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Amendement n°CL797

Déposé le jeudi 23 novembre 2023
Discuté
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À la première phrase du premier alinéa de l’article L. 425‑1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile, les références : « 225‑4-1 à 225‑4-6 et 225‑5 à 225‑10 du code pénal » sont remplacés par les références : « 224‑1 A à C, 225‑4-1 à 225‑4-6, 225‑5 à 225‑10, 225‑14, 225‑14‑1 et 2 du code pénal ».

Exposé sommaire

Cet amendement vise à octroyer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " d'une durée d'un an aux victimes d’infractions connexes de la traite des êtres humains.

En effet en cas de réduction en esclavage, de servitude, de travail forcé ou de conditions de travail indignes, il est particulièrement incohérent que le visa délivré aux victimes n’ouvre pas les mêmes droits aux victimes de traite des êtres humains, notamment le droit au séjour.

En conséquence, cet amendement est une occasion de rectifier cette erreur matérielle permettant de respecter l’esprit de la Convention de du Conseil de l’Europe sur la lutte contre la traite des êtres humains du 16 mai 2005.

On observe un ralentissement mondial de la réponse de la justice pénale à la traite d'êtres humains : les taux de détection ont chuté de 11 % en 2020 et les condamnations de 27 %, selon les chiffres de l’ONU. 41 % des victimes qui parviennent à échapper à leur calvaire s'adressent aux autorités de leur propre initiative - un autre signe clair que les mesures de lutte contre la traite des êtres humains ne sont pas à la hauteur.

En France, d’après les dernières données administratives publiées, le nombre de victimes identifiées est en diminution (1 243), en lien probablement avec la crise sanitaire qui a accentué l’invisibilité de ces victimes et dégradé encore plus leurs conditions de vie.

Il faut souligner que la circulaire Ministère de l’Intérieur du 19 mai 2015 à destination des préfets délègue l’identification formelle des victimes de traite des êtres humains aux seuls services de police ou de gendarmerie. Or l’analyse de terrain démontre que cette difficulté est notamment liée à un manque de connaissances du phénomène par les services enquêteurs, à laquelle s’ajoute une suspicion de détournement de la procédure afin d’obtenir une régularisation administrative sur le territoire français comme le sous-tend l’article L. 316-1 du CESEDA.

Ainsi, la circulaire susmentionnée ne prévoit pas la prise en compte de l’identification réalisée par les associations, pourtant spécialistes en la matière. Cette pratique est problématique, la protection des victimes prévue par la loi (hébergement, régularisation administrative, aides financières, insertion professionnelle…) n’étant accordée qu’à la suite d’un dépôt de plainte portant la mention « traite des êtres humains » devant un service de police ou de gendarmerie.

Cette démarche pouvant prendre plusieurs mois, voire plusieurs années, ce sont donc les acteurs associatifs qui doivent entièrement assurer la prise en charge des victimes le temps que la procédure judiciaire soit enclenchée. Nous relevons d’ailleurs que l’absence de délivrance du titre de séjour empêche ces victimes de recourir à des droits qui devraient leur être accordés au vu de leur précarité.

Au cours de la procédure, d’autres obstacles apparaissent. Par exemple, les enquêtes préliminaires peu approfondies provoquent le classement sans suite des plaintes. La victime est ainsi dans l’obligation de déposer une plainte avec constitution de partie civile devant un juge d’instruction afin qu’une enquête effective soit réalisée. En outre, les procureurs ne retiennent que très rarement l’infraction de traite des êtres humains lors des renvois devant les tribunaux et se contentent uniquement des infractions connexes, notamment le travail dissimulé. Cette réalité implique pour la victime d’être seule face aux juges pour faire reconnaître l’existence de l’infraction de traite des êtres humains.

En conséquence, cet amendement propose la protection des personnes victimes de ces infractions graves par un titre de séjour unique, d’une durée d’un an, permettant leur prise en charge plus sereine par la société civile et les services publics.