XVe législature
Session ordinaire de 2017-2018
Séance du mardi 24 octobre 2017
- Présidence de M. François de Rugy
- 1. Questions au Gouvernement
- Travailleurs détachés
- Travailleurs détachés
- Hausse du prix du beurre
- Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018
- Finances locales
- Invalidation de la taxe sur les dividendes
- Conséquences de la sécheresse sur l’agriculture
- Hôpital public
- Formation aux gestes de premier secours
- Démographie médicale
- Réserve civile dans la police nationale
- Travailleurs détachés et CETA
- Trains de nuit
- Place de la France dans le Pacifique
- Organisation des services d’urgence
- 2. Projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 - Projet de loi de finances pour 2018 (première partie)
- 3. Projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018
- Présentation
- Mme Agnès Buzyn, ministre des solidarités et de la santé
- M. Gérald Darmanin, ministre de l’action et des comptes publics
- M. Olivier Véran, rapporteur général de la commission des affaires sociales
- Présidence de Mme Carole Bureau-Bonnard
- M. Éric Alauzet, rapporteur pour avis de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- Mme Brigitte Bourguignon, présidente de la commission des affaires sociales
- M. Éric Woerth, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- Motion de rejet préalable
- Motion de renvoi en commission
- Présentation
- 4. Ordre du jour de la prochaine séance
1e séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.
La parole est à Mme Danièle Obono, pour le groupe La France insoumise.
Monsieur le président, mesdames et messieurs les ministres, mes chers collègues, ma question s’adresse à Mme la ministre du travail.
Le Président Macron, le Gouvernement et vous-même vous gargarisez d’avoir obtenu un accord majeur pour les travailleurs et les travailleuses détachés. Vous affirmez même que l’Europe sociale serait en marche. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
Vous dites lutter contre le dumping social et protéger correctement les 2 millions de travailleurs et travailleuses détachés en Europe, dont 400 000 sont en France. (Les applaudissements couvrent la voix de l’oratrice.) Qu’est-ce que ça veut dire, ça ? Comme nous y sommes désormais habitués, ce n’est que de la poudre de perlimpinpin – pour reprendre une expression chère à Jupiter ! (Huées sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
On est très loin d’une harmonisation par le haut des conditions de travail des personnes détachées, et ce pour trois motifs.
Premièrement, puisque les travailleurs et travailleuses vont continuer à payer leurs cotisations dans leur pays d’origine et non dans le pays où ils travaillent effectivement, le coût de la main d’œuvre restera inférieur au coût des travailleurs embauchés sous le régime du droit national.
Deuxièmement, votre projet de directive a pu être conclu parce que vous avez accepté de sacrifier les travailleurs et travailleuses du secteur routier, alors qu’il s’agit du secteur le plus fragilisé. Elle a raison ! Savez-vous qu’un ou une Bulgare est rémunéré environ 200 euros par mois ? Avez-vous vu les millions de camions qui circulent chaque jour sur les routes et les conditions dans lesquelles ces personnes travaillent ? Et avez-vous vu le prix du gazole ? Ce n’est pas acceptable !
Enfin, vous ne vous donnez pas les moyens de lutter efficacement contre la fraude. Votre propre ministère estime qu’entre 220 000 et 300 000 travailleurs sont en situation de détachement sans avoir été préalablement déclarés !
Pour lutter véritablement contre le dumping social en Europe, qu’il soit légalisé ou illégal, il faut remettre en cause le principe même de la directive et actionner la clause de désengagement, l’ opt out , comme nous, à La France insoumise, le proposons. Très bien ! Nous regrettons que vous n’ayez pas eu le courage de soutenir cette revendication.
Toutefois, il vous est encore possible de faire de cette négociation une avancée. Ma question, madame la ministre, est de savoir si vous allez introduire dans les négociations le sujet de la lutte contre la fraude, remettre en cause la directive d’exécution de 2004, et aborder enfin l’enjeu de l’harmonisation sociale par le haut. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur plusieurs bancs du groupe GDR.) Merci, madame la députée.
La parole est à Mme la ministre du travail. Madame la députée, oui, je l’affirme, l’accord sur la directive européenne relative aux travailleurs détachés est une étape importante dans la construction de l’Europe sociale ; c’est un succès majeur sur le chemin de l’Europe sociale que nous désirons ! (« Bravo ! » et vifs applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.– Exclamations sur les bancs du groupe FI ainsi que sur les bancs du groupe LR.) Vous avez oublié les transports ! Et l’accord ne s’appliquera qu’en 2022 ! Le Président de la République s’y était engagé ; il n’a pas ménagé ses efforts. Nous avons œuvré de concert avec Nathalie Loiseau et Élisabeth Borne, et nous avons obtenu hier, collectivement, à Luxembourg, une victoire majeure. C’est celle, je le répète, de l’Europe sociale, c’est-à-dire d’une Europe qui non seulement protège les salariés, mais aussi permet une concurrence plus équitable entre les entreprises. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)
Quatre résultats ont été acquis hier. Le premier est que, sur le même lieu de travail, il y ait à travail égal, salaire égal ; c’est une avancée considérable par rapport à ce qui avait été décidé en 1996. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LC.) Vingt et un ans plus tard, nous avons enfin une égalité renforcée ; cela inclut non seulement les salaires de base, tel le SMIC, mais aussi les primes et les accessoires du salaire : les remboursements de frais et les indemnités relatives à l’hébergement ou aux déplacements viendront en plus, et non en déduction du salaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.– Exclamations sur les bancs du groupe FI.)
Deuxièmement, s’agissant du transport, les vingt-huit États membres ont réaffirmé hier qu’il faisait bien partie du champ de la directive relative aux travailleurs détachés – ce qui n’était pas gagné d’avance ! (Exclamations sur les bancs du groupe FI ainsi que sur les bancs du groupe LR.) C’est faux ! En revanche, les modalités détaillées seront négociées dans le cadre du paquet « mobilité ».
Pourquoi ? Tout le monde peut comprendre que contrôler le travail d’un chauffeur dans un camion, ce n’est pas la même chose que contrôler un chantier !
Il y a des modalités spécifiques qui seront négociées, mais le principe a été affirmé : oui, le transport fait bien partie de la directive relative aux travailleurs détachés. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) Mensonge ! Troisièmement, nous avons fait une avancée majeure au sujet de la fraude.
Quant au quatrième résultat, je le présenterai à l’occasion de la réponse à la prochaine question ! (Rires et applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à Mme Sabine Thillaye, pour le groupe La République en marche. Monsieur le Premier ministre, hier soir, dans la nuit, un accord ambitieux a été trouvé sur la révision de la directive européenne concernant les travailleurs détachés. Pour la France, pour l’Europe, c’est un succès majeur. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
Depuis plusieurs mois, le Président de la République s’est mobilisé pour faire respecter le principe d’une concurrence européenne juste, régulée et encadrée. Il a multiplié les rencontres avec ses homologues et est parvenu à convaincre des États initialement très réticents. C’est la preuve qu’une France engagée en Europe, c’est une France écoutée et respectée. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.)
Cet accord, monsieur le Premier ministre, c’est aussi un succès indéniable pour votre gouvernement et pour la ministre du travail, Muriel Pénicaud. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.) Les avancées sont majeures : plafonnement de la durée du détachement ; consécration du principe : « à travail égal, salaire égal » ; renforcement, enfin, de la lutte contre les abus, les fraudes et le dumping social. Non ! Ce n’est pas vrai ! La commission des affaires européennes a été à l’initiative pour apporter une contribution utile aux négociations. Je tiens ici à saluer, sur ce point, le travail de Jean-Louis Bourlanges et de Typhanie Degois (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM) , dont la proposition de résolution sur le détachement des travailleurs a été adoptée par notre assemblée à une très large majorité.
Monsieur le Premier ministre, l’accord conclu hier soir au Conseil de l’Union européenne est historique. C’est une capitulation ! Il constitue une première étape décisive vers la construction d’une Europe sociale, une Europe qui protège. Quelle est votre réaction sur cet accord et sur les conséquences qu’il aura ? (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. le Premier ministre. Vous avez raison, madame la députée, l’accord conclu hier est un bon accord. Pas pour tout le monde ! Pas pour les salariés ! C’est un bon accord pour l’Europe, pour la France et pour l’ensemble des travailleurs français et européens. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LC.)
Cet accord, il ne nous a pas été concédé par des partenaires qui, spontanément, auraient été sur la même ligne que nous. Il a été obtenu parce que le Président de la République, les membres du Gouvernement, la diplomatie française,… Se sont couchés ! …les députés européens et Mme la ministre du travail ont effectué un travail remarquable de discussion, de persuasion et de diplomatie. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.) À chaque entretien entre des responsables français et européens, le sujet était évoqué, et les arguments français étaient poussés, si bien qu’une majorité a pu se constituer.
Dans une discussion, mesdames, messieurs les députés, on n’obtient pas toujours ce que l’on souhaite. Mais quand les positions françaises prévalent, comme c’est le cas ici ; quand l’accord est meilleur que celui mis sur la table à Malte il y a quelques mois, comme c’est encore le cas ; quand l’accord, en un mot, est meilleur que celui qui prévalait avant la discussion, alors il faut s’en réjouir. J’aimerais donc que ceux qui contestent cet accord considèrent le parcours effectué depuis que nous avons engagé la discussion : qui, sur ces bancs, peut nier que la situation est meilleure après l’accord qu’avant l’accord ? (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LC.)
Sur quatre points majeurs nous avons pu, grâce à un travail minutieux, patient et déterminé, obtenir des avancées : c’est vrai sur le principe « à travail égal, salaire égal », dans un même lieu, sur la durée du détachement,… Elle est en moyenne de trois mois en Europe ! …comme sur les moyens de contrôle pour éviter les fraudes. Sur ces points, nous avons obtenu beaucoup, et nous devons maintenant passer à la mise en œuvre.
Je veux enfin vous exprimer, très tranquillement et très solennellement, la très grande fierté que nous éprouvons face au résultat obtenu, et la très grande fierté d’avoir au sein de ce gouvernement, à mes côtés, une ministre du travail exceptionnelle, qui a joué tout son rôle en cette occasion. (Mmes et MM. les députés des groupes REM et MODEM se lèvent et applaudissent longuement. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LC.) La parole est à M. Nicolas Turquois, pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés. Monsieur le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, la presse, ces derniers jours, s’en est largement fait l’écho : il devient très difficile de trouver du beurre dans les magasins de grande distribution. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.) À certains endroits, c’est même la pénurie qui menace.
En effet, la hausse de la demande mondiale est en contradiction avec la fin des quotas laitiers annoncée il y a deux ans, laquelle a d’abord obligé nombre de nos agriculteurs à réduire leur production pour éviter une baisse des prix plus forte encore.
Aujourd’hui, la situation s’inverse. Devant la hausse invraisemblable de la demande, les prix ont augmenté considérablement, atteignant plus de 7 500 euros la tonne cet été, contre trois fois moins il y a un an et demi. En conséquence, l’industrie agroalimentaire n’a pas pu répercuter cette hausse des coûts auprès de la grande distribution, qui fixe les prix annuellement.
Nous nous trouvons donc dans la situation suivante : certaines grandes surfaces ne veulent pas augmenter encore le prix du beurre, et préfèrent maintenir des prix bas face à des éleveurs qui ne bénéficient pas du prix payé. Ce rapport de force déséquilibré en faveur des centrales d’achat déstabilise toute la filière du lait. Cet état de fait pose, plus généralement, la question de l’attitude de la grande distribution, engagée dans une guerre des prix dévastatrice pour nos agriculteurs.
Ainsi, au-delà des États généraux de l’alimentation, qui visent à permettre aux agriculteurs de vivre dignement de leur travail par le paiement de prix justes, à mettre en place des filières où l’acheteur final n’est pas le seul à déterminer les prix et à instaurer un rapport de force réellement équilibré entre producteurs, transformateurs et distributeurs, que pensez-vous de la situation actuelle, monsieur le ministre, et que comptez-vous faire pour qu’elle cesse dans les meilleurs délais ? (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur plusieurs bancs du groupe REM.) La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Vous avez raison, monsieur le député, de rappeler cette situation quelque peu inédite sur le marché du beurre. La France est l’un des principaux producteurs laitiers en Europe, et nous assistons aujourd’hui à deux phénomènes conjoints : une baisse de la collecte de lait – ce qui est habituel de juin à septembre – et une demande très forte de pays comme les États-Unis et la Chine en raison de la qualité du beurre français.
Nous examinons bien entendu la situation de près. Je ne pense pas que l’on puisse parler de « pénurie » à l’heure actuelle car, plus on avancera dans l’automne et dans l’hiver, plus les stocks laitiers se reconstitueront. Par ailleurs, nous souhaitons que des accords soient trouvés, demain, entre distributeurs et transformateurs, de façon que les magasins soient à nouveau livrés.
Sachez aussi, monsieur le député, que les prix du beurre repartent actuellement à la baisse. Les efforts accomplis sur la collecte devraient permettre à l’ensemble des magasins de se réorganiser.
Je veux enfin rassurer l’ensemble des consommateurs qui nous écoutent : le beurre regarnira les rayons des magasins, et nos concitoyens ne seront pas privés de cette matière première française qui fait l’honneur des tables de France et de notre production laitière. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le groupe Les Républicains. Madame la ministre des solidarités et de la santé, nous discuterons dans quelques heures du budget de la Sécurité sociale.
C’est vrai, le ton a changé. Votre prédécesseure, en plus de crisper et mécontenter tous les professionnels de santé, vous a laissé un système de santé en grande difficulté. Ce n’est pas moi qui le dis, mais la Cour des comptes. Nous saluons donc votre méthode d’apaisement, dont tout le monde avait bien besoin.
Mais, sur le fond, qu’est-ce qui a changé dans ce nouveau budget ? Rien ! (Exclamations sur les bancs du groupe REM.)
Si nous partageons votre volonté de remettre les comptes à l’équilibre, en revanche, sur les moyens, vous ressortez la vieille recette des coups de rabot que l’on a connue : rabot sur le médicament, bien entendu, au risque de tuer l’innovation ; rabot encore avec la maîtrise médicalisée dans les hôpitaux, déjà exsangues, et auxquels vous non plus ne donnez pas les moyens de se moderniser.
Vous savez déjà que les économies que vous avez chiffrées au doigt mouillé à 3 milliards d’euros ne seront pas réalisées : elles ne l’étaient déjà pas l’année dernière, ni l’année d’avant. Mais peu importe puisque vous avez une botte secrète : la hausse de la contribution sociale généralisée – la CSG – dès janvier, mais qui ne sera compensée qu’en octobre. Résultat de l’opération : ces 3 milliards vous permettront d’afficher une amélioration du déficit, alors que les Français subiront une augmentation de 22 % de la cotisation qu’ils paient. Cette augmentation de la CSG, qui s’attaque au portefeuille des classes moyennes pour les matraquer, sera compensée par du vent car les compensations de ces 3 milliards, c’est du vent – M. Darmanin le confirmera.
Ma question est donc simple : madame la ministre, comment allez-vous faire l’année prochaine ? Allez-vous vous attaquer aux réformes de structure nécessaires ou trouverez-vous une autre botte secrète pour boucher les trous avec une autre cotisation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Et du rabot ! Monsieur le député, je vous remercie tout d’abord pour le compliment. Je suis heureuse d’avoir pu apaiser le monde de la santé, il en avait besoin. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) C’est vrai ! Par ailleurs, contrairement à ce que vous pensez, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale que je présente est un PLFSS de réformes structurelles. Un quoi ? Je présenterai notamment un article 35 tout à fait innovant, qui permettra des organisations nouvelles sur le territoire, un décloisonnement entre la ville et l’hôpital, ainsi qu’entre le médico-social et le médical, et évitera les fractures entre professionnels. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) IL faut agir sur la démographie médicale ! Surtout, j’ai une autre botte secrète, en effet. Il est temps de s’intéresser à la pertinence des actes que nous faisons. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) Tous les rapports le montrent : actuellement, environ 25 % des dépenses de santé résultent d’actes inutiles ou redondants. Nous avons d’énormes marges de manœuvre pour notre système de santé. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
Je souhaite donc qu’en ville, comme à l’hôpital, nous ne valorisions pas uniquement l’activité et le toujours plus d’actes, mais la qualité et la pertinence des soins par le changement de la tarification. (Mêmes mouvements.) Je proposerai donc dans le projet de loi de sortir progressivement de la tarification exclusive à l’activité, le « tout T2A ». C’est la promesse que je fais aujourd’hui à l’hôpital public.
Je souhaite également que, pour les soins de ville, nous travaillions à des tarifications au forfait, au parcours et à la coordination. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. Christophe Jerretie, pour le groupe La République en marche. Monsieur le ministre de l’action et des comptes publics, dans quelques instants, notre assemblée votera la première partie du budget de la nation pour 2018.
Pour nos collectivités territoriales, un constat s’impose à tous : c’est un budget consolidant et structurant qui ouvre un nouveau modèle de contractualisation. (Exclamations sur les bancs des groupes LR, FI et GDR.– Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) Quel culot ! Pour la première fois depuis longtemps, les enveloppes financières de fonctionnement et d’investissement se stabilisent. Oui ! Pour nos compatriotes, 2018 marquera également la première étape de la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des foyers. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.)
C’est une promesse de campagne du Président de la République et une excellente mesure sociale. Si cette décision sera la bienvenue pour le porte-monnaie des Français, elle n’aura aucune incidence pour les élus locaux. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Mensonge ! C’est scandaleux de dire cela ! Le Gouvernement, je le rappelle, compensera à l’euro près ce dégrèvement de la taxe d’habitation. Après la suppression de la taxe professionnelle en 2010, dont on discute encore certains éléments dans l’hémicycle, c’est la deuxième des quatre vieilles taxes qui est en passe d’être supprimée partiellement.
Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous confirmer à la représentation nationale les mesures positives pour les collectivités locales de votre budget ? Au-delà, peut-on envisager un travail de fond pour assurer l’aboutissement d’une réforme de la fiscalité locale et des finances publiques ? (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. le ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le député, je voudrais d’abord saluer votre implication, comme celle de très nombreux parlementaires, toute la semaine dernière pour l’examen du budget. Ce travail s’est très bien passé. C’était une première pierre de la transformation de notre pays. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.)
Vous avez raison, ce projet de loi de finances contient trois grandes mesures pour les collectivités locales. Bravo ! Premièrement, depuis 2010, c’est la première fois que le Parlement ne votera pas de baisse des dotations aux collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) C’est vrai ! Mais si, il y en a, des baisses ! Deuxièmement, depuis 2010, c’est la première fois qu’un Parlement ne baissera pas les dotations aux collectivités locales. (Mêmes mouvements.)
Et troisièmement, je le répète parce que la répétition fixe la notion, pour la première fois, nous ne baisserons pas les dotations aux collectivités locales. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.– Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Vous nous prenez pour des débiles ? Il y avait d’autres méthodes : le gouvernement précédent nous avait habitués à une baisse des dotations de 11 milliards ; le projet que soutenait l’opposition parlementaire visait 20 milliards de baisse des dotations. Nous, nous ne baisserons pas les dotations aux collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) Mensonge ! Par ailleurs, depuis longtemps, les élus, notamment ceux qui géraient les fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée, voulaient sortir ces montants de l’enveloppe normée. Le rapporteur général, Joël Giraud, que je voudrais remercier, et moi-même avons fait voter cette disposition : ces fonds ne feront plus partie de l’enveloppe normée, les collectivités locales pourront enfin en disposer.
Enfin, le projet de loi prévoit le maintien total de l’investissement pour les collectivités. Quel amateurisme budgétaire ! La dotation d’équipement des territoires ruraux – DETR –, la dotation de soutien à l’investissement public local – DSIL et les crédits de la politique de la ville sont même en légère augmentation. Cela nous change, n’est-ce pas, monsieur le ministre d’État Gérard Collomb, de ce qui s’est passé depuis plusieurs années ?
Monsieur le député, vous appelez de vos vœux une fiscalité nouvelle, qui à la fois serve le pouvoir d’achat de nos concitoyens et soit plus juste pour les contribuables. C’est ce que nous allons faire : le quinquennat dure cinq ans ! (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Les Constructifs : républicains, UDI, indépendants. Monsieur le ministre de l’économie et des finances, le Conseil constitutionnel, par une décision rendue le 6 octobre 2017, a définitivement enterré la contribution de 3 % sur les dividendes distribués, taxe instaurée en juillet 2012 par l’ancienne majorité socialiste. C’était Macron ! Cette taxe, qui a rapporté à l’État 1,8 milliard d’euros par an entre 2013 et 2017, devra donc être intégralement remboursée aux entreprises qui l’ont payée. Bravo Macron ! Le coût de ce remboursement est estimé, selon vos déclarations, à au moins 10 milliards d’euros, somme bénéficiant d’intérêts moratoires au taux de 4,78 %. Rends l’argent, Macron ! Je fais partie de ceux qui, lors de la séance du 19 juillet 2012, avaient mis en garde le gouvernement socialiste, sans être entendus, quant au grave risque de rupture d’égalité entre les entreprises dont cette mesure était porteuse.
Cette annulation pose trois questions.
Premièrement, tandis que le Gouvernement, à la différence de ses prédécesseurs, a fait un vrai effort de sincérité dans le projet de loi de finances pour 2018 (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM) , quelles mesures entendez-vous prendre pour honorer ce remboursement, alors même qu’il n’existe pour faire face à cette dépense qu’une provision de 300 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2018,… Pour taxer les sociétés ! …et une provision annuelle de 1,8 milliard par an pour chacun des trois exercices suivants ? La France ne risque-t-elle pas de ne pas sortir en 2018 de la procédure pour déficit excessif et de demeurer ainsi le dernier mauvais élève de la zone euro ?
Deuxièmement, en termes de responsabilité politique, comment votre prédécesseur, Pierre Moscovici, alors ministre de l’économie et des finances et actuel commissaire européen chargé du respect de la discipline budgétaire des États, ainsi que Jérôme Cahuzac, alors ministre du budget,… Hou ! …et Christian Eckert, alors rapporteur général du budget, ont-ils pu monter un dispositif aussi anti-européen et anticonstitutionnel ? Ne s’agit-il pas là d’un « scandale d’État », comme vous l’avez déclaré dans la presse le 20 octobre dernier ?
Troisièmement, monsieur le ministre, vous évoquez dans la presse de ce matin l’idée de créer un nouvel impôt sur les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 1 milliard d’euros. Toujours des taxes ! Mais cette idée n’est-elle pas totalement contraire à l’ensemble de la politique fiscale d’abaissement des charges fiscales et sociales sur les entreprises que vous menez à juste titre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LC.) La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances. Monsieur le député,… Un moratoire sur l’impôt sur la fortune ! Pour quatre ans ! …je suis ministre, pas procureur de la République, et je ne suis pas là pour juger les comportements de mes prédécesseurs.
Je confie à l’Inspection générale des finances le soin de faire toute la lumière sur cette affaire, parce que les Français et les parlementaires ont droit à une transparence totale et à l’établissement des responsabilités des uns et des autres. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Y compris celle de Macron ! C’était sous la responsabilité de M. Macron ! L’Inspection générale des finances me rendra son rapport le 10 novembre. Auditionnez le Président de la République ! Bonne idée ! Ma responsabilité, vous le dites parfaitement, est de faire en sorte que, dans les jours qui viennent, la France puisse sortir de la procédure pour déficit public excessif ; que les comptes publics soient bien tenus ; que nous trouvions une solution et les moyens de rembourser ces 10 milliards d’euros.
J’ai commencé des consultations avec les chefs d’entreprise. Ce sont uniquement les très grandes entreprises, celles dont le chiffre d’affaires est supérieur à 1 milliard, qui seront concernées. Je leur ai déjà annoncé qu’elles auraient à participer au remboursement et qu’une contribution exceptionnelle leur serait demandée. Je fais appel à leur sens civique, car l’enjeu, ce ne sont pas uniquement les comptes publics, ni les comptes des entreprises : c’est le respect de la parole de la France et sa crédibilité en Europe. Les entreprises ne sont pas responsables des erreurs du passé ! L’État prendra aussi à sa charge une partie de ce remboursement.
Je souhaite que, d’ici au début de la semaine prochaine, cette affaire soit définitivement réglée, que ce problème de 10 milliards d’euros soit derrière nous. Nous devons décider rapidement, avec le Premier ministre et avec le Président de la République ; apporter une solution la semaine prochaine ; et la présenter à nos partenaires européens et à la Commission européenne, pour que cette affaire soit définitivement derrière nous en début de semaine et que nous puissions nous tourner vers ce qui nous intéresse : l’avenir de la France, la bonne gestion des comptes publics et le redressement économique de notre nation. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LC.) La parole est à M. Olivier Gaillard, pour le groupe La République en marche. Ma question, à laquelle j’associe mes collègues parlementaires gardois, s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Après le gel d’avril 2017, une sécheresse sévère a touché l’ensemble des filières agricoles, y compris les éleveurs, qui sont contraints de nourrir les animaux avec le stockage de fourrage d’hiver.
La viticulture connaît une chute de rendement vertigineuse : un million d’hectolitres au moins manque à la production viticole gardoise par rapport à 2016. La baisse de production oscille entre 30 % et 50 % selon les exploitations, et cette tendance n’est pas près de s’inverser, d’où les réflexions engagées sur l’irrigation dans le département du Gard.
Déjà soumise aux cours internationaux et aux importations massives qui tirent les prix vers le bas, l’agriculture connaît actuellement, dans certaines de ses filières et territoires, des situations dérogeant à la norme, tant les effets du climat sont devenus mortifères pour le maintien de l’activité et d’une juste rémunération.
L’hypothèse d’un traitement fiscal d’exonération totale, appliqué selon des critères clairs et objectifs, aurait l’avantage d’apporter des réponses différenciées aux agriculteurs qui subissent cette sécheresse historique.
Trop nombreuses sont les exploitations qui voient leur survie compromise. La crainte est grande que les 30 millions d’euros de l’enveloppe nationale – toutes filières confondues – du fonds d’action sanitaire et social ne suffisent pas, non plus que le dégrèvement d’office proportionnel aux pertes subies.
Au vu de l’état des trésoreries et des difficultés croissantes des agriculteurs, qui subissent dans le même temps les événements climatiques défavorables et la baisse du prix de leurs produits sur le marché, quelles réponses seront apportées par le ministère à court et à moyen terme ?
Dans ce contexte peu rassurant pour la viabilité des exploitations, il est déjà un élément à propos duquel les bonnes nouvelles sont bienvenues : les aides. Quelles explications et perspectives de solution pouvez-vous nous fournir concernant les blocages, les retards du versement de la dotation jeunes agriculteurs, du versement des mesures agro-environnementales, de l’aide à l’agriculture biologique des années 2015 et 2016 et du financement des dossiers relatifs au plan de compétitivité ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.) Il faudrait lire nos propositions, mais vous avez rejeté notre proposition de loi ! La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le député, je sais, nous savons la souffrance à laquelle cette sécheresse expose un grand nombre de nos viticulteurs sur le territoire.
À ce stade, nous sommes en train d’évaluer l’ampleur des pertes dont les agriculteurs et les producteurs ont été victimes. Cette situation nous rappelle la nécessité de donner des moyens à notre agriculture pour relever le défi de la préservation des ressources en eau. Dans le cadre de la lutte contre le changement climatique, l’État apporte un fort soutien à une mobilisation durable de la ressource en eau qui tienne compte de la diversité des agricultures et des territoires.
Je souhaite également m’appuyer sur des réalisations concrètes et des solutions innovantes, tout en veillant à ne pas fragiliser les exploitations agricoles par des charges administratives et financières supplémentaires qui seraient trop lourdes pour nos producteurs.
Vous m’interrogez également sur les retards de paiement des aides de la PAC. Vous le savez, lundi 16 octobre, l’État a honoré ses engagements en versant 6,3 milliards d’euros sur les comptes d’exploitation des agriculteurs français. Il s’agit du premier versement de l’apport de trésorerie remboursable pour 2017 et du plus important versement d’aide agricole jamais réalisé en France en une seule fois.
Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est engagé aux côtés de nos producteurs pour défendre la qualité de nos productions et soutenir nos producteurs et nos viticulteurs face au changement climatique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.) La parole est à M. Alain Bruneel, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Madame la ministre des solidarités et de la santé, je vous prie d’entendre mon intervention comme un point de vue, qui n’est pas à prendre ou à laisser, mais à discuter, et d’écarter le sentiment que je puisse y apparaître comme un donneur de leçons.
Je veux témoigner avec force du cri d’alerte des personnels de santé et des patients, de la souffrance qu’ils expriment. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018 n’est pas pour nous rassurer, puisque l’économie y est le maître mot avec une baisse de 4,2 milliards d’euros dans le cadre des dépenses de santé. L’urgence est pourtant au rendez-vous : augmentation des maladies chroniques, renoncement aux soins, déserts médicaux ou encore vieillissement de la population. Et le manque de praticiens ! De plus, la hausse injuste du forfait hospitalier augmentera le reste à charge des patients, puisque les complémentaires santé répercuteront le surcoût dans leurs tarifs. Les hôpitaux, déjà étranglés financièrement, ne sont pas épargnés avec plus d’1 milliard d’économies à réaliser en 2018. Madame la ministre, dans les établissements hospitaliers, les personnels sont stressés, fatigués, épuisés. On leur demande de faire toujours plus avec moins de moyens. À titre d’exemple, à l’hôpital de Douai, le personnel a cumulé l’an dernier 73 000 heures supplémentaires non payées, non récupérées.
Si le service public de santé tient aujourd’hui debout, c’est grâce au courage et à l’abnégation de ses salariés (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, NG et FI) qui mettent leur vie personnelle et familiale entre parenthèses pour faire face à l’impératif des soins ; mais à force de tirer sur la corde, elle risque de casser.
Madame la ministre, la santé n’est pas une marchandise destinée à être rentable. Ma question est simple : allez-vous poursuivre une gestion suicidaire pour nos hôpitaux, qui sont déjà en soins palliatifs, ou, au contraire, allez-vous, grâce à une enveloppe de crédits supplémentaires, donner une bouffée d’oxygène au service public de la santé, qui permettrait à la fois au personnel de respirer et à notre population de bénéficier d’un haut niveau de soins ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, NG et FI.) La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le député Burneel,… C’est Bruneel ! (Sourires et exclamations sur de nombreux bancs.) Un peu de respect pour le Parlement, madame la ministre ! Pardonnez-moi, monsieur Bruneel ! C’est l’émotion, parce que vous avez dit beaucoup de bien des personnels hospitaliers, dont j’ai fait partie pendant trente ans… (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) Je sais qu’à l’hôpital, on ne lésine pas sur son temps de travail.
Vous avez raison : l’hôpital fonctionne aujourd’hui comme une entreprise. C’est exactement ce que ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale est en train de faire évoluer. Aujourd’hui, les hôpitaux cherchent des parts de marché ; ils cherchent à faire de l’activité pour être rentables. C’est pourquoi j’ai proposé dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale de sortir progressivement de la tarification à l’activité des hôpitaux, de façon à ne pas favoriser une course effrénée à la recherche de patients et d’actes. (Mêmes mouvements.) C’est tout l’objectif de la réforme que je souhaite mener, afin de valoriser ceux qui font bien et non pas ceux qui font uniquement du chiffre.
Concernant les économies demandées à l’hôpital public, je rajoute 1,8 milliard d’euros à son budget grâce à l’ONDAM fixé à 2,2 % pour les hôpitaux. C’est de l’argent en plus par rapport au budget de cette année.
Par ailleurs, nous savons qu’il y a des marges de progrès à réaliser sur les achats. C’est déjà fait ! Les groupements hospitaliers de territoire permettront de faire énormément d’économies – autour de 1 milliard d’euros sans doute. Enfin, sur le prix des médicaments, nous savons tous qu’il y a des marges de progrès énormes, notamment des médicaments hospitaliers. Nous allons mener un travail particulier pour développer l’accès aux génériques dans les hôpitaux. Nous savons que toutes ces cibles sont tout à fait atteignables, sans remettre en cause la qualité du travail des personnels hospitaliers auxquels je suis particulièrement attachée. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) Vous ne répondez pas à la question ! La parole est à Mme Béatrice Piron, pour le groupe La République en marche. Monsieur le ministre de l’intérieur, lors de votre discours au congrès des sapeurs-pompiers, vous les avez remerciés pour leur contribution dans la formation aux premiers secours. Grâce à la campagne "Adoptons les comportements qui sauvent", décrétée grande cause nationale en 2016, plus de 100 000 personnes ont été formées en un an, principalement par les pompiers, la Croix-Rouge française et la protection civile. Vous avez annoncé la volonté du Gouvernement d’intensifier cette dynamique pour que 80 % de la population soit formée.
Actuellement, en France, seule une personne sur cinq, témoin d’un accident cardiaque, pratiquerait une réanimation, et moins de 50 % des Français savent prodiguer les premiers secours. En Norvège, ce chiffre atteint 95 %. Monsieur le ministre, mesdames et messieurs les députés, il me semble essentiel de sensibiliser tous nos concitoyens à cette nécessité. Nous, élus de la République, nous devrions être tous exemplaires et connaître les gestes pour intervenir.
Symboliquement et concrètement, une action de formation est organisée à l’Assemblée nationale le 13 novembre prochain, date anniversaire d’un attentat que personne n’a pu oublier. Elle sera suivie d’autres formations à partir du 30 novembre. À ce jour, ce sont surtout des députées qui se sont inscrites, ce qui reflète d’ailleurs les statistiques nationales. J’attends que vous vous réveilliez, messieurs les députés !
Mais vous, monsieur le ministre, quelles sont les mesures que vous envisagez de prendre pour atteindre ce premier objectif de 80 % de la population formée ? (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur. Madame la députée, vous l’avez dit, lors du congrès national des sapeurs-pompiers tenu à Ajaccio, il y a quinze jours, cette fédération a décidé de lancer une grande campagne sur les gestes qui sauvent. Vous avez donné les chiffres : aujourd’hui, en France, moins de 50 % de la population est formée aux premiers gestes qui sauvent, quand dans les pays scandinaves, c’est l’ensemble de la population qui l’est. Avec les sapeurs-pompiers, dont le congrès à Ajaccio était un moment formidable, nous allons lancer une grande campagne. Elle nous concerne tous ! Elle concerne l’éducation nationale, l’université, chacune de nos communes, chacune et chacun d’entre nous.
Mesdames, messieurs les députés, nous lancerons une campagne médiatique dans les prochains temps. Nous veillerons à ce que chacune et chacun soit sensibilisé. Aux côtés de la ministre chargée de la santé, nous ferons en sorte de permettre de sauver chaque année des dizaines de milliers de vies, qui pourraient en effet être sauvées si nous connaissions les uns et les autres les gestes qui sauvent. Je vous félicite d’avoir lancé ici, à l’Assemblée nationale, une campagne, et j’ai bien compris que vous adressiez un appel aux hommes de cette assemblée. Je suis sûr qu’ils y répondront ! (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. Guillaume Garot, pour le groupe Nouvelle Gauche. Monsieur le Premier ministre, beaucoup de nos concitoyens peinent aujourd’hui à trouver un médecin généraliste. C’est une inégalité supplémentaire entre les Français : d’un côté, des grandes villes ou des départements en bord de mer, avec des médecins en surnombre ; de l’autre, des territoires urbains et ruraux qui voient leurs médecins partir à la retraite sans trouver de remplaçant. Vous avez récemment présenté un plan pour la démographie médicale ; nouveau plan, mais toujours les mêmes recettes ! Vous pourrez avoir les plus belles maisons de santé, proposer les aides les plus attractives,… Eh oui ! …vanter la télémédecine du futur – et tout cela est très bien –, mais l’expérience montre maintenant que cela ne suffit pas.
C’est pourquoi les députés du groupe Nouvelle Gauche proposeront dans le budget de la Sécurité sociale de nouvelles règles pour l’installation des médecins, avec ce qu’on appelle le conventionnement sélectif. En clair, l’assurance maladie ne pourrait plus conventionner les médecins qui voudraient s’installer dans des zones surdotées, pour les inciter à exercer ailleurs. Cette régulation existe – et fonctionne – pour les pharmaciens et d’autres professionnels de santé. Je précise que nos collègues Richard Ferrand et Brigitte Bourguignon, ou Christophe Castaner apprécieront cet amendement puisqu’ils l’avaient signé l’an dernier. (Exclamations et applaudissements sur les bancs des groupes NG, LR, LC et GDR.) Cela prouve que ce sujet dépasse les clivages politiques !
Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement doit aujourd’hui aller plus loin. Êtes-vous prêt à étudier le conventionnement sélectif pour répondre à la crise d’un système à bout de souffle, et donner un médecin à chaque Français ? (Applaudissements sur les bancs des groupes NG et GDR.) Pour une fois, soyez fidèles à vos convictions ! Cela nous changera ! La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le député, comme vous le savez, le plan que j’ai présenté est différent et propose énormément de mesures nouvelles qui n’ont jamais été expérimentées. (Protestations sur les bancs des groupes LR, LC et GDR.) Il propose notamment de faire entrer la télémédecine et la téléexpertise dans le droit commun, alors que cela fait cinq ans que nous attendons le début des expérimentations. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.) Autre point : nous valorisons de 25 % les consultations détachées dans les territoires sous-dotés. Nous créons également 300 postes d’assistants partagés entre les hôpitaux publics et les zones sous-dotées, ainsi que 500 lieux de stage pour les étudiants en médecine, qui leur permettront de se familiariser avec l’exercice libéral dans ces zones sous-dotées. Nous créons des possibilités de délégation de tâches et mettons en place des financements incitatifs qui encouragent les exercices partagés et multisites. Tout cela concerne tant les médecins que les autres professionnels de santé qui interviennent dans la délégation de tâches. Enfin, l’installation des médecins en zones sous-dotées est favorisée par des incitations financières qui ont été largement revalorisées. C’est insuffisant ! C’est déjà fait ! Pour la première fois, nous faisons confiance aux médecins. Nous leur confions une responsabilité territoriale et les incitons à travailler en commun avec l’ensemble des professionnels de santé et les élus locaux. (Protestations sur les bancs du groupe LR.) Ce travail, qui vise à améliorer la couverture territoriale, est d’ores et déjà programmé au sein des ARS. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.) La parole est à M. Laurent Garcia, pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés. Monsieur le ministre d’État, ministre de l’intérieur, Mme la garde des sceaux vient de lancer les cinq grands chantiers de la justice visant à transformer celle-ci en profondeur. L’un de ces grands chantiers s’attache à l’amélioration et à la simplification de la procédure pénale car si celle-ci protège, elle pèse aussi sur le quotidien des forces de l’ordre, des parquets et des juges du siège. Justement, s’agissant des forces de l’ordre, on a vu s’installer un certain blues du policier national : comme certaines professions médicales, les policiers se sentent moins reconnus et moins respectés. Outre l’évolution sociétale, ce sentiment de non-reconnaissance se nourrit en grande partie des normes administratives sans cesse croissantes et extrêmement chronophages qui amputent d’autant le temps consacré au cœur même du métier. Ce sentiment est exacerbé par l’emploi à des tâches qui peuvent être considérées comme subalternes, faute de pouvoir faire appel à la réserve civile.
En effet, contrairement à la gendarmerie qui dispose d’une réserve civile qu’elle est en capacité de former, la police nationale ne peut faire de même, par manque de budget et de structures de formation. Les rares volontaires civils sont donc confinés dans des tâches monotones et peu attractives, et ce sont les policiers eux-mêmes qui assurent toutes les missions, y compris les encadrements de manifestations, notamment sportives et culturelles, se sentant parfois ainsi sous-employés.
Monsieur le ministre d’État, quelle est votre position sur la réserve civile mobilisable dans la police nationale ? Serait-il envisageable de prévoir un crédit de formation pour pouvoir réellement bénéficier de ces moyens humains, afin de suppléer efficacement les agents de la police nationale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur quelques bancs du groupe REM.) La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le député, vous posez trois questions. La première renvoie à la réforme de la procédure pénale. Nous y travaillons avec Mme la garde des sceaux, car aujourd’hui, beaucoup de nos policiers sont pris par des tâches administratives qui ne leur permettent plus d’être sur le terrain. Créer une police de sécurité du quotidien demande évidemment que nombre de nos policiers puissent retourner sur le terrain. Fumisterie ! Pour une fois, nous travaillons en commun, ministre de l’intérieur et garde des sceaux, et c’est peut-être la principale novation, car nous ne voulons plus d’affrontement entre police et justice. Les uns et les autres travaillent à la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.)
S’agissant des tâches indues, oui, nous travaillons aujourd’hui pour que les policiers ne passent plus leur temps à faire des gardes statiques, mais reviennent sur le terrain.
Enfin, pour répondre à votre troisième question relative à la garde nationale, je rappelle que pour la gendarmerie la somme consacrée à cet objectif est de 98,7 millions d’euros, contre seulement 32 millions d’euros pour la police. Nous venons d’augmenter cette dernière somme de 7 millions d’euros, car nous pensons qu’il est extrêmement important de libérer certains de nos policiers. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) C’est bon, c’est bon… La parole est à M. Guillaume Peltier, pour le groupe Les Républicains. Monsieur le Premier ministre, je ne voudrais pas, par cette question, briser le bel unanimisme médiatique qui préside aux commentaires sur l’avenir de l’Europe. J’évoquerai deux questions essentielles : le travail détaché et le CETA – l’accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne.
Par l’action magistrale – dit-on – de votre gouvernement, la France, l’Europe, que dis-je : le monde… L’univers ! …seraient enfin passés de l’ombre à la lumière. Et pourtant, sur la question du travail détaché, vous avez privilégié la concurrence déloyale plutôt que la fin des cotisations sociales du pays d’origine. Vous avez sacrifié le transport routier français sur l’autel d’un accord illusoire sur la durée du détachement, qui dans les faits ne réglera rien. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR et parmi les députés non-inscrits.)
Telle est votre méthode politique : l’illusion plutôt que l’action,… L’enfumage ! …faire croire plutôt que faire.
Peut-être pourrions-nous nous consoler avec le CETA ? Hélas, la désillusion de nos compatriotes sera à la mesure de la grande illusion pratiquée par votre gouvernement. Le CETA, c’est un déni démocratique. Il a raison ! Comment accepter qu’un traité commercial puisse être appliqué en France, sans que ni le Parlement français ni le peuple français lui-même n’en soient saisis ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) Il faut organiser un référendum ! Le CETA, c’est un drame économique pour nos paysans qui subiront encore les importations déloyales. Le CETA, c’est un scandale juridique car désormais des multinationales pourront traduire devant les tribunaux les États et les peuples souverains. Vous aviez là pourtant une opportunité historique de tourner le dos aux excès de l’ultra-libéralisme et de la loi du plus fort. (« Rejoignez-nous ! » sur plusieurs bancs des groupes FI et GDR.) Mélenchon est d’accord ! (Sourires sur certains bancs du groupe LR). Monsieur le Premier ministre, ma question est la suivante : quand renoncerez-vous à l’ultra-libéralisme ? Quand allez-vous enfin protéger nos travailleurs, nos ouvriers, nos paysans ? (Exclamations sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
Quand rétablirez-vous la souveraineté de notre peuple, la puissance et la grandeur de notre Europe ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, GDR et FI.– Exclamations persistantes sur les bancs des groupes REM et MODEM.) Bravo camarade ! Un communiste de plus ! Encore un qui va se faire exclure ! La parole est à Mme la ministre du travail. Monsieur le député, je me concentrerai sur le travail détaché, puisque c’est l’actualité du jour. Nous aurons l’occasion de revenir sur les autres sujets, lors d’autres séances de questions au Gouvernement.
Pour revenir à ce que vous avez dit au tout début de votre intervention : oui, nous sommes un gouvernement résolument pro-européen. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) Un gouvernement ultra-libéral ! Nous savons que la France sera forte si l’Europe est forte ; et pour que l’Europe soit forte, il faut qu’elle soit à la fois monétaire, économique et sociale. C’est cela notre combat. C’est cela que nous voulons construire. (Mêmes mouvements.) Le combat de l’ultra-libéralisme ! Sur le travail détaché, je voudrais rectifier un peu ce que vous avez dit. Il est vrai que l’accord n’a été trouvé qu’à vingt-trois heures, après douze heures de négociations : vous n’avez peut-être pas encore pris connaissance de tous les détails. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) C’est la France soumise ! Nous aussi avons siégé tard pour l’examen du projet de loi de finances la semaine dernière, jusqu’à deux heures du matin dimanche ! Tout d’abord, sur le sujet à travail égal salaire égal, nous avons accompli d’immenses progrès, non seulement par rapport au texte de la directive de 1996, mais aussi par rapport à la version qui avait été proposée en juin dernier : c’est à présent l’ensemble des compléments de salaire qui est pris en compte pour le travail détaché. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Deuxième chose dont vous n’avez peut-être pas pris connaissance, puisqu’elle est intervenue à minuit et quart :… Vous vous êtes couchée tard pour une fois ! …nous avons adopté le règlement 883 en matière de sécurité sociale. C’est une première étape pour lutter contre le travail détaché frauduleux : ce texte fixe une obligation d’inscription à la Sécurité sociale trois mois avant un détachement. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Enfin, nous avons fixé à douze mois la durée maximale d’un détachement, avec une possibilité de prolongation de six mois – la directive sur les travailleurs détachés, dans sa rédaction originelle, de 1996, précisait que le travail détaché devait être temporaire, mais ne fixait pas de limite de temps. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.– Exclamations persistantes sur les bancs du groupe LR.)
Vous n’y croyez peut-être pas, mais vous verrez que dans le transport, avec les dispositions que nous avons obtenues, nous sommes en meilleure posture pour défendre nos transporteurs. (Mêmes mouvements.) Ce n’est pas une réponse ! La parole est à Mme Pascale Boyer, pour le groupe La République en marche. Madame la ministre des transports, dans la perspective de la préparation de la loi d’orientation des mobilités qui sera présentée par le Gouvernement au premier semestre 2018, j’appelle votre attention sur la place donnée au train de nuit lors des Assises de la mobilité, alors que les fermetures de lignes de nuit se succèdent et que le train de nuit Paris-Nice est aujourd’hui menacé.
Lancées le 19 septembre dernier, les Assises de la mobilité ont d’ores et déjà permis de poser les grands principes qui orienteront les mobilités de demain : respectueux de l’environnement, accessibles au plus grand nombre, les transports doivent viser la continuité territoriale sans nécessiter d’investissements lourds dans les infrastructures. Or malgré une qualité de service dégradée, les trains Intercités de nuit correspondent à ces grands principes.
Le transport ferroviaire figure parmi les moins polluants. Le réseau Intercités de nuit assure le désenclavement des territoires de montagne, des territoires ruraux, et favorise le report modal. Ces dernières années, des lignes de nuit ont été supprimées en raison de leur déficit supposé. On a préféré les cars Macron ! Mais l’ambition des Assises de la mobilité, qui consiste à intégrer le coût des externalités négatives et le bénéfice des externalités positives au calcul de la rentabilité, pourrait conduire à revoir le bilan.
La période de pause dans le développement des lignes à grande vitesse n’est-elle pas l’occasion de réveiller les trains de nuit ? Le train de nuit Paris-Briançon circule attelé au Paris-Nice. Cela permet de mutualiser les coûts tout en apportant une fréquentation importante et complémentaire entre les deux destinations. La suppression du Paris-Nice ne risque-t-elle pas de reporter de nombreux coûts sur le Paris-Briançon et de compromettre, à terme, le désenclavement des Hautes-Alpes ?
L’État peut-il s’engager, madame la ministre, sur la pérennité du Paris-Briançon ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.) Ce n’est pas un sujet de question au gouvernement, mais de question orale sans débat ! Et Cahors ? La parole est à Mme la ministre chargée des transports. Madame la députée, vous m’interrogez sur la pérennité du train de nuit entre Paris et Briançon, et plus largement entre Paris et Nice. Tout d’abord, je vous confirme que l’État s’engage à poursuivre l’exploitation du train de nuit entre Paris et Briançon. Et Cahors ? Je sais qu’il répond à une attente forte des usagers et des élus. C’est précisément la raison pour laquelle l’État, la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, le département des Hautes-Alpes et SNCF Réseau se sont engagés à hauteur de 20 millions d’euros pour réaliser des travaux d’amélioration sur la section Briançon - Mont-Dauphin.
Cette rénovation, qui a débuté en septembre dernier, s’achèvera d’ici à la fin novembre. Elle a certes causé des gênes pour les voyageurs, mais elle permettra d’assurer la pérennité de cette ligne et d’améliorer durablement les conditions de circulation et le confort des voyageurs, ce dont je me réjouis. Au-delà, comme vous, je suis convaincue que les trains de nuit peuvent répondre aux besoins de mobilité de certains territoires.
À l’heure où certains laissent entendre que nous voudrions fermer des lignes ou des gares TGV, nous avons là un exemple très concret de l’engagement du Gouvernement au service de la mobilité pour tous dans tous les territoires. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) Avec les bus Macron ! La parole est à M. Napole Polutele, pour le groupe Les Constructifs : républicains, UDI, indépendants. Monsieur le Premier ministre, avec le temps, c’est autour du Pacifique que les affaires du monde se passent : sur ses rives réside une majorité de la population mondiale, sur ses pourtours se déploie une puissance économique considérable et sur ses eaux se croisent de nombreuses routes commerciales. L’Europe est loin, et pratiquement absente. Demain, seule la France continuera à y être présente pour l’ensemble de l’Union européenne, car le Brexit ne permettra plus à la Grande-Bretagne de représenter l’Europe. Avec la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et les îles Wallis et Futuna, nos collectivités occupent une superficie plus grande que l’Europe et une zone économique exclusive qui donne à la France la deuxième place mondiale. Cela suscite de grands espoirs pour l’avenir. Le secrétaire d’État Sébastien Lecornu est venu sur place prendre la pleine mesure de nos relations interrégionales et leur enjeu pour l’avenir.
Monsieur le Premier ministre, comment la France entend-elle développer ses relations internationales dans le Pacifique ? Notre pays sera-t-il représenté dans les instances locales à un niveau crédible et a-t-il pour ambition d’y tenir un rôle ? Soutiendrez-vous l’adhésion de Wallis-et-Futuna au Forum du Pacifique ? Quel est le calendrier que la France entend suivre concernant le sommet France-Océanie et quelles y seront ses intentions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LC.) La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Oui, monsieur le député, la France est pleinement un pays du Pacifique, comme elle est pleinement un pays de l’océan Indien, un pays de la Caraïbe, un pays de l’Amérique latine. Car la France rayonne à travers le vaste monde par toutes les facettes de sa diversité, de ses territoires – et aussi de ses terroirs, madame Dalloz – et de ses aires marines. Oui, monsieur le député, le Pacifique, ce bien commun de l’humanité, est riche en matière humaine, en matière de culture ou de biodiversité. On attend du concret dans la réponse ! Quant au concret, c’est bien simple : le Gouvernement était justement représenté lors du Forum des îles du Pacifique. M. Lecornu y était et il a porté cette parole forte de la France pour appuyer l’accession au statut de membre à part entière de Wallis-et-Futuna.
Par ailleurs, le Gouvernement reste évidemment très actif dans la communauté du Pacifique. Il reste attaché au Fonds Pacifique, qui permet une coopération économique, sociale et culturelle. Il noue aussi un partenariat stratégique avec les États voisins – je pense bien sûr à l’Australie, et au dialogue dense que nous menons avec la Nouvelle-Zélande. En 2018, il y aura une échéance capitale : le sommet France-Pacifique-Océanie. Préparons-le ensemble ; c’est un bel horizon que de réussir à ce que le Pacifique, ce cœur battant de notre humanité, reste aussi dans le cœur de tous les Français. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à Mme Annie Vidal, pour le groupe La République en marche. Madame la ministre des solidarités et de la santé, l’hôpital est un maillon essentiel de notre système de santé, notamment du fait de ses services d’urgence. Le nombre de passages annuels dans ces derniers est en augmentation constante : 3,5 % de plus en moyenne chaque année depuis 2013. Ce sont près de 56 000 personnes qui se présentent chaque jour dans nos 734 services d’urgence. Ceux-ci dispensent une prise en charge sanitaire de haut niveau, et en même temps sont le dernier rempart face à des situations de grande détresse.
Les urgences présentent la particularité d’être à l’interface de la médecine et des maux de la société. Depuis leur structuration en 1995, elles se sont adaptées aux évolutions du terrain. De nombreux rapports ont été rédigés à ce sujet : le dernier en date, déposé en juillet 2017 au nom de la commission des affaires sociales du Sénat, met notamment en avant le renforcement de la demande sociale et la très grande précarité d’une part non négligeable des patients accueillis, précarité visible chez ceux se présentant avec des pathologies très avancées, mais également chez ceux qui relèvent d’une consultation simple. Ils viennent aux urgences parce qu’ils n’ont pas su s’orienter dans le parcours de soins ou… Parce qu’ils n’ont plus de médecin traitant ! …parce qu’ils n’ont pas trouvé de professionnels médicaux à proximité de leur lieu de résidence. Entre l’urgence vitale, l’urgence traumatique, l’urgence médicale et l’urgence sociale, ces services prennent une part prépondérante dans le parcours de soins et je salue l’investissement exceptionnel des équipes, leurs compétences et leur dévouement.
Pourtant, la question de la soutenabilité et de la viabilité de l’actuel système se pose. Quelles sont les mesures, madame la ministre,… Merci, madame la députée.
La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Madame la députée, les urgences sont en effet très souvent la porte d’entrée dans le système de soins et dans le système hospitalier. Vingt millions de nos concitoyens ont fréquenté les urgences en 2016, et ce nombre augmente chaque année. Normal, il n’y a plus de médecins ! Cette augmentation de la fréquentation des urgences s’explique par trois raisons en amont : des difficultés financières, qui contraignent parfois les Français à renoncer à aller chez des professionnels de ville du fait du reste à charge ou des dépassements d’honoraires ; des raisons territoriales, parce que l’offre de soins sur les territoires n’est pas suffisante pour permettre l’accès aux soins ; des problèmes pour assurer la permanence des soins, dans la mesure où il est difficile d’accéder à un médecin de nuit alors que les urgences sont ouvertes vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
Par ailleurs, les urgences souffrent également d’un déficit de lits d’aval. Elles sont ainsi surchargées car nous n’avons pas les moyens de faire hospitaliser toutes les personnes, notamment âgées, qui restent parfois sur des brancards pendant de très nombreuses heures. Nous devons donc aussi travailler sur cette question des lits d’aval, notamment des lits de soins de suite et de réadaptation.
Je propose donc, premièrement, d’améliorer la permanence des soins dans le secteur de ville ; deuxièmement, d’adosser auprès des services hospitaliers des maisons de santé pluriprofessionnelles ou des réseaux de soins afin d’assurer la permanence des soins à des tarifs abordables ; troisièmement, de travailler sur la gradation des prises en charge entre les groupements hospitaliers de territoire de façon à ne pas avoir de services redondants dans des hôpitaux qui sont à vingt kilomètres les uns des autres. Enfin, je traiterai évidemment de l’offre de ville de premier recours autour des hôpitaux, car elle est absolument nécessaire pour un meilleur maillage territorial. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.) Quel baratin ! Nous avons terminé les questions au Gouvernement. La séance est suspendue. (La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze.) La séance est reprise.
Le Président Macron, le Gouvernement et vous-même vous gargarisez d’avoir obtenu un accord majeur pour les travailleurs et les travailleuses détachés. Vous affirmez même que l’Europe sociale serait en marche. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
Vous dites lutter contre le dumping social et protéger correctement les 2 millions de travailleurs et travailleuses détachés en Europe, dont 400 000 sont en France. (Les applaudissements couvrent la voix de l’oratrice.) Qu’est-ce que ça veut dire, ça ? Comme nous y sommes désormais habitués, ce n’est que de la poudre de perlimpinpin – pour reprendre une expression chère à Jupiter ! (Huées sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
On est très loin d’une harmonisation par le haut des conditions de travail des personnes détachées, et ce pour trois motifs.
Premièrement, puisque les travailleurs et travailleuses vont continuer à payer leurs cotisations dans leur pays d’origine et non dans le pays où ils travaillent effectivement, le coût de la main d’œuvre restera inférieur au coût des travailleurs embauchés sous le régime du droit national.
Deuxièmement, votre projet de directive a pu être conclu parce que vous avez accepté de sacrifier les travailleurs et travailleuses du secteur routier, alors qu’il s’agit du secteur le plus fragilisé. Elle a raison ! Savez-vous qu’un ou une Bulgare est rémunéré environ 200 euros par mois ? Avez-vous vu les millions de camions qui circulent chaque jour sur les routes et les conditions dans lesquelles ces personnes travaillent ? Et avez-vous vu le prix du gazole ? Ce n’est pas acceptable !
Enfin, vous ne vous donnez pas les moyens de lutter efficacement contre la fraude. Votre propre ministère estime qu’entre 220 000 et 300 000 travailleurs sont en situation de détachement sans avoir été préalablement déclarés !
Pour lutter véritablement contre le dumping social en Europe, qu’il soit légalisé ou illégal, il faut remettre en cause le principe même de la directive et actionner la clause de désengagement, l’ opt out , comme nous, à La France insoumise, le proposons. Très bien ! Nous regrettons que vous n’ayez pas eu le courage de soutenir cette revendication.
Toutefois, il vous est encore possible de faire de cette négociation une avancée. Ma question, madame la ministre, est de savoir si vous allez introduire dans les négociations le sujet de la lutte contre la fraude, remettre en cause la directive d’exécution de 2004, et aborder enfin l’enjeu de l’harmonisation sociale par le haut. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur plusieurs bancs du groupe GDR.) Merci, madame la députée.
La parole est à Mme la ministre du travail. Madame la députée, oui, je l’affirme, l’accord sur la directive européenne relative aux travailleurs détachés est une étape importante dans la construction de l’Europe sociale ; c’est un succès majeur sur le chemin de l’Europe sociale que nous désirons ! (« Bravo ! » et vifs applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.– Exclamations sur les bancs du groupe FI ainsi que sur les bancs du groupe LR.) Vous avez oublié les transports ! Et l’accord ne s’appliquera qu’en 2022 ! Le Président de la République s’y était engagé ; il n’a pas ménagé ses efforts. Nous avons œuvré de concert avec Nathalie Loiseau et Élisabeth Borne, et nous avons obtenu hier, collectivement, à Luxembourg, une victoire majeure. C’est celle, je le répète, de l’Europe sociale, c’est-à-dire d’une Europe qui non seulement protège les salariés, mais aussi permet une concurrence plus équitable entre les entreprises. (Exclamations sur les bancs du groupe FI.)
Quatre résultats ont été acquis hier. Le premier est que, sur le même lieu de travail, il y ait à travail égal, salaire égal ; c’est une avancée considérable par rapport à ce qui avait été décidé en 1996. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LC.) Vingt et un ans plus tard, nous avons enfin une égalité renforcée ; cela inclut non seulement les salaires de base, tel le SMIC, mais aussi les primes et les accessoires du salaire : les remboursements de frais et les indemnités relatives à l’hébergement ou aux déplacements viendront en plus, et non en déduction du salaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.– Exclamations sur les bancs du groupe FI.)
Deuxièmement, s’agissant du transport, les vingt-huit États membres ont réaffirmé hier qu’il faisait bien partie du champ de la directive relative aux travailleurs détachés – ce qui n’était pas gagné d’avance ! (Exclamations sur les bancs du groupe FI ainsi que sur les bancs du groupe LR.) C’est faux ! En revanche, les modalités détaillées seront négociées dans le cadre du paquet « mobilité ».
Pourquoi ? Tout le monde peut comprendre que contrôler le travail d’un chauffeur dans un camion, ce n’est pas la même chose que contrôler un chantier !
Il y a des modalités spécifiques qui seront négociées, mais le principe a été affirmé : oui, le transport fait bien partie de la directive relative aux travailleurs détachés. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) Mensonge ! Troisièmement, nous avons fait une avancée majeure au sujet de la fraude.
Quant au quatrième résultat, je le présenterai à l’occasion de la réponse à la prochaine question ! (Rires et applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à Mme Sabine Thillaye, pour le groupe La République en marche. Monsieur le Premier ministre, hier soir, dans la nuit, un accord ambitieux a été trouvé sur la révision de la directive européenne concernant les travailleurs détachés. Pour la France, pour l’Europe, c’est un succès majeur. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
Depuis plusieurs mois, le Président de la République s’est mobilisé pour faire respecter le principe d’une concurrence européenne juste, régulée et encadrée. Il a multiplié les rencontres avec ses homologues et est parvenu à convaincre des États initialement très réticents. C’est la preuve qu’une France engagée en Europe, c’est une France écoutée et respectée. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe REM.)
Cet accord, monsieur le Premier ministre, c’est aussi un succès indéniable pour votre gouvernement et pour la ministre du travail, Muriel Pénicaud. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LR.) Les avancées sont majeures : plafonnement de la durée du détachement ; consécration du principe : « à travail égal, salaire égal » ; renforcement, enfin, de la lutte contre les abus, les fraudes et le dumping social. Non ! Ce n’est pas vrai ! La commission des affaires européennes a été à l’initiative pour apporter une contribution utile aux négociations. Je tiens ici à saluer, sur ce point, le travail de Jean-Louis Bourlanges et de Typhanie Degois (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM) , dont la proposition de résolution sur le détachement des travailleurs a été adoptée par notre assemblée à une très large majorité.
Monsieur le Premier ministre, l’accord conclu hier soir au Conseil de l’Union européenne est historique. C’est une capitulation ! Il constitue une première étape décisive vers la construction d’une Europe sociale, une Europe qui protège. Quelle est votre réaction sur cet accord et sur les conséquences qu’il aura ? (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. le Premier ministre. Vous avez raison, madame la députée, l’accord conclu hier est un bon accord. Pas pour tout le monde ! Pas pour les salariés ! C’est un bon accord pour l’Europe, pour la France et pour l’ensemble des travailleurs français et européens. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LC.)
Cet accord, il ne nous a pas été concédé par des partenaires qui, spontanément, auraient été sur la même ligne que nous. Il a été obtenu parce que le Président de la République, les membres du Gouvernement, la diplomatie française,… Se sont couchés ! …les députés européens et Mme la ministre du travail ont effectué un travail remarquable de discussion, de persuasion et de diplomatie. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.) À chaque entretien entre des responsables français et européens, le sujet était évoqué, et les arguments français étaient poussés, si bien qu’une majorité a pu se constituer.
Dans une discussion, mesdames, messieurs les députés, on n’obtient pas toujours ce que l’on souhaite. Mais quand les positions françaises prévalent, comme c’est le cas ici ; quand l’accord est meilleur que celui mis sur la table à Malte il y a quelques mois, comme c’est encore le cas ; quand l’accord, en un mot, est meilleur que celui qui prévalait avant la discussion, alors il faut s’en réjouir. J’aimerais donc que ceux qui contestent cet accord considèrent le parcours effectué depuis que nous avons engagé la discussion : qui, sur ces bancs, peut nier que la situation est meilleure après l’accord qu’avant l’accord ? (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LC.)
Sur quatre points majeurs nous avons pu, grâce à un travail minutieux, patient et déterminé, obtenir des avancées : c’est vrai sur le principe « à travail égal, salaire égal », dans un même lieu, sur la durée du détachement,… Elle est en moyenne de trois mois en Europe ! …comme sur les moyens de contrôle pour éviter les fraudes. Sur ces points, nous avons obtenu beaucoup, et nous devons maintenant passer à la mise en œuvre.
Je veux enfin vous exprimer, très tranquillement et très solennellement, la très grande fierté que nous éprouvons face au résultat obtenu, et la très grande fierté d’avoir au sein de ce gouvernement, à mes côtés, une ministre du travail exceptionnelle, qui a joué tout son rôle en cette occasion. (Mmes et MM. les députés des groupes REM et MODEM se lèvent et applaudissent longuement. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LC.) La parole est à M. Nicolas Turquois, pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés. Monsieur le ministre de l’agriculture et de l’alimentation, la presse, ces derniers jours, s’en est largement fait l’écho : il devient très difficile de trouver du beurre dans les magasins de grande distribution. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.) À certains endroits, c’est même la pénurie qui menace.
En effet, la hausse de la demande mondiale est en contradiction avec la fin des quotas laitiers annoncée il y a deux ans, laquelle a d’abord obligé nombre de nos agriculteurs à réduire leur production pour éviter une baisse des prix plus forte encore.
Aujourd’hui, la situation s’inverse. Devant la hausse invraisemblable de la demande, les prix ont augmenté considérablement, atteignant plus de 7 500 euros la tonne cet été, contre trois fois moins il y a un an et demi. En conséquence, l’industrie agroalimentaire n’a pas pu répercuter cette hausse des coûts auprès de la grande distribution, qui fixe les prix annuellement.
Nous nous trouvons donc dans la situation suivante : certaines grandes surfaces ne veulent pas augmenter encore le prix du beurre, et préfèrent maintenir des prix bas face à des éleveurs qui ne bénéficient pas du prix payé. Ce rapport de force déséquilibré en faveur des centrales d’achat déstabilise toute la filière du lait. Cet état de fait pose, plus généralement, la question de l’attitude de la grande distribution, engagée dans une guerre des prix dévastatrice pour nos agriculteurs.
Ainsi, au-delà des États généraux de l’alimentation, qui visent à permettre aux agriculteurs de vivre dignement de leur travail par le paiement de prix justes, à mettre en place des filières où l’acheteur final n’est pas le seul à déterminer les prix et à instaurer un rapport de force réellement équilibré entre producteurs, transformateurs et distributeurs, que pensez-vous de la situation actuelle, monsieur le ministre, et que comptez-vous faire pour qu’elle cesse dans les meilleurs délais ? (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur plusieurs bancs du groupe REM.) La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Vous avez raison, monsieur le député, de rappeler cette situation quelque peu inédite sur le marché du beurre. La France est l’un des principaux producteurs laitiers en Europe, et nous assistons aujourd’hui à deux phénomènes conjoints : une baisse de la collecte de lait – ce qui est habituel de juin à septembre – et une demande très forte de pays comme les États-Unis et la Chine en raison de la qualité du beurre français.
Nous examinons bien entendu la situation de près. Je ne pense pas que l’on puisse parler de « pénurie » à l’heure actuelle car, plus on avancera dans l’automne et dans l’hiver, plus les stocks laitiers se reconstitueront. Par ailleurs, nous souhaitons que des accords soient trouvés, demain, entre distributeurs et transformateurs, de façon que les magasins soient à nouveau livrés.
Sachez aussi, monsieur le député, que les prix du beurre repartent actuellement à la baisse. Les efforts accomplis sur la collecte devraient permettre à l’ensemble des magasins de se réorganiser.
Je veux enfin rassurer l’ensemble des consommateurs qui nous écoutent : le beurre regarnira les rayons des magasins, et nos concitoyens ne seront pas privés de cette matière première française qui fait l’honneur des tables de France et de notre production laitière. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. Jean-Pierre Door, pour le groupe Les Républicains. Madame la ministre des solidarités et de la santé, nous discuterons dans quelques heures du budget de la Sécurité sociale.
C’est vrai, le ton a changé. Votre prédécesseure, en plus de crisper et mécontenter tous les professionnels de santé, vous a laissé un système de santé en grande difficulté. Ce n’est pas moi qui le dis, mais la Cour des comptes. Nous saluons donc votre méthode d’apaisement, dont tout le monde avait bien besoin.
Mais, sur le fond, qu’est-ce qui a changé dans ce nouveau budget ? Rien ! (Exclamations sur les bancs du groupe REM.)
Si nous partageons votre volonté de remettre les comptes à l’équilibre, en revanche, sur les moyens, vous ressortez la vieille recette des coups de rabot que l’on a connue : rabot sur le médicament, bien entendu, au risque de tuer l’innovation ; rabot encore avec la maîtrise médicalisée dans les hôpitaux, déjà exsangues, et auxquels vous non plus ne donnez pas les moyens de se moderniser.
Vous savez déjà que les économies que vous avez chiffrées au doigt mouillé à 3 milliards d’euros ne seront pas réalisées : elles ne l’étaient déjà pas l’année dernière, ni l’année d’avant. Mais peu importe puisque vous avez une botte secrète : la hausse de la contribution sociale généralisée – la CSG – dès janvier, mais qui ne sera compensée qu’en octobre. Résultat de l’opération : ces 3 milliards vous permettront d’afficher une amélioration du déficit, alors que les Français subiront une augmentation de 22 % de la cotisation qu’ils paient. Cette augmentation de la CSG, qui s’attaque au portefeuille des classes moyennes pour les matraquer, sera compensée par du vent car les compensations de ces 3 milliards, c’est du vent – M. Darmanin le confirmera.
Ma question est donc simple : madame la ministre, comment allez-vous faire l’année prochaine ? Allez-vous vous attaquer aux réformes de structure nécessaires ou trouverez-vous une autre botte secrète pour boucher les trous avec une autre cotisation ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Et du rabot ! Monsieur le député, je vous remercie tout d’abord pour le compliment. Je suis heureuse d’avoir pu apaiser le monde de la santé, il en avait besoin. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) C’est vrai ! Par ailleurs, contrairement à ce que vous pensez, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale que je présente est un PLFSS de réformes structurelles. Un quoi ? Je présenterai notamment un article 35 tout à fait innovant, qui permettra des organisations nouvelles sur le territoire, un décloisonnement entre la ville et l’hôpital, ainsi qu’entre le médico-social et le médical, et évitera les fractures entre professionnels. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) IL faut agir sur la démographie médicale ! Surtout, j’ai une autre botte secrète, en effet. Il est temps de s’intéresser à la pertinence des actes que nous faisons. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) Tous les rapports le montrent : actuellement, environ 25 % des dépenses de santé résultent d’actes inutiles ou redondants. Nous avons d’énormes marges de manœuvre pour notre système de santé. (Applaudissements sur les mêmes bancs.)
Je souhaite donc qu’en ville, comme à l’hôpital, nous ne valorisions pas uniquement l’activité et le toujours plus d’actes, mais la qualité et la pertinence des soins par le changement de la tarification. (Mêmes mouvements.) Je proposerai donc dans le projet de loi de sortir progressivement de la tarification exclusive à l’activité, le « tout T2A ». C’est la promesse que je fais aujourd’hui à l’hôpital public.
Je souhaite également que, pour les soins de ville, nous travaillions à des tarifications au forfait, au parcours et à la coordination. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. Christophe Jerretie, pour le groupe La République en marche. Monsieur le ministre de l’action et des comptes publics, dans quelques instants, notre assemblée votera la première partie du budget de la nation pour 2018.
Pour nos collectivités territoriales, un constat s’impose à tous : c’est un budget consolidant et structurant qui ouvre un nouveau modèle de contractualisation. (Exclamations sur les bancs des groupes LR, FI et GDR.– Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) Quel culot ! Pour la première fois depuis longtemps, les enveloppes financières de fonctionnement et d’investissement se stabilisent. Oui ! Pour nos compatriotes, 2018 marquera également la première étape de la suppression de la taxe d’habitation pour 80 % des foyers. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.)
C’est une promesse de campagne du Président de la République et une excellente mesure sociale. Si cette décision sera la bienvenue pour le porte-monnaie des Français, elle n’aura aucune incidence pour les élus locaux. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Mensonge ! C’est scandaleux de dire cela ! Le Gouvernement, je le rappelle, compensera à l’euro près ce dégrèvement de la taxe d’habitation. Après la suppression de la taxe professionnelle en 2010, dont on discute encore certains éléments dans l’hémicycle, c’est la deuxième des quatre vieilles taxes qui est en passe d’être supprimée partiellement.
Aussi, monsieur le ministre, pouvez-vous confirmer à la représentation nationale les mesures positives pour les collectivités locales de votre budget ? Au-delà, peut-on envisager un travail de fond pour assurer l’aboutissement d’une réforme de la fiscalité locale et des finances publiques ? (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. le ministre de l’action et des comptes publics. Monsieur le député, je voudrais d’abord saluer votre implication, comme celle de très nombreux parlementaires, toute la semaine dernière pour l’examen du budget. Ce travail s’est très bien passé. C’était une première pierre de la transformation de notre pays. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.)
Vous avez raison, ce projet de loi de finances contient trois grandes mesures pour les collectivités locales. Bravo ! Premièrement, depuis 2010, c’est la première fois que le Parlement ne votera pas de baisse des dotations aux collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) C’est vrai ! Mais si, il y en a, des baisses ! Deuxièmement, depuis 2010, c’est la première fois qu’un Parlement ne baissera pas les dotations aux collectivités locales. (Mêmes mouvements.)
Et troisièmement, je le répète parce que la répétition fixe la notion, pour la première fois, nous ne baisserons pas les dotations aux collectivités locales. (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.– Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Vous nous prenez pour des débiles ? Il y avait d’autres méthodes : le gouvernement précédent nous avait habitués à une baisse des dotations de 11 milliards ; le projet que soutenait l’opposition parlementaire visait 20 milliards de baisse des dotations. Nous, nous ne baisserons pas les dotations aux collectivités locales. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) Mensonge ! Par ailleurs, depuis longtemps, les élus, notamment ceux qui géraient les fonds de compensation de la taxe sur la valeur ajoutée, voulaient sortir ces montants de l’enveloppe normée. Le rapporteur général, Joël Giraud, que je voudrais remercier, et moi-même avons fait voter cette disposition : ces fonds ne feront plus partie de l’enveloppe normée, les collectivités locales pourront enfin en disposer.
Enfin, le projet de loi prévoit le maintien total de l’investissement pour les collectivités. Quel amateurisme budgétaire ! La dotation d’équipement des territoires ruraux – DETR –, la dotation de soutien à l’investissement public local – DSIL et les crédits de la politique de la ville sont même en légère augmentation. Cela nous change, n’est-ce pas, monsieur le ministre d’État Gérard Collomb, de ce qui s’est passé depuis plusieurs années ?
Monsieur le député, vous appelez de vos vœux une fiscalité nouvelle, qui à la fois serve le pouvoir d’achat de nos concitoyens et soit plus juste pour les contribuables. C’est ce que nous allons faire : le quinquennat dure cinq ans ! (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. Charles de Courson, pour le groupe Les Constructifs : républicains, UDI, indépendants. Monsieur le ministre de l’économie et des finances, le Conseil constitutionnel, par une décision rendue le 6 octobre 2017, a définitivement enterré la contribution de 3 % sur les dividendes distribués, taxe instaurée en juillet 2012 par l’ancienne majorité socialiste. C’était Macron ! Cette taxe, qui a rapporté à l’État 1,8 milliard d’euros par an entre 2013 et 2017, devra donc être intégralement remboursée aux entreprises qui l’ont payée. Bravo Macron ! Le coût de ce remboursement est estimé, selon vos déclarations, à au moins 10 milliards d’euros, somme bénéficiant d’intérêts moratoires au taux de 4,78 %. Rends l’argent, Macron ! Je fais partie de ceux qui, lors de la séance du 19 juillet 2012, avaient mis en garde le gouvernement socialiste, sans être entendus, quant au grave risque de rupture d’égalité entre les entreprises dont cette mesure était porteuse.
Cette annulation pose trois questions.
Premièrement, tandis que le Gouvernement, à la différence de ses prédécesseurs, a fait un vrai effort de sincérité dans le projet de loi de finances pour 2018 (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM) , quelles mesures entendez-vous prendre pour honorer ce remboursement, alors même qu’il n’existe pour faire face à cette dépense qu’une provision de 300 millions d’euros dans le projet de loi de finances pour 2018,… Pour taxer les sociétés ! …et une provision annuelle de 1,8 milliard par an pour chacun des trois exercices suivants ? La France ne risque-t-elle pas de ne pas sortir en 2018 de la procédure pour déficit excessif et de demeurer ainsi le dernier mauvais élève de la zone euro ?
Deuxièmement, en termes de responsabilité politique, comment votre prédécesseur, Pierre Moscovici, alors ministre de l’économie et des finances et actuel commissaire européen chargé du respect de la discipline budgétaire des États, ainsi que Jérôme Cahuzac, alors ministre du budget,… Hou ! …et Christian Eckert, alors rapporteur général du budget, ont-ils pu monter un dispositif aussi anti-européen et anticonstitutionnel ? Ne s’agit-il pas là d’un « scandale d’État », comme vous l’avez déclaré dans la presse le 20 octobre dernier ?
Troisièmement, monsieur le ministre, vous évoquez dans la presse de ce matin l’idée de créer un nouvel impôt sur les entreprises dont le chiffre d’affaires dépasse 1 milliard d’euros. Toujours des taxes ! Mais cette idée n’est-elle pas totalement contraire à l’ensemble de la politique fiscale d’abaissement des charges fiscales et sociales sur les entreprises que vous menez à juste titre ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LC.) La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances. Monsieur le député,… Un moratoire sur l’impôt sur la fortune ! Pour quatre ans ! …je suis ministre, pas procureur de la République, et je ne suis pas là pour juger les comportements de mes prédécesseurs.
Je confie à l’Inspection générale des finances le soin de faire toute la lumière sur cette affaire, parce que les Français et les parlementaires ont droit à une transparence totale et à l’établissement des responsabilités des uns et des autres. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Y compris celle de Macron ! C’était sous la responsabilité de M. Macron ! L’Inspection générale des finances me rendra son rapport le 10 novembre. Auditionnez le Président de la République ! Bonne idée ! Ma responsabilité, vous le dites parfaitement, est de faire en sorte que, dans les jours qui viennent, la France puisse sortir de la procédure pour déficit public excessif ; que les comptes publics soient bien tenus ; que nous trouvions une solution et les moyens de rembourser ces 10 milliards d’euros.
J’ai commencé des consultations avec les chefs d’entreprise. Ce sont uniquement les très grandes entreprises, celles dont le chiffre d’affaires est supérieur à 1 milliard, qui seront concernées. Je leur ai déjà annoncé qu’elles auraient à participer au remboursement et qu’une contribution exceptionnelle leur serait demandée. Je fais appel à leur sens civique, car l’enjeu, ce ne sont pas uniquement les comptes publics, ni les comptes des entreprises : c’est le respect de la parole de la France et sa crédibilité en Europe. Les entreprises ne sont pas responsables des erreurs du passé ! L’État prendra aussi à sa charge une partie de ce remboursement.
Je souhaite que, d’ici au début de la semaine prochaine, cette affaire soit définitivement réglée, que ce problème de 10 milliards d’euros soit derrière nous. Nous devons décider rapidement, avec le Premier ministre et avec le Président de la République ; apporter une solution la semaine prochaine ; et la présenter à nos partenaires européens et à la Commission européenne, pour que cette affaire soit définitivement derrière nous en début de semaine et que nous puissions nous tourner vers ce qui nous intéresse : l’avenir de la France, la bonne gestion des comptes publics et le redressement économique de notre nation. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LC.) La parole est à M. Olivier Gaillard, pour le groupe La République en marche. Ma question, à laquelle j’associe mes collègues parlementaires gardois, s’adresse à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation.
Après le gel d’avril 2017, une sécheresse sévère a touché l’ensemble des filières agricoles, y compris les éleveurs, qui sont contraints de nourrir les animaux avec le stockage de fourrage d’hiver.
La viticulture connaît une chute de rendement vertigineuse : un million d’hectolitres au moins manque à la production viticole gardoise par rapport à 2016. La baisse de production oscille entre 30 % et 50 % selon les exploitations, et cette tendance n’est pas près de s’inverser, d’où les réflexions engagées sur l’irrigation dans le département du Gard.
Déjà soumise aux cours internationaux et aux importations massives qui tirent les prix vers le bas, l’agriculture connaît actuellement, dans certaines de ses filières et territoires, des situations dérogeant à la norme, tant les effets du climat sont devenus mortifères pour le maintien de l’activité et d’une juste rémunération.
L’hypothèse d’un traitement fiscal d’exonération totale, appliqué selon des critères clairs et objectifs, aurait l’avantage d’apporter des réponses différenciées aux agriculteurs qui subissent cette sécheresse historique.
Trop nombreuses sont les exploitations qui voient leur survie compromise. La crainte est grande que les 30 millions d’euros de l’enveloppe nationale – toutes filières confondues – du fonds d’action sanitaire et social ne suffisent pas, non plus que le dégrèvement d’office proportionnel aux pertes subies.
Au vu de l’état des trésoreries et des difficultés croissantes des agriculteurs, qui subissent dans le même temps les événements climatiques défavorables et la baisse du prix de leurs produits sur le marché, quelles réponses seront apportées par le ministère à court et à moyen terme ?
Dans ce contexte peu rassurant pour la viabilité des exploitations, il est déjà un élément à propos duquel les bonnes nouvelles sont bienvenues : les aides. Quelles explications et perspectives de solution pouvez-vous nous fournir concernant les blocages, les retards du versement de la dotation jeunes agriculteurs, du versement des mesures agro-environnementales, de l’aide à l’agriculture biologique des années 2015 et 2016 et du financement des dossiers relatifs au plan de compétitivité ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.) Il faudrait lire nos propositions, mais vous avez rejeté notre proposition de loi ! La parole est à M. le ministre de l’agriculture et de l’alimentation. Monsieur le député, je sais, nous savons la souffrance à laquelle cette sécheresse expose un grand nombre de nos viticulteurs sur le territoire.
À ce stade, nous sommes en train d’évaluer l’ampleur des pertes dont les agriculteurs et les producteurs ont été victimes. Cette situation nous rappelle la nécessité de donner des moyens à notre agriculture pour relever le défi de la préservation des ressources en eau. Dans le cadre de la lutte contre le changement climatique, l’État apporte un fort soutien à une mobilisation durable de la ressource en eau qui tienne compte de la diversité des agricultures et des territoires.
Je souhaite également m’appuyer sur des réalisations concrètes et des solutions innovantes, tout en veillant à ne pas fragiliser les exploitations agricoles par des charges administratives et financières supplémentaires qui seraient trop lourdes pour nos producteurs.
Vous m’interrogez également sur les retards de paiement des aides de la PAC. Vous le savez, lundi 16 octobre, l’État a honoré ses engagements en versant 6,3 milliards d’euros sur les comptes d’exploitation des agriculteurs français. Il s’agit du premier versement de l’apport de trésorerie remboursable pour 2017 et du plus important versement d’aide agricole jamais réalisé en France en une seule fois.
Vous le voyez, monsieur le député, le Gouvernement est engagé aux côtés de nos producteurs pour défendre la qualité de nos productions et soutenir nos producteurs et nos viticulteurs face au changement climatique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.) La parole est à M. Alain Bruneel, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Madame la ministre des solidarités et de la santé, je vous prie d’entendre mon intervention comme un point de vue, qui n’est pas à prendre ou à laisser, mais à discuter, et d’écarter le sentiment que je puisse y apparaître comme un donneur de leçons.
Je veux témoigner avec force du cri d’alerte des personnels de santé et des patients, de la souffrance qu’ils expriment. Le projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2018 n’est pas pour nous rassurer, puisque l’économie y est le maître mot avec une baisse de 4,2 milliards d’euros dans le cadre des dépenses de santé. L’urgence est pourtant au rendez-vous : augmentation des maladies chroniques, renoncement aux soins, déserts médicaux ou encore vieillissement de la population. Et le manque de praticiens ! De plus, la hausse injuste du forfait hospitalier augmentera le reste à charge des patients, puisque les complémentaires santé répercuteront le surcoût dans leurs tarifs. Les hôpitaux, déjà étranglés financièrement, ne sont pas épargnés avec plus d’1 milliard d’économies à réaliser en 2018. Madame la ministre, dans les établissements hospitaliers, les personnels sont stressés, fatigués, épuisés. On leur demande de faire toujours plus avec moins de moyens. À titre d’exemple, à l’hôpital de Douai, le personnel a cumulé l’an dernier 73 000 heures supplémentaires non payées, non récupérées.
Si le service public de santé tient aujourd’hui debout, c’est grâce au courage et à l’abnégation de ses salariés (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, NG et FI) qui mettent leur vie personnelle et familiale entre parenthèses pour faire face à l’impératif des soins ; mais à force de tirer sur la corde, elle risque de casser.
Madame la ministre, la santé n’est pas une marchandise destinée à être rentable. Ma question est simple : allez-vous poursuivre une gestion suicidaire pour nos hôpitaux, qui sont déjà en soins palliatifs, ou, au contraire, allez-vous, grâce à une enveloppe de crédits supplémentaires, donner une bouffée d’oxygène au service public de la santé, qui permettrait à la fois au personnel de respirer et à notre population de bénéficier d’un haut niveau de soins ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, NG et FI.) La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le député Burneel,… C’est Bruneel ! (Sourires et exclamations sur de nombreux bancs.) Un peu de respect pour le Parlement, madame la ministre ! Pardonnez-moi, monsieur Bruneel ! C’est l’émotion, parce que vous avez dit beaucoup de bien des personnels hospitaliers, dont j’ai fait partie pendant trente ans… (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) Je sais qu’à l’hôpital, on ne lésine pas sur son temps de travail.
Vous avez raison : l’hôpital fonctionne aujourd’hui comme une entreprise. C’est exactement ce que ce projet de loi de financement de la Sécurité sociale est en train de faire évoluer. Aujourd’hui, les hôpitaux cherchent des parts de marché ; ils cherchent à faire de l’activité pour être rentables. C’est pourquoi j’ai proposé dans le projet de loi de financement de la Sécurité sociale de sortir progressivement de la tarification à l’activité des hôpitaux, de façon à ne pas favoriser une course effrénée à la recherche de patients et d’actes. (Mêmes mouvements.) C’est tout l’objectif de la réforme que je souhaite mener, afin de valoriser ceux qui font bien et non pas ceux qui font uniquement du chiffre.
Concernant les économies demandées à l’hôpital public, je rajoute 1,8 milliard d’euros à son budget grâce à l’ONDAM fixé à 2,2 % pour les hôpitaux. C’est de l’argent en plus par rapport au budget de cette année.
Par ailleurs, nous savons qu’il y a des marges de progrès à réaliser sur les achats. C’est déjà fait ! Les groupements hospitaliers de territoire permettront de faire énormément d’économies – autour de 1 milliard d’euros sans doute. Enfin, sur le prix des médicaments, nous savons tous qu’il y a des marges de progrès énormes, notamment des médicaments hospitaliers. Nous allons mener un travail particulier pour développer l’accès aux génériques dans les hôpitaux. Nous savons que toutes ces cibles sont tout à fait atteignables, sans remettre en cause la qualité du travail des personnels hospitaliers auxquels je suis particulièrement attachée. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) Vous ne répondez pas à la question ! La parole est à Mme Béatrice Piron, pour le groupe La République en marche. Monsieur le ministre de l’intérieur, lors de votre discours au congrès des sapeurs-pompiers, vous les avez remerciés pour leur contribution dans la formation aux premiers secours. Grâce à la campagne "Adoptons les comportements qui sauvent", décrétée grande cause nationale en 2016, plus de 100 000 personnes ont été formées en un an, principalement par les pompiers, la Croix-Rouge française et la protection civile. Vous avez annoncé la volonté du Gouvernement d’intensifier cette dynamique pour que 80 % de la population soit formée.
Actuellement, en France, seule une personne sur cinq, témoin d’un accident cardiaque, pratiquerait une réanimation, et moins de 50 % des Français savent prodiguer les premiers secours. En Norvège, ce chiffre atteint 95 %. Monsieur le ministre, mesdames et messieurs les députés, il me semble essentiel de sensibiliser tous nos concitoyens à cette nécessité. Nous, élus de la République, nous devrions être tous exemplaires et connaître les gestes pour intervenir.
Symboliquement et concrètement, une action de formation est organisée à l’Assemblée nationale le 13 novembre prochain, date anniversaire d’un attentat que personne n’a pu oublier. Elle sera suivie d’autres formations à partir du 30 novembre. À ce jour, ce sont surtout des députées qui se sont inscrites, ce qui reflète d’ailleurs les statistiques nationales. J’attends que vous vous réveilliez, messieurs les députés !
Mais vous, monsieur le ministre, quelles sont les mesures que vous envisagez de prendre pour atteindre ce premier objectif de 80 % de la population formée ? (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur. Madame la députée, vous l’avez dit, lors du congrès national des sapeurs-pompiers tenu à Ajaccio, il y a quinze jours, cette fédération a décidé de lancer une grande campagne sur les gestes qui sauvent. Vous avez donné les chiffres : aujourd’hui, en France, moins de 50 % de la population est formée aux premiers gestes qui sauvent, quand dans les pays scandinaves, c’est l’ensemble de la population qui l’est. Avec les sapeurs-pompiers, dont le congrès à Ajaccio était un moment formidable, nous allons lancer une grande campagne. Elle nous concerne tous ! Elle concerne l’éducation nationale, l’université, chacune de nos communes, chacune et chacun d’entre nous.
Mesdames, messieurs les députés, nous lancerons une campagne médiatique dans les prochains temps. Nous veillerons à ce que chacune et chacun soit sensibilisé. Aux côtés de la ministre chargée de la santé, nous ferons en sorte de permettre de sauver chaque année des dizaines de milliers de vies, qui pourraient en effet être sauvées si nous connaissions les uns et les autres les gestes qui sauvent. Je vous félicite d’avoir lancé ici, à l’Assemblée nationale, une campagne, et j’ai bien compris que vous adressiez un appel aux hommes de cette assemblée. Je suis sûr qu’ils y répondront ! (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à M. Guillaume Garot, pour le groupe Nouvelle Gauche. Monsieur le Premier ministre, beaucoup de nos concitoyens peinent aujourd’hui à trouver un médecin généraliste. C’est une inégalité supplémentaire entre les Français : d’un côté, des grandes villes ou des départements en bord de mer, avec des médecins en surnombre ; de l’autre, des territoires urbains et ruraux qui voient leurs médecins partir à la retraite sans trouver de remplaçant. Vous avez récemment présenté un plan pour la démographie médicale ; nouveau plan, mais toujours les mêmes recettes ! Vous pourrez avoir les plus belles maisons de santé, proposer les aides les plus attractives,… Eh oui ! …vanter la télémédecine du futur – et tout cela est très bien –, mais l’expérience montre maintenant que cela ne suffit pas.
C’est pourquoi les députés du groupe Nouvelle Gauche proposeront dans le budget de la Sécurité sociale de nouvelles règles pour l’installation des médecins, avec ce qu’on appelle le conventionnement sélectif. En clair, l’assurance maladie ne pourrait plus conventionner les médecins qui voudraient s’installer dans des zones surdotées, pour les inciter à exercer ailleurs. Cette régulation existe – et fonctionne – pour les pharmaciens et d’autres professionnels de santé. Je précise que nos collègues Richard Ferrand et Brigitte Bourguignon, ou Christophe Castaner apprécieront cet amendement puisqu’ils l’avaient signé l’an dernier. (Exclamations et applaudissements sur les bancs des groupes NG, LR, LC et GDR.) Cela prouve que ce sujet dépasse les clivages politiques !
Monsieur le Premier ministre, le Gouvernement doit aujourd’hui aller plus loin. Êtes-vous prêt à étudier le conventionnement sélectif pour répondre à la crise d’un système à bout de souffle, et donner un médecin à chaque Français ? (Applaudissements sur les bancs des groupes NG et GDR.) Pour une fois, soyez fidèles à vos convictions ! Cela nous changera ! La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Monsieur le député, comme vous le savez, le plan que j’ai présenté est différent et propose énormément de mesures nouvelles qui n’ont jamais été expérimentées. (Protestations sur les bancs des groupes LR, LC et GDR.) Il propose notamment de faire entrer la télémédecine et la téléexpertise dans le droit commun, alors que cela fait cinq ans que nous attendons le début des expérimentations. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.) Autre point : nous valorisons de 25 % les consultations détachées dans les territoires sous-dotés. Nous créons également 300 postes d’assistants partagés entre les hôpitaux publics et les zones sous-dotées, ainsi que 500 lieux de stage pour les étudiants en médecine, qui leur permettront de se familiariser avec l’exercice libéral dans ces zones sous-dotées. Nous créons des possibilités de délégation de tâches et mettons en place des financements incitatifs qui encouragent les exercices partagés et multisites. Tout cela concerne tant les médecins que les autres professionnels de santé qui interviennent dans la délégation de tâches. Enfin, l’installation des médecins en zones sous-dotées est favorisée par des incitations financières qui ont été largement revalorisées. C’est insuffisant ! C’est déjà fait ! Pour la première fois, nous faisons confiance aux médecins. Nous leur confions une responsabilité territoriale et les incitons à travailler en commun avec l’ensemble des professionnels de santé et les élus locaux. (Protestations sur les bancs du groupe LR.) Ce travail, qui vise à améliorer la couverture territoriale, est d’ores et déjà programmé au sein des ARS. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM.) La parole est à M. Laurent Garcia, pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés. Monsieur le ministre d’État, ministre de l’intérieur, Mme la garde des sceaux vient de lancer les cinq grands chantiers de la justice visant à transformer celle-ci en profondeur. L’un de ces grands chantiers s’attache à l’amélioration et à la simplification de la procédure pénale car si celle-ci protège, elle pèse aussi sur le quotidien des forces de l’ordre, des parquets et des juges du siège. Justement, s’agissant des forces de l’ordre, on a vu s’installer un certain blues du policier national : comme certaines professions médicales, les policiers se sentent moins reconnus et moins respectés. Outre l’évolution sociétale, ce sentiment de non-reconnaissance se nourrit en grande partie des normes administratives sans cesse croissantes et extrêmement chronophages qui amputent d’autant le temps consacré au cœur même du métier. Ce sentiment est exacerbé par l’emploi à des tâches qui peuvent être considérées comme subalternes, faute de pouvoir faire appel à la réserve civile.
En effet, contrairement à la gendarmerie qui dispose d’une réserve civile qu’elle est en capacité de former, la police nationale ne peut faire de même, par manque de budget et de structures de formation. Les rares volontaires civils sont donc confinés dans des tâches monotones et peu attractives, et ce sont les policiers eux-mêmes qui assurent toutes les missions, y compris les encadrements de manifestations, notamment sportives et culturelles, se sentant parfois ainsi sous-employés.
Monsieur le ministre d’État, quelle est votre position sur la réserve civile mobilisable dans la police nationale ? Serait-il envisageable de prévoir un crédit de formation pour pouvoir réellement bénéficier de ces moyens humains, afin de suppléer efficacement les agents de la police nationale ? (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM et sur quelques bancs du groupe REM.) La parole est à M. le ministre d’État, ministre de l’intérieur. Monsieur le député, vous posez trois questions. La première renvoie à la réforme de la procédure pénale. Nous y travaillons avec Mme la garde des sceaux, car aujourd’hui, beaucoup de nos policiers sont pris par des tâches administratives qui ne leur permettent plus d’être sur le terrain. Créer une police de sécurité du quotidien demande évidemment que nombre de nos policiers puissent retourner sur le terrain. Fumisterie ! Pour une fois, nous travaillons en commun, ministre de l’intérieur et garde des sceaux, et c’est peut-être la principale novation, car nous ne voulons plus d’affrontement entre police et justice. Les uns et les autres travaillent à la sécurité de nos concitoyens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.)
S’agissant des tâches indues, oui, nous travaillons aujourd’hui pour que les policiers ne passent plus leur temps à faire des gardes statiques, mais reviennent sur le terrain.
Enfin, pour répondre à votre troisième question relative à la garde nationale, je rappelle que pour la gendarmerie la somme consacrée à cet objectif est de 98,7 millions d’euros, contre seulement 32 millions d’euros pour la police. Nous venons d’augmenter cette dernière somme de 7 millions d’euros, car nous pensons qu’il est extrêmement important de libérer certains de nos policiers. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) C’est bon, c’est bon… La parole est à M. Guillaume Peltier, pour le groupe Les Républicains. Monsieur le Premier ministre, je ne voudrais pas, par cette question, briser le bel unanimisme médiatique qui préside aux commentaires sur l’avenir de l’Europe. J’évoquerai deux questions essentielles : le travail détaché et le CETA – l’accord économique et commercial global entre le Canada et l’Union européenne.
Par l’action magistrale – dit-on – de votre gouvernement, la France, l’Europe, que dis-je : le monde… L’univers ! …seraient enfin passés de l’ombre à la lumière. Et pourtant, sur la question du travail détaché, vous avez privilégié la concurrence déloyale plutôt que la fin des cotisations sociales du pays d’origine. Vous avez sacrifié le transport routier français sur l’autel d’un accord illusoire sur la durée du détachement, qui dans les faits ne réglera rien. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR et parmi les députés non-inscrits.)
Telle est votre méthode politique : l’illusion plutôt que l’action,… L’enfumage ! …faire croire plutôt que faire.
Peut-être pourrions-nous nous consoler avec le CETA ? Hélas, la désillusion de nos compatriotes sera à la mesure de la grande illusion pratiquée par votre gouvernement. Le CETA, c’est un déni démocratique. Il a raison ! Comment accepter qu’un traité commercial puisse être appliqué en France, sans que ni le Parlement français ni le peuple français lui-même n’en soient saisis ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.) Il faut organiser un référendum ! Le CETA, c’est un drame économique pour nos paysans qui subiront encore les importations déloyales. Le CETA, c’est un scandale juridique car désormais des multinationales pourront traduire devant les tribunaux les États et les peuples souverains. Vous aviez là pourtant une opportunité historique de tourner le dos aux excès de l’ultra-libéralisme et de la loi du plus fort. (« Rejoignez-nous ! » sur plusieurs bancs des groupes FI et GDR.) Mélenchon est d’accord ! (Sourires sur certains bancs du groupe LR). Monsieur le Premier ministre, ma question est la suivante : quand renoncerez-vous à l’ultra-libéralisme ? Quand allez-vous enfin protéger nos travailleurs, nos ouvriers, nos paysans ? (Exclamations sur les bancs des groupes REM et MODEM.)
Quand rétablirez-vous la souveraineté de notre peuple, la puissance et la grandeur de notre Europe ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, GDR et FI.– Exclamations persistantes sur les bancs des groupes REM et MODEM.) Bravo camarade ! Un communiste de plus ! Encore un qui va se faire exclure ! La parole est à Mme la ministre du travail. Monsieur le député, je me concentrerai sur le travail détaché, puisque c’est l’actualité du jour. Nous aurons l’occasion de revenir sur les autres sujets, lors d’autres séances de questions au Gouvernement.
Pour revenir à ce que vous avez dit au tout début de votre intervention : oui, nous sommes un gouvernement résolument pro-européen. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.) Un gouvernement ultra-libéral ! Nous savons que la France sera forte si l’Europe est forte ; et pour que l’Europe soit forte, il faut qu’elle soit à la fois monétaire, économique et sociale. C’est cela notre combat. C’est cela que nous voulons construire. (Mêmes mouvements.) Le combat de l’ultra-libéralisme ! Sur le travail détaché, je voudrais rectifier un peu ce que vous avez dit. Il est vrai que l’accord n’a été trouvé qu’à vingt-trois heures, après douze heures de négociations : vous n’avez peut-être pas encore pris connaissance de tous les détails. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) C’est la France soumise ! Nous aussi avons siégé tard pour l’examen du projet de loi de finances la semaine dernière, jusqu’à deux heures du matin dimanche ! Tout d’abord, sur le sujet à travail égal salaire égal, nous avons accompli d’immenses progrès, non seulement par rapport au texte de la directive de 1996, mais aussi par rapport à la version qui avait été proposée en juin dernier : c’est à présent l’ensemble des compléments de salaire qui est pris en compte pour le travail détaché. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Deuxième chose dont vous n’avez peut-être pas pris connaissance, puisqu’elle est intervenue à minuit et quart :… Vous vous êtes couchée tard pour une fois ! …nous avons adopté le règlement 883 en matière de sécurité sociale. C’est une première étape pour lutter contre le travail détaché frauduleux : ce texte fixe une obligation d’inscription à la Sécurité sociale trois mois avant un détachement. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Enfin, nous avons fixé à douze mois la durée maximale d’un détachement, avec une possibilité de prolongation de six mois – la directive sur les travailleurs détachés, dans sa rédaction originelle, de 1996, précisait que le travail détaché devait être temporaire, mais ne fixait pas de limite de temps. (Applaudissements sur les bancs des groupes REM et MODEM.– Exclamations persistantes sur les bancs du groupe LR.)
Vous n’y croyez peut-être pas, mais vous verrez que dans le transport, avec les dispositions que nous avons obtenues, nous sommes en meilleure posture pour défendre nos transporteurs. (Mêmes mouvements.) Ce n’est pas une réponse ! La parole est à Mme Pascale Boyer, pour le groupe La République en marche. Madame la ministre des transports, dans la perspective de la préparation de la loi d’orientation des mobilités qui sera présentée par le Gouvernement au premier semestre 2018, j’appelle votre attention sur la place donnée au train de nuit lors des Assises de la mobilité, alors que les fermetures de lignes de nuit se succèdent et que le train de nuit Paris-Nice est aujourd’hui menacé.
Lancées le 19 septembre dernier, les Assises de la mobilité ont d’ores et déjà permis de poser les grands principes qui orienteront les mobilités de demain : respectueux de l’environnement, accessibles au plus grand nombre, les transports doivent viser la continuité territoriale sans nécessiter d’investissements lourds dans les infrastructures. Or malgré une qualité de service dégradée, les trains Intercités de nuit correspondent à ces grands principes.
Le transport ferroviaire figure parmi les moins polluants. Le réseau Intercités de nuit assure le désenclavement des territoires de montagne, des territoires ruraux, et favorise le report modal. Ces dernières années, des lignes de nuit ont été supprimées en raison de leur déficit supposé. On a préféré les cars Macron ! Mais l’ambition des Assises de la mobilité, qui consiste à intégrer le coût des externalités négatives et le bénéfice des externalités positives au calcul de la rentabilité, pourrait conduire à revoir le bilan.
La période de pause dans le développement des lignes à grande vitesse n’est-elle pas l’occasion de réveiller les trains de nuit ? Le train de nuit Paris-Briançon circule attelé au Paris-Nice. Cela permet de mutualiser les coûts tout en apportant une fréquentation importante et complémentaire entre les deux destinations. La suppression du Paris-Nice ne risque-t-elle pas de reporter de nombreux coûts sur le Paris-Briançon et de compromettre, à terme, le désenclavement des Hautes-Alpes ?
L’État peut-il s’engager, madame la ministre, sur la pérennité du Paris-Briançon ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe REM.) Ce n’est pas un sujet de question au gouvernement, mais de question orale sans débat ! Et Cahors ? La parole est à Mme la ministre chargée des transports. Madame la députée, vous m’interrogez sur la pérennité du train de nuit entre Paris et Briançon, et plus largement entre Paris et Nice. Tout d’abord, je vous confirme que l’État s’engage à poursuivre l’exploitation du train de nuit entre Paris et Briançon. Et Cahors ? Je sais qu’il répond à une attente forte des usagers et des élus. C’est précisément la raison pour laquelle l’État, la région Provence-Alpes-Côte-d’Azur, le département des Hautes-Alpes et SNCF Réseau se sont engagés à hauteur de 20 millions d’euros pour réaliser des travaux d’amélioration sur la section Briançon - Mont-Dauphin.
Cette rénovation, qui a débuté en septembre dernier, s’achèvera d’ici à la fin novembre. Elle a certes causé des gênes pour les voyageurs, mais elle permettra d’assurer la pérennité de cette ligne et d’améliorer durablement les conditions de circulation et le confort des voyageurs, ce dont je me réjouis. Au-delà, comme vous, je suis convaincue que les trains de nuit peuvent répondre aux besoins de mobilité de certains territoires.
À l’heure où certains laissent entendre que nous voudrions fermer des lignes ou des gares TGV, nous avons là un exemple très concret de l’engagement du Gouvernement au service de la mobilité pour tous dans tous les territoires. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes REM et MODEM.) Avec les bus Macron ! La parole est à M. Napole Polutele, pour le groupe Les Constructifs : républicains, UDI, indépendants. Monsieur le Premier ministre, avec le temps, c’est autour du Pacifique que les affaires du monde se passent : sur ses rives réside une majorité de la population mondiale, sur ses pourtours se déploie une puissance économique considérable et sur ses eaux se croisent de nombreuses routes commerciales. L’Europe est loin, et pratiquement absente. Demain, seule la France continuera à y être présente pour l’ensemble de l’Union européenne, car le Brexit ne permettra plus à la Grande-Bretagne de représenter l’Europe. Avec la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française et les îles Wallis et Futuna, nos collectivités occupent une superficie plus grande que l’Europe et une zone économique exclusive qui donne à la France la deuxième place mondiale. Cela suscite de grands espoirs pour l’avenir. Le secrétaire d’État Sébastien Lecornu est venu sur place prendre la pleine mesure de nos relations interrégionales et leur enjeu pour l’avenir.
Monsieur le Premier ministre, comment la France entend-elle développer ses relations internationales dans le Pacifique ? Notre pays sera-t-il représenté dans les instances locales à un niveau crédible et a-t-il pour ambition d’y tenir un rôle ? Soutiendrez-vous l’adhésion de Wallis-et-Futuna au Forum du Pacifique ? Quel est le calendrier que la France entend suivre concernant le sommet France-Océanie et quelles y seront ses intentions ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LC.) La parole est à M. le secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères. Oui, monsieur le député, la France est pleinement un pays du Pacifique, comme elle est pleinement un pays de l’océan Indien, un pays de la Caraïbe, un pays de l’Amérique latine. Car la France rayonne à travers le vaste monde par toutes les facettes de sa diversité, de ses territoires – et aussi de ses terroirs, madame Dalloz – et de ses aires marines. Oui, monsieur le député, le Pacifique, ce bien commun de l’humanité, est riche en matière humaine, en matière de culture ou de biodiversité. On attend du concret dans la réponse ! Quant au concret, c’est bien simple : le Gouvernement était justement représenté lors du Forum des îles du Pacifique. M. Lecornu y était et il a porté cette parole forte de la France pour appuyer l’accession au statut de membre à part entière de Wallis-et-Futuna.
Par ailleurs, le Gouvernement reste évidemment très actif dans la communauté du Pacifique. Il reste attaché au Fonds Pacifique, qui permet une coopération économique, sociale et culturelle. Il noue aussi un partenariat stratégique avec les États voisins – je pense bien sûr à l’Australie, et au dialogue dense que nous menons avec la Nouvelle-Zélande. En 2018, il y aura une échéance capitale : le sommet France-Pacifique-Océanie. Préparons-le ensemble ; c’est un bel horizon que de réussir à ce que le Pacifique, ce cœur battant de notre humanité, reste aussi dans le cœur de tous les Français. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes REM et MODEM.) La parole est à Mme Annie Vidal, pour le groupe La République en marche. Madame la ministre des solidarités et de la santé, l’hôpital est un maillon essentiel de notre système de santé, notamment du fait de ses services d’urgence. Le nombre de passages annuels dans ces derniers est en augmentation constante : 3,5 % de plus en moyenne chaque année depuis 2013. Ce sont près de 56 000 personnes qui se présentent chaque jour dans nos 734 services d’urgence. Ceux-ci dispensent une prise en charge sanitaire de haut niveau, et en même temps sont le dernier rempart face à des situations de grande détresse.
Les urgences présentent la particularité d’être à l’interface de la médecine et des maux de la société. Depuis leur structuration en 1995, elles se sont adaptées aux évolutions du terrain. De nombreux rapports ont été rédigés à ce sujet : le dernier en date, déposé en juillet 2017 au nom de la commission des affaires sociales du Sénat, met notamment en avant le renforcement de la demande sociale et la très grande précarité d’une part non négligeable des patients accueillis, précarité visible chez ceux se présentant avec des pathologies très avancées, mais également chez ceux qui relèvent d’une consultation simple. Ils viennent aux urgences parce qu’ils n’ont pas su s’orienter dans le parcours de soins ou… Parce qu’ils n’ont plus de médecin traitant ! …parce qu’ils n’ont pas trouvé de professionnels médicaux à proximité de leur lieu de résidence. Entre l’urgence vitale, l’urgence traumatique, l’urgence médicale et l’urgence sociale, ces services prennent une part prépondérante dans le parcours de soins et je salue l’investissement exceptionnel des équipes, leurs compétences et leur dévouement.
Pourtant, la question de la soutenabilité et de la viabilité de l’actuel système se pose. Quelles sont les mesures, madame la ministre,… Merci, madame la députée.
La parole est à Mme la ministre des solidarités et de la santé. Madame la députée, les urgences sont en effet très souvent la porte d’entrée dans le système de soins et dans le système hospitalier. Vingt millions de nos concitoyens ont fréquenté les urgences en 2016, et ce nombre augmente chaque année. Normal, il n’y a plus de médecins ! Cette augmentation de la fréquentation des urgences s’explique par trois raisons en amont : des difficultés financières, qui contraignent parfois les Français à renoncer à aller chez des professionnels de ville du fait du reste à charge ou des dépassements d’honoraires ; des raisons territoriales, parce que l’offre de soins sur les territoires n’est pas suffisante pour permettre l’accès aux soins ; des problèmes pour assurer la permanence des soins, dans la mesure où il est difficile d’accéder à un médecin de nuit alors que les urgences sont ouvertes vingt-quatre heures sur vingt-quatre.
Par ailleurs, les urgences souffrent également d’un déficit de lits d’aval. Elles sont ainsi surchargées car nous n’avons pas les moyens de faire hospitaliser toutes les personnes, notamment âgées, qui restent parfois sur des brancards pendant de très nombreuses heures. Nous devons donc aussi travailler sur cette question des lits d’aval, notamment des lits de soins de suite et de réadaptation.
Je propose donc, premièrement, d’améliorer la permanence des soins dans le secteur de ville ; deuxièmement, d’adosser auprès des services hospitaliers des maisons de santé pluriprofessionnelles ou des réseaux de soins afin d’assurer la permanence des soins à des tarifs abordables ; troisièmement, de travailler sur la gradation des prises en charge entre les groupements hospitaliers de territoire de façon à ne pas avoir de services redondants dans des hôpitaux qui sont à vingt kilomètres les uns des autres. Enfin, je traiterai évidemment de l’offre de ville de premier recours autour des hôpitaux, car elle est absolument nécessaire pour un meilleur maillage territorial. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.) Quel baratin ! Nous avons terminé les questions au Gouvernement. La séance est suspendue. (La séance, suspendue à seize heures cinq, est reprise à seize heures quinze.) La séance est reprise.
L’ordre du jour appelle les explications de vote communes et les votes par scrutin public sur, d’une part, l’ensemble du projet de loi de programmation des finances publiques pour les années 2018 à 2022 (nos 234, 268) et, d’autre part, l’ensemble de la première partie du projet de loi de finances pour 2018 (nos 235, 273, 264 rectifié, 266 rectifié).
Dans les explications de vote, la parole est à M. Olivier Faure, pour le groupe Nouvelle Gauche.
Monsieur le président, monsieur le ministre de l’action et des comptes publics, mes chers collègues, il existait une autre voie. Tel est le sens du contre-budget qui a été présenté, au nom du groupe Nouvelle Gauche, par Valérie Rabault et Christine Pires Beaune.
Nous y avons montré qu’avec le même objectif de maîtrise du déficit, il était possible de ne pas augmenter la contribution sociale généralisée – CSG – sur les petites retraites, de ne pas baisser les aides personnalisées au logement – APL –, de ne pas fiscaliser les plans d’épargne logement, de ne pas toucher au forfait hospitalier, de ne pas réduire le montant de la prestation d’accueil du jeune enfant – PAJE – et de ne pas opérer de coupes claires dans le budget de nos collectivités locales ; possible enfin de ne pas procéder à cet immense plan social auquel vous allez vous livrer s’agissant des emplois dits aidés.
Et en même temps, il aurait été possible d’orienter l’épargne vers l’investissement productif. Mais vous avez fait un autre choix, celui que partageaient d’ailleurs tous les candidats à la primaire de la droite : suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune – ISF – et baisse de la fiscalité sur les revenus du capital, avec l’instauration d’une flat tax .
De ce point de vue, monsieur le ministre, vous avez eu raison de la rappeler, vous êtes cohérent : vous n’avez rien oublié !
Le 20 octobre, en vingt-quatre heures, vous avez ainsi mis à mal deux principes essentiels de notre fiscalité : la progressivité de l’impôt, qui veut que l’on paie en fonction de sa richesse, et son caractère redistributif.
Dans votre esprit, l’exigence de justice sociale est assimilée à une jalousie pathologique. Ce très vieil argument fut opposé à la majorité de 1981 et à Michel Rocard lorsqu’il rétablit un impôt sur la fortune en 1988. Pour vous, une mesure est juste si elle ne contrarie pas la liberté des actionnaires, quitte à accroître des inégalités qui, elles, ne vous empêchent pas de dormir. Le partage des richesses est remplacé par cette fumeuse théorie du ruissellement, dont le seul effet avéré est de rendre les riches encore plus riches.
Ainsi, en attendant que la fortune veuille bien ruisseler jusqu’au bas de la pyramide sociale, une flat tax a été adoptée. Grâce à elle, les revenus du capital seront imposés à 12,8 %, alors qu’un salarié de la tranche la plus basse de l’impôt sur le revenu sera imposé à 14 % !
Nous nous apprêtons à voter dans quelques minutes, mais le Gouvernement n’a toujours pas daigné révéler l’ampleur de ce cadeau pour les cent plus grandes fortunes de France. Visiblement, toute vérité n’est pas bonne à dire, car c’est un chèque de plusieurs millions d’euros par foyer fiscal qu’il faudrait annoncer. Difficile à assumer, quand on découvre au cours du débat que la mesure est en partie financée par la fiscalisation des plans épargne logement ! Difficile à justifier, quand le même Gouvernement considère qu’un retraité est riche à partir de 1 200 euros ! Il a raison. Vous avez également supprimé l’impôt de solidarité sur la fortune. Nouveau chèque en blanc, après celui de la flat tax . Aucune condition n’est fixée. Vous prétendez libérer des capitaux qui s’investiront dans les placements à risque, mais aucune obligation n’est imposée aux grands gagnants de ce loto fiscal ! Et quand bien même cette manne serait placée en actions, elle pourrait l’être dans un fonds de pension américain, un fonds vautour, une entreprise étrangère plutôt qu’une entreprise française ! Jusqu’ici il existait un dispositif appelé ISF-PME qui permettait de déduire une part de son impôt, en contrepartie d’un investissement dans les PME nationales. Vous réalisez la contre-performance de le supprimer !
Votre volonté de déplacer les capitaux vers l’investissement productif est enfin démentie par l’abrogation de la taxe sur les transactions financières intrajournalières. Le trading haute fréquence est de la spéculation pure, les opérations étant réalisées essentiellement à partir d’algorithmes. Comment voir dans cette complaisance un quelconque soutien à l’activité ou à l’innovation ?
Vous faites un pari, un pari qui sera payé par les classes moyennes et populaires qui, elles, vivent de leur seul travail. C’est une faute que d’autres ont commise avant vous, mais dont vous ne tirez aucune leçon. Les grandes fortunes n’ont jamais autant pris le chemin de l’exil fiscal qu’au lendemain de l’instauration du bouclier fiscal. C’est faux. Valérie Rabault l’a prouvé durant le débat parlementaire, souvenez-vous.
C’est une faute parce que ce n’est pas au secours des entreprises que vous vous portez, mais de la fortune personnelle des détenteurs de capitaux. Une faute parce que c’est la cohésion sociale que vous abîmez tout en affaiblissant le consentement même à l’impôt. Comment expliquerez-vous à nos retraités qu’ils sont appelés à la solidarité quand ils observeront vos largesses en faveur de ceux qui en ont le moins besoin ?
Le nouveau monde fiscal se caractérisera par une perte de 30 milliards d’euros sur le quinquennat pour les caisses de l’État, que devront supporter tous les autres Français. Les Français retiendront donc de vos arbitrages qu’il vaut mieux vivre de ses rentes financières que de son travail, être un gros actionnaire qu’un épargnant de la classe moyenne, vivre sur son yacht que se loger grâce aux aides personnalisées au logement, spéculer que tenter de refaire surface par le biais d’un emploi aidé. Veuillez conclure, mon cher collègue… Ces choix-là sont ceux que la gauche a toujours combattus. Votre nouveau monde fiscal est un moyen-âge. Nous voterons unanimement contre ce qui, aux yeux de tous les Français, apparaît comme une injustice insupportable. (Applaudissements sur les bancs du groupe NG et plusieurs bancs du groupe GDR.) La parole est à M. Éric Coquerel, pour le groupe La France insoumise. Nous voici donc parvenus à la conclusion de la partie relative aux recettes du projet de loi de finances pour 2018 – PLF.
En attendant que soient battus les records d’austérité lors de l’examen des dépenses et du projet de loi de financement de la sécurité sociale – PLFSS – cette semaine aura confirmé que ce budget est le plus inégal de la Ve République.
Par le passé, d’autres auront voulu instaurer un bouclier social, voire un bouclier fiscal : vous instituez un bouclier du capital.
J’aimerais, dans les cinq minutes qui me sont imparties, éveiller chez nos collègues La République en marche, qui vont bientôt voter, au moins la conscience du principe de précaution. Nous nous retrouvons en effet face à une majorité inédite, qui applaudit debout la casse du code du travail, la fin de l’ISF, la flat tax, comme d’autres, hier, saluaient les congés payés, le vote des femmes, la légalisation de l’IVG ou l’abrogation de la peine de mort.
Je suppose donc, mes chers collègues, que vous avez le sentiment de vivre des heures historiques, au nom de l’intérêt général. Je veux le croire. Pensez-vous cependant être accueillis, de retour dans vos circonscriptions, par des hourras, des salves d’applaudissements, des manifestations d’allégresse ?
Car le bilan de cette semaine est sans appel : 9 milliards offerts aux plus riches, détenteurs du capital, des miettes aux 9 millions de pauvres, une baisse du pouvoir d’achat pour les autres.
Reprenons donc le pari pascalien que vous avez fait, monsieur le ministre : ces 9 milliards, accordés sans aucune contrepartie concrète, permettraient un investissement productif. Nous avons été nombreux à vous demander comment vous comptiez vous y prendre. Nous avons reçu, à un moment donné, cette réponse : le bon sens !
Ignorez-vous à ce point l’histoire, chers collègues, monsieur le ministre, pour oublier que pas une fois le capitalisme ne s’est régulé et gendarmé de lui-même, et qu’il n’a consenti au compromis que sous la contrainte des pouvoirs publics ou des faits historiques, qu’il s’agisse de mouvements sociaux ou de circonstances exceptionnelles et civilisationnelles – le New Deal, 1936, la Libération ?
Au final, il y a fort à parier que ces 9 milliards alimenteront encore un peu plus la rente, celle-là même pour laquelle, au nom de ses intérêts, s’exerce toute la pression vers le bas sur les productifs de ce pays, qu’il s’agisse des TPE-PME, des salariés, des artisans ou des agriculteurs.
Car nous la paierons tous. Dès lors que vous vous placez dans la logique des déficits imposée par Bruxelles, certes avec le consentement complice des gouvernements successifs de ce pays depuis des années, vous devez inévitablement prendre aux plus pauvres ce que vous donnerez aux plus riches. Et vous le faites ! Vous le faites en refusant tous les amendements qui visaient à limiter les niches fiscales, dont chacun reconnaît le caractère scandaleux. Vous le faites en augmentant la CSG, en baissant les APL, en instaurant une taxe carbone qui ne concerne que les particuliers. Vous le faites par 15 milliards au moins de dépense publique.
Cette politique enrichit les plus riches et le capital et appauvrit l’État. Elle désintègre la dimension redistributive de l’impôt, qui est la base du consentement républicain à celui-ci.
En quelques mois, vous incarnez la marche arrière vers le XIXe siècle, vers le travail à la tâche, que vous avez encore amplifié en multipliant par deux le plafonnement applicable aux auto-entrepreneurs, ce qui s’ajoute aux ordonnances, aux fameuses directives sur les travailleurs détachés, dont vous vous enorgueillissez alors que vous légitimez le dumping interne et qui font de Mme Pénicaud la ministre la plus anti-sociale de la Ve République, mais aussi la plus appréciée du MEDEF. Exactement. À ce monde de la concurrence, de la dérégulation et de l’austérité, plus que jamais nous répondons par l’avenir en commun : celui de la taxe différentielle ; celui d’un impôt sur le revenu à quatorze tranches qui imposerait les plus riches de nos concitoyens, ceux qui gagnent plus de 400 000 euros, à 90 % de leurs revenus ; celui de la taxation de ceux dont la richesse alourdit la cordée collective que le peuple français assure, à savoir ceux qui font de la richesse sur le capital leur seul motif de fierté ; celui de la baisse de la TVA, qui pèse deux fois plus sur les revenus des plus modestes que sur les plus riches. C’est vrai. Le 2 novembre, nous proposerons par conséquent un contre-budget, pour vous prouver qu’un autre avenir existe pour notre pays que celui auquel le destine ce budget de l’austérité et des inégalités. Nous voterons contre, car c’est celui du Président des ultras riches. C’est la logique même de ce budget. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.) La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’on ne manque pas de raisons de voter contre cette première partie du projet de loi de finances pour 2018.
Nous l’avons souligné à de nombreuses reprises, au risque de susciter un certain agacement dans vos rangs, mais nous le réaffirmons très tranquillement : oui ce budget est bien un budget pour les riches. Ce n’est pas faux. Vous avez choisi de privilégier le capital plutôt que le travail. Trois exemples, qui ne souffrent d’aucune ambiguïté, témoignent de ce choix.
Le premier, le plus emblématique, le plus révélateur, est bien entendu la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, qui prive le budget de l’État de plus de 3 milliards d’euros de recettes. C’est colossal, énorme, et cela ne va profiter qu’à environ 300 000 foyers à qui l’on demande, en contrepartie, si c’était possible, de bien vouloir réinvestir ce pactole dans l’économie.
On nous dit qu’appauvrir – mais le terme est-il employé à bon escient ? – les riches n’a jamais enrichi les pauvres. Pour autant, leur accorder un chèque en blanc de ce montant permettra-t-il à ceux qui peinent à boucler leurs fins de mois de vivre mieux ? Nous en doutons fortement, car ce cadeau n’est pas financé par son effet escompté sur la reprise économique.
Non, il faut faire, en contrepartie, des économies !
Économies sur les contrats aidés, accusés de tous les maux. C’est bien connu, quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage. Quand on veut tuer le contrat aidé donc, on dit qu’il est inefficace – beaucoup apprécieront – et que de surcroît il coûte cher. Mais combien a coûté chaque emploi financé par le CICE ? 400 000 euros !
Économies aussi sur les APL, avec 5 euros de moins par mois, pour de nombreux étudiants par exemple. Économies sur les collectivités à qui l’on demande, pour 319 d’entre elles, de limiter la dépense. Sinon, les sanctions tomberont ! Économies encore par la suppression progressive de la taxe d’habitation – prétendument compensée à l’euro près : si c’est vrai, ce sera un réel changement !
Par cette dernière mesure, vous reprenez véritablement en main les collectivités. Mais que préparez-vous donc ? Nous en reparlerons sans doute bientôt…
Je salue ceux qui, partout en France, s’opposent à ces politiques violentes et brutales. Je salue ceux qui réparent et dont certains représentants sont ici en ce moment : je pense aux membres de la CGT Douanes et de l’association Action santé mondiale. Rappelons également le travail essentiel mené par Oxfam, CCFD, et diverses ONG.
J’évoquais tout à l’heure trois exemples. Après celui, édifiant, de l’ISF transformé en IFI – impôt sur la fortune immobilière – citons, bien entendu, la fameuse flat tax , encore appelée PFU – prélèvement forfaitaire unique. Ce nouveau système d’imposition des revenus de placements ou de dividendes permet, en pratiquant un prélèvement unique de 30 %, de supprimer la progressivité de l’impôt comme c’était le cas jusqu’à présent.
Bien entendu, chacun aura compris que ce nouveau dispositif profitera aux plus hauts revenus – qui, spontanément, réinvestiront bien sûr cette nouvelle manne dans le financement des entreprises ! Cette nouvelle mesure coûtera la bagatelle de 2 milliards d’euros.
Troisième exemple, on ne peut plus parlant : la dislocation de la taxe sur les transactions financières – TTF – votée dans le projet de loi de finances 2017, et la non mise en place de la taxe sur les transactions journalières, dont une très grosse partie ne sont que spéculatives. Soulignons simplement que le produit de ces taxes est censé participer au développement des pays qui ont besoin du soutien international.
Vous instaurez une fiscalité écologique punitive pour ceux qui ont besoin de leurs véhicules et qui devront payer le gasoil plus cher.
La baisse des moyens consacrés à la cohésion des territoires nous inquiète particulièrement pour l’avenir de la ruralité. Je me réjouis toutefois de la réintégration, temporaire pour l’instant, des communes exclues du dispositif ZRR – zones de revitalisation rurale – depuis le 1er juillet 2017, exclusion que j’avais ici même dénoncée il y a quelques semaines.
Le texte est muet sur la nécessité de livrer un combat sans concession contre l’évasion et la fraude fiscales, dont le montant représente pourtant l’équivalent de notre déficit.
Pour toutes ces raisons et pour d’autres encore sur lesquelles je n’ai pas le temps de revenir, nous voterons contre ce budget des riches. Nous pensons, ce faisant, être les porte-parole d’une majorité de nos concitoyens. C’est pourquoi nous avons présenté une alternative budgétaire qui annule les cadeaux fiscaux et qui propose d’autres choix en matière de justice fiscale, de pouvoir d’achat ou de soutien aux services publics, tels que la santé. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.) La parole est à Mme Amélie de Montchalin, pour le groupe La République en marche. Nous nous apprêtons à voter la trajectoire budgétaire pour le quinquennat… C’est une trajectoire inquiétante ! …et la première partie du projet de loi de finances pour 2018. Mais ces textes sont bien plus qu’un budget.
Ces textes sont d’abord le fruit d’un diagnostic partagé sur l’état de notre pays et sur l’impasse dans laquelle il se trouvait sur certains aspects : impasse budgétaire, comme nous l’avons vu cet été, impasse économique, avec des PME trop petites, un déficit commercial record et un chômage de masse, et impasse politique, du fait de débats bien trop techniques là où des choix forts s’imposent.
Il émane de ce diagnostic une volonté collective de transformer le pays, qui était inscrite au cœur du projet présidentiel et qui a rythmé nos campagnes sur le terrain. Le projet de loi de finances et la trajectoire pluriannuelle en traduisent les engagements forts.
Ils reflètent aussi une nouvelle méthode, notre méthode, celle d’une réelle coconstruction entre le Gouvernement et le Parlement (Exclamations sur les bancs du groupe LR) et, au sein de celui-ci, entre la majorité et ses oppositions. Certes, nous sommes la majorité, mais nous sommes ouverts à un dialogue respectueux et constructif. On l’a vu ! Sans aller jusqu’à retenir nos amendements ! Il y a de bonnes idées sur tous les bancs ! Les 119 amendements adoptés lors de ce débat budgétaire en témoignent.
Ce budget est plus qu’un budget car il permet de réconcilier ce qui a trop longtemps été opposé. Il réconcilie d’abord le travail et l’investissement. Nous sommes la majorité qui réduit les cotisations salariales, qui soutient le pouvoir d’achat des actifs, et qui réduit le poids des prélèvements obligatoires. Et la CSG ? Nous agissons sur deux leviers : la feuille de paie et la feuille d’impôt.
En même temps, nous sommes la majorité qui stimule les investissements, privés et publics : en rénovant la fiscalité du capital pour la rendre plus lisible, plus incitative et plus attractive ; en permettant à nos entreprises, petites et grandes, de se financer en fonds propres plutôt que par la dette ; en investissant 57 milliards d’argent public dans notre économie, dans l’innovation, dans la recherche, pour mieux la transformer, via le grand plan d’investissement.
Nous y avons montré qu’avec le même objectif de maîtrise du déficit, il était possible de ne pas augmenter la contribution sociale généralisée – CSG – sur les petites retraites, de ne pas baisser les aides personnalisées au logement – APL –, de ne pas fiscaliser les plans d’épargne logement, de ne pas toucher au forfait hospitalier, de ne pas réduire le montant de la prestation d’accueil du jeune enfant – PAJE – et de ne pas opérer de coupes claires dans le budget de nos collectivités locales ; possible enfin de ne pas procéder à cet immense plan social auquel vous allez vous livrer s’agissant des emplois dits aidés.
Et en même temps, il aurait été possible d’orienter l’épargne vers l’investissement productif. Mais vous avez fait un autre choix, celui que partageaient d’ailleurs tous les candidats à la primaire de la droite : suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune – ISF – et baisse de la fiscalité sur les revenus du capital, avec l’instauration d’une flat tax .
De ce point de vue, monsieur le ministre, vous avez eu raison de la rappeler, vous êtes cohérent : vous n’avez rien oublié !
Le 20 octobre, en vingt-quatre heures, vous avez ainsi mis à mal deux principes essentiels de notre fiscalité : la progressivité de l’impôt, qui veut que l’on paie en fonction de sa richesse, et son caractère redistributif.
Dans votre esprit, l’exigence de justice sociale est assimilée à une jalousie pathologique. Ce très vieil argument fut opposé à la majorité de 1981 et à Michel Rocard lorsqu’il rétablit un impôt sur la fortune en 1988. Pour vous, une mesure est juste si elle ne contrarie pas la liberté des actionnaires, quitte à accroître des inégalités qui, elles, ne vous empêchent pas de dormir. Le partage des richesses est remplacé par cette fumeuse théorie du ruissellement, dont le seul effet avéré est de rendre les riches encore plus riches.
Ainsi, en attendant que la fortune veuille bien ruisseler jusqu’au bas de la pyramide sociale, une flat tax a été adoptée. Grâce à elle, les revenus du capital seront imposés à 12,8 %, alors qu’un salarié de la tranche la plus basse de l’impôt sur le revenu sera imposé à 14 % !
Nous nous apprêtons à voter dans quelques minutes, mais le Gouvernement n’a toujours pas daigné révéler l’ampleur de ce cadeau pour les cent plus grandes fortunes de France. Visiblement, toute vérité n’est pas bonne à dire, car c’est un chèque de plusieurs millions d’euros par foyer fiscal qu’il faudrait annoncer. Difficile à assumer, quand on découvre au cours du débat que la mesure est en partie financée par la fiscalisation des plans épargne logement ! Difficile à justifier, quand le même Gouvernement considère qu’un retraité est riche à partir de 1 200 euros ! Il a raison. Vous avez également supprimé l’impôt de solidarité sur la fortune. Nouveau chèque en blanc, après celui de la flat tax . Aucune condition n’est fixée. Vous prétendez libérer des capitaux qui s’investiront dans les placements à risque, mais aucune obligation n’est imposée aux grands gagnants de ce loto fiscal ! Et quand bien même cette manne serait placée en actions, elle pourrait l’être dans un fonds de pension américain, un fonds vautour, une entreprise étrangère plutôt qu’une entreprise française ! Jusqu’ici il existait un dispositif appelé ISF-PME qui permettait de déduire une part de son impôt, en contrepartie d’un investissement dans les PME nationales. Vous réalisez la contre-performance de le supprimer !
Votre volonté de déplacer les capitaux vers l’investissement productif est enfin démentie par l’abrogation de la taxe sur les transactions financières intrajournalières. Le trading haute fréquence est de la spéculation pure, les opérations étant réalisées essentiellement à partir d’algorithmes. Comment voir dans cette complaisance un quelconque soutien à l’activité ou à l’innovation ?
Vous faites un pari, un pari qui sera payé par les classes moyennes et populaires qui, elles, vivent de leur seul travail. C’est une faute que d’autres ont commise avant vous, mais dont vous ne tirez aucune leçon. Les grandes fortunes n’ont jamais autant pris le chemin de l’exil fiscal qu’au lendemain de l’instauration du bouclier fiscal. C’est faux. Valérie Rabault l’a prouvé durant le débat parlementaire, souvenez-vous.
C’est une faute parce que ce n’est pas au secours des entreprises que vous vous portez, mais de la fortune personnelle des détenteurs de capitaux. Une faute parce que c’est la cohésion sociale que vous abîmez tout en affaiblissant le consentement même à l’impôt. Comment expliquerez-vous à nos retraités qu’ils sont appelés à la solidarité quand ils observeront vos largesses en faveur de ceux qui en ont le moins besoin ?
Le nouveau monde fiscal se caractérisera par une perte de 30 milliards d’euros sur le quinquennat pour les caisses de l’État, que devront supporter tous les autres Français. Les Français retiendront donc de vos arbitrages qu’il vaut mieux vivre de ses rentes financières que de son travail, être un gros actionnaire qu’un épargnant de la classe moyenne, vivre sur son yacht que se loger grâce aux aides personnalisées au logement, spéculer que tenter de refaire surface par le biais d’un emploi aidé. Veuillez conclure, mon cher collègue… Ces choix-là sont ceux que la gauche a toujours combattus. Votre nouveau monde fiscal est un moyen-âge. Nous voterons unanimement contre ce qui, aux yeux de tous les Français, apparaît comme une injustice insupportable. (Applaudissements sur les bancs du groupe NG et plusieurs bancs du groupe GDR.) La parole est à M. Éric Coquerel, pour le groupe La France insoumise. Nous voici donc parvenus à la conclusion de la partie relative aux recettes du projet de loi de finances pour 2018 – PLF.
En attendant que soient battus les records d’austérité lors de l’examen des dépenses et du projet de loi de financement de la sécurité sociale – PLFSS – cette semaine aura confirmé que ce budget est le plus inégal de la Ve République.
Par le passé, d’autres auront voulu instaurer un bouclier social, voire un bouclier fiscal : vous instituez un bouclier du capital.
J’aimerais, dans les cinq minutes qui me sont imparties, éveiller chez nos collègues La République en marche, qui vont bientôt voter, au moins la conscience du principe de précaution. Nous nous retrouvons en effet face à une majorité inédite, qui applaudit debout la casse du code du travail, la fin de l’ISF, la flat tax, comme d’autres, hier, saluaient les congés payés, le vote des femmes, la légalisation de l’IVG ou l’abrogation de la peine de mort.
Je suppose donc, mes chers collègues, que vous avez le sentiment de vivre des heures historiques, au nom de l’intérêt général. Je veux le croire. Pensez-vous cependant être accueillis, de retour dans vos circonscriptions, par des hourras, des salves d’applaudissements, des manifestations d’allégresse ?
Car le bilan de cette semaine est sans appel : 9 milliards offerts aux plus riches, détenteurs du capital, des miettes aux 9 millions de pauvres, une baisse du pouvoir d’achat pour les autres.
Reprenons donc le pari pascalien que vous avez fait, monsieur le ministre : ces 9 milliards, accordés sans aucune contrepartie concrète, permettraient un investissement productif. Nous avons été nombreux à vous demander comment vous comptiez vous y prendre. Nous avons reçu, à un moment donné, cette réponse : le bon sens !
Ignorez-vous à ce point l’histoire, chers collègues, monsieur le ministre, pour oublier que pas une fois le capitalisme ne s’est régulé et gendarmé de lui-même, et qu’il n’a consenti au compromis que sous la contrainte des pouvoirs publics ou des faits historiques, qu’il s’agisse de mouvements sociaux ou de circonstances exceptionnelles et civilisationnelles – le New Deal, 1936, la Libération ?
Au final, il y a fort à parier que ces 9 milliards alimenteront encore un peu plus la rente, celle-là même pour laquelle, au nom de ses intérêts, s’exerce toute la pression vers le bas sur les productifs de ce pays, qu’il s’agisse des TPE-PME, des salariés, des artisans ou des agriculteurs.
Car nous la paierons tous. Dès lors que vous vous placez dans la logique des déficits imposée par Bruxelles, certes avec le consentement complice des gouvernements successifs de ce pays depuis des années, vous devez inévitablement prendre aux plus pauvres ce que vous donnerez aux plus riches. Et vous le faites ! Vous le faites en refusant tous les amendements qui visaient à limiter les niches fiscales, dont chacun reconnaît le caractère scandaleux. Vous le faites en augmentant la CSG, en baissant les APL, en instaurant une taxe carbone qui ne concerne que les particuliers. Vous le faites par 15 milliards au moins de dépense publique.
Cette politique enrichit les plus riches et le capital et appauvrit l’État. Elle désintègre la dimension redistributive de l’impôt, qui est la base du consentement républicain à celui-ci.
En quelques mois, vous incarnez la marche arrière vers le XIXe siècle, vers le travail à la tâche, que vous avez encore amplifié en multipliant par deux le plafonnement applicable aux auto-entrepreneurs, ce qui s’ajoute aux ordonnances, aux fameuses directives sur les travailleurs détachés, dont vous vous enorgueillissez alors que vous légitimez le dumping interne et qui font de Mme Pénicaud la ministre la plus anti-sociale de la Ve République, mais aussi la plus appréciée du MEDEF. Exactement. À ce monde de la concurrence, de la dérégulation et de l’austérité, plus que jamais nous répondons par l’avenir en commun : celui de la taxe différentielle ; celui d’un impôt sur le revenu à quatorze tranches qui imposerait les plus riches de nos concitoyens, ceux qui gagnent plus de 400 000 euros, à 90 % de leurs revenus ; celui de la taxation de ceux dont la richesse alourdit la cordée collective que le peuple français assure, à savoir ceux qui font de la richesse sur le capital leur seul motif de fierté ; celui de la baisse de la TVA, qui pèse deux fois plus sur les revenus des plus modestes que sur les plus riches. C’est vrai. Le 2 novembre, nous proposerons par conséquent un contre-budget, pour vous prouver qu’un autre avenir existe pour notre pays que celui auquel le destine ce budget de l’austérité et des inégalités. Nous voterons contre, car c’est celui du Président des ultras riches. C’est la logique même de ce budget. (Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.) La parole est à M. Jean-Paul Dufrègne, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine. Le moins que l’on puisse dire, c’est que l’on ne manque pas de raisons de voter contre cette première partie du projet de loi de finances pour 2018.
Nous l’avons souligné à de nombreuses reprises, au risque de susciter un certain agacement dans vos rangs, mais nous le réaffirmons très tranquillement : oui ce budget est bien un budget pour les riches. Ce n’est pas faux. Vous avez choisi de privilégier le capital plutôt que le travail. Trois exemples, qui ne souffrent d’aucune ambiguïté, témoignent de ce choix.
Le premier, le plus emblématique, le plus révélateur, est bien entendu la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune, qui prive le budget de l’État de plus de 3 milliards d’euros de recettes. C’est colossal, énorme, et cela ne va profiter qu’à environ 300 000 foyers à qui l’on demande, en contrepartie, si c’était possible, de bien vouloir réinvestir ce pactole dans l’économie.
On nous dit qu’appauvrir – mais le terme est-il employé à bon escient ? – les riches n’a jamais enrichi les pauvres. Pour autant, leur accorder un chèque en blanc de ce montant permettra-t-il à ceux qui peinent à boucler leurs fins de mois de vivre mieux ? Nous en doutons fortement, car ce cadeau n’est pas financé par son effet escompté sur la reprise économique.
Non, il faut faire, en contrepartie, des économies !
Économies sur les contrats aidés, accusés de tous les maux. C’est bien connu, quand on veut tuer son chien, on dit qu’il a la rage. Quand on veut tuer le contrat aidé donc, on dit qu’il est inefficace – beaucoup apprécieront – et que de surcroît il coûte cher. Mais combien a coûté chaque emploi financé par le CICE ? 400 000 euros !
Économies aussi sur les APL, avec 5 euros de moins par mois, pour de nombreux étudiants par exemple. Économies sur les collectivités à qui l’on demande, pour 319 d’entre elles, de limiter la dépense. Sinon, les sanctions tomberont ! Économies encore par la suppression progressive de la taxe d’habitation – prétendument compensée à l’euro près : si c’est vrai, ce sera un réel changement !
Par cette dernière mesure, vous reprenez véritablement en main les collectivités. Mais que préparez-vous donc ? Nous en reparlerons sans doute bientôt…
Je salue ceux qui, partout en France, s’opposent à ces politiques violentes et brutales. Je salue ceux qui réparent et dont certains représentants sont ici en ce moment : je pense aux membres de la CGT Douanes et de l’association Action santé mondiale. Rappelons également le travail essentiel mené par Oxfam, CCFD, et diverses ONG.
J’évoquais tout à l’heure trois exemples. Après celui, édifiant, de l’ISF transformé en IFI – impôt sur la fortune immobilière – citons, bien entendu, la fameuse flat tax , encore appelée PFU – prélèvement forfaitaire unique. Ce nouveau système d’imposition des revenus de placements ou de dividendes permet, en pratiquant un prélèvement unique de 30 %, de supprimer la progressivité de l’impôt comme c’était le cas jusqu’à présent.
Bien entendu, chacun aura compris que ce nouveau dispositif profitera aux plus hauts revenus – qui, spontanément, réinvestiront bien sûr cette nouvelle manne dans le financement des entreprises ! Cette nouvelle mesure coûtera la bagatelle de 2 milliards d’euros.
Troisième exemple, on ne peut plus parlant : la dislocation de la taxe sur les transactions financières – TTF – votée dans le projet de loi de finances 2017, et la non mise en place de la taxe sur les transactions journalières, dont une très grosse partie ne sont que spéculatives. Soulignons simplement que le produit de ces taxes est censé participer au développement des pays qui ont besoin du soutien international.
Vous instaurez une fiscalité écologique punitive pour ceux qui ont besoin de leurs véhicules et qui devront payer le gasoil plus cher.
La baisse des moyens consacrés à la cohésion des territoires nous inquiète particulièrement pour l’avenir de la ruralité. Je me réjouis toutefois de la réintégration, temporaire pour l’instant, des communes exclues du dispositif ZRR – zones de revitalisation rurale – depuis le 1er juillet 2017, exclusion que j’avais ici même dénoncée il y a quelques semaines.
Le texte est muet sur la nécessité de livrer un combat sans concession contre l’évasion et la fraude fiscales, dont le montant représente pourtant l’équivalent de notre déficit.
Pour toutes ces raisons et pour d’autres encore sur lesquelles je n’ai pas le temps de revenir, nous voterons contre ce budget des riches. Nous pensons, ce faisant, être les porte-parole d’une majorité de nos concitoyens. C’est pourquoi nous avons présenté une alternative budgétaire qui annule les cadeaux fiscaux et qui propose d’autres choix en matière de justice fiscale, de pouvoir d’achat ou de soutien aux services publics, tels que la santé. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.) La parole est à Mme Amélie de Montchalin, pour le groupe La République en marche. Nous nous apprêtons à voter la trajectoire budgétaire pour le quinquennat… C’est une trajectoire inquiétante ! …et la première partie du projet de loi de finances pour 2018. Mais ces textes sont bien plus qu’un budget.
Ces textes sont d’abord le fruit d’un diagnostic partagé sur l’état de notre pays et sur l’impasse dans laquelle il se trouvait sur certains aspects : impasse budgétaire, comme nous l’avons vu cet été, impasse économique, avec des PME trop petites, un déficit commercial record et un chômage de masse, et impasse politique, du fait de débats bien trop techniques là où des choix forts s’imposent.
Il émane de ce diagnostic une volonté collective de transformer le pays, qui était inscrite au cœur du projet présidentiel et qui a rythmé nos campagnes sur le terrain. Le projet de loi de finances et la trajectoire pluriannuelle en traduisent les engagements forts.
Ils reflètent aussi une nouvelle méthode, notre méthode, celle d’une réelle coconstruction entre le Gouvernement et le Parlement (Exclamations sur les bancs du groupe LR) et, au sein de celui-ci, entre la majorité et ses oppositions. Certes, nous sommes la majorité, mais nous sommes ouverts à un dialogue respectueux et constructif. On l’a vu ! Sans aller jusqu’à retenir nos amendements ! Il y a de bonnes idées sur tous les bancs ! Les 119 amendements adoptés lors de ce débat budgétaire en témoignent.
Ce budget est plus qu’un budget car il permet de réconcilier ce qui a trop longtemps été opposé. Il réconcilie d’abord le travail et l’investissement. Nous sommes la majorité qui réduit les cotisations salariales, qui soutient le pouvoir d’achat des actifs, et qui réduit le poids des prélèvements obligatoires. Et la CSG ? Nous agissons sur deux leviers : la feuille de paie et la feuille d’impôt.
En même temps, nous sommes la majorité qui stimule les investissements, privés et publics : en rénovant la fiscalité du capital pour la rendre plus lisible, plus incitative et plus attractive ; en permettant à nos entreprises, petites et grandes, de se financer en fonds propres plutôt que par la dette ; en investissant 57 milliards d’argent public dans notre économie, dans l’innovation, dans la recherche, pour mieux la transformer, via le grand plan d’investissement.