XVe législature
Session extraordinaire de 2019-2020

Séance du mercredi 08 juillet 2020

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la seconde partie du projet de loi de finances rectificative pour 2020 (nos 3074, 3132).
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement no 87 portant article additionnel après l’article 17, examiné par priorité.
Monsieur le président, je demande une suspension de séance. La séance est suspendue pour cinq minutes.
(La séance, suspendue à vingt et une heures trente, est reprise à vingt et une heures trente-cinq.) La séance est reprise.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 87. Il est défendu, monsieur le président. Mes collègues auront l’occasion d’y revenir. La parole est à M. Laurent Saint-Martin, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission. Il est défavorable. La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics. Même avis.
(L’amendement no 87 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 708. Cet amendement concerne les mécanismes de participation et d’intéressement, lesquels doivent être favorisés – nous serons tous d’accord sur ce point. Certains dispositifs ont déjà été revus, à l’instar du forfait social, qui est onéreux pour les entreprises et ne favorise pas le recours à l’intéressement et à la participation. C’est pourquoi je vous propose, par cet amendement, de le supprimer pour les entreprises de moins de 250 salariés.
Il conviendrait également d’adopter un mécanisme de simplification, car je vous rappelle que le forfait social fait l’objet de quatre taux différents ; les entreprises peinent donc à s’y retrouver. En effet, le taux de base s’élève à 20 % ; un taux de 16 % s’applique à certains versements alimentant des plans d’épargne pour la retraite collectifs – PERCO ; un taux de 10 % existe depuis le 1er janvier 2019 pour les entreprises de moins de cinquante salariés ; et un taux de 8 % s’applique à la réserve spéciale de participation dans les sociétés coopératives et participatives de moins de cinquante salariés.
Je vous propose donc de simplifier les choses et de promouvoir l’intéressement et la participation en supprimant le forfait social pour les entreprises de moins de 250 salariés.
Quel est l’avis de la commission ? Le produit du forfait social s’élève tout de même à plus de 5 milliards d’euros ;… Ce n’est pas mal ! …il conviendra de s’en rappeler lorsqu’il nous faudra financer l’ensemble des mesures de soutien à l’économie. Grâce à la loi PACTE – loi relative à la croissance et la transformation des entreprises –, nous avons renforcé de manière assez satisfaisante l’attractivité de l’intéressement et de la participation.
Je suis néanmoins d’accord avec vous s’agissant de la nécessité d’accroître encore et toujours la participation, l’intéressement et, de manière générale, l’actionnariat salarié pour un meilleur partage de la valeur ; ici réside probablement l’entreprise de demain. Beaucoup de progrès restent à accomplir en la matière, mais nous suivons le bon chemin et la loi PACTE constitue une étape importante. Je demande donc le retrait de l’amendement. À défaut, je donnerai un avis défavorable.
(L’amendement no 708, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) Je suis saisi de trois amendements, nos 1115, 1618 et 1764, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1115 et 1618 sont identiques.
La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l’amendement no 1115.
Il a trait à la suppression de la C3S – contribution sociale de solidarité des sociétés –, que nous avons évoquée cet après-midi, et que le groupe Les Républicains a proposée au travers d’amendements lors de l’examen des trois derniers projets de loi de finances. Il faut bien quelques recettes ! Nous pensons en effet qu’il convient de baisser les impôts de production, car, comme vous le savez, ceux-ci expliquent une bonne part du manque de compétitivité de l’industrie française, notamment vis-à-vis de l’industrie allemande, et de l’écart de niveau des prélèvements obligatoires sur les entreprises entre les deux pays. En bref, les impôts de production sur le chiffre d’affaires sont évidemment des impôts à supprimer.
Nous vous avions proposé de ne pas supprimer la taxe d’habitation, mais plutôt les impôts de production ; vous avez choisi de faire l’inverse. Désormais, comme c’est tous les jours Noël, vous allez certainement les supprimer. Toutefois, je ne vois pas très bien comment vous pourrez financer cette mesure, mais je suis sûr que vous nous l’expliquerez en détail.
Quoi qu’il en soit, la suppression de la C3S est absolument indispensable. En outre, elle est plus facile à mettre en œuvre que la suppression des autres impôts de production, qui représentent autant de ressources pour les collectivités locales. Le cas échéant, il faudrait en effet conduire une réforme de la fiscalité des collectivités dans son ensemble, chose que vous n’avez pas faite, mais qu’il conviendra de réaliser prochainement.
J’ai également déposé un amendement de repli, le no 1764, qui doit être examiné peu après et qui vise à augmenter le montant de l’abattement sur la C3S. Vous le savez, celui-ci s’élève actuellement à 19 millions d’euros ; nous proposons de le porter à 30 millions d’euros.
L’amendement no 1618 de M. Emmanuel Maquet est défendu ; l’amendement no 1764 vient de l’être.
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ?
Je n’adhère pas vraiment à votre idée de comparer ou d’opposer la taxe d’habitation et la C3S : la première touche les ménages, lorsque la seconde s’impose aux entreprises. Certes, les collectivités se trouvent au milieu, mais ces deux impôts ne poursuivent pas le même objectif. La suppression de la taxe d’habitation est une mesure de pouvoir d’achat pour 80 % et bientôt 100 % des Français, et je crois qu’ils l’ont ressentie dans leur budget annuel, ce qui est heureux. Il s’agissait d’une promesse de campagne, elle a été tenue, et il n’y avait aucune raison de faire différemment de ce que nous avions annoncé aux électeurs.
En revanche, les impôts de production sont une question importante pour notre compétitivité et notre souveraineté, ou du moins pour la relocalisation des entreprises. Il est vrai que nous taxons trop haut dans le compte de résultat avant le bénéfice ; nous sommes d’accord sur ce point, tout comme nous sommes nombreux dans cet hémicycle à partager la volonté de repenser les impôts de production. Et vous avez raison, monsieur le président de la commission des finances, le premier à revoir est la C3S. Les autres sont effectivement plus complexes à réformer, étant donné qu’ils concernent les collectivités territoriales et que cela nécessiterait, vous l’avez bien dit, de repenser l’ensemble des composantes de la fiscalité locale.
Il conviendra donc d’aborder cette question assez rapidement à la rentrée. La baisse des impôts de production constitue une très bonne piste de relance. Lorsque nous aurons remis nos entreprises sur pied, par quelle mesure fiscale pourrons-nous leur permettre de redémarrer ? En nous attaquant à la C3S. C’est en tout cas mon souhait en tant que rapporteur général et je crois que le Gouvernement entend également y travailler. Nous étudierons sa proposition lorsqu’elle sera déposée au Parlement et nous aurons alors tout loisir de débattre de la question pour, je l’espère, adopter quelque chose d’audacieux. En attendant, je demande le retrait de ces amendements.
Très bien ! C’est très clair ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Mon avis est très similaire à celui du rapporteur général. Nous menons une réflexion sur les impôts de production dans le cadre de la préparation du plan de relance. Je suis d’accord avec vous sur un point, monsieur le président de la commission des finances : la C3S est certainement l’impôt de production le plus facile à modifier, dans la mesure où il ne sera pas nécessaire de compenser les pertes de recettes des collectivités locales, comme nous avons dû le faire pour la taxe d’habitation. En revanche, je souscris aux arguments du rapporteur général : il nous paraît prématuré d’acter quoi que ce soit dans le présent PLFR. Je demande donc le retrait des amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable. La parole est à M. le président de la commission des finances. Le présent texte est de toute façon décalé par rapport aux réalités : au mois de juillet, alors que la crise nous touche depuis des mois, il devrait s’agir d’un plan de relance. Autrement dit, nous devrions aller beaucoup plus loin que ne le prévoit ce troisième PLFR.
On le voit d’ailleurs bien : vous hésitez sur toutes les mesures, vous les remettez à plus tard, alors que l’urgence est extrême. Nous ne pourrons jamais être d’accord avec votre calendrier. Vous avez fait passer des impératifs politiques avant les impératifs du pays, et je pense que vous avez commis une lourde erreur.

Bien évidemment, nous serons d’accord, par principe, avec certaines de vos mesures de relance. Mais que de temps perdu ! Pourquoi attendre autant, alors qu’en réalité, aucun plan social ne nous en laisse le temps ?
Je n’oppose pas la taxe d’habitation aux impôts de production. Je relève simplement que vous avez utilisé, voire obéré vos marges de manœuvre pour baisser la taxe d’habitation, au détriment de la productivité, alors que personne ne vous le demandait.
Oui, vous avez fait un choix ! Vous avez mené une politique de la demande, avant de mener une politique de l’offre, alors que c’est l’offre qui provoque la demande et déclenche l’augmentation des salaires. C’est ainsi que les choses fonctionnent, et vous êtes d’ailleurs plutôt d’accord avec cette analyse.
De vous à moi, personne ne vous demandait de baisser la taxe d’habitation.
Eh oui ! Personne ne vous demandait de supprimer le seul impôt qui maintenait encore un lien entre le contribuable et l’électeur local. Absolument ! C’était une erreur. Nous vous proposons de la réparer en supprimant la C3S. Puisque vous n’avez plus désormais de borne financière,… Provisoirement ! …profitez-en pour supprimer la C3S ! La parole est à M. Daniel Labaronne. Pour améliorer la compétitivité de nos entreprises, il est possible d’agir sur trois variables : le coût du travail, le coût du capital et les impôts de production. En matière de baisse du coût du travail, nous avons agi et obtenu des résultats. De même, nous avons pris des mesures tout à fait significatives qui ont permis de réduire le coût du capital. S’agissant des impôts de production, troisième étage de la fusée, il faut effectivement que nous menions une réflexion et que nous formulions des propositions, en nous inscrivant dans une démarche audacieuse, comme l’a préconisé le rapporteur général.
Grâce aux résultats que nous avons obtenus en matière de compétitivité-coût, notre économie est devenue très attractive pour les investissements directs étrangers. Comment expliquer sinon que la France soit devenue la première puissance européenne pour l’accueil de ces investissements ? Notre localisation, nos infrastructures publiques, la compétence de nos ingénieurs, la qualité de la formation reçue par les jeunes dans notre système éducatif y ont certes contribué, mais les mesures que nous avons prises pour diminuer le coût du travail et le coût du capital ont produit des résultats tangibles.
Et le commerce extérieur ? Ces résultats sont à la hauteur de ce que nous attendions, puisqu’ils ont permis la reprise de l’activité industrielle et des investissements directs étrangers dans notre économie. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz. Compte tenu de ce que je viens d’entendre, je ne comprends pas comment la France a pu obtenir de si mauvais résultats au premier trimestre. Nous devrions être les champions d’Europe en la matière ; or tel n’est pas le cas.
Je reviens sur l’histoire fiscale récente. En 2017 et 2018, vous avez augmenté fortement la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, la TICPE, qui porte notamment sur les carburants. Cela a suscité le mouvement des gilets jaunes. À ce moment-là, vous avez pris conscience que la pression sur les ménages était trop forte, et vous avez ressorti la baisse de la taxe d’habitation.
Le président Woerth a raison, c’est parce que vous avez pris cette mesure, qui coûtera 20 milliards en année pleine, que vous n’avez plus de marges de manœuvre. Aujourd’hui, la priorité est de réduire les coûts de production pour relancer l’économie. Or nous sommes à la traîne en la matière ; nous sommes très en retard sur les autres pays. Pourquoi l’Allemagne a-t-elle pris tous nos marchés ? Il y a bien une raison.

Vous dites que vous y penserez, monsieur le rapporteur général, mais il sera trop tard ! C’est maintenant que nous vous soumettons des mesures. Quand vous y viendrez, vous aurez beau jeu d’affirmer que c’est votre majorité qui en est à l’origine. Cela fait trois ans que nous vous proposons d’aménager la C3S, et nous ne céderons pas, parce que nous pensons que l’amélioration de la compétitivité de nos entreprises passe par là.
La parole est à M. Éric Coquerel. Nous assistons à un débat intéressant entre la majorité et une partie de l’opposition. Toutefois, celui-ci porte uniquement sur la position du curseur, car l’une et l’autre sont en réalité d’accord sur la logique.
Vous avez expliqué, monsieur Labaronne, que votre majorité avait réduit le coût du travail et le coût du capital. S’agissant du coût du travail, c’est exact, et vous n’avez d’ailleurs pas été les seuls à le faire, puisque cette politique est menée depuis trente ans, si bien qu’il y a un problème non pas d’offre, mais de demande et de pouvoir d’achat, entre autres. En revanche, vous n’avez pas fait baisser le coût du capital ; vous avez fait des cadeaux mirifiques au capital, ce qui n’est pas la même chose. Cela a d’ailleurs l’effet exactement inverse : lorsque l’on diminue le prix du travail et que l’on fait des cadeaux au capital, celui-ci coûte une partie croissante de la richesse produite, tous les chiffres le montrent.
Nous ne voterons pas ces amendements. Vous l’avez précisé, monsieur le président Woerth, le groupe Les Républicains a proposé la suppression de la C3S lors de l’examen des trois derniers budgets. Pour notre part, nous avons proposé à ces trois mêmes occasions le rétablissement de l’impôt de solidarité sur la fortune. À chacun ses critères…
Le moment est moins approprié que jamais pour baisser l’impôt sur les sociétés. Il est paradoxal de donner des milliards aux entreprises avec le dispositif de chômage partiel et les diverses aides, qui plus est sans aucune contrepartie, et d’expliquer dans le même temps qu’elles devraient payer moins d’impôts, alors que ceux-ci servent à financer les mesures prises en leur faveur… Les entreprises gagneraient à la fois au grattage et au tirage, si je puis dire !
Pour toutes ces raisons, nous ne pensons pas que la priorité soit d’améliorer encore et toujours la compétitivité et de réduire encore et toujours les impôts payés par les sociétés. Si vous poursuivez cette course vers le moins-disant fiscal, comme vous êtes en outre opposés aux déficits, il faudra bien que quelqu’un paie. Or ce sont les forces productives de notre pays qui paieront, les forces de travail, notamment les salariés.
La parole est à M. le rapporteur général. Vous relancez le débat sur la taxe d’habitation, monsieur le président Woerth. Qui a demandé de la supprimer ? Les Français ! Peut-être pas tous les Français, mais au moins les huit millions et demi d’électeurs qui ont voté pour Emmanuel Macron au premier tour de la présidentielle ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Pardonnez-nous de respecter nos promesses de campagne ! N’importe quoi ! Votre reproche est donc assez baroque, monsieur le président Woerth. Nous avons trouvé plutôt normal de faire, après l’élection, ce que nous avions promis aux Français. Mais sans doute suis-je encore trop jeune en politique… Avez-vous jamais été maire, monsieur le rapporteur général ? Par ailleurs, la question n’est pas de savoir si telle ou telle mesure fiscale favorise plutôt l’offre ou la demande. Sur le fond, nous sommes plutôt d’accord : nous partons nous aussi du principe qu’il faut d’abord restaurer l’offre et que nous ne sommes pas confrontés à une véritable crise de demande, même s’il convient probablement de stimuler le redémarrage de la consommation ; nous avons besoin d’une relance par l’offre. Vous êtes effectivement d’accord ! Pourquoi voulons-nous prendre des mesures fiscales ultérieurement ? Non pas pour pouvoir dire que nous avons eu raison, ni pour refuser toute mesure venant du groupe Les Républicains, mais pour faire les choses dans l’ordre.
Si vous n’avez pas remis les entreprises sur pied au préalable, les mesures fiscales que vous prendrez en leur faveur seront, j’en suis convaincu, inopérantes. Demander une baisse de la fiscalité des entreprises alors que la moitié d’entre elles sont encore à terre et ne savent même pas comment elles pourront maintenir leur niveau d’emploi jusqu’en septembre, cela relève du slogan.
Faire les choses dans l’ordre ne revient pas à traîner. Il est primordial de respecter les séquences de la vie économique, aussi bien celles de la crise que celles de la relance. Si nous mettons la charrue avant les bœufs, nous allons casser la reprise et empêcher la relance.
Il ne s’agit en aucun cas d’attendre la rentrée car ce serait plus malin politiquement – nous ne pouvons pas nous payer ce luxe ! Il s’agit tout simplement de prendre les mesures au bon moment pour qu’elles soient efficaces.
Enfin, quand bien même l’Assemblée adopterait l’un de ces amendements, les faits nous donneraient raison, car la C3S a déjà été payée pour l’exercice 2020, en mai dernier. La suppression de la C3S n’aurait donc d’effet qu’à compter de 2021 ; c’est une mesure de relance pour l’année n+1.
Pour toutes ces raisons, je maintiens mon avis défavorable.
(Les amendements identiques nos 1115 et 1618 ne sont pas adoptés.)
(L’amendement no 1764 n’est pas adopté.) La parole est à M. Éric Woerth, pour soutenir l’amendement no 1102. Il porte sur la question des jeunes. Nous l’avons déjà présenté, mais nous y revenons, car un jour, je l’ai dit à propos d’autres mesures, vous y viendrez. Vous êtes de nouveau d’accord ! On perd du temps ! Nous avons été les premiers, dès le mois d’avril, à diagnostiquer les difficultés qu’éprouverait toute une génération à entrer sur le marché du travail. Le Gouvernement a compris la situation, tardivement, et a fait des jeunes une priorité, ce dont nous ne pouvons que nous réjouir.
Il faut désormais des actes. Il ne suffit pas de modifier le montant des crédits consacrés à l’apprentissage. Il faut prendre des mesures bien plus fortes si l’on veut éviter que 800 000 jeunes aient des difficultés insurmontables pour entrer, d’une manière ou d’une autre, sur le marché du travail.

Comme nous l’avions fait en inscrivant à l’ordre du jour de la niche du groupe Les Républicains une proposition de loi dont Guillaume Peltier et moi-même étions les premiers signataires, nous vous proposons de mettre en place un dispositif « zéro charge » pour toutes les embauches de jeunes jusqu’à 2,5 SMIC – niveau inférieur à celui de 4,5 SMIC que vous avez retenu pour le dispositif de chômage partiel.

Il est indispensable d’agir en ce sens. On peut débattre de la nature de l’aide qu’il convient d’apporter aux entreprises, mais l’important est de baisser le coût du travail pour les inciter à embaucher des jeunes. Un jeune qui coûte moins cher a davantage de chances d’être employé ; c’est un principe de base.
Il y a donc différentes manières de procéder. Pour notre part, nous proposons d’exonérer ces entreprises de cotisations patronales.
Et le financement de la sécu ? J’entends l’argument selon lequel la quasi-disparition des cotisations au niveau du SMIC serait problématique. Toutefois, les jeunes ne sont pas tous embauchés au SMIC ; certains le sont avec un salaire plus élevé. On tire les salaires vers le bas ! Bruno Le Maire a déclaré que l’exonération pourrait porter sur les cotisations salariales. Grosso modo, une partie de l’écart entre le salaire net et le salaire brut resterait dans la poche des entreprises plutôt que de revenir aux URSSAF – unions de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d’allocations familiales. Pourquoi pas ? Il serait aussi possible de verser des primes au niveau du SMIC.
En tout cas, il nous faut une aide massive à l’emploi des jeunes. Vous adorez le terme « massif », puisque vous qualifiez ainsi tous vos plans de soutien. Pour une fois, créez une aide vraiment massive, en faveur de l’emploi des jeunes. Ne passez pas à côté de l’occasion ! Le bon moment pour prendre cette mesure, ce ne sera pas le mois de septembre, lorsque vous présenterez votre fameux plan de relance, c’est maintenant ! Peut-être un amendement sera-t-il déposé au Sénat, mais il viendrait bien tard.
Quel est l’avis de la commission ? Il convient effectivement d’adresser un message immédiat aux jeunes. Nous l’avons déjà fait, en partie. Nous avons prévu, dès le présent texte, des mesures qui visent à accompagner au mieux les jeunes, soit lorsqu’ils poursuivent leurs études, soit lorsqu’ils arrivent sur le marché du travail. Nous avons notamment augmenté les crédits consacrés à l’apprentissage.
Néanmoins, je suis d’accord avec vous, ces mesures sont nécessaires mais ne sont pas suffisantes. Il y aura donc bien un plan massif.

Vous proposez une exonération de charges sociales et la suppression de la C3S. C’est plutôt, on le sait, une exonération de charges qui est envisagée. Selon moi, de telles exonérations sont efficaces, nous sommes d’accord sur le fond. Cependant, le modeste rapporteur général du budget que je suis ignore à quel moment le Gouvernement proposera des mesures en ce sens.
Si vous l’ignorez, acceptez l’amendement ! Néanmoins, de telles mesures ont été annoncées, et nous savons que les entreprises pourront effectivement accorder la priorité à l’emploi des jeunes.
Je suis d’accord avec vous sur un autre point : il est nécessaire d’instaurer assez rapidement ces exonérations de charges. Je veillerai comme vous à ce que tel soit le cas. En attendant, je vous invite à retirer votre amendement.
Quel est l’avis du Gouvernement ? À propos de la taxe d’habitation, monsieur le président de la commission des finances, vous avez parlé de marges de manœuvre. S’agissant de l’emploi de jeunes, le débat est du même ordre : comment élaborer un plan de relance tout en affectant de la manière la plus efficace les moyens dont nous disposerons ? Nous travaillons précisément à cela, et c’est pourquoi, à ce stade, nous sommes défavorables aux amendements qui tendent à ajouter des exonérations de cotisations à celles qui existent déjà.
Nous continuons à avancer. Vous estimez que le plan de relance sera trop tardif si nous le présentons en septembre. Tel n’est pas mon sentiment : les dispositifs d’urgence et de résilience que nous avons mis en place, notamment l’accompagnement par l’activité partielle, nous permettront d’aller jusque-là et d’avoir le dispositif global le plus adapté. Je souscris aux arguments du rapporteur général et demande le retrait de l’amendement, au profit des mesures que nous préparons.
La parole est à M. Éric Coquerel. Monsieur le rapporteur général, dois-je rappeler que les cotisations patronales ne sont pas des charges?? C’est pourtant ce que je viens de vous entendre dire une fois encore. Il ne faut pas se laisser influencer par la novlangue libérale?! (Exclamations sur quelques bancs du groupe LaREM.) Ces cotisations patronales et salariales ont été créées, autrefois, au terme d’un accord conclu pour faire en sorte qu’une partie de la rémunération des salariés soit socialisée afin de financer des mécanismes de solidarité collective.
Cependant, M. Woerth pose une question intéressante : comment accueillir sur le marché de l’emploi les quelque 400?000 jeunes qui vont y arriver?? Nous, nous proposons de créer des sortes d’emplois-jeunes sur cinq ans rémunérés convenablement en CDI. Sans doute, ce n’est pas la panacée, mais ça peut être une solution temporaire. À partir du moment où l’État investit dans le service public ou dans l’éducation, il vaudrait mieux pour ces jeunes qu’il leur mette le pied à l’étrier. Ainsi, ils participeraient à l’effort national. Quant à vous, comme toujours, vous proposez des exonérations. Mais à force d’exonérer, il y aura de moins en moins d’argent pour le système social. Vous avez beau, tous, protester que vous ne voulez pas le détruire, à la longue, vous ne pourrez que finir par demander aux gens d’aller, comme aux États-Unis, prendre des assurances privées, soit pour le chômage, soit pour la sécurité sociale.
Les cotisations patronales ne sont pas de l’argent versé dans le tonneau des Danaïdes. Elles doivent au contraire servir, en cas de crise comme celle que nous traversons, à éviter que le pays ne plonge dans la pauvreté la plus totale…
Bien sûr ! …Votre idée, monsieur Woerth, je la connais : c’est toujours que le travail coûte trop cher. Vous avez votre logique, et vous avez compris que ce n’est pas la nôtre. S’il y a moins de cotisations patronales et salariales, et comme, par ailleurs, l’État ne compensera pas tout – il a commencé à le faire dans le dernier PLFSS –, on ne pourra que demander aux gens de se tourner vers les assurances privées. La parole est à M. Jean-Paul Mattei. L’article 17 concerne la taxe de séjour. Or nous parlons de bien des sujets très intéressants, mais qui mériteraient d’être abordés dans un texte beaucoup plus global. C’est ce que nous demandons, un texte global ! Nous côtoyons tous des entrepreneurs : ce qu’ils demandent, c’est de pouvoir reprendre leur respiration afin de rebondir, dans l’attente d’un vrai plan de relance. On a parlé de la C3S, qui ne concerne que certaines catégories d’entreprises, mais pas forcément les TPE-PME, qui ont elles aussi besoin d’exister. On a parlé de consolidation des fonds propres. On parle de tout, et on perd beaucoup de temps, alors qu’il reste plus de 840 amendements à examiner?! Nous ne pouvons pas continuer à discuter de tout sans cohérence. (M. Jean-Paul Dufrègne applaudit.) Il est vrai que nous attendons un plan de relance, mais ce n’est pas ce texte qui peut l’accueillir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM, ainsi que sur quelques bancs des groupes LaREM et Agir ens.) Des baisses de charges, encore des baisses de charges, toujours des baisses de charges ! La parole est à M. Arnaud Viala. Je ne souscris pas du tout à ces remarques de méthode. Nous discutons de la troisième modification de la loi de finances consécutivement à la crise que nous traversons et nous sommes en droit de nous interroger sur la manière dont les mesures que nous voterons cette semaine seront appliquées au mois de septembre. L’employabilité des jeunes diplômés est d’une actualité brûlante : nombreux sont déjà ceux qui ne trouvent pas d’emploi à cause de la situation économique, et tous les nouveaux diplômés qui arrivent sur le marché du travail n’en trouveront pas non plus. Relancer la machine économique, c’est permettre à cette génération d’être tout de suite employable en allégeant le dispositif des charges sociales et fiscales des employeurs qui choisissent d’embaucher un jeune. Vous connaissez l’entreprise ? C’est aussi, dans les difficultés que nous traversons, donner un signal à cette génération alors même qu’on est en train de charger sa barque avec tout ce qu’elle aura à payer dans les années à venir pour remettre le pays d’aplomb. Je ne crois donc pas que le débat de ce soir soit hors sujet. La parole est à M. le président de la commission des finances. Monsieur Mattei, nous sommes souvent d’accord, mais là, nous ne le sommes pas. On perd du temps ! J’imagine que vous considérez, comme moi, que les jeunes sont prioritaires, et qu’il faut à la fois aider à réembaucher des salariés qui sont au chômage partiel et à engager les jeunes qui viennent d’obtenir leur diplôme, et déclencher plus de croissance. Si l’une de ces deux conditions n’est pas remplie, ça ne marchera pas. Il faut un texte plus global ! Vous ne pouvez pas dire à des jeunes qui arrivent sur le marché du travail au mois de juillet qu’ils doivent attendre un texte qui sera présenté au mois de septembre et définitivement voté au mois de novembre. Vous ne pouvez pas faire ça?! Vous ne pouvez pas avoir un traitement inhumain de la crise ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) C’est pour cela qu’il faut des cotisations : sinon, ce sera inhumain !
(L’amendement no 1102 n’est pas adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 10, 77, 348 rectifié, 452, 577 rectifié, 676, 805, 1029, 1528 et 2245.
Les amendements nos 10 de M. Pierre Cordier, 77 de Mme Valérie Bazin-Malgras et 348 rectifié de M. Marc Le Fur sont défendus.
La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz, pour soutenir l’amendement no 452.
La Fédération française du bâtiment nous alerte, ayant constaté, lorsque les chantiers ont repris, que les équipements nécessaires à la protection des salariés entraînent un surcoût qui n’est pris en charge ni par le maître d’œuvre ni par le maître d’ouvrage, et que l’entreprise doit assumer seule. Or, en l’occurrence, il ne s’agit pas seulement d’acheter du gel et des masques, mais d’organiser la distanciation physique et de repenser tout le chantier. Cet amendement propose d’annuler le plafonnement de la déduction forfaitaire spécifique, la DFS, dans le calcul de l’allégement général des charges sociales. Je doute que cette mesure soit très onéreuse, mais ce serait un signal fort pour le bâtiment. La parole est à M. Arnaud Viala, pour soutenir l’amendement no 577 rectifié. Je crois en effet que le secteur du BTP a besoin d’un signe : il a été durement touché et a essayé, pendant toute la période du confinement, de continuer à travailler en se pliant à diverses contraintes. Rencontrant des difficultés à redémarrer les chantiers, en raison de l’inquiétude des salariés et des maîtres d’ouvrage, il a tout mis en œuvre pour le faire dans les meilleures conditions de sécurité. En outre, étant donné les difficultés que nous avons eues pour organiser les élections municipales, la commande publique est perturbée. Aujourd’hui, les arrangements sur la question des surcoûts se font de gré à gré entre donneurs d’ordres et entreprises, mais le code des marchés publics et l’environnement juridique ne permettent pas toujours que l’on trouve un accord, et certaines entreprises sont en péril. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 676. Cet amendement a pour objectif de soutenir le bâtiment, qui en a bien besoin.
Je voudrais revenir, cependant, sur l’emploi des jeunes. Monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre délégué, en raison des annonces que vous avez faites à retardement pour, peut-être, demain, encourager l’embauche des jeunes diplômés qui vont arriver sur le marché, aucune entreprise ne les engagera aujourd’hui parce qu’elles vont toutes préférer attendre les nouveaux dispositifs. C’est bien regrettable, et je vous invite à réfléchir à la question.
Ce n’est pas cela, la vie d’une entreprise ! La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 805. La mise en place des précautions sanitaires pour la protection des salariés sur les chantiers a conduit non seulement à une modification des modalités d’organisation du travail, mais surtout à des surcoûts de l’ordre de 10 à 20 %. Or ils n’étaient évidemment pas prévus lors de la signature des contrats et ils sont rarement partagés entre l’entreprise du bâtiment, le maître d’ouvrage et le maître d’œuvre. Cela fragilise les entreprises du BTP, qui sont par ailleurs confrontées à une forte baisse de la commande, qu’elle soit publique ou privée. Pour éviter la faillite des entreprises et des licenciements économiques, il est proposé de prendre en charge une partie des surcoûts liés à la crise du covid-19 en procédant à l’annulation du plafonnement de la prise en compte de la déduction forfaitaire spécifique dans le calcul de l’allégement général des charges sociales. Les amendements nos 1029 de Mme Sylvia Pinel, 1528 de M. Vincent Rolland et 2245 de Mme Marjolaine Meynier-Millefert sont défendus.
Quel est l’avis de la commission ?
Suspense ! Je ne peux pas laisser dire que le secteur du BTP n’ait pas été accompagné pendant cette crise… Nous n’avons pas dit cela ! …ou qu’il ait été lésé. Au-delà des mesures de soutien de droit commun, qui lui sont évidemment accessibles, il faut rappeler les avances sur marchés publics, le changement de trajectoire du gazole non routier – GNR –, ce qui était un geste fort, très attendu.
En ce qui concerne le plafond de la déduction forfaitaire spécifique, je ne crois pas que ces amendements apportent la bonne solution au problème. Ce plafond a été mis en place en 2018, pour des raisons tout à fait rationnelles et cohérentes, dans la loi de financement de la sécurité sociale. Aujourd’hui, vouloir déplafonner, c’est profiter de la sortie de crise pour revenir sur le dispositif, mais je ne crois pas que le problème du secteur du BTP soit celui de la trésorerie. Il a d’abord besoin d’activité et de marchés. Quand il aura les marchés, il aura en effet besoin de mesures concrètes et efficaces, d’allégements de charges ou de cotisations, de trésorerie, par exemple avec le changement de trajectoire du GNR. Je comprends l’intérêt corporatiste de ces amendements, mais déplafonner la DFS n’est pas la solution à cette crise. Avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Je ne reviens pas sur les mesures de soutien au secteur du BTP que le rapporteur général a rappelées. Je voudrais juste signaler que, au même titre qu’il existe des niches fiscales, il existe des niches sociales, et que la DFS en est une. Elles fonctionnent de manière très particulière.
Il ne s’agit pas d’un abattement sur les cotisations sociales versées par l’employeur ou par le salarié, mais d’un abattement d’assiette, ce qui a deux conséquences. D’une part, à salaire égal, les salariés travaillant dans un secteur bénéficiant de la DFS sont moins bien protégés, puisque les cotisations portent sur une assiette qui a fait l’objet d’un abattement et non sur leurs revenus réels. D’autre part, le point de sortie des allégements généraux, généralement fixé à 1,6 SMIC, dépasse ce montant. Par exemple, un salarié rémunéré 1,8 SMIC dans un secteur bénéficiant d’une DFS à 30 % est traité, du point de vue des allégements généraux, comme s’il percevait 1,38 SMIC. Ainsi le régime d’allégement général est-il maintenu pour des niveaux de rémunération bien supérieurs à 1,6 SMIC.
Nous avons donc ouvert l’année dernière, par voie réglementaire, un travail visant à plafonner l’avantage comparatif qu’apporte la DFS à certains secteurs, sans pour autant le supprimer.
Les exposés sommaires de tous ces amendements identiques se concentrent sur l’objectif de soutenir le secteur du BTP. Pourtant, la mesure proposée bénéficierait à l’intégralité des professions concernées par la DFS, dont les pilotes de l’air, les mannequins, et certaines professions dans les services, pour lesquelles il est anachronique de maintenir un avantage comparatif.
Par ailleurs, le BTP est un des secteurs pour lesquels le taux de DFS est parmi les plus bas, et a donc l’effet marginal sur la compétitivité le plus faible. Nous sommes donc défavorables à ces amendements.
Une première étape a été franchie à la fin 2019 : l’avantage lié à la DFS a été diminué de quelques dizaines de millions d’euros, sur un total de plus de 1,6 milliard.
Ainsi, l’avantage comparatif reste massif. En outre, la suppression de ce plafond profiterait surtout à d’autres secteurs que le BTP – pour lequel nous avons déjà pris des mesures de soutien, comme l’a excellemment rappelé M. le rapporteur général.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard. Je pense que l’annulation du plafonnement de la DFS serait une bonne mesure, notamment pour les entreprises qui ont signé leur contrat de chantier avant la crise de la covid-19, qu’il faut distinguer des autres. En effet, ces entreprises font face à un surcoût de 10 à 20 % qu’elles ne peuvent répercuter sur les contrats, puisqu’ils ont déjà été signés, comme je l’ai expliqué tout à l’heure.
Pour les autres entreprises, qui ne signent leurs contrats qu’aujourd’hui, la donne est peut-être différente. Il faudrait donc distinguer selon la date de signature des contrats.
La parole est à M. le ministre délégué. La DFS est une niche sociale – le terme n’est pas péjoratif, mais renvoie simplement à l’avantage comparatif qu’apporte l’abattement sur l’assiette de cotisation, dont le coût global, en l’occurrence, est très important.
La solution que vous évoquez, madame Ménard, n’est pas opérante. La DFS s’applique à l’intégralité des salariés d’une société. Il est totalement impossible de faire varier l’application du plafonnement de la DFS selon la date de signature des chantiers, puisqu’un même salarié peut intervenir sur différents chantiers signés à des dates différentes.

Ainsi, soit l’on rétablit la DFS dans son intégralité, pour un coût budgétaire important, et avec un effet marginal sur le secteur que vos amendements visent, soit l’on étudie d’autres dispositifs pour faire face au surcoût lié au covid-19 pour les marchés, en utilisant d’autres moyens que le rétablissement d’un abattement sur l’assiette des cotisations et contributions sociales. C’est ce travail qu’a engagé Bruno Le Maire,
(Les amendements identiques nos 10, 77, 348 rectifié, 452, 577 rectifié, 676, 805, 1029, 1528 et 2245 ne sont pas adoptés.) La parole est à M. le président de la commission des finances, pour soutenir l’amendement no 1103. La mesure que nous proposons par cet amendement a déjà été défendue lors d’une journée de niche parlementaire. Cela étant, monsieur Mattei, cet amendement a tout à fait sa place ici, parce qu’il nous permet de déployer un projet un peu différent, un peu plus ambitieux que celui qui est le vôtre dans ce PLFR, et surtout plus tôt – puisqu’il est évident que vous finirez par vous ranger à notre idée.
Les mesures ne doivent pas être uniquement sectorielles – ce serait selon moi une erreur. Elles doivent aussi porter sur les catégories de personnes. L’amendement précédent se penchait sur les jeunes, celui-ci concerne les salariés encore en chômage partiel ou en activité partielle, que ce dispositif vise à aider à revenir dans les entreprises.
Il faut aider les entreprises à embaucher à un rythme plus soutenu que celui de l’augmentation naturelle de l’activité lors de la reprise. Sans cela, la politique économique ne fonctionnera pas et les plans sociaux se succéderont.
Nous vous proposons donc de mettre en œuvre un plan de baisse des cotisations patronales pour aider les entrepreneurs à reprendre plus vite leurs propres employés. Vous avez aidé ceux-ci à partir au chômage partiel ; il faut désormais les aider à revenir.
Je sais bien que vous allez instaurer un dispositif d’activité partielle à moyen ou long terme. Pourquoi pas, mais ce dispositif ne peut concerner que des salariés qui, de toute manière, auront bien du mal à être repris.
Il convient surtout que les salariés actuellement au chômage partiel soient repris par les entreprises plus vite que ne le voudrait la simple augmentation naturelle du chiffre d’affaires.
Ces mesures, qui doivent être prises dès maintenant, ne fonctionneront évidemment que si l’on aide l’économie française à stimuler sa propre croissance.
M. Coquerel disait tout à l’heure qu’il ne fallait pas baisser les cotisations ou charges patronales. Pour ma part, je pense que si : il faut faciliter la reprise des embauches, parce qu’une personne au chômage ne « rapporte » strictement rien à la sécurité sociale. Aidons-la donc à retrouver du travail.
Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Nous avons choisi une méthode différente de celle que vous proposez. Comme l’a annoncé le Gouvernement mi-juin, il s’agit de sortir en sifflet de l’activité partielle, en fonction des secteurs d’activité, ce qui est selon moi la bonne méthode.
Il faut continuer à accompagner les secteurs qui en ont le plus besoin, et ne transférer les salaires du privé au public qu’autant que possible et nécessaire. La passation n’est pas évidente, c’est vrai. Il faut procéder avec soin, et sans pénaliser les entreprises.
Je partage votre constat : il faut éviter de supprimer l’aide trop brutalement, parce que cela risquerait de faire perdre son équilibre à l’entreprise. Il ne faut donc augmenter le reste à charge pour les entreprises qu’avec parcimonie, progressivement. Pour certains secteurs, le dispositif d’activité partielle devra en outre être prolongé de plusieurs mois.

Le mécanisme que nous avons choisi est le bon ; il est efficace et compris des entreprises – n’oublions pas qu’il est important, lors d’une sortie de crise, qu’elles disposent d’une bonne visibilité et d’une bonne compréhension des outils utilisés.

Nous avions de toute manière déjà eu ce débat lors de l’examen de votre proposition de loi visant à alléger temporairement les cotisations sociales à la charge des entreprises afin de remplacer progressivement le dispositif d’activité partielle. Avis défavorable.
(L’amendement no 1103, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) L’amendement no 1616 de M. Emmanuel Maquet est défendu.
(L’amendement no 1616, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 88. L’amendement, déposé à l’initiative de ma collègue Valérie Bazin-Malgras, vise à faciliter l’insertion dans l’emploi des jeunes en ouvrant la possibilité de les recruter par le biais d’un contrat exceptionnel d’insertion entre le 1er juillet 2020 et le 1er juillet 2022, ces deux dates définissant une période de deux ans au cours de laquelle la crise économique risque d’avoir un effet important sur le dynamisme du marché du travail, notamment sur l’emploi des jeunes.
Ce contrat d’insertion concernera les jeunes diplômés, et facilitera leur embauche en offrant aux recruteurs des avantages fiscaux d’une durée d’un an, à partir de sa date de conclusion. Les employeurs seront notamment exemptés de cotisations sociales, dans la limite d’un plafond fixé par décret, de la taxe sur les salaires et de la taxe d’apprentissage attachées à ce contrat.
Quel est l’avis de la commission ? Le débat est très similaire à celui que nous venons d’avoir. Avis défavorable.
(L’amendement no 88, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) Sur les amendements nos 1141 et 1140, je suis saisi par le groupe Écologie démocratie solidarité d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 1141, 1140, 158, 1022, 1695 et 1980, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 158, 1022 et 1695 sont identiques.
La parole est à Mme Annie Chapelier, pour soutenir les amendements nos 1141 et 1140, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Par ces amendements, nous proposons de modifier la loi du 13 juillet 1972 afin de soumettre les entrepôts logistiques à la taxe sur les surfaces commerciales – TASCOM –, dont ils sont actuellement exonérés.
Vous nous avez dit, monsieur le rapporteur général, que l’on ne pouvait alourdir la fiscalité d’entreprises déjà quasiment à terre à cause du confinement. Vous ne pouvez pourtant parler ainsi des GAFA – Google, Apple, Facebook et Amazon –, particulièrement d’Amazon.
Pour rappel, la fermeture pendant huit semaines de 86 % des commerces de proximité a conduit à une explosion des ventes en ligne, dont le chiffre d’affaires a augmenté de 83 % en avril 2020, essentiellement au bénéfice des plus grandes plateformes, et en particulier de la multinationale Amazon. La majorité des commandes a en outre porté sur des produits non essentiels et importés.
La stratégie d’Amazon est publique et bien connue : asseoir sa position monopolistique sur le marché français du commerce en ligne. D’ici au début de l’année 2021, Amazon a prévu de doubler ses capacités, en créant neuf entrepôts et centres de tri supplémentaires. Or nous savons, grâce notamment à la note d’analyse de Mounir Mahjoubi, que cette entreprise fait perdre des emplois – 7 500 rien que pour l’année dernière – alors qu’elle prétend en créer. M. Jeff Bezos, l’homme le plus riche du monde, s’est encore enrichi à la faveur de cette crise.
Notre pays compte 600 000 entreprises de commerce de proximité, dont 95 % sont de très petites entreprises ; elles représentent 20 % du PIB, 3 millions d’actifs et 1,2 million de salariés. Ces entreprises ne peuvent pas recourir aux mêmes stratégies, notamment fiscales, que les entreprises de commerce en ligne – défiscalisation, paiement partiel de la TVA, absence de paiement de taxe sur les enseignes et publicités extérieures, faiblesse des loyers, et ainsi de suite.
Dans le même temps, la puissance publique vient d’investir 5 milliards d’euros sur cinq ans dans le programme « Action cœur de ville » pour préserver les commerces, la vitalité des centres-villes, le lien social, les services de proximité, les emplois et l’attractivité des territoires. C’est donc la cohérence même de notre politique vis-à-vis des territoires et de notre tissu économique qui est en question. Nos amendements, rédigés par Delphine Batho, font le choix de la cohérence et de l’équité en proposant de soumettre les entrepôts logistiques à la taxe sur les surfaces commerciales, dont ils sont actuellement exonérés.
(Mme Delphine Bagarry applaudit.) La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 158. Cet amendement a été déposé à l’initiative de notre collègue Marc Le Fur, dans le même esprit que ceux qui viennent d’être défendus.
Il se justifie sous le prisme de l’équité fiscale. D’un côté, les commerces de proximité, qui, en règle générale, participent à la dynamique des centres-villes, s’acquittent de la TASCOM ; de l’autre, les entrepôts qui servent au commerce électronique en sont exemptés. Cela crée une situation de concurrence déloyale. Il faut établir des mécanismes afin que chacun contribue dans des proportions équivalentes, en se fondant sur la justice fiscale. Nous proposons donc d’assujettir les entrepôts d’une surface supérieure à 400 mètres carrés à la TASCOM.
Il importe de maintenir des magasins dans les centres-villes, afin de nourrir la dynamique de ces espaces urbains, dont l’impact a été au cœur de nombreuses discussions. Cet amendement y contribuerait.
L’amendement no 1022 de M. Dominique Potier est défendu.
La parole est à M. Vincent Ledoux, pour soutenir l’amendement no 1695.
Pour reprendre les propos de Mme Louwagie, nous touchons là à une question de justice fiscale. Dans les territoires, on a beaucoup de mal à maintenir les commerces de proximité et à garantir les grands équilibres économiques et commerciaux. La concurrence du e-commerce est extrêmement préjudiciable, et rompt le pacte fiscal en matière économique.
Comme Mme Louwagie, je demande que toutes les entreprises, y compris celles de e-commerce, soient assujetties à une TASCOM équivalente.
(M. Matthieu Orphelin applaudit.) La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 1980. Il vise à soumettre à la taxe sur les surfaces commerciales les nouveaux entrepôts logistiques destinés aux opérateurs de commerce en ligne. Non seulement la non-taxation de ces entrepôts contribue à instaurer une concurrence déloyale envers la distribution physique traditionnelle, mais elle contrarie aussi les objectifs de lutte contre l’artificialisation des sols du plan de sauvegarde de la biodiversité de juillet 2018.
Récemment, une proposition de loi de Delphine Batho réclamait un moratoire sur l’implantation de nouveaux entrepôts par les multinationales du commerce en ligne comme Amazon ou Alibaba. Celles-ci détruisent l’emploi, méprisent les droits des salariés, nuisent gravement aux commerces de proximité et présentent un bilan carbone catastrophique. Elles cochent toutes les cases de ce que, collectivement, sur l’ensemble des bancs, nous ne voulons plus.
Ainsi que le rappelait l’exposé des motifs de cette proposition de loi, « [Amazon], qui compte actuellement une vingtaine d’entrepôts de stockage en France, […] compte doubler ses capacités d’ici le début 2021, en créant neuf entrepôts et centres de tri supplémentaires. De même, Alibaba compte en ouvrir deux, connectés au hub logistique géant qu’il construit à proximité de l’aéroport de Liège. »
C’est la mort de nos centres-villes ! Compte tenu des risques que font peser ces opérateurs sur notre tissu économique, la mesure que nous sommes plusieurs à proposer est sans doute insuffisante. Mais il s’agit d’une première étape ; nous attendons que le Gouvernement réagisse au plus vite pour mettre un frein au développement de ces entreprises sur le territoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.) Tout est dit ! Quel est l’avis de la commission ? Comment pourrait-il ne pas être favorable ? Le débat sur la TASCOM revient régulièrement, à raison, parce que nul ne peut se satisfaire de la situation et de la différence de traitement fiscal entre les commerces physiques et les grandes entreprises comme Amazon, pour ne pas la citer – puisque ce nom revient souvent quand on parle des entrepôts.
Ce débat n’est pas si simple quand on veut le rendre opérationnel.
Je crains le pire… Des rapports sur la TASCOM, x ont été commandés et y ont été rendus. Ils disent à peu près tous la même chose. Or si la TASCOM est modifiée comme vous le demandez – c’est-à-dire, avec quelques variantes, si elle est appliquée aux entrepôts, sauf s’ils jouxtent des commerces physiques, parce qu’on veut bien taxer Amazon, mais pas la grande distribution –, c’est inopérant. On le sait très bien, puisqu’on a déjà essayé. Malheureusement, ça ne fonctionne pas, puisqu’il suffit qu’Amazon ouvre un petit espace de vente pour échapper à la fiscalité que vous proposez. Vous avez essayé ? Ça ne fonctionne pas, monsieur Chassaigne : il suffirait à Amazon d’ouvrir une vitrine – ce qui existe, d’ailleurs – pour être à nouveau exonérée de TASCOM. C’est ce que disent les rapports de l’IGF – inspection générale des finances – et ceux de différents corps d’inspection ; ce sont des travaux sérieux.
Il faut remettre à plat la fiscalité du commerce plutôt que d’essayer d’y faire rentrer l’entreposage, sauf s’il y a un commerce physique, parce que tout le monde ne peut pas être concerné. Ça ne fonctionne pas : il y aura toujours un moyen de contourner la taxe et de ne pas la payer.
La fiscalité des GAFA est un autre sujet, sur lequel nous avons progressé avec Bruno Le Maire depuis maintenant près de deux ans. Elle a pris une dimension internationale et multilatérale intéressante et rapporte 350 millions d’euros par an.
Ça ne va pas bien loin ! Ce n’est pourtant pas rien, 350 millions par an ! Nous sommes le premier pays à l’avoir fait et cela fonctionne. Cela a permis de réunir les pays autour de la table de l’OCDE pour discuter de la fiscalité des GAFA : on ne peut pas dire que ce n’est rien ! Faire avancer la fiscalité, ce n’est pas seulement assurer des rentrées fiscales sur une année, c’est aussi impulser une dynamique, et celle-ci est bonne.
Je ne suis pas contre le débat sur la TASCOM, ni contre la remise à plat de cette fiscalité. Je n’exclus pas de traiter ce sujet en septembre. M. Benoit Potterie le connaît parfaitement, il l’évoque chaque année. Il faut trouver une solution, mais ces amendements ne fonctionnent pas – on le sait, ce n’est pas la première fois qu’ils sont présentés et le débat est récurrent.
Capitulation ! Pouvons-nous nous engager à travailler à une refonte de ce type de fiscalité du commerce physique ? J’y suis favorable, je peux très volontiers m’y engager auprès de vous. Mais faisons-le avec un dispositif qui fonctionne, pas avec une mesure dont on pense, à tort, qu’elle obligera Amazon à payer.
Je vous demande d’entendre cet argument, qui n’est pas un argument d’évitement, mais un argument opérationnel : telle qu’elle est présentée, la mesure ne fonctionnerait pas. Avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Il existe une autre possibilité de contournement de la TASCOM, notamment lorsqu’on parle d’entrepôts de logistique pour de la vente à distance, 50, 100 ou 150 kilomètres n’étant pas nécessairement un obstacle pour ceux qui l’organisent. Amazon, pour la citer à nouveau, a moins d’une quinzaine d’entrepôts sur tout le territoire. Cette possibilité consiste à déplacer un entrepôt de quelques dizaines de kilomètres, au-delà d’une frontière, dans un marché aujourd’hui ouvert à la circulation des marchandises. Un tel déplacement permettrait d’éviter la taxation et aurait aussi pour conséquence l’éloignement des emplois, quel que soit le jugement que l’on peut porter sur les conditions de travail ou les épisodes auxquels nous avons assisté pendant le confinement.
Ce point peut être un sujet de discussion pour trouver un système opérant et éviter les modalités de contournement évoquées. Votre collègue Benoit Potterie, ici présent, prépare un rapport sur la TASCOM qui sera, je n’en doute pas, riche d’enseignements pour nous permettre d’orienter cette décision.
Ce débat a eu lieu à plusieurs reprises. Lors de l’examen du projet de loi de finances pour 2020, le principe d’un groupe de travail au sein de la commission des finances, très complémentaire du rapport de Benoit Potterie, avait été acté. L’objectif était de faire des propositions aussi transpartisanes que possible sur cet enjeu.
Cela a-t-il été fait ? Nous sommes prêts à avancer et à trouver les moyens véritablement opérants de limiter l’artificialisation des sols et d’encadrer les pratiques dénoncées par les uns et les autres. Ça n’a pas bougé depuis ? Les dispositifs proposés ne sont pas suffisamment efficaces, parce que les modalités de contournement sont trop nombreuses. C’est la raison pour laquelle mon avis est défavorable, non sur le principe, mais pour continuer à travailler sur le sujet, et surtout pour trouver les modalités les plus opérationnelles. On nous a dit la même chose l’an dernier ! La parole est à M. Matthieu Orphelin. Ce n’est pas la première fois que nous avons ce débat, et j’entends tout à fait les arguments techniques du rapporteur général et du Gouvernement. Mais il faut envoyer un message politique clair ! Il reste 600 jours à ce quinquennat : il n’est pas possible d’évacuer de tels enjeux avec des rapports ou des groupes de travail.
L’approche transpartisane, vous l’avez : les amendements sont proposés par différents groupes politiques, y compris ceux de la majorité. Nous devons avancer et envoyer un signal politique, d’autant que ce débat est plus éclairé qu’il y a un ou deux ans. La note de Mounir Mahjoubi a montré que pour chaque emploi créé chez Amazon, 2,2 emplois sont détruits dans les petits commerces. C’est un élément majeur, qui nous fera voter en faveur de tous ces amendements. Amazon, c’est la destruction d’emplois ; la question est de savoir quels commerces nous voulons.
Notre jugement peut aussi être éclairé par les propositions formulées par la convention citoyenne pour le climat : elle demande de mettre fin à l’artificialisation des sols et aux surfaces commerciales en dehors des centres-villes et des centres-bourgs. L’élargissement de la TASCOM est un premier pas vers le moratoire sur les nouvelles surfaces commerciales hors des centres-villes et centres-bourgs.
La parole est à M. Fabien Roussel. Nous défendons cette proposition depuis tous les bancs de l’Assemblée nationale, de droite comme de gauche. Tout à fait ! Nous sommes dans le cadre d’un PLFR 3, faisant suite à la pandémie, qui vise à apporter des réponses exceptionnelles aux PME, aux communes et aux centres-villes. Dans le même temps, nous essayons d’empêcher ces grands groupes, ces GAFA, de se développer aux dépens des entreprises locales.
Il est beaucoup question de souveraineté et de relocalisation : voilà l’occasion de faire tous ensemble un premier geste en ce sens. Certes, ces amendements présentent des difficultés et ne répondront pas totalement à la question. Ces mêmes arguments ont empêché pendant des années de taxer les GAFA. Votre gouvernement a décidé d’instaurer une taxe qui rapporte 350 millions et qui a déclenché la colère des États-Unis. Nous sommes d’ailleurs en train de reculer sur ce sujet dans l’Union européenne. Toutefois, nous avons réussi à porter le débat sur cette question grâce à cette taxe décidée nationalement et unilatéralement, malgré toutes les objections techniques.
Là, c’est la même chose : envoyons un signal, appliquons la TASCOM à ces entrepôts, mettons-les en difficulté, obligeons-les à ouvrir des espaces de vente, et nous verrons ! Profitons du PLFR pour adopter les amendements : en septembre, nous prendrons les dispositions nécessaires pour améliorer le dispositif.
C’est un signal que nous devons envoyer dès maintenant ! Nous n’avons pas besoin d’un énième rapport : il y en a eu tout plein et nous savons ce qu’il faut faire. Envoyons un signal maintenant et rectifions le dispositif en septembre !
(Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.) La parole est à M. Dominique Potier. Je suis surpris de l’argument technique du rapporteur général concernant la surface d’un espace de vente par rapport à celle des entrepôts. C’est très étonnant, parce que sur de très petites surfaces, celles d’un artisan, d’un paysan, d’une TPE, on sait distinguer la partie privée de la partie professionnelle et taxer celle-ci. Je ne vois pas ce qui s’opposerait à une proratisation des surfaces. En tout état de cause, aucun argument technique ne tient.
Matthieu Orphelin a évoqué les 600 jours qui nous restent ; il y a moins de 200 jours, sous la présidence de Barbara Pompili, la commission du développement durable et celle des affaires économiques auditionnaient conjointement les représentants d’Amazon. La niche fiscale dont bénéficient les entrepôts faisait l’objet d’une condamnation unanime.
Si depuis lors, et en dépit de tous les amendements d’appel qui ont été déposés, le Gouvernement n’a pas été capable de trouver une solution technique satisfaisante, c’est qu’il y a manifestement de la mauvaise volonté.
C’est du renoncement ! L’enjeu ne tient pas seulement à la concurrence déloyale et à la destruction d’emplois. Il y a, au niveau de la production agricole et de l’ensemble des PME, une concurrence déloyale qui écrase les prix et les producteurs, dans une disproportion totale qui conforte l’oligarchie des principaux donneurs d’ordre dans les achats. Cette concurrence encourage la concentration de la demande, qui est la cause d’un écrasement des prix qui va à l’encontre d’une digne rémunération des producteurs.
Il y a aussi une question de bilan carbone : les mêmes arguments nous ont été donnés par la ministre de l’écologie pour éviter que les livraisons des derniers kilomètres ne se croisent dans les métropoles.
Il faut reprendre le sujet globalement, mais il faut agir de manière pragmatique. La reprise ne peut être qu’une relance qui marque un véritable virage pour l’écologie et pour l’emploi.
(MM. Jean-Paul Dufrègne et Matthieu Orphelin applaudissent.) Ça y est, le rapporteur général est convaincu ! La parole est à Mme Annie Chapelier. J’espère que M. le rapporteur général et M. le ministre délégué sont convaincus !
Monsieur le rapporteur général, vous parlez de la difficulté de déterminer ce que sont ces entrepôts, d’espaces de vente, etc. Je ne vous ferai pas l’affront de vous rappeler que l’amendement no 1141 propose justement, à l’alinéa 5, une tentative de définition. Si celle-ci vous paraît imparfaite, nous ne demandons qu’à la revoir avec vous pour qu’elle soit valable.
Exactement : c’est le rôle du Parlement ! Envoyer un signal aujourd’hui ne peut pas être une mauvaise chose. Au contraire, compte tenu des demandes exprimées dans le cadre de la convention citoyenne pour le climat, mais aussi des derniers résultats électoraux, vous ne pouvez qu’y gagner dans l’opinion publique, pour le monde que nous voulons pour demain – puisqu’il s’agit bien de cela. (M. Matthieu Orphelin applaudit.) Je demande la parole, monsieur le président ! J’ai des dizaines de demandes de prise de parole. Je vous rappelle qu’il nous reste 840 amendements à examiner. La seule question à se poser est donc la suivante : sommes-nous suffisamment éclairés pour voter ?
La parole est à M. le rapporteur général.
Je crois que certains bancs ont besoin d’une dernière loupiote pour finir d’être convaincus. (Sourires)
Monsieur Potier, il n’est pas possible de faire le distinguo que vous évoquez. Votre amendement précise : « Toutefois, sont exonérées de la taxe sur les surfaces de stockage les entreprises assujetties à la taxe sur la surface de vente des magasins de commerce de détail. » Par conséquent, ceux qui tiennent un commerce physique ne seraient pas assujettis à la taxe : voilà ce que prévoit l’amendement. Travaillons-le ensemble ! Sous-amendez ! Ce que vous proposez ne marcherait donc pas, parce les ventes des commerces de détail seraient exclues de l’assiette de la taxe, afin d’éviter la double taxation, ce qui est compréhensible. Ce n’est pas dans notre amendement ! Et puis vous dites que nous sommes là pour travailler le dispositif. C’est exactement ma réponse : travaillons, d’ici au prochain PLF, à l’élaboration d’une bonne fiscalité sur le commerce. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Je suis le premier à le dire. Ai-je balayé d’un revers de manche la perspective de travailler sur la fiscalité du commerce ? Non, bien au contraire. Je demande juste que le dispositif soit opérationnel, car il me paraît normal, lorsque l’on rapporte un texte, que l’on s’assure de son efficacité ; or je maintiens que vos propositions ne fonctionneront pas, d’où l’avis défavorable. La parole est à M. le ministre délégué. Je confirme la volonté du Gouvernement de travailler avec tous les parlementaires qui le souhaiteront à l’élaboration d’un modèle le plus efficace et le plus opérationnel possible. Mais les amendements déposés offrent trop de possibilités de contournement ; nourris par le rapport que j’ai évoqué et par les travaux des différents groupes, nous serons extrêmement attentifs à ce sujet. Le sujet étant important, il y aura une prise de parole par groupe, à condition que chacun s’exprime avec concision. C’est fait ! La parole est à M. Jacques Cattin. Il faut se mettre à la place des élus des territoires, confrontés à des baisses de recettes. En Alsace, il y a deux implantations, que vous connaissez : leurs représentants disent que si elles n’étaient pas installées ici, elles seraient à Montbéliard ou un peu plus loin. Voilà le problème ! Il faut garantir l’équité et s’assurer que la concurrence est saine et loyale. Ce n’est pas compliqué.
Monsieur le rapporteur général, nous ne sommes pas des élèves : ce n’est pas un sujet de rentrée, et nous savons ce que nous avons à faire.
(M. Fabien Roussel applaudit.) Très bien ! La parole est à M. Jean-Paul Mattei. J’aurais bien aimé que ces amendements soient retirés et que l’on discute du sujet lors de l’examen du PLF ou du plan de relance, comme l’a suggéré le rapporteur général. À titre personnel, je voterai pour ces amendements, pour le symbole. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LT et EDS.) Bravo ! Néanmoins, il faudrait les retravailler pour les rendre efficients. Je ne peux pas engager mon groupe, qui préfère le retrait des amendements pour les retravailler, mais, à titre personnel, je voterai pour. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes FI, GDR, LT et EDS.) La parole est à M. Éric Coquerel. Je suis d’accord avec M. Mattei : nous appellerons à voter pour les amendements. Ils entrent dans la catégorie de ceux qu’il ne faut pas remettre à plus tard, du fait du signal politique qu’ils envoient. Il n’est pas possible que des entrepôts comme ceux d’Amazon soient favorisés dans la concurrence avec d’autres sites commerciaux. Voilà le premier critère, sachant qu’Amazon jouit déjà de nombreux avantages.
En outre, il s’agit d’une des seules entreprises qui, pendant la crise, a posé des problèmes dans l’utilisation du chômage partiel. Nous les connaissons et nous savons ce qu’ils sont : il faut des règles contraignantes, au moins pour la concurrence avec les autres entrepôts commerciaux.
J’entends les arguments du ministre délégué et du rapporteur général, mais nous sortirions grandis si nous oubliions nos divergences pour voter en faveur de ces amendements. Peut-être que le dispositif devra être amélioré, je l’ignore, mais, une fois voté, il sera mis en place.
Bien sûr ! Il faut envoyer un signal ! La parole est à M. Daniel Labaronne. Pendant la crise, voyez-vous, j’ai rencontré des artisans et des commerçants qui m’ont dit retrouver de la clientèle grâce à Amazon. Cela m’a interpellé et, comme je suis de Touraine, j’ai visité le site de Saran, près d’Orléans. Là, tous mes a priori sont tombés. Alors là, ils sont forts ! J’ai le droit d’exprimer cette position. Premièrement, je me suis rendu compte qu’Amazon, pour ne pas la citer, offre des services logistiques extrêmement intéressants aux TPE et PME : les artisans et les commerçants utilisent ces services. Deuxièmement, Amazon emploie surtout des jeunes dépourvus de la moindre qualification. Troisièmement, Amazon fait travailler tous les transporteurs locaux, car elle ne gère que des entrepôts, sans assurer le transport. Cela ne change rien ! Quatrièmement, Amazon paie un montant non négligeable d’impôts locaux à la ville de Saran. J’aimerais appeler votre attention sur ces aspects.
Je note qu’un député, notre collègue Potterie, travaille sur la question.
Ben oui ! Nous pourrions peut-être respecter le travail parlementaire ! Il est très fort ! Madame Louwagie, vous souvenez-vous de la requalification des établissements commerciaux en établissements industriels ? Tout à fait ! Ce sujet a demandé un an de travail avec les services fiscaux et l’ensemble des partenaires de la profession pour aboutir à un amendement au projet de loi de finances initiale, qui a été adopté à l’unanimité. Nous avions posé le problème et travaillé pendant un an. Peut-être faut-il aller plus vite ; toujours est-il que nous avions effectué un travail parlementaire sérieux, qui avait abouti à un amendement consensuel. Je préconise que nous reprenions cette méthode. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Cette argumentation est un cas d’école ! La parole est à Mme Sylvia Pinel. Ce sujet anime l’hémicycle depuis longtemps, de PLF en PLF et de PLFR en PLFR. Je ne demande qu’à vous croire, monsieur le rapporteur général et monsieur le ministre délégué, lorsque vous dites vouloir avancer. Nous connaissons tous la nécessité de préserver le commerce de proximité, qui participe d’une politique d’aménagement du territoire attractive, ainsi que l’importance de la lutte contre l’artificialisation des sols et de la conjugaison du commerce physique et de l’e-commerce. Cependant, à chaque PLF, on confie une mission à l’IGF – l’inspection générale des finances – ou à un parlementaire, mais on n’avance pas et la question reste prégnante. Pendant la crise sanitaire que nous venons de vivre, le commerce de proximité a beaucoup souffert d’avoir été longtemps fermé.
Sur quel calendrier précis de réforme de la fiscalité du commerce le Gouvernement s’engage-t-il ? On ne peut pas éternellement remettre à plus tard la résolution du problème. Celle-ci est urgente, et les arguments avancés par mes collègues semblent aller dans le bon sens. Qu’il y ait des possibilités de contournement de la taxe, nous le savons, mais il faut travailler et avancer. Je soutiendrai ces amendements importants, d’autant que l’administration de Bercy est capable de les améliorer et de trouver la bonne rédaction.
(Applaudissements sur quelques bancs des groupes LT, GDR et EDS.) La parole est à Mme Lise Magnier. Nous discutons là d’un sujet qui revient effectivement à chaque PLF : un certain nombre d’entre nous tentent de faire passer des amendements pour avancer sur la TASCOM. Néanmoins, à chaque fois, nous nous rendons compte que nous ne trouvons pas le bon outil : nous échouons à analyser suffisamment en profondeur le sujet pour résoudre la question, majeure pour les commerces de centre-ville, qui subissent une concurrence difficile, dont nous portons, soyons honnêtes, une part de responsabilité.
Avec mes collègues du groupe Agir ensemble, nous préférons attendre la remise des conclusions de la mission confiée par la commission des finances à notre collègue Potterie ; j’ai d’ailleurs assisté à certaines des auditions qu’il a menées. Il importe que nous soyons sûrs de ce que nous faisons.
(M. Daniel Labaronne applaudit.) Si nous adoptions ces amendements, nous percerions des trous dans la raquette et risquerions de punir ceux que nous voulons accompagner. Nous voterons donc contre ces amendements. (Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens et sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.) La parole est à M. le rapporteur général. Pour joindre les actes à la parole, je vais m’entretenir avec Benoit Potterie après l’adoption du texte. Si cela s’avérait nécessaire, je m’engage à organiser une session de travail à l’Assemblée, avec l’appui de la division B. Ah, la fameuse division B ! Tous les groupes pourront participer à ce travail, destiné à trouver une solution opérationnelle. Il n’est pas nécessaire de créer un comité. J’enverrai des emails pour organiser notre réflexion sur l’élaboration d’un dispositif pouvant être inséré dans le PLF. Voilà à quoi je m’engage, si vous le souhaitez. Je mets aux voix l’amendement no 1141.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 79
Nombre de suffrages exprimés 74
Majorité absolue 38
Pour l’adoption 28
Contre 46
(L’amendement no 1141 n’est pas adopté.) Je mets aux voix l’amendement no 1140.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 77
Nombre de suffrages exprimés 72
Majorité absolue 37
Pour l’adoption 25
Contre 47
(L’amendement no 1140 n’est pas adopté.)
(Les amendements identiques nos 158, 1022 et 1695 ne sont pas adoptés.)
(L’amendement no 1980 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 738. Cet amendement de notre collègue Jérôme Nury vise à corriger une erreur qu’ont pu commettre certaines communes. La loi de finances initiale pour 2020 a fait de 2017 l’année de référence pour la fixation du montant des transferts de taxe foncière sur les propriétés bâties du département vers les communes, à partir de 2021, en compensation de la suppression de la taxe d’habitation. La présentation de l’état 1259 fourni aux communes était inhabituelle : le taux de référence de la taxe d’habitation mentionné par l’administration était fixé à 0 %, en raison du retraitement du taux de 2016. Le principe de neutralité, imaginé dans le cadre du pacte fiscal, a été interprété comme une reconduction par certaines équipes municipales, qui, en conséquence, ont commis une erreur en réinscrit le taux de référence. L’amendement vise à leur permettre de corriger cette erreur matérielle. Quel est l’avis de la commission ? Je demande le retrait de cet amendement d’appel à l’attention du Gouvernement. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, l’avis serait défavorable.
Vous proposez d’interroger les communes sur le taux qu’elles auraient voulu voter en 2017, en fonction de ce qu’elles ont inscrit dans leur budget. Il paraît difficile de valider cette action rétroactive, à moins que nous ne souhaitions accepter un principe de surcompensation.
Quant aux communes ayant rencontré des difficultés de lecture de l’état 1259 du fait d’une présentation différente, les services de la DGFIP – direction générale des finances publiques – ont toujours été extrêmement présents pour apporter les bons renseignements.
(L’amendement no 738 n’est pas adopté.) Je suis saisi de sept amendements, nos 1046, 1119, 2184, 1713, 2125, 626 et 627, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1046 et 1119 sont identiques, de même que les amendements nos 2184 et 1713.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 1046.
La loi de finances pour 2020 a instauré une taxe forfaitaire de 10 euros sur les contrats à durée déterminée d’usage, ou CDDU, afin de favoriser l’emploi plus durable dans les secteurs qui ont recours à ce type de contrats. Parmi les secteurs concernés figurent évidemment l’hôtellerie, la restauration, la culture, les traiteurs et les discothèques.
Pendant la crise, la ministre du travail a validé le report de l’application de cette taxe supplémentaire de 10 euros sur les CDDU. L’amendement vise à supprimer totalement cette nouvelle taxation, car elle frappe les secteurs les plus touchés par la crise du covid-19. Je pense notamment aux traiteurs, qui vont connaître une situation très difficile cet été, avec les annulations et les reports de mariage. L’amendement tend à soutenir les entreprises des filières concernées.
L’amendement no 1119 de Mme Véronique Louwagie est défendu.
Sur les amendements identiques nos 2184 et 1713, je suis saisi par le groupe Agir ensemble d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 2184.
Je propose, si elle en est d’accord, que Mme Kuric défende son amendement identique. La parole est à Mme Aina Kuric, pour soutenir l’amendement no 1713. Il revient sur la taxation, adoptée dans le dernier PLF, des CDD d’usage de 10 euros afin d’encourager les contrats plus longs. Ce sont certes des contrats qui concernent les professionnels de la restauration, comme les traiteurs, mais également ceux de la formation. En cette période de relance, il faut pouvoir compter sur l’ensemble des acteurs, et il importe de les aider à maintenir l’emploi et de les encourager à en créer. Cette taxe, dont la pertinence ne nous semblait déjà pas évidente lors de l’examen du PLF 2020, est encore moins d’actualité au regard des événements que nous traversons. La parole reste à Mme Aina Kuric, pour soutenir l’amendement no 2125. Il visait à supprimer la taxe pendant une durée limitée. Je le retire, au profit du no 1713.
(L’amendement no 2125 est retiré.) La parole est à M. Christophe Blanchet, pour soutenir les amendements nos 626 et 627, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée. Nous avions adopté la taxe sur les CDDU dans un contexte de croissance, avec un taux de chômage de 8,3 % : nous imaginions augmenter nettement le nombre de CDI dans les secteurs concernés. Or la donne a changé, cela a été rappelé sur les différents bancs : la restauration et les traiteurs sont terriblement en souffrance ; quant aux discothèques, n’étant pas encore ouvertes, elles ne sont pas près de bénéficier de l’exonération… Les secteurs tout entiers de l’événementiel, de la culture ou de la filmographie doivent être accompagnés. Il s’agit donc d’un amendement d’actualité, pour les encourager et les aider. Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements ? Il est favorable aux amendements no 2184 de la commission et identique. Leur adoption aura pour conséquence de satisfaire les autres ; je demande donc leur retrait. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Aurélien Taché. Je suis très surpris de la mise en discussion de ces amendements, adoptés en commission des finances, et d’entendre que le rapporteur général émet un avis favorable. En effet, ils visent à revenir sur le dispositif que le précédent rapporteur général de la commission des finances, M. Joël Giraud, avait fait passer : l’instauration d’une taxe de 10 euros sur les CDD d’usage, pour compléter le principe de bonus-malus en fonction de la durée des contrats, précédemment inscrit dans la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, dont je fus le rapporteur. L’idée est très simple : le travail précaire doit coûter plus cher quand un contrat est court ; on paie alors davantage de cotisations patronales au chômage, plus que quand on embauche en CDI.
Le CDD d’usage est quand même le contrat le plus précaire qui soit : il ne prévoit ni prime de précarité ni délai de carence ; on peut le répéter à l’envi, indéfiniment. L’adoption de l’amendement signifierait qu’avec cette crise, on accepte une précarisation maximale de l’emploi.
Très bien ! Absolument, ce n’est pas acceptable ! Nous venons de refuser d’instaurer une taxe sur les surfaces commerciales pour les entreprises de type Amazon, au prétexte qu’augmenter la fiscalité des entreprises serait le crime de lèse-majesté par excellence. Les sociétés concernées peuvent ainsi renoncer au seul effort qu’elles avaient consenti sur ces contrats d’usage, les plus précaires qui soient. Ce serait un très mauvais signal. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.) La parole est à Mme Cendra Motin. Effectivement, le contexte a changé. Il y a beaucoup plus de précarité ! C’est scandaleux ! Quand l’instauration de la taxe a été votée, l’année dernière, la restauration et l’hôtellerie, notamment, ainsi que les EHPAD – vous avez oublié de les évoquer –, cherchaient à employer des gens. L’objectif était de pérenniser des contrats, là où il y en avait. Désormais, les cafés et restaurants essaient de survivre, après une fermeture de deux mois ; ils ignorent de quoi l’avenir sera fait, si les touristes reviendront. Très concrètement, tout emploi susceptible d’être créé, même incertain, est bon à prendre.
Encore une fois, il ne faut pas dire n’importe quoi sur les CDDU : ils sont réservés à quelques secteurs très précis, tout le monde ne peut pas y avoir recours ! Revenons sur terre : dans le contexte que nous connaissons, ces secteurs d’activité en ont besoin, comme ils ont besoin d’être soutenus. Nous déployons un plan spécifique d’exonération de charges ;…
Ce sont des cotisations, pas des charges ! …il serait insensé de taxer les CDDU dans le même temps. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.) Scandaleux ! La parole est à Mme Émilie Bonnivard. Je voudrais compléter la réponse de Mme Motin à l’intervention de M. Taché. Vu la situation, il n’y aura bientôt plus de traiteurs. Je ne sais pas comment ils passeront l’été, alors que toutes leurs commandes ont été annulées. Quand les traiteurs auront disparu, il n’y aura plus de problèmes de contrats précaires, pour faire simple, puisqu’il n’y aura plus de contrats du tout. Très bien ! C’est vrai ! Je crois qu’il faut se poser les bonnes questions au bon moment ; le contexte étant nouveau, sachons le prendre en considération pour que ces contrats et ces emplois, au moins, perdurent. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Chassez le naturel, il revient au galop ! (Protestations sur quelques bancs du groupe LaREM.)