XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023

Séance du jeudi 23 mars 2023

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024 et portant diverses autres dispositions (nos 809, 939).
Ce matin, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 47 à l’article 7 bis.
Sur l’article 7
bis , je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisie de deux amendements, nos 47 et 589, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Julie Lechanteux, pour soutenir l’amendement no 47.
L’article 7 bis prévoit qu’une enquête administrative peut être demandée avant l’affectation des personnels des entreprises de travail temporaire à une mission liée à la sécurité des personnes et des biens.
Si cette mesure nous paraît parfaitement nécessaire, compte tenu des risques inhérents à l’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (JO) de 2024, elle nous semble insuffisante pour garantir la sécurité au niveau national. Nous proposons que les personnels concernés fassent l’objet d’une enquête administrative obligatoire, en amont de leur prise de poste, afin de vérifier la compatibilité de leur profil avec l’exercice de la mission proposée. Le but est d’écarter les profils dangereux, susceptibles de présenter une menace pour l’ordre public.
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à Mme Gisèle Lelouis, pour soutenir l’amendement no 589. En prévoyant qu’une enquête administrative « peut » être demandée, vous ne cherchez pas à « garantir la sécurité des Jeux olympiques et paralympiques » mais à la « semi-garantir ». Nous proposons que l’enquête administrative soit effectuée systématiquement avant l’affectation des personnels. Nous n’avons pas le droit à l’erreur. L’honneur de notre nation, la sécurité des Français et des touristes étrangers est en jeu. Je suis sûre que, dans cet hémicycle, personne ne prendra la responsabilité de rejeter cet amendement de bon sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Sacha Houlié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour donner l’avis de la commission. Ces amendements présentent deux difficultés. La première est juridique : dans la mesure où l’article L. 114-2 du code de la sécurité intérieure prévoit qu’une enquête administrative peut être menée avant le recrutement de personnels, il serait étrange de la rendre obligatoire pour l’affectation d’intérimaires. La deuxième tient aux capacités de l’administration : le service concerné n’est pas en mesure d’effectuer toutes ces enquêtes. Enfin, c’est l’employeur qui doit rendre compte des personnels qu’il a affectés à ces missions temporaires ; il n’appartient pas à l’État d’assumer les responsabilités de l’employeur. Avis défavorable. La parole est à Mme la ministre des sports et des Jeux olympiques et paralympiques, pour donner l’avis du Gouvernement. Même avis, pour les mêmes raisons. Nous avons besoin de cette faculté, pas de rigidité. La parole est à Mme Gisèle Lelouis. Vous trouvez des justifications hasardeuses et méprisantes pour vous défausser. Si un événement grave, lié à ces affectations, devait survenir, vous seriez responsables devant les victimes. La parole est à M. Ugo Bernalicis. Même si l’exécutif aimerait bien qu’on puisse effectuer toutes ces enquêtes, la vérité est qu’on n’a pas les moyens de les mener, à moins de les bâcler. L’emploi des termes « peut être » est donc plus prudent. Je l’ai déploré ce matin, et l’argumentation du rapporteur l’illustre assez bien : on cherche à se rassurer, on parle de tolérance zéro, mais on sait bien que ce ne sera en définitive pas le cas. La parole est à M. le président de la commission des lois. Pardon de faire preuve de sincérité, monsieur Bernalicis ! Les partisans du chaos voudraient que ça se passe mal ou qu’on n’ait pas les moyens de faire ce qu’on souhaite… L’enquête administrative que le code de la sécurité intérieure prévoit pour le recrutement de personnels est facultative. Par ailleurs, il existe un problème capacitaire, mais cela ne pose pas de difficultés dans la mesure où l’employeur est responsable des personnes qu’il embauche. Ce ne peut pas être la faute de l’État s’il embauche n’importe qui ! La parole est à Mme la ministre. J’ajoute que les travaux en commission ont permis de donner plus de temps à ce travail de criblage, qui commencera le 1er mai et non le 1er juillet. Nous voulons être au rendez-vous de la sécurité, sans pour autant créer des rigidités inutiles.
(Les amendements nos 47 et 589, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) L’amendement no 619 de Mme Élisa Martin est défendu.
(L’amendement no 619, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) Je mets aux voix l’article 7 bis .
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 39
Nombre de suffrages exprimés 37
Majorité absolue 19
Pour l’adoption 31
Contre 6
(L’article 7 bis est adopté.)
La parole est à Mme Clara Chassaniol, pour soutenir l’amendement no 732. Face aux difficultés actuelles de recrutement et pour atteindre le nombre de 22 000, voire de 33 000 agents de sécurité privés, le Gouvernement a lancé un plan de recrutement et de formation de 3 000 étudiants. Cet amendement vise à favoriser l’emploi des étudiants étrangers pendant la durée des Jeux : il prévoit que le temps de travail accompli dans ce cadre ne sera pas décompté du temps d’activité professionnelle salariée, limité à 60 % de la durée de travail annuelle.
(L’amendement no 732, accepté par la commission et le Gouvernement, est adopté.) Je vous annonce que l’article 8 ainsi que les amendements portant article additionnel après l’article 8 sont réservés, à la demande du Gouvernement.
La parole est à M. José Gonzalez. La France a l’honneur d’accueillir les prochains Jeux olympiques. Depuis le début du siècle dernier, cinq cérémonies s’y sont déroulées. La France est – ou du moins était – le pays historique de l’ardente flamme olympique. Les récents problèmes de sécurité autour des événements sportifs nous font cependant craindre une averse de violences, qui pourraient éteindre cette torche brûlante devant les yeux effarés du monde entier. Espérons que les fameux supporters anglais ne ramèneront pas le temps pluvieux !
L’illustre fondateur de ce grand événement mondial, Pierre de Coubertin, déclarait : « Le succès n’est pas le but mais un moyen de viser plus haut. » La logistique de ces jeux doit être parfaite en tous points, notamment pour ce qui est de la sécurité, car c’est ce que les commentateurs internationaux retiendront en premier. La France doit retrouver son image de grande nation sportive et culturelle. Ces Jeux doivent donc être exceptionnels.
L’article 9 vise à étendre les compétences du préfet de police mais les nouvelles attributions ne sont pas précisées. Par ailleurs, l’attribution de pouvoirs renforcés au préfet de police n’assure pas pour autant sa compétence. J’en veux pour preuve la démission du préfet Lallement à la suite des événements tragiques du 28 mai.
Après le fiasco du Stade de France, notre pays doit être exemplaire ; nous n’avons plus le droit à l’erreur. Gardons à l’esprit nos objectifs : visibilité, attractivité, promotion de notre culture, revalorisation des TPE-PME – très petites, petites et moyennes entreprises –, mais aussi recettes financières – les 11 milliards d’euros que les Jeux olympiques sont susceptibles de rapporter à la France pourraient, en langage gouvernemental, couvrir un an de déficit des retraites.
Le préfet de police aura donc un rôle décisif ; en cas de problème, il ne pourra pas reporter la faute sur nos voisins anglo-saxons. Nous voterons pour cet article tout en gardant un regard critique sur ce qu’il en adviendra.
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Maxime Minot. Les Jeux de Paris, rappelons-le, ne sont pas les Jeux d’une seule ville. L’Île-de-France est particulièrement concernée par l’organisation de cet événement et l’accueil de compétitions sur ses sites. Le préfet de police, sur engagement de la France devant le Comité international olympique (CIO), doit être le seul et unique responsable de la sécurité dans la région, avec une coordination totale des départements, exposés aux mêmes enjeux et menaces que Paris.
Le préfet de police se verra donc confier, pour toute la durée des Jeux, les mêmes pouvoirs que ceux qu’il exerce communément en petite couronne. Il convient, évidemment, de rassurer les acteurs départementaux, à commencer par les préfets, sur leur implication durant cette période. À ce titre, d’ailleurs, le préfet de police leur déléguera certaines compétences.
Même si nous ne savons pas encore quelles seront ces compétences, je ne vois pas comment nous pourrions nous opposer à ce qu’elles soient déléguées à des préfets qui connaissent parfaitement leur territoire. Cette supervision par le préfet de Paris est fondamentale si nous voulons des actions coordonnées et un plan de sécurisation et de sûreté optimal. S’il est un article transpartisan sur lequel nous pouvons tous nous engager, c’est bien l’article 9.
La parole est à M. Philippe Latombe. Le groupe Démocrate soutiendra l’article 9 sans réserve. Quelques inquiétudes, cependant, se sont exprimées, notamment par la voix d’Aude Luquet, députée de Seine-et-Marne. Il semble que les forces de l’ordre, notamment de gendarmerie, craignent que cette disposition ne soit pérennisée. Pourriez-vous rassurer ces personnes en expliquant qu’il s’agit d’une mesure bornée dans le temps, visant à coordonner au mieux la protection des Jeux olympiques et paralympiques et que les forces de l’ordre des départements de la grande couronne retrouveront ensuite le fonctionnement habituel ? La parole est à Mme Gisèle Lelouis, pour soutenir l’amendement no 582. Dans sa version initiale, l’article 9 était assez flou : il arrogeait au préfet de police beaucoup de compétences sur la sécurité des Jeux olympiques et paralympiques. La commission des lois a supprimé la mention des « événements liés aux Jeux olympiques et paralympiques » pour éviter toute ambiguïté. La question de la délimitation de ces pouvoirs extraordinaires se pose quand même et le fait que l’article ne contienne plus les termes « Jeux olympiques et paralympiques » est dommageable. Nous proposons de les réintroduire pour une plus grande cohérence rédactionnelle. Et puisque c’est l’enjeu des Jeux de 2024, autant mentionner la « sécurité des biens et des personnes ».
Par ailleurs, qu’un préfet de police soit compétent dans autant de départements est inquiétant. S’il se concentre sur les JO, il ne se concentre pas sur ses compétences ordinaires. Si plusieurs événements graves devaient survenir de manière concomitante, le préfet de police pourrait-il remplir ses missions en sus des missions nouvelles liées à l’élargissement de ses compétences ? Cela ne revient-il pas à surcharger cet homme ? Pour la cohérence rédactionnelle du texte, je vous demande d’adopter ces légères modifications qui, j’en suis sûr, conviendront parfaitement au rapporteur.
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission ? Elles ne me conviennent pas vraiment, madame Lelouis, puisque la commission a justement pris soin de supprimer les termes que vous proposez d’ajouter. Il est nécessaire d’assurer l’unité de commandement du préfet de police sur l’ensemble de la région Île-de-France. S’agissant des tâches administratives, il est prévu qu’un arrêté du ministre de l’intérieur prévoie des délégations de signature.
Pour toutes ces raisons, avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable également. Il est important que le préfet de police voie ses pouvoirs en matière de sécurité étendus le temps des Jeux. Nous n’avons pas à rentrer dans des arguties pour savoir s’il y a un lien direct ou pas. Cette extension doit être homogène, pleine et entière afin de lui permettre d’être au top de l’efficacité requise. La parole est à Mme Gisèle Lelouis. Monsieur le président de la commission, pourquoi le préfet d’Île-de-France n’est-il pas inclus dans le dispositif prévu par ce projet de loi ?
(L’amendement no 582 n’est pas adopté.)
(L’article 9 est adopté.)
La parole est à Mme Julie Lechanteux, pour soutenir l’amendement no 179. Il est évident que des risques pèsent sur la sécurité des Jeux olympiques. M. le ministre de l’intérieur nous a expliqué que la France attendait au moins 600 000 personnes, ne serait-ce que pour la cérémonie d’ouverture. Pour faire face à cet afflux massif de touristes, il manquerait près de 20 000 agents.
M. Darmanin a par ailleurs indiqué aux sénateurs que les forces de l’ordre ne pourraient pas prendre de jours de congé durant les mois de juin, juillet et août 2024. Compte tenu de la gravité des problèmes de sécurité, leurs effectifs devraient être étoffés par des policiers municipaux. Ils luttent eux aussi courageusement, nous le savons, contre la délinquance et ont démontré qu’ils n’avaient pas peur d’agir face à la menace terroriste. Ainsi, à Nice, il y a trois ans, ce sont des policiers municipaux qui sont intervenus pour mettre un terme au périple meurtrier du terroriste qui s’était introduit dans la basilique Notre-Dame.
Cet amendement prévoit que les représentants de l’État tiennent les maires informés pour que les policiers municipaux, troisième force de sécurité de notre pays, puissent contribuer au mieux à la sécurité des personnes et des biens pendant la durée des JO.
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission ? Ce n’est pas une simple information mais une information continue que vous demandez aux représentants de l’État d’assurer. Or on imagine bien que, pendant la durée des Jeux olympiques et paralympiques, les préfets de département auront bien d’autres missions à accomplir. Cependant, il est évident qu’ils travailleront de concert avec les communes pour assurer la sécurité. Avis défavorable, comme en commission, où votre amendement a été rejeté. Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable également. Il importe certes d’assurer une coopération entre État et communes et un partage de l’information fluide mais votre amendement instaurerait une rigidité qui exposerait à un risque de nullité des actes. La parole est à Mme Julie Lechanteux. Je suis certaine que tous les maires de France vous remercieront, surtout lorsqu’ils auront à organiser des événements à l’échelon local sans l’aide de la police nationale.
(L’amendement no 179 n’est pas adopté.)
La parole est à M. Ugo Bernalicis, pour un rappel au règlement. Sur le double fondement de l’article 72, alinéa 3, relatif aux mises en cause personnelles, et de l’article 100, qui se rapporte à la clarté et à la sincérité de nos débats. Ce matin, le ministre de l’intérieur s’est permis de me toiser et de m’attaquer à trois reprises. Et vous ne l’aviez pas cherché du tout ! Il a indiqué que contrairement à moi, il ne participerait pas aux manifestations. Il se trouve que cet après-midi, je suis présent dans l’hémicycle et que lui est absent. Or nous avons besoin que le ministre de l’intérieur soit au banc du Gouvernement avec la ministre des sports afin d’examiner l’organisation des JO sous l’angle aussi bien du sport que de l’ordre public. Peut-être qu’il est dans les manifs ! Je ne sais pas s’il est parti mater du manifestant, mais nous aimerions avoir les deux ministres au banc, madame la présidente,… C’est du sexisme ! Non, je ne crois pas que ce soit sexiste ! Mais parler à la place de Mme la ministre, ça, oui ! …pour satisfaire l’exigence de clarté de nos débats. Nous avons bien compris, monsieur Bernalicis.
La parole est à M. Belkhir Belhaddad. Essayons de parler des Jeux olympiques.
Notre ambition à tous, c’est de réussir à faire de ces Jeux une grande fête populaire et sportive. Sur le plan organisationnel, cela suppose de veiller à la sécurisation des sites de compétition en Île-de-France et ailleurs mais aussi des fanzones. Nous savons que de nombreuses mesures contenues dans ce projet de loi procèdent à l’adaptation de normes internationales et de règlements européens en vigueur dans beaucoup d’autres pays, qu’il s’agisse des athlètes, des participants en général ou des spectateurs.
L’article 10 élargit de manière pérenne la procédure de criblage aux fanzones et aux personnes participant aux grands événements. Comme le rappelle l’étude d’impact, l’ensemble des États accueillant les Jeux olympiques et paralympiques, à l’exception de la France, ont prévu une enquête administrative visant l’ensemble des participants à ces événements, conformément aux recommandations du Comité international olympique. Les garanties apportées par notre droit, sur le fondement desquelles le Conseil d’État avait déjà refusé en 2018 de transmettre une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) considérant que les dispositions concernées ne soulevaient aucun risque sérieux, sont encore renforcées par le caractère conforme conféré à l’avis de l’autorité administrative.
S’agissant enfin de la capacité du service national des enquêtes administratives de sécurité (Sneas) à réaliser des enquêtes administratives supplémentaires, une montée en puissance de ses effectifs est prévue. Une révision à la hausse est intervenue, portant l’objectif-cible à 91 équivalents temps plein (ETP).
Les dispositions de l’article 10 ne portent atteinte ni aux libertés publiques ni aux droits individuels de la personne et je vous invite donc à voter en leur faveur.
La parole est à M. Maxime Minot. Je vais revenir, après l’intervention de mon collègue Belkhir Belhaddad avec qui je copréside le groupe de travail chargé du suivi de la préparation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris 2024, sur les fanzones. Comme le petit couac qu’a connu la billetterie… C’est gentiment dit ! …a fait de nombreux déçus, elles auront une importance particulière en tant que lieux de festivités. Comme s’y rassembleront un grand nombre de personnes pour assister aux retransmissions de compétitions, elles seront particulièrement exposées à un risque de menaces terroristes. Or notre seule boussole doit être la sécurité des spectateurs et des participants à ce grand événement. C’est pourquoi il nous faut soutenir cet article qui permet d’étendre la procédure de criblage. Cette solution ouvre la possibilité de mener des enquêtes administratives sur l’ensemble des participants, sans distinction de nationalité. Il convient de le souligner car les fanzones ne sont pas les seules concernées. La procédure sera aussi appliquée au village des athlètes olympiques et paralympiques et au village des médias.
Au-delà de cette zone et des alentours des sites, cela permettra aux collectivités de mieux sécuriser les lieux de retrouvailles. Nous pouvons d’ailleurs les rassurer car ces mesures n’entraîneront pour elles ni charges supplémentaires de travail ni coûts financiers.
Si les compétitions ont lieu principalement en Île-de-France, cela ne doit pas empêcher le partage afin que cette grande fête populaire ruisselle sur l’ensemble du territoire avec un niveau de sécurité optimal partout assuré.
La parole est à M. Antoine Léaument, pour un rappel au règlement. Je me fonde sur l’alinéa 4 de l’article 100 : notre amendement no 428 ne figure pas à la bonne place dans la liste des amendements à l’article 10. Comme il s’agit d’un amendement de suppression, il devrait figurer en haut de celle-ci. Il me semble qu’il y a une erreur. La rigueur juridique ! Erreur que nous allons corriger, monsieur Léaument.
Je vous donne donc la parole, pour soutenir cet amendement no 428. Alors, vous allez citer la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ? Non, monsieur Minot, je n’aurai pas besoin de le faire. Le dispositif de criblage aboutira à mener 750 000 enquêtes administratives. Vous êtes-vous assurés que vous disposez des moyens nécessaires pour appliquer la loi ou s’agit-il de vaines paroles ?
Comme nous considérons que ces enquêtes constituent en outre une intrusion dans la vie des gens, nous vous proposons de supprimer cet article.
Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Nous avons besoin de cet article pour étendre le criblage à la famille des athlètes, conformément aux recommandations du CIO, et aux fanzones, lesquelles constituent, comme l’a souligné très justement Maxime Minot, des extensions des compétitions et célébrations des Jeux olympiques et paralympiques d’une particulière importance. Il serait irresponsable de s’opposer à ce dispositif ! La parole est à M. Ugo Bernalicis. Madame la présidente, si j’ai le règlement dans les mains, ce n’est pas pour m’y référer pour un rappel, c’est simplement parce qu’y figure la Déclaration des droits de l’homme et de citoyen. Un collègue nous demandait si nous allions encore la citer,… C’était de l’humour ! …je me dois de lui dire qu’elle est toujours en lien avec notre travail de législateur. Référons-nous à son article 2 : « Le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l’homme. » Nous parlerions aujourd’hui de « droits humains »… « Ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l’oppression. » Je passe sur la résistance à l’oppression, vous savez ce que c’est ! La première des libertés, c’est la sécurité ! Il ne faut pas confondre sécurité et sûreté. La sûreté est le droit de ne pas être mis en cause arbitrairement par le pouvoir. Il a raison ! Ce terme recouvre aussi bien sûr le droit de ne pas être agressé par son voisin. (Exclamations sur les bancs du groupe RE.)
Le criblage donne à l’administration des pouvoirs exorbitants du droit commun puisqu’il permet d’aller fouiller dans la vie des gens de manière disproportionnée.
Quel est le problème s’ils n’ont rien à se reprocher ? Nous savons bien que cette pratique comporte des risques de biais : pourquoi ne décideriez-vous pas, par exemple, que certaines personnes, parce qu’elles ont participé à des manifestations contre la réforme des retraites, ne pourraient pas faire partie des bénévoles participant à l’organisation des JO ? Et je suis certain que vous êtes capables de les exclure de peur qu’elles ne déploient une banderole en plein milieu d’un stade. Je suis opposé à la réforme des retraites mais cela n’a rien à voir ! Vous redoutez que les compétitions soient le théâtre de scènes tumultueuses – même si, contrairement à notre règlement, celui des JO ne fait pas référence à de telles scènes… Voilà ce à quoi l’extension du criblage peut aboutir : caractériser le niveau de dangerosité des personnes qui en font l’objet en fonction de leurs opinions politiques parce que vous vous inquiétez qu’elles ne viennent gâcher cette belle fête olympique. La parole est à Mme la ministre. Monsieur le député, je tiens à souligner que ces mesures de criblage ne concernent pas le public. Mais qu’en est-il des bénévoles ? Toutes les menaces que vous venez d’agiter n’ont pas lieu d’être. Ces dispositions ne s’appliquent qu’à la famille des athlètes olympiques, à la demande du CIO, et aux organisateurs des fanzones. Donc, les bénévoles ! Personne ne regardera pour qui ils ont voté ! Les personnes qui viendront se rassembler dans ces lieux ne feront l’objet d’aucun criblage.
(L’amendement no 428 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 328. Nous proposons une solution de repli consistant à supprimer non l’article 10 dans son entier mais ses alinéas 4 à 6. Il est essentiel de garantir la sûreté de nos concitoyens. Nous le répétons depuis plusieurs jours, il y a une grande différence entre l’apparence de sécurité et la réalité de la sûreté.
Le criblage s’appliquera à tout le monde, à l’exception des spectateurs : les journalistes, les bénévoles, les athlètes, les familles. Cela réclamera des efforts colossaux qui emboliseront nos services – imaginons ce qui se serait passé si le public avait été inclus ! La Commission nationale de l’informatique et des libertés (Cnil) a précisé dans son avis que le Gouvernement n’avait fourni aucune raison pour justifier cette extension du criblage.
Il apparaît dès lors disproportionné d’appliquer cette procédure à autant de personnes. Elle ne répond à aucune exigence de proportionnalité et à aucune nécessité, deux considérations essentielles s’agissant des données personnelles. Rien ne vient justifier l’élargissement du dispositif et surtout sa pérennisation au-delà des JO.
Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Pour sécuriser les Jeux, il est nécessaire d’étendre le criblage à toute la famille des accrédités.
(L’amendement no 328 n’est pas adopté.) Je suis saisie de deux amendements, nos 332 et 429, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 332.
À défaut de supprimer l’ensemble des dispositions qui nous semblent problématiques dans cet article 10, nous proposons, à titre de repli, d’exempter de ces criblages désormais pérennisés non seulement les spectateurs mais aussi les participants et les journalistes.
Effectuer une enquête administrative sur les journalistes afin de déterminer s’ils peuvent accéder, ou non, à un événement constitue une atteinte très grave à la liberté de la presse, ce qui n’est pas acceptable dans un État démocratique – même si les votes intervenus à l’article 7 dessinent un tournant plus répressif et plus grave à ce qui devrait être le cours normal d’une démocratie.
La France n’est quand même pas un pays autoritaire ! Le texte que nous examinons devait concerner les Jeux olympiques et paralympiques. « Essayons de parler des JO ! » a dit un de nos collègues tout à l’heure. Nous aimerions bien en parler, nous aussi, mais nous constatons malheureusement que le projet de loi ne laisse aucune place ni au sport ni à la question olympique. Pire, il est contraire à l’essence même des Jeux – nous y reviendrons à l’article 12.
Parce que les Écologistes ont toujours cherché le compromis – malgré la main tendue par la coalition présidentielle, ou par certaines de ses composantes, à la droite, voire à l’extrême droite, comme nous l’avons vu ce matin – et parce que les Jeux représentent un défi en matière de sécurité, nous proposons que le dispositif prévu ne s’applique que de manière temporaire, qu’il soit limité aux seuls Jeux et qu’il ne soit pas inscrit dans le droit commun, d’autant que le CIO ne le demande pas.
La parole est à M. Antoine Léaument, pour soutenir l’amendement no 429. Ma collègue Sandra Regol l’a expliqué : nous nous efforçons de circonscrire le nombre de personnes susceptibles de faire l’objet d’une procédure de criblage.
Comme je l’ai déjà évoqué, un premier problème se pose s’agissant du nombre d’opérations de criblage à mener dans le cadre des Jeux olympiques : si l’on se fonde sur la rédaction actuelle de l’article 10, celles-ci sont évaluées à 750 000. Or, au cours de l’année 2022, 760 000 opérations de ce type ont été effectuées au total, tous sujets confondus. En conséquence, comment ferons-nous avec les moyens actuels ? Faudra-t-il se contenter de les appliquer aux seuls événements liés aux JO, en excluant toutes les autres opérations ?
Deuxième point – sur lequel je souhaiterais obtenir une réponse qui sera notée au compte rendu : qu’en sera-t-il des syndicalistes qui se sont engagés dans le combat contre la réforme des retraites et ont parfois mené des actions en dehors du cadre légal – je pense aux coupures de courant intervenues, par exemple, sur les chantiers des Jeux olympiques ?
Ce n’est pas bien ! N’exprimant leur opposition que vis-à-vis de la réforme des retraites et n’ayant pas de problèmes particuliers avec les Jeux olympiques, ils pourraient vouloir se porter volontaires. Ils ne veulent déjà pas bosser quand ils sont rémunérés, alors devenir bénévoles… Ces personnes risquent-elles de se voir refuser la possibilité de devenir bénévoles lors des Jeux ? Il s’agit d’un exemple très spécifique sur lequel j’aimerais que vous apportiez une réponse précise, pour qu’elle soit notée au compte rendu, je le répète. Vous n’avez pas besoin de menacer. De toute façon, tout est noté au compte rendu ! C’est parce que la jurisprudence en tient compte ! Quel est l’avis de la commission ? L’extension des procédures de criblage aux participants et aux fanzones est pertinente. S’il s’agit bien d’une demande du CIO dans le cadre des Jeux olympiques, je rappelle que la France accueillera, auparavant, une compétition tout aussi importante, même si elle a moins les faveurs du grand public, je veux parler de la Coupe du monde de rugby 2023, pour laquelle la menace terroriste sera tout aussi élevée. Cela justifie donc pleinement d’étendre le criblage aux participants.
En ce qui concerne les journalistes, vous avez évoqué, madame Regol, une atteinte grave à la liberté de la presse. Ce n’est pas la position du Conseil d’État qui a estimé, dans un avis rendu en 2016, que la procédure d’enquête administrative « ne portait [pas] une atteinte disproportionnée […] à la liberté d’expression (dans l’hypothèse où elle serait appliquée à des journalistes) ». La Haute juridiction elle-même ne partage donc pas votre avis.
Monsieur Léaument, vous êtes déjà longuement intervenu, lors de l’examen de la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi), sur les AFD – amendes forfaitaires délictuelles –, en prétendant qu’elles permettraient de brimer le mouvement social. La réalité, c’est que nous ne l’avons jamais constaté dans le cadre de la réforme des retraites. Vous spéculez sur les peurs dans le but de vous opposer à certains dispositifs. En outre, vous voulez rendre légal ce qui est illégal. Mais si des gens ont commis des actes illégaux, ils sont sanctionnés pour leurs méfaits, ou du moins pour n’avoir pas respecté la loi, et cela figure dans leur casier judiciaire – c’est logique.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) C’est donc un avis défavorable.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Avis défavorable également. Pour répondre le plus précisément possible à M. Léaument, nous nous sommes donné davantage de temps, afin d’être à même de réaliser ces opérations de criblage. C’est le sens de l’amendement adopté en commission, à l’article 7 bis , qui prévoit un démarrage du dispositif le 1er mai. Nous renforcerons également le Sneas, chargé d’opérer ces criblages, en lui octroyant 15 ETP supplémentaires, soit les ressources nécessaires pour traiter les volumes que vous avez évoqués. D’autre part, ces décisions de criblage s’inscrivent dans une logique de proportionnalité ; elles sont prises sous le contrôle du juge et portent sur l’analyse du risque terroriste et l’atteinte grave à la sécurité des personnes. La parole est à M. Antoine Léaument. J’ai effectivement souligné que les amendes forfaitaires délictuelles pourraient servir à réprimer la contestation dans le cadre de la réforme des retraites. Mais insinuez-vous, monsieur le président Houlié, qu’il n’y a pas actuellement de répression du mouvement social ? C’est normal si ce sont des manifestations illégales, car non déclarées ! Ce n’est pas ce que constatent les gens ! Ils se prennent des coups de matraque, ce qui est pire que des AFD ! Par ailleurs, en ce qui concerne les amendes, avant-hier… Parlez de l’État de droit ! J’y viens, justement. J’entends certains souligner qu’il s’agit de manifestations illégales,… Certaines le sont, en effet ! …c’est-à-dire non déclarées ; c’est bien ce que vous voulez dire ? Il y en a quelques-unes, oui ! Très bien. Je cite l’arrêt de la Cour de cassation, chambre criminelle, du 14 juin 2022 : « ni l’article R. 644-1 du code pénal ni aucune autre disposition légale ou réglementaire n’incrimine le seul fait de participer à une manifestation non déclarée ». Il n’est donc pas illégal de participer à une manifestation non déclarée. Mais l’incitation à la violence est punie par la loi ! Vous avez affirmé, monsieur Houlié, que les AFD n’étaient pas utilisées dans le cadre de la répression : il est vrai que nous ne l’avons pas constaté pour l’instant. Néanmoins, alors que je me suis rendu avant-hier auprès de manifestants pris dans une nasse de la police, j’ai rencontré une dizaine de jeunes à qui l’on a dit qu’ils se verraient infliger une amende de 135 euros pour participation à une manifestation non déclarée. Quelle véracité des faits ? Sur quelle base, monsieur le président de la commission des lois, cette répression par l’amende est-elle organisée ? La parole est à Mme Prisca Thevenot. S’il vous plaît, ne tombons pas dans ce jeu-là : c’est à croire que la seule compétence, sur vos bancs, a trait à la provocation ! Plus de huit manifestations, il me semble, ont été organisées par les intersyndicales ces dernières semaines, dans un cadre légal, celui de l’État de droit – et de devoir. Elles se sont très bien déroulées. Tout à fait ! Les violences commises l’ont été en marge des manifestations, hors du cadre de la loi. Je suis donc étonnée de constater que, dans cet hémicycle où nous sommes censés faire la loi et la faire respecter,… Nous sommes là aussi pour la modifier ! …des députés de La France insoumise expliquent que tout cela ne sert à rien, puisque dès l’instant où l’on sort du cadre de la loi, il est possible de l’enfreindre sans aucun problème ! Revenons plutôt au cœur de notre sujet et travaillons à l’organisation des prochains Jeux olympiques et paralympiques. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE et sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.) La parole est à M. le président de la commission des lois. M. Léaument a tenté tout à l’heure de créer la confusion en mêlant ce qu’il appelle la répression du mouvement social à la possibilité d’infliger des amendes forfaitaires délictuelles ; puis, juste après, il a reconnu qu’il n’y avait pas eu d’AFD,… C’est peut-être parce que je vous ai embêtés sur le sujet, justement ! …alors même que durant les débats sur la Lopmi – vous vous en souvenez certainement tous –, il nous a répété qu’une personne qui entraverait la circulation ou un jeune majeur qui bloquerait son lycée se verrait aussitôt recevoir une telle amende. Et aujourd’hui, face à l’absence d’AFD, tout ce qu’il trouve à me répondre, c’est : « On m’a dit que… » (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Voilà !
(Les amendements nos 332 et 429, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 330 rectifié. Il s’agit d’un amendement de repli du repli, si je puis dire, visant à protéger au mieux la liberté de la presse, qui semble en ce moment faire les frais des politiques menées. Il tend à exclure les journalistes du champ des criblages administratifs, car le recours à cette procédure n’est pas justifié dans leur cas, d’autant qu’elle pourrait cibler des journalistes issus de pays où exercer ce métier représente un danger. Le fait que des enquêtes soient menées sur eux pourrait donc leur faire prendre un risque.
La seule justification qui nous a été apportée en commission est que cette mesure répond à une demande du CIO. Toutefois, celui-ci n’a jamais demandé de modifier le droit commun : il a sollicité des dispositions temporaires, mais non définitives.
Eh oui ! Je le demande donc une nouvelle fois : pourquoi devons-nous légiférer sur des dispositions qui excèdent très largement le temps des Jeux olympiques, voire qui modifient le droit commun, alors que nous devrions parler premièrement de sport, deuxièmement de l’organisation de ces événements qui doivent constituer une fête, et troisièmement de la sécurité dans le cadre des Jeux ? On nous appelle sans cesse à modifier le droit commun ; ce n’est pas possible ! (Mme Lisa Belluco applaudit.) Quel est l’avis de la commission ? Je viens à l’instant d’évoquer la Coupe du monde de rugby de 2023, madame Regol. Avis défavorable. Un peu plus de mépris encore ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Avis défavorable également. Nous faisons évoluer le droit à l’occasion des Jeux olympiques et paralympiques, considérant qu’il est normal, a fortiori dans un contexte géopolitique compliqué, de passer au criblage les participants aux compétitions. Or cette mesure est importante pour l’avenir de toutes les compétitions. Ma question ne porte que sur les journalistes ! C’est la même logique pour les journalistes. Si nous forçons le trait, il suffirait de présenter une carte de presse factice pour passer au travers des criblages. Ce ne serait pas à la hauteur de l’exigence de sécurité qu’attendent de nous les Français dans l’organisation des Jeux et, plus largement, pour la tenue de nos compétitions sportives. Les bras m’en tombent !
(L’amendement no 330 rectifié n’est pas adopté.) Sur l’article 10, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 569.
Il est proposé par mon excellent collègue Benjamin Lucas, qui est resté un peu plus longtemps que moi à la manifestation. Grand bien lui fasse ! Les journalistes et les lanceurs d’alerte doivent être en mesure de documenter la phase de préparation des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 à Paris. Lors d’autres Jeux, à Sotchi par exemple, leur travail a été essentiel, pour éclairer notamment sur les nombreuses dérives et atteintes à l’environnement. Ayons l’humilité de reconnaître que nous avons besoin aussi, chez nous, de gens à même de porter un regard extérieur et de dénoncer, par exemple, le fait que des travailleurs sans papiers sont employés sur les chantiers – nous en reparlerons ultérieurement –, soit ce que l’on a justement reproché au Qatar. Le travail que fournissent ces professionnels ne saurait être entravé ; la liberté de la presse ne se négocie pas. En outre, ils peuvent venir de pays dans lesquels la démocratie est bien moins vivante. Donc, nous sommes bien en démocratie ? Le pays des Lumières, le pays de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen ne peut être celui où les droits de la presse régressent. (M. Antoine Léaument applaudit.)
L’actualité révèle la grande acuité du sujet. Au côté de la population, nous avons manifesté notre colère contre le recours au 49.3 et contre le passage en force de la réforme des retraites. La mobilisation du 7 mars a été considérée comme historique, celle d’aujourd’hui bat de nouveaux records – il reste à savoir si tout le monde l’entendra. Or l’actualité nous montre que parfois, des agents de police sont obligés de porter atteinte à la liberté de la presse, parce qu’on leur en donne l’ordre.
Tous ces éléments factuels et juridiques nous conduisent à vous demander davantage de transparence. Il faut donc permettre aux journalistes d’accéder aux lieux où se dérouleront les Jeux et de travailler.
Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Également défavorable. Je vous assure que cette mesure n’est rigoureusement pas tournée contre les journalistes. Bien au contraire : un vrai journaliste faisant son travail est absolument nécessaire, et il sera le bienvenu dans l’ensemble des compétitions sportives. On est journaliste ou on ne l’est pas, il n’y a pas d’entre-deux ! La parole est à M. Antoine Léaument. En quoi serait-il problématique de protéger les journalistes contre le criblage ? Comme M. Bernalicis l’a expliqué, nous craignons que certaines personnes soient ciblées pour leurs opinions politiques, parce qu’elles auraient participé à des manifestations – sachant que s’exerce actuellement une répression visant à inscrire au casier judiciaire de certains individus leur seule participation aux manifestations.
Vous n’avez d’ailleurs toujours pas répondu à ma question concernant les amendes de 135 euros infligées à des jeunes manifestants, monsieur le président. Ce ne sont pas là des on-dit : des jeunes m’ont dit, dans une nasse, que la police comptait leur infliger des amendes.
Ce sont donc bien des on-dit ! Cela m’a été rapporté par les intéressés : je peux vous donner leur nom et leur numéro de téléphone, si vous voulez vérifier.
Par ailleurs, je crains que cette disposition ne soit contraire à l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Puisque vous aimez m’entendre la citer, je n’y résiste pas : « Nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi. »
« Pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi » : c’est bien écrit ! Il oublie la fin de la phrase ! Si des bénévoles, ou plus encore des journalistes, ne troublent pas l’ordre public durant les Jeux olympiques, il n’y a pas de raison qu’ils fassent l’objet d’un criblage. Nous parlons de vrais journalistes, avec de vraies cartes de presse ! Des journalistes peuvent avoir été inquiétés pour avoir mené des enquêtes dérangeantes. Nous voulons avant tout protéger la liberté de la presse. La parole est à Mme la ministre. Les mesures de criblage n’ont absolument rien à voir avec les opinions politiques des personnes. Le but est de construire une bulle de sécurité, à laquelle aucune profession n’a de raison de se soustraire, de manière à prévenir tout risque d’atteinte grave à la sécurité des personnes ou de nature terroriste.
(L’amendement no 569 n’est pas adopté.) L’amendement no 745 de M. Guillaume Vuilletet, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, est défendu.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Favorable. La parole est à M. Ugo Bernalicis. Je rappelle que le criblage peut permettre d’investiguer dans l’entourage d’une personne, sur sa famille ou sur ses connaissances notamment, pour savoir si elle est en lien avec des individus inscrits au fichier de traitement des signalements pour la prévention de la radicalisation à caractère terroriste (FSPRT) ou radicalisés, selon ce qu’en disent vos fichiers et selon les renseignements du ministère de l’intérieur. Certes, le criblage peut se limiter à une consultation du casier judiciaire, mais il peut aussi consister en des enquêtes administratives plus poussées. Manifestement, vous ne lui avez pas fixé de limite ; sinon, vous auriez proposé de le circonscrire à la consultation du casier judiciaire – mais, dès lors que certaines personnes viendront de l’étranger, cela ne peut pas vous suffire. Vous pourrez donc mener des enquêtes très intrusives. J’imagine que la dangerosité sera appréciée au travers de certains filtres, et qu’on fouillera moins un journaliste qu’un autre profil de participant. Nous n’en avons toutefois aucune assurance, puisque l’exécutif est le seul décideur dans ce domaine, et que l’article 10 dépossède le Parlement de toute forme de contrôle et de toute possibilité de fixer des limites.
(L’amendement no 745 est adopté.) Je mets aux voix l’article 10.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 65
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 55
Contre 8
(L’article 10, amendé, est adopté.)
La parole est à M. Thomas Rudigoz. Je salue notre rapporteur Guillaume Vuilletet, qui est malheureusement absent, mais qui suit nos débats. Je lui souhaite un prompt rétablissement, et je le remercie pour l’important travail qu’il a mené.
L’article 11 tend à autoriser l’usage de scanners corporels à ondes millimétriques dans les enceintes sportives, récréatives ou culturelles. Cette mesure vise deux objectifs principaux : mieux gérer les flux, qui seront très abondants durant les Jeux olympiques, et éviter les goulets d’étranglement. Les scanners permettront aussi de détecter les objets dangereux de façon plus efficace qu’avec des simples palpations.
Cet outil n’a rien d’inédit : il est déjà employé en France, en particulier dans les aéroports de Lyon-Saint-Exupéry, Paris-Charles de Gaulle, Orly, Nice et Toulouse. Un bilan très positif en a été dressé récemment, tant par les agents de sûreté qui travaillent dans les aéroports que par les passagers.
L’utilisation de ces scanners est encadrée par des garanties importantes, à commencer par le consentement des individus. Une personne qui ne souhaite pas s’y soumettre peut demander à recourir à la palpation. Par ailleurs, aucun stockage d’image n’est autorisé. La commission des lois a ajouté des garanties supplémentaires – je salue le travail que M. Acquaviva et le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires ont mené dans ce domaine. Nous avons ainsi décidé de diffuser une information claire et précise dans les sites, pour informer les visiteurs qu’ils peuvent refuser de franchir un scanner et demander une palpation. La commission a enfin décidé que les scanners produiront une image générique du corps humain.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) Vous n’avez pas été si convaincants que cela, puisque M. Acquaviva a déposé un amendement tendant à supprimer l’article… La parole est à M. José Gonzalez. Je souhaite associer à mes propos M. Rancoule, président du groupe d’études sur la sécurité privée, dans le cadre duquel nous travaillons activement. Nous déplorons l’article 11, qui a pour unique objet de modifier une disposition législative relative à la sécurité privée. En effet, il aura pour conséquence de pérenniser les techniques de vérification par utilisation de scanners corporels. La nature même de ce dispositif inquiète autant qu’elle rassure – je laisse à mes collègues le soin d’assurer l’arbitrage technique relatif à l’outil.
J’appelle l’attention de l’Assemblée sur la question des ressources humaines : une lecture attentive du projet de loi permet de constater que celles-ci manquent cruellement, alors que, selon la Cour des comptes, il manque au moins 20 000 agents issus de la sécurité publique. Comment le Gouvernement peut-il occulter cette question centrale ?
Même si les nouveaux dispositifs permettront de faciliter et d’accélérer la détection d’éventuelles anomalies, ces avancées resteront stériles si elles sont corrélées à un manque de moyens humains. Le Gouvernement doit prendre conscience que la sécurité des Français n’est pas un sport à la carte des Jeux olympiques, mais une garantie de leur réussite. La machine et les innovations technologiques doivent être complémentaires de l’humain, et en aucun cas le remplacer. Nous ne pouvons tolérer que les Jeux soient sujets à des expérimentations qui auraient dû être effectuées bien en amont. Cet événement n’est pas une étape, mais une ligne d’arrivée. La détonation arrive à grand pas, mais nous semblons prendre un faux départ.
Pourtant, le projet de loi aurait été l’occasion de revaloriser une filière malmenée, représentant 12 000 entreprises, 200 000 employés et un chiffre d’affaires de près de 8 milliards d’euros. L’efficacité de dispositifs sécuritaires pour des événements similaires ne passera pas seulement par l’essor de nouvelles technologies, mais aussi par le développement de la filière de la sécurité privée.
La parole est à M. Léo Walter. Cela a été dit : l’article 11 permettra d’utiliser des scanners corporels, aussi appelés dispositifs d’imagerie à ondes millimétriques, qui serviront à l’inscription et au filtrage à l’entrée des enceintes de manifestations sportives, récréatives ou culturelles rassemblant plus de 300 spectateurs – je tiens à insister sur la jauge retenue et sur le champ d’application de l’article.
Quelques garde-fous sont certes prévus, mais ils sont bien maigres : les personnes devront être informées de la présence du dispositif par un moyen de publicité à l’entrée de la manifestation ; en cas de refus, elles pourront être soumises à un contrôle par palpation. La commission a également obtenu que l’image résultant du scanner utilise une forme générique du corps humain. L’opérateur ne pourra donc pas visualiser simultanément l’identité de la personne et son image produite par le scanner.
Malgré ces très maigres avancées, nous proposons de supprimer l’article 11 : comme l’article 7, en effet, il s’inscrit non pas dans le projet relatif aux Jeux olympiques et paralympiques de 2024, mais dans son complément, le projet de loi portant diverses autres dispositions. Vous vous saisissez des Jeux olympiques pour instituer une mesure qui n’est circonscrite ni dans l’espace, ni dans le temps.
En quoi est-ce gênant ? Cela participera à la normalisation de la surveillance de masse.
De plus, l’article 11 ouvrira un véritable marché de la commande de scanners, achats qui nous semblent inutiles ou surdimensionnés par rapport aux manifestations qu’ils concernent. Vous voudriez installer dans les esprits l’idée qu’il est normal d’être contrôlé à tout moment, dans toute manifestation et tout lieu public. Songez qu’à Marseille, il y a une quinzaine d’années, des tourniquets d’accès avec badges ont été installés dans les collèges pour des raisons de sécurité, au motif que cela existait dans les aéroports – vous reprenez d’ailleurs cet argument pour les scanners.
Les députés du groupe La France insoumise-NUPES sont fermement opposés à cette idéologie mortifère du contrôle permanent. Nous considérons qu’il faut au contraire engager des agents et prévoir des moyens en personnel, pour garantir la circulation fluide de toutes et de tous. Aussi proposons-nous de supprimer l’article 11.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) La parole est à M. Maxime Minot. Les conditions d’accès aux enceintes sportives, où des débordements peuvent se produire, sont une préoccupation récurrente, particulièrement dans certains sports. Nous devons entendre les inquiétudes des associations de supporters, qui craignent une mainmise sécuritaire sur le sport. Si nous devons donner raison aux supporters qui jouent le jeu et qui respectent les règles, notamment celles de la sécurité, nous devons aussi poser un cadre juridique précis.
Les enceintes sportives accueilleront un nombre considérable de supporters lors des Jeux de Paris. Aussi l’article 11 prévoit-il le recours à des scanners corporels à l’entrée des enceintes de plus de 300 spectateurs. Ce dispositif aura le double avantage de sécuriser et de faciliter l’accès aux enceintes. En définissant des règles cadrées et connues du public, qui ne seront donc pas jugées abusives, nous pourrons œuvrer collectivement au bon déroulement des épreuves. Nous devrons redoubler de pédagogie quant aux conditions d’utilisation des scanners : il conviendra en particulier d’expliquer que les images ne permettent pas de contrôler l’identité, que le visage est flouté et que les images ne sont ni stockées, ni enregistrées. Sans cela, nous n’obtiendrons pas l’adhésion des associations de supporters.
Nous devrions unanimement voter l’article 11, qui vise avant tout à assurer la sécurité de nos concitoyens et des spectateurs qui feront le déplacement. Il est nécessaire pour la sécurité des Jeux olympiques et paralympiques.
Bien sûr, monsieur Minot ! M. Minot redevient raisonnable ! La parole est à M. Antoine Léaument, pour soutenir l’amendement no 430 visant à supprimer l’article. L’article 11 tend à permettre l’installation de scanners corporels dans les enceintes sportives et culturelles pouvant accueillir des événements de 300 personnes ou plus. Il n’est pas circonscrit au cadre des JO. Cela pose plusieurs problèmes.
Le premier d’entre eux réside dans l’efficacité de ces outils. Vous affirmez que les scanners corporels permettront de faire entrer le public plus rapidement. Je le conteste : il suffit d’entrer dans un aéroport pour constater que les scanners corporels ne sont pas plus rapides que la palpation, mais ralentissent au contraire le contrôle.
(Protestations sur les bancs du groupe Dem.) Mais non, cela n’a rien à voir ! En outre, le contrôle est toujours plus efficace s’il est effectué visuellement et à l’aide d’un outil capable de détecter les métaux que s’il est réalisé par une personne cachée derrière une vitre pour éviter tout contact visuel direct qui lui permettrait de rattacher l’image du scanner à l’identité de la personne contrôlée. Il est donc plus efficace d’embaucher des agents de sécurité pour surveiller ce qu’apportent les visiteurs.
Le coût d’un scanner corporel s’élève entre 90 000 et 150 000 euros. Il est bien plus utile et plus rapide d’embaucher temporairement, pendant les événements en question, des agents munis de détecteurs de métaux.
Non, car le scanner ne détecte pas uniquement les métaux ! Voilà pourquoi nous vous proposons de supprimer l’article 11 au profit de méthodes plus rapides, plus efficaces et qui créeraient en outre des emplois – temporaires, certes, mais des emplois tout de même. Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. J’en profite pour dire de cet article quelques mots qui serviront aux débats ultérieurs. Nous avons besoin de scanners corporels car, contrairement à ce que vous affirmez, ils fluidifient le passage des spectateurs et réduisent donc les délais d’attente, tout en accroissant la sécurité du contrôle. La commission a renforcé les garanties déjà prévues, en précisant d’une part que la présence de scanners doit donner lieu à une information spécifique du public, d’autre part que les images produites par ces outils ne sont aucunement attentatoires à l’intimité de la personne contrôlée. J’ajoute que cette méthode de contrôle requiert le consentement du spectateur, qui conserve la liberté de choisir plutôt la palpation. Ainsi, si la féminisation des personnes assurant le contrôle par palpation constitue un enjeu, le scanner représente une sécurité supplémentaire pour les femmes.
Pour renforcer la sécurité et la fluidité des entrées, il paraît donc pertinent d’installer ces scanners corporels, accompagnés de toutes les garanties indiquées.
La parole est à M. Stéphane Mazars, rapporteur pour avis de la commission des affaires culturelles et de l’éducation. La sécurité représente le défi majeur pour les organisateurs de l’événement mondial que sont les Jeux de 2024 en France. Le secteur de la sécurité privée rencontre des difficultés liées aux ressources humaines, comme l’a souligné la Cour des comptes dans son rapport présenté récemment à la commission des affaires culturelles et de l’éducation, également chargée du sport. M. Stéphane Peu et moi-même l’avions d’ailleurs déjà signalé à la commission en notre qualité de corapporteurs de la mission d’information sur les retombées des Jeux olympiques et paralympiques de 2024 sur le tissu économique et associatif local.
Il faudrait recruter plusieurs milliers d’agents de sécurité ; ce travail est en cours, mais l’objectif sera difficile à atteindre. Des politiques publiques très volontaristes sont pourtant déployées en la matière, notamment celle de Pôle emploi, qui prend attache avec toutes les personnes ayant exercé ce métier et susceptibles d’y revenir. Je pense également à la création d’une nouvelle carte professionnelle dont les conditions d’accès sont moins exigeantes que la carte habituelle. Néanmoins, nous savons que la sécurité des JO souffrira d’un déficit de ressources humaines ; il convient donc d’aider au mieux les personnes chargées de cette tâche. À cette fin, les scanners constitueront un outil précieux. Il conviendra de les utiliser, comme le font de nombreux aéroports français sans que cela pose le moindre problème.
Je tiens également à insister sur les différentes garanties prévues dans le texte, rappelées à l’instant par Mme la ministre et plus tôt par M. Rudigoz, notamment sur la nécessité du consentement. Nul ne peut être soumis au contrôle par scanner corporel sans y consentir, ce qui apparaît comme une garantie essentielle. En outre, l’image du scanner brouille le visage. Il me semble donc que le dispositif proposé atteint un équilibre satisfaisant, c’est pourquoi nous le voterons.
La parole est à M. Antoine Léaument. Je reviendrai sur deux points. D’une part, vous affirmez que les scanners sont respectueux de l’intimité des personnes ; pourtant, ils laissent apparaître les parties génitales. Non ! Si ! Vous expliquez qu’elles seront floutées… Non : dès l’origine, les scanners ne permettent pas de voir le sexe. …car il faut protéger l’intimité des personnes. Mais si vous voulez trouver, par exemple, des lames céramiques glissées dans un caleçon, c’est là qu’il faudra regarder ! Elles, on les verra au scanner ! Un scanner, ce n’est pas les lunettes déshabilleuses que vous fantasmez ! Or une simple palpation au niveau des cuisses permettrait de vérifier sans peine l’absence de telles lames. Ce sont des poètes, à la NUPES ! J’essaie de poser des questions précises : nous débattons tout de même de ce que nous allons faire subir à nos concitoyens.
D’autre part, vous affirmez que les scanners sont plus rapides que la palpation. Je reconnais ne pas avoir eu le temps de lire l’étude d’impact. Contient-elle une analyse comparative du temps de passage moyen lors d’un contrôle par scanner et lors d’un contrôle humain et, le cas échéant, comment a-t-elle été réalisée ? Si, par exemple, vous m’expliquez que le passage par un scanner dure 4,5 secondes en moyenne et que le passage par un dispositif humain dure 6,7 secondes, je reconnaîtrai qu’une étude sérieuse a été menée. Je n’ai pas eu le temps de lire l’étude d’impact,…
Ce n’est franchement pas sérieux ! …mais si une telle analyse existe, je souhaite en connaître les résultats et les méthodes.
(L’amendement no 430 n’est pas adopté.) Je suis saisie de cinq amendements, nos 162, 163, 771, 118 et 540, pouvant être soumis à une discussion commune. La parole est à M. Roger Vicot, pour soutenir les amendements nos 162 et 163, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée. L’amendement no 163 vise à limiter ce dispositif à la durée des Jeux olympiques, c’est-à-dire du 26 juillet au 8 septembre 2024.
L’amendement no 162 tend à limiter l’usage des scanners corporels à ondes millimétriques aux manifestations sportives, récréatives ou culturelles rassemblant plus de 30 000 personnes. En effet, le texte du Sénat aurait pour effet de généraliser ce dispositif à toute manifestation de plus de 300 personnes, c’est-à-dire à quasiment toutes les manifestations à venir. On veut nous rassurer en insistant sur le fait que ces outils coûtent 100 000 euros ; mais ce coût ne s’élèvera plus qu’à 30 000 euros dans deux ou trois ans ! De plus, le Gouvernement pourra toujours – pourquoi pas, si tel est son choix –, recourir au Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD) pour favoriser l’achat de ces dispositifs par les collectivités, comme il l’a fait pour la vidéosurveillance.
Surtout, madame la ministre, vous affirmez que les scanners corporels préservent l’intimité des personnes.
Oui ! Il s’agit là d’un réel problème de fond sur lequel nous sommes en total désaccord. Le décalage est énorme entre les photos qu’on nous a fait parvenir, figurant une vague silhouette dont elles préservent effectivement l’intimité, et un document que nous avons reçu durant les travaux en commission, nommé « état d’avancement des travaux du rapporteur » – j’en profite pour lui souhaiter bon rétablissement –, dans lequel M. Vuilletet lui-même explique que le scanner à ondes millimétriques est tellement intrusif qu’il propose de flouter le visage des personnes observées. La différence entre ce document qui décrit l’outil comme intrusif et les photos vagues que nous avons reçues laisse planer un véritable doute sur la préservation de l’intimité des personnes contrôlées par ce dispositif qu’on envisage pourtant de généraliser à partir de 300 personnes. (M. Philippe Latombe secoue la tête en signe de dénégation.) La parole est à M. José Gonzalez, pour soutenir l’amendement no 771. Il vise à ce que ce dispositif de contrôle par scanner corporel soit instauré seulement à titre expérimental et jusqu’au 31 décembre 2024. Nous reconnaissons volontiers qu’il présente le double intérêt de faciliter la gestion des flux de spectateurs à l’entrée des enceintes sportives et de détecter plus aisément des objets dangereux qui auraient pu passer inaperçus lors d’une simple palpation. Néanmoins, son caractère intrusif nous pousse à nous interroger, et se doit d’être compensé par des garanties solides de respect de la vie privée. Nous devons être certains que les dispositifs d’information des personnes seront à la hauteur, afin que chacun ait connaissance de son droit de refuser l’utilisation de scanners corporels au profit de la simple palpation.
De plus, promouvoir une expérimentation – comme le fait d’ailleurs l’article 7, relatif au traitement algorithmique des images de vidéoprotection – permettra de s’assurer de l’application concrète de l’encadrement prévu dans le texte. Si l’expérience est concluante, le dispositif pourra faire son retour devant la représentation nationale, qui choisira de le pérenniser ou non, en dehors de toute pression liée à l’échéance des Jeux olympiques. Le Gouvernement pourra ainsi nous apporter les preuves du respect des dispositions prévues, mais également de l’efficacité et de la proportionnalité du dispositif.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 118. Si on peut comprendre la volonté de fluidifier les contrôles d’accès aux enceintes sportives, le dispositif prévu de recours à des scanners corporels à ondes millimétriques doit être limité dans le temps et dans l’espace du fait de sa nature inédite. Je propose la date du 31 décembre 2024, qui lui permet de continuer à fonctionner même après la fin des Jeux olympiques, afin d’obtenir davantage de recul sur son utilisation.
Cela semble d’autant plus pertinent que, dans son rapport, le Sénat considère que « la durée de création de l’image peut occasionner un ralentissement de l’intégration des spectateurs dans les enceintes pouvant lui-même générer un risque de manifestations d’impatience des spectateurs et de poussées au sein des flux [jusqu’à des mouvements de foule] ». Il ajoute : « Les différentes auditions menées par le rapporteur n’ont pas permis de déterminer si les scanners corporels seraient réellement mis en œuvre pendant la période des Jeux olympiques et paralympiques. Selon les déclarations des représentants du Comité d’organisation des Jeux olympiques et paralympiques (Cojop), ce n’est pas une technologie qu’il a prévu de déployer. »
Cet amendement de précision vise donc à limiter dans le temps le recours aux scanners corporels.
La parole est à M. Antoine Léaument, pour soutenir l’amendement no 540. Voici l’amendement Houlié ! En effet, M. Houlié a déposé cet amendement en commission des lois, avant de le retirer en promettant qu’il le déposerait à nouveau en séance. Pourtant, je ne crois pas qu’il l’ait fait. Nous l’avons donc copié-collé et repris à notre compte. Comme souvent ! Quel esprit de coconstruction ! C’est un amendement transpartisan. Nous souhaitons ainsi coconstruire cette mesure avec le président de la commission. L’amendement tend à limiter l’utilisation des scanners corporels à la période des Jeux olympiques, c’est-à-dire entre le 1er juillet et le 15 septembre 2024. En effet, le projet de loi s’intitule « projet de loi relatif aux Jeux olympiques et paralympiques », non « projet de loi sur la surveillance généralisée », « projet de loi Big Brother » ou encore « projet de loi 1984 ».
Par ailleurs, madame la ministre, je viens de consulter rapidement l’étude d’impact. J’y ai lu que les scanners allaient quatre fois plus vite que la palpation.
Merci ! Vous voyez, quand vous voulez ! Il reste donc à savoir comment cette étude d’impact a été menée. (« Oh là là » et soupirs sur les bancs des groupes RE et Dem.) De plus, elle indique que « en cas de zone d’alarme détectée, l’agent doit lever le doute par d’autres moyens (palpation) ». Ne serait-il pas plus rapide d’employer directement la méthode la plus efficace pour lever le doute, plutôt que d’ajouter une étape intermédiaire qui oblige ensuite à lever d’éventuels doutes ?
En toute honnêteté, pour avoir fait l’expérience des deux méthodes en tant que supporter de football et en tant que voyageur occasionnel par avion – quand j’y suis contraint –, je ne suis absolument pas convaincu que le contrôle par scanner corporel soit plus rapide que la palpation.
Quel est l’avis de la commission ? Monsieur Vicot, d’après votre défense de l’amendement no 162, vous semblez comprendre que l’utilisation du scanner corporel est obligatoire pour les manifestations de plus de 300 personnes, alors qu’en réalité elle est simplement possible. J’émets donc un avis défavorable sur cet amendement.
Je laisse la ministre répondre au sujet du caractère expérimental ou pérenne de ces dispositions. Monsieur Léaument, il ne faut pas s’en tenir à : « on m’a dit que ». En effet, j’ai consulté le compte rendu de la commission, et les propos que vous m’attribuez ne correspondent pas à ce que j’ai dit.
Ah ! Alors qu’avez-vous dit ? Vous avez pourtant déposé cet amendement, puisque nous l’avons recopié ! L’avis de la commission sur ces cinq amendements est défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Avis défavorable. Je confirme au député Roger Vicot le caractère facultatif du déploiement de ces scanners. Je rappelle à M. Léaument que le contrôle par le scanner est en effet quatre fois plus rapide que la palpation, ce qui permet de passer de 200 à 800 contrôles par heure. Pour répondre à votre question précise, une étude préliminaire réalisée conjointement par un opérateur français de sécurité privé et un fabricant français de scanners à ondes millimétriques…