XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023

Séance du lundi 06 mars 2023

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi relative à la prévention de l’exposition excessive des enfants aux écrans (nos 757, 909).
Cet après-midi, l’Assemblée a commencé d’entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
La parole est à M. Frédéric Maillot.
L’exposition excessive aux écrans est devenue un grand fléau, aussi bien pour les enfants que pour les parents. En effet, les parents sont les premiers à reconnaître qu’ils utilisent trop leur smartphone et peinent parfois, par manque d’information, à encadrer – voire à recadrer – l’utilisation des écrans par leur enfant.
Pourtant, les dangers sont multiples et multiformes – certains collègues l’ont rappelé. Toujours plus présents, les écrans affectent les relations des enfants avec leur entourage, alors que ces interactions sont essentielles à leur développement. À cela s’ajoutent de véritables risques pour leur santé : dommages sur la rétine, cycles de sommeil insuffisants – les experts le confirment –, retards de langage, obésité ou encore hypertension artérielle.
La santé physique des enfants est la première à être affectée, mais il ne faut surtout pas oublier la santé psychique. Les écrans enferment et ne permettent pas aux tout-petits d’appréhender correctement leur environnement. Les heures passées devant la télé ou devant un écran de smartphone sont autant d’heures durant lesquelles les écrans agissent sur la santé et le développement cognitif de nos enfants.
Parce que nous sommes parfaitement informés de ces risques, nous devons nous donner les chances de protéger les enfants et faire passer ce message clair : aucune exposition aux écrans avant l’âge de 3 ans. Plusieurs mesures, comme les campagnes de sensibilisation et les plateformes explicatives, sont nécessaires pour donner des clefs essentielles aux parents. Afin de les outiller au mieux dans leurs méthodes éducatives, les parents ont besoin de trouver des réponses précises et accessibles. Ce soutien est d’autant plus nécessaire que 46 % d’entre eux ne se sentent pas assez accompagnés dans la pratique numérique de leurs enfants.
Bien entendu, on ne peut nier le formidable outil que représentent les écrans dans l’apprentissage ou l’ouverture au monde grâce à l’accès à internet. Je dis cela en connaissance de cause car, à La Réunion, l’abonnement à internet coûte 40 % plus cher qu’en Hexagone, si bien que beaucoup de familles doivent y renoncer.
C’est inacceptable. Cette proposition de loi est une première pierre législative pour encadrer l’usage des écrans auprès des enfants et nous proposons des amendements de bon sens. Il s’agit non pas de culpabiliser les parents dans l’éducation de leurs enfants, mais de les informer pour qu’ils puissent faire des choix éclairés.
Lors de l’examen de l’article 4 en commission, ma collègue Soumya Bourouaha vous a alertés sur les missions nouvelles que cette proposition de loi souhaitait confier aux conseils départementaux. Elle a notamment pointé l’inégalité de ressources à laquelle ils sont confrontés et la difficulté qu’ils éprouvent à assurer leurs missions. Mme la rapporteure propose un amendement visant à supprimer cette disposition. Nous regrettons ce choix : notre mise en garde n’avait pas pour but de supprimer ce dispositif intéressant, mais plutôt de souligner qu’il faut impérativement, pour qu’il s’applique réellement, allouer aux collectivités les ressources nécessaires.
Nous sommes très favorables à l’inscription de messages de prévention sur les emballages des différents écrans mis en vente, consistant en un court texte de prévention ou en un logo. Du reste, cette décision revient au législateur et non aux fabricants. C’est d’ailleurs parce que nous estimons cette mesure intéressante que nous avons déposé un amendement visant à inscrire noir sur blanc dans la loi que les industriels qui ne se plieraient pas à cette obligation s’exposeraient automatiquement à des sanctions. On ne transige pas avec la santé de nos enfants, on ne saurait la « scroller ».
Enfin, nous avons déposé un amendement d’appel visant à demander au Gouvernement de remettre un rapport aux parlementaires évaluant l’utilisation des écrans par les enfants de 6 à 12 ans.
Très bien ! Nous souhaitons que les conclusions et préconisations de ce rapport puissent servir de base à un travail parlementaire s’intéressant aux 6-12 ans, en complément de cette proposition de loi qui ne concerne que les enfants âgés de 0 à 6 ans.
Le groupe GDR-NUPES ne peut que soutenir une telle proposition de loi. La responsabilisation des parents est impérative pour apporter de réelles réponses face aux risques que les écrans peuvent induire sur leur santé physique mais aussi mentale. Il faut sensibiliser et davantage responsabiliser, afin d’éviter que cette proposition de loi ne devienne un écran de fumée.
(Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES.) Très bien ! La parole est à M. Olivier Serva. La surexposition des enfants aux écrans est un phénomène croissant, qui doit retenir toute l’attention des pouvoirs publics, tant les risques et dangers qu’il entraîne sont importants du point de vue de la santé publique, du développement cognitif, mais aussi des relations sociales.
Les chiffres que vous avez mis en avant, madame la rapporteure, doivent tous nous interpeller. Sept cent vingt-huit, c’est le nombre d’heures que passe, en moyenne, chaque année, un enfant âgé de 3 à 10 ans derrière un écran. Quant aux enfants âgés de 0 à 3 ans, ils sont un tiers à prendre leur repas devant un écran. Troubles du langage et de la mémoire, retards de développement et phénomènes d’addiction sont les symptômes de cette épidémie silencieuse qui touche particulièrement les générations Z et alpha.
Autre conséquence de la surexposition aux écrans : les troubles de la vision. Selon la Société française d’ophtalmologie, l’Europe de l’Ouest pourrait voir son taux de personnes myopes passer de 28,5 % en 2010 à 56,2 % en 2050. Plus grave encore, près d’un milliard de personnes pourraient présenter un risque accru de devenir aveugles.
Ces chiffres et constats alarmants commandent aux décideurs publics de prendre d’urgentes mesures préventives. C’est pourquoi le groupe LIOT soutient fermement la volonté de mener une politique publique de prévention des risques liés aux écrans numériques pour la jeunesse. À ce titre, l’article 1er de la proposition de loi est pertinent en ce qu’il inscrit une telle politique dans le code de la santé publique. Celle-ci passera notamment par la formation des professionnels de santé et de la petite enfance. Cela suppose également, et principalement, la sensibilisation des parents. Dans ce but, vous prévoyez l’inscription de messages de prévention sur les emballages et l’encadrement de certains messages publicitaires : nous y souscrivons.
Par ailleurs, il est judicieux que l’application de cette politique incombe au conseil départemental, dans la mesure où celui-ci organise déjà la protection maternelle et infantile (PMI). Néanmoins, nous nous interrogeons sur le bien-fondé de l’ajout de nouvelles compétences dans la loi, dans la mesure où les départements sont déjà mobilisés sur la question. Nous prenons note de la volonté de la rapporteure de revenir sur ce point lors de l’examen du texte en séance.
Le véritable enjeu réside dans les moyens alloués aux départements pour mener à bien leurs missions de prévention. À ce sujet, j’interroge le Gouvernement : une compensation est-elle prévue pour les départements, alors qu’ils nous alertent sur leurs difficultés à trouver et à recruter des intervenants ?
En outre, notre groupe s’interroge sur la pertinence de certaines mesures présentes dans le texte, qui relevaient davantage du domaine réglementaire que de celui de la loi. Nous sommes satisfaits de la nouvelle rédaction de l’article 2 relatif aux messages de prévention figurant dans le carnet de grossesse. Son inscription telle quelle dans le code de la santé publique n’était pas adaptée ; il était nécessaire de renvoyer cette disposition à un décret.
Toutefois, nous continuons de nous interroger sur la restriction, inscrite dans le règlement intérieur des établissements, de l’utilisation des appareils par les professionnels encadrants, en présence d’enfants. Cette mesure nous semble disproportionnée et particulièrement contraignante. La rédaction ne permet pas de savoir quel usage est précisément visé. Les usages pédagogiques seront-ils les seuls visés ou bien l’usage des téléphones des enseignants, par exemple, le sera-t-il également ?
Plus largement, notre groupe estime qu’il était suffisant d’inscrire dans la loi l’existence d’une politique publique de prévention. En effet, il revient au pouvoir réglementaire, aux professionnels de santé, aux éducateurs et aux collectivités locales de déterminer et d’appliquer cette politique. Le principal enjeu, selon nous, réside dans les moyens que les pouvoirs publics y consacreront, et l’investissement de toutes les parties prenantes.
Nous constatons par ailleurs que cette proposition de loi est examinée alors même que notre assemblée se prononce sur la proposition de loi visant à garantir le respect du droit à l’image des enfants ou encore la proposition de loi visant à instaurer une majorité numérique et à lutter contre la haine en ligne. Ces textes se rapprochent de ceux que nous avons adoptés sous la précédente législature, telle la loi du 2 mars 2022 visant à renforcer le contrôle parental sur les moyens d’accès à internet. Il aurait peut-être été intéressant que ces questions, qui sont liées, soient traitées dans un seul et même texte. Il faudra désormais s’assurer de la cohérence de toutes les mesures que nous adopterons, dans l’objectif de protéger nos enfants. D’ici-là, notre groupe soutiendra assurément cette proposition de loi.
La parole est à M. Yannick Neuder. Quatre heures et trente-sept minutes par semaine. Voilà le temps que passent en moyenne les enfants âgés de 1 à 6 ans sur les écrans. Parmi eux, 10 % possèdent leur propre console, 15 % leur propre tablette, et 67 % des enfants âgés de 2 ans regardent la télévision tous les jours. Ces chiffres sont alarmants, alors même que les recommandations en matière éducative prescrivent de « maintenir les enfants de moins de trois ans éloignés des écrans et d’accompagner très progressivement leur insertion dans leur quotidien dans les années qui suivent ».
Cette réalité a pris une acuité particulière lors de la crise sanitaire : le nombre des clics a considérablement augmenté pendant les différents confinements. Quant à la consommation numérique des enfants, elle a crû de 53 %, en raison notamment d’une nette hausse des activités vidéoludiques. En la matière, ce qu’ils préfèrent, c’est regarder des vidéos sur les plateformes, écouter de la musique et regarder des clips, et jouer aux jeux vidéo.
Le phénomène croissant de l’hyperconnexion soulève de véritables questions, du point de vue de la santé publique mais aussi de l’égalité des chances.
En effet, la dépendance aux écrans représente un réel danger pour la santé de nos enfants. Or il est parfois difficile pour nous, parents, de contrôler leur activité ; et je parle en connaissance de cause – c’est du vécu ! Le médecin et père de famille que je suis ne saurait être insensible à l’impact des écrans sur la santé mentale et physique de nos jeunes.
Il a par ailleurs été démontré que l’usage massif des écrans met en lumière les inégalités qui règnent dans notre société. Une enquête réalisée à l’initiative de la Direction générale de la santé a permis, par exemple, d’établir un lien entre un usage fréquent de la télévision et le niveau d’études des parents : plus celui-ci est faible, plus les enfants la regardent souvent.
Il paraît donc opportun que le législateur se saisisse d’une telle question. Il ne s’agit pas de brider l’utilisation de ces technologies innovantes, et encore moins de limiter la liberté d’éducation des parents ; vous savez combien les députés Les Républicains sont attachés aux libertés individuelles et au respect de la vie privée.
Très bien ! Il s’agit plutôt de protéger nos concitoyens, notamment les plus jeunes d’entre eux. Telle est en effet la mission de notre assemblée.
Oui, mes chers collègues, il faut non seulement protéger nos enfants des conséquences de l’exposition aux écrans mais aussi limiter les risques potentiels qu’elle comporte. J’appelle plus particulièrement votre attention sur les méfaits de la lumière diffusée par les écrans. Sur les yeux, tout d’abord, puisque les leds émettent un pic de lumière bleue, proche du rayonnement ultraviolet, dont les effets délétères sont connus : elle provoque un vieillissement précoce de la rétine et favorise la dégénérescence maculaire liée à l’âge.
Sur le cerveau, ensuite, puisque les signaux lumineux, en déréglant le rythme de l’alternance veille-sommeil, sont source de perturbations du sommeil, de troubles cognitifs et de l’humeur : dépressions, troubles bipolaires. Les études ont ainsi démontré un lien entre une exposition excessive aux écrans et un certain nombre de troubles en augmentation chez les jeunes : diminution de l’attention, retard scolaire, stress, anxiété, surpoids, obésité…
Il est donc important de fixer un cadre afin de prévenir la surexposition des enfants aux écrans. Nous pourrions ainsi prévoir, comme le recommande l’Académie nationale de médecine, une sensibilisation, d’une part, des élèves, durant leur cursus scolaire, d’autre part des parents, souvent mal informés dans ce domaine, aux risques liés à un usage excessif des écrans.
La proposition de loi, qui apparaît comme une démarche volontariste, aurait donc pu aller encore plus loin. Mais parce qu’elle est une première étape essentielle dans ce combat 2.0, les députés Les Républicains voteront pour.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) La parole est à Mme Laure Lavalette. Cela ressemble à s’y méprendre à une fenêtre, mais voir le monde à travers un écran est une façon bien froide de l’appréhender.
La question qui nous occupe, et nous occupera de plus en plus, est bien celle de notre envie de laisser nos enfants découvrir ce monde sans âme qui, en cas d’excès, détériore leur psychisme et leur santé. Comment voir un danger dans un outil aussi banal qu’un écran, dont la présence dans nos vies est devenue absolue, incontournable, tant dans la rue qu’à la maison, dans les transports ou au travail, bref : partout.
Visibles par tous, les écrans sont, dès le plus jeune âge, des outils quotidiens très plaisants pour les enfants : ils diffusent sans cesse des images colorées et distrayantes, les histoires s’enchaînent et n’ont jamais de fin. Lorsqu’ils sont utilisés à des fins pédagogiques, ils permettent de répondre à des quiz ou de cliquer dans un temps imparti sur l’image qui correspond au mot énoncé. Rien de bien problématique en apparence, donc.
Mais, très vite, ils deviennent la norme, au détriment des apprentissages fondamentaux et de la santé des plus petits. Comprenez bien : il ne s’agit pas d’être technophobe et de balayer d’un revers de main l’utilisation de tout support numérique dans la vie des enfants. Mais la balance entre les bénéfices et les risques doit être faite, et vite.
Car si la littérature scientifique française permet d’ores et déjà de mettre en garde les parents contre les conséquences d’une exposition aux écrans sur les enfants, leurs effets à long terme sont encore trop méconnus. À court terme, les risques sont nombreux : ralentissement de l’apprentissage des fondamentaux, troubles cognitifs, relationnels et intellectuels, troubles du sommeil et de la concentration, obésité, problèmes de vue, hypertension artérielle… Bref, c’est tout une hygiène numérique que nous devons inventer.
La vitesse à laquelle les écrans sont entrés dans nos vies ne nous a pas laissé le temps d’intérioriser les bons gestes à adopter. Et, nous le savons, les bonnes pratiques sont plus longues à s’ancrer dans le quotidien que les moins bonnes.
Le texte que nous étudions est, comme vous l’écrivez dans son exposé des motifs, madame la rapporteure, la « première pierre législative » d’un grand plan qui se veut ambitieux, et c’est une bonne chose. Toutefois, comme notre collègue Christine Loir l’a montré dans son rapport d’information sur les jeunes et le numérique, le législateur peine à instaurer une protection suffisante.
L’adoption d’une hygiène numérique prend du temps, et cela dépend moins du législateur que des familles. Il ne s’agit pas d’assurer une police de la bonne conduite au sein des foyers ; nous sommes évidemment très attachés à la liberté d’éducation. Mais il faut que nous ayons le courage de contrebalancer l’ingérence des écrans. Je pense notamment à leur présence dans les classes de maternelle.
Le fait que des enfants de petite, de moyenne et de grande section aient accès à des écrans pose deux problèmes majeurs. Le premier, c’est bien sûr celui de l’acquisition des apprentissages fondamentaux que sont la motricité, le langage, la construction des relations avec la famille et la sphère sociale, la compréhension de l’environnement quotidien… Les neurosciences nous apprennent qu’un enfant qui tape sur le clavier d’une tablette fait le même geste quelle que soit la lettre qui s’imprime sur l’écran, alors que lorsqu’il trace ces lettres sur le papier, des connexions neuronales se font, qui sont très importantes pour la suite de leurs apprentissages.
Si la maternelle ne doit pas compenser ou se substituer au rôle parental, elle permet de développer de nouvelles compétences et d’en renforcer d’autres. De fait, l’enfant découvre un nouveau monde lorsqu’il entre en maternelle : il apprend à se comporter en société auprès d’enfants du même âge et à nouer avec eux des liens affectifs. Il apprend également à se passer de ses parents et à communiquer avec le personnel éducatif, loin de la sphère rassurante du foyer. Ces années sont donc cruciales pour un développement serein de l’enfant lui garantissant des bases solides et suffisantes.
Le second enjeu de la présence des écrans en maternelle est celui de l’égalité des chances – nous avons évoqué cette question en commission. D’après l’Association française de pédiatrie ambulatoire, les enfants âgés de 1 à 6 ans passent en moyenne quatre heures dix par semaine sur internet et 44 % des parents d’enfants de moins de 3 ans leur prêtent leur téléphone afin de les calmer et de les occuper.
À cela s’ajoute la forte présence de la télévision dans les foyers. En juin 2021, une étude de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) a mis en évidence qu’à 2 ans, le niveau de langage des enfants toujours exposés à la télévision pendant les repas de famille est plus faible que celui des enfants qui ne le sont jamais. Cela n’a rien d’étonnant, puisque l’enfant et les parents se détournent des conversations humaines au profit de stimulations visuelles et auditives qui brouillent les distinctions phonologiques.
Le temps passé devant un écran, notamment lorsque c’est au détriment des moments passés en famille, dépend bien souvent de la catégorie socio-économique à laquelle appartiennent les parents. L’écran remplace une activité culturelle, ludique, souvent à l’extérieur, en particulier lorsque le parent est seul.
Ces inégalités dans la richesse et la variété des activités, nous ne devons pas les reproduire à l’école. Alors, allons plus loin et supprimons l’écran là où il n’apporte rien mais prive de beaucoup. Si l’enfance est une saison qui ne dure pas, faisons en sorte qu’elle demeure la plus épanouissante possible !
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. François Gernigon. De nos jours, il est difficile d’imaginer la vie sans écran. Que ce soit pour travailler, communiquer avec nos proches, nous divertir ou apprendre, nous avons constamment recours à des ordinateurs, à des smartphones, à des tablettes ou à des téléviseurs. Or cette surabondance d’écrans est un défi majeur pour les parents, qui doivent désormais gérer l’accès constant de leurs enfants à ces technologies. En effet, contrairement aux générations précédentes, les enfants d’aujourd’hui grandissent en ayant un accès quasi illimité aux écrans, ce qui peut avoir des effets néfastes sur leur développement cognitif, social et émotionnel.
Les résultats de la cohorte Elfe (Étude longitudinale française depuis l’enfance), publiés récemment par l’Insee, sont alarmants : plus de quatre enfants sur dix âgés de 3 ans et demi et plus de la moitié des enfants âgés de 5 ans et demi utilisent régulièrement des écrans numériques. Durant les six premières années de la vie, seulement quatre enfants sur dix sont durablement maintenus à distance de ces derniers, tandis que plus de la moitié augmentent, parfois fortement, leur temps d’écran. De plus, seulement 13,5 % des parents respectent la recommandation de ne pas exposer aux écrans les enfants de moins de deux ans. Ces chiffres reflètent de fortes inégalités socio-économiques.
Le psychiatre Serge Tisseron a élaboré une série de préconisations concernant l’usage des écrans, largement diffusées par les professionnels de la santé et des organismes tels que Santé publique France. Selon la règle « 3-6-9-12 » qu’il a élaborée, il convient de ne pas exposer les enfants à la télévision avant l’âge de 3 ans, aux consoles de jeux avant l’âge de 6 ans, à internet avant l’âge de 9 ans et aux réseaux sociaux avant l’âge de 12 ans.
Les scientifiques ont alerté sur les risques encourus par les enfants exposés de manière excessive aux écrans, risques qui sont résumés dans un avis du Haut Conseil de la santé publique (HCSP) paru en 2020 : dégradation de la qualité du sommeil, obésité et surpoids, troubles du développement concernant l’apprentissage, le langage et l’attention, ou décrochage scolaire à l’adolescence…
Pour le groupe Horizons, il faut favoriser la prise de conscience de cette problématique à l’échelle de la société et chez les professionnels de la petite enfance ; c’est une ardente nécessité. À cette fin, la proposition de loi prévoit une campagne de communication sanitaire à destination du grand public – ajout de messages sur les emballages, dans les publicités et dans le carnet de grossesse, plateformes d’information – ainsi qu’une prise en compte pérenne de cette problématique à différents échelons de nos administrations – conseil départemental, écoles et secteur parascolaire – et la formation des professionnels au contact des plus jeunes.
Pendant les débats en commission, la rapporteure a pu dissiper quelques incertitudes concernant la proposition de loi. Remaniée par les députés et la rapporteure à la suite des auditions, elle a été adoptée à l’unanimité par la commission des affaires sociales.
Nous remercions la rapporteure pour son engagement et ses travaux. Ce texte marque une belle avancée pour la santé de nos enfants. Aussi notre groupe, qui souscrit à ses objectifs, le soutient-il pleinement. Il s’accompagnera d’autres mesures, notamment en ce qui concerne les contenus et les réseaux sociaux, dont l’usage précoce expose les enfants à d’autres types de risques.
Nous tenons, à ce propos, à saluer l’adoption à la quasi-unanimité par notre assemblée, jeudi dernier, de la proposition de loi du président Laurent Marcangeli visant à instaurer une majorité numérique.
(Applaudissements sur les bancs du groupe HOR. – Mme Nicole Dubré-Chirat applaudit également.) La discussion générale est close.
La parole est à Mme Caroline Janvier, rapporteure de la commission des affaires sociales.
Je remercie les orateurs des différents groupes, qui se sont exprimés assez largement en faveur des objectifs que nous visons en défendant cette proposition de loi. Nous aurons l’occasion de débattre d’un certain nombre de points. Je pense à la question de la tranche d’âge qui doit faire l’objet d’une politique de prévention, certains d’entre vous souhaitant que celle-ci s’adresse aux enfants âgés de moins de 12 ans, et non de moins de 6 ans.
Je pense également à la notion d’« usage excessif », qui me paraît plus opérationnelle que celle d’exposition. Je rappelle que la proposition de loi concerne également les enfants âgés de plus de 3 ans ; or il ne me paraît pas raisonnable de prôner une absence totale d’utilisation des écrans les concernant.
Par ailleurs, plusieurs groupes ont souligné les difficultés que pourraient rencontrer les départements, compte tenu des ressources dont ils disposent, dans l’exercice de missions supplémentaires ; je vous proposerai, à l’article 4, un amendement à ce sujet.
Enfin, je salue la prise de parole de notre collègue Rouaux, du groupe Socialistes, qui a établi un lien entre la baisse de l’activité sportive des enfants et leur usage des écrans qui, au-delà de leurs effets sur le développement de l’enfant, les privent d’autres activités, notamment culturelles et sportives. L’Organisation mondiale de la santé (OMS) notamment s’alarme, du reste, de cette diminution de l’activité physique et des conséquences qu’elle peut avoir sur la santé des enfants, en particulier en les exposant à un risque accru d’obésité.
La parole est à Mme Virginie Duby-Muller. La présente proposition de loi vise à prévenir la surexposition des enfants aux écrans. En 2019, l’OMS recommandait déjà de bannir les écrans pour les enfants de moins de 2 ans et de limiter leur usage à une heure par jour entre 2 ans et 5 ans. Aujourd’hui, un consensus scientifique se dégage pour considérer que l’exposition excessive aux écrans a un impact sur le développement des enfants en bloquant leurs interactions sociales, notamment avec les autres membres de la famille. Par ailleurs, une utilisation inappropriée peut avoir des conséquences physiques et mentales : hyperactivité et impulsivité, troubles de l’apprentissage, du sommeil, du langage et du développement cognitif.
Or, malgré les recommandations des autorités scientifiques compétentes – l’académie américaine de pédiatrie mais aussi, en France, l’Académie de médecine et le Haut Conseil de la santé publique –, les enfants de 3 ans à 10 ans passent près de deux heures par jour devant les écrans, soit sept cent vingt-huit heures annuellement. En outre, selon la rapporteure du présent texte, un tiers des enfants de moins de 3 ans prennent leurs repas devant un écran. Les dangers sont donc bien réels.
Par conséquent, il est urgent de protéger les jeunes enfants. C’est ce dont traite plus spécifiquement l’article 1er. Celui-ci aborde les questions de prévention, en prévoyant notamment un volet formation constitué de modules spécifiques consacrés à cette problématique pour les professionnels de santé, du secteur médico-social et de celui de la petite enfance, mais également l’ajout de mentions spéciales sur les emballages ainsi que des messages de présentation dans les publicités, et enfin la limitation de l’utilisation des écrans dans les établissements d’accueil de la petite enfance et dans les écoles maternelles et primaires. Mais il faudra aussi et surtout associer les parents car c’est d’eux que relève l’éducation, et des actions spécifiques devront donc être conduites à leur endroit.
(Mme Marie-Christine Dalloz et M. Fabien Di Filippo applaudissent.) Je suis saisi de deux amendements, nos 32 et 26, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 32.
Cet amendement de mon collègue Pierre Cordier propose d’étendre la politique de prévention aux enfants de 6 ans et plus ainsi qu’aux adolescents. En effet, les risques liés à l’exposition aux écrans numériques ne concernent pas que les jeunes enfants. Vous conservez la parole, mon cher collègue, pour soutenir l’amendement no 26. Cet amendement rédactionnel tire les conséquences du fait que tous les enfants doivent être protégés, pas seulement les plus jeunes d’entre eux. Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Il serait évidemment pertinent de légiférer dans le cadre de stratégies abordant les âges au-delà de 6 ans, y compris l’adolescence, étant donné les risques spécifiques qui concernent cette classe d’âge, notamment en lien avec les contenus que nous connaissons. Néanmoins, j’ai fait le choix, parce qu’il s’agit d’une proposition de loi dont la dimension opérationnelle est forcément restreinte, de limiter ce texte à la tranche d’âge des 0-6 ans.
Les experts nous rappellent que les habitudes de consommation se forment très jeune ; il nous faut donc mettre l’accent sur cette tranche d’âge que Michel Desmurget appelle un temps d’imprégnation, avec toutes les implications que l’on connaît sur le développement de l’enfant, notamment son développement cognitif. C’est d’ailleurs bien pourquoi dix-sept des vingt rendez-vous médicaux obligatoires dans le cadre scolaire sont concentrés sur cette période ; de même, les services de PMI s’attachent plus particulièrement au public des 0-6 ans.
L’avis sera donc défavorable à tous les amendements qui proposent d’étendre l’âge des enfants visés par cette proposition de loi.
La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’enfance, pour donner l’avis du Gouvernement. Je rejoins l’avis de Mme la rapporteure. Le choix des moins de 6 ans résulte de travaux menés par le Haut Conseil de la santé publique : cette tranche d’âge correspond en effet au stade du développement de l’enfant pendant lequel les impacts potentiels des écrans sont les plus importants. Dans son avis du 12 décembre 2019, le Haut Conseil mentionne des risques spécifiques sur la santé des enfants de moins de 6 ans, sur lesquels tous nos efforts doivent donc se concentrer.
L’exposition aux écrans est une distraction qui peut avoir des conséquences sur leur développement cognitif, mais aussi sur leur développement physique – modification du comportement alimentaire par une consommation d’aliments nocifs, sédentarité accrue et sommeil altéré. L’exposition des enfants de moins de 3 ans est même à proscrire, selon le HCSP, si les conditions d’une interaction parentale ne sont pas réunies et, sinon, le temps d’utilisation doit être faible et délimité.
Les messages de prévention en matière de santé publique doivent se fonder, nous le savons, sur des recommandations scientifiques précises et c’est ce qu’a fait le Haut conseil. Il établit clairement la distinction entre jeunes enfants d’une part, et autres enfants et adolescents d’autre part. Or les actions de prévention et de suivi menées par les services de protection maternelle et infantile, le cœur de l’action proposée par Mme la rapporteure, sont bien à destination des 0-6 ans. Il faut, je le répète, focaliser toutes les actions de prévention sur cette tranche d’âge. Je suis donc moi aussi défavorable à tous les amendements qui proposent de l’étendre.
La parole est à M. Philippe Fait. J’ai bien compris qu’on n’étendra pas ce soir la tranche d’âge des enfants concernés par cette proposition de loi, mais j’aurais tout de même bien aimé qu’on y inclue aussi les députés puisque j’ai failli, en me rendant aux toilettes il y a quelques instants, être percuté par deux collègues complètement absorbés par leurs écrans. (Sourires.) Ça fait avancer le débat… Il y aura peut-être un jour le moyen de légiférer aussi sur cet autre problème. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Conformément à l’application stricte du règlement, ce sera un orateur pour et un orateur contre, puis nous passerons au vote. M. Fait était pour ou contre ? La parole est à M. Antoine Léaument. Nous, à La France insoumise, allons voter l’amendement no 26 de M. Cinieri parce que la suppression du mot « jeunes » participe de l’état d’esprit dans lequel nous voulons être ce soir. Comme je l’ai dit dans la discussion générale, nous considérons que c’est un danger d’exposer les enfants aux écrans. Surtout aux vidéos de LFI ! La simple modification d’un intitulé qui est demandée ici n’aurait certes pas de réelle portée juridique, mais elle montrerait que l’exposition aux écrans est dangereuse pour l’ensemble des enfants. Notre position sera similaire s’agissant de la notion d’exposition excessive – mais on y reviendra plus en détail ultérieurement.
(Les amendements nos 32 et 26, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à M. Thierry Frappé, pour soutenir l’amendement no 7. L’adoption de cet amendement permettrait au ministère de la santé d’être un acteur à part entière de la prévention des risques liés à l’exposition aux écrans numériques sur la santé. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission ? Vous souhaitez, par cet amendement, insister sur la dimension de santé publique que revêt la proposition de loi, mais elle figure déjà écrite noir sur blanc avec le nouveau titre ajouté au code de la santé publique par l’article 1er. Cela étant, les autres articles relèvent également d’autres ministères, notamment celui de l’éducation – puisque je propose une formation des enseignants –, mais aussi du secrétariat d’État à l’enfance et du ministère chargé de la transition numérique. Je crois qu’il nous faut au contraire élargir le champ et associer le plus grand nombre possible d’acteurs. L’avis est donc défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je vous remercie, madame la rapporteure, de justifier un tout petit peu mon rôle au sein de ce gouvernement. C’était nécessaire. La lutte contre tous les risques liés au numérique, en particulier les risques de l’exposition aux écrans, est en effet une politique interministérielle. C’est pourquoi mon secrétariat d’État est placé auprès de la Première ministre. Non seulement le ministre de la santé est parfaitement impliqué dans cette lutte mais c’est aussi le cas de l’ensemble des ministres, dont évidemment le ministre de l’éducation nationale et le ministre chargé du numérique, ainsi que d’autres acteurs : je pense bien sûr aux départements, chargés d’une politique sociale et de prévention, mais aussi à d’autres collectivités ou à des institutions comme certaines autorités administratives indépendantes. Je suis défavorable à cet amendement et j’en demande le retrait pour bien souligner le caractère interministériel et interinstitutionnel de la lutte contre l’usage excessif des écrans.
(L’amendement no 7 n’est pas adopté.) Je suis saisi de plusieurs amendements, nos 33, 13, 22 et 30, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 13 et 22 sont identiques.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 33.
Cet amendement de mon collègue Pierre Cordier propose de ne pas limiter la politique de prévention aux enfants de moins de 6 ans. En effet, tous les enfants et tous les jeunes adolescents sont potentiellement concernés par les problèmes de concentration et de mémorisation ainsi que par les troubles du sommeil et du comportement et leurs conséquences psychologiques et physiques.
Les adolescents risquent par ailleurs, bien plus que les jeunes enfants, de tomber dans l’addiction aux jeux vidéo ou aux jeux de hasard en ligne, sans oublier le risque d’exposition à des contenus choquants ou pour le moins inadaptés, ou encore le risque de mauvaises rencontres en ligne qui peuvent engendrer cyberharcèlement, arnaques et pédophilie.
La parole est à Mme Christine Loir, pour soutenir l’amendement no 13. Les problèmes causés par l’exposition aux écrans ne concernent pas seulement les enfants de moins de 6 ans. Les spécialistes ont établi quatre balises définissant les étapes clés de la prévention chez les enfants de 3 ans, 6 ans, 9 ans et 12 ans. Nous proposons ici de faire passer de 6 ans à 12 ans l’âge limite de la prévention car on a besoin d’une prévention globale pour tous les jeunes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.) La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 22. Les risques liés à l’exposition excessive aux écrans numériques sont importants pour les enfants, même au-delà de 6 ans. Il convient donc de mettre en place une politique de prévention jusqu’à 12 ans. L’amendement no 30 de Mme Alexandra Martin est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur cette série d’amendements ?
Avis défavorable pour les raisons que j’ai expliquées précédemment. Je souhaite conserver cette cible des 0-6 ans, même si je reconnais qu’il serait intéressant de travailler sur la question des autres tranches d’âge pour aboutir à un texte distinct portant sur les risques inhérents aux 6-12 ans ou aux 12-18 ans : je pense à l’addiction aux réseaux sociaux, à l’exposition à des contenus violents ou encore au cyberharcèlement. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je suis moi aussi défavorable à l’ensemble de ces amendements parce qu’il s’agit d’un texte d’une portée très particulière et qui vise à alerter spécifiquement sur le cas des 0-6 ans, conformément à l’avis du Haut Conseil de la santé publique. Nous continuerons bien sûr de travailler sur le cas des autres enfants et des adolescents – je rappelle que votre assemblée a déjà examiné plusieurs textes à ce sujet et que d’autres sont en préparation.
La politique du Gouvernement s’agissant de l’enfance est globale, mais il s’agit en l’espèce, en s’appuyant sur l’action des PMI, de mener une politique de prévention, notamment en matière sanitaire, visant la tranche d’âge des 0-6 ans. Il convient de préserver la cohérence du texte. Le message adressé aux familles doit être très clair et alerter fortement sur le cas des 0-6 ans.
La parole est à M. Fabien Di Filippo. La cohérence supposerait justement d’inclure une partie des adolescents dans ce texte ; vous l’avez reconnu du bout des lèvres, madame la rapporteure. Vous parlez de l’importance des études scientifiques pour reconnaître ces problèmes et évoquez le Haut Conseil de la santé publique. N’oubliez pas que l’Académie de médecine, il y a un mois exactement, a publié une étude sur l’impact des écrans chez les enfants, mais aussi chez les adolescents, lesquels sont encore plus affectés par la phototoxicité et par les troubles ou les décalages du sommeil. Pour quelle raison ? L’usage des écrans chez les enfants de moins de 6 ans est forcément très contrôlé par les parents ; on peut en dire autant des professionnels dans les crèches. (Mme Michèle Peyron s’exclame.) Je connais très peu d’enfants qui arrivent au CP avec un smartphone – je ne dis pas que cela n’existe pas, mais l’usage de smartphones vient un peu plus tard.
En revanche, à l’adolescence, l’usage des écrans est complètement libre, y compris jusque très tard dans la nuit à cause des espaces de discussion en ligne
et des jeux vidéo. L’impact sur le cerveau et la concentration, ainsi que les troubles cognitifs et de l’apprentissage peuvent à ce moment-là devenir encore plus forts. Vous parlez de « cohérence », madame la secrétaire d’État : convenez que ces amendements donnent justement plus d’efficacité et de cohérence à ce texte ! Je vois que M. Léaument demande la parole mais je vais la donner à Mme Michèle Peyron ; nous aurons ainsi entendu un avis pour et un autre contre les amendements. Pour une fois que je m’apprêtais à aller dans le sens de la majorité… Je suis évidemment d’accord avec la rapporteure et la secrétaire d’État. Vous avez tous rencontré comme moi des enfants qui, dès l’âge de 2 ans, ont des portables à la main. Or c’est aux âges les plus jeunes, au début de la vie donc, que les développements s’effectuent, notamment du langage ; tous les apprentissages cognitifs sont très importants. Si vous me permettez cette expression très commune, il faut mettre le paquet sur les moins de 6 ans. J’insiste, cet âge correspond au début de la vie, aux premiers apprentissages. Comme l’a dit la rapporteure, on peut toujours viser les autres tranches d’âge, mais occupons-nous surtout des 0-6 ans. La parole est à Mme la rapporteure. Monsieur Di Filippo, vous affirmez que peu d’enfants arrivent au CP avec un smartphone. Vous révélez ainsi la méconnaissance d’un vrai sujet, celui du temps d’utilisation des écrans chez les moins de 6 ans, soit trois heures et onze minutes chez les moins de 2 ans, comme je l’ai rappelé lors de la discussion générale. C’est une moyenne : autrement dit, certains enfants passent jusqu’à neuf heures par jour sur les écrans alors qu’ils n’ont que 11, 15 ou 18 mois ! Les pédiatres chargés des consultations pour les surexpositions aux écrans, avec qui j’ai eu l’occasion d’échanger, m’ont informé de l’existence d’effets majeurs et parfois irréversibles :… Je ne vous contredis pas sur ce point ! …certains enfants arrivent à l’école et ne savent pas tenir un crayon ; d’autres sont incapables de se concentrer plus de dix minutes ou s’endorment en classe. La réalité, c’est que ce phénomène est assez méconnu : votre prise de parole en témoigne et je crois qu’elle correspond à ce que beaucoup de gens pensent. Si l’on connaît les situations d’adolescents qui passent parfois dix heures par jour sur leur écran, on méconnaît le temps d’utilisation des écrans chez les très jeunes enfants, notamment la moyenne de trois heures et onze minutes par jour chez les moins de 2 ans.
(L’amendement no 33 n’est pas adopté.)
(Les amendements identiques nos 13 et 22 ne sont pas adoptés.)
(L’amendement no 30 n’est pas adopté.) La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 23. Je suis sûr que la rapporteure et la secrétaire d’État seront d’accord avec mon amendement. Le développement des écrans numériques dans les écoles maternelles et primaires est inquiétant, en particulier avec la mise à disposition de tablettes en remplacement des livres et des cahiers. Mais non, ce n’est pas un remplacement ! Ici aussi, on avait du papier avant ! Cela nuit aux apprentissages des enfants et risque d’induire une addiction aux écrans. Par conséquent, le présent amendement vise à interdire les tablettes dans les lieux d’accueil de jeunes enfants. Il a raison ! Allez dans les écoles ! Quel est l’avis de la commission ? Tout l’objectif de cette proposition de loi est de former, de sensibiliser, de réguler ; non d’interdire. Il revient aussi aux enseignants, à l’école, d’éduquer les enfants au bon usage des écrans et, plus largement, du numérique. Les enfants ont bien le temps pour ça ! J’estime qu’une interdiction sèche sans éducation ni prévention n’aura pas le même effet. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? L’interdiction de l’utilisation de tout écran à l’école maternelle n’est pas une solution au problème de l’exposition excessive des enfants aux écrans, sur lequel nous travaillons au travers de ce texte. Mais si ! Des usages très limités, ponctuels et encadrés d’un écran par un maître ou une maîtresse d’école peuvent au contraire correspondre à un projet pédagogique,… Pour les 0-3 ans ? …sans logique de substitution aux usages des livres et des cahiers, qui restent prioritaires quoi qu’il arrive – même si peu de cahiers sont utilisés à ces âges-là. Il s’agit non pas d’interdire sans distinctions, mais d’encadrer et d’identifier. Je rejoins la rapporteure : croyons au discernement de nos enseignants, qui reste la meilleure des garanties ! Avis défavorable. Dans ce cas, pas d’écrans à l’école avant six ans ! La parole est à M. Fabien Di Filippo. Il y a un problème dans votre rhétorique et votre argumentation, madame la rapporteure. Ce n’est pas parce que nous proposons d’étendre des dispositions jusqu’aux adolescents que nous ne voulons rien faire pour les enfants et les tout-petits ou que nous ne sommes pas conscients des problèmes auxquels ils sont exposés – nous y reviendrons plus tard avec d’autres amendements. Il est clair qu’il y a un problème ! Dino Cinieri soulignait juste qu’on éludait, en termes de santé publique, l’impact des écrans sur les adolescents. C’est dommage, car nous avons justement l’occasion de faire un texte sur le sujet.
Je doute que le mois prochain, votre groupe ou l’Assemblée vous redonne du temps pour présenter un texte qui inclurait cette fois-ci les adolescents – je serais prêt à m’en charger si l’un d’entre vous me donne du temps, et à travailler avec vous sans aucune difficulté !
Je vous assure que l’utilisation excessive des écrans chez les adolescents est ravageuse et entraîne sédentarité, troubles de l’attention, sautes d’humeur, déphasage complet entre le temps de sommeil et le cycle de la journée. Si j’affirme qu’il est regrettable de mettre ce sujet de côté, je ne nie pas du tout les conséquences d’une utilisation excessive des écrans chez les enfants en bas âge.
La parole est à Mme Ségolène Amiot. J’ai du mal à comprendre, madame la rapporteure. Tout à l’heure, vous avez cité M. Desmurget et ses très bonnes études, que je vous invite tous à lire. Sans faire de demi-mesure, il indique que les écrans sont « néfastes » au développement des enfants de moins de 6 ans. Par définition, les enfants qui sont en maternelle ont moins de 6 ans. Je ne vois pas en quoi il serait pertinent d’intégrer l’apprentissage aux écrans dès la maternelle alors même qu’ils ne sont pas bons pour les enfants : vous l’avez vous-même rappelé tout à l’heure ! Je pense qu’on nous présente là un amendement de bon sens et qui est dans la logique de votre propre argumentation – soyez cohérente avec vous-même ! Les études que vous citez indiquent que les écrans sont néfastes pour les enfants : empêchons qu’ils y soient volontairement exposés à l’école ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
(L’amendement no 23 n’est pas adopté.) La parole est à M. Alain David, pour soutenir l’amendement no 21. Les municipalités dotent les écoles primaires et maternelles d’ordinateurs, de tablettes, de tableaux numériques qui, du point de vue pédagogique, sont devenus des éléments essentiels de transmission du savoir. Cependant, il nous semble anormal que des outils de mesure soient déployés dans les écoles, qui n’ont pas vocation à se transformer en laboratoires d’études sur les enfants. Quel est l’avis de la commission ? Il me semble qu’il y a un malentendu sur le sens de cette disposition. L’idée est de faire prendre conscience aux professionnels du temps passé par les enfants devant les écrans. De nombreuses études montrent que ce temps est en réalité minoré par les parents, mais aussi par les professionnels. Il peut arriver qu’un enfant utilise un écran avant le début de la classe, à huit heures, pendant la pause méridienne, et après la fin des cours. Entre les moments périscolaires et les moments scolaires, le temps cumulé passé sur les écrans peut donc être assez important. L’idée n’est pas de réaliser des études statistiques ou d’utiliser les écoles comme des lieux d’expérimentation, mais d’assurer le suivi du temps passé devant un écran, afin que l’équipe pédagogique en prenne conscience et le réduise si nécessaire. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? J’ai un léger doute sur l’interprétation du texte… Une chose est sûre : il ne s’agit pas de transformer les lieux d’accueils, qui par définition prennent en charge nos enfants, en laboratoires. Cela étant, il est important de s’y rendre afin de mesurer l’impact des écrans sur le comportement des enfants. Pour ma part, je suis favorable à la recherche : nous pouvons faire confiance aux chercheurs pour intervenir avec tact – ce n’est pas la première fois que nos écoles servent de lieux d’étude et de recherche.
J’insiste, il est important d’aller voir comment se comportent les enfants à l’école avec les écrans. C’est pourquoi je n’approuve pas la suppression de la fin de l’alinéa 6, telle qu’elle est proposée. Nous avons besoin d’avis scientifiques pour appuyer nos politiques de prévention. Aussi devons-nous devons étudier le comportement des enfants dans ces structures. Avis défavorable.
La parole est à M. Antoine Léaument. Il y a un petit problème dans votre argumentaire. Nos collègues proposent de supprimer la mention « dans les lieux d’accueil des jeunes enfants, en particulier dans les écoles maternelles. » De deux choses l’une. Soit nous faisons une loi pour les 0-6 ans, comme vous nous le suggérez. Le cas échéant, la question qui se pose est de savoir comment limiter l’accès aux écrans des enfants, puisque l’on part du principe que c’est dangereux. Soit nous faisons une loi générale et, à ce compte-là, nous devons prendre en considération l’ensemble des cas. En l’occurrence, les outils de mesure dans les lieux d’accueil des jeunes enfants passent à côté du problème. Il fallait adopter l’amendement précédent de M. Cinieri, qui vise à interdire les tablettes ! Très bien ! Et non. Voici, en somme, ce que vous nous proposez : il y a danger ; mesurons donc à quel point les jeunes enfants y sont exposés ! Vous voyez bien que nous passons à côté de l’objectif. Le danger, c’est la surexposition. Adopter cet amendement, c’est admettre qu’il faut des outils de mesure pour tout le monde : on doit pouvoir évaluer le temps passé sur les écrans de manière générale, sans se soucier uniquement des jeunes enfants. Voilà comment on parviendrait à préserver un tant soit peu la cohérence de votre proposition de loi. Mais si nous voulions être véritablement cohérents, il nous faudrait supprimer cette partie de l’alinéa 6. Autrement, nous aurions dû adopter l’amendement de M. Cinieri – c’est pourquoi je voulais réagir tout à l’heure ; malheureusement, son amendement a été rejeté.
J’insiste, il serait incohérent de ne pas supprimer la dernière partie de l’alinéa. C’est comme si vous disiez : « C’est du poison, alors mesurons à quel point les enfants en boivent ! » Convenez que c’est un peu bizarre.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) La parole est à Mme Laure Lavalette. On peut en effet s’imaginer qu’un outil permette de dire combien de temps les enfants passent devant les écrans à l’école – au fond, pourquoi pas. Mais, pour le coup, j’approuve le parallèle avec le poison. Quantifier n’a d’intérêt que si cela est suivi d’effets : on peut décider de réduire le temps d’écran, par exemple. Or c’est quelque chose qui manque à votre argumentaire. Nous voterons contre cet article : nous voulons bien quantifier, mais il faut aller plus loin. La parole est à Mme la rapporteure. Nous sommes cohérents, au contraire. Nous ne souhaitons pas interdire complètement l’utilisation des écrans dans les écoles. En revanche, nous souhaitons la mesurer, pour comprendre ce qu’il s’y passe. Je le répète, je cherche à ce que le texte soit opérationnel et applicable. Dans certains établissements, les enfants regardent la télévision ou un autre écran pendant plusieurs heures. Il me paraîtrait irréaliste de supprimer totalement les écrans. La parole est à Mme la secrétaire d’État. Je confirme que tout cela est cohérent. Dès lors que l’on considère qu’un usage très raisonné des écrans dans les écoles maternelles peut être un outil pédagogique,… Non, pas à la maternelle ! …il faut mesurer à la fois le temps d’utilisation et son impact. Nous reviendrons peut-être sur la question si l’on s’aperçoit que, pour différentes raisons, la situation est bien plus bénéfique dans les écoles où il n’y a pas du tout d’écrans que dans celles où il y en a un peu. Aujourd’hui, nous sommes dans une logique d’évaluation. Il faut pouvoir mener cette évaluation dans les établissements. Nos enfants ne sont pas des cobayes !
(L’amendement no 21 n’est pas adopté.) Sur l’amendement no 69, je suis par le groupe Écologiste-NUPES d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Thierry Frappé, pour soutenir l’amendement no 66.
Il vise à étendre aux écoles primaires l’appui apporté par l’Agence nationale de santé publique dans le développement d’outils de mesure des risques liés à l’exposition aux écrans numériques. Nous pourrions ainsi mesurer les risques sur les enfants jusqu’à la fin de l’école primaire. Non, ça va plus loin que ça… Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Si nous adoptions l’amendement, le texte concernerait les enfants au-delà de 6 ans. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Ce texte a effectivement vocation à se concentrer sur la tranche d’âge de 0 à 6 ans. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz. Je sens un flottement dans votre texte. Vous voulez toucher la tranche d’âge de 0 à 6 ans, ce que je peux comprendre, tout en le déplorant dans une certaine mesure, car je pense que nous aurions pu aller au-delà. En tout cas, je souscris à ce qui a été dit précédemment. Vous vous appuyez sur des études relativement argumentées qui prouvent que l’utilisation régulière des écrans est source de nuisance. Or, dans les écoles, vous vous contentez de la mesurer. Votre proposition de loi aurait du sens si vous la limitiez, avec les enseignants, par exemple à une heure ou une heure et demie par jour. Oui ! Elle a raison ! Si l’on constate que cette utilisation est réellement dangereuse, il ne faut pas se contenter de la mesurer. Ou alors, on fait une loi pour faire une loi. C’est ce que j’appelle une loi bavarde, et je ne suis pas sûre qu’elle aura de réels effets. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et RN. – Mme Ségolène Amiot applaudit aussi.) La parole est à M. Bruno Studer. Il ne revient pas à la loi de fixer un temps d’utilisation quotidien. Je rappelle que nous parlons du problème de la surexposition aux écrans. D’autre part, nous avons déjà voté une loi concernant les enfants de plus de 6 ans et les jeunes adolescents. S’agissant de l’utilisation du téléphone portable à l’école et au collège, sur laquelle certains s’interrogeaient, nous avons clarifié les choses : elle est interdite, sauf là où le règlement intérieur, élaboré par la communauté éducative, l’autorise.
Mme la rapporteure estime qu’il appartient aux professionnels de s’emparer de la question. Pour cela, encore faut-il qu’ils soient documentés. C’est précisément le sens de la disposition prévue à l’alinéa 6 de l’article 1er.
Il ne s’agit pas de diaboliser les écrans. Si tel était le cas, il faudrait tout interdire, y compris de montrer à la maison des photos sur son portable. L’objet du texte est de prévenir la surexposition, car un temps excessif passé seul sur les écrans peut avoir les conséquences que nous avons évoquées. Revenons, s’il vous plaît, au cœur du sujet. La disposition proposée par Mme la rapporteure est tout à fait équilibrée.
Il a raison ! Non, il a tort !
(L’amendement no 66 n’est pas adopté.) La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir les amendements nos 69 et 68, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée. Le rapport relatif aux 1 000 premiers jours est clair : « Environ la moitié des enfants de moins de 3 ans sont exposés à la télévision au moins une fois par semaine. Ils sont plus d’un tiers à être exposés aux smartphones et un peu plus d’un sur dix aux tablettes […]. »
De nombreux contenus présentés comme « éducatifs » n’ont jamais fait l’objet d’une évaluation. Il n’existe pas de données scientifiques démontrant un bénéfice des logiciels commerciaux actuels destinés aux enfants de moins de 3 ans. Par les amendements no 69 et 68, nous proposons que ces logiciels fassent l’objet d’une évaluation scientifique, conformément aux recommandations de la commission des 1 000 premiers jours.
L’amendement no 69 prévoit en outre la création d’un label. L’amendement no 68 est donc un amendement de repli.
Quel est l’avis de la commission ? Vos amendements visent à évaluer le caractère éducatif de certains contenus, objectif auquel je suis très favorable. Dans un amendement ultérieur, vous demandez d’ailleurs un rapport à ce sujet. Toutefois, j’émets un avis défavorable pour une raison de forme : les présents amendements font référence aux outils de mesure des risques liés à l’exposition aux écrans ; or ces outils sont dépourvus de lien avec les contenus que vous évoquez. Au demeurant, le public visé n’est pas le même : les outils visant à mesurer le temps passé sur écran dans les établissements scolaires concerneront les professionnels qui accompagnent les enfants ; l’évaluation et le label que vous prévoyez s’adresseraient aux parents en tant qu’acheteurs d’équipements. Quel est l’avis du Gouvernement ? La proposition de loi porte sur l’exposition aux écrans, et non sur les contenus, qui sont traités dans d’autres textes. Nous nous concentrons sur les enfants de 0 à 6 ans en adoptant une approche très transversale, puisque nous nous intéressons à la santé physique, à la santé mentale, au poids, etc. Vous l’avez dit vous-même, nous ne disposons pas d’évaluation suffisamment précise ; il serait donc prématuré de créer un label. Ce travail doit être réalisé, mais pas dans le cadre de ce texte. Je suis défavorable à l’amendement. La parole est à Mme Ersilia Soudais. Dans ma circonscription, j’ai été à de nombreuses reprises sollicitée par des parents très en colère, trompés précisément par les appellations « éducatifs » ou « pédagogiques ».
Je vous fais part du témoignage de Jennifer, mère de Riley. En 2020, après avoir perdu son père, elle a eu tendance à céder facilement, dit-elle, aux demandes de Riley : elle a pensé bien faire en le laissant regarder des programmes télévisés prétendument éducatifs et pédagogiques. Or, lors de son entrée en maternelle, Riley ne comprenait pas ce qu’était la simple action de rapporter trois cubes.
De la même façon, Géraldine relate qu’on lui a présenté une tablette dite éducative, recommandée aux enfants à partir de 2 ans, pour alphabétiser son fils. Or, à la suite de cela, des troubles autistiques se sont développés : son fils ne communiquait plus.
Comment pouvez-vous ignorer, madame la secrétaire d’État, une étude sociologique aussi approfondie que celle-là ? (M. Jocelyn Dessigny rit.) Mes collègues et moi sommes favorables à ces amendements de bon sens. Je mets aux voix l’amendement no 69.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 105
Nombre de suffrages exprimés 105
Majorité absolue 53
Pour l’adoption 38
Contre 67
(L’amendement no 69 n’est pas adopté.)
(L’amendement no 68 n’est pas adopté.) Sur les amendements nos 12 et 11, je suis saisi par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Anne-Laure Blin, pour soutenir l’amendement no 111.
Madame la secrétaire d’État, je suis étonnée par la réponse que vous venez de faire. L’article 1er précise, à l’alinéa 5, que l’État met en œuvre une politique de prévention. Il est ensuite question, à l’alinéa 9, de la formation des enseignants. Je ne comprends pas pourquoi vous ne voulez pas vous attaquer à l’usage des écrans dans les établissements scolaires. Plusieurs collègues l’ont dit, nous voyons bien quelle peut être la nocivité des écrans dans les classes, particulièrement en maternelle. Il est très clair que les écrans n’ont pas leur place dans les établissements destinés aux enfants de cet âge.
L’amendement no 111 est rédactionnel : il vise simplement à préciser le nom de la plateforme numérique comportant des informations sur les risques liés aux écrans pour les enfants. Il s’agit du site « Je protège mon enfant », que vous avez créé.
Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Il faut laisser un peu de latitude quant à l’évolution éventuelle de la plateforme. Il ne me semble pas pertinent de graver son nom dans le marbre de la loi. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il serait malvenu d’inscrire le nom de la plateforme dans le texte, car cela obligerait à modifier la loi chaque fois que l’on souhaite changer le nom de domaine ou l’extension ; cela ne relève pas de la loi. En revanche, vous pouvez compter sur moi pour continuer à faire la promotion de la plateforme.
(L’amendement no 111 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Christine Loir, pour soutenir l’amendement no 12. Les enfants sont très souvent en activité périscolaire. Les personnels qui les encadrent dans ce contexte doivent donc être formés à la prévention de l’exposition aux écrans, d’autant qu’ils ont la possibilité de faire passer un message par des jeux ou des ateliers. Je souhaite que les établissements périscolaires fassent partie des lieux où l’on fait de la prévention. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Les activités périscolaires sont visées à l’article 5 de la proposition de loi. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à Mme Claudia Rouaux. En ce qui concerne la limitation de l’utilisation des écrans dans les écoles, je suis très partagée. On a demandé aux maires d’équiper les établissements scolaires en outils numériques, et il n’est guère possible de faire marche arrière. S’agissant des activités périscolaires, en revanche, il faudrait peut-être faire des remarques pour que les éducateurs, notamment les plus jeunes, n’aient pas en permanence leur portable à la main ou sur leur table, ce qui incite les enfants à s’y intéresser.
L’addiction des enfants au portable se développe avant tout chez leurs parents, dès le plus jeune âge. Une oratrice a évoqué tout à l’heure des mères qui allaitent ou donnent le biberon en consultant leur portable. Le problème est là ; c’est à ce niveau qu’il faut agir.
La parole est à M. Fabien Di Filippo. Je souligne une petite contradiction, madame la rapporteure. L’objectif de votre proposition de loi, dites-vous, n’est pas d’empêcher complètement l’usage des écrans. Je peux le comprendre, car ils peuvent effectivement avoir une utilité pédagogique, l’important étant d’en faire un usage raisonné, c’est-à-dire limité et adapté. Néanmoins, vous avez rappelé que, d’après une étude scientifique, les enfants de moins de 2 ans passaient en moyenne trois heures et onze minutes par jour devant les écrans. Il faut donc mesurer l’usage qui est fait des écrans du début à la fin de la journée, en incluant les temps scolaire et périscolaire. Le présent amendement va donc plutôt dans le sens de ce que vous indiquiez tout à l’heure. Je mets aux voix l’amendement no 12.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 96
Nombre de suffrages exprimés 91
Majorité absolue 46
Pour l’adoption 29
Contre 62
(L’amendement no 12 n’est pas adopté.) La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l’amendement no 70 rectifié. Dans une démarche d’« aller vers », cet amendement du groupe écologiste prévoit que la plateforme numérique aura également pour mission de faire la promotion des consultations et des actions de prévention portant sur les risques liés à l’exposition des enfants aux écrans créées par l’article 3 du présent texte. Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. L’idée de l’article n’est pas de créer un nouvel outil, mais de conforter la plateforme existante « Je protège mon enfant », laquelle réunit déjà beaucoup d’informations destinées aux parents. L’amendement me semble superfétatoire. Quel est l’avis du Gouvernement ? Si je ne me trompe pas, vous faites allusion aux consultations en PMI, lesquelles relèvent de la compétence des départements. Il me semble compliqué de proposer la mise à jour continue de politiques décentralisées sur un site du Gouvernement. Je m’engage à ce que le site jeprotegemonenfant.gouv.fr contienne un maximum d’informations claires, mais pas en ce qui concerne les départements. Je suis donc défavorable à l’amendement.
(L’amendement no 70 rectifié n’est pas adopté.) La parole est à Mme Christine Loir, pour soutenir l’amendement no 11. Il vise à élargir le spectre du personnel formé à la prévention à tous ceux en lien avec les enfants de 0 à 12 ans en incluant les AESH – accompagnants d’élèves en situation de handicap –, qui peuvent être des relais de prévention importants, ainsi que les enseignants des premier et second cycles, puisque je propose, à l’amendement no 13, l’extension de la prévention jusqu’à l’âge de 12 ans. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. (« Oh ! » sur les bancs du groupe RN.) Comme par hasard ! Pour les raisons que j’ai évoquées de nombreuses fois, il me semble préférable de circonscrire la formation aux enseignants du premier degré, plutôt que de l’étendre à tous les professionnels de l’éducation. Les AESH sont aussi là pour ça ! Quel est l’avis du Gouvernement ? L’amendement, qui évoque la catégorie indéfinie des « professionnels de l’éducation », est trop imprécis, ce qui le rend inapplicable. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable. Sous-amendez, alors ! La parole est à Mme Perrine Goulet. Il est toujours important d’écouter la parole des enfants quand on légifère pour eux. La semaine dernière, nous avons auditionné les enfants de l’UNICEF qui avaient travaillé sur ces trois textes. Ils nous ont dit qu’il fallait former l’ensemble des personnes intervenant dans les écoles, les AESH comme le personnel de la cantine ; selon eux, tous ont un rôle à jouer en matière de sensibilisation auprès des enfants. Ce sont les parents qu’il faut former ! J’entends votre argument, madame la secrétaire d’État. Mais si les enfants nous disent qu’ils ont besoin que ces personnes-là puissent leur répondre, nous devons nous interroger. Nous allons utiliser la navette. La parole est à Mme Isabelle Santiago. Je souhaite apporter quelques précisions. Le texte lui-même et certains amendements proposent des politiques publiques qui existent déjà au niveau décentralisé. En matière de formation, par exemple, de très nombreuses personnes sont sensibilisées à la question des écrans par les départements, en ce qui concerne les PMI, et par les maires, en ce qui concerne les centres de loisirs et les intervenants périscolaires. Il en va de même des AESH et des enseignants. Plutôt que de faire figurer cette mesure dans la loi, il me semble préférable de travailler de manière plus transversale avec les collectivités. Je mets aux voix l’amendement no 11.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 96
Nombre de suffrages exprimés 94
Majorité absolue 48
Pour l’adoption 34
Contre 60
(L’amendement no 11 n’est pas adopté.) La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 27. La plateforme doit aussi conseiller les enseignants du second degré. Il est important de les sensibiliser à ces questions afin que les jeunes collégiens limitent leur usage des écrans numériques, à défaut de pouvoir totalement s’en passer. Quel est l’avis de la commission ? Vous souhaitez, si j’ai bien compris, que la plateforme conseille aussi les éducateurs et les enseignants du second degré, et non seulement les parents. Comme je l’ai dit à de nombreuses reprises, la proposition de loi concerne les 0-6 ans. De ce fait, je préfère circonscrire la formation aux enseignants du premier degré. De plus, l’article 1er vise déjà à pérenniser la plateforme « Je protège mon enfant », qui traite de la parentalité numérique. Je ne suis donc pas favorable à cet ajout, même s’il est évident que les éducateurs et les enseignants pourront s’y connecter et y trouver les ressources nécessaires. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est logique, dans une loi sur la prévention de la surexposition aux écrans pour les 0-6 ans, de concentrer la formation sur les enseignants du premier degré et sur les professionnels qui encadrent les enfants de moins de 6 ans. Je suis défavorable à cet amendement. La parole est à Mme Laure Lavalette. Je tenais simplement à signaler que j’ai cinq enfants et que je n’avais jamais entendu parler de cette plateforme avant la proposition de loi. Je ne vis pourtant pas dans une grotte. Je ne suis donc pas la seule à être passée à côté ! Cette plateforme est complètement inconnue. C’est que vous ne passez pas assez de temps sur vos écrans… En revanche, ce à côté de quoi je ne suis pas passée – fermez les yeux, je vous emmène deux secondes en Californie, les palmiers, le sable chaud –, c’est l’école Waldorf, sans écran, où tous les cadres de la Silicon Valley se précipitent pour y inscrire leurs enfants. Eh oui ! Exactement ! C’est une école privée où les enfants font de la sculpture, de la peinture, de la musique. Évidemment, ils ont les moyens, mais nous avons sans doute beaucoup à apprendre de cette expérience.
Je me rappelle aussi une interview dans laquelle Steve Jobs, à qui on demandait comment ses enfants trouvaient le dernier iPad, avait répondu : « Aucun iPad n’est jamais rentré chez moi. » Il était peut-être mormon, je n’en sais rien ; nous avons tous des iPad chez nous. Mais cela montre que les gens qui ont créé ces écrans ont tout de même compris leur côté néfaste pour les enfants.
Il avait 60 ans quand l’iPad est sorti ! Je vous trouve donc un peu tièdes, madame la secrétaire d’État, madame la rapporteure. Encore une fois, vous nous proposez un vrai « en même temps » : « ce n’est pas bien, mais nous allons seulement essayer de quantifier le problème ». Cette position ne mène à rien. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
(L’amendement no 27 n’est pas adopté.) Les amendements nos 100 et 101 de Mme la rapporteure sont rédactionnels.
Quel est l’avis du Gouvernement ?
Avis favorable. La parole est à M. Pierre Meurin. Dans sa version initiale, la proposition de loi prévoyait l’obligation, pour les professionnels médico-sociaux et de santé et le personnel de l’éducation nationale, de suivre une formation sur la surexposition des enfants aux écrans. Par cet amendement, vous transformez cette obligation en option, vidant ainsi le texte de sa substance. J’abonde donc dans le sens de notre collègue Laure Lavalette : c’est un texte très peu disant sur l’enjeu majeur de santé publique, et même de civilisation, qu’est le développement de nos enfants surexposés aux écrans. Ce n’est pas le sujet de l’amendement ! Finalement, la seule mesure qui proposait une vraie avancée, c’est-à-dire l’obligation de suivre une formation sur la surexposition aux écrans, se transforme en option. On ne sait même pas comment cette formation sera proposée, ni contrôlée. Ne prétendez pas que ces amendements sont rédactionnels ! Il s’agit d’une arnaque.
Vous supprimez une des seules mesures intéressantes pour sensibiliser l’ensemble des personnels au contact de l’enfance à la surexposition aux écrans.
On a compris ! C’est regrettable, car le texte partait d’une bonne intention. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Aurélien Saintoul. Je m’immisce quelques instants dans le débat car Mme Lavalette, en citant en exemple les écoles Waldorf, nous a révélé l’étendue de sa méconnaissance du sujet. Madame Lavalette, les établissements Steiner-Waldorf sont des postes avancés de l’anthroposophie, qui est un courant ésotérique. Cela ne me paraît pas un exemple très adapté ! Monsieur le député, vous vous éloignez de l’amendement. N’exagérez pas !
(Les amendements nos 100 et 101 sont successivement adoptés.) La parole est à Mme Ersilia Soudais, pour soutenir l’amendement no 51. Il est effectivement important de former les personnels concernés à la question de l’exposition des enfants aux écrans. Néanmoins, pour que cette formation ne soit pas vaine, il faut qu’elle ait lieu en présentiel.
Lors de mes déplacements en circonscription, j’ai été marquée par le fait que, sur des sujets particulièrement importants comme celui des violences faites aux femmes, les agents se voyaient proposer des formations en PDF : il fallait cliquer tout le temps sur « suivant », « suivant », « suivant »… À la fin, ils n’avaient strictement rien lu, mais comme ils avaient cliqué sur « suivant » et sur « finir », la formation était considérée comme validée.
Sans arriver à cet extrême, rien ne remplace la présence humaine. Il est important d’avoir face à soi un formateur de chair et d’os pouvant répondre aux questions que l’on se pose. C’est la raison pour laquelle nous défendons cet amendement.
Quel est l’avis de la commission ? Avis défavorable. Même si je comprends votre intention, le lieu et la façon dont la formation doit être dispensée sont des informations trop précises pour figurer dans la loi. Quel est l’avis du Gouvernement ? Les modalités de conduite des formations ne relèvent pas de la loi. Elles doivent rester à la discrétion des employeurs et des organismes de formation.
(L’amendement no 51 n’est pas adopté.) Je suis saisi de deux amendements, nos 10 et 31, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Christine Loir, pour soutenir l’amendement no 10.
Il vise à élever de 6 à 12 ans la limite de l’âge d’application de la proposition de loi. L’alinéa 9 aborde la formation des professionnels ; ceux-ci devraient être formés à traiter les enfants différemment en fonction de leur âge, car il est évident que les problèmes posés par les écrans pour un enfant de 2 ans ne sont pas les mêmes que pour un enfant de 10 ans.
Au risque de me répéter, 6 ans, ce n’est pas suffisant pour prévenir les troubles scolaires, l’hyperactivité, ou encore – bien qu’il ne soit pas directement dû à la surexposition aux écrans – le harcèlement en ligne.
La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 31. Cet amendement de ma collègue Alexandra Martin vise à instaurer une formation spécifique sur les risques associés à l’exposition aux écrans des enfants de moins de 10 ans, et non de 6 ans, comme proposé initialement.
(Les amendements nos 10 et 31, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) Sur l’amendement no 96, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
L’amendement no 99 de Mme la rapporteure est rédactionnel.
(L’amendement no 99, accepté par le Gouvernement, est adopté.) La parole est à Mme Christine Loir, pour soutenir l’amendement no 96. Les modifications apportées à la proposition de loi par Mme Janvier depuis les travaux de la commission sont intéressantes. Cependant, laisser aux professionnels le choix de se former ou non est contradictoire avec la volonté affichée d’organiser une véritable campagne de prévention. Il convient de sensibiliser tant les parents et les enfants que les professionnels aux dangers d’une exposition excessive aux écrans. Tous les professionnels concernés doivent donc être formés, car ils seront, auprès de la population, les meilleurs relais de la prévention de l’exposition excessive des enfants aux écrans. Quel est l’avis de la commission ? Vous souhaitez que la formation se déroule pendant le temps de travail sans consultation des professionnels. L’article 1er contient déjà tous les garde-fous nécessaires pour nous assurer que chacun d’eux sera formé sur la question spécifique de la prévention de l’exposition excessive des enfants aux écrans. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je suis également défavorable à l’amendement. Dès lors que l’on facilite l’organisation de la formation pendant le temps de travail, l’adhésion des professionnels est essentielle. Je mets aux voix l’amendement no 96.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 90
Nombre de suffrages exprimés 90
Majorité absolue 46
Pour l’adoption 29
Contre 61
(L’amendement no 96 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Ersilia Soudais, pour soutenir l’amendement no 37. Il est dommage, madame la rapporteure, que vous ne souhaitiez pas donner de cadre légal à l’obligation de formation des personnels. Ce serait pourtant le seul moyen de garantir une formation effective et efficace. Nous proposons quant à nous qu’elle ait lieu de manière régulière, tous les deux ans. Cette fréquence paraît d’autant plus importante que les technologies évoluent en permanence. Si l’obligation de régularité de la formation n’est pas inscrite dans le texte, le risque est grand que certains personnels ne soient jamais formés, ou le soient seulement en début de carrière, ce qui rendrait la proposition de loi tout à fait inutile. C’est réglementaire ! On ne peut pas imposer la formation aux professionnels ! Quel est l’avis de la commission ? Pour les mêmes raisons que celles que j’ai invoquées au sujet des modalités de délivrance des formations – quand vous avez proposé des formations présentielles plutôt que virtuelles –, il ne me semble pas opportun d’inscrire un rythme aussi précis dans la proposition de loi. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Notons que la proposition de loi apporte une amélioration à la formation des professionnels. Une certaine souplesse doit être laissée entre la formation initiale et la formation continue. Prévoir une fréquence de deux ans pour l’organisation de la formation sur les risques associés à l’exposition aux écrans numériques des enfants de moins de 6 ans semble excessif compte tenu du nombre de professionnels que nous voulons former. Avis défavorable.
(L’amendement no 37 n’est pas adopté.) La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l’amendement no 71. Dans le cadre de son rapport, la commission des 1 000 premiers jours a insisté sur le besoin de formation des professionnels de santé, du secteur médico-social et de la petite enfance sur les besoins et les rythmes du bébé, la conduite pratique de l’allaitement, l’écoute et la relation d’aide, et les besoins spécifiques d’un bébé prématuré ou malade. Le rapport a notamment souligné l’importance de former les professionnels à la prise en compte de l’appétence relationnelle du bébé.
La proposition de loi ajoute à la formation initiale et continue des professionnels de santé, du secteur médico-social et de la petite enfance une formation dédiée aux risques associés à l’exposition des enfants aux écrans. Le présent amendement a été retravaillé depuis les travaux de la commission, la rapporteure ayant appelé notre attention sur la portée restrictive de sa rédaction initiale.
Dans cette nouvelle version, l’amendement vise seulement à préciser que la formation doit contenir une partie relative au développement cognitif, émotionnel et social de l’enfant de moins de 6 ans, ainsi qu’un volet dédié à l’appétence relationnelle du bébé, sans restreindre la formation à ce seul champ.
Quel est l’avis de la commission ? Bien que partageant votre volonté d’améliorer la formation des professionnels sur le développement cognitif, émotionnel et social de l’enfant, ainsi que sur l’appétence relationnelle du bébé, je considère que l’alinéa dépasse le champ de la proposition de loi. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je vous invite à retirer votre amendement, monsieur le député. Outre l’argument de Mme la rapporteure, je rappelle que les professionnels de la petite enfance sont déjà formés au développement cognitif, émotionnel et social de l’enfant de moins 6 ans. Leur métier est précisément de travailler sur la question. Votre amendement est donc satisfait. Absolument ! La parole est à M. Roger Chudeau. Depuis environ une demi-heure, nous évoquons des questions qui concernent les plans de formation des enseignants et qui relèvent donc d’une circulaire – même pas d’un arrêté. Elles n’ont aucun rapport avec la proposition de loi et nous éloignent du sujet : la protection des enfants contre une exposition excessive aux écrans. Je n’adresse cependant pas ce reproche aux auteurs des amendements, mais à la commission. Madame la rapporteure, que n’avez-vous consulté pour avis la commission des affaires culturelles et de l’éducation ? Cela vous aurait évité de vous égarer sur un terrain que manifestement vous ne maîtrisez pas.