XVe législature
Session ordinaire de 2019-2020

Séance du mardi 19 novembre 2019

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique (nos 2357, 2401).
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 1277 à l’article 4.
Je suis saisie de trois amendements, nos 1277, 1276 et 1400, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1276 et 1400 sont identiques.
La parole est à M. Vincent Bru, qui peut soutenir en même temps ses deux amendements nos 1277 et 1276.
Les conférences des maires devront désormais être créées dans tous les établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – à fiscalité propre. L’amendement no 1277 vise à ce que les avis et les vœux qu’elles émettront soient adressés à l’ensemble des conseillers municipaux des communes membres de l’EPCI. L’amendement no 1276 impose la même obligation s’agissant des seuls avis.
Conformément au sens général du projet de loi, ces amendements permettent de réaffirmer la place des maires au sein des intercommunalités. Les opinions des maires doivent être connues par tous les conseillers municipaux des communes membres de l’EPCI afin que les votes et délibérations puissent avoir lieu en connaissance de cause.
La parole est à M. Sacha Houlié, pour soutenir l’amendement no 1400. Il est identique à l’amendement no 1276. Il vise à ce que les avis de la conférence des maires soient transmis selon les mêmes modalités que celles que nous avons adoptées à l’alinéa 3. Je vous invite à voter en faveur des amendements no 1276 et 1400 plutôt que de l’amendement no 1277. La parole est à M. Bruno Questel, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission sur les amendements en discussion commune. M. Houlié vient, en quelque sorte, de faire mon travail. (Sourires.) Étendre aux vœux, au-delà des seuls avis, l’obligation de transmission à tous les conseillers municipaux des communes de l’EPCI amènerait à transmettre des éléments dont l’objet peut être totalement étranger aux prérogatives des collectivités locales et des intercommunalités.
En conséquence, je suis défavorable à l’amendement no 1277, dont je demande le retrait, et favorable aux amendements identiques nos 1276 et 1400.
La parole est à M. le ministre chargé des collectivités territoriales, pour donner l’avis du Gouvernement. À mon tour de constater que mon travail est déjà fait, grâce à MM Houlié et Questel… Je demande également le retrait de l’amendement no 1277 au profit des amendements nos 1276 et 1400.
(L’amendement no 1277 est retiré.)
(Les amendements identiques nos 1276 et 1400 sont adoptés.) La parole est à M. Arnaud Viala, pour soutenir l’amendement no 487. Parce que nous ne sommes pas suffisamment innovants dans notre volonté de simplifier et de moderniser la diffusion de l’information des EPCI vers les conseillers municipaux, j’ai déposé des amendements de suppression de plusieurs alinéas de l’article 4. Celui-là vise l’alinéa 4.
Je l’ai dit lors des travaux de la commission des lois, introduire l’automaticité de la transmission d’informations des EPCI vers les conseillers municipaux en indiquant le détail des modalités retenues – papier, informatique ou les deux – me paraît contraire à l’esprit du projet de loi.
Il me semblerait en revanche justifié que l’on permette de recourir à des dispositifs modernes déjà utilisés dans de nombreuses collectivités et établissements publics afin que chaque élu qui le souhaite puisse aller chercher l’information dont il a besoin. Je soutiendrai dans quelques instants un amendement en ce sens, qui correspond davantage que le présent amendement à nos échanges en commission des lois.
Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Nous avons déjà eu ce débat à la fin de la séance de l’après-midi. Quel est l’avis du Gouvernement ? Cette fois, c’est M. Viala qui a fait une partie de mon travail ! Je demande le retrait de son amendement, sachant que nous examinerons dans un instant l’amendement no 1402 de M. Sacha Houlié, qui permet d’aller dans le même sens sans supprimer l’intégralité de l’alinéa 4. À défaut d’un retrait, mon avis sera défavorable.
(L’amendement no 487 est retiré.) Je suis saisie de deux amendements, nos 272 et 664, pouvant être soumis à une discussion commune.
L’amendement no 272 est défendu.
La parole reste à M. Arnaud Viala, pour soutenir l’amendement no 664.
Comme l’amendement précédent – qui est un amendement du groupe Les Républicains –, il vise non plus à supprimer l’alinéa 4, mais à en modifier la rédaction afin que l’EPCI puisse mettre les documents mentionnés à l’alinéa 3 à disposition des conseillers municipaux sur une plateforme sécurisée. Nous préférons un système innovant et moderne à la rigidité d’un mode de diffusion déterminé par avance. Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements ? Je suis défavorable à l’amendement no 272 et favorable à l’amendement no 664, qui vient ajouter une modalité pratique intelligente au dispositif proposé. Quel est l’avis du Gouvernement ? Les deux amendements sont intéressants. Je me range à l’avis du rapporteur pour une meilleure rédaction de l’article 4.
(L’amendement no 272 n’est pas adopté.)
(L’amendement no 664 est adopté à l’unanimité ; en conséquence, les amendements nos 131 et 537 tombent.) La parole est à Mme Fannette Charvier, pour soutenir l’amendement no 1402. Afin de clarifier et de simplifier le dispositif, il vise, tout en conservant l’obligation d’information relative aux délibérations de l’EPCI, à ce que ce dernier reste seul responsable de l’envoi des documents à tous les conseillers municipaux des communes membres.
(L’amendement no 1402, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté ; en conséquence, les amendements nos 273, 792, 1385 et 886 tombent.) L’amendement no 696 de M. Bruno Questel est rédactionnel.
(L’amendement no 696, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.) La parole est à M. Arnaud Viala, pour soutenir l’amendement no 488. Je le retire, puisque mon amendement no 664 a été adopté.
(L’amendement no 488 est retiré.) La parole est à M. Sébastien Huyghe, pour soutenir l’amendement no 1485. À l’heure où l’on souhaite rapprocher les EPCI des citoyens, il peut sembler utile d’étendre à tous les électeurs des communes concernées la communication des documents mentionnés à l’article 4. Il est toujours utile que les citoyens s’intéressent au fonctionnement de notre démocratie.
Monsieur le ministre, en donnant votre avis sur un amendement sensiblement équivalent que je soutenais en commission, vous m’avez dit qu’il fallait en retravailler la rédaction pour la séance, ce que j’ai fait. Vous m’avez également dit que vos services prendraient contact avec moi, mais comme je n’ai rien vu venir, je me suis permis de travailler seul à la présente rédaction. Elle devrait mieux convenir puisqu’il est proposé de mettre les documents à disposition de manière dématérialisée, ce que vous sembliez approuver.
Quel est l’avis de la commission ? À défaut d’un retrait, mon avis sera défavorable. L’amendement est satisfait, puisque les électeurs ont accès à tous les documents administratifs qu’ils souhaitent consulter en mairie ou auprès de l’EPCI. Cette consultation ne peut pas leur être refusée : la leur permettre est déjà une obligation légale. Quel est l’avis du Gouvernement ? Avis défavorable. La parole est à M. Sébastien Huyghe. Vos réponses ne correspondent pas à la teneur des échanges qui furent les nôtres en commission. Monsieur le ministre, vous sembliez favorable à la mesure – à vrai dire, vous y étiez favorable, il suffit pour le vérifier de lire le compte rendu de la réunion. Je suis un peu surpris de ce changement de pied. On m’avait assuré que si la formule était plus adaptée à la dématérialisation des documents, le Gouvernement ne verrait pas d’inconvénient à ce que l’on rende obligatoire la mise à disposition de tous les documents à l’intention de nos concitoyens. La parole est à M. le ministre. En commission, j’ai dit que j’étais ouvert à l’idée d’un amendement dont la rédaction serait modifiée, mais cette modification ne s’est pas produite. Votre amendement vise à ce que le stock de documents que l’EPCI doit transmettre à l’ensemble des conseillers municipaux des communes membres soit consultable par n’importe quel citoyen. J’entends ce que vous dites, mais est-ce bien ce que nous devons faire dans un texte visant à simplifier la vie des élus locaux ? Ce n’est pas cela ! C’est pourtant bien ce qui est écrit dans votre amendement : « Les documents mentionnés sont consultables en mairie par tout électeur de la commune ou mis à disposition de manière dématérialisée. » Je ne vois pas un grand changement par rapport à l’amendement que vous défendiez en commission.
Vous pouvez défendre cette position. Si tel était le cas, je respecterais votre conviction, mais faut-il vraiment que chaque convocation, chaque ordre du jour, chaque rapport – il faudrait citer l’ensemble des documents visés à l’article 4 – fasse l’objet d’une communication aux habitants dans chaque mairie de chaque commune de l’intercommunalité ? Reconnaissez qu’il pourrait s’agir de l’une de ces mesures contraignantes dont les membres de votre groupe ne voulaient pas entendre parler tout à l’heure ! Je maintiens donc mon avis défavorable ; croyez bien que je le regrette.
Il pourrait y avoir des nuances ! Peut-être aurait-il fallu mieux encadrer les choses en se limitant à la mise à disposition de manière dématérialisée ou en réservant à l’EPCI l’obligation de diffusion. Mais on ne peut pas demander à toutes les communes de diffuser les documents pour le compte de leur EPCI ! La parole est à M. Sébastien Jumel. Les amendements un peu techniques que nous examinons depuis un moment visent à réfléchir à la manière de construire des liens entre les intercommunalités et les habitants. Ils posent une question de fond : l’absence de légitimité politique des intercommunalités. Vous le savez mieux que quiconque, monsieur le ministre, on a construit les intercommunalités en s’asseyant sur les conseils municipaux et, plus généralement, sur les habitants eux-mêmes.
L’élaboration des SDCI – schémas départementaux de coopération intercommunale – a fait l’objet de trocs de nature politicienne. L’objectif, que j’ai décrit cet après-midi en posant une question au Gouvernement, était de construire des intercommunalités XXL, au nom d’un projet politique assez limpide dont nous devrions parler aujourd’hui : transformer les régions en Länder dans lesquels on aura éloigné les services de l’État des territoires de vie ; créer des intercommunalités mastodontes et technocratiques, au sein desquelles même les conseillers municipaux membres de l’assemblée délibérante auront du mal à savoir sur quoi ils délibèrent.
C’est de la loi NOTRe que vous parlez ! En fait, c’est à ce sujet que vous interpellent les collègues qui veulent resserrer les liens entre intercommunalités et citoyens et améliorer l’information de ces derniers. Vous avez construit un fonctionnement technocratique qui vise à dessaisir les élus locaux, les communes et les maires de ce qui se passe sur leur territoire. Il faut réintroduire de la démocratie et de la transparence dans tout ça. Il faut faire en sorte que les habitants s’approprient ces enjeux, qu’il s’agisse des problèmes de transport, d’eau, d’assainissement, d’environnement ou d’aménagement du territoire. C’est de cela que nous parlons ce soir ! La parole est à M. Sébastien Huyghe. Non, monsieur le ministre, ce n’est pas ce que nous avons dit en commission ! Je vous renvoie au compte rendu des travaux de la commission et à l’amendement que j’avais soutenu, puis retiré à votre demande afin de le retravailler pour la séance publique. Il s’agissait que chaque citoyen qui le demande puisse recevoir par mail une copie des convocations, projets de délibération et autres documents issus de l’EPCI. Vous m’aviez répondu que l’on pouvait mettre en place une procédure beaucoup plus légère puisque chaque collectivité dispose d’un site internet qui permet au citoyen de consulter des documents.
Permettre cette consultation n’alourdit donc pas le dispositif mais, comme l’a souligné M. Jumel, contribue à rapprocher de l’EPCI le citoyen. Au moment où l’intercommunalité acquiert toujours plus de compétences et prend d’autant plus de décisions qui affectent le quotidien de ce dernier, cette transparence est plus nécessaire que jamais.
La parole est à M. le ministre. Je vous l’avoue, monsieur Huyghe, j’ai du mal à vous suivre. Nombre des amendements déposés par votre groupe visaient à s’assurer qu’aucune obligation ne serait imposée aux EPCI. Je ne reprendrai pas le débat que nous avons eu hier sur le pacte de gouvernance et la conférence des maires : vous connaissez mes convictions et, par conséquent, la position du Gouvernement.
Ainsi, votre collègue M. Viala vient de défendre, avec sincérité et talent, plusieurs amendements nous engageant à ne pas créer de contraintes supplémentaires s’agissant de la circulation des documents au sein de l’EPCI, qui doit rester libre.
Oh oui ! Nous sommes quelques-uns à avoir soutenu qu’il fallait néanmoins prévoir une base légale garantissant que les conseillers municipaux seraient suffisamment informés, c’est-à-dire autant que les conseillers communautaires. C’était notamment – pardonnez-moi de le souligner, monsieur Jumel – le point de vue des députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine ; je vous rassure, ainsi que cela a été annoncé en fin de séance de l’après-midi, votre demande en ce sens sera satisfaite – le président Chassaigne a d’ailleurs témoigné de sa vigilance à cet égard dans son intervention sur l’article – par voie d’amendement.
Que le conseiller municipal de la plus petite commune rurale dispose des mêmes informations que le conseiller communautaire de la commune la plus importante constitue déjà en soi une petite révolution dans l’organisation entre les communes et l’intercommunalité.
Mais votre amendement est différent, monsieur Huyghe, puisqu’il tend à ce que la commune s’assure de la publicité des documents de l’EPCI.
De l’accessibilité ! De l’accessibilité, soit. Votre circonscription est relativement dense mais, de mémoire, elle compte quelques communes rurales. Or l’on voit bien, dans ce contexte, à quoi aboutirait une telle disposition.
J’ajoute à l’attention des députés du groupe LR, par cohérence avec ce que je disais à la fin de la précédente séance, qu’il s’agirait de rendre publics des documents quasi préparatoires. Les projets de délibérations à inscrire à l’ordre du jour du conseil communautaire font l’objet de documents certes publics, mais avant tout destinés aux élus. Demander à une mairie rurale de rendre accessibles des documents de l’EPCI encore au stade préparatoire me paraît délicat.
Je tenais à m’expliquer sur mon avis défavorable : je ne veux pas que l’on dise que le Gouvernement a manqué à sa parole. Je m’étais engagé, en commission, à examiner cet amendement si sa rédaction était revue. Elle ne l’a pas été avec mes collaborateurs, mais c’est votre droit, monsieur Huyghe. Reste que l’amendement dit la même chose qu’en commission et qu’il est contradictoire avec les positions de votre groupe.
Je demande la parole, madame la présidente ! De nombreux échanges ont déjà eu lieu, monsieur le député. Mais il y a une contradiction entre l’avis de la commission et celui du ministre : le rapporteur, lui, a dit que l’amendement était satisfait ! Ce sont les députés qui décident, monsieur le député !
(L’amendement no 1485 n’est pas adopté.)
(L’article 4, amendé, est adopté.)
La parole est à M. Rémy Rebeyrotte, pour soutenir l’amendement no 1541. Je l’ai annoncé à la fin de la séance précédente : il s’agit de rendre obligatoire, à chaque séance du conseil municipal, un point d’actualité sur la vie communautaire. Il pourrait être très court s’il n’y a rien de particulier à signaler, ou plus long, selon les cas ; il permettrait en tout cas de faire circuler l’information et, peut-être, d’inciter les élus à s’informer par eux-mêmes sur le portail de l’EPCI et à lire les documents qui leur sont envoyés, pour préparer le débat. Comme si le maire ne le faisait pas déjà ! Quel est l’avis de la commission ? Il n’est pas rare qu’un point sur l’intercommunalité soit fait à chaque conseil municipal, soit par le maire, soit par un adjoint qui a reçu délégation de compétence. Bien sûr ! Je l’ai observé pendant quinze ans et cela marchait très bien. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Cela peut aller de soi, en effet. En outre, les délibérations inscrites à l’ordre du jour du conseil communautaire permettent de faire circuler la parole – comme, d’ailleurs, chaque amendement dans cet hémicycle !
Demande de retrait.
Très bien ! Pour une fois, je suis d’accord ! Pas de loi bavarde ! C’est un amendement déconnecté ! On voit que son auteur n’a jamais siégé dans un conseil municipal ! Pas dans les mêmes que vous !
(L’amendement no 1541 est retiré.) L’amendement no 30 de Mme Valérie Bazin-Malgras est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Il serait ennuyeux d’étendre les règles relatives à l’information des conseillers communautaires aux EPCI ne comportant pas une commune d’au moins 3 500 habitants, comme le propose l’amendement.
Avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Pour les raisons précédemment évoquées, avis défavorable.
(L’amendement no 30 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Aurore Bergé, pour soutenir l’amendement no 817. Il vise à donner plus de temps aux nouveaux élus des EPCI pour préparer leur représentation et leurs projets intercommunaux, en portant de quatre à six semaines après l’élection des maires le délai au terme duquel se réunit l’organe délibérant de l’EPCI. Quel est l’avis de la commission ? Le délai de quatre semaines est tout à fait suffisant dans la pratique. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Madame la députée, je comprends votre volonté de laisser davantage de temps aux élus, mais je n’en ai jamais ressenti le besoin en tant qu’élu local, et les nombreuses associations d’élus que j’ai consultées dans le cadre de la préparation du projet de loi ne m’ont pas non plus fait part d’une telle demande. L’échéance du vendredi de la quatrième semaine est généralement considérée comme satisfaisante. Demande de retrait ou avis défavorable.
(L’amendement no 817 est retiré.) La parole est de nouveau à Mme Aurore Bergé, pour soutenir l’amendement no 820. Il a pour objectif d’accroître la légitimité des EPCI, dont les citoyens peuvent avoir l’impression qu’ils sont peu représentatifs. À cette fin, les candidats à la fonction exécutive doivent pouvoir développer un projet à l’échelle des EPCI et le présenter aux élus afin de renforcer l’identité territoriale des EPCI. Quel est l’avis de la commission ? Il est inutile d’inscrire cela dans la loi. Quelle que soit la taille de l’intercommunalité, les candidats potentiels à sa présidence sont connus ; les élus ont discuté entre eux ; la transparence est totale. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? J’ai déjà expliqué notre philosophie en commission : nous sommes par principe hostiles à toute mesure qui ferait peser sur les élus locaux des obligations que, d’ailleurs, les élus nationaux ne s’imposent pas à eux-mêmes. Les obliger à prononcer une profession de foi, à présenter un projet électoral, est pour le moins curieux. Je ne suis pas d’accord. Ce serait comme rendre obligatoires les réunions de compte rendu de mandat pour les députés. Une telle mesure est à la fois contraire aux principes démocratiques et, à mon avis, à la Constitution, qui consacre le principe de libre administration des collectivités territoriales.
Dans notre démocratie, si un député souhaite envoyer une page blanche en guise de profession de foi, il en a le droit. Il n’existe pas de contrôle dans ce domaine.
Vous le savez d’expérience : c’est ce que vous avez fait ! Vous avez simplement ajouté la photo du Président de la République ! Monsieur Jumel, soyez respectueux des députés de la majorité qui ont été élus sur un programme électoral. Il est vrai que certains ici font la même profession de foi depuis maintenant plus de soixante ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.) Respectez les élus vous-même ! Le principe que nous devons retenir, s’agissant des listes communautaires, c’est que nous ne pouvons pas imposer de contrôle préalable sur le contenu des documents électoraux. Imposer au sein des EPCI une campagne électorale, une propagande électorale, en somme, n’est donc pas opportun. Ce serait de l’ingérence ! Cet amendement est en réalité un amendement d’appel, qui nous invite à favoriser le débat parmi les élus locaux et les élus communautaires, mais l’esprit de ce texte n’est pas d’imposer une obligation nouvelle. Très bien ! La parole est à M. Arnaud Viala. L’amendement dévoie l’objectif initial du projet de loi, qui est de redonner aux élus et aux communes du poids dans les EPCI. Considérer que les candidats à la présidence de l’EPCI peuvent, avant même d’accéder à cette fonction, définir un projet pour le territoire, sans avoir consulté les élus – ils ne connaissent pas le corps électoral qui va les désigner au moment où ils se portent candidats, à la suite des élections municipales –, est proprement aberrant. Je ne comprends pas, en vérité, le sens de cet amendement. La parole est à M. Erwan Balanant. À moi, il ne me paraît pas totalement inintéressant. Je le trouve même plutôt pertinent ! (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)
Comme vous, j’ai été élu local, mesdames et messieurs les députés du groupe LR ! Nous sommes nombreux ici à l’avoir été et nous en avons assez de vos leçons !
On n’a rien dit ! Poursuivez, monsieur Balanant, je vous en prie. Comme j’ai eu l’occasion de le dire lors de la discussion d’un autre amendement, les citoyens ne connaissent pas le programme intercommunal pour la simple et bonne raison que la plupart du temps, il n’y en a pas ! Le sujet est pourtant important et nous devons y réfléchir.
L’amendement propose une mesure intermédiaire afin de permettre aux conseillers municipaux et aux futurs conseillers communautaires de disposer du projet défendu par les candidats à la présidence de l’EPCI. Car, en la matière, rien n’est automatique et des rapports de force s’établissent en fonction des élections.
À titre personnel, je soutiendrai l’amendement.
La parole est à M. Sébastien Jumel. J’ai dit tout à l’heure qu’il était normal qu’une majorité sans cap soutienne la liberté de ne pas avoir de programme, mais c’était pour plaisanter ! Ah ! Sur le fond, je partage l’avis du ministre : cet amendement est dangereux, et pour plusieurs raisons.
Je m’étonne des propos de M. Balanant, qui n’a visiblement pas lu le texte.
Je ne t’ai pas beaucoup vu en commission, Sébastien ! Tout d’abord, le projet de loi prévoit l’actualisation du projet de territoire dans les six mois qui suivent le renouvellement des conseils intercommunaux et l’établissement d’un pacte de gouvernance. Les nouvelles intercommunalités ont donc l’obligation de se mettre d’accord sur un projet de territoire.
Ensuite, l’amendement consacre le règne de la supracommunalité en actant la domination des exécutifs intercommunaux sur les communes. Une intercommunalité est l’addition, à l’échelle d’un territoire, des projets des différentes communes. Laisser passer cet amendement, au beau milieu du congrès des maires, reviendrait à dire aux communes que vous n’accordez aucune valeur au projet sur lequel elles ont été élues ! Ce serait profondément dangereux et contraire à l’esprit même de l’intercommunalité.
Enfin, comme cela a été dit, l’amendement est contraire au principe de libre administration des collectivités territoriales.
Pour toutes ces raisons, les députés du groupe GDR s’y opposeront lors du vote. Dans cette démocratie du nouveau monde, nous avons l’habitude que l’on nous dise ce qu’il faut faire ou ne pas faire, mais cela ne peut s’appliquer aux intercommunalités !
La parole est à Mme Aurore Bergé. Dans la démocratie du nouveau monde, nous sommes simplement à l’écoute des élus locaux et des maires des communes membres d’EPCI ! Ceux que j’ai rencontrés regrettaient, tout comme nos concitoyens, le manque de lisibilité de l’action de certains EPCI, dont ils ne connaissaient ni les attributions, ni les compétences, ni les projets de territoire. Dans une collectivité territoriale que je connais bien, à quelques mois des élections municipales, aucun projet de territoire n’a encore été porté à la connaissance des citoyens.
C’est bien pourquoi cet amendement propose uniquement que les élus qui veulent se porter candidats à la présidence de l’EPCI transmettent un projet. Ainsi, l’EPCI serait mieux incarné et son action plus lisible pour nos concitoyens. L’enjeu de ce texte étant de renforcer la place des élus locaux, accroître la lisibilité de leur action en tant que membres de l’EPCI et développer plus de démocratie au sein de celui-ci ne me paraît pas complètement superfétatoire.
(L’amendement no 820 n’est pas adopté.) La parole est à M. Jean-Félix Acquaviva, pour soutenir l’amendement no 1062. L’article L. 5211-39 du code général des collectivités territoriales dispose que « les représentants de la commune [au sein de l’organe délibérant de l’EPCI] rendent compte au moins deux fois par an au conseil municipal de l’activité de l’établissement public de coopération intercommunale ». En cohérence avec l’un de nos amendements qui a été adopté par la commission des lois, nous proposons qu’ils en rendent compte à chaque réunion du conseil municipal au lieu de deux fois par an minimum, afin de faire reculer un tant soit peu le sentiment de dépossession de leurs prérogatives qu’éprouvent les élus communaux. Il semble en effet nécessaire d’instaurer le plus de transparence possible quant aux activités de l’intercommunalité. Quel est l’avis de la commission ? Rien n’interdit aujourd’hui aux représentants de la commune au sein de l’EPCI de rendre compte à leur conseil municipal plus de deux fois par an, voire après chaque réunion de l’organe délibérant de l’EPCI. Mais l’imposer serait une contrainte excessive et un facteur de blocage. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je comprends l’esprit de l’amendement, mais rendre obligatoire à chaque réunion du conseil municipal de faire le point sur l’intercommunalité me paraît très lourd. Demande de retrait. À défaut, l’avis serait défavorable.
(L’amendement no 1062 n’est pas adopté.)
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l’amendement no 856. L’article L. 2121-10 du code général des collectivités territoriales prévoit que l’envoi par courrier papier est, sauf demande expresse de l’intéressé, la seule façon de transmettre les convocations. À l’heure de la transition numérique et de la dématérialisation de la plupart des documents administratifs, nos concitoyens sont familiarisés avec les usages numériques. Le présent amendement propose donc que l’envoi dématérialisé ait un caractère officiel tout en maintenant l’obligation de continuer à envoyer une convocation papier. Quel est l’avis de la commission ? Madame Brulebois, une obligation plus une obligation, cela fait deux obligations. J’émets donc un avis défavorable car votre amendement propose de cumuler deux modalités d’envoi obligatoires. C’est inutile et cela compliquerait le dispositif actuel, qui fonctionne très bien. Mais quand le courrier n’arrive pas ? Quel est l’avis du Gouvernement ? Longtemps le principe a été le papier, le numérique restant l’exception ; le Gouvernement considère que l’on peut commencer à inverser la donne, le numérique devenant le principe et le papier l’exception. Mais il ne s’agit certainement pas d’interdire un mode d’envoi par respect, là aussi, pour les libertés locales. Nous faisons confiance aux élus locaux de l’EPCI pour déterminer si les caractéristiques du territoire de l’intercommunalité permettent de transmettre par voie numérique le cas échéant. De ce point de vue, la rédaction de l’article après son examen par votre commission va dans le bon sens et est équilibrée. Demande de retrait ou, sinon, avis défavorable. Madame Brulebois ?… Je vais le retirer, mais je voulais attirer l’attention sur le fait que l’envoi de convocations papier peut poser des problèmes quand il y a des difficultés de distribution du courrier.
(L’amendement no 856 est retiré.)
(L’article 4 bis A est adopté.)
La parole est à M. Bruno Questel, pour soutenir l’amendement no 1228. Cet amendement inverse la logique de la rédaction de l’alinéa 4 afin de ne pas instaurer ce qui ressemblerait à une tutelle de la métropole de Lyon sur les communes membres. Il prévoit à cet effet qu’il appartiendra à cette métropole de décider de transmettre aux conseillers municipaux les convocations et les rapports sur les affaires devant être soumises aux conseillers métropolitains. Quel est l’avis du Gouvernement ? Cet amendement a le mérite de rendre constitutionnelle la disposition adoptée au Sénat. Avis favorable.
(L’amendement no 1228 est adopté.)
(L’article 4 bis, amendé, est adopté.)
La parole est à M. Raphaël Schellenberger. Cet article prévoit que la réunion du conseil communautaire puisse se tenir par téléconférence.
Je comprends bien la nécessité d’apporter une solution à des élus de territoires ruraux inclus dans une intercommunalité XXL et qui ont des difficultés à être présents à ces réunions, sachant qu’il leur faut parfois plusieurs heures de trajet. Mais je ne peux pas m’empêcher de penser qu’on est en train de traiter le symptôme plutôt que le problème. Les intercommunalités sont devenues trop grandes et ne correspondent plus à des réalités territoriales, à des bassins de vie, à des territoires vécus par les habitants et donc par les élus.
Si faciliter l’accès de ces derniers aux réunions par la téléconférence peut avoir un intérêt, cela signifie tout de même casser les modalités de construction de la délibération qui prévalaient jusqu’alors et la façon de concevoir l’élaboration de l’intérêt général en France. Au-delà de l’expression d’une somme d’intérêts particuliers, l’intérêt général naît de nos échanges physiques à l’Assemblée nationale, et il en est de même dans une communauté locale. Cette nouvelle disposition va ainsi porter une atteinte fondamentale à l’une des composantes de notre système démocratique, de notre conception de l’intérêt général.
S’il y a des raisons techniques objectives à autoriser la téléconférence, il y a aussi des raisons de philosophie politique qui devraient nous amener à y regarder à deux fois.
(M. Hubert Wulfranc applaudit.) Très bien ! La parole est à M. Sacha Houlié. C’est l’intervention de M. Schellenberger qui m’a incité à m’inscrire sur cet article. Je suis une source d’inspiration pour vous ! (Sourires.) Exactement, mon cher collègue. (Sourires.) Je rappelle que l’article 4 ter a été introduit en commission pour organiser la téléconférence dans les conseils intercommunaux. On observera que si le nouveau dispositif est dans cet article réservé aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération, je proposerai par voie d’amendement de l’étendre aux communautés urbaines et aux métropoles pour que l’ensemble des intercommunalités soient concernées.
Vous vous opposez à cet article, monsieur Schellenberger, au motif que le périmètre des intercommunalités aurait trop grossi par l’effet des fusions consécutives à la loi NOTRe – loi portant nouvelle organisation territoriale de la République – de 2015. Mais il ne traite pas de ce sujet : ce sont les articles 9, 10 et 11 qui permettront de faire évoluer ce périmètre, soit par le rattachement d’une commune à un autre EPCI, soit par la scission de l’EPCI, mais avec un garde-fou : en présenter préalablement les conséquences financières – un amendement proposera alors d’en présenter aussi les conséquences sociales.
La parole est à M. Sébastien Jumel. Notre collègue de droite a raison. La droite a souvent raison ! On essaie dans cet article de trouver une solution technique – la numérisation – à une question politique. Le faible taux de participation aux réunions intercommunales, au point que, régulièrement, le quorum n’est pas atteint – de même dans les conseils municipaux des communes nouvelles –,… C’est vrai ! …ne tient pas au fait qu’il faille prendre sa voiture pour s’y rendre, mais à ce que les élus ont le sentiment que les décisions se prennent ailleurs, que l’on a dévitalisé leur collectivité, dessaisi l’instance de proximité de ce qui est utile aux habitants – l’urbanisme, les services publics de proximité, la capacité à délivrer des cartes d’identité… – et que les maires ont été transformés en de simples officiers d’état civil. Il ne reste plus à ceux-ci qu’à couper les rubans et à délivrer des actes d’état civil. Voilà votre vision technocratique de l’intercommunalité. (Protestations sur de nombreux bancs des groupes LaREM et MODEM.) Ah non ! Pas nous ! Je suis désolé de vous le dire, mais c’est ainsi.
J’ajoute que ce ne sont même pas les exécutifs intercommunaux qui prennent la main : ce sont les technocrates des services administratifs. Cela satisfait les libéraux que vous êtes
(Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM) , vous enthousiasme même. Cela vous fait kiffer ! (Mouvements divers.) Mais c’est ce qui crée la colère des maires, notamment des maires ruraux qui se disent qu’ils n’ont plus la main sur ce qui concerne les habitants de leur commune. Voilà ce qu’il faut corriger ! La parole est à Mme Christine Pires Beaune. Une fois n’est pas coutume, je ne serai pas d’accord avec mon collègue Jumel. Il ne s’agit que d’un outil technique, en l’espèce la téléconférence. Ça change le sens de la délibération ! Et s’il est vrai que certains EPCI XXL ne marchent pas bien, ce n’est pas le cas pour d’autres. Il y a même de petits EPCI qui ne fonctionnent pas bien. Le problème n’est pas là. Il s’agit uniquement de permettre aux intercommunalités d’utiliser un outil moderne. On leur en donnerait la simple faculté, et pas pour toutes les réunions puisque les plus importantes – je pense notamment à l’élection du président et à l’adoption du budget primitif – en sont évidemment exclues. Mais, pour des délibérations du quotidien, je ne vois pas pourquoi on ne le permettrait pas. J’irai même plus loin : je trouve dommage qu’on ne le permette pas également aux départements et aux régions qui le souhaiteraient. On devrait le faire pour l’Assemblée aussi ! Ça rendrait service aux absents ! Eh oui ! La parole est à M. Charles de Courson. Je voudrais abonder dans le sens de notre collègue Pires Beaune : pourquoi limiter l’utilisation de la téléconférence aux réunions des conseils communautaires alors que l’on pourrait l’étendre à celles des commissions permanentes – ce serait tout de même intelligent pour les élus situés en zone de montagne –, et aussi aux départements et aux régions ?
J’appartiens à l’une des trois plus grandes régions de France, le Grand Est ; autant vous dire que pour les conseillers régionaux qui habitent en bordure de l’Île-de-France et qui doivent aller à Strasbourg, c’est un truc de fou : ils mettent plus d’une journée, aller et retour compris, pour une réunion de deux heures. La téléconférence apporterait une solution.
Est-ce que le Gouvernement serait prêt à étendre la portée de cet article ? Je signale au passage que j’en ai discuté tout à l’heure avec Mme Pires Beaune et avec votre éminente collègue, Mme Gourault, qui a trouvé l’idée excellente – manière de faire le lien entre deux membres du Gouvernement.
(Sourires.) Après la République numérique, la démocratie virtuelle ! La parole est à M. le ministre. J’avoue avoir bien du mal à suivre ce débat : la loi dont nous discutons porte notamment sur l’engagement dans la vie locale ; dans ce cadre, on facilite l’engagement des élus locaux au quotidien de la manière la plus pratique possible, en mettant à leur disposition les outils les plus modernes, d’ailleurs déjà utilisés dans l’entreprise – beaucoup de conseils d’administration fonctionnent par téléconférence –… C’est bien ça le problème ! …ainsi que dans le monde associatif.
Il s’agit d’un texte plutôt simple et pragmatique, destiné à trouver des solutions pratiques aux élus. Certes, monsieur Jumel, ce peut être pour des raisons de fond que certains, comme vous l’avez dit, se sentent dépossédés de leurs prérogatives et ne viennent donc plus aux réunions. Mais souffrez que ce puisse aussi être parce qu’ils ont par ailleurs une profession et des obligations familiales qui les détournent de leur engagement d’élu local.
(Protestations sur les bancs du groupe LR.)
Dès lors qu’il ne s’agira pas d’une obligation mais d’une faculté, il faut être cohérent : je ne vois pas quel problème cela pose d’ouvrir à la téléconférence les réunions des assemblées délibérantes. Il y a dans ce débat quelque chose qui me dépasse, un manque de bon sens.
Vous avez raison, monsieur le ministre ! À moins que certains ne souhaitent pas que les Français qui ont un vrai métier, qui sont éventuellement pères ou mères de famille ou bien ont d’autres obligations privées, puissent s’engager dans des conseils municipaux.
J’indique à Mme Pires Beaune et à M. de Courson, qui ne peuvent plus amender le texte, que je m’apprête à déposer un amendement au nom du Gouvernement qui étend le dispositif aux commissions permanentes des conseils départementaux et des conseils régionaux.
Très bien ! Merci ! J’estime néanmoins qu’il faut se fixer deux limites – je rejoins, en cela, les propos de M. Schellenberger –, qui ne sont pas des limites de principe, mais des limites de fond. La première concerne les discussions budgétaires : peut-on voter à distance le budget de l’EPCI dans lequel on siège ? Non ! Je ne le pense pas : le sujet mérite que l’on se déplace. Peut-on élire son président d’intercommunalité par visioconférence ? Non ! Je ne le pense pas non plus. Nous pouvons donc exclure du champ de l’article ces deux types de délibérations, qui – pardon de le rappeler – font déjà l’objet d’un traitement spécifique par le CGCT, lequel définit les majorités ou les modalités de scrutin à observer dans ces cas – un vote à bulletin secret est par exemple obligatoire pour procéder aux nominations.
La mesure proposée me semble de bon sens. Parfois, cependant, le bon sens est la chose du monde la moins partagée.
Je rappelle qu’il n’est pas possible, à ce stade de la discussion sur l’article, de répondre au ministre. Vous aurez cependant l’occasion de le faire, chers collègues, dans le cadre de la discussion des amendements.
La parole est à Mme Sandrine Mörch, pour soutenir l’amendement no 607 rectifié.
Cet amendement, dont Élisabeth Toutut-Picard a eu l’initiative, vise à permettre l’organisation de conseils communautaires ou municipaux par téléconférence dans les communautés de communes, les communautés d’agglomération et les conseils municipaux. La téléconférence n’est aujourd’hui possible que pour certaines communes, en application de l’article L. 2573-5 du code général des collectivités territoriales.
Les distances parfois grandes et les intempéries, notamment en période hivernale, peuvent rendre difficile, pour les élus, l’accès au lieu de réunion du conseil communautaire. La possibilité de recours à la téléconférence éviterait ainsi aux conseillers communautaires des déplacements parfois longs et faciliterait l’exercice de leur mandat.
Et qui paiera le matériel ? Quel est l’avis de la commission ? Je peux tout entendre s’agissant des régions qui comptent entre dix et treize départements ou des conseils départementaux qui peuvent être amenés à se réunir, en commission permanente par exemple, de manière urgente ou dont certains membres sont empêchés. S’agissant des conseils municipaux, toutefois, c’est franchement au-dessus de mes forces ! Avis défavorable. Très bien ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Je répondrai avec le même pragmatisme : la téléconférence me semble envisageable pour les EPCI et pour les conseils départementaux ou régionaux. En revanche, la prévoir pour assurer le fonctionnement du conseil municipal, qui n’implique que quatre réunions obligatoires par an, serait à mon sens aller un peu trop loin. Très bien ! Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable. Quand on est élu, il faut savoir ce que l’on veut ! La parole est à M. Julien Aubert. Je comprends les explications selon lesquelles la distance, notamment dans les territoires ruraux, ne permet pas aux élus communautaires de participer aux assemblées, mais, au-delà de l’enjeu technique, il va falloir modifier le dictionnaire. Lorsqu’on en ouvre un pour y consulter la définition du mot « assemblée », il y est en effet écrit qu’il s’agit de « personnes réunies en un même lieu pour un motif commun ». Surtout pour une assemblée délibérante ! À moins qu’il ne s’agisse d’une assemblée virtuelle ! En considérant que toute assemblée peut se réunir à distance, on ouvre la voie à l’introduction de la visioconférence à l’Assemblée nationale. Bien sûr ! Je viens du Vaucluse : le trajet est long, pour venir ici, et il y a parfois des intempéries ! Pourquoi ne resterais-je pas chez moi, pour y suivre confortablement les débats ? Il a raison ! Je mets cet argument sur la table, car j’estime que le fait d’être réunis dans un même lieu facilite le débat et la concentration, et crée une plus-value. Nos échanges l’illustrent d’ailleurs : passé un certain point, on suit mieux la discussion, on se répond, on interagit. La démocratie est aussi un fait social.
Je ne suis pas hostile à la visioconférence, mais je crois que le sujet mérite réflexion – car d’une certaine façon, en catimini, c’est une évolution de la conception de la démocratie que vous nous proposez.
Non ! C’est une adaptation de la démocratie ! Or il me semble que la démocratie, c’est de l’humain, et qu’en ayant une machine pour seul intermédiaire, on perd quelque chose qui nous vient des Grecs et qui est né un jour sur une agora. C’est pourquoi je suis hostile à votre amendement. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et GDR.) Très juste ! La parole est à M. Frédéric Petit. Je crois, cher collègue, que la démocratie grecque est née contre l’agora, et non sur elle – mais c’est un autre débat.
Je voulais réagir aux propos de M. Jumel concernant les relations entre les citoyens et l’administration. Pour connaître la situation qui prévaut dans de nombreux pays, je crois que la France doit être fière de son administration, qui est très solide. Ne jetons pas le bébé avec l’eau du bain : si l’administration est parfois toute-puissante et peut agir en dehors de tout contrôle des élus – y compris au sein de cette assemblée –, la responsabilité en revient avant tout à ces derniers. Ne nous plaignons pas d’avoir une administration trop forte, mais d’avoir des élus qui – peut-être par manque de moyens – ne s’élèvent pas au niveau de leur administration.
Et pour résoudre le problème, on leur dit qu’ils n’ont pas besoin d’aller voir leur administration et qu’ils peuvent rentrer chez eux ? Je connais de nombreux pays où l’administration n’est pas à la hauteur : c’est bien plus gênant que quand elle est forte. J’appelle donc à mener cette réflexion de manière beaucoup plus profonde : nous devons aider les élus à se former et à prendre la mesure du rôle de leur administration, mais ne nous plaignons pas d’avoir en France des administrations solides. (Mme Anne Blanc applaudit.) Pour conclure sur cet amendement, la parole est à M. Sébastien Jumel. On a pu constater, à la faveur de la réforme de la justice, votre volonté de rendre la République numérisée, désincarnée et déshumanisée – vous promouvez d’ailleurs cette évolution dans tous les champs de l’action publique. Vous nous proposez maintenant la démocratie virtuelle. Or si on renonce à se réunir en assemblée, on ne peut pas se nourrir du débat et de la confrontation, y compris, le cas échéant, pour changer d’opinion ou forger un avis permettant de dégager l’intérêt général – nos collègues du groupe LR ont raison sur ce point. C’est une drôle de conception de la démocratie à laquelle vous nous préparez.
Enfin, j’avais cru comprendre que le projet de loi visait, entre autres objectifs, à aider les élus à resserrer leurs liens de proximité avec les habitants, donc à réduire la fracture politique majeure qui existe entre les citoyens et leurs représentants. Pensez-vous vraiment y parvenir en expliquant à nos concitoyens qu’on va désormais, pour des raisons pratiques ou pour prendre en considération les intempéries, permettre aux élus de discuter à distance ? Mais sur quelle planète vivez-vous ?
On va se faire lyncher ! Et puis, monsieur Lecornu, je sais que vous assumez de représenter la droite décomplexée (Exclamations sur les bancs du groupe LR) , mais vous comparez des assemblées délibérantes à des assemblées d’actionnaires ! Personnellement, je suis heureux que ces organes ne fonctionnent pas de la même façon ! Un conseil municipal, c’est autre chose : c’est la sève de la démocratie vivante et de ses instances de proximité. C’est cela qu’il nous faut préserver. En favorisant l’absentéisme ? Vous n’avez jamais été maire, monsieur le ministre !
(L’amendement no 607 rectifié n’est pas adopté.) La parole est à M. Sacha Houlié, pour soutenir l’amendement no 1406. Comme je l’avais déjà indiqué, il vise à étendre à toutes les intercommunalités la faculté de téléconférence, qui ne se limiterait ainsi pas aux communautés de communes ou aux communautés d’agglomération, mais s’appliquerait également aux communautés urbaines et aux métropoles. Quel est l’avis de la commission ? J’émets un avis favorable, dans un souci de cohérence.
Monsieur Jumel, il n’est nullement question d’étendre la téléconférence aux conseils municipaux. Vous n’avez visiblement pas écouté ou entendu les échanges précédents.
C’est votre parti pris : la démocratie virtuelle ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Favorable. La parole est à M. Fabien Di Filippo. Une fois cette décision prise, elle posera sans doute moins de problème aux métropoles qu’aux petites communes, mais tout de même : sous couvert de pragmatisme, de modernité et de simplification, vous êtes en train d’effacer tout ce qui fait le liant humain que conservent encore un tant soit peu les petites collectivités rurales éclatées. (M. Pierre Vatin applaudit.)
La mesure proposée ne permettra pas de réaliser des économies, car les élus locaux se déplacent aujourd’hui à leurs frais pour assister aux réunions. En revanche, qui, à l’avenir – mon collègue Cordier soulevait fort justement ce point il y a quelques instants –, paiera le matériel informatique nécessaire pour que tous les conseillers aient accès à une salle de téléconférence dans leur salon, d’où ils pourront, comme vous le suggériez, vaquer à leurs occupations, faire leur repassage ou que sais-je ?
(Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Mais pour qui prenez-vous les élus locaux ? Vous supprimez par ailleurs toute possibilité d’interaction. Or ce qui fait le sel de nos débats, c’est tout de même de pouvoir s’interpeller et d’interagir directement. Des réunions d’information très verticales peuvent se tenir par téléconférence, mais pas des réunions décisionnelles prévoyant des débats et des votes ! En tout cas, nous ne partageons pas la conception très verticale du débat et du vote qui peut exister dans votre nouveau monde macronisé.
Tout cela ne poussera pas les gens à s’engager, bien au contraire ! Je prendrai l’exemple de la communauté de communes du Saulnois, qui compte 128 communes pour 148 délégués communautaires.
C’est une exception ! Vous voulez les mettre chacun devant un écran. Qui continuera à participer à de telles réunions ? Les conseillers se connecteront peut-être pour faire acte de présence, mais ils seront encore plus privés d’accès à l’information et de possibilité d’expression qu’aujourd’hui. Vous obtiendrez l’effet inverse à celui recherché. Il faut au contraire remettre du liant, de l’humain, et surtout redonner du pouvoir aux élus locaux plutôt que de les éloigner des centres de décision en les cantonnant chez eux comme de simples spectateurs des décisions technocratiques qui seront prises ! Très bien ! La parole est à Mme Cécile Untermaier. Je veux réagir au nom du groupe Socialistes et apparentés, pour dire que nous sommes évidemment très favorables à cet amendement. Bien évidemment, puisqu’il est cohérent avec les absurdités de la loi NOTRe ! Nous souhaitons remercier le ministre et le rapporteur d’avoir accepté d’inclure les conseils départementaux et régionaux dans le champ de l’article 4 ter . Nous rencontrons, sur le terrain, beaucoup d’élus harassés par le nombre de réunions auxquelles ils doivent assister chaque semaine. Qu’ils ne se présentent pas aux élections, alors ! (Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) Quel mépris ! La téléconférence représente une possibilité et un outil nouveau. Adaptons notre démocratie aux outils qu’on nous propose. S’agissant du matériel, une réflexion sera menée… « Adapter la démocratie » ? Vous rendez-vous compte de ce que vous dites ? La démocratie s’exercera, puisque l’on échangera grâce à la visioconférence. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.) S’il vous plaît, chers collègues, seule Mme Untermaier a la parole ! Nous remercions le ministre de la possibilité ainsi offerte, qui n’est nullement attentatoire à la démocratie, mais permet au contraire de la faciliter et de l’adapter au XXIe siècle. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) La parole est à M. Hubert Wulfranc. J’ai le sentiment que nous échangeons des arguments de piteux niveau. Bravo ! Merci.
Qu’essaye-t-on de contourner par ces nouvelles possibilités données aujourd’hui, étendues demain, puis rendues obligatoires dans quelques années ? Précisément ce que réclament les élus depuis des années : un véritable statut de l’élu, qui va bien au-delà des techniques de visioconférence, mais touche à la faculté même de certains de nos concitoyens à simplement accéder à la fonction d’élu !
Le ministre parlait tout à l’heure des gens qui travaillent. Mais cherchez les travailleurs, les ouvriers, les employés, dans les assemblées élues !
Et ce n’est pas la visioconférence qui va arranger les choses… Voilà ce que nous vous demandons depuis des années : pouvoir exercer un mandat dans de bonnes conditions.
Par ailleurs, qu’est-ce qu’une réunion de conseil métropolitain ou de conseil d’intercommunalité ? C’est quelque chose de vivant : c’est un public, qui participe, qui proteste, et qui, de plus en plus, est écarté de la scène du débat.
(Exclamations sur divers bancs.) Un exemple nous en a encore été donné il y a un mois à l’occasion de l’incendie de l’usine Lubrizol à Rouen, où les citoyens voulant obtenir des réponses ont été accueillis par des CRS ! Veuillez conclure, monsieur le député. Or demain, on voudrait faire en sorte que les élus s’expriment entre eux, à travers des écrans ? Qu’est-ce que cela veut dire ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI, et sur quelques bancs du groupe LR.) Pour conclure, la parole est à Mme Émilie Chalas. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.) La dernière intervention faisait une très bonne conclusion… Restons calmes, chers amis : je serai brève. Je voulais simplement répondre à quelques-uns de nos collègues à propos de la dématérialisation. De la déshumanisation ! Nous connaissons tous des élus – pour l’avoir été nous-mêmes, avoir travaillé avec eux dans les territoires et en circonscription, ou même avoir travaillé pour eux –, et nous savons que 90 % d’entre eux sont très responsables. Contrairement à ce que vous affirmiez, monsieur Di Filippo – de façon quelque peu choquante, selon moi –, ils ne se connecteront pas en téléconférence simplement pour faire « acte de présence ».
Les élus locaux, lorsqu’ils s’engagent, sont responsables de leur mandat. Ils l’assument généralement jusqu’au bout, y compris tard le soir et de façon dématérialisée.
Ils viennent aux réunions, dans ce cas ! Enfin, je rappelle que le télétravail se développe de plus en plus, dans les entreprises mais aussi dans les services publics,… La démocratie n’est pas une entreprise ! …et que, de ce fait, les élus peuvent moderniser leur façon de faire de la politique dans les territoires. Je suis donc très favorable à cet amendement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.) On sait depuis le début que vous n’êtes pas favorable au débat !
(L’amendement no 1406 est adopté.) C’est terrible !
(L’article 4 ter, amendé, est adopté.)
La parole est à M. Stéphane Travert, pour soutenir l’amendement no 601. Vous ne voulez pas le défendre de manière virtuelle ? Envoyez-nous donc un mail ! (Sourires.) L’amendement, qui vise à faciliter l’organisation de la téléconférence dans les différentes assemblées, est âprement défendu, madame la présidente. (Sourires.) Quel est l’avis de la commission ? De la manière la plus courtoise et la plus diplomatique possible, j’opposerai un avis défavorable, mon cher collègue, à cet amendement qui concerne les municipalités.