XVe législature
Session ordinaire de 2017-2018

Séance du dimanche 03 juin 2018

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique (nos 846, 971, 881, 942, 944).
Le temps de parole restant pour la discussion de ce texte est de huit heures cinquante-six minutes pour le groupe La République en marche, dont 379 amendements sont en discussion ; cinq heures trente-huit minutes pour le groupe Les Républicains, dont 503 amendements sont en discussion ; deux heures douze minutes pour le groupe du Mouvement démocrate et apparentés, dont 75 amendements sont en discussion ; deux heures quarante-deux minutes pour le groupe UDI, Agir et indépendants, dont 81 amendements sont en discussion ; deux heures cinquante-huit minutes pour le groupe Nouvelle Gauche, dont 108 amendements sont en discussion ; deux heures trente-neuf minutes pour le groupe La France insoumise, dont 60 amendements sont en discussion ; trente-neuf minutes pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, dont 117 amendements sont en discussion.
Il ne reste plus de temps de parole aux députés non inscrits, dont 48 amendements sont en discussion.
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 55 rectifié portant article additionnel après l’article 33. Je suis saisie de cinq amendements identiques, nos 55 rectifié, 923 rectifié, 1265 rectifié, 2114 rectifié et 2699 rectifié.
La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement no 55 rectifié.
Il est défendu, madame la présidente. La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 923 rectifié. Il est défendu. La parole est à Mme Valérie Lacroute, pour soutenir l’amendement no 1265 rectifié. La liste des charges récupérables est fixée, pour les logements des organismes HLM, par le décret du 9 novembre 1982. L’article L.442-3 du code de la construction et de l’habitation prévoit qu’il peut y être dérogé par accords collectifs locaux portant sur l’amélioration de la sécurité ou la prise en compte du développement durable. Cet amendement vise à élargir la possibilité de déroger à cette liste limitative des charges récupérables par accords collectifs locaux portant sur « les nouveaux services à caractère social d’intérêt direct pour les locataires. » Je sais bien, messieurs les ministres, que nous avons déjà évoqué cette fameuse liste des charges récupérables qui date du décret précité de novembre 1982 – certains d’entre nous étaient très jeunes à l’époque. M. le secrétaire d’État avait deux ans ! Moi aussi. (Sourires) J’ai bien compris que ce chantier était important et que vous vous apprêtiez à l’ouvrir. Il importe en effet que nous puissions revoir dans des délais relativement courts cette liste des charges récupérables. La situation des habitants des quartiers a évolué depuis 1982 : leurs profils et leurs demandes ne sont plus les mêmes. Pour leur tranquillité comme pour leur qualité de vie, il serait judicieux de réexaminer cette liste des charges récupérables. Je m’attends bien sûr à ce que mon amendement soit rejeté, mais j’espère que notre demande sera entendue. La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l’amendement no 2114 rectifié. Il est défendu. La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l’amendement no 2699 rectifié. Il est défendu. La parole est à Mme Christelle Dubos, rapporteure de la commission des affaires économiques. Ces amendements portent en effet sur le décret du 9 novembre 1982 fixant la liste des charges récupérables dont nous avons parlé juste avant la levée de séance de cet après-midi. Compte tenu de ce que nous avons dit à ce moment-là, je propose à leurs auteurs de les retirer. À défaut, la commission y sera défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Monsieur Lurton, retirez-vous ou maintenez-vous l’amendement no 55 rectifié ? Je le maintiens, madame la présidente. Monsieur Bazin, retirez-vous ou maintenez-vous l’amendement no 923 rectifié ? Je le retire.
(L’amendement no 923 rectifié est retiré.) Qu’en est-il du vôtre, madame Lacroute ? Je le maintiens. Elle est incorruptible ! (Sourires.) Madame Faucillon ? Je maintiens également le mien. Madame Rabault ? Moi aussi, madame la présidente.
(Les amendements identiques nos 55 rectifié, 1265 rectifié, 2114 rectifié et 2699 rectifié ne sont pas adoptés.)
(Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Mes chers collègues, vous auriez dû compter en même temps que moi : je vous assure que le vote était sans appel. Ils ont été rejetés très largement ! Je suis saisie de deux amendements, nos 635 et 634, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Robin Reda, pour les soutenir.
Messieurs les ministres, j’aurais aimé soutenir ces amendements avant le dîner, afin qu’ils vous donnent un sujet de conversation : la métropole du Grand Paris.
Nous sommes en effet parvenus à la moitié du projet de loi, et cela fait très longtemps que nous n’avons pas reparlé de la nécessité de mettre à bas ce monstre technocratique qui étouffe les communes d’Île-de-France.
Libérez Paris ! On arrive : ça va venir ! On arrive ! Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ? S’agissant de l’amendement no 635, la question de l’organisation de la métropole du Grand Paris a été tranchée par la loi du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite loi NOTRe. Même si des débats sont en cours, le projet de loi que nous examinons n’a pas vocation à traiter de cette question : l’avis de la commission est donc défavorable.
S’agissant de l’amendement no 634, le transfert progressif de compétences au niveau des EPCI a été enclenché par la loi du 24 mars 2014 pour l’accès au logement et un urbanisme rénové, dite loi ALUR, puis poursuivi par la loi du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté.
Revenir en arrière serait par conséquent un grave recul. L’EPCI constitue en effet l’échelon adapté tant pour penser les politiques du logement à l’échelle du bassin de vie que pour encourager la mixité sociale : l’avis de la commission est donc défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Je considère qu’il s’agit d’un amendement d’appel. (« Oui ! » sur les bancs du groupe LR.) Aidez-nous ! À Paris, les automobilistes souffrent ! Vous savez, madame la députée, que le Gouvernement est là pour vous aider et pour aider tous nos concitoyens. Vous voulez supprimer les établissements publics territoriaux, les EPT, mais d’autres les ont créés et ils font actuellement l’objet d’une réflexion.
Nous travaillons en effet sur ce sujet. Le Président de la République, le Premier ministre, le ministre d’État Gérard Collomb, le secrétaire d’État et moi-même avons reçu tous les acteurs de l’Île-de-France.
Tout à fait. Nous avons bien entendu à cette occasion les déclarations et les souhaits des uns et des autres. Ils sont parfois contradictoires, même lorsqu’ils émanent de personnalités issues de la même sensibilité politique.
Cette réflexion se poursuit car, comme nous le savons tous, le système est aujourd’hui extrêmement compliqué : c’est d’ailleurs ce que tout le monde s’accorde à dire.
Cela me fait penser à : « je vous ai compris ! » Les conclusions à tirer en vue des réformes à mettre en place sont, comme je l’ai dit, très diverses, ce sujet transcendant les différentes sensibilités politiques. Il est donc vraiment à l’étude : le Gouvernement y travaille.
Vous comprendrez par conséquent que je ne puisse pas vous annoncer ce soir que nous allons supprimer les EPT.
Mais vous pouvez donner un calendrier, peut-être ? Non. Je peux en revanche vous confirmer que le Gouvernement travaille beaucoup sur ce dossier, en collaboration avec tous les élus franciliens. Nous héritons quoi qu’il en soit d’une situation que l’accumulation des modifications, issues en particulier des dernières lois votées en la matière, n’a pas forcément améliorée. Merci Manuel !
(Les amendements nos 635 et 634, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Sur l’amendement no 3111, je suis saisie par le groupe Nouvelle Gauche d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour le soutenir.
Il est très important. Avant d’essuyer des critiques à son sujet, je suis d’accord avec vous, monsieur le ministre : il aurait davantage sa place dans un projet de loi de finances.
Compte tenu du fait que vous avez réaffirmé l’objectif de voir s’élever des grues et de relancer la construction de façon très active, mon collègue François Pupponi a cependant proposé que nous le déposions dès maintenant.
La plupart des opérations de démolition de logements sociaux réalisées dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain – NPNRU – conduit par l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU, bénéficient de règles de droit commun en matière de taxe sur la valeur ajoutée – TVA – qui facilitent leur mise en œuvre, c’est-à-dire d’un taux réduit de 5,5 %.
Cependant, l’ANRU a constaté que certaines opérations ne bénéficiaient pas des deux mécanismes facilitant cette mise en œuvre, et qu’elles se voyaient donc appliquer un taux de TVA de 20 %.
Cet amendement vise à ce que les opérations qui, pour des raisons très particulières, ne peuvent bénéficier aujourd’hui du taux réduit de 5,5 %, puissent en bénéficier. L’impact financier de cette minoration du taux de TVA est à ce jour estimé à 37 millions d’euros sur la durée du NPNRU. Si on ajoute les opérations qui ne bénéficient pour l’instant pas de cette minoration, on arrive – c’est une cote mal taillée – à 2 à 3 millions d’euros.
Cet amendement ne dégradera donc pas nos finances publiques de manière importante. En revanche, il peut avoir un impact extrêmement positif sur la relance de la construction que vous appelez de vos vœux, monsieur le ministre, et que nous soutenons évidemment : il permettrait qu’elle se fasse dans les meilleures conditions.
Quel est l’avis de la commission ? Il est exact que la TVA peut, dans certaines situations, constituer un coût important pour les opérateurs. Toutefois, une telle mesure devrait être expertisée, en particulier au regard du droit communautaire.
Elle aurait en outre plutôt sa place, vous l’avez dit à juste titre, dans le projet de loi de finances.
Enfin, la rédaction proposée ne tient pas compte des mesures votées fin 2017 sur la TVA applicable au logement social : il ne serait donc pas opérationnel. Pour toutes ces raisons, la commission y est défavorable.
Très bon amendement. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il sera également défavorable. Comme cela a d’ailleurs été rappelé par Mme la présidente Rabault, cette disposition aurait plutôt sa place dans le projet de loi de finances.
S’agissant de la relance de la construction et de la présence des grues dans les quartiers, vous savez sans doute que le 25 mai dernier, le conseil d’administration de l’ANRU a approuvé un certain nombre de mesures et pris des orientations.
Elles vont permettre de relancer très rapidement la construction dans les quartiers prioritaires de la ville, les QPV.
Un nombre important de dossiers ont été validés à cette occasion. Cette évolution est favorisée par une accélération des procédures, sur laquelle nous nous étions engagés, et par la mise en place de nouveaux financements dédiés aux démolitions, qui étaient très attendus.
Il me semble donc que nous sommes sur le bon chemin. Nous nous sommes abstenus de faire le procès de ce qui avait été fait avant, et nous avons pris la décision – avec le concours des partenaires, notamment financiers, de l’ANRU, qu’il s’agisse d’Action logement, des bailleurs sociaux ou de l’État – de simplifier et d’accélérer les choses.
Il me semble que cela correspond à ce que tout le monde souhaitait.
La parole est à M. François Pupponi. Monsieur le ministre, j’ai participé à la réunion du conseil d’administration que vous venez d’évoquer. Parmi les mesures demandées par celui-ci figure celle qui a été présentée par notre collègue Valérie Rabault.
Pourquoi ? Il s’agit d’un cas un peu particulier : quand l’ANRU demande à un bailleur de démolir un immeuble, si celui-ci ne reconstitue pas l’offre locative, il est soumis à un taux de TVA de 20 %.
S’il reconstitue l’offre locative, il est soumis à un taux de TVA de 5,5 %. Le bailleur est donc fondé à demander pourquoi il se trouve pénalisé de la sorte et pourquoi on ne le lui confie pas, une fois la destruction menée à bien, la reconstruction de l’immeuble. Cela n’a aucun sens !
Lorsqu’un bailleur procède à une démolition d’immeuble pour le compte de l’ANRU, il doit bénéficier, en vue d’accélérer les démolitions, du taux réduit de TVA de 5,5 %, qu’il reconstitue ensuite ou non l’offre locative.
En l’occurrence, le bailleur n’a aucun intérêt à prendre en charge la seule démolition, puisqu’il s’en trouve pénalisé fiscalement. Je le répète : la décision de ne pas lui confier ensuite la reconstitution de l’offre locative est souvent le fait de l’ANRU.
En effet, l’ANRU dit souvent au bailleur en question : vous ne pouvez pas reconstruire, car ce sont d’autres bailleurs sociaux que nous avons désignés pour cela. Cela revient à lui infliger une double peine : non seulement il perd des loyers, mais en plus il ne bénéficie pas du taux réduit de TVA. Dans ces cas-là, les bailleurs sollicités répondent bien souvent non.
Je ne fais qu’exprimer une position défendue par tous les membres du conseil d’administration : ce rescrit fiscal constitue une anomalie qu’il faut modifier.
Cela aurait pu être fait avant. Monsieur le ministre, vous pouvez nous répondre à chaque fois que nous aurions pu le faire avant, mais si nous avions tout bien fait avant, vous ne seriez pas là. Vous n’allez pas nous le reprocher, quand même ! (Exclamations et rires.) Il était déjà là avant, lui ! C’est la continuité de l’ancien monde ! Je corrige : heureusement pour vous que nous n’avons pas tout bien fait, sinon nos collègues ne seraient pas là aujourd’hui – et ils n’auraient pas pu passer un magnifique dimanche à l’Assemblée nationale. Par conséquent, remerciez-nous de ne pas avoir tout fait ! (Rires et applaudissements.) Nous vous remercions ! Trêve de plaisanterie : c’est un sujet technique. Les bailleurs nous demandent pourquoi ils sont pénalisés, et nous n’avons pas de réponse à leur donner. L’idée de l’amendement, c’est d’appliquer un taux de TVA de 5,5 % lorsqu’une opération de démolition est menée dans le cadre du nouveau programme national de renouvellement urbain, que le bailleur reconstruise ou pas. Il démolit, on applique le même taux de TVA à tout le monde et on n’en parle plus.
Si vous nous répondiez qu’il s’agit d’une mesure fiscale, qui n’a pas sa place ici mais que vous vous engagez à inscrire dans un cadre approprié, nous serions prêts à retirer l’amendement. Mais ce qu’il faut, c’est que le Gouvernement reconnaisse qu’il y a une anomalie et qu’il s’engage à rectifier le tir dans un texte fiscal.
Pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté : ce sont les bailleurs qui sont demandeurs ; nous ne sommes, nous, que leurs porte-parole.
La parole est à M. le ministre. Monsieur Pupponi, nous n’allons pas polémiquer sur ce point. Qu’est-ce que nous vous avons répondu ? Que nous étions en train d’expertiser les choses.
C’est un sujet que vous connaissez, puisque vous avez eu à le traiter pendant plusieurs années. Je vous remercie d’ailleurs d’avoir rappelé que c’était grâce à vous que nous étions là. Vous le dites souvent – d’ailleurs, je vous tends fréquemment la perche.
(Sourires.) Je sais que cela vous fait plaisir, monsieur le ministre. (Sourires.) C’est surtout parce qu’ils ont été mauvais ! (Vives exclamations sur les bancs des groupes NG, LR, FI et GDR.) Vous voulez vraiment qu’on donne cette tonalité-là au débat ? C’est indigne ! C’est nul ! Et s’ils sont nuls, il faut leur dire ! Et Macron, où était-il ? Laissez le ministre répondre à M. Pupponi, s’il vous plaît ! Monsieur Pupponi, monsieur Peu, ne vous énervez pas. Ce n’est pas du tout ce que je voulais dire. Je voulais juste rendre hommage aux propos de M. Pupponi. (« Bravo ! » et applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Redevenons sérieux. M. Pupponi a une longue expérience de l’ANRU. Il siège à son conseil d’administration. Il a pu constater à cette occasion qu’il était nécessaire de prendre un certain nombre de mesures.
Il a voté pour vos mesures ! S’il ne l’avait pas fait, madame la députée, c’eût été en contradiction avec ce qu’il demandait depuis longtemps, quel que soit le Gouvernement. Aujourd’hui, nous y sommes ; nous nous étions engagés, tous ensemble, à accélérer et à simplifier le système, et c’est bien ce que nous faisons.
Quant à la mesure proposée
via cet amendement, elle nécessite d’être évaluée, notamment au regard du droit européen. Nous allons faire cette expertise et nous reviendrons vous dire si c’est possible ou pas. La parole est à M. François Pupponi. Dont acte, monsieur le ministre.
Sans vouloir polémiquer, je voudrais dire à notre collègue de La République en marche qu’il y a un an et demi, nous étions dans la même situation que vous : très nombreux. Nous disions aux collègues d’en face : nous sommes là parce que vous avez été nuls.
Oui, nous nous en souvenons ! Eh bien, regardez comment nous avons fini ! (Rires.) Justement ! Ne criez pas victoire trop fort, cher collègue. Un peu d’humilité ne nuit pas ! Monsieur Pupponi, retirez-vous ou maintenez-vous l’amendement ? Je le retire, madame la présidente.
(L’amendement no 3111 est retiré.) La parole est à Mme Graziella Melchior, pour soutenir l’amendement no 1796. Cet amendement propose la mise en place d’une convention signée par l’État et tous les organismes de logement social possédant au moins 5 % du parc de logements locatifs sociaux du territoire. L’objectif est d’assurer la cohérence entre les politiques locales de l’habitat et les stratégies propres de chacun des bailleurs présents sur le territoire. Les collectivités locales doivent être pleinement associées à l’évolution du patrimoine des organismes de logement social s’agissant du parc se situant sur leur territoire. Cette convention garantirait la convergence des objectifs de la collectivité et de ceux des organismes de logement social. Quel est l’avis de la commission ? La convention proposée par l’intermédiaire de cet amendement ressemble beaucoup à la convention d’utilité sociale – CUS – qui doit être signée entre l’État et chaque organisme HLM d’ici 2020. La loi prévoit d’ores et déjà que les CUS doivent prendre en compte les programmes locaux de l’habitat. La création d’un nouvel outil ne semble pas nécessaire. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Madame Melchior, que décidez-vous ? Vous retirez l’amendement ? Je retire l’amendement. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
(L’amendement no 1796 est retiré.) La parole est à M. Gilles Lurton, pour soutenir l’amendement no 88. Même si je suis peu enclin à demander des rapports, cette demande émane de notre collègue Pierre Cordier, dont l’amendement propose que le Gouvernement remette au Parlement, dans un délai de six mois suivant la promulgation de la loi, un rapport évaluant les conditions d’instruction des demandes de logement social.
(L’amendement no 88, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à Mme Nathalie Bassire, pour soutenir l’amendement no 89. Cet amendement de M. Cordier vise à demander un rapport sur une possible harmonisation de la gestion départementale du fonds de solidarité logement – FSL – autour d’un socle commun minimal de prestations, afin de limiter les ruptures d’égalité entre territoires. Cela permettrait de renforcer le soutien de l’État aux départements en difficulté. Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. La parole est à M. Ian Boucard. Il serait quand même intéressant de se pencher sur la question, car le règlement intérieur du fonds de solidarité logement varie d’un département à l’autre. Vu que dans certains départements – souvent les plus pauvres –, la solidarité est plus importante, cela peut provoquer un appel d’air. Le FSL est un dispositif national, financé en grande partie par l’État, mais qui a une réglementation locale. Par exemple, dans le Territoire-de-Belfort, on est très solidaire ; dans le département voisin, un peu moins. Il serait bon qu’il y ait une égalité sur l’ensemble du territoire – je crois que nous y sommes tous très attachés.
Nous vous demandons simplement de faire un rapport afin de vérifier s’il y a une réelle égalité entre les départements. Cela ne coûterait pas grand-chose et pourrait nous apprendre des choses intéressantes, notamment si l’on veut réformer le FSL au cours du mandat.
(L’amendement no 89 n’est pas adopté.) La parole est à M. Alain Ramadier, pour soutenir l’amendement no 90. Cet amendement de notre collègue Cordier vise à demander un rapport étudiant la possibilité d’un assouplissement des dérogations aux plafonds de ressources dans les secteurs détendus. Dans ces secteurs, accorder ces dérogations avec une plus grande souplesse permettrait d’attribuer des logements vacants et de garantir une meilleure mixité sociale.
(L’amendement no 90, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à M. Robin Reda. Quelques mots en introduction de cet article.
Nous abordons le sujet du bail mobilité. Vous savez, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, que le groupe Les Républicains s’accorde à considérer cette mesure comme une avancée. C’est une étape très intéressante dans la progression de l’examen de ce projet de loi. Il y a toutefois trois points sur lesquels nous souhaiterions revenir dans le cadre des amendements, afin que l’esprit de ce bail mobilité ne soit pas altéré.
D’abord, ce bail s’adresse à des publics en évolution, notamment pour des raisons professionnelles ou de formation. Vous avez une vision positive de la mobilité, et c’est très bien ; votre optimisme est à saluer. Toutefois, il y a aussi des personnes qui auraient besoin d’un bail mobilité dans des situations plus difficiles, notamment des conjoints isolés qui auraient besoin de se loger pour une courte durée. Nous aurons l’occasion de revenir sur cette question à travers les amendements. La mobilité, c’est bien, mais il faudrait la définir de manière un peu plus souple et évolutive ; un décret serait peut-être plus approprié que la loi pour ce faire. Ce que l’on considère comme une mobilité peut varier avec le temps.
Ensuite, parce que nous sommes favorables à ce qu’on le propose dans le parcours locatif, nous ne voudrions pas que ce produit soit totalement illusoire. L’absence de dépôt de garantie est, de ce point de vue, problématique – même s’il y aura la garantie Visale, dont nous avons entendu le secrétaire d’État faire la promotion en commission. D’ailleurs, vous ne vous y trompez pas, puisque vous ne prévoyez pas de réelle sanction contre les propriétaires qui demanderaient quand même un dépôt de garantie. Il serait bon de faire en sorte que cette forme de bail soit réellement attractive pour les propriétaires.
Dernière chose : notre groupe n’est pas insensible au risque de précarisation sociale et de détournement du bail mobilité, qui pourrait être un moyen de tester ce qui deviendrait le bail de droit commun. Il ne faudrait pas que le bail mobilité soit, à l’instar d’un contrat première embauche, un contrat première location.
La parole est à M. Jean François Mbaye. Nous voici arrivés à l’article 34, qui, comme l’a souligné notre collègue Reda, crée cet instrument inédit, dérogatoire au droit commun et assez séduisant qu’est le bail mobilité. Je ne souscris pas aux propos de ceux qui le qualifient de bail précarité. D’abord, il relève d’une approche innovante, et il convient de saluer ce que le Gouvernement nous propose. Ensuite, il peut et doit répondre à certains des objectifs que nous nous sommes fixés.
En toute hypothèse, il y a actuellement une limitation des bénéficiaires potentiels – nous avons déjà eu cette discussion en commission, monsieur le ministre. Je pense en particulier aux personnes qui sont en procédure de divorce, qui brillent par leur absence dans le texte. Personnellement, je le regrette. Je considère que la mobilité est protéiforme, qu’elle peut certes relever d’un choix, mais aussi d’une contrainte. Mon collègue Reda a commencé à aborder ce sujet, en donnant l’exemple des personnes isolées. Dans tous les cas, le besoin de mobilité est le même, de même que celui de garde-fous.
Monsieur le ministre, vous présentez là un dispositif innovant, et j’espère que vous arriverez à convaincre ceux qui considèrent que c’est un bail précarité. Une fois que son utilité et sa pertinence auront été démontrées, peut-être pourrons-nous engager la réflexion sur une éventuelle ouverture du dispositif. Sachez en tout cas que j’y suis très attaché.
(M. Richard Lioger applaudit.) Je suis saisie de deux amendements, nos 1502 et 2280, tendant à supprimer l’article.
Sur ces amendements, je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 1502.
Disons qu’il est défendu, puisque je ne dispose pas d’assez de temps de parole pour le faire. La démocratie parlementaire fait que l’on ne peut même pas défendre les amendements de suppression ! La parole est à M. Éric Coquerel, pour soutenir l’amendement no 2280. Quel beau nom, « bail de mobilité », pour ce qui n’est en réalité qu’un bail de précarité ! (Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.) Ça commence bien ! Écoutez mes arguments, vous répondrez ensuite, chers collègues. (Les exclamations se poursuivent.)
Eh oui ! Il faut parfois savoir entendre la vérité !
Rien que ça ! Ce bail est tout à l’avantage, non du locataire, mais du loueur. De quoi parlons-nous ? D’une dérogation à la loi du 6 juillet 1989, afin d’instituer un bail d’un à dix mois, non renouvelable. C’est donc très clairement l’affirmation de la précarité du statut de locataire. Le risque, c’est que cet instrument soit plébiscité par des investisseurs peu scrupuleux, voire des marchands de sommeil.
Je vous rappelle que le locataire sera privé de toutes les protections que lui assure la loi du 6 juillet 1989 : je pense notamment aux diagnostics techniques relatifs au plomb, à l’électricité ou à l’énergie.
C’est faux ! Non, mon cher collègue. Vous pourrez me répondre, si vous le souhaitez.
Les locataires seront également privés de toute garantie de maintien dans le logement une fois le bail expiré, puisque celui-ci n’est pas renouvelable. Le dispositif empêche aussi tout encadrement des loyers.
Au Royaume-Uni, un bail de six à douze mois a été mis en place ; et d’après le
National Audit office , le nombre de personnes sans domicile fixe, passé de 48 000 en 2011 à 77 000 en 2017, est imputable à 74 % à ces nouveaux règlements. Ce sont donc des arguments que vous devriez écouter, si votre préoccupation est d’améliorer la mobilité. Je ne doute pas de vos bonnes intentions – vous voyez, je suis gentil –, mais, en réalité, le problème est qu’un tel système aggrave avant tout la précarité.
Comme l’observait mon collègue du groupe Les Républicains, le problème, quand on commence à déroger à une règle, c’est que la dérogation devient la règle elle-même : on ouvre la porte à des baux de courte durée et, à la fin, on obtient une dérégulation générale.
Je crains donc que, après avoir organisé la précarité au travail à travers des dispositions vendues comme le comble du modernisme, vous n’aggraviez la précarité dans le domaine du logement, ne vous en déplaise.
(Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.)
Répondez aux arguments, chers collègues de la majorité !
Quel est l’avis de la commission ? La création du bail mobilité vise à répondre à une demande non satisfaite aujourd’hui. Dans le cadre juridique actuel, les personnes en mobilité sollicitent le plus souvent des locations meublées classiques dont le contrat, d’une durée d’un an, peut être résilié à tout moment par le locataire, à condition de respecter un préavis d’un mois. Ce type de contrat impose toutefois le versement d’un dépôt de garantie dont le montant s’élève à deux mois de loyer, ce qui peut représenter un obstacle financier insurmontable, notamment pour des jeunes en apprentissage et en stage.
De l’autre côté, des propriétaires, qui disposent d’un pied-à-terre, préfèrent louer leur bien
via des plateformes de locations meublées que je ne citerai pas plutôt que de le mettre en location, car les baux sont trop longs et trop rigides. Eh oui ! Dans le cadre de ce projet de loi et de la stratégie relative au logement, je veux revenir sur la plateforme numérique, la concertation citoyenne et la conférence de consensus, qui ont permis d’engager un travail sur le bail mobilité. Des auditions et du travail mené en commission, il ressort que ce bail doit répondre à une situation tout en apportant des garanties de droit commun quant à la protection des locataires telle qu’elle est prévue par la loi de 1989.
En commission, nous avons donc fixé un cadre et prévu des garde-fous, notamment sur les diagnostics, ce qui n’était pas le cas initialement. Ainsi, les diagnostics de sécurité seront les mêmes que pour un logement classique. La non-reconduction du bail mobilité au-delà de dix mois évite justement, monsieur Coquerel, toute précarisation. Nous avons décidé la possibilité d’un renouvellement unique, dans la limite de dix mois, afin d’éviter un renouvellement tous les mois qui aurait en effet empêché les gens de savoir où ils vont après un mois.
Nous avons aussi imposé que, en l’absence de travaux, le dernier loyer soit mentionné dans le contrat de location, afin d’éviter toute inflation entre deux locations successives.
Bref, nous avons fixé des cadres, car la conférence de consensus, les auditions et le travail de concertation mené en commission ont fait remonter ces besoins, qui ont donc été pris en compte. Avis défavorable sur ces amendements.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Quel est l’avis du Gouvernement ? Mme la rapporteure a très bien rappelé les objectifs de cette mesure, et les raisons pour lesquelles elle répond à un besoin. Je remercie d’ailleurs le député Reda, qui a salué le bail mobilité à ce titre.
On peut ne pas être d’accord avec cette mesure, monsieur Coquerel – et cela ne m’étonne guère de votre part. On peut aussi ne pas être d’accord sur l’existence même d’un problème – ce qui me paraît plus bizarre –, et surtout sur les moyens d’y porter remède – ce qui pour le coup est normal.
En revanche, et sans vouloir polémiquer, vos propos posent tout de même un vrai problème. Au-delà de vos remarques sur la précarisation, la financiarisation ou le marchandage, vous dites des choses fausses, tout simplement. Vous avez développé deux arguments tout à fait faux – ou alors, nous n’avons pas lu le même texte.
En premier lieu, vous avez prétendu que les baux n’incluraient pas les diagnostics ; or le projet de loi dit exactement le contraire.
(« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LaREM.) Deuxième idée fausse : les baux échapperaient à l’encadrement des loyers, si cette mesure est décidée. Là encore, c’est faux ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.) Je suis prêt à débattre de tout ce que l’on veut, mais sur la base de choses vraies, car on ne peut débattre sur des choses fausses. Il est trop facile de clamer son désaccord ici ou là, de nous accuser d’organiser la précarité. Si vous dites des choses fausses, le débat n’est assurément pas possible. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et MODEM.)
Je salue vos propos, monsieur Mbaye, et la méthode que vous suggérez. Nous avons effectivement débattu, en commission, sur l’efficience du bail mobilité. Celui-ci est une solution nouvelle que nous apportons ; nous agirons avec la méthode qui nous caractérise : nous proposons une solution face à un problème qui, comme l’a dit Mme la rapporteure, nous est remonté du terrain ; si cela marche bien, nous pourrons l’étendre ici ou là, ou bien mettre des garde-fous, avec la même méthode d’évaluation : je m’y engage, et je connais, monsieur le député, votre implication sur le sujet.
Enfin, monsieur Reda, vous avez énoncé deux objectifs difficiles à concilier. Le premier, que je salue, repose sur la question de savoir si l’absence de dépôt de garantie empêchera certains d’accéder au bail mobilité. Et si, d’autre part, ces baux se rapprochent des termes de la loi de 1989, alors, ajoutez-vous, ils feront concurrence aux baux classiques, ce qu’il faut éviter. Ces deux objectifs, vous le voyez, peuvent donc entrer en contradiction : tout l’enjeu de notre discussion sera de trouver le juste équilibre. Je sais que vous souhaitez aussi le succès de ce bail, et je vous en remercie.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Thibault Bazin, pour un rappel au règlement. Protéger, délivrer, libérer… (Rires et exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Pour éviter tout reproche, je précise que ce rappel au règlement se fonde sur l’article 58, alinéa 1.
Le Gouvernement vient de déposer un nouvel amendement no 3227 à l’article 34. Aussi je demande officiellement, madame la présidente, que les groupes et les députés non inscrits bénéficient d’un temps de parole supplémentaire.
Je me permets aussi d’expliquer notre vote sur les amendements en discussion, parmi lesquels celui de notre camarade Peu.
(Rires et applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Nous n’avons pas envie de nous faire reprocher par M. le ministre les tracts que nous avons sortis sur le logement ; je ne sais même pas si nous en avons sorti, d’ailleurs, car le logement ne fut pas vraiment un sujet de la dernière campagne présidentielle.
Nous avions cependant, avant de nous faire élire sur ces bancs, défendu l’idée d’un bail mobilité : j’espère que cela n’a pas inspiré le candidat Macron
a posteriori , puisque son programme n’était pas encore défini à cette époque. Ce n’est pas un rappel au règlement ! Je veux, disais-je, expliquer notre vote sur les amendements de suppression. Monsieur Bazin, vous parlez sur l’article : ce n’est plus un rappel au règlement. Monsieur Maillard, laissons Mme la présidente présider. Nous ne voterons donc pas ces amendements, car nous souhaitons discuter du bail mobilité, qui, dans la rédaction actuelle du texte, ne répondra pas, selon nous, aux objectifs poursuivis.
Nous souhaitons un vrai débat de fond sur ce sujet. Des besoins existent, mais je ne suis pas certain que l’on y réponde ici. Nous devons encadrer davantage le dispositif si nous voulons le rendre efficace.
Avant de donner la parole à M. Nogal, je réponds à votre demande, monsieur Bazin.
Le Gouvernement a en effet déposé un amendement après l’expiration du délai. En application de l’article 55, alinéa 6 du règlement, un temps supplémentaire de dix minutes est attribué à chaque groupe sur la discussion de cet article. Les députés non inscrits, eux, disposent d’un temps de parole supplémentaire de cinq minutes.
Nous en revenons aux amendements de suppression de l’article.
La parole est à M. Mickaël Nogal.
Je suis un peu essoufflé car, pour tout vous dire, j’étais retenu à mon bureau, où est installée une télévision sur laquelle nous pouvons suivre les débats de notre assemblée. Ayant donc entendu M. Coquerel défendre son amendement, j’ai accouru pour lui répondre, car on ne peut laisser dire, au seuil de nos débats sur le présent article, des choses fausses – et pour ceux qui veulent calculer la distance que j’ai dû parcourir en sprintant, mon bureau est situé au 101 rue de l’Université… (Sourires.)
Le bail mobilité n’est une surprise pour personne : il correspond à un engagement de campagne fort du Président de la République. Contrairement à ce que dit M. Bazin, certains candidats à l’élection présidentielle avaient, en matière de logement, de belles propositions, qu’ils ont défendues et qu’ils mettent en œuvre aujourd’hui. Le bail mobilité, d’une durée de un à dix mois, est, comme son nom l’indique, destiné à ceux qui sont en mobilité professionnelle, qu’il s’agisse de stagiaires, d’apprentis, de personnes en formation professionnelle ou de saisonniers.
Soit l’on dit que les Français n’ont pas besoin de bouger, qu’ils naissent quelque part et y demeurent pour suivre leurs études et accomplir leur carrière professionnelle, soit l’on accepte que la mobilité fait partie de la vie, fût-ce de manière temporaire, et l’on cherche des solutions pour l’accompagner : nous avons eu ce débat en commission.
Il n’y a pas besoin du bail mobilité pour cela. Le bail mobilité s’inscrit pleinement dans ce cadre de l’émancipation des individus. Certains ayant fait part de leurs expériences personnelles, je me permets de vous livrer la mienne à mon tour, en guise d’aparté. Je fais partie de ces étudiants de province qui ont dû venir à Paris pour des stages et des opportunités professionnelles ; or, en l’absence de garanties ou d’un garant, la recherche d’un logement est difficile. Si le bail mobilité avait existé à l’époque – assez récente, je vous l’accorde – où j’étais étudiant, de même que la garantie Visale, j’aurais pu effectuer mon stage à Paris, comme on me le proposait. (« Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.) Malheureusement j’ai dû rester à Toulouse, qui demeure malgré tout la plus belle ville du monde. (Sourires.) Mais ensuite, vous êtes devenu député ! Quoi qu’il en soit, le bail mobilité vise à répondre à un nouveau besoin. Je crois aussi qu’il créera une nouvelle offre car, aujourd’hui, les offres de location – qu’il s’agisse d’une résidence principale ou secondaire – sont publiées sur des plateformes, mais ne s’adressent pas forcément aux personnes qui en ont besoin à titre professionnel. Madame la présidente, il nous reste 1 375 amendements à examiner !… En commission, nous avons travaillé pour faire en sorte que le bail mobilité ne soit pas un bail précarité, comme cela a pu être dit, et pour protéger le locataire. Il s’agit en effet d’établir, entre lui et le propriétaire, un rapport gagnant-gagnant : pour le locataire, le dépôt de garantie ou le cautionnement ne seront plus requis ; quant au propriétaire, il aura l’assurance que son logement sera occupé de manière temporaire et récupéré ensuite. Je parlais d’un rapport gagnant-gagnant, car une nouvelle demande se développe en même temps que la mobilité. Une nouvelle offre se développera aussi, j’en suis sûr, car notre parc comporte des millions de logements vacants, qui pourront trouver des occupants grâce au bail mobilité.
Aussi voterons-nous contre les amendements de suppression de l’article, afin de promouvoir le bail mobilité.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Stéphane Peu. Je remercie Thibault Bazin de nous avoir signifié que l’amendement du Gouvernement nous permettait d’obtenir quelques minutes de temps de parole supplémentaire.
Je veux dire deux ou trois choses assez simples. Par nature, je ne prête jamais de mauvaises intentions aux auteurs d’un projet de loi. La mobilité est une évidence, et il faut y répondre. La tentation d’y répondre comme on le suggère ici, observons-le, existe depuis de nombreuses années.
Dans le domaine du logement, de nombreux produits ont essayé de répondre à la question de la mobilité.
Trop de produits ! Je pense notamment à un mécanisme de défiscalisation, qui visait les résidences services destinées à la mobilité professionnelle des étudiants ou des actifs. Faites-en le bilan ! On réalise peu d’études d’impact et de bilans de ce qui a été fait, alors qu’il y a eu de nombreuses lois et de nombreux mécanismes de défiscalisation pour favoriser la mobilité depuis une dizaine d’années.
Qui, parmi ceux d’entre nous qui ont accueilli sur leur territoire une résidence services défiscalisée pour la mobilité professionnelle, peut se dire satisfait de sa gestion ?
Moi ! Depuis le début de cette discussion, vous êtes bien l’exception qui confirme la règle, monsieur Lioger ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Je vais devoir me rendre à Metz pour me rendre compte par mes propres yeux ! (Sourires.)
D’une manière générale, ces résidences ont été détournées de leur objet pour servir à diverses opérations, notamment spéculatives. Ma circonscription en compte une, au pied du Stade de France. Pour ceux qui vont de temps en temps aux matchs, je vous invite à faire un détour pour la visiter.
(Sourires.) Nous ne sommes pas invités ! Depuis trois ans, cette résidence héberge des familles qui ont été placées là par le SAMU social. Il ne s’agit donc pas de mobilité.
Les meilleures intentions ne produisent pas forcément des résultats vertueux. Et l’enfer en est pavé ! Je doute donc, étant donné ce que je sais de l’article, que le dispositif fonctionnera. C’est même une opportunité pour tous ceux qui sont à l’affût des niches que créent nos lois successives depuis quinze ans et qui en profitent pour faire de la spéculation et de la précarisation, affaiblissant ainsi le droit au logement dans notre pays.
Je crains que cet article, tel qu’il est rédigé, ne soit de nouveau une opportunité pour les marchands de sommeil et pour tous ceux qui font de la précarisation du logement un dogme, une facilité.
C’est la raison pour laquelle nous avons proposé cet amendement de suppression de l’article.
La parole est à M. Éric Coquerel. Depuis ce matin, nous argumentons de manière assez calme ici. Je suppose que certains collègues, qui viennent d’arriver, ont eu envie de se faire remarquer en réagissant vivement à mon intervention, mais je propose que nous restions au diapason de ce qui a permis jusque-là un échange, quels que soient nos désaccords. Rentrez au moins votre chemise dans votre pantalon ! Monsieur le ministre, je vous propose d’ailleurs de ne pas non plus m’accuser de crier à la précarité. Je n’ai jamais dit cela ! Non, je ne crie pas : je donne des arguments, des éléments, et je vous propose de répondre.
Sur le fond, pourquoi la question de la précarité dans le logement est-elle identique à celle de la précarité dans le travail ? Lorsqu’il existe une pression du chômage, les obligations de prendre un emploi précaire, non un emploi librement choisi, de manière mobile, sont évidentes. De la même manière, pour le logement, quand, dans de nombreux endroits de nos centres-villes ou de nos périphéries, il est très difficile de trouver des logements, notamment pour les jeunes, les étudiants, sans garantie de leurs parents, des baux réduits font en réalité l’affaire de ceux qui louent, non de ceux qui recherchent une location. Tout dépend donc d’où vient la pression. À l’heure actuelle, malheureusement, la pression n’est pas du côté de ceux qui cherchent à louer, mais des propriétaires.
Nous avons déposé un amendement visant à ajouter à l’alinéa 9 de cet article non seulement l’article 3-3 de la loi de 1989, qui oblige à fournir un dossier de diagnostic technique – diagnostic de performance énergétique, constat de risque d’exposition au plomb, état de présence d’amiante – en annexe du contrat de location, mais aussi l’article 20-1, c’est-à-dire l’obligation pour le bailleur d’une mise en conformité en cas de non-respect des normes de logement décent, et les articles 17 et 17-1, qui concernent le dispositif d’encadrement des loyers prévu. Pour l’instant, ces articles ne figurent pas dans l’alinéa 9.
En revanche, on trouve bien dans l’article 34 du texte de loi l’alinéa 36 selon lequel « le loyer est librement fixé et ne peut être révisé en cours de bail ». Sur ces amendements que nous soutiendrons tout à l’heure, madame la rapporteure, monsieur le ministre, vous nous donnerez vos arguments, que nous écouterons.
Pour l’heure, ces articles de référence de la loi de 1989 manquent à l’article 34. C’est pourquoi j’estime que le dispositif technique et l’encadrement des loyers ne sont pas assurés. Vous me convaincrez peut-être de l’inverse tout à l’heure.
(Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) La parole est à M. Jean François Mbaye. Cet article vise notamment à créer de la mobilité, à faciliter les mutations sociales, pour répondre au besoin croissant de mobilité dont nous avons tous conscience.
Monsieur Coquerel, vous vous trompez lorsque vous assimilez la précarité dans le travail à celle du logement, car vous n’avez pas conscience de l’objectif recherché par l’article 34. Le bail mobilité que le Gouvernement propose et que la majorité soutient ne s’adresse pas à des familles en attente de logement. Il vise à répondre à un besoin de mutation, à des personnes qui sont par exemple en apprentissage ou en formation professionnelle, qui ont besoin de se loger rapidement pour une courte durée. À ceux-là, nous proposons un dispositif innovant.
Selon vous, monsieur Coquerel, les bailleurs, ou du moins les propriétaires, sont des mafieux, comme c’était le cas pour les patrons lors de la discussion sur la loi travail. Je suis en total désaccord avec vous.
On n’a jamais dit cela ! Rien à voir ! Si, vous avez dit que les propriétaires profiteraient du bail mobilité. Or ce bail comporte des critères assez stricts, et son objectif n’est pas la précarisation, mais plutôt la réponse à un besoin de mutation et de mobilité.
Une visite récente à un centre de formation d’apprentis – CFA – me fait penser aux apprentis qui sont en contrat d’alternance, auxquels la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel s’intéressera bientôt. Ils auront certainement besoin d’un bail mobilité dans le cadre du contrat d’alternance.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) C’est sûr qu’avec ce qu’on va leur donner, ils ont du souci à se faire ! Je mets aux voix les amendements identiques nos 1502 et 2280.
(Il est procédé au scrutin.)
(Les amendements identiques nos 1502 et 2280 ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Alain Ramadier, pour soutenir l’amendement no 413. Il est défendu.
(L’amendement no 413, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à M. Bruno Fuchs, pour soutenir l’amendement no 2401. Cet amendement, déposé par mon collègue Mohamed Laqhila, vise à renforcer la protection du bail mobilité pour les locataires, qui disposent souvent de moyens extrêmement faibles. Il s’agit d’encadrer les frais d’agence, notamment parce que le bail mobilité étant très court, ces coûts ne peuvent être amortis sur plusieurs années. (Applaudissements sur les bancs du groupe MODEM.) Quel est l’avis de la commission ? Cet amendement est entièrement satisfait, car l’alinéa 9 précise que l’article 5 de la loi de 1989 relatif au plafonnement des honoraires de location s’applique bien au bail mobilité.
Je vous suggère donc, monsieur Fuchs, de retirer votre amendement. À défaut, je demanderai à l’Assemblée de le rejeter.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis.
(L’amendement no 2401 est retiré.) La parole est à Mme Elsa Faucillon, pour soutenir l’amendement no 1489.
Sur cet amendement, je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
En défendant cet amendement, je soutiendrai également le suivant, no 1484. Toutes les associations de défense des locataires ou liées au secteur HLM, y compris celles qui ont contribué à ce projet de loi plutôt que de s’y opposer résolument, ont dit leur opposition au bail mobilité. Pour faire un parallèle avec les ordonnances travail, les associations disent qu’à vouloir répondre à une mobilité qui peut exister dans certains cas, on se retrouve avec la situation actuelle, où 80 % des embauches sont des contrats à durée déterminée – CDD –, et non indéterminée. Nous savons d’ailleurs à quel point cela pèse sur l’accès à un logement du parc privé.
L’amendement no 1489 vise à préciser qu’il s’agit d’un bail provisoire, qui ne peut en aucun cas se substituer aux baux déjà existants.
Quant à l’amendement no 1484, il rappelle que dans son avis sur le projet de loi, le Conseil d’État a accepté le formalisme allégé ainsi que le régime juridique dérogatoire du bail mobilité, mais en précisant qu’il était réservé à un public cible, « en besoin temporaire de logement », au motif justement que le bail mobilité n’a pas vocation à « porter sur un logement destiné à être la résidence principale du locataire ».
Comme certains collègues qui évoquaient le statut d’apprenti ou des besoins professionnels très temporaires, nous pouvons inscrire dans la loi cette idée que le bail mobilité n’a pas vocation à porter sur un logement destiné à servir de résidence principale, puisqu’il n’est octroyé qu’au titre d’une mobilité.
Sur les amendements identiques nos 1484 et 2700, je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 1489 ?
Avis défavorable. Le bail mobilité sera l’un des trois contrats de location à la disposition du bailleur. Celui-ci est libre de disposer de son bien dans le cadre de la loi. Aussi, madame Faucillon, votre amendement est contraire au droit de propriété. Souhaitez-vous également donner l’avis de la commission sur les deux amendements identiques, nos 1484 et 2700, bien que le second n’ait pas encore été défendu ? Volontiers, madame la présidente : avis défavorable. Ces amendements rigidifient excessivement le bail mobilité ; ils empêcheraient notamment les étudiants ou les apprentis d’en bénéficier dans le cadre d’un stage ; cela les obligerait à conserver un autre logement, doublant ainsi le coût de leur loyer. Quel est l’avis du Gouvernement ? Dans votre premier amendement, madame Faucillon, vous proposez de changer la sémantique pour montrer qu’il s’agit d’un bail provisoire. J’y suis défavorable, car tel qu’il est défini dans la loi, le bail mobilité ne peut pas être renouvelé par le locataire et ne concerne que des personnes en mobilité. Par définition même, son objet est forcément un bail provisoire.
Il n’est pas possible pour le locataire de renouveler ce bail. En cas d’extension du bail, on bascule directement dans le bail de la loi de 1989.
Quant à l’amendement no 1484, comme l’a indiqué la rapporteure, le bail mobilité s’adresse non seulement aux étudiants, mais également aux personnes en formation professionnelle. Si cette formation dure huit mois, celles-ci peuvent ne pas avoir de résidence principale et rechercher une résidence uniquement pour suivre ladite formation. Avis défavorable.
La parole est à M. Ian Boucard. Je ne trouve rien à redire à l’amendement no 1489. Pourquoi ne pas ajouter cette précision, en effet ? Mais l’amendement no 1484 me semble compliqué. Je trouve difficile de demander à un apprenti d’avoir une autre résidence, puisqu’il n’a pas beaucoup de moyens. Je pense que vous en conviendrez, monsieur Peu. Comment aurait-il une résidence principale et une résidence secondaire, pour laquelle il pourrait bénéficier d’un bail mobilité ?
Je reviens à l’exemple déjà cité : notre collègue Mickaël Nogal, étudiant à Toulouse, avait dû refuser un stage à Paris. Il n’aurait pas davantage pu effectuer ce stage si, pour bénéficier d’un bail mobilité à Paris, il avait dû prendre en même temps un logement à Toulouse. Nous avons tous été étudiants. Nous avons tous connu ce problème qu’à mon sens, l’amendement no 1484 ne résout pas.
Je regrette de vous dire cela, monsieur Peu, car j’ai souvent été d’accord avec vous depuis le début de la discussion.
La parole est à Mme Sylvia Pinel. Je remercie les orateurs inscrits dans un groupe politique d’avoir demandé du temps supplémentaire après le dépôt hors délai de l’amendement du Gouvernement. Ils permettent ainsi aux députés non inscrits de s’exprimer.
Le bail mobilité est un élément important du texte. Lors de la discussion générale, j’ai indiqué que je trouvais l’idée intéressante. Elle répond en effet à un besoin réel des apprentis, des étudiants ou des travailleurs saisonniers, notamment dans l’agriculture ou le tourisme.
J’ai cependant précisé, monsieur le secrétaire d’État, que nombre de parlementaires et d’acteurs du logement s’inquiétaient à juste titre. Dans sa rédaction actuelle, le projet de loi tend un peu – d’autres l’ont dit avant moi – à précariser les locataires.
Plusieurs amendements tendent justement à le sécuriser. C’est le cas des amendements en discussion, que je soutiens, car ils visent à nous rassurer en évitant certaines dérives. À côté des propriétaires qui pourraient utiliser ce bail à bon escient, il y a tous les autres, dont nous savons, vous et moi, qu’ils ne sont pas toujours vertueux.
Prenons des engagements pour rassurer ceux qui nous écoutent, et éviter par exemple que les marchands de sommeil ne s’emparent du bail mobilité. L’idée est bonne. Il serait dommage de l’altérer par une pratique peu vertueuse.
(« Très bien ! » sur les bancs du groupe LR.) La parole est à M. Stéphane Peu. Monsieur Boucard, de deux choses l’une.
Soit l’on habite à un endroit, par exemple chez ses parents – c’est le cas de beaucoup d’apprentis – ou chez soi, et l’on doit se déplacer pour faire ses études ou encore pour des raisons professionnelles. Pendant ce déplacement, il faut trouver une solution temporaire. Le bail mobilité peut être une réponse et, passé le temps de ce déplacement, on revient au domicile principal.
Soit on peut contracter un bail mobilité pour dix mois sans avoir d’autre recours. Si, au terme de ces dix mois, on se retrouve à la rue, et qu’on signe un autre bail mobilité, puis un autre, et ainsi de suite, en attendant de pouvoir accéder à un logement pérenne, on se retrouve dans un bail précarité.
La différence entre le bail mobilité et le bail précarité tient à ce que la personne possède ou non une domiciliation et, partant, une mobilité qui lui permet de signer des baux.
Le problème n’est pas nouveau. Dans de nombreuses villes de France, on trouvait – on trouve encore – des gens vivant dans ce qu’on appelle des « hôtels de préfecture » ou des « garnis », en renouvelant leur situation tous les mois. Leur statut relève de la précarité.
Par l’amendement no 1484, qui ne comporte aucune intention maligne, nous tentons seulement de faire la différence entre la mobilité – dans laquelle on se déplace, mais on conserve un port d’attache – et la précarité – dans laquelle on signe successivement des baux temporaires.
La parole est à M. Éric Coquerel. Les amendements nos 1489, 1484 et 2700 permettront au Gouvernement de nous éclairer réellement sur ses intentions. M. Mbaye nous a expliqué que la majorité essayait de répondre à des cas particuliers, par exemple celui de quelqu’un qui viendrait passer quelques mois à un endroit donné, très différent de celui d’une personne qui suivrait des études pendant plusieurs années et qui, compte tenu de la difficulté d’acquitter un loyer, se verrait obligée de signer tous les dix mois des baux successifs.
Si telle est réellement l’intention de la majorité, elle doit voter ces amendements. Ils offrent en effet l’assurance qu’on n’aura pas, d’un côté, un loueur qui fait profession d’accumuler les baux précaires, de l’autre, un locataire qui possède une maison ou un appartement ailleurs et dont la situation est conjoncturelle.
Tout à l’heure, nous défendrons des amendements pour préciser certains points. Peut-être le secrétaire d’État apportera-t-il des précisions qui nous permettront d’avancer sur les questions techniques et nous rassureront sur l’encadrement des loyers.
Pour l’heure, si la majorité vote les amendements, nous serons rassurés sur ses intentions. À défaut, nous serons évidemment très inquiets.
(Applaudissements sur les bancs du groupe FI.) La parole est à M. Ian Boucard. Un mot pour vous répondre, monsieur Peu. Je comprends les dispositions de l’amendement no 1489 et j’entends bien votre désir de ne pas créer un bail précarité. Si l’on parle d’un intérimaire ou d’un saisonnier, je suis assez d’accord avec ce que vous dites. Le cas d’un étudiant est un peu différent.
Si celui-ci part en alternance ou en stage, comment l’obligerait-on à avoir une résidence principale ? L’amendement fonctionne bien s’il vit chez ses parents, mais si tel n’est pas le cas, sa situation devient plus compliquée. Il ne pourra pas rendre, le cas échéant, son logement au centre régional des œuvres universitaires et scolaires – CROUS – ou à son foyer de jeunes travailleurs – FJT. Voilà ce qui me pose problème !
Ou alors il faut supposer que cet étudiant détournera la loi et qu’alors qu’il occupait un logement au CROUS ou dans un FJT, il devra prétendre qu’il habite chez ses parents afin de conserver son logement. Dans ce cas, il trichera un peu. Je pense que ni vous ni moi n’avons envie que les étudiants se retrouvent dans une situation dans laquelle ils devront mentir à des propriétaires.
Voilà pourquoi, alors que l’amendement no 1489 ne me pose aucune difficulté, je continue de trouver l’amendement no 1484 un peu compliqué.
Je mets aux voix l’amendement no 1489.
(Il est procédé au scrutin.)
(L’amendement no 1489 n’est pas adopté.) Nous en venons aux amendements identiques nos 1484 et 2700.
Le premier a déjà été défendu par Mme Faucillon.
La parole est à Mme Valérie Rabault, pour soutenir l’amendement no 2700.
Il est défendu. L’avis de la commission est donc défavorable, madame la rapporteure ? Oui, madame la présidente. Je m’en suis expliquée tout à l’heure. Et celui du Gouvernement également ? En effet. Je mets aux voix les amendements identiques nos 1484 et 2700.
(Il est procédé au scrutin.)
(Les amendements nos 1484 et 2700 ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Pascale Boyer, pour soutenir l’amendement no 2849. Cet amendement vise à garantir que le projet de loi prend en compte le statut des travailleurs saisonniers, qui sont amenés à signer des contrats de travail temporaires. En inscrivant la situation des saisonniers dans la loi, on leur permettrait d’avoir plus facilement accès à un logement décent.
Dans les zones touristiques, beaucoup de logements sont destinés à servir de résidences secondaires. Occupés durant quelques semaines par an, ils restent fermés la plupart du temps. C’est ce qu’on appelle des « lits froids ».
Par sa facilité, le bail mobilité pourrait inciter leurs propriétaires à les louer à des travailleurs saisonniers.
Quel est l’avis de la commission ? À l’inverse de l’article 25-3 de la loi de 1989, qui exclut explicitement les travailleurs saisonniers du bail meublé classique, l’alinéa 11 ne les exclut pas du bail mobilité. L’amendement me semble donc satisfait : rien n’interdit aux travailleurs saisonniers d’utiliser le bail mobilité.
Je vous suggère de retirer l’amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à Mme Pascale Boyer. Je retire l’amendement.
(L’amendement no 2849 est retiré.) La parole est à Mme Christelle Dubos, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 2871. Cet amendement vise à élargir le champ du bail mobilité aux volontaires en service civique.
(L’amendement no 2871, accepté par le Gouvernement, est adopté.) La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 932. En commission, monsieur le secrétaire d’État, nous avons évoqué la possibilité de trouver une solution pour que des personnes victimes d’un conjoint violent – ou violent envers ses enfants – puissent bénéficier du bail mobilité. Pour prendre en compte vos remarques, j’ai retravaillé la rédaction de l’amendement, et je vous propose de compléter l’alinéa 7 par les mots : « ou en procédure de divorce pour faute suite à un dépôt de plainte pour violences conjugales ou envers les enfants ».
Quand un conjoint doit quitter le domicile conjugal, il doit trouver une solution rapide. On lui demandera, pour éviter tout effet d’aubaine, de fournir à l’appui de sa demande des éléments objectifs, par exemple un dépôt de plainte.
Peut-être la rédaction ne convient-elle pas. S’il faut la modifier, je suis à votre écoute. Mais je pense qu’une telle situation doit être prise en compte. Dans nos territoires, il nous est arrivé à tous de rencontrer une victime dans ce cas, qui ne sait plus que faire. La mesure créerait un lien avec la justice, qui parfois, pour maintenir les intéressés dans certains logements, sollicite des moyens, par exemple afin de rembourser un emprunt.
Nous irions dans le bon sens si nous parvenions à traiter ce problème.
Quel est l’avis de la commission ? Au risque de me répéter, je rappelle que le bail mobilité concerne la mobilité professionnelle. Cependant, je suis consciente que vous soulevez un vrai problème.
Si la situation du divorce ne relève pas de la mobilité professionnelle, les personnes victimes de violences familiales peuvent bénéficier d’autres types de logement. Les inscrire dans le cadre du bail mobilité reviendrait à faire de celui-ci un bail précaire car, au-delà des dix mois, qui ne correspondraient dans ce cas ni à la durée d’un contrat de travail ni à une mobilité liée à un travail, la question du logement suivant se poserait de manière plus aiguë. Avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Je rejoins la rapporteure. Le débat est compliqué, car nous sommes confrontés à un choix pour ainsi dire cornélien. En effet, nous apporterions une solution à des personnes en difficulté en leur proposant un bail non reconductible. Autrement dit, nous réglerions le problème à court terme mais ces personnes, dix mois après, se trouveraient confrontées à des difficultés peut-être plus importantes. Nous travaillons donc à une autre solution, qui n’est pas de nature législative. Nous essayons de déterminer comment la garantie Visale, dont nous aurons l’occasion de reparler, pourrait être étendue à des personnes qui, suite à un accident de la vie, sont confrontées à une rupture de salaire qui les met en difficulté pour se loger ou pour financer leur logement. Nous sommes dans la dernière ligne droite des discussions. Comme vous le savez, la garantie Visale est financée par le 1 % logement et fait l’objet d’une convention cadre qui est en phase finale de négociation. C’est par ce truchement que nous souhaitons résoudre le problème pertinent que vous soulevez, monsieur le député. La parole est à M. Thibault Bazin. Je retire mon amendement, car je ne veux pas donner l’impression de vouloir précariser le logement des personnes victimes de violences conjugales ou dont les enfants sont eux-mêmes victimes de violences. Cela étant, je crois que l’extension de la garantie ne suffit pas. Souvent, quand des personnes viennent nous voir, on leur conseille d’aller voir les bailleurs sociaux afin qu’ils leur proposent des solutions. Le problème est que ces personnes sont parfois propriétaires de leur logement et que, dans un pareil cas, elles ne peuvent avoir accès à un logement aidé. L’extension de la garantie ne suffit donc pas. Il faut peut-être modifier un certain nombre de droits d’accès au logement dans ce cas spécifique. Pour éviter des effets d’aubaine, il faudra bien sûr demander des éléments probants, même si, dans un contentieux, on doit accueillir les plaintes avec une profonde bienveillance ; en tout état de cause, le dépôt de plainte est un élément objectif. Je pense qu’il faut compléter l’extension de garantie, car ceux qui peuvent mettre en location sont notamment les bailleurs sociaux.
(L’amendement no 932 est retiré.) Je suis saisie de trois amendements, nos 1483, 2701 et 3125, pouvant être soumis à une discussion commune.
Sur les amendements identiques nos 1483 et 2701, je suis saisie par le groupe de la Gauche démocrate et républicaine d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 1483.
Je voudrais appeler l’attention de l’Assemblée nationale, et en particulier de la majorité parlementaire, sur une préoccupation que j’exprime par cet amendement : le respect de la parole présidentielle. Ah ! Ça a du mal à sortir ! Oui, j’avais du mal à le dire (Sourires) mais, avec un peu d’efforts, j’y arrive. Comme beaucoup d’entre vous, j’ai assisté à la présentation du rapport annuel de la Fondation Abbé Pierre, début 2017. Comme de coutume, avant chaque campagne présidentielle, tous les candidats défilent et exposent leur programme en matière de logement. Comme la mesure figurait dans le programme d’Emmanuel Macron, Christophe Robert, délégué général de la Fondation Abbé Pierre, l’avait interrogé sur le bail mobilité – vous savez que la fondation est vent debout contre cette mesure. M. Macron avait répondu que jamais on ne pourrait passer d’un bail de trois ans à un bail mobilité, et qu’il serait impossible de reconduire celui-ci au cours de l’année ; sa durée devait donc nécessairement être limitée. Mais votre projet de loi dit le contraire. Je vous invite donc à respecter fidèlement la parole d’Emmanuel Macron, candidat à la présidence de la République, devant la Fondation Abbé Pierre. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.) Les amendements, nos 2701 et 3125 peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. François Pupponi, pour les soutenir.
Ils sont défendus. Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ? Vos amendements ont pour objet de réserver le bail mobilité aux logements vacants ou n’ayant jamais été loués. C’est ce qu’avait dit Emmanuel Macron ! Je réponds sur les amendements. Entre l’exposé du programme et l’aboutissement du projet de loi, un travail a été conduit et des évolutions engagées. On dit ce qu’on fait et on fait ce qu’on dit ! Exactement ! Comme je l’ai dit en préambule, ces dispositions ont été définies en tenant compte de la concertation menée en lien avec les citoyens et les acteurs du logement dans les territoires ; la Fondation Abbé Pierre, en particulier, nous a fait part de ses doutes dans le cadre de la conférence de consensus ; nous les avons pris en compte. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.) Alors pourquoi sont-ils opposés à cette mesure ? Je souhaite répondre à la question concrète, juridique, que vous m’avez posée. Nous n’allons pas refaire le débat que nous avons eu en commission ou dans le cadre de la conférence de consensus, sans quoi nous n’aurons pas le temps de finir l’examen du texte. Ce n’est pas grave ! Le droit de propriété est constitutionnellement garanti et permet à un bailleur de disposer de son bien comme il l’entend. Ainsi, il est libre de louer son logement par le biais de tel ou tel type de contrat. Avec le bail mobilité, nous ajoutons un troisième type de contrat à la loi de 1989. Ce bail permet avant tout de mobiliser un parc de logements qui n’auraient pas été loués sans ce nouvel outil. Il s’agit de mettre à disposition des logements vacants à un public qui en a besoin compte tenu d’une situation particulière. L’avis est donc défavorable pour l’ensemble des amendements. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Emmanuel Macron battu par sa majorité ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Eh bien non, monsieur Peu, je vais vous démontrer par A plus B que nous appliquons ce qu’Emmanuel Macron a dit. Premier argument, il ne faut pas que le bail mobilité puisse être reconduit : c’est chose faite, c’est dans le projet de loi. Deuxième argument : un bail soumis à la loi de 1989 ne doit pas pouvoir être transformé en bail mobilité. Actuellement, le propriétaire louant son appartement dans le cadre d’un bail de la loi de 1989 ne peut y mettre fin que dans deux cas : pour le vendre ou pour le récupérer pour soi. Donc, par définition, un bail de la loi de 1989 ne peut pas devenir un bail mobilité. C’est ce que disait Emmanuel Macron ! Mais c’est le texte du projet de loi ! Si un bail de 1989 ne peut pas devenir un bail mobilité, un logement vacant peut, lui, par définition, être loué avec un tel bail. Si un logement est vide, à un moment donné, parce que le locataire part, par exemple, il peut être loué dans le cadre d’un bail mobilité. J’espère vous avoir convaincu, et je vous remercie de l’attention que vous portez au respect du programme présidentiel. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe MODEM.) La parole est à M. François Pupponi. Ce que voulait dire le candidat Emmanuel Macron, c’est qu’il ne faut pas qu’un propriétaire trouve le moyen de mettre son locataire dehors pour conclure un bail mobilité.