqué de presse auquel vous avez fait allusion bénéficieront du dispositif d’exonération, mais nous nous gardons la possibilité d’en compléter la liste par voie réglementaire si cela s’avérait nécessaire. (Les amendements identiques nos 677 rectifié, 807 rectifié et 1457 rectifié ne sont pas adoptés.) (Les amendements nos 1094, 1095 et 398 successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 21, 311, 1092, 1264, 1500 et 1956 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 1072 n’est pas adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 165, 669, 1692, 1915, 863, 361, 865, 1575, 2280, 1620, 1312, 1942, 1313 et 1051, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 165, 669, 1692 et 1915 sont identiques, de même que les amendements nos 361, 865, 1575 et 2280.
La parole est à M. Jacques Cattin, pour soutenir l’amendement no 165. Il est défendu. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 669. Il concerne la période d’exonération des cotisations sociales. Nous vous proposons de ne pas retenir, comme échéance, la date 31 mai 2020 mais plutôt, pour tous les secteurs liés au tourisme comme l’hôtellerie, la restauration, le sport, la culture, le transport aérien, l’événementiel, la date du 31 octobre 2021. Il s’agit en effet de donner à ces secteurs des perspectives pour rebondir et participer au mieux à la relance. L’amendement no 1692 de M. Benoit Potterie est défendu.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 1915. Il est vrai que le secteur touristique a été très lourdement touché par la crise sanitaire – paralysé pendant le confinement, il peine à se relever. La baisse globale d’activité est d’environ 33 %, dont cinq points pour les seuls secteurs liés au tourisme. L’hébergement et la restauration restent les plus affectés avec une diminution de 90 % de leur activité. J’ai eu l’occasion de discuter, en fin de semaine dernière, avec des propriétaires de campings du littoral biterrois : pour eux, la saison est très compromise ; le mois de juillet ne s’annonce pas bon du tout et si le mois d’août promet d’être un peu meilleur dans l’hypothèse où il n’y aurait pas de deuxième vague, leur situation reste très compliquée. Et pourtant, il y a peu, la France était encore une des destinations favorites des vacanciers : en 2018 nous avons accueilli 89,4 millions de visiteurs étrangers – un chiffre en hausse par rapport à 2017.
Le choc dû à la crise sanitaire ne doit pas porter un coup fatal à un secteur qui emploie directement ou indirectement plus de 2 millions de personnes. C’est pourquoi il semble indispensable de prolonger la période d’exonération jusqu’au 31 octobre 2021. La parole est à M. Yves Daniel, pour soutenir l’amendement no 863. Depuis le début de la crise sanitaire et les interdictions administratives de rassemblement, la filière événementielle a estimé les pertes d’activité à environ 15 milliards d’euros. Au-delà du chiffre d’affaires réalisé, les foires agricoles et commerciales contribuent au développement économique, social et écologique des territoires, en particulier des territoires ruraux – ce qui n’est pas forcément chiffrable. Si les entreprises et les associations sont mises à mal, c’est donc le territoire et les acteurs concernés qui en subiront les conséquences.
Le texte prévoit que l’exonération de cotisations patronales ne dépassera pas le mois de mai 2020 pour les entreprises de moins de 250 salariés et le mois d’avril pour celles de moins de 10 salariés. Le présent amendement a donc pour objet de prolonger la période d’exonération jusqu’en juin 2021. Très bien, excellent ! L’amendement no 361 de Mme Véronique Louwagie est défendu.
La parole est à M. Yves Daniel, pour soutenir l’amendement no 865. Par cet amendement de repli, nous ne demandons plus le report de l’exonération des cotisations jusqu’en juin 2021 mais jusqu’en décembre 2020. La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 1575. Cet amendement de notre collègue Acquaviva vise à maintenir l’exonération de charges jusqu’à la fin de l’année 2020, ce qui représenterait une bouffée d’oxygène en attendant la reprise. La parole est à M. Buon Tan, pour soutenir l’amendement no 2280. Malgré les dispositifs mis en place par l’État depuis le début de la crise, certains secteurs, comme celui du tourisme, sont devenus très fragiles avec un risque de faillites très important. La reprise de l’activité n’y sera que très progressive – étalée sur plusieurs mois, voire plusieurs années. La saison a commencé et nous constatons en effet l’absence presque totale de touristes américains ou asiatiques. Le secteur souffre déjà d’une perte de chiffre d’affaires de plus de 40 milliards d’euros. Beaucoup d’entreprises ne tiendront pas jusqu’à l’an prochain. C’est pourquoi nous proposons de prolonger la période d’exonération de charges patronales qui représentent souvent l’un des postes budgétaires les plus importants. Le minimum que nous puissions faire est donc de prolonger cette exonération jusqu’au 31 décembre 2020. Les amendements nos 1620 et 1312 de Mme Pascale Fontenel-Personne, 1942 de M. Mohamed Laqhila et 1313 de Mme Pascale Fontenel-Personne sont défendus.
La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 1051. Cet amendement de M. Pupponi vise à différencier la période de référence de l’exonération de cotisations patronales selon la classification des territoires en zone verte ou orange. En effet, les employeurs présents dans les départements d’Île-de-France, de Guyane et de Mayotte, n’ont pas pu reprendre tout de suite une activité normale. Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements ? Ces amendements, voisins de ceux présentés précédemment par Mme Louwagie, visent à prolonger la période d’exonération des cotisations patronales. Il faudra probablement, d’une manière ou d’une autre, étendre la durée des aides en faveur des secteurs les plus touchés. Nous l’avons déjà proposé avec l’activité partielle, dont la prolongation est envisagée, nous le ferons sans doute avec le fonds de solidarité, peut-être aussi avec les reports de charges… Reste que la durée de la période d’exonération de charges doit bien être calquée sur celle du confinement, à savoir trois mois ou quatre mois selon les secteurs. Ce souci de cohérence me conduit à émettre un avis défavorable sur l’ensemble des amendements. Toutefois, j’y insiste, nous n’allons pas cesser du jour au lendemain d’aider ces secteurs d’activité : dès lors que prendra fin l’exonération de charges, il faudra bien sûr continuer de les accompagner dans la relance. Quel est l’avis du Gouvernement ? Si nous tenons, comme vient de le souligner le rapporteur général, à ce que la période d’exonération soit calée sur celle du confinement – en tout cas sur la période d’empêchement de l’activité –, nous gardons néanmoins bien présentes à l’esprit les difficultés que ces secteurs peuvent rencontrer après le confinement. C’est pourquoi des dispositifs, évoqués par le rapporteur général, ont été prévus pour les accompagner. Ainsi, un crédit de cotisations pourra être utilisé par les entreprises concernées pour apurer des retards ou bien pour régler des cotisations à venir. Ce crédit a été calculé sur la base des salaires versés pendant la première partie de l’année. Nous avons trouvé cet outil – outre ceux que je qualifierais presque de droit commun même s’ils ont un caractère exceptionnel comme l’aide à l’activité partielle de longue durée – pour soutenir les entreprises concernées au cours des mois qui viennent. Avis défavorable. La parole est à M. le président de la commission des finances. J’ai sous les yeux un avis de l’URSSAF de l’Oise, adressé à un restaurant de Senlis, dans ma circonscription. J’imagine que de nombreux restaurants, dans maints endroits, sont dans ce cas. Les cotisations provisionnelles pour 2020 sont nulles pour les mois d’avril, mai, juin et juillet. Mais, à partir du 5 août, ce restaurant devra payer 2853 euros contre 1576 euros auparavant. C’est-à-dire que, d’un coup, à partir du mois d’août, les cotisations URSSAF doublent presque. Les URSSAF entendent donc procéder à un rattrapage de la période de report.
Certes, si le PLFR est voté, l’URSSAF refera ses calculs mais il est assez curieux d’envoyer ce type de document aux comptables des milliers de restaurants en France. Le moins que l’on puisse dire est que cela fragilise des chefs d’entreprise. En outre, la situation n’est pas claire.
Il en va de même pour les 20 % de crédit d’impôt ou de cotisations sociales sur la masse salariale : pardon, monsieur le rapporteur général, mais cette mesure, assez rarement prise, n’est pas non plus très claire. C’est une mesure de trésorerie, je suppose, mais je n’en comprends pas très bien la finalité. La parole est à Mme Véronique Louwagie. Je confirme qu’un grand nombre d’entreprises, sinon toutes, ont reçu un tel échéancier de la part des URSSAF, lequel prévoit en effet le recouvrement, à partir du mois d’août, de tous les montants ayant été reportés. Je crois même que certaines entreprises ont fait l’objet de prélèvements dès le 5 juin dernier.
Vous avez indiqué, monsieur le rapporteur général, que les entreprises seraient aidées ; mais elles ont besoin dès aujourd’hui d’avoir des perspectives. Or ce troisième PLFR ne leur apporte pas de visibilité. C’est bien dommage et il faut y remédier si vous voulez que la relance soit la plus forte possible. La parole est à M. le ministre délégué. Le président Woerth avait promis de me transmettre une copie de ce document de l’URSSAF : c’est chose faite et nous allons donc pouvoir l’examiner.
Nous avons mis en place, avec les URSSAF, un système de report automatique des échéances applicable pendant la période de crise la plus dure – la période de confinement. Ce report n’est désormais plus automatique et général mais il est de droit si l’entreprise le demande. Par ailleurs, comme l’a présumé le président Woerth, les URSSAF tiendront compte des dispositions votées par le Parlement et reverront les notifications attribuées.
Quant au crédit de cotisations de 20 % de la masse salariale versée pendant la première partie de l’année, il est plus qu’une mesure de trésorerie : c’est une possibilité de paiement que nous donnons aux entreprises sur la base de salaires qu’elles ont versés et qui, jusqu’à présent, ne donnaient pas lieu à crédit d’impôt. Ce n’est ni une avance ni un prêt, c’est un crédit d’impôt, donc, d’une certaine manière, de l’argent que nous rendons aux entreprises pour faire face aux échéances à venir ou régulariser des retards. C’est donc une véritable aide que nous accordons aux entreprises concernées. Nous répondons ainsi au moins en partie à la demande de ceux qui défendent des amendements visant à prolonger la période d’exonération de cotisations. La parole est à M. Charles de Courson. Monsieur le ministre délégué, vous ne vous êtes pas exprimé sur l’amendement plein de bon sens déposé par M. Pupponi.
Votre choix de caler le calendrier des exonérations sur celui des mesures administratives est logique. Lorsque ces dernières se sont appliquées plus longtemps, l’exonération doit être prolongée. Mais alors, pourquoi ne pas avoir procédé de même pour les territoires classés « orange » qui ne comprenaient plus que l’Île-de-France, la Guyane et Mayotte – nous examinerons d’ailleurs ultérieurement des amendements relatifs à ces deux derniers territoires ?
M. le rapporteur général a un peu évoqué le crédit d’impôt, mais vous avez observé une grande discrétion sur le sujet. Vous me direz si je me trompe, mais je crois que le problème est simplement qu’on ne peut pas supprimer les cotisations sociales des salariés. Le crédit d’impôt est un moyen de contourner la jurisprudence constitutionnelle selon laquelle les cotisations sociales des salariés leur appartiennent. Oui ! On ne peut pas les supprimer, mais vous trouvez un moyen de le faire en créant un crédit d’impôt. Pourquoi ne pas le dire simplement ? Je crois que tout le monde comprendrait. (Les amendements identiques nos 165, 669, 1692 et 1915 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 863 n’est pas adopté.) (Les amendements identiques nos 361, 865, 1575 et 2280 ne sont pas adoptés.) (Les amendements nos 1620, 1312, 1942, 1313 et 1051, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 439, 882, 228, 711, 1234, 1909, 1917, 1623 et 1619, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 439 et 882 sont identiques, de même que les amendements nos 228, 711, 1234, 1909 et 1917.
Les amendements identiques nos 439 de Mme Marie-Christine Dalloz et 882 de M. Michel Vialay sont défendus.
Dans la seconde série d’amendements identiques, l’amendement no 228 de M. Fabrice Brun est défendu.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 711. Après que nous avons abordé la question des secteurs d’activité et du calendrier, nous en venons à celle de la taille des entreprises. Alors que l’article 18 exclut du champ de la mesure d’exonération celles de plus de 250 salariés, nous vous proposons de ne pas prendre en compte ce critère et de permettre que la mesure s’applique quel que soit le nombre de salariés.
Si vous aviez précédemment retenu les amendements de M. Éric Woerth et du groupe Les Républicains visant à seulement prendre en compte la baisse d’activité de chaque entreprise, vous n’auriez pas besoin d’une approche par critères, qu’il s’agisse du secteur d’activité ou de la taille de l’entreprise. L’amendement no 1234 de M. Frédéric Descrozaille est défendu.
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1909. Il est identique à celui que vient de défendre Mme Louwagie. Le groupe UDI et indépendants soutient le principe de l’article 18. Je l’ai dit il y a de nombreuses semaines : je salue les initiatives prises par le Gouvernement pour soutenir l’économie de façon générale. Cela dit, notre travail de député consiste aussi à appeler l’attention du rapporteur général et du Gouvernement sur des secteurs qui auraient été oubliés ou sur des difficultés rencontrées sur le terrain.
Le plafond de 250 salariés est un problème. Tout d’abord, pendant la période de crise sanitaire, certains secteurs ont connu un arrêt total de leur activité. Je pense notamment au commerce de gros des viandes et son industrie, pour les entreprises spécialisées dans la restauration hors foyer et l’événementiel. Ces secteurs, dont les codes de la nomenclature d’activités française sont NAF 4632A et 1011Z, ont été oubliés. Nous voulons qu’ils soient intégrés dans la liste des secteurs dépendant des secteurs prioritaires – liste S1 bis. Ensuite la reprise ne s’effectue pas instantanément, elle est très molle.
L’amendement vise donc à réparer un oubli en permettant que les entreprises de plus de 250 salariés bénéficient du filet de sécurité que constituent les mesures d’exonération de l’article 18. Dernier amendement de cette série d’amendements identiques, l’amendement no 1917 de M. Paul Christophe est défendu.
Il en est de même des amendements nos 1623 et 1619 de Mme Pascale Fontenel-Personne.
Quel est l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements en discussion commune ? Avis défavorable. Il est important que nous ciblions bien les entreprises de type PME. Je sais bien que les 250 salariés ne sont qu’un seuil possible pour les qualifier – la définition communautaire est par exemple plus large puisqu’elle prend en compte le chiffre d’affaires et le total du bilan –, mais nous avons fait au plus simple en ne retenant que ce critère.
Il me semble nécessaire de conserver ce plafond. Je note d’ailleurs des positions contradictoires : vous défendez, d’un côté, certains amendements qui limitent aux entreprises de moins de 10 salariés le bénéfice de plusieurs de vos propositions d’exonération, et, de l’autre, vous voulez supprimer le plafond de 250 salariés.
Nous pouvons collectivement nous mettre d’accord sur le fait que les PME doivent être les cibles prioritaires de mesures de soutien proposées à l’article 18.
Monsieur Benoit, vous avez raison, il faut alerter sur les secteurs d’activité qui auraient pu être oubliés. Nous en parlions hier : Mme Bergé évoquait, pour ce qui concerne l’événementiel, de métiers souvent oubliés ou périphériques, comme celui des guides. Il revient au pouvoir réglementaire de réparer ces oublis, et nos échanges doivent le permettre.
Votre amendement ne comporte pas de code NAF, pas plus que les autres. Je le prends donc comme un amendement d’appel pour que l’on s’assure que les secteurs concernés soient pris en compte.
J’ajoute que je soutiendrai un amendement visant à opérer un suivi fin et exhaustif de tous les codes NAF inscrits dans les listes S1 et S1 bis, listes que le Gouvernement transmettra à la représentation nationale par l’intermédiaire du président et du rapporteur général de la commission des finances. Il s’agit d’être totalement transparent sur la façon dont ces listes sont dressées. Chacun pourra vérifier que tous les secteurs d’activité qu’il considère objectivement comme devant appartenir aux listes S1 et S1 bis y figurent bien. Quel est l’avis du Gouvernement ? Le Gouvernement a le même avis défavorable, pour les mêmes raisons. Nous souhaitons un dispositif le plus ciblé possible. La parole est à M. Charles de Courson. Je m’interroge sur le plafond de 250 salariés au regard du seuil communautaire d’autorisation des aides d’État. J’ai fait un petit calcul : si l’on considère une entreprise de 250 salariés et un salaire brut mensuel moyen de 3 000 euros, on obtient une masse salariale de 750 000 euros, ce qui signifie qu’avec une cotisation salariale d’environ 40 %, l’exonération peut atteindre 300 000 euros par mois. Autrement dit, sur la période, vous percutez le seuil communautaire. Une notification à Bruxelles deviendrait donc obligatoire. Comment tout cela s’articule-t-il ? La parole est à M. Thierry Benoit. J’ai bien noté la volonté de transparence exprimée par le rapporteur général et le ministre délégué s’agissant de l’insertion de codes NAF dans les listes S1 et S1 bis. C’est important, de même que la grande vigilance et l’attention extrême qu’ils porteront aux secteurs sensibles évoqués.
Je suis plus inquiet pour les entreprises familiales. Député de Bretagne, je pense à des outils industriels comme des abattoirs, des ateliers de découpe ou transformation. Je sais qu’ils sont en grande difficulté et que leur inquiétude est forte. J’imagine très bien ce qu’il peut se passer au mois de septembre ou d’octobre. C’est pour cela que j’insiste et que j’appelle votre attention sur le plafond des 250 salariés. Il y a, en Ille-et-Vilaine ou dans les Côtes-d’Armor, des entreprises familiales qui sont des ateliers de proximité dans lesquels travaillent 280 ou 300 salariés. Ce tissu industriel est précieux et j’aimerais que le Gouvernement examine la question du plafond de 250 salariés avec la plus grande attention. La parole est à M. le ministre délégué. Monsieur Benoit, je répète que le Gouvernement est particulièrement attentif à ce sujet. Nous serons vigilants.
Monsieur de Courson, j’espère pouvoir vous rassurer. Nous avons bien conscience qu’au-delà de 800 000 euros par entreprise, une notification est obligatoire. Mais si un plafonnement est nécessaire pour sécuriser le dispositif, nous ne sommes pas obligés de l’inscrire dans la loi, il peut figurer dans un décret.
Vous estimez que le seuil risque d’être atteint assez rapidement : permettez-moi de relativiser cette appréciation. L’entreprise de 250 salariés que vous prenez en exemple aurait atteint le niveau d’exonération que vous évoquez à condition que la totalité des salariés aient maintenu leur activité. Or notre dispositif est destiné aux entreprises qui, ayant connu des chutes d’activité très importantes, ont dû avoir recours au chômage partiel qui ne donne pas lieu à cotisations. En conséquence, le risque d’atteindre le seuil qui nous obligerait à une notification est réduit. Il n’y aura aucun cas ? Je ne sais pas combien il y en aura. Nous travaillons encore sur le sujet avec le SGAE de manière à le sécuriser. Nous avons la possibilité, si cela était nécessaire, d’avoir recours à un texte réglementaire. (Les amendements identiques nos 439 et 882 ne sont pas adoptés.) (Les amendements identiques nos 228, 711, 1234, 1909 et 1917 ne sont pas adoptés.) (Les amendements nos 1623 et 1619, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Jacques Cattin, pour soutenir l’amendement no 1585. De nombreux députés comptent des communes touristiques dans leur circonscription. Depuis le déconfinement, l’activité des magasins de souvenirs est profondément touchée par le faible nombre de touristes, même dans les destinations habituellement très fréquentées. Je connais un magasin employant cinq salariés dont le chiffre d’affaires, qui est généralement de 1 000 euros en juin, est tombé à 50 à 100 euros par jour le mois dernier. Vous conviendrez qu’il y a un problème !
Il est plus que normal que ces commerces soient pris en compte dans le plan tourisme – c’est l’objet de mon amendement. Avec une clientèle composée à 95 % de touristes, ils sont les vitrines de nos produits régionaux et de l’artisanat local.
Je remercie les nombreux députés de différentes sensibilités politiques qui ont cosigné mon amendement. Quel est l’avis de la commission ? Nous avons déjà débattu de ce sujet en commission. Je vous avais rejoint pour dire que la question est d’importance. Nous sommes bien dans la situation que nous évoquions avec M. Thierry Benoit : le risque est qu’il y ait des « trous dans la raquette ». Il faut faire attention à ce que ces magasins de souvenirs, dépendants du secteur du tourisme, soient bien inscrits dans la liste des secteurs prioritaires ou dans celle des secteurs qui en dépendent.
Comme je l’ai dit au début du débat sur l’article, ce genre de situations exige des mesures non législatives, mais réglementaires ; je me tourne donc vers le Gouvernement pour m’assurer que le type de magasins correspondant au code NAF que vous citez dans l’exposé sommaire est bien inclus dans le dispositif, comme cela devrait être le cas. Je vous rejoins sur la nécessité de les rendre éligibles à l’exonération de charges sociales. Si les éclaircissements du Gouvernement montrent que l’amendement est satisfait, j’en demanderai le retrait. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je confirme d’abord que dans l’exemple que vous citez, si l’entreprise emploie cinq salariés et qu’elle a fait l’objet d’une obligation de fermer pendant la période de confinement, elle est éligible au dispositif d’exonération de charges, qui va jusqu’à dix salariés pour les entreprises fermées par décision administrative, quel qu’en soit le secteur d’activité, dès lors qu’elles ont été mentionnées dans le décret du 15 mars.
Pour ce qui est du code NAF, nous serons vigilants et veillerons à ce que les magasins de souvenirs dont l’activité est liée au tourisme soient bien couverts et accompagnés. Nous travaillerons à la fois sur le décret et sur la doctrine car un même code NAF peut regrouper des activités très différentes. Parmi les magasins de souvenirs, certains sont intimement liés à l’activité touristique ; d’autres – nous pouvons tous en convenir – le sont beaucoup moins. Nous ferons très attention à ce point. Retirez-vous l’amendement, monsieur Cattin ? Si je le retire, il faut que ma préoccupation soit prise en compte ! La parole est à M. le président de la commission des finances. Je voudrais redire à quel point le débat que provoque M. Cattin est important. Dans la mesure où certaines activités seront forcément laissées de côté, le dispositif a un aspect absurde et donc injuste ; il aurait mieux valu prévoir une « voiture-balai », pour un niveau équivalent de coûts. Tout lister, c’est une méthode typiquement française : si on est sur la liste, c’est bien ; si on n’y est pas, c’est un problème, alors on organise le rattrapage en créant des exceptions pour ceux qui ne sont pas sur la liste. Honnêtement, vous avez choisi un drôle de procédé ! Madame Ménard, j’ai cru comprendre que vous ne souhaitiez pas que l’amendement soit retiré. Vous avez la parole ! Je remercie M. Cattin pour avoir déposé l’amendement – que j’ai cosigné –, et M. le rapporteur général et M. le ministre délégué pour s’être montrés compréhensifs. Je vous appelle à la vigilance car depuis le dépôt de l’amendement, nous avons été plusieurs fois interpellés par un collectif des commerces de souvenirs qui perçoit le fait de ne pas faire partie du dispositif d’aide comme une injustice incompréhensible. Comment peut-on retenir les offices de tourisme et non les boutiques de souvenirs, qui vivent à 95 % des achats de touristes, principalement étrangers ? Plus les touristes viennent de loin, plus ils restent longtemps dans la région, et plus ils achètent des souvenirs. Ce n’est évidemment pas l’habitant local qui ira acheter le mug avec le dessin de la cathédrale ou de l’abbaye ! Il est vraiment important de rendre ces commerces éligibles à l’exonération. (L’amendement no 1585 est retiré.) La parole est à M. Bertrand Bouyx, pour soutenir l’amendement no 618. Il vise à inclure dans les dispositifs de soutien les entreprises publiques locales, qui participent à la vie de nos territoires et de nos offices de tourisme. Quel est l’avis de la commission ? L’amendement est satisfait puisqu’il n’y a aucune distinction de nature juridique entre les entreprises que vous citez et les autres ; elles seront donc pleinement éligibles. Je propose le retrait. (L’amendement no 618, ayant reçu un avis défavorable du Gouvernement, est retiré.) Je suis saisi d’une série d’amendements identiques.
L’amendement no 230 de M. Fabrice Brun est défendu.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 363. Il vise à étendre à l’agriculture l’exonération de charges que vous proposez à l’article 18. Comme vous le savez, l’ensemble du secteur a été fortement touché par la crise ; c’est en particulier le cas de la production fromagère et laitière. Je pense aux fromages d’appellation d’origine protégée – AOP – et d’indication géographique protégée – IGP –, au camembert et au beaufort. Très affectés par la crise, les producteurs ont subi des pertes de recettes importantes et vivent une situation compliquée. Pour se relancer, la filière a besoin d’accompagnement. C’est pourquoi nous proposons, par le présent amendement, d’étendre le bénéfice de l’exonération aux productions agricoles, notamment à la filière laitière et fromagère AOP. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 702. Il est identique à celui de ma collègue Bonnivard. Aux termes de l’article 18, tel qu’il est rédigé, l’agriculture ne fait pas partie des secteurs bénéficiaires ; or les producteurs de lait et de fromages AOP sont en difficulté car il s’agit de produits périssables et impossibles à congeler. Cette filière a déjà subi beaucoup de préjudices et il est important de la soutenir. Elle n’est pourtant pas retenue dans les listes S1 et S1 bis. L’amendement propose de faire bénéficier l’agriculture des exonérations de cotisations sociales. L’amendement no 780 de Mme Frédérique Lardet est défendu.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 1066. À l’instar d’autres collègues, notre groupe a déposé le présent amendement – dont nous avons discuté hier – pour appeler l’attention sur la situation très hétérogène dans l’agriculture, notamment dans la viticulture. En effet, les producteurs ont continué à travailler, mais ils ne peuvent plus vendre certains produits ; c’est en particulier le cas des produits viticoles, ce qui pose problème aux vignerons indépendants.
Monsieur le ministre délégué, vous nous aviez promis qu’on résoudrait le problème grâce à un amendement que vous déposeriez ce matin, mais si j’ai bien compris, il est encore en gestation. Pourriez-vous nous en dire un peu plus ? Nous serions prêts à retirer notre amendement au profit du vôtre. La gestation, avez-vous expliqué, est un peu lente, mais vous ne désespériez pas d’avoir un bel enfant en fin de matinée ou en début d’après-midi… Un accouchement au forceps ! L’amendement no 1067 de Mme Gisèle Biémouret est défendu.
La parole est à M. M’jid El Guerrab, pour soutenir l’amendement no 1189. Étant du Cantal, je ne peux pas éviter de parler d’agriculture ! Le secteur agricole a été sévèrement touché par la crise sanitaire, certains métiers ayant souffert du confinement. La mobilisation du secteur a été exceptionnelle et a permis d’éviter toute situation de pénurie. Il convient de rendre grâce à nos agriculteurs en leur permettant de bénéficier de cette exonération. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour soutenir l’amendement no 1365. Avec l’amendement de mon collègue Sébastien Jumel, nous proposons d’intégrer l’agriculture, plus particulièrement la filière laitière, au plan de soutien exceptionnel et aux mesures d’allégement de cotisations – même si d’autres secteurs, comme la viticulture, sont également à retenir. Durant la crise et encore aujourd’hui, la filière laitière a fait face à une situation sans précédent : les producteurs ont dû consentir des arrêts de fabrication et de collecte dans près d’une vingtaine de filières d’appellation ; 10 % des producteurs se sont retrouvés en situation de grande détresse ; la moitié des filières AOP et IGP ont d’ores et déjà dû recourir à des dons alimentaires pour éviter de jeter leurs produits. En effet, la vente de fromages, notamment à la coupe, a plongé de près de 60 % au plus fort de la crise.
Les difficultés persistent aujourd’hui avec la baisse prolongée du prix du lait. Au sein de la filière laitière, les productions sous signe de qualité et d’origine sont allées jusqu’à opérer des destructions de produits face à la perte de débouchés. L’avenir des fromages normands, si chers à mon collègue Sébastien Jumel – le camembert, le livarot, le neufchâtel ou encore le pont-l’évêque – est particulièrement fragilisé ; près de 1 000 tonnes de fromage sont encore menacées de destruction à court terme si aucun débouché n’est trouvé.
Sans bénéficier d’un soutien franc de l’Union européenne, la filière s’est résignée à constituer des stocks de lait écrémé en poudre et de beurre, avec pour corollaire la baisse durable des cours. Ce stockage massif interroge également sur la capacité d’écoulement dans les mois à venir.
Confrontée à l’assèchement des débouchés, la filière laitière a conduit une opération de réduction volontaire de la collecte de lait en contrepartie de la création d’un système d’indemnisation professionnelle – un fonds d’indemnisation doté de 10 millions d’euros et financé à 75 % par les producteurs. Dans ce contexte, le ministre de l’agriculture et de l’alimentation s’était engagé à soutenir les fromages sous signe de qualité, annonçant que la filière laitière serait éligible, dans ce nouveau PLFR, aux exonérations de cotisations. Bien qu’insuffisante pour compenser les besoins réels des acteurs, cette annonce de compensation était attendue par la filière. La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 1482. Il s’agit, comme l’ont dit les collègues, de rendre les productions agricoles sous signe de qualité éligibles aux exonérations de cotisations sociales. La parole est à M. Jacques Cattin, pour soutenir l’amendement no 1740. Le 9 juin dernier, le ministre de l’agriculture s’était engagé à soutenir l’éligibilité de la filière agricole. Les producteurs de fromages sous signe de qualité étant souvent de très petites structures familiales, il serait bon de leur permettre de bénéficier des exonérations. La parole est à Mme Patricia Lemoine, pour soutenir l’amendement no 1794. Notre groupe a également déposé un amendement pour soutenir le secteur agricole. Je ne reviendrai pas sur les arguments déjà évoqués, considérant l’amendement défendu. Excellent ! La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 1984. Le 9 juin dernier, lors des questions au Gouvernement, M. Didier Guillaume, alors ministre de l’agriculture et de l’alimentation – il n’a pas été récompensé pour son engagement ! –, avait affirmé sa volonté de soutenir les fromages sous signe de qualité et annoncé que dans le cadre du nouveau PLFR, la filière laitière serait éligible aux exonérations de cotisations. Cette annonce était très attendue par la filière qui a l’impression, malgré l’engagement ministériel de début juin, d’avoir été mise de côté, alors même que la perte de rémunération des producteurs est évaluée à environ 17 millions d’euros. Le présent amendement permettrait d’y remédier. L’amendement no 2055 de Mme Fannette Charvier est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements identiques ? Après le cas du BTP, arrêtons-nous sur celui de l’agriculture afin d’expliquer pourquoi il est cohérent que certains secteurs d’activité entrent dans le champ d’application de l’article 18 et d’autres non.
L’objectif est de rester cohérent. Les exploitations agricoles n’ayant pas été fermées administrativement, il est normal qu’elles ne soient pas intégrées dans la liste S1 – je n’aime pas trop le terme de secteur « prioritaire », qui laisserait à penser que l’agriculture n’est pas un secteur prioritaire alors qu’elle est évidemment l’une de nos priorités, une activité sur laquelle nous comptons pour relancer notre économie. Si elle ne figure pas dans la liste S1, c’est parce que les exploitations agricoles n’ont pas fermé – je crois que tout le monde sera d’accord sur ce point.
Plusieurs secteurs d’activité liés à l’agriculture ou à la viticulture sont en revanche inclus dans la liste S1 bis des secteurs dépendant des activités listées en S1 : culture de la vigne, vinification, fabrication de cidre et de vins de fruits, fabrication de bière, fabrication de malt, production de fromages sous appellation d’origine contrôlée ou indication géographique protégée – AOP et IGP –, horticulture. Ces secteurs agricoles dépendants pourront bénéficier d’une exonération de charges sociales en cas de baisse substantielle de leur chiffre d’affaires – évaluée pour l’instant à 80 %. C’est trop ! Les autres pourront toujours bénéficier de remises de dettes et de plans d’apurement, dans les conditions définies par l’article 18. En commission, nous avons d’ailleurs élargi aux indépendants et aux travailleurs non salariés agricoles, la possibilité de demander des remises de dette.
Le secteur agricole n’est donc pas oublié par l’article 18, mais il est traité de manière cohérente avec les dispositions prévues dans cet article, notamment en matière d’exonérations de charges.
Pour le reste, l’agriculture n’a évidemment pas été mise de côté pendant cette crise, plusieurs plans ayant complété les dispositifs de droit commun : soutien aux filières viticole, horticole et laitière, dont nous avons parlé lors de l’examen des derniers projets de loi de finances rectificative ; aides aux produits laitiers et à la viande afin de répondre notamment à la question des stocks ; soutien à la main-d’œuvre – je ne reviens pas sur la plateforme « Des bras pour ton assiette ».
Soyons clairs : depuis le début de la crise, l’agriculture est au cœur des préoccupations du Gouvernement et de la majorité. Il n’y a eu en la matière aucun oubli et aucune mise de côté.
Je suis donc défavorable à ces amendements, par souci de cohérence : comme le BTP, l’agriculture ne peut pas être intégrée dans la liste S1, mais il en est fait mention dans la liste S1 bis, dans le cadre des critères fixés. Les secteurs énumérés dans cet article pourront ainsi bénéficier des 4,5 milliards d’euros d’exonérations de charges prévues, sans que soit mise en péril la faisabilité de cette volonté politique. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je ne vais pas revenir sur notre volonté de préserver la cohérence du dispositif – volonté que partage M. le rapporteur général. J’insisterai plutôt sur les secteurs intégrés dans la liste S1 bis.
Nous avons pris cette précaution pour couvrir par le dispositif d’exonérations les acteurs de l’agriculture dont une majorité de clients a été littéralement empêchée de réaliser son activité : par exemple, ceux qui travaillent uniquement ou quasi exclusivement avec l’hôtellerie ou avec la restauration privée ou collective. Ceux-là ont pu voir disparaître l’essentiel de leurs débouchés, du jour au lendemain, du fait de la fermeture administrative des entreprises de leurs clients.
D’autres producteurs agricoles – et c’est tant mieux ! – ont été beaucoup moins affectés par la crise, voire ne l’ont pas été du tout, parce que les modes de commercialisation de leurs produits sont très différents de ceux que je viens d’évoquer.
Nous avons donc voulu inscrire les secteurs affectés dans la liste S1 bis, et non pas allonger la liste S1, afin de bien accompagner ceux d’entre eux qui ont été les plus touchés par la crise.
Pour les mêmes raisons que M. le rapporteur général, je suis défavorable à ces amendements identiques. La parole est à M. le président de la commission des finances. Encore une fois, vous construisez un monde artificiel : pour figurer sur la liste S1 bis, il faut vraiment avoir subi une très forte baisse du chiffre d’affaires. 80 % ! Les collègues présents considèrent-ils qu’un recul de 50 % est une très forte baisse ? Dans un monde normal, sans doute. Dans le vôtre, il faut un recul de 80 %, c’est-à-dire presque une réduction ultime du chiffre d’affaires. Autant dire juste avant la mort ! C’est un débat absurde, en total décalage avec les réalités. La parole est à M. Philippe Gosselin. Le président Woerth montre bien toute la difficulté de ce fractionnement entre les listes S1 et S1 bis.
Sur le papier, le fait d’être inclus dans la liste S1 bis peut paraître favorable aux activités agricoles que vous avez mentionnées. Je ferai toutefois deux objections : d’abord, cela ne concerne que certaines activités, alors que toute l’agriculture souffre, notamment la filière laitière ; ensuite, avec le critère retenu pour être éligible – une baisse de 80 % du chiffre d’affaires –, on n’est plus dans le sauvetage, on fait à peine de la réanimation pour accompagner vers une forme de mort quasi certaine.
Sachant qu’une baisse de 50 % du chiffre d’affaires perturbe déjà énormément une entreprise, le critère d’une baisse de 80 % ne tient pas la route. Il faut que vous entendiez cette demande, conforme aux propos tenus par le ministre de l’agriculture dès le 9 juin, et qui correspond à une attente très forte du monde agricole, du monde rural ainsi que de nos concitoyens. La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne. Quand j’entends qu’on ne serait pas éligible à ce dispositif si on n’a pas subi une baisse d’au moins 80 % de son chiffre d’affaires, je me dis que ce n’est pas sérieux. Pensez-vous qu’un producteur de fromage, par exemple, qui a perdu 50 %, 60 % ou 70 % de son chiffre d’affaires n’est pas affecté par la crise ? Le nouveau monde est vraiment loin du vrai monde ! La parole est à Mme Émilie Bonnivard. Ce projet de loi de finances rectificative, où figurent les exonérations de cotisations, a suscité beaucoup d’attentes : les acteurs de tous les secteurs économiques nous interrogent presque tous les jours à son propos. Or il risque de provoquer chez eux une réelle déception.
Comme mes collègues, je m’étonne du niveau de perte de chiffre d’affaires exigé pour être éligible au dispositif. J’ignore quel sera le nombre de bénéficiaires au total, mais je pense qu’il y aura un décalage très net entre la communication et les effets réels sur la filière agricole.
À cette occasion, j’appelle votre attention sur les effets violents de l’évolution des aides liées à la politique agricole commune, la PAC, au cours des années à venir : baisse de 10 %, dès l’année prochaine, de toutes les aides surfaciques du premier pilier : baisse de 25 % du financement des mesures du second pilier. Comment notre agriculture va-t-elle tenir dans ce contexte de crise, de baisse des productions, de contraction des marchés et, dès l’année prochaine, d’incertitude absolue concernant le budget de la PAC, qui lui permet de fonctionner ? La parole est à M. Charles de Courson. Monsieur le ministre, vous ne voulez pas – hélas !, allais-je dire – inscrire le taux de 80 % dans la loi, mais vous serait-il possible, par voie réglementaire, de prévoir une exonération totale de charges lorsque la baisse du chiffre d’affaires est supérieure à 80 % et de créer une deuxième tranche, d’exonération dégressive, à partir de 50 % ou 60 % de baisse ? Tel que rédigé, le texte vous permettrait-il de faire cela par voie réglementaire ? La parole est à M. Michel Castellani. En appui aux amendements déposés par mes collègues Acquaviva, Dubié et Lassalle, je tiens à souligner les difficultés considérables d’application de ce texte.
Nous parlons ici d’un secteur structurellement en crise, dans lequel des dizaines de milliers de personnes souffrent tous les jours dans leur entreprise et ont des revenus dérisoires. Je voudrais dire un mot de soutien à tous les éleveurs, à tous les producteurs agricoles, qui sont indispensables à la vie quotidienne de chacun d’entre nous et dont on connaît les conditions sociales extrêmement dégradées.
Prendre en considération une perte de 80 % des revenus, pour une grande partie de ces exploitations, ça n’a aucun sens ! La parole est à M. le rapporteur général. Revenons sur ce seuil de perte de chiffre d’affaires, afin que l’on ne tire pas de notre débat une conclusion qui serait contraire à l’objet de l’article.
L’article 18 est nécessaire et bienvenu, nous sommes tous d’accord là-dessus. Il est excellent ! Nous sommes d’accord avec l’ouverture qui est faite ! Par facilité ou sécurité, on aurait pu s’en tenir à la liste S1 : ceux qui, ayant fermé, n’ont pas pu travailler sont exonérés de charges. Au moment de la construction du texte, ce point a fait débat ; j’ai pour ma part insisté pour que soient inclus les secteurs dépendants, selon le principe de la chaîne de valeur, de ceux qui ont fermé. Très bien ! Puisque les cafés ont fermé, les viticulteurs qui vendent aux cafés doivent être aidés de la même manière. Par ricochet ! Très bien ! Il convenait donc de caractériser la notion de dépendance. C’est pourquoi nous avons fixé le seuil à une baisse de 80 % du chiffre d’affaires. Peut-il être abaissé un peu ? Oui !