XVe législature
Session ordinaire de 2018-2019

Séance du jeudi 13 juin 2019

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi d’orientation des mobilités (nos 1831, 1974, 1937, 1938, 1942).
Hier soir, l’Assemblée a poursuivi l’examen des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 2792 portant article additionnel après l’article 28 bis B.
L’amendement no 2792 de Mme Delphine Batho est défendu.
La parole est à M. Jean-Luc Fugit, rapporteur de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour donner l’avis de la commission.
Avis défavorable. La parole est à Mme la ministre chargée des transports, pour donner l’avis du Gouvernement. Avis défavorable.
(L’amendement no 2792 n’est pas adopté.) L’amendement no 2800 de Mme Delphine Batho est défendu.
(L’amendement no 2800, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour soutenir l’amendement no 3289. Cet amendement, dont M. Christophe Bouillon est le premier signataire, vise à créer des zones piétonnes et des zones à trafic limité à titre permanent ou temporaire. Quel est l’avis de la commission ? L’amendement est satisfait par l’article 28 bis B que nous avons adopté en commission.
Je profite de cette occasion pour souhaiter un bon anniversaire à la présidente de notre commission, Mme Barbara Pompili.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Monsieur le rapporteur, je me joins à vous pour souhaiter un excellent anniversaire à Mme la présidente de la commission. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis.
(L’amendement no 3289 n’est pas adopté.)
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel, pour un rappel au règlement. Monsieur le président, je formule une interrogation. Vous avez commencé la séance en mettant aux voix des amendements qui ne me paraissaient pas défendus. C’est tout à fait exact. Croyant que Mme Batho était là, je les ai mis aux voix. (Mme Delphine Batho entre dans l’hémicycle.) Voilà ! Mme Batho est là. Je l’avais aperçue. De toute façon, en tant que députée non inscrite, celle-ci a épuisé son temps de parole.
Nous poursuivons la discussion.
La parole est à Mme Monica Michel, pour soutenir l’amendement no 3059, qui tend à supprimer l’article. Il est défendu.
(L’amendement no 3059, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
(L’article 28 bis est adopté.)
La parole est à Mme Véronique Hammerer. Les chemins de fer ont profondément évolué pour s’adapter aux avancées technologiques. C’est ainsi que notre pays s’est doté de lignes et de trains à grande vitesse qui nous ont permis de faire tomber les distances séparant nos grandes métropoles. Aujourd’hui, moins de deux heures séparent Paris de Bordeaux, Rennes, Lyon ou Strasbourg. Mais pas du Havre ! Ces évolutions ne sont pas sans conséquences. Les lignes de chemin de fer à grande vitesse Sud Europe Atlantique, Nord, Rhin-Rhône ou encore Bretagne-Pays de la Loire traversent nos territoires. Pour nos concitoyens qui vivent à proximité immédiate de ces lignes, la confiance en l’action publique s’est rompue quand les consultations publiques, qui ne portaient parfois que sur des projets d’une dizaine de rotations par jour, avec des trains à un étage circulant dans des tronçons enfouis dits « rampes déblais », se sont révélés porter sur des lignes en surface exploitées par des trains à deux étages passant plus d’une cinquantaine de fois par jour. Pire encore, leur santé pâtit au quotidien de ces expositions à répétition et leurs habitations sont dévaluées à mesure que leurs murs se lézardent sous les vibrations induites.
Il est temps de rétablir la confiance en l’action publique et d’accompagner celles et ceux qui souffrent de ne pas être considérés. Pour cela, il est nécessaire que nous nous dotions d’indicateurs adaptés.
Enfin ! Oui, enfin, la représentation nationale, avec le soutien du Gouvernement, souhaite réaffirmer des principes forts en reconsidérant l’arrêté de 1999 sur les nuisances sonores. Cet article souligne la nécessité de passer d’une mesure de moyenne de bruit, qui ne correspond en rien au trafic ferroviaire, pour prendre en considération les pics de bruit, dont certains atteignent plus de 120 décibels plusieurs fois par jour dans les habitations à proximité des lignes de grande vitesse. Par ailleurs, les vibrations doivent être prises en considération.
Il est temps d’unir nos concitoyens en ouvrant une concertation de tous les acteurs : usagers, experts, professionnels et autorités publiques. Ensemble, nous devons définir les meilleurs outils pour une mesure adéquate des vibrations induites par le trafic ferroviaire.
C’est l’ambition de l’article 28 ter. Je ne peux m’empêcher de constater que ces évolutions sont concrètes, tangibles et partent d’une réalité pour s’affirmer dans la loi. Par des initiatives de cette nature, la représentation nationale va redonner confiance en nos institutions à nos concitoyens qui vivent cette réalité au quotidien.
J’ai une pensée pour toutes celles et tous ceux qui, comme les habitants des neuf communes de ma circonscription situées à proximité d’une ligne à grande vitesse, pâtissent des conséquences d’une réglementation insuffisante et inadaptée.
Je remercie mes collègues qui soutiennent cette mesure.
(Mme Laurianne Rossi et M. Jean-Charles Colas-Roy applaudissent.) Je suis saisi de deux amendements, nos 2136 et 1999, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Laurianne Rossi, pour soutenir l’amendement no 2136.
En écho aux propos de Mme Hammerer, je rappelle que nous avons eu de longs échanges en commission sur les nuisances sonores liées aux transports. Le bruit empoisonne aujourd’hui le quotidien de huit Français sur dix et 80 % des nuisances sonores sont liées aux transports. Il s’agit, par conséquent, d’un enjeu non seulement environnemental mais de santé publique. Le coût social du bruit s’élève à 11,5 milliards d’euros par an, pour la seule partie relative au transport, et 9 millions de Français sont exposés à des seuils critiques.
Le projet de loi d’orientation des mobilités – LOM – doit être une opportunité de mieux prendre en compte les nuisances et d’apporter de meilleures réponses à cet enjeu environnemental et sanitaire. C’est ce que nous avons fait en commission, en apportant plusieurs améliorations que je tiens à saluer. Je remercie, d’ailleurs, Mme la ministre ainsi que M. le rapporteur d’avoir émis un avis favorable aux amendements tendant à intégrer de nouveaux indicateurs, en complément des mesures actuelles assises sur des moyennes de bruit, qui ne reflètent pas la gêne sonore éprouvée par nos concitoyens.
En commission, nous avons choisi d’intégrer, pour les infrastructures ferroviaires, de nouveaux indicateurs dits « événementiels », qui s’appuient sur les pics d’intensité, la répétitivité du bruit, les vibrations, mais également le cumul de bruits. C’est une grande avancée dans la prise en compte des nuisances sonores.
Évidemment, il faudra ensuite définir une méthodologie. Mme la ministre nous a indiqué devant la commission que le Centre d’études et d’expertise sur les risques, l’environnement, la mobilité et l’aménagement ou CEREMA, et le Conseil national du bruit ou CNB, dont je suis membre, auront pour mission d’établir une méthode et une mesure, ce qui ne sera pas facile.
J’ai déjà déposé en commission cet amendement visant à élargir la prise en compte des indicateurs événementiels à toutes les infrastructures terrestres, c’est-à-dire aussi aux infrastructures routières. Pour tout vous dire, j’ai hésité à le redéposer en séance publique. Je suis même prête à le retirer.
Reste que je suis surprise par deux amendements qui seront appelés ultérieurement : l’amendement no 3171 de M. le rapporteur et l’amendement no 2982 rectifié dont Mme Luquet est la première signataire. Ils tendent à récrire les mesures adoptées en commission en supprimant le cumul de bruits des indicateurs que nous avions intégrés en commission avec l’avis favorable du Gouvernement.
Je souhaite que M. le rapporteur nous apporte des précisions sur ces amendements. Je ne comprends pas ce recul. Je retirerai mon amendement si j’ai la certitude que le cumul de bruits sera maintenu parmi les indicateurs réels de gêne sonore.
Je répète que ce critère est capital. Je comprends que l’on retire les infrastructures routières du dispositif, mais rayer le cumul de bruits des indicateurs serait très grave. Dans ma circonscription, à Malakoff, un TGV génère, en amont de la gare Montparnasse, des nuisances sonores très importantes, aggravées par le passage, en aérien, de la ligne 13 du métro parisien. Certes, nous sommes en milieu dense urbain dans le Grand Paris, mais ma collègue Véronique Hammerer, en territoire rural, rencontre les mêmes difficultés du fait des axes routiers.
Intégrer le cumul de bruit parmi les indicateurs de nuisance sonore me semble indispensable. Cette mesure, qui concerne le cadre de vie des Français, est très attendue.
La parole est à M. Stéphane Demilly, pour soutenir l’amendement no 1999. Cet amendement cher à Mme Sophie Auconie, qui en est la première signataire, vise à inscrire dans le projet de loi une revendication récurrente de nos concitoyens en matière d’évaluation des nuisances sonores aux abords des infrastructures de transports ferroviaires et des infrastructures routières.
Je suis déjà intervenu sur le sujet pendant la discussion générale et Mme Rossi vient de rappeler à juste titre que de nombreux Français souffrent du bruit de manière récurrente.
Les normes applicables en matière de seuils de nuisances sonores définies, d’une part, par l’arrêté du 8 novembre 1999 relatif au bruit des infrastructures ferroviaires et, d’autre part, par l’arrêté du 5 mai 1995 relatif au bruit des infrastructures routières, sont élaborées selon un principe de fréquence, avec un chiffre correspondant au nombre moyen de décibels émis.
Or ce critère généraliste ignore les problématiques propres et spécifiques à nos territoires, qui peuvent réunir des infrastructures aussi bien routières que ferroviaires, ce qui augmente l’intensité du bruit pour les riverains. De plus, les mesures sont réalisées séparément pour chaque infrastructure, sur une période donnée, lissée sur la journée, sans traduction réelle des conséquences humaines, sanitaires et environnementales des pics de bruit.
Le présent amendement propose donc d’inscrire le principe d’une évaluation beaucoup plus complète, adaptée aux réalités des nuisances, pour mesurer les nuisances sonores aux abords des infrastructures de transports ferroviaires et des infrastructures routières.
Quel est l’avis de la commission ? Nous avions abordé en commission le problème que pose la création d’indicateurs de bruit pour le transport terrestre en général. À ce stade, de tels indicateurs me semblent trop larges. Sur le plan scientifique, le CNB, le CEREMA et d’autres acteurs doivent encore travailler sur le sujet, notamment sur le cumul.
Les critères figurant dans l’article 28 ter sont spécifiques au secteur ferroviaire. Les dispositions introduites au Sénat et confortées en commission prennent en compte les pics de bruit et le bruit événementiel lié, par exemple, au passage d’un train.
Les critères relatifs au transport routier seront nécessairement différents. Un travail spécifique doit être mené pour traiter ce sujet. Je propose donc que nous nous en tenions à la question du transport ferroviaire, et que via le CNB, que vous connaissez bien, et via d’autres acteurs, nous travaillions en parallèle sur le cumul, de manière sérieuse, scientifique et méthodique.
En attendant, je vous suggère de retirer les amendements. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Je vous dois quelques mots d’explication concernant la position du Gouvernement sur les différents amendements.
La mise en service des lignes à grande vitesse a mis en évidence que la réglementation actuelle rendait mal compte des nuisances subies par les riverains. La campagne de mesure que nous avons lancée révèle, en effet, que les riverains se plaignent de nuisances alors même que les seuils de la réglementation sont respectés, preuve que la situation n’est pas satisfaisante.
À la suite de la mission conduite par mon inspection, j’ai pris deux décisions. La première, d’action immédiate, est la mise en place d’un fonds destiné à répondre aux difficultés que rencontrent les riverains des lignes mises en service à l’été 2017. Il s’agira d’installer des protections phoniques, que ce soient des murs antibruit ou des isolations sur les habitations.
Ma deuxième décision est de faire évoluer la réglementation sur le bruit ferroviaire, qui, aujourd’hui, prend en considération un indicateur de bruit moyen qui ne rend pas compte des pics de bruit que subissent, de fait, les riverains. C’est une mission qu’il est d’ores et déjà prévu de confier au Conseil national du bruit, avec l’appui de l’ANSES – Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail – et du CEREMA. Tel est le sens de la disposition qui a été introduite dans le projet de loi au Sénat, et que nous avons retravaillée en commission. L’article 28 ter traduit l’engagement de faire évoluer la réglementation sur le bruit ferroviaire.
La rédaction issue des travaux en commission introduit deux autres sujets importants, qu’il faut, me semble-t-il, considérer séparément : les vibrations et le cumul de bruits. Les TGV créent un phénomène particulier de production d’une onde qui se traduit par des vibrations dans les habitations situées à proximité des lignes à grande vitesse. Par ailleurs, comme le disait Mme Rossi, on peut résider à la fois près d’une ligne à grande vitesse et à proximité d’une autoroute. La prise en compte du cumul des nuisances n’est actuellement pas satisfaisante. La nouvelle rédaction de l’article 28 ter, relative aux pics de bruit, permettra de revoir la méthodologie d’élaboration des indicateurs, en se concentrant sur la bonne prise en compte de l’ensemble des bruits ferroviaires.
Nous souhaitons traiter séparément les deux sujets : la question des vibrations nécessite un indicateur particulier, tandis que celle du cumul appelle une approche différente. À l’heure actuelle, on a tendance à traiter séparément le bruit ferroviaire et le bruit routier. On ne dispose pas d’une approche méthodologique pour les traiter de concert.
Je vous propose de consacrer un article spécifique à la question des vibrations liées aux lignes à grande vitesse. En ce sens, je serai favorable aux amendements identiques nos 1 rectifié et 2983 rectifié, portant article additionnel après l’article 28 ter.
S’agissant des cumuls de bruits, je serai favorable aux amendements identiques nos 2982 rectifié et 3171. Il ne suffit pas d’additionner des indicateurs liés aux vibrations, aux pics de bruit et au bruit routier.
Absolument ! Il faut mener une réflexion sur la méthodologie à suivre en la matière. Nous demanderons le concours du Conseil national du bruit.
Enfin, les nuisances sonores sont insuffisamment prises en compte dans les documents d’urbanisme. Concernant le transport aérien, des PEB – plans d’expositions au bruit – permettent de définir les zones dans lesquelles on constate un bruit excessif et d’en tirer les conclusions sur les règles d’urbanisme. S’agissant des infrastructures routières, l’approche est différente : on élabore des classements des infrastructures, qui aboutissent à des résultats voisins. Pour autant, on ne suit pas la même méthode concernant la prise en compte des nuisances dans les documents d’urbanisme. Ces réflexions, qui concernent à la fois le code de l’environnement et le code de l’urbanisme, et actuellement conduites par la DGPR – direction générale de la prévention des risques –, doivent se poursuivre.
Nous souhaitons donc recentrer l’article 28 ter sur la notion de « pics de bruit », consacrer un autre article aux vibrations et mener la réflexion sur deux sujets complémentaires : le cumul des indicateurs et la prise en compte de ces nuisances dans les documents d’urbanisme.
Très bien ! La parole est à Mme Laurianne Rossi. Madame la ministre, je vous remercie de ces précisions. Concernant les vibrations, je me félicite du dépôt de l’amendement no 1 rectifié, qui va dans le bon sens et que nous soutiendrons. Oui, c’est bien ! S’agissant du cumul de bruits, cependant, j’estime que nous allons connaître un recul. Je suis consciente de l’enjeu méthodologique et du travail qui nous reste à faire, mais, comme nous l’avons dit en commission, lorsque nous avons intégré au texte les pics d’intensité, la répétitivité, les vibrations et le cumul de bruits, nous savions qu’un travail restait à accomplir. Il est d’ailleurs engagé ; le Conseil national du bruit y travaille depuis plusieurs mois et rendra un avis prochainement. Nous avons d’ailleurs tenu une assemblée plénière hier, sous la présidence de Christophe Bouillon. Le CEREMA sera également mobilisé. Nous connaissions donc l’enjeu méthodologique. Il nous faudra certes attendre l’aboutissement de ce travail, la définition des outils et d’une méthodologie, mais retirer le cumul de bruits de la liste des indicateurs événementiels, qui suscitent une gêne sonore réelle, me semble un recul par rapport à ce que nous avions adopté en commission. Il me paraît donc difficile de retirer l’amendement au regard de cet enjeu.
Par ailleurs, concernant l’urbanisme, j’ai présenté un amendement en commission qui visait précisément à annexer les PPBE – plans de prévention du bruit dans l’environnement – au plan local d’urbanisme, et qui a été rejeté. Je présenterai un autre amendement qui vise à rendre ces documents opposables. À cet égard, je souscris pleinement aux propos que vous avez tenus à l’instant : il faut annexer aux documents d’urbanisme les données qui ont pour objet la prévention du bruit.
Le maintien de la référence au « cumul de nuisances » n’emporterait pas de conséquences majeures. Le travail relatif à la méthodologie devra, en tout état de cause, être mené pour les autres indicateurs ; autant donc intégrer au texte, d’ores et déjà, le cumul.
La parole est à M. Julien Aubert. Le sujet du bruit ne se limite pas à la mobilité. J’ai conscience de la réalité du problème, même si j’ai cru comprendre, à la lecture de plusieurs études, que le bruit routier était la principale source de nuisance, avant le bruit ferroviaire ou aérien. Nous sommes toujours confrontés au problème de la mesure du bruit. Ce n’est pas seulement un sujet méthodologique. Par exemple, les riverains d’installations sportives, tel un circuit de kart, pourront s’étonner qu’on autorise telle ou telle activité. Peut-être aurait-il été intéressant d’inscrire cette méthodologie dans un spectre plus large, en parlant de toutes les activités humaines. Je pourrais, d’ailleurs, citer des exemples très éloignés de la mobilité : au sujet des éoliennes, qu’on implante un peu partout, il y a débat sur le mode de calcul des décibels, qui fait l’objet d’une dérogation par rapport aux règles actuelles.
J’approuve la démarche intellectuelle consistant à prendre en compte le cumul de bruits et le bruit marginal, qui créent la nuisance. Toutefois, j’appelle votre attention sur le fait que, si on veut bâtir une méthodologie, il serait peut-être opportun de considérer le sujet d’un point de vue plus global et transversal.
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel. La question du bruit est effectivement très large. Nous avions déposé un amendement visant à créer un fonds d’indemnisation des riverains des lignes à grande vitesse, sur le modèle de celui existant pour Orly et Roissy, mais il a été renvoyé au projet de loi de finances. Nous souhaitions que cet organisme figure dans le code général des impôts. Les propositions que vous venez de faire, madame la ministre, vont dans le bon sens et nous rassurent. Toutefois, pourriez-vous préciser comment sera abondé le fonds ? Êtes-vous favorable à ce que sa pérennité soit établie par le projet de loi de finances, par exemple par l’affectation d’une part du produit des péages perçu par les TGV, ou au moyen d’autres recettes ? La parole est à Mme la ministre. Madame Battistel, le fonds est en train d’être mis en place, sans attendre la loi de finances, par un réabondement de l’État et des régions qui ont cofinancé les lignes à grande vitesse. Il n’y a pas de ressources magiques dans le modèle du TGV. On sait que SNCF Réseau accuse un déficit important, et on ne saurait donc lui prendre de l’argent. Le fonds sera donc alimenté par des dotations budgétaires de l’État et des régions qui ont accepté de cofinancer les isolations phoniques, qui doivent être mises en place rapidement.
Madame Rossi, il me paraît important d’avoir des indicateurs pour ainsi dire « purs », qui traduisent la nuisance engendrée par une infrastructure. Cela permet, ensuite, de se retourner vers le maître d’ouvrage de l’infrastructure, pour lui imposer des restrictions des nuisances. Il me semble donc très important de continuer à avoir un indicateur attaché à chaque infrastructure, et de définir une méthodologie permettant de prendre en compte le cumul des bruits. Il s’agit de s’assurer que les riverains ne subissent pas, globalement, des nuisances excessives. Je continue à penser – ce sera la position du Gouvernement et le sens des avis que nous donnerons – qu’il faut un indicateur sur le bruit lié à l’infrastructure ferroviaire, un autre relatif à l’infrastructure routière, un troisième concernant les vibrations engendrées par l’infrastructure ferroviaire et une méthodologie pour intégrer l’ensemble des nuisances. Tel est le sens de notre démarche.
(Les amendements nos 2136 et 1999, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 2982 rectifié et 3171.
La parole est à Mme Aude Luquet, pour soutenir l’amendement no 2982 rectifié.
Cet amendement a pour objet d’apporter des précisions sur la disposition qui a été adoptée au Sénat. Je voudrais revenir sur l’évolution des indicateurs concernant le bruit, que vous avez évoqué dans le détail, monsieur le rapporteur, madame la ministre. Nous souhaitons prendre en compte plus précisément l’intensité de la gêne provoquée par les pics sonores, ainsi que la répétitivité – terme beaucoup plus précis que celui de « fréquence » – du bruit, et le bruit événementiel, qui recouvre les pics de bruit notamment lors du passage des trains à grande vitesse. (Brouhaha sur les bancs du groupe LR.) Le bruit peut constituer une nuisance importante, également dans l’hémicycle, où le bruit de nos collègues peut nous perturber. (Sourires.) La parole est à M. Jean-Luc Fugit, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 3171. C’est un amendement identique, qui est défendu. Avis évidemment favorable sur ces deux amendements.
(Les amendements identiques nos 2982 rectifié et 3171, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.) La parole est à Mme Véronique Hammerer, pour soutenir l’amendement no 1542. Cet amendement est apparemment satisfait, et je remercie Mme la ministre.
Sur la question du cumul, des engagements avaient été pris en commission. Je peux comprendre qu’il soit complexe de faire évoluer aussi rapidement un arrêté de 1999. C’est ce qu’il faut dire à nos concitoyens : aujourd’hui, on ne sait pas faire, et il faudra prendre le temps de faire les choses correctement.
Par contre, je prends à la lettre vos engagements, madame la ministre. Si je comprends parfaitement qu’on se concentre sur l’infrastructure – tel est le message que je porterai, ce soir, à mes concitoyens, qui subissent les nuisances sonores –, il ne faudra pas oublier de prendre en compte le cumul des bruits, qui est un élément important.
(M. M’jid El Guerrab applaudit.)
(L’amendement no 1542 est retiré.) Sur l’article 28 ter, je suis saisi par le groupe La République en marche d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Mes chers collègues, il serait souhaitable d’anticiper les demandes de scrutin public, le règlement imposant une attente de cinq minutes entre l’annonce et le vote.
La parole est à M. Jean-Marie Sermier.
Notre débat sur l’article 28 ter, qui a porté sur le bruit et d’autres nuisances gênant nos concitoyens, était intéressant. Il serait opportun de réduire l’origine des problèmes, ce que ne fera pas ce projet de loi par manque de crédits. SNCF Réseau n’a pas les moyens financiers de faire disparaître les vibrations engendrées par la ligne reliant Paris à Bordeaux, et il ne serait pas normal que l’entreprise concessionnaire de la ligne doive supporter cette charge. Dans les investissements futurs, il faudra prévoir une solution pour supprimer l’origine de ce bruit, qui a un impact sur nos concitoyens, comme cela a été rappelé.
D’ailleurs, en tant que viticulteur, je fais remarquer que certains de mes collègues vignerons ont observé des vibrations dans leurs caves, parfois de grands crus, qui se trouvent à proximité de la ligne. Cette vibration améliorera-t-elle ou détériorera-t-elle la qualité du vin ? Peut-être pourrions-nous lancer une mission chargée de vérifier l’évolution du vin dans ces caves !
(Sourires.)
En tout cas, il faut trouver les moyens de réduire, voire de supprimer, ces vibrations. Je mets aux voix l’article 28 ter .
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 40
Nombre de suffrages exprimés 37
Majorité absolue 19
Pour l’adoption 37
Contre 0
(L’article 28 ter, amendé, est adopté.)
Je suis saisi de plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 28 ter.
L’amendement no 2802 de Mme Delphine Batho est défendu.
(L’amendement no 2802, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à Mme Véronique Hammerer, pour soutenir l’amendement no 2685. Il s’agit de créer un label simple et clair permettant d’identifier la performance acoustique des revêtements contre le bruit. Les bétons bitumineux à couche très mince et à faible granularité sont de nouveaux revêtements qui présentent des caractéristiques très intéressantes en termes de bruit de roulement au passage d’un véhicule.
Il est indispensable d’améliorer la qualité du revêtement routier pour le bien-être des citoyens habitant aux abords des grandes infrastructures routières. Tel est l’objectif de l’amendement.
Quel est l’avis de la commission ? Ce sujet est très intéressant, madame Hammerer, mais il relève du domaine réglementaire. Je vous demande de retirer l’amendement. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. L’amendement est-il retiré, madame Hammerer ? Non !
(L’amendement no 2685 n’est pas adopté.) Les amendements nos 1er rectifié et 2983 rectifié sont identiques.
La parole est à Mme Véronique Hammerer, pour soutenir l’amendement no 1er rectifié.
J’ai le plaisir de présenter cet amendement qui réaffirme la nécessaire prise en compte des vibrations dans les nuisances engendrées par l’exploitation des lignes ferroviaires à grande vitesse. Si les vibrations peuvent résulter du bruit, elles peuvent également avoir d’autres sources, dont les ondes de propagation, qu’il faut prendre en compte spécifiquement.
L’amendement propose d’ouvrir une concertation avec les parties prenantes pour définir, d’ici à la fin de l’année prochaine, des méthodes d’évaluation des nuisances vibratoires. Un arrêté consacrera leur mesure. Il s’agit d’une véritable reconnaissance des problèmes rencontrés par nos concitoyens, dont les murs se lézardent à mesure que le trafic ferroviaire se développe.
La parole est à Mme Aude Luquet, pour soutenir l’amendement no 2983 rectifié. Déposé par mon collègue Jean-Noël Barrot, il se situe dans la lignée des amendements précédents. Son objet, identique à celui que vient de défendre Mme Hammerer, est d’ouvrir une réflexion sur le traitement des nuisances vibratoires provoquées par les infrastructures ferroviaires. Quel est l’avis de la commission ? Avec la même énergie qu’a mise Mme Hammerer à maintenir son précédent amendement, je me prononce très favorablement sur ces amendements identiques, car inciter les acteurs à se mobiliser sur ce sujet est très positif.
(Les amendements identiques nos 1er rectifié et 2983 rectifié, acceptés par le Gouvernement, sont adoptés.) Les amendements nos 3013 et 3045 de M. Jean-Noël Barrot sont défendus.
(Les amendements nos 3013 et 3045, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Laurianne Rossi, pour soutenir l’amendement no 2249. Il traite des plans de prévention du bruit dans l’environnement. En commission, j’avais proposé de les annexer aux plans locaux d’urbanisme, mais j’ai entendu les objections de M. le rapporteur et de Mme la ministre arguant que cette annexion n’était pas pertinente, les autorités compétentes n’étant pas toujours les mêmes. J’ai retravaillé l’amendement, qui prévoit de rendre les plans de prévention du bruit dans l’environnement opposables à toute personne publique ou privée. Cette opposabilité serait indépendante des PLU.
Il s’agit d’un amendement important, car il améliore la prise en compte des nuisances sonores ainsi que l’information de nos concitoyens, auxquels il offre la possibilité de se prévaloir des plans de prévention.
Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Cet amendement est assez éloigné de la thématique des transports et des mobilités ; il pourrait même constituer un cavalier législatif. J’en demande le retrait ; à défaut, avis défavorable.
Je suis néanmoins conscient de la nécessité de retravailler ce sujet dans le cadre du Conseil national du bruit.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Les PPBE sont des plans d’action pour lutter contre les nuisances sonores, non des cartographies destinées à les mesurer. La direction générale de la prévention des risques a engagé une réflexion pour élaborer l’équivalent des plans d’exposition au bruit des transports aériens pour les transports terrestres. Je vous propose de retirer votre amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
(L’amendement no 2249 n’est pas adopté.) Les amendements nos 1351 et 1352 peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
La parole est à M. Christophe Blanchet, pour les soutenir.
Ces amendements ont été déposés par notre collègue Jean-François Cesarini. Ils ont pour objectif de développer les moyens de transport collectifs routiers et les taxis en tiers-lieux, dans lesquels le passager a à sa disposition tous les éléments nécessaires à l’accomplissement de son travail. Les entreprises seraient incitées à acheter des véhicules tiers-lieux moins polluants, par un régime dérogatoire d’amortissement sur deux ans, dans le premier amendement, et sur trois ans, dans le second. La liste des équipements nécessaires sera fixée en Conseil d’État, après avis du conseil national des tiers-lieux. Quel est l’avis de la commission ? Ces amendements seraient plus à leur place dans le projet de loi de finances. Je vous invite à les retirer, quitte à les déposer à l’automne prochain. En cas de maintien, mon avis sera défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Christophe Blanchet. M. Cesarini m’a demandé de les maintenir.
(Les amendements nos 1351 et 1352, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Christophe Blanchet, pour soutenir l’amendement no 1349. Son objectif est de valoriser le choix de nos concitoyens en faveur de la transition énergétique, en créant un bonus de 15 % à 25 %, selon le type de véhicule, dans l’application du barème des indemnités kilométriques, afin de tenir compte du coût d’achat plus élevé de ces véhicules. Il se fait à budget constant pour l’État.
J’attends la même réponse et je ferai également la même.
Si tout le monde anticipe la réponse de tout le monde, nous irons bien plus vite !
Quel est l’avis de la commission ?
Vous voyez bien l’avenir, monsieur Blanchet ! Cet amendement relevant également de la loi de finances, je vous invite à le retirer et à le représenter dans le cadre du PLF. Faites l’effort de le retirer, cela nous évitera de voter ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Qui plus est, l’amendement est satisfait, puisque la loi de finances a prévu que des dispositions réglementaires, en cours d’élaboration, puissent valoriser plus efficacement les véhicules propres.
(L’amendement no 1349 est retiré.) Les amendements nos 1207 et 1669 sont identiques.
La parole est à M. Jean-Yves Bony, pour soutenir l’amendement no 1207.
Déposé par mon collègue Julien Dive, il vise à mettre en cohérence le calcul des émissions de CO2 pour la TVS – taxe sur les véhicules des sociétés –, en appliquant le même abattement de 40 % sur les émissions de CO2 que celui opéré pour le calcul des émissions de CO2 du malus des véhicules fonctionnant au superéthanol-E85. La parole est à M. Stéphane Demilly, pour soutenir l’amendement no 1669. Il convient d’aider les entreprises à remplacer leurs véhicules fonctionnant avec des énergies fossiles par des véhicules fonctionnant avec des énergies renouvelables. Aussi, cet amendement propose de mettre en cohérence le calcul des émissions de CO2pour la TVS, en appliquant le même abattement de 40 % sur les émissions de CO2 que celui prévu pour le calcul des émissions de CO2 des malus des véhicules fonctionnant au superéthanol-E85.
Cet abattement de 40 % sur les émissions de CO2 de superéthanol-E85 prend en compte le caractère renouvelable du carbone contenu dans le bioéthanol, car celui-ci, produit en Europe, réduit les émissions de gaz à effet de serre de 70 % en moyenne par rapport à l’essence fossile – cela a été maintes fois démontré. En outre, le superéthanol-E85 réduit de 90 % les émissions de particules fines par rapport à l’essence.
Une telle mesure permettrait de répondre à une recommandation du rapport d’information de la mission d’évaluation et de contrôle sur les outils publics encourageant l’investissement privé dans la transition écologique, du 30 janvier 2019 : « Conforter les dispositifs fiscaux encourageant l’incorporation des biocarburants en mettant en cohérence l’ensemble de la fiscalité liée aux biocarburants ». Cette recommandation me va très bien !
Le coût de cette exonération sera extrêmement faible pour le budget 2020, compte tenu du temps d’appropriation de la mesure par les gestionnaires de flottes et les constructeurs.
Quel est l’avis de la commission ? Nous avons déjà abordé ce sujet lors de l’examen des articles précédents. Il faudrait analyser les cycles de vie des carburants, en appliquant la méthodologie qui verra le jour en 2023. Ces types de carburant bénéficient déjà d’exonérations assez élevées de TICPE – taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques. Il faut d’abord poursuivre les travaux sur le cycle de vie et attendre leurs conclusions pour éventuellement agir.
Petite remarque scientifique – l’une de mes dernières – : les émissions de particules et d’oxydes d’azote – NOx – des biocarburants sont inférieures à celles d’autres types de carburant, mais les émissions dans l’air des additifs que l’on trouve dans les biocarburants ne sont pas mesurées. Le jour où l’on procédera à ces mesures, on pourrait avoir une surprise désagréable. Faisons attention : les biocarburants n’émettent moins de particules que par rapport à ce que l’on mesure ! N’oublions pas ce que l’on ne mesure pas !
Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Stéphane Demilly. Je fais observer, à mon tour, que l’analyse du cycle de vie des biocarburants a été maintes fois réalisée. Je ne vois pas pourquoi on remet systématiquement en cause ce qui a été fait auparavant.
(Les amendements identiques nos 1207 et 1669 ne sont pas adoptés.) Les amendements nos 1208 et 1672 sont identiques.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l’amendement no 1208.
Notre collègue Dive en est le premier signataire.
À l’heure actuelle, le parc de véhicules des flottes d’entreprises est composé à 90 % de véhicules diesel. Si l’on souhaite promouvoir et généraliser les énergies renouvelables, il est nécessaire d’aider les entreprises à remplacer leurs véhicules fonctionnant aux énergies fossiles par des véhicules fonctionnant aux énergies renouvelables.
À cette fin, l’amendement vise à exonérer de taxe sur les véhicules de société, pour une période de douze trimestres, les véhicules fonctionnant au superéthanol-E85, sur le modèle des dispositions applicables aux véhicules fonctionnant au gaz naturel pour véhicules et au gaz de pétrole liquéfié.
La parole est à M. Stéphane Demilly, pour soutenir l’amendement no 1672. J’aurai recours à la tautologie, répétant ce que je viens de dire avec des mots différents.
À l’heure actuelle, le parc de véhicules des flottes d’entreprises est composé à 90 % de véhicules diesel. Il convient d’aider les entreprises à remplacer leurs véhicules fonctionnant aux énergies fossiles par des véhicules fonctionnant aux énergies renouvelables.
À cette fin, l’amendement vise à exonérer de taxe sur les véhicules de société, pour une période de douze trimestres, les véhicules fonctionnant au superéthanol-E85, sur le modèle des dispositions applicables aux véhicules fonctionnant au gaz naturel pour véhicules et au gaz de pétrole liquéfié.
Le superéthanol-E85, rappelons-le, présente une proportion de bioéthanol comprise entre 65 % et 85 %. Celui-ci, permettez-moi de le répéter, produit des émissions de gaz à effet de serre inférieures de 70 %, en moyenne, à celles issues de moteurs à essence fossile. En outre, sa combustion n’émet quasiment aucune particule.
L’abattement fiscal de 40 % proposé pour les véhicules fonctionnant au superéthanol-E85, tient compte du caractère renouvelable du carbone contenu dans le bioéthanol.
Enfin, je rappelle, une fois encore, que le coût de l’exonération proposée pour le budget pour 2020 sera très faible, compte tenu du temps d’appropriation de la mesure par les gestionnaires de flottes et par les constructeurs automobiles.
Quel est l’avis de la commission ? Nous avons déjà eu le débat. Je comprends que l’on compare la fiscalité du superéthanol-E85 et celle du gaz naturel pour véhicules, qui bénéficie d’une défiscalisation moindre dans le cadre de la TICPE. Toutefois, on ne peut distinguer le biogaz et le gaz naturel, faute de pouvoir en différencier les molécules, donc le coût. Par conséquent, on ne peut favoriser l’un ou l’autre. C’est pourquoi la défiscalisation dont bénéficie le gaz naturel pour véhicules, dans le cadre de la TICPE, est moindre que celle dont bénéficie le superéthanol-E85. Celui-ci n’en bénéficie pas moins d’avantages fiscaux intéressants.
Je comprends l’intention des auteurs des amendements. Toutefois, il s’agit de dispositions fiscales susceptibles de converger à l’avenir, sous réserve que nous parvenions à établir une certification de provenance du biogaz. Celui-ci pourrait alors bénéficier d’un abattement de TICPE identique à celui dont bénéficie le superéthanol-E85. Il faut travailler à réduire l’usage du gaz aux seuls biogaz. Dès lors que nous avons décidé de sortir des énergies fossiles d’ici à vingt ans, tel sera le cas. Nous pourrons alors harmoniser la fiscalité en la matière.
Pour l’heure, je considère que le superéthanol-E85 bénéficie d’ores et déjà d’avantages fiscaux intéressants, dans le cadre de la TICPE, fussent-ils sept fois moindres que ceux applicables au diesel et à l’essence. Sans doute faudra-t-il aborder le sujet dans le cadre des projets de loi de finances ultérieurs, en tenant compte des évolutions que je viens d’évoquer.
Demande de retrait ou avis défavorable.
(Les amendements identiques nos 1208 et 1672, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Aude Luquet, pour soutenir l’amendement no 2984. Notre collègue Barrot en est le premier signataire. Il vise à permettre aux autorités de tester une procédure de contrôle à la volée des niveaux sonores des véhicules, notamment ceux des deux-roues, en vue de sanctionner les comportements routiers bruyants, mesurés par les radars acoustiques développés par plusieurs associations, notamment Bruitparif. Quel est l’avis de la commission ? Avis favorable. Il s’agit d’un amendement utile, dont les dispositions permettront de conduire des travaux grâce auxquels nous progresserons en matière de faisabilité technique de tels contrôles automatiques.
(L’amendement no 2984, accepté par le Gouvernement, est adopté.) L’amendement no 2909, de M. Jean-Noël Barrot, est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
L’amendement est satisfait. Demande de retrait ou avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis.
(L’amendement no 2909 est retiré.)
Je suis saisi d’amendements portant article additionnel après l’article 28 quater.
La parole est à M. Bruno Fuchs, pour soutenir l’amendement no 2823.
Il porte sur un sujet que nous avons succinctement abordé hier soir, en fin de séance. Nous avons eu un bref débat, que j’aimerais approfondir.
L’article 10 de la loi du 12 juillet 2010, dite Grenelle 2, dispose que les transporteurs doivent mesurer les émissions de CO2 de leurs véhicules liées à leurs prestations, et en informer leurs clients. Or, d’après l’ADEME – Agence de l’environnement et de la maîtrise de l’énergie –, seuls 29 % d’entre eux se conforment à cette obligation, alors même que 75 % d’entre eux sont en mesure de le faire – et non 100 %.
Agir sur le gaz à effet de serre rejeté dans l’atmosphère suppose de connaître en détail le volume de gaz émis, ainsi que sa provenance. Je propose donc – l’amendement n’a pas d’autre objectif – d’adopter un dispositif coercitif assurant le respect de l’article 10 de la loi Grenelle 2.
Ainsi, nous connaîtrons enfin le volume des émissions de gaz à effet de serre, transporteur par transporteur et, mieux encore, trajet par trajet. Sur cette base, nous pourrons agir, bien plus efficacement que nous ne le faisons, en vue de leur réduction, qui suppose d’en avoir une connaissance fine et détaillée.
Quel est l’avis de la commission ? Nous avons eu le débat hier soir. Nous ne le poursuivrons pas ce matin, d’autant moins que nous devons encore aborder de nombreux sujets.
D’une part, la quantification des émissions de gaz à effet de serre est difficile à réaliser. D’autre part, le dispositif proposé vise sans doute à taxer les émissions polluantes, ce qui n’a de pertinence qu’à l’échelle européenne, à laquelle il faut entreprendre de telles démarches si nous voulons les voir aboutir un jour. Demande de retrait ou avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Bruno Fuchs. L’idée est de faire avancer les choses. Au demeurant, je proposerai ultérieurement un dispositif de taxation à l’échelle européenne.
Quoi qu’il en soit, si nous voulons taxer les émissions polluantes, il faut au préalable connaître en détail leur volume, transporteur par transporteur et moyen de transport par moyen de transport. Le point faible de leur taxation réside dans le fait que l’on ne connaît pas en détail, pour chaque moyen de transport, les émissions de gaz à effet de serre.
Monsieur le rapporteur, si le dispositif proposé ne vous satisfait pas, quel est celui qu’il faudrait adopter pour connaître, moyen de transport par moyen de transport, le volume des émissions de gaz à effet de serre ? On ne peut taxer que des quantités connues. Tel est le sens de l’amendement.
Sur ce point, la loi n’est pas respectée. Comment la faire respecter ? Pour taxer, il faut se fonder sur des données tangibles, dont nous ne disposons pas à l’heure actuelle. Je veux bien retirer l’amendement, sous réserve que l’on m’indique comment procéder à la mesure des tous les gaz à effet de serre émis par les transports.
(L’amendement no 2823 n’est pas adopté.) La parole est à M. Stéphane Demilly, pour soutenir l’amendement no 2892. La circulation de certains véhicules à moteur provoque de graves nuisances sonores et perturbe grandement la tranquillité des habitants. Il faut dire que, dans le concours de bruit, certains conducteurs pourraient prétendre au titre de champion du monde, au détriment de ceux qui essaient de se reposer, notamment la nuit !
Il s’agit, à mes yeux, d’un véritable fléau de santé publique, et d’un irrespect d’autrui suscitant de l’incompréhension, de la rancœur et, parfois, des réactions reptiliennes particulièrement violentes de la part de ceux qui se sentent agressés.
L’article 28 quater du présent projet de loi vise à inscrire la pollution sonore dans la loi. Par le biais de l’amendement, nous proposons d’aller plus loin. En effet, les maires et les forces de l’ordre sont souvent démunis pour lutter contre le phénomène.
Face au constat de la faible efficacité des dispositifs destinés à lutter contre les nuisances provoquées par certains véhicules à moteur, nos collègues Bruno Le Roux et Rémi Pauvros ont déposé, le 14 janvier 2014, une proposition de loi visant à lutter contre les nuisances de certains engins motorisés en milieu urbain. Elle a été – je m’en souviens – très largement adoptée, en première lecture, à l’Assemblée nationale, mais le Sénat, malheureusement, ne l’a jamais examinée.
Le présent amendement en reprend certaines dispositions en vue de renforcer, par la loi, le dispositif réglementaire instauré pour lutter contre les nuisances sonores engendrées par certains engins motorisés. Si la loi du 3 août 2018 visant à renforcer la lutte contre les rodéos motorisés a été adoptée, elle ne concerne pas, de façon spécifique, la lutte contre les nuisances sonores engendrées par certains véhicules à moteur. Tel est le sens de l’amendement.
Quel est l’avis de la commission ? Cher collègue, je comprends bien votre intention. Toutefois, votre amendement est satisfait par l’article R. 318-3 du code de la route, dont je vous épargne la lecture. Demande de retrait ou avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis.
(L’amendement no 2892 est retiré.) La parole est à Mme Zivka Park, pour soutenir l’amendement no 1916. Chers collègues, je vous propose, par le biais du présent amendement, d’adopter une préconisation formulée dans le cadre des Assises nationales du transport aérien – en ayant bien conscience que le présent projet de loi ne traite pas du secteur aérien.
Tout bien immobilier situé dans une zone relevant d’un PEB fait l’objet d’une obligation d’information lors de sa location. Tel n’est pas le cas en cas d’acquisition.
À des fins de transparence, je propose d’étendre cette obligation d’information à toute installation en zone PEB. Ainsi, chacun pourra s’installer en toute connaissance de cause.
Trop souvent, dans ma circonscription, j’entends des habitants se plaindre : « Nous habitons à proximité d’un aéroport, mais nous ne nous attendions pas à subir autant de bruit ! ». Il me semble essentiel que chacun puisse s’installer en toute connaissance de cause.
Je profite de cette évocation de ma circonscription pour saluer la présence, dans les tribunes, d’élèves du lycée Baudelaire de la commune de Fosses.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Quel est l’avis de la commission ? Il s’agit d’un amendement intéressant. Les dispositions proposées permettront de renforcer l’information des acquéreurs, ce qui leur évitera de subir une situation semblable à celle que vivent les protagonistes du célèbre film Un éléphant ça trompe énormément, sorti en 1976. Excellent film ! En effet, madame la présidente de la commission, et je fais cette référence plaisante pour votre anniversaire ! (Sourires.) Avis très favorable à l’amendement. Quel est l’avis du Gouvernement ? L’amendement de Mme Park est inspiré d’une proposition formulée dans le cadre des Assises nationales du transport aérien.
Les dispositions proposées créent peu d’obligations nouvelles. En tout état de cause, elles n’obligent pas à procéder à des diagnostics supplémentaires. Elles sont proportionnées et répondent à un vrai besoin. Avis favorable.
(L’amendement no 1916 est adopté.) Excellent !
La parole est à M. Xavier Roseren. Je salue l’article 29, qui vise à résoudre un problème concret et majeur de nos territoires, notamment en Savoie et en Haute-Savoie.
La fraude aux dispositifs anti-pollution, notamment l’AdBlue, est de plus en plus courante. Pour rappel, l’AdBlue permet de réduire le volume d’oxyde d’azote à la sortie des pots d’échappement des véhicules.
Cette technologie, basée sur un additif liquide, permet de limiter les émissions polluantes et, surtout, de respecter les normes européennes anti-pollution. Toutefois, certains transporteurs peu scrupuleux utilisent des dispositifs de neutralisation de l’AdBlue, vendus sur internet à faible coût.
Cet article vise donc à renforcer les contrôles opérés sur les poids lourds, afin de s’assurer que de tels dispositifs n’y sont pas installés. Je remercie mes collègues de la commission du développement durable d’avoir adopté mon amendement, qui a étendu les sanctions.
Je souhaite enfin, madame la ministre, appeler votre attention sur la nécessité d’une bonne formation des agents qui effectueront ces contrôles, ainsi que d’une multiplication de ces derniers : c’est de cette façon que l’ensemble des transporteurs, français et étrangers, sauront que la France agit. Nous mettrons ainsi fin à cette fraude à l’AdBlue.
La parole est à M. Jean-Marc Zulesi. Nous examinons maintenant le dernier article du titre III du projet de loi. C’est l’occasion, pour moi, de remercier l’ensemble de nos collègues : tous ensemble, sur tous les bancs, nous avons œuvré pour que nos mobilités soient demain plus propres, plus durables, plus vertes, en instaurant notamment une politique ambitieuse en matière de vélo. Le forfait mobilités durables a été voté à l’unanimité. Nous voulons aussi développer les zones à faibles émissions, et nous avons travaillé collectivement pour que nos dispositifs soient viables, opérationnels.
Merci, donc, à tous nos collègues, ainsi qu’à Mme la ministre et à notre rapporteur, qui a fait preuve de pédagogie pour éclairer tous les enjeux de ce titre III.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Bravo !
(L’article 29 est adopté.)
La parole est à M. Jean-Luc Fugit, rapporteur, pour soutenir l’amendement no 3147. L’amendement no 3147 est rédactionnel.
Au terme de ce titre III, je souhaite, moi aussi, dire quelques mots de conclusion. J’ai pris un grand plaisir à mener ce travail très dense et très enrichissant, et je me réjouis que vous l’ayez perçu.
(Sourires.)
Je remercie mon équipe, ainsi que les fonctionnaires de la commission du développement durable et de toute l’Assemblée nationale, les présidents qui se sont succédé, et tous nos collègues, sur tous les bancs, qui ont fait de ces discussions des moments agréables, bien que parfois bruyants. J’espère ne pas vous avoir ennuyés avec mes explications scientifiques : il me paraît utile de parler de science, parfois, dans l’hémicycle. M. le Premier ministre a d’ailleurs dit hier, dans son discours de politique générale, qu’il fallait savoir écouter ce que la science nous enseigne.
Merci, enfin, à Mme la ministre et à ses équipes pour leur patience au cours des longues réunions qui nous ont permis de converger sur de nombreux sujets. Et à bientôt pour parler encore d’environnement, d’énergie, de qualité de l’air et de mobilités plus propres et plus actives !
(Vifs applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)
(L’amendement no 3147, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
(L’article 29 bis, amendé, est adopté.)
Nous examinons maintenant l’article 1er A, qui avait été précédemment réservé à la demande du Gouvernement.
La parole est à M. Francis Chouat.
J’associe à cette intervention ma collègue Marie Guévenoux.
Le Gouvernement a décidé d’appliquer les recommandations du deuxième scénario décrit par le rapport du Conseil d’orientation des infrastructures – COI –, remis le 1er février 2018. Cette décision est cohérente avec les objectifs fixés par cet article.
Le rapport annexé au projet de loi fait le lien avec le sixième tableau figurant dans le rapport du Conseil d’orientation, qui dresse la liste de l’ensemble des opérations d’investissement qui seraient programmées pour chacun des trois scénarios examinés. Tous ces investissements répondent à des problèmes de réduction des inégalités territoriales, d’accessibilité, de mobilité, d’efficacité et d’accélération de la transition énergétique.
L’un de ces projets est très attendu des élus locaux et des habitants de nos territoires, usagers quotidiens du RER et des liaisons intercités – je pense en particulier à ceux qui empruntent la partie sud de la ligne D du RER. Il s’agit d’un projet de développement que vous connaissez bien, madame la ministre : le « terrier de Bercy ». Ces travaux permettraient de fluidifier le nœud de Bercy afin de permettre le passage de davantage de trains vers la capitale. Toutes les études le montrent, cette réalisation permettrait de lever de fortes contraintes de déplacement pour près de 30 millions d’habitants, et de désaturer un réseau sous tension depuis de très nombreuses années.
Nous nous réjouissons donc de voir cet investissement figurer au nombre de ceux qui sont programmés. Mais, vous le savez, en la matière, le besoin de clarté de nos concitoyens sur les engagements pris est d’une extrême sensibilité. C’est la raison pour laquelle nous souhaitons, madame la ministre, que vous confirmiez la programmation et le calendrier de réalisation du terrier de Bercy, qui permettra une réelle et significative amélioration des conditions de circulation sur le réseau sud-francilien.
La parole est à M. Damien Pichereau. Ce titre Ier A, relatif à la programmation des investissements de l’État dans les transports pour la décennie prochaine, est discuté de manière très symbolique après le titre III, relatif aux mobilités propres et actives. De manière symbolique, car nous, majorité et Gouvernement, avons voulu changer de paradigme pour toutes les transformations que nous souhaitons pour la nation. Les solutions ne peuvent venir seulement de l’État providence tel qu’il a été imaginé depuis maintenant des dizaines d’années. L’objectif de cette loi est de donner aux collectivités territoriales la confiance qui leur manque. Une myriade de solutions existe, et des projets peuvent être menés à bien au plus près des besoins de nos concitoyens, dans chaque territoire, avec un accompagnement accru de l’État. C’est pourquoi la gouvernance, objet du titre Ier, nous apparaît comme la colonne vertébrale de ce texte. Par courtoisie, nous avons toutefois décidé de conserver le changement d’agencement opéré par nos collègues sénateurs.
Le Conseil d’orientation des infrastructures, présidé par M. Philippe Duron et qui comprend plusieurs parlementaires, notamment Mme la présidente de la commission du développement durable, a proposé trois scénarios de programmation des investissements, afin d’établir une visibilité pluriannuelle des investissements en matière de transport, avec une réorientation vers les transports du quotidien, et de mieux optimiser les infrastructures existantes.
Le Gouvernement nous propose d’adopter le scénario 2, qui permet l’entretien et la modernisation de notre patrimoine, ainsi que le lancement des premières phases de grands projets.
Notre méthode a toujours été celle de la concertation avec l’ensemble des acteurs territoriaux – régions, associations d’élus, organisations non gouvernementales, associations d’usagers…
Notre groupe souhaite ici saluer la volonté du Gouvernement d’établir une trajectoire soucieuse en particulier de la régénération des transports du quotidien dans tous les territoires, et ambitieuse, puisqu’elle prévoit une augmentation 40 % du budget pour ce quinquennat, par rapport au précédent. Il nous appartiendra, à nous, parlementaires, de contrôler cette trajectoire, et de voter les budgets nécessaires lors des prochaines lois de finances.
À ce titre, nous avons souhaité maintenir la disposition qu’ont ajoutée nos collègues sénateurs visant à affecter à l’Agence de financement des infrastructures de transport de France – AFITF – la part de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques, votée durant la loi de finances pour 2016. Il s’agit de rediriger des budgets pour accroître la lisibilité et la cohérence du dispositif.
Une autre avancée majeure, que notre rapporteure Bérangère Abba a portée en commission, réside dans l’affectation du surplus de la taxe de solidarité sur les billets d’avion, qui revenait jusqu’alors au budget général, à hauteur de 30 millions d’euros. Par cette mesure, nous actons une des annonces du Président de la République, qui indiquait être favorable à ce que le transport aérien participe aux investissements dans les transports du quotidien.
Le groupe La République en marche votera contre tout amendement…
Venant de l’opposition ! …visant à introduire une nouvelle fiscalité car, comme nous l’avons dit, il nous appartiendra de prendre de telles mesures dans les prochaines lois de finances.
Par ailleurs, la programmation s’appliquant à l’ensemble du territoire, il ne nous paraît pas opportun de spécifier un territoire d’affectation.
La parole est à M. Vincent Rolland. Cet article est, pour nous, l’occasion d’évoquer les trains de nuit, qui ont été supprimés dans nos vallées alpines, en Savoie du moins, il n’y a pas si longtemps, faute de rentabilité et de fréquentation, nous a-t-on dit. Quoi d’étonnant, sachant que les moyens déployés pour faire connaître ces trains et les services associés ont été réduits à la portion congrue ?
La Savoie et la Haute-Savoie constituent la première destination de ski au monde, et connaissent, malgré les infrastructures existantes, des périodes de saturation du réseau routier autant que des réseaux aérien ou ferré, plus particulièrement des TGV – puisque les trains de nuit ne sont plus exploités. Or ils correspondent à une attente. Moins chers que le TGV, ils permettent de gagner une à deux journées de vacances, dans un contexte de fragmentation des séjours touristiques, qui sont de plus en plus courts. Surtout, ils sont un moyen de préserver l’environnement – un enjeu majeur de ce projet de loi –, notamment l’air de nos vallées alpines.
D’autres lignes existent à l’étranger, notamment en Autriche, avec le
Nightjet de la compagnie ÖBB. Ce projet de loi donne l’occasion d’insister sur la nécessité de relancer les trains de nuit. Si chacun y met du sien, ce chantier, j’en suis persuadé, sera couronné de succès. Oui aux trains de nuit ! Même à Aurillac ! La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel. L’article 1er A traite de la programmation des infrastructures : il s’agit simplement de reprendre le scénario 2 défini par Conseil d’orientation des infrastructures, sans apporter ni projet nouveau ni clarté sur les financements nécessaires. C’est pourquoi nous avons déposé des amendements pour abonder les recettes de l’AFITF, en particulier par la suppression de l’exonération de TICPE sur le kérosène pour les vols intérieurs.
D’autres amendements viseront à favoriser le déplacement ferroviaire intereuropéen, par la création de nouvelles lignes de trains de nuit et la pérennisation de celles qui fonctionnent aujourd’hui.
Nous proposerons également d’expérimenter une ou plusieurs lignes intercités de nuit, offrant une haute qualité de service sur toute la ligne, conformément aux critères européens. Je rejoins ici mon collègue Vincent Rolland, qui défendait le maintien ou le retour au train de nuit dans les vallées alpines : c’est une nécessité pour désengorger le trafic routier.
Nous soutenons aussi le carburant alternatif et le renforcement des moyens consacrés à la politique nationale de continuité territoriale pour les outre-mer.
Je me permets, enfin, d’insister sur la nécessité de maintenir, rénover et rendre attractives les lignes régionales, parfois en mauvais état, qui sont indispensables au changement de pratiques en matière de mobilité, notamment dans les territoires où elles constituent l’alternative à la voiture. Tel est bien le cas de la ligne régionale Grenoble-Veyne-Gap, que vous connaissez bien, madame la ministre, et qui dessert des territoires très ruraux. La renforcer et la rendre attractive est donc une nécessité.
La parole est à M. M’jid El Guerrab. Parmi les trois scénarios d’investissement dans les infrastructures de transport proposés par le COI, vous avez choisi le deuxième. Ce n’est pas le plus ambitieux, mais il a le mérite d’avoir reçu l’assentiment de l’ensemble des acteurs mobilisés lors des concertations – opérateurs, usagers, parlementaires. Il permet de répondre aux grandes priorités fixées, en privilégiant la restauration et la modernisation du patrimoine, et en permettant d’avancer dans les premières phases des grands projets.
Malheureusement, vous vous êtes arrêtés à un scénario « 1,5 », éloigné des premières ambitions et ne répondant pas aux nécessités des transports de demain. Avec un effort de financement de l’État de 13,7 milliards d’euros sur les cinq prochaines années, nous sommes bien en deçà du scénario 2 prévu par le COI et convenu lors des concertations.
Alors que ce scénario estimait à 3 milliards d’euros par an les dépenses de l’AFITF, 2,7 milliards seulement lui sont affectés. Vous prétendez que le rattrapage aura lieu au cours de la décennie. Permettez-nous d’en douter.
À cela s’ajoute, en 2018, l’effondrement des recettes tirées du compte d’affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », dit « Radars », du fait des dégradations occasionnées en marge du mouvement des gilets jaunes, qui a provoqué une perte de 200 millions d’euros pour l’Agence. Ce manque à gagner, qui s’ajoute à une structure de financement déjà faible, devra être rattrapé tout au long de la programmation.
Vous l’aurez compris, madame la ministre, la question des financements étant la principale faiblesse de ce texte, nous attendons vos réponses.
C’est un vrai sujet ! La parole est à M. Jean-Marie Sermier. Les investissements dans les infrastructures de transport ne sont pas un objectif, mais un moyen d’assurer la solidarité territoriale dans une France qui se métropolise chaque jour davantage. Il est plus facile de répondre à la mobilité du quotidien dans les métropoles, avec les voies réservées, le renforcement des transports urbains ou le développement de nouvelles technologies comme les trottinettes. Notre devoir est aussi d’arrimer à ces territoires les zones rurales, peu denses, où plus de 90 % des déplacements s’effectuent en voiture. Il convient donc d’entretenir les réseaux de communication, notamment les routes nationales, qui sont aujourd’hui les parents pauvres des infrastructures.
Des infrastructures dépend aussi le développement économique d’un pays, pour lequel des voies de communication sont indispensables. Aucune civilisation, aucune grande ville ne s’est construite sans elles. Il faut amplifier le réseau fluvial, avec le canal Seine-Nord, et assurer les transports au-delà de nos frontières, avec le tunnel Lyon-Turin, sans oublier les opérations plus modestes comme l’achèvement de la ligne TGV Rhin-Rhône entre Mulhouse et Belfort – 30 kilomètres dont la construction a commencé avec l’achat de terrains mais qu’il faut terminer. Pour cela, il faut assurer le financement.
Or, cela a été dit plusieurs fois, en la matière, le compte n’y est pas. L’AFITF manque de moyens. Pourtant, la TICPE est rentable : entre les 30 milliards d’euros de 2017 et les quelque 37 milliards prévus pour 2019, c’est 6,5 milliards qui pourront être mobilisés. Cet argent va certes combler le déficit de l’État, mais il importerait d’en flécher une partie pour assurer l’équilibre financier de l’ensemble des infrastructures.
La parole est à Mme Aude Luquet. Cet article est primordial, car l’ensemble des dispositions votées jusqu’à présent n’ont de sens que si l’on modifie la construction et l’entretien des infrastructures de transport. Il est aussi important que le Parlement puisse enfin s’exprimer sur ces orientations. Sans reprendre l’ensemble des modifications apportées en commission, qui vont dans le bon sens, je veux rappeler l’intégration de la pollution sonore, la réduction des gaz à effet de serre ou le rééquilibrage modal en faveur du transport ferroviaire.
Le renforcement ferroviaire est indispensable pour réduire nos émissions de polluants atmosphériques, tout en favorisant une filière économique française. La progression des modes non routiers dans le transport de marchandises, en complémentarité avec la route, est l’un des leviers de la transition écologique. Il faut encourager le recours aux transports ferroviaire, fluvial ou maritime, sur le maillon principal de la chaîne logistique, en réservant le transport routier au transport d’approche.
Enfin, le présent article devrait prendre en compte les spécificités ultramarines pour assurer la continuité territoriale dans les outre-mer afin de réduire les inégalités territoriales et contribuer à la cohésion des territoires métropolitains et ultramarins. Cette continuité territoriale a été rappelée lors de l’adoption de l’amendement du rapporteur à l’article 8. Par cohérence, nous proposerons d’en faire de même dans l’article qui traite de la programmation des infrastructures de transport.
La parole est à Mme Valérie Lacroute. C’est un article important, prioritaire, que le Sénat a choisi de placer en tête du texte. La programmation des investissements routiers de transport est essentielle pour encourager la mobilité dans l’ensemble des territoires, financer les infrastructures ferroviaires et routières, rénover les réseaux, maintenir les petites lignes ou encore remettre en service les trains de nuit.
Sur ce sujet des moyens financiers, nous avons donné l’alerte en commission ; nous le referons en séance publique, même si l’on peut saluer le travail du Conseil d’orientation des infrastructures, qui a mis en évidence plusieurs scénarios, établissant la liste et le degré de priorité des différents investissements. Vous avez fait le choix de retenir, avec quelques variantes, le scénario 2, chiffré à environ 3 milliards d’euros par an passant par l’AFITF.
C’est là que le bât blesse et qu’il faut poursuivre le travail. Cette agence, dont j’ai été membre au cours de la précédente législature, avait été qualifiée par la Cour des comptes de « dernier avatar des différents supports que l’État a successivement créés depuis l’après-guerre ». J’ai pu constater qu’elle joue, en réalité, le rôle d’une boîte aux lettres, les propositions en matière de programmation provenant de la direction des transports du ministère.
Sans toutefois aller vers sa suppression, il semble important de revoir le fonctionnement de cette agence, vers laquelle est fléchée une partie des financements. En particulier, la rémunération de son président devra être abordée – c’est un sujet d’actualité que traiteront certains amendements.
Surtout, il faut donner à l’AFITF les moyens financiers nécessaires. Nous en revenons à la question du fléchage de la TICPE, qui reste notre leitmotiv sur ce projet de loi. Sur les 37 milliards d’euros de recettes de TICPE, seulement 1,2 milliard sera fléché vers l’AFITF pour régénérer le réseau et investir dans les moyens de transport.
Vous en êtes consciente, madame la ministre, je le sais, dans le prochain projet de loi de finances, il faudra absolument affecter une part plus importante de TICPE à l’Agence pour financer les infrastructures. Ce ne sont pas les 30 millions d’euros correspondant au surplus de la taxe de solidarité sur les billets d’avion, dite taxe Chirac, qui permettront de résoudre tous les problèmes de financement en matière de transport.
Pour que la loi d’orientation des mobilités soit une réussite, elle doit prévoir des moyens financiers à tous les niveaux. C’est le cœur de cet article.
La parole est à M. Julien Aubert. Je reviens sur les trains de nuit, qui permettent de remédier au désenclavement, notamment pour les territoires montagneux. Dans ma région, si leur suppression devait se poursuivre, l’impact sera très négatif. Certaines de vos annonces, madame la ministre, suscitent toutefois de l’espérance.
Ensuite, je crois comprendre que la ligne nouvelle Montpellier-Béziers-Perpignan est programmée, malheureusement, à la fin de la période, donc dans une dizaine d’années. Pourtant, elle est attendue depuis plus de trente ans. L’Espagne a fait sa part du travail, et elle est désormais suspendue à la réalisation de ce dernier tronçon qui doit permettre de relier l’Europe du Nord à l’Europe du Sud. Cette ligne est le seul moyen de désengorger la ligne actuelle et d’augmenter le nombre de trains du quotidien qui sont aujourd’hui complètement saturés. En outre, pour lutter contre la pollution, il convient de développer le fret ferroviaire – il est prévu que la LGV soit mixte, c’est-à-dire accueillant à la fois du fret et des passagers. Sur ce sujet, nous avons besoin aujourd’hui d’un engagement de l’État et d’une accélération du calendrier.
Enfin, je souhaite évoquer la décision de l’État de céder des parts de routes nationales contiguës aux autoroutes. Je relève, en premier lieu, une certaine opacité. Cette mesure, introduite par voie d’amendement, s’inspire d’un rapport paru pendant la crise des gilets jaunes, dont on sait qu’elle est aussi une crise d’acceptabilité des décisions publiques. Elle a été présentée – non par le Gouvernement, mais par les députés qui l’ont soutenue – comme une mesure technique alors qu’il s’agit d’une décision budgétaire et politique, qui est loin d’être anodine.
En deuxième lieu, je souligne une contradiction : la mise en concurrence serait inévitable – ce que je conteste parfois – pour la SNCF ou les barrages hydroélectriques, et voilà que la cession de routes nationales en serait dispensée et pourrait se faire de gré à gré. Je m’interroge, car je me souviens qu’il y a quelques années, l’Association des sociétés françaises d’autoroutes – AFSA – faisait du lobbying en faveur de l’extension du modèle des concessions autoroutières à l’ensemble des routes nationales. Je ne voudrais pas que cette mesure soit une première étape vers une extension des concessions – au lieu du retour des autoroutes dans le giron public que j’appelle de mes vœux –, au motif que l’État n’aurait plus les moyens d’entretenir le réseau routier national. Où s’arrêtera-t-on ? Aujourd’hui, ce sont les portions les plus proches des autoroutes qui sont concernées au nom du bons sens. Mais, demain, d’autres tronçons seront connexes de ceux qui auront été cédés.
Si l’État est désargenté, c’est aussi parce qu’il a fait de très mauvaises affaires avec ces concessions autoroutières. Je le dis d’autant plus calmement que la droite est en partie responsable de cette erreur. Alors que les concessions avaient été valorisées à 14,8 milliards d’euros, les sociétés concessionnaires ont distribué 27,4 milliards d’euros de dividendes en dix ans. L’État a donc fait une très mauvaise affaire. C’est en partie à cause de cette erreur que nous sommes aujourd’hui dans l’incapacité de financer les transports.
Comme disait Milton Friedman : «
there ain’t no such thing as a free lunch ! », autrement dit, rien n’est gratuit. Dès lors que les routes nationales seront concédées, les sociétés gestionnaires instaureront un péage. Pour revenir à la crise des gilets jaunes, je ne pense pas qu’une augmentation des péages soit la meilleure manière de réconcilier les Français avec la politique.
Je tenais à vous alerter, car la place de l’État est mise en question. Je considère que l’État doit gérer les routes nationales. Vous ne pouvez pas accepter une augmentation des péages afin de mettre sous le tapis les problèmes budgétaires de l’État. Il est urgent de voter une loi de séparation des églises autoroutières et de l’État.
(Sourires.) La parole est à M. Hubert Wulfranc. La toile de fond de ce projet de loi est l’ouverture à la concurrence que le Gouvernement a initiée au travers de la réforme de la SNCF. Nous le vérifierons dans les articles consacrés à la RATP. Les conséquences de ce choix sont déjà visibles pour le réseau ferré : les services aux usagers sous pression pour réaliser des économies drastiques ; les incertitudes sur le devenir des petites lignes, sur lesquelles nous reviendrons.
M. Aubert vient de porter le fer, comme je l’avais fait en commission, sur les routes nationales, dont on pressent qu’elles pourraient être concédées et livrées à l’appétit de partenaires privés qui attendent de se gaver de bénéfices. Les enjeux économiques sont majeurs. La privatisation éventuelle se ferait au détriment du patrimoine national et des usagers.
Nous avons exprimé nos doutes, madame la ministre, sur la sincérité de votre scénario d’investissements que j’avais qualifié de médiocrement médian. Ainsi, le surcroît d’investissements dont vous vous enorgueillissez est à relativiser puisqu’il fait suite à une absence totale d’efforts de l’État au cours de la dernière période. Les chiffres que vous présentez s’inscrivent dans un processus de rattrapage qui sera particulièrement long. Les moyens pour la régénération ne sont donc pas au rendez-vous, qu’il s’agisse du ferroviaire, de la route ou d’un élément trop souvent passé sous silence : le fleuve – je pense en particulier à la capacité à redynamiser le fret fluvial.
Ce scénario est médiocrement médian, car vous négligez les recettes que vous pourriez tirer de l’application du principe pollueur-payeur. Ce faisant, vous privez la nation de capacités d’investissement nouvelles et significatives.
Je ne m’appesantis pas sur les interrogations que nous avons soulevées quant à la pertinence des priorités que vous défendez. S’agissant de la création d’infrastructures lourdes en matière routière, vos choix vont, selon nous, à l’encontre du report modal, qui devrait être au cœur de la politique de transport.
Nous présenterons plusieurs amendements et sachez que nous souhaiterions être constructifs. Nous avons entendu, hier, le Premier ministre faire de la défense de l’environnement et de la justice sociale des priorités gouvernementales. Le titre relatif aux efforts financiers en faveur des mobilités que nous examinons devrait être l’occasion de concrétiser ces engagements. Nous jugerons sur pièces mais, en l’état, nous sommes loin des promesses faites hier. Nous tenions à vous le signifier dès le début de cette discussion.
La parole est à Mme Michèle Victory. La mobilité, dont nous discutons depuis plus d’une semaine dans cet hémicycle, est au cœur des préoccupations de nos concitoyens.
La nécessité de s’engager en faveur de modes de déplacement plus vertueux et plus respectueux de l’environnement est reconnue, et nous sommes tous prêts à prendre ce problème à bras-le-corps, comme le montrent nos débats.
Je veux cependant une nouvelle fois appeler l’attention de mes collègues et de Mme la ministre sur la nécessité de prendre en compte les spécificités de certains territoires, pour lesquels les problèmes de transport et de déplacement sont devenus de véritables casse-têtes.
Je le rappelle, l’Ardèche est le seul département de l’Hexagone à ne plus disposer de ligne de chemin de fer pour les passagers depuis 1972. Il est cependant traversé par des centaines de trains de marchandises le long de la vallée du Rhône dont la plupart des communes sont littéralement coincées entre le fleuve et la montagne – certaines sont empêchées de se développer suffisamment et toutes subissent fortement les nuisances que provoque la traversée des centres bourgs par de longs convois de marchandises, dont certains contiennent des produits dangereux, voyageant d’un bout à l’autre de l’Europe.
Je vous ai alerté sur l’urgence à refuser le schéma de contournement est de Lyon qui aurait pour effet de renvoyer sur la ligne existante des trains encore plus nombreux. J’espère que la concertation régionale aboutira à de nouvelles pistes, plus responsables et respectueuses des populations et des générations futures. L’inquiétude est très grande dans notre vallée.
Tant que les anciennes lignes SNCF qui desservaient toutes les communes de la vallée ne seront pas rétablies – il semble que, sous la pression de nombreux élus, la région ait enfin pris position sur cette question –, il nous faudra traverser le Rhône pour aller prendre un train dans la Drôme, département voisin, ou pour aller y travailler – 80 % des habitants de la Drôme ou de l’Ardèche travaillent dans l’autre département et doivent donc emprunter, chaque jour, les fameux ponts qui enjambent le fleuve.
L’année dernière, a été actée par les services de l’État, en accord avec les collectivités concernées, la construction d’un nouvel échangeur autoroutier permettant de faciliter la desserte locale et d’améliorer le quotidien des habitants. Ce nouvel échangeur ne suffira cependant pas à faire face à l’augmentation de la population dans ces territoires.
À titre d’exemple, le pont qui enjambe le Rhône à Tournon est emprunté par 20 000 véhicules par jour, celui de Guilherand-Granges est emprunté quotidiennement par 48 000 véhicules et celui d’Andance par 7 000 véhicules. Le trafic routier a augmenté de 5 % en dix ans. Cette situation provoque un allongement des temps de déplacement. À cet égard, l’ouverture de l’échangeur supplémentaire, qui entraînera un accroissement du trafic sur les ponts qui relient la Drôme et l’Ardèche, soulève un nouveau problème.
L’ensemble des élus participent à la concertation afin de trouver de nouvelles solutions, mais le nouveau schéma d’infrastructures routières et ferroviaires est un élément particulièrement important. Il nous faudra faire en sorte que les habitants du nord de l’Ardèche ne soient pas une nouvelle fois pénalisés dans leurs déplacements. Avec les problèmes d’emploi, la flexibilité est plus grande. Il nous faut donc trouver de nouvelles solutions pour répondre à ces problématiques.
Nous devrons ainsi élaborer de nouveaux schémas de mobilité, mais les collectivités ont besoin de l’accompagnement de l’État car, à elles seules, elles ne parviendront pas, malgré leur bonne volonté et leurs idées nouvelles, à développer correctement ces territoires.
La parole est à Mme la ministre. Le Gouvernement a souhaité que l’examen de ce titre intervienne après le titre Ier, car nous avons la conviction qu’une place centrale doit être donnée aux collectivités locales, qui sont les mieux à même d’apporter des réponses au plus près des besoins de nos concitoyens, après le titre II, qui vise à mobiliser l’innovation pour améliorer la mobilité et les transports du quotidien, et après le titre III, qui regroupe les outils qui permettront d’assurer une mobilité plus propre et plus active.
Ce titre reflète un exercice inédit de programmation des investissements dans les transports, qui vise à en finir avec des décennies de promesses non financées, et traduit une réorientation de notre politique d’investissement en faveur des transports du quotidien. Je veux, à cet égard, saluer à nouveau le travail accompli par le Conseil d’orientation des infrastructures, instance transpartisane, dont le rapport, adopté à l’unanimité, marque une avancée très importante de notre conception des investissements dans ce secteur.
Nous avons, en effet, retenu le scénario 2. Certains estiment que nous n’en respecterions pas l’équilibre, de sorte qu’il s’agirait plutôt d’un « scénario 1,5 ». Nous y reviendrons au cours de la discussion, mais les équilibres du scénario 2 préconisé par le COI sont bien respectés. Les cinq programmes d’investissement retenus respectent, comme l’ensemble du texte, le cap fixé par le Premier ministre, qui souhaite engager résolument notre pays dans la transition écologique et favoriser une plus grande justice sociale et territoriale.
Je rappelle que nous n’abandonnons pas pour autant les grands projets. Mais nous avons fait le choix – et c’est un élément important du travail effectué par le Conseil d’orientation des infrastructures – de ne pas nous enfermer dans un choix binaire – « réaliser ou ne pas réaliser un grand projet » et d’adopter une approche par phases, en privilégiant celles qui contribuent à l’amélioration des transports du quotidien.
Je souligne également que l’examen du texte au Sénat, puis en commission à l’Assemblée a permis de respecter les grands équilibres de ce titre et la lisibilité de notre politique d’investissement dans les transports. Ainsi avons-nous évité de dresser une liste de projets, qui nuirait à cette lisibilité.
En ce qui concerne les ressources, nous sommes au rendez-vous puisqu’en 2019, le budget de l’AFITF augmente de 10 % et s’élève à 2,5 milliards. En outre, le projet comporte d’ores et déjà des avancées importantes, notamment la sanctuarisation des centimes de TICPE – qu’il avait été décidé d’affecter à l’agence suite à l’abandon de l’écotaxe. Nous avons également exprimé notre volonté de privilégier la taxation des modes de transport polluants au profit des modes de transport les plus propres en affectant le surplus de la « taxe Chirac » au transport ferroviaire notamment. Mais nous poursuivrons certainement ces débats dans la perspective de l’examen du projet de loi de finances.
Monsieur Aubert, nous avons opté pour un calendrier de réalisation progressive des infrastructures, mais le Gouvernement est prêt à examiner des modalités qui permettraient, grâce à des ressources locales, d’accélérer leur réalisation. À ce propos, j’appelle votre attention sur notre amendement no 3587, qui vise à habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnance pour créer des sociétés de projet dans des conditions qui restent à définir.
Par ailleurs, nous ne modifions pas le droit des concessions. Aucun article de ce texte ne revient sur la loi de 2015, qui dispose clairement qu’une concession ne peut être prolongée sans l’accord du Parlement. Au demeurant, le droit des concessions et les principes constitutionnels qui s’y appliquent sont très clairs : l’adossement, c’est-à-dire l’ajout de tronçons de routes nationales dans des concessions, qui était possible avant la directive « concessions », ne l’est plus aujourd’hui et ne le sera pas davantage demain. Deux amendements ont été adoptés. Le premier vise simplement à préciser qu’il est possible d’intégrer dans des concessions des sections à deux fois une voie, car celles-ci peuvent s’avérer plus pertinentes dans certains territoires que les sections à deux fois deux voies. Le second tend à préciser les modalités d’examen par le Conseil d’État des critères s’appliquant aux avenants au contrat de concession, sans qu’il s’agisse d’adossement. Ces critères sont, par exemple, ceux qui ont été retenus par le Conseil d’État pour l’examen des avenants au contrat de concession sur le programme d’investissement autoroutier, qui permettent essentiellement l’aménagement d’aires de covoiturage et le verdissement des autoroutes. Ces critères seront désormais inscrits dans la loi.
J’ajoute que nous sommes bien conscients de l’importance du Terrier de Bercy, dont il ne nous a pas échappé qu’il était indispensable non seulement à la qualité des transports en Île-de-France, mais aussi à la liaison Paris-Clermont et au TER Bourgogne-Franche-Comté. Je vous confirme, même si cela ne relève pas de la loi, que les études sont en cours et que les travaux pourront être inscrits dans le prochain contrat de plan.
J’ai également noté l’attention que vous portez aux trains de nuit. Vous aurez remarqué que, dans le rapport annexé, il est d’ores et déjà prévu que le Gouvernement élabore une stratégie en la matière. Je crois beaucoup à ce mode de transport. C’est pourquoi j’ai décidé de prolonger les contrats entre l’État et la SNCF portant sur les trains de nuit que nous exploitons et d’engager la rénovation des matériels roulants.
Enfin, c’est vrai, l’Ardèche n’est pas bien dotée en matière d’infrastructures. Mais l’alinéa 54 renvoie explicitement à la situation de ce département.
Je souhaiterais prendre la parole, monsieur le président ! Monsieur Lecoq, Mme la ministre a répondu aux orateurs inscrits sur l’article. Je vous propose donc d’intervenir lors de l’examen d’un amendement. Avec le temps programmé, nous devrions avoir le droit d’intervenir à tout moment ! La parole est à M. M’jid El Guerrab, pour soutenir l’amendement no 191. En Île-de-France comme dans d’autres régions, se déplacer de banlieue à banlieue, voire de la banlieue vers le centre-ville, relève du parcours du combattant. Les transports en commun existent mais leur fréquence laisse à désirer, ils sont souvent sous-dimensionnés et l’information en temps réel fait défaut. Ce déficit en matière d’infrastructures et d’accès à la mobilité est une double peine : non seulement les populations concernées sont marginalisées socialement et économiquement, mais leur mobilité est entravée par l’absence ou l’insuffisance d’infrastructures, qui est un nouveau frein au développement de ces zones.
Il est urgent de mettre fin au processus de ghettoïsation dont les habitants de ces quartiers sont victimes. En précisant que la priorité doit être donnée aux quartiers prioritaires de la politique de la ville – QPV –, cet amendement de M. Pupponi vise à résorber le processus de mise à l’écart dont souffrent ces quartiers.
La parole est à Mme Bérangère Abba, rapporteure de la commission du développement durable et de l’aménagement du territoire, pour donner l’avis de la commission. Cet amendement nous semble satisfait par le premier objectif, défini à l’alinéa 3 de l’article 1er A, lequel prévoit notamment de renforcer l’accessibilité, « au sein des agglomérations, aux quartiers prioritaires de la politique de la ville ». Par ailleurs, accentuer la priorité accordée à ces quartiers pourrait nous amener à éluder d’autres zones prioritaires ou présentant certaines spécificités, telles que les zones de revitalisation rurale. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable. Retirez-vous l’amendement, monsieur El Guerrab ? Non, je le maintiens. La parole est à M. Jean-Paul Lecoq. Monsieur le président, mon intervention ne porte pas sur l’amendement, mais vous n’avez pas accepté que je prenne la parole plus tôt alors que, dans le cadre du temps programmé, je devrais pouvoir intervenir à tout moment.
Madame la ministre, j’ai écouté attentivement votre réponse, mais je ne suis pas certain de l’avoir bien comprise. Nous sommes actuellement en discussion avec vos services afin de faire en sorte que les personnes vivant de chaque côté de l’estuaire de la Seine ne soient plus contraintes d’acquitter les péages du Pont de Normandie et du Pont de Tancarville, qui font tous deux partie de liaisons autoroutières – ils sont indispensables à la continuité des autoroutes.
L’une des solutions que nous avons imaginées consiste à rediscuter les contrats de concession avec les sociétés d’autoroutes et à inscrire ces ponts dans l’itinéraire global, de sorte que ceux qui vivent à moins de 15 kilomètres ne soient plus obligés de payer pour emprunter ces ponts. Ces péages pourraient ainsi être supprimés et répartis sur l’ensemble de la concession. Or votre réponse m’inquiète, car j’ai cru comprendre que cette solution pourrait ne plus être envisageable. Je souhaiterais donc que vous me rassuriez sur ce point, en me confirmant que les discussions en cours peuvent se poursuivre pour qu’au terme de la concession des ponts, celle des autoroutes soit réécrite afin d’intégrer ces ponts.
La parole est à M. Fabien Di Filippo. Cet amendement a une portée plus générique que ne l’a dit Mme la rapporteure. De fait, on insiste de plus en plus sur la fracture territoriale dont seraient victimes les quartiers. Or, aujourd’hui, la véritable fracture territoriale concerne les zones rurales, délaissées et enclavées. Ainsi, un rapport de France Stratégie – qui est tout de même rattaché de très près au gouvernement auquel vous appartenez, madame la ministre – nous apprenait récemment qu’un enfant issu d’une zone rurale a 15 % de chances en moins de connaître une ascension sociale par rapport à la situation de ses parents qu’un enfant des quartiers. La paupérisation concerne donc bien la ruralité. C’est ce dont vous n’avez pas pris conscience au début de la législature, lorsque vous avez réservé le dédoublement des classes de CP aux seuls réseaux d’éducation prioritaire, et c’est ce dont vous ne prenez toujours pas conscience, bien que ce soit un fait sociologique avéré.
Les espaces qui se paupérisent, qui sont le plus éloignés de l’emploi et des centres d’études et sur lesquels repose en partie l’avenir du pays, les espaces où l’équité sociale et territoriale est en jeu se trouvent dans la ruralité !
La parole est à M. Michel Castellani. Je voudrais soutenir cet amendement qui a le mérite de souligner le rôle décisif des infrastructures de transports dans l’aménagement d’un territoire, pour en améliorer l’accessibilité et en renforcer l’attractivité. La situation sociale des territoires et la qualité de vie de leurs habitants en dépendent. Il met également en évidence la grande diversité de la France et la situation particulière des quartiers périphériques et des zones rurales. Du reste, M. Pupponi est un spécialiste de ces questions.
Une politique des transports ne se résume donc pas à la construction d’une voie ferrée ou d’une route. Elle doit tenir compte des effets très importants qu’elle a sur la vie sociale, culturelle et économique.
La parole est à M. Paul-André Colombani. Les banlieues souffrent de ghettoïsation, mais l’assignation à résidence du fait du manque d’infrastructures de transports est un fléau que connaissent aussi les régions de montagne, les territoires insulaires et tous ceux qui ne sont pas reliés au réseau ferré ou autoroutier. Dans ce contexte, l’amendement de M. Pupponi revêt une particulière importance. La parole est à M. M’jid El Guerrab. Monsieur di Filippo, n’opposons pas les quartiers aux territoires ruraux. Ce n’était pas l’intention, du reste, de M. Pupponi. Cet amendement est à envisager au travers du prisme parisien. Il est aberrant que certains territoires de la région parisienne ne soient pas connectés entre eux alors que seuls quelques kilomètres les séparent. Il n’est pas rare de se retrouver dans des zones non desservies par les transports en commun, où l’on ne soit pas même informé des moyens de se rendre d’un lieu à l’autre.
Ainsi, il ne faut pas moins d’une heure et demie pour aller à Bondy depuis Paris alors qu’il s’agit de la proche banlieue. Je le dis d’autant plus aisément que je suis originaire d’un territoire rural : je suis né et j’ai grandi à Aurillac – je vois d’ailleurs que les deux députés du Cantal sont présents aujourd’hui. Je connais donc les difficultés liées à l’enclavement. Les territoires ruraux sont logés à la même enseigne que les banlieues mais il demeure que l’on ne peut continuer à mettre plusieurs heures pour venir à Paris quand on n’habite qu’à quelques kilomètres de son centre. Pour toutes ces raisons, je défendrai avec force cet amendement. Je vous prie de m’en excuser, madame la rapporteure, mais je ne le retirerai pas.
La parole est à M. Hubert Wulfranc. Il n’est pas nécessaire, en effet d’opposer les territoires entre eux. Qu’ils soient urbains ou ruraux, ils peuvent être isolés de la même manière, coupés des autres territoires, et leurs habitants privés de mobilité du fait de l’impossibilité d’accéder aux transports.
Madame la ministre, l’Agence nationale de la cohésion des territoires, portée sur les fonts baptismaux il y a quelques semaines, aura pour mission de soutenir les collectivités territoriales dans la définition et la mise en œuvre de leurs projets, en particulier pour favoriser les mobilités. Comment pourrait-elle être intéressée à l’instruction de tels dossiers et à leur financement, y compris sur le budget de votre ministère, afin de soutenir des initiatives de désenclavement, aussi bien dans des quartiers prioritaires de la politique de la ville que dans les territoires ruraux isolés ?
(L’amendement no 191 n’est pas adopté.) L’amendement no 3304 de M. Gabriel Serville est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Amendement satisfait par l’alinéa 3 dans lequel sont cités les territoires ultramarins. Je vous invite à le retirer sinon avis défavorable.
(L’amendement no 3304, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) L’amendement no 1885 de Mme Emmanuelle Ménard est défendu.
(L’amendement no 1885, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements, nos 175 et 1272, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 175.
Cet amendement de M. Saddier tend à prendre en compte précisément les difficultés d’accessibilité dans les zones rurales. La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l’amendement no 1272. Cet amendement de M. Vatin tend à rétablir la version de l’article adoptée au Sénat. On peut aisément deviner que derrière les vocables de « villes moyennes dont il faut renforcer l’accessibilité » ou de « territoires mal connectés aux métropoles » se cachent les territoires peu denses et les territoires ruraux mais il vaut toujours mieux être explicite. Quel est l’avis de la commission ? Ces amendements sont satisfaits par la rédaction de l’article 1er A et du rapport annexé. Quel est l’avis du Gouvernement ? Ils sont en effet largement satisfaits du fait de la mention explicite de l’objectif de désenclavement dans la priorité no 3 du rapport annexé, de la rédaction de l’alinéa 4, qui évoque l’amélioration des liaisons « entre les territoires ruraux ou périurbains et les pôles urbains », et de l’excellent travail réalisé en commission.
(Les amendements nos 175 et 1272, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Jean-Yves Bony, pour soutenir l’amendement no 746. La rédaction de l’alinéa 3 de cet article est extrêmement réductrice au regard de la diversité des difficultés que peuvent rencontrer les territoires. Ainsi, le problème, qui ne concerne pas seulement les villes moyennes, ne se résume pas à l’accès aux seules grandes métropoles. Il est au contraire celui de la connexion de tous les territoires avec les réseaux structurants, routiers ou ferroviaires notamment. Quel est l’avis de la commission ? Satisfait. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis.
(L’amendement no 746 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 174. Les choses doivent être nommées et nous souffrons aujourd’hui des effets de la novlangue puisque nous ne savons plus désigner clairement quoi que ce soit. En particulier, les territoires auxquels il est difficile d’accéder ont besoin d’une reconnaissance particulière dans la loi.
M. Saddier a donc déposé deux amendements en ce sens, le premier visant à ce que soient prises en considération les zones frontalières – notamment le nord de la Haute-Savoie qui rencontre des difficultés particulières, et le second, no 173, au sujet des zones de montagne, qui font l’objet d’un texte particulier, et dont la spécificité en matière d’accessibilité, différente de celle des zones rurales par exemple, doit être reconnue.
Quel est l’avis de la commission ? Cet amendement est satisfait mais je comprends votre souci de faire valoir les spécificités de ces territoires.
Un amendement no 2212 au rapport annexé tendra à préciser que cette programmation tient compte des enjeux spécifiques en matière d’accessibilité des territoires de montagne, insulaires, ultramarins et frontaliers, en leur accordant une attention particulière tant pour ce qui est de l’entretien que du développement des infrastructures.
Il nous a semblé important de nous faire l’écho, par cet engagement, des spécificités territoriales.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis.
(L’amendement no 174 est retiré.) Je suis saisi de deux amendements, nos 173 et 654, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 173.
Je le retire.

M. le président