XVIe législature
Session extraordinaire de 2022-2023
Séance du jeudi 20 juillet 2023
- Présidence de Mme Valérie Rabault
- 1. Accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés lors des violences urbaines
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
1e séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à neuf heures.)
L’ordre du jour appelle la discussion du projet de loi relatif à l’accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023 (nos 1533, 1537).
La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.
On ne sait pas pour combien de temps ! Avec le remaniement, il va peut-être devoir interrompre son intervention !
(Sourires.)
Du 27 juin au 5 juillet, chacun s’en souvient, notre pays a été marqué par huit nuits de violences et de pillages inqualifiables, dont l’étendue des destructions surpasse de très loin le triste précédent des émeutes de 2005. Nous avons tous en mémoire la mort de Nahel, ce jeune homme de 17 ans dont le décès a constitué le fait déclencheur apparent des émeutes. La diversité des violences, des dégradations et des déprédations commises témoigne cependant d’un lien complexe avec cet événement initial – lien qui reste à établir. De toute évidence, il a servi de prétexte à tout autre chose.
Dans la continuité immédiate de ces événements, après que près de 500 communes ont été touchées à un titre ou à un autre, le Président de la République a reçu à l’Élysée les maires concernés et il a pris l’engagement que des mesures législatives permettent d’accélérer la reconstruction. Le présent projet de loi est l’occasion de tenir parole et de faire un geste de soutien unanime en faveur de nos élus, de nos services publics et des habitants frappés par les nuits d’émeutes et de violences urbaines. Les mesures de ce texte faciliteront la reconstruction matérielle des bâtiments dégradés ou détruits.
Le projet de loi a été adopté à l’unanimité avant-hier, mardi 18 juillet, au Sénat. Je ne doute pas que le sens de l’intérêt général que nous avons en partage, ainsi que la volonté de ne pas laisser le dernier mot aux émeutiers, conduiront votre assemblée à l’adopter également à l’unanimité – du moins, je l’espère. Ce projet de loi répond de manière concrète et limitée, non pas aux causes, mais aux conséquences des émeutes.
Au total, dans l’ensemble du territoire, ont été attaqués : 274 commissariats, brigades de gendarmerie et postes de police municipale, 105 mairies, 243 établissements scolaires, 47 établissements relevant du ministère de la justice, 3 centres hospitaliers, mais aussi des bus, des trams, des médiathèques, des maisons de quartier, une crèche, des gymnases, des maisons de la culture et même des locaux associatifs – autant d’équipements et de services essentiels, au service de nos concitoyens, pour lesquels nos collectivités et la collectivité nationale que nous formons ont beaucoup investi dans la durée, pour l’avenir de tous.
Et, bien sûr, il y a eu les attaques ignobles, inqualifiables, contre les forces de l’ordre, contre les pompiers appelés pour secourir et contenir les destructions, contre les élus et leurs familles. Ils sont tous l’incarnation de notre République et ont été ciblés comme tels.
Je n’oublie pas les 1 000 commerces vandalisés et pillés, les gérants de café, les employés et les propriétaires de commerces de proximité, les pharmaciens, bref toutes celles et ceux qui mènent une vie droite et honnête et qui pourtant, durant ces nuits, ont perdu le fruit de leur labeur : un emploi, un outil de travail, un véhicule, quand ce n’était pas les économies d’une vie.
Le projet de loi me donne l’occasion de dire que nous ne lâchons rien face à ceux que le spectacle de la destruction facile réjouit et que nous sommes aux côtés de tous ceux qui doivent rebâtir. Ce texte est une brique essentielle pour effacer les stigmates des émeutes et permettre à chacun de repartir rapidement de l’avant, mais, je le concède bien volontiers, il n’est qu’une partie de la réponse. S’agissant des causes des violences et des décisions nécessaires pour éviter que de tels événements ne se reproduisent à l’avenir, il nous faut évidemment en débattre, mais ce débat est renvoyé à la rentrée. (M. Maxime Minot s’exclame.)
Le droit actuel fournit déjà une partie de l’arsenal dont nous avons besoin pour reconstruire… C’est sûr, tout va bien ! …comme le montre la circulaire prise il y a deux semaines par la Première ministre, qui mobilise pleinement les outils existants pour la réalisation des opérations de reconstruction et de réfection des immeubles détruits ou endommagés. Il est cependant impératif d’aller plus loin pour faciliter la reconstruction. Tel est l’objet des trois articles du projet de loi, qui autorisent le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance, les mesures nécessaires.
En ce qui concerne, tout d’abord, la reconstruction à l’identique, elle est juridiquement possible aujourd’hui à condition qu’aucune adaptation du bâtiment ne soit envisagée pour des raisons de sécurité ou d’exigence environnementale. Nous devons donc faire en sorte que les nouveaux impératifs de sécurité et les nouvelles normes environnementales soient pris en compte dans la loi pour toute reconstruction à l’identique.
De même, nous proposons d’autoriser le commencement des travaux préparatoires, tels que les démolitions, le terrassement ou l’installation du chantier, alors même que la délivrance d’autorisation est en cours d’instruction. Cela permettra de gagner un temps précieux. Il faut également accélérer les procédures d’autorisation administrative, ce qui ne revient pas à supprimer les instructions mais à les mener dans un temps restreint – en somme, il faut préserver les équilibres tout en favorisant la reconstruction. L’objectif est par ailleurs de faciliter la reconstruction du bâti public, ce qui passe par une accélération des procédures des marchés publics de travaux en dérogeant aux obligations de publicité préalable et en permettant un usage plus étendu des marchés de conception-réalisation.
En ce qui concerne le financement des travaux, nous proposons de rendre possible la mobilisation du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) pour les collectivités et leurs groupements dès l’année de son versement, mais aussi de déroger à la règle d’une participation minimum de 20 % des collectivités maîtres d’œuvre et de supprimer le plafond des fonds de concours versés par les intercommunalités afin de leur permettre d’accompagner les collectivités concernées.
Certains, sans doute, s’interrogeront sur l’étendue de ces dérogations. Personne ! Elles sont extrêmement limitées, puisqu’elles concernent uniquement les bâtiments et les équipements publics touchés entre le 27 juin et le 5 juillet. Pour ces derniers, le projet de loi a pour objectif de limiter les difficultés éventuelles dans le processus de reconstruction. Si, en outre, l’ambition du Gouvernement est que les mesures du projet de loi entrent en vigueur dès que possible, le Conseil d’État devra tout d’abord être saisi et les quelques trous qui subsistent dans la raquette devront être comblés en concertation avec les associations d’élus.
Quant à la question budgétaire, enfin, l’examen de ce texte ne doit pas préempter le futur débat sur le partage de l’effort de reconstruction,… C’est dommage, il y a urgence ! …et ce, pour deux raisons. D’une part, nous ne connaissons pas le montant consolidé des dégâts. Les collectivités ont jusqu’au 30 septembre pour transmettre la liste des dommages qu’elles ont subis. D’ici là, les préfets assumeront l’évaluation de leur montant. D’autre part, lorsque nous aurons connaissance du montant des dégâts, nous devrons commencer par défalquer les sommes dues par les assurances. Ce n’est qu’à ce moment-là que nous pourrons aborder la question de la participation des émeutiers ou de leurs parents au remboursement des dégâts. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.) La parole est à M. Jean-Paul Mattei, rapporteur de la commission des affaires économiques. Si les violences urbaines qui se sont déroulées entre le 27 juin et le 5 juillet dernier nous conduisent à nous interroger sur diverses politiques publiques, elles nous imposent, dans l’urgence, de veiller à la continuité et à la stabilité de l’ordre et du service publics. Dès lors, il est impératif de réparer dans les plus brefs délais les équipements publics, les quelque 750 bâtiments publics et trois fois plus de bâtiments privés dégradés au cours de ces événements.
Si nous ne connaissons pas la répartition exacte de ces dégradations, ni leur ampleur et leur gravité, il est certain que de nombreux travaux devront être rapidement lancés pour permettre leur réfection ou leur reconstruction complète. C’est à cette tâche impérieuse et urgente que s’emploie le projet de loi, alors même que le Gouvernement a déjà mis en œuvre, grâce à deux circulaires de la Première ministre, de premières mesures d’accélération.
Le projet de loi se compose de trois articles d’habilitation, qui portent chacun sur une composante essentielle des travaux de reconstruction. En effet, bien que le temps presse, ces mesures dérogatoires nécessiteront un travail d’expertise approfondi, qui justifie le recours à des ordonnances, avec un délai limite de publication fixé à brève échéance. La rédaction des habilitations qui nous est présentée, sur laquelle nos collègues sénateurs, dont je salue le travail, se sont déjà prononcés, est précise et ciblée. Elle permettra des dérogations circonscrites et limitées.
L’article 1er habilite le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance, les mesures propres à accélérer la reconstruction et la réfection des bâtiments dégradés lors des violences urbaines : d’abord, pour autoriser leur reconstruction à l’identique ou sous réserve de modifications limitées et d’améliorations justifiées, même si les règles d’urbanisme en vigueur s’y opposent ; ensuite, pour permettre l’engagement des travaux préliminaires avant la délivrance de l’autorisation d’urbanisme ou la décision de non-opposition à déclaration préalable ; enfin, pour accélérer – en passant, par exemple, de six mois à six semaines – le traitement des demandes d’autorisation d’urbanisme, y compris la consultation des différentes instances ou autorités impliquées dans leur délivrance.
L’article 2 habilite le Gouvernement à instaurer un régime dérogatoire à certaines règles de la commande publique pour les marchés de travaux. Ces dérogations permettraient aux acheteurs publics, premièrement, de passer des marchés publics sans publicité, mais avec mise en concurrence, pour des travaux dont le montant serait inférieur à un seuil défini dans l’ordonnance, qui serait nettement supérieur au droit commun de 100 000 euros. Deuxièmement, ces dérogations permettraient aux acheteurs publics de ne pas allotir leurs marchés. Dans certains cas, cette faculté pourrait permettre un gain de plusieurs mois.
L’article 3 habilite le Gouvernement à faciliter le financement par les collectivités territoriales des travaux de réparation et de reconstruction nécessaires. Il s’agira, tout d’abord, de déterminer les modalités particulières de versement aux bénéficiaires du FCTVA au titre des dépenses éligibles et de permettre ainsi le versement contemporain du FCTVA en année n. Ensuite, l’article prévoit de déroger à l’exigence de participation minimale des collectivités territoriales maîtres d’ouvrage au financement de leurs projets d’investissement pour leur permettre de bénéficier de subventions représentant jusqu’à 100 % du coût des travaux.
Ces dispositifs permettront une véritable facilitation et une accélération du financement des travaux et contribueront à soulager les collectivités, confrontées à des tensions de trésorerie. Ils accompagnent donc utilement la mise en place du fonds de financement des travaux prévu par la circulaire de la Première ministre. J’estime que ces dispositions sont nécessaires et proportionnées, et je vous propose, comme la commission des affaires économiques, qui s’est réunie hier, d’adopter le projet de loi sans modification. Nous sommes d’accord ! Bien sûr, vous l’avez dit monsieur le ministre, au-delà du travail de reconstruction, la restauration de nos quartiers doit faire l’objet d’un processus de long terme et nous devrons examiner plus largement les problématiques de ces territoires. Cela fait trente ans qu’on les examine ! Reste que le projet de loi nous permet d’aborder utilement les problèmes les plus urgents. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. Guillaume Kasbarian, président de la commission des affaires économiques, applaudit également.)
Dans la continuité immédiate de ces événements, après que près de 500 communes ont été touchées à un titre ou à un autre, le Président de la République a reçu à l’Élysée les maires concernés et il a pris l’engagement que des mesures législatives permettent d’accélérer la reconstruction. Le présent projet de loi est l’occasion de tenir parole et de faire un geste de soutien unanime en faveur de nos élus, de nos services publics et des habitants frappés par les nuits d’émeutes et de violences urbaines. Les mesures de ce texte faciliteront la reconstruction matérielle des bâtiments dégradés ou détruits.
Le projet de loi a été adopté à l’unanimité avant-hier, mardi 18 juillet, au Sénat. Je ne doute pas que le sens de l’intérêt général que nous avons en partage, ainsi que la volonté de ne pas laisser le dernier mot aux émeutiers, conduiront votre assemblée à l’adopter également à l’unanimité – du moins, je l’espère. Ce projet de loi répond de manière concrète et limitée, non pas aux causes, mais aux conséquences des émeutes.
Au total, dans l’ensemble du territoire, ont été attaqués : 274 commissariats, brigades de gendarmerie et postes de police municipale, 105 mairies, 243 établissements scolaires, 47 établissements relevant du ministère de la justice, 3 centres hospitaliers, mais aussi des bus, des trams, des médiathèques, des maisons de quartier, une crèche, des gymnases, des maisons de la culture et même des locaux associatifs – autant d’équipements et de services essentiels, au service de nos concitoyens, pour lesquels nos collectivités et la collectivité nationale que nous formons ont beaucoup investi dans la durée, pour l’avenir de tous.
Et, bien sûr, il y a eu les attaques ignobles, inqualifiables, contre les forces de l’ordre, contre les pompiers appelés pour secourir et contenir les destructions, contre les élus et leurs familles. Ils sont tous l’incarnation de notre République et ont été ciblés comme tels.
Je n’oublie pas les 1 000 commerces vandalisés et pillés, les gérants de café, les employés et les propriétaires de commerces de proximité, les pharmaciens, bref toutes celles et ceux qui mènent une vie droite et honnête et qui pourtant, durant ces nuits, ont perdu le fruit de leur labeur : un emploi, un outil de travail, un véhicule, quand ce n’était pas les économies d’une vie.
Le projet de loi me donne l’occasion de dire que nous ne lâchons rien face à ceux que le spectacle de la destruction facile réjouit et que nous sommes aux côtés de tous ceux qui doivent rebâtir. Ce texte est une brique essentielle pour effacer les stigmates des émeutes et permettre à chacun de repartir rapidement de l’avant, mais, je le concède bien volontiers, il n’est qu’une partie de la réponse. S’agissant des causes des violences et des décisions nécessaires pour éviter que de tels événements ne se reproduisent à l’avenir, il nous faut évidemment en débattre, mais ce débat est renvoyé à la rentrée. (M. Maxime Minot s’exclame.)
Le droit actuel fournit déjà une partie de l’arsenal dont nous avons besoin pour reconstruire… C’est sûr, tout va bien ! …comme le montre la circulaire prise il y a deux semaines par la Première ministre, qui mobilise pleinement les outils existants pour la réalisation des opérations de reconstruction et de réfection des immeubles détruits ou endommagés. Il est cependant impératif d’aller plus loin pour faciliter la reconstruction. Tel est l’objet des trois articles du projet de loi, qui autorisent le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance, les mesures nécessaires.
En ce qui concerne, tout d’abord, la reconstruction à l’identique, elle est juridiquement possible aujourd’hui à condition qu’aucune adaptation du bâtiment ne soit envisagée pour des raisons de sécurité ou d’exigence environnementale. Nous devons donc faire en sorte que les nouveaux impératifs de sécurité et les nouvelles normes environnementales soient pris en compte dans la loi pour toute reconstruction à l’identique.
De même, nous proposons d’autoriser le commencement des travaux préparatoires, tels que les démolitions, le terrassement ou l’installation du chantier, alors même que la délivrance d’autorisation est en cours d’instruction. Cela permettra de gagner un temps précieux. Il faut également accélérer les procédures d’autorisation administrative, ce qui ne revient pas à supprimer les instructions mais à les mener dans un temps restreint – en somme, il faut préserver les équilibres tout en favorisant la reconstruction. L’objectif est par ailleurs de faciliter la reconstruction du bâti public, ce qui passe par une accélération des procédures des marchés publics de travaux en dérogeant aux obligations de publicité préalable et en permettant un usage plus étendu des marchés de conception-réalisation.
En ce qui concerne le financement des travaux, nous proposons de rendre possible la mobilisation du fonds de compensation pour la TVA (FCTVA) pour les collectivités et leurs groupements dès l’année de son versement, mais aussi de déroger à la règle d’une participation minimum de 20 % des collectivités maîtres d’œuvre et de supprimer le plafond des fonds de concours versés par les intercommunalités afin de leur permettre d’accompagner les collectivités concernées.
Certains, sans doute, s’interrogeront sur l’étendue de ces dérogations. Personne ! Elles sont extrêmement limitées, puisqu’elles concernent uniquement les bâtiments et les équipements publics touchés entre le 27 juin et le 5 juillet. Pour ces derniers, le projet de loi a pour objectif de limiter les difficultés éventuelles dans le processus de reconstruction. Si, en outre, l’ambition du Gouvernement est que les mesures du projet de loi entrent en vigueur dès que possible, le Conseil d’État devra tout d’abord être saisi et les quelques trous qui subsistent dans la raquette devront être comblés en concertation avec les associations d’élus.
Quant à la question budgétaire, enfin, l’examen de ce texte ne doit pas préempter le futur débat sur le partage de l’effort de reconstruction,… C’est dommage, il y a urgence ! …et ce, pour deux raisons. D’une part, nous ne connaissons pas le montant consolidé des dégâts. Les collectivités ont jusqu’au 30 septembre pour transmettre la liste des dommages qu’elles ont subis. D’ici là, les préfets assumeront l’évaluation de leur montant. D’autre part, lorsque nous aurons connaissance du montant des dégâts, nous devrons commencer par défalquer les sommes dues par les assurances. Ce n’est qu’à ce moment-là que nous pourrons aborder la question de la participation des émeutiers ou de leurs parents au remboursement des dégâts. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.) La parole est à M. Jean-Paul Mattei, rapporteur de la commission des affaires économiques. Si les violences urbaines qui se sont déroulées entre le 27 juin et le 5 juillet dernier nous conduisent à nous interroger sur diverses politiques publiques, elles nous imposent, dans l’urgence, de veiller à la continuité et à la stabilité de l’ordre et du service publics. Dès lors, il est impératif de réparer dans les plus brefs délais les équipements publics, les quelque 750 bâtiments publics et trois fois plus de bâtiments privés dégradés au cours de ces événements.
Si nous ne connaissons pas la répartition exacte de ces dégradations, ni leur ampleur et leur gravité, il est certain que de nombreux travaux devront être rapidement lancés pour permettre leur réfection ou leur reconstruction complète. C’est à cette tâche impérieuse et urgente que s’emploie le projet de loi, alors même que le Gouvernement a déjà mis en œuvre, grâce à deux circulaires de la Première ministre, de premières mesures d’accélération.
Le projet de loi se compose de trois articles d’habilitation, qui portent chacun sur une composante essentielle des travaux de reconstruction. En effet, bien que le temps presse, ces mesures dérogatoires nécessiteront un travail d’expertise approfondi, qui justifie le recours à des ordonnances, avec un délai limite de publication fixé à brève échéance. La rédaction des habilitations qui nous est présentée, sur laquelle nos collègues sénateurs, dont je salue le travail, se sont déjà prononcés, est précise et ciblée. Elle permettra des dérogations circonscrites et limitées.
L’article 1er habilite le Gouvernement à prendre, par voie d’ordonnance, les mesures propres à accélérer la reconstruction et la réfection des bâtiments dégradés lors des violences urbaines : d’abord, pour autoriser leur reconstruction à l’identique ou sous réserve de modifications limitées et d’améliorations justifiées, même si les règles d’urbanisme en vigueur s’y opposent ; ensuite, pour permettre l’engagement des travaux préliminaires avant la délivrance de l’autorisation d’urbanisme ou la décision de non-opposition à déclaration préalable ; enfin, pour accélérer – en passant, par exemple, de six mois à six semaines – le traitement des demandes d’autorisation d’urbanisme, y compris la consultation des différentes instances ou autorités impliquées dans leur délivrance.
L’article 2 habilite le Gouvernement à instaurer un régime dérogatoire à certaines règles de la commande publique pour les marchés de travaux. Ces dérogations permettraient aux acheteurs publics, premièrement, de passer des marchés publics sans publicité, mais avec mise en concurrence, pour des travaux dont le montant serait inférieur à un seuil défini dans l’ordonnance, qui serait nettement supérieur au droit commun de 100 000 euros. Deuxièmement, ces dérogations permettraient aux acheteurs publics de ne pas allotir leurs marchés. Dans certains cas, cette faculté pourrait permettre un gain de plusieurs mois.
L’article 3 habilite le Gouvernement à faciliter le financement par les collectivités territoriales des travaux de réparation et de reconstruction nécessaires. Il s’agira, tout d’abord, de déterminer les modalités particulières de versement aux bénéficiaires du FCTVA au titre des dépenses éligibles et de permettre ainsi le versement contemporain du FCTVA en année n. Ensuite, l’article prévoit de déroger à l’exigence de participation minimale des collectivités territoriales maîtres d’ouvrage au financement de leurs projets d’investissement pour leur permettre de bénéficier de subventions représentant jusqu’à 100 % du coût des travaux.
Ces dispositifs permettront une véritable facilitation et une accélération du financement des travaux et contribueront à soulager les collectivités, confrontées à des tensions de trésorerie. Ils accompagnent donc utilement la mise en place du fonds de financement des travaux prévu par la circulaire de la Première ministre. J’estime que ces dispositions sont nécessaires et proportionnées, et je vous propose, comme la commission des affaires économiques, qui s’est réunie hier, d’adopter le projet de loi sans modification. Nous sommes d’accord ! Bien sûr, vous l’avez dit monsieur le ministre, au-delà du travail de reconstruction, la restauration de nos quartiers doit faire l’objet d’un processus de long terme et nous devrons examiner plus largement les problématiques de ces territoires. Cela fait trente ans qu’on les examine ! Reste que le projet de loi nous permet d’aborder utilement les problèmes les plus urgents. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. Guillaume Kasbarian, président de la commission des affaires économiques, applaudit également.)
Dans la discussion générale, la parole est à M. Thibault Bazin.
Nous voici réunis ce matin en séance pour examiner le projet de loi permettant l’accélération de la reconstruction des bâtiments dégradés ou démolis au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet 2023, adopté à l’unanimité par le Sénat avant-hier.
Monsieur le ministre délégué, vous avez retiré, à raison, un quatrième article, prévu initialement, qui aurait rendu le projet de loi inacceptable. Visant à faciliter les expropriations dans les copropriétés dégradées, cet article aurait porté une atteinte trop importante au droit de la propriété. Mais oui ! Merci d’y avoir renoncé afin de permettre une adoption conforme de ce projet de loi. Tout à fait. Les violences urbaines et émeutes survenues du 27 juin au 5 juillet nous ont profondément scandalisés. Les dégâts sont énormes. Leur ampleur est considérable : plus de 500 communes concernées, plus de 800 bâtiments dégradés. S’en prendre à des dépositaires de la force publique, à des proches d’élus est intolérable.
J’ai une pensée pour l’épouse et les enfants de M. Vincent Jeanbrun, maire de L’Haÿ-les-Roses.
S’en prendre à des commissariats, des brigades de gendarmerie, des mairies, des établissements scolaires, des bibliothèques, des maisons de quartier, des centres hospitaliers, des crèches, des cafés, des pharmacies est inadmissible. C’est un scandale ! Les auteurs doivent être poursuivis et sanctionnés ; et je le dis haut et fort devant la représentation nationale, ces auteurs devront aussi participer au financement des reconstructions par des amendes pénales. Ils devront également y contribuer par des travaux d’intérêt général (TIG), et, pour les mineurs, la responsabilité de leurs parents devra aussi être engagée quand cela sera justifié ; c’est une question de justice. Exact. Cela étant dit, il nous faut rétablir dans les meilleurs délais la continuité des services publics sur l’ensemble de notre territoire. Cela passe par la reconstruction des bâtiments et équipements publics. Il y a urgence, notamment pour les écoles, au regard de l’échéance de la prochaine rentrée scolaire.
Pour construire, il faut obtenir des autorisations, passer des marchés et trouver les financements. Assurément, ce projet de loi répond à des besoins d’allègement des procédures, de réduction des délais, d’assouplissement des règles pour bénéficier de financements. Nous soutiendrons ces mesures. En effet, le droit actuel ne permettrait pas la reconstruction à l’identique de la totalité des biens dégradés ou détruits ni de sécuriser tous les donneurs d’ordre pour accélérer les marchés publics. Même si ce projet de loi ne prévoit pas de financement direct par l’État de ces reconstructions, la possibilité de bénéficier du remboursement anticipé du FCTVA dès cette année – qu’il faudrait d’ailleurs généraliser pour toutes les collectivités –,… Très juste ! …, de bénéficier de 100 % de subventions ainsi que de déplafonner les fonds de concours des intercommunalités permettra aux acteurs publics locaux de trouver des solutions de financement.
Concernant les commerces et services tels les cafés ou pharmacies qui ont été vandalisés, il faudra peut-être aussi les accompagner s’ils ne sont pas couverts totalement par leur assurance. Il en va de même pour les communes qui n’ont pas souscrit d’assurance contre les émeutes. Tout à fait ! Permettez-moi aussi d’évoquer les particuliers dont les biens ont été dégradés – notamment ceux qui ont vu leur voiture partir en fumée. Il faut penser à eux ! J’exhorte les assurances à trouver les solutions avec l’État pour les indemniser au mieux, au terme d’expertises rapides. Ces victimes ne doivent pas être abandonnées à leur sort. Exact ! Reste la question du financement par l’État de ses propres bâtiments dégradés. D’ici l’automne, un chiffrage devra être produit. Il faudra l’accompagner de mesures de sûreté pour mieux protéger ces bâtiments d’État tels que la trésorerie, sûrement par le déploiement de la vidéoprotection.
Alors que notre pays va connaître une très grave crise de la construction, et que d’autres espaces que ceux touchés par les émeutes du 27 juin au 5 juillet sont concernés par des besoins de reconstruction, il apparaît par ailleurs nécessaire que le Gouvernement engage à la sortie de l’été une réforme structurante de simplification de l’urbanisme et des marchés. En effet, après les énergies renouvelables, les installations nucléaires et l’industrie verte, il s’agit déjà du quatrième projet de loi illustrant la nécessité d’alléger nos contraintes urbanistiques en l’espace d’un an. Eh oui ! Ce besoin de légiférer pour permettre un traitement accéléré souligne la longueur des délais de droit commun ainsi que la lourdeur et la complexité des procédures de droit commun, ce qui freine le développement en France. Exact ! Les trois articles dans la version du projet que nous examinons ce matin consistent en des habilitations du Gouvernement à légiférer par ordonnance. Nous n’apprécions pas la méthode, mais elle tend à être justifiée, dans le contexte actuel, par l’ambition d’aller vite et bien sur des sujets techniques. Très bien ! L’urgence est indéniable. Les lacunes dans le droit existant sont indéniables. Ce sont les raisons pour lesquelles notre groupe prendra ses responsabilités et soutiendra ces dispositions en espérant un vote conforme.
Cependant, le moment venu, nous invitons le Gouvernement à présenter ses ordonnances au Parlement pour les ratifier, car la pratique inverse est de plus en plus observée.
Nous invitons surtout le Gouvernement à les présenter au plus vite en Conseil des ministres, si possible avant la pause estivale pour l’article 2, afin de ne pas perdre le temps que les dispositions dérogatoires contenues dans cet article devraient nous permettre de gagner. Cela permettrait de passer les marchés publics le plus rapidement possible.
Enfin, ce projet de loi se borne à faciliter la reconstruction matérielle. Cela ne suffira pas à nous éviter de revivre de tels événements. Eh oui, il a raison ! Il faudra s’atteler aux causes de ces violences commises contre les symboles de notre République afin que cela ne se reproduise plus.
Nous invitons donc également le Gouvernement à engager au plus vite une restauration de l’autorité à différents niveaux et à défendre une ambition d’intégration républicaine fondée sur le partage d’un destin commun animé par l’amour de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur les bancs des commissions.) La parole est à M. Thierry Benoit. Le groupe Horizons, au nom duquel je m’exprime, soutiendra naturellement votre projet de loi… Quelle surprise ! On ne s’y attendait pas. …en espérant une adoption conforme, par souci de rapidité d’exécution et d’efficacité.
Ce texte, qui nous ramène à une actualité brûlante et déchirante, se passe de grands discours et de grands mots. C’est un texte de reconstruction, un texte de réparation matérielle… Il faudrait un texte de sanctions ! …qui vise, dans la mesure du possible, à permettre à la vie de reprendre son cours dans les quartiers où des violences urbaines et des émeutes ont eu lieu. Un chiffre en particulier m’interpelle : 243 établissements scolaires ont été dégradés. À lui seul, il nous confronte à la grave réalité du niveau de tension auquel est soumis notre pays depuis de nombreux mois, voire de nombreuses années.
Il s’agit donc de réparer les écoles, les équipements culturels et sportifs, nombre de services – dont ceux de la petite enfance, comme les crèches –, mais aussi des bâtiments publics tels que les mairies, sans oublier l’arsenal de bâtiments privés, de particuliers et de commerces qui ont été dégradés.
Le texte nous donne les moyens d’intervenir sur les équipements, les bâtiments et les infrastructures. Nos débats porteront sur trois domaines. Le premier est le code de l’urbanisme, puisqu’il s’agit de reconstruire à l’identique – avec les règles qui prévalent en 2023 –, tout en saisissant, au passage, les occasions d’en améliorer les aspects liés à la transition énergétique, à la sécurité et à l’accessibilité.
Le deuxième domaine nous amènera à modifier le code des marchés publics ; si la publicité n’est pas obligatoire, nous pourrons faire entièrement confiance aux maires de nos communes pour mettre en concurrence les différents corps de métiers qui seront sollicités. Par ailleurs, ce texte nous offre l’occasion de faire œuvre de simplification en matière de délais d’instruction des permis de construire et d’urbanisme.
Le troisième domaine où nous allons intervenir est celui du financement, en gardant comme trajectoire et comme objectif le zéro reste à charge pour les communes. Nous devrons aussi réfléchir à l’adaptation à la réglementation européenne : vous pourrez revenir, monsieur le ministre délégué, sur le seuil maximal des marchés publics exonérés de publicité de 1,5 million d’euros que vous avez évoqué en commission. De même, si la règle commune fixe à 80 % le montant maximal de subventions que peuvent toucher les collectivités, il faudra cependant aller au-delà pour que le reste à charge soit effectivement égal à zéro. Enfin, nous devrons étudier la question du fonds de compensation de la TVA – que tous les élus connaissent – qui suppose de passer de la récupération en année n + 2 à une récupération immédiate de la TVA.
Une fois ce texte voté, il nous restera à identifier les responsabilités des auteurs de ces dégradations, et à les faire participer – ainsi que leurs parents – aux réparations, sous une forme ou une autre. Il nous faudra aussi évaluer le montant total des dégradations et vérifier quelle est la prise en charge réelle par les assurances.
Pour conclure, au-delà de la réparation matérielle, nous devons réfléchir à la réparation immatérielle et morale – je reprends les mots que j’ai utilisés en commission. La question qui se pose à la France, en 2023, c’est celle du vivre ensemble. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Ah ! Puisque nous sommes députés de la nation et que j’ai la chance de siéger dans cet hémicycle depuis seize ans, je le dis humblement et modestement : nous avons chacun, en tant que représentants de la nation, une forme de responsabilité quant à l’image que nous donnons des relations humaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.) On ne peut pas passer son temps à chauffer à blanc une certaine partie des Français puis s’étonner que, dans nos quartiers,… Très bien ! …quelles que soient nos origines, notre catégorie sociale, nos conditions de vie, nous soyons amenés à ne plus nous comprendre.
Nous devons donc nous parler raisonnablement et respectueusement, car c’est ainsi que nous nous comprendrons et que nous parviendrons à construire le vivre ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.) La parole est à Mme Sabrina Sebaihi. Un mort de plus, un mort de trop : le jeune Nahel a été tué le 27 juin dernier à Nanterre par un officier de police lors d’un contrôle routier, à la suite d’un refus d’obtempérer, et quelques mois après Alhoussein Camara, tué dans les mêmes circonstances en banlieue d’Angoulême. Comme en 2005, après la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré, comme en 2007 à Villiers-le-Bel, comme en 2017 après la mutilation de Théo lors de son arrestation, la colère et l’émoi se sont cristallisés dans les violences.
Bien évidemment, nul d’entre nous n’approuvera ces violences, ces pillages, ces destructions d’édifices, notamment publics. Nous ne tolérerons pas non plus la violence contre les élus locaux, toujours en première ligne. C’est bien de l’entendre ! Cependant, votre réponse ne peut se réduire à la matraque pour les quartiers et au chéquier pour les dégâts. D’année en année, de violence en violence, les conséquences ont toujours été perçues à travers le prisme sécuritaire, tandis que les causes, elles, ont continué à mûrir et à produire au fil du temps des fractures de plus en plus béantes dans notre société.
On compte aujourd’hui 5 millions de nos concitoyens vivant dans l’un des 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville. Quelle est la vision pour ces quartiers ? Où en sont les promesses de justice sociale et d’égalité républicaine ? Dans ces quartiers, 40 % de la population est en situation de pauvreté et 45 % des jeunes sont au chômage ; il y a deux fois moins de professionnels de santé par habitant que sur l’ensemble du territoire national, moins de bureaux de poste, de maisons de justice ou encore de transports. Allez voir ce qu’il en est dans la ruralité, un petit peu ! À cet abandon de la population s’ajoute un abandon des municipalités. De quand date le dernier budget ambitieux de soutien aux collectivités territoriales ? On a consacré 100 milliards aux quartiers ! Cette année encore, le projet de loi de finances qui semble se présager annonce fièrement une augmentation de 1 milliard pour la dotation globale de fonctionnement (DGF), carburant financier de l’État à destination des municipalités. C’est la gauche qui dit ça ! Mais ce milliard ne viendra même pas compenser la moitié de l’inflation et des baisses systématiques de la DGF. C’est faux ! C’est faux ; vous souvenez-vous de l’époque où vous étiez alliée au parti socialiste ? En réalité, nous connaîtrons à nouveau une baisse cette année, qui se traduira concrètement dans nos villes et nos quartiers par des activités culturelles moins nombreuses, par l’arrêt des subventions municipales, par la fermeture d’équipements sportifs et par des réductions d’effectifs. (M. Erwan Balanant s’exclame.) Chers collègues, seule Mme Sebaihi a la parole. La DGF, ce n’est pas n’importe quelle dotation : c’est celle qui donne les outils aux maires pour combler les lacunes de l’État, pour que chacun, qu’il habite le 15e arrondissement de Paris, la cité Pablo-Picasso à Nanterre ou le quartier de l’Ariane à Nice se sente égal aux autres membres de la société, lié à eux par un destin commun ; pour que chacun puisse s’émanciper, travailler et vivre sur une même base d’égalité. Bien évidemment, l’urgence est de reconstruire – et de reconstruire vite. C’est une demande des élus locaux et notre devoir est d’y répondre. (Exclamations sur divers bancs.) Seule Mme Sebaihi a la parole, s’il vous plaît. Nos écoles, nos mairies, nos commissariats, nos commerces de proximité, nos centres sociaux doivent être opérationnels au plus vite, pour que les habitants puissent en bénéficier au plus tôt – car ces dégradations se sont déroulées dans les quartiers où les habitants en ont le plus besoin. C’est pour cette raison que le groupe Écologiste votera ce texte ; mais ne nous contentons pas d’un simple coup de ciment par-ci ou d’une simple brique par-là ; nous devons revoir les fondations mêmes de notre République au sein de nos quartiers et de nos banlieues.
J’y insiste : la solution ne réside pas uniquement dans le logement. Lancer, par exemple, un nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), bras armé de la politique de la ville, sans l’accord des habitants, parfois même contre eux, sans accompagnement social, sans refondation complète des politiques dans ces quartiers, ne recollera pas les morceaux.
Enfin, reconstruire offre une occasion de faire mieux. L’état énergétique du parc public comme privé ne répond pas aux normes environnementales et énergétiques les plus performantes. Dans des tours qui sont des fours en été et des congélateurs en hiver, il faut s’attaquer à la rénovation énergétique. Alors que les services publics sont inaccessibles, que les personnes en situation de handicap luttent parfois pour franchir le seuil d’un bureau de poste, il faut s’attaquer au chantier de l’accessibilité. Dans des quartiers où le bus ne passe qu’une fois par heure, il faut s’attaquer au chantier de la mobilité. Dans une France qui n’a jamais été aussi antagoniste, en proie aux chimères sécuritaires et discriminantes de l’extrême droite,… Ah ! Quinze minutes de débat avant qu’on parle de l’extrême droite ! …investissons massivement dans l’éducation, l’emploi, la culture, l’insertion. En somme, investissons dans l’émancipation,… Elle a raison ! …afin d’éviter que le prochain mort ne mène à des drames plus tragiques encore. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Je vois que cela vous émeut – vous devriez effectivement chercher à comprendre ce qui s’est passé, car, en vérité, ce n’est pas anodin. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)
Votre comportement montre que vous n’avez rien compris à ce qui s’est passé ces dernières semaines. (Mêmes mouvements.) Vous feriez mieux d’écouter, de comprendre le message qui a été donné,… On a bien compris ! …afin de réparer la société française et ne pas laisser la situation perdurer. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Hubert Wulfranc. Les mesures présentées en urgence dans le cadre de ce projet de loi sur la reconstruction des bâtiments dégradés ou démolis du 27 juin au 5 juillet sont très attendues par les élus locaux et par l’ensemble des administrés concernés.
Le groupe GDR-NUPES considère ces dispositions comme strictement nécessaires. En outre, la reconstruction ouvre la possibilité d’améliorer les conditions d’accueil, la qualité environnementale et la sécurité des lieux qui abritent les services publics de proximité. L’accélération et la simplification des procédures permettront de réaliser les travaux le plus rapidement possible. Très bien ! Des dispositions particulières autoriseront les collectivités territoriales à disposer de subventions dérogatoires aux règles en vigueur.
Ces mesures, qui sont strictement nécessaires et qui seront précisées avec sérieux dans les ordonnances qui suivront, sont-elles suffisantes ?
D’un point de vue strictement financier, rien ne garantit que les communes ne verront pas leur budget d’investissement largement amputé par les engagements auxquels elles devront faire face.
Le maire de la petite ville de Mont-Saint-Martin, en Meurthe-et-Moselle,… C’est chez les voisins, ça ! …a invité le Président de la République à venir prendre la mesure des dégâts : sa ville, qui subit déjà les conséquences du recul de services publics, a déploré ces dernières semaines, comme bien d’autres communes, l’incendie d’une école, d’un centre pour autistes, de la maison médicale, des locaux du club de foot, ainsi que l’attaque du collège et d’une école maternelle. Le maire est atterré, mais il souhaite aller vite : il a déjà entamé la reconstruction, comme me le disait Jean-Paul Lecoq.
Nous avons une responsabilité à l’égard de l’ensemble de ces élus et de ces populations qui s’interrogent sur l’avenir immédiat et à long terme des services publics et de leur budget, tout simplement. Ils se demandent s’ils pourront satisfaire rapidement aux besoins quotidiens des habitants.
Or nous estimons que le projet de loi ne répond que très partiellement à ces interrogations.
Dans une séquence longue particulièrement délicate pour les collectivités locales, en particulier pour les communes populaires, la question des dotations, en particulier de la dotation globale de fonctionnement, est à nouveau légitimement posée. La proposition du groupe GDR-NUPES visant à indexer la DGF sur l’inflation, récemment défendue par Jean-Marc Tellier, n’en prend que plus de relief.
Plus fondamentalement, réparer les bâtiments qui hébergent les services publics de proximité mentionnés par les différents orateurs, ce n’est pas réparer le service public. Vous êtes très sévèrement attendus sur ce point, alors que, comme nous vous l’avons constamment rappelé, vous n’avez cessé d’aggraver la situation des services publics en adoptant à leur égard une logique de rigueur et d’attrition, budget après budget. Nous nous y opposerons de nouveau à la prochaine rentrée.
Nous déplorons l’absence dans ce projet de loi de toute mesure concernant le secteur assurantiel. À nos yeux, il est absolument nécessaire de mettre à contribution et de responsabiliser les compagnies d’assurances afin de garantir la réparation intégrale des dommages subis par les particuliers, par les associations et les organismes de logement notamment.
Actuellement, la loi pose pour principe, selon les termes de l’article L 121-8 du code des assurances, que « [l]’assureur ne répond pas […] des pertes et dommages occasionnés […] par des émeutes ou par des mouvements populaires ». Nous avions déposé un amendement visant à rendre obligatoire la couverture intégrale de ces risques et un autre tendant à instaurer une contribution exceptionnelle des compagnies d’assurances afin d’alimenter un fonds destiné à indemniser les particuliers et les associations victimes de dégradations. Nous regrettons profondément que ces amendements aient été déclarés irrecevables.
Comme je le disais, ce projet de loi est attendu par les élus locaux. Il devra être suivi très rapidement, en particulier lors des débats budgétaires de l’automne, d’autres dispositions financières. Nous aurons donc l’occasion de vous demander à nouveau des comptes sur votre politique.
Pour en revenir au projet de loi que nous examinons dans les derniers jours de la session extraordinaire, nous vous annonçons notre vote efficace et sobre en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE et LR.) Très bien ! La parole est à M. Benjamin Saint-Huile. La colère, si légitime et partagée soit-elle, ne pourra jamais justifier les violences aveugles et sourdes perpétrées partout sur le territoire national il y a quelques semaines.
L’émotion qui s’est emparée du pays après la mort d’un jeune homme prénommé Nahel à Nanterre est légitime. Elle soulève des interrogations ; le travail des enquêteurs et de la justice permettra de faire la lumière sur les conditions qui ont conduit à cette situation inacceptable.
Néanmoins, le temps n’est pas venu – fort heureusement – pour que reprenne le concours des petites phrases, des déclarations faciles, de la caricature. Nous savons, nous qui sommes en prise avec la réalité du quotidien – un certain nombre d’entre nous avons administré des communes –, quel choc c’est pour nos concitoyens de voir disparaître dans ces moments de violence, des lieux d’apprentissage, de culture, ces lieux qui manifestent la République, qui font sens et qui définissent le vivre ensemble. (Murmures sur les bancs du groupe RN.)
Nous ne pouvons pas accepter une seule seconde que soit remise en cause la capacité qu’a chacun de s’appuyer sur un service public fort qui accompagne tous les citoyens de France, aussi bien les plus fragiles, les plus éloignés des services du quotidien, que ceux qui vivent à leur proximité. Nous avons été profondément marqués et meurtris par ces moments qui ont soustrait à nos populations ce bien que certains n’ont que trop peu, les manifestations concrètes de la capacité à vivre ensemble à travers les outils de la République, qu’ils soient portés par l’État lui-même ou par les collectivités. Notre pays devra s’interroger sur les réponses à apporter à cet épisode si violent.
Une fois encore, nous devons rappeler que dans un pays comme le nôtre, avec pour seules boussoles la République et l’intérêt général, il n’est plus acceptable de voir les forces de sécurité remises en cause de manière systémique, de voir les sapeurs-pompiers en intervention se faire caillasser dans certaines parcelles de la République. Très juste ! En disant cela, nous n’affirmons pas que la seule réponse soit le renforcement de l’ordre. Il faut de l’ordre ! Droits et devoirs ! Nous savons, nous qui sommes en prise avec les populations, qu’une réponse globale et complexe doit être construite. Elle doit répondre à une politique que certains considéreront comme trop sociale : nous devons accompagner ceux qui espèrent voir leurs enfants vivre mieux qu’ils ne vivent eux-mêmes, dans des quartiers où parfois la question de la discrimination n’est plus assez posée, où l’origine, la couleur de peau ou le prénom peuvent être un prétexte pour interroger la possibilité de vivre ensemble.
Le temps de construire cette réponse viendra. Je souhaite, sans nourrir toutefois trop d’espoir, que ce débat puisse se tenir sans verser dans la facilité ou la caricature. (Sourires sur les bancs du groupe LR.) Ça, c’est drôle ! En examinant ce projet de loi, nous tentons d’apporter une réponse immédiate à la question de la reconstruction, qui fait sens pour tout le monde et qui permet aux élus locaux de construire la République qui avance. Nous devons répondre vite et fort à ces émeutes inacceptables,… Inacceptables, c’est le mot ! …afin de permettre aux enfants d’ici et d’ailleurs d’être scolarisés dans de bonnes conditions, et à la culture de constituer un moyen d’émancipation et d’ouvrir des chemins pour la jeunesse.
Je l’affirme sincèrement, ce projet de loi est utile et nécessaire. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous l’avez dit : ce texte est la suite logique des discussions qui ont eu lieu entre les élus locaux, l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) et le Président de la République.
Certaines dispositions pourraient bien sûr être discutées et améliorées. Nous tenterons de le faire malgré le temps réduit dont nous disposons. Toutefois, le principe qui doit nous guider est la volonté de permettre une reconstruction rapide. Nous voterons les procédures d’urgence qu’autorise ce texte, tout en vérifiant ensemble que nous ne créons pas à travers elles un biais qui pourrait favoriser les grandes entreprises au détriment des très petites entreprises (TPE) ou des petites et moyennes entreprises (PME). Il a raison ! Ce sera l’un des rares sujets sur lesquels nous engagerons une discussion. Pour le reste, vous pouvez compter sur la solidarité du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et Dem, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE et HOR.) La parole est à M. Robin Reda. Au nom du groupe Renaissance, je commencerai par rendre hommage aux maires, aux élus locaux, mais aussi aux forces de police et de gendarmerie, aux pompiers, aux agents techniques des municipalités qui ont courageusement fait face aux nuits de violences fin juin, début juillet. (M. Emmanuel Lacresse applaudit.)
Les maires, en particulier ceux des plus de 500 communes frappées par des déchaînements haineux, ont assisté médusés, attristés et souvent même en colère, à la dégradation ou à la destruction de projets qu’ils avaient mis du temps à imaginer, à défendre, à financer et à construire. Ils ont assisté au pillage de commerces de proximité qui font l’âme des centres-villes. J’ai une pensée particulière pour les communes de la région Île-de-France, du département de l’Essonne et de ma circonscription, qui ont été douloureusement affectées.
Après ces émeutes traumatisantes, deux positions irréconciliables ont immédiatement émergé dans le débat public. D’une part, il y a ceux qui voudraient tout excuser, tout laisser passer ; d’autre part, il y a ceux qui voudraient tout laisser tomber. D’une part, ceux qui, au fond, auraient bien voulu que les émeutes continuent, même s’ils affirment ouvertement qu’ils préfèrent qu’on s’en prenne à des bijouteries plutôt qu’à des bibliothèques ; d’autre part, ceux qui auraient bien voulu que la réponse de l’État ne soit pas à la hauteur, afin de pouvoir faire leur beurre d’une impuissance supposée. Ce n’est pas l’heure de polémiquer ! L’État a été au rendez-vous. Police, gendarmerie, justice : le volontarisme de l’État régalien a démontré son efficacité (Exclamations sur les bancs du groupe RN) pour mettre fin à un embrasement que rien ne pouvait justifier ni excuser. C’est la quatrième dimension ! Quelles que soient les émotions qui peuvent nous saisir dans l’actualité, elles ne peuvent justifier les intimidations et les exactions. Très bien ! Nous voulons dire aux habitants des villes et des quartiers où des vitres sont brisées, des locaux de services publics brûlés, que personne ici ne les abandonnera. Nous avons résolument choisi notre camp : nous sommes aux côtés de ceux qui s’engagent, pas de ceux qui saccagent – et j’espère que ce sera le cas de tout le monde à l’issue de nos débats. Très bien ! Le projet de loi que nous allons examiner apporte une réponse rapide aux élus de nos collectivités, désemparés face aux réinvestissements qui les attendent. La simplification que nous proposons doit être une invitation à ne pas baisser les bras. L’urgence, c’est de faire flotter à nouveau le drapeau tricolore partout dans nos centres-villes et dans nos quartiers, et de montrer sans délai que la République ne se laisse pas impressionner. Nous nous engageons pour dire que la République sera toujours plus forte que les attaques qui tentent de l’affaiblir. Il serait temps ! Mes chers collègues, nous ne sommes pas ici pour rendre la justice, même si, comme tous les Français, nous sommes nombreux à espérer des sanctions effectives à l’encontre de tous ceux qui ont été identifiés parmi les casseurs des nuits de juillet. Oui, ceux qui ont cassé doivent payer. Mais ceux qui n’ont rien demandé ont, eux aussi, le droit de ne pas être les oubliés de l’affaire. Exactement ! Ils vont payer aussi ! Le ministre l’a rappelé hier lors de l’examen du texte en commission : nous donnerons à nos collectivités, à nos territoires, les moyens financiers de reconstruire. Nous ne sommes pas la majorité qui a baissé les dotations aux collectivités territoriales ; nous ne sommes pas non plus celle qui a réduit le périmètre des quartiers prioritaires de la politique de la ville, privant des centaines d’habitants de moyens, ni celle qui construit davantage encore dans des quartiers comptant déjà trop de logements sociaux. Nous sommes la majorité de l’équilibre des territoires. Oh ! Le temps de l’analyse des causes viendra, mais nous en connaissons au moins une :… Le laxisme ! …nous savons qu’il faut que chacun se sente partie d’une nation. Nous devons trouver une nouvelle manière de nous réunir autour de tout ce qui fait l’identité française, car une nation, c’est un symbole et des idées qui nous font tenir ensemble et mener un projet commun. Mettez fin à votre politique néolibérale, ça améliorera déjà la situation ! Mais ce projet commun, il commence tout en bas : la nation se construit d’abord autour des quatre murs d’une mairie, d’une école ou d’une maison des associations.
Nous sommes ici pour dire à la majorité silencieuse de nos concitoyens de ne pas désespérer : notre majorité ne se résignera jamais. Quelle majorité ? Rien ne justifie la violence – la culture de l’excuse n’est pas un programme –, mais rien ne justifie non plus de priver nos enfants de retrouver leur école à la rentrée, de priver nos policiers de locaux d’intervention,… Il faut faire payer les coupables ! …de laisser des gens aux portes explosées d’un bureau de poste, d’empêcher les habitants de faire du sport ou de s’épanouir par la culture. En faisant payer les coupables ! Dans le sage sillon tracé par le Sénat, nous espérons pouvoir adopter rapidement ce projet de loi, qui prévoit des habilitations qui permettront à M. le ministre d’agir rapidement et efficacement. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.) (À neuf heures cinquante, M. Sébastien Chenu remplace Mme Valérie Rabault au fauteuil de la présidence.)Présidence de M. Sébastien Chenu
La parole est à M. Antoine Villedieu.
Il existe bien des références historiques aux 100 jours annoncés par Emmanuel Macron ; malheureusement, l’histoire ne retiendra des 100 jours de 2023 qu’une vaste supercherie, donnant lieu à une situation marquée par le chaos et l’embrasement. Huit jours d’émeutes seulement, et un bilan pourtant bien plus lourd que celui de 2005, où elles avaient duré trois semaines. J’ai une pensée pour nos policiers, nos gendarmes et nos sapeurs-pompiers, qui, au milieu des affrontements, ont su assurer leur mission. Pendant ce temps, nos commerçants assistaient, impuissants, au pillage et au saccage de leurs boutiques, les habitants des quartiers voyaient les flammes emporter leurs véhicules, et des passants étaient pris à partie sans raison par des meutes de sauvages. Qui était alors aux commandes ? Emmanuel Macron ? Certainement pas : il assistait à un concert ! Visiblement, quand le chat n’est pas là, les souris pataugent.
(« Qu’est-ce qu’il raconte ? » sur les bancs du groupe RE.)
Ces 100 jours d’abandon se seront soldés par huit jours de destruction : voilà ce que retiendront les Français. Vous allez le répéter combien de fois ? Nous allons débattre d’un projet de loi relatif à l’accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet. Pourtant, à sa lecture, on ne constate que de timides références aux casseurs. Non, il ne s’agit pas d’une catastrophe naturelle dont les causes seraient exogènes : les responsables, nous les connaissons, ce sont principalement des jeunes issus des banlieues, rassemblés pour en découdre et casser – le tout avec la bénédiction des élus de la NUPES. (M. René Pilato incline son pouce vers le bas.) Oui, chers collègues, en refusant d’appeler au calme et en jetant constamment de l’huile sur le feu,… Vous vous êtes regardés dans la glace ? …certainement aveuglés par votre éternel fantasme de voir nos institutions s’effondrer, vous avez une part de responsabilité dans ce chaos. Où êtes-vous allé chercher ça ? Pendant ce temps, notre gouvernement tremblait, incapable de rétablir l’ordre dans les rues : selon certains observateurs de terrain, c’est l’intervention des narcotrafiquants qui aurait permis un retour au calme. (M. Philippe Vigier s’exclame.) Heureusement, les Français ont compris – et ils l’expriment ouvertement – que seule Marine Le Pen (« Ah ! » sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR) ,… Il aura sa gommette ! (Sourires.) … aura le courage de faire face à une violence devenue endémique. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Sans surprise, votre texte, qui prévoit des hausses d’impôts et de cotisations d’assurance, prévoit finalement de faire payer la France qui travaille, celle qui ne fait pas de bruit et ne casse pas. Pour elle, ce sera la double peine. La racaille détruit et les Français payent. Dans ce projet de loi, vous traitez les effets sans jamais vous attaquer aux causes : effacer au plus vite les stigmates des émeutes et faire oublier aux Français votre incapacité à agir dans leur intérêt, voilà son véritable objectif !
Les responsables et les causes de ce que nous avons vécu ne peuvent être ignorés : ce sont ceux qui nous haïssent, galvanisés et nourris par un sentiment de toute-puissance et d’impunité, ceux qui habitent des zones de « non-France » et empruntent le chemin de la sécession. Mais ce sont aussi quarante années d’une politique migratoire anarchique, associée à des réponses pénales inadaptées, notamment une absence d’exécution des peines. La culture de l’excuse et la repentance permanente poussent notre pays à une inversion des valeurs : les coupables deviennent des victimes, les victimes des coupables.
Nous devons être impitoyables avec ceux qui cultivent la haine anti-France, attaquent nos symboles et profanent nos mémoriaux : c’est aux émeutiers d’assumer l’entière responsabilité de leurs actes, sur le plan pénal comme sur le plan civil. Exactement ! Ils doivent rembourser l’intégralité des dommages qu’ils ont causés – à perpétuité s’il le faut. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Comme l’a rappelé Marine Le Pen lors d’une conférence de presse… Deux gommettes ! …les solutions existent, monsieur le ministre, il suffit de les appliquer : le principe du casseur-payeur doit devenir la règle, les émeutiers étrangers doivent être expulsés, les allocations familiales des familles de délinquants mineurs doivent être supprimées, la majorité pénale doit être abaissée à 16 ans. À 5 ans, tant que vous y êtes ! Le bagne ! Ce texte restera un pansement sur une jambe de bois. Une fois encore, les Français paieront quarante années de lâcheté politique, de clientélisme et d’aveuglement idéologique. Des élus Les Républicains (Exclamations sur les bancs du groupe LR) … Oubliez-nous ! …à ceux de la NUPES, en passant par ceux du centre, vous êtes tous complices de cette situation.
Monsieur le ministre, sachez que les députés du Rassemblement national n’auront jamais les mains qui tremblent face à la racaille. Nous le disons aux Français : lorsque nous serons au pouvoir, nous rétablirons l’ordre et nous rendrons la France à la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Dommage, vous avez oublié de conclure en citant le nom de Marine Le Pen ! La parole est à Mme Raquel Garrido. Cette loi permettra-t-elle de reconstruire avant septembre l’école maternelle de La Verrière, dans les Yvelines ? Cette loi permettra-t-elle de reconstruire rapidement l’antenne de police de Bagnolet, chez moi, en Seine-Saint-Denis ? Quelle indécence ! Vous qui détestez la police ! Cette loi nous garantira-t-elle la reconstruction rapide – la reconstruction tout court, même – de tous les bâtiments destinés à un service public ? Non, et vous le savez bien. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
En effet, tout d’abord, il n’y a pas de garantie de financement. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Collègues de l’extrême droite, laissez au moins les autres intervenir. (Vives exclamations sur les bancs du groupe RN.) Seul le président préside ! Je vais gérer, madame la députée. La loi (Mêmes mouvements) … On parle des mairies, cela ne vous intéresse pas ? Nous, si. On ne remet pas en cause la présidence ! Laissez-moi gérer, madame Garrido, ce sera plus efficace. Le texte n’oblige pas les mairies à assurer leurs bâtiments. Bien que nous n’ayons pas de données précises sur ce sujet, votre ministère estime pourtant que presque la moitié des collectivités ne sont effectivement pas couvertes par une assurance.
Le texte permettra-t-il de débloquer de nouveaux crédits en urgence pour répondre aux besoins de reconstruction ? Non ! Une circulaire de la Première ministre du 7 juillet 2023 prévoit au contraire d’aller piocher dans les fonds existants, les obérant de 94 millions d’euros qui ne pourront donc financer les politiques publiques auxquelles ils devaient initialement être consacrés. Avec un budget limité et imprévisible, certaines collectivités devront faire un choix : faut-il privilégier la reconstruction de la cantine de l’école ou celle de la bibliothèque ? Ce dilemme n’est pas acceptable : votre rôle, c’est de garantir que tout sera reconstruit. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Même l’hôtel de police ? (Sourires.) Et qui va payer ? Pour avoir l’assurance que les travaux démarrent au plus vite, il faudrait un nouvel engagement financier dans l’exercice 2023. Vous devez vous engager à débloquer ces nouveaux fonds dans le cadre d’un projet de loi de finances rectificative qui serait présenté à l’automne – c’est le véhicule que vous avez choisi pour défendre le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, vous pouvez bien l’utiliser aussi pour assurer la reconstruction. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Quelle indécence, franchement ! Et, par pitié, ne me dites pas que le paiement en avance du FCTVA ou la suppression de l’obligation de participation minimale des collectivités équivalent à un reste à charge nul pour ces collectivités : c’est faux. Les fonds du FCTVA appartenaient déjà aux mairies, et les débloquer par anticipation n’y changera rien ;… C’est insensé ! …et, si les collectivités n’ont plus à apporter de concours financier, le problème reste entier : qui financera les 100 % restants ? Le principe du casseur-payeur ! Le pire n’est pas que vous traitiez mal la question matérielle, mais que vous gériez mal la question immatérielle. Collègues, c’est la première fois que nous sommes réunis pour parler de la réplique à apporter à l’homicide volontaire qui a entraîné la mort de Nahel, le 27 juin. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Vous êtes juge ? Le texte ne fait pas mention de cet événement, comme si vous vouliez l’effacer de nos mémoires. (« Hors sujet ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.) Ce n’est pas le sujet ! Le Président de la République lui-même ne s’est toujours pas exprimé.
Votre texte concerne effectivement les biens détruits ou dégradés à partir du 27 juin, jour de la mort de Nahel, mais en ne parlant que de la réponse à y apporter, vous omettez de traiter les problèmes mis au jour par l’homicide volontaire (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES) – c’est-à-dire le meurtre. (« Et la justice ? » sur plusieurs bancs du groupe RN.)
Je ne m’arroge pas le droit de préjuger de la culpabilité d’un homme – tout homme est présumé innocent –, mais il s’agit bien de la qualification juridique qui a été retenue par la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Il y aura un procès, le policier plaidera qu’il a utilisé son arme dans le cadre de la loi relative à la sécurité publique de 2017. Qu’attendez-vous pour abroger le 4o de l’article L. 435-1 du code de la sécurité intérieure ? (Mêmes mouvements.) Qu’il y ait davantage de morts ? Treize meurtres en 2022 ne suffisent-ils pas ? La mort de Nahel – son meurtre, pour reprendre la qualification retenue par la justice à ce stade – n’est-elle pas suffisante ? (« Arrêtez ! » et « Quelle honte ! » sur les bancs du groupe RN.)
Quand traiterez-vous enfin la question du racisme dans la police ? Voilà ce qui construirait la paix, comme c’est notre rôle à tous. (Exclamations sur les bancs du groupe RN et sur quelques bancs du groupe LR.) N’entendez-vous donc pas la petite musique de la guerre civile ? Il faut répondre. (Mêmes mouvements.) Collègues… Mes chers collègues, il est dix heures du matin, c’est encore trop tôt pour un tel brouhaha. Exactement ! Ce n’est pas possible ! Pour encore quarante secondes, seule Mme Garrido a la parole : je vous prie de la laisser terminer son propos. Je ne suis pas née en France : j’y suis arrivée à l’âge de 14 ans, et ne suis devenue Française qu’à l’âge de 25 ans. (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.) Jamais je n’accepterai que vous opériez un tri entre les Français en fonction de leur ascendance ou de leur religion. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Inaki Echaniz applaudit également.) Je n’ai pas de pays de rechange, vous n’avez pas de pays de rechange ! (Exclamations continues sur les bancs du groupe RN) Vous ne vous débarrasserez ni de moi ni des autres ! Protégeons ce pays (« Notre pays ! » sur les bancs du groupe RN), protégeons la République, protégeons la justice et la paix : c’est notre devoir à tous. (Les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent.) Quel théâtre ! Vous êtes complètement fous ! C’est l’hôpital qui se fout de la charité ! Dans le calme enfin revenu, la parole est à M. Inaki Echaniz. Le 27 juin, un jeune garçon de Nanterre, Nahel Merzouk, était abattu par un policier à l’occasion d’un contrôle routier, nouvelle victime d’une terrible série qui pose la question des conditions de l’usage de leur arme par les forces de l’ordre et, plus largement, de notre doctrine de maintien de l’ordre et du rapport entre la police et la population. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, ce n’est pas l’objet de notre discussion aujourd’hui : la justice doit suivre son cours et le Parlement doit jouer son rôle de contrôle. À cet égard, le groupe Socialistes et apparentés a sollicité et obtenu une évaluation de la loi relative à la sécurité publique de 2017 ; mon collègue Roger Vicot en sera corapporteur au nom de l’opposition.
Ce qui nous rassemble ce matin, c’est l’enjeu de la reconstruction. En effet, entre le 27 juin et le 5 juillet, ce drame a donné lieu à une flambée de violences, initialement alimentée par une réponse judiciaire perçue comme complaisante envers les policiers, alors qu’une vidéo des faits contredisait les premiers éléments fournis par ces derniers. Ces violences, que nous condamnons une nouvelle fois sans réserve, ont pris une ampleur inédite depuis celles de 2005 consécutives à la mort de Zied Benna et Bouna Traoré. La dégradation voire la destruction de mairies, de commissariats, d’écoles, de crèches, de médiathèques a privé nos concitoyens d’accès à certains services publics, souvent dans des territoires où ceux-ci sont déjà peu présents ; des bureaux, des commerces, les locaux professionnels d’artisans ont également été touchés, ainsi que des véhicules privés, aux dépens de ceux qui se lèvent tôt pour se rendre au travail. Il est de notre responsabilité de leur apporter une réponse rapide : c’est pourquoi nous soutiendrons ce projet de loi bienvenu. En les faisant payer ? Je souhaite néanmoins, comme je l’ai fait en commission, commencer par évoquer ce qui ne figure pas dans le texte et qu’il importe de traiter urgemment. Il y a tout d’abord la question des assurances : alors que nous souhaitons reconstruire à la fois vite et, en ce qui nous concerne, bien, des mois et même des années risquent d’être perdus en expertises, contre-expertises et autres négociations en vue de protocoles transactionnels. Certaines collectivités ne pourront entamer les travaux avant d’avoir reçu une compensation, et elles n’entrent pas nécessairement dans le périmètre du texte. Il faudra, monsieur le ministre, que le Gouvernement amène rapidement les assureurs, dont nous gardons à l’esprit la mauvaise volonté initiale au début de la pandémie de covid-19, à prendre toute leur part.
S’ajoute logiquement à ce sujet celui des moyens et aides financières : si le projet de loi vise à faciliter l’obtention de taux élevés de cofinancement, encore faut-il que les crédits existent et qu’ils soient vite mobilisés. En la matière, nous avons besoin d’une réelle visibilité : les moyens alloués à la reconstruction ne doivent pas se limiter au recyclage de crédits des dotations de soutien à l’investissement local (DSIL).
S’agissant des dispositions que le Gouvernement souhaite pouvoir prendre par voie d’ordonnance, nous vous inviterons par nos amendements, monsieur le ministre, à prendre au banc un certain nombre d’engagements visant à ce que des intentions partagées trouvent une traduction concrète. D’ores et déjà, vous avez apporté en commission des garanties, par exemple au sujet des bailleurs sociaux : je n’y reviendrai pas. Il est notamment essentiel pour notre groupe que les reconstructions à l’identique respectent les normes les plus récentes et les plus exigeantes concernant l’accessibilité, la sécurité, le statut thermique ; essentiel également de concilier, touchant la commande publique, volonté d’aller vite, préservation des deniers publics et prévention des risques de corruption. Nous défendrons par voie d’amendement une proposition simple qui permettrait un meilleur contrôle démocratique sans compromettre les objectifs visés. Je ne doute pas, monsieur le ministre, que vous saurez nous rassurer et prendre les engagements nécessaires au cours du débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.) Oh là là ! Quelle force dans le propos ! La parole est à M. Philippe Vigier. Monsieur le ministre (Sourires) … Les images que nous avons tous pu voir entre le 27 juin et le 5 juillet sont dramatiques : durant des jours, elles ont montré une République fragilisée, déstabilisée. J’ai naturellement une pensée émue pour la famille de ce jeune qui est mort, mais aussi pour tous les agents des forces de l’ordre qui, jour et nuit, ont tenu bon afin que le calme et la paix reviennent, que nous puissions avancer. (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.) Comme l’a dit le ministre, nous en sommes au moment de l’analyse des faits, des enquêtes judiciaires, de la politique de la ville – les députés Écologistes n’étant pas encore là, j’y reviendrai à la fin de mon propos, car, de même que Thierry Benoit, je suis là depuis quelques années. En la matière, il conviendra de savoir, monsieur le ministre, pourquoi les résultats ne sont pas à la hauteur des moyens que nous déployons depuis de longues années. Je n’oublie pas que 500 communes ont été touchées, 750 bâtiments publics ou privés abîmés, détruits ; je pense à tous ceux qui ont perdu leur outil de travail, au médecin généraliste dont le cabinet a brûlé, à l’infirmière sans voiture, aux enseignants sans école, à l’incendie du bus du cœur des femmes, où des soignants proposaient de dépister gratuitement diverses pathologies. Ces images sont celles d’une France défigurée, et c’est tout à votre honneur, monsieur le ministre, que vous nous présentiez dans l’urgence ce texte qui vise à essayer d’en effacer les stigmates.
S’agissant d’urbanisme, de logement, de construction, le rapporteur a d’ailleurs été judicieusement choisi : Jean-Paul Mattei est un orfèvre ès matières, et je suis persuadé que, dès la promulgation des ordonnances, il vous facilitera la tâche de toutes les façons. Ceux d’entre nous qui exercent des fonctions locales, qui ont été maire, savent qu’il faut d’ordinaire compter plusieurs mois pour réhabiliter un commerce, trois ans pour réaliser une école. Or nous sommes en train d’envoyer un signal au pays : en cas de crise, nous sommes capables de réagir rapidement, d’assouplir les règles, tout en garantissant que les bâtiments reconstruits seront bien plus performants du point de vue énergétique ! Hier, madame Garrido, vous vous êtes émue en commission de ce qu’il n’y avait « pas un seul centime de prévu pour financer la reconstruction » : je me permettrai de vous rappeler que récupérer immédiatement la TVA évite une ligne de trésorerie et deux ans d’attente. Ça, c’est déjà de l’argent public ! Eh oui ! Très bien ! Quand vous aurez géré une collectivité, vous verrez comment se passent les choses. (M. René Pilato s’exclame.) En outre, la fongibilité des aides d’État, dispositif exceptionnel, profitera au monde rural comme au monde urbain : c’est pourquoi je me suis élevé en commission contre l’amendement no CE60, qui visait à exclure des fonds mobilisables la fameuse dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR). Quant aux marchés publics, madame Garrido, nous ne foulerons pas aux pieds le contrôle de légalité, bien au contraire, il sera bien là, à la fin ; il s’agit de faciliter leur conclusion en dispensant de publicité et d’allotissement jusqu’à 1,5 million d’euros – sans doute aborderez-vous ce point, monsieur le ministre. Ce sera là une réponse très forte. Il ne reste plus à l’Assemblée qu’à adopter le texte, dès la première lecture, dans les mêmes termes que le Sénat, afin que nous soyons immédiatement opérationnels ! J’imagine que le Gouvernement, de son côté, aura à cœur de promulguer les ordonnances le plus vite possible. Encore une fois, c’est une réponse que nous adressons à la France, à ces maires que nous vénérons tous, qui sont les piliers de la République, et qu’il faut conforter. Les Français nous regardent ! J’ai été indigné de constater le renoncement permanent du Rassemblement national (Exclamations sur les bancs du groupe RN) :… C’est vous qui renoncez à faire payer les casseurs ! Chers collègues, s’il vous plaît ! …ne pas voter pour un tel texte parce que vous souhaitiez voir qualifier autrement ces violences urbaines, il faut le faire ! La France saura que vous n’avez pas voulu reconstruire. Pas avec l’argent des Français ! La reconstruction n’attendra pas quatre années : elle doit commencer maintenant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. le président de la commission des affaires économiques, applaudit également.) C’est votre responsabilité, et nous la ferons connaître ! Ce n’est pas au contribuable de payer la casse ! Quant à la NUPES, en particulier aux Écologistes (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES) , je regrette que Mme Chatelain ne soit pas là. J’étais déjà député à l’époque où un gouvernement de gauche a diminué de 13,5 milliards d’euros le montant des dotations aux collectivités locales (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem) , tandis que les moyens alloués à la politique de la ville s’effondraient de 40 %. Quel culot vous avez ! Quelle honte ! (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Quand on sait à quel point l’État se mobilise par l’intermédiaire du fonds Vert et des plans de relance, vous devriez au moins… Merci, cher collègue. Je termine, monsieur le président ! Vous venez théoriquement de terminer, d’ailleurs… Jamais les collectivités n’ont été autant aidées. Alors, je le répète, avançons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.) Bravo ! C’est au sein d’un hémicycle apaisé pour accueillir nos visiteurs dans les tribunes du public que je donne la parole à Mme Emmanuelle Ménard. C’était hier soir à la télévision, Les Visiteurs ! Monsieur Minot, ce n’est pas parce que c’est votre anniversaire que vous devez la ramener matin, midi et soir… (Sourires.) Madame Ménard, vous avez la parole. Chers collègues, 23 878 feux sur la voie publique, 12 031 véhicules incendiés, 2 508 bâtiments incendiés ou dégradés, dont 273 postes de police ; 105 mairies incendiées ou dégradées, 168 écoles attaquées, 17 élus menacés ou agressés ; enfin 3 505 personnes interpellées et – c’est heureux – plus d’un millier de condamnations. La stupéfaction suscitée par ce déchaînement de haine a vite laissé place à la peur, à la colère. Rien ne peut justifier les violences qui ont enflammé notre pays ! Elles sont insupportables, inacceptables, impardonnables. Tout y est prétexte et récupération. Elles ne visent en aucun cas à exprimer une émotion légitime, mais bien à fouler aux pieds nos institutions, à détruire tout ce qui les incarne. Disons-le franchement : les émeutiers se contrefoutent de la mort de Nahel ! (« Elle a raison ! Bravo ! » sur quelques bancs du groupe RN.) Vous aussi, manifestement ! À Béziers, une cinquantaine de voyous ont dévasté leur quartier, celui de La Devèze, où plus de 150 millions avaient été investis afin d’assurer le bien-être des 4 000 habitants. Ils ont gravement détérioré la mission locale pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes, c’est-à-dire une structure conçue pour eux, incendié la maison de quartier où leurs petits frères et sœurs étaient accueillis en vue de séjours en centre de loisirs, les privant de vacances cet été ; la mairie annexe a été saccagée, des véhicules brûlés. Dans un autre quartier, le bureau de poste et divers commerces ont subi des dégâts considérables. Sous les attaques et les jets de projectiles, les policiers nationaux et municipaux, les gendarmes, les pompiers ont fait preuve d’un sang-froid à toute épreuve. L’enveloppe nécessaire à la remise en état sera lourde : dans ma ville, la première estimation avoisine 1 million d’euros pour les seuls bâtiments publics. Qui va payer la note ? Les Français, bien sûr, d’une façon ou d’une autre, ce qui est terriblement injuste !
Afin de rassurer nos compatriotes, le chef de l’État a promis un texte d’urgence, celui-là même que nous étudions ce matin. Vous y prévoyez la possibilité d’un affranchissement partiel ou total des obligations en matière de participation financière qui pèsent sur une collectivité maître d’ouvrage lorsque d’autres personnes publiques contribuent au financement du projet : d’une part le fait que la participation du maître d’ouvrage doit représenter au moins 20 % du total de celle des personnes publiques, d’autre part les fonds de concours permettant à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et à ses communes membres de contribuer aux investissements les uns des autres. C’est là une bonne idée, même si vous n’ignorez pas qu’elle ne règle rien au fond : il reviendra à l’État, c’est-à-dire au contribuable, de mettre la main à la poche, subissant ainsi la double peine de payer la réparation d’équipements qu’il a déjà financés.
Parce que la reconstruction constitue une urgence, je voterai en faveur de ces dispositions. (« Ah ! » sur quelques bancs du groupe Dem.) Mais les casseurs dans tout ça ? Selon Sandrine Rousseau, malheureusement absente de l’hémicycle ce matin, s’ils pillent les magasins, c’est parce qu’ils sont pauvres, ce qui les met hors d’état de rembourser les dégâts qu’ils commettent – CQFD. À ce point, on ne peut même plus parler de naïveté ou de raisonnement absurde : il s’agit tout bonnement de complicité,… Très bien ! …soit l’exact contraire de ce qu’attend la grande majorité des Français ! Nous devrons nous contenter du flyer par lequel le garde des sceaux entend expliquer « en termes simples », dit-il, leurs obligations aux parents qui les « auraient oubliées ». Êtes-vous sérieux ? C’est Surprise sur prise ! Il faut des actes forts : pour ces petits voyous, ces casseurs, ces pilleurs qui n’ont pas atteint leur majorité, cela signifie la responsabilisation financière des parents, la condamnation systématique à des TIG consistant à nettoyer et réparer les dégâts, la restauration de l’autorité à l’école, avec un recentrage des programmes sur le français et sur l’éducation civique et morale ; le développement des internats et des centres éducatifs fermés (CEF), la remise en cause de l’excuse de minorité, de nouvelles places de prison. Bravo ! Nous n’en prenons pas le chemin. Une fois encore, une fois de trop, vous allez consciencieusement dissimuler la poussière sous le tapis. Pour combien de temps ? Regardons les choses en face : l’argent ne réglera pas tout ! Il convient surtout de s’interroger au sujet de la haine qui anime ces casseurs, ces voleurs – la haine de notre pays. Je dis bien « notre pays », car, à leurs yeux, ce n’est pas le leur : ils sont Français, mais seulement par leurs papiers. (« Quelle honte ! » sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Beaucoup parmi vous persistent à nier tout rapport entre ces émeutes et une immigration de masse, non choisie, non contrôlée (« Elle a raison ! » sur quelques bancs du groupe RN) :… Merci, madame Ménard. …qu’ils continuent ainsi ! Nous nous retrouverons un jour ici pour déplorer encore plus de dégâts et peut-être, qui sait, non plus un, mais plusieurs morts. La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre. Est-ce bien nécessaire ? Je serai bref, car je souhaite que nous puissions adopter rapidement ce texte d’urgence. Je voudrais simplement indiquer que nous répondrons, article par article, aux questions relatives au texte. S’agissant en revanche des causes des violences urbaines, qui ont donné lieu à plusieurs interpellations, je répète que ce sujet mérite mieux qu’un débat de quelques heures au mois de juillet. Il devra être traité les yeux ouverts, à la rentrée, sous une seule condition : que personne n’entre dans l’hémicycle en disant « Cela fait des années que je le dis, et j’ai raison ». Bien sûr, on peut compter sur vous pour ça ! On ne met pas de conditions à la discussion d’un texte ! Parce que sinon, bizarrement, certains diront des choses absolument contraires à ce que diront d’autres (Mme Aurélie Trouvé s’exclame) , selon une logique de prophétie autoréalisatrice qui ne correspond pas à ce que nous avons vécu.
Monsieur le ministre délégué, vous avez retiré, à raison, un quatrième article, prévu initialement, qui aurait rendu le projet de loi inacceptable. Visant à faciliter les expropriations dans les copropriétés dégradées, cet article aurait porté une atteinte trop importante au droit de la propriété. Mais oui ! Merci d’y avoir renoncé afin de permettre une adoption conforme de ce projet de loi. Tout à fait. Les violences urbaines et émeutes survenues du 27 juin au 5 juillet nous ont profondément scandalisés. Les dégâts sont énormes. Leur ampleur est considérable : plus de 500 communes concernées, plus de 800 bâtiments dégradés. S’en prendre à des dépositaires de la force publique, à des proches d’élus est intolérable.
J’ai une pensée pour l’épouse et les enfants de M. Vincent Jeanbrun, maire de L’Haÿ-les-Roses.
S’en prendre à des commissariats, des brigades de gendarmerie, des mairies, des établissements scolaires, des bibliothèques, des maisons de quartier, des centres hospitaliers, des crèches, des cafés, des pharmacies est inadmissible. C’est un scandale ! Les auteurs doivent être poursuivis et sanctionnés ; et je le dis haut et fort devant la représentation nationale, ces auteurs devront aussi participer au financement des reconstructions par des amendes pénales. Ils devront également y contribuer par des travaux d’intérêt général (TIG), et, pour les mineurs, la responsabilité de leurs parents devra aussi être engagée quand cela sera justifié ; c’est une question de justice. Exact. Cela étant dit, il nous faut rétablir dans les meilleurs délais la continuité des services publics sur l’ensemble de notre territoire. Cela passe par la reconstruction des bâtiments et équipements publics. Il y a urgence, notamment pour les écoles, au regard de l’échéance de la prochaine rentrée scolaire.
Pour construire, il faut obtenir des autorisations, passer des marchés et trouver les financements. Assurément, ce projet de loi répond à des besoins d’allègement des procédures, de réduction des délais, d’assouplissement des règles pour bénéficier de financements. Nous soutiendrons ces mesures. En effet, le droit actuel ne permettrait pas la reconstruction à l’identique de la totalité des biens dégradés ou détruits ni de sécuriser tous les donneurs d’ordre pour accélérer les marchés publics. Même si ce projet de loi ne prévoit pas de financement direct par l’État de ces reconstructions, la possibilité de bénéficier du remboursement anticipé du FCTVA dès cette année – qu’il faudrait d’ailleurs généraliser pour toutes les collectivités –,… Très juste ! …, de bénéficier de 100 % de subventions ainsi que de déplafonner les fonds de concours des intercommunalités permettra aux acteurs publics locaux de trouver des solutions de financement.
Concernant les commerces et services tels les cafés ou pharmacies qui ont été vandalisés, il faudra peut-être aussi les accompagner s’ils ne sont pas couverts totalement par leur assurance. Il en va de même pour les communes qui n’ont pas souscrit d’assurance contre les émeutes. Tout à fait ! Permettez-moi aussi d’évoquer les particuliers dont les biens ont été dégradés – notamment ceux qui ont vu leur voiture partir en fumée. Il faut penser à eux ! J’exhorte les assurances à trouver les solutions avec l’État pour les indemniser au mieux, au terme d’expertises rapides. Ces victimes ne doivent pas être abandonnées à leur sort. Exact ! Reste la question du financement par l’État de ses propres bâtiments dégradés. D’ici l’automne, un chiffrage devra être produit. Il faudra l’accompagner de mesures de sûreté pour mieux protéger ces bâtiments d’État tels que la trésorerie, sûrement par le déploiement de la vidéoprotection.
Alors que notre pays va connaître une très grave crise de la construction, et que d’autres espaces que ceux touchés par les émeutes du 27 juin au 5 juillet sont concernés par des besoins de reconstruction, il apparaît par ailleurs nécessaire que le Gouvernement engage à la sortie de l’été une réforme structurante de simplification de l’urbanisme et des marchés. En effet, après les énergies renouvelables, les installations nucléaires et l’industrie verte, il s’agit déjà du quatrième projet de loi illustrant la nécessité d’alléger nos contraintes urbanistiques en l’espace d’un an. Eh oui ! Ce besoin de légiférer pour permettre un traitement accéléré souligne la longueur des délais de droit commun ainsi que la lourdeur et la complexité des procédures de droit commun, ce qui freine le développement en France. Exact ! Les trois articles dans la version du projet que nous examinons ce matin consistent en des habilitations du Gouvernement à légiférer par ordonnance. Nous n’apprécions pas la méthode, mais elle tend à être justifiée, dans le contexte actuel, par l’ambition d’aller vite et bien sur des sujets techniques. Très bien ! L’urgence est indéniable. Les lacunes dans le droit existant sont indéniables. Ce sont les raisons pour lesquelles notre groupe prendra ses responsabilités et soutiendra ces dispositions en espérant un vote conforme.
Cependant, le moment venu, nous invitons le Gouvernement à présenter ses ordonnances au Parlement pour les ratifier, car la pratique inverse est de plus en plus observée.
Nous invitons surtout le Gouvernement à les présenter au plus vite en Conseil des ministres, si possible avant la pause estivale pour l’article 2, afin de ne pas perdre le temps que les dispositions dérogatoires contenues dans cet article devraient nous permettre de gagner. Cela permettrait de passer les marchés publics le plus rapidement possible.
Enfin, ce projet de loi se borne à faciliter la reconstruction matérielle. Cela ne suffira pas à nous éviter de revivre de tels événements. Eh oui, il a raison ! Il faudra s’atteler aux causes de ces violences commises contre les symboles de notre République afin que cela ne se reproduise plus.
Nous invitons donc également le Gouvernement à engager au plus vite une restauration de l’autorité à différents niveaux et à défendre une ambition d’intégration républicaine fondée sur le partage d’un destin commun animé par l’amour de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur les bancs des commissions.) La parole est à M. Thierry Benoit. Le groupe Horizons, au nom duquel je m’exprime, soutiendra naturellement votre projet de loi… Quelle surprise ! On ne s’y attendait pas. …en espérant une adoption conforme, par souci de rapidité d’exécution et d’efficacité.
Ce texte, qui nous ramène à une actualité brûlante et déchirante, se passe de grands discours et de grands mots. C’est un texte de reconstruction, un texte de réparation matérielle… Il faudrait un texte de sanctions ! …qui vise, dans la mesure du possible, à permettre à la vie de reprendre son cours dans les quartiers où des violences urbaines et des émeutes ont eu lieu. Un chiffre en particulier m’interpelle : 243 établissements scolaires ont été dégradés. À lui seul, il nous confronte à la grave réalité du niveau de tension auquel est soumis notre pays depuis de nombreux mois, voire de nombreuses années.
Il s’agit donc de réparer les écoles, les équipements culturels et sportifs, nombre de services – dont ceux de la petite enfance, comme les crèches –, mais aussi des bâtiments publics tels que les mairies, sans oublier l’arsenal de bâtiments privés, de particuliers et de commerces qui ont été dégradés.
Le texte nous donne les moyens d’intervenir sur les équipements, les bâtiments et les infrastructures. Nos débats porteront sur trois domaines. Le premier est le code de l’urbanisme, puisqu’il s’agit de reconstruire à l’identique – avec les règles qui prévalent en 2023 –, tout en saisissant, au passage, les occasions d’en améliorer les aspects liés à la transition énergétique, à la sécurité et à l’accessibilité.
Le deuxième domaine nous amènera à modifier le code des marchés publics ; si la publicité n’est pas obligatoire, nous pourrons faire entièrement confiance aux maires de nos communes pour mettre en concurrence les différents corps de métiers qui seront sollicités. Par ailleurs, ce texte nous offre l’occasion de faire œuvre de simplification en matière de délais d’instruction des permis de construire et d’urbanisme.
Le troisième domaine où nous allons intervenir est celui du financement, en gardant comme trajectoire et comme objectif le zéro reste à charge pour les communes. Nous devrons aussi réfléchir à l’adaptation à la réglementation européenne : vous pourrez revenir, monsieur le ministre délégué, sur le seuil maximal des marchés publics exonérés de publicité de 1,5 million d’euros que vous avez évoqué en commission. De même, si la règle commune fixe à 80 % le montant maximal de subventions que peuvent toucher les collectivités, il faudra cependant aller au-delà pour que le reste à charge soit effectivement égal à zéro. Enfin, nous devrons étudier la question du fonds de compensation de la TVA – que tous les élus connaissent – qui suppose de passer de la récupération en année n + 2 à une récupération immédiate de la TVA.
Une fois ce texte voté, il nous restera à identifier les responsabilités des auteurs de ces dégradations, et à les faire participer – ainsi que leurs parents – aux réparations, sous une forme ou une autre. Il nous faudra aussi évaluer le montant total des dégradations et vérifier quelle est la prise en charge réelle par les assurances.
Pour conclure, au-delà de la réparation matérielle, nous devons réfléchir à la réparation immatérielle et morale – je reprends les mots que j’ai utilisés en commission. La question qui se pose à la France, en 2023, c’est celle du vivre ensemble. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Ah ! Puisque nous sommes députés de la nation et que j’ai la chance de siéger dans cet hémicycle depuis seize ans, je le dis humblement et modestement : nous avons chacun, en tant que représentants de la nation, une forme de responsabilité quant à l’image que nous donnons des relations humaines. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.) On ne peut pas passer son temps à chauffer à blanc une certaine partie des Français puis s’étonner que, dans nos quartiers,… Très bien ! …quelles que soient nos origines, notre catégorie sociale, nos conditions de vie, nous soyons amenés à ne plus nous comprendre.
Nous devons donc nous parler raisonnablement et respectueusement, car c’est ainsi que nous nous comprendrons et que nous parviendrons à construire le vivre ensemble. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.) La parole est à Mme Sabrina Sebaihi. Un mort de plus, un mort de trop : le jeune Nahel a été tué le 27 juin dernier à Nanterre par un officier de police lors d’un contrôle routier, à la suite d’un refus d’obtempérer, et quelques mois après Alhoussein Camara, tué dans les mêmes circonstances en banlieue d’Angoulême. Comme en 2005, après la mort de Zyed Benna et Bouna Traoré, comme en 2007 à Villiers-le-Bel, comme en 2017 après la mutilation de Théo lors de son arrestation, la colère et l’émoi se sont cristallisés dans les violences.
Bien évidemment, nul d’entre nous n’approuvera ces violences, ces pillages, ces destructions d’édifices, notamment publics. Nous ne tolérerons pas non plus la violence contre les élus locaux, toujours en première ligne. C’est bien de l’entendre ! Cependant, votre réponse ne peut se réduire à la matraque pour les quartiers et au chéquier pour les dégâts. D’année en année, de violence en violence, les conséquences ont toujours été perçues à travers le prisme sécuritaire, tandis que les causes, elles, ont continué à mûrir et à produire au fil du temps des fractures de plus en plus béantes dans notre société.
On compte aujourd’hui 5 millions de nos concitoyens vivant dans l’un des 1 500 quartiers prioritaires de la politique de la ville. Quelle est la vision pour ces quartiers ? Où en sont les promesses de justice sociale et d’égalité républicaine ? Dans ces quartiers, 40 % de la population est en situation de pauvreté et 45 % des jeunes sont au chômage ; il y a deux fois moins de professionnels de santé par habitant que sur l’ensemble du territoire national, moins de bureaux de poste, de maisons de justice ou encore de transports. Allez voir ce qu’il en est dans la ruralité, un petit peu ! À cet abandon de la population s’ajoute un abandon des municipalités. De quand date le dernier budget ambitieux de soutien aux collectivités territoriales ? On a consacré 100 milliards aux quartiers ! Cette année encore, le projet de loi de finances qui semble se présager annonce fièrement une augmentation de 1 milliard pour la dotation globale de fonctionnement (DGF), carburant financier de l’État à destination des municipalités. C’est la gauche qui dit ça ! Mais ce milliard ne viendra même pas compenser la moitié de l’inflation et des baisses systématiques de la DGF. C’est faux ! C’est faux ; vous souvenez-vous de l’époque où vous étiez alliée au parti socialiste ? En réalité, nous connaîtrons à nouveau une baisse cette année, qui se traduira concrètement dans nos villes et nos quartiers par des activités culturelles moins nombreuses, par l’arrêt des subventions municipales, par la fermeture d’équipements sportifs et par des réductions d’effectifs. (M. Erwan Balanant s’exclame.) Chers collègues, seule Mme Sebaihi a la parole. La DGF, ce n’est pas n’importe quelle dotation : c’est celle qui donne les outils aux maires pour combler les lacunes de l’État, pour que chacun, qu’il habite le 15e arrondissement de Paris, la cité Pablo-Picasso à Nanterre ou le quartier de l’Ariane à Nice se sente égal aux autres membres de la société, lié à eux par un destin commun ; pour que chacun puisse s’émanciper, travailler et vivre sur une même base d’égalité. Bien évidemment, l’urgence est de reconstruire – et de reconstruire vite. C’est une demande des élus locaux et notre devoir est d’y répondre. (Exclamations sur divers bancs.) Seule Mme Sebaihi a la parole, s’il vous plaît. Nos écoles, nos mairies, nos commissariats, nos commerces de proximité, nos centres sociaux doivent être opérationnels au plus vite, pour que les habitants puissent en bénéficier au plus tôt – car ces dégradations se sont déroulées dans les quartiers où les habitants en ont le plus besoin. C’est pour cette raison que le groupe Écologiste votera ce texte ; mais ne nous contentons pas d’un simple coup de ciment par-ci ou d’une simple brique par-là ; nous devons revoir les fondations mêmes de notre République au sein de nos quartiers et de nos banlieues.
J’y insiste : la solution ne réside pas uniquement dans le logement. Lancer, par exemple, un nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU), bras armé de la politique de la ville, sans l’accord des habitants, parfois même contre eux, sans accompagnement social, sans refondation complète des politiques dans ces quartiers, ne recollera pas les morceaux.
Enfin, reconstruire offre une occasion de faire mieux. L’état énergétique du parc public comme privé ne répond pas aux normes environnementales et énergétiques les plus performantes. Dans des tours qui sont des fours en été et des congélateurs en hiver, il faut s’attaquer à la rénovation énergétique. Alors que les services publics sont inaccessibles, que les personnes en situation de handicap luttent parfois pour franchir le seuil d’un bureau de poste, il faut s’attaquer au chantier de l’accessibilité. Dans des quartiers où le bus ne passe qu’une fois par heure, il faut s’attaquer au chantier de la mobilité. Dans une France qui n’a jamais été aussi antagoniste, en proie aux chimères sécuritaires et discriminantes de l’extrême droite,… Ah ! Quinze minutes de débat avant qu’on parle de l’extrême droite ! …investissons massivement dans l’éducation, l’emploi, la culture, l’insertion. En somme, investissons dans l’émancipation,… Elle a raison ! …afin d’éviter que le prochain mort ne mène à des drames plus tragiques encore. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Je vois que cela vous émeut – vous devriez effectivement chercher à comprendre ce qui s’est passé, car, en vérité, ce n’est pas anodin. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)
Votre comportement montre que vous n’avez rien compris à ce qui s’est passé ces dernières semaines. (Mêmes mouvements.) Vous feriez mieux d’écouter, de comprendre le message qui a été donné,… On a bien compris ! …afin de réparer la société française et ne pas laisser la situation perdurer. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Hubert Wulfranc. Les mesures présentées en urgence dans le cadre de ce projet de loi sur la reconstruction des bâtiments dégradés ou démolis du 27 juin au 5 juillet sont très attendues par les élus locaux et par l’ensemble des administrés concernés.
Le groupe GDR-NUPES considère ces dispositions comme strictement nécessaires. En outre, la reconstruction ouvre la possibilité d’améliorer les conditions d’accueil, la qualité environnementale et la sécurité des lieux qui abritent les services publics de proximité. L’accélération et la simplification des procédures permettront de réaliser les travaux le plus rapidement possible. Très bien ! Des dispositions particulières autoriseront les collectivités territoriales à disposer de subventions dérogatoires aux règles en vigueur.
Ces mesures, qui sont strictement nécessaires et qui seront précisées avec sérieux dans les ordonnances qui suivront, sont-elles suffisantes ?
D’un point de vue strictement financier, rien ne garantit que les communes ne verront pas leur budget d’investissement largement amputé par les engagements auxquels elles devront faire face.
Le maire de la petite ville de Mont-Saint-Martin, en Meurthe-et-Moselle,… C’est chez les voisins, ça ! …a invité le Président de la République à venir prendre la mesure des dégâts : sa ville, qui subit déjà les conséquences du recul de services publics, a déploré ces dernières semaines, comme bien d’autres communes, l’incendie d’une école, d’un centre pour autistes, de la maison médicale, des locaux du club de foot, ainsi que l’attaque du collège et d’une école maternelle. Le maire est atterré, mais il souhaite aller vite : il a déjà entamé la reconstruction, comme me le disait Jean-Paul Lecoq.
Nous avons une responsabilité à l’égard de l’ensemble de ces élus et de ces populations qui s’interrogent sur l’avenir immédiat et à long terme des services publics et de leur budget, tout simplement. Ils se demandent s’ils pourront satisfaire rapidement aux besoins quotidiens des habitants.
Or nous estimons que le projet de loi ne répond que très partiellement à ces interrogations.
Dans une séquence longue particulièrement délicate pour les collectivités locales, en particulier pour les communes populaires, la question des dotations, en particulier de la dotation globale de fonctionnement, est à nouveau légitimement posée. La proposition du groupe GDR-NUPES visant à indexer la DGF sur l’inflation, récemment défendue par Jean-Marc Tellier, n’en prend que plus de relief.
Plus fondamentalement, réparer les bâtiments qui hébergent les services publics de proximité mentionnés par les différents orateurs, ce n’est pas réparer le service public. Vous êtes très sévèrement attendus sur ce point, alors que, comme nous vous l’avons constamment rappelé, vous n’avez cessé d’aggraver la situation des services publics en adoptant à leur égard une logique de rigueur et d’attrition, budget après budget. Nous nous y opposerons de nouveau à la prochaine rentrée.
Nous déplorons l’absence dans ce projet de loi de toute mesure concernant le secteur assurantiel. À nos yeux, il est absolument nécessaire de mettre à contribution et de responsabiliser les compagnies d’assurances afin de garantir la réparation intégrale des dommages subis par les particuliers, par les associations et les organismes de logement notamment.
Actuellement, la loi pose pour principe, selon les termes de l’article L 121-8 du code des assurances, que « [l]’assureur ne répond pas […] des pertes et dommages occasionnés […] par des émeutes ou par des mouvements populaires ». Nous avions déposé un amendement visant à rendre obligatoire la couverture intégrale de ces risques et un autre tendant à instaurer une contribution exceptionnelle des compagnies d’assurances afin d’alimenter un fonds destiné à indemniser les particuliers et les associations victimes de dégradations. Nous regrettons profondément que ces amendements aient été déclarés irrecevables.
Comme je le disais, ce projet de loi est attendu par les élus locaux. Il devra être suivi très rapidement, en particulier lors des débats budgétaires de l’automne, d’autres dispositions financières. Nous aurons donc l’occasion de vous demander à nouveau des comptes sur votre politique.
Pour en revenir au projet de loi que nous examinons dans les derniers jours de la session extraordinaire, nous vous annonçons notre vote efficace et sobre en faveur de ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE et LR.) Très bien ! La parole est à M. Benjamin Saint-Huile. La colère, si légitime et partagée soit-elle, ne pourra jamais justifier les violences aveugles et sourdes perpétrées partout sur le territoire national il y a quelques semaines.
L’émotion qui s’est emparée du pays après la mort d’un jeune homme prénommé Nahel à Nanterre est légitime. Elle soulève des interrogations ; le travail des enquêteurs et de la justice permettra de faire la lumière sur les conditions qui ont conduit à cette situation inacceptable.
Néanmoins, le temps n’est pas venu – fort heureusement – pour que reprenne le concours des petites phrases, des déclarations faciles, de la caricature. Nous savons, nous qui sommes en prise avec la réalité du quotidien – un certain nombre d’entre nous avons administré des communes –, quel choc c’est pour nos concitoyens de voir disparaître dans ces moments de violence, des lieux d’apprentissage, de culture, ces lieux qui manifestent la République, qui font sens et qui définissent le vivre ensemble. (Murmures sur les bancs du groupe RN.)
Nous ne pouvons pas accepter une seule seconde que soit remise en cause la capacité qu’a chacun de s’appuyer sur un service public fort qui accompagne tous les citoyens de France, aussi bien les plus fragiles, les plus éloignés des services du quotidien, que ceux qui vivent à leur proximité. Nous avons été profondément marqués et meurtris par ces moments qui ont soustrait à nos populations ce bien que certains n’ont que trop peu, les manifestations concrètes de la capacité à vivre ensemble à travers les outils de la République, qu’ils soient portés par l’État lui-même ou par les collectivités. Notre pays devra s’interroger sur les réponses à apporter à cet épisode si violent.
Une fois encore, nous devons rappeler que dans un pays comme le nôtre, avec pour seules boussoles la République et l’intérêt général, il n’est plus acceptable de voir les forces de sécurité remises en cause de manière systémique, de voir les sapeurs-pompiers en intervention se faire caillasser dans certaines parcelles de la République. Très juste ! En disant cela, nous n’affirmons pas que la seule réponse soit le renforcement de l’ordre. Il faut de l’ordre ! Droits et devoirs ! Nous savons, nous qui sommes en prise avec les populations, qu’une réponse globale et complexe doit être construite. Elle doit répondre à une politique que certains considéreront comme trop sociale : nous devons accompagner ceux qui espèrent voir leurs enfants vivre mieux qu’ils ne vivent eux-mêmes, dans des quartiers où parfois la question de la discrimination n’est plus assez posée, où l’origine, la couleur de peau ou le prénom peuvent être un prétexte pour interroger la possibilité de vivre ensemble.
Le temps de construire cette réponse viendra. Je souhaite, sans nourrir toutefois trop d’espoir, que ce débat puisse se tenir sans verser dans la facilité ou la caricature. (Sourires sur les bancs du groupe LR.) Ça, c’est drôle ! En examinant ce projet de loi, nous tentons d’apporter une réponse immédiate à la question de la reconstruction, qui fait sens pour tout le monde et qui permet aux élus locaux de construire la République qui avance. Nous devons répondre vite et fort à ces émeutes inacceptables,… Inacceptables, c’est le mot ! …afin de permettre aux enfants d’ici et d’ailleurs d’être scolarisés dans de bonnes conditions, et à la culture de constituer un moyen d’émancipation et d’ouvrir des chemins pour la jeunesse.
Je l’affirme sincèrement, ce projet de loi est utile et nécessaire. Monsieur le ministre, monsieur le rapporteur, vous l’avez dit : ce texte est la suite logique des discussions qui ont eu lieu entre les élus locaux, l’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) et le Président de la République.
Certaines dispositions pourraient bien sûr être discutées et améliorées. Nous tenterons de le faire malgré le temps réduit dont nous disposons. Toutefois, le principe qui doit nous guider est la volonté de permettre une reconstruction rapide. Nous voterons les procédures d’urgence qu’autorise ce texte, tout en vérifiant ensemble que nous ne créons pas à travers elles un biais qui pourrait favoriser les grandes entreprises au détriment des très petites entreprises (TPE) ou des petites et moyennes entreprises (PME). Il a raison ! Ce sera l’un des rares sujets sur lesquels nous engagerons une discussion. Pour le reste, vous pouvez compter sur la solidarité du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT et Dem, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE et HOR.) La parole est à M. Robin Reda. Au nom du groupe Renaissance, je commencerai par rendre hommage aux maires, aux élus locaux, mais aussi aux forces de police et de gendarmerie, aux pompiers, aux agents techniques des municipalités qui ont courageusement fait face aux nuits de violences fin juin, début juillet. (M. Emmanuel Lacresse applaudit.)
Les maires, en particulier ceux des plus de 500 communes frappées par des déchaînements haineux, ont assisté médusés, attristés et souvent même en colère, à la dégradation ou à la destruction de projets qu’ils avaient mis du temps à imaginer, à défendre, à financer et à construire. Ils ont assisté au pillage de commerces de proximité qui font l’âme des centres-villes. J’ai une pensée particulière pour les communes de la région Île-de-France, du département de l’Essonne et de ma circonscription, qui ont été douloureusement affectées.
Après ces émeutes traumatisantes, deux positions irréconciliables ont immédiatement émergé dans le débat public. D’une part, il y a ceux qui voudraient tout excuser, tout laisser passer ; d’autre part, il y a ceux qui voudraient tout laisser tomber. D’une part, ceux qui, au fond, auraient bien voulu que les émeutes continuent, même s’ils affirment ouvertement qu’ils préfèrent qu’on s’en prenne à des bijouteries plutôt qu’à des bibliothèques ; d’autre part, ceux qui auraient bien voulu que la réponse de l’État ne soit pas à la hauteur, afin de pouvoir faire leur beurre d’une impuissance supposée. Ce n’est pas l’heure de polémiquer ! L’État a été au rendez-vous. Police, gendarmerie, justice : le volontarisme de l’État régalien a démontré son efficacité (Exclamations sur les bancs du groupe RN) pour mettre fin à un embrasement que rien ne pouvait justifier ni excuser. C’est la quatrième dimension ! Quelles que soient les émotions qui peuvent nous saisir dans l’actualité, elles ne peuvent justifier les intimidations et les exactions. Très bien ! Nous voulons dire aux habitants des villes et des quartiers où des vitres sont brisées, des locaux de services publics brûlés, que personne ici ne les abandonnera. Nous avons résolument choisi notre camp : nous sommes aux côtés de ceux qui s’engagent, pas de ceux qui saccagent – et j’espère que ce sera le cas de tout le monde à l’issue de nos débats. Très bien ! Le projet de loi que nous allons examiner apporte une réponse rapide aux élus de nos collectivités, désemparés face aux réinvestissements qui les attendent. La simplification que nous proposons doit être une invitation à ne pas baisser les bras. L’urgence, c’est de faire flotter à nouveau le drapeau tricolore partout dans nos centres-villes et dans nos quartiers, et de montrer sans délai que la République ne se laisse pas impressionner. Nous nous engageons pour dire que la République sera toujours plus forte que les attaques qui tentent de l’affaiblir. Il serait temps ! Mes chers collègues, nous ne sommes pas ici pour rendre la justice, même si, comme tous les Français, nous sommes nombreux à espérer des sanctions effectives à l’encontre de tous ceux qui ont été identifiés parmi les casseurs des nuits de juillet. Oui, ceux qui ont cassé doivent payer. Mais ceux qui n’ont rien demandé ont, eux aussi, le droit de ne pas être les oubliés de l’affaire. Exactement ! Ils vont payer aussi ! Le ministre l’a rappelé hier lors de l’examen du texte en commission : nous donnerons à nos collectivités, à nos territoires, les moyens financiers de reconstruire. Nous ne sommes pas la majorité qui a baissé les dotations aux collectivités territoriales ; nous ne sommes pas non plus celle qui a réduit le périmètre des quartiers prioritaires de la politique de la ville, privant des centaines d’habitants de moyens, ni celle qui construit davantage encore dans des quartiers comptant déjà trop de logements sociaux. Nous sommes la majorité de l’équilibre des territoires. Oh ! Le temps de l’analyse des causes viendra, mais nous en connaissons au moins une :… Le laxisme ! …nous savons qu’il faut que chacun se sente partie d’une nation. Nous devons trouver une nouvelle manière de nous réunir autour de tout ce qui fait l’identité française, car une nation, c’est un symbole et des idées qui nous font tenir ensemble et mener un projet commun. Mettez fin à votre politique néolibérale, ça améliorera déjà la situation ! Mais ce projet commun, il commence tout en bas : la nation se construit d’abord autour des quatre murs d’une mairie, d’une école ou d’une maison des associations.
Nous sommes ici pour dire à la majorité silencieuse de nos concitoyens de ne pas désespérer : notre majorité ne se résignera jamais. Quelle majorité ? Rien ne justifie la violence – la culture de l’excuse n’est pas un programme –, mais rien ne justifie non plus de priver nos enfants de retrouver leur école à la rentrée, de priver nos policiers de locaux d’intervention,… Il faut faire payer les coupables ! …de laisser des gens aux portes explosées d’un bureau de poste, d’empêcher les habitants de faire du sport ou de s’épanouir par la culture. En faisant payer les coupables ! Dans le sage sillon tracé par le Sénat, nous espérons pouvoir adopter rapidement ce projet de loi, qui prévoit des habilitations qui permettront à M. le ministre d’agir rapidement et efficacement. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.) (À neuf heures cinquante, M. Sébastien Chenu remplace Mme Valérie Rabault au fauteuil de la présidence.)
Présidence de M. Sébastien Chenu
vice-président
La parole est à M. Antoine Villedieu.
Il existe bien des références historiques aux 100 jours annoncés par Emmanuel Macron ; malheureusement, l’histoire ne retiendra des 100 jours de 2023 qu’une vaste supercherie, donnant lieu à une situation marquée par le chaos et l’embrasement. Huit jours d’émeutes seulement, et un bilan pourtant bien plus lourd que celui de 2005, où elles avaient duré trois semaines. J’ai une pensée pour nos policiers, nos gendarmes et nos sapeurs-pompiers, qui, au milieu des affrontements, ont su assurer leur mission. Pendant ce temps, nos commerçants assistaient, impuissants, au pillage et au saccage de leurs boutiques, les habitants des quartiers voyaient les flammes emporter leurs véhicules, et des passants étaient pris à partie sans raison par des meutes de sauvages. Qui était alors aux commandes ? Emmanuel Macron ? Certainement pas : il assistait à un concert ! Visiblement, quand le chat n’est pas là, les souris pataugent.
(« Qu’est-ce qu’il raconte ? » sur les bancs du groupe RE.)
Ces 100 jours d’abandon se seront soldés par huit jours de destruction : voilà ce que retiendront les Français. Vous allez le répéter combien de fois ? Nous allons débattre d’un projet de loi relatif à l’accélération de la reconstruction et de la réfection des bâtiments dégradés ou détruits au cours des violences urbaines survenues du 27 juin au 5 juillet. Pourtant, à sa lecture, on ne constate que de timides références aux casseurs. Non, il ne s’agit pas d’une catastrophe naturelle dont les causes seraient exogènes : les responsables, nous les connaissons, ce sont principalement des jeunes issus des banlieues, rassemblés pour en découdre et casser – le tout avec la bénédiction des élus de la NUPES. (M. René Pilato incline son pouce vers le bas.) Oui, chers collègues, en refusant d’appeler au calme et en jetant constamment de l’huile sur le feu,… Vous vous êtes regardés dans la glace ? …certainement aveuglés par votre éternel fantasme de voir nos institutions s’effondrer, vous avez une part de responsabilité dans ce chaos. Où êtes-vous allé chercher ça ? Pendant ce temps, notre gouvernement tremblait, incapable de rétablir l’ordre dans les rues : selon certains observateurs de terrain, c’est l’intervention des narcotrafiquants qui aurait permis un retour au calme. (M. Philippe Vigier s’exclame.) Heureusement, les Français ont compris – et ils l’expriment ouvertement – que seule Marine Le Pen (« Ah ! » sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR) ,… Il aura sa gommette ! (Sourires.) … aura le courage de faire face à une violence devenue endémique. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Sans surprise, votre texte, qui prévoit des hausses d’impôts et de cotisations d’assurance, prévoit finalement de faire payer la France qui travaille, celle qui ne fait pas de bruit et ne casse pas. Pour elle, ce sera la double peine. La racaille détruit et les Français payent. Dans ce projet de loi, vous traitez les effets sans jamais vous attaquer aux causes : effacer au plus vite les stigmates des émeutes et faire oublier aux Français votre incapacité à agir dans leur intérêt, voilà son véritable objectif !
Les responsables et les causes de ce que nous avons vécu ne peuvent être ignorés : ce sont ceux qui nous haïssent, galvanisés et nourris par un sentiment de toute-puissance et d’impunité, ceux qui habitent des zones de « non-France » et empruntent le chemin de la sécession. Mais ce sont aussi quarante années d’une politique migratoire anarchique, associée à des réponses pénales inadaptées, notamment une absence d’exécution des peines. La culture de l’excuse et la repentance permanente poussent notre pays à une inversion des valeurs : les coupables deviennent des victimes, les victimes des coupables.
Nous devons être impitoyables avec ceux qui cultivent la haine anti-France, attaquent nos symboles et profanent nos mémoriaux : c’est aux émeutiers d’assumer l’entière responsabilité de leurs actes, sur le plan pénal comme sur le plan civil. Exactement ! Ils doivent rembourser l’intégralité des dommages qu’ils ont causés – à perpétuité s’il le faut. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Comme l’a rappelé Marine Le Pen lors d’une conférence de presse… Deux gommettes ! …les solutions existent, monsieur le ministre, il suffit de les appliquer : le principe du casseur-payeur doit devenir la règle, les émeutiers étrangers doivent être expulsés, les allocations familiales des familles de délinquants mineurs doivent être supprimées, la majorité pénale doit être abaissée à 16 ans. À 5 ans, tant que vous y êtes ! Le bagne ! Ce texte restera un pansement sur une jambe de bois. Une fois encore, les Français paieront quarante années de lâcheté politique, de clientélisme et d’aveuglement idéologique. Des élus Les Républicains (Exclamations sur les bancs du groupe LR) … Oubliez-nous ! …à ceux de la NUPES, en passant par ceux du centre, vous êtes tous complices de cette situation.
Monsieur le ministre, sachez que les députés du Rassemblement national n’auront jamais les mains qui tremblent face à la racaille. Nous le disons aux Français : lorsque nous serons au pouvoir, nous rétablirons l’ordre et nous rendrons la France à la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Dommage, vous avez oublié de conclure en citant le nom de Marine Le Pen ! La parole est à Mme Raquel Garrido. Cette loi permettra-t-elle de reconstruire avant septembre l’école maternelle de La Verrière, dans les Yvelines ? Cette loi permettra-t-elle de reconstruire rapidement l’antenne de police de Bagnolet, chez moi, en Seine-Saint-Denis ? Quelle indécence ! Vous qui détestez la police ! Cette loi nous garantira-t-elle la reconstruction rapide – la reconstruction tout court, même – de tous les bâtiments destinés à un service public ? Non, et vous le savez bien. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
En effet, tout d’abord, il n’y a pas de garantie de financement. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Collègues de l’extrême droite, laissez au moins les autres intervenir. (Vives exclamations sur les bancs du groupe RN.) Seul le président préside ! Je vais gérer, madame la députée. La loi (Mêmes mouvements) … On parle des mairies, cela ne vous intéresse pas ? Nous, si. On ne remet pas en cause la présidence ! Laissez-moi gérer, madame Garrido, ce sera plus efficace. Le texte n’oblige pas les mairies à assurer leurs bâtiments. Bien que nous n’ayons pas de données précises sur ce sujet, votre ministère estime pourtant que presque la moitié des collectivités ne sont effectivement pas couvertes par une assurance.
Le texte permettra-t-il de débloquer de nouveaux crédits en urgence pour répondre aux besoins de reconstruction ? Non ! Une circulaire de la Première ministre du 7 juillet 2023 prévoit au contraire d’aller piocher dans les fonds existants, les obérant de 94 millions d’euros qui ne pourront donc financer les politiques publiques auxquelles ils devaient initialement être consacrés. Avec un budget limité et imprévisible, certaines collectivités devront faire un choix : faut-il privilégier la reconstruction de la cantine de l’école ou celle de la bibliothèque ? Ce dilemme n’est pas acceptable : votre rôle, c’est de garantir que tout sera reconstruit. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Même l’hôtel de police ? (Sourires.) Et qui va payer ? Pour avoir l’assurance que les travaux démarrent au plus vite, il faudrait un nouvel engagement financier dans l’exercice 2023. Vous devez vous engager à débloquer ces nouveaux fonds dans le cadre d’un projet de loi de finances rectificative qui serait présenté à l’automne – c’est le véhicule que vous avez choisi pour défendre le report de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans, vous pouvez bien l’utiliser aussi pour assurer la reconstruction. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Quelle indécence, franchement ! Et, par pitié, ne me dites pas que le paiement en avance du FCTVA ou la suppression de l’obligation de participation minimale des collectivités équivalent à un reste à charge nul pour ces collectivités : c’est faux. Les fonds du FCTVA appartenaient déjà aux mairies, et les débloquer par anticipation n’y changera rien ;… C’est insensé ! …et, si les collectivités n’ont plus à apporter de concours financier, le problème reste entier : qui financera les 100 % restants ? Le principe du casseur-payeur ! Le pire n’est pas que vous traitiez mal la question matérielle, mais que vous gériez mal la question immatérielle. Collègues, c’est la première fois que nous sommes réunis pour parler de la réplique à apporter à l’homicide volontaire qui a entraîné la mort de Nahel, le 27 juin. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Vous êtes juge ? Le texte ne fait pas mention de cet événement, comme si vous vouliez l’effacer de nos mémoires. (« Hors sujet ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.) Ce n’est pas le sujet ! Le Président de la République lui-même ne s’est toujours pas exprimé.
Votre texte concerne effectivement les biens détruits ou dégradés à partir du 27 juin, jour de la mort de Nahel, mais en ne parlant que de la réponse à y apporter, vous omettez de traiter les problèmes mis au jour par l’homicide volontaire (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES) – c’est-à-dire le meurtre. (« Et la justice ? » sur plusieurs bancs du groupe RN.)
Je ne m’arroge pas le droit de préjuger de la culpabilité d’un homme – tout homme est présumé innocent –, mais il s’agit bien de la qualification juridique qui a été retenue par la justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Il y aura un procès, le policier plaidera qu’il a utilisé son arme dans le cadre de la loi relative à la sécurité publique de 2017. Qu’attendez-vous pour abroger le 4o de l’article L. 435-1 du code de la sécurité intérieure ? (Mêmes mouvements.) Qu’il y ait davantage de morts ? Treize meurtres en 2022 ne suffisent-ils pas ? La mort de Nahel – son meurtre, pour reprendre la qualification retenue par la justice à ce stade – n’est-elle pas suffisante ? (« Arrêtez ! » et « Quelle honte ! » sur les bancs du groupe RN.)
Quand traiterez-vous enfin la question du racisme dans la police ? Voilà ce qui construirait la paix, comme c’est notre rôle à tous. (Exclamations sur les bancs du groupe RN et sur quelques bancs du groupe LR.) N’entendez-vous donc pas la petite musique de la guerre civile ? Il faut répondre. (Mêmes mouvements.) Collègues… Mes chers collègues, il est dix heures du matin, c’est encore trop tôt pour un tel brouhaha. Exactement ! Ce n’est pas possible ! Pour encore quarante secondes, seule Mme Garrido a la parole : je vous prie de la laisser terminer son propos. Je ne suis pas née en France : j’y suis arrivée à l’âge de 14 ans, et ne suis devenue Française qu’à l’âge de 25 ans. (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.) Jamais je n’accepterai que vous opériez un tri entre les Français en fonction de leur ascendance ou de leur religion. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Inaki Echaniz applaudit également.) Je n’ai pas de pays de rechange, vous n’avez pas de pays de rechange ! (Exclamations continues sur les bancs du groupe RN) Vous ne vous débarrasserez ni de moi ni des autres ! Protégeons ce pays (« Notre pays ! » sur les bancs du groupe RN), protégeons la République, protégeons la justice et la paix : c’est notre devoir à tous. (Les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent.) Quel théâtre ! Vous êtes complètement fous ! C’est l’hôpital qui se fout de la charité ! Dans le calme enfin revenu, la parole est à M. Inaki Echaniz. Le 27 juin, un jeune garçon de Nanterre, Nahel Merzouk, était abattu par un policier à l’occasion d’un contrôle routier, nouvelle victime d’une terrible série qui pose la question des conditions de l’usage de leur arme par les forces de l’ordre et, plus largement, de notre doctrine de maintien de l’ordre et du rapport entre la police et la population. Comme vous l’avez rappelé, monsieur le ministre, ce n’est pas l’objet de notre discussion aujourd’hui : la justice doit suivre son cours et le Parlement doit jouer son rôle de contrôle. À cet égard, le groupe Socialistes et apparentés a sollicité et obtenu une évaluation de la loi relative à la sécurité publique de 2017 ; mon collègue Roger Vicot en sera corapporteur au nom de l’opposition.
Ce qui nous rassemble ce matin, c’est l’enjeu de la reconstruction. En effet, entre le 27 juin et le 5 juillet, ce drame a donné lieu à une flambée de violences, initialement alimentée par une réponse judiciaire perçue comme complaisante envers les policiers, alors qu’une vidéo des faits contredisait les premiers éléments fournis par ces derniers. Ces violences, que nous condamnons une nouvelle fois sans réserve, ont pris une ampleur inédite depuis celles de 2005 consécutives à la mort de Zied Benna et Bouna Traoré. La dégradation voire la destruction de mairies, de commissariats, d’écoles, de crèches, de médiathèques a privé nos concitoyens d’accès à certains services publics, souvent dans des territoires où ceux-ci sont déjà peu présents ; des bureaux, des commerces, les locaux professionnels d’artisans ont également été touchés, ainsi que des véhicules privés, aux dépens de ceux qui se lèvent tôt pour se rendre au travail. Il est de notre responsabilité de leur apporter une réponse rapide : c’est pourquoi nous soutiendrons ce projet de loi bienvenu. En les faisant payer ? Je souhaite néanmoins, comme je l’ai fait en commission, commencer par évoquer ce qui ne figure pas dans le texte et qu’il importe de traiter urgemment. Il y a tout d’abord la question des assurances : alors que nous souhaitons reconstruire à la fois vite et, en ce qui nous concerne, bien, des mois et même des années risquent d’être perdus en expertises, contre-expertises et autres négociations en vue de protocoles transactionnels. Certaines collectivités ne pourront entamer les travaux avant d’avoir reçu une compensation, et elles n’entrent pas nécessairement dans le périmètre du texte. Il faudra, monsieur le ministre, que le Gouvernement amène rapidement les assureurs, dont nous gardons à l’esprit la mauvaise volonté initiale au début de la pandémie de covid-19, à prendre toute leur part.
S’ajoute logiquement à ce sujet celui des moyens et aides financières : si le projet de loi vise à faciliter l’obtention de taux élevés de cofinancement, encore faut-il que les crédits existent et qu’ils soient vite mobilisés. En la matière, nous avons besoin d’une réelle visibilité : les moyens alloués à la reconstruction ne doivent pas se limiter au recyclage de crédits des dotations de soutien à l’investissement local (DSIL).
S’agissant des dispositions que le Gouvernement souhaite pouvoir prendre par voie d’ordonnance, nous vous inviterons par nos amendements, monsieur le ministre, à prendre au banc un certain nombre d’engagements visant à ce que des intentions partagées trouvent une traduction concrète. D’ores et déjà, vous avez apporté en commission des garanties, par exemple au sujet des bailleurs sociaux : je n’y reviendrai pas. Il est notamment essentiel pour notre groupe que les reconstructions à l’identique respectent les normes les plus récentes et les plus exigeantes concernant l’accessibilité, la sécurité, le statut thermique ; essentiel également de concilier, touchant la commande publique, volonté d’aller vite, préservation des deniers publics et prévention des risques de corruption. Nous défendrons par voie d’amendement une proposition simple qui permettrait un meilleur contrôle démocratique sans compromettre les objectifs visés. Je ne doute pas, monsieur le ministre, que vous saurez nous rassurer et prendre les engagements nécessaires au cours du débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.) Oh là là ! Quelle force dans le propos ! La parole est à M. Philippe Vigier. Monsieur le ministre (Sourires) … Les images que nous avons tous pu voir entre le 27 juin et le 5 juillet sont dramatiques : durant des jours, elles ont montré une République fragilisée, déstabilisée. J’ai naturellement une pensée émue pour la famille de ce jeune qui est mort, mais aussi pour tous les agents des forces de l’ordre qui, jour et nuit, ont tenu bon afin que le calme et la paix reviennent, que nous puissions avancer. (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.) Comme l’a dit le ministre, nous en sommes au moment de l’analyse des faits, des enquêtes judiciaires, de la politique de la ville – les députés Écologistes n’étant pas encore là, j’y reviendrai à la fin de mon propos, car, de même que Thierry Benoit, je suis là depuis quelques années. En la matière, il conviendra de savoir, monsieur le ministre, pourquoi les résultats ne sont pas à la hauteur des moyens que nous déployons depuis de longues années. Je n’oublie pas que 500 communes ont été touchées, 750 bâtiments publics ou privés abîmés, détruits ; je pense à tous ceux qui ont perdu leur outil de travail, au médecin généraliste dont le cabinet a brûlé, à l’infirmière sans voiture, aux enseignants sans école, à l’incendie du bus du cœur des femmes, où des soignants proposaient de dépister gratuitement diverses pathologies. Ces images sont celles d’une France défigurée, et c’est tout à votre honneur, monsieur le ministre, que vous nous présentiez dans l’urgence ce texte qui vise à essayer d’en effacer les stigmates.
S’agissant d’urbanisme, de logement, de construction, le rapporteur a d’ailleurs été judicieusement choisi : Jean-Paul Mattei est un orfèvre ès matières, et je suis persuadé que, dès la promulgation des ordonnances, il vous facilitera la tâche de toutes les façons. Ceux d’entre nous qui exercent des fonctions locales, qui ont été maire, savent qu’il faut d’ordinaire compter plusieurs mois pour réhabiliter un commerce, trois ans pour réaliser une école. Or nous sommes en train d’envoyer un signal au pays : en cas de crise, nous sommes capables de réagir rapidement, d’assouplir les règles, tout en garantissant que les bâtiments reconstruits seront bien plus performants du point de vue énergétique ! Hier, madame Garrido, vous vous êtes émue en commission de ce qu’il n’y avait « pas un seul centime de prévu pour financer la reconstruction » : je me permettrai de vous rappeler que récupérer immédiatement la TVA évite une ligne de trésorerie et deux ans d’attente. Ça, c’est déjà de l’argent public ! Eh oui ! Très bien ! Quand vous aurez géré une collectivité, vous verrez comment se passent les choses. (M. René Pilato s’exclame.) En outre, la fongibilité des aides d’État, dispositif exceptionnel, profitera au monde rural comme au monde urbain : c’est pourquoi je me suis élevé en commission contre l’amendement no CE60, qui visait à exclure des fonds mobilisables la fameuse dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR). Quant aux marchés publics, madame Garrido, nous ne foulerons pas aux pieds le contrôle de légalité, bien au contraire, il sera bien là, à la fin ; il s’agit de faciliter leur conclusion en dispensant de publicité et d’allotissement jusqu’à 1,5 million d’euros – sans doute aborderez-vous ce point, monsieur le ministre. Ce sera là une réponse très forte. Il ne reste plus à l’Assemblée qu’à adopter le texte, dès la première lecture, dans les mêmes termes que le Sénat, afin que nous soyons immédiatement opérationnels ! J’imagine que le Gouvernement, de son côté, aura à cœur de promulguer les ordonnances le plus vite possible. Encore une fois, c’est une réponse que nous adressons à la France, à ces maires que nous vénérons tous, qui sont les piliers de la République, et qu’il faut conforter. Les Français nous regardent ! J’ai été indigné de constater le renoncement permanent du Rassemblement national (Exclamations sur les bancs du groupe RN) :… C’est vous qui renoncez à faire payer les casseurs ! Chers collègues, s’il vous plaît ! …ne pas voter pour un tel texte parce que vous souhaitiez voir qualifier autrement ces violences urbaines, il faut le faire ! La France saura que vous n’avez pas voulu reconstruire. Pas avec l’argent des Français ! La reconstruction n’attendra pas quatre années : elle doit commencer maintenant ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. le président de la commission des affaires économiques, applaudit également.) C’est votre responsabilité, et nous la ferons connaître ! Ce n’est pas au contribuable de payer la casse ! Quant à la NUPES, en particulier aux Écologistes (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES) , je regrette que Mme Chatelain ne soit pas là. J’étais déjà député à l’époque où un gouvernement de gauche a diminué de 13,5 milliards d’euros le montant des dotations aux collectivités locales (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem) , tandis que les moyens alloués à la politique de la ville s’effondraient de 40 %. Quel culot vous avez ! Quelle honte ! (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Quand on sait à quel point l’État se mobilise par l’intermédiaire du fonds Vert et des plans de relance, vous devriez au moins… Merci, cher collègue. Je termine, monsieur le président ! Vous venez théoriquement de terminer, d’ailleurs… Jamais les collectivités n’ont été autant aidées. Alors, je le répète, avançons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.) Bravo ! C’est au sein d’un hémicycle apaisé pour accueillir nos visiteurs dans les tribunes du public que je donne la parole à Mme Emmanuelle Ménard. C’était hier soir à la télévision, Les Visiteurs ! Monsieur Minot, ce n’est pas parce que c’est votre anniversaire que vous devez la ramener matin, midi et soir… (Sourires.) Madame Ménard, vous avez la parole. Chers collègues, 23 878 feux sur la voie publique, 12 031 véhicules incendiés, 2 508 bâtiments incendiés ou dégradés, dont 273 postes de police ; 105 mairies incendiées ou dégradées, 168 écoles attaquées, 17 élus menacés ou agressés ; enfin 3 505 personnes interpellées et – c’est heureux – plus d’un millier de condamnations. La stupéfaction suscitée par ce déchaînement de haine a vite laissé place à la peur, à la colère. Rien ne peut justifier les violences qui ont enflammé notre pays ! Elles sont insupportables, inacceptables, impardonnables. Tout y est prétexte et récupération. Elles ne visent en aucun cas à exprimer une émotion légitime, mais bien à fouler aux pieds nos institutions, à détruire tout ce qui les incarne. Disons-le franchement : les émeutiers se contrefoutent de la mort de Nahel ! (« Elle a raison ! Bravo ! » sur quelques bancs du groupe RN.) Vous aussi, manifestement ! À Béziers, une cinquantaine de voyous ont dévasté leur quartier, celui de La Devèze, où plus de 150 millions avaient été investis afin d’assurer le bien-être des 4 000 habitants. Ils ont gravement détérioré la mission locale pour l’insertion professionnelle et sociale des jeunes, c’est-à-dire une structure conçue pour eux, incendié la maison de quartier où leurs petits frères et sœurs étaient accueillis en vue de séjours en centre de loisirs, les privant de vacances cet été ; la mairie annexe a été saccagée, des véhicules brûlés. Dans un autre quartier, le bureau de poste et divers commerces ont subi des dégâts considérables. Sous les attaques et les jets de projectiles, les policiers nationaux et municipaux, les gendarmes, les pompiers ont fait preuve d’un sang-froid à toute épreuve. L’enveloppe nécessaire à la remise en état sera lourde : dans ma ville, la première estimation avoisine 1 million d’euros pour les seuls bâtiments publics. Qui va payer la note ? Les Français, bien sûr, d’une façon ou d’une autre, ce qui est terriblement injuste !
Afin de rassurer nos compatriotes, le chef de l’État a promis un texte d’urgence, celui-là même que nous étudions ce matin. Vous y prévoyez la possibilité d’un affranchissement partiel ou total des obligations en matière de participation financière qui pèsent sur une collectivité maître d’ouvrage lorsque d’autres personnes publiques contribuent au financement du projet : d’une part le fait que la participation du maître d’ouvrage doit représenter au moins 20 % du total de celle des personnes publiques, d’autre part les fonds de concours permettant à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre et à ses communes membres de contribuer aux investissements les uns des autres. C’est là une bonne idée, même si vous n’ignorez pas qu’elle ne règle rien au fond : il reviendra à l’État, c’est-à-dire au contribuable, de mettre la main à la poche, subissant ainsi la double peine de payer la réparation d’équipements qu’il a déjà financés.
Parce que la reconstruction constitue une urgence, je voterai en faveur de ces dispositions. (« Ah ! » sur quelques bancs du groupe Dem.) Mais les casseurs dans tout ça ? Selon Sandrine Rousseau, malheureusement absente de l’hémicycle ce matin, s’ils pillent les magasins, c’est parce qu’ils sont pauvres, ce qui les met hors d’état de rembourser les dégâts qu’ils commettent – CQFD. À ce point, on ne peut même plus parler de naïveté ou de raisonnement absurde : il s’agit tout bonnement de complicité,… Très bien ! …soit l’exact contraire de ce qu’attend la grande majorité des Français ! Nous devrons nous contenter du flyer par lequel le garde des sceaux entend expliquer « en termes simples », dit-il, leurs obligations aux parents qui les « auraient oubliées ». Êtes-vous sérieux ? C’est Surprise sur prise ! Il faut des actes forts : pour ces petits voyous, ces casseurs, ces pilleurs qui n’ont pas atteint leur majorité, cela signifie la responsabilisation financière des parents, la condamnation systématique à des TIG consistant à nettoyer et réparer les dégâts, la restauration de l’autorité à l’école, avec un recentrage des programmes sur le français et sur l’éducation civique et morale ; le développement des internats et des centres éducatifs fermés (CEF), la remise en cause de l’excuse de minorité, de nouvelles places de prison. Bravo ! Nous n’en prenons pas le chemin. Une fois encore, une fois de trop, vous allez consciencieusement dissimuler la poussière sous le tapis. Pour combien de temps ? Regardons les choses en face : l’argent ne réglera pas tout ! Il convient surtout de s’interroger au sujet de la haine qui anime ces casseurs, ces voleurs – la haine de notre pays. Je dis bien « notre pays », car, à leurs yeux, ce n’est pas le leur : ils sont Français, mais seulement par leurs papiers. (« Quelle honte ! » sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Beaucoup parmi vous persistent à nier tout rapport entre ces émeutes et une immigration de masse, non choisie, non contrôlée (« Elle a raison ! » sur quelques bancs du groupe RN) :… Merci, madame Ménard. …qu’ils continuent ainsi ! Nous nous retrouverons un jour ici pour déplorer encore plus de dégâts et peut-être, qui sait, non plus un, mais plusieurs morts. La discussion générale est close.
La parole est à M. le ministre. Est-ce bien nécessaire ? Je serai bref, car je souhaite que nous puissions adopter rapidement ce texte d’urgence. Je voudrais simplement indiquer que nous répondrons, article par article, aux questions relatives au texte. S’agissant en revanche des causes des violences urbaines, qui ont donné lieu à plusieurs interpellations, je répète que ce sujet mérite mieux qu’un débat de quelques heures au mois de juillet. Il devra être traité les yeux ouverts, à la rentrée, sous une seule condition : que personne n’entre dans l’hémicycle en disant « Cela fait des années que je le dis, et j’ai raison ». Bien sûr, on peut compter sur vous pour ça ! On ne met pas de conditions à la discussion d’un texte ! Parce que sinon, bizarrement, certains diront des choses absolument contraires à ce que diront d’autres (Mme Aurélie Trouvé s’exclame) , selon une logique de prophétie autoréalisatrice qui ne correspond pas à ce que nous avons vécu.
J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
Sur l’amendement no 49, je suis saisi par le groupe Renaissance d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Nathalie Oziol. Le meurtre de Nahel Merzouk, 17 ans, le 27 juin dernier à Nanterre (Protestations sur quelques bancs du groupe RE) a déclenché une vague d’émotion et de colère à travers le pays. (« Non ! » sur quelques bancs des groupes RN et LR.) C’était un prétexte ! De nombreux biens publics, logements et commerces du quotidien ont été dégradés ou détruits. Plus de 12 000 voitures et 2 508 bâtiments ont été incendiés ou dégradés et plus de 1 000 commerces vandalisés, ce dont les habitants des quartiers, les commerçants et les usagers des services publics sont les victimes à double titre : d’abord parce qu’ils n’ont plus accès à ces lieux, mais aussi et surtout parce que ce sont eux qui subissent les conséquences des choix politiques désastreux faits par Emmanuel Macron et ses prédécesseurs depuis des décennies. Je pense à la destruction des services publics et à l’attaque des allocations chômage, alors que près d’un quart des habitantes et des habitants des quartiers populaires, en moyenne, sont au chômage. Je pense aussi à l’attaque des locataires et en particulier à la dernière loi en date, la loi Kasbarian-Bergé, visant à protéger les logements contre l’occupation illicite, contre laquelle nous avons déposé un recours au Conseil constitutionnel. Vous êtes hors sujet ! Allons ! En tant que président de commission, vous devriez avoir un comportement exemplaire, monsieur Kasbarian ! Je suis obligé de répondre, c’est de la provocation ! Un peu de silence, s’il vous plaît. Qui a détruit ces quartiers ? Ce texte devrait être l’occasion de s’interroger sur la façon de réparer le lien entre l’État et les quartiers populaires. L’article 1er porte sur les dérogations qui permettront d’accélérer les délais. Il faut certes s’intéresser à ces aspects techniques, mais on ne répond ainsi qu’à des enjeux matériels et logistiques. La dimension politique, elle, est totalement occultée dans ce texte. L’État peut encadrer l’indemnisation des sinistres, qu’ils aient touché des acteurs privés ou publics. Particuliers, petites et moyennes entreprises, services publics, associations : tous doivent obtenir une réparation intégrale que l’État peut et doit garantir. Ce sont les casseurs qui doivent payer ! Pour les commerces n’ayant pu rouvrir, il faudrait envisager un fonds de solidarité. Ce sont ces aspects politiques qui intéressent le groupe La France insoumise. (M. Manuel Bompard applaudit.) Je suis saisi de deux amendements, nos 49 et 98, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Nathalie Oziol, pour soutenir l’amendement no 49. Il vise à souligner la notion d’urgence : ce texte part du principe qu’il faut, de manière urgente, reconstruire ce qui a été détruit, tout en accordant un délai de trois mois au Gouvernement. Or, comme je l’indiquais précédemment, certains commerces ne pourront pas reprendre leur activité tant qu’ils n’auront pas été reconstruits. C’est le cas d’un bureau de tabac de ma circonscription, à Montpellier. Dans ce type de situation, la notion d’urgence doit être réellement prise en compte. Par ailleurs, un fonds de solidarité aiderait ces commerces à reprendre leur activité. (MM. Manuel Bompard et René Pilato applaudissent.) L’amendement no 98 de Mme Raquel Garrido est défendu.
Quel est l’avis de la commission ? Je précise au préalable que je concentrerai mes réponses sur le texte, même si je n’ignore pas les sujets qui ont été abordés. S’agissant des deux amendements en discussion, je soulignerai qu’il est difficile d’établir une ordonnance en une dizaine de jours. Le délai de trois mois prévu à l’article 1er et le délai de deux mois prévu à l’article 2 me semblent raisonnables pour rédiger correctement les ordonnances. Avis défavorable. Excellent ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Les délais proposés par ces amendements ne sont pas tenables. Dans l’hypothèse où le texte ferait l’objet d’un vote conforme, ce que je souhaite, nous n’aurions pas assez de temps entre le 20 et le 31 juillet – date suggérée par l’amendement no 49 – pour saisir le Conseil d’État et le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN). Les délais prévus par le texte sont ceux que le Conseil d’État a conseillés au Gouvernement ; je vous invite à suivre cette ligne. La parole est à M. Thibault Bazin. Si nous avons besoin de cet article 1er, c’est parce que le droit de l’urbanisme existant ne permet pas une reconstruction à l’identique dans tous les cas, que les propriétaires soient publics ou privés. Il faut donc pouvoir adapter les règles. Comme il s’agit de sujets techniques, les remontées du terrain sur les demandes d’autorisation seront nécessaires pour ajuster les dispositions. Même si l’ordonnance était présentée avant le 31 juillet, il ne serait d’ailleurs pas exclu qu’il faille la modifier pour tenir compte de cas particuliers, dans des secteurs sauvegardés ou en zone inondable par exemple. Des ordonnances prises trop rapidement risqueraient de laisser perdurer des trous dans la raquette ; ce serait profondément injuste pour les territoires ayant subi des émeutes et des violences urbaines. Je m’opposerai donc à ces amendements. Nous aussi. Sur un sujet aussi technique, il faut se donner quelques semaines pour pouvoir corriger le tir afin d’éviter qu’il y ait des oubliés parmi les victimes. Bien sûr, c’est du bon sens ! La parole est à Mme Nathalie Oziol.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Nathalie Oziol. Le meurtre de Nahel Merzouk, 17 ans, le 27 juin dernier à Nanterre (Protestations sur quelques bancs du groupe RE) a déclenché une vague d’émotion et de colère à travers le pays. (« Non ! » sur quelques bancs des groupes RN et LR.) C’était un prétexte ! De nombreux biens publics, logements et commerces du quotidien ont été dégradés ou détruits. Plus de 12 000 voitures et 2 508 bâtiments ont été incendiés ou dégradés et plus de 1 000 commerces vandalisés, ce dont les habitants des quartiers, les commerçants et les usagers des services publics sont les victimes à double titre : d’abord parce qu’ils n’ont plus accès à ces lieux, mais aussi et surtout parce que ce sont eux qui subissent les conséquences des choix politiques désastreux faits par Emmanuel Macron et ses prédécesseurs depuis des décennies. Je pense à la destruction des services publics et à l’attaque des allocations chômage, alors que près d’un quart des habitantes et des habitants des quartiers populaires, en moyenne, sont au chômage. Je pense aussi à l’attaque des locataires et en particulier à la dernière loi en date, la loi Kasbarian-Bergé, visant à protéger les logements contre l’occupation illicite, contre laquelle nous avons déposé un recours au Conseil constitutionnel. Vous êtes hors sujet ! Allons ! En tant que président de commission, vous devriez avoir un comportement exemplaire, monsieur Kasbarian ! Je suis obligé de répondre, c’est de la provocation ! Un peu de silence, s’il vous plaît. Qui a détruit ces quartiers ? Ce texte devrait être l’occasion de s’interroger sur la façon de réparer le lien entre l’État et les quartiers populaires. L’article 1er porte sur les dérogations qui permettront d’accélérer les délais. Il faut certes s’intéresser à ces aspects techniques, mais on ne répond ainsi qu’à des enjeux matériels et logistiques. La dimension politique, elle, est totalement occultée dans ce texte. L’État peut encadrer l’indemnisation des sinistres, qu’ils aient touché des acteurs privés ou publics. Particuliers, petites et moyennes entreprises, services publics, associations : tous doivent obtenir une réparation intégrale que l’État peut et doit garantir. Ce sont les casseurs qui doivent payer ! Pour les commerces n’ayant pu rouvrir, il faudrait envisager un fonds de solidarité. Ce sont ces aspects politiques qui intéressent le groupe La France insoumise. (M. Manuel Bompard applaudit.) Je suis saisi de deux amendements, nos 49 et 98, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Nathalie Oziol, pour soutenir l’amendement no 49. Il vise à souligner la notion d’urgence : ce texte part du principe qu’il faut, de manière urgente, reconstruire ce qui a été détruit, tout en accordant un délai de trois mois au Gouvernement. Or, comme je l’indiquais précédemment, certains commerces ne pourront pas reprendre leur activité tant qu’ils n’auront pas été reconstruits. C’est le cas d’un bureau de tabac de ma circonscription, à Montpellier. Dans ce type de situation, la notion d’urgence doit être réellement prise en compte. Par ailleurs, un fonds de solidarité aiderait ces commerces à reprendre leur activité. (MM. Manuel Bompard et René Pilato applaudissent.) L’amendement no 98 de Mme Raquel Garrido est défendu.
Quel est l’avis de la commission ? Je précise au préalable que je concentrerai mes réponses sur le texte, même si je n’ignore pas les sujets qui ont été abordés. S’agissant des deux amendements en discussion, je soulignerai qu’il est difficile d’établir une ordonnance en une dizaine de jours. Le délai de trois mois prévu à l’article 1er et le délai de deux mois prévu à l’article 2 me semblent raisonnables pour rédiger correctement les ordonnances. Avis défavorable. Excellent ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Les délais proposés par ces amendements ne sont pas tenables. Dans l’hypothèse où le texte ferait l’objet d’un vote conforme, ce que je souhaite, nous n’aurions pas assez de temps entre le 20 et le 31 juillet – date suggérée par l’amendement no 49 – pour saisir le Conseil d’État et le Conseil national d’évaluation des normes (CNEN). Les délais prévus par le texte sont ceux que le Conseil d’État a conseillés au Gouvernement ; je vous invite à suivre cette ligne. La parole est à M. Thibault Bazin. Si nous avons besoin de cet article 1er, c’est parce que le droit de l’urbanisme existant ne permet pas une reconstruction à l’identique dans tous les cas, que les propriétaires soient publics ou privés. Il faut donc pouvoir adapter les règles. Comme il s’agit de sujets techniques, les remontées du terrain sur les demandes d’autorisation seront nécessaires pour ajuster les dispositions. Même si l’ordonnance était présentée avant le 31 juillet, il ne serait d’ailleurs pas exclu qu’il faille la modifier pour tenir compte de cas particuliers, dans des secteurs sauvegardés ou en zone inondable par exemple. Des ordonnances prises trop rapidement risqueraient de laisser perdurer des trous dans la raquette ; ce serait profondément injuste pour les territoires ayant subi des émeutes et des violences urbaines. Je m’opposerai donc à ces amendements. Nous aussi. Sur un sujet aussi technique, il faut se donner quelques semaines pour pouvoir corriger le tir afin d’éviter qu’il y ait des oubliés parmi les victimes. Bien sûr, c’est du bon sens ! La parole est à Mme Nathalie Oziol.