XVIe législature
Session extraordinaire de 2021-2022
Séance du vendredi 22 juillet 2022
- Présidence de Mme Valérie Rabault
- 1. Projet de loi de finances rectificative pour 2022
- Première partie (suite)
- Avant l’article 1er (suite)
- Amendements nos 360, 475, 503, 530, 636, 726, 914 et 948
- Sous-amendements nos 1056, 1057, 1059 et 983
- M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
- M. Mathieu Lefèvre, suppléant M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- Amendements nos 508, 17, 301 et 168
- M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- Amendements nos 596, 781 et 378, 650, 20, 288
- M. Éric Coquerel, président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire
- Suspension et reprise de la séance
- Suspension et reprise de la séance
- Rappel au règlement
- Suspension et reprise de la séance
- Avant l’article 1er (suite)
- Avant l’article 1er (suite)
- Première partie (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
2e séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de finances rectificative pour 2022 (nos 17 et 147).
Cet après-midi, l’Assemblée a commencé la discussion des articles de la première partie du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 360 portant article additionnel avant l’article 1er.
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 360, 475, 503, 530, 636, 726, 914 et 948, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 360, 475, 503 et 530, ainsi que les amendements nos 636, 726, 914 et 948 sont identiques. Ces derniers font l’objet de quatre sous-amendements, nos 1056, 1057, 1059 et 983.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 360. Cet amendement du groupe Les Républicains ouvre la possibilité aux salariés de convertir leurs jours de RTT non pris en salaire. C’est une bonne idée ! Je rappelle que les RTT ont pris naissance au moment du passage à la semaine de 35 heures. Il s’agit de journées de repos accordées aux salariés quand la durée de travail effectif est supérieure au seuil légal. Ceux-ci peuvent choisir de les prendre isolément ou bien de les regrouper. Actuellement, les entreprises sont confrontées à des difficultés pour recruter, pour passer des marchés et répondre à la demande et les salariés doivent bien souvent renoncer à leurs jours de RTT pour soutenir l’activité. Nous proposons qu’ils soient compensés en espèces sonnantes et trébuchantes, à l’instar de ce qui est pratiqué pour les salariés ayant accumulé un nombre important de jours de RTT au moment de leur départ à la retraite.
Il s’agit d’une vraie mesure de pouvoir d’achat, qui a d’ailleurs été quelquefois demandée par les salariés à leurs employeurs car ils préféraient voir augmenter leur rémunération. La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l’amendement no 475. La conversion des jours de RTT en salaire a pour but d’aider les entreprises confrontées à des difficultés de recrutement à maintenir un niveau d’activité important. Cet amendement a également pour objectif de mieux récompenser le travail et le mérite et d’augmenter le salaire net des Français. L’amendement no 503 de Mme Isabelle Valentin est défendu.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l’amendement no 530. Ces amendements identiques tendent à faire deux gagnants : les entreprises et les salariés. Les entreprises, face aux difficultés de recrutement, ont besoin que leurs salariés soient plus présents sur leur lieu de travail, soit qu’ils fassent des heures supplémentaires – je vous renvoie à notre précédent débat –, soit qu’ils renoncent à leurs jours de RTT, ce qui est un droit. Les salariés, quant à eux, ont un besoin immédiat de pouvoir d’achat.
La conversion en salaire net de jours de RTT non pris est une mesure qui a l’avantage d’être efficace tout de suite, de ne rien coûter à l’État et de ne faire, je le répète, que des gagnants, les entreprises et les salariés. Les Républicains l’ont défendue lors des campagnes électorales et la défendent avec force et vigueur aujourd’hui devant vous. (M. Olivier Marleix applaudit.) Sur les amendements identiques nos 636 et suivants, je suis saisie par les groupes Renaissance, La France insoumise-NUPES et Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Nous en venons à la deuxième série d’amendements identiques. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 636. Cet amendement des députés du groupe Les Républicains est un amendement de repli par rapport aux amendements identiques précédents : la possibilité de convertir des RTT en salaire serait limitée à la période allant du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023. La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 726. Je vais montrer l’exemple et me contenter de dire : « Défendu » ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes HOR, RE et Dem et sur quelques bancs du groupe RN.) La parole est à M. Marc Ferracci, pour soutenir l’amendement no 914. Le salarié sera libre de procéder ou non à la monétisation des jours de RTT et il devra solliciter une autorisation de son employeur, précision importante car il ne faudrait pas que ce mécanisme déstabilise les petites et moyennes entreprises, susceptibles d’être confrontées à des problèmes de trésorerie, dans l’hypothèse où de nombreux salariés demanderaient une telle conversion en même temps.
En outre, si le dispositif est limité dans le temps, c’est qu’il existe un projet encore plus ambitieux, défendu par la majorité présidentielle et le Président de la République, autour du compte épargne-temps universel. Celui-ci a vocation à prolonger le dispositif du compte épargne-temps (CET) en le rendant accessible à l’ensemble des salariés. Il leur permettra d’utiliser les jours de RTT non pris soit pour les poser plus tard, soit pour les monétiser. Nous avons donc choisi cette limitation du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023 dans l’attente de la concertation qui va s’engager avec les partenaires sociaux sur ce nouveau compte épargne-temps. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.) L’amendement no 948 de M. Mohamed Laqhila est défendu.
Nous en venons aux sous-amendements aux amendements identiques nos 636 et suivants.
La parole est à M. Arthur Delaporte, pour soutenir les sous-amendements nos 1056, 1057 et 1059, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée. Je vous avoue que ce n’est pas de gaieté de cœur que nous avons déposé ces sous-amendements. Le sous-amendement du Gouvernement à l’amendement no 636 laisse entrevoir que le Gouvernement et la majorité présidentielle soutiennent les principes défendus par le groupe Les Républicains qui reviennent à casser tout ce qui permet aux travailleurs effectuant des heures supplémentaires de bénéficier d’une protection, notamment d’un droit au repos. N’oublions pas que c’est sur la base du volontariat ! Oui, mais la crise de la covid-19 a déjà permis d’expérimenter un dispositif de ce type et vous voulez saisir l’occasion d’une deuxième crise, celle du pouvoir d’achat, pour opérer un effet cliquet qui conduirait à moyen terme à une disparition pure et simple de toute protection des 35 heures.
En outre, plusieurs garanties sont absentes et nous voulons les réintroduire par nos sous-amendements : le no 1056 conditionne la possibilité de transformer des RTT en salaire au fait qu’une négociation collective avec les organisations syndicales l’ait autorisée, à travers une convention ou un accord de branche, d’établissement ou d’entreprise. Il faut éviter que la mesure ne soit totalement discrétionnaire. Ce que vous proposez est, je le répète, une casse pure et simple des règles régissant le temps de travail.
Le sous-amendement no 1057 pose une autre garantie : il limite chaque année à cinq, soit dix demi-journées, les jours de RTT susceptibles d’être transformés en salaire.
Quant au sous-amendement no 1059, il tend à supprimer la disposition qui nous apparaît la plus dangereuse : « Les heures correspondantes ne s’imputent pas sur le contingent légal ou conventionnel d’heures supplémentaires prévu à l’article L. 3121-30 du même code. ». Cela permettrait de ne pas comptabiliser dans le contingent légal ou conventionnel les heures supplémentaires lorsque les jours de RTT qui en résultent ont été monétisés. Le diable se cache dans les détails et il faut être attentif car, par ces amendements, vous remettez totalement en cause les 35 heures. Madame la présidente, le temps de parole ! En effet, en monétisant tous les jours de RTT correspondant à des heures supplémentaires effectuées au-delà des 35 heures hebdomadaires, et en dessous des 39 heures ou des 40 heures, un salarié pourrait en droit ne jamais se retrouver au-delà des 40 heures alors même que son temps de travail a dépassé ce seuil. Cette phrase signifie la fin pure et simple des 35 heures. J’invite vraiment notre assemblée à voter nos sous-amendements, sinon ce sera open bar !
J’espère que nous serons une majorité à essayer de défendre le droit au repos, droit majeur des individus, et les principes fondamentaux du droit du travail en France. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NUPES, GDR et Écolo-NUPES.) La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, pour soutenir le sous-amendement no 983. Par souci de parallélisme, nous souhaitons aligner le régime fiscal des rémunérations issues du rachat des RTT sur celui des heures supplémentaires, à savoir une défiscalisation dans la limite de 7 500 euros, disposition que nous venons d’adopter. La parole est à M. Mathieu Lefèvre, suppléant M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune et ces sous-amendements. Précisons que la commission n’a pas examiné ces sous-amendements. Je souhaite remercier M. Thibaut Bazin pour la disposition contenue dans l’amendement no 636 qu’il avait déjà présentée dans le cadre du projet de loi consacré au pouvoir d’achat. Merci aussi à Mme Louwagie et à M. Dumont pour leurs interventions.
Ces amendements nos 636 et identiques sont opportuns. Étendre la possibilité de monétiser les jours de RTT aux salariés qui ne sont pas au forfait jours ou qui ne disposent pas d’un CET, est une mesure de bon sens. De plus, elle est cohérente avec ce qu’ont proposé le ministre et cette majorité en matière de régime fiscal des heures supplémentaires que notre assemblée vient d’adopter puisque les journées de RTT travaillées seront elles aussi défiscalisées dans la limite de 7 500 euros. En outre, la limitation dans le temps nous paraît raisonnable : nous pourrons évaluer les effets de cette mesure après le 31 décembre 2023. Enfin, elle est aussi cohérente avec tout ce nous faisons pour redonner de l’importance à la valeur travail.
S’agissant des sous-amendements de M. Delaporte, l’avis est défavorable. Il ne nous paraît pas opportun de conditionner cette possibilité de monétiser les RTT alors que nous venons à peine de l’ouvrir. Nous proposons qu’elle s’applique à des secteurs comme l’hôtellerie et la restauration qui subissent une très forte concurrence et de grandes tensions et qui bénéficient de très importants contingents conventionnels d’heures supplémentaires.
L’avis est donc favorable aux amendements identiques nos 636 et suivants et au sous-amendement no 983 et défavorable aux sous-amendements nos 1056, 1057 et 1059. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Je suis saisie de plusieurs demandes de parole et vais donner la parole à un orateur par groupe, si cela vous convient. Non, nous avions dit un pour, un contre ! Un pour, un contre pour chaque amendement ? (« Oui ! » sur divers bancs.) Si nous appliquons ce principe à la lettre, cela va avoir pour effet de multiplier les prises de parole. Or, compte tenu du nombre d’amendements… Elle a raison ! La parole est à M. Antoine Léaument. Vous voulez, avec ces amendements, aligner le régime fiscal du rachat de RTT sur celui des heures supplémentaires, en l’exonérant de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu. Vous affirmez que cela permettra d’augmenter le salaire net. Sur le principe, c’est bien. Mais, en réalité, les cotisations et l’impôt participent du salaire socialisé : ils financent la sécurité sociale, l’école publique ou encore l’hôpital public. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Eva Sas applaudit également.) Bref, c’est du pouvoir d’achat.
Vous nous faites en quelque sorte le coup du portefeuille : vous prenez discrètement son portefeuille à votre voisin pour le lui redonner ensuite en expliquant qu’il s’agit d’un cadeau. C’est bien ce que vous faites avec les citoyens. En vérité, depuis 2019 et la non-compensation de l’exonération des cotisations sociales sur les heures supplémentaires, vous appauvrissez volontairement la sécurité sociale. Vous êtes en train de tuer la sécurité sociale ; vous commettez un crime de sécucide ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES. – Sourires sur quelques bancs des groupes RE et RN.) La parole est à M. Jean-Marc Tellier. Dans la lignée des amendements relatifs aux heures supplémentaires, vous trouvez un énième moyen de contourner la hausse des salaires. Nous voici désormais face à la panoplie presque complète : après les RTT, les heures supplémentaires et les primes, il ne vous reste plus qu’à désocialiser et défiscaliser les salaires eux-mêmes !
Selon nous, chaque heure travaillée doit être socialisée et fiscalisée pour ouvrir des droits. Une nouvelle fois, cette mesure vise à accroître le temps de travail en France. Rien de très novateur, en somme : « Travailler plus pour gagner plus. » C’est bien cela. J’appelle en revanche votre attention sur une entourloupe : un salarié qui effectue actuellement plus d’heures que la durée légale du travail et souhaite être payé est rémunéré en heures supplémentaires, majorées au taux normal de 25 % – cela peut parfois être un peu moins –, alors que les RTT, au contraire, ne sont majorées qu’au taux de 10 %. En d’autres termes, l’employeur pourra proposer au salarié qui travaillera plus de 35 heures et voudra être payé, des RTT monétisables et majorées à 10 % plutôt que des heures supplémentaires majorées à 25 %. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES.) La parole est à M. Laurent Jacobelli. Vous connaissez désormais la ligne de conduite du groupe Rassemblement national : lorsqu’une proposition est bonne, d’où qu’elle vienne, nous la votons. Il faut parfois savoir renoncer aux œillères idéologiques : je constate que, sur les sujets du travail et de la rémunération, sur les bancs de la majorité, on nous explique que la hausse des salaires est une hypothèse impensable,… Vous l’avez refusée ! …même lorsque Marine Le Pen propose d’augmenter de 10 % les salaires en les exonérant de charges patronales –, et que, chez les députés de la gauche, les poils se hérissent à l’idée que des Français puissent vouloir travailler plus pour gagner plus ! Pour eux, c’est « travailler moins pour gagner plus » ! Mais c’est malheureusement une équation impossible. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN. – Protestations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) Nous avons, avec ces amendements, l’occasion de dire oui à la valeur travail, oui au pouvoir d’achat, oui à l’aide aux petites entreprises qui, face à un carnet de commandes en surchauffe, pourront trouver un regain de main-d’œuvre. C’est pourquoi, sans hésitation, le groupe Rassemblement national les votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à Mme Christine Pires Beaune. Nous sommes en train de tordre le code du travail sans disposer d’aucune étude d’impact : j’ai l’impression que vous vous en fichez royalement. Mesurez-vous vraiment ce que représentent les RTT ? Ce sont des jours de récupération prévus pour ceux qui travaillent au-delà du temps légal : par exemple, les ouvriers d’une aciérie qui effectuent 40 heures par semaine et qui, à ce titre, bénéficient de récupérations. C’est comme si vous leur disiez qu’ils n’ont finalement pas besoin de ce repos et qu’on peut le leur échanger contre de l’argent ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC, LFI-NUPES, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) Le pire, c’est que votre dispositif n’est même pas conditionné : il est certes limité dans le temps, mais il devient possible de dire à un salarié que toutes ses RTT seront monnayées. C’est irresponsable ! Acceptez au moins le sous-amendement visant à les limiter à cinq jours par an. La parole est à M. Nicolas Turquois. J’aimerais qu’on arrête de présenter une vision caricaturale du travail. (Protestations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) Je vous assure que la caricature blesse. (Mêmes mouvements.) Soit. Faisons de la caricature : compte tenu des effectifs de la NUPES présents dans l’hémicycle ce soir, j’en déduis que vous n’êtes pas favorables aux heures supplémentaires ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR. – Protestations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) C’est honteux ! Je prendrai un exemple personnel : ceux qui étaient déjà députés lors de la précédente législature savent que je suis agriculteur. Dans ce secteur, la durée du travail est très différente en période estivale ou en période hivernale : qu’il s’agisse des récupérations de RTT ou des heures supplémentaires, mes salariés savent que les mois d’été sont très bien rémunérés parce qu’il y a énormément de travail – et ils sont d’ailleurs demandeurs.
Vous ne confiez pas une moissonneuse-batteuse ou un tracteur à un salarié que vous embaucheriez spécialement pour cette période car leur maniement nécessite une formation et engage une responsabilité. Ce surcroît de travail correspond à la fois à un vrai besoin de l’entreprise et à un souhait du salarié qui l’accepte sur la base du volontariat. Donnons donc un peu de souplesse au système. En tant que députés, il nous appartient de corriger les excès – ils existent, je l’admets parfaitement –, mais cessons de présenter une vision caricaturale du travail selon laquelle il se traduirait forcément par une domination de l’employeur sur l’employé. Les relations entre les deux peuvent aussi être équilibrées. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem, RE et HOR et sur quelques bancs des groupes RN et LR.) La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian. J’entends dire dans cet hémicycle que les salariés auraient le choix : ce pourrait être le cas si les salaires étaient décents, s’ils permettaient de vivre dignement, si les contrats précaires ou à temps partiel n’étaient pas si nombreux. Mais, en réalité, le choix n’existe pas : pour vivre avec les salaires actuels, on est obligé de faire des heures supplémentaires ; on y est obligé pour boucler les fins de mois ! Notre proposition de partager le travail et d’augmenter les salaires est donc cohérente. (M. Benjamin Lucas applaudit.) C’est ainsi que nous lutterons contre le chômage.
J’entends dire également que le travail n’est pas toujours fondé sur la domination. Toutefois, juridiquement, il s’agit bien d’un lien de subordination. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.) Certains salariés, qui subissent une forme de pression, se sentent obligés d’accéder à la requête de leur patron lorsqu’il leur demande de travailler un peu plus, à telle heure ou à tel moment. On le voit, on le sait. Mais non ! Qu’est-ce que vous en savez ? Ce n’est peut-être pas le cas de tout le monde, mais pour de nombreux postes de travail pénibles, notamment en cas de travail posté, il faut savoir entendre ce que nous vous disons. La solution réside bien dans l’augmentation des salaires. Nous nous échinons à vous le dire, mais vous refusez de l’entendre : c’est fort dommage. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.) (Les amendements identiques nos 360, 475, 503 et 530 ne sont pas adoptés.) (Les sous-amendements nos 1056, 1057 et 1059, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) (Le sous-amendement no 983 est adopté.) Je mets aux voix les amendements identiques nos 636, 726, 914 et 948. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 211
Nombre de suffrages exprimés 209
Majorité absolue 105
Pour l’adoption 154
Contre 55 (Les amendements identiques nos 636, 726, 914 et 948, sous-amendés, sont adoptés.) (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, RN, LR, Dem et HOR.) Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 508, 17, 301, 168, 596, 781, 378, 650, 20 et 288, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 17 et 301 sont identiques. Il en est de même des amendements nos 378 et 650.
L’amendement no 508 de M. Pierre-Henri Dumont est défendu.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 17. Sur 80 % du territoire national, 70 % des salariés utilisent leur véhicule pour se rendre à leur travail. L’augmentation des prix du carburant, accentuée par l’explosion de la fiscalité qui lui est rattachée, est profondément injuste car elle grève mécaniquement le pouvoir d’achat de ceux qui travaillent.
Plus injuste encore : les plus pénalisés sont ceux qui perçoivent des bas salaires, comme les aides à domicile. Pour sortir de la logique qui conduit nos concitoyens à devoir calculer s’ils ont intérêt à travailler ou non, il convient d’accompagner les plus modestes de façon plus importante, tout comme nous accompagnerons les autres avec des amendements que nous examinerons ultérieurement.
Alors que les salariés imposables bénéficient d’une déduction d’impôt pour les déplacements effectués entre leur domicile et leur lieu de travail, ce n’est pas le cas de ceux qui, du fait de leurs faibles revenus, ne sont pas imposables. Cet amendement vise donc à instaurer un crédit d’impôt pour les travailleurs qui utilisent leur véhicule mais ne sont pas imposables. Il s’agit d’une mesure de justice et de pouvoir d’achat en faveur des plus fragiles. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) L’amendement identique no 301 de Mme Véronique Louwagie est défendu.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l’amendement no 168 de la commission. Je laisse M. de Courson le présenter. La parole est à M. Charles de Courson. Nos collègues ont déjà expliqué la situation. Le régime fiscal permet de déduire de l’impôt sur le revenu soit un abattement forfaitaire de 10 %, soit le montant des frais réels. Par conséquent, lorsque les frais de déplacements sont importants, il est possible de les déduire. C’est normal et c’est très bien. Cependant, seuls ceux qui sont imposables en bénéficient. Je rappelle que 38 % des foyers seulement le sont. Or 70 % des salariés se rendent à leur travail en voiture.
Il s’agit donc d’instaurer un crédit d’impôt à destination de ceux qui ne bénéficient pas de la déduction des frais réels. Telle est l’idée de cet amendement qui a séduit la commission des finances, mais hélas pas le rapporteur général dans un premier temps. Espérons qu’il changera d’avis : il est peut-être en voie de conversion puisqu’il m’a demandé de l’exposer. Vous pouvez également soutenir l’amendement nos 596. L’amendement no 596 a le même objectif, mais propose de limiter la mesure au 31 décembre 2023, en espérant que le prix du carburant soit redescendu à cette date. Nous verrons alors, à l’occasion de l’examen du budget pour 2024, s’il convient d’ajuster le dispositif, de le maintenir ou de le supprimer. Il s’agit d’un amendement de justice entre tous les Français, comme l’a dit Mme Bonnivard, afin que ceux qui ne sont pas imposables bénéficient du même dispositif que ceux qui le sont. La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy, pour soutenir l’amendement no 781. Cet amendement vise à soutenir le travail de la commission des finances : comme nous l’avions promis, nous sommes prêts à appuyer les propositions de nos collègues, dès lors qu’elles sont bien conçues. En l’occurrence, cette proposition très consensuelle et très juste, qui reconnaît la valeur travail tout en participant à la solidarité nationale, mérite une approbation unanime. Il s’agit d’une belle mesure de justice fiscale pour les Français qui peinent à assumer le coût des déplacements jusqu’à leur lieu de travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Les amendements identiques nos 378 de Mme Véronique Louwagie et 650 de M. Charles de Courson sont défendus. Il en est de même des amendements nos 20 et 288 des mêmes auteurs.
Quel est l’avis de la commission ? Vous proposez par ces amendements une rupture importante avec le modèle fiscal existant, en ayant recours, je crois, à un outil inadapté. La déduction des frais, qu’elle se fasse au forfait ou au réel, est une modalité fondamentale de l’établissement du revenu imposable. Cette logique garantit le traitement équitable des contribuables, quels que soient leurs revenus. Vous proposez de la transformer en niche fiscale, ce qui est radicalement différent. (Mme Émilie Bonnivard et M. Olivier Marleix protestent.) C’est la réalité.
Les conséquences budgétaires d’une telle mesure seraient disproportionnées. L’État se trouverait contraint de rembourser à l’euro près les frais kilométriques de millions de contribuables. Le coût de la mesure serait hors de contrôle, et l’avantage pour les contribuables les plus imposés ne serait pas maîtrisé. Le choix des contribuables se porterait massivement sur le système des frais réels, en délaissant la déduction forfaitaire de 10 %.
De plus, un tel crédit d’impôt entraînerait des effets de bord très complexes. La déduction des frais réels du revenu imposable donne actuellement lieu à quelques centimes de réduction, alors que votre proposition permettrait le remboursement de l’intégralité du barème kilométrique, entraînant ainsi une rupture flagrante d’égalité devant l’impôt. Je pense d’ailleurs que le Conseil constitutionnel refuserait une telle mesure.
De plus, autre effet pervers possible, le revenu imposable gagnerait en importance. Cela influerait sur le calcul des prestations sociales comme le RSA, ce qui pourrait y rendre inéligibles certains contribuables. Votre proposition entraînerait en réalité d’innombrables effets, dont les premiers seraient un coût colossal pour l’État et la bascule de millions de contribuables vers un remboursement quasi-intégral de leurs frais kilométriques. Cette mesure est incompatible avec l’esprit du texte. J’émets donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je partage l’argumentaire de M. le rapporteur général. Je salue la générosité des parlementaires auteurs de ces amendements, mais cette mesure nous ferait passer d’un système juste et proportionné – la déduction des frais réels – à un système complètement disproportionné et, au bout du compte, injuste. Actuellement, les dépenses kilométriques déclarées sont déduites du revenu imposable et permettent au contribuable d’économiser des sommes raisonnables, qui se chiffrent en euros plutôt qu’en centaines ou en milliers d’euros. Avec votre proposition, chaque euro dépensé dans le cadre d’un déplacement donnerait lieu à un crédit d’impôt, ce qui produirait des sommes considérables. Cela entraînerait une rupture d’égalité entre les personnes qui se déplacent et celles qui ne se déplacent pas, entre celles qui pourraient avoir recours à ce dispositif et celles qui ne le pourraient pas.
D’après notre chiffrage, cette mesure coûterait à l’État plus de 25 milliards d’euros. (M. Olivier Marleix s’exclame.) Elle ferait exploser la banque ! Elle est en complète rupture avec la logique que nous avons adoptée lors de l’examen de ce texte, qui consiste à trouver un équilibre satisfaisant entre le soutien aux Français face à l’inflation et le respect des finances publiques. Elle ne respecte ni les finances publiques, ni l’égalité devant l’impôt. Je recommande vivement de retirer ces amendements, faute de quoi mon avis sera défavorable. Très bien ! À partir de maintenant, nous appliquerons la règle du « un pour, un contre » : deux interventions, une favorable et une défavorable, par discussion commune.
La parole est à Mme Véronique Louwagie. Monsieur le rapporteur général, je souhaite rectifier vos propos. Vous évoquez une « niche fiscale », mais nous parlons des salariés non imposables, incapables donc d’avoir recours à la déduction des frais réels. L’emploi de ce terme me semble gênant. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN. –M. Nicolas Dupont-Aignan et M. Stéphane Peu applaudissent également.) Par ailleurs, vous dites craindre les « innombrables effets » de cette mesure « hors de contrôle ». Vous évoquez des problèmes techniques ; je refuse de croire que l’administration est incapable d’y faire face. Il me semble que la vraie question, à laquelle vous n’avez pas répondu, est la suivante : ce dispositif est-il intéressant ou non ? S’il l’est, il s’agit de faire en sorte de l’appliquer. Bien sûr ! Il suffit de mettre des plafonds. Monsieur le ministre, vous affirmez que le mécanisme actuel est juste. Laissez-moi d’abord vous rappeler qu’il a évolué : si le dispositif des frais réels s’applique, c’est justement parce que la déduction forfaitaire de 10 % n’était pas adaptée à toutes les situations et n’était donc pas juste. Par ailleurs, je ne souscris pas à votre vision, car le dispositif actuel ne profite qu’aux salariés imposables. Voilà… c’est évident ! Il ne profite pas aux salariés non imposables. C’est là qu’est la réelle rupture d’égalité : entre les salariés imposables et les salariés non imposables. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RN et LIOT. – M. Nicolas Dupont-Aignan et M. Stéphane Peu applaudissent également.) Je concède qu’il faut peut-être retravailler le mécanisme que nous proposons, qu’on peut le trouver trop ouvert. Plusieurs options sont possibles : nous pourrions le plafonner, réfléchir sur le taux. En tout état de cause, bien que la majorité ne soit visiblement pas prête à accepter un dispositif de cette nature, il importe de se pencher sur la situation difficile dans laquelle se trouvent ces nombreux salariés non imposables. Ils méritent de se voir proposer une solution, plutôt que de la voir rejeter au prétexte qu’il s’agirait d’une « niche fiscale ». (Mme Émilie Bonnivard et M. Olivier Marleix applaudissent.) La parole est à M. Mathieu Lefèvre. Ces amendements traduisent une intention louable, que nous partageons. En revanche, le mécanisme fiscal proposé est particulièrement complexe : vous augmenterez le revenu imposable des personnes qui se rendent sur leur lieu de travail et créerez une dépense fiscale supplémentaire – car, comme l’a rappelé M. le rapporteur général, il s’agit bien d’une niche fiscale, qu’on le veuille ou non. Cela créerait de nombreux effets non maîtrisés : l’augmentation du revenu fiscal de référence des salariés en question pourrait notamment leur interdire l’accès à certains mécanismes sociaux.
L’instabilité fiscale est un mal dont la France souffre de longue date. Le dispositif de déduction des frais professionnels fonctionne très bien ; il a fait ses preuves, et vous souhaitez pourtant le remplacer par un mécanisme de crédit d’impôt dont nous ne maîtriserions ni les effets de bord, ni surtout le coût.
Je vous propose plutôt d’engager une réflexion collective en prévision du projet de loi de finances (PLF) pour 2023, qui pourrait inclure l’amélioration du dispositif de déduction des frais professionnels. Outre l’argument juridique de la distorsion fondamentale que créerait un tel dispositif entre les deux options que sont la déduction au réel et celle au forfait, ce sujet se prête tout à fait à une discussion dans le cadre du PLF. Nous pouvons en débattre tous ensemble et trouver un accord. En tout cas, il n’est pas pertinent d’introduire par voie d’amendement un dispositif aux effets de bord si importants et si mal maîtrisés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Excellent ! La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Sur le principe, chacun en conviendra, ces amendements cherchent à résoudre une inégalité. Il est anormal que les salariés non assujettis à l’impôt sur le revenu, qui, par définition, gagnent donc moins que les salariés qui y sont assujettis, ne bénéficient pas des mêmes avantages qu’eux en matière de frais réels. Je suis d’accord avec Mme Louwagie : il est paradoxal de parler de « niche fiscale » lorsqu’il s’agit de salariés non imposables, dont il est évident qu’ils ne constituent pas une catégorie favorisée. Si même M. Coquerel est d’accord avec moi… Je suis souvent d’accord avec vous ! En tout cas, quand je suis d’accord, je le dis. (Sourires.) Il faut savoir reconnaître les convergences d’idées, même avec les personnes d’un autre bord politique.
Par ailleurs, M. le ministre, j’aimerais que vous nous expliquiez par quel calcul vous êtes parvenu à la somme de 25 milliards d’euros. Effectivement ! On nous annonce des chiffres mal étayés : par exemple, je conteste le chiffrage du « paquet pouvoir d’achat » à 20 milliards d’euros, et je l’estime plus proche de 35 milliards. J’aimerais que le Gouvernement établisse plus clairement son chiffrage. Par ailleurs, il me semble que l’amendement en question vise non pas à faire rembourser au réel les frais kilométriques, mais à établir des barèmes, qui peuvent tout à fait tenir compte des critères existants. Ces barèmes seraient définis par l’exécutif, par voie de décret. Monsieur de Courson, je me fais votre porte-parole ; ai-je bien compris votre amendement ? (M. Charles de Courson acquiesce.) Ce mécanisme cherche à rétablir l’égalité. De surcroît, il est limité dans le temps : il doit durer jusqu’en décembre 2023, pour faire face à l’explosion du prix du carburant. Pour toutes ces raisons, je suis enclin à le voter, comme je l’ai fait en commission des finances. La séance est suspendue. (La séance, suspendue à vingt-deux heures dix, est reprise à vingt-deux heures quinze.) La séance est reprise.
Je suis à nouveau saisie d’une suspension de séance. La séance est suspendue. (La séance, suspendue à vingt-deux heures quinze, est reprise à vingt-deux heures vingt.) La séance est reprise.
La parole est à M. le ministre. Pardon de reprendre la parole, mais je ne voudrais pas qu’un vendredi soir, à vingt-deux heures trente, le projet de loi de finances rectificative déraille : or ces amendements présentent ce risque. Que chacun prenne ses responsabilités, mais que chacun veille aussi à rester cohérent. À tous ceux qui assènent, depuis le début de l’examen du texte, qu’il faut préserver les ressources de l’État, qu’il faut instaurer de nouvelles taxes et de nouveaux impôts pour financer les services publics, les hôpitaux, les collèges et les universités, j’adresse un message clair : vous ne pouvez pas voter un amendement qui prive l’État d’un tiers de ses recettes d’impôt sur le revenu. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) À tous ceux qui disent, depuis le début de l’examen du texte, qu’il faut rétablir les finances publiques, qu’il ne faut pas endetter l’État ni creuser les déficits, et qu’il faut réduire impérativement les dépenses publiques, je réponds : vous ne pouvez pas, en cohérence, proposer plus de 20 milliards d’euros de dépense publique supplémentaires. La dette a augmenté de 600 milliards d’euros ! À tous ceux qui affirment qu’il ne faut pas subventionner les énergies fossiles ni les carburants fossiles, je dis : en cohérence, vous ne pouvez pas voter un amendement qui siphonne le tiers des recettes de l’impôt sur le revenu pour subventionner lesdites énergies. Un peu de cohérence ! Je vous demande de ne pas voter ces amendements. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La parole est à Mme Émilie Bonnivard. Je retire l’amendement no 17, mais avec regret, monsieur le ministre (Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI-NUPES) , car votre réponse n’est pas à la hauteur de mes attentes. C’est le parti des regrets ! Vous nous aviez assuré que notre mesure coûtait 50 milliards d’euros, mais nous apprenons aujourd’hui qu’elle n’en coûte que 10. Charles de Courson et moi-même voulions surtout obtenir, de votre part, l’engagement que nous pourrions travailler sur une mesure encadrée d’ici au projet de loi de finances. Vous nous accusez d’être irresponsables, mais c’est tout le contraire : nous voulons agir en faveur de la justice fiscale et défendre les travailleurs les plus modestes dans une période d’inflation. Allez, retirez-le ! Je retire mon amendement, mais j’aurais aimé que vous teniez un discours plus apaisant et plus ouvert, dans la perspective du projet de loi de finances. (Les amendements identiques nos 17 et 301 sont retirés.) (L’amendement no 508 est retiré.) Qu’en est-il de l’amendement no 168 de la commission des finances ? Il a été approuvé par la commission, même si j’ai exprimé un avis défavorable à titre personnel. Je ne peux pas le retirer. (L’amendement no 168 n’est pas adopté.) La parole est à M. Charles de Courson. Je regrette vivement l’attitude de fermeture totale affichée par M. le ministre. Nos amendements ne coûtent absolument pas les sommes qu’il allègue, pour une raison simple : le montant des remboursements serait déterminé par un arrêté du ministre des finances. Il pourrait donc être fixé à 5, 10 ou 15 milliards d’euros. À ceux qui affirment que notre proposition coûterait 25 milliards d’euros, je réponds : vous n’avez pas lu nos amendements. Je retire le mien, mais je le redéposerai pour poser de nouveau cette question de fond. Nous pourrions y travailler avec nos collègues sénateurs. (Mme Émilie Bonnivard et M. Olivier Marleix applaudissent.) (L’amendement no 596 est retiré.) La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy. Je maintiens, pour ma part, l’amendement no 781. Je confesse l’avoir déposé parce que je savais ce qui se passerait ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur divers bancs.) L’amendement de Charles de Courson était très raisonnable. Le Parlement pourrait parfaitement discuter du montant en jeu et du budget afférent. C’est proprement ahurissant : vous refusez de discuter de ce montant, monsieur le ministre, parce que vous refusez d’accorder aux travailleurs modestes et aux classes moyennes inférieures un avantage que vous accordez aux riches. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit également.) (L’amendement no 781 n’est pas adopté.) (Les amendements identiques nos 378 et 650 sont retirés.) (Les amendements nos 20 et 288 sont retirés.) La parole est à M. Jean-Marc Zulesi, pour soutenir l’amendement no 803. Il vise à permettre le cumul des indemnités kilométriques avec celles du covoiturage, afin de promouvoir ce dernier. Surtout dans le contexte actuel, le covoiturage me semble constituer une pratique vertueuse. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Quel est l’avis de la commission ? Je connais votre expertise en la matière, mais votre amendement me paraît satisfait. Un conducteur qui pratique le covoiturage a déjà droit à une déduction, et un passager peut également déduire ses frais dans la limite de sa quote-part. Seulement s’il est imposable ! Peut-être M. le ministre a-t-il des explications complémentaires. Quel est l’avis du Gouvernement ? Mon avis est favorable, car cet amendement lève une ambiguïté du régime fiscal du covoiturage. Il s’agit bien ici d’une déduction du montant imposable, et non d’un crédit d’impôt. Évidemment, on pourrait aussi imaginer des crédits d’impôt sur les factures de téléphone, les déplacements, les trajets en avion ou que sais-je – et en définitive, c’est l’État qui paierait entièrement la vie des Français ! Telle n’est pas exactement notre conception de la dépense publique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) (L’amendement no 803 est adopté.) L’amendement no 576 de Mme Cécile Untermaier est défendu.
Quel est l’avis de la commission ? Nous aurons une discussion sur les revalorisations automatiques dans le cadre du projet de loi de finances. Avis défavorable. (L’amendement no 576, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) L’amendement no 394 de Mme Véronique Louwagie est défendu. (L’amendement no 394, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) Je suis saisie de trois amendements, nos 665, 705 et 666, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 665 et 705 sont identiques.
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l’amendement no 665. En milieu rural, particulièrement en zone de revitalisation rurale (ZRR), tous les habitants – qu’ils soient travailleurs, retraités ou autre – doivent prendre leur voiture pour se déplacer, aller au travail, emmener les enfants à l’école, se rendre chez le médecin ou encore faire des courses. Or ces trajets en voiture sont très coûteux. Une solution réside dans la diminution des prix du carburant à la pompe – il faut la mettre en œuvre rapidement. Mais en milieu rural, l’énergie destinée à se chauffer est aussi très onéreuse. Une autre solution existe : outre la déduction forfaitaire de 10 % sur les salaires, qui existe déjà, nous proposons d’accorder aux résidents des ZRR une déduction forfaitaire supplémentaire exceptionnelle de 5 %, applicable pour l’année fiscale 2022. Les habitants non imposables recevraient un chèque énergie spécifique aux ZRR. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 705. Comme l’a très bien expliqué M. Vigier, il s’agit d’accorder aux habitants des communes classées en zone de revitalisation rurale, les fameuses ZRR, une déduction forfaitaire supplémentaire de 5 % uniquement pour l’année fiscale 2022, et ce afin de prendre en compte les surcoûts liés à l’énergie pour ces habitants. Il est vrai que ces derniers n’ont pas le choix : ils sont obligés d’utiliser leur voiture pour aller travailler, faire leurs courses, consulter le médecin. Tout est loin de leur habitation ! Ils sont donc pénalisés, et ils le sont plus encore lorsque le prix du carburant explose, comme c’est le cas actuellement.
J’ajoute que le dispositif proposé inclut les retraités car, s’ils n’exercent pas d’activité professionnelle, ils subissent également la hausse du prix des carburants. La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l’amendement no 666. Je défends également le no 667, car ces deux amendements sont complémentaires. Par l’amendement no 666, qui est de repli, nous proposons une déduction forfaitaire supplémentaire de 3 %, et non plus de 5 %. Quant au no 667, il a pour objet d’appliquer une déduction forfaitaire supplémentaire de 5 % aux habitants des zones de montagne. Quel est l’avis de la commission ? Sur le principe, ces amendements sont séduisants, mais la disposition proposée serait très complexe à mettre en œuvre car les ZRR ont pour objet de faciliter l’implantation d’entreprises : elles ne concernent donc nullement les particuliers. Il ne me paraît donc pas opportun d’étendre ce dispositif conçu pour les entreprises à la fiscalité des ménages. Par ailleurs, on peut imaginer que, dans les zones rurales, les contribuables, précisément parce qu’ils utilisent beaucoup leur voiture, sont plus nombreux à opter pour le régime des frais réels, plus avantageux dans ce cas. Enfin, je vous renvoie au doublement du plafond du remboursement carburant – de 200 à 400 euros – que nous avons adopté tout à l’heure.
J’ajoute – et je suis moi-même élu dans un département rural – que si nous devions tenir compte de toutes les spécificités de chaque territoire, cela deviendrait très complexe. Pourquoi, en effet, ne pas prévoir un dispositif particulier lorsque le coût de l’immobilier ou de l’alimentation, par exemple, est particulièrement élevé à tel ou tel endroit ? Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable, pour les mêmes raisons que celles indiquées par le rapporteur général. Toutefois, nous sommes conscients des difficultés soulevées par ces amendements, difficultés qui ont été rappelées par Vincent Descoeur tout à l’heure et qui sont liées au coût souvent prohibitif des déplacements dans les zones rurales ou de montagne.
Je vous propose donc, non pas de laisser tomber cette question importante, qui a été évoquée par plusieurs députés Les Républicains, mais d’envisager un autre dispositif, qui consisterait, d’une part, à augmenter le montant de la remise de 18 centimes et, d’autre part, de tenir compte de la spécificité de ces territoires, où le transport du carburant est plus élevé, en allant, pour leurs habitants, plus loin que la seule remise. La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy. Nous soutiendrons ces amendements, qui nous paraissent de bon sens. Ils correspondent en effet à une réalité que vivent tous ceux qui sont élus dans une circonscription rurale. Clemenceau disait que, lorsqu’on veut enterrer un problème, on crée une commission : sous Macron, on invoque des raisons techniques… (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) (Les amendements identiques nos 665 et 705 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 666 n’est pas adopté.) Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 667, 721 et 886.
L’amendement no 667 de M. Jean-Pierre Vigier a été défendu.
La parole est à M. Inaki Echaniz, pour soutenir l’amendement no 721. Il s’agit, comme l’a indiqué M. Vigier tout à l’heure, de prévoir une déduction forfaitaire supplémentaire de 5 % pour les habitants des communes classées en zone de montagne. Dans ces régions, la vallée d’Aspe par exemple, la distance entre le domicile et les différents services publics, dont les écoles, peut être très longue, d’autant qu’ils ferment les uns après les autres – mon prédécesseur avait évoqué ces fermetures devant vous. Or le coût de ces déplacements est très élevé. Il est donc nécessaire de prévoir un dispositif adapté. La parole est à Mme Pascale Boyer, pour soutenir l’amendement no 886. Vivre en zone de montagne, c’est supporter des coûts supplémentaires pour aller travailler, faire ses courses, voir le médecin, mais aussi pour se chauffer : 6 millions de Français sont concernés. Monsieur le ministre, vous venez de nous proposer de discuter d’un dispositif pour les territoires ruraux : il serait intéressant que les élus des territoires de montagne soient associés à ces discussions. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Quel est l’avis de la commission ? Je vous demanderai de bien vouloir retirer vos amendements, compte tenu de l’annonce par le ministre de l’ouverture d’une réflexion sur le sujet d’ici à l’examen du projet de loi de finances. Au demeurant, il me paraît, là encore, difficile d’étendre aux particuliers un dispositif de zonage qui a été conçu pour les collectivités territoriales. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis que le rapporteur général. (Les amendements identiques nos 667, 721 et 886 ne sont pas adoptés.) Je suis saisie de trois amendements, nos 105, 486 et 839 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 105 et 486 sont identiques.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 105. Il s’agit de supprimer un impôt sur l’impôt. En effet, les Français doivent acquitter un impôt sur le revenu sur la contribution sociale généralisée (CSG) non déductible et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) qu’ils ont payées. De fait, comme ils peuvent le constater sur leur bulletin de salaire, le net à payer avant prélèvement à la source est inférieur au net imposable.
Cet impôt sur l’impôt est archaïque, injustifiable et injuste et il entraîne une forte baisse de pouvoir d’achat en raison de l’inflation record. C’est pourquoi, une fois encore – le groupe Les Républicains dépose un amendement analogue chaque année –, nous proposons de supprimer l’impôt calculé sur ces contributions prélevées, je le rappelle, sur le capital, sur les revenus d’activité et sur les revenus du travail. L’amendement no 486 de M. Pierre-Henri Dumont est défendu.
La parole est à M. Thomas Ménagé, pour soutenir l’amendement no 839 rectifié. Il s’agit d’un amendement de bon sens qui, comme l’a dit Mme Louwagie, vise à supprimer un impôt sur l’impôt. Cette mesure est réclamée par les Français, comme j’ai encore pu le constater la semaine dernière lors d’un débat avec des concitoyens que j’ai organisé dans ma circonscription. De fait, ils ne comprennent plus rien à la fiscalité : lorsqu’on ne leur reprend pas d’une main ce qu’on leur a donné de l’autre, on leur fait payer un impôt sur de l’argent dont ils n’ont jamais vu la couleur. Rendez-vous compte : sur l’argent que gagnent les Français qui se lèvent le matin pour travailler ou ceux qui ont travaillé toute leur vie, on prélève, avant même qu’ils ne le perçoivent, la CSG, puis on leur demande d’acquitter l’impôt sur le revenu sur cette CSG. Cela n’a aucun sens !
Comment peut-on consentir à un tel impôt sur l’impôt ? Les dispositifs fiscaux se sont empilés au fil du temps, et ce sont toujours les mêmes qui payent. Les Français qui travaillent dur, les retraités, ont le sentiment légitime de passer leur vie à payer, toujours et encore. Ils ont conscience des immenses avantages dont on bénéficie en France – la sécurité sociale, les écoles, les routes, les services publics –, mais ils ont le sentiment de payer pour tout le monde. On ne leur fait jamais aucun cadeau et on ne cesse de leur demander des sacrifices.
Notre objectif est donc d’améliorer nos dispositifs fiscaux en les rendant plus lisibles, moins lourds et, surtout, plus justes. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission ? Je vous rappelle que, sous la précédente législature, nous avons baissé les impôts de 50 milliards : vous ne pouvez donc pas nous accuser de créer des taxes sur des taxes. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Bien sûr, vous avez supprimé l’ISF ! Le principal impôt que nous avons supprimé, madame Le Pen, c’est la taxe d’habitation, pour un total de 24 milliards d’euros.
Si les 2,4 points de CSG non déductibles et la CRDS devenaient déductibles, comme vous le proposez, l’assiette de l’impôt sur le revenu serait réduite de 37 milliards et les recettes de l’État liées à cet impôt de 6 milliards.
Pourquoi existe-t-il deux types de CSG ? Les 2,4 points non déductibles correspondent à l’impôt créé par Michel Rocard sur l’ensemble des revenus – de 1,1 %, son taux est ensuite passé à 2,4 %. Quant aux augmentations ultérieures, elles se sont substituées à des cotisations – transformées, donc, en CSG – qui étaient déductibles du revenu imposable. Il n’y avait donc pas de raison de les assujettir à l’impôt sur le revenu.
Par ailleurs, l’histoire récurrente de « l’impôt sur l’impôt », je veux bien,…. Ce n’est pas une histoire, c’est la réalité ! …mais c’est très courant. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) C’est ainsi que c’est construit ! Eh bien, c’est mal construit ! Laissez M. le rapporteur général s’exprimer. Je vais prendre un exemple. Vous percevez 100 de revenus. Si vous dépensez ces 100, vous paierez 20 % de TVA et, pourtant, l’assiette de votre impôt sur le revenu sera de 100. Vous payez donc un impôt sur la TVA. On peut vouloir supprimer ce type de situations, mais ce serait ouvrir la boîte de Pandore. Je suis désolé, mais mon avis est largement défavorable à ces amendements qui coûteraient 6 milliards d’euros. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis que le rapporteur général. La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan. Ce qui me stupéfie dans votre réponse, monsieur le rapporteur général, c’est que vous considérez certains amendements comme insupportables, impossibles à mettre en œuvre, alors que la majorité a elle-même décidé de baisses fiscales – je pense à la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune ou de la taxe d’habitation – qui n’ont pas suscité les mêmes préventions.
Ce qui est en cause dans ce qui est dénoncé ici, c’est la rupture de bon sens absolue qui décrédibilise l’impôt et renforce l’allergie fiscale. Nos collègues demandent tout simplement de rétablir la crédibilité de l’impôt auprès de nos concitoyens.
Je ne vois pas comment on peut repousser d’un revers de main une telle proposition ; je suis convaincu qu’elle renforcerait l’adhésion à l’impôt de nos concitoyens, alors qu’ils ont actuellement le sentiment d’être taxés deux fois de suite. Nous aurons sans aucun doute le même débat sur la TVA et sur la taxe sur l’essence. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Charles de Courson. C’est une vieille histoire ! On peut répondre comme le fait le rapporteur général : est déductible ce qui s’est substitué à des cotisations sociales et non déductible ce qui ne s’y est pas substitué. Telle est bien la vérité historique.
Cependant, aujourd’hui, c’est incompréhensible. Ainsi, des contribuables m’expliquent qu’ils ne comprennent pas, sur leur bulletin de paie, pourquoi la partie imposable est supérieure à la somme qu’ils perçoivent.
La solution, qui reviendrait à supprimer deux lignes dans les bulletins de paie, la CRDS et la part non déductible de la CSG, consiste à augmenter le taux d’imposition de la CSG de 0,5 point pour que cette suppression se fasse à coût nul.
J’accorde volontiers qu’un gros travail serait nécessaire pour en arriver là, mais la solution existe et elle supprimerait deux lignes sur la fiche de paie.
Je ne voterai pas ces amendements, mais ils soulèvent un vrai problème. (M. Jean-Philippe Tanguy applaudit.) On ne peut pas dire simplement : « Ça coûte 6 milliards. Circulez, il n’y a rien à voir. » La solution existe. Elle réclame du courage ; il faudrait que les différents courants politiques se réunissent, qu’ils osent affirmer qu’ils approuvent cette réforme et qu’ils s’engagent à expliquer que cette décision supprime deux lignes sur la fiche de paie mais qu’elle ne coûte rien aux finances sociales – ce ne sont pas les finances de l’État qui sont concernées mais les finances sociales.
On a essayé plusieurs fois de promouvoir cette solution… Personnellement, cela fait vingt-cinq ans que j’essaye ! Mais il ne faut peut-être pas désespérer d’y arriver un jour ! (Les amendements identiques nos 105 et 486 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 839 rectifié n’est pas adopté.) Sur l’amendement no 518, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Sur les amendements identiques nos 16, 25, 183, 332, 525 et 854, je suis saisie par le groupe Rassemblement National d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Marine Le Pen, pour soutenir l’amendement no 518. L’amendement vise à rendre justice aux familles françaises. (Exclamations.) Dès que je parle de familles françaises, certains trouvent cela honteux… Nous sommes tous des familles françaises ! C’est pourtant la famille qui nous permet de vivre, d’envisager l’avenir, de créer des emplois et de la richesse, de se projeter. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.) En réalité, depuis 1945, jamais la crise de natalité n’a été aussi grave ni aussi lourde ! C’est la conséquence d’une politique qui a tourné le dos aux familles. Pour être honnête, cela ne date pas du dernier quinquennat, plutôt du précédent, mais cette politique se poursuit.
Dans le monde moderne, élever un enfant est incontestablement plus cher que ce n’était le cas par le passé. Je considère donc qu’il faut mettre en place une politique de natalité, c’est-à-dire d’aide à l’arrivée de l’enfant dans le foyer. En même temps, il faut accompagner les familles qui font le choix d’avoir des enfants et augmenter leur pouvoir d’achat. C’est la raison pour laquelle je vous propose d’accorder une part fiscale pleine dès le deuxième enfant. D’abord parce que pour faire le troisième, il faut déjà faire le deuxième ! C’est du bon sens. Surtout, puisque nous parlons depuis plusieurs jours de pouvoir d’achat, je vous indique que cette mesure, pour une famille de classe moyenne avec deux enfants, représente un gain annuel de 560 euros environ ; beaucoup de familles de classe moyenne en ont besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Mes chers collègues, je vous invite à baisser le niveau du fond sonore.
Quel est l’avis de la commission ? À mon sens, ce sujet n’a pas sa place dans le projet de loi de finances rectificative (PLFR). Vous proposez une modification qu’on peut parfaitement comprendre – et vous l’avez très bien expliquée ; toutefois ce sujet relève du projet de loi de finances initiale, puisque l’adoption de cet amendement aurait un impact sur l’impôt payé en 2023, et aussi parce qu’il ne répond à l’urgence dont nous parlons, à savoir aider les Français à passer le pic d’inflation. J’admets volontiers que c’est une remarque que j’aurais pu faire pour beaucoup d’autres amendements.
Vous dites que notre politique familiale n’est pas à la hauteur. En réalité, nous partageons votre volonté d’avoir une politique familiale ambitieuse. C’est un des piliers de notre modèle social. Nous avons dépensé en 2019 63 milliards d’euros pour la politique familiale, soit 3,6 % du PIB. C’est le niveau d’effort le plus élevé des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Nous sommes d’ailleurs un des pays de l’OCDE dont le taux de natalité est le plus fort.
Il faut prendre en compte tous les paramètres : il y a effectivement les dispositifs fiscaux, mais aussi les prestations sociales, l’offre de service d’accueil pour les jeunes enfants…
Du reste, le surcoût lié à la naissance du deuxième enfant est déjà pris en compte, avec la demi-part supplémentaire dans le quotient familial et du fait que c’est à partir du deuxième enfant que les familles ont droit aux allocations familiales.
Madame Le Pen, je vous propose de reprendre cette proposition lors de l’examen du PLF ou dans le cadre d’une proposition de loi spécifique. Le PLFR n’est en effet pas le cadre adéquat. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Je mets aux voix l’amendement no 518. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 210
Nombre de suffrages exprimés 202
Majorité absolue 102
Pour l’adoption 44
Contre 158 (L’amendement no 518 n’est pas adopté.) Je suis saisie de six amendements identiques, nos 16, 25, 183, 332, 525 et 854.
La parole est à M. Pierre Cordier, pour soutenir l’amendement no 16. Je veux vous parler du pouvoir d’achat des retraités. La suppression, en 2014, de la demi-part fiscale accordée aux veufs et aux veuves ayant eu un enfant pénalise fortement de nombreuses personnes âgées aux revenus modestes.
Afin d’améliorer le pouvoir d’achat de ces personnes, l’amendement vise à rétablir la demi-part fiscale au bénéfice de tous les veufs et veuves ayant eu un enfant. La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 25. Je rappellerai simplement, en complément de ce qu’a dit Pierre Cordier, que les retraités ont déjà eu à subir la hausse de la CSG. La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 183. Le sujet de la demi-part fiscale fait l’objet de la plus grande attention depuis pratiquement quinze ans. En effet, un premier coup avait été porté en 2008 avant le coup de grâce porté en 2014, pendant la présidence de François Hollande.
Celles et ceux qui étaient en campagne il y a quelque temps, celles et ceux qui vivent, comme nous tous dans cet hémicycle, au plus près de nos concitoyens, savent que nous sommes régulièrement interpellés au sujet du rétablissement de la demi-part fiscale pour les personnes veuves. C’est vrai ! En effet, lorsque du jour au lendemain une personne perd le conjoint avec lequel elle partageait son logement, elle se retrouve souvent face à de vraies difficultés.
Soyons objectifs : je reconnais que cet amendement est onéreux – je vois des spécialistes des finances hocher la tête. C’est une affaire à 1 milliard. Toutefois, j’ai proposé d’aller chercher l’argent là où il est. Dans notre pays, quels que soient les gouvernements, cette action n’est pas menée à terme ; je reconnais que le gouvernement actuel fait des efforts, mais je maintiens qu’il y a matière à aller chercher des recettes. Je ne demande pas tout au ministre de l’économie et des finances, j’essaie de faire des propositions et de trouver des recettes nouvelles, notamment en créant des taxes spéciales qui s’appliquent à celles et ceux qui bénéficient des crises que nous vivons depuis deux ans. Les riches ! Dites le mot ! En somme, le rétablissement de la demi-part fiscale pour les personnes veuves est régulièrement demandé sur tout le territoire national. La parole est à M. Jérôme Nury, pour soutenir l’amendement no 332. L’amendement vise à rétablir la demi-part fiscale accordée aux veufs et aux veuves ayant eu un enfant.
Lorsqu’on parle de pouvoir d’achat, il faut parler aussi de manière très concrète des personnes concernées. Parfois les accidents de la vie plongent certaines familles dans le plus grand désarroi. Gardons-nous d’accentuer cela et soutenons par la solidarité nationale les personnes qui ont perdu leur conjoint ou leur conjointe. Il s’agit d’une mesure immédiate de solidarité qui touche tant les actifs que les retraités. Cette mesure conférerait du pouvoir d’achat à ceux qui non seulement ont enduré une souffrance mais qui connaissent souvent une baisse de leur niveau de vie lors du départ de leur conjoint. La parole est à Mme Marine Le Pen, pour soutenir l’amendement no 525. Nos collègues ont raison de rappeler que, partout sur le terrain – pour ceux qui y vont –, nous sommes interpellés par des personnes qui ne comprennent pas la suppression de la demi-part pour les veufs et pour les veuves.
Vous connaissez l’expression française d’après laquelle on doit protéger la veuve et l’orphelin. Eh bien oui, là aussi, c’est bon sens. Cette mesure n’est pas si onéreuse, si on se souvient qu’elle est destinée à ceux qui ont été frappés par la mort, par la solitude qui en est la conséquence, et qui subissent donc de véritables blessures. Nous nous devons, nous qui représentons la nation, de nous pencher sur leur situation. On nous interpelle régulièrement à ce sujet ; la décision de supprimer cette demi-part a créé un sentiment d’injustice profonde ; nous devons apporter une réponse et réparer cette injustice, pour venir – car c’est aussi à cela que se marque la grandeur de notre pays – au secours des veuves, des veufs et indirectement des orphelins. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan, pour soutenir l’amendement no 854. Au-delà du fait que, comme l’a dit Mme Le Pen, nous devons être solidaires de cette peine affective, il y a la double peine : la peine financière qui suit souvent un décès, les énormes difficultés sociales que rencontrent ceux qui sont confrontés à cette douleur.
Le rapporteur général et le ministre vont nous dire que cela coûte cher. Cependant je remarque que, chaque année, on augmente le budget de l’Union européenne de manière considérable sans faire de difficulté. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Cela se passe un lundi après-midi, dans cet hémicycle, et nous parlons là de milliards d’euros.
Je vous rappelle que chaque année, on augmente ce budget sans savoir où va l’argent : les fonctionnaires européens s’augmentent de manière considérable ; l’aide à la Turquie est sans contrôle ; cela finance des délocalisations dans les pays de l’Est. Bref, vous dépensez ces milliards d’euros sans aucune pudeur.
Je pourrais également parler des cabinets d’étude, du rapport du Sénat sur McKinsey et les autres, des centaines de millions d’euros que vous gaspillez. (Mme Michèle Peyron proteste.) Je pourrais parler de nos propositions au sujet des profiteurs de crise, de ceux qui profitent de la misère pour s’enrichir toujours davantage. De grâce, n’y allez pas de votre couplet sur le fait que cette mesure coûtera de l’argent ! Oui, elle coûtera de l’argent ; mais je préfère que l’on dépense de l’argent pour alléger la peine de ceux qui sont dans la douleur que pour favoriser les copains du président de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ? Oui, monsieur Dupont-Aignan, cette mesure coûtera de l’argent : elle coûtera 1,5 milliard. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Et l’ISF ? Combien ça a coûté, la suppression de l’ISF ? Nous avons le sens des responsabilités. Avec ce texte, nous tenons absolument à tenir notre ligne qui consiste à borner le déficit à 5 % cette année.
C’est indispensable pour l’indépendance nationale à laquelle vous êtes si attaché et pour notre crédibilité internationale ! Si nous voulons retrouver un déficit inférieur à 3 % en 2027, il ne faut pas déroger à cette règle.
Oui, on peut dépenser 1,5 milliard pour faire plaisir à X ou Y, mais ça n’est pas juste ! (Protestations sur les bancs du groupe RN.) La mesure que vous proposez n’est pas juste car elle ne correspond pas à une charge qui pèserait sur les veufs et sur les veuves. (Vives protestations sur les bancs du groupe RN.) Du calme, mes chers collègues. Les veufs qui ont élevé seul un enfant pendant cinq ans bénéficient d’une demi-part, mais vous affirmez que les personnes qui n’ont pas élevé seules un enfant devraient également avoir une demi-part. Et alors ? Vous ne tenez pas compte des revenus. La mesure que vous proposez est doublement injuste ! (Mêmes mouvements.) C’est honteux ! Avis très défavorable ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ? Même avis. La parole est à M. Stéphane Peu. Mon groupe, qui, depuis 2015, dépose chaque année des amendements sur le projet de loi de finances pour rétablir une demi-part fiscale pour les veuves et les veufs, se félicite de ces amendements.
J’ajoute aux arguments déjà développés que, lorsque l’on se retrouve seul, il n’y a pas seulement la peine et le vide affectif : les charges du foyer deviennent aussi plus importantes à supporter. La solidarité nationale doit venir alléger ce surcoût. La suppression de cette mesure en 2014 était injuste, c’est pourquoi nous avons proposé chaque année de la rétablir. Il faudrait réfléchir à un mécanisme de plafonnement ; mais il est temps de rétablir la demi-part des veuves et veufs. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe RN.) Très bien ! La parole est à M. Mathieu Lefèvre. Le débat sur la demi-part des veuves et des veufs est difficile, car il s’agit toujours de situations compliquées.
Cependant, j’observe que la loi votée en 2009, qui – notamment, si je me souviens bien, à l’initiative d’un amendement de M. de Courson – a recentré la mesure sur les femmes et les hommes ayant élevé seuls un enfant durant au moins cinq ans, a aujourd’hui atteint un équilibre qu’il serait difficile et injuste de remettre en cause.
En effet, le rapporteur général a rappelé que l’avantage fiscal procuré par la mesure ne correspondait à aucune charge réelle. Il faut avoir le courage de le dire : si aucune majorité n’a remis en question la décision prise en 2009, c’est précisément pour cette raison. C’est parce que vous êtes lâches ! Il faut aussi avoir le courage de s’opposer au rétablissement de la demi-part parce que, comme le rapporteur général l’a rappelé, il coûterait 1,5 milliard d’euros. Compte tenu de la progressivité de l’impôt sur le revenu, il bénéficierait, par définition, aux ménages les plus aisés – je le répète pour la gauche, notamment. J’ajoute que la précédente majorité a diminué l’impôt sur le revenu de 5 milliards d’euros, a relevé le seuil d’imposition pour aider les foyers les plus modestes ; nous avons maintenu l’ensemble des abattements sur les taxes foncières, et les taxes afférentes aux personnes seules. L’équilibre trouvé depuis 2009 à l’initiative, je le rappelle, de M. de Courson, est fragile et précaire : nous devons absolument le maintenir, il y va de notre responsabilité. La parole est à M. Philippe Brun. Les députés socialistes voteront en faveur de ces amendements, non sans faire quelques remarques.
Tout d’abord, si nous partageons les propos des différents orateurs au sujet du drame que constitue la perte d’un conjoint et la pauvreté relative qui en résulte, rétablir la demi-part supprimée sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy revient à accorder un avantage fiscal important indifféremment selon les revenus. Mais non ! Prenons l’exemple de feue Liliane Bettencourt : avec cette mesure, elle aurait bénéficié de la demi-part fiscale dans les mêmes proportions qu’une veuve d’ouvrier. Sous cette forme, le système n’est donc pas acceptable.
Nous voterons malgré cela en faveur de ces amendements, à condition de travailler à un mécanisme de plafonnement de leurs effets, comme cela avait été fait pour le quotient familial lors de la loi de finances rectificative pour 2012, après l’élection de François Hollande. Nous pourrions réfléchir à un dispositif similaire, qui serait intégré au texte lors de son examen au Sénat. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian. Le groupe Écologiste-NUPES soutiendra également ces amendements, parce qu’ils tendent à réparer une injustice. En effet, au-delà de la souffrance liée au deuil, ce drame humain très fort entraîne une dégradation des conditions de vie, car malgré la disparition de l’être cher, les charges du ménage – logement, chauffage… – restent identiques. Sur le principe, nous sommes donc favorables au rétablissement d’une demi-part fiscale après le décès du conjoint. Certains considèrent que la progressivité de la mesure est un problème, mais nous touchons là à la question de la progressivité de l’impôt sur le revenu.
Certes, la mesure entraîne des dépenses supplémentaires – 1 milliard d’euros, nous dit-on –, mais si vraiment on s’intéresse à la justice fiscale, il faut alors taxer davantage les personnes aisées, voire très aisées. Mes chers collègues, adoptons ces amendements, et adoptons parallèlement les propositions de rétablissement de l’impôt sur la fortune (ISF) – un bel ISF climatique, par exemple ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) La parole est à M. Jean-Paul Mattei. Le groupe Démocrate (MODEM et indépendants) ne soutiendra pas ces amendements. En effet, la suppression de la demi-part fiscale a été encadrée : les veuves et veufs qui ont élevé un enfant durant au moins cinq ans continuent à bénéficier de cette mesure. Par ailleurs, je vous rappelle que cet avantage fiscal est plafonné. Le cadre est inchangé depuis plusieurs années, il ne me semble donc pas opportun de modifier le régime aujourd’hui. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem et RE.) La parole est à M. Charles de Courson. Ayant le triste privilège d’être ici depuis… Un siècle, quasiment ! …trente ans, je vais vous rappeler l’origine de la mesure, notamment pour nos plus jeunes collègues. Dans l’une de ses décisions, le Conseil constitutionnel a considéré qu’il existait une rupture d’égalité entre les célibataires, qui bénéficiaient d’une part fiscale, et les veuves et veufs, qui avaient droit à une part et demie. La demi-part supplémentaire des veufs a donc été supprimée.
Comme l’a rappelé M. Lefèvre – qui, pour ceux qui ne le sauraient pas, travaillait à l’époque avec un certain rapporteur général du budget, mon vieil ami Gilles Carrez –, un amendement de Courson a rétabli la demi-part, mais uniquement pour les veuves et les veufs qui avaient élevé seul un enfant pendant au moins cinq ans. Avec cette contrepartie d’intérêt général, la mesure ne créait donc plus de rupture d’égalité. Voilà pour l’origine d’un problème dont nous débattons depuis quinze ans.
Ainsi, si nous rétablissons la demi-part pour les veuves et les veufs, il faut accorder également une demi-part supplémentaire à tous les célibataires, puisque, en droit fiscal, il n’y a pas de différence entre un célibataire et une personne devenue célibataire par le veuvage. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) Le problème est très délicat : des associations de célibataires sont venues nous voir, réclamant davantage qu’une part fiscale – 1,2 ou 1,5 selon les calculs – puisque dans un logement, que l’on soit deux ou tout seul, un certain nombre de coûts sont fixes. Voilà pour l’historique du problème et de ce débat très compliqué. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et RE, ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.) La parole est à M. David Guiraud. Parfois, il faut savoir faire un pas de côté par rapport à certaines de nos positions.
La suppression de la demi-part fiscale était injuste. On vient d’en expliquer l’origine ! L’amendement est-il parfait ? À nos yeux, non. Va-t-il profiter un peu plus aux riches qu’aux autres ? Oui ! Oui, un peu plus, c’est vrai. Allons-nous le voter ? (« Ah ! » sur les bancs du groupe RE.) Oui, nous allons le voter. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.) Silence, silence pour la France ! (Rires et applaudissements sur de nombreux bancs.) Ce que vous ne comprenez pas, chers collègues, c’est que nous parlons de veuves et de veufs. Et dans cette situation, je n’accepte pas d’entendre des arguments d’ordre financier. (Exclamations sur les bancs des groupes RE et Dem.) Nous, nous n’avons pas un portefeuille à la place du cœur, et nous voterons donc en faveur de ces amendements. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et RN.) La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan. Je sais que la meilleure défense, c’est l’attaque, mais la réponse de M. le rapporteur général est tout de même osée ! Nous demandons simplement la prise en compte de la douleur des veufs et la compensation de la perte financière liée au deuil, et il ose parler d’injustice, alors même que vous avez donné 5 milliards d’euros aux Français les plus riches sans la moindre hésitation ! Il ose parler d’injustice alors que vous refusez de taxer les profiteurs de crise ! Il ose parler d’injustice alors que vous gaspillez tant de milliards ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Comment accepter cela ?
Les Français nous regardent, et, au-delà des différences politiques, ils aimeraient un peu plus d’humanité dans notre façon d’aborder les problèmes. Soyez un peu plus humains, et la politique sera plus appréciée dans notre pays. (Même mouvement.) La parole est à Mme Marine Le Pen. Je suis vraiment choquée par l’hostilité, voire la haine, qui se dégage des propos du rapporteur général. (Protestations sur les bancs du groupe RE.) Je crois que vous n’avez pas pris conscience de la violence de vos propos, monsieur le rapporteur général. Je rappelle encore une fois que nous parlons de veuves et de veufs, souvent de personnes très âgées, qui se retrouvent seules alors qu’elles avaient organisé une vie de couple que le malheur leur a retirée – c’est bien là la rupture avec les célibataires, monsieur de Courson. L’organisation de la vie est différente par rapport à celle d’un célibataire, les charges et les conséquences, qu’elles soient psychologiques, affectives ou financières, également.
Vous voir réagir avec autant de brutalité, autant de violence, est gênant. Vous savez, on a aussi le droit d’attendre de vous un peu d’humanité… Oh, c’est bon ! …un peu de retenue, face à des situations douloureuses. Peut-être y a-t-il moyen de faire des économies – économies, quel gros mot ! – sur d’autres sujets. Nous pourrions, comme je l’ai suggéré, instaurer un nouvel impôt sur la fortune financière, qui remplacerait l’ISF. Pour ma part, je trouve plus normal d’aller réclamer à des gens qui ont les moyens de payer un nouvel impôt que de supprimer une demi-part fiscale à des veuves et à des veufs. Mais nous ne voyons peut-être pas les choses de la même façon. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit aussi.) La parole est à M. le président de la commission des finances. J’étais en train de me demander si Mme Le Pen était présente dans l’hémicycle quand l’ISF a été supprimé.
Les amendements nos 360, 475, 503 et 530, ainsi que les amendements nos 636, 726, 914 et 948 sont identiques. Ces derniers font l’objet de quatre sous-amendements, nos 1056, 1057, 1059 et 983.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 360. Cet amendement du groupe Les Républicains ouvre la possibilité aux salariés de convertir leurs jours de RTT non pris en salaire. C’est une bonne idée ! Je rappelle que les RTT ont pris naissance au moment du passage à la semaine de 35 heures. Il s’agit de journées de repos accordées aux salariés quand la durée de travail effectif est supérieure au seuil légal. Ceux-ci peuvent choisir de les prendre isolément ou bien de les regrouper. Actuellement, les entreprises sont confrontées à des difficultés pour recruter, pour passer des marchés et répondre à la demande et les salariés doivent bien souvent renoncer à leurs jours de RTT pour soutenir l’activité. Nous proposons qu’ils soient compensés en espèces sonnantes et trébuchantes, à l’instar de ce qui est pratiqué pour les salariés ayant accumulé un nombre important de jours de RTT au moment de leur départ à la retraite.
Il s’agit d’une vraie mesure de pouvoir d’achat, qui a d’ailleurs été quelquefois demandée par les salariés à leurs employeurs car ils préféraient voir augmenter leur rémunération. La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l’amendement no 475. La conversion des jours de RTT en salaire a pour but d’aider les entreprises confrontées à des difficultés de recrutement à maintenir un niveau d’activité important. Cet amendement a également pour objectif de mieux récompenser le travail et le mérite et d’augmenter le salaire net des Français. L’amendement no 503 de Mme Isabelle Valentin est défendu.
La parole est à M. Pierre-Henri Dumont, pour soutenir l’amendement no 530. Ces amendements identiques tendent à faire deux gagnants : les entreprises et les salariés. Les entreprises, face aux difficultés de recrutement, ont besoin que leurs salariés soient plus présents sur leur lieu de travail, soit qu’ils fassent des heures supplémentaires – je vous renvoie à notre précédent débat –, soit qu’ils renoncent à leurs jours de RTT, ce qui est un droit. Les salariés, quant à eux, ont un besoin immédiat de pouvoir d’achat.
La conversion en salaire net de jours de RTT non pris est une mesure qui a l’avantage d’être efficace tout de suite, de ne rien coûter à l’État et de ne faire, je le répète, que des gagnants, les entreprises et les salariés. Les Républicains l’ont défendue lors des campagnes électorales et la défendent avec force et vigueur aujourd’hui devant vous. (M. Olivier Marleix applaudit.) Sur les amendements identiques nos 636 et suivants, je suis saisie par les groupes Renaissance, La France insoumise-NUPES et Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Nous en venons à la deuxième série d’amendements identiques. La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 636. Cet amendement des députés du groupe Les Républicains est un amendement de repli par rapport aux amendements identiques précédents : la possibilité de convertir des RTT en salaire serait limitée à la période allant du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023. La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 726. Je vais montrer l’exemple et me contenter de dire : « Défendu » ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes HOR, RE et Dem et sur quelques bancs du groupe RN.) La parole est à M. Marc Ferracci, pour soutenir l’amendement no 914. Le salarié sera libre de procéder ou non à la monétisation des jours de RTT et il devra solliciter une autorisation de son employeur, précision importante car il ne faudrait pas que ce mécanisme déstabilise les petites et moyennes entreprises, susceptibles d’être confrontées à des problèmes de trésorerie, dans l’hypothèse où de nombreux salariés demanderaient une telle conversion en même temps.
En outre, si le dispositif est limité dans le temps, c’est qu’il existe un projet encore plus ambitieux, défendu par la majorité présidentielle et le Président de la République, autour du compte épargne-temps universel. Celui-ci a vocation à prolonger le dispositif du compte épargne-temps (CET) en le rendant accessible à l’ensemble des salariés. Il leur permettra d’utiliser les jours de RTT non pris soit pour les poser plus tard, soit pour les monétiser. Nous avons donc choisi cette limitation du 1er janvier 2022 au 31 décembre 2023 dans l’attente de la concertation qui va s’engager avec les partenaires sociaux sur ce nouveau compte épargne-temps. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.) L’amendement no 948 de M. Mohamed Laqhila est défendu.
Nous en venons aux sous-amendements aux amendements identiques nos 636 et suivants.
La parole est à M. Arthur Delaporte, pour soutenir les sous-amendements nos 1056, 1057 et 1059, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée. Je vous avoue que ce n’est pas de gaieté de cœur que nous avons déposé ces sous-amendements. Le sous-amendement du Gouvernement à l’amendement no 636 laisse entrevoir que le Gouvernement et la majorité présidentielle soutiennent les principes défendus par le groupe Les Républicains qui reviennent à casser tout ce qui permet aux travailleurs effectuant des heures supplémentaires de bénéficier d’une protection, notamment d’un droit au repos. N’oublions pas que c’est sur la base du volontariat ! Oui, mais la crise de la covid-19 a déjà permis d’expérimenter un dispositif de ce type et vous voulez saisir l’occasion d’une deuxième crise, celle du pouvoir d’achat, pour opérer un effet cliquet qui conduirait à moyen terme à une disparition pure et simple de toute protection des 35 heures.
En outre, plusieurs garanties sont absentes et nous voulons les réintroduire par nos sous-amendements : le no 1056 conditionne la possibilité de transformer des RTT en salaire au fait qu’une négociation collective avec les organisations syndicales l’ait autorisée, à travers une convention ou un accord de branche, d’établissement ou d’entreprise. Il faut éviter que la mesure ne soit totalement discrétionnaire. Ce que vous proposez est, je le répète, une casse pure et simple des règles régissant le temps de travail.
Le sous-amendement no 1057 pose une autre garantie : il limite chaque année à cinq, soit dix demi-journées, les jours de RTT susceptibles d’être transformés en salaire.
Quant au sous-amendement no 1059, il tend à supprimer la disposition qui nous apparaît la plus dangereuse : « Les heures correspondantes ne s’imputent pas sur le contingent légal ou conventionnel d’heures supplémentaires prévu à l’article L. 3121-30 du même code. ». Cela permettrait de ne pas comptabiliser dans le contingent légal ou conventionnel les heures supplémentaires lorsque les jours de RTT qui en résultent ont été monétisés. Le diable se cache dans les détails et il faut être attentif car, par ces amendements, vous remettez totalement en cause les 35 heures. Madame la présidente, le temps de parole ! En effet, en monétisant tous les jours de RTT correspondant à des heures supplémentaires effectuées au-delà des 35 heures hebdomadaires, et en dessous des 39 heures ou des 40 heures, un salarié pourrait en droit ne jamais se retrouver au-delà des 40 heures alors même que son temps de travail a dépassé ce seuil. Cette phrase signifie la fin pure et simple des 35 heures. J’invite vraiment notre assemblée à voter nos sous-amendements, sinon ce sera open bar !
J’espère que nous serons une majorité à essayer de défendre le droit au repos, droit majeur des individus, et les principes fondamentaux du droit du travail en France. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NUPES, GDR et Écolo-NUPES.) La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, pour soutenir le sous-amendement no 983. Par souci de parallélisme, nous souhaitons aligner le régime fiscal des rémunérations issues du rachat des RTT sur celui des heures supplémentaires, à savoir une défiscalisation dans la limite de 7 500 euros, disposition que nous venons d’adopter. La parole est à M. Mathieu Lefèvre, suppléant M. Jean-René Cazeneuve, rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour donner l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune et ces sous-amendements. Précisons que la commission n’a pas examiné ces sous-amendements. Je souhaite remercier M. Thibaut Bazin pour la disposition contenue dans l’amendement no 636 qu’il avait déjà présentée dans le cadre du projet de loi consacré au pouvoir d’achat. Merci aussi à Mme Louwagie et à M. Dumont pour leurs interventions.
Ces amendements nos 636 et identiques sont opportuns. Étendre la possibilité de monétiser les jours de RTT aux salariés qui ne sont pas au forfait jours ou qui ne disposent pas d’un CET, est une mesure de bon sens. De plus, elle est cohérente avec ce qu’ont proposé le ministre et cette majorité en matière de régime fiscal des heures supplémentaires que notre assemblée vient d’adopter puisque les journées de RTT travaillées seront elles aussi défiscalisées dans la limite de 7 500 euros. En outre, la limitation dans le temps nous paraît raisonnable : nous pourrons évaluer les effets de cette mesure après le 31 décembre 2023. Enfin, elle est aussi cohérente avec tout ce nous faisons pour redonner de l’importance à la valeur travail.
S’agissant des sous-amendements de M. Delaporte, l’avis est défavorable. Il ne nous paraît pas opportun de conditionner cette possibilité de monétiser les RTT alors que nous venons à peine de l’ouvrir. Nous proposons qu’elle s’applique à des secteurs comme l’hôtellerie et la restauration qui subissent une très forte concurrence et de grandes tensions et qui bénéficient de très importants contingents conventionnels d’heures supplémentaires.
L’avis est donc favorable aux amendements identiques nos 636 et suivants et au sous-amendement no 983 et défavorable aux sous-amendements nos 1056, 1057 et 1059. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Je suis saisie de plusieurs demandes de parole et vais donner la parole à un orateur par groupe, si cela vous convient. Non, nous avions dit un pour, un contre ! Un pour, un contre pour chaque amendement ? (« Oui ! » sur divers bancs.) Si nous appliquons ce principe à la lettre, cela va avoir pour effet de multiplier les prises de parole. Or, compte tenu du nombre d’amendements… Elle a raison ! La parole est à M. Antoine Léaument. Vous voulez, avec ces amendements, aligner le régime fiscal du rachat de RTT sur celui des heures supplémentaires, en l’exonérant de cotisations sociales et d’impôt sur le revenu. Vous affirmez que cela permettra d’augmenter le salaire net. Sur le principe, c’est bien. Mais, en réalité, les cotisations et l’impôt participent du salaire socialisé : ils financent la sécurité sociale, l’école publique ou encore l’hôpital public. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Eva Sas applaudit également.) Bref, c’est du pouvoir d’achat.
Vous nous faites en quelque sorte le coup du portefeuille : vous prenez discrètement son portefeuille à votre voisin pour le lui redonner ensuite en expliquant qu’il s’agit d’un cadeau. C’est bien ce que vous faites avec les citoyens. En vérité, depuis 2019 et la non-compensation de l’exonération des cotisations sociales sur les heures supplémentaires, vous appauvrissez volontairement la sécurité sociale. Vous êtes en train de tuer la sécurité sociale ; vous commettez un crime de sécucide ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES. – Sourires sur quelques bancs des groupes RE et RN.) La parole est à M. Jean-Marc Tellier. Dans la lignée des amendements relatifs aux heures supplémentaires, vous trouvez un énième moyen de contourner la hausse des salaires. Nous voici désormais face à la panoplie presque complète : après les RTT, les heures supplémentaires et les primes, il ne vous reste plus qu’à désocialiser et défiscaliser les salaires eux-mêmes !
Selon nous, chaque heure travaillée doit être socialisée et fiscalisée pour ouvrir des droits. Une nouvelle fois, cette mesure vise à accroître le temps de travail en France. Rien de très novateur, en somme : « Travailler plus pour gagner plus. » C’est bien cela. J’appelle en revanche votre attention sur une entourloupe : un salarié qui effectue actuellement plus d’heures que la durée légale du travail et souhaite être payé est rémunéré en heures supplémentaires, majorées au taux normal de 25 % – cela peut parfois être un peu moins –, alors que les RTT, au contraire, ne sont majorées qu’au taux de 10 %. En d’autres termes, l’employeur pourra proposer au salarié qui travaillera plus de 35 heures et voudra être payé, des RTT monétisables et majorées à 10 % plutôt que des heures supplémentaires majorées à 25 %. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES.) La parole est à M. Laurent Jacobelli. Vous connaissez désormais la ligne de conduite du groupe Rassemblement national : lorsqu’une proposition est bonne, d’où qu’elle vienne, nous la votons. Il faut parfois savoir renoncer aux œillères idéologiques : je constate que, sur les sujets du travail et de la rémunération, sur les bancs de la majorité, on nous explique que la hausse des salaires est une hypothèse impensable,… Vous l’avez refusée ! …même lorsque Marine Le Pen propose d’augmenter de 10 % les salaires en les exonérant de charges patronales –, et que, chez les députés de la gauche, les poils se hérissent à l’idée que des Français puissent vouloir travailler plus pour gagner plus ! Pour eux, c’est « travailler moins pour gagner plus » ! Mais c’est malheureusement une équation impossible. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN. – Protestations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) Nous avons, avec ces amendements, l’occasion de dire oui à la valeur travail, oui au pouvoir d’achat, oui à l’aide aux petites entreprises qui, face à un carnet de commandes en surchauffe, pourront trouver un regain de main-d’œuvre. C’est pourquoi, sans hésitation, le groupe Rassemblement national les votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à Mme Christine Pires Beaune. Nous sommes en train de tordre le code du travail sans disposer d’aucune étude d’impact : j’ai l’impression que vous vous en fichez royalement. Mesurez-vous vraiment ce que représentent les RTT ? Ce sont des jours de récupération prévus pour ceux qui travaillent au-delà du temps légal : par exemple, les ouvriers d’une aciérie qui effectuent 40 heures par semaine et qui, à ce titre, bénéficient de récupérations. C’est comme si vous leur disiez qu’ils n’ont finalement pas besoin de ce repos et qu’on peut le leur échanger contre de l’argent ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC, LFI-NUPES, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) Le pire, c’est que votre dispositif n’est même pas conditionné : il est certes limité dans le temps, mais il devient possible de dire à un salarié que toutes ses RTT seront monnayées. C’est irresponsable ! Acceptez au moins le sous-amendement visant à les limiter à cinq jours par an. La parole est à M. Nicolas Turquois. J’aimerais qu’on arrête de présenter une vision caricaturale du travail. (Protestations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) Je vous assure que la caricature blesse. (Mêmes mouvements.) Soit. Faisons de la caricature : compte tenu des effectifs de la NUPES présents dans l’hémicycle ce soir, j’en déduis que vous n’êtes pas favorables aux heures supplémentaires ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR. – Protestations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) C’est honteux ! Je prendrai un exemple personnel : ceux qui étaient déjà députés lors de la précédente législature savent que je suis agriculteur. Dans ce secteur, la durée du travail est très différente en période estivale ou en période hivernale : qu’il s’agisse des récupérations de RTT ou des heures supplémentaires, mes salariés savent que les mois d’été sont très bien rémunérés parce qu’il y a énormément de travail – et ils sont d’ailleurs demandeurs.
Vous ne confiez pas une moissonneuse-batteuse ou un tracteur à un salarié que vous embaucheriez spécialement pour cette période car leur maniement nécessite une formation et engage une responsabilité. Ce surcroît de travail correspond à la fois à un vrai besoin de l’entreprise et à un souhait du salarié qui l’accepte sur la base du volontariat. Donnons donc un peu de souplesse au système. En tant que députés, il nous appartient de corriger les excès – ils existent, je l’admets parfaitement –, mais cessons de présenter une vision caricaturale du travail selon laquelle il se traduirait forcément par une domination de l’employeur sur l’employé. Les relations entre les deux peuvent aussi être équilibrées. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem, RE et HOR et sur quelques bancs des groupes RN et LR.) La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian. J’entends dire dans cet hémicycle que les salariés auraient le choix : ce pourrait être le cas si les salaires étaient décents, s’ils permettaient de vivre dignement, si les contrats précaires ou à temps partiel n’étaient pas si nombreux. Mais, en réalité, le choix n’existe pas : pour vivre avec les salaires actuels, on est obligé de faire des heures supplémentaires ; on y est obligé pour boucler les fins de mois ! Notre proposition de partager le travail et d’augmenter les salaires est donc cohérente. (M. Benjamin Lucas applaudit.) C’est ainsi que nous lutterons contre le chômage.
J’entends dire également que le travail n’est pas toujours fondé sur la domination. Toutefois, juridiquement, il s’agit bien d’un lien de subordination. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.) Certains salariés, qui subissent une forme de pression, se sentent obligés d’accéder à la requête de leur patron lorsqu’il leur demande de travailler un peu plus, à telle heure ou à tel moment. On le voit, on le sait. Mais non ! Qu’est-ce que vous en savez ? Ce n’est peut-être pas le cas de tout le monde, mais pour de nombreux postes de travail pénibles, notamment en cas de travail posté, il faut savoir entendre ce que nous vous disons. La solution réside bien dans l’augmentation des salaires. Nous nous échinons à vous le dire, mais vous refusez de l’entendre : c’est fort dommage. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.) (Les amendements identiques nos 360, 475, 503 et 530 ne sont pas adoptés.) (Les sous-amendements nos 1056, 1057 et 1059, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) (Le sous-amendement no 983 est adopté.) Je mets aux voix les amendements identiques nos 636, 726, 914 et 948. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 211
Nombre de suffrages exprimés 209
Majorité absolue 105
Pour l’adoption 154
Contre 55 (Les amendements identiques nos 636, 726, 914 et 948, sous-amendés, sont adoptés.) (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, RN, LR, Dem et HOR.) Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 508, 17, 301, 168, 596, 781, 378, 650, 20 et 288, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 17 et 301 sont identiques. Il en est de même des amendements nos 378 et 650.
L’amendement no 508 de M. Pierre-Henri Dumont est défendu.
La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 17. Sur 80 % du territoire national, 70 % des salariés utilisent leur véhicule pour se rendre à leur travail. L’augmentation des prix du carburant, accentuée par l’explosion de la fiscalité qui lui est rattachée, est profondément injuste car elle grève mécaniquement le pouvoir d’achat de ceux qui travaillent.
Plus injuste encore : les plus pénalisés sont ceux qui perçoivent des bas salaires, comme les aides à domicile. Pour sortir de la logique qui conduit nos concitoyens à devoir calculer s’ils ont intérêt à travailler ou non, il convient d’accompagner les plus modestes de façon plus importante, tout comme nous accompagnerons les autres avec des amendements que nous examinerons ultérieurement.
Alors que les salariés imposables bénéficient d’une déduction d’impôt pour les déplacements effectués entre leur domicile et leur lieu de travail, ce n’est pas le cas de ceux qui, du fait de leurs faibles revenus, ne sont pas imposables. Cet amendement vise donc à instaurer un crédit d’impôt pour les travailleurs qui utilisent leur véhicule mais ne sont pas imposables. Il s’agit d’une mesure de justice et de pouvoir d’achat en faveur des plus fragiles. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) L’amendement identique no 301 de Mme Véronique Louwagie est défendu.
La parole est à M. le rapporteur général de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire, pour soutenir l’amendement no 168 de la commission. Je laisse M. de Courson le présenter. La parole est à M. Charles de Courson. Nos collègues ont déjà expliqué la situation. Le régime fiscal permet de déduire de l’impôt sur le revenu soit un abattement forfaitaire de 10 %, soit le montant des frais réels. Par conséquent, lorsque les frais de déplacements sont importants, il est possible de les déduire. C’est normal et c’est très bien. Cependant, seuls ceux qui sont imposables en bénéficient. Je rappelle que 38 % des foyers seulement le sont. Or 70 % des salariés se rendent à leur travail en voiture.
Il s’agit donc d’instaurer un crédit d’impôt à destination de ceux qui ne bénéficient pas de la déduction des frais réels. Telle est l’idée de cet amendement qui a séduit la commission des finances, mais hélas pas le rapporteur général dans un premier temps. Espérons qu’il changera d’avis : il est peut-être en voie de conversion puisqu’il m’a demandé de l’exposer. Vous pouvez également soutenir l’amendement nos 596. L’amendement no 596 a le même objectif, mais propose de limiter la mesure au 31 décembre 2023, en espérant que le prix du carburant soit redescendu à cette date. Nous verrons alors, à l’occasion de l’examen du budget pour 2024, s’il convient d’ajuster le dispositif, de le maintenir ou de le supprimer. Il s’agit d’un amendement de justice entre tous les Français, comme l’a dit Mme Bonnivard, afin que ceux qui ne sont pas imposables bénéficient du même dispositif que ceux qui le sont. La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy, pour soutenir l’amendement no 781. Cet amendement vise à soutenir le travail de la commission des finances : comme nous l’avions promis, nous sommes prêts à appuyer les propositions de nos collègues, dès lors qu’elles sont bien conçues. En l’occurrence, cette proposition très consensuelle et très juste, qui reconnaît la valeur travail tout en participant à la solidarité nationale, mérite une approbation unanime. Il s’agit d’une belle mesure de justice fiscale pour les Français qui peinent à assumer le coût des déplacements jusqu’à leur lieu de travail. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Les amendements identiques nos 378 de Mme Véronique Louwagie et 650 de M. Charles de Courson sont défendus. Il en est de même des amendements nos 20 et 288 des mêmes auteurs.
Quel est l’avis de la commission ? Vous proposez par ces amendements une rupture importante avec le modèle fiscal existant, en ayant recours, je crois, à un outil inadapté. La déduction des frais, qu’elle se fasse au forfait ou au réel, est une modalité fondamentale de l’établissement du revenu imposable. Cette logique garantit le traitement équitable des contribuables, quels que soient leurs revenus. Vous proposez de la transformer en niche fiscale, ce qui est radicalement différent. (Mme Émilie Bonnivard et M. Olivier Marleix protestent.) C’est la réalité.
Les conséquences budgétaires d’une telle mesure seraient disproportionnées. L’État se trouverait contraint de rembourser à l’euro près les frais kilométriques de millions de contribuables. Le coût de la mesure serait hors de contrôle, et l’avantage pour les contribuables les plus imposés ne serait pas maîtrisé. Le choix des contribuables se porterait massivement sur le système des frais réels, en délaissant la déduction forfaitaire de 10 %.
De plus, un tel crédit d’impôt entraînerait des effets de bord très complexes. La déduction des frais réels du revenu imposable donne actuellement lieu à quelques centimes de réduction, alors que votre proposition permettrait le remboursement de l’intégralité du barème kilométrique, entraînant ainsi une rupture flagrante d’égalité devant l’impôt. Je pense d’ailleurs que le Conseil constitutionnel refuserait une telle mesure.
De plus, autre effet pervers possible, le revenu imposable gagnerait en importance. Cela influerait sur le calcul des prestations sociales comme le RSA, ce qui pourrait y rendre inéligibles certains contribuables. Votre proposition entraînerait en réalité d’innombrables effets, dont les premiers seraient un coût colossal pour l’État et la bascule de millions de contribuables vers un remboursement quasi-intégral de leurs frais kilométriques. Cette mesure est incompatible avec l’esprit du texte. J’émets donc un avis défavorable sur l’ensemble de ces amendements. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je partage l’argumentaire de M. le rapporteur général. Je salue la générosité des parlementaires auteurs de ces amendements, mais cette mesure nous ferait passer d’un système juste et proportionné – la déduction des frais réels – à un système complètement disproportionné et, au bout du compte, injuste. Actuellement, les dépenses kilométriques déclarées sont déduites du revenu imposable et permettent au contribuable d’économiser des sommes raisonnables, qui se chiffrent en euros plutôt qu’en centaines ou en milliers d’euros. Avec votre proposition, chaque euro dépensé dans le cadre d’un déplacement donnerait lieu à un crédit d’impôt, ce qui produirait des sommes considérables. Cela entraînerait une rupture d’égalité entre les personnes qui se déplacent et celles qui ne se déplacent pas, entre celles qui pourraient avoir recours à ce dispositif et celles qui ne le pourraient pas.
D’après notre chiffrage, cette mesure coûterait à l’État plus de 25 milliards d’euros. (M. Olivier Marleix s’exclame.) Elle ferait exploser la banque ! Elle est en complète rupture avec la logique que nous avons adoptée lors de l’examen de ce texte, qui consiste à trouver un équilibre satisfaisant entre le soutien aux Français face à l’inflation et le respect des finances publiques. Elle ne respecte ni les finances publiques, ni l’égalité devant l’impôt. Je recommande vivement de retirer ces amendements, faute de quoi mon avis sera défavorable. Très bien ! À partir de maintenant, nous appliquerons la règle du « un pour, un contre » : deux interventions, une favorable et une défavorable, par discussion commune.
La parole est à Mme Véronique Louwagie. Monsieur le rapporteur général, je souhaite rectifier vos propos. Vous évoquez une « niche fiscale », mais nous parlons des salariés non imposables, incapables donc d’avoir recours à la déduction des frais réels. L’emploi de ce terme me semble gênant. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et RN. –M. Nicolas Dupont-Aignan et M. Stéphane Peu applaudissent également.) Par ailleurs, vous dites craindre les « innombrables effets » de cette mesure « hors de contrôle ». Vous évoquez des problèmes techniques ; je refuse de croire que l’administration est incapable d’y faire face. Il me semble que la vraie question, à laquelle vous n’avez pas répondu, est la suivante : ce dispositif est-il intéressant ou non ? S’il l’est, il s’agit de faire en sorte de l’appliquer. Bien sûr ! Il suffit de mettre des plafonds. Monsieur le ministre, vous affirmez que le mécanisme actuel est juste. Laissez-moi d’abord vous rappeler qu’il a évolué : si le dispositif des frais réels s’applique, c’est justement parce que la déduction forfaitaire de 10 % n’était pas adaptée à toutes les situations et n’était donc pas juste. Par ailleurs, je ne souscris pas à votre vision, car le dispositif actuel ne profite qu’aux salariés imposables. Voilà… c’est évident ! Il ne profite pas aux salariés non imposables. C’est là qu’est la réelle rupture d’égalité : entre les salariés imposables et les salariés non imposables. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RN et LIOT. – M. Nicolas Dupont-Aignan et M. Stéphane Peu applaudissent également.) Je concède qu’il faut peut-être retravailler le mécanisme que nous proposons, qu’on peut le trouver trop ouvert. Plusieurs options sont possibles : nous pourrions le plafonner, réfléchir sur le taux. En tout état de cause, bien que la majorité ne soit visiblement pas prête à accepter un dispositif de cette nature, il importe de se pencher sur la situation difficile dans laquelle se trouvent ces nombreux salariés non imposables. Ils méritent de se voir proposer une solution, plutôt que de la voir rejeter au prétexte qu’il s’agirait d’une « niche fiscale ». (Mme Émilie Bonnivard et M. Olivier Marleix applaudissent.) La parole est à M. Mathieu Lefèvre. Ces amendements traduisent une intention louable, que nous partageons. En revanche, le mécanisme fiscal proposé est particulièrement complexe : vous augmenterez le revenu imposable des personnes qui se rendent sur leur lieu de travail et créerez une dépense fiscale supplémentaire – car, comme l’a rappelé M. le rapporteur général, il s’agit bien d’une niche fiscale, qu’on le veuille ou non. Cela créerait de nombreux effets non maîtrisés : l’augmentation du revenu fiscal de référence des salariés en question pourrait notamment leur interdire l’accès à certains mécanismes sociaux.
L’instabilité fiscale est un mal dont la France souffre de longue date. Le dispositif de déduction des frais professionnels fonctionne très bien ; il a fait ses preuves, et vous souhaitez pourtant le remplacer par un mécanisme de crédit d’impôt dont nous ne maîtriserions ni les effets de bord, ni surtout le coût.
Je vous propose plutôt d’engager une réflexion collective en prévision du projet de loi de finances (PLF) pour 2023, qui pourrait inclure l’amélioration du dispositif de déduction des frais professionnels. Outre l’argument juridique de la distorsion fondamentale que créerait un tel dispositif entre les deux options que sont la déduction au réel et celle au forfait, ce sujet se prête tout à fait à une discussion dans le cadre du PLF. Nous pouvons en débattre tous ensemble et trouver un accord. En tout cas, il n’est pas pertinent d’introduire par voie d’amendement un dispositif aux effets de bord si importants et si mal maîtrisés. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Excellent ! La parole est à M. le président de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire. Sur le principe, chacun en conviendra, ces amendements cherchent à résoudre une inégalité. Il est anormal que les salariés non assujettis à l’impôt sur le revenu, qui, par définition, gagnent donc moins que les salariés qui y sont assujettis, ne bénéficient pas des mêmes avantages qu’eux en matière de frais réels. Je suis d’accord avec Mme Louwagie : il est paradoxal de parler de « niche fiscale » lorsqu’il s’agit de salariés non imposables, dont il est évident qu’ils ne constituent pas une catégorie favorisée. Si même M. Coquerel est d’accord avec moi… Je suis souvent d’accord avec vous ! En tout cas, quand je suis d’accord, je le dis. (Sourires.) Il faut savoir reconnaître les convergences d’idées, même avec les personnes d’un autre bord politique.
Par ailleurs, M. le ministre, j’aimerais que vous nous expliquiez par quel calcul vous êtes parvenu à la somme de 25 milliards d’euros. Effectivement ! On nous annonce des chiffres mal étayés : par exemple, je conteste le chiffrage du « paquet pouvoir d’achat » à 20 milliards d’euros, et je l’estime plus proche de 35 milliards. J’aimerais que le Gouvernement établisse plus clairement son chiffrage. Par ailleurs, il me semble que l’amendement en question vise non pas à faire rembourser au réel les frais kilométriques, mais à établir des barèmes, qui peuvent tout à fait tenir compte des critères existants. Ces barèmes seraient définis par l’exécutif, par voie de décret. Monsieur de Courson, je me fais votre porte-parole ; ai-je bien compris votre amendement ? (M. Charles de Courson acquiesce.) Ce mécanisme cherche à rétablir l’égalité. De surcroît, il est limité dans le temps : il doit durer jusqu’en décembre 2023, pour faire face à l’explosion du prix du carburant. Pour toutes ces raisons, je suis enclin à le voter, comme je l’ai fait en commission des finances. La séance est suspendue. (La séance, suspendue à vingt-deux heures dix, est reprise à vingt-deux heures quinze.) La séance est reprise.
Je suis à nouveau saisie d’une suspension de séance. La séance est suspendue. (La séance, suspendue à vingt-deux heures quinze, est reprise à vingt-deux heures vingt.) La séance est reprise.
La parole est à M. le ministre. Pardon de reprendre la parole, mais je ne voudrais pas qu’un vendredi soir, à vingt-deux heures trente, le projet de loi de finances rectificative déraille : or ces amendements présentent ce risque. Que chacun prenne ses responsabilités, mais que chacun veille aussi à rester cohérent. À tous ceux qui assènent, depuis le début de l’examen du texte, qu’il faut préserver les ressources de l’État, qu’il faut instaurer de nouvelles taxes et de nouveaux impôts pour financer les services publics, les hôpitaux, les collèges et les universités, j’adresse un message clair : vous ne pouvez pas voter un amendement qui prive l’État d’un tiers de ses recettes d’impôt sur le revenu. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) À tous ceux qui disent, depuis le début de l’examen du texte, qu’il faut rétablir les finances publiques, qu’il ne faut pas endetter l’État ni creuser les déficits, et qu’il faut réduire impérativement les dépenses publiques, je réponds : vous ne pouvez pas, en cohérence, proposer plus de 20 milliards d’euros de dépense publique supplémentaires. La dette a augmenté de 600 milliards d’euros ! À tous ceux qui affirment qu’il ne faut pas subventionner les énergies fossiles ni les carburants fossiles, je dis : en cohérence, vous ne pouvez pas voter un amendement qui siphonne le tiers des recettes de l’impôt sur le revenu pour subventionner lesdites énergies. Un peu de cohérence ! Je vous demande de ne pas voter ces amendements. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La parole est à Mme Émilie Bonnivard. Je retire l’amendement no 17, mais avec regret, monsieur le ministre (Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI-NUPES) , car votre réponse n’est pas à la hauteur de mes attentes. C’est le parti des regrets ! Vous nous aviez assuré que notre mesure coûtait 50 milliards d’euros, mais nous apprenons aujourd’hui qu’elle n’en coûte que 10. Charles de Courson et moi-même voulions surtout obtenir, de votre part, l’engagement que nous pourrions travailler sur une mesure encadrée d’ici au projet de loi de finances. Vous nous accusez d’être irresponsables, mais c’est tout le contraire : nous voulons agir en faveur de la justice fiscale et défendre les travailleurs les plus modestes dans une période d’inflation. Allez, retirez-le ! Je retire mon amendement, mais j’aurais aimé que vous teniez un discours plus apaisant et plus ouvert, dans la perspective du projet de loi de finances. (Les amendements identiques nos 17 et 301 sont retirés.) (L’amendement no 508 est retiré.) Qu’en est-il de l’amendement no 168 de la commission des finances ? Il a été approuvé par la commission, même si j’ai exprimé un avis défavorable à titre personnel. Je ne peux pas le retirer. (L’amendement no 168 n’est pas adopté.) La parole est à M. Charles de Courson. Je regrette vivement l’attitude de fermeture totale affichée par M. le ministre. Nos amendements ne coûtent absolument pas les sommes qu’il allègue, pour une raison simple : le montant des remboursements serait déterminé par un arrêté du ministre des finances. Il pourrait donc être fixé à 5, 10 ou 15 milliards d’euros. À ceux qui affirment que notre proposition coûterait 25 milliards d’euros, je réponds : vous n’avez pas lu nos amendements. Je retire le mien, mais je le redéposerai pour poser de nouveau cette question de fond. Nous pourrions y travailler avec nos collègues sénateurs. (Mme Émilie Bonnivard et M. Olivier Marleix applaudissent.) (L’amendement no 596 est retiré.) La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy. Je maintiens, pour ma part, l’amendement no 781. Je confesse l’avoir déposé parce que je savais ce qui se passerait ce soir. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur divers bancs.) L’amendement de Charles de Courson était très raisonnable. Le Parlement pourrait parfaitement discuter du montant en jeu et du budget afférent. C’est proprement ahurissant : vous refusez de discuter de ce montant, monsieur le ministre, parce que vous refusez d’accorder aux travailleurs modestes et aux classes moyennes inférieures un avantage que vous accordez aux riches. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit également.) (L’amendement no 781 n’est pas adopté.) (Les amendements identiques nos 378 et 650 sont retirés.) (Les amendements nos 20 et 288 sont retirés.) La parole est à M. Jean-Marc Zulesi, pour soutenir l’amendement no 803. Il vise à permettre le cumul des indemnités kilométriques avec celles du covoiturage, afin de promouvoir ce dernier. Surtout dans le contexte actuel, le covoiturage me semble constituer une pratique vertueuse. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Quel est l’avis de la commission ? Je connais votre expertise en la matière, mais votre amendement me paraît satisfait. Un conducteur qui pratique le covoiturage a déjà droit à une déduction, et un passager peut également déduire ses frais dans la limite de sa quote-part. Seulement s’il est imposable ! Peut-être M. le ministre a-t-il des explications complémentaires. Quel est l’avis du Gouvernement ? Mon avis est favorable, car cet amendement lève une ambiguïté du régime fiscal du covoiturage. Il s’agit bien ici d’une déduction du montant imposable, et non d’un crédit d’impôt. Évidemment, on pourrait aussi imaginer des crédits d’impôt sur les factures de téléphone, les déplacements, les trajets en avion ou que sais-je – et en définitive, c’est l’État qui paierait entièrement la vie des Français ! Telle n’est pas exactement notre conception de la dépense publique. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) (L’amendement no 803 est adopté.) L’amendement no 576 de Mme Cécile Untermaier est défendu.
Quel est l’avis de la commission ? Nous aurons une discussion sur les revalorisations automatiques dans le cadre du projet de loi de finances. Avis défavorable. (L’amendement no 576, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.) L’amendement no 394 de Mme Véronique Louwagie est défendu. (L’amendement no 394, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) Je suis saisie de trois amendements, nos 665, 705 et 666, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 665 et 705 sont identiques.
La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l’amendement no 665. En milieu rural, particulièrement en zone de revitalisation rurale (ZRR), tous les habitants – qu’ils soient travailleurs, retraités ou autre – doivent prendre leur voiture pour se déplacer, aller au travail, emmener les enfants à l’école, se rendre chez le médecin ou encore faire des courses. Or ces trajets en voiture sont très coûteux. Une solution réside dans la diminution des prix du carburant à la pompe – il faut la mettre en œuvre rapidement. Mais en milieu rural, l’énergie destinée à se chauffer est aussi très onéreuse. Une autre solution existe : outre la déduction forfaitaire de 10 % sur les salaires, qui existe déjà, nous proposons d’accorder aux résidents des ZRR une déduction forfaitaire supplémentaire exceptionnelle de 5 %, applicable pour l’année fiscale 2022. Les habitants non imposables recevraient un chèque énergie spécifique aux ZRR. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 705. Comme l’a très bien expliqué M. Vigier, il s’agit d’accorder aux habitants des communes classées en zone de revitalisation rurale, les fameuses ZRR, une déduction forfaitaire supplémentaire de 5 % uniquement pour l’année fiscale 2022, et ce afin de prendre en compte les surcoûts liés à l’énergie pour ces habitants. Il est vrai que ces derniers n’ont pas le choix : ils sont obligés d’utiliser leur voiture pour aller travailler, faire leurs courses, consulter le médecin. Tout est loin de leur habitation ! Ils sont donc pénalisés, et ils le sont plus encore lorsque le prix du carburant explose, comme c’est le cas actuellement.
J’ajoute que le dispositif proposé inclut les retraités car, s’ils n’exercent pas d’activité professionnelle, ils subissent également la hausse du prix des carburants. La parole est à M. Jean-Pierre Vigier, pour soutenir l’amendement no 666. Je défends également le no 667, car ces deux amendements sont complémentaires. Par l’amendement no 666, qui est de repli, nous proposons une déduction forfaitaire supplémentaire de 3 %, et non plus de 5 %. Quant au no 667, il a pour objet d’appliquer une déduction forfaitaire supplémentaire de 5 % aux habitants des zones de montagne. Quel est l’avis de la commission ? Sur le principe, ces amendements sont séduisants, mais la disposition proposée serait très complexe à mettre en œuvre car les ZRR ont pour objet de faciliter l’implantation d’entreprises : elles ne concernent donc nullement les particuliers. Il ne me paraît donc pas opportun d’étendre ce dispositif conçu pour les entreprises à la fiscalité des ménages. Par ailleurs, on peut imaginer que, dans les zones rurales, les contribuables, précisément parce qu’ils utilisent beaucoup leur voiture, sont plus nombreux à opter pour le régime des frais réels, plus avantageux dans ce cas. Enfin, je vous renvoie au doublement du plafond du remboursement carburant – de 200 à 400 euros – que nous avons adopté tout à l’heure.
J’ajoute – et je suis moi-même élu dans un département rural – que si nous devions tenir compte de toutes les spécificités de chaque territoire, cela deviendrait très complexe. Pourquoi, en effet, ne pas prévoir un dispositif particulier lorsque le coût de l’immobilier ou de l’alimentation, par exemple, est particulièrement élevé à tel ou tel endroit ? Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable, pour les mêmes raisons que celles indiquées par le rapporteur général. Toutefois, nous sommes conscients des difficultés soulevées par ces amendements, difficultés qui ont été rappelées par Vincent Descoeur tout à l’heure et qui sont liées au coût souvent prohibitif des déplacements dans les zones rurales ou de montagne.
Je vous propose donc, non pas de laisser tomber cette question importante, qui a été évoquée par plusieurs députés Les Républicains, mais d’envisager un autre dispositif, qui consisterait, d’une part, à augmenter le montant de la remise de 18 centimes et, d’autre part, de tenir compte de la spécificité de ces territoires, où le transport du carburant est plus élevé, en allant, pour leurs habitants, plus loin que la seule remise. La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy. Nous soutiendrons ces amendements, qui nous paraissent de bon sens. Ils correspondent en effet à une réalité que vivent tous ceux qui sont élus dans une circonscription rurale. Clemenceau disait que, lorsqu’on veut enterrer un problème, on crée une commission : sous Macron, on invoque des raisons techniques… (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) (Les amendements identiques nos 665 et 705 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 666 n’est pas adopté.) Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 667, 721 et 886.
L’amendement no 667 de M. Jean-Pierre Vigier a été défendu.
La parole est à M. Inaki Echaniz, pour soutenir l’amendement no 721. Il s’agit, comme l’a indiqué M. Vigier tout à l’heure, de prévoir une déduction forfaitaire supplémentaire de 5 % pour les habitants des communes classées en zone de montagne. Dans ces régions, la vallée d’Aspe par exemple, la distance entre le domicile et les différents services publics, dont les écoles, peut être très longue, d’autant qu’ils ferment les uns après les autres – mon prédécesseur avait évoqué ces fermetures devant vous. Or le coût de ces déplacements est très élevé. Il est donc nécessaire de prévoir un dispositif adapté. La parole est à Mme Pascale Boyer, pour soutenir l’amendement no 886. Vivre en zone de montagne, c’est supporter des coûts supplémentaires pour aller travailler, faire ses courses, voir le médecin, mais aussi pour se chauffer : 6 millions de Français sont concernés. Monsieur le ministre, vous venez de nous proposer de discuter d’un dispositif pour les territoires ruraux : il serait intéressant que les élus des territoires de montagne soient associés à ces discussions. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Quel est l’avis de la commission ? Je vous demanderai de bien vouloir retirer vos amendements, compte tenu de l’annonce par le ministre de l’ouverture d’une réflexion sur le sujet d’ici à l’examen du projet de loi de finances. Au demeurant, il me paraît, là encore, difficile d’étendre aux particuliers un dispositif de zonage qui a été conçu pour les collectivités territoriales. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis que le rapporteur général. (Les amendements identiques nos 667, 721 et 886 ne sont pas adoptés.) Je suis saisie de trois amendements, nos 105, 486 et 839 rectifié, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 105 et 486 sont identiques.
La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 105. Il s’agit de supprimer un impôt sur l’impôt. En effet, les Français doivent acquitter un impôt sur le revenu sur la contribution sociale généralisée (CSG) non déductible et la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS) qu’ils ont payées. De fait, comme ils peuvent le constater sur leur bulletin de salaire, le net à payer avant prélèvement à la source est inférieur au net imposable.
Cet impôt sur l’impôt est archaïque, injustifiable et injuste et il entraîne une forte baisse de pouvoir d’achat en raison de l’inflation record. C’est pourquoi, une fois encore – le groupe Les Républicains dépose un amendement analogue chaque année –, nous proposons de supprimer l’impôt calculé sur ces contributions prélevées, je le rappelle, sur le capital, sur les revenus d’activité et sur les revenus du travail. L’amendement no 486 de M. Pierre-Henri Dumont est défendu.
La parole est à M. Thomas Ménagé, pour soutenir l’amendement no 839 rectifié. Il s’agit d’un amendement de bon sens qui, comme l’a dit Mme Louwagie, vise à supprimer un impôt sur l’impôt. Cette mesure est réclamée par les Français, comme j’ai encore pu le constater la semaine dernière lors d’un débat avec des concitoyens que j’ai organisé dans ma circonscription. De fait, ils ne comprennent plus rien à la fiscalité : lorsqu’on ne leur reprend pas d’une main ce qu’on leur a donné de l’autre, on leur fait payer un impôt sur de l’argent dont ils n’ont jamais vu la couleur. Rendez-vous compte : sur l’argent que gagnent les Français qui se lèvent le matin pour travailler ou ceux qui ont travaillé toute leur vie, on prélève, avant même qu’ils ne le perçoivent, la CSG, puis on leur demande d’acquitter l’impôt sur le revenu sur cette CSG. Cela n’a aucun sens !
Comment peut-on consentir à un tel impôt sur l’impôt ? Les dispositifs fiscaux se sont empilés au fil du temps, et ce sont toujours les mêmes qui payent. Les Français qui travaillent dur, les retraités, ont le sentiment légitime de passer leur vie à payer, toujours et encore. Ils ont conscience des immenses avantages dont on bénéficie en France – la sécurité sociale, les écoles, les routes, les services publics –, mais ils ont le sentiment de payer pour tout le monde. On ne leur fait jamais aucun cadeau et on ne cesse de leur demander des sacrifices.
Notre objectif est donc d’améliorer nos dispositifs fiscaux en les rendant plus lisibles, moins lourds et, surtout, plus justes. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission ? Je vous rappelle que, sous la précédente législature, nous avons baissé les impôts de 50 milliards : vous ne pouvez donc pas nous accuser de créer des taxes sur des taxes. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Bien sûr, vous avez supprimé l’ISF ! Le principal impôt que nous avons supprimé, madame Le Pen, c’est la taxe d’habitation, pour un total de 24 milliards d’euros.
Si les 2,4 points de CSG non déductibles et la CRDS devenaient déductibles, comme vous le proposez, l’assiette de l’impôt sur le revenu serait réduite de 37 milliards et les recettes de l’État liées à cet impôt de 6 milliards.
Pourquoi existe-t-il deux types de CSG ? Les 2,4 points non déductibles correspondent à l’impôt créé par Michel Rocard sur l’ensemble des revenus – de 1,1 %, son taux est ensuite passé à 2,4 %. Quant aux augmentations ultérieures, elles se sont substituées à des cotisations – transformées, donc, en CSG – qui étaient déductibles du revenu imposable. Il n’y avait donc pas de raison de les assujettir à l’impôt sur le revenu.
Par ailleurs, l’histoire récurrente de « l’impôt sur l’impôt », je veux bien,…. Ce n’est pas une histoire, c’est la réalité ! …mais c’est très courant. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) C’est ainsi que c’est construit ! Eh bien, c’est mal construit ! Laissez M. le rapporteur général s’exprimer. Je vais prendre un exemple. Vous percevez 100 de revenus. Si vous dépensez ces 100, vous paierez 20 % de TVA et, pourtant, l’assiette de votre impôt sur le revenu sera de 100. Vous payez donc un impôt sur la TVA. On peut vouloir supprimer ce type de situations, mais ce serait ouvrir la boîte de Pandore. Je suis désolé, mais mon avis est largement défavorable à ces amendements qui coûteraient 6 milliards d’euros. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis que le rapporteur général. La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan. Ce qui me stupéfie dans votre réponse, monsieur le rapporteur général, c’est que vous considérez certains amendements comme insupportables, impossibles à mettre en œuvre, alors que la majorité a elle-même décidé de baisses fiscales – je pense à la suppression de l’impôt de solidarité sur la fortune ou de la taxe d’habitation – qui n’ont pas suscité les mêmes préventions.
Ce qui est en cause dans ce qui est dénoncé ici, c’est la rupture de bon sens absolue qui décrédibilise l’impôt et renforce l’allergie fiscale. Nos collègues demandent tout simplement de rétablir la crédibilité de l’impôt auprès de nos concitoyens.
Je ne vois pas comment on peut repousser d’un revers de main une telle proposition ; je suis convaincu qu’elle renforcerait l’adhésion à l’impôt de nos concitoyens, alors qu’ils ont actuellement le sentiment d’être taxés deux fois de suite. Nous aurons sans aucun doute le même débat sur la TVA et sur la taxe sur l’essence. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Charles de Courson. C’est une vieille histoire ! On peut répondre comme le fait le rapporteur général : est déductible ce qui s’est substitué à des cotisations sociales et non déductible ce qui ne s’y est pas substitué. Telle est bien la vérité historique.
Cependant, aujourd’hui, c’est incompréhensible. Ainsi, des contribuables m’expliquent qu’ils ne comprennent pas, sur leur bulletin de paie, pourquoi la partie imposable est supérieure à la somme qu’ils perçoivent.
La solution, qui reviendrait à supprimer deux lignes dans les bulletins de paie, la CRDS et la part non déductible de la CSG, consiste à augmenter le taux d’imposition de la CSG de 0,5 point pour que cette suppression se fasse à coût nul.
J’accorde volontiers qu’un gros travail serait nécessaire pour en arriver là, mais la solution existe et elle supprimerait deux lignes sur la fiche de paie.
Je ne voterai pas ces amendements, mais ils soulèvent un vrai problème. (M. Jean-Philippe Tanguy applaudit.) On ne peut pas dire simplement : « Ça coûte 6 milliards. Circulez, il n’y a rien à voir. » La solution existe. Elle réclame du courage ; il faudrait que les différents courants politiques se réunissent, qu’ils osent affirmer qu’ils approuvent cette réforme et qu’ils s’engagent à expliquer que cette décision supprime deux lignes sur la fiche de paie mais qu’elle ne coûte rien aux finances sociales – ce ne sont pas les finances de l’État qui sont concernées mais les finances sociales.
On a essayé plusieurs fois de promouvoir cette solution… Personnellement, cela fait vingt-cinq ans que j’essaye ! Mais il ne faut peut-être pas désespérer d’y arriver un jour ! (Les amendements identiques nos 105 et 486 ne sont pas adoptés.) (L’amendement no 839 rectifié n’est pas adopté.) Sur l’amendement no 518, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Sur les amendements identiques nos 16, 25, 183, 332, 525 et 854, je suis saisie par le groupe Rassemblement National d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Marine Le Pen, pour soutenir l’amendement no 518. L’amendement vise à rendre justice aux familles françaises. (Exclamations.) Dès que je parle de familles françaises, certains trouvent cela honteux… Nous sommes tous des familles françaises ! C’est pourtant la famille qui nous permet de vivre, d’envisager l’avenir, de créer des emplois et de la richesse, de se projeter. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.) En réalité, depuis 1945, jamais la crise de natalité n’a été aussi grave ni aussi lourde ! C’est la conséquence d’une politique qui a tourné le dos aux familles. Pour être honnête, cela ne date pas du dernier quinquennat, plutôt du précédent, mais cette politique se poursuit.
Dans le monde moderne, élever un enfant est incontestablement plus cher que ce n’était le cas par le passé. Je considère donc qu’il faut mettre en place une politique de natalité, c’est-à-dire d’aide à l’arrivée de l’enfant dans le foyer. En même temps, il faut accompagner les familles qui font le choix d’avoir des enfants et augmenter leur pouvoir d’achat. C’est la raison pour laquelle je vous propose d’accorder une part fiscale pleine dès le deuxième enfant. D’abord parce que pour faire le troisième, il faut déjà faire le deuxième ! C’est du bon sens. Surtout, puisque nous parlons depuis plusieurs jours de pouvoir d’achat, je vous indique que cette mesure, pour une famille de classe moyenne avec deux enfants, représente un gain annuel de 560 euros environ ; beaucoup de familles de classe moyenne en ont besoin. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Mes chers collègues, je vous invite à baisser le niveau du fond sonore.
Quel est l’avis de la commission ? À mon sens, ce sujet n’a pas sa place dans le projet de loi de finances rectificative (PLFR). Vous proposez une modification qu’on peut parfaitement comprendre – et vous l’avez très bien expliquée ; toutefois ce sujet relève du projet de loi de finances initiale, puisque l’adoption de cet amendement aurait un impact sur l’impôt payé en 2023, et aussi parce qu’il ne répond à l’urgence dont nous parlons, à savoir aider les Français à passer le pic d’inflation. J’admets volontiers que c’est une remarque que j’aurais pu faire pour beaucoup d’autres amendements.
Vous dites que notre politique familiale n’est pas à la hauteur. En réalité, nous partageons votre volonté d’avoir une politique familiale ambitieuse. C’est un des piliers de notre modèle social. Nous avons dépensé en 2019 63 milliards d’euros pour la politique familiale, soit 3,6 % du PIB. C’est le niveau d’effort le plus élevé des pays de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Nous sommes d’ailleurs un des pays de l’OCDE dont le taux de natalité est le plus fort.
Il faut prendre en compte tous les paramètres : il y a effectivement les dispositifs fiscaux, mais aussi les prestations sociales, l’offre de service d’accueil pour les jeunes enfants…
Du reste, le surcoût lié à la naissance du deuxième enfant est déjà pris en compte, avec la demi-part supplémentaire dans le quotient familial et du fait que c’est à partir du deuxième enfant que les familles ont droit aux allocations familiales.
Madame Le Pen, je vous propose de reprendre cette proposition lors de l’examen du PLF ou dans le cadre d’une proposition de loi spécifique. Le PLFR n’est en effet pas le cadre adéquat. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Je mets aux voix l’amendement no 518. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 210
Nombre de suffrages exprimés 202
Majorité absolue 102
Pour l’adoption 44
Contre 158 (L’amendement no 518 n’est pas adopté.) Je suis saisie de six amendements identiques, nos 16, 25, 183, 332, 525 et 854.
La parole est à M. Pierre Cordier, pour soutenir l’amendement no 16. Je veux vous parler du pouvoir d’achat des retraités. La suppression, en 2014, de la demi-part fiscale accordée aux veufs et aux veuves ayant eu un enfant pénalise fortement de nombreuses personnes âgées aux revenus modestes.
Afin d’améliorer le pouvoir d’achat de ces personnes, l’amendement vise à rétablir la demi-part fiscale au bénéfice de tous les veufs et veuves ayant eu un enfant. La parole est à M. Vincent Descoeur, pour soutenir l’amendement no 25. Je rappellerai simplement, en complément de ce qu’a dit Pierre Cordier, que les retraités ont déjà eu à subir la hausse de la CSG. La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 183. Le sujet de la demi-part fiscale fait l’objet de la plus grande attention depuis pratiquement quinze ans. En effet, un premier coup avait été porté en 2008 avant le coup de grâce porté en 2014, pendant la présidence de François Hollande.
Celles et ceux qui étaient en campagne il y a quelque temps, celles et ceux qui vivent, comme nous tous dans cet hémicycle, au plus près de nos concitoyens, savent que nous sommes régulièrement interpellés au sujet du rétablissement de la demi-part fiscale pour les personnes veuves. C’est vrai ! En effet, lorsque du jour au lendemain une personne perd le conjoint avec lequel elle partageait son logement, elle se retrouve souvent face à de vraies difficultés.
Soyons objectifs : je reconnais que cet amendement est onéreux – je vois des spécialistes des finances hocher la tête. C’est une affaire à 1 milliard. Toutefois, j’ai proposé d’aller chercher l’argent là où il est. Dans notre pays, quels que soient les gouvernements, cette action n’est pas menée à terme ; je reconnais que le gouvernement actuel fait des efforts, mais je maintiens qu’il y a matière à aller chercher des recettes. Je ne demande pas tout au ministre de l’économie et des finances, j’essaie de faire des propositions et de trouver des recettes nouvelles, notamment en créant des taxes spéciales qui s’appliquent à celles et ceux qui bénéficient des crises que nous vivons depuis deux ans. Les riches ! Dites le mot ! En somme, le rétablissement de la demi-part fiscale pour les personnes veuves est régulièrement demandé sur tout le territoire national. La parole est à M. Jérôme Nury, pour soutenir l’amendement no 332. L’amendement vise à rétablir la demi-part fiscale accordée aux veufs et aux veuves ayant eu un enfant.
Lorsqu’on parle de pouvoir d’achat, il faut parler aussi de manière très concrète des personnes concernées. Parfois les accidents de la vie plongent certaines familles dans le plus grand désarroi. Gardons-nous d’accentuer cela et soutenons par la solidarité nationale les personnes qui ont perdu leur conjoint ou leur conjointe. Il s’agit d’une mesure immédiate de solidarité qui touche tant les actifs que les retraités. Cette mesure conférerait du pouvoir d’achat à ceux qui non seulement ont enduré une souffrance mais qui connaissent souvent une baisse de leur niveau de vie lors du départ de leur conjoint. La parole est à Mme Marine Le Pen, pour soutenir l’amendement no 525. Nos collègues ont raison de rappeler que, partout sur le terrain – pour ceux qui y vont –, nous sommes interpellés par des personnes qui ne comprennent pas la suppression de la demi-part pour les veufs et pour les veuves.
Vous connaissez l’expression française d’après laquelle on doit protéger la veuve et l’orphelin. Eh bien oui, là aussi, c’est bon sens. Cette mesure n’est pas si onéreuse, si on se souvient qu’elle est destinée à ceux qui ont été frappés par la mort, par la solitude qui en est la conséquence, et qui subissent donc de véritables blessures. Nous nous devons, nous qui représentons la nation, de nous pencher sur leur situation. On nous interpelle régulièrement à ce sujet ; la décision de supprimer cette demi-part a créé un sentiment d’injustice profonde ; nous devons apporter une réponse et réparer cette injustice, pour venir – car c’est aussi à cela que se marque la grandeur de notre pays – au secours des veuves, des veufs et indirectement des orphelins. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan, pour soutenir l’amendement no 854. Au-delà du fait que, comme l’a dit Mme Le Pen, nous devons être solidaires de cette peine affective, il y a la double peine : la peine financière qui suit souvent un décès, les énormes difficultés sociales que rencontrent ceux qui sont confrontés à cette douleur.
Le rapporteur général et le ministre vont nous dire que cela coûte cher. Cependant je remarque que, chaque année, on augmente le budget de l’Union européenne de manière considérable sans faire de difficulté. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Cela se passe un lundi après-midi, dans cet hémicycle, et nous parlons là de milliards d’euros.
Je vous rappelle que chaque année, on augmente ce budget sans savoir où va l’argent : les fonctionnaires européens s’augmentent de manière considérable ; l’aide à la Turquie est sans contrôle ; cela finance des délocalisations dans les pays de l’Est. Bref, vous dépensez ces milliards d’euros sans aucune pudeur.
Je pourrais également parler des cabinets d’étude, du rapport du Sénat sur McKinsey et les autres, des centaines de millions d’euros que vous gaspillez. (Mme Michèle Peyron proteste.) Je pourrais parler de nos propositions au sujet des profiteurs de crise, de ceux qui profitent de la misère pour s’enrichir toujours davantage. De grâce, n’y allez pas de votre couplet sur le fait que cette mesure coûtera de l’argent ! Oui, elle coûtera de l’argent ; mais je préfère que l’on dépense de l’argent pour alléger la peine de ceux qui sont dans la douleur que pour favoriser les copains du président de la République. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ? Oui, monsieur Dupont-Aignan, cette mesure coûtera de l’argent : elle coûtera 1,5 milliard. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Et l’ISF ? Combien ça a coûté, la suppression de l’ISF ? Nous avons le sens des responsabilités. Avec ce texte, nous tenons absolument à tenir notre ligne qui consiste à borner le déficit à 5 % cette année.
C’est indispensable pour l’indépendance nationale à laquelle vous êtes si attaché et pour notre crédibilité internationale ! Si nous voulons retrouver un déficit inférieur à 3 % en 2027, il ne faut pas déroger à cette règle.
Oui, on peut dépenser 1,5 milliard pour faire plaisir à X ou Y, mais ça n’est pas juste ! (Protestations sur les bancs du groupe RN.) La mesure que vous proposez n’est pas juste car elle ne correspond pas à une charge qui pèserait sur les veufs et sur les veuves. (Vives protestations sur les bancs du groupe RN.) Du calme, mes chers collègues. Les veufs qui ont élevé seul un enfant pendant cinq ans bénéficient d’une demi-part, mais vous affirmez que les personnes qui n’ont pas élevé seules un enfant devraient également avoir une demi-part. Et alors ? Vous ne tenez pas compte des revenus. La mesure que vous proposez est doublement injuste ! (Mêmes mouvements.) C’est honteux ! Avis très défavorable ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) Quel est l’avis du Gouvernement sur ces amendements identiques ? Même avis. La parole est à M. Stéphane Peu. Mon groupe, qui, depuis 2015, dépose chaque année des amendements sur le projet de loi de finances pour rétablir une demi-part fiscale pour les veuves et les veufs, se félicite de ces amendements.
J’ajoute aux arguments déjà développés que, lorsque l’on se retrouve seul, il n’y a pas seulement la peine et le vide affectif : les charges du foyer deviennent aussi plus importantes à supporter. La solidarité nationale doit venir alléger ce surcoût. La suppression de cette mesure en 2014 était injuste, c’est pourquoi nous avons proposé chaque année de la rétablir. Il faudrait réfléchir à un mécanisme de plafonnement ; mais il est temps de rétablir la demi-part des veuves et veufs. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe RN.) Très bien ! La parole est à M. Mathieu Lefèvre. Le débat sur la demi-part des veuves et des veufs est difficile, car il s’agit toujours de situations compliquées.
Cependant, j’observe que la loi votée en 2009, qui – notamment, si je me souviens bien, à l’initiative d’un amendement de M. de Courson – a recentré la mesure sur les femmes et les hommes ayant élevé seuls un enfant durant au moins cinq ans, a aujourd’hui atteint un équilibre qu’il serait difficile et injuste de remettre en cause.
En effet, le rapporteur général a rappelé que l’avantage fiscal procuré par la mesure ne correspondait à aucune charge réelle. Il faut avoir le courage de le dire : si aucune majorité n’a remis en question la décision prise en 2009, c’est précisément pour cette raison. C’est parce que vous êtes lâches ! Il faut aussi avoir le courage de s’opposer au rétablissement de la demi-part parce que, comme le rapporteur général l’a rappelé, il coûterait 1,5 milliard d’euros. Compte tenu de la progressivité de l’impôt sur le revenu, il bénéficierait, par définition, aux ménages les plus aisés – je le répète pour la gauche, notamment. J’ajoute que la précédente majorité a diminué l’impôt sur le revenu de 5 milliards d’euros, a relevé le seuil d’imposition pour aider les foyers les plus modestes ; nous avons maintenu l’ensemble des abattements sur les taxes foncières, et les taxes afférentes aux personnes seules. L’équilibre trouvé depuis 2009 à l’initiative, je le rappelle, de M. de Courson, est fragile et précaire : nous devons absolument le maintenir, il y va de notre responsabilité. La parole est à M. Philippe Brun. Les députés socialistes voteront en faveur de ces amendements, non sans faire quelques remarques.
Tout d’abord, si nous partageons les propos des différents orateurs au sujet du drame que constitue la perte d’un conjoint et la pauvreté relative qui en résulte, rétablir la demi-part supprimée sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy revient à accorder un avantage fiscal important indifféremment selon les revenus. Mais non ! Prenons l’exemple de feue Liliane Bettencourt : avec cette mesure, elle aurait bénéficié de la demi-part fiscale dans les mêmes proportions qu’une veuve d’ouvrier. Sous cette forme, le système n’est donc pas acceptable.
Nous voterons malgré cela en faveur de ces amendements, à condition de travailler à un mécanisme de plafonnement de leurs effets, comme cela avait été fait pour le quotient familial lors de la loi de finances rectificative pour 2012, après l’élection de François Hollande. Nous pourrions réfléchir à un dispositif similaire, qui serait intégré au texte lors de son examen au Sénat. La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian. Le groupe Écologiste-NUPES soutiendra également ces amendements, parce qu’ils tendent à réparer une injustice. En effet, au-delà de la souffrance liée au deuil, ce drame humain très fort entraîne une dégradation des conditions de vie, car malgré la disparition de l’être cher, les charges du ménage – logement, chauffage… – restent identiques. Sur le principe, nous sommes donc favorables au rétablissement d’une demi-part fiscale après le décès du conjoint. Certains considèrent que la progressivité de la mesure est un problème, mais nous touchons là à la question de la progressivité de l’impôt sur le revenu.
Certes, la mesure entraîne des dépenses supplémentaires – 1 milliard d’euros, nous dit-on –, mais si vraiment on s’intéresse à la justice fiscale, il faut alors taxer davantage les personnes aisées, voire très aisées. Mes chers collègues, adoptons ces amendements, et adoptons parallèlement les propositions de rétablissement de l’impôt sur la fortune (ISF) – un bel ISF climatique, par exemple ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) La parole est à M. Jean-Paul Mattei. Le groupe Démocrate (MODEM et indépendants) ne soutiendra pas ces amendements. En effet, la suppression de la demi-part fiscale a été encadrée : les veuves et veufs qui ont élevé un enfant durant au moins cinq ans continuent à bénéficier de cette mesure. Par ailleurs, je vous rappelle que cet avantage fiscal est plafonné. Le cadre est inchangé depuis plusieurs années, il ne me semble donc pas opportun de modifier le régime aujourd’hui. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem et RE.) La parole est à M. Charles de Courson. Ayant le triste privilège d’être ici depuis… Un siècle, quasiment ! …trente ans, je vais vous rappeler l’origine de la mesure, notamment pour nos plus jeunes collègues. Dans l’une de ses décisions, le Conseil constitutionnel a considéré qu’il existait une rupture d’égalité entre les célibataires, qui bénéficiaient d’une part fiscale, et les veuves et veufs, qui avaient droit à une part et demie. La demi-part supplémentaire des veufs a donc été supprimée.
Comme l’a rappelé M. Lefèvre – qui, pour ceux qui ne le sauraient pas, travaillait à l’époque avec un certain rapporteur général du budget, mon vieil ami Gilles Carrez –, un amendement de Courson a rétabli la demi-part, mais uniquement pour les veuves et les veufs qui avaient élevé seul un enfant pendant au moins cinq ans. Avec cette contrepartie d’intérêt général, la mesure ne créait donc plus de rupture d’égalité. Voilà pour l’origine d’un problème dont nous débattons depuis quinze ans.
Ainsi, si nous rétablissons la demi-part pour les veuves et les veufs, il faut accorder également une demi-part supplémentaire à tous les célibataires, puisque, en droit fiscal, il n’y a pas de différence entre un célibataire et une personne devenue célibataire par le veuvage. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) Le problème est très délicat : des associations de célibataires sont venues nous voir, réclamant davantage qu’une part fiscale – 1,2 ou 1,5 selon les calculs – puisque dans un logement, que l’on soit deux ou tout seul, un certain nombre de coûts sont fixes. Voilà pour l’historique du problème et de ce débat très compliqué. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et RE, ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.) La parole est à M. David Guiraud. Parfois, il faut savoir faire un pas de côté par rapport à certaines de nos positions.
La suppression de la demi-part fiscale était injuste. On vient d’en expliquer l’origine ! L’amendement est-il parfait ? À nos yeux, non. Va-t-il profiter un peu plus aux riches qu’aux autres ? Oui ! Oui, un peu plus, c’est vrai. Allons-nous le voter ? (« Ah ! » sur les bancs du groupe RE.) Oui, nous allons le voter. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.) Silence, silence pour la France ! (Rires et applaudissements sur de nombreux bancs.) Ce que vous ne comprenez pas, chers collègues, c’est que nous parlons de veuves et de veufs. Et dans cette situation, je n’accepte pas d’entendre des arguments d’ordre financier. (Exclamations sur les bancs des groupes RE et Dem.) Nous, nous n’avons pas un portefeuille à la place du cœur, et nous voterons donc en faveur de ces amendements. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et RN.) La parole est à M. Nicolas Dupont-Aignan. Je sais que la meilleure défense, c’est l’attaque, mais la réponse de M. le rapporteur général est tout de même osée ! Nous demandons simplement la prise en compte de la douleur des veufs et la compensation de la perte financière liée au deuil, et il ose parler d’injustice, alors même que vous avez donné 5 milliards d’euros aux Français les plus riches sans la moindre hésitation ! Il ose parler d’injustice alors que vous refusez de taxer les profiteurs de crise ! Il ose parler d’injustice alors que vous gaspillez tant de milliards ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Comment accepter cela ?
Les Français nous regardent, et, au-delà des différences politiques, ils aimeraient un peu plus d’humanité dans notre façon d’aborder les problèmes. Soyez un peu plus humains, et la politique sera plus appréciée dans notre pays. (Même mouvement.) La parole est à Mme Marine Le Pen. Je suis vraiment choquée par l’hostilité, voire la haine, qui se dégage des propos du rapporteur général. (Protestations sur les bancs du groupe RE.) Je crois que vous n’avez pas pris conscience de la violence de vos propos, monsieur le rapporteur général. Je rappelle encore une fois que nous parlons de veuves et de veufs, souvent de personnes très âgées, qui se retrouvent seules alors qu’elles avaient organisé une vie de couple que le malheur leur a retirée – c’est bien là la rupture avec les célibataires, monsieur de Courson. L’organisation de la vie est différente par rapport à celle d’un célibataire, les charges et les conséquences, qu’elles soient psychologiques, affectives ou financières, également.
Vous voir réagir avec autant de brutalité, autant de violence, est gênant. Vous savez, on a aussi le droit d’attendre de vous un peu d’humanité… Oh, c’est bon ! …un peu de retenue, face à des situations douloureuses. Peut-être y a-t-il moyen de faire des économies – économies, quel gros mot ! – sur d’autres sujets. Nous pourrions, comme je l’ai suggéré, instaurer un nouvel impôt sur la fortune financière, qui remplacerait l’ISF. Pour ma part, je trouve plus normal d’aller réclamer à des gens qui ont les moyens de payer un nouvel impôt que de supprimer une demi-part fiscale à des veuves et à des veufs. Mais nous ne voyons peut-être pas les choses de la même façon. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit aussi.) La parole est à M. le président de la commission des finances. J’étais en train de me demander si Mme Le Pen était présente dans l’hémicycle quand l’ISF a été supprimé.