XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023

Deuxième séance du mardi 29 novembre 2022

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Deuxième séance du mardi 29 novembre 2022

Présidence de Mme Élodie Jacquier-Laforge
vice-présidente

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)

    1. Protection des logements contre l’occupation illicite

    Suite de la discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi de M. Guillaume Kasbarian et plusieurs de ses collègues visant à protéger les logements contre l’occupation illicite (nos 360, 491).

    Discussion des articles (suite)

    Mme la présidente

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    Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la proposition de loi, s’arrêtant à l’amendement no 68 portant article additionnel après l’article 5.

    Après l’article 5 (amendements appelés par priorité) (suite)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 137, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    (La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Perrine Goulet, pour soutenir l’amendement no 68.

    Mme Perrine Goulet

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    Je partage pleinement l’esprit du texte, mais souhaite faire en sorte que les enfants ne puissent être mis à la rue. Je propose donc non pas l’interdiction des expulsions lorsqu’il y a des enfants, mais l’intervention des services de la protection de l’enfance. Je souhaite pour cela que le juge soit obligé de saisir les services sociaux en cas d’expulsion, afin de garantir qu’aucun enfant ne soit mis à la rue.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Guillaume Kasbarian, président et rapporteur de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur de la commission des affaires économiques

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    Je comprends votre but, madame Goulet, mais les services sociaux sont d’ores et déjà associés aux procédures. La loi prévoit à cet effet que l’organisme saisi réalise un diagnostic social et financier au cours duquel le locataire et le bailleur sont mis en mesure de présenter leurs observations. Nous avons encore renforcé ce dispositif en adoptant tout à l’heure un amendement visant à anticiper ce diagnostic. Votre amendement à venir no 69 permettrait par ailleurs au préfet de prévenir les services sociaux en cas de mise en œuvre de l’article 38 de la loi instituant le droit au logement opposable (Dalo). Cela me semble cohérent avec ledit article et interviendrait au bon moment au cours de la procédure. C’est la raison pour laquelle je vous invite à retirer l’amendement no 68 au profit du no 69, qui me semble mieux placé dans le texte.  

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, pour donner l’avis du Gouvernement.

    M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

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    Il est défavorable, pour les mêmes raisons : d’après l’analyse que nous en faisons, le mécanisme que vous proposez existe déjà, madame Goulet – y compris l’obligation de signalement auprès du procureur lorsqu’on a connaissance qu’un mineur est présent dans le logement. Votre amendement n’ajouterait donc rien au dispositif.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Perrine Goulet.

    Mme Perrine Goulet

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    Le problème, c’est que la loi ne rend pas ce mécanisme obligatoire : il peut être mis en œuvre comme il peut ne pas l’être. C’est la raison pour laquelle je voulais l’inscrire dans le texte. Je retire néanmoins l’amendement no 68 au profit de l’amendement no 69, puisque ce dernier recevra un avis favorable. (M. Frédéric Zgainski applaudit.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Merci.

    (L’amendement no 68 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. José Gonzalez, pour soutenir l’amendement no 160.

    M. José Gonzalez

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    En l’état du droit, la personne en tort dispose, après le commandement de quitter les lieux, d’un délai de deux mois pour s’exécuter, en accord avec l’article L. 412-1 du code des procédures civiles d’exécution. Le présent amendement vise à accélérer l’expulsion des squatteurs après ledit commandement par l’huissier, en supprimant tout bonnement ce délai dans le cas des squats – et dans ce seul cas. Nous considérons qu’au vu de la procédure, le squatteur n’a pas besoin d’un délai supplémentaire pour quitter un domicile dans lequel il s’est introduit illégalement, et voulons éviter de faire subir aux propriétaires des délais qui les privent pendant deux mois supplémentaires d’un loyer ou, pire, d’un logement.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Cet amendement propose de restreindre le pouvoir d’interprétation du juge de l’exécution dans les procédures d’expulsion. Cela me semble un peu excessif, pour les raisons que nous avons évoquées lors de l’examen de l’article 5. Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Vous suggérez, monsieur le député, que l’on ajoute les mots « , manœuvres ou contraintes » au second alinéa de l’article L.412-1 du code des procédures civiles d’exécution pour justifier la procédure d’expulsion. Or, dès l’instant qu’il y a voie de fait, il y a automatiquement manœuvres ou contraintes. Votre amendement n’ajouterait donc rien, raison pour laquelle le Gouvernement demande également son retrait et émettra, à défaut, un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Retirez-vous votre amendement, monsieur Gonzalez ?

    M. José Gonzalez

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    Non, madame la présidente : je le maintiens.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Notre groupe est défavorable à cet amendement, qui est tout de même intéressant : M. Gonzalez souhaite en effet accélérer les procédures d’expulsion non pas des personnes légalement entrées dans un logement, mais des squatteurs. Cette proposition révèle la confusion totale qu’il y a dans le texte. Prenons l’exemple d’un locataire entré légalement dans un logement, qui a signé un contrat de location. Avec la proposition de loi de M. Kasbarian, des impayés de loyer le conduiront devant un tribunal où il pourra être jugé expulsable. S’il reste dans le logement, il sera alors considéré comme un squatteur. (« Mais non ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.) Mais si : avec ce texte, il sera considéré comme un squatteur, et même comme un voleur ! Cela mène à une confusion totale : comment le juge pourra-t-il savoir s’il a affaire à un locataire entré légalement dans le logement ou à un squatteur, puisque vous mettez en place une clause de résiliation automatique du bail ?

    M. Jocelyn Dessigny

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    Toute excuse est bonne pour défendre les locataires défaillants !

    M. François Piquemal

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    J’en profite pour vous poser une question à laquelle vous n’avez toujours pas répondu, monsieur Kasbarian. Pour vous, une victime de marchand de sommeil, un locataire en situation d’impayés de loyers ayant reçu un jugement d’expulsion ou un locataire en fin de bail qui reste dans son logement à défaut d’une autre solution sont tous des occupants sans droit ni titre. De fait, sur le plan juridique, c’est ce que prévoit votre proposition de loi. Pour vous, ces gens sont-ils des squatteurs et des voleurs ? Merci de me répondre enfin, monsieur Kasbarian.

    (L’amendement no 160 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 156 et 199.
    La parole est à M. William Martinet, pour soutenir l’amendement no 156.

    M. William Martinet

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    Cet amendement de mon collègue François Piquemal est très important, car il vise à en finir avec une aberration, une contradiction dans les politiques publiques. La loi Dalo, dont vous connaissez l’existence, chers collègues, dispose qu’il incombe au préfet de proposer un logement à celles et ceux de nos concitoyens qui n’arrivent pas à se loger dignement par leurs propres moyens et dont une commission de médiation (Comed) départementale a jugé, après qu’ils ont exposé leurs difficultés, que le relogement était prioritaire. C’est une responsabilité de l’État. Or il arrive que des ménages considérés comme prioritaires au titre de la loi Dalo – par exemple parce qu’ils vivent dans un logement insalubre, ou parce qu’ils ne peuvent s’acquitter d’un loyer beaucoup trop élevé compte tenu de leurs revenus – se retrouvent en procédure d’expulsion. Le préfet intervient alors non pas pour faire respecter la loi et attribuer à la famille un logement en vertu de la loi Dalo, mais pour accorder le concours de la force publique et la faire expulser, au risque de la mettre à la rue. L’État se trouve donc tenu par deux contraintes qui sont en contradiction absolue : il doit à la fois expulser les habitants et les reloger. Pourtant, à travers le préfet, il ne prend qu’une seule décision, celle d’expulser.
    Par le présent amendement, nous proposons quelque chose de très simple : plutôt que de remettre la famille à la rue, nous proposons que le préfet puisse assurer effectivement son relogement. Cela nous paraît relever du bon sens. Nous avons beaucoup entendu, depuis le début de nos débats, que les lois de la République doivent être respectées. Cela vaut pour les squatteurs, peut-être cela peut-il aussi valoir pour le préfet lorsqu’il a l’obligation de reloger une famille reconnue prioritaire au titre de la loi Dalo. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Francesca Pasquini, pour soutenir l’amendement no 199.

    Mme Francesca Pasquini

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    Le droit au logement est garanti par la loi. Il doit être effectif pour toutes et pour tous, quelle que soit la situation d’occupation du logement. Les instances dédiées au règlement des différends entre bailleurs et occupants doivent avoir toute latitude pour exercer leurs responsabilités, et les procédures être adaptées pour leur laisser le temps de travailler sereinement, dans le meilleur intérêt du bailleur et de l’occupant. Ce n’est pas le cas aujourd’hui. Cet amendement vise donc à suspendre les effets du commandement de quitter les lieux lorsque le ménage qui fait l’objet d’un jugement d’expulsion saisit la Comed, afin de permettre à cette dernière de rendre sa décision. Actuellement, la saisine de la Comed n’entraîne pas de suspension de l’expulsion, ce qui ne permet pas de garantir le droit des occupants et ne donne pas à la commission la crédibilité nécessaire pour en faire une instance reconnue de résolution des conflits entre bailleurs et occupants. Avec cet amendement, nous proposons une meilleure effectivité de la loi Dalo, mais aussi une reconnaissance de la Comed et de son utilité dans la régulation des conflits. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Ce que vous proposez au travers de ces amendements, chers collègues, c’est de suspendre les effets du commandement de quitter les lieux lorsque le ménage ou la personne qui fait l’objet d’un jugement d’expulsion saisit la commission de médiation départementale. Nous en avons longuement discuté tout à l’heure : les délais moyens des procédures s’échelonnent entre vingt-quatre et trente-six mois, parfois davantage. En réalité, vous souhaitez ralentir la procédure. Or ce n’est pas l’objet de la présente proposition de loi, qui vise au contraire à accélérer les choses. Je comprends que votre philosophie ne soit pas la même que la nôtre, mais je ne peux être favorable à vos amendements.
    Puisque je me suis engagé à répondre sur les vrais amendements et non sur les sous-amendements, j’en profite pour répondre à votre question, monsieur Piquemal. Vous m’avez demandé si je condamnais les personnes qui se trouvent dans les situations que vous avez évoquées. Je me bornerai à vous lire l’article L. 226-4 du code pénal, qui est assez simple : « L’introduction dans le domicile d’autrui à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. Le maintien dans le domicile d’autrui à la suite de l’introduction mentionnée au premier alinéa, hors les cas où la loi le permet, est puni des mêmes peines. »

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Le squat est un délit, monsieur Piquemal, il n’y a pas de débat sur cette question : ce n’est pas une invention du rapporteur Kasbarian, c’est un délit inscrit comme tel dans le code pénal – et quand je vous dis que le squatteur est un délinquant, je ne fais que vous citer le code pénal.

    M. François Piquemal

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    Vous ne répondez pas !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Par conséquent, je vous retourne la question : condamnez-vous, oui ou non, le squat, et considérez-vous, oui ou non, qu’il constitue un acte délictueux ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Avis défavorable à ces deux amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. William Martinet.

    M. William Martinet

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    Je trouve que la réponse du rapporteur est un peu légère – sans parler de celle du ministre. Certaines familles faisant l’objet d’une procédure d’expulsion ont, parallèlement, fait condamner l’État par le tribunal administratif en invoquant le droit au logement : en d’autres termes, il arrive que des familles soient menacées d’expulsion alors même qu’elles ont entre les mains un jugement du tribunal administratif qui condamne l’État – en l’occurrence le préfet, qui n’a pas respecté l’obligation de relogement résultant du Dalo. Sans sourciller, on met de côté le fait que le droit au logement d’une famille n’est pas respecté pour estimer que le préfet peut décider de la mettre à la rue !
    J’en appelle au sens commun, collègues, en espérant que vous percevez la contradiction d’une telle situation, et que vous comprenez la colère qu’elle peut susciter au sein des familles concernées. Quelle est la valeur de la loi de la République dans cette situation, que vaut la parole de l’État quand il ne se sert que de la main qui frappe et qui jette dehors, alors que celle qui doit protéger en faisant respecter le droit au logement ne semble pas fonctionner ? Il y a là une contradiction fondamentale à laquelle ni vous, monsieur le rapporteur, ni vous, monsieur le ministre, n’avez répondu. Le sujet sérieux dont il est ici question aurait, à mon sens, mérité un peu plus d’implication de votre part. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    (Les amendements identiques nos 156 et 199 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Loubet, pour soutenir l’amendement no 137.

    M. Alexandre Loubet

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    Combien de temps encore les squatteurs seront-ils davantage protégés par la loi que ne le sont les honnêtes gens dont ils violent la propriété ? Les exemples sont malheureusement nombreux dans ma circonscription de Moselle-Est, et je veux avoir ici une pensée pour les nombreuses victimes. Lorsqu’une décision de justice est prise pour ordonner l’expulsion des occupants d’un logement, elle doit être appliquée rapidement, ce qui n’est malheureusement pas le cas aujourd’hui, comme nous l’avons vu tout à l’heure. En effet, la loi dispose que le juge peut accorder des délais renouvelables aux squatteurs dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement « chaque fois que le relogement des intéressés ne peut avoir lieu dans des conditions normales ». Autrement dit, le nombre de fois où le juge accorde des délais aux squatteurs n’est pas limité par la loi.
    Chers collègues, il est temps que la loi cesse d’être complice des squatteurs, n’en déplaise à nos amis de la NUPES, et qu’elle défende les personnes victimes d’une occupation illégale de leur propriété. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) Avec cet amendement de bon sens, d’une part, nous souhaitons qu’il soit mis fin à la possibilité pour le juge de multiplier les délais en faveur des squatteurs, en proposant qu’un seul renouvellement, et d’une durée raisonnable, soit possible ; d’autre part, nous donnons la possibilité au juge de refuser d’accorder un délai supplémentaire s’il est établi que le squatteur n’a réalisé aucune démarche effective en vue de son relogement.
    En votant pour cet amendement du Rassemblement national, vous accélérerez les délais d’exécution des expulsions et vous mettrez fin aux abus de certains squatteurs, qui profitent de la faiblesse de la loi en n’effectuant aucune démarche de relogement à seule fin de continuer d’occuper illégalement une propriété privée. Nous comptons sur vous pour rétablir la justice et faire en sorte qu’elle soit respectée. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Premièrement, vous proposez d’inscrire dans la loi le fait que les délais doivent être d’une durée « raisonnable ». Or cet adjectif peut vouloir dire beaucoup de choses et donner lieu à des interprétations très variables. À l’article 5 que nous avons voté tout à l’heure, plus précisément à l’alinéa 12, nous avons porté de trois ans à un an la durée maximale des délais renouvelables que le juge peut accorder : ainsi, la loi prévoit déjà une limite clairement définie.
    Deuxièmement, vous proposez que le juge n’accorde aucun délai s’il est établi que l’occupant n’a pas effectué de démarches en vue de son relogement. Là aussi, votre souhait est déjà satisfait puisque le juge de l’exécution (JEX) prend en compte tous les éléments avant de rendre sa décision.
    Je vous invite donc à retirer votre amendement, et émettrai à défaut un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Une fois de plus, vous considérez de la même manière tous les locataires, qu’ils soient de bonne ou de mauvaise foi, alors qu’il est justifié de les traiter de façon différenciée. En proposant que dans certains cas, le juge n’accorde aucun délai aux locataires, vous risquez de sanctionner des personnes ayant été victimes d’un accident de la vie, qui mériteraient de bénéficier de délais pour les aider à trouver une solution. Avis défavorable.

    M. Paul Midy

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    Eh oui !

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de trois demandes de scrutin public : sur l’amendement no 96, par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale, et sur les amendements nos  124 et 111, par le groupe Rassemblement national.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Emmanuel Fernandes.

    M. Emmanuel Fernandes

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    En août dernier, je me suis rendu dans un bâtiment occupé, rue de Bourgogne dans le quartier de la Meinau à Strasbourg. J’y ai rencontré une famille dont le père, souffrant d’insuffisance respiratoire, doit rester placé sous respirateur artificiel seize heures par jour. Deux des enfants sont scolarisés, le troisième ayant moins de 3 ans. Cette famille n’avait pas d’autre solution que d’occuper sans droit ni titre un immeuble en instance de démolition : c’était sa seule chance de survie, les campements dans les parcs et les échangeurs autoroutiers de Strasbourg n’étant pas adaptés à sa situation, notamment à la condition médicale de l’un de ses membres.
    Telle est la réalité de l’occupation d’un immeuble vacant où, depuis près d’un an, environ soixante-dix familles, parmi lesquelles beaucoup d’enfants et de personnes présentant des pathologies lourdes, se sont réfugiées dans des logements se trouvant encore en assez bon état, pour ce que j’ai pu en voir. Pour les familles concernées, les quelques mois de délai de la procédure judiciaire ont permis une anticipation de la situation par les acteurs sociaux et une évaluation médico-sociale. Ainsi, la médiation de Médecins du monde auprès du service intégré d’accueil et d’orientation (SIAO) a permis de trouver cet automne, pour la famille que j’ai évoquée au début de mon intervention, une solution de relogement adaptée à ses besoins spécifiques.
    Le raccourcissement des délais d’expulsion réduirait à néant le travail des associations, déjà soumises à des délais contraints pour trouver des solutions d’hébergement d’urgence et dont je salue le travail essentiel et précieux : en un mot, elles font œuvre d’humanité. (M. Frédéric Maillot applaudit.) Raccourcir les délais aurait pour effet de réduire encore les chances qu’un diagnostic social soit établi, comme le prévoit pourtant l’instruction du gouvernement du 25 janvier 2018. Ceux que vous appelez les squatteurs attendent juste que l’État fasse son devoir en proposant des places d’hébergement d’urgence pour régulariser enfin leur situation : je le rappelle, il relève de la responsabilité de l’État de loger les 300 000 sans-abri de France. Les familles sans logement ne font que chercher par tous les moyens un abri pour leurs enfants, et je ne doute pas qu’à leur place, vous feriez la même chose. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 137.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        143
            Nombre de suffrages exprimés                142
            Majorité absolue                        72
                    Pour l’adoption                34
                    Contre                108

    (L’amendement no 137 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de quatre amendements, nos 96,124, 89 et 79, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 96.

    M. François Piquemal

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    Il y a quelques instants, vous m’avez interpellé, monsieur le rapporteur, sans toutefois répondre à ma question. Cependant, votre absence de réponse me semble révéler le fond de votre pensée : cette loi est anti-locataires, elle est anti-victimes des marchands de sommeil. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Mais non !

    M. François Piquemal

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    Si, si. Vous semblez incapable de faire la distinction entre les différents occupants sans droit ni titre. Pour vous, ce ne sont que des squatteurs et des voleuses. Pour vous, quelqu’un qui est victime d’une arnaque de la part d’un marchand de sommeil – j’ose dire d’un délinquant, voire d’un criminel – est coupable d’être victime !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Et les squatteurs, ce ne sont pas des délinquants ?

    M. François Piquemal

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    La proposition que nous faisons avec cet amendement devrait faire plaisir au ministre de la justice, puisqu’elle va dans le sens des propos qu’il a tenus hier, quand il a affirmé qu’il était important de donner force à la loi. C’est un fait, il existe dans notre pays un droit au logement opposable, auquel de nombreux ménages font appel quand ils sont en difficulté – car bien qu’ils soient reconnus prioritaires, ils doivent le plus souvent attendre bien au-delà des délais légaux pour obtenir un logement. Nous proposons donc de suspendre les expulsions tant que l’État n’a pas pris ses responsabilités en proposant un logement à l’ensemble des ménages qui ont accompli honnêtement toutes les démarches nécessaires pour avoir un toit sur la tête. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Kévin Mauvieux, pour soutenir l’amendement no 124.

    M. Kévin Mauvieux

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    En l’état actuel du droit, il n’y a pas de trêve hivernale pour les squatteurs – je dis bien pour les squatteurs. Sur la base d’une décision de justice, il est possible de les expulser des logements qu’ils squattent – et non pas qu’ils louent. L’objet de cet amendement de notre collègue Chenu est d’étendre le champ de cette disposition à d’autres types de locaux que des logements, à savoir les locaux d’entreprise, les garages et les parties communes des immeubles. Nous estimons en effet que les copropriétaires, les entrepreneurs et les propriétaires de garages n’ont pas non plus vocation à subir l’occupation de leurs locaux par des squatteurs susceptibles de gêner des activités ou des personnes. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l’amendement no 89.

    Mme Danielle Simonnet

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    À l’inverse de ce que nous venons d’entendre, nous proposons pour notre part d’interdire les expulsions de squats pendant la trêve hivernale. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Il ressort des propos de plusieurs orateurs favorables aux expulsions que nous sommes en droit d’attendre de ceux qui n’ont pas de logement qu’ils respectent la loi. Mais l’État ne doit-il pas, lui aussi, respecter la loi ?

    Mme Rachel Keke

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    Tout à fait !

    Mme Danielle Simonnet

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    Que signifient les mots « droit au logement opposable », si ce n’est que l’État a l’obligation de garantir le droit au logement pour toutes et tous – en d’autres termes, que les personnes reconnues Dalo doivent être relogées par l’État ?
    En ce moment même, nous devrions discuter d’une grande loi sur le logement, définissant les moyens de garantir ce droit effectif. Nous devrions avoir déjà voté dans le projet de loi de finances les moyens de mener une véritable politique de production de logements sociaux.

    M. Frédéric Boccaletti

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    Qui paye les loyers de ces logements ?

    Mme Danielle Simonnet

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    Nous devrions nous demander comment faire pour réquisitionner l’ensemble des logements vides. Nous devrions faire en sorte que la loi sur l’encadrement des loyers soit mieux appliquée, afin que les loyers soient revus à la baisse dans les zones tendues. Au lieu de cela, vous ne cherchez qu’à expulser, alors qu’il revient à l’État de garantir le droit au logement. Tant qu’il ne le fait pas, il faut surseoir aux expulsions locatives, en particulier durant la période hivernale. L’Observatoire des expulsions collectives de lieux de vie informels estime que sur les 1 330 expulsions de squats recensées en 2021, environ 64 % ont eu lieu en pleine trêve hivernale. C’est extrêmement grave, car cela signifie qu’on a jeté à la rue des personnes qui n’ont eu d’autre solution que de trouver refuge dans les parcs ou les transports, ou d’essayer de trouver une porte qui s’ouvre quelque part. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Frédéric Maillot, pour soutenir l’amendement no 79.

    M. Frédéric Maillot

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    Notre collègue Stéphane Peu propose d’interdire durant la trêve hivernale l’expulsion des personnes entrées dans tout autre lieu que le domicile par voie de fait.

    M. Thomas Ménagé

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    Et les propriétaires, comment font-ils durant l’hiver ?

    M. Frédéric Maillot

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    Pour la défense de cet amendement, je m’en remets totalement à ce que vient de dire Mme Simonnet. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Cette discussion commune regroupe des propositions radicalement différentes les unes des autres. Je commencerai par souligner que la présente proposition de loi ne remet pas en cause les dispositions relatives à la trêve hivernale qui, je le rappelle, ne s’applique pas en cas de squat d’un domicile. Si, en rentrant chez vous ce soir, vous tombez sur un squatteur, il ne pourra invoquer la trêve hivernale pour vous empêcher de récupérer votre domicile. En revanche – je n’invente rien, c’est le droit actuel –, la trêve hivernale s’applique dans le cas des locataires, y compris en situation d’impayé, et la proposition de loi ne change rien sur ce point.
    Ce que ces amendements proposent est radicalement différent. Madame Simonnet, vous avez indiqué vouloir interdire les expulsions de squatteurs pendant la trêve hivernale. Mais rendez-vous compte des implications d’une telle disposition ! Dans votre circonscription parisienne, en 2021, plus d’une vingtaine de squats ont été constatés, dont six concernaient des locataires, autrement dit, des personnes qui, de retour d’une journée de travail ou de week-end, tombaient en rentrant à leur domicile sur un squatteur. Votre amendement revient à leur dire : désolés, pas de bol, c’est la trêve hivernale,…

    Mme Danielle Simonnet

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    Mais non !

    M. William Martinet

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    Vous n’avez pas bien lu !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    … rendez-vous en avril pour l’expulsion. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Vous expliquerez cela aux propriétaires !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Madame Simonnet, pour notre part, nous ne souhaitons pas faire appliquer la trêve hivernale pour les squatteurs. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Tout le monde n’a pas la même chance que vous d’habiter dans un logement social à Paris !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Nous souhaitons que tous les Français, s’ils tombent sur une personne qu’ils ne connaissent ni d’Ève ni d’Adam en rentrant chez eux le soir, puissent recourir à l’article 38 de la loi Dalo pour faire procéder à l’expulsion sans attendre jusqu’au mois d’avril pour reprendre possession de leur domicile.

    Mme Danielle Simonnet

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    Il ne s’agit pas de cela, vous le savez très bien !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Votre amendement répond à la question à laquelle votre collègue François Piquemal n’a pas répondu. En réalité, vous ne condamnez pas les occupations illicites, vous défendez les squatteurs. Vous voulez même les autoriser à se maintenir au domicile d’autrui jusqu’à la fin de la trêve hivernale.

    Mme Maud Bregeon

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    Eh oui !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Mon avis sur vos amendements sera donc défavorable. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Vous voulez mettre les gens à la rue ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Vous prenez leur place dans les logements sociaux !

    Mme la présidente

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    Seul M. le rapporteur a la parole !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    M. Chenu propose pour sa part, dans son amendement, d’étendre les autorisations d’expulsion pendant la trêve hivernale à des lieux autres que le domicile, autrement dit un commerce ou un immeuble abandonné, un bureau inoccupé, un logement vacant dégradé, voire un terrain vague, dans lesquels une personne se serait abritée.
    Si la trêve hivernale ne s’applique pas pour le domicile, c’est parce que celui-ci, comme l’a rappelé le garde des sceaux, touche à la vie privée et à l’intime.

    Mme Danielle Simonnet

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    Personne n’a dit le contraire !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Un squatteur peut donc être expulsé à n’importe quelle période de l’année s’il se trouve chez vous. Aller plus loin en supprimant la trêve hivernale pour tous les autres lieux me semble excessif. C’est pourquoi je serai défavorable à cet amendement no 124.
    J’estime, chers collègues, qu’il faut avoir une approche raisonnable et équilibrée : ne touchons pas au droit en vigueur s’agissant de la trêve hivernale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Madame la présidente, je suis en total accord avec le rapporteur.

    Mme Mathilde Panot

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    Lisez notre amendement !

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Interdire toute expulsion de squatteurs pendant la trêve hivernale revient à refuser que quelqu’un puisse regagner son domicile si celui-ci est squatté.

    M. William Martinet

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    Ce n’est pas le sens de l’amendement !

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Si votre assemblée adoptait cet amendement, cela reviendrait à privilégier les squatteurs par rapport aux propriétaires ou aux titulaires d’un bail !

    Mme Ségolène Amiot

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    Lisez l’amendement !

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Vous vous êtes sans doute emballés en le rédigeant.

    Mme Nathalie Oziol

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    Quelle mauvaise foi !

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, chers collègues !

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Modérez l’émotion que vous exprimez maintenant face au rapporteur, parce qu’en l’espèce, vous avez adopté une position qui remet en cause le droit au logement pour les personnes titulaires d’un bail !

    Mme la présidente

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    Avant de donner la parole à M. Kévin Mauvieux, je vous prie, chers collègues, de bien vouloir écouter les orateurs afin que nos débats puissent se dérouler dans un certain calme.

    M. Kévin Mauvieux

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    Deux réponses pour deux prises de position différentes.
    D’abord, réponse à la NUPES : vous nous reprochez – à nous et à la majorité, car en l’occurrence, nous souhaitons légiférer dans le même sens – de vouloir mettre les gens dehors. Je suis désolé, mais dans tous les cas, quelqu’un est mis dehors. Nous, ce sont les squatteurs occupant illicitement un lieu que nous voulons mettre dehors ; vous, ce sont les locataires ou les propriétaires, car vous préférez offrir un abri aux squatteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Avec votre amendement, les locataires ou les propriétaires se retrouveront à la rue si leur appartement est occupé par un squatteur. Nous avons eu connaissance de plusieurs cas lors des hivers précédents. Imaginez-vous des locataires ou des propriétaires, revenant de vacances passées chez leurs enfants, obligés de rester dehors par moins cinq degrés alors que les squatteurs sont bien au chaud chez eux ? (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Excellent !

    M. Kévin Mauvieux

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    Il faut choisir son camp : nous, nous voulons abriter les locataires et les propriétaires ; vous, vous voulez abriter les squatteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
    Ensuite, réponse au rapporteur : il prétend qu’avec notre amendement, nous voulons nous en prendre à ceux qui s’abritent dans une cage d’escalier. Désolé, mais depuis le début, je pense que nous avons la même définition du squatteur que vous : ce n’est pas la personne qui se réfugie quelque part pour échapper à une averse puis s’en va ; c’est celui qui s’installe durablement. L’extension des exceptions à la trêve hivernale à d’autres lieux que le domicile, c’est-à-dire, entre autres, aux entreprises, aux cages d’escalier ou aux garages, vise les squatteurs, qui s’installent durablement, et non pas M. ou Mme Tout-le-monde s’abritant momentanément pendant un orage.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Il est brillant !

    M. Kévin Mauvieux

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    Vous soulignez que le domicile est un lieu privé comme si laisser s’installer des squatteurs dans les locaux d’une entreprise ne posait aucun problème. C’est oublier que pour l’entrepreneur, les locaux de l’entreprise sont un peu comme chez lui : c’est là qu’il fait son beurre, c’est là qu’il nourrit des familles. Si on laisse en plein hiver des entreprises aux squatteurs, on peut vraiment se demander où va la France ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. William Martinet.

    M. William Martinet

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    Monsieur le rapporteur, je suis au regret de vous dire que, premièrement, vous jouez sur les peurs, et que, deuxièmement, vous mentez sur le contenu de l’amendement que nous avons défendu. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Laissez-moi m’expliquer, s’il vous plaît.
    En quoi jouez-vous sur les peurs ? Parce que vous faites croire aux Françaises et aux Français que le droit en vigueur ne permet pas de protéger leur domicile. C’est faux ! L’article 38 de la loi Dalo existe : si après être parti un jour, un mois ou un an, vous découvrez que quelqu’un s’est introduit chez vous, vous pouvez compter sur le préfet et les forces de police pour libérer votre domicile dans les quarante-huit heures,…

    M. Jocelyn Dessigny

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    Jusqu’au moment où les squatteurs feront appel à vous pour que vous les protégiez ! Eh oui, les NUPES veulent protéger les délinquants contre les honnêtes gens !

    M. William Martinet

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    …et c’est heureux. Tout le monde dans cet hémicycle s’accorde sur cette procédure, parce que le domicile des gens doit être protégé. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe SOC.)
    Ce que vous allez faire avec cette proposition de loi est grave, parce que vous comptez étendre la notion de domicile. Vous venez de dire, monsieur le rapporteur, que celui-ci relevait de l’intime, du personnel ; or dans ce texte, vous défendez l’idée selon laquelle un multipropriétaire possédant dix, vingt ou trente logements (Exclamations sur les bancs du groupe RE) pourra aller au commissariat demander une intervention immédiate afin de virer des personnes occupant un de ses appartements vacants au motif qu’il s’agit de son domicile. (Exclamations sur les bancs du groupe RE. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Celui qui possède des logements vides partout en France pourra désormais dire que chacun d’entre eux est son domicile ! Est-ce cela que vous appelez l’intime et le personnel ? Vous êtes en pleine incohérence, on le voit bien !
    Venons-en aux propos que vous avez tenus sur le contenu de notre amendement. Nulle part vous n’y trouverez qu’il empêche d’évacuer un domicile pendant la trêve hivernale. Au contraire, il conserve l’exception faite pour ces expulsions en précisant que le domicile doit s’entendre comme le lieu habituel d’habitation. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Merci, cher collègue.

    M. William Martinet

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    Nous bordons les choses pour reconnaître le fait qu’en rentrant chez soi, il faut…

    Mme la présidente

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    Merci.
    Je mets aux voix l’amendement no 96.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        181
            Nombre de suffrages exprimés                177
            Majorité absolue                        89
                    Pour l’adoption                35
                    Contre                142

    (L’amendement no 96 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 124.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        187
            Nombre de suffrages exprimés                177
            Majorité absolue                        89
                    Pour l’adoption                49
                    Contre                128

    (L’amendement no 124 n’est pas adopté.)

    (Les amendements nos 89 et 79, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. José Gonzalez, pour soutenir l’amendement no 138.

    M. José Gonzalez

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    Il y a un consensus pour dire que la trêve hivernale est une mesure profondément humaine qui permet d’éviter que ne soient mises à la rue en plein hiver des personnes de bonne foi. Ce n’est toutefois pas le cas de tout le monde et certains utilisent ces délais pour se maintenir illégalement le plus longtemps possible au domicile d’autrui. Cet amendement vise à éviter ce type de manœuvres en limitant à une fois le nombre de trêves hivernales dont peuvent bénéficier des occupants illégaux.
    Ce matin, dans l’émission de Jean-Jacques Bourdin sur Sud-Radio, Alain venait témoigner du fait que la maison de ses parents âgés respectivement de 90 et 92 ans était squattée depuis plus d’un an par une famille nombreuse possédant plusieurs voitures. Si dans votre grande bonté, vous votez notre amendement, cette situation ne se reproduira plus. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Vous proposez de supprimer la trêve hivernale en cas de récidive. Autrement dit, une personne ayant déjà bénéficié de ce sursis au cours d’une procédure d’expulsion ne pourrait en faire l’objet une nouvelle fois. Je suis défavorable à une telle évolution, qui pourrait conduire à expulser des locataires fragiles en plein hiver. Ce n’est pas l’objectif de cette proposition de loi. Je reste sur ma position de tout à l’heure : nous souhaitons accélérer les procédures judiciaires et administratives, non remettre en cause le droit en vigueur s’agissant de la trêve hivernale.

    M. Bruno Studer

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Monsieur le rapporteur, je me demande si vous comprenez le sens de votre proposition de loi. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Pas vous, visiblement !

    M. François Piquemal

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    Vous dites que vous ne voulez pas que les expulsions s’appliquent aux locataires durant la trêve hivernale. Or, selon votre texte, un locataire jugé expulsable deviendra un occupant sans droit ni titre, donc un squatteur. À ce titre, il est susceptible d’être mis dehors, y compris pendant la trêve hivernale, selon la libre appréciation du juge. Autrement dit, vous dénoncez un effet nocif qu’aurait votre propre proposition de loi !
    Venons-en au fond de votre amendement, monsieur Gonzalez. Franchement, savez-vous quelle est l’espérance de vie d’une personne à la rue ? 49 ans ! Vous nous proposez de mettre des gens dehors sans prévoir une quelconque solution d’hébergement ou de relogement. En gros, vous les promettez à la mort.

    M. Jocelyn Dessigny

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    C’est n’importe quoi !

    M. François Piquemal

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    À tout le moins, vous les contraignez à devoir s’abriter comme ils le peuvent. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Avec ce genre de méthodes, avec la proposition de loi anti-locataires du rapporteur, davantage de personnes seront tentées de squatter : ce sera la seule solution pour elles si elles sont expulsées de leur logement. Qui crée un terreau favorable aux squats ?

    M. Jocelyn Dessigny

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    C’est vous !

    M. François Piquemal

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    Vous, monsieur le rapporteur ! Vous, mesdames et messieurs les députés du Rassemblement national ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Les NUPES nous prennent pour des dupes !

    (L’amendement no 138 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l’amendement no 93.

    Mme Danielle Simonnet

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    Cet amendement vise à ce qu’il n’y ait plus aucune expulsion locative sans relogement. Le logement est une condition essentielle pour mener une vie digne. C’est un droit qu’il nous faut protéger de manière absolue.
    Sachez qu’entre le 1er novembre 2020 et le 31 octobre 2021, 1 330 expulsions ont été recensées. Dans 90 % des cas, aucune solution n’a été proposée. En 2021, la Fondation Abbé-Pierre a évalué à 12 000 le nombre des expulsions. Or un logement sur dix est vacant. C’est dire si la situation est aberrante !
    Je souhaiterais, mes chers collègues, que vous preniez conscience des conséquences aussi dramatiques que diverses des expulsions.
    Trois ans après une expulsion, 32 % des ménages vivent encore à l’hôtel ou chez un tiers ; 29 % n’ont pu poursuivre leur activité professionnelle ; 71 % rencontrent des problèmes de santé ou des difficultés psychologiques liés à l’événement ; 43 % ont constaté un effet sur la scolarité de leurs enfants. De telles situations créent des traumatismes psychologiques, des problèmes de santé et un gâchis social terrible. Elles induisent également un coût pour la collectivité : arrêtons de financer des placements à l’hôtel totalement inadaptés à des familles ou des centres d’hébergement qui ne sont pas davantage adaptés alors qu’il existe tant de logements vacants ! Pas d’expulsion sans relogement !

    M. François Jolivet

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    Cela existe déjà dans la législation en vigueur, madame !

    Mme Danielle Simonnet

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    Il s’agit d’une nécessité absolue pour la dignité de chacun, qui permettrait en outre d’assurer le respect du droit au logement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Il y a de la place chez vous ?

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Le juge de l’exécution peut déjà accorder des délais renouvelables dans la limite d’un an – nous venons en effet de les réduire de trois à un an – en cas d’absence de proposition de relogement. Il est donc possible d’octroyer des délais lorsqu’il existe des difficultés particulières de relogement. Aller plus loin reviendrait à aller dans le sens inverse de notre objectif, à savoir l’accélération de la procédure. Par conséquent, j’émets un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Avis défavorable également, d’autant que cette disposition me semble inconstitutionnelle : nous ne pourrions pas conditionner la non-application d’une décision de justice et refuser le concours de la force publique à une décision de relogement. Indépendamment des arguments de fond, cela poserait une difficulté juridique.

    (L’amendement no 93 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 94.

    M. François Piquemal

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    Il vise à empêcher toute expulsion dès lors que le propriétaire ne respecte pas la loi relative à l’encadrement des loyers. Si nous voulons agir concrètement sur les impayés, il faut instaurer un encadrement des loyers, de manière généralisée, au moins dans les zones tendues. Plusieurs faits divers ont été évoqués, mais ce qui est indécent, en réalité, c’est le prix des loyers dans les grandes villes.

    M. Laurent Jacobelli

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    Ce n’est pas une raison pour ne pas payer !

    M. François Piquemal

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    En augmentation constante, ils sont indécents pour une grande partie de nos concitoyens, qui n’arrivent pas à boucler leurs fins de mois. Si l’on ajoute à cela la coupe effectuée dans les aides personnelles au logement (APL) et votre refus d’augmenter les salaires et les pensions de retraite, vous comprendrez qu’ils représentent une charge importante pour les locataires. La moindre des choses serait donc que les propriétaires qui ne respectent pas la loi ne puissent pas saisir le juge pour faire expulser leurs locataires. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Les méchants propriétaires et les gentils squatteurs !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Vous restez dans la même logique : vous souhaitez ralentir la procédure et éviter l’expulsion. Nous avons sur ce point un désaccord idéologique avéré et constaté, dont nous avons longuement débattu. Avis défavorable.

    Mme Ségolène Amiot

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    On a le droit de ne pas respecter la loi lorsqu’on est propriétaire, mais pas quand on est locataire !

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, seuls les orateurs ont la parole ! Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Je comprends l’intention de l’auteur, mais il ne s’est pas rendu compte que si son amendement était adopté, il priverait les locataires vivant dans les zones tendues des dispositions de prévention des expulsions, prévues par l’article L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution : il y aurait ainsi des effets de bord liés au non-respect de l’encadrement des loyers qui se retourneraient contre le locataire.
    J’ajoute que si le propriétaire ne respecte pas la règle d’encadrement des loyers, ce qui est en effet un souci, il existe une commission de conciliation qui permet, dans 80 % des cas, d’obtenir une baisse du loyer. Il n’est donc pas souhaitable d’utiliser l’article que vous mentionnez, même si je note une forme d’inventivité juridique à le présenter de cette manière : ce ne serait pas efficace sur les loyers et cela aurait pour conséquence de réduire les droits des locataires. Je vous conseille donc de retirer votre amendement.

    (L’amendement no 94 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierrick Berteloot, pour soutenir l’amendement no 111.

    M. Pierrick Berteloot

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    Il vise à demander au Gouvernement un rapport sur le nombre de logements illégalement occupés sur notre territoire, ainsi qu’un bilan chiffré du montant total des préjudices subis par les propriétaires. Nous constatons une inquiétante augmentation des occupations illégales de logements privés et il serait pertinent de prendre la pleine mesure des enjeux en la matière.
    Des chiffres issus d’une enquête neutre et complète permettraient à l’État non seulement de mieux appréhender le phénomène des propriétaires spoliés, mais aussi de reconnaître les dérives du mal-logement en France, qui conduisent à occuper illégalement des propriétés privées. Une telle enquête pourrait également être utilisée pour déterminer le montant d’un fonds de garantie, instauré ultérieurement et destiné à l’indemnisation des victimes d’une occupation illicite de leur bien, ne serait-ce que pour couvrir les frais de remise en état du logement et les factures accumulées ou pour assurer une stabilité financière des propriétaires privés de revenus par cette occupation illégale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Vous demandez un rapport sur le nombre de logements illégalement occupés. Cette question nous taraude également : combien de cas cela représente-t-il précisément ?

    M. Jocelyn Dessigny

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    L’objectif est de vous aider à y voir plus clair !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Plutôt que d’adopter un article de loi sur le sujet, il suffit de consulter les chiffres publiés par l’Observatoire des squats, mis en place par Emmanuelle Wargon :…

    Mme Mathilde Panot

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    Qui est opposée à votre texte !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    …ils ont permis d’établir qu’en 2021, première année d’application de la loi d’accélération et de simplification de l’action publique, la loi Asap, qui a modifié l’article 38 de la loi Dalo, il y avait 170 squats.

    Mme Ségolène Amiot

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    Vous légiférez pour 170 squats ! Bravo !

    Mme Sophia Chikirou

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    170 squats !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    J’espère, monsieur le ministre, que nous pourrons disposer pour 2022 d’éléments chiffrés au même titre que pour 2021 – il suffit de systématiser leur publication et j’attends les résultats avec impatience. Pour autant, je ne suis pas sûr qu’il soit nécessaire de légiférer sur le sujet : l’Observatoire des squats fonctionne ; par conséquent, attendons les prochains chiffres – peut-être serez-vous en mesure de nous les communiquer bientôt, monsieur le ministre ?

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Christophe Béchu, ministre

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    De manière générale, le Gouvernement n’est pas favorable à la multiplication des demandes de rapports.

    M. Patrick Hetzel

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    C’est normal, vous ne les faites pas !

    M. Christophe Béchu, ministre

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    La réponse du président Kasbarian, fondée sur les chiffres de cet observatoire, me semble précise. Il existe un deuxième levier qui consiste, si vous le souhaitez, à mener une mission parlementaire sur le sujet afin d’aller au fond des choses, plutôt que de solliciter un rapport annuel…

    M. Jocelyn Dessigny

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    Cela coûte moins cher qu’une étude de McKinsey !

    M. Christophe Béchu, ministre

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    …sur le nombre de squats, d’autant que l’ambition de la présente proposition de loi est précisément de réduire le phénomène. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. William Martinet.

    M. William Martinet

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    Cet amendement a au moins un mérite, celui de poser la question du manque d’informations disponibles – non pas sur le nombre de squats, puisque comme l’a très bien dit M. le rapporteur, le chiffre, extrêmement faible, s’établit à moins de 200, mais sur les conséquences sociales d’une telle proposition de loi, par ailleurs totalement insupportable. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Combien de personnes supplémentaires se retrouveront-elles à la rue du fait de l’accélération des procédures d’expulsion que vous vantez, monsieur le rapporteur, amendement après amendement ? Combien de personnes supplémentaires solliciteront-elles le 115, structure déjà saturée puisque chaque soir, 6 000 personnes la contactent sans obtenir de place d’hébergement d’urgence ?
    Un impensé persiste depuis le début de ce débat : la majorité refuse d’envisager les conséquences sociales engendrées par les procédures d’expulsion prévues dans cette proposition de loi. Nous considérons, en ce qui nous concerne, qu’il serait irresponsable d’adopter une loi accélérant les procédures d’expulsion sans la moindre visibilité quant au nombre de personnes qui se retrouveraient ainsi à la rue, avec tout ce que cela implique.
    Ma collègue Danielle Simonnet a évoqué les conséquences d’une remise à la rue sur le plan de la santé, de la scolarité des enfants ou encore de l’errance résidentielle qu’une expulsion provoque. Allons encore plus loin : en France, vivre dans la rue tue. Le collectif Les Morts de la rue souligne que plus de 2 000 personnes meurent ainsi chaque année. Ces éléments doivent nous inciter à peser avec une extrême gravité la question de la procédure des expulsions et de ses conséquences sur le nombre de personnes supplémentaires qui se retrouveront à dormir sur les trottoirs de nos villes et finiront par en mourir – car c’est bien de cela qu’il s’agit. Ces sujets sont beaucoup trop graves pour que nous adoptions aveuglément une proposition de loi élaborée sous le seul angle de la gestion par les bailleurs, sans aucune analyse des conséquences sociales. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 111.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        204
            Nombre de suffrages exprimés                201
            Majorité absolue                        101
                    Pour l’adoption                53
                    Contre                148

    (L’amendement no 111 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierrick Berteloot, pour soutenir l’amendement no 118.

    M. Pierrick Berteloot

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    En complément de l’amendement précédent, celui-ci concerne la création d’un fonds national de garantie, destiné aux propriétaires victimes d’occupation illégale. Nous demandons que le Gouvernement remette au Parlement un rapport sur le nombre de logements illégalement occupés et un bilan du montant total des préjudices subis par les propriétaires, dans le but d’établir un chiffrage précis permettant d’indemniser correctement ces derniers. Les dégâts financiers pour les victimes sont en effet considérables : entre le paiement des factures, les crédits non remboursés en raison du manque à gagner lors d’une occupation illégale, les travaux de remise en état du bien, sans parler des frais de justice qu’elles doivent engager pour récupérer leur bien, les victimes sont injustement prises à la gorge de toutes parts. L’indemnisation tarde sans cesse ; les démarches, la plupart du temps ignorées des propriétaires, sont compliquées et ne couvrent pas tous les préjudices.
    La création d’un fonds national de garantie spécifique serait l’occasion de simplifier l’indemnisation, d’englober la totalité des préjudices subis et d’accélérer le processus. L’État se doit de soutenir les victimes d’occupation illégale, aussi bien juridiquement que financièrement. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Même argumentation que tout à l’heure : il existe un Observatoire des squats ; utilisons ce nouveau vecteur, qui a bien fonctionné en 2021, pour obtenir les chiffres de 2022 et des prochaines années, quitte à le renforcer et à demander plus d’indications relatives aux régions, aux départements et au montant des préjudices. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Vous évoquez, monsieur le député, les frais laissés à la charge des propriétaires victimes. Je rappelle que le code des procédures civiles d’exécution prévoit qu’un propriétaire victime peut obtenir à la fois le dédommagement des charges impayées et le montant des loyers non perçus à cause d’un squat.

    M. Frédéric Boccaletti

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    Mais cela prend des années !

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Il convient donc d’appliquer les dispositions de ce code, sans qu’il soit besoin d’imaginer un dispositif alternatif.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Selon l’Observatoire des squats créé par Mme Wargon, 170 propriétaires ont pu être mis en difficulté en raison du non-paiement des loyers et des crédits qu’ils avaient à rembourser. Ce n’est bien sûr pas normal. Nous formulons depuis longtemps une proposition en vue de répondre à cette situation – nous l’avons d’ailleurs fait en commission : il s’agit de la garantie universelle des loyers. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) L’idée n’est pas nouvelle : elle était défendue par Cécile Duflot, alors ministre du logement, qui prévoyait de l’appliquer,…

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Ce n’est pas une très grande référence !

    M. François Piquemal

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    …mais Manuel Valls a écarté la mesure.
    La garantie universelle des loyers permettrait de disposer d’une caisse nationale d’assurance, gérée de manière paritaire par des représentants de locataires et de propriétaires, afin de combler, auprès du propriétaire, les impayés d’un locataire en difficulté. Cette caisse de solidarité et de péréquation permettrait de répondre à ce besoin. Nous préférons cette solution sérieuse, qui a fait l’objet d’études précises, à un fonds institué à la va-vite. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    (L’amendement no 118 n’est pas adopté.)

    Article 1er A

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Michel Castellani.

    M. Michel Castellani

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    Cette proposition de loi en général, et cet article en particulier, nous invitent à appréhender la question du logement dans sa globalité. La protection de la propriété privée constitue certes une base incontournable de la démocratie, du vivre-ensemble et de la vie sociale, mais on ne saurait oublier que derrière le squat se cachent la misère, la précarité et la marginalité. S’il est utile de protéger la propriété, il est également indispensable de protéger les plus modestes, de promouvoir une politique de production de logements sociaux bien plus active qu’aujourd’hui, et de favoriser toujours davantage une politique d’insertion sociale – bien que nous en connaissions les immenses difficultés.
    Une question me taraude : que deviennent les personnes expulsées ? Où vont-elles ? Par quel artifice ou quel miracle ne deviendront-elles pas de nouveaux squatteurs ? Nous devrions répondre à cette interrogation angoissante, si nous voulons éviter que les squats et les expulsions ne se succèdent en chapelet. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Pauget.

    M. Éric Pauget

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    Enfin, les squatteurs pourront être considérés comme des voleurs ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Anne-Laure Blin

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    Il a raison !

    M. Éric Pauget

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    Grâce aux travaux menés en commission, nous avons pu aboutir au consensus du bon sens.

    M. Maxime Minot

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    Ça fait du bien d’entendre la vérité !

    M. Éric Pauget

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    En votant l’amendement de notre collègue Annie Genevard, les membres de notre assemblée ont reconnu l’existence d’un délit d’occupation illégale du bien d’autrui, désormais considéré comme un vol. Le droit de propriété reprend sa place. Nous pouvons nous réjouir collectivement de cette avancée notable, défendue depuis de nombreuses années par les députés du groupe Les Républicains, et qui va dans le sens de l’intérêt général. Je tiens à saluer les parlementaires qui nous ont apporté leur soutien et leur vote, et qui se sont montrés capables de dépasser les clivages partisans.
    Cette avancée majeure ne doit pas nous empêcher de porter plus avant notre lutte contre le fléau des squatteurs. Il est inconcevable que des délinquants immobiliers continuent de bénéficier des avantages de notre politique sociale du logement, réservée aux honnêtes citoyens. Aussi vous demandons-nous d’aller encore plus loin dans la prévention du squat – c’est le sens des amendements que j’ai déposés. Nous devons envoyer un message clair aux auteurs de ces pratiques inacceptables, pour les dissuader de commettre ces infractions ; tel sera le sens des amendements que je présenterai, visant à suspendre les demandes de logement social et les aides au logement pour les squatteurs – car plus on dissuade, moins on sanctionne.

    Mme Anne-Laure Blin

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    Il a raison !

    M. Éric Pauget

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    J’espère pouvoir compter sur votre soutien lors du vote de ces mesures dissuasives, visant à prévenir le squat. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme Anne-Laure Blin

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Rachel Keke.

    Mme Rachel Keke

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    La loi que vous proposez est complètement déconnectée de la réalité. Il y a quelques semaines, nous avons condamné, dans l’hémicycle, la baisse du chauffage à dix-neuf degrés dans les logements : c’est un luxe que n’ont pas les 162 habitants de la résidence Coallia de Thiais, et bien d’autres ! Vous rendez-vous compte que dormir avec dix-neuf degrés en France, en 2022, est un luxe pour beaucoup ? Et vous voudriez les condamner ? Ce soir, il fait entre cinq et huit degrés, et je pense à tous ceux qui vivent dans des conditions déplorables : comment pouvez-vous criminaliser des personnes qui fuient la misère, l’injustice et le froid ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Votre proposition de loi est une honte. Moi qui ai connu la galère et la misère, moi qui ai connu la vie dans un squat et l’exclusion avec un bébé dans les bras, je vous le dis : j’ai honte qu’une telle loi puisse réprimer le fait de se loger avec dignité. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
    Je le répète, pour que le message entre dans vos têtes : personne ne veut se demander où il va dormir le soir, ni s’il aura assez chaud. Comme le dit l’association Droit au logement, qui a manifesté toute la journée devant l’Assemblée nationale : se loger n’est pas un crime. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Les gens qui essaient de survivre ne sont pas des criminels. Comment peut-on condamner à trois ans de prison et à 45 000 euros d’amende des personnes qui n’ont rien, et qui n’ont pas de logement ? Vous êtes déconnectés des réalités de la vie ! (Mêmes mouvements.) On ne résout rien en ajoutant du malheur aux malheureux. Il faut trouver des vraies solutions, et elles passent par une vraie politique du logement. (Mme et MM. les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent. – Plusieurs députés du groupe Écolo-NUPES applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Cyrielle Chatelain.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Cet article fait peser un grave risque sur des centaines de milliers de locataires et d’habitants, car derrière votre novlangue dans laquelle squatteur rime avec peur, qui cherchez-vous à criminaliser ? Les personnes dites sans droit ni titre, qui ont par exemple un bail oral, ou les locataires dont le bail a été résilié par la justice en raison d’une procédure de vente ou parce qu’il est arrivé à son terme : ces personnes sont, potentiellement, chez elles.

    M. Philippe Gosselin

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    On ne parle pas de la même chose, vous le savez très bien !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Il est facile de parler de squatteurs, mais en réalité, vous cherchez à jouer sur les peurs et à criminaliser.

    M. Laurent Jacobelli

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    Pourquoi n’êtes-vous jamais du côté des honnêtes gens ?

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Vous voulez condamner ces personnes à plusieurs années de prison pour vol d’un immeuble, mais un immeuble, ça ne se vole pas – à ce que je sache, on ne part pas avec un immeuble sous le bras ! Le propriétaire en reste propriétaire : il peut le vendre, le léguer ou, bien évidemment, en récupérer l’usage avec des procédures prévues par la loi.

    M. Philippe Gosselin

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    C’est pour cela qu’il faut légiférer !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Je le répète, il en reste le propriétaire.
    Enfin, si l’immeuble est squatté, c’est généralement parce qu’il est vide et inutilisé. (« Et alors ? » sur les bancs du groupe LR.)

    M. Philippe Gosselin

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    Ce n’est pas une raison !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Être propriétaire, cela implique des droits, mais aussi des devoirs. Je tiens à vous rappeler que dans la loi que notre assemblée a votée, il est écrit : « Garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble de la nation. » Il est bien question de l’ensemble de la nation, y compris les propriétaires ! Ceux qui ne sont pas à la hauteur, qui n’appliquent pas la loi, qui ne respectent pas la solidarité nationale et qui laissent des personnes dormir dehors, sont aussi ceux qui, pour des raisons financières et spéculatives, laissent des immeubles vides, y compris en plein Paris où les prix sont complètement fous.

    M. Maxime Minot

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    C’est totalement inentendable !

    M. Philippe Gosselin

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    Que l’État organise les choses !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Les voleurs, ce ne sont pas ceux qui cherchent à se protéger du froid avec leurs enfants ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR et quelques bancs du groupe RN.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous détestez les honnêtes gens !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    La solidarité nationale, cela ne vous dit rien ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Merci, chère collègue.
    La parole est à M. Gérard Leseul.

    M. Gérard Leseul

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    L’article 1er A a été intégré en commission par un amendement du groupe Les Républicains, ce qui nous donne déjà une indication sur son esprit… (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LR.) Il assimile à un vol l’occupation illicite, sans droit ni titre, et de mauvaise foi, d’un immeuble appartenant à un tiers. Il fait peser sur l’occupant la responsabilité de prouver qu’il détient un titre légal d’occupation. Dans l’esprit de l’article 3 initial, l’article 1er A vise à durcir toutes les sanctions pesant sur l’ensemble des occupants sans droit ni titre, sans distinction entre, d’une part, un locataire dont le bail a été rompu – cela a été souligné à plusieurs reprises – et, d’autre part, un occupant qui a pénétré par effraction dans les lieux et s’y maintient par la force.
    Somme toute, cet article condense les intentions qui ont animé le rapporteur : provoquer une rupture complète avec tout ce qui a forgé la lutte contre les exclusions depuis la loi d’orientation relative à la lutte contre les exclusions, dite loi Aubry, de 1998 – le rapporteur y a fait référence sans la nommer, en affirmant qu’il fallait revenir à la situation ante. C’est bien ce que vous faites avec cette proposition de loi et avec l’article 1er A : vous voulez en revenir à des temps où les plus faibles n’étaient pas protégés. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Vojetta.

    M. Stéphane Vojetta

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    Je ne comptais pas prendre la parole, mais nous venons d’entendre des paroles graves qui m’obligent à réagir. Une députée a affirmé que les propriétaires qui détiennent un logement vacant – sans préciser sur quelle période – ne respecteraient pas la loi et ne rempliraient pas leur mission. C’est bien cela, madame la députée ? Bravo !

    M. Laurent Jacobelli

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    Ils sont du côté des voyous !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Ce n’est pas moi qui le dis, c’est la loi !

    M. Stéphane Vojetta

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    Vous considérez donc qu’un couple qui a épargné toute sa vie pour investir dans un petit logement, en vue de se permettre un complément de retraite (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN), de maintenir son style de vie, voire de laisser quelque chose à ses enfants (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES), et qui serait obligé de laisser ce logement vacant entre deux locataires,…

    Mme Sabrina Sebaihi

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    Nous parlons d’immeubles !

    M. Stéphane Vojetta

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    …ou simplement pour procéder à des travaux de rénovation énergétique – qui vous tiennent à cœur –, n’accomplit pas sa mission au sein de la nation et ne respecte pas la loi ? Félicitations, c’est une belle vision de la France ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE, ainsi que sur les bancs du groupe LR. – Exclamations sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    Mme Cyrielle Chatelain

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    C’est la loi !

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de quatre amendements de suppression, nos 75, 84, 142 et 185.
    Sur ces amendements identiques, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Frédéric Maillot, pour soutenir l’amendement no 75.

    M. Frédéric Maillot

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    Introduit en commission, l’article 1er A assimile toute occupation sans droit ni titre d’un immeuble à usage d’habitation à un vol, exposant les occupants à des peines pouvant aller jusqu’à sept ans d’emprisonnement et 100 000 euros d’amende, au titre de l’article 311-5 du code pénal. L’article 1er A n’opère aucune distinction entre les logements vides et les logements occupés, affirmant ainsi le primat du droit de propriété sur les exigences de sauvegarde de la dignité de la personne – en l’espèce, de personnes dépourvues de logement. Nous proposons donc de le supprimer.
    L’un d’entre vous a affirmé que la loi était faible quand elle ne protégeait que les propriétaires ; plus encore, la loi est faible quand elle met des gamins dehors et qu’elle ne reloge pas les gens destinés à une expulsion. C’est là que la loi est faible ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 84.

    M. François Piquemal

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    C’est une grande escroquerie que de faire croire que cette proposition de loi s’adresse au petit propriétaire qui, en rentrant chez lui, trouve quelqu’un dans son canapé. (« Mais si ! » sur plusieurs bancs du groupe LR.)

    M. Philippe Gosselin

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    Cela arrive souvent !

    M. François Piquemal

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    Ce n’est pas du tout cela. Si vous aviez bien fait votre travail, monsieur le rapporteur, vous auriez établi des distinctions entre les occupants sans droit ni titre. Vous mettez sur le même plan une personne qui s’invite dans le canapé d’un petit propriétaire et une personne qui s’est abritée dans un logement resté vide depuis dix ans, ou encore un petit commerçant qui sous-loue un local. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Pour vous, c’est exactement la même chose.
    Nous nous trouvons dans une situation dommageable : vous avez préféré tendre l’oreille au programme du Rassemblement national en matière de logement, plutôt qu’à celui d’associations comme la Fondation Abbé-Pierre ou le Secours catholique, et plutôt qu’à la Défenseure des droits. (Mêmes mouvements.) Voilà où nous en sommes.

    M. Jean-Pierre Taite

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    Arrêtez de donner des leçons !

    M. François Piquemal

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    Vous promettez la prison à des personnes qui sont victimes de marchands de sommeil et à des locataires qui n’arrivent plus à s’en sortir. Ils seraient des voleurs, auxquels vous promettez trois à quinze ans de prison ! Je me suis livré à un petit calcul : combien coûterait votre mesure pour les squatteurs de 2021 – sachant toutefois qu’avec votre texte, le nombre de squatteurs va exploser ?

    M. Paul Midy

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    Non, ils vont arrêter de squatter !

    M. François Piquemal

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    Ils n’arrêteront pas de squatter : vous mettrez davantage de personnes à la rue, et vous tenterez davantage de personnes de s’abriter dans le logement d’autrui.
    Avec des peines de sept ans de prison, votre mesure coûterait 224 000 euros par personne. Pour 170 personnes, il en coûterait 38 millions d’euros à l’ensemble des contribuables. Avec cet argent, nous pourrions payer trente-et-une années de loyer. Je vous propose donc de retirer l’article 1er A – soyez plus humains que cela, et retirez même votre proposition de loi. Utilisons cet argent à bon escient, notamment pour construire du logement social. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Anne Brugnera, pour soutenir l’amendement no 142.

    Mme Anne Brugnera

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    Il vise à supprimer l’article 1er A qui a été introduit lors de l’examen du texte en commission, et qui vise à créer un délit d’occupation sans droit ni titre d’un immeuble bâti à usage d’habitation appartenant à un tiers – délit apparenté à un vol.
    Je partage la volonté de M. le rapporteur et de mes collègues du groupe Renaissance de renforcer la protection de la propriété privée – c’est l’esprit global de la proposition de loi. Cependant, cet article risque d’avoir des effets pervers, car il mélange des situations qui ne peuvent pas être traitées de la même façon : les squatteurs et les locataires menacés d’expulsion.

    Mme Danielle Simonnet

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    Exactement !

    Mme Anne Brugnera

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    Les personnes coupables de squat, c’est-à-dire celles qui sont entrées et se sont maintenues illégalement dans un logement, sont déjà pénalisées au titre de l’article 226-4 du code pénal. L’article 1er de cette proposition de loi alourdira la peine encourue, qui sera désormais la même que pour un vol.
    Cependant, il faut également prendre en considération les occupants entrés légalement et qui se sont retrouvés sans droit ni titre par la suite, ce qui peut arriver pour diverses raisons. Je crains que cet article ne mène à infliger à ces locataires une sorte de double peine.
    En outre, l’efficacité de ce nouveau délit pour accélérer les procédures contentieuses – car c’est là un des objectifs du texte – n’est pas avérée dans ce dernier cas, comme M. le rapporteur l’a souligné lors de l’examen en commission.
    Pour toutes ces raisons, je vous propose de supprimer l’article 1er A pour le remplacer par un autre dispositif plus équilibré qui permettrait de différencier ces deux situations et de leur appliquer des sanctions graduées. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Mathilde Panot

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    Écoutez votre collègue, supprimez l’article !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Aurélien Taché, pour soutenir l’amendement no 185.

    M. Aurélien Taché

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    Je suis surpris des propos que Mme Brugnera vient de tenir : visiblement, certains dans la majorité finissent par se rendre à la raison !
    Monsieur le rapporteur, votre proposition de loi initiale contenait un article 3 par lequel vous tentiez de pénaliser les impayés de loyer. Vous y avez finalement renoncé après avoir procédé aux auditions, comme vous nous l’aviez expliqué en commission.
    Pourtant, l’article 1er A produirait des effets similaires. En effet, il assimile au vol l’occupation sans droit ni titre d’un bien immobilier. Peut-être vous êtes-vous rendu compte des conséquences que cela aurait – l’intervention de Mme Brugnera me permet de l’espérer.
    Transposer à l’occupation d’un bien les dispositions applicables au vol, qu’est-ce que cela signifie ? Un vol simple peut entraîner trois ans de prison. Or votre définition d’un occupant sans droit ni titre inclut le détenteur d’un bail résilié. En somme, si un locataire ne paye pas son loyer pendant quelques mois et voit son bail résilié, il est considéré comme un voleur et passible de trois ans de prison. Cette peine peut, dans divers cas, être étendue à sept ans par l’application des circonstances aggravantes définies dans le code pénal. Elle peut même atteindre dix ans lorsque l’occupation est pratiquée en bande organisée, comme je le rappelais lors de la discussion générale.
    Le texte rend également ces dispositions applicables aux logements inoccupés. Raisonnons par l’absurde : si l’association Droit au logement qui, par des actions d’occupation, a souvent alerté la société sur la situation des mal-logés, décidait d’occuper un bâtiment vide, ses membres seraient désormais coupables d’occupation en bande organisée et passibles de dix ans de prison.
    Si vous vous êtes rendu compte de l’absurdité de votre criminalisation des locataires, des militants, de tous ceux qui luttent contre le mal-logement, nous nous apprêtons à vivre un moment important. Monsieur le rapporteur, après ces différentes interventions, je suis impatient d’écouter votre avis. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    En rédigeant cette proposition de loi, j’ai pris pour référence l’article 226-4 du code pénal : « L’introduction dans le domicile d’autrui à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte, hors les cas où la loi le permet, est punie d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. » Cette sanction est trois fois inférieure à celle que risque un propriétaire qui, ayant constaté la présence chez lui d’un squatteur, déciderait de faire évacuer les lieux.

    M. Paul Midy

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    Eh oui, il a raison ! Ce n’est pas logique !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    J’ai donc souhaité reprendre une idée que nous avions introduite dans la loi Asap. Certes, le groupe La France insoumise s’était abstenu, mais l’Assemblée nationale avait largement adopté cet article 74 : nous avions considéré comme anormal qu’un squatteur risque une peine trois fois moins lourde qu’un propriétaire qui le jette dehors.
    L’Assemblée nationale comme le Sénat avaient donc adopté cet article. C’est le Conseil constitutionnel qui, à la suite de sa saisine par la gauche quant à l’ensemble de la loi Asap, l’avait censuré au motif qu’il s’agissait d’un cavalier législatif.
    J’ai donc estimé pertinent de reprendre cette mesure visant à rééquilibrer les peines en sanctionnant plus lourdement les squatteurs. Il s’agit de l’article 1er, adopté en commission.
    Il se trouve que nous avons depuis mené un travail de coconstruction avec le groupe Les Républicains, en particulier avec Annie Genevard, que je salue.

    Mme Sabrina Sebaihi

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    Et avec le RN ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Elle a proposé ce nouvel article 1er A, également adopté en commission, qui permet d’envoyer un signal fort : au-delà de la question de la peine, que nous proposons de tripler, nous souhaitons, en l’inscrivant en préambule de la loi, acter le principe selon lequel l’occupation illicite d’un local à usage d’habitation est punie au même titre qu’un vol. Cela nous a paru relever du bon sens.
    Nous avons depuis pris connaissance d’autres éléments évoqués lors des débats, notamment des remarques de M. le garde des sceaux relatives à la constitutionnalité du dispositif. Nous reconnaissons qu’il convient de préciser les peines. Nous triplerons la peine prévue par l’article 226-4 du code pénal en la portant à trois ans et à 45 000 euros d’amende ; il faut définir un quantum des peines, clarifier les différentes situations, car on ne peut pas mettre tout le monde dans le même panier et appliquer une sanction identique à un squatteur et à un locataire.
    Il importe donc de définir plus précisément les peines applicables à différentes situations, ne serait-ce que pour rendre l’article conforme à la Constitution. Nous avons poursuivi notre travail de coconstruction : c’est pourquoi Mme Genevard a déposé deux amendements de réécriture de l’article 1er A, qui permettront de répondre aux objections formulées lors du débat.
    Ils ne laisseront aucun doute sur les différentes peines : dans certains cas, l’occupation illicite d’un logement sera assimilable à un vol et passible de trois ans de prison et de 45 000 euros d’amende ; dans d’autre cas, elle sera passible d’une peine beaucoup moins lourde.
    Nous n’avons aucune intention de dépasser les trois ans de prison et les 45 000 euros d’amende, comme le prétendent certains. Le but n’est pas de se livrer à la surenchère,…

    Mme Sabrina Sebaihi

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    Si ! C’est tout le sens de votre proposition de loi !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    …de multiplier et d’alourdir les peines n’importe comment. C’est pourquoi la réécriture proposée par Mme Genevard est pertinente : elle permet d’acter sans ambiguïté le principe directeur de l’article, tout en définissant clairement des peines dégressives, différenciées selon la situation.
    Dans un esprit de coconstruction, attendu que l’article a été adopté par la commission, je suis défavorable à sa suppression. En revanche, je vous invite à examiner avec attention les amendements de réécriture de Mme Genevard : si elle a défendu en commission un très bon dispositif, celui qu’elle propose en séance est encore meilleur. (Sourires et applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et LR.) Il permettra de clarifier l’échelle des peines, conformément aux exigences constitutionnelles, et de différencier les situations en fixant des critères objectifs.
    Je souhaite donc continuer cette démarche de coconstruction. Plutôt que de supprimer l’article 1er A introduit par Mme Genevard, passons directement à sa réécriture avec Mme Genevard. Je vois que des sous-amendements ont été déposés, ce qui nous donnera l’occasion d’en discuter ensemble,…

    M. Sylvain Maillard

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    Main dans la main !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    …afin que ce texte sorte de l’Assemblée nationale rédigé aussi clairement que possible, avec une échelle des peines limpide.

    Mme Sabrina Sebaihi

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    Il pourrait aussi ne pas en sortir du tout !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Les différentes lectures à l’Assemblée nationale et au Sénat permettront de peaufiner le texte. En tout état de cause, il s’agit ici d’atteindre mon, notre, objectif initial en déclarant qu’il est intolérable qu’un squatteur risque une peine trois fois moins lourde que le propriétaire qui le jette dehors.

    M. Paul Midy

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    Eh oui !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Je suis donc défavorable aux amendements de suppression. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et LR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

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    L’article 1er A vise à criminaliser l’occupation sans droit ni titre et de mauvaise foi d’un immeuble bâti à usage d’habitation. Disons-le clairement : cela a du sens.
    Néanmoins, un examen plus approfondi révèle certains écueils qui ne sont pas mineurs, car constitutionnels. Le premier d’entre eux concerne le terme de « mauvaise foi ».

    M. Erwan Balanant

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    Qui n’existe pas vraiment dans le code pénal…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Pour le définir dans le code pénal, si vous me permettez cette familiarité, bonjour ! C’est compliqué ! C’est une première réelle difficulté.
    Le deuxième écueil réside dans l’instauration de facto d’une présomption de culpabilité, qui présente là encore, à l’évidence, une fragilité constitutionnelle importante.
    Troisièmement, en plus de sa rédaction que l’on peut qualifier d’imprécise, l’article pose d’importants risques de chevauchement, puisqu’il n’exclut pas de son périmètre les logements pour lesquels la violation de domicile peut s’appliquer.
    Enfin, ce délit aurait également pour effet d’incriminer les locataires défaillants qui ne font l’objet d’aucune mesure d’expulsion, ce qui réduirait à néant tous les dispositifs prévus dans le code de procédure civile d’exécution pour protéger les locataires. Je pense notamment à la trêve hivernale et aux délais accordés pour quitter les lieux.
    En conséquence, je partage l’avis de M. le rapporteur : l’article 1er A mérite d’être retravaillé. La navette parlementaire accomplira son travail salutaire.

    Mme Sabrina Sebaihi

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    Supprimons-le, ça nous fera gagner du temps !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Non : comme je vous l’ai dit, je trouve que l’idée de départ est excellente. Il faut simplement l’affiner un peu pour le rendre conforme aux principes constitutionnels. Ce ne sera pas la première fois ! Il suffit d’un peu de bonne volonté et d’un peu de travail supplémentaire, que nous sommes prêts à fournir.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Le professeur Dupond-Moretti nous donne des leçons à vingt-trois heures…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Vous savez, j’ai été avocat pendant trente-cinq ans : je peux vous donner une petite leçon de droit, si vous y tenez !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Allez-y, finissez votre propos !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ne soyez pas désobligeant ! Vous, vous n’êtes pas capable de grand-chose, hormis de vociférations et de hurlements constants dans l’hémicycle ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Allez, c’est bon ! Finissez votre propos !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ce ne sont même pas des phrases entières, mais des onomatopées ! En permanence ! Bravo, vous apportez énormément au débat !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Vous, vous faites avancer le débat, c’est sûr !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Prenez donc le micro, apportez-nous votre éclairage juridique ! Allez-y, venez !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Vous êtes un clown !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je ne sais pas si je suis un clown, mais si c’est le cas, je ne suis pas le seul !

    Mme la présidente

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    Seul M. le ministre a la parole !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Par conséquent, demande de retrait, et à défaut, avis défavorable. Il nous reste à travailler ensemble : avec une telle volonté de construction commune, je suis sûr que nous y parviendrons !

    M. Jocelyn Dessigny

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    C’est cela, allez donc travailler ! Il y a de quoi faire, en matière de justice !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Cyrielle Chatelain. Elle l’a demandée, elle, et elle l’a.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Je suis bien évidemment favorable aux amendements de suppression de l’article.

    M. Patrick Hetzel

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    Quelle surprise ! On ne s’y attendait pas !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    J’en profite pour répondre à mes collègues visiblement étonnés par la découverte des dispositions légales en matière de logement.
    Bien évidemment, il existe de petits propriétaires, des personnes qui ont épargné toute leur vie pour investir dans un bien, pour y loger leurs enfants. Bien évidemment, il arrive que ces personnes louent leur logement, par exemple après que leurs enfants ont fini leurs études. Faut-il les protéger ? Oui : la loi le fait. Faut-il aller plus loin ? Oui : mettez donc en œuvre la garantie universelle des loyers. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)
    C’est ce que proposait Cécile Duflot.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Une très mauvaise ministre !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    C’est la seule manière de protéger les petits propriétaires, puisqu’elle leur permet de percevoir leur loyer lorsque les locataires de bonne foi ne peuvent pas le payer en raison d’un accident de la vie. Si vous tenez à les protéger, adoptez cette mesure !
    Cela dit, vous mettez beaucoup en avant les petits propriétaires pour protéger les gros. Je vous rappelle que 3,5 % des propriétaires détiennent 50 % des logements. Je le répète, la moitié des logements en location appartiennent à 3,5 % des propriétaires !
    La majorité d’entre eux louent d’ailleurs leur logement et sont de bons propriétaires. Toutefois, une petite minorité acquiert des logements à des fins uniquement spéculatives. Elle laisse vides des immeubles entiers, qui finissent parfois par être squattés.
    Je vous rappelle que l’article 1er de la loi de 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement dispose : « Garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble de la nation. »

    M. Paul Midy

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    Il est très important, mais ne reconnaît aucun droit à squatter !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Il me semble que personne, propriétaire ou locataire, ne peut s’en exempter.

    M. Philippe Gosselin

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    C’est à l’État d’organiser cette solidarité, pas aux propriétaires privés !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Laisser vacant un logement, un immeuble entier, pour des raisons financières, contrevient à ce devoir de solidarité de l’ensemble de la nation. Quand notre pays compte 4 millions de mal-logés, oui, les contrevenants à la loi sont ceux qui en profitent ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES. – Mme Stella Dupont applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Prisca Thevenot.

    Mme Prisca Thevenot

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    Oui, bien entendu, il faut distinguer entre les squatteurs et les locataires qui connaissent des difficultés financières ou de vie – ces difficultés sont compréhensibles. Mais, comme l’a indiqué le rapporteur, cet élément sera pris en compte, notamment dans le travail d’enrichissement qui sera effectué au cours de la navette parlementaire.
    Cela étant dit, notre débat est impressionnant en ce qu’il révèle la distorsion idéologique sur laquelle est campée une partie de l’hémicycle,…

    M. Philippe Gosselin

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    Et elle est très forte, cette distorsion !

    Mme Danièle Obono et M. Aurélien Taché

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    C’est vrai, il y a une distorsion idéologique !

    Mme Prisca Thevenot

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    …distorsion idéologique qui empêche certains de nos collègues de voir la réalité en face. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN.) Oui, squatter un logement qui n’est pas le sien est un délit !

    Mme Mathilde Panot

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    Mais c’est déjà le cas dans la loi !

    Mme Prisca Thevenot

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    Et arrêtons de croire que seuls les belles demeures et les grands châteaux sont squattés : ce sont le plus souvent les logements de petits propriétaires qui sont visés. Du reste, le petit argumentaire du bon squatteur en fait état.
    Je souhaiterais donc que l’on discute sainement, calmement,…

    Mme Mathilde Panot

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    Pourquoi ? Ce n’est pas le cas ?

    Mme Prisca Thevenot

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    …de la réalité des choses : squatter est un délit, aider les locataires en difficulté est un enjeu. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Thomas Ménagé applaudit également.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 75, 84, 142 et 185.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        219
            Nombre de suffrages exprimés                219
            Majorité absolue                        110
                    Pour l’adoption                53
                    Contre                166

    (Les amendements identiques nos 75, 84, 142 et 185 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement no 163, qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements.

    Mme Annie Genevard

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    Tirant les leçons de nos discussions en commission, j’ai décidé de vous proposer une réécriture de l’article 1er A, afin de répondre à différentes objections qui me paraissaient fondées.
    Premièrement, il est nécessaire de distinguer le squatteur du locataire qui ne paie plus ses loyers. Les situations ne sont pas les mêmes, les quantums de peine ne doivent donc pas être les mêmes, non plus que les éventuelles procédures d’éviction.
    Deuxièmement, j’ai souhaité revenir sur la présomption de culpabilité. De fait, aux termes de l’article 1er A tel qu’il est rédigé, il appartiendrait au squatteur de démontrer qu’il possède un titre l’autorisant à occuper le lieu concerné. J’ai donc supprimé ce point.
    Troisièmement, j’ai également supprimé, selon le même principe, la mauvaise foi, qui faisait encourir au texte un risque d’ordre constitutionnel.
    En revanche, j’ai conservé, et cela nous paraît très important, la notion de vol : le squat est assimilé à un vol.

    M. Maxime Minot

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    Eh oui ! Squatter, c’est voler !

    Mme Annie Genevard

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    La « soustraction frauduleuse de la chose d’autrui » : telle est la définition que l’article 311-1 du code pénal donne du vol.

    Mme Ségolène Amiot

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    En l’espèce, il n’y a pas de soustraction !

    Mme Annie Genevard

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    J’entends les objections ; le terme semble choquer les oreilles sensibles. Mais, en réalité, n’importe quel Français de bon sens vous dira que lorsqu’on lui prend son logement, son bien, on le lui dérobe : c’est un vol ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Philippe Gosselin

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    Eh oui, il ne peut pas en disposer !

    Mme Annie Genevard

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    Il n’en a plus l’usus – c’est-à-dire le droit de s’en servir –, ni, s’il s’agit d’un logement mis en location, le fructus – c’est-à-dire le fruit de la location –, ni l’abusus, puisqu’il ne peut plus en disposer, le céder, le transformer ou l’abandonner.

    M. Philippe Gosselin

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    Allez vendre un bien squatté !

    Mme la présidente

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    Merci de conclure, ma chère collègue.

    Mme Annie Genevard

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    Ces trois éléments constituent le droit de propriété. C’est la raison pour laquelle nous sommes attachés à la notion de vol. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. William Martinet, pour soutenir le sous-amendement no 205.

    M. William Martinet

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    Le Gouvernement et une partie de la majorité sont, je crois, bien embêtés. En commission, ils ont ouvert la boîte de Pandore, lâché les chiens en quelque sorte, en autorisant un discours, et plus que cela, des amendements, un article, qui tendent à criminaliser des situations de pauvreté. C’est ainsi que l’article 1 A a été adopté en commission, avec le soutien du groupe LR et du groupe RN – soutien dont vous étiez très contents.
    Mais peut-être sont-ils à présent, une semaine après les débats en commission, en train de prendre conscience de l’impact qu’aurait cet article s’il était adopté. Je parlais de criminalisation de la pauvreté ; de fait, une peine de prison pouvant aller jusqu’à dix ans serait encourue, non seulement par les squatteurs, mais aussi par les locataires d’un logement, titulaires d’un bail, qui ont commencé à payer un loyer mais qui, après avoir fait l’objet d’un jugement d’expulsion, se maintiennent dans le logement sans droit ni titre.
    En fait, vous êtes en train de paniquer, mes chers collègues, car vous mesurez combien l’article 1er A est terrible. Mais, pardonnez-moi, la réponse que vous nous faites n’est absolument pas satisfaisante. Monsieur le garde des sceaux, vous avez commis un lapsus tout à l’heure : vous avez appelé au retrait. Mais au retrait de quoi ? De l’article 1er A ? Il n’est pas possible de retirer un article.

    Mme Véronique Louwagie et M. Patrick Hetzel

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    Mais non : des amendements de suppression. Écoutez donc !

    M. William Martinet

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    Certains collègues de la majorité présidentielle ont invoqué la navette parlementaire. Pour ma part, je n’accepte pas de signer un chèque en blanc, et de conserver un article 1er A terriblement dangereux pour la société puisqu’il criminalise la pauvreté, au motif que vous essaierez, lors de la navette, d’encadrer les choses et d’éviter que cet article ne conduise à mettre des familles pauvres en prison.
    Certes, il aurait été préférable que vous votiez nos amendements de suppression. Mais au moins avez-vous pris conscience – en tout cas, je l’espère – du problème. À force d’écouter le Rassemblement national défendre les lois anti-squat, vous en arrivez à des situations dangereuses comme celles-là. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Erwan Balanant, pour soutenir le sous-amendement no 398.

    M. Erwan Balanant

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    Grâce à l’amendement de Mme Genevard, nous avançons vers une prise en compte raisonnable, ou plutôt équilibrée, de la problématique du squat. Je crois – en tout cas, j’espère – que, des bancs des Insoumis jusqu’à ceux du Rassemblement national, on a pris conscience qu’il s’agissait là d’un véritable problème.
    Le sous-amendement no 398 vise cependant à rétablir l’équilibre sur certains points. Tout d’abord, l’assimilation du squat au vol ne nous paraît pas souhaitable : outre qu’elle pourrait soulever des questions d’ordre constitutionnel, elle ne nous satisfait pas du tout du point de vue de l’écriture du code pénal. Ensuite, il convient de respecter l’échelle des peines. Ainsi, il nous semble important de revenir à une peine d’emprisonnement d’un an au lieu de trois ans.
    Par ailleurs, nous avons souhaité sécuriser les choses au regard de la trêve hivernale.

    Mme Annie Genevard

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    C’est dedans, la trêve hivernale !

    M. Erwan Balanant

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    Nous avons donc déposé différents sous-amendements afin que la question des squats, qui est une véritable préoccupation des propriétaires bailleurs, soit traitée, en respectant un équilibre. De fait, le texte issu des travaux de la commission n’est pas équilibré. L’amendement de Mme Genevard apporte une amélioration. Grâce à nos sous-amendements, le dispositif pourrait être parfait, ou presque.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. William Martinet, pour soutenir le sous-amendement no 206.

    M. William Martinet

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    Je souscris aux arguments qui viennent d’être exposés, mais je dois dire que ni l’amendement no 163 ni les sous-amendements de M. Balanant ne règlent le problème. En effet, Mme Genevard a été très maligne : elle accepte que le vol soit ici puni au maximum de trois ans de prison, mais elle en profite pour réintroduire la peine de six mois de prison et de 7 500 euros d’amende prévue à l’ancien article 3, que nous avons supprimé en commission car nous l’avons jugé intolérable dans la mesure où il revenait à criminaliser non pas des squatteurs mais des gens qui ont un bail mais qui rencontrent des difficultés pour payer leur loyer.
    Ainsi, même avec les sous-amendements – dont je partage l’esprit puisqu’ils visent à atténuer les conséquences de l’amendement de Mme Genevard –, cette peine de six mois de prison et de 7 500 euros d’amende serait maintenue. Encore une fois, je l’ai dit tout à l’heure, vous êtes dans la panade ! Les amendements et sous-amendements qui nous sont proposés ne peuvent pas régler le problème : vous auriez dû accepter nos amendements de suppression de l’article 1er A.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir le sous-amendement no 209.

    M. François Piquemal

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    Je vais vous citer un cas concret, puisque vous proposez d’étendre le délit de vol à l’occupation illicite, sans droit ni titre, de locaux commerciaux. Vous me direz comment on gère ce type de situation. Je connais, dans ma circonscription, des petits commerçants et des petits artisans qui sous-louent des locaux commerciaux. Une de ces commerçantes m’a interpellé hier pour me dire que le propriétaire qui lui sous-loue son local – elle n’a donc ni contrat ni titre – lui réclame depuis plusieurs mois un loyer plus élevé. Elle se demande s’il peut se retourner contre elle en la dénonçant comme une occupante sans droit ni titre, donc comme une squatteuse et une voleuse.
    Beaucoup de petits artisans et commerçants, et même de petites entreprises, n’ont pas les moyens, compte tenu du prix de l’immobilier et des loyers, de souscrire un contrat de location – du reste, parfois, le propriétaire préfère sous-louer, pour des raisons qui lui appartiennent.

    M. Philippe Gosselin

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    Un propriétaire ne sous-loue pas !

    M. François Piquemal

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    Or, la loi de M. Kasbarian les mettra en danger, puisqu’ils seront, eux aussi, considérés comme des squatteurs et des voleurs. Que faites-vous de tels cas ?

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir le sous-amendement no 214.

    Mme Danielle Simonnet

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    Tout d’abord, vous nous racontez la fable selon laquelle il s’agirait de protéger les propriétaires dont le propre logement serait squatté. Mais tout le monde a compris qu’il s’agissait d’une fable puisqu’un cadre législatif existe déjà pour ces cas de figure. Ensuite, on voit bien que vous cherchez à étendre la notion de domicile. Par ailleurs – nous le verrons ultérieurement –, vous jugez totalement paradoxal qu’un propriétaire qui veut se faire justice lui-même encoure une peine plus lourde que le squatteur qu’il veut déloger.

    Mme Annie Genevard

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    Ce n’est pas l’amendement !

    Mme Danielle Simonnet

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    En fait, cela n’a rien de paradoxal car notre droit prévoit toujours des peines plus fortes pour la personne qui ne respecte pas l’État de droit et porte atteinte à d’autres personnes que pour celle qui se loge simplement pour survivre.
    Toujours est-il qu’on s’aperçoit qu’il ne s’agit pas que du domicile puisque cette qualification de vol, puni de prison et d’une amende pouvant aller jusqu’à 45 000 euros, vous voulez l’étendre à l’occupation sans droit ni titre de locaux à usage économique. Votre logique est donc sans fin !
    La seule problématique dont vous ne voulez pas vous occuper, c’est celle de toutes ces personnes qui, encore en 2022, n’ont pas accès à un logement. Pourquoi la loi instituant le droit au logement opposable n’est-elle toujours pas appliquée ? Le droit au logement, décidément, vous n’en avez que faire !

    M. Emmanuel Fernandes

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. William Martinet, pour soutenir le sous-amendement no 215.

    M. William Martinet

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    Qui court après l’extrême droite doit en assumer les conséquences dans l’hémicycle. Vous devez, monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, assumer cet article 1er A qui criminalise la pauvreté. Je vais essayer d’illustrer mon propos par un exemple extrêmement concret.
    Imaginons une famille locataire d’un logement, titulaire d’un bail, qui paie son loyer rubis sur l’ongle depuis plusieurs années. Cette famille est modeste et son logement se situe en Île-de-France, où les loyers sont très élevés, au point que le sien consomme 40 % à 50 % de son budget. Une personne dans la famille tombe malade, perd son travail, ou devient handicapée. Bref, le revenu de la famille baisse et elle se retrouve de fait en situation d’impayé de loyer.

    M. Erwan Balanant

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    Ça n’est pas un squat, ça !

    M. William Martinet

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    C’est la réalité sociale de centaines de milliers de personnes. Cette famille vit donc dans un logement trop cher pour elle ; la dette s’accumule ; une procédure d’expulsion est lancée. Cette famille aimerait trouver un autre logement, plus abordable ; elle a fait une demande de logement social, mais vous savez combien de temps il faut attendre pour avoir une proposition. Elle cherche dans le privé, mais personne ne lui propose de logement. Sous le coup d’un jugement d’expulsion, cette famille se retrouve sans droit ni titre dans son logement.
    Du fait de l’article 1er A que vous nous proposez d’adopter, cette famille dont je viens de décrire le parcours risque des années de prison – je rappelle que des milliers de personnes dans ce pays sont dans ce genre de situations. Voilà ce que vous proposez.

    M. Bruno Fuchs

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    Mais non ! Ce n’est pas un squat !

    M. William Martinet

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    Vous avez couru après l’extrême droite et vous vous retrouvez dans une situation honteuse que vous-mêmes, au fond de votre conscience, vous n’assumez pas. En effet, je suis certain que vous ne souhaitez pas ce résultat, qui est pourtant la conséquence du texte que vous avez voté en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Paul Midy

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    C’est faux !

    M. Laurent Jacobelli

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    Fariboles !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir le sous-amendement no 216.

    Mme Danielle Simonnet

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    Souvenez-vous de la table ronde organisée avec trois avocats spécialisés, préalablement aux travaux de la commission des affaires économiques sur cette proposition de loi. Ces avocats ont été invités parce que ce sont de grands spécialistes de cette question : ils défendent des propriétaires qui subissent une occupation illicite. Je leur ai d’abord demandé combien de cas de ce type ils traitaient par an ; ils ont répondu « trois ou quatre ». Je vous laisse apprécier.
    Je leur ai ensuite posé une question précise : est-ce que le fait de passer d’un à trois ans de prison, aurait changé quoi que ce soit aux dossiers que vous avez eu à traiter ? En toute franchise, dites-le. Ils ont été obligés de reconnaître que cela n’aurait eu aucun effet. Vous pouvez bien continuer à alourdir les peines, à criminaliser la misère…

    M. Laurent Jacobelli

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    Oh là là…

    Mme Danielle Simonnet

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    …à faire des « salauds de pauvres », comme aurait dit Coluche…

    Plusieurs députés du groupe RE

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    Mais non !

    Mme Danielle Simonnet

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    C’est ça, le fond de votre loi ! Vous pouvez criminaliser la misère, vous ne réglerez pas le problème de la pauvreté pour autant. C’est toute la logique de cette loi qu’il faut absolument abandonner. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Erwan Balanant, pour soutenir le sous-amendement no 399.

    M. Erwan Balanant

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    Une remarque au sujet de ce que vient de dire M. Martinet : la situation que vous décrivez, sur laquelle nous pouvons peut-être avoir des avis convergents, n’est pas celle de squatteurs. Or ce sont bien les squatteurs que vise cette proposition de loi. (M. William Martinet proteste.)
    Le sous-amendement no 399 vise à exclure du champ d’application les cas où le locataire ne peut être expulsé en raison de la trêve hivernale – il me semble important de le rappeler –, les cas où a été accordé au locataire un sursis à expulsion, et enfin le cas des personnes qui occupent un logement social ; le dispositif ne pourra s’appliquer qu’aux habitations appartenant à des particuliers. Le sous-amendement no 399 vise donc à préciser un peu le champ.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 163 ainsi que sur les sous-amendements ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    C’est un beau travail de coconstruction et d’affinage.

    Mme Danielle Simonnet

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    Avec l’extrême droite !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    L’article 1er A avait été adopté en commission ; on le réécrit en séance. Cela fait partie du travail parlementaire. Ceux qui le connaissent un peu savent que ce processus se poursuivra. En effet, le Sénat proposera lui aussi une rédaction, puis le texte reviendra à l’Assemblée en commission et en séance pour une deuxième lecture, avant une seconde lecture en commission et en séance au Sénat et, enfin, une commission mixte paritaire, je l’espère. Le travail de coconstruction parlementaire fait qu’on ne reste pas figé. L’intérêt d’être parlementaire, ce n’est pas d’afficher des dogmes idéologiques, de ne jamais bouger et de ne jamais entendre ce qui est dit…

    M. Philippe Gosselin

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    Ce n’est pas aux députés LFI qu’il faut dire ça !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Et justement, nous ne sommes pas dogmatiques. Nous posons des principes et des convictions, puis nous écoutons les réserves qui peuvent être apportées par le Conseil constitutionnel, les experts, les avocats, etc., et nous affinons.
    À ce titre, madame Genevard, je voudrais vous remercier à nouveau pour votre proposition de réécrire l’article 1er A que vous aviez défendu en commission. Encore une fois, cela prouve que vous êtes ouverte à la discussion, que vous entendez les critiques.
    Les amendements nos 163 et 173 – qui vient tout de suite après – que vous proposez permettent de répondre aux critiques.
    Cependant, l’amendement no 163 inclut dans le champ de ces mesures les locaux « à usage économique », tandis que l’amendement no 173 ne mentionne que les locaux « à usage d’habitation ». J’ai une petite préférence pour l’amendement no 173, et je jugerais bon que nous convergions sur celui-ci de manière à circonscrire le champ d’application de la proposition de loi. En effet, l’article 1er, que nous examinerons ensuite, modifie le quantum des peines prévues pour les faire passer à trois ans et 45 000 euros, justement parce que les locaux concernés sont des locaux d’habitation. Du reste, ces peines sont graduées. En effet, quand le bail a été résilié par un juge indépendant qui n’a pas accordé de délai, et hors de la trêve hivernale – comme c’est écrit noir sur blanc dans le dernier paragraphe des amendements nos 163 et 173 –, après des mois et des mois de procédures judiciaires, si la personne se maintient encore dans le domicile, la sanction est de six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende.
    Je vous propose d’intégrer le sous-amendement no 400 déposé par le groupe Dem sur l’amendement no 173, qui précise que cette sanction ne peut intervenir qu’après le rejet de la demande par le juge de l’exécution ou l’expiration des délais accordés par celui-ci.
    Ne pourraient donc être incriminées que des personnes dont le bail a été résilié, auxquelles le JEX n’accorde plus le moindre délai, et en dehors de la trêve hivernale. On est donc vraiment en bout de course, dans une situation où une personne se maintient dans un logement après des mois de procédure, pour ne pas dire des années.
    Madame Genevard, si vous retirez l’amendement no 163, qu’on retient l’amendement no 173 avec le sous-amendement no 400 déposé par M. Erwan Balanant, à mon sens, le quantum des peines sera cohérent. En effet, dans les cas où une personne se maintient dans une propriété malgré la résiliation du bail, malgré la fin de la trêve hivernale et malgré la décision du juge de l’exécution, on est arrivé au bout du bout, et il faut prendre des sanctions : six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende relèvent d’un quantum faible.
    Ça permet de rassurer tout le monde et de parvenir à une première rédaction. Bien sûr, chers collègues de La France insoumise, il y aura des affinages supplémentaires au cours de la navette parlementaire. C’est normal, ça fait partie du travail législatif : quand on n’est pas obtus et borné (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES), on fait évoluer ses propres textes, ses propres amendements, on est capable de faire un pas vers l’autre. Telle est en tout cas notre posture. Je suis sûr que c’est également la vôtre, mes chers collègues. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Laurent Croizier applaudit également.)

    M. Paul Midy

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    C’est très clair !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je voudrais vous dire ma lassitude d’entendre en permanence que nous serions les salauds qui veulent criminaliser les pauvres.

    Mme Danielle Simonnet

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    C’est pourtant vrai !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ras-le-bol, mais alors ras-le-bol ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
    Je n’ai sans doute pas vos qualités humaines, puisque je n’appartiens pas à LFI. Mais, comme on l’a dit lors d’un débat célèbre, « vous n’avez pas le monopole du cœur ». Ça suffit maintenant ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem et HOR.)
    Moi, vous voyez, je pense à la vieille dame qui a bossé toute sa vie… (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Et allez, ça recommence !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Eh bien ça existe ! À Strasbourg, vous ne devez pas en connaître, car toute la misère du monde, vous prétendez la défendre, mais la désespérance d’une vieille dame qui a bossé toute sa vie et qui voit son immeuble squatté, alors là, ça vous échappe ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem et HOR.) Moi, j’en connais, voyez-vous ! J’ai raconté hier soir à la tribune cette histoire que je trouve terrifiante d’une dame qui arrive à la fin de sa vie, qui part vivre dans un Ehpad. Quelques canailles repèrent que son logement n’est plus un domicile car il n’est plus occupé ; elles investissent les lieux. La fille arrive en expliquant que c’est chez sa mère et que sa famille voudrait vendre l’immeuble et on lui répond : « Allez vous faire voir ! ».

    Mme Ségolène Amiot

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    Ce sont 170 cas !

    M. Laurent Croizier

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    C’est trop !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Mieux encore, une affichette à la fenêtre, rédigée par un avocat, affirme que s’ils viennent récupérer l’immeuble, ils seront punis. C’est le monde à l’envers ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem, HOR et sur quelques bancs du groupe RN.)
    Puisqu’on parle de logement, il y a des choses insupportables, comme occuper un logement social alors qu’on n’y a pas droit ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR, Dem, HOR et sur quelques bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Danièle Obono

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    Et mettre en cause les magistrats quand on est garde des sceaux, c’est supportable ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Faisons maintenant une autre rectification. S’agissant de l’article 1er A, je n’ai pas commis de lapsus, monsieur Martinet.
    Je n’ai pas demandé qu’on retire cet article ; j’ai fait part, dans mon rôle de garde des sceaux, me semble-t-il, de réserves constitutionnelles qu’on devrait prendre en considération. J’ai invité à une réécriture – je ne peux pas faire plus, car je suis très respectueux du rôle du Parlement. (M. Jocelyn Dessigny rit.) Les choses sont claires ; rassurez-vous, il n’y a pas de lapsus.
    Maintenant, madame Genevard, je vais essayer de vous répondre avec le sérieux et l’attention que vous méritez.

    Mme Danièle Obono

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    Ouais, ouais, quelle démagogie !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ouais, ouais…
    D’abord, le squat n’est pas un vol. Pourquoi ? Au sens commun du terme, c’est un vol, bien sûr, mais au sens juridique, non, car le vol, c’est « la soustraction frauduleuse de la chose d’autrui ». On peut voler les meubles qui sont dans un immeuble, mais on ne peut pas voler l’immeuble, car on ne peut pas s’en emparer.
    Il y a quelques éminents juristes parmi vous…

    M. William Martinet

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    Ils regardent tous leurs chaussures !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …comme M. Gosselin et M. Hetzel. On ne peut pas identifier le squat au vol. D’ailleurs, vous le savez, car vous avez rectifié un peu la rédaction.

    Un député du groupe LR

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    La rédaction précise : « s’apparente à un vol ».

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Oui, mais « s’apparente » pose le même problème.
    Là, vous allez un peu vite en besogne, me semble-t-il. Je le dis avec infiniment de respect : vous confondez le sens commun et le droit. Madame Genevard, vous disiez que la personne dont l’appartement est squatté soutient que c’est un vol – oui, elle s’exprime ainsi si elle n’est pas juriste. De la même façon, celui qui est escroqué dit : « C’est un vol ! » ; celui qui est victime d’un abus de confiance dit : « C’est un vol ! ». Pourtant, en droit, ce n’est pas un vol, mais un abus de confiance ou une escroquerie. Attention aux termes que nous utilisons !
    Ensuite, cette proposition de loi visait initialement à protéger les logements d’habitation, et là, subrepticement mais nécessairement, on dérive, madame Genevard, vers la protection des locaux économiques.
    Enfin, la rédaction que vous nous proposez aura pour effet de contourner les règles du code de procédure civile d’exécution qui sont protectrices des locataires. Je prends un exemple : une famille en cours d’expulsion qui aurait obtenu des délais supplémentaires octroyés par le juge pour quitter les lieux en considération de sa situation serait passible de six mois d’emprisonnement.

    Mme Danielle Simonnet

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    Voilà ! (Sourires.)

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Mais c’est infernal !

    M. William Martinet

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    Mais oui, nous sommes d’accord avec vous, monsieur le ministre !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ce n’est franchement pas ce que nous recherchons. Je vous propose donc de retirer l’amendement no 163 au profit de l’amendement no 173, sous-amendé par les sous-amendements nos 397 et 400 déposés par Erwan Balanant, sur lesquels je me prononcerai avec bienveillance – je le dis dès à présent. J’émets le même avis de retrait sur les autres sous-amendements dont certains, à l’évidence, ne visent qu’à l’obstruction des débats. Voilà quelle est la position du Gouvernement – humaniste. (Applaudissements et sourires sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Je souhaite une suspension de séance, madame la présidente.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à vingt-trois heures trente, est reprise à vingt-trois heures quarante-cinq.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.
    Madame Genevard, retirez-vous l’amendement no 163 ?
    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Non, madame la présidente, je le maintiens. (Murmures sur les bancs du groupe RE.) Si, je le retire ? (Sourires sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Sébastien Delogu

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    C’est un sketch !

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît. Seule Mme Genevard a la parole.

    Mme Annie Genevard

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    Pardonnez-moi, nous sommes face à une question de légistique relativement complexe. Une des dispositions que nous souhaitons conserver figure dans l’amendement no 163, qui ne peut malheureusement plus être sous-amendé. Nous allons donc le retirer, au profit de l’amendement no 173, qui sera, lui, sous-amendé, afin d’y ajouter la question des locaux à usage économique qui figurait dans l’amendement no 163. Les locaux visés par le dispositif seront donc ceux à usage d’habitation ou à usage économique.

    M. Sébastien Delogu

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    Ce sont les petites étoiles en bas du contrat, donc…

    (L’amendement no 163 est retiré. En conséquence, les sous-amendements nos 205, 398, 206, 209, 214, 215, 216 et 399 deviennent sans objet.)

    Mme la présidente

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    Je vous propose, madame Genevard, de présenter l’amendement no 173, qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements.

    Mme Annie Genevard

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    On est au cœur de la loi. L’amendement tend à réécrire le dispositif relatif au délit d’occupation frauduleuse pour couvrir à la fois les squats et le cas de locataires ayant cessé d’acquitter leur loyer et qui se maintiennent dans un local malgré une décision de la justice. Il n’est pas très différent de l’amendement no 163, mais il lui manquait la notion de local à usage économique : c’est l’objet du sous-amendement déposé par M. le rapporteur, no 402.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir le sous-amendement no 402.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Nous allons y arriver ! (Sourires.) C’est normal : on travaille et on essaye d’ajuster la rédaction du dispositif pour qu’il fonctionne correctement.
    Je vous propose d’adopter l’amendement no 173, sous-amendé par le no 402, afin d’y faire figurer la notion de local à usage économique, mais d’en supprimer les termes « s’apparente à un vol ». En effet, comme l’a indiqué le garde des sceaux, s’il est important de bien qualifier et d’être clair au sujet du quantum de peines…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Oui !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    …– c’est bien le cas –, la formulation « s’apparente à un vol » semble fragile d’un point de vue juridique et constitutionnel. Pour clarifier le dispositif, nous proposons donc de la supprimer.
    Je vous propose également d’adopter le sous-amendement no 400 de M. Balanant, qui réintroduit le juge de l’exécution. C’est important, car cela signifie qu’un locataire ne devient passible d’une peine de six mois d’emprisonnement et 7 500 euros d’amende qu’après des mois et des mois de procédure, une fois son bail résilié par un juge, la procédure d’expulsion engagée, la trêve hivernale terminée – l’amendement no 173 le prévoit – et enfin si le juge d’exécution a refusé d’accorder un délai pour quitter les lieux.
    Pour en avoir discuté avec les uns et les autres, je pense que le dispositif est désormais satisfaisant, opérationnel, et répond complètement aux réserves d’ordre constitutionnel émises par le ministre sur le fait d’apparenter un squat à un vol – cela semblait difficile. Le quantum de peine est correctement cohérent, et nous avons pris toutes les précautions pour bien distinguer les différentes situations, afin qu’on ne nous reproche pas ensuite de mélanger les choux et les carottes.

    Mme Sandra Regol

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    Pourrait-on avoir le sous-amendement ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Pour récapituler, je propose d’adopter l’amendement no 173 de Mme Genevard, modulo l’adoption des sous-amendements nos 402 et 400.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Aurore Bergé, pour soutenir le sous-amendement identique no 403 rectifié.

    Mme Aurore Bergé

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    Je crois que nous avons abouti à un compromis à la fois robuste d’un point de vue juridique et efficace, car il préserve la notion de squat et vise à la fois les biens à usage d’habitation et les biens à usage économique. Cette clarification est importante, car on ne peut pas considérer que dans un cas, il y a un squatteur, dans l’autre, seulement un demi-squatteur.
    En outre, le sous-amendement de notre collègue Erwan Balanant permet de réaffirmer la place essentielle du juge d’exécution dans la procédure.
    Nous aboutissons à un bon compromis, un dispositif robuste qui préserve l’enjeu politique : mettre enfin, et définitivement, fin aux squats. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    M. Paul Midy

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    Voilà !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir le sous-amendement no 401.

    M. Thibault Bazin

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    J’ai évoqué en commission la question de l’usage partiel d’habitation, comme c’est par exemple le cas pour un professionnel de santé dont le cabinet se situe dans sa maison, ou pour un artisan qui utilise une partie de sa maison à des fins professionnelles, en dédiant une pièce de son logement ou son garage à son bureau.

    M. Erwan Balanant

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    C’est satisfait par le sous-amendement no 402 !

    M. Thibault Bazin

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    Ne viser que les locaux à usage d’habitation dans le dispositif pourrait ouvrir une fenêtre pour les squatteurs, si vous me permettez cette image. (Sourires.)
    Nos discussions montrent bien les deux dimensions juridiques du sujet. D’un côté, le code de la construction et de l’habitation est binaire : soit le local est à usage d’habitation, soit il ne l’est pas. De l’autre, le code de l’urbanisme prévoit cinq catégories de destination des locaux, elles-mêmes divisées en sous-catégories.
    Si l’usage d’habitation d’un local est clair, l’usage économique, lui, peut être temporaire et évoluer. Nous devons donc nous assurer, monsieur le rapporteur, que la rédaction du dispositif inclut l’usage mixte – même si cela n’est pas prévu par le code de la construction et de l’habitation –…

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    C’est le cas avec l’adoption du sous-amendement no 402.

    M. Thibault Bazin

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    …car les squatteurs sont astucieux et se glissent dans les failles. Si nous modifions l’arsenal juridique, faisons en sorte qu’il soit le plus complet possible pour éviter, demain, tout squat abusif.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Erwan Balanant, pour soutenir les sous-amendements nos 397 et 400.

    M. Erwan Balanant

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    Je vais retirer le sous-amendement no 397, qui est satisfait par les sous-amendements identiques nos 402 et 403 rectifié. En effet, il tendait à supprimer du texte la notion de vol, ce qui nous semblait important.
    En revanche, je maintiens le sous-amendement no 400, car il est important – et le rapporteur a d’ailleurs émis un avis favorable. Je pense qu’ainsi réécrit, le dispositif pourra être considéré, dans un premier temps, comme plus ou moins satisfaisant. Mais nous devrons continuer à y travailler.

    (Le sous-amendement no 397 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Monsieur Bazin, la distinction entre l’usage d’habitation et l’usage économique d’un local est bien couverte par le sous-amendement no 402. Si vous l’adoptez, le vôtre sera donc satisfait.
    Pour que les choses soient bien claires, je vous rappelle que je vous propose d’adopter les sous-amendements nos 402 et 400, puis l’amendement no 173 ainsi sous-amendé.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Sagesse sur les sous-amendements identiques nos 402 et 403 rectifié, sur le sous-amendement 400 et sur l’amendement no 173 ainsi sous-amendé. Je demande en revanche le retrait du sous-amendement no 401 de M. Bazin.
    Je souligne que le sous-amendement no 400 de M. Erwan Balanant permet d’éliminer tout risque de contournement des règles du code de la procédure civile d’exécution, ce qu’il fallait à tout prix éviter puisqu’elles permettent de protéger le locataire.
    J’ai donné tout à l’heure l’exemple d’une famille en cours d’expulsion qui, en considération de sa situation, aurait obtenu du juge des délais supplémentaires pour quitter les lieux : sans le sous-amendement, elle aurait été passible d’une peine de six mois d’emprisonnement. Le sous-amendement de M. Balanant évite donc une terrible injustice.

    M. Erwan Balanant

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    N’oubliez pas M. Mattei, qui est cosignataire !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Naturellement ! Je m’en veux de l’avoir oublié. (Sourires.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Vu ce à quoi nous venons d’assister, je pense que plusieurs prises de parole vont être nécessaires pour clarifier votre pensée.
    J’avais déjà assisté à quelques congrès dans ma vie, jamais à un congrès de multipropriétaires : je dois dire que ça donne la migraine !
    D’abord, M. le ministre demande au rapporteur de retirer l’article 1er A :…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    N’importe quoi ! Ce n’est pas vrai !

    M. Philippe Gosselin

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    Vous n’avez rien compris, monsieur Piquemal !

    M. François Piquemal

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    …celui-ci refuse.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Le ministre n’a jamais rien demandé de tel, au contraire !

    M. François Piquemal

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    Ensuite, les députés Renaissance votent avec le Rassemblement national, et contre l’avis du ministre, en faveur de l’adoption de l’article 1er A.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Mais non ! Ce n’est pas vrai du tout !

    M. François Piquemal

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    Puis, nouvelle partie du congrès des multipropriétaires, une élue Les Républicains souhaite rétablir l’article 3, pourtant supprimé en commission par les députés Renaissance, qui le jugeaient trop sévère. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Erwan Balanant

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    Cela s’appelle le travail parlementaire !

    M. François Piquemal

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    En effet, il prévoyait qu’un locataire était passible de six mois d’emprisonnement et 7 000 euros d’amende en cas d’impayés de loyers.
    Là, M. Dupond-Moretti, qui semble retrouver un semblant de « judiciosité », je dirais… enfin, qui semble retrouver ses esprits, nous explique que le squat ne peut pas être assimilé à un vol. Le rapporteur nous a pourtant maintenu le contraire pendant des heures, soulignant que ceux qui le niaient étaient complices des squatteurs. Je suis donc contraint de vous apprendre, monsieur le ministre, que selon M. Kasbarian, vous seriez complice des squatteurs ! (Exclamations sur les bancs du groupe RE.)
    Le rapporteur, justement, vous n’arrêtez pas de lui dire que sa proposition de loi n’est quand même pas terrible, et qu’il faut l’affiner : à force de l’affiner, il va finir fromager ! (Exclamations sur les bancs du groupe RE.) C’est un très beau métier, et je pense qu’il fera moins de mal aux fromages qu’aux locataires. (Rires et applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Finalement, et je n’aurais jamais cru dire cela un jour, nous en sommes à espérer qu’Élisabeth Borne arrive et déclenche le 49.3 (Rires sur les bancs du groupe RE) pour mettre fin à tout ce cinéma et que l’on puisse repartir sur des bases saines pour construire une loi de progrès social en matière de logement.

    M. Philippe Gosselin

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    Rassurez-vous, elle reviendra bien assez vite !

    Mme Sandra Regol

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    Je demande la parole, madame la présidente !

    Mme la présidente

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    Je vous rappelle que lors de la réunion de ce matin, l’ensemble des présidents de groupe se sont mis d’accord pour que les séances soient levées à minuit. Nous allons néanmoins terminer le débat sur cet amendement, et je vous invite donc à être très brefs dans vos prises de paroles.
    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je tiens à répondre à M. Piquemal : j’ai demandé le retrait des amendements déposés – et en aucun cas celui de l’article 1er A –…

    M. Philippe Gosselin

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    Mais oui ! Il n’a rien compris !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …en raison de plusieurs réserves d’ordre constitutionnel. Je les ai expliquées une première fois, puis une seconde, puisque vous m’avez accusé d’avoir fait un lapsus. J’ai donc expliqué les choses deux fois, et tout cela est naturellement consigné dans le compte rendu :…

    Mme Sarah Legrain

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    Ça va bien se passer, monsieur le ministre…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …votre manie de tronquer la vérité est exaspérante ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)
    Enfin, la « judiciosité »… mais quelle audacité, monsieur le député ! (Rires sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    Mme Sandra Regol

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    J’ai demandé la parole, madame la présidente !

    Mme la présidente

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    Je vous ai entendue, madame Regol, mais nous appliquons la règle un pour, un contre, et M. Piquemal s’est déjà exprimé.

    Mme Sandra Regol

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    M. Piquemal et moi n’appartenons pas au même groupe ! Je demande la parole !

    Mme la présidente

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    Le fait que vous ne fassiez pas partie du même groupe ne vous donne pas droit à la parole. (Exclamations sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    (Les sous-amendements identiques nos 402 et 403 rectifié sont adoptés.)

    (Le sous-amendement no 401 n’est pas adopté.)

    (Le sous-amendement no 400 est adopté.)

    (L’amendement no 173, sous-amendé, est adopté ; en conséquence, les amendements nos 65, 140 rectifié, 149, 143, 46, 165, 50, 107 et 66, ainsi que les sous-amendements dont ils font l’objet, tombent.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR et sur plusieurs bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    M. William Martinet

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    Je demande la parole pour un rappel au règlement, madame la présidente !

    2. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Discussion, en lecture définitive, du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023 ;
    Discussion de la proposition de résolution visant à exiger la fin de l’agression de l’Azerbaïdjan à l’encontre de l’Arménie et établir une paix durable dans le Caucase du Sud ;
    Discussion de la proposition de loi visant à améliorer l’encadrement des centres de santé ;
    Discussion de la proposition de résolution affirmant le soutien de l’Assemblée nationale à l’Ukraine et condamnant la guerre menée par la Fédération de Russie ;
    Discussion de la proposition de résolution appelant à un accord ambitieux lors de la quinzième conférence des parties à la convention sur la diversité biologique ;
    Suite de la discussion de la proposition de loi visant à protéger les logements contre l’occupation illicite.

    Mme Mathilde Panot

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    Nous avions demandé la parole pour un rappel au règlement, madame la présidente ! Ce n’est pas correct !

    Mme la présidente

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    La séance est levée. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    (La séance est levée, le mercredi 30 novembre 2022, à zéro heure cinq.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra