Première séance du mercredi 07 avril 2021
- Présidence de Mme Annie Genevard
- 1. Lutte contre le dérèglement climatique
- Discussion des articles (suite)
- Article 19 (suite)
- Amendements nos 878, 264, 902, 1122, 1337, 1719, 1752, 2372, 2595, 3619, 4716, 5267, 5297, 5481, 5956, 6350 et 7137
- Mme Cendra Motin, rapporteure de la commission spéciale pour le titre II
- Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique
- M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission spéciale
- Amendement no 6051
- Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État chargée de la biodiversité
- Amendements nos 5751, 1676, 2593, 4564, 6052, 1657 et 5686
- Sous-amendement no7349
- Amendements nos 5923, 4715, 283, 4503, 4505, 6204, 2485, 4992 et 6730
- Suspension et reprise de la séance
- Après l’article 19
- Amendements nos 4894, , 124 rectifié, 268 rectifié, 1115, 1185 rectifié, 2106 rectifié, 3131, 3495, 4560, 4835, 2407, 2688, 3817, 4335, 4991, 5774, 2671, 5190, 605, 6423, 278, 4993, 7053, 3558, 171, 209, 334, 341, 743, 946, 1043, 1073, 1658, 1674, 1831, 1846, 1916, 1961, 2123, 2149, 2597, 2625, 2706, 2920, 3891, 4787, 5448, 5670, 5950, 6399, 6424, 6924, 6981, 426, 436, 769, 1038, 1040, 1045, 1048, 1183, 1845, 2150, 2466, 2600, 2628, 4788, 5449, 5948, 6335, 6982, 5056 et 2089, 4779
- Rappel au règlement
- Suspension et reprise de la séance
- Amendements nos 7054, 7055, 2599, 4808, , 99, 7009, 1066, , 265, 559, 795, 1356, 2399, 2657, 3484, 3785, 4498, 4572, 4829, 5899, 6425 et 6739
- Sous-amendements nos 7363, 7364, 7361, 7358 et 7359, 7362
- Amendement no 759, 1094
- Article 19 (suite)
- Discussion des articles (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Annie Genevard
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Lutte contre le dérèglement climatique
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets (nos 3875, 3995).
Discussion des articles (suite)
Mme la présidente
Hier soir, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 878 à l’article 19.
Article 19 (suite)
Mme la présidente
Sur les amendements no 264 et identiques, je suis saisie par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 878, 264, 902, 1122, 1337, 1719, 1752, 2372, 2595, 3619, 4716, 5267, 5297, 5481, 5956, 6350 et 7137, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 264 et suivants sont identiques.
L’amendement no 878 de Mme Emmanuelle Ménard est défendu, de même que les amendements nos 264 de M. Julien Dive et 902 de M. Gérard Cherpion.
La parole est à M. Patrice Perrot, pour soutenir l’amendement no 1122.
M. Patrice Perrot
L’article 19 conduit à remettre en cause les fondements du droit de l’eau, basés sur la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau entre les différents usages. Cet équilibre suppose de concilier les intérêts liés à la protection de l’eau en tant que milieu naturel avec les intérêts liés à sa valeur économique et, conformément à la directive-cadre sur l’eau, de prendre en compte toutes les composantes du milieu aquatique sans en privilégier une plutôt qu’une autre, ainsi que toutes les activités humaines qui s’exercent sur ces milieux, sans hiérarchiser les usages. En modifiant l’article L. 210-1 du code de l’environnement pour que priment les enjeux de la préservation et de la restauration des fonctionnalités de certains écosystèmes, qu’ils soient aquatiques, marins ou de zones humides, on rompra l’équilibre actuel entre les usages. En outre, la réglementation risque de s’en trouver complexifiée. C’est pourquoi je souhaite que l’article 19 soit réécrit.
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 1337.
M. Thibault Bazin
Nous voici arrivés à l’article 19 qui suscite de fortes attentes parmi les acteurs locaux : ils ne veulent pas remettre en cause les fondements du droit de l’eau, basés sur la gestion équilibrée de la ressource en eau entre les différents usages.
M. Jean-Marie Sermier
C’est vrai.
M. Thibault Bazin
Nous sommes nombreux à soutenir ces amendements identiques, afin que le texte établisse une définition précise des écosystèmes aquatiques qui implique non seulement la préservation mais aussi la restauration des fonctionnalités naturelles, et qui instaure un nouveau concept de patrimoine naturel et paysager de la nation, en plus de celui de patrimoine commun de la nation.
Gardons-nous d’ajouter à l’insécurité juridique des projets locaux sans pour autant parvenir à ce que leurs effets sur l’environnement et le climat soient systématiquement bénéfiques. En réalité, il faudrait conjuguer davantage tous les usages. Or l’article 19 présente des risques ; l’amendement vise – à défaut de le supprimer, puisque toute suppression d’article, dites-vous, reviendrait à amoindrir l’ambition du texte – à en donner une rédaction différente et intéressante : « […] le respect des équilibres naturels implique la préservation des fonctionnalités naturelles des écosystèmes aquatiques et de leurs interactions, ces fonctionnalités étant essentielles à la reconquête de la biodiversité, à l’adaptation au changement climatique ainsi qu’à l’atténuation de ses effets et participent à la lutte contre les pollutions ; ».
Mme la présidente
Les amendements identiques nos 1719 de M. Pierre Cordier, 1752 de Mme Marianne Dubois, 2372 de Mme Valérie Bazin-Malgras, 2595 de M. Thibault Bazin, 3619 de M. Gérard Menuel, 4716 de M. Pierre Venteau, 5267 de M. Yves Hemedinger, 5297 de M. David Habib, 5481 de M. Jean-Claude Bouchet et 5956 de M. Rémy Rebeyrotte sont défendus.
La parole est à M. Jean-Baptiste Moreau, pour soutenir l’amendement no 6350.
M. Jean-Baptiste Moreau
Les agriculteurs peuvent contribuer à préserver la qualité de l’eau ; évitons de les considérer systématiquement comme des pollueurs qui modifient cette ressource. L’entretien des zones humides est essentiel, a
Mme la présidente
L’amendement no 7137 de M. Julien Aubert est défendu.
La parole est à Mme Cendra Motin, rapporteure de la commission spéciale pour le titre II, pour donner l’avis de la commission sur l’ensemble des amendements en discussion commune.
Mme Cendra Motin, rapporteure de la commission spéciale pour le titre II
Face à la multitude des amendements visant à modifier l’alinéa 2 de l’article 19 et à l’insérer à l’article L. 211-1 plutôt qu’au L. 210-1 du code de l’environnement, je me suis posé beaucoup de questions. J’ai donc beaucoup consulté et je me suis interrogée de manière pragmatique car comme l’a dit M. Moreau, ce sont les agriculteurs qui s’inquiètent le plus de ces amendements, et nous voulons tous qu’ils continuent à cultiver leurs terres. J’ai entendu leur inquiétude que nous inscrivions la protection des écosystèmes aquatiques parmi les grands principes généraux de l’eau, ceux qu’énonce l’article 1er de la loi sur l’eau. Or le Gouvernement a choisi de placer la protection et la préservation des écosystèmes aquatiques à l’article L. 210-1 du code de l’environnement parce qu’elles doivent précisément être des principes fondamentaux de la gestion de l’eau. Mais en aucun cas ces principes ne doivent entrer en contradiction avec les dispositions très opérationnelles de l’article L. 211-1 en matière de gestion équilibrée des usages de l’eau.
M. Pierre Cordier
Heureusement que ce n’est pas l’article L. 214 !
M. Erwan Balanant
Celui-là n’est pas dans le même code…
Mme Cendra Motin, rapporteure
Rappelons l’avis du Conseil d’État sur l’article 19 : il admet la modification de l’article L. 210-1 « dans la mesure où, bien que peu normative, elle éclaire la notion de "respect des équilibres naturels" figurant déjà » audit article. Il est donc pertinent de conserver l’article 19 dans sa rédaction actuelle. Nous pouvons faire confiance au Conseil d’État qui, à aucun moment, n’a jugé que cet article entraînerait un quelconque déséquilibre entre les usages de l’eau.
J’ai également consulté des avocats et des praticiens qui utilisent au quotidien le code de l’environnement. Tous ont été unanimes : en plaçant l’alinéa 2 de l’article 19 à l’article L. 210-1, on rappelle un principe général et, ce faisant, on leur donne un éclairage plus précis sur la notion de respect des équilibres naturels, sans pour autant déséquilibrer les bons usages et la gestion de l’eau. En revanche, en déplaçant cette notion à l’article L. 211-1, on ouvrirait la voie à des contentieux en pagaille et on exposerait les agriculteurs à beaucoup plus de difficultés. En toute bonne foi, parce que vous voulez mettre en exergue l’importance des bons usages de l’eau et de la gestion équilibrée, vous risquez, par ces amendements, de faire finalement plus de mal que de bien, notamment à ceux que vous essayez de protéger. C’est pourquoi je vous propose de les retirer ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre de la transition écologique, pour donner l’avis du Gouvernement.
Mme Barbara Pompili, ministre de la transition écologique
Comme en commission spéciale, cet article suscite des questions et, comme vient de le faire très justement Mme la rapporteure, il faut que nous en expliquions à nouveau le sens. L’article 19 vise à ajouter aux grands principes du droit la reconnaissance du grand cycle de l’eau et du lien direct entre la ressource en eau et la préservation des écosystèmes et de leur fonctionnement. J’entends les inquiétudes de plusieurs acteurs concernant les risques que cette disposition pourrait faire peser sur certains usages de l’eau et sur leur hiérarchie. Je vous invite à relire l’article 19 avec attention : la hiérarchie des usages n’y est pas modifiée puisqu’elle est abordée à l’article suivant du code de l’environnement.
Au-delà de cet argument légistique qui devrait suffire à rassurer tout le monde, je dirais même que l’article 19 tel que nous le proposons produit l’effet contraire à ce qui lui est reproché. Quand les acteurs locaux élaborent les fameux PTGE (projets de territoire pour la gestion de l’eau), ils ont pleinement conscience que la ressource dont ils discutent est la même pour tous et qu’elle circule entre différents compartiments – naturels ou construits par l’homme – du cycle de l’eau. Dans l’article 19, nous rappelons qu’il n’y a pas d’usage de l’eau sans écosystèmes préservés et fonctionnels. Rien ne modifie la manière dont la répartition de la ressource doit se faire.
Certains amendements visent à déplacer le contenu de l’article 19 dans l’article suivant du code de l’environnement, le fameux L. 211-1, qui est précisément celui qui hiérarchise les usages de l’eau. Ce faisant, on modifierait l’équilibre trouvé dans la loi depuis de nombreuses années sans avoir jamais été remis en cause.
Nous pouvons nous retrouver autour de ces principes qui font consensus, comme la reconnaissance de l’importance du grand cycle de l’eau. Employons plutôt nos forces rechercher un usage raisonné et durable de l’eau, qui permettrait d’y avoir accès et de s’en servir dans de bonnes conditions. Il me semble que là est la priorité, plutôt que de modifier des hiérarchies qui font leurs preuves depuis des années. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Frédérique Tuffnell.
Mme Frédérique Tuffnell
Placer le contenu de l’article 19 à l’article L. 210-1 du code de l’environnement permet de donner un cadre général au partage de l’eau, car cet article est précisément d’ordre général et ne concerne pas la différenciation entre les usages. C’est une fois ce cadre posé que peut se poser la question du partage, qui suppose que l’eau soit abondante dans les écosystèmes – ce qui n’est pas le cas, et il faut y remédier.
Inscrire cet alinéa dans le cadre général de l’article L. 210-1 permet de sanctuariser l’eau et sa protection dans les écosystèmes. Encore une fois, il ne s’agit aucunement à ce stade des usages, lesquels peuvent être concurrentiels. L’usage agricole n’est pas seul, et le titre Ier du code de l’environnement ne le concerne pas plus qu’un autre. Il s’agit simplement de renforcer l’objectif d’abondance de la ressource en eau.
Mme la présidente
La parole est à M. Arnaud Viala.
M. Arnaud Viala
Votre explication, madame la ministre, n’est ni rassurante ni convaincante. Comme Mme Tuffnell vient de le souligner, il est évidemment nécessaire de préserver le grand cycle de l’eau et d’en garantir la quantité nécessaire afin de répondre aux besoins des différents usagers. Je ne vois donc pas l’intérêt de renforcer ce cadre général ; selon l’interprétation qui en sera faite, une telle modification législative risque au contraire de verrouiller les dispositions encadrant tel ou tel usage.
La gouvernance, ensuite : chacun est suffisamment averti de l’importance de la ressource en eau pour laisser la responsabilité d’organiser les usages, dans le grand comme le petit cycle de l’eau, aux acteurs locaux qui sont d’abord des experts capables de mesurer les défis, les contraintes, les difficultés ; ils ont déjà accompli un travail considérable pour préserver et pour hiérarchiser les usages possibles de cette ressource, au cas par cas, car la situation n’est pas uniforme. Modifier les codes sur ce sujet serait donc plus dangereux qu’autre chose.
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson
Mon amendement no 5129 a été considéré comme non soutenu, alors que j’étais là pour le défendre.
Mme la présidente
Il est vrai que vous étiez là, mais personne n’a réagi quand je l’ai appelé.
M. Charles de Courson
Ce n’est pas grave.
L’argumentaire de la rapporteure et de la ministre est surprenant : à les croire, non seulement l’alinéa dont l’article 19 vise l’insertion dans l’article L. 210-1 du code de l’environnement ne sert à rien, mais son insertion dans l’article L. 211-1 pourrait même le rendre dangereux !
Dans son avis, le Conseil d’État lui-même a estimé que cet alinéa ne sert à rien parce qu’il n’a pas de caractère normatif. Cependant, hier soir, vous avez refusé de supprimer l’article 19. Acceptez au moins d’insérer ce passage dans l’article suivant du code de l’environnement, afin de rassurer les utilisateurs. En effet, la nature n’est pas un bien en soi : il faut trouver un équilibre, et c’est aux représentants du peuple qu’il revient de définir les règles. Comme vous l’avez souligné, les usages de l’eau ne sont pas ici évoqués, or l’eau n’est pas « en et pour soi », selon le concept d’un philosophe célèbre. Quelque chose ne tourne pas rond dans votre argumentaire.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission spéciale.
M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission spéciale
Il ne faut pas faire dire à cet article ce qu’il ne dit pas. Il ne s’agit pas de modifier les éléments fondamentaux du code de l’environnement : l’eau est un patrimoine commun ; sa valorisation comme ressource économique est reconnue – cela rassurera les agriculteurs – ; la politique active de stockage de l’eau sera poursuivie. L’article 19 n’est en rien contradictoire avec ces éléments, il tend seulement à éclairer et à préciser la notion de respect des équilibres naturels. Les activités liées à l’eau ne courent pas de risque. Évitons de susciter des peurs qui ne reposent sur rien dans le texte.
Mme la présidente
La parole est à Mme Frédérique Tuffnell.
Mme Frédérique Tuffnell
Il s’agit de restaurer les écosystèmes aquatiques en affirmant que la protection de la ressource est prédominante. Il ne sert à rien d’asseoir une obligation de restauration si elle n’apparaît pas dans l’article général, car l’eau sera alors considérée comme une simple ressource à se partager. L’article 19 vise à affirmer avec force l’intérêt de protéger des écosystèmes aquatiques. De là découleront la protection de l’eau et son partage, envisagés dans la suite du code.
(L’amendement no 878 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 264, 902, 1122, 1337, 1719, 1752, 2372, 2595, 3619, 4716, 5267, 5297, 5481, 5956, 6350 et 7137.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 137
Nombre de suffrages exprimés 116
Majorité absolue 59
Pour l’adoption 30
Contre 86
(Les amendements identiques nos 264, 902, 1122, 1337, 1719, 1752, 2372, 2595, 3619, 4716, 5267, 5297, 5481, 5956, 6350 et 7137 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Barbara Bessot Ballot, pour soutenir l’amendement no 6051.
Mme Barbara Bessot Ballot
Il vise à reconnaître qu’il est légitime de préserver les écosystèmes aquatiques créés par l’activité humaine lorsqu’ils ont une incidence biologique positive. Dans le cadre de la protection du grand cycle de l’eau, ce projet de loi nous permet opportunément de prendre en compte les avantages certains que des aménagements humains équilibrés présentent pour la biodiversité. Non seulement ils respectent les écosystèmes, mais ils les préservent et les protègent. Citons les retenues faibles des barrages de petite hydroélectricité : insuffisantes pour aggraver les effets d’une sécheresse, elles peuvent même créer les conditions nécessaires au stockage d’un volume d’eau appréciable pour l’écosystème.
L’amendement ne fait pas obstacle à la continuité écologique des cours d’eau, puisqu’il concerne uniquement les écosystèmes dont on peut démontrer l’impact positif sur la biodiversité. Je précise qu’il fait écho aux observations de la Coordination nationale Eaux et rivières humaines.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
En mettant un accent particulier sur l’hydroélectricité dans l’énoncé d’un principe fondamental, comme celui que l’article 19 tend à modifier, votre amendement semble faire prévaloir cet usage de l’eau. Vous comprendrez que nous ne pouvons déséquilibrer les autres usages à son profit. Nous y reviendrons sans doute à l’occasion d’une longue série d’amendements sur les moulins et la petite hydroélectricité. (Exclamations
Mme la présidente
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la biodiversité, pour donner l’avis du Gouvernement.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État chargée de la biodiversité
Je confirme qu’une telle énumération, non exhaustive, dans deux articles successifs du code, risquerait de brouiller le message relatif aux usages anthropiques de l’eau. Parmi eux, l’hydroélectricité est déjà mentionnée. Demande de retrait ou avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Barbara Bessot Ballot.
Mme Barbara Bessot Ballot
Je le retire. La petite hydroélectricité ne constitue peut-être pas un sujet de réflexion important au niveau national, en raison de sa faible ampleur, mais il n’en va pas de même dans les territoires ruraux.
(L’amendement no 6051 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à M. Christophe Jerretie, pour soutenir l’amendement no 5751.
M. Christophe Jerretie
Il est lié à l’amendement no 5774 portant article additionnel après l’article 19, que je défends par anticipation.
L’article L. 210-1 du code de l’environnement expose le droit d’utilisation de l’eau, son usage et son coût. En insérant un alinéa sur les écosystèmes, vous mettez à mal la logique du principe du droit de l’eau. Selon moi, c’est dangereux.
Le premier des deux amendements vise à remplacer l’alinéa que vous proposez par un autre, qui concerne le principe général de l’eau, beaucoup plus important à mon sens : « L’équilibre quantitatif et qualitatif entre les prélèvements dans les ressources en eau et leur recharge naturelle doit être assuré ». Voilà le fondement qui manque dans l’article 19 : la compensation de l’eau consommée par l’eau naturelle, qui doit revenir. Nous sommes tous capables d’en mesurer l’importance en matière de droit et de comprendre l’intérêt de la distinction entre quantitatif et qualitatif concernant les impacts : il est indispensable d’apporter cette précision dans l’article L. 210-1.
L’amendement no 5774 ne vise pas à redéfinir les écosystèmes mais à créer un article L. 210-2 de principe, spécifique au milieu naturel. Le droit de l’eau ne serait pas mis à mal et on intégrerait la difficulté de protéger les écosystèmes des milieux marin et aquatique.
Il me semble essentiel de ne pas mélanger ces deux sujets. En effet, on malmène l’article L. 210-1, au fondement du droit de l’eau et des jurisprudences associées, et que nous appliquons dans nos territoires. Attention à cet élément.
Il s’agit certes de deux amendements un peu complexes, qui n’ont pas été présentés en commission – je les dépose parce que j’ai beaucoup travaillé dans le domaine de l’eau. Il faudra se pencher sur ce sujet pendant la navette. Je n’ai pas beaucoup détaillé les exposés sommaires, mais il existe des éléments très concrets qui me poussent à vouloir absolument distinguer l’alinéa de l’article 19 du droit de l’eau tel qu’il est défini par l’article L. 210-1. Je propose donc de créer un nouvel article, afin de ne pas soulever de doutes, ni faire peser les difficultés sur l’usager de l’eau.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Je vous répondrai sur l’amendement no 5751, et je vous répondrai sur le no 5774 lorsqu’il sera appelé. Vous proposez d’ajouter à l’article L. 210-1 une mention visant à assurer l’équilibre quantitatif et qualitatif de l’eau. Elle n’a pas vraiment sa place dans un article de principe qui ne définit pas les usages de l’eau, mais l’objectif de la préserver.
M. Christophe Jerretie
Si !
Mme Cendra Motin, rapporteure
Il y est question de l’eau comme d’un patrimoine national – et non paysager, puisque nous avons enlevé le terme lors de l’examen en commission ; j’en profite pour rectifier le propos de M. Bazin.
En revanche, dans un article du code de l’environnement consacré aux conditions nécessaires à la préservation des équilibres, vous retrouverez les notions que vous défendez et qui sont essentielles. Je sais qu’en Corrèze, votre département, la sécheresse a provoqué d’importantes difficultés ces dernières années, notamment en matière d’eau potable. L’amendement de Martial Saddier que nous avons adopté en commission, créant l’article 19 bis, répond parfaitement à votre préoccupation. Je vous propose donc de retirer votre amendement, sinon l’avis sera défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
À ce stade de la discussion, et au moment où la réglementation européenne et la directive-cadre sur l’eau nous imposent d’observer le bon état écologique des cours d’eau sur le fondement d’indicateurs biologiques et de qualité, liés à leur fonctionnalité, il serait regrettable de restreindre le respect des équilibres naturels aux seuls équilibres quantitatif et qualitatif. Vous le savez, certains prélèvements portent atteinte à la fonctionnalité des cours d’eau. Nous devons garantir une vision beaucoup plus globale de la gestion de la ressource. L’avis est donc défavorable.
(L’amendement no 5751 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 1676, 2593 et 4564.
La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 1676.
M. Charles de Courson
Il vise à préciser que la gestion des écosystèmes aquatiques tient compte des objectifs nationaux et européens en matière de climat, d’énergie, de biodiversité et de bon état des masses d’eau. Il permet ainsi une gestion cohérente des écosystèmes aquatiques, dans la lignée des grandes orientations fixées au niveau national et au niveau européen. Il réaffirme donc l’importance d’atteindre un bon équilibre des usages dans la gestion des écosystèmes.
Mme la présidente
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 2593.
M. Thibault Bazin
Selon vous, madame la rapporteure, l’article 19 répond à une attente de la Convention citoyenne pour le climat. Or les interventions de mes collègues montrent qu’une inquiétude subsiste eu égard à la modification du code de l’environnement, dont les dispositions actuelles permettent une gestion équilibrée de la ressource en eau.
Les enjeux liés à l’eau ne concernent pas uniquement la Corrèze puisque mon département, par exemple, a aussi connu des problèmes dus à la sécheresse, qui concernent non seulement les citoyens, mais aussi beaucoup d’autres d’acteurs. Alors que l’article 19 prévoit d’insérer un nouvel alinéa dans le code de l’environnement, il nous semble essentiel d’ajouter les mots « sans préjudice de la gestion équilibrée et durable de la ressource en eau définie à l’article L. 211-1 ».
Pourquoi y attachons-nous une telle importance ? Parce que l’article 19 permet de concilier la préservation des équilibres naturels avec les usages anthropiques de l’eau – irrigation, hydroélectricité, loisirs. La logique est celle du développement durable, et non pas seulement d’une une vision statique de la ressource en eau. Aussi est-il important de pouvoir concilier la politique de préservation des écosystèmes aquatiques avec les différents usages de l’eau : une telle précision permettrait de rassurer tout le monde.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Marie Sermier, pour soutenir l’amendement no 4564.
M. Jean-Marie Sermier
L’usage de l’eau est si essentiel qu’il est à l’origine de guerres dans certains pays qui en manquent. Les problèmes liés à l’eau génèrent aussi beaucoup de conflits locaux. Chacun d’entre nous a ainsi déjà entendu les remarques faites lorsqu’un agriculteur irrigue en plein été, ignorant en partie le travail accompli en amont pour économiser l’eau d’irrigation et pour faire en sorte de ne donner à la plante que ce qui lui est strictement nécessaire.
Tout le monde a aussi en tête les problèmes entre les pêcheurs et les kayakistes sur les rivières. Tout le monde a en tête les problèmes d’eau potable dans certaines collectivités, qu’il faut raccorder très rapidement lorsque l’eau manque. En somme, l’eau est essentielle à la vie de nos concitoyens, à leurs métiers, aux collectivités.
Vous venez de préciser un point important, madame la ministre, en indiquant que l’article 19 ne modifie pas l’article L. 211-1 du code de l’environnement. Nous vous avons entendue : le présent amendement, identique à ceux défendus par M. de Courson et par M. Bazin, propose d’inscrire vos propos dans la loi.
M. Charles de Courson
En somme, c’est un amendement gouvernemental !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Accepter ces amendements reviendrait à admettre que l’article 19 modifie l’équilibre actuel, ce qui n’est pas le cas.
M. Jean-Marie Sermier
Prévoyons ceinture et bretelles !
Mme Cendra Motin, rapporteure
La modification de l’article L. 210-1 du code de l’environnement proposée par le présent texte n’est pas inutile, puisque, monsieur de Courson, comme vous le savez, un amendement de principe permet de fixer un cap et d’indiquer les fondements qui sous-tendent les décisions, comme le fait l’article L. 210-1, qui indique que l’eau fait partie de notre patrimoine commun. L’article L. 211-1 est plus opérationnel et entre dans le détail. L’article 19 ne modifie en rien l’équilibre actuel et il n’est pas utile de le préciser.
Les écosystèmes aquatiques sont au cœur du dispositif, parce qu’ils nous permettent de nous protéger et de régénérer nos ressources en eau. Vous avez raison, monsieur Bazin, la Corrèze n’est pas le seul endroit à connaître des problèmes de sécheresse.
M. Charles de Courson
Ça ne mange pas de pain…
Mme Barbara Pompili, ministre
Si, au contraire !
Mme Cendra Motin, rapporteure
Tous les territoires connaissent des épisodes de sécheresse. La préservation des ressources, dont les écosystèmes aquatiques font partie, est un enjeu essentiel, pour les usages agricoles et industriels comme pour les particuliers.
Le texte ne modifie pas les grands équilibres des usages de l’eau, parce que tel n’est pas l’objet de l’article 19, qui réaffirme que la préservation des écosystèmes aquatiques est au nombre de nos principes et de nos valeurs fondamentales. Je vous invite donc à retirer vos amendements, à défaut ce sera un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Il serait effectivement curieux qu’un texte législatif comporte des articles qui se contredisent. La rédaction actuelle est cohérente. Ces amendements ne sont donc ni nécessaires, ni utiles : j’y suis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson
Ces trois amendements identiques constituent, madame la rapporteure, un filet de sécurité. Si l’on en croit votre thèse, il ne coûte rien de les adopter puisqu’ils renvoient au code de l’environnement et visent simplement à inscrire dans la loi ce que vous dites ici, afin de dissiper les inquiétudes liées à cet article déclaratif. Je rappelle à cet égard l’avis du Conseil d’État, indiquant l’absence de portée juridique.
(Les amendements identiques nos 1676, 2593 et 4564 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 6052 et 1657, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Barbara Bessot Ballot, pour soutenir l’amendement no 6052.
Mme Barbara Bessot Ballot
Il vise à consacrer le potentiel énergétique de l’eau dans la loi. Je reviens à la charge au sujet de la petite hydroélectricité mais il s’agit de valoriser le patrimoine et de le rendre exploitable pour en faire de l’énergie verte, conformément aux objectifs définis par la Convention citoyenne pour le climat.
Mme la présidente
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l’amendement no 1657.
Mme Danielle Brulebois
Il vise à mentionner dans l’article 19 les écosystèmes créés par l’activité humaine, qui sont le fruit de travaux que les hommes ont accomplis au cours des siècles : les biefs des étangs, les canaux ou encore les étangs de la Bresse, qui sont des zones humides au sens où les entend la convention de Ramsar. Ces zones jouent un rôle important dans les écosystèmes aquatiques et contribuent aux services rendus par l’eau en préservant l’étiage, en régulant les crues, en exerçant une fonction d’épuration, en rendant service à la faune et aux plantes hydrophiles.
Les biefs des étangs sont des lieux calmes où les animaux viennent se reproduire, notamment les carnassiers. Ceux-ci sont en voie disparition en raison de la disparition des frayères à brochets et à saumons. J’appelle votre attention sur le rôle joué par les écosystèmes d’origine humaine, très mal protégés et même souvent contestés par les dispositions juridiques. Or, détruire des ouvrages hydrauliques sous le couvert de la continuité écologique revient à détruire des zones humides au sens de la convention de Ramsar.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Je répondrai à chacune d’entre vous car, bien que faisant partie d’une discussion commune, vos amendements sont relativement différents.
Votre amendement, madame Bessot Ballot, est en partie satisfait car les écosystèmes visés ne se limitent pas aux seuls écosystèmes naturels, ce qui conduirait en effet à omettre beaucoup des lieux que vient d’énumérer Mme Brulebois, tels que les lacs, les étangs, les canaux devenus des rivières au fil des siècles.
Par ailleurs, votre amendement est trop réducteur car il ne préserve que les fonctionnalités biologiques, en oubliant les fonctionnalités hydrologiques et écologiques, rendant difficile la prévision d’un impact biologique bienfaisant. Je vous invite donc à le retirer.
Vous dites très justement, madame Brulebois, qu’il ne faut pas prendre uniquement en considération les écosystèmes naturels, mais aussi les services rendus par les écosystèmes que l’activité humaine a créés. Néanmoins, il n’y a selon moi aucune raison de les distinguer. Lorsque des arbitrages sont à faire, l’ensemble des avantages et des inconvénients de chaque situation doit être pris en compte : il n’est pas nécessaire de valoriser l’un des avantages plus que les autres. Pour ces raisons, je vous invite à retirer vos amendements, sinon j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
L’amendement de Mme Bessot Ballot différencie les écosystèmes aquatiques selon qu’ils sont naturels ou non, réduisant ainsi les fonctionnalités naturelles aux seules fonctionnalités biologiques alors que les milieux aquatiques ont aussi des fonctionnalités géochimiques ou hydrauliques. Ainsi, les fonctions de transport sédimentaire de l’eau permettent de limiter le creusement du lit des rivières et celui des berges, aspects qu’il faut continuer de prendre en compte. Cet amendement restreint donc le champ de l’article 19, ce qui n’est pas souhaitable.
Quant à l’amendement de Mme Brulebois, qui met en avant l’obligation d’évaluer et de préserver les services rendus, il risque de nous éloigner de notre objectif de protection de l’ensemble des rivières, conformément à la directive-cadre sur l’eau, car nous n’arrivons malheureusement pas à toutes les restaurer.
Je vous invite par conséquent à retirer vos amendements, sinon j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Charles de Courson.
M. Charles de Courson
Vous êtes originaire de la Haute-Marne, madame la secrétaire d’État, où se trouve le lac du Der, à la limite des départements de la Marne et de la Haute-Marne : il s’étend sur 5 000 hectares mis en eau en 1977, devenus un superbe réservoir de biodiversité et même un centre majeur de migration des oiseaux. Or, l’article 19 ne protège pas ce lac. Faudra-t-il supprimer les digues et rendre ces 5 000 hectares à leur état naturel ? Faudra-t-il reconstituer les étangs d’origine ?
D’autres secteurs abritent une superbe biodiversité alors qu’ils ont été créés par l’homme et n’ont rien de naturel. Notre collègue Brulebois en a cité plusieurs exemples. Prenons celui des étangs de la Dombes : va-t-on supprimer toutes les digues ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Mais non !
M. Charles de Courson
La rédaction actuelle, qui dispose que « le respect des équilibres naturels implique la préservation, et, le cas échéant, la restauration des fonctionnalités naturelles », est erronée, car de tels équilibres ne sont pas naturels mais artificiels, comme le montrent les réglementations qui régissent les étangs et les lacs. L’amendement de Mme Brulebois est donc plein de bon sens. Faudra-t-il abattre toutes les constructions et rendre ces zones à leur état naturel, quitte à détruire la biodiversité qui s’y est installée ? Dans ce cas, l’article 19 doit l’annoncer clairement ; or ce n’est pas le cas.
Mme la présidente
La parole est à Mme Frédérique Tuffnell.
Mme Frédérique Tuffnell
Nous en venons pratiquement à définir ce qu’est une zone humide ! J’entends les arguments de M. de Courson et de Mme Brulebois, et je ne nie pas que certains marais ont été créés par l’homme. Reste que cet article vise non à redéfinir des zones humides – même au titre de la convention de Ramsar, que je connais bien –, mais à préserver les équilibres naturels au vu de leur ressource en eau. Nous devons fixer un cap général. Que voulons-nous demain dans nos écosystèmes ? Une eau de qualité et en quantité suffisante. Après quoi, nous pourrons partager ces écosystèmes. L’article est clair : il s’agit de la préservation et, le cas échéant, de la restauration des fonctionnalités naturelles des écosystèmes aquatiques.
Encore une fois, nous sommes dans un cadre général. Il ne s’agit pas d’élaborer une définition précise, ce qui nous amènerait – chose impossible dans une loi – à définir toutes les formes que peut prendre un écosystème. L’adjectif « biologique » restreindrait l’application du dispositif à certaines terres ou certaines particularités de ces zones, ce qui n’est pas souhaitable, puisqu’il faut prendre en compte, dans tous ces équilibres naturels, les paysages, voire certains éléments non biologiques.
Mme la présidente
La parole est à M. Jean-Marie Sermier.
M. Jean-Marie Sermier
Les amendements me semblent au contraire frappés au coin du bon sens. L’important est de maintenir l’existant, même s’il a été créé par l’homme.
M. Charles de Courson
Tout à fait !
M. Fabrice Brun
Pourquoi vouloir détruire systématiquement ce qui a été construit par l’homme ?
M. Jean-Marie Sermier
M. de Courson a rappelé l’exemple de la Dombes. On peut également citer celui de la Bresse jurassienne, où des étangs créés par l’homme sont exploités – trop peu, hélas –, ce qui permet à des pêcheurs professionnels de nous approvisionner en poissons d’espèces bien connues, nous évitant de recourir à l’importation. Nous devons privilégier ce circuit court si nous voulons tenir nos engagements en matière de climat.
Je ne fais pas de procès d’intention au Gouvernement, mais je le mets en garde : si la manière dont le texte devait être appliqué nous amenait demain à revoir certaines installations créées il y a des siècles, nous aurions du souci à nous faire.
M. Fabrice Brun
Oui !
M. Jean-Marie Sermier
Le Gouvernement doit à tout le moins s’engager en précisant ce qui, dans les aménagements réalisés par l’homme, doit être conservé, voire sanctuarisé.
Mme la présidente
La parole est à Mme la rapporteure.
Mme Cendra Motin, rapporteure
Je pense qu’il y a une méprise, peut-être due au fait que la rédaction de l’article est un peu compliquée. Dans la première phrase, l’adjectif « naturel » porte sur les fonctionnalités des écosystèmes et non sur les écosystèmes eux-mêmes.
M. Erwan Balanant
Voilà !
Mme Cendra Motin, rapporteure
Même s’il a été créé par l’homme, un étang a une fonctionnalité naturelle. Il permet par exemple à des carnassiers de se nourrir, comme l’a rappelé Mme Brulebois. J’ajoute – M. Sermier a eu raison de le rappeler – que certains étangs ont été créés il y a très longtemps, de sorte qu’un équilibre naturel s’est établi autour de ces écosystèmes.
Que les écosystèmes aquatiques soient naturels ou non, il importe de préserver leurs fonctionnalités naturelles, ainsi que l’équilibre naturel qui s’est installé autour d’eux, parce qu’il concourt au respect de la biodiversité.
C’est pourquoi je vous demande de retirer ces amendements.
Mme la présidente
Maintenez-vous votre amendement, madame Barbara Bessot Ballot ?
Mme Barbara Bessot Ballot
Si notre préoccupation est prise en compte et que l’amendement est satisfait, j’accepte de retirer l’amendement, mais je le répète : les moulins sont un patrimoine en soi et ils apportent de l’énergie verte. Osons l’affirmer et permettre son exploitation.
(L’amendement no 6052 est retiré.)
Mme la présidente
Maintenez-vous le vôtre, madame Brulebois ?
Mme Danielle Brulebois
Non, madame la présidente, compte tenu de l’engagement de Mme la rapporteure. Celle-ci a rappelé que les biefs des moulins, les étangs et les canaux sont des écosystèmes naturels, qu’il faut préserver en raison de leurs fonctionnalités. Je rappelle en outre qu’ils sont reconnus par la convention de Ramsar, que nous devons respecter.
(L’amendement no 1657 est retiré.)
M. Charles de Courson
Je regrette que l’amendement ne soit pas maintenu.
Mme la présidente
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 5686, qui fait l’objet d’un sous-amendement no 7349.
Mme Cendra Motin, rapporteure
Pour lever une inquiétude peut-être suscitée par des amendements que j’ai défendus en commission, je vous propose de rappeler explicitement que les zones humides et les écosystèmes marins sont des parties du grand ensemble des écosystèmes aquatiques.
Mme la présidente
La parole est à Mme la secrétaire d’État, pour soutenir le sous-amendement no 7349.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
L’objectif de Mme la rapporteure est aussi le mien. Pour rester en cohérence avec le code de l’environnement, il est important et opportun de constater le statut spécifique des écosystèmes marins, au sein des écosystèmes aquatiques. Puisque le code distingue bien les réglementations qui leur sont applicables, il convient de maintenir cette distinction à l’article L. 210-1.
Mme la présidente
Nous comprenons que vous émettez un avis favorable à l’amendement, sous réserve de l’adoption de votre sous-amendement.
La parole est à M. Loïc Prud’homme.
M. Loïc Prud’homme
Puisque nous réfléchissons sur les écosystèmes aquatiques et sur l’opportunité d’apporter quelques précisions au texte, j’appelle l’attention du Gouvernement sur une difficulté. La notion de cours d’eau est définie par des termes assez larges – un lit d’origine naturelle, une alimentation par une source et un débit suffisant pendant la majeure partie de l’année – qui ne rendent pas compte de la diversité des cours d’eau sur l’ensemble du territoire.
On a parfois profité de ce flou pour sortir du cadre de la défense des masses d’eau, issu de la loi de 2016 pour la reconquête de la biodiversité, de la nature et des paysages, et du droit de l’eau, une grande partie du chevelu. De ce fait, dans certains départements, plus du tiers des ruisseaux ne sont plus considérés comme tels et se retrouvent donc livrés à des pollutions industrielles ou agricoles.
Dès lors que nous précisons le texte et que nous redéfinissons certains termes, j’invite le Gouvernement à se saisir de l’occasion pour affiner la définition du cours d’eau et y réintégrer les 30 % du chevelu ne figurant plus sur nos cartes en tant que cours d’eau et qui, bien que situés en amont de tout notre réseau hydrographique, se retrouvent pollués. Nous renouerions alors avec la situation antérieure à 2018, ce qui protégerait non seulement ces cours d’eau mais l’ensemble de l’écosystème aquatique. (Applaudissements
(Le sous-amendement no 7349,
(L’amendement no 5686, sous-amendé, est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Anne-Laure Cattelot, pour soutenir l’amendement no 5923.
Mme Anne-Laure Cattelot
Je le retire.
(L’amendement no 5923 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Venteau, pour soutenir l’amendement no 4715.
M. Pierre Venteau
La préservation et la restauration des fonctionnalités naturelles des écosystèmes sont des objectifs généraux qui méritent d’être poursuivis. Pour autant, l’application de ces principes généraux peut conduire à une déstabilisation, voire à la remise en cause d’activités humaines existantes, qui ont pu prendre en compte ces fonctionnalités. C’est ainsi qu’une retenue d’eau, mise en conformité et servant à l’irrigation, tout en marquant potentiellement une évolution des écosystèmes initiaux, permet aux irrigants qui l’exploitent de lutter efficacement contre le changement climatique. Sa destruction fragiliserait l’agriculture. Nous proposons donc de rappeler que la réalité des activités humaines doit bien être prise en compte en sous-pesant les bénéfices et les risques.
Mme la présidente
Sur article 19, je suis saisie par le groupe Libertés et territoires d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 4715 ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Il vise à relativiser le principe que nous proposons d’énoncer à l’article L. 210-1 du code de l’environnement. Bien que nous souhaitions rappeler l’importance des besoins de la nature, fondement de l’article 19, nous ne voudrions pas laisser penser que nous minimisons, voire oublions les besoins humains. C’est parce que ceux-ci sont essentiels que nous n’avons pas touché à l’article L. 211-1, qui les décrit.
Acceptez-vous de me croire si je vous dis que la rédaction de l’article 19 ne met pas en danger l’intérêt des activités humaines, et de retirer votre amendement ? Cela m’évitera d’émettre un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Votre proposition d’ajouter le respect des équilibres naturels à celui des activités existantes me semble satisfaite par l’article L. 210-1, qui rappelle le respect des droits antérieurement établis – précision qui devrait suffire à vous rassurer. Il y est précisé en outre que « l’eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection, sa mise en valeur et le développement de la ressource utilisable, dans le respect des équilibres naturels, sont d’intérêt général. »
Mme la présidente
La parole est à M. Pierre Venteau.
M. Pierre Venteau
Compte tenu de la conviction de Mme la rapporteure, je retire l’amendement.
(L’amendement no 4715 est retiré.)
Mme la présidente
La parole est à M. Guy Bricout, pour soutenir l’amendement no 283.
M. Guy Bricout
Je propose d’insérer, après la première phrase de l’alinéa 2, la phrase suivante : « La préservation et la restauration de ces fonctionnalités s’appliquent à tous les territoires et doivent être garanties sur les territoires urbanisés et fortement artificialisés. »
L’article 19 souligne le rôle essentiel des milieux aquatiques dans la protection des écosystèmes et de la biodiversité, mais il omet de mentionner les milieux aquatiques urbains. Or, ceux-ci ne doivent pas être les laissés pour compte de la préservation de l’écosystème aquatique, compte tenu de leur développement et de leur impact significatif sur la biodiversité. Il semble essentiel de mentionner les trames bleues dans l’article afin d’inciter à mettre en place ces continuités écologiques aquatiques urbaines, garantes de la préservation de la biodiversité et des écosystèmes.
De fait, au-delà même de la simple conservation de l’écosystème aquatique, les trames bleues comportent de nombreux avantages écologiques. Les zones humides en ville ont un rôle épuratif : la Seine permet par exemple d’économiser près de 50 % du coût d’épuration de l’eau. Par ailleurs, ces espaces humides et aquatiques agissent comme des zones tampons qui aident à limiter les risques d’inondation. Enfin, ils contribuent à atteindre ou à conserver le bon état écologique ou le bon potentiel des eaux de surface et des écosystèmes aquatiques.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Nous avons déjà eu cette discussion en commission. Vous avez raison de souligner les bienfaits des écosystèmes aquatiques créés par l’homme, qui, s’ils ne sont pas naturels, apportent de réels bienfaits dans les zones très urbanisées – ce pourquoi nous les encourageons.
J’aimerais cependant vous rassurer : comme nous l’avons indiqué tout à l’heure, tous les écosystèmes aquatiques, qu’ils soient naturels ou non, et situés en milieu rural ou urbain, sont concernés par l’article L.210-1 et ils seront préservés par les dispositions que nous allons voter. De plus, même si les bienfaits que vous décrivez sont réels, je ne crois pas opportun d’introduire ce rappel dans un texte de loi. Je vous suggère donc de retirer l’amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Je partage l’opinion de M. Bricout : les écosystèmes aquatiques en milieu urbain sont essentiels pour lutter contre les îlots de chaleur, pour assurer une meilleure résilience des villes. Toutefois, cet article concerne les écosystèmes aquatiques et leurs fonctionnalités, qu’ils soient urbains, forestiers, ruraux ou littoraux. Or d’une part, votre amendement introduit une spécificité, au risque de ne pas être exhaustif et d’oublier tel écosystème ou telle fonctionnalité ; d’autre part, il prévoit une obligation de résultat, ce qui nous expose à un risque important de contentieux. Je vous invite donc à retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
(L’amendement no 283 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Les amendements nos 4503 et 4505 de Mme Josette Manin et 6204 de Mme Sira Sylla sont défendus.
(Les amendements nos 4503, 4505 et 6204, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 2485.
Mme Émilie Bonnivard
Il vise à compléter l’article 19 par l’alinéa suivant : « Le respect et la protection de la biodiversité impliquent de garantir dans les espaces naturels l’équilibre entre les espèces animales sauvages, apprivoisées et d’élevage. Les activités humaines ayant des impacts bénéfiques sur la biodiversité sont prises en compte et valorisées au titre de la préservation des territoires ».
Il vise à appeler votre attention sur l’importance de préserver le pastoralisme dans les zones de montagne, notamment l’élevage extensif ovin qui, depuis quelques années, est mis en difficulté en raison de la réintroduction des loups et de la protection stricte de cette espèce, et de celle des ours, notamment dans les Pyrénées.
Il est indispensable que nous garantissions un équilibre entre les activités humaines durables qui valorisent notre territoire et notre patrimoine – l’agriculture durable, je le répète, favorise la biodiversité dans ces territoires – et la réintroduction d’espèces sauvages strictement protégées. Aujourd’hui, cette cohabitation n’est pas optimale : 12 000 animaux sont tués chaque année par les loups, et les ours posent également des difficultés. Nous devons également protéger les activités pastorales ancestrales, au nom de la biodiversité et de la préservation des territoires.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Nous partageons, bien entendu, la même préoccupation, à savoir trouver le bon équilibre entre les activités humaines et la biodiversité. Or, je le sais car nous vivons dans la même région, la réintroduction du loup et de certains animaux peut poser des problèmes. Nous sommes toujours à la recherche d’un équilibre difficile à trouver, qui implique un long dialogue entre les acteurs et le changement ou l’autorisation de certaines pratiques. Vous avez raison, notre rôle est de trouver cet équilibre et de le garantir pour tous.
Si votre amendement n’a pas vraiment sa place dans cet article, j’entends l’appel que vous avez lancé : nous partageons tous cette préoccupation et nous pouvons nous rejoindre pour trouver le nécessaire équilibre. Je vous propose de retirer votre amendement que je considère comme un amendement d’appel.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Je vous rejoins, madame Bonnivard, quant au défi que nous devons relever. L’objet de la stratégie Aires protégées, que j’ai présentée en début d’année, est précisément de retrouver ces équilibres, d’offrir une protection à la française, redonnant aux activités humaines leur place dans leur espace naturel. Néanmoins, l’amendement, qui vise la gestion des espaces naturels et des espèces sauvages, ne relève pas de la loi sur l’eau ni de l’article L. 210-1 du code de l’environnement. Par conséquent, j’émets un avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Julien Aubert.
M. Julien Aubert
L’amendement de ma collègue Émilie Bonnivard est très important. Tout d’abord, permettez-moi une remarque sur la méthode : à chaque fois que le groupe Les Républicains propose un amendement, vous nous répondez toujours la même chose,…
Mme Cendra Motin, rapporteure
Ah ça, non !
M. Julien Aubert
…que vous partagez notre opinion, que vous êtes d’accord avec notre proposition qui va dans le bon sens mais soit ce n’est pas le bon moment, soit ce n’est pas le bon article ou le bon alinéa. On est un peu comme Georges Brassens, « on s’est trompé d’idée ». Il y a l’amour et les preuves d’amour ; pour ma part, je souhaiterais que vous donniez des preuves de partage en nous rejoignant sur cet amendement.
En effet, cet article mentionne les équilibres naturels et, s’il y a bien une discussion que nous devons avoir dans le cadre de l’examen d’un texte sur l’écologie, c’est celle relative à la place de l’homme dans les équilibres naturels. Il y a deux sortes d’écologistes : ceux qui considèrent que l’homme est un problème pour l’équilibre naturel…
M. Jacques Cattin
Ils feraient mieux de s’occuper de l’explosion démographique en Afrique !
M. Julien Aubert
…et que, pour faire court, s’il y avait moins d’humains, finalement, on irait mieux ; ceux qui pensent que l’homme est essentiel à l’équilibre naturel et qu’on protège l’environnement pour protéger l’homme. Or s’agissant du pastoralisme, et ainsi que l’a expliqué Émilie Bonnivard, la politique écologique a consisté à libérer des espèces sauvages – je parle bien entendu du loup, mais il y en a d’autres –, à les laisser proliférer. Aujourd’hui, certains éleveurs sont dans l’incapacité de continuer leur activité, on assiste à une déprise agricole, à un déclin de l’agriculture dans certaines zones. Si on y répond en leur versant des indemnisations, le pretium
Ainsi, l’adoption de cet amendement démontrerait que, premièrement, l’homme fait partie de la transition écologique ; deuxièmement, le pastoralisme doit être autant respecté que l’introduction ou la protection d’espèces sauvages ; troisièmement et fort accessoirement, la vie des brebis et des moutons qui se font dévorer par les loups est tout aussi importante que celle des loups qu’on cherche à protéger. Pour toutes ces raisons, je vous invite à voter cet amendement qui permet de réintroduire l’homme dans la transition écologique.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.
Mme Marie-Noëlle Battistel
Je voudrais remercier notre collègue Émilie Bonnivard d’avoir abordé ici ce sujet. J’entends bien les arguments concernant sa place dans cet article. Mais alors où est-elle ? À chaque fois qu’on expose le sujet, ce n’est jamais ni le bon texte ni la bonne place.
Mme Valérie Beauvais
Eh oui !
Mme Marie-Noëlle Battistel
Or nous n’avons pas de multiples occasions de sensibiliser sur cette question très importante, notamment dans les territoires de montagne, qui doit être abordée à un moment ou à un autre. Nous devons lui trouver une place ; si elle n’est pas ici, où est-elle ?
Mme Valérie Beauvais
Il faut une réécriture des articles !
Mme la présidente
La parole est à Mme Frédérique Tuffnell.
Mme Frédérique Tuffnell
Si je trouve ce sujet très intéressant, l’article est relatif aux écosystèmes aquatiques…
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Tout à fait !
Mme Frédérique Tuffnell
…et non aux questions d’élevage d’ovins dans les montagnes ou aux zones humides en général auxquelles je suis tout à fait favorable et qui sont un objectif clair. Ainsi, recentrons-nous sur les systèmes aquatiques et les milieux humides qui sont l’objet de l’article 19. Je pense que cette question est hors sujet et je suis la première à dénoncer le nombre d’amendements qui le sont.
Mme la présidente
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Je rappelle que la stratégie aires protégées est inscrite à l’article 56 du projet de loi ; nous y reviendrons largement. Les mystères relatifs au placement de cet amendement sur cet article m’échappent.
Mme la présidente
La parole est à Mme Émilie Bonnivard.
Mme Émilie Bonnivard
Je souhaite le maintenir car nous sommes confrontés à un choc de temporalité. Certains jeunes ne souhaitent et ne peuvent plus s’installer et il arrive que des éleveurs partant à la retraite ne soient pas remplacés. Je ne peux pas l’accepter. Les effets de bord de cette impossible cohabitation, en tout cas pour le moment, conduisent les élevages à développer des pratiques contraires à celles qui sont durables et que nous souhaitons tous voir perdurer. En effet, les animaux reviennent plus tôt dans les étables et sont nourris avec des aliments transportés par camion, alors que, normalement, ils vivent dans la nature et restent le plus tard possible dans les estives.
Nous en arrivons donc à des effets contraires à ce que nous souhaitons pour le pastoralisme, alors qu’il engendre des conséquences positives pour la biodiversité comme peu de pratiques agricoles en produisent. En raison de ce problème de temporalité et d’urgence, je maintiens mon amendement pour qu’il puisse être voté. J’ignore pourquoi il a été placé ici, mais peu importe.
(L’amendement no 2485 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Florence Lasserre, pour soutenir l’amendement no 4992.
Mme Florence Lasserre
L’article 19 consacre les écosystèmes aquatiques comme des « éléments essentiels du patrimoine naturel », notion qui reste floue et peu opposable dans le cadre de contentieux devant les tribunaux. Ainsi, cette inscription dans la loi pénalisera les projets de production d’hydroélectricité, qui ne sont pas encore reconnus d’intérêt majeur par les textes et qui seront, demain plus qu’aujourd’hui, jugés non compatibles avec la préservation des milieux aquatiques.
Afin d’éviter que la production d’hydroélectricité soit la grande perdante de la consécration des écosystèmes aquatiques, le présent amendement vise à préciser que l’attention particulière portée à ce patrimoine naturel ne doit pas faire oublier la poursuite des autres politiques publiques, telles que la lutte contre le réchauffement climatique, la transition énergétique et la production d’énergies renouvelables.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Je le répète : si nous modifions l’article L. 210-1 du code de l’environnement conformément à votre amendement, la priorité que nous souhaitons reconnaître au bon fonctionnement des milieux aquatiques sera relativisée au regard de la question énergétique.
Nous sommes tous ici convaincus que les usages énergétiques de l’eau sont importants et présentent un réel potentiel, c’est vrai pour la petite comme pour la grande hydroélectricité – ce n’est pas Mme Battistel qui me dira le contraire. Or l’article 19 autorise ces usages dans la mesure où l’on protège les écosystèmes aquatiques qui les entourent. Je prends l’exemple de ma région, traversée par le Rhône : la Compagnie nationale du Rhône œuvre depuis cinquante ans à la préservation de ces écosystèmes tout en étant un acteur majeur de l’hydroélectricité.
Ainsi, l’objectif de cet article n’est pas de favoriser un usage plutôt qu’un autre mais de faire en sorte qu’ils cohabitent correctement et harmonieusement sans pour autant relativiser l’importance que nous souhaitons accorder aux écosystèmes aquatiques. Par conséquent, je vous propose de retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Je suis d’accord avec vous : nous devons trouver une nécessaire cohérence entre nos objectifs énergétiques climatiques et la préservation de la biodiversité et du bon état des masses d’eau dans le cadre de la gestion des écosystèmes. Or tant l’article 19, l’article L. 210-1 du code de l’environnement que nos politiques générales en matière de gestion de l’eau assurent cette cohérence. Ainsi, je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.
(L’amendement no 4992 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Panot, pour soutenir l’amendement no 6730.
Mme Mathilde Panot
Il vise à imposer un moratoire sur l’extraction de sable en baie de Lannion, un grand projet inutile qui provoque de terribles ravages environnementaux. En effet, l’exploitation industrielle des sables marins bouleverse les fonctionnalités des écosystèmes océaniques où ils sont prélevés et a une forte incidence négative sur la faune qui y réside ainsi que sur le littoral, menacé par le recul du trait de côte.
J’insiste également sur le fait que l’extraction de sable est rejetée par tout le monde dans la région, qu’il s’agisse des pêcheurs, des commerçants, des acteurs du secteur touristique, des associations – à l’instar du collectif Le Peuple des dunes de Batz à Bréhat –, des naturalistes évidemment, ainsi que des élus qui ont saisi la justice à plusieurs reprises contre ce projet.
De plus, le présent amendement tend à faire cesser le climatocynisme du Gouvernement et l’amnésie du Président du République en matière d’écologie. En effet, Emmanuel Macron, alors candidat à l’élection présidentielle, avait nié avoir autorisé l’extraction de sable en baie de Lannion, indiquant que seuls des permis de recherche avaient été délivrés. Pourtant, en avril 2015, c’est bien lui qui, en tant que ministre de l’économie, avait signé le décret attribuant une autorisation d’exploitation de quinze ans à la Compagnie armoricaine de navigation. Pire, s’il a annoncé l’arrêt du projet le 20 juin 2018, cette fois en sa qualité de Président de la République, il a depuis oublié d’abroger le décret en question.
Je le répète, nous demandons l’arrêt de ce grand projet inutile. Je rappelle qu’un site Natura 2000 se trouve à deux kilomètres du lieu d’extraction. On ne peut à la fois déclarer des zones protégées et accorder la possibilité de les détruire !
Enfin, je profite de cette intervention pour apporter mon plein soutien aux journalistes victimes de pressions, d’intimidations et de menaces par les grands groupes alimentaires auxquels nous faisons ici référence et qui, au nom de leurs intérêts privés, prélèvent ce sable au détriment de toute une région. Ce soutien s’adresse particulièrement à Morgan Large et Inès Léraud, (Mme Caroline
Il faut que ces intimidations cessent et que l’État se montre ferme en mettant un terme à ce grand projet inutile et dangereux !
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Je ne répondrai ni à vos invectives ni à vos commentaires assez déplaisants à l’endroit du Président de la République. Je vous dirai simplement que votre amendement est satisfait et je pense que, mieux que moi, mon collègue Éric Bothorel vous expliquera pourquoi. En tant que député de Lannion, il pourra nous éclairer sur cette question. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
L’exploitation des sables coquilliers, qui relève du domaine réglementaire et non du domaine législatif, a été strictement encadrée. Elle a été autorisée pour quinze ans, mais interdite de mai à août inclus, et un document stratégique de façade a été élaboré en concertation avec les acteurs locaux. Nous y avons rappelé l’enjeu écosystémique que revêtent les sables coquilliers, qui structurent le fonctionnement des écosystèmes et constituent des zones d’alimentation pour les prédateurs.
L’extraction est limitée aux dunes hydrauliques et doit être évitée sur les dunes du haut talus. Une cible a été fixée s’agissant des surfaces de dunes mobiles pouvant être soumises à extraction. Et il a été décidé en 2019 de n’accorder aucune nouvelle autorisation d’extraction sur cette façade littorale.
Ainsi, au-delà des engagements de l’État, l’activité d’extraction de sables coquilliers en baie de Lannion est strictement encadrée et une trajectoire claire a été établie dans la concertation pour les années à venir – même s’il nous faudra bien sûr rester vigilants. Je demande donc le retrait de l’amendement. À défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Éric Bothorel.
M. Éric Bothorel
Merci, madame Panot, pour cet amendement qui nous permet de redire à quel point l’ensemble de la population trégorroise est opposée à ce projet et combien elle l’a affirmé haut et fort. Vous avez cité l’implication du Peuple des dunes, nous pourrions aussi mentionner celle d’Alain Vidal, de ma collègue Sandrine Le Feur, ainsi que le combat mené par ma prédécesseure Corinne Erhel. Elle n’aura pas eu la possibilité d’entendre, en 2018, le Président de la République décréter ce que vous demandez, c’est-à-dire la suspension du projet d’extraction. En effet, je crois que vous confondez les termes « suspension » et « abrogation ». En l’occurrence, votre amendement vise bien à imposer une suspension et c’est justement ce qu’a décidé le Président de la République.
Lors du décès de Corinne Erhel puis de ses obsèques, il avait affirmé qu’il n’oublierait jamais l’engagement de l’ensemble des Trégorrois, des acteurs économiques, de Joël Le Jeune, des acteurs du secteur touristiques. Ce n’étaient pas des Gaulois réfractaires qui s’opposaient à l’extraction, mais l’ensemble de la population de la région. Ils ont dit leur opposition de manière très claire et elle a été parfaitement entendue. Depuis trois ans, il n’y a plus d’extraction de sable en baie de Lannion et il n’y en aura plus à l’avenir. (Applaudissements
Mme la présidente
La parole est à Mme Mathilde Panot.
Mme Mathilde Panot
Je suis heureuse d’entendre ce qui vient d’être dit. Cependant, Joël Le Jeune, le président de la communauté d’agglomération Lannion-Trégor-Communauté dont vous avez cité le nom, a bien annoncé qu’il allait se pourvoir en cassation pour obtenir l’annulation du décret par lequel l’extraction de sable a été autorisée. Quoi qu’il en soit, si, comme vous le dites, il n’y a plus d’extraction de sable en baie de Lannion, nous pouvons tout à fait l’inscrire dans le projet de loi. (Mme Caroline
(L’amendement no 6730 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’article 19, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 163
Nombre de suffrages exprimés 139
Majorité absolue 70
Pour l’adoption 115
Contre 24
(L’article 19, amendé, est adopté.)
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures vingt, est reprise à seize heures trente-cinq.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
Après l’article 19
Mme la présidente
La parole est à Mme Valérie Petit, pour soutenir l’amendement no 4894.
Mme Valérie Petit
Cet amendement vise à faire de la préservation de la biodiversité un critère d’évaluation de la performance environnementale des bâtiments. En d’autres termes, il s’agit de faire en sorte que les constructions neuves ou anciennes fassent toute leur place à la faune et à la flore, grâce à l’aménagement de nichoirs, par exemple, ou à la préservation des végétaux qui rendent certains services, en termes d’isolation notamment.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
J’espère vous rassurer en indiquant que vos préoccupations au sujet de la performance énergétique et environnementale des bâtiments trouvent des réponses dans ce texte, notamment grâce à la végétalisation des toits, que nous aborderons à l’article 24.
Cela étant, les normes de performance environnementale sont déjà nombreuses et exigeantes. Nous les faisons d’ailleurs évoluer, ne serait-ce qu’avec le diagnostic de performance énergétique et la réglementation environnementale des bâtiments neufs – RE2020 – qui sera bientôt en place.
Il me paraît donc plus prudent à ce stade de s’assurer de la bonne application des règles existantes plutôt que d’en rajouter. C’est pourquoi je demande le retrait de votre amendement ; à défaut, ce sera un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Si je partage votre souci de préserver la biodiversité, je suis moins convaincue par l’ajout que vous proposez à l’article L. 171-1 du code de la construction et de l’habitation, qui concerne la performance environnementale des bâtiments.
En effet, il reste difficile de corréler les émissions de gaz à effet de serre et la perte d’abondance de la biodiversité. Nous manquons encore de recul et de données chiffrées, et nous avons entrepris un important travail de définition des indicateurs, qui prend progressivement forme. C’est donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Valérie Petit.
Mme Valérie Petit
Je ne suis pas convaincue mais j’ai confiance en Mme la ministre, et je compte sur elle pour que nous rattrapions notre retard en matière d’indicateurs de la biodiversité ; c’est indispensable dans le domaine du bâtiment mais également pour ce qui concerne l’empreinte des entreprises sur la biodiversité. Je retire mon amendement.
(L’amendement no 4894 est retiré.)
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 124 rectifié, 268 rectifié, 1115, 1185 rectifié, 2106 rectifié, 3131, 3495, 4560, 4835, 2407, 2688, 3817 et 4335, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 124 rectifié, 268 rectifié, 1115, 1185 rectifié, 2106 rectifié, 3131, 3495, 4560 et 4835 ainsi que les amendements nos 2407, 2688, 3817 et 4335 sont identiques.
Les amendements identiques nos 124 rectifié de M. Éric Girardin, 268 rectifié de M. Dino Cinieri, 1115 de M. Pierre Vatin, 1185 rectifié de M. Dominique Potier, 2106 rectifié de Mme Delphine Batho, 3131 de Mme Lise Magnier et 3495 de M. Stéphane Viry sont défendus.
La parole est à M. Philippe Meyer, pour soutenir l’amendement no 4560.
M. Philippe Meyer
Le présent amendement a pour objectif d’assurer l’équilibre du bilan carbone des politiques de mobilisation de la biomasse forestière. Il vise en particulier à éviter que ces politiques ne portent atteinte à ce remarquable puits de carbone qu’est la forêt dans notre pays, ce qui implique notamment d’éviter les formes d’exploitation qui conduisent à la mise en lumière des sols, avec des risques de libération du carbone.
Il intègre le principe du respect de la hiérarchie des usages, afin d’éviter que des bois d’œuvre ou des bois pouvant avoir une autre vocation soient utilisés pour de la simple valorisation énergétique.
En outre, il propose que l’approvisionnement en bois soit assuré dans un rayon limité, afin d’éviter l’importation de matières qui, d’une part, alourdiraient le bilan carbone et, d’autre part, augmenteraient les nuisances connexes – dégradation des routes, pollution, nuisances sonores, entre autres.
Enfin, il entend mettre en cohérence la politique nationale énergétique avec les objectifs de la politique forestière de notre pays.
Mme la présidente
L’amendement no 4835 n’est pas défendu…
M. Bertrand Bouyx
Si, je suis là, madame la présidente, il fallait juste que je me lève…
M. Thibault Bazin
On se réveille !
Mme la présidente
Pardon, monsieur Bouyx, mais vous êtes un certain nombre à changer de place, et il n’est pas toujours facile de s’y retrouver.
M. Bertrand Bouyx
C’est vrai, j’ai officiellement changé de place il y a deux mois.
Mme la présidente
J’avais en effet remarqué que cela se faisait beaucoup sous cette législature…
M. Bertrand Bouyx
Ce sont les aléas de la vie parlementaire ! (Sourires.)
Mme la présidente
Monsieur Bouyx, vous avez donc la parole pour soutenir l’amendement no 4835.
M. Bertrand Bouyx
Cet amendement vise à assurer l’équilibre du bilan carbone des politiques de mobilisation de la biomasse forestière, afin que ces politiques ne portent pas atteinte au puits de carbone forestier. Il intègre le principe du respect de la hiérarchie des usages et fait en sorte que l’approvisionnement en bois soit assuré dans un rayon limité ; enfin, il met en cohérence la politique nationale énergétique avec les objectifs de la politique forestière.
Mme la présidente
Les amendements identiques nos 2407 de M. Michel Vialay, 2688 de M.François-Michel Lambert, 3817 de M. Dominique Potier et 4335 de Mme Delphine Batho sont défendus.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Ces amendements ont plusieurs objectifs. Le premier est de rappeler que la politique énergétique en général et les stratégies de valorisation de la biomasse forestière en particulier doivent rester cohérentes avec les enjeux et les objectifs des autres politiques publiques. Si cette exigence est indispensable, il ne me semble pas nécessaire pour autant de l’inscrire dans le marbre de la loi. En outre, nous avons voté, à l’article 14, une disposition qui me semble répondre à votre objectif, puisqu’elle établit que des stratégies telles que la stratégie nationale de recherche, la stratégie nationale bas carbone et la stratégie nationale pour la biodiversité doivent avoir des trajectoires parallèles et tenir compte les unes des autres.
M. Vincent Descoeur
Il y en a, des stratégies ! C’est une armée mexicaine de stratèges, que vous avez !
Mme Cendra Motin, rapporteure
En ce qui concerne la valorisation du coût de la biomasse à des fins de production de matériaux et d’énergie, il est évident que nous partageons la même ambition et le même objectif. En revanche, vouloir limiter le rayon d’approvisionnement en bois afin de réduire les impacts liés au transport pourrait être contre-productif, même si je comprends votre intention. En effet, le marché du bois n’est pas un marché régional, ni même un marché national, mais un marché international.
Il est vrai qu’aujourd’hui, pour le bois, notre balance commerciale est affreusement mauvaise, puisque nous exportons énormément de grumes pour réimporter du bois transformé, ce qui n’est absolument pas souhaitable. C’est d’ailleurs pour cela que la politique de gestion des forêts est si importante. Cela étant, cette politique de gestion doit pouvoir s’adapter en fonction des nécessités, en l’occurrence le réchauffement climatique, qui nous oblige à modifier les pratiques forestières.
Il est préférable que ces recommandations aient une portée réglementaire plutôt que législative, c’est pourquoi j’émettrai un avis défavorable à l’ensemble des amendements.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
C’est en effet une évidence qu’il faut, dans la hiérarchie des usages, réserver le produit du long travail des forestiers et de la nature au bois d’?uvre ; c’est une évidence économique et une évidence environnementale.
Cela répond aussi à un souci de cohérence, mais il n’est sans doute pas nécessaire de rappeler dans la loi l’articulation entre les différentes politiques publiques qui doivent maintenir cette cohérence.
Enfin, en ce qui concerne la limitation du rayon d’approvisionnement, un cadre de la durabilité des bioénergies issu du droit européen doit être précisé courant 2021 ; il nous apportera des éléments de réponse et des outils de contrôle. C’est donc une demande de retrait ou un avis défavorable.
(Les amendements identiques nos124 rectifié, 268 rectifié, 1115, 1185 rectifié, 2106 rectifié, 3131, 3495, 4560 et 4835 ne sont pas adoptés.)
(Les amendements identiques nos 2407, 2688, 3817 et 4335 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Frédérique Tuffnell, pour soutenir l’amendement no 4991.
Mme Frédérique Tuffnell
Nous proposons que soit mentionnée, au premier alinéa de l’article L. 110-1 du code de l’environnement, la qualité de l’eau. Il s’agit d’être exhaustif et de l’y faire figurer au même titre que la qualité de l’air, même si elle figure à l’article L. 210-1.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Comme vous venez de le dire très justement, l’article L. 110-1 répond déjà à votre demande. L’eau y est, en quantité comme en qualité, déjà comprise dans la notion de « ressources et milieux naturels terrestre et marin » qu’on y trouve. Par ailleurs, il serait risqué de préciser davantage la portée des fondamentaux du droit de l’environnement.
On pourrait se demander, en lisant l’article : « Je vois inscrite la qualité de l’air. Pourquoi ne pas ajouter la qualité de l’eau ? » Néanmoins, j’ai effectué quelques recherches qui m’ont permis de retrouver, à plusieurs endroits du code de l’environnement, la notion de qualité de l’air, et j’ai l’impression que, l’air n’étant pas quelque chose de physique que l’on peut décrire (M. Charles
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Cet amendement qui vise à inscrire la qualité de l’eau à l’article L. 110-1 du code de l’environnement m’interpelle : en effet, pourquoi ne pas citer explicitement la qualité de l’eau dans cet article général qui liste les compartiments de l’environnement faisant partie du patrimoine commun de la nation ? Ce sera pour moi un avis de sagesse. (« Ah ! »
(L’amendement no 4991 est adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 5774 de M. Christophe Jerretie est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Je m’étais engagée à répondre à notre collègue sur cet amendement ; je m’exécute donc pour dire à nouveau que le caractère d’intérêt général de l’équilibre des fonctionnalités des milieux aquatiques et marins est satisfait par l’article L. 210-1 du code de l’environnement : « L’eau fait partie du patrimoine commun de la nation. Sa protection […], dans le respect des équilibres naturels, [est] d’intérêt général. » Il n’est pas nécessaire de préciser cette notion plus qu’elle ne l’est déjà. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Je partage cette analyse. Le premier alinéa de l’article L. 210-1 du code de l’environnement répond déjà à cette volonté en élevant l’équilibre des écosystèmes aquatiques au rang de bien commun d’intérêt général. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
(L’amendement no 5774 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l’amendement no 2671.
Mme Josiane Corneloup
La gestion équilibrée de la ressource en eau vise à concilier les intérêts liés à sa protection en tant que milieu naturel et les intérêts liés à sa valeur économique. Cette gestion implique que soient prises en compte toutes les composantes du milieu aquatique et toutes les activités humaines qui s’exercent sur ces milieux. Il n’y a pas de hiérarchie entre les usages. L’ajout visé à l’article L. 210-1 du code de l’environnement conduit à remettre en cause les fondements du droit de l’eau en donnant la prépondérance aux enjeux de la préservation et de la restauration des fonctionnalités des écosystèmes aquatiques. L’équilibre actuel entre les usages est ainsi rompu. L’amendement vise à déplacer une partie des écrits dans l’article L. 211-1 du code de l’environnement pour conserver le principe de la gestion équilibrée de la ressource en eau.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
L’amendement est une redite du débat précédent sur la migration de dispositions de l’article L. 210-1 vers l’article L. 211-1. J’émets encore une fois un avis défavorable, surtout à cet endroit du texte.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Le respect des équilibres naturels forme le cadre d’une gestion de l’eau qui soit d’intérêt général. Il me semble logique d’apporter des précisions sur cette notion au même article, sans bousculer pour autant le cadre fondamental de l’équilibre actuel que la loi fixe depuis 1992. Avis défavorable.
(L’amendement no 2671 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 5190 de M. Jean-Pierre Vigier est défendu.
(L’amendement no 5190, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de deux amendements, nos 605 et 6423, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Emmanuel Maquet, pour soutenir l’amendement no 605.
M. Emmanuel Maquet
Il vise à clarifier la protection des zones humides. Un arrêt du Conseil d’État a considéré que deux critères – sol hydromorphe et végétation hygrophile – devaient être remplis pour définir une zone humide. En plus d’ouvrir une période d’incertitude autour du statut à accorder aux zones humides et de faire disparaître virtuellement celles ne relevant que de l’un des deux critères, cette décision a deux conséquences majeures : la destruction d’espaces occupés par une végétation hygrophile au profit d’espaces artificialisés, car il suffit de détruire la végétation pour empêcher de considérer le terrain comme une zone humide, et la condamnation des milieux humides dégradés qui ne peuvent bénéficier de programmes de restauration, par exemple dans le cadre de la compensation écologique.
Cette décision est illogique eu égard aux objectifs ambitieux que le Gouvernement s’est fixés dans le cadre de la préservation de la biodiversité. Il primordial, dans un projet de loi sur le climat aussi important que celui-ci, de ne pas occulter les milieux qui sont essentiels à sa préservation, comme les milieux humides. C’est pourquoi l’amendement propose de clarifier l’article L. 211-1 du code de l’environnement. Une telle modification est nécessaire pour préserver ces espaces magnifiques.
Mme la présidente
La parole est à Mme Sandrine Le Feur, pour soutenir l’amendement no 6423.
Mme Sandrine Le Feur
Il vise à clarifier le code de l’environnement afin d’assurer la pleine protection des zones humides en spécifiant que ces zones concernent également les sols hydromorphes sans végétation hygrophile. Par un arrêt de 2017, le Conseil d’État a considéré que les deux critères – sol hydromorphe et végétation hygrophile – devaient être constatés pour définir une zone humide. Cela ouvre une possibilité de destruction d’espaces ne satisfaisant qu’un seul de ces critères, au profit d’espaces artificialisés. Il s’agit de clarifier ce point afin que la jurisprudence ne joue pas en la défaveur de la préservation des zones humides.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Cette précision est redondante avec la définition des zones humides donnée à l’article L. 211-1 du code de l’environnement. Depuis la loi du 24 juillet 2019 portant création de l’Office français de la biodiversité (OFB), il me semble que cette définition suffit pour couvrir tous les types de zones humides que vous souhaitez protéger. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
La loi du 24 juillet 2019 portant création de l’Office français de la biodiversité a bien introduit une définition selon des critères non cumulatifs, sol hydromorphe ou végétation hygrophile. Les précisions proposées dans l’amendement de M. Maquet existaient en partie dans le projet du Gouvernement soumis au Conseil d’État, et celui-ci a considéré que les exemples et illustrations relevaient du niveau réglementaire. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
(L’amendement no 6423 est retiré.)
(L’amendement no 605 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Sur les amendements no 171 et identiques, je suis saisie par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Guy Bricout, pour soutenir l’amendement no 278.
M. Guy Bricout
Il vise à insérer, après le 7° créé à l’article 19, un 8° ainsi rédigé : « La création ou l’élargissement d’aires protégées préservant les écosystèmes aquatiques d’eau douce afin de permettre une plus grande résilience de la biodiversité. »
Le chapitre III du projet de loi montre l’importance de la restauration et de la préservation des écosystèmes aquatiques en France. En effet, ces espaces sont bien souvent négligés alors qu’ils accueillent une biodiversité vaste et variée et participent largement à la lutte contre le changement climatique. Il convient donc de mieux protéger les écosystèmes aquatiques dans la stratégie de restauration de la biodiversité grâce à une meilleure maîtrise des aires protégées. Bien que le Gouvernement français semble attaché à la conservation de la nature, les aires protégées ne représentent que 23,5 % du territoire métropolitain et d’outre-mer. C’est pourquoi le Gouvernement a l’ambition d’étendre ces zones à 30 % du territoire dès 2022. Pourtant, il est surprenant de constater que, ni dans la stratégie nationale pour les aires protégées 2030, ni dans le plan d’action 2021-2023 de la stratégie nationale pour les aires protégées 2030 ne figurent de chapitre et d’objectifs clairs concernant l’eau douce et les écosystèmes aquatiques.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Si je partage la préoccupation que vous exprimez concernant la protection des écosystèmes d’eau douce et des aires protégées – sujet sur lequel Mme la secrétaire d’État vous répondra sans doute bien mieux que moi –, l’amendement n’a pas sa place dans l’article L. 211-1 du code de l’environnement. Par ailleurs, nous avons répondu à votre souci en adoptant en commission spéciale l’amendement de notre collègue Martial Saddier, devenu l’article 19 bis, lequel nous aidera à protéger ces masses d’eau douce si précieuses. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Nous en débattrons à l’article 56 du projet de loi. Je vous remercie de l’attention que vous portez aux écosystèmes aquatiques, mais il me semble que la stratégie nationale pour les aires protégées prend bien en compte ce paramètre en protégeant les cours d’eau et les zones humides. Nous avons également le projet de créer un parc national dédié, dont nous reparlerons à l’article 56.
(L’amendement no 278 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Frédérique Tuffnell, pour soutenir l’amendement no 4993.
Mme Frédérique Tuffnell
Dans le même ordre d’idées, il vise à inscrire la restauration des zones humides à l’article à L. 211-1 du code de l’environnement, notamment celle des tourbières, des mangroves, des ripisylves, etc. Près de deux tiers des zones humides ont disparu en France depuis le XXe siècle ; une étude de 2010-2012 indiquait que, sur 206 zones humides identifiées, 48 % continuaient de se dégrader et 11 % seulement étaient en amélioration, ce qui est très peu. Le constat est franchement alarmant, et inscrire une disposition en ce sens à l’article L. 211-1, comme on nous l’a pratiquement conseillé, serait un élément très fort.
Nous avons besoin de restaurer les zones humides et surtout d’éviter de les dégrader. Cette dégradation est surtout à éviter dans le cas des tourbières, qui représentent 3 % des terres émergées dans le monde mais captent 30 % du carbone ; il ne faut surtout pas les retourner, ce qui dégagerait ce carbone. Les tourbières jouent un rôle très précieux, et inscrire cette disposition à cet endroit du code de l’environnement est pour moi une évidence.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Merci, madame Tuffnell, d’avoir pris en compte les demandes que nous avions formulées en commission spéciale. Néanmoins, je reste mal à l’aise avec cet amendement qui imposerait une restauration des zones humides. Nous avons pris la précaution d’indiquer, à l’article L. 210-1 du code de l’environnement, que la restauration se ferait « le cas échéant ». Ici, vous l’imposez de fait, de surcroît à l’article L. 211-1, dont nous avons déjà vu qu’il était plus facilement opposable et pouvait donc susciter plus de contentieux. D’autre part, l’avis du Conseil d’État nous a indiqué qu’il fallait éviter de dresser trop de listes de milieux aquatiques, or l’amendement revient en arrière en réintroduisant la liste de milieux aquatiques que le Gouvernement avait supprimée à l’article 19. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Je suis très sensible à cet amendement qui porte sur la restauration des tourbières, mangroves et autres ripisylves et herbiers marins au service écosystémique ô combien significatif. Les zones humides sont des milieux fortement dégradés et représentent une partie importante des solutions fondées sur la nature, dont nous souhaitons voir le développement et la massification.
Le premier alinéa de l’article L. 211-1 du code de l’environnement, consacré aux zones humides, permet déjà de protéger les tourbières et les mangroves. Il m’aurait semblé plus opportun que la rédaction de votre amendement place cette notion au premier alinéa de l’article plutôt que d’alourdir celui-ci en créant un huitième alinéa.
J’émets un avis de sagesse.
(L’amendement no 4993 est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sylvie Bouchet Bellecourt, pour soutenir l’amendement no 7053.
Mme Sylvie Bouchet Bellecourt
Il forme un bloc avec les amendements nos 7054 et 7055 qui seront examinés plus tard. L’idée générale est simple : il faut revoir les modalités de classement des cours d’eau pour protéger les moulins qui appartiennent à notre patrimoine.
Il existe actuellement deux listes possibles de classement des cours d’eau : la première répertorie les cours d’eau en très bon état écologique sur lesquels aucune autorisation ou concession ne peut être accordée pour la construction de nouveaux ouvrages s’ils constituent un obstacle à la continuité écologique ; la seconde recense les cours d’eau sur lesquels il est nécessaire d’intervenir, selon des règles définies par l’autorité administrative en concertation avec le propriétaire ou l’exploitant, afin d’assurer le transport suffisant des sédiments et la circulation des poissons migrateurs.
La loi du 30 décembre 2006 sur l’eau et les milieux aquatiques a imposé des obligations disproportionnées aux propriétaires ainsi qu’aux exploitants des moulins de notre pays. En effet, elle contraint les propriétaires de moulin à détruire les seuils de prise d’eau ou à les aménager selon des travaux complexes aux coûts exorbitants.
Or la pratique diffère fortement de l’intention de la loi. Faute de moyens et de temps, l’autorité administrative classe abusivement les cours d’eau dans la première liste sans effectuer de diagnostic préalable. La majorité des cours d’eau classés dans la première liste, qui regroupe ceux en très bon état écologique, présentent en réalité un état chimique déplorable. Pour quelle finalité ? Nous détruisons notre patrimoine local au nom de la continuité biologique sans pour autant améliorer celle-ci car, de toute évidence, nul poisson n’y circule ou ne s’y reproduit.
C’est pourquoi je vous propose de mieux définir la notion de « réservoir biologique » en précisant qu’il s’agit de zones de reproduction ou d’habitat des espèces et que la circulation est libre entre ces zones. L’amendement vise également à réviser la première liste afin d’éviter de détruire notre précieux patrimoine rural.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Cendra Motin, rapporteure
Voici les conditions précises, énoncées par la loi, de classement d’un cours d’eau ou d’une partie d’un cours d’eau dans la première liste : celle-ci regroupe des « cours d’eau, parties de cours d’eau ou canaux parmi ceux qui sont en très bon état écologique ou identifiés par les schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux comme jouant le rôle de réservoir biologique nécessaire au maintien ou à l’atteinte du bon état écologique des cours d’eau d’un bassin-versant ou dans lesquels une protection complète des poissons migrateurs vivant alternativement en eau douce et en eau salée est nécessaire, sur lesquels aucune autorisation ou concession ne peut être accordée pour la construction de nouveaux ouvrages s’ils constituent un obstacle à la continuité écologique. »
Contrairement à ce que vous venez de dire, cette liste ne se limite pas aux cours d’eau qui sont déjà en très bon état écologique, puisque la loi comprend les mots « ou à l’atteinte du bon état écologique » qui sous-entendent que celui-ci peut, hélas, être absent.
Votre amendement introduit une condition de libre circulation des espèces entre les différentes zones pour le classement d’un cours d’eau dans la première liste ; or le classement ne vise pas uniquement à préserver mais, le cas échéant, à restaurer cette circulation. L’adoption de votre amendement conduirait à supprimer le deuxième objectif.
Enfin, vous souhaitez que soit effectué un diagnostic de la réalité des besoins en moins d’un an, ce qui ne me semble pas totalement réalisable. Si les deux listes ne concernent qu’à peine 11 % des cours d’eau de notre territoire, elles comportent tout de même plusieurs milliers de voies, ce qui représenterait un travail énorme, qui ne me semble pas réalisable. Je donne un avis défavorable à votre amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
Nous entrons dans un long tunnel d’amendements. Un travail important de recensement a été effectué sur ces listes. Les interpellations sur les classements et les hiérarchisations sont fréquentes dans les territoires.
M. Vincent Descoeur
Tout à fait.
Mme Bérangère Abba, secrétaire d’État
La consultation publique sur les SDAGE – schémas directeurs d’aménagement et de gestion des eaux – obéit à un calendrier. Les annexes des SDAGE contiennent la liste qui permet de connaître les ouvrages reconnus comme prioritaires. Les concertations et le travail avec les DREAL – directions régionales de l’environnement, de l’aménagement et du logement – et les comités de bassin sont précieux : il faut poursuivre le plan d’action, dessiné entre 2017 et 2019, qui vise à déployer une politique apaisée de restauration de la continuité biologique. Pour autant, la consultation publique sur les SDAGE stimule la réflexion et le questionnement, notamment sur les priorités inscrites sur les listes.
Je propose de nous retrouver après la consultation publique, soit après le 1er septembre prochain, pour examiner, avec les parlementaires, les présidents de comité de bassin et les DREAL, les projets d’ouvrage soulevant des interrogations. Nous pourrons alors poser un regard plus fin sur les listes annexées aux SDAGE. La concertation est le meilleur outil pour formuler des réponses apaisées et adaptées aux ouvrages et aux territoires, avec l’objectif, que nous partageons tous, de restaurer les continuités écologiques et de protéger un patrimoine auquel nous sommes tous très attachés.
Mme la présidente
La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.
Mme Marie-Noëlle Battistel
La loi du 17 août 2015 relative à la transition énergétique pour la croissance verte dispose que chaque révision de SDAGE entraîne celle du classement des cours d’eau. Cette mesure n’est pas appliquée : commençons par la mettre en œuvre !
(L’amendement no 7053 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 3558, 171, 209, 334, 341, 743, 946, 1043, 1073, 1658, 1674, 1831, 1846, 1916, 1961, 2123, 2149, 2597, 2625, 2706, 2920, 3891, 4787, 5448, 5670, 5950, 6399, 6424, 6924, 6981, 426, 436, 769, 1038, 1040, 1045, 1048, 1183, 1845, 2150, 2466, 2600, 2628, 4788, 5449, 5948, 6335, 6982, 5056, 2089 et 4779, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 171, 209, 334, 341, 743, 946, 1043, 1073, 1658, 1674, 1831, 1846, 1916, 1961, 2123, 2149, 2597, 2625, 2706, 2920, 3891, 4787, 5448, 5670, 5950, 6399, 6424, 6924 et 6981, les amendements nos 426 et 436, ainsi que les amendements nos 769, 1038, 1040, 1045, 1048, 1183, 1845, 2150, 2466, 2600, 2628, 4788, 5449, 5948, 6335 et 6982 sont identiques.
La parole est à M. Hubert Wulfranc, pour soutenir l’amendement no 3558.
M. Hubert Wulfranc
Il m’échoit de défendre l’amendement de mon ami Sébastien Jumel sur les petits moulins à eau.
M. Vincent Descoeur
Ah !
M. Hubert Wulfranc
Nous demandons la reconnaissance et la valorisation énergétique et écologique de ces structures. Il convient d’éviter certaines destructions décidées par les agences de l’eau.
Mon collègue Jumel, qui sillonne abondamment à l’heure actuelle les routes de Normandie, m’a parlé de l’exemple frappant de ces trois fleuves côtiers que sont l’Orne, la Touques et la Vire, où la population des poissons n’a pas repris sa croissance et continue même de baisser malgré de nombreuses destructions d’ouvrages.
En hommage à mon camarade Sébastien Jumel, qui se trouve encore à cette heure sur les routes de Normandie (Sourires), je vous demande une attention particulière à cet amendement et à ceux qui suivront. (« Merci,
Mme la présidente
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 171.
M. Thierry Benoit
Je vais défendre cet amendement au nom de ses cosignataires et des membres de l’espace Colbert. Il vise tout d’abord à consacrer le rôle des moulins à eau, comme vient de le dire Hubert Wulfranc. Au-delà de leur rôle dans la production d’énergie et de leur dimension écologique, ces moulins font partie du patrimoine de notre pays.
Ensuite, l’amendement rappelle strictement la loi et confie aux propriétaires l’entretien, la gestion et l’équipement des moulins. Il ne convient en aucun cas de détruire tout ou partie des équipements de ces moulins. En effet, il y a un conflit d’usage avec les propriétaires de moulins à eau qui peuvent les utiliser pour produire des farines : aux Marches de Bretagne, près de Fougères, sur le Couesnon qui se jette près du Mont-Saint-Michel, il subsiste quelques moulins dont il importe de préserver le rôle et pour lesquels il convient d’éviter le conflit d’usage dans lequel les agences de l’eau tirent argument de la défense de la libre circulation des poissons remontant les cours pour frayer pour demander aux propriétaires de détruire certains équipements des moulins.
Nous voulons travailler à la préservation des dimensions énergétique, écologique et patrimoniale des moulins.
Mme la présidente
La parole est à M. Philippe Meyer, pour soutenir l’amendement no 209.
M. Philippe Meyer
Je constate avec satisfaction que ce sujet nous rassemble sur plusieurs bancs. Je suis ravi, madame la secrétaire d’État, que vous rappeliez votre attachement à l’un des éléments du patrimoine de notre pays.
Lors des deux derniers étés, plus de soixante-dix départements ont fait l’objet d’arrêtés de restrictions sévères de l’usage de l’eau, pénalisant l’agriculture et nos concitoyens, ce qui ne nous laisse pas insensibles.
Des milliers d’ouvrages de retenue d’eau des moulins stockent des centaines de millions de mètres cubes d’eau douce dans l’ensemble du territoire et participent activement à la recharge des nappes tout au long de l’année. Ils offrent un potentiel de développement d’énergie renouvelable non négligeable, qui équivaut à la consommation électrique annuelle, hors chauffage, d’un million de foyers, d’après les données de RESTOR Hydro, un projet européen très intéressant.
Les obligations de franchissement des poissons migrateurs et de transport suffisant des sédiments, posées par le code de l’environnement, confient la gestion, l’entretien et l’équipement des ouvrages de retenue aux propriétaires des moulins.
Pourtant, dans leurs programmes d’aide, les agences de l’eau ont ajouté aux trois seules modalités prévues par la loi une quatrième consistant à détruire les ouvrages. Celle-ci donne lieu à une prime importante, les taux d’aides étant proches de 100 %, soit le double des aides prévues pour l’équipement desdits ouvrages.
Une telle prime à la casse explique à elle seule les milliers de destructions de retenues de moulins et la perte de dizaines de millions de mètres cubes d’eau douce alors que notre territoire connaît des pénuries importantes chaque année.
L’amendement tend à exclure définitivement le financement de la destruction des retenues de moulins au titre des obligations précitées et à orienter les financements publics non plus vers une continuité écologique destructrice, mais vers une continuité écologique de conservation et de valorisation des ouvrages, conforme à la loi.
M. Fabrice Brun
Il a raison !
M. Philippe Meyer
Il serait ainsi mis un terme à une politique de destruction qui a pour effet d’aggraver la sécheresse sur notre territoire et d’obérer le développement de la petite hydroélectricité.
Les amendements en ce sens peuvent nous rassembler.
Mme la présidente
L’amendement no 334 de M. Pierre Cordier est défendu.
La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 341.
M. Marc Le Fur
Notre pays a la chance de posséder, avec les moulins qui jalonnent nos rivières, un patrimoine gigantesque. Il s’agit d’un patrimoine ancien – datant du XIVe, XVe, XVIe ou XVIIe siècle –, entretenu par des familles propriétaires qui sont souvent des passionnées. Ce patrimoine, aussi curieux que cela puisse paraître, certains veulent le détruire au nom de la prétendue continuité écologique.
Pourtant, il représente une chance à double titre : il constitue à la fois une réserve d’eau et une source d’électricité décarbonée – l’équivalent de la consommation d’un million de personnes. Cela compte, qu’on le veuille ou non !
Or, il est menacé tant par une administration qui, dans le sillage des DREAL, est devenue très militante en s’attaquant aux moulins, que par des financements publics qui pourraient légitimement être affectés à d’autres usages.
Sachons conserver un tel patrimoine. Il constitue une chance pour nous ; il est écologique au sens premier du terme, puisqu’il permet la production d’énergie décarbonée. Pourquoi le remettre en cause ?
Je reçois dans ma permanence – et je ne dois pas être le seul ici – des propriétaires de moulins découragés…
M. Fabrice Brun
Nous aussi !
M. Marc Le Fur
…et scandalisés. Ce n’est pas seulement leur projet de vie qui se trouve remis en question ; ce sont plusieurs siècles de patrimoine préservé par nos grands anciens.
L’adoption de l’amendement permettra de faire cesser les tracasseries à l’égard de ceux qui ont le mérite d’entretenir notre patrimoine.
M. Fabrice Brun
Bravo !
Mme la présidente
L’amendement no 743 de M. Philippe Meyer est défendu.
La parole est à M. Fabrice Brun, pour soutenir l’amendement no 946.
M. Fabrice Brun
À mon tour, je souhaite me faire l’avocat d’une continuité écologique apaisée. Je l’ai déclinée au travers de plusieurs amendements que je défendrai de manière groupée ici.
Oui, il faut protéger nos rivières. Oui, il faut protéger la biodiversité. Oui, nous devons continuer à améliorer la qualité écologique des milieux aquatiques – c’est un Ardéchois qui vous le dit, le contrat de rivière pour le bassin de l’Ardèche fut le premier signé en 1984. Mais, non, nos digues ancestrales et nos moulins ne sont pas la source de tous les maux !
Lorsqu’un ouvrage est présent depuis longtemps – des siècles, Marc Le Fur vient de le rappeler –, sa destruction affecte l’hydromorphologie de l’eau.
M. Jean-Yves Bony