Fabrication de la liasse

Amendement n°I-CF201

Déposé le mardi 3 octobre 2023
Discuté
Rejeté
(vendredi 13 octobre 2023)
Photo de madame la députée Véronique Louwagie
Photo de madame la députée Valérie Bazin-Malgras
Photo de madame la députée Émilie Bonnivard
Photo de monsieur le député Hubert Brigand
Photo de madame la députée Josiane Corneloup
Photo de monsieur le député Julien Dive
Photo de madame la députée Annie Genevard
Photo de monsieur le député Philippe Gosselin
Photo de madame la députée Justine Gruet
Photo de monsieur le député Patrick Hetzel
Photo de monsieur le député Mansour Kamardine
Photo de madame la députée Alexandra Martin (Alpes-Maritimes)
Photo de monsieur le député Yannick Neuder
Photo de monsieur le député Jérôme Nury
Photo de monsieur le député Éric Pauget
Photo de madame la députée Isabelle Périgault
Photo de monsieur le député Vincent Rolland
Photo de monsieur le député Vincent Seitlinger
Photo de monsieur le député Pierre Vatin
Photo de monsieur le député Alexandre Vincendet
Photo de monsieur le député Stéphane Viry
Photo de monsieur le député Vincent Descoeur
Photo de monsieur le député Pierre-Henri Dumont
Photo de madame la députée Virginie Duby-Muller
Photo de monsieur le député Marc Le Fur

I. – À l’article 1965 B du code général des impôts, après les mots : "le nu-propriétaire", sont insérés les mots : "ou le donateur lorsqu’il a pris à sa charge les droits de mutation,".

II. – La perte de recettes pour l’État est compensée à due concurrence par la création d’une taxe additionnelle à l’accise sur les tabacs prévue au chapitre IV du titre Ier du livre III du code des impositions sur les biens et services.

Exposé sommaire

L’article 1965 B du CGI admet que « dans le cas d’usufruits successifs, l’usufruit éventuel venant à s’ouvrir, le nu-propriétaire a droit à la restitution d’une somme égale à ce qu’il aurait payé en moins si le droit acquitté par lui avait été calculé d’après l’âge de l’usufruitier éventuel ».
 
Ce droit à restitution est pratiqué notamment dans le cas d’une donation par un parent à son enfant de la nue-propriété d’un bien. Le donateur se réserve ainsi l’usufruit du bien et prévoit que cet usufruit sera reversé au profit, par exemple, de son conjoint, plus jeune, au jour de son décès. Ces usufruits sont dits successifs : l’un, actuel porte d’abord sur la tête du donateur, l’autre éventuel sur la tête du conjoint survivant.
 
Dans cette situation, l’enfant  donataire de la nue-propriété, est taxé sur la valeur de la nue-propriété évaluée selon le barème fiscal établi par l’article 669 du CGI, en fonction du seul âge de l’usufruitier  actuel, abstraction faite de l’usufruit successif, éventuel. Sachant qu’au regard de ce barème, la taxation de la nue-propriété est d’autant plus importante que l’usufruitier est âgé (la valeur de l’usufruit décroissant avec l’âge de son titulaire).
 
Un tel mode de calcul est pénalisant pour le nu-propriétaire quand, au décès du premier usufruitier, le second usufruit s’ouvre au profit d’une personne plus jeune. En effet, cet usufruit étant constitué au profit d’une personne plus jeune, la valeur de la nue-propriété s’en trouve diminuée et le nu-propriétaire se trouve surtaxé.
 
Afin d’éviter cette surimposition, l’article 1965 B du CGI admet que, lorsque ce second usufruit s’ouvre, le nu-propriétaire a droit à la restitution d’une somme égale à ce qui aurait été payé en moins si les droits avaient été calculés d’après l’âge du nouvel usufruitier au jour du décès du constituant qui est à l’origine des usufruits successifs (c’est-à-dire le donateur de la nue-propriété). 
 
Toutefois, retenant la lettre du texte, l’administration considère que le droit à restitution n’est accordé que si le nu-propriétaire a acquitté les droits de mutation à titre gratuit ; la prise en charge des droits de donation par le donateur étant alors présentée comme un obstacle à la restitution des droits.
 
Une telle analyse est contestable. L’article 1965 B du CGI institue un droit à restitution au profit du nu-propriétaire dans le seul but d’éviter une surimposition lors de l’ouverture de l’usufruit successif. Cet objectif légal de justice fiscale doit dès lors être indépendant de toute prise en charge des droits de donation par le donateur, le critère exclusif du droit à restitution devant être la surimposition du nu-propriétaire. La question du débiteur des droits de donation est, en effet totalement indifférente à l’application de l’article 1965 B du CGI. Par ailleurs, à défaut de prendre en compte la finalité de ce texte, la doctrine administrative conduit à taxer un bien sur une valeur supérieure à sa valeur réelle dès lors que le second usufruitier est plus jeune que le premier et que son droit est lui-même taxable.
 
Pour illustrer ce propos, il peut être pris l’exemple suivant : un parent donne à son enfant un bien qui vaut 100, en s’en réservant un usufruit qui vaut 30, suivant le barème établi par l’article 669 I du CGI. Dans l’acte, il prévoit, au jour de son décès, une réversion d’usufruit au profit de sa concubine, laquelle est plus jeune que lui et dont l’usufruit est évalué, au jour de la signature, à 40. La nue-propriété est taxée aux droits de mutation sur 70, car on ne tient compte que de l’usufruit ouvert et actuel du donateur.
 
Au jour où l’usufruit donné au profit de la concubine s’ouvre, celui-ci vaut toujours 40 : il supporte alors les droits de mutation sur cette base. La nue-propriété ayant été taxée sur 70, la taxation aux droits de mutation portera alors sur 110… soit une assiette supérieure à la valeur totale du bien. Ce qu’évite précisément le texte de l’article 1965 B en permettant au nu-propriétaire un remboursement des droits perçus initialement sur les 10 représentant la diminution de la valeur de la nue-propriété du fait de la présence de cet usufruitier plus jeune. Edictant une règle d’assiette, la prise en charge des droits par le donateur est donc totalement indifférente, et subordonner la restitution au paiement des droits par le nu-propriétaire conduit ainsi à une aberration fiscale en soumettant aux droits de mutation une assiette supérieure à la valeur réelle d’un bien.