- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2024, n° 1680
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par :
- Mission visée : Outre-mer
Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes | + | - |
Emploi outre-mer | 0 | 100 000 000 |
Conditions de vie outre-mer | 0 | 0 |
Plan pour le droit d'accès à l'eau dans les Outre-mer(ligne nouvelle) | 100 000 000 | 0 |
TOTAUX | 100 000 000 | 100 000 000 |
SOLDE | 0 |
Par cet amendement nous souhaitons alerter sur la nécessité de mettre en place un véritable plan d’urgence pour rendre effectif le droit d’accès à l’eau dans les Outre-mer.
Dans un rapport du 2 juin 2023, le Comité des droits de l’enfant de l’ONU demande à l’État français de garantir les droits à l’eau et l’assainissement dans les Outre-mer, cela concernait ici particulièrement le cas de la Guadeloupe qui est pour l’ONU dans une « urgence sanitaire » avec « un quart de la population de Guadeloupe [qui] n’a pas accès tous les jours à l’eau, en raison de coupures ».
Dans le présent projet de loi de finances, les crédits pour accompagner le syndicat mixte pour la gestion de l’eau et l’assainissement en Guadeloupe (SMGEAG) diminuent (passant de 20 à 30 millions) et ce alors même que la Guadeloupe subit actuellement une grave crise de l’eau. Le 5 octobre l’agence régionale de santé a alerté sur la dégradation de la qualité de l’eau, obligeant des maires à fermer écoles et crèches. La gestion du syndicat mixte pour la gestion de l’eau et l’assainissement en Guadeloupe, créé en 2021 par la loi, est toujours très déficiente et c’est un échec.
En mai dernier, le Conseil des droits de l’homme recommandait également de faire cesser les coupures en Guadeloupe, en Martinique et à Mayotte.
A Mayotte, la situation est catastrophique. Du fait de la sécheresse mais également du manque d’anticipation des autorités publiques la crise de l’eau y a pris une ampleur inégalée. L’accès à l’eau est de nouveau réduit, passant de 24h à 18h un jour sur trois. Ces restrictions et la qualité actuelle de l’eau ont des conséquences en cascade (fermetures d’écoles, développement de maladies...) dans le département le plus pauvre de France et la peur d’une catastrophe sanitaire est de plus en plus grande.
Ce problème est commun à de nombreuses collectivités ultra-marines. En juillet dernier, la Cour des comptes a publié un rapport portant sur la période 2016‑2022 dans lequel l’institution estime que « la situation est alarmante dans les territoires ultramarins ».
Les canalisations sont en ruine. 1 litre sur deux est perdu sur le réseau en moyenne dans les Outre- Mer, contre 1 litre sur 5 en Hexagone. Et une partie très importante de la population n’a tout simplement pas accès à l’eau. Par exemple, en Guyane, on estime que près de 20 % de la population ne dispose pas d’eau potable à proximité du domicile. Selon le CESE, 31,7 % de la population mahoraise n’a pas accès à l’eau courante dans son logement. A La Réunion, la moitié des habitants n’ont pas d’accès à l’eau potable de façon permanente, à cause notamment des aléas climatiques et de la pollution, et 38 % du réseau d’eau se perd dans la nature. En Guadeloupe et Martinique, les habitants subissent des coupures d’eau quotidiennes, sans compter la pollution des cours d’eau et des sources au chlordécone qui reste présent dans les sols et les eaux.
Le prix d’accès à l’eau bat des records. Le prix moyen national de l’eau est de 4,30 €/m3, or en Guadeloupe cela atteint 6,52 €/m3 en 2020 !
La qualité même de l’eau est très loin de celle distribuée sur le territoire hexagonal. A La Réunion, 52 % des Réunionnais sont alimentés par des réseaux dont la sécurité sanitaire est insuffisante et des parasites seraient présents dans l’eau pour 5 % des abonnés. Cette eau contient donc des éléments pathogènes entrainant des pathologies plus ou moins graves, mais dont l’impact néfaste sur la santé est avéré.
Le droit d’accéder à l’eau potable est un droit reconnu dans de nombreux pays et par des organisations internationales dont la France est membre. Ainsi, nous pouvons citer notamment la résolution de l’assemblée générale de l’ONU du 28 juillet 2010 qui reconnait « l’importance que revêt l’accès équitable à une eau potable salubre et propre et à des services d’assainissement, qui fait partie intégrante de la réalisation de tous les droits de l’Hommes ». L’accès à l’eau potable est ainsi un « droit fondamental, essentiel au plein exercice du droit à la vie et de tous les droits de l’Homme ». Ce doit n’est pas effectif dans les collectivités d’Outre-mer et la Commission d’enquête parlementaire présidée par Mathilde Panot et dont Olivier Serva était le rapporteur a permis de le rappeler.
Cet amendement vise donc à prélever 100 millions d’euros d’AE et de CP sur l’action 01 « Soutien aux entreprises » du programme 138 « Emploi outre-mer », pour abonder le nouveau programme « Plan pour le droit d’accès à l’eau dans les Outre-mer » . Nous appelons cependant le Gouvernement à lever le gage.