XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023

Séance du mercredi 15 mars 2023

L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires à proximité de sites nucléaires existants et au fonctionnement des installations existantes (nos 762, 917).
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’amendement no 410 à l’article 1er.
La parole est à M. Matthias Tavel, pour soutenir l’amendement no 410. Que l’on soit pour ou contre, ce projet de loi est très important pour le pays qu’il engage pour des décennies, avec des dizaines et peut-être des centaines de milliards d’euros de dépenses à la clef. Il ne devrait donc pas être question d’à-peu-près. Pourtant, c’est l’impression qui se dégage d’un texte qui prévoit une relance du nucléaire vite faite, mal faite – bâclée sur certains aspects.
Vous avez inventé un septième scénario pour Réseau de transport d’électricité (RTE), scénario invisible jusque-là, prévoyant plus de quatorze réacteurs nucléaires pour vous aligner sur la demande de Mme Le Pen.
Vous avez adopté un amendement en forme d’aveu de votre propre incertitude concernant la technologie que vous proposez puisque personne ne peut garantir que l’EPR 2 – réacteur pressurisé européen de deuxième génération – fonctionnera un jour.
Nous sommes dans le brouillard le plus complet en ce qui concerne le financement. D’ailleurs, vous n’avez toujours pas répondu, madame la ministre, à cette question : oui ou non, le Gouvernement envisage-t-il de piller le livret A pour financer le nucléaire au détriment du logement social ?
Nous n’avons aucune garantie sur un autre point : EDF sera-t-il bien l’unique exploitant de ce nouveau nucléaire et de l’existant ou bien êtes-vous en train de préparer le retour d’un « Hercule », dans une version atomique ?
Nous prévoyons des dérogations pour des décennies qui, en l’occurrence, s’appliqueraient « à proximité immédiate » des centrales sans plus de précision sur la distance kilométrique que cela représente – d’où notre amendement. Puisque même le Conseil d’État s’est étonné de l’imprécision de cette notion de proximité immédiate, nous proposons de la définir dans la loi en réservant l’application de ces dispositions à une distance de 5 kilomètres autour des centrales existantes, ce qui correspond au périmètre des enquêtes publiques. Il nous paraît nécessaire de le préciser.
(M. Maxime Laisney applaudit.) Cinq minutes pour expliquer ça ! La parole est à Mme Maud Bregeon, rapporteure de la commission des affaires économiques, pour donner l’avis de la commission. Je comprends l’idée de l’amendement. En fait, nous avons limité la zone à celle des plans particuliers d’intervention (PPI), c’est-à-dire 20 kilomètres maximum. Du reste, comme le précise le Conseil d’État, il reviendra au pouvoir réglementaire de définir la zone exacte. Avis défavorable. La parole est à Mme la ministre de la transition énergétique, pour donner l’avis du Gouvernement. Même avis. La parole est à M. Matthias Tavel. Vous admettez vous-même, madame la rapporteure, qu’il y a une imprécision. Nous proposons 5 kilomètres et vous dites 20, ce qui n’est pas exactement la même chose. 20 kilomètres maximum ! Oui, mais qui peut le plus peut le moins. Non, soyons précis ! Vous conviendrez avec moi qu’une limitation à 5 kilomètres permet de rester dans la proximité géographique immédiate des sites existants sans qu’il soit besoin d’aller beaucoup plus loin. En revanche, à 20 kilomètres des centrales existantes, il ne s’agit plus de proximité immédiate mais de projets distincts. Il n’y a pas de raison qu’à cette distance puissent naître de nouveaux projets, qui ne sont plus accolés les uns aux autres. C’est ce que nous voulons dire : nous sommes opposés à de nouveaux projets mais, si vous décidez de les faire, il faut au moins qu’ils soient accolés physiquement aux centrales existantes et non pas à 20 kilomètres.
Alors, inscrivons 5 kilomètres dans la loi. Cela relève du pouvoir réglementaire, dites-vous. Permettez que le Parlement ait son mot à dire en la matière. Il nous semble plus prudent de l’inscrire dans la loi dès à présent.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
(L’amendement no 410 n’est pas adopté.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 398 et 418.
Sur ces amendements identiques, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Lisa Belluco, pour soutenir l’amendement no 398.
Il s’agit d’un amendement de repli puisqu’il vise à supprimer les alinéas 3 à 7 qui concernent les installations d’entreposage de combustible. Nous proposons de limiter aux nouveaux réacteurs les dérogations et les facilités introduites dans la suite de ce texte, en retirant les installations d’entreposage des nouveaux réacteurs du champ des installations visées par le titre Ier.
À l’évidence, ce ne sont pas les installations d’entreposage de combustible nucléaire qui bloquent et nuisent à la rapidité des procédures. Ce n’est donc pas en accélérant les autorisations liées à ces installations que nous gagnerons du temps sur la construction des nouveaux projets nucléaires dans leur ensemble. Ces installations se font généralement en temps masqué, un réacteur étant beaucoup plus long à construire. C’est pourquoi nous proposons de circonscrire précisément les dérogations de ce texte.
La parole est à M. Christophe Bex, pour soutenir l’amendement no 418. Vous ne réalisez pas la mesure de votre projet que j’intitule « Objectif première pierre 2027 ». (M. Maxime Laisney applaudit.) Vous décidez en effet d’appliquer des procédures accélérées et dérogatoires au droit commun pour les installations d’entreposage de combustible nucléaire. Autrement dit, tout projet d’enfouissement des déchets radioactifs – puisque c’est la piste privilégiée – sera désormais mis en œuvre à des conditions facilitées.
Est-il vraiment nécessaire de vous rappeler que personne – ni la France ni aucun autre pays au monde – n’a trouvé de solution durable pour gérer ces déchets hautement radioactifs ? La gestion de ces déchets radioactifs repose sur des projets démesurés et nocifs, dont les preuves de sûreté n’existent pas.
Le projet du centre industriel de stockage géologique – Cigéo – de Bure est un exemple frappant. La transformation de la Meuse en un territoire de dépendance au nucléaire est le produit de stratégies proactives de l’Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs (Andra) et de l’État. L’Agence a pris le temps d’investir le territoire étape par étape, mentant sur la réversibilité de ses actions tout en s’implantant de manière irréversible, communiquant sur sa volonté de répondre aux besoins de la population locale tout en se rendant indispensable financièrement.
À travers vos projets dangereux, vous trompez et exposez à des risques inconsidérés la population actuelle, mais aussi et surtout les générations futures sur lesquelles vous faites planer une très grave menace. Par conséquent, alléger les procédures administratives pour l’installation de ce type de projets est en totale contradiction avec leur complexité, qui est à la fois sociologique, politique, économique, scientifique et industrielle.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Quel est l’avis de la commission ? Sans surprise, il est défavorable : j’ai toujours défendu l’idée que relancer le parc nucléaire nécessite d’avoir une vision à 380 degrés sur le cycle (Murmures sur les bancs du groupe Écolo-NUPES), ce qui implique les déchets. Il semble donc adapté de faire bénéficier de ce régime dérogatoire, par arrêté ministériel, les installations situées sur le site d’une installation nucléaire de base (INB) ou à proximité, sachant que seule une partie des articles du titre Ier s’appliquera à ce titre.
Précisons en outre que le projet Cigéo, auquel vous faites référence, n’est absolument pas concerné par ces dispositions.
Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. On parle d’entreposage et non pas de stockage. De surcroît, pour avoir été à Bure avec tous les élus et avoir réuni le comité de suivi du projet Cigéo, j’ai plutôt constaté un véritable alignement des élus,… Non. …une volonté de faire avancer le projet, et une grande confiance dans l’Andra, ce dont je voulais faire part à la représentation nationale. La parole est à M. Nicolas Dragon. Encore une fois, je vais répéter ce que j’ai déjà dit à de multiples reprises dans cet hémicycle depuis deux jours :… Oh non, n’insistez pas ! …la question des déchets peut trouver une solution. Il y a plusieurs années, la solution trouvée passait notamment par le réacteur au sodium de Superphénix, que vos ancêtres de la gauche plurielle ont décidé de stopper en 1998, alors qu’il pouvait brûler du combustible usagé. Nous étions alors dans un cercle vertueux. Le projet Astrid – réacteur rapide refroidi au sodium à visée industrielle –, stoppé en 2019, était du même acabit. Il existe des solutions et d’autres pays que le nôtre ont su développer ce genre de procédés.
En l’occurrence, votre amendement est inopérant. De toute façon, une centrale nucléaire est une installation industrielle qui doit comporter certains éléments autour d’elle, notamment l’entreposage ou le stockage de déchets radioa…, enfin de déchets issus de la combustion.
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Maxime Laisney. Notre collègue du Rassemblement national n’a pas failli faire une faute de langage : ce sont bien des déchets radioactifs. En fait, l’uranium utilisé dans les centrales nucléaires devient radioactif pendant plusieurs centaines de milliers d’années. C’est bien comme ça que ça s’appelle.
Mon collègue Bex vous a parlé de Cigéo, le centre d’enfouissement de déchets radioactifs de Bure, dont on nous dit qu’il n’aurait qu’un rapport un peu lointain avec l’objet de cet article sur les capacités d’entreposage. Mais si vous construisez des centrales supplémentaires, il va bien falloir entreposer le combustible usagé avant de l’enfouir, d’en faire autre chose – de l’envoyer sur la Lune, ou que sais-je encore. À l’heure où nous parlons, il n’y a plus de place pour entreposer le combustible usagé. Nous avons déjà eu l’occasion de dire qu’à Flamanville, comme on ne sait plus où le mettre, on en met un peu plus là où il reste un peu de place : dans cette piscine où il fait bon se baigner – je ne sais pas combien de degrés il y fait.
Tel que prévu, le centre d’enfouissement de Cigéo – que nous contestons – est fait pour enfouir les déchets existants. Si vous construisez des centrales supplémentaires qui vont irradier davantage d’uranium, on va se retrouver avec plus de déchets usagés. Or, on ne sait toujours pas où on va les mettre.
Première question : que va-t-on faire des nouveaux combustibles usagés ? Deuxième question : combien va coûter le projet de Cigéo, les estimations dont nous disposons variant de 25 à 35 milliards d’euros ? Aidez-nous et dites-nous si c’est plutôt 25 ou 35 milliards, ou encore davantage pour tenir compte des nouveaux combustibles usagés.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Je mets aux voix les amendements identiques nos 398 et 418.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 101
Nombre de suffrages exprimés 101
Majorité absolue 51
Pour l’adoption 24
Contre 77
(Les amendements identiques nos 398 et 418 ne sont pas adoptés.) L’amendement no 242 de Mme la rapporteure est rédactionnel.
(L’amendement no 242, accepté par le Gouvernement, est adopté.) Je suis saisie de deux amendements, nos 166 et 581, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 166.
Il s’agit de rétablir une partie de l’article 1er pour permettre aux projets de production d’hydrogène de bénéficier des dispositions prévues pour la construction de nouvelles installations nucléaires. Je propose également de rétablir le rapport visant à évaluer la faisabilité et l’opportunité d’étendre les technologies des projets nucléaires et les conditions d’implantation mentionnées au I du présent article. Enfin, je propose de réintroduire la demande de rapport annuel, adoptée au Sénat, sur l’application des mesures d’accélération prévues par le projet de loi. La parole est à Mme Florence Goulet, pour soutenir l’amendement no 581. Il vise à réintroduire la demande de rapport d’étape supprimée par la commission. La situation d’urgence absolue dans laquelle nous nous trouvons est le résultat d’une longue liste d’erreurs mêlant imprévoyance, incompétence et intérêts mal placés, mais aussi idéologie : rappelons-nous comment certains membres du Gouvernement se félicitaient avec émotion, il y a peu, d’avoir fermé la centrale de Fessenheim. À présent, le Gouvernement se rend enfin compte de la catastrophe à laquelle il a conduit le pays. Nous voulons nous assurer que cette salutaire disposition d’esprit s’inscrira dans la durée et qu’on ne sabotera pas de nouveau les efforts des Français. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ? Madame Ménard, les projets de production d’hydrogène, qui me semblent constituer le point le plus important de votre amendement, obéissent au régime des installations classées pour la protection de l’environnement (ICPE). Or le régime dérogatoire dont il est question dans le texte concerne les installations nucléaires de base. D’après l’analyse juridique que nous avons menée, le fait d’y intégrer les installations d’hydrogène conduirait à créer un régime juridique hybride, à mi-chemin entre les INB et les ICPE, que nous ne savons pas comment rendre opérant à l’heure actuelle.
Je ne m’oppose pas, à titre personnel, à la définition d’un régime dérogatoire pour les projets de production d’hydrogène.
C’est ma demande ! En revanche, dès lors que le texte traite des INB, votre amendement, qui fait référence à des ICPE, pose un problème de cohérence juridique. Avis défavorable. C’est dommage ! Quel est l’avis du Gouvernement ? J’irai même plus loin, madame Ménard : les dossiers à monter pour implanter une INB sont légitimement assujettis à un niveau d’exigence supérieur à celui qui s’applique aux installations classées. J’imagine que vous songez au projet de Genvia à Béziers ou encore à celui de Hyd’Occ à Port-La-Nouvelle, mais, pour le coup, la situation des parties concernées par ce cluster d’usines de production d’hydrogène serait rendue plus difficile par l’adoption de cet amendement, qui complexifierait les procédures à suivre pour développer l’activité. Le régime auquel ils sont actuellement soumis, à savoir celui des installations classées, bien que déjà complexe, reste en effet plus simple que celui des INB. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
(L’amendement no 166 est retiré.)
(L’amendement no 581 n’est pas adopté.) La parole est à M. Charles Fournier, pour soutenir l’amendement no 252. L’article 1er prévoit que les nouveaux réacteurs devront être installés « à proximité immédiate » des sites déjà existants – un terme pour le moins flou, à dessein. Le rapporteur du projet de loi au Sénat a souhaité préciser cette notion en la calquant sur le périmètre des PPI, qui correspond aux zones de distribution d’iode aux personnes habitant autour des centrales nucléaires, c’est-à-dire à un rayon récemment étendu de 10 kilomètres à 20 kilomètres.
Cette définition, qui permet finalement d’implanter de nouveaux réacteurs un peu partout, nous semble bien trop large. Nous proposons donc de prévoir que si de nouveaux réacteurs doivent être construits, ils devront l’être à moins de 1 kilomètre des réacteurs existants. Cette rédaction, beaucoup plus précise, limitera la préemption de terres agricoles, posera moins de difficultés, et permettra de concentrer l’effort sur des zones dont l’existence et les enjeux sont déjà connus.
Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Maxime Laisney. Nous soutiendrons cet amendement. Je profite de l’occasion pour poser une énième question – à laquelle sera peut-être opposée une énième non-réponse ou une réponse hors sujet, mais je tente ma chance malgré tout : les fameux SMR – Small Modular Reactors , ou petits réacteurs modulaires –, qui sont inclus dans le projet de loi, devront-ils eux aussi être construits à proximité des centrales existantes, ou pulluleront-ils partout, notamment sous l’action de la main invisible du marché et des PPA – Power Purchase Agreement , ou vente directe d’électricité – que vous avez prévu d’utiliser pour permettre aux acteurs privés à conclure des contrats de gré à gré ? D’après un article paru ce matin, c’est d’ailleurs ce que vous tentez d’imposer à l’échelle européenne. Il serait bon d’informer la représentation nationale sur ce point avant qu’elle ne se prononce, plutôt que de négocier directement à Bruxelles. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Sur l’article 1er, je suis saisie par le groupe Renaissance d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme la ministre.
Vous obtenez des réponses détaillées à vos questions depuis lundi. Je rappelle que vous avez même consacré plus de dix heures à débattre d’un article prévoyant la remise d’un rapport, qui vous permettra de disposer de toutes les informations nécessaires sur le texte que nous examinons, dont vous savez d’ailleurs qu’il concerne avant tout les procédures administratives applicables : il ne s’agit pas d’un projet de programmation. Ah bon ? Un peu quand même ! Conformément au souhait que vous avez exprimé, vous recevrez un rapport détaillé portant sur l’ensemble des éléments pertinents – les coûts, les compétences, la filière industrielle, les technologies, etc. – et dont le contenu a été longuement enrichi par la représentation nationale.
Par ailleurs, parce que vous êtes parfaitement capable de lire un projet de loi, vous savez que celui dont il est question ici prévoit la possibilité de déroger aux procédures administratives habituelles pour installer des réacteurs à proximité d’installations existantes. Vous connaissez donc la réponse à votre question : par construction, les SMR, tout comme les EPR 2, devront être implantés à proximité d’installations existantes.
Je précise enfin que la mention du rayon de 20 kilomètres prévu dans les PPI a été ajoutée par le Sénat, qui a souhaité préciser la notion de « proximité immédiate » figurant dans le texte. Il s’agit seulement d’une distance maximale, qui ne dénote en rien une volonté de placer les futurs réacteurs à la limite des périmètres des PPI.
Alors soyons plus clairs ! Le Conseil d’État n’avait d’ailleurs pas jugé nécessaire d’apporter cette précision et était parfaitement satisfait de la rédaction initialement proposée.
(L’amendement no 252 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Marie Pochon, pour soutenir l’amendement no 212. L’article que nous examinons n’a en réalité qu’une seule finalité : faire avancer le bulldozer de la relance du nucléaire. Pour ce faire, le Gouvernement souhaite déroger aux procédures existantes non pas pendant un an, ni même pendant cinq ans, mais pendant vingt-sept ans ! L’allègement des procédures administratives s’inscrit à contre-courant des objectifs fixés dans la loi et dans les actes réglementaires qui en découlent, alors même que la priorité des responsables politiques devrait être de tout faire pour protéger les Françaises et les Français des conséquences toujours plus grandes et violentes du changement climatique, et pour sécuriser notre approvisionnement énergétique dans ce nouveau contexte. Le délai nécessaire pour développer de nouveaux réacteurs nucléaires est très long : d’après EDF, aucun ne sera prêt avant 2037. Ce temps-là ne répond pas à l’urgence climatique. Arrêtons donc le greenwashing : si vous voulez vraiment agir pour le climat, c’est maintenant qu’il faut le faire, et pas en 2040 ! (Mme Lisa Belluco applaudit.)
Aussi, à défaut d’avoir supprimé l’article 1er, comme nous le demandions à travers l’amendement no 3 de ma collègue Julie Laernoes, nous souhaitons que le dépôt d’un dossier de demande d’autorisation d’installation d’un réacteur électronucléaire soit précédé d’une enquête publique, seule procédure de participation permettant aux citoyens de s’informer sur le projet et de formuler des observations auprès d’un tiers indépendant. La relance du nucléaire, si elle a lieu, doit intervenir dans un cadre démocratique et impliquer l’ensemble de nos concitoyens.
(Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis : un débat public – dont le champ excède celui d’une enquête publique – est déjà prévu avant le dépôt de toute demande d’autorisation. L’adoption de votre amendement conduirait ainsi à restreindre la participation du public. Je m’étonne donc de cette proposition. J’ajoute que vous seriez plus crédibles si vous aviez voté la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables présentée par le Gouvernement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) Ça suffit, avec ça ! C’est ridicule ! C’est votre responsabilité ! Il n’y avait rien sur les énergies renouvelables, c’est pour cela que les écologistes n’ont pas voté le projet ! La parole est à M. Nicolas Dragon. L’amendement qui vient d’être défendu entre en totale contradiction avec le titre du projet de loi que nous examinons et qui vise à « l’accélération des procédures liées à la construction de nouvelles installations nucléaires ». Dans un cadre démocratique ! Le sens du mot « accélérer » est clair – mais peut-être faudrait-il modifier le titre du texte ?
Ensuite, je le répète, vos arguments vont à l’encontre des recommandations du Groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat (Giec)…
(Exclamations sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.) Non, pas du tout. Mais si, parfaitement ! Seulement, vous ne voulez pas l’entendre. On en a déjà parlé ! Le Giec indique que le nucléaire est une des composantes potentielles de la lutte contre le réchauffement climatique et qu’il représente une des solutions qui nous permettront d’atteindre cet objectif dans les années à venir. Pas avant 2040 ! Votre amendement est donc inopérant, puisque nous devons au contraire agir le plus rapidement possible pour garantir l’approvisionnement en électricité de l’ensemble des Français – c’est bien ce qu’ils demandent – afin d’éviter de vivre les coupures généralisées que nous avons failli subir cet hiver. Nous ne souhaitons pas retourner aux temps anciens. Ah, revoilà la bougie ! L’économie française, les très petites entreprises (TPE), les petites et moyennes entreprises (PME) et nos concitoyens exigent un approvisionnement en électricité peu cher et abondant. Organisez un référendum, alors ! C’est précisément ce qu’ils avaient avant que vous ne décidiez d’imposer la fermeture de la centrale de Fessenheim et que vous ne nous entraîniez dans vos errements. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) La parole est à M. Matthias Tavel. Madame la ministre, chaque fois que je vous entends évoquer la loi relative à l’accélération de la production d’énergies renouvelables, j’ai envie de dire qu’il en va de ce texte comme la confiture : moins on en a, plus on l’étale ! (Sourires sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.) Dites-le à vos collègues de la NUPES qui l’ont voté… Si nous n’avons pas voté ce texte, c’est précisément parce qu’il ne s’agit pas d’une loi d’accélération du déploiement des énergies renouvelables, mais plutôt d’une loi de freinage (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES) : aucun objectif n’y est fixé, alors que vous en prévoyez dans celle-ci ; elle rend quasiment inapplicable la définition de zones d’accélération ;… Vos amis socialistes font grise mine ! …et vous avez rejeté, au cours de son examen, tous les amendements que nous proposions pour encourager l’installation de panneaux photovoltaïques sur les surfaces déjà bâties, afin de protéger au maximum les zones naturelles.
Bref : si vous aviez fait votre travail depuis six ans en matière de production d’énergies renouvelables et de sobriété, vous ne seriez pas obligés de venir ânonner un texte ayant prétendument vocation à accélérer le déploiement du nucléaire, mais qui n’accélérera rien du tout, si ce n’est dans quinze ou vingt ans ! Si nous débattons de ce projet de loi, c’est seulement parce que, depuis six ans, vous avez accumulé les retards en matière de développement des énergies renouvelables et de sobriété énergétique. La moindre des choses serait de ne pas vous prévaloir de votre propre turpitude.
(Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
(L’amendement no 212 n’est pas adopté.) Je mets aux voix l’article 1er, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 169
Nombre de suffrages exprimés 168
Majorité absolue 85
Pour l’adoption 133
Contre 35
(L’article 1er, amendé, est adopté.)
Sur l’amendement no 615 portant article additionnel après l’article 1er, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES) d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Chantal Jourdan, pour soutenir l’amendement no 615.
Il vise à conditionner l’autorisation d’installation de nouveaux réacteurs électronucléaires à une évaluation par l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) de la capacité d’EDF à conduire de front trois activités : les visites décennales prévues durant la décennie 2020 ; le traitement des problèmes liés au phénomène de corrosion sous contrainte ; la création de nouveaux réacteurs électronucléaires. Chacun connaît la difficulté, pour EDF, de disposer des ressources humaines nécessaires. Dans la mesure où nous nous interrogeons sur ses réelles capacités dans ce domaine, il nous paraît nécessaire que des garanties soient apportées par l’ASN. Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Il revient à l’exploitant, et non à l’ASN, de gérer son plan de charge. Ce type d’autorisation intervient néanmoins après un examen rigoureux de l’ASN qui porte sur des questions relatives à la sûreté et non aux ressources humaines. Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. J’ajoute que la délégation de programme interministérielle au nouveau nucléaire procédera à une analyse de ce type et donnera ainsi des éléments à propos de la préparation d’EDF mais aussi de l’ensemble de la filière s’agissant de ces projets. D’ailleurs, il est demandé au Gouvernement, dans un rapport dont le principe a fait l’objet d’un examen approfondi ces deux derniers jours, de rendre compte de cette situation. La parole est à M. Maxime Laisney. Nous soutenons cet amendement. Puisqu’il mentionne le problème de la corrosion sous contrainte, j’en profite pour poser une nouvelle fois plusieurs questions auxquelles vous n’avez toujours pas répondu, si ce n’est pour dire qu’une fois que le projet de loi aura été adopté, un rapport viendrait nous éclairer sur les mesures dont nous discutons en ce moment. J’espère obtenir d’autres réponses.
La corrosion sous contrainte se produit sur les circuits d’injection de secours des réacteurs. Nous aimerions tout d’abord savoir qui dit vrai : les sources qui affirment que ce phénomène est connu sur la centrale du Bugey depuis 1984 ou EDF qui prétend l’avoir découvert en 2021 ?
Deuxièmement, j’aimerais évoquer la corrosion détectée récemment sur le réacteur de Penly 1 et révélée la semaine dernière. Je rappelle qu’un quart de la circonférence de la tuyauterie a été endommagé, sur une profondeur de 23 millimètres sur 27. À la suite de cet incident, classé au niveau 2 sur l’échelle internationale des événements nucléaires et radiologiques, dite Ines (
International nuclear and radiological event scale ), l’ASN a demandé à EDF de vérifier 200 autres soudures, ce qui était une bonne idée puisqu’une fissure a été trouvée dans la centrale de Cattenom.
Quand aura-t-on fini de réparer ces soudures ou procédé au changement des tuyaux ? Les centrales nucléaires, dont vous faites l’apologie en permanence, fonctionneront-elles l’hiver prochain, nous permettant ainsi d’éviter le black-out à côté duquel, semble-t-il, nous sommes passés cet hiver ? S’agissant des nouveaux réacteurs que vous souhaitez construire, est-on certain que nous ne serons pas de nouveau confrontés à ce problème ? Des études sur le sujet ont-elles été menées ? Dispose-t-on des matériaux nécessaires ? Résoudrons-nous les problèmes d’ordre géométrique qui se posent – puisque, semble-t-il, telle est une partie des enjeux – ainsi que les problèmes liés aux soudures de réparation ?
Bref, ne nous engageons-nous pas dans un pari pourri sur le nucléaire en jetant l’argent des Français par les fenêtres ?
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) C’est élégant ! La parole est à Mme Chantal Jourdan. Je précise que je ne demande pas, avec cet amendement, que l’ASN procède à des vérifications relevant du volet ressources humaines d’EDF. Je souhaite en revanche que la création des nouveaux réacteurs soit soumise à une évaluation de l’ASN, compte tenu de la situation actuelle. EDF doit en effet mener plusieurs chantiers, dont certains n’étaient visiblement pas prévus, par exemple le règlement des problèmes de corrosion. Je mets aux voix l’amendement no 615.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 165
Nombre de suffrages exprimés 165
Majorité absolue 83
Pour l’adoption 34
Contre 131
(L’amendement no 615 n’est pas adopté.)
La parole est à M. Fabien Roussel. Oui, en matière d’investissement dans la production d’énergie nucléaire et renouvelable, pour renforcer notre mix énergétique, il est nécessaire d’accélérer. Il faut rattraper le temps perdu pour répondre aux besoins du pays, pour sortir au plus vite des énergies fossiles et pour garantir notre souveraineté ainsi que la réindustrialisation totale de notre pays. Nos usines ne tourneront pas grâce aux éoliennes.
Selon nous, cette action doit cependant être menée dans des conditions de sécurité et de maîtrise publique absolues et en concertation très étroite avec les élus et les citoyens du territoire. S’agissant de la sécurité, nous sommes satisfaits d’avoir fait échouer le projet de fusion entre l’IRSN (Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire) et l’ASN – à nos yeux, c’est un point positif.
Nous sommes attachés au fait que ce travail soit mené dans le respect des règles et dans le dialogue avec les élus et les citoyens. C’est la raison pour laquelle, dans le cadre de l’examen de l’article 2 – que nous soutenons –, nous proposerons un amendement visant à améliorer l’échange avec les citoyens au moment de l’installation de nouvelles centrales nucléaires. Il faut favoriser la mise en place d’un dialogue avec les citoyens qui soit le plus approfondi possible, répondre à leurs interrogations et à leurs inquiétudes et faire en sorte que l’adhésion au projet soit la plus large possible. C’est l’avenir de la nation qui est en jeu.
La parole est à Mme Christine Engrand. On l’aura compris, la plupart d’entre vous essaient enfin de faire face à leurs responsabilités. La dégradation de notre parc nucléaire ? C’est vous. La perte d’efficacité d’EDF ? Encore vous. La flambée des prix de l’énergie ? Toujours vous. Heureusement, avec ce projet de loi, vous avez la possibilité de tout mettre en œuvre pour assurer la reconstruction d’un parc nucléaire viable et fiable.
L’article 2 est un article charnière dans la mesure où il permet de qualifier un projet d’intérêt général directement depuis le sommet de l’État par décret en Conseil d’État.
Cependant un projet d’intérêt général, lacunaire, ne donne pas à l’État tous les moyens dont il devrait se saisir pour assurer la mise en œuvre de la reconstruction de notre parc. En effet, puisque le projet d’intérêt général a un effet sur les documents d’urbanisme, il nécessite une procédure de mise en compatibilité avec les collectivités territoriales qui peut traîner en longueur et ralentir insidieusement les lancements de projet.
En outre, la possibilité de qualifier un projet d’intérêt général en Conseil d’État ne préjuge aucunement des actes à venir du Gouvernement car rien ne nous préserve d’un ultime revirement – de ceux dont le Président de la République a le secret. Ainsi, la confiance n’excluant pas le contrôle, nous proposons d’assurer l’effectivité des projets d’intérêt général en leur attribuant par la loi – et non par décret – la qualité d’opération d’intérêt national, et non plus général, dès que le site de leur implantation est connu, et ce afin de sécuriser au plus tôt le cadre de leur réalisation.
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Jean-Pierre Vigier. Je salue les dispositions de cet article qui prévoit plusieurs adaptations en matière de simplification des procédures. En effet, toute simplification réglementaire permettant de faciliter les projets est la bienvenue. Il est donc pertinent de faire valoir la dimension d’intérêt général des réacteurs pour permettre à ces projets de bénéficier d’une dérogation et surtout pour accélérer le démarrage des chantiers. Il a raison ! La mise en compatibilité des documents d’urbanisme représentera un gain de temps précieux et ce, surtout, sans porter atteinte à la libre administration des collectivités territoriales.
Madame la ministre, ces mesures d’accélération n’effacent pas, cependant, les décennies d’attentisme en matière de stratégie nucléaire. La filière, vous le savez, est en déclin et les conséquences de ce désintérêt sont dramatiques.
Nous le constatons chaque jour ! Ainsi, RTE a placé la France en situation de vigilance particulière jusqu’en 2024 sur le plan de la sécurité d’approvisionnement.
C’est évident : pour disposer d’une énergie abondante, décarbonée et pilotable, nous devons nous appuyer sur un cap clair et sur des moyens massifs. C’est à ces conditions que le nucléaire restera un levier essentiel de notre souveraineté énergétique et surtout de la transition écologique.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 4 et 433, visant à supprimer l’article.
Sur ces amendements, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Julie Laernoes, pour soutenir l’amendement no 4.
Il vise à supprimer l’article 2, qui tend à qualifier les projets de réacteurs nucléaires de projets d’intérêt général et prévoit donc une nouvelle procédure dérogatoire de mise en compatibilité des documents d’urbanisme. La maîtrise des procédures est ainsi déplacée des collectivités territoriales vers l’État. Au passage, on comprend bien pourquoi ce projet de loi a d’abord été examiné au Sénat, lequel est supposé préserver l’intérêt des collectivités territoriales.
Cet article nous semble éminemment contestable, notamment au regard du principe de libre administration des collectivités territoriales garanti par l’article 72 de la Constitution.
Nos chers collègues ont affirmé, entre autres choses – parfois, on n’en croit pas ses oreilles –, que les procédures administratives et d’instruction des demandes d’autorisation seraient à l’origine des retards sur les constructions de réacteurs nucléaires.
Je leur répondrai en rappelant que la conception de l’EPR 2 n’a pas encore été totalement définie et que, dans certains amendements, des collègues se demandent s’il est pertinent d’utiliser cette technologie. Par conséquent, la voix des collectivités territoriales, auxquelles on impose des dérogations dans cet article, ne me semble pas au cœur des enjeux liés à l’accélération du nucléaire. Il faudrait plutôt s’interroger sur la fiabilité de l’industrie elle-même qui, je le rappelle, s’est en quelque sorte automutilée.
Le Conseil d’État lui-même, dans son avis du 27 octobre 2022, relève que « le gain de temps attendu » par les dispositions de cet article « ne peut être évalué avec certitude ». Or c’est en vertu de ce gain incertain que l’on s’assoit sur le droit des collectivités territoriales. Cette dérogation, qui est l’expression d’un manque de respect pour nos collectivités et pour les procédures administratives, est de très mauvais augure.
Ah, ça vous plaît, les procédures ! La parole est à Mme Anne Stambach-Terrenoir, pour soutenir l’amendement no 433. Nous proposons nous aussi de supprimer cet article qui prévoit de mettre en place une nouvelle procédure dérogatoire au droit commun en permettant à l’État d’engager directement les procédures de mise en compatibilité des documents d’urbanisme nécessaires à la construction de réacteurs nucléaires. Cela constitue évidemment un affaiblissement certain de la libre administration des collectivités territoriales.
Certes, nous refusons de toute façon la relance à marche forcée de l’industrie nucléaire mais, même si l’on adoptait le point de vue du Gouvernement – qui est favorable à une accélération en la matière –, l’utilité de cet article resterait plus que douteuse.
En effet, comme cela a été rappelé, le Conseil d’État a indiqué dans son avis que le gain de temps ne pouvait être évalué avec certitude. De même, le rapporteur du Sénat a précisé que les personnes auditionnées avaient cité, pour expliquer les délais, la complexité et la technicité des études d’ingénierie ainsi que la disponibilité des compétences – et pas du tout les procédures relevant des aspects urbanistiques. Enfin, le retard de plus de douze ans sur le chantier de Flamanville n’a rien à voir avec des problèmes d’urbanisme.
Bref, aucune raison ne justifie que le Gouvernement agisse ainsi dans le secteur nucléaire, de manière autoritaire, en enjambant les collectivités territoriales et en faisant fi de leurs compétences s’agissant de l’urbanisme.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Julie Laernoes applaudit également.) Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Le gain, évalué dans le cadre de l’étude d’impact, est de l’ordre de deux ans. Ça ne fait pas lourd ! Je mets aux voix les amendements identiques nos 4 et 433.
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 177
Nombre de suffrages exprimés 171
Majorité absolue 86
Pour l’adoption 26
Contre 145
(Les amendements identiques nos 4 et 433 ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Christine Engrand, pour soutenir l’amendement no 276. Puisqu’il nous engage sur plusieurs décennies, ce projet de loi doit être l’occasion de faire des choix forts. Par cet amendement, nous vous proposons de qualifier d’opérations d’intérêt national les projets d’installation de nouveaux réacteurs nucléaires. Cet outil permet de répondre, selon le code de l’urbanisme, « à des enjeux d’une importance telle qu’elle nécessite une mobilisation de la collectivité nationale et à laquelle l’État décide par conséquent de consacrer des moyens particuliers ».
Au-delà du symbole sémantique, une telle qualification permet une sécurisation cruciale de la reconstruction de notre parc en sanctuarisant un périmètre au sein duquel le préfet récupère la compétence territoriale en matière d’urbanisme. Il s’agit de compléter et de préparer la mise en œuvre des projets d’intérêt général en assurant d’office la définition d’un cadre d’exception, au sein duquel les projets d’installation nucléaire pourront se développer dès lors que le site de leur implantation est défini.
Aujourd’hui, cette qualification est attribuée par décret. Cigéo en bénéficie par exemple depuis juillet 2022 et il est probable que le Gouvernement envisage d’y recourir de nouveau. Rien ne s’y oppose en tout cas puisque, depuis 2021, certaines dispositions du code de l’urbanisme prévoient déjà expressément de qualifier ainsi des installations nucléaires de base.
Il est crucial de verrouiller légalement cette qualification puisque la reconstruction du parc s’inscrit dans un temps long et que rien n’assure que la position du gouvernement français sera la même d’ici une dizaine d’années. On l’a vu : ce sont les atermoiements et tractions politiques des vingt dernières années qui nous ont plongés dans l’ornière.
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
(L’amendement no 276, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.) La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l’amendement no 140. Cet amendement me semble particulièrement important puisque la rénovation de notre filière électronucléaire ne peut pas se limiter à la seule construction de nouveaux réacteurs nucléaires : pour renouveler la filière, elle doit faire l’objet d’un plan global de reprise en main, incluant le cycle du combustible en amont et en aval. Il faudra donc accélérer dans les mois et dans les années à venir la mise en place de projets qui concernent non pas seulement les réacteurs nucléaires mais bien aussi les sites qui traitent du cycle du combustible. L’objet de l’amendement est par conséquent de les inclure dans les dispositifs de cette loi afin de faciliter ce qui a fait la force et la spécificité de la France : il ne s’agit pas seulement de posséder des réacteurs nucléaires, mais bien toute l’industrie du cycle nucléaire dans son ensemble. Quel est l’avis de la commission ? L’amendement est partiellement satisfait puisqu’on a déjà voté un amendement qui permet d’inclure dans ces dispositions la piscine centralisée d’Orano sur le site de La Hague, étendant donc le dispositif aux installations traitant le combustible quand elles sont entreposées dans une INB ou à proximité – ce qui ne concerne pas le projet Cigéo, je le dis pour la gauche de l’hémicycle. J’ajoute que le périmètre voté à l’article 1er ne me semble pas devoir être modifié puisqu’il comporte déjà les installations liées au cycle combustible que vous évoquez. Demande de retrait. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. J’ajoute que la société Orano – que vous aviez peut-être en tête en déposant cet amendement – a été interrogée à ce sujet et nous a confirmé que, de son point de vue, la disposition que vous proposez ne lui apportait pas de bénéfice. Elle n’en est donc pas demandeuse, sachant que l’usage d’une dérogation doit toujours être envisagé avec parcimonie, par principe et pour des raisons constitutionnelles évidentes.
(L’amendement no 140 est retiré.) La parole est à M. Maxime Laisney, pour soutenir l’amendement no 434. Cet article attribue le statut de projet d’intérêt général à la réalisation d’un réacteur nucléaire, ce qui entraîne la mainmise de l’État sur la mise en compatibilité des documents d’urbanisme. On nous a renvoyés à plusieurs reprises à la loi sur l’accélération de la production d’énergies renouvelables, mais je rappelle que vous y avez inséré un article 3 qui prévoit une pseudo-planification sous la forme d’un quasi-droit de veto des maires, puisque chaque étape nécessite leur avis conforme, ce qui fait qu’on tourne en rond.
De plus, à aucun moment le référent préfectoral institué pour l’occasion ne peut imposer des zones d’accélération pour permettre d’être en conformité avec les objectifs de développement des énergies renouvelables qui devaient être définis à l’échelle régionale et déclinés à l’échelle départementale. Et c’est maintenant le strict inverse : l’État reprend la main pour imposer aux collectivités la mise en compatibilité des documents d’urbanisme. Vous avez fait votre petit marché dans les dispositions intégrées au Sénat ; permettez-nous de le faire à notre tour en demandant ici le rétablissement de la rédaction sénatoriale afin qu’il y ait un débat public en bonne et due forme, mené par la CNDP – la Commission nationale du débat public – avant que la qualification de projet d’intérêt général ne soit accordée.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Vous remettez en cause les prérogatives de la CNDP puisque c’est à elle qu’il appartient d’évaluer s’il faut un débat public ou un autre type de concertation.
(L’amendement no 434 n’est pas adopté.) L’amendement no 378 de Mme la rapporteure est rédactionnel.
(L’amendement no 378, accepté par le Gouvernement, est adopté.) La parole est à M. Maxime Laisney, pour soutenir l’amendement no 436. Le processus de mise en conformité des documents d’urbanisme prévoit que ce sont les établissements publics de coopération intercommunale – EPCI – ou les communes qui y sont associés. Mais comme je viens de le rappeler, les communes disposent d’un quasi-droit de veto sur les projets de développement des énergies renouvelables. Nous ne voyons pas pourquoi il y aurait un traitement différent dans le cadre de l’installation d’un nouveau réacteur nucléaire sur leur territoire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Quel est l’avis de la commission ? Défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Je rappelle par ailleurs que dans la loi sur l’accélération de la production d’énergies renouvelables que vous mentionnez, aucune commune ne peut s’opposer à un projet d’énergie renouvelable. C’est donc la même chose ici. La parole est à M. Pierre Cazeneuve. Monsieur Laisney, avec tout le respect que je vous dois, j’ai un peu l’impression que vous n’avez pas lu jusqu’au bout l’article 3 de la loi sur les énergies renouvelables et que c’est pourquoi vous avez voté contre ! Bien tenté ! Il n’est à aucun moment question d’un droit de veto des communes dans cette loi que nous, nous avons votée. Si ! Un avis conforme à chaque étape, ça s’appelle un droit de veto ! Il s’agit d’un dispositif très simple : on a redonné les clefs du camion aux communes et elles ont désormais le choix de définir les zones dans lesquelles elles souhaitent que soient implantées les zones d’accélération de production d’énergies renouvelables,… C’est vrai et c’est pourquoi j’ai voté contre ! …condition sine qua non à l’établissement de zones d’exclusion. Mais il n’y a, je le répète, aucun droit de veto du maire concerné – ni, d’ailleurs, des maires des communes environnantes. Soyons cohérents : nous n’avons pas instauré de droit de veto des communes dans le cadre de l’accélération de la production d’énergies renouvelables, ne le faisons pas quand il s’agit de l’énergie nucléaire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) La parole est à M. Matthias Tavel. Peut-être notre collègue Pierre Cazeneuve a-t-il lu l’article mais il ne l’a pas compris. Un avis conforme de la commune équivaut à un droit de veto car en l’absence d’avis conforme, il ne peut y avoir de zone d’accélération. (« Eh oui ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Mais il n’y a pas d’avis conforme ! En prévoyant un avis conforme à chaque étape de la procédure, vous avez créé un droit de veto complet. C’est n’importe quoi ! Un avis conforme n’est pas un droit de veto ! En revanche, je note qu’alors que votre texte prévoit d’accompagner ces zones d’accélération de zones d’exclusion, le projet de loi actuel ne prévoit pas de zones d’exclusion de l’énergie nucléaire, preuve une nouvelle fois que vous ne procédez pas de façon symétrique et que vous favorisez le nucléaire. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.) La parole est à Mme la ministre. Par construction logique, ce qui n’est pas une INB est en conséquence une zone d’exclusion. Là encore, je viens d’entendre une contrevérité. C’est malheureux de devoir à chaque fois afficher, parce que vous n’avez pas voté la loi sur les énergies renouvelables,… Ils le regrettent ! …vos impostures et vos contrevérités. (Exclamations sur de nombreux bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
(L’amendement no 436 n’est pas adopté.) Je vous informe que sur l’amendement no 435, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l’amendement no 48.
En l’état actuel du texte, les départements et les régions ne sont pas associés en tant que personnes publiques à l’examen de la mise en compatibilité des documents d’urbanisme. Cet amendement propose donc qu’ils en soient informés. Cette démarche très simple n’occasionnerait pas de lourdeur administrative supplémentaire et serait pour moi une marque de confiance et de considération pour ces collectivités et qui aiderait à l’acceptabilité des projets.
D’autre part, une installation nucléaire nécessitant une route dégagée, en bon état et correctement dimensionnée, critère essentiel pour la relève des personnels, pour l’acheminement des pièces de rechange – lesquelles peuvent être très volumineuses et exiger des convois spéciaux – et pour l’arrivée des services d’urgence comme les pompiers, il convient de rappeler que ce type de voirie est de la compétence des départements, raison de plus de les tenir informés, et cela ne coûterait pas cher.
Mais elle est déjà là, la route ! L’entretien de ces routes suppose, rappelons-le, une programmation et des plans pluriannuels d’investissement et de formation. Quel est l’avis de la commission ? Demande de retrait au profit des amendements no 32 et identiques à venir, qui permettent d’informer les départements et les régions de la demande par l’autorité administrative de la mise en compatibilité, et qui me semble satisfaisant au regard des processus utilisés dans ce cadre. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. Je pense que l’ensemble des collectivités locales environnantes devraient être informées de l’existence d’un projet d’installation nucléaire, mais je ne doute pas que Gravelines et Penly soient au courant, tout comme Tricastin et Bugey qui sont sur les rangs pour récupérer la troisième paire de réacteurs. Cela étant, en tout état de cause, nous proposons d’organiser l’information des collectivités de manière plus efficace avec les amendements no 32 et identiques. Madame Brulebois, l’amendement est-il maintenu ou retiré ? Je salue l’excellent travail de mon collègue Cinieri dont l’amendement est mieux rédigé que le mien, que je retire au profit du sien. (« Ah ! » sur divers bancs.) C’est beau, tout de même ! Il y a de l’amour dans l’air ! (Sourires.)
(L’amendement no 48 est retiré.) Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 435, 32, 37, 49, 50, 51, 57, 66, 73, 79, 505 et 52, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 32, 37, 49, 50, 51, 57, 66, 73, 79 et 505 sont identiques.
La parole est à Mme Martine Etienne, pour soutenir l’amendement no 435.
Cet amendement vise à renforcer le rôle des collectivités dans la mise en compatibilité des documents d’urbanisme nécessaires à la réalisation d’un réacteur électronucléaire à proximité d’une installation existante. Il prévoit que les collectivités disposent de six mois pour émettre leurs observations sur le dossier d’aménagement présenté par l’État. Il s’agit ainsi de leur permettre d’indiquer les motifs pour lesquels elles considèrent que les documents d’urbanisme ne permettent pas la réalisation du projet de réacteur ainsi que les modifications qu’elles estiment nécessaires pour y parvenir. Dès lors, l’État leur répondrait dans les deux mois en indiquant les évolutions du projet qu’il propose pour en tenir compte.
Un amendement similaire – quoique moins contraignant – avait été voté au Sénat, mais il a été supprimé en commission. Vous considérez qu’il faut aller vite ; peu importe les élus et leur expertise, peu importe les territoires. Nous, au contraire, nous voulons associer les élus locaux à ces décisions primordiales. La modification des documents d’urbanisme doit impliquer nécessairement la prise en compte de l’expertise des autorités locales compétentes sur le long terme. Respectez la démocratie, respectez les avis citoyens, respectez le débat et respectez la représentation, plus encore quand les projets atteignent à ce point les libertés locales et touchent les collectivités concernées pour des générations !
À l’échelle des années nécessaires à la procédure de mise en service d’un réacteur nucléaire, six petits mois de concertation ne semblent pas être un temps déraisonnable, surtout si cela permet non seulement aux élus locaux d’être mieux associés mais aussi que leurs observations contribuent à faire gagner en pertinence la mise en compatibilité des documents d’urbanisme.
(Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) La parole est à M. Dino Cinieri, pour soutenir l’amendement no 32. Comme l’a indiqué Mme Brulebois, cet amendement propose de réintroduire une disposition adoptée au Sénat et supprimée en commission, visant à informer plus en amont les départements et les régions dans le cadre de la réalisation des réacteurs électronucléaires qualifiés de projet d’intérêt général en application du présent article 2. Une telle démarche d’information n’occasionnerait pas de lourdeur excessive dans la procédure. De plus, au vu des compétences des départements en matière de routes ou encore de sécurité incendie, et au vu des implications en termes d’équilibre territorial au niveau régional, il apparaît pertinent d’informer ces collectivités plus tôt des projets de réacteurs nucléaires qui émergeront sur leur territoire car, en l’état du texte, départements et régions ne seraient impliqués qu’en tant que personnes publiques associées dans le cadre de l’examen conjoint de la mise en compatibilité des documents d’urbanisme, ce qui est trop tardif. La création de procédures spécifiques doit en effet s’accompagner de garanties d’information supplémentaires pour les rendre acceptables sur le territoire. Bravo ! La parole est à Mme Véronique Louwagie, pour soutenir l’amendement no 37. Vous l’avez vous-même indiqué, madame la ministre : il est important que les collectivités locales puissent être informées, notamment le département et la région, qui sont des collectivités de proximité participant à l’établissement des schémas de cohérence territoriale (Scot). Tel est le sens du présent amendement, identique au précédent. (« Excellent ! » sur les bancs du groupe LR.) La parole est à M. Romain Daubié, pour soutenir l’amendement no 49. En l’état, les collectivités locales de proximité que sont le département et la région ne disposent pas, à mon sens, d’une information suffisante. (M. Sébastien Jumel s’exclame.) Mon amendement vise tout simplement à les informer, sans formalisme ni allongement des délais de procédure, dans une logique de simplification. Ainsi, chaque collectivité pourra pleinement exercer ses compétences – je pense en particulier à la compétence des départements en matière de routes ; c’est le conseiller départemental qui vous parle ! – et perdra le moins de temps possible dans le cadre de la construction de nouveaux réacteurs nucléaires. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et LIOT.) La parole est à M. Nicolas Ray, pour soutenir l’amendement no 50. Pour les mêmes raisons, cet amendement vise à réintroduire une disposition votée au Sénat et défendue par l’Assemblée des départements de France et par Régions de France. Ces collectivités exercent des compétences propres qui peuvent se voir affectées par l’article 2 du présent texte. Nous avions défendu ces principes d’information pour les énergies renouvelables : par cohérence, nous les défendons aussi en matière nucléaire. La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l’amendement no 51. Cet amendement, rédigé avec l’ancien ministre Stéphane Travert, vise le même objectif. Nous avons tout intérêt à travailler en étroite coopération avec les collectivités, qu’il s’agisse des départements ou des régions – nous avons beaucoup à y gagner. Que peuvent-elles nous apporter ? Par exemple, le conseil général du Haut-Rhin a créé une commission locale de surveillance… C’est dommage, parce que vous avez fermé la centrale de Fessenheim ! …qui a servi de modèle et a ensuite été généralisée dans toute la France. L’apport des collectivités est important, en particulier dans les plans de prévention des risques. La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l’amendement no 57. Au vu des compétences des départements en matière de routes et de sécurité incendie, et compte tenu des implications en termes d’équilibre territorial au niveau régional, il apparaît pertinent d’informer ces collectivités plus tôt des projets de réacteurs nucléaires qui émergeraient sur leur territoire. En l’état, les départements et les régions ne seraient impliqués qu’en tant que personnes publiques associées dans le cadre de l’examen conjoint de la mise en compatibilité des documents d’urbanisme, ce qui me semble trop tardif. La parole est à M. Benoît Bordat, pour soutenir l’amendement no 66. Nous sommes une quinzaine à présenter le même amendement, nous n’allons pas nous répéter à chaque fois. Nous pourrions peut-être gagner du temps en admettant que ces amendements identiques expriment une position transpartisane en faveur des départements et des régions de France. Accélérons et passons au vote ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) La parole est à M. Jean-Pierre Taite, pour soutenir l’amendement no 73. Cet amendement vise à réintroduire une disposition votée au Sénat mais supprimée en commission afin d’informer plus en amont les départements et les régions dans le cadre de la réalisation des réacteurs électronucléaires qualifiés de projets d’intérêt général, en application de l’article 2 du présent projet de loi. Une telle démarche d’information est très simple et n’occasionnera pas de lourdeur administrative excessive. Au vu des compétences des départements en matière de routes ou de sécurité incendie, et compte tenu des implications en termes d’équilibre territorial au niveau régional, il apparaît pertinent d’informer ces collectivités plus tôt des projets de réacteurs nucléaires qui émergeraient sur leur territoire. Excellent ! La parole est à M. Michel Castellani, pour soutenir l’amendement no 79. (« Ah ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.) Ils ont des réacteurs nucléaires en Corse ? Cet amendement, proposé par Benjamin Saint-Huile, va dans le même sens que ceux qui ont été précédemment défendus. Nous devons faire en sorte de mieux associer les départements et les régions à la prise de décision. En effet, ces derniers n’y sont intégrés qu’en tant que personnes publiques associées pour l’examen conjoint de la mise en compatibilité des documents d’urbanisme. Il s’agit donc d’aller un peu au-delà. Cet amendement va dans le bon sens puisqu’il tend à rapprocher les décideurs de ceux qui vivent au quotidien les décisions qui sont prises, dans le respect des collectivités. Il trouve aussi sa justification par rapport au poids objectif que représente de toute évidence une centrale nucléaire en matière environnementale, mais aussi en matière d’emploi et d’activité économique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.) Les amendements nos 505, de Mme Émilie Bonnivard, et 52, de Mme Danielle Brulebois, sont défendus.
Quel est l’avis de la commission sur tous ces amendements en discussion commune ?
A priori , avis de sagesse sur l’amendement no 435, mais avant de confirmer mon avis sur l’ensemble des amendements, je laisse à Mme la ministre le soin de présenter d’abord celui du Gouvernement. Madame la ministre ? Je demande le retrait de l’amendement no 435 et de l’amendement no 52, au profit des amendements nos 32 et identiques, sur lesquels j’émettrai un avis de sagesse. Les collectivités locales sont évidemment informées des projets de réacteurs nucléaires, mais j’entends la demande qui émane des bancs de cet hémicycle. Du reste, nous suggérerons sans doute quelques améliorations rédactionnelles au cours de la navette. Madame la rapporteure ? Même avis. La parole est à M. Raphaël Schellenberger. Je salue l’ouverture du Gouvernement au dialogue nécessaire entre collectivités locales quand il s’agit d’accueillir de nouveaux réacteurs nucléaires. Tout de même, ces amendements ne mangent pas de pain. De quoi parle-t-on ? De la mise en compatibilité du Scot qui, en règle générale, fait déjà mention qu’il existe une INB dans son périmètre. C’est 20 kilomètres seulement ! Le Scot ne détaille pas s’il y existe deux, quatre, six, voire huit réacteurs et se contente globalement de faire état d’un site de développement nucléaire. Le fait de construire sur ce site, et lui seul, de nouveaux réacteurs ne changera rien aux documents d’urbanisme. Qu’il y ait un dialogue entre l’État, l’exploitant et les collectivités territoriales de tout niveau pour l’installation de nouveaux réacteurs me semble frappé au coin du bon sens ! Cela ne mange pas de pain de l’écrire dans la loi.
J’aimerais rassurer toutes celles et ceux qui se posent des questions aujourd’hui : sur 18 des 19 INB, au moins, les élus locaux ont envie que soient construits de nouveaux réacteurs, notamment pour préparer l’avenir de ces sites. Madame la ministre, si vous souhaitez de nouveau développer un projet nucléaire sur la dix-neuvième INB française, celle de Fessenheim, nous y serons favorables !
La parole est à M. Sébastien Jumel. J’aime bien Dino Cinieri, j’ai du respect pour lui – franchement, il est sympa. Nous allons donc voter ces amendements. Mais manifestement, ceux qui les ont défendus ne savent pas comment ça se passe. (Mme la ministre sourit.) La mise en compatibilité d’un plan local d’urbanisme impose au préalable de consulter les personnes publiques associées : départements, intercommunalités, régions. D’ailleurs, des projets de ce type font l’objet d’un débat public qui associe l’ensemble des collectivités publiques, ainsi que les autorités portuaires, pour discuter des questions de sécurité, d’aménagement – notamment routier – ou encore de logement. Les collectivités sont donc informées en long, en large et en travers.
Quant à la compatibilité du Scot et du schéma régional d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (Sraddet) avec un projet d’intérêt national, elle va de soi – elle est même consubstantielle à la loi. On peut toujours l’inscrire dans ce texte : si cela fait plaisir à Dino Cinieri,…
Entre autres ! …je suis prêt à m’y plier (Sourires) , mais il n’y a que ceux de nos collègues qui n’ont jamais fait de plan local d’urbanisme pour croire que cela a de l’importance. (M. Raphaël Schellenberger applaudit.) Je mets aux voix l’amendement no 435. Avec un avis de sagesse de la commission ! Non, l’amendement no 435 a donné lieu à une demande de retrait et, à défaut, à un avis défavorable. La rapporteure a donc changé d’avis !
(Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 210
Nombre de suffrages exprimés 208
Majorité absolue 105
Pour l’adoption 42
Contre 166
(L’amendement no 435 n’est pas adopté.)
(Les amendements identiques nos 32, 37, 49, 50, 51, 57, 66, 73, 79 et 505 sont adoptés ; en conséquence, l’amendement no 52 tombe.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes LR et LIOT.)
Bravo Dino ! Je suis saisie de deux amendements, nos 83 et 636, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Nicolas Ray, pour soutenir l’amendement no 83.
Cet amendement vise à réintroduire une disposition votée au Sénat afin de renforcer le dialogue territorial entre l’État et les collectivités. La procédure dérogatoire est évidemment placée sous l’entière responsabilité de l’État en lieu et place des collectivités, mais nous considérons qu’il est important que les exécutifs locaux puissent faire valoir des observations sur le projet et obtenir des réponses écrites de la part de l’État dans le cadre des dispositions de l’article 2 de ce projet de loi. Il s’agit non pas de conférer un pouvoir de blocage aux collectivités, bien entendu, mais d’instaurer un véritable dialogue en amont de la procédure dérogatoire. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) L’amendement no 636 de Mme Marie-Noëlle Battistel est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
L’alinéa 7 prévoit déjà un examen conjoint associant les collectivités et l’État. Le besoin que vous évoquez nous semble donc déjà satisfait. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Avis défavorable : M. le député Jumel a rappelé les conditions dans lesquelles se font ces examens ; je pense que c’était utile pour éclairer la représentation nationale.
(Les amendements nos 83 et 636, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Lisa Belluco, pour soutenir l’amendement no 377. Il vise à supprimer l’alinéa 5, aux termes duquel l’autorité administrative compétente de l’État engage sans délai la procédure de mise en compatibilité du document d’urbanisme, après avoir transmis le dossier à la collectivité territoriale concernée. La mention « sans délai » risque d’être source de conflit au niveau local, car les élus locaux n’auront pas le temps de prendre connaissance du dossier transmis, ni d’y réagir.
Cet amendement va dans le même sens que les deux amendements précédents, qui viennent malheureusement d’être rejetés. La disposition prévue à l’alinéa 5 empêchera la concertation et un fonctionnement en bonne intelligence avant le lancement de la procédure de mise en compatibilité. Sa suppression permettrait d’éviter des tensions et des conflits ultérieurs avec les élus locaux.
Qui plus est, la notion « sans délai » nous semble assez floue. Que signifie-t-elle : dans l’heure, dans la journée, dans la semaine, dans le mois ? Elle est une source supplémentaire de recours ou risque d’être utilisée comme telle.
C’est tout simplement du droit ! Quel est l’avis de la commission ? Mon avis sur cet amendement est défavorable, comme il le sera sur plusieurs amendements qui suivent. À mon sens, vous n’essayez pas de favoriser le dialogue avec les collectivités : cette série d’amendements consiste à faire perdre du temps aux projets, car vous n’avez pas envie qu’ils se concrétisent. Eh oui ! Vous êtes démasqués ! Ces amendements ajoutent un délai, qui de deux semaines, qui d’un mois, qui de six mois. Les collectivités territoriales sont déjà largement associées, tant dans la phase de projet que dans la phase d’exploitation. Quel est l’avis du Gouvernement ?