XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023

Séance du lundi 24 octobre 2022

J’informe l’Assemblée nationale que j’ai pris acte, le 20 octobre 2022 à vingt heures quarante-cinq, du dépôt, par M. Boris Vallaud, Mmes Mathilde Panot et Cyrielle Chatelain, M. André Chassaigne, ainsi que 146 députés, d’une motion de censure, en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, la Première ministre ayant engagé la responsabilité du Gouvernement sur l’adoption de la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2023.
Ainsi que vient de le décider la conférence des présidents, la discussion et le vote de cette motion de censure auront lieu ce soir, à partir de vingt et une heures trente.
L’ordre du jour appelle la discussion commune et les votes sur les motions de censure déposées, en application de l’article 49, alinéa 3, de la Constitution, par Mmes Cyrielle Chatelain et Mathilde Panot, MM. Boris Vallaud et André Chassaigne, ainsi que 147 de leurs collègues, d’une part, et par Mme Marine Le Pen et 89 membres de l’Assemblée nationale, d’autre part, la Première ministre ayant engagé la responsabilité du Gouvernement sur l’adoption de la première partie du projet de loi de finances pour 2023.
La parole est à Mme Cyrielle Chatelain.
Madame la Première ministre, vous mentez ! Vous mentez aux Françaises et aux Français mais, surtout, vous vous mentez à vous-même. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES. – Protestations sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
Il y a quelques jours, vous avez parlé de l’urgence environnementale et nous avez exhortés à changer radicalement nos manières de produire, de consommer et d’agir. Vous avez rappelé un constat implacable : nous devons faire en huit ans ce que nous n’avons pas fait en trente-deux années. Toutefois, combien de propositions concrètes avez-vous formulées dans votre discours ? Zéro ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES.) Combien de décisions radicales figurent dans votre plan de sobriété ? Zéro ! Quelle chance avons-nous, si vous ne changez pas de politique, de relever ce défi d’accomplir en huit ans ce qui n’a jamais été fait ? Zéro ! (Mêmes mouvements.) Et que faites-vous ? Des clips, des chartes et de jolis concepts. Vous avez non seulement trahi mais, pire, vous avez déserté vos responsabilités ! C’est vous qui étiez au pouvoir en 2017 et qui avez été condamnés pour inaction durant cette période ! Aujourd’hui, je veux rassurer les Françaises et les Français : le combat n’est pas impossible. En matière d’inaction climatique, je m’adresse à vous, madame la Première ministre car, en vérité, de ministre chargé du climat, il n’en est point : vous, l’ancienne préfète qui, comme on dit à Paris, connaît les territoires, ces territoires dont vous vous êtes pourtant coupée si rapidement. Votre inaction se mesure en nombre de jours de sécheresse,… Oh ! …à Clansayes dans la Drôme, à Gérardmer dans les Vosges, à Miribel-les-Échelles en Isère et dans plus de cent autres communes privées d’eau. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES.) Elle se mesure en hectares de forêts brûlés en Gironde, dans les Landes, la Drôme, l’Aveyron, l’Isère, mais aussi en Bretagne, dans le Maine-et-Loire, le Jura ou les Vosges. Partout, cet été, la France a brûlé : ce sont ainsi 62 000 hectares de forêts qui ont été ravagés par les flammes.
Ne dites pas : « Ce n’est pas nous ; c’est un problème plus grand, trop grand, qui nous dépasse ». Ces incendies sont le résultat de votre inaction
(Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES) et d’années passées à essorer le personnel de l’Office national des forêts (ONF), qui a vu 12 % de ses effectifs supprimés – 12 %, j’insiste. C’est vous qui n’avez rien fait ! Avez-vous, pour autant, pris la mesure des événements dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) pour 2023 ? Non. Le niveau de financement de l’action Gestion durable de la forêt n’augmente pas cette année ; les dépenses de fonctionnement sont à la baisse et la tendance se prolongera en 2024 et en 2025 : c’est intolérable, compte tenu des besoins en matière de protection de la forêt.
Votre inaction se mesure sur la facture de chauffage des familles les plus modestes : chaque année, 3,5 millions de ménages ont froid, parce qu’ils ne peuvent payer leurs factures. Votre ministre de l’économie a découvert le pull à col roulé : sachez que des millions de Français le portent la nuit, parce qu’ils ont froid.
C’est à cause de vous ! Le problème nucléaire, c’est vous ! C’est pour cela qu’on a besoin du nucléaire ! Et quel est votre objectif ? Sortir 15 000 logements de leur statut de passoire thermique, c’est-à-dire 5 000 de moins que l’objectif de l’année dernière. C’est un renoncement ! Ce chiffre, alors que la France compte 4,8 millions de passoires thermiques, est ridiculement bas. Je ne sais pas si vous avez fait le calcul mais, à ce rythme, nous aurons terminé en 2352 ! (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES. – Mme Karine Lebon applaudit également.) Cela prendra trois cent vingt ans pour isoler les bâtiments et arrêter de chauffer dehors, trois cent vingt ans pour tarir l’une des principales sources des émissions de gaz à effet de serre !
Depuis le mois de juillet, notre collègue Eva Sas dépose des amendements en vue d’augmenter les crédits alloués à MaPrimeRénov’ : nous savons qu’il faut y consacrer au moins 9 milliards. Nous vous demandons de sortir de l’inaction et de l’affichage, mais vous nous répondez en recourant au 49.3 !
C’est scandaleux ! De quoi votre budget est-il le nom et le symbole ? Vous êtes la tête de gondole du libéralisme économique qui consacre l’inaction politique et le laisser-faire attendu par vos camarades de la droite traditionnelle, ce libéralisme qui coûte aux Français – la suppression de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) leur coûtera encore 9 milliards d’euros supplémentaires par an – et qui est parfaitement inefficace pour combattre le dérèglement climatique et résorber nos fractures. Pour cause, c’est lui qui les a créés.
Le « en même temps » est une impasse. On ne peut pas faire de la planification écologique et protéger le libéralisme économique.
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES.) Votre planification est une mascarade : des mots, toujours des mots, rien que des mots ! La planète mérite mieux que le libéralisme ; nous méritons mieux. Nous ne sommes pas tous responsables du réchauffement climatique de manière égale. Et vous, vous êtes surtout des irresponsables ! Votre budget donne un chèque en blanc aux plus riches, alors qu’ils polluent huit fois plus – j’ai bien dit huit fois plus – que les 50 % des Français les moins riches. Je le répète : nous ne sommes pas responsables de manière identique du réchauffement climatique et de la destruction de la biodiversité. (Mêmes mouvements.) Prenons l’exemple du carburant : les prix s’envolent et vous mettez en place une remise à la pompe qui coûtera 7,6 milliards d’euros. Mais pour qui ? Pour Christophe Galtier et sa Lamborghini ? Car cette remise profite deux fois plus aux plus riches. N’importe quoi ! On ne peut pas caricaturer. Ceux qui bossent dans les territoires ont besoin de leur voiture ! C’est le même constat en ce qui concerne le bouclier tarifaire sur le gaz et l’électricité : 45 milliards d’euros sont dépensés, sans distinction. Lorsque l’État distribue 100 euros, il en donne 7 aux plus pauvres et le double aux plus riches. Il y a un malaise, madame la Première ministre : le ressentez-vous ? Ou êtes-vous complètement déconnectée ? Mon collègue Nicolas Thierry a proposé un bouclier tarifaire écologique, qui garantit à chacun d’avoir suffisamment pour vivre et ne subventionne pas l’ébriété énergétique.
Madame la Première ministre, j’aimerais dire un mot de votre méthode. Au cœur de l’été, Mme la présidente de l’Assemblée nationale a rappelé son attachement viscéral à la construction de compromis et son peu de goût pour le recours au 49.3. Quel malaise, aujourd’hui ! Madame la présidente, je me tourne vers vous qui allez devoir présider une assemblée muselée à coups de 49.3 – une stratégie de fin de règne, engagée seulement quatre mois après l’élection d’Emmanuel Macron. (
Mêmes mouvements.) Le 49.3 est l’arme des faibles, de ceux qui sont à court d’arguments. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Pourtant, à votre droite, une opposition fantoche valide tous vos textes : les membres du groupe Les Républicains auraient d’ailleurs pu voter votre budget, puisqu’il est conforme à leur projet. N’importe quoi, c’est une caricature ! À l’extrême droite, se trouve un parti qui n’aime ni la science, ni les faits, ni l’histoire, un parti qui s’est avili dans le révisionnisme (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES) et qui se réjouit de votre brutalité sociale car c’est sur ce terreau qu’il prospère, un parti qui s’accommode de votre inaction climatique puisqu’il n’y a pas si longtemps, Marine Le Pen déclarait ne pas être certaine que l’activité humaine fût à l’origine des changements climatiques. (Protestations sur les bancs du groupe RN.) Cela ne nous donne pas envie de voter votre motion de censure ! Au milieu de ce grand jeu de dupes – avec le retour de Nicolas Sarkozy qui vous tend la main – et des places clés de l’Assemblée que vos députés ont choisi d’offrir à l’extrême droite, la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale (NUPES) prend ses responsabilités. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES.) Nous verrons si vous êtes capables de prendre vos responsabilités ! Oui, la NUPES continue à participer à un débat de qualité ; non, elle n’est pas une opposition stérile. Elle sait faire des propositions et accepter des compromis. Nous avons ainsi formulé des propositions concrètes, comme celle relative au crédit d’impôt en faveur des résidents en Ehpad, présentée par Christine Arrighi, et même soutenu certaines issues de vos rangs, comme la taxe sur les superdividendes défendue par Jean-Paul Mattei. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.) Le recours au 49.3 les écrase.
Madame la Première ministre, vous avez rendu hommage à « l’humanité rare » de Bruno Latour. Vous avez salué ses travaux qui, je vous cite, « continueront d’éveiller les consciences. »
Sauf la vôtre, madame la Première ministre ! Il serait temps ! D’ailleurs, il ne prétendait pas vous éveiller mais bien vous chasser. Je le cite, pour dissiper votre contresens : Ils « ont échoué à basculer de la production à l’habitabilité. Il faut donc prendre leur relais ».
Votre budget aggrave la situation et consacre l’irresponsabilité climatique des plus riches. Les dépenses climaticides augmentent, comme si le niveau d’alerte n’avait jamais été atteint. Pourtant, vous le savez – et vous le dites aux Français que vous exhortez à multiplier les efforts individuels –, il nous reste moins de huit ans pour agir et limiter l’augmentation des températures.
Nous écologistes, députés de la NUPES, nous prenons le relais et ne lâcherons rien !
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES.) Nous ne baisserons pas les bras. Durablement, nous proposerons, toujours et encore, la taxe sur les superprofits, une fiscalité qui intègre le principe pollueur-payeur, la création d’un ISF – impôt de solidarité sur la fortune – climatique ou encore un bouclier tarifaire qui introduit une justice sociale et une efficacité climatique.
Aujourd’hui est venue l’heure des choix : des choix radicaux, des choix qui dérangent les intérêts privés, des choix courageux, qui obligent à partager les richesses et les responsabilités, des choix enthousiasmants pour le plus grand nombre d’entre nous,…
Cela reste à prouver ! …mais qui dérangeront la caste de privilégiés qui vous impressionne. S’opposer au néant, c’est difficile, mais ce n’est pas impossible. Les Français peuvent compter sur nous, sur les écologistes, sur la NUPES, pour mener le combat ! (Les députés des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES se lèvent et applaudissent.) La parole est à Mme Marine Le Pen. Le 19 juin dernier, les Français ont pris une décision sans ambiguïté : en privant de majorité absolue le Président de la République nouvellement élu et en envoyant quatre-vingt-neuf députés du Rassemblement national à l’Assemblée,… C’est quatre-vingt-neuf de trop ! …ils ont exprimé une soif de renouveau démocratique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) Mais avant, vous avez été battue ! Le 19 juin dernier, les Français ont adressé un message à la majorité, devenue minorité présidentielle, et à Emmanuel Macron : ils ont décidé de vous placer sous le contrôle du Parlement et, à travers nos élus, sous le contrôle du peuple de France. Vous êtes la perdante de l’élection présidentielle ! Le 19 juin dernier, notre groupe a acquis une double responsabilité : celle de faire souffler à Paris le vent d’un renouveau démocratique, balayant l’arrogance, la brutalité institutionnelle, le mépris de la représentation nationale – marque de fabrique, il faut bien le dire, du premier quinquennat d’Emmanuel Macron (Applaudissements sur les bancs du groupe RN) ; et celle de faire entendre à la minorité présidentielle une voix nouvelle, dont elle semblait avoir oublié jusqu’au son : la voix du peuple de France.
Le 19 juin dernier, le Président de la République aurait pu, aurait dû, entendre ce nouveau message et faire acte d’humilité. Or, plus que jamais, aveugle au réel et aux basculements des rapports de force politiques, ni lui ni la minorité présidentielle ne semblent en avoir tenu compte. Le président lui-même continue à vouloir être tout à la fois Président de la République, Premier ministre et, même, ministre de tout, une sorte de boulimie du « en même temps » !
Jalouse ! En s’entêtant à exercer la fonction de cette manière, selon un logiciel dépassé, le président prend le risque de conduire le pays au blocage. Lorsqu’il aura épuisé son droit de tirage du 49.3, il exposera le pays à une crise politique, voire, compte tenu de la défiance qui s’exprimera probablement alors, à une crise de régime. Vous allez voter avec LFI ? En effet, utiliser le 49.3 constitue un mode de gestion du pays qui n’est ni apaisé ni avisé. Les recours à cette procédure ont, par leur brutalité symbolique, vocation à demeurer exceptionnels. C’est vrai. Le recours massif qui promet d’y être fait témoigne de la faiblesse du pouvoir, mais surtout d’une incapacité à fédérer, à accepter de soumettre l’action publique à l’écoute et à l’échange :… Voulez-vous finir avec Mélenchon ? …en somme, d’une inaptitude à jouer le jeu démocratique.
Emmanuel Macron ne peut ignorer cette règle d’airain : quand l’article 49.3 n’est pas utilisé pour mettre un terme à une obstruction parlementaire, mais seulement pour interdire le droit d’amendement du Parlement, il a pour effet immédiat d’user le pouvoir qui s’en sert. Vos 49.3 jumeaux sont de ceux-là ; ils ne sont pas brandis du fait d’un blocage de l’opposition – elle n’a jamais cessé de délibérer loyalement –, mais comme la marque d’un refus du Gouvernement de discuter, de rechercher des compromis et de composer. Le pouvoir ne trouvera pas, dans une méthode procédurale brutale, une façon louable de gouverner.
C’est la Constitution ! Avec deux 49.3 en deux jours, dès les premières discussions, ce mandat à peine commencé a déjà pris les allures d’une fin de règne. Une minorité présidentielle en plein doute, un exécutif barricadé dans ses certitudes, un gouvernement qui considère toute concession comme une capitulation, et plus généralement un régime qui n’a pas compris que quelque chose s’était passé il y a quatre mois : force est de constater que le pouvoir refuse toujours d’admettre qu’il a été institutionnellement invité à changer sinon de nature, du moins de comportement. Voilà la triste épopée solitaire d’un gouvernement usé avant d’avoir servi.
Nous sommes navrés de ne pouvoir poursuivre la discussion parlementaire et de nous voir privés du droit d’amendement sur des textes que nous avions à cœur d’améliorer, conscients des devoirs immenses que nous a confiés le peuple de France le 19 juin 2022. Face à la décision du Gouvernement de couper court à toute discussion parlementaire, notre attitude responsable demeure intacte. Nous avons montré, au début de la législature, que nous n’envisagions pas les capacités de censure parlementaire comme un jeu, une posture politicienne ou un élément de communication. La situation du pays est trop grave pour s’adonner à ce genre d’exercice incivique – nos concitoyens, à juste titre, ne comprendraient pas. Si le groupe Rassemblement national a décidé de proposer à la représentation nationale la censure du Gouvernement, ce n’est ni par plaisir ni par esprit d’opposition,…
Mais bien sûr ! Savez-vous vous-mêmes pourquoi ? …mais pour deux raisons principales. Tout d’abord, il nous semble illégitime de rayer, comme le Gouvernement compte le faire, les mesures qui ont été discutées et votées de manière éminemment démocratique. Il s’agissait pourtant de mesures essentielles au bien-être des Français – je pense par exemple à la taxation des superdividendes, au soutien de la nation aux bénévoles des associations, ou encore au crédit d’impôt pour les personnes en Ehpad. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Chacune de ces mesures constituait, pour les Français, des avancées significatives, concrètes et attendues pour leur vie quotidienne. Les ensevelir sous les artifices d’une procédure parlementaire relève d’une révocation certes légale, mais, je le pense, illégitime.
Au-delà de l’aspect politique – et même démocratique –, comment ne pas s’étonner que vous ayez laissé se dérouler des sessions jour et nuit, avec l’arrière-pensée originelle de tout annuler, de rayer d’un trait de plume tout le travail accompli ? C’est là, humainement et moralement, un état d’esprit qui m’échappe. Je fais aussi cette observation en pensant aux collaborateurs, aux administrateurs et à tous les personnels qui contribuent au fonctionnement de cette belle maison.
(Mêmes mouvements.) Ce sont des personnes qui ont des vies de famille, ce sont des auxiliaires de l’activité parlementaire dont le dévouement est admirable, et dont le travail doit être respecté en toute occasion. (Mêmes mouvements.) Vous les avez fait participer en toute connaissance de cause à un jeu de dupes. Cela manque terriblement d’élégance.
Ensuite, et surtout, nous présentons cette motion de censure parce que, plus largement, le Gouvernement – et j’aurais tendance à y inclure le Président de la République – semble avoir perdu tout contrôle de la situation.
Mais non ! La vie chère, qui a fait de l’alimentation et des carburants, produits essentiels à la vie des Français, des produits de luxe ; l’inflation incontrôlée qui ruine les épargnants et les retraités ; l’angoisse énergétique qui inquiète les familles, les chefs d’entreprise et les élus locaux ; la montée de pénuries involontaires ou spéculatives ; les perspectives invraisemblables de rationnement pour les produits les plus basiques ; nos entreprises stratégiques bradées jusque dans le domaine de la défense : en clair, un désordre économique s’installe.
Ajoutons à cela une crise sociale qui s’envenime, et qui ne pourra que s’aggraver dans les prochains mois du fait même du déni démocratique ; l’arrogance des féodalités et l’impunité des prédateurs d’en bas comme d’en haut ; un système éducatif malmené sous les coups de boutoir des islamistes, qui conduisent des professeurs à aller chaque jour au travail avec la peur au ventre
(Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES) ; la réalité de l’ensauvagement, le macabre décompte des morts et des blessés rythmant désormais chaque journal télévisé et s’affichant à la une des quotidiens (Applaudissements sur les bancs du groupe RN) ; le déluge migratoire qui nous ramène aux grandes vagues connues en 2015 (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES) ; des obligations de quitter le territoire français (OQTF) désespérément inexécutées, contrairement aux belles paroles de l’exécutif qui avait évoqué un objectif de 100 % ; un État qui s’affaisse chaque jour davantage, et qui voit ses services publics et ses corps – préfectoral et diplomatique, en particulier – sombrer sous les coups d’un nouveau management public anachronique et destructeur ; des menaces de guerre qu’aucune volonté politique ne cherche même à conjurer : il n’y a rien, jusqu’à la politique européenne d’un Emmanuel Macron brouillé avec tout le monde, qui échappe au naufrage d’une politique erratique, ballottée entre l’exaltation échevelée et l’apathie, entre des déclarations tonitruantes et un immobilisme exaspérant. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Vous racontez n’importe quoi ! Nous le constatons : rien ne porte à l’optimisme dans une situation dont – avouez-le, madame la Première ministre – vous êtes plus spectateurs et commentateurs qu’acteurs et décideurs. Mais c’est vous qui commentez ! Et rien, dans votre action, ne semble en mesure de redresser la situation : pas un secteur qui soit épargné, pas un citoyen qui ne se sente en insécurité économique, sociale ou physique, et surtout, pas une lueur d’espoir d’amélioration pour un pays qui se demande ce qui lui arrive, où il va, et ce qu’il a fait pour mériter cela. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Pire, comme si la situation n’était pas assez inflammable, le Gouvernement cherche d’inutiles provocations, comme cette réforme des retraites injuste et improductive que vous souhaitez imposer en janvier, au cœur même de la crise que vivent nos concitoyens.
Plutôt que d’interroger le merveilleux potentiel de notre si grande, de notre si belle France, vous ne cessez de vous conformer aux injonctions anachroniques d’une technocratie européiste périmée, indifférente au sort de notre peuple. Croyez-vous que le pays ait besoin de fractures supplémentaires, incapables que vous êtes de réprimer vos envies d’en susciter de nouvelles ? Quel besoin avez-vous d’ouvrir inutilement des fronts supplémentaires, quand vous ne parvenez déjà pas à contenir ceux qui consument l’énergie du pays ? Le douloureux précédent des gilets jaunes vous a-t-il si peu instruits ? L’intransigeance dont vous faites preuve à l’égard des Français les plus modestes, les plus insécurisés ou les plus dociles, vous vous gardez bien de l’exercer contre les revenants de Daech que vous réinstallez discrètement en France
(Mêmes mouvements) , contre les fraudeurs à la carte Vitale qui poursuivent leur entreprise de pillage social,… Comment osez-vous dire cela ? …contre les récidivistes qui pourrissent la vie des honnêtes gens, contre ceux qui attaquent les policiers et les pompiers, contre ceux qui squattent comme ceux qui cassent dans les manifestations et qui agressent dans les rues.
Le pays n’est pas présidé, n’est pas gouverné, n’est pas administré ; il n’est pas même géré, il n’est plus tenu.
N’importe quoi ! Cette situation hors de contrôle ne peut perdurer davantage dans un pays comme la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Aucun citoyen ne peut admettre que la puissance publique s’effiloche au point que sont compromises les activités essentielles du pays comme l’approvisionnement alimentaire ou énergétique, comme la liberté de circuler, comme la sécurité des personnes et des biens. C’est en dehors de la réalité ! Aucun républicain ne peut admettre que nos valeurs fédératrices, comme la laïcité, soient ostensiblement bafouées, défiées ou piétinées. Aucun Européen véritable ne peut voir sans regret l’impérialisme de l’Union européenne faire douter de la belle idée européenne. Aucun patriote ne peut se satisfaire de la dégringolade dans laquelle un pouvoir inconscient entraîne la patrie.
Je vous l’ai dit : une motion de censure ne relève pas, pour nous, d’un jeu politique, ni même d’une sorte d’exercice imposé.
Un peu quand même ! Elle est pour nous, lorsque les circonstances l’exigent, l’expression solennelle et responsable d’une défiance républicaine et démocratique face à un pouvoir gravement défaillant. (Mêmes mouvements.) Parce que seul l’intérêt national guide ses paroles et ses actes, le groupe que j’ai l’honneur de présider votera également la motion de censure présentée en des termes acceptables de l’autre côté de l’hémicycle. (Mmes et MM. les députés du groupe RN se lèvent et applaudissent.) C’est le fer à cheval ! Je le dis, pour que personne, même en haut lieu, ne se méprenne : au Rassemblement national, nous ne craignons pas les menaces de dissolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Le vent nouveau qui s’est levé le 19 juin 2022 n’est pas près de retomber. Nos places ne nous importent pas. Ça m’étonnerait ! Elles comptent moins que nos convictions, moins que l’intérêt bien compris et bien défendu des Français. Que chacun le sache : notre confort personnel ne nous importe pas lorsque le sort du pays est en jeu. (Applaudissements nourris sur les bancs du groupe RN.) Si, demain, nous devons repartir aux élections, nous y sommes prêts ; nous sommes prêts à rendre compte de nos votes et de nos prises de position, mais surtout, prêts à proposer au pays un grand projet alternatif. Et prêts à voter avec la NUPES ! Pour la France, nous le pensons de tout notre cœur, le plus vite sera le mieux. Aujourd’hui, devant tant d’échecs et tant d’incertitudes, l’urgence, c’est l’alternance ! (Mmes et MM. les députés du groupe RN se lèvent et applaudissent longuement.) C’est le chaos que vous voulez ! La parole est à M. André Chassaigne. Ce n’est pas la première fois qu’un gouvernement recourt à l’article 49.3 pour imposer un projet de loi. C’est la quatre-vingt-dixième fois ! Ce n’est pas la première fois qu’un gouvernement utilise cette procédure la plus antidémocratique de la Constitution. Chaque fois, cette dérobade constitutionnelle est vécue sur nos bancs, d’où qu’elle vienne, comme ce qu’elle est : une brutalité à l’encontre de la représentation nationale, donc à l’encontre du peuple. D’un commun accord avec le Rassemblement national, bravo ! Ça va ! C’est ce qui rend, chaque fois, cette violence institutionnelle insupportable.
Cependant, le présent 49.3 est une potion plus amère que les autres : elle a pourtant le goût du 49.3, elle ressemble à du 49.3, mais pour vous, elle n’est pas du 49.3 ; elle est un prétendu remède pour soigner la dangereuse irresponsabilité des opposants.
C’était ça sous Rocard ! C’est, selon vous, un 49.3 pour faire vivre la démocratie – comme si vous défiliez en Lamborghini pour sauver le climat ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES et sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
Madame la Première ministre, votre élixir marquera l’histoire politique du pays. Je vous suggère de le mettre dans un bocal, orné d’une étiquette « 49.3 première cuvée Élisabeth 2022 ». Vous poserez le bocal sur la cheminée de Matignon, et il servira à instruire les générations futures. On va en avoir beaucoup, des comme ça ! Vous avez cependant oublié un ingrédient essentiel : le résultat issu des urnes aux législatives, qui, en vous privant d’une majorité absolue, vous demande – vous oblige même – à gouverner autrement et à rééquilibrer les pouvoirs entre l’exécutif et le législatif. Dans la continuité des pratiques brutales qu’a eues l’exécutif ces cinq dernières années, votre remède de cheval tourne le dos à la majorité des électrices et des électeurs, qui voyaient le rééquilibrage des forces au sein de notre assemblée comme une bonne nouvelle pour la vie politique du pays. En faisant faner cette espérance, vous faites courir un risque vertigineux à notre démocratie : celui de détourner définitivement le peuple de la vie politique, ou de le pousser dans les bras du fascisme, qui ne peut que s’épanouir dans de telles carabistouilles.
Madame la Première ministre, ici même, lors de votre discours de politique générale, vous aviez pourtant promis de changer vos pratiques. Prétendant avoir entendu les Français, vous vous étiez engagée à mener un dialogue soutenu et une recherche active de compromis ; mais aujourd’hui, imprégnée de l’autoritarisme des maîtres à penser du nouveau monde, vous reniez vos engagements. Loin de répondre aux attentes de nos concitoyens par une revalorisation du Parlement et par un rééquilibrage du pouvoir, vous avez préféré interrompre les débats en rejetant tout compromis. Des compromis avaient pourtant été trouvés à la faveur d’amendements adoptés au vu et au su de tous, mais l’Élysée, Bercy et Matignon ont cuisiné en vase clos un gloubi-boulga qui n’incorpore qu’une petite dizaine d’amendements des oppositions, sur les 117 introduits dans le texte.
Où est le compromis quand vous rayez d’un trait de plume ce que la majorité des représentants du peuple a voté ? Où est le compromis quand l’amendement sur la taxation des superdividendes, adopté à l’initiative de membres de votre majorité, est écarté parce que, paraît-il, le ministre des finances aurait fait du chantage à la démission ?
Sans majorité, vous êtes contraints, dites-vous, d’user du 49.3. Mais avec une once de panache et une pincée de démocratie, vous auriez pu mener les débats à leur terme et enrichir votre projet des amendements votés à la majorité par les députés, par l’Assemblée nationale souveraine !
Certes, j’en conviens, à moins d’un remaniement copernicien du texte, notre groupe n’aurait pas voté ce projet de loi, même amélioré ici ou là par quelques amendements. En effet, le budget que vous proposez pour la France traduit un projet politique qui n’est pas le nôtre, un projet politique au rebours des attentes et des besoins d’un pays en proie à une crise d’une terrible violence pour les plus faibles, mais très profitable à une poignée. C’est vrai, nous aurions rejeté ce budget poursuivant envers et contre tout un agenda libéral, que ne compensent évidemment pas les quelques dispositifs prévus pour soutenir les ménages et les entreprises les plus en difficulté.
Certes, les chèques que vous multipliez – le chèque énergie, le chèque inflation, la prime d’activité – seront un soulagement, car les plus pauvres ne peuvent se permettre de refuser l’aumône. Mais, pour reprendre Victor Hugo : « Vous voulez les misérables secourus, [nous voulons] la misère supprimée. »
(Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES et sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)
Non seulement vos chèques sont insuffisants, mais ils sont surtout inefficaces, car ils sont distribués en lieu et place d’une indispensable hausse des salaires et des retraites, qui seule pourrait faire face à l’inflation qui nous frappe de plein fouet. Cela, vous n’en voulez pas. S’il est besoin d’une preuve : alors que votre main est ferme et forte pour réquisitionner les salariés en grève, votre voix est chevrotante et timide pour suggérer au Medef d’augmenter les salaires. Ce sont pourtant ces hausses de salaires, au moyen de l’échelle mobile des salaires et d’une hausse significative du Smic, qu’il faut imposer sans trembler et sans tarder. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES).
Ce budget aurait dû annoncer des investissements publics massifs. Notre pays a besoin de relocaliser diverses productions, de renouveler son mix énergétique, d’investir dans la rénovation thermique, de développer les transports publics, d’investir dans les hôpitaux. C’est ce qu’attendent les Français. C’est ce que contient la proposition de budget défendue collectivement par les groupes de la NUPES.
Ce n’est pas ce que vous avez décidé. Fidèles à vous-mêmes et à votre logiciel néolibéral, vous continuez à faire des cadeaux aux plus aisés, vous spoliez la France de plus de 8 milliards d’euros en supprimant la CVAE, vous freinez des quatre fers lorsqu’il s’agit de taxer les superprofits. Pourquoi ? Pour satisfaire les boulimiques de l’argent volé, ceux qui voient leurs revenus augmenter en pleine crise, ceux qui sniffent la plus-value comme de la poudre blanche.
(Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR-NUPES et Écolo-NUPES.) C’est très limite, ça ! Avec votre politique, la France des dividendes saigne à blanc la France du travail. (Mme Sophia Chikirou applaudit.)
Votre budget acte également l’abandon des collectivités territoriales, qui sont pourtant le premier maillon de la République ; les élus de tous bords le qualifient de « black-out territorial ». Après les baisses de la DGF (dotation globale de fonctionnement) et la suppression des impôts locaux, après la crise sanitaire qui a coûté près de 7 milliards d’euros aux collectivités, face à l’inflation et à l’explosion des factures énergétiques, vous auriez dû nous présenter des mesures à la hauteur, afin d’aider nos concitoyens qui ont tant besoin de l’accompagnement des services publics. Au lieu de cela, vous allez contraindre bon nombre de communes à fermer des équipements sportifs, à baisser le chauffage à 17o C dans les écoles,… C’est n’importe quoi ! …à réduire les plages horaires d’ouverture des bibliothèques.
Votre budget confirme sans ambiguïté votre attachement idéologique à la dérégulation des marchés, malgré son coût phénoménal pour les finances publiques. Le bouclier tarifaire visant à limiter la hausse des factures d’énergie coûte 45 milliards d’euros, alors que les coûts réels de production en France sont actuellement dix fois moins élevés que les prix du marché. C’est une absurdité eu égard aux profits engendrés par les énergéticiens et à l’insuffisance de la protection apportée non seulement aux ménages les plus fragiles, mais également aux TPE (très petites entreprises) et PME (petites et moyennes entreprises), qui sont au bord du gouffre. Les profits du seul groupe TotalEnergies se sont élevés à 18,8 milliards d’euros au premier semestre 2022 ! Face à cela, vous brandissez votre contribution exceptionnelle des énergéticiens, qui ne rapportera que 200 millions d’euros en 2023.
(Protestations sur les bancs des groupes RE et Dem.) Non ! Quinze milliards ! Les cris des Playmobil effarouchés réjouissent mes oreilles ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES. – Protestations sur quelques bancs du groupe RE.)
C’est vrai, nous n’aurions pas voté votre projet de loi, quand bien même il aurait intégré des modifications marginales adoptées par l’Assemblée nationale. En effet, si ces modifications sont indispensables pour répondre à l’urgence, elles n’auraient pas suffi pour conduire une politique de bifurcation solidaire et écologique.
Les députés communistes et du groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES défendent un budget au service de la justice sociale et écologique, au service des laissés-pour-compte de la répartition des richesses, au service des collectivités territoriales, un budget au service de nos compatriotes d’outre-mer accablés par la misère et la difficulté. Un budget au service du peuple ! En faisant le choix d’escamoter le débat pour écarter toutes les modifications qu’auraient apportées une majorité des députés, le Gouvernement s’est irréversiblement détaché du peuple.
Les députés de notre groupe voteront donc la motion de censure déposée par les différents groupes de gauche de l’Assemblée nationale pour défendre un projet de gauche. Ils ne voteront pas la motion déposée par le Rassemblement national
(« Ah ! » sur les bancs du groupe RN), porteuse d’un projet d’extrême droite mortifère et tournant le dos aux intérêts du peuple. (Les députés des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES se lèvent et applaudissent longuement. – Vives protestations sur les bancs du groupe RN.) Inutiles ! Vous êtes complices ! Vous êtes les idiots utiles du Gouvernement ! La parole est à M. Charles de Courson. Le recours à l’article 49, alinéa 3 constitue toujours un échec politique. Depuis que la Ve République existe, cet instrument juridique à la disposition du Gouvernement traduit la prééminence du pouvoir exécutif sur le pouvoir législatif. Ce déséquilibre dans nos institutions nuit au fonctionnement d’une démocratie vivante et équilibrée : telle est la position défendue depuis toujours par le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires.
L’utilisation du 49.3 affaiblit le gouvernement qui y recourt, puisqu’il démontre une certaine incapacité à trouver les bons équilibres. Pire, il déplace le combat politique depuis l’Assemblée nationale vers la société civile, voire dans la rue. En effet, il faut rappeler qu’au premier tour des élections législatives, les candidats de la majorité sortante n’ont obtenu qu’un quart des voix des 48 % d’électeurs qui se sont déplacés pour voter, soit 12 % des voix des électeurs inscrits.
Cette situation dangereuse est aggravée par la perspective de la multiplication des recours au 49.3. Après la première partie du projet de loi de finances, c’est la troisième partie du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) qui sera votée grâce à cet article.
Elle ne sera pas votée, justement, mais adoptée sans vote ! La seconde partie du PLF et la quatrième partie du PLFSS feront également l’objet d’un 49.3, situation qui se reproduira lors de la seconde lecture à l’Assemblée nationale, puis lors de la dernière lecture. Au total, le 49.3 sera utilisé une dizaine de fois. Il ne reste que le projet de loi de programmation des finances publiques pour laquelle vous ne recourrez pas à cet outil, de peur de ne pouvoir l’employer lors de l’examen du projet de loi de réforme des retraites prévu au début de l’année 2023.
S’agissant des retraites, notre groupe a toujours défendu une réforme structurelle, juste et effectuée de concert avec les organisations syndicales réformistes. Une telle réforme est complexe en raison de l’existence de quarante-deux régimes et de nombreuses questions délicates : cas des carrières longues, pénibilité, avenir des régimes spéciaux, petites retraites…
Mais revenons-en aux deux motions de censure dont nous débattons. Pourquoi et comment en sommes-nous arrivés là ?
Le Gouvernement a dénoncé l’attitude des oppositions, le ralentissement des débats. Je regrette, pour ma part, que nous n’ayons pu aller au bout de l’examen des amendements en séance publique, comme nous y étions parvenus en commission des finances. Nous aurions pu siéger le week-end, nous y étions prêts. Nous l’avons d’ailleurs déjà fait par le passé.
Madame la Première ministre, dans votre discours de politique générale du 6 juillet, vous présentiez une nouvelle méthode de gouvernance, rendue nécessaire par la nouvelle configuration politique dans laquelle les oppositions détiennent une majorité absolue. Vous affirmiez : « Nous mènerons pour chaque sujet une concertation dense. Nous aborderons chaque texte dans un esprit de dialogue, de compromis et d’ouverture. »
J’ai participé, au nom de mon groupe, aux fameux dialogues de Bercy. Le dialogue n’était pas décisionnel, puisque les deux représentants du Gouvernement n’ont pris aucun engagement. En outre, il était bien trop tardif, puisque le PLF avait déjà été soumis pour avis au Conseil d’État. J’en veux pour preuve qu’aucune des propositions formulées à cette occasion ne figurait dans le texte initial déposé à l’Assemblée nationale.
Notre groupe maintient les trois principales critiques qu’il avait alors formulées à l’égard de ce projet de loi de finances pour 2023.
La première critique concerne l’absence d’économies, dans un contexte où la situation dramatique des finances publiques imposerait d’en faire. Vous ne réduisez ni le déficit ni la dette publique. Enfin, vos projections reposent sur des prévisions macroéconomiques très optimistes, d’ores et déjà dépassées. Le vote sur le projet de loi de programmation des finances publiques 2023-2027 nous donnera l’occasion d’en reparler demain, mais je vous le dis dès à présent, madame la Première ministre : la trajectoire de cinq ans que vous projetez pour les finances publiques est déjà obsolète.
La seconde critique concerne le manque de ciblage de vos aides exceptionnelles. Oui, l’inflation que nous connaissons appelle des réponses fortes. Le choc que subissent nos économies s’annonce durable. Il sera supporté par les ménages, les entreprises, les collectivités territoriales et l’État, mais cet effort doit être justement réparti.
Ainsi, le coût du bouclier énergétique sera considérable : il est estimé à 45 milliards d’euros en 2023, dont 16 milliards d’euros inscrits dans le PLF, principalement destinés aux ménages. À tous les ménages, sans distinction ; c’est bien là le problème. Toutes les personnes ici présentes, ministres et députés, en bénéficieront. Est-ce normal ? Il serait plus économe et plus juste de cibler le bouclier tarifaire sur les seuls ménages les plus modestes.
Un mot en faveur des entreprises. Celles qui consomment beaucoup d’énergie se trouvent dans une situation dramatique. Les dispositifs d’aide sont complexes – vous avez dû les revoir à plusieurs reprises –, mais insuffisants.
Eh oui, il faut aller plus loin ! À l’époque des dialogues de Bercy, il n’existait que le décret pris en juillet, dont vous avez vous-même reconnu, monsieur Le Maire, qu’il était complètement inapplicable. Vous faisiez valoir que vous prépariez un second dispositif. J’espère que vous nous en proposerez un troisième dans le dernier projet de loi de finances rectificative pour 2022, que nous aurons à examiner dans deux semaines environ. À cette occasion, nous verrons si les mesures proposées sont adaptées à la situation.
Enfin, la troisième critique que nous formulons concerne les baisses d’impôt non financées. Est-il si urgent et opportun de supprimer la CVAE ?
(« Mais oui ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) À terme, cette suppression coûtera 8 milliards d’euros par an. En outre, elle profite avant tout aux grandes entreprises, puisque les petites entreprises en sont déjà exonérées. C’est exact, il a raison ! Seuls 24 % des 8 milliards d’euros en question iront à l’industrie. Compte tenu de l’état des finances publiques, n’auriez-vous pas pu différer cette mesure… La reporter aux calendes grecques ? …ou la concentrer sur l’industrie, ce qui aurait divisé son coût par quatre ?
De même, n’auriez-vous pas pu reporter la suppression de la taxe d’habitation pour les 20 % des ménages les plus aisés, qui représente une perte de recettes de 2,8 milliards d’euros ?
On n’a pas eu le choix, c’est un avis du Conseil constitutionnel.
Quid de la suppression de la contribution à l’audiovisuel public adoptée en août dernier, occasionnant une perte de 3 milliards d’euros pour les caisses de l’État ?
À ces trois critiques, j’ajoute une alerte sur l’état des finances des collectivités territoriales. Je réfute la petite rengaine que nous avons entendue, tant en commission qu’en séance, selon laquelle leur santé financière serait très bonne. Les collectivités du bloc communal doivent encaisser l’inflation pour chauffer les piscines et les écoles, les départements et régions doivent la subir pour chauffer les collèges et les lycées. Les départements font face à une hausse de leurs dépenses sociales. Nous approuvons donc la reprise par le Gouvernement d’un amendement de nos collègues du groupe Horizons prévoyant un filet de sécurité à hauteur de 1,5 milliard d’euros pour les collectivités territoriales ; mais il faut rappeler que cette mesure ne figurait pas dans le texte initial du PLF et qu’il a fallu que l’Assemblée nationale fasse pression pour l’y introduire.
Quelles dispositions nouvelles contient le texte final de la première partie du PLF ? En commission et en séance, nous avions procédé à des modifications substantielles. J’entends certains membres du Gouvernement nous dire que celles-ci n’avaient pas de cohérence. Je n’aurai pas la cruauté de les interroger sur celle de certaines mesures gouvernementales !
(Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT et sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Au demeurant, je leur rappelle que ce n’est pas à eux, mais au Parlement qu’il revient de voter la loi.
En définitive, peu de ces modifications sont conservées. La contribution exceptionnelle sur les superdividendes, proposée par notre ami Jean-Paul Mattei
(Mêmes mouvements. – Mme Maud Petit applaudit également) , qui avait au moins le mérite de susciter le débat, a été écartée alors qu’elle émanait de la majorité. Il en va de même pour l’excellent amendement visant à créer un crédit d’impôt pour les personnes résidant dans des Ehpad (Mme Raquel Garrido applaudit) , qui provenait également de la majorité. Non, du groupe Socialistes ! Notre groupe a obtenu quelques menues avancées, madame la Première ministre – notre président a eu, ces derniers jours, plusieurs échanges avec vous à ce sujet. On en compte neuf, proposées par notre groupe, seul ou avec d’autres, de la majorité ou de l’opposition. Je pense à la demi-part fiscale pour les veuves d’anciens combattants, au relèvement de la valeur faciale des titres-restaurants ainsi qu’à des amendements concernant les territoires ultramarins ou la prorogation et l’amélioration du crédit d’impôt pour les investissements en Corse.
Nous avons également soutenu plusieurs amendements visant à lutter contre la spéculation immobilière, notamment dans les zones comptant un grand nombre de résidences secondaires – en Corse, en l’espèce ; nous espérons que la navette parlementaire permettra de maintenir ce dispositif, en l’améliorant et en l’étendant à d’autres territoires.
C’est au regard de ces différents éléments que notre groupe a déterminé son vote sur les motions de censure. Il n’y a pas de suspens : la NUPES votera sa propre motion de censure, le groupe RN votera la sienne, mais il votera également celle de la NUPES
(« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe RN) , et les deux seront rejetées. Sauf si vous votez pour ! Au sein de notre groupe, nous en avons débattu et nous avons fait le choix de ne soutenir ni l’une ni l’autre, en responsabilité. Vous manquez de courage ! Pourquoi ? Non seulement parce que nous ne voulons pas ajouter du chaos à l’instabilité (Exclamations sur les bancs du groupe RN) mais aussi et surtout Le chaos, c’est eux ! …– écoutez-moi bien – parce que nous estimons que le 49.3 ne met pas fin au débat parlementaire, dès lors qu’il ne s’applique qu’à la première partie du PLF, et en première lecture. Nous arrêterons donc la position finale de notre groupe en seconde lecture. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.) Suspense ! La parole est à Mme Aurore Bergé. Nous sommes réunis aujourd’hui parce que le Gouvernement a engagé sa responsabilité dans le cadre de l’article 49.3 de la Constitution et que deux groupes de l’opposition ont réagi par le dépôt d’une motion de censure. L’équilibre de nos institutions est ici pleinement respecté. Eh oui ! C’est leur force même que de permettre cette pondération. Bla bla bla ! N’en faites pas trop, quand même ! Nous sommes tous dépositaires d’un héritage : la Constitution de la Ve République. L’ensemble des députés du groupe Renaissance assument cette fidélité. Fidélité au subtil équilibre des pouvoirs que notre texte fondamental organise : un président légitime, un gouvernement qui a les moyens d’agir, une Assemblée nationale ayant la capacité de légiférer en toute liberté. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Voilà notre cadre commun.
Notre équilibre institutionnel est clair : il n’y a ni déni de démocratie ni passage en force. Il y a, d’un côté, le refus du blocage et de l’enlisement pour donner un budget à la France et, de l’autre, une réponse politique des oppositions – ou plutôt des réponses politiques, aussi disparates que le sont vos groupes, chers collègues.
(Mêmes mouvements.) Ces motions de censure, c’est votre droit et votre choix de les déposer. Nous verrons ce soir, lorsque nous connaîtrons le résultat du vote souverain des députés, si ces réponses sont majoritaires ou minoritaires. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Jean-Paul Mattei applaudit également.)
Dès lors, la question que nous devons nous poser est simple : cette situation était-elle évitable ? Depuis plusieurs semaines, nous entendons sur les bancs de cet hémicycle que le Gouvernement aurait voulu amputer le débat démocratique, que le débat n’aurait pas eu lieu, que la démocratie aurait été mise au placard. C’est vrai ! S’agissant du PLFSS, c’est le cas ! Aucun député de l’opposition n’a eu l’honnêteté de reconnaître que nous avons échangé, débattu, travaillé, amendé pendant près de soixante heures en séance publique. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES . ) Nous avons fait notre travail : nous avons légiféré. Surtout, aucun député de l’opposition n’a dit qu’il serait prêt à voter le budget, quand bien même celui-ci serait revu et amendé. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE.) C’est faux ! Vous avez même tous dit par anticipation que vous vous y opposeriez.
Ce fut le cas de Jean-Luc Mélenchon et de l’extrême gauche. Dès fin août, vous avez annoncé, chers collègues de La France insoumise, que vous ne prendriez pas part au débat et, dès la présentation de notre budget, fin septembre, vous avez appelé à voter les motions de censure qui seraient déposées sur celui-ci. Vous avez été entendus par l’extrême droite, qui votera pour la vôtre !
(Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
Ce fut également le cas des Républicains, notamment de Laurent Wauquiez,… Il n’est pas député ! …qui, sans laisser de place au doute, mettait en garde, dès fin août, les députés LR : « Il y a des symboles forts qui placent un élu dans la majorité ou dans l’opposition : c’est le cas du vote du budget. »
Même son de cloche du côté de l’extrême droite, qui a refusé de prendre part aux discussions engagées dans le cadre des dialogues de Bercy.
Allons plus loin : cette situation est-elle amenée à se répéter sur les autres textes budgétaires ? Sortons des faux-semblants et du jeu de dupes qui fatiguent et lassent les Français, lesquels n’ont pas les yeux braqués sur notre hémicycle. La réponse est claire : nous ne serons jamais du côté du blocage. Nous continuerons à débattre, nous permettrons que des propositions issues des oppositions puissent être adoptées à l’unanimité, comme nous l’avons fait pour la demi-part fiscale accordée aux veuves des anciens combattants ou pour la protection de nos agriculteurs.
(Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Nous demandons bien entendu au Gouvernement d’entendre ce qui fait consensus ici pour démontrer aux Français la force et l’utilité du débat parlementaire, et donc d’intégrer ces compromis à sa copie finale. C’est ce qu’a fait la Première ministre.
Mais soyons clairs : qu’ont apporté au débat parlementaire les oppositions ? La première réponse est sans appel : 8 milliards de dépenses supplémentaires !
(Mêmes mouvements.) Avec les recettes en face ! C’est nettement moins que ce que vous avez dépensé en plus ! Alors que nous n’avons examiné qu’un tiers de vos propositions, chers collègues, vous avez déjà adopté 8 milliards de dépenses supplémentaires ! (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.) Ce ne sont pas des dépenses supplémentaires, ce sont de moindres recettes ! Comment ces dépenses supplémentaires seraient-elles financées ? Par de la dette ou de nouveaux impôts prélevés sur les Français. À cela, nous répondons par la cohérence d’une politique économique et fiscale que nos concitoyens nous ont demandé de poursuivre : ni dette ni impôt ou taxe supplémentaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Vous ne manquez pas de culot ! Avec autant de dettes… Notre politique économique a fait ses preuves. Pour la troisième année consécutive, la France est le pays le plus attractif pour les investissements étrangers. Ce sont ces investissements qui ont permis de créer plus de 180 000 emplois en quatre ans et de relocaliser des industries, avec près de 100 000 emplois créés et confortés. Une politique pour l’emploi et la formation des jeunes, grâce au plan « 1 jeune, 1 solution » qui a permis à près de 4 millions d’entre eux de trouver un emploi, un apprentissage, une formation, et de bénéficier de l’accompagnement nécessaire. Bref, tout va bien dans notre pays ! Une politique économique résolument engagée en faveur du plein emploi, qui nous permet d’avoir le taux de chômage le plus faible depuis quinze ans. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Une politique économique qui permet, ne vous en déplaise, de rétablir les comptes publics. Vous ne manquez pas de toupet ! Ce sont les salaires qu’il faut augmenter ! Nous avons en effet un objectif clair : revenir sous les 3 % de déficit d’ici à 2027, pour commencer à rembourser notre dette dès 2026. La dette, la dette, la dette… Enfin, une politique économique qui est un enjeu de justice. Je pense à la contribution qui s’appliquera aux profits exceptionnels des énergéticiens en Europe. Notre réponse est européenne ; c’est ainsi qu’elle est cohérente et puissante. Eh oui ! Cette contribution sera prélevée directement par chaque État membre sur les activités qui s’exercent sur son propre territoire. Nous avions déjà des dispositifs pour mettre à contribution les profits exceptionnels des producteurs d’électricité ; l’échelle européenne permet de les amplifier et de récupérer 7 milliards d’euros supplémentaires. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
Après l’irresponsabilité, quelle autre réponse les oppositions ont-elles apportée ? Celle de l’incohérence, ou plutôt d’une cohérence qui a pour seul arbitre des alliances de circonstance dont l’unique but est de faire chuter le Gouvernement et la seule majorité existant dans cet hémicycle : la majorité présidentielle ! (Mêmes mouvements.) La minorité présidentielle ! En vérité, il n’y a que deux options. Soit vous formez une majorité, et vous devez alors dire aux Français que vous défendez le même projet,… C’est de votre budget qu’il s’agit ! …que vos options politiques sont équivalentes et que, tous alliés, vous formeriez, ici, une grande coalition allant de l’extrême droite à l’extrême gauche, de la gauche de gouvernement à la droite républicaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Dites alors aux Français que vous seriez prêts à gouverner ensemble, dans un même gouvernement ! (Vifs applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs blancs du groupe Dem.) Vous faites de la politique-fiction ! Cela n’existe pas. Si vous refusez cette option, admettez l’évidence : ces alliances sont contre nature et il n’y a pas de majorité alternative à la seule majorité cohérente et de projet : la majorité présidentielle ! (Les députés du groupe RE se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et HOR.)
En définitive, pour ou contre quoi vous prononcerez-vous ce soir ? La question n’est pas celle de la durée de nos débats ou du moment choisi par le Gouvernement pour engager sa responsabilité. La seule question qui vaille est celle de savoir ce que contient ce budget. De la dette, de la dette, de la dette ! Voterez-vous pour ou contre une école de la réussite, dont les enseignants gagnent plus et ne commencent pas leur carrière à moins de 2 000 euros net par mois ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) Pour ou contre la création des 4 000 postes d’AESH – accompagnants d’élèves en situation de handicap – que les familles attendent ? (« Pour ! » sur les bancs du groupe RE.) Pour ou contre les 3,5 milliards d’euros d’aides en faveur de l’alternance ? (Mêmes mouvements.) Pour ou contre une justice dotée de plus de moyens, plus de magistrats et de greffiers ? (Mêmes mouvements. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.) Voterez-vous pour ou contre la construction de 15 000 nouvelles places de prison ? (« Pour ! » sur les bancs du groupe RE.) Il n’y a pas de vote ! Voterez-vous pour ou contre la hausse de 8 % des crédits alloués à la justice pour la troisième année consécutive ? (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Voterez-vous pour ou contre les 660 millions d’euros consacrés aux frais de justice afin de renforcer certaines politiques pénales, dont la lutte contre les violences intrafamiliales ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Pour ou contre le soutien aux collectivités territoriales ? En 2023, après une baisse de 11 milliards d’euros entre 2013 et 2017, la DGF non seulement ne baisse pas pour la sixième année consécutive, mais augmente de 320 millions d’euros. (Mêmes mouvements.) Voterez-vous pour ou contre cette hausse historique ?
Voterez-vous pour ou contre des services publics toujours plus proches des citoyens
(Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES) , grâce à une augmentation historique des effectifs des préfectures et des sous-préfectures ? La sous-préfecture de Château-Gontier, vous l’avez fermée, nous la rouvrons ! La sous-préfecture de Clamecy, vous l’avez fermée, nous la rouvrons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
Voterez-vous pour ou contre l’augmentation de 15 % du budget consacré à la transition écologique ? (Protestations sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.) Oui, nous voulons voter ! Mais vous avez utilisé le 49.3 ! Il n’y a pas eu de vote ! Pour ou contre la rénovation énergétique des bâtiments, le maintien des aides à l’acquisition de véhicules moins polluants, le développement des transports en commun ou le déploiement du plan Vélo ? Pour ou contre la hausse de 2,3 milliards d’euros des crédits alloués à MaPrimeRénov’ ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Voterez-vous enfin pour ou contre la création de 3 000 postes supplémentaires de policiers et gendarmes ? Pour ou contre 200 nouvelles brigades de gendarmerie dans nos territoires ruraux ? Mais vous recourez au 49.3 ! De quel vote parlez-vous ? Telles sont les seules questions qui se posent. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
Si vous adoptez cette motion de censure, voilà ce contre quoi vous voterez. Vous voulez vous y opposer, c’est votre droit. Mais il faut que les Français le sachent. Nous, nous sommes au rendez-vous du débat, de la responsabilité, de la cohérence, de la démocratie et de la vérité. Et nous continuerons à l’être ! (Les députés du groupe RE se lèvent et applaudissent longuement. – Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et HOR.) La parole est à Mme Mathilde Panot. Ci-gît la démocratie parlementaire (Exclamations sur les bancs du groupe Renaissance) , avec pour épitaphe : « 49.3, deuxième épisode ». (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Le niveau chute brutalement ! Madame la Première ministre, en moins de vingt-quatre heures, vous avez activé par deux fois la manœuvre favorite des autoritaires, de ceux qui gouvernent sans mandat et sans majorité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Pourquoi ? Ce n’est pas parce que les débats s’éternisaient : nous avions débattu du budget pendant neuf jours contre onze l’année dernière, et nous n’avons consacré qu’un seul jour à l’examen de celui de la sécurité sociale. Pourtant, nous avions jusqu’à la fin du mois de décembre pour voter ces budgets. Fainéants ! Ce n’est pas non plus parce que les amendements du Gouvernement étaient refusés, ni même à cause d’un quelconque blocage. Non, vous avez décidé que ces budgets seraient adoptés sans vote, parce que le résultat de nos délibérations vous a déplu. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES.)
Création d’une taxe sur les super-dividendes, rétablissement de l’ exit tax , gain de 200 euros par mois pour les résidents d’Ehpad, soumission du bénéfice des exonérations de cotisations sociales au respect de l’égalité entre les femmes et les hommes : toutes ces mesures d’intérêt général ont été votées à la majorité de cette assemblée, parfois même avec les voix des députés de vos rangs. Mais non ! C’est parce que vous votez avec le RN ! En activant l’article 49.3 dans toutes ces circonstances, vous montrez votre aversion pour le fonctionnement normal de la démocratie.
Depuis, vous vous êtes livrée à des magouilles en coulisses, vous réservant le droit de séparer le bon grain de l’ivraie. Vous avez évacué plus de la moitié des amendements votés à l’Assemblée. Ainsi, vous remplacez la délibération par le fait du prince. Pour l’un et l’autre texte, pas moins de 85 % et 92 % des amendements retenus proviennent exclusivement de votre camp.
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Quel sectarisme ! Madame la Première ministre, deux Français sur trois ne veulent pas de 49.3, et vous leur en donnez un double ! En Macronarchie, l’arbitraire fait loi. Oh là là… Comment ne pas voir ce continuum autoritaire depuis cinq ans ? Vingt et une lois promulguées réduisent les libertés individuelles. Le pouvoir s’exerce par ordonnances ou depuis un Conseil de défense. La matraque est votre seule réponse aux mouvements sociaux, quand vous ne choisissez pas la réquisition. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Désormais, vous gouvernez au rythme d’un 49.3 par jour. Depuis cinq ans, vous maintenez votre pouvoir sur tout ce que la Ve République a de plus brutal. Tout cela n’a rien d’un hasard : le macronisme est un autoritarisme. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Protestations sur les bancs du groupe RE.) Vous êtes bien placée pour parler, avec Mélenchon ! Ainsi, vous serez bien en peine de rejeter un quelconque blocage sur le dos des oppositions. Aucun de vos arguments ne résiste une seule seconde à l’examen.
Comme Mme Bergé, vous nous dites : « vous ne souhaitiez pas voter ce budget de toute façon ». Au bout de cinq ans, je pensais que vous vous étiez habitués. Visiblement, le désaccord revêt encore une forme de mystère à vos yeux. Pour la millième fois, nous sommes l’opposition, nous avons été élus pour défendre un programme radicalement différent du vôtre.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Elsa Faucillon applaudit également.)
Vous dites que votre texte a été « dénaturé », vous ne comprenez donc pas la différence subtile entre le budget que vous nous soumettez et celui qui sera adopté. C’est dans cet interstice que réside la démocratie. Ne vous en déplaise, l’Assemblée nationale n’est pas la photocopieuse de l’exécutif ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Vous prétendez que les débats auront au moins servi à « éclairer nos compatriotes ».
Que dire de cette vision toute personnelle du débat parlementaire, où nous délibérons pour la beauté du geste ? En Macronie, les députés étudient un texte, parfois jusqu’à minuit, en attendant le couperet du 49.3. Pour vous, la démocratie est donc décorative. Que cette conception convienne aux députés Renaissance, cela ne fait aucun doute. Ils ont rendu un bel hommage à la servitude volontaire dénoncée par La Boétie en applaudissant copieusement vos coups de force.
(Mêmes mouvements.) Bravo ! Vous nous dites encore que la seule majorité qui vaille est celle qui siège sur les bancs du groupe Renaissance. Alors que vous ne disposez que d’une majorité relative, vous fantasmez une majorité simple, car vous êtes nostalgiques de la majorité absolue des cinq dernières années. La réalité est cruelle : vous avez été battus en juin dernier. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI. – Exclamations sur les bancs du groupe RE.) C’est Mélenchon qui a été battu ! C’est vous qui avez été battus ! Mais une défaite est un détail pour tout mauvais perdant. En vérité, vous ne savez plus à quelle légitimité vous adosser. Nous avons même surpris Bruno Le Maire qui convoquait le souvenir de l’élection d’Emmanuel Macron pour justifier une prétendue adhésion à votre budget, omettant au passage son élection par défaut. Dans ce cas, cessez de faire semblant et allez au bout de votre idée : assumez que vous souhaitez supprimer le Parlement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Enfin, il vous faut comprendre que les mots ont un sens. Quand vous osez parler de dialogue, d’esprit de responsabilité, alors que vous muselez en réalité la souveraineté populaire,… Le résultat des élections, c’est ça la souveraineté populaire ! …vous ne faites que détruire le peu de confiance que les Français avaient en vous. Vous êtes les seuls artisans du blocage ! (Mêmes mouvements.)
Pour une fois, la vérité sort de la bouche d’un ministre lorsqu’il affirme que « la minorité ne doit pas dicter sa loi à la majorité. » (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Sandrine Rousseau applaudit également.) C’est vous la minorité, Panot ! Les mesures que nous avions votées n’étaient pourtant pas révolutionnaires. Il s’agissait de rétablir un peu de justice sociale. Contrairement à vous, la majorité de cette assemblée s’était rendue à la raison. Avec vos 49.3, c’est autant la démocratie que vous désavouez que l’aspiration à une vie digne de nos concitoyens.
Nul être humain n’est plus déterminé qu’un macroniste quand il s’agit de protéger le capital privé. Après deux ans de pandémie et une explosion de l’inflation, vous ne trouvez toujours pas pertinent de redistribuer les richesses. Forts de vos alliés objectifs comme le Rassemblement national à l’extrême droite, vous avez tout refusé : la hausse du Smic, la taxe sur les superprofits, celle sur les dividendes, le rétablissement, même temporaire, de l’impôt de solidarité sur la fortune.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
La Macronie radicalisée se fait la gardienne des profits, y compris des plus indus. Vous refusez les mesures que nous proposons au motif que gouverner avec des symboles ne résoudrait pas le chômage. À ma connaissance, retirer 5 euros d’aide personnalisée au logement (APL) aux plus pauvres du pays ne le résout pas non plus (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe LFI-NUPES) . Oh là là… Quelle démagogie ! Supprimer l’ISF, baisser l’indemnité versée aux chômeurs, faire des cadeaux fiscaux aux grandes entreprises sans contrepartie non plus.
Depuis la rentrée, vous enchaînez les textes de classe : destruction de l’assurance chômage, budget austéritaire et bientôt la casse des retraites !
À présent, vous dégainez l’article 49.3 au pic de la gronde sociale. Jamais un gouvernement n’avait semblé aussi déconnecté. Madame la Première ministre, vous êtes en apesanteur sociale. Comment faites-vous pour ne pas voir la colère et l’immense lassitude qui parcourt le pays ? Ce que vous leur avez refusé au Parlement, les salariés le réclament désormais dans la lutte.
C’est normal ! Les raffineurs ont ouvert la brèche. (Applaudissements prolongés sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Leur mobilisation fait tache d’huile. Quelle tache d’huile ? Une goutte ! Elle s’étend aux cheminots, aux travailleurs du nucléaire, aux routiers, aux soignants, aux professeurs de lycée professionnel, aux officiers de police judiciaire.
Dimanche 16 octobre, ceux qui ont envie d’un autre monde s’étaient donné rendez-vous à Nation : 140 000 personnes ont défilé contre le vôtre !
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Protestations sur les bancs du groupe RE.) Seulement 29 000 personnes ! Après tout, qu’avez-vous à offrir au pays ? Du sérieux ! Cet été, les Français ont vu défiler les catastrophes écologiques. En cette rentrée, ils subissent une série de pénuries. Ils apprennent que le dérèglement climatique pourrait être pire que prévu en même temps qu’ils lisent dans les journaux les jérémiades des patrons qui perçoivent des salaires à sept chiffres. Pour Noël, vous leur promettez des coupures d’électricité. Pour la nouvelle année, vous leur demandez de travailler plus longtemps.
Madame la Première ministre, qu’avez-vous à offrir au pays ?
(« Rien ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Il est loin, le temps où Emmanuel Macron vantait un nouveau monde, une France forte et la libération des énergies. Votre exaltation du libéralisme s’est fracassée contre le mur de la réalité. Le Président de la République a été réélu sans état de grâce. Et Mélenchon ? Battu à plate couture ! Votre jargon managérial s’est peu à peu vidé de toute substance. Vous avez désenchanté la politique au profit d’une logique comptable et gestionnaire dont on peine à saisir la vision et dont nous payons surtout les conséquences sociales et climatiques. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
Madame la Première ministre, qu’avez-vous donc à offrir au pays ? Désormais, vous percevez – certes très confusément – la faillite de l’idéologie qui vous guide. Vous parlez alors de « planification écologique » à coups de slogans, certes, car en Macronie, même les politiques publiques sont des marchandises à vendre.
Et voici qu’Emmanuel Macron sort du traité sur la charte de l’énergie – c’est risible !
Les rares fois où les libéraux font le constat, à demi-mot, que leurs recettes ne fonctionnent pas, ils en viennent à nos idées.
(Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Si vous tenez tant à vous inspirer de nous,… Ah non ! On n’y tient pas ! …sachez que la Nouvelle Union populaire, écologique et sociale n’a jamais renoncé à l’idée de gouverner ce pays. Redistribution des richesses, bifurcation écologique et solidaire pour transformer nos modes de production, augmentation des minima sociaux, renforcement de nos services publics, sortie du marché de biens communs choisis démocratiquement, assemblée constituante pour une VIe République, nous sommes prêts à appliquer ces mesures. (Mêmes mouvements.) Les Français n’en veulent pas ! Collègues, ministres, rendez-vous à l’évidence : il y a comme une odeur de fin de règne. Bien que vos ardeurs autoritaires ne soient qu’un aveu de la faiblesse de votre pouvoir, croyez bien que nous ne nous habituerons pas à ces méthodes.
Madame la Première Ministre, les Français ne se laisseront pas gouverner à coups de 49.3. Et prenez garde !
Des menaces ? (Sourires.) Une fois la période budgétaire passée, il ne vous restera plus qu’un seul joker autoritaire. (Les députés sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES se lèvent et applaudissent.) La parole est à M. Olivier Marleix. Madame la Première ministre, aujourd’hui, deux motions de censure ont été déposées. Pourquoi ? Parce que, faute de pouvoir faire adopter votre budget par l’Assemblée nationale, vous avez été contrainte d’engager la responsabilité de votre gouvernement.
La loi de finances suppose des choix ; or, malgré notre volonté de permettre au pays d’avancer, nous ne partageons pas vos choix.
Nous ne partageons pas votre recours systématique à la dette. Vous n’aimez pas que l’on vous rappelle les chiffres, mais la réalité dépasse l’entendement. D’après le budget que vous nous présentez pour 2023, l’État dépensera 500 milliards d’euros, alors qu’il n’encaissera que 345 milliards de recettes. Le déficit de votre budget atteint donc 155 milliards d’euros, c’est-à-dire qu’un tiers de la dépense de l’État est financé par de la dette supplémentaire, tandis que le stock de dette dépassera les 3 000 milliards d’euros.
Voilà la réalité. La crise de la dette menace ; elle fait courir les risques que l’on connaît à la France et à l’épargne des Français, mais vous n’en tenez aucun compte.
Nous ne partageons pas non plus vos choix concernant la fiscalité. Vous méprisez le travail, qui est la valeur essentielle du lien social. Vous ne prévoyez rien pour cette classe moyenne accablée d’impôts de toutes sortes, qui prend son véhicule pour aller travailler, qui cherche à accéder à la propriété mais se voit refuser des crédits, et qui, peu à peu, ne voit plus le bénéfice de son travail.
Nous ne comprenons pas, enfin, votre absence de détermination face à la crise de l’énergie : depuis de trop longues semaines, des dizaines de milliers de salariés d’entreprises dans notre pays, des boulangers, des artisans, des employés d’entreprises industrielles ne savent plus comment faire face aux factures qui leur sont annoncées. « Ne signez rien », leur disait le Président de la République le 23 septembre dernier. Un mois plus tard, que leur répondez-vous ?
Rien, comme d’habitude ! Pour toutes ces raisons, il nous est impossible d’adopter cette première partie de votre budget. Eh oui ! Les députés Les Républicains ont pourtant formulé de nombreuses propositions, mais vous n’écoutez pas ! Eh non ! Nous avons proposé d’amender ce budget avec un plan de réduction des dépenses, mais aussi avec des propositions concrètes pour améliorer le pouvoir d’achat et pour permettre à tous les Français d’entreprendre la rénovation énergétique de leur logement, en remplaçant le dispositif MaPrimeRenov’, qui ne fonctionne pas, par un véritable crédit d’impôt. Eh oui ! Nous avons proposé de limiter les dépenses de carburant en supprimant la taxe sur la taxe. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
Toutefois, vous n’avez rien repris de substantiel. Dès lors, ce gouvernement issu d’une majorité plus que relative n’a en effet pas d’autre choix que d’employer le 49.3. Vous l’avez déjà utilisé à deux reprises et vous serez probablement contrainte de l’employer, avant décembre, encore quatre ou cinq fois. Voire plus ! Une motion de censure sert à constater que le Gouvernement ne dispose pas de la majorité.
Ce n’est pas une surprise : nous le savons tous, sur tous les bancs de cette assemblée, depuis le premier jour. Ainsi en ont décidé les Français qui ont volontairement placé le Président de la République en face d’une assemblée dans laquelle il n’a pas la majorité.
Exactement ! Soyons clairs : nous ne nous associerons pas à la France insoumise et au RN, et nous ne voterons pas ces motions de censure. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Mohamed Laqhila applaudit également. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Vous direz cela à vos électeurs ! C’est dommage. Nous, nous avons voté votre amendement ! À quoi cela conduirait-il ?
En les votant, nous ferions tomber le Gouvernement, mais cela conduirait très probablement à remplacer un gouvernement Borne 2 par un gouvernement Borne 3, puis la semaine suivante par un gouvernement Borne 4… Il n’y a là, au-delà d’un bref moment de satisfaction pour les opposants, aucune utilité pour les Français.
Bien sûr, il y a sans doute sur les bancs autour de vous, madame la Première ministre, des candidats pour vous remplacer.
À commencer par vous ! Je ne citerai pas les noms ; ils se reconnaîtront. Mais si c’est pour mener la même politique, je n’en vois pas non plus l’utilité pour les Français. Nous non plus ! Faudrait-il faire tomber le gouvernement parce qu’il y aurait dans cette assemblée une autre majorité possible, à partir d’une autre combinazione politique, comme celles dont se régalait le régime des partis sous la IVe République ? Là encore, je n’en vois pas, sauf si le rapprochement des extrêmes, à l’œuvre actuellement, va jusqu’à nous proposer un gouvernement commun. Faudra-t-il alors dissoudre cette assemblée pour en élire une autre ? Peut-être. Nous y sommes toujours prêts : retourner devant les électeurs est toujours un moment de bonheur. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)
Mais, quatre mois après les élections, et après seulement huit semaines de travail de cette assemblée, tout cela ne nous paraît pas très sérieux. Donner encore davantage de notre pays l’image d’un bateau à la dérive n’est pas l’intention du groupe Les Républicains (Exclamations sur les bancs du groupe RN) : spéculer sur l’effondrement du pays est le calcul de ceux qui préfèrent le désordre – on l’a vu jusque dans notre assemblée –, pas le nôtre. Il y va de notre responsabilité de ne pas ajouter à l’inflation et à la récession que les Français doivent affronter, une instabilité politique qui paralyserait le pays.
Ces motions de censure, personne n’y croit donc vraiment aujourd’hui, à commencer par ceux qui les ont déposées.
(Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Mais soyons clairs : nous n’hésiterons pas à en déposer une nous-mêmes si les circonstances l’exigeaient. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.) Essayons donc d’abord de respecter le vote des Français : pour M. Macron et votre gouvernement, cela veut dire écouter davantage les oppositions, pour les oppositions, cela signifie préférer être utiles aux Français, plutôt qu’alimenter le désordre en espérant rejouer indéfiniment je ne sais quel match perdu.
Le temps presse, madame la Première ministre : allez dire au Président de la République que le 49.3 n’est pas une solution durable pour le pays,…
Elle va le faire ! …qui a besoin d’être rassemblé, et non fracturé. Votez la motion ! Un peu de courage ! On a trop souvent l’impression que le Président n’en voit pas la déliquescence (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES), qu’il ferme les yeux sur le quotidien des Français, sur ce qu’ils ressentent et ce qui les indigne. Vous devez comprendre que les Français s’indignent qu’une enfant de 12 ans soit sauvagement assassinée au cœur de Paris par une femme qui aurait dû être expulsée !