XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023

Première séance du mardi 09 mai 2023

Sommaire détaillé
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Première séance du mardi 09 mai 2023

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à quinze heures.)

    1. Questions au Gouvernement

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle les questions au Gouvernement.

    Sort de l’entreprise Valdunes

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sébastien Chenu.

    M. Sébastien Chenu

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    Ma question s’adresse à M. le ministre de l’économie, des finances et de la désindustrialisation. (Sourires sur les bancs du groupe RN.)
    Parce que nous sommes le parti de la France qui travaille, qui aimerait travailler et qui a travaillé, j’étais ce matin dans le Nord, aux côtés des ouvriers de Valdunes. Je tiens à les remercier. Ils ont vu défiler tous ceux qui, pendant des années, ont ruiné l’industrie de notre pays, mais qui, pour certains, se permettent de leur donner des cours d’écologie.
    Valdunes, le dernier fabricant français de roues de train, pourrait fermer. Son unique actionnaire, une entreprise chinoise, a déclaré qu’il ne mettrait plus un centime dans la société. Valdunes, qui représente 336 emplois dans le Nord, à Trith-Saint-Léger, et dont le savoir-faire, la productivité, les compétences et la qualité du travail sont reconnus par tous, est menacé. L’investisseur chinois, après avoir obtenu ce qu’il voulait – les brevets, le savoir-faire, la technologie –, est prêt à plier bagage, laissant les ouvriers et les employés dans le désarroi.
    Ce pillage des compétences françaises et l’incapacité à contraindre des entreprises publiques françaises comme la SNCF à passer des commandes pour des roues de train à une entreprise française en disent long sur l’abandon de nos fleurons industriels et sur votre soumission. Déjà en 2021 j’avais alerté, par écrit, M. le ministre de l’économie, des finances et de la désindustrialisation, mais je n’ai jamais obtenu de réponse. Quel mépris et quelle désinvolture !
    Quel sort réservez-vous à Valdunes et à ses salariés ? Qu’attendez-vous pour appliquer la préférence nationale de la commande publique, comme Marine Le Pen le suggère ? Vous avez des leviers en main, comme BPIFrance, pour protéger notre industrie et pour agir concrètement. En 2022, vous avez autorisé le rachat de plus de 130 entreprises sensibles par des étrangers. Quand allez-vous vous occuper enfin de l’industrie française ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.

    M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’industrie

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    Comme toujours, vous simplifiez, vous instrumentalisez, vous caricaturez. La réindustrialisation de la France a commencé il y a six ans et ce n’est pas grâce à vous, mais à cette majorité. (Exclamations sur les bancs du groupe RN ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.) Elle va se poursuivre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.)

    M. Pierre Cordier

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    On se demande où est la réindustrialisation.

    M. Roland Lescure, ministre délégué

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    L’entreprise Valdunes a été reprise par un actionnaire chinois en 2014. Contrairement à ce que vous dites, il a réinvesti dans l’entreprise, mais, malgré ces réinvestissements à hauteur de 100 millions, Valdunes a connu des pertes et n’a pas réussi à gagner des parts de marché à l’international. Vous le savez sans doute, puisque vous suivez de près cette entreprise, Valdunes dispose d’une capacité de production de 100 000 roues par an alors que la SNCF, même si elle lui achetait toutes les roues dont elle a besoin, n’en commanderait que 30 000 à 40 000 par an au maximum.
    Nous avons déjà identifié le défi de compétitivité auquel doit faire face ce site. Nous n’avons en effet pas attendu que vous vous intéressiez à cette entreprise pour la regarder de près. Nous avons ainsi convoqué la direction et l’actionnaire il y a un an et avons commandé une étude indépendante. Celle-ci montre que deux défis existent : l’ancienneté de l’outil de production – la forge date de 1950 – et la capacité de production.
    Grâce au comité social et économique exceptionnel de l’entreprise qui s’est réuni vendredi, nous avons désormais plus d’informations sur le malheureux désengagement de l’actionnaire, que nous avons à nouveau convoqué – la réunion se tiendra demain à Bercy. Nous allons également recevoir les organisations syndicales afin de discuter de l’accompagnement de l’entreprise vers la voie la plus probable, celle de la reprise, que nous ferons tout pour favoriser. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sébastien Chenu.

    M. Sébastien Chenu

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    Nous n’avons pas besoin d’une réponse de ChatGPT, nous avons besoin d’action. Bougez-vous ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre délégué.

    M. Roland Lescure, ministre délégué

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    Vos bons mots, vous pouvez vous les garder ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Le Gouvernement a créé en six ans plus d’emplois industriels que vous n’en créerez jamais ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Laurent Croizier applaudit également.) Il a réindustrialisé, il a soutenu des entreprises, y compris dans le Nord alors que vous y nourrissez la désindustrialisation depuis cinquante ans. C’est terminé : nous continuerons à agir alors que vous continuerez à parler ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Crise du logement

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Gosselin.

    M. Philippe Gosselin

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    Madame la Première ministre, depuis des mois, une crise sans précédent du logement s’annonçait. Elle est désormais là.

    M. Patrick Hetzel

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    C’est un gros sujet !

    M. Philippe Gosselin

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    Tous les acteurs le disent : le marché des transactions immobilières est gelé et celui des locations est asphyxié. Le mal-logement s’aggrave en France. Depuis six ans, il y manque au moins 100 000 logements et ce manque touche tous les territoires et tous les types de logement, y compris le logement social. Les causes de ce manque cruel sont multiples et se cumulent : les taux d’intérêt ont augmenté, les crédits se sont resserrés et les banques sont devenues extrêmement frileuses. La rareté du foncier bloque les projets en zones RNU – règlement national d’urbanisme – et en zones rurales, qui sont les plus touchées, et empêche l’avancement des projets PLUI – plan local d’urbanisme intercommunal. Que dire des fameuses ZAN – zéro artificialisation nette – qui deviennent, de plus en plus, des ZEM, des zones d’emmerdement maximal ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Sébastien Jumel applaudit aussi.)
    La crise soulève également la question du DPE – diagnostic de performance énergétique –, dont la fiabilité est d’ailleurs de plus en plus souvent remise en cause, et des mesures nouvelles le concernant. Les logements diagnostiqués comme étant des passoires énergétiques – ils se chiffreront bientôt en dizaines de milliers tous les ans – se trouvent en effet retirés du marché. Je rappelle dans ce contexte les difficultés que connaissent des particuliers et des entreprises pour toucher les paiements, souvent aléatoires et réduits, liés au versement de MaPrimeRénov’. N’en jettez plus, la coupe est pleine alors qu’il paraît que l’Europe va encore en ajouter une couche ! La crise du logement est bien là et entretient un fort ressentiment social : nos concitoyens n’en peuvent plus !
    Au début de son premier mandat, le Président de la République avait annoncé un choc sur l’offre de logement. Le choc est bien là, mais il ne se fait pas sentir dans le sens qui était souhaité. Madame la Première ministre, que comptez-vous faire pour soutenir le logement et aider nos concitoyens, qui en ont tant besoin ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, ainsi que sur quelques bancs du groupe RN.  M. Sébastien Jumel applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.

    M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

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    Le Gouvernement agit depuis six ans pour le logement.

    M. Philippe Gosselin

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    Nous n’en voyons pas les effets. C’est inquiétant !

    M. Jean-Yves Bony

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    Il agit mal !

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    Vous avez parlé du mal logement. Le plan « logement d’abord », lancé dès 2018, a permis à 440 000 personnes de quitter la rue pour entrer dans un foyer.
    S’agissant de la rénovation thermique, je rappelle que 1,5 million de chantiers ont pu être mis en place, soit l’équivalent de l’économie de la ville de Lyon. Le Gouvernement a agi pour protéger les Français en créant des boucliers tarifaires pour le gaz et l’électricité alimentant le chauffage individuel et collectif.

    M. Pierre Cordier

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    Ce n’est pas le sujet !

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    Il existe des difficultés, mais vous savez très bien que la responsabilité dans ce domaine est très morcelée. (Exclamations sur les bancs du groupe LR.)

    M. Philippe Gosselin

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    C’est une blague !

    Mme la présidente

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    Un peu de silence, s’il vous plaît !

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    Il faut notamment mobiliser les maires pour leur donner envie d’exercer leurs capacités de construire. Nous le faisons. Nous attendons les conclusions des travaux du volet logement du Conseil national de la refondation (CNR), qui seront disponibles très prochainement.
    Face à la crise actuelle, nous travaillons avec l’ensemble des acteurs, privés et publics, du monde du logement pour préparer une relance. Cette relance passe par une action de la Caisse des dépôts ; par un soutien aux prêts à taux zéro, qui sont un moyen d’accès à la propriété à disposition de nos concitoyens les plus fragiles ; par le pacte de confiance avec les bailleurs sociaux, qui figure dans la feuille de route de Mme la Première ministre et qui sera signé avant l’automne, lors de la tenue du congrès de l’Union sociale de l’habitat. Nous poursuivrons notre travail pour faire face à cette crise.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Gosselin.

    M. Philippe Gosselin

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    Le Gouvernement est dans le déni complet. Vous dites avoir fait beaucoup de choses, mais beaucoup reste à faire ! Nous attendons des mesures concrètes. Si vous souhaitez que les casseroles restent dans les cuisines, il vous faudra prendre le dossier à bras-le-corps. Les maires ne peuvent pas tout faire, des ZAN les empêchent de construire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre délégué.

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    Quand on veut faire le Tartuffe, on fait le Tartuffe ! (Exclamations sur les bancs du groupe LR ainsi que sur quelques bancs du groupe RN.) Les ZAN sont un moyen de protéger notre environnement et ce dispositif est utilisé comme alibi par trop de personnes pour ne pas construire de logements.

    M. Fabien Di Filippo

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    Ne nous accusez pas de vos propres turpitudes !

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    Les PLUI sont à la disposition des élus locaux, qui doivent continuer à travailler.

    M. Philippe Gosselin

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    Il manque 100 000 logements !

    Renforcement de l’Union européenne

    Mme la présidente

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    Mes chers collègues, un peu de silence s’il vous plaît.
    La parole est à M. Jean-Louis Bourlanges, et à lui seul.

    M. Jean-Louis Bourlanges

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    Rassurez-vous, madame la présidente, ce sera plus calme.
    Nous célébrons aujourd’hui l’appel à la construction d’une Europe unie lancé il y a soixante-treize ans par Robert Schuman. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE, ainsi sur quelques bancs des groupes HOR et Écolo-NUPES.) Le groupe MODEM se garderait de manquer à ce rendez-vous du souvenir et de l’avenir.
    L’Europe, ce sont aujourd’hui deux choses essentielles : la paix pour vivre ensemble et la synergie pour vivre libre. Les Français aiment l’Europe quand ils regardent le passé parce qu’elle a su mettre un terme au cauchemar de la guerre éternelle qui a empoisonné leur histoire. Les Français aiment l’Europe quand ils regardent l’avenir car ils savent que seule l’Union fait la force.

    M. Emeric Salmon

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    Pourtant, ils votent contre !

    M. Jean-Louis Bourlanges

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    Cet avenir est inédit et, j’oserai le dire, révolutionnaire. Au cours des vingt dernières années, l’Europe a été confrontée à six défis majeurs dans l’ordre géopolitique, économique, démographique, technologique, écologique et démocratique. Elle n’y a répondu que de façon partielle. Malgré les appels répétés du Président de la République dans la foulée de son discours de la Sorbonne,…

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Un très grand discours !

    M. Jean-Louis Bourlanges

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    …les Européens sont globalement incapables de répondre aux trois questions qui déterminent les réponses : qui ? Quoi ? Comment ? Qui sont les Européens ? C’est la question de l’identité commune. Quoi ? Que voulons-nous faire ensemble et que voulons-nous continuer de faire séparément ? Comment ? C’est la question d’un modèle institutionnel, contesté mais irremplaçable. On ne bâtira pas l’Europe de demain sur le détricotage de l’Europe d’hier.
    Nos concitoyens retrouveront foi dans le projet commun à la condition de se voir offrir simultanément une vision claire et des actions fortes. Nous devons tenir ensemble les deux bouts de la chaîne. Nous avons besoin d’un cap et d’un calendrier : un cap pour choisir, un calendrier pour agir. Que le Gouvernement entend-il faire pour offrir l’un et l’autre aux électeurs européens l’an prochain ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RE, ainsi que sur quelques bancs du groupe HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la Première ministre.

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    Nous traversons une période de crises multiples, marquée par le retour de la guerre sur notre continent, par la volonté d’affirmation des superpuissances et par la nécessité de renforcer notre indépendance énergétique, industrielle, alimentaire et stratégique.
    Face à ces défis, pour peser et bâtir notre souveraineté, plus que jamais la solution passe par l’Union européenne.
    Bien sûr, les partisans du repli sur soi et les populistes des deux bords aiment à accabler l’Europe.

    M. Julien Odoul

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    Bla bla bla !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    Elle est leur bouc émissaire commode ; elle serait la cause de tous leurs maux. Ils oublient que c’est l’Europe qui a permis une relance majeure de l’économie après le covid ; que c’est l’Europe qui nous permet d’apporter une réponse ferme et résolue à l’agression russe en Ukraine ; que c’est l’Europe qui nous permet de défendre une ambition climatique puissante et coordonnée (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem) ; que c’est l’Europe qui nous permet de défendre notre souveraineté alimentaire et les agriculteurs (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN) ;…

    M. Pierre Cazeneuve

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    Elle a raison !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    …que c’est l’Europe qui nous permet de soutenir notre économie face aux subventions étrangères, sources de concurrence déloyale. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Avec l’argent de qui ?

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    L’Union européenne devient une puissance et nous pouvons être fiers du chemin parcouru car, sous l’égide du Président de la République,…

    M. Frédéric Boccaletti

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    Malheureusement !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    …la France prend toute sa part dans ce combat. Je ne prétends pas que l’Europe est parfaite et les défis qui nous attendent sont immenses, mais pour atteindre l’autonomie stratégique, garantir notre souveraineté et notre indépendance, pour atteindre la neutralité carbone, oui, nous avons besoin de l’Europe. En ce 9 mai, comme tous les jours, face aux extrêmes et aux populismes, nous continuerons à la défendre. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur plusieurs bancs du groupe Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    Réforme des retraites

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bex.

    M. Christophe Bex

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    Madame la Première ministre, depuis des mois, le peuple se mobilise contre votre réforme des retraites injuste et inutile. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Des millions de personnes manifestent lors de chaque journée de mobilisation ; 93 % des actifs de notre pays expriment leur opposition. (Mêmes mouvements.) Mais votre seule réponse est le mépris et la répression, en interdisant les dispositifs sonores portatifs – vous n’avez pas peur du ridicule – ou les cartons rouges au stade de France.

    M. Fabien Di Filippo

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    Aussi rouges que votre gilet, monsieur Bex !

    M. Christophe Bex

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    La page n’est pas tournée. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES ainsi que sur plusieurs bancs du groupe Écolo-NUPES.) Votre projet brise des vies. Il n’aura pas fallu attendre trois semaines après sa promulgation pour que votre contre-réforme des retraites ait des conséquences dramatiques. Je pense en particulier à ces femmes et ces hommes qui avaient négocié leur départ à la retraite anticipé avec leurs employeurs, attendant avec impatience ce droit au repos, ces moments aux côtés de leur famille et au sein d’associations.
    Ainsi, alors qu’Olivier, de la société Orano, avait célébré son départ à la retraite et qu’il avait des projets tout tracés, il devra finalement choisir entre prendre un congé sans solde le privant de revenus ou revenir travailler durant une année.

    Plusieures députées du groupe LFI-NUPES

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    C’est une honte !

    M. Christophe Bex

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    Choisir entre revenir travailler et voir son revenu baisser, voilà le progrès que vous réservez à nos concitoyennes et concitoyens ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES ainsi que sur plusieurs bancs du groupe Écolo-NUPES.) Vous demeurez sourds aux revendications d’un peuple que vous traitez avec une arrogance rare.
    Chers collègues, il est encore temps d’agir et d’adresser un carton rouge à ce gouvernement qui cherche à étouffer la contestation. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Non, la page n’est pas tournée. Le 8 juin prochain, votons la proposition de loi d’abrogation de la réforme des retraites, pour porter haut et fort la voix du peuple que nous représentons. (Les députés du groupe LFI-NUPES ainsi que plusieurs députés des groupes SOC et Écolo-NUPES se lèvent et applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

    Un député du groupe RN

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    Ministre du chômage, oui !

    M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion

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    Vous évoquez quelques cas que le Gouvernement n’ignore pas.

    M. Nicolas Meizonnet

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    Au travail, alors !

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    Rappelons quelques évidences. Parmi nos concitoyens qui sont déjà partis à la retraite, aucun ne sera jamais rappelé au travail.

    Mme Clémence Guetté

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    Oh, vraiment ? On connaît vos mensonges !

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    Par ailleurs, aucun assuré pouvant faire valoir son droit à la retraite avant le 1er septembre 2023 ne peut être concerné par un quelconque rappel. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Les cas que vous citez concernent seize salariés de l’entreprise Orano,…

    M. Sébastien Jumel

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    Seize de trop !

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    …qui ne sont en aucun cas à la retraite, mais seulement en congé anticipé, après avoir négocié avec leur direction, sur le fondement d’un accord sur le compte épargne temps. Mon cabinet est en lien avec chacune des sociétés comptant de tels cas.

    M. Manuel Bompard

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    On veut de vraies réponses !

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    Chaque dossier individuel bénéficiera d’un traitement social, pour que personne ne soit rappelé.

    Mme Clémence Guetté

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    Tout va bien, alors !

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    Vous prétendez parler au nom du peuple ou des opposants à la réforme ; permettez-moi de vous dire qu’avec La France insoumise, ceux-ci ont de bien piètres porte-parole. Vous n’avez servi à rien dans ce débat. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Vous n’avez pas fait bouger une ligne du texte ; vous n’avez pas défendu les salariés. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.) Vous avez voulu bloquer le débat et n’avez rien apporté. Votre seule fonction est de mettre le bazar, ici et dans la rue. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Peut-être êtes-vous fiers de ceux qui parmi vous appellent à décapiter le Président de la République ou lui promettent un destin « à la Kennedy » ? Ce n’est pas notre conception de la République et de la démocratie. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Renforcement de l’Europe

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pieyre-Alexandre Anglade.

    M. Pieyre-Alexandre Anglade

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    En ce 9 mai, nous célébrons la Journée de l’Europe et le discours fondateur de Robert Schuman. Depuis six ans, au sein de la majorité, nous défendons une exigence d’action et de refondation du projet européen…

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Ça a bien marché !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade

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    …à travers un agenda de souveraineté proposé aux Français par le Président de la République. Durant ces six années, nous avons avancé résolument sur ce chemin. Du plan de relance européen à la stratégie d’acquisition des vaccins, en passant par la lutte contre le dérèglement climatique et, bien sûr, notre réponse commune face à l’invasion russe de l’Ukraine, l’Europe a montré ces dernières années sa capacité à résister, à protéger, et même à dépasser ses dogmes. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)
    Nous avons besoin de continuer à transformer l’Europe de la coopération en Europe de la puissance, en ce moment charnière de notre histoire où, forts de nos réussites, nous devons nous projeter dans l’avenir du modèle européen et de son autonomie stratégique. Les menaces géopolitiques, l’urgence climatique et les évolutions technologiques majeures donnent à l’Europe une responsabilité particulière.
    Les ennemis de l’Europe restent nombreux, y compris dans cet hémicycle.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Ah !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade

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    Certains, alors que Vladimir Poutine menace l’Europe et nos valeurs, préfèrent dépenser toute leur énergie pour dénigrer le drapeau européen et, à travers lui, l’unité européenne. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Ceux-là, à l’extrême droite et à l’extrême gauche, jouent un jeu dangereux, car l’Europe indépendante et souveraine est le meilleur levier de puissance et de protection. (MM. Grégoire de Fournas et Nicolas Meizonnet protestent.)
    Le 9 mai 2022, le Président de la République concluait la conférence sur l’avenir de l’Europe, de véritables états généraux de l’Europe avant la révolution européenne de la puissance que nous appelons de nos vœux et qui est absolument essentielle si nous voulons tenir compte des enjeux de notre époque, notamment l’intégration de l’Ukraine au sein l’Union européenne. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    Un député du groupe RN

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    Quel blabla !

    M. Frédéric Boccaletti

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    On s’en moque !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade

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    En ce siècle redevenu incertain, nous voulons continuer à faire de l’Europe le continent le plus écologique, le plus innovant, le plus protecteur, celui qui défend les valeurs de liberté et de démocratie. Madame la Première ministre, pouvez-vous nous indiquer la feuille de route de votre gouvernement pour y parvenir ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la Première ministre.

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    Il y a soixante-treize ans, Robert Schuman posait les fondements de la construction européenne ; sa déclaration constituait d’abord une promesse de paix. Or le retour de la guerre aux portes de l’Europe avec l’agression russe de l’Ukraine rappelle que la paix n’a rien d’une évidence, qu’elle est précieuse et que l’Union européenne nous l’apporte au quotidien – tel est mon premier message, destiné notamment à notre jeunesse.
    Le mot Europe est par ailleurs devenu synonyme d’action et de solution au service des peuples, notamment des Français.

    M. Grégoire de Fournas

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    Quelle blague !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    C’est tout le sens de l’engagement du Président de la République depuis 2017.

    Mme Caroline Parmentier

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    Incroyable !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    Alors qu’on prétendait que l’Europe était menacée par les crises, c’est grâce à elle que nous avons mutualisé l’achat de vaccins et relancé massivement nos économies. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    M. Grégoire de Fournas

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    Non, pas ça !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    Alors qu’on l’accusait d’être naïve sur le plan commercial, elle a su imposer que les produits importés respectent les mêmes standards environnementaux que les produits européens. (Mme Sandra Marsaud applaudit. – Protestations sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme Clémence Guetté

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    C’est faux !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    Alors qu’on la présentait à l’origine comme un marché, elle devient une puissance, qui défend ses intérêts et veut conquérir son indépendance, avec un agenda d’autonomie stratégique pour les matières premières critiques et les médicaments, avec une nouvelle politique industrielle tournée vers la transition écologique et le numérique.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Baratin !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    C’est une puissance qui promeut ses valeurs, en luttant contre le travail forcé, contre les produits issus de la déforestation ou pour la régulation du numérique, une puissance sociale, qui promeut…

    Mme Mathilde Panot

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    La casse sociale et environnementale !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    …l’égalité entre les femmes et les hommes et impose à chaque pays de se doter d’un salaire minimum. Enfin, l’Europe devient une puissance géopolitique, en réagissant de manière unanime face à la Russie, en finançant la livraison d’armes pour aider l’Ukraine, en renforçant sa sécurité et sa défense.

    Mme Caroline Parmentier

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    Amen !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    C’est long ! Il vous reste combien de jours à Matignon ?

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    Je n’ignore rien des défis qui restent à relever…

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Ne vous inquiétez pas, c’est bientôt la quille !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    …qu’il s’agisse de l’énergie, des migrations ou des futurs élargissements. Nous sommes lucides quant au chemin qu’il reste à parcourir. Face aux cyniques qui caricaturent l’Europe et l’accusent de tous les maux, face aux prétendus patriotes qui affirment qu’il faudrait choisir entre l’amour de la France et l’attachement à l’Europe (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE), j’assume d’affirmer que l’Europe est l’un des projets les plus importants à bâtir.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Eh oui !

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    J’assume d’affirmer que souveraineté nationale et souveraineté européenne se renforcent mutuellement. Sans nation forte, l’Europe est fragile, mais sans Europe puissante, nos nations seront plus faibles. Je suis fière d’être à la tête d’une majorité qui est la seule famille politique résolument proeuropéenne. (« C’est vrai ! » et applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)

    M. Dominique Potier

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    Et nous ?

    Mme Élisabeth Borne, Première ministre

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    Je le revendique, entre les extrêmes et nous, il y aura toujours l’Europe. En ce 9 mai, je souhaite à tous nos compatriotes une belle fête de l’Europe, en leur rappelant, à un an des élections européennes, que l’Europe est un combat et que la majorité présidentielle est décidée à le mener. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur plusieurs bancs du groupe Dem.)

    M. Sébastien Chenu

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    Parlez plutôt du pouvoir d’achat !

    Manifestation d’extrême droite

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Francesca Pasquini.

    Mme Francesca Pasquini

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    Monsieur le ministre de l’intérieur et des outre-mer, samedi, les croix celtiques de nationalistes révolutionnaires, avec leurs cagoules et leurs masques noirs ont défilé à Paris sous la bannière du Comité du 9 mai (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES), en hommage à un militant du groupe pétainiste L’?uvre française décédé en 1994. Les images sont terrifiantes, alors qu’un assistant parlementaire a été passé à tabac par cette même extrême droite une semaine plus tôt.

    M. Carlos Martens Bilongo

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    Honteux !

    Mme Francesca Pasquini

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    Je fais remarquer la présence dans ce cortège d’anciens trésoriers du microparti de Mme Le Pen (Mêmes mouvements) ainsi que des membres du groupe Union défense et d’anciens membres des Zouaves Paris. Eh oui, on ne masque pas ses origines si facilement !
    Cette manifestation n’a pas été interdite car, selon le préfet de police de Paris, elle ne constituait pas un risque de trouble à l’ordre public. Elle a donc été autorisée et encadrée par la police, comme chaque année. Pourtant, ce n’est pas parce que l’ennemi est silencieux et marche au pas sans déborder qu’il n’est pas dangereux. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et GDR-NUPES.) Comment célébrer le 8 mai 1945 sans dénoncer la violence intrinsèque de ces groupes d’extrême droite ? Il est inconcevable que l’État ne les considère pas, par leur essence même, comme un trouble à l’ordre public. L’État était fondé à interdire ce cortège, car, pour reprendre les mots de l’ancien président de la République italienne Sandro Pertini « le fascisme n’est pas une opinion, mais un crime » ! (Mêmes mouvements.)
    Bien que ces manifestants aient tenté de dissimuler leur identité, nous ne sommes pas dupes. Nous saurons toujours reconnaître, même sous les tissus les plus sombres, les ennemis de la République. Vous préférez vous en prendre à ceux qui battent le pavé à visage découvert pour défendre leur droit à la retraite et à la démocratie plutôt qu’à des néonazis. (Mêmes mouvements.)

    Plusieurs députés du groupe RN

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    Oh là là !

    Mme Francesca Pasquini

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    Monsieur le ministre, entendez-vous « le vol noir des corbeaux sur nos plaines, […]les cris sourds du pays qu’on enchaîne » ? (Les députés des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES, GDR-NUPES et SOC se lèvent et applaudissent vivement.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.

    M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer

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    Vous avez parfaitement raison, cette manifestation dans les rues de Paris était inacceptable.

    M. Sébastien Chenu

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    Eh bien alors ?

    M. Gérald Darmanin, ministre

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    Mme la Première ministre a eu raison d’affirmer que le spectacle de ces manifestants était choquant dans notre république. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    La faute à qui ?

    M. Gérald Darmanin, ministre

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    Contrairement à ce que j’ai pu entendre, cette manifestation n’a pas été déclarée auprès des autorités par un collectif ou une association, mais par un individu isolé. Au mois de janvier dernier, le préfet de police de Paris et moi-même avons souhaité interdire une manifestation de la même mouvance, mais le tribunal administratif de Paris – je le regrette – nous a sommés de la laisser se tenir.
    Ainsi, la manifestation de samedi ne présentait pas a priori de difficultés nous permettant, selon le droit en vigueur, que vous, parlementaires, votez, de l’interdire.

    M. Alexis Corbière

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    Ah bon ?

    M. Gérald Darmanin, ministre

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    Le jugement du tribunal sur lequel nous nous sommes fondés pour en décider date seulement d’il y a trois mois, monsieur le député.
    Cela étant, après ce que nous avons constaté dans les rues de Paris, vous avez raison, madame la députée, de m’interpeller sur cette manifestation. J’ai donné pour instruction que toutes les manifestations du type que vous décrivez, déclarées par des militants d’ultradroite ou d’extrême droite ou leurs collectifs ou associations, à Paris,…

    Mme Marie-Charlotte Garin

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    À Lyon, également !

    M. Gérald Darmanin, ministre

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    …comme partout sur le territoire national, fassent l’objet d’un arrêté d’interdiction du préfet. Nous laisserons donc les tribunaux juger, à la lumière de la jurisprudence, de la légalité de ces manifestations. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)

    Un député du groupe GDR

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    En l’occurrence, le port de cagoules justifiait l’interdiction !

    M. Gérald Darmanin, ministre

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    Vous évoquez des violences, notamment celles commises contre un attaché parlementaire. Pourtant, à ma connaissance et à celle du préfet de police, aucune plainte n’a été déposée. Je vous encourage à les faire déposer le plus rapidement possible afin que la police puisse enquêter.
    Enfin, je rappelle que c’est notre gouvernement qui a demandé la dissolution des Zouaves Paris, d’Alvarium, de Bordeaux nationaliste ou de Génération identitaire, groupes d’extrême droite présents sur le territoire national parfois depuis plus de trente ans ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

    Réforme des retraites

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Elsa Faucillon.

    Mme Elsa Faucillon

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    Votre opération « Tourner la page » est un fiasco ! Vos tentatives de diversion ne peuvent effacer le passage en force d’une réforme qui abîme si durement, si concrètement et si brutalement la vie des gens. Les premières victimes sont bien réelles. Il s’agit de femmes et d’hommes qui, après toute une vie professionnelle, avaient planifié leur départ en retraite.
    Alors, oui, ils étaient en congé de fin de carrière car ils souhaitaient partir en retraite. Aujourd’hui, ils sont contraints de revenir au travail. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.) Pour faire la jonction avec leur nouvelle date de départ à la retraite, il leur est proposé de prendre un congé sans solde ou de reprendre leur poste avec un salaire lissé, donc diminué.

    Mme Raquel Garrido

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    C’est honteux !

    Mme Elsa Faucillon

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    Monsieur Dussopt, vous savez très bien qu’il n’y aura pas que les seize salariés d’Orano ! Des milliers de femmes et d’hommes sont suspendus à la publication des décrets d’application de la réforme pour déterminer s’ils devront, ou non, retirer leur demande de départ à la retraite, ou consentir à une décote de leur pension.
    De même, des travailleurs venus du Maghreb ou d’Afrique subsaharienne, occupant les métiers les plus pénibles et bénéficiant de retraites de misère à cause de carrières hachées – faites d’intérim et de périodes mal ou non déclarées par leur employeur – découvrent qu’il leur faudra rester neuf mois par an en France – et non plus six – pour bénéficier de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa).
    Du jour au lendemain, vous brisez des projets de vie et vous volez des années de vie ! On hésite : doit-on accuser votre gouvernement de manque d’anticipation ou de malhonnêteté ? Avec le précédent sur les carrières longues et sur les 1 200 euros, permettez-nous de pencher pour un mensonge de plus ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)
    Ce mensonge cache votre déconnexion abyssale avec la vie des Français. C’est une marque de mépris supplémentaire et, à n’en pas douter, votre réforme nous réserve encore beaucoup trop de mauvaises surprises.
    Alors, non, décidément, nous ne tournerons pas la page car elle ne se tourne pas comme cela. C’est pourquoi les députés du groupe GDR-NUPES, comme les autres députés de la NUPES, seront au rendez-vous, le 6 juin dans la rue, …

    Mme la présidente

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    Merci de bien vouloir conclure.

    Mme Elsa Faucillon

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    …mais également le 8 juin, ici, pour obtenir… (Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice. – Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

    M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion

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    Je vais poursuivre la réponse déjà faite à M. Bex et vous rappeler – mais vous l’avez dit – qu’aucun retraité n’est rappelé. Aucun assuré qui peut faire valoir son départ à la retraite dans les conditions prévues par la loi avant le 1er septembre 2023 ne peut être concerné par un quelconque rappel.
    Certains salariés ayant actionné leur compte épargne-temps ou leur congé de fin de carrière vont effectivement voir leur départ décalé de trois mois.

    Mme Clémence Guetté

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    Serial menteur !

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    Cela peut poser quelques problèmes de tuilage – si vous me permettez l’expression. C’est pourquoi nous sommes en contact avec chacune des sociétés concernées – pour les seize personnes chez Orano, comme au sein d’autres sociétés industrielles.
    En lien avec les équipes de la Première ministre, nous travaillons afin de convaincre les entreprises d’accompagner socialement les personnes concernées, afin que personne n’ait à revenir. Le nombre total de cas ne sera pas très élevé car, vous le savez, bénéficier d’un congé de fin de carrière ou d’un compte épargne-temps crédité d’un an ou plus est relativement rare, et concerne plutôt des salariés de très grandes entreprises – d’où notre suivi particulièrement attentif.
    Vous m’interrogez en outre sur les décrets d’application. Les principaux, notamment ce que l’on appelle parfois les mesures paramétriques – décalage de l’âge de départ à la retraite à raison d’un trimestre par an et accélération de la réforme de 2013 – ont été transmis pour avis aux caisses de retraite. Ils seront publiés très rapidement.
    Une certitude : ils sont parfaitement conformes à la loi. Ainsi, ceux qui vous interrogent peuvent s’appuyer sur la loi, sur son exposé des motifs, ainsi que sur l’ensemble des documents annexés au projet de loi. Si les décrets concernent l’âge de départ en retraite et la durée de cotisation,…

    Mme Clémence Guetté

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    Scandaleux !

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    …ils organisent également, à compter du 1er septembre, la revalorisation des pensions minimales, précisent les nouvelles règles de prise en compte des carrières longues, prévoient l’ouverture à la fonction publique de la retraite progressive ou encore l’assouplissement des règles pour le secteur privé. Ainsi, l’ensemble de ces mesures de la réforme entreront en vigueur au 1er septembre. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Égal accès à l’IVG

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Guillaume Gouffier Valente.

    M. Guillaume Gouffier Valente

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    Ma question s’adresse à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé. En cette Journée de l’Europe, au nom du groupe Renaissance, je tiens à réaffirmer notre soutien aux femmes et aux hommes qui se battent en Europe, et ailleurs dans le monde, pour la défense du droit à l’avortement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)
    Madame la ministre déléguée, depuis plusieurs semaines, le Gouvernement est interpellé sur les tensions d’approvisionnement en misoprostol, cette molécule indispensable pour réaliser les interruptions volontaires de grossesse (IVG) médicamenteuses – solution privilégiée par les femmes qui souhaitent avorter. Dans les officines de ville, cette situation complique l’accès aux médicaments qui contiennent la molécule, notamment le Gymiso et le MisoOne – pilules abortives.
    On ne peut parler de pénurie, puisque les établissements de santé disposent de stocks d’au moins un mois, mais ces tensions, ponctuelles, sont sources d’interrogations et inquiètent de manière légitime. Quelles en sont les raisons ? Quelles mesures le Gouvernement a-t-il prises pour les résorber ?
    En outre, alors que le droit à l’avortement est attaqué de manière organisée et régulière par les mouvements conservateurs et d’extrême droite partout dans le monde, y compris en Europe et en France, nous nous devons d’entendre les inquiétudes plus globales que révèlent les interpellations de ces dernières semaines.
    Au moment où nous débattons de la constitutionnalisation du droit à l’avortement et de sa reconnaissance dans la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, cet épisode vient nous rappeler l’importance de l’égal accès de toutes les femmes à l’avortement.
    La délégation aux droits des femmes et à l’égalité des chances entre les hommes et les femmes a déjà mis en lumière cet enjeu, en mars et novembre 2022. Pour notre groupe, Renaissance, il est central. En 2023, en France, il n’est pas acceptable que des femmes qui souhaitent avorter rencontrent des difficultés ou, pire, renoncent. Quelles mesures le Gouvernement a-t-il prises pour garantir l’égal accès de toutes les femmes à l’IVG…

    Mme Clémence Guetté

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    Et à la pilule abortive !

    M. Guillaume Gouffier Valente

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    …et, en réalité, le respect de leur droit à disposer de leur corps ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Mme Cécile Untermaier et M. Olivier Falorni applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé.

    Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée chargée de l’organisation territoriale et des professions de santé

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    Je vous prie de bien vouloir excuser l’absence de M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention, retenu au Sénat. En cette Journée de l’Europe, permettez-moi tout d’abord d’avoir une pensée pour Simone Veil, première femme présidente du Parlement européen, qui a fait du combat pour l’émancipation des femmes et l’accès à l’IVG le cœur de son engagement politique. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe LR. M. Sébastien Chenu et M. Benjamin Lucas applaudissent également.)
    Les difficultés que vous évoquez concernent des tensions sur la fabrication de médicaments à base de misoprostol, fournis par un seul laboratoire, le laboratoire suédois Nordic Pharma. Il s’agit d’un dysfonctionnement dans la chaîne de production pour le médicament Gymiso et d’un problème dans l’analyse du contrôle qualité pour le MisoOne. Cela a décalé la production pendant trois mois.
    Dès qu’il a eu connaissance d’éventuelles tensions, le ministre s’est assuré que l’Agence nationale de sécurité du médicament et des produits de santé (ANSM) avait pris toutes les mesures nécessaires pour garantir l’accès de ces médicaments aux professionnels de santé et aux centres de contraception et d’IVG.
    Concernant les spécialités à base de misoprostol, 46 500 boîtes de Gymiso, couvrant plus de trois mois de consommation habituelle, ont été livrées depuis le 7 avril dernier, en ville et à l’hôpital. Ces livraisons ont permis d’honorer les reliquats de commandes à hauteur de 6 000 boîtes. Les 40 500 boîtes restantes assurent une couverture large des besoins pour les prochaines semaines, dans l’attente de la prochaine livraison prévue début juin. Des mesures de contingentement ont également été prises, afin de garantir une distribution plus régulière, ainsi que l’importation de produits destinés à d’autres marchés.

    Mme Clémence Guetté

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    Écoutez le Planning familial !

    Mme Agnès Firmin Le Bodo, ministre déléguée

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    Concernant le MisoOne, les approvisionnements de la présentation hospitalière – seize comprimés – couvrent les besoins mensuels, mais des tensions subsistent sur la présentation en boîtes d’un comprimé. Depuis fin avril, des livraisons, à hauteur de 45 000 boîtes, sont en cours, qui permettront de normaliser durablement la situation.
    Afin de consolider les approvisionnements, une importation de la spécialité italienne est également en cours, à destination des circuits ville et hôpital. En lien étroit avec l’ANSM, Le ministère de la santé et la prévention suit évidemment avec attention la situation.
    Vous pouvez compter sur mon engagement, et celui de l’ensemble du Gouvernement, pour garantir la pleine effectivité de l’accès à l’IVG pour toutes les femmes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    On est sauvé !

    Réforme de l’enseignement professionnel

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexis Corbière.

    M. Alexis Corbière

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    Monsieur le ministre de l’éducation nationale, jeudi 4 mai, le Président de la République a annoncé un profond bouleversement de l’enseignement professionnel. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
    Avec emphase, il a déclaré « ce n’est pas simplement une réforme, c’est une cause nationale. » Certes, l’enseignement professionnel, qui accueille un tiers des lycéens, le mériterait. Mais votre projet n’est pas une cause, c’est une casse nationale ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, Écolo-NUPES et GDR-NUPES. – « Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.)
    Si nous vous laissons faire, vous allez briser la spécificité de notre enseignement professionnel qui, malgré des difficultés, mérite beaucoup plus.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Quel mépris de classe ! Quel mépris pour la filière professionnelle !

    M. Alexis Corbière

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    Vos annonces sidèrent par les dégâts qu’elles vont causer ; elles illustrent surtout une méconnaissance totale de la réalité. Dans de nombreux médias, vous avez annoncé qu’il s’agissait de rapprocher le lycée professionnel du monde de l’entreprise. Mais c’est déjà le cas ! (« Ah bon ? » sur quelques bancs du groupe RE.)
    Tous les diplômes de l’enseignement professionnel – tous, sans exception – doivent avoir été validés au sein de commissions où siègent les organisations patronales des branches professionnelles. C’est aussi le cas pour la carte des formations. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.) Pourquoi faire croire le contraire ? Dans quel but ?
    Alors que tous les élèves de terminale ont déjà huit semaines de stage, vous proposez d’en ajouter 50 %, sans la moindre justification pédagogique. Votre modèle semble être celui de l’apprentissage contre la formation publique. Pourtant, quand trois élèves sur quatre sous statut scolaire arrivent au baccalauréat, ce n’est le cas que deux apprentis sur cinq…

    Mme Danielle Simonnet

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    Exactement !

    M. Alexis Corbière

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    Vous annoncez de fumeux bureaux des entreprises dans les lycées professionnels. En vérité, ils ne serviront qu’à répondre aux besoins immédiats et à courte vue du patronat !
    Vous proposez une rémunération supplémentaire aux enseignants, mais, vous recyclez le slogan éculé de Sarkozy – travailler plus pour gagner plus. J’ignorais d’ailleurs que vous étiez d’accord avec lui – je vous ai connu à une autre époque…
    Vous annoncez une gratification pour les élèves. Nous y sommes favorables, mais pas avec de l’argent public ! En résumé, nous ne vous laisserons pas faire dans les lycées professionnels ce que vous avez fait pour les retraites ! Retirez votre réforme ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels

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    « L’enseignement professionnel doit d’abord être crédible dans les entreprises pour déboucher sur des emplois. »

    M. Sébastien Chenu

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    Pas comme le Gouvernement !

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    Il ne s’agit pas d’une citation de la majorité, mais de Jean-Luc Mélenchon, alors ministre de l’enseignement professionnel, en 2000. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Erwan Balanant applaudit également. – Mme Raquel Garrido et M. Jérôme Guedj s’exclament.)
    Ce qu’il n’a pas fait, nous allons le faire. (Mme Clémence Guetté proteste.) Notre ambition est claire : faire de la voie professionnelle une voie qui insère, une voie de choix, une voie d’excellence. Pour cela, nous allons rapprocher l’école de l’entreprise et nous l’assumons. (Protestations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Erwan Balanant

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    Arrêtez de couper la parole aux femmes !

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    La voie professionnelle doit être professionnalisante. Elle doit ouvrir des possibilités. (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, mes chers collègues, un peu de silence.

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    En réalité, nous allons réparer cette méconnaissance des entreprises et développer le réseau professionnel des jeunes, dont la faiblesse est un obstacle majeur dans l’accès au premier emploi. Nous allons mettre les moyens qu’il faudra pour accompagner les élèves : gratification des périodes de formation en milieu professionnel et augmentation du nombre de semaines de stage, avec un montant de gratification allant de 600 à 1 200 euros pour certains élèves en terminale. (Mme Clémence Guetté et M. Carlos Martens Bilongo s’exclament.)

    M. Jean-François Coulomme

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    Sur le budget de l’éducation !

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    Cette mesure, mesdames et messieurs les députés de La France insoumise, M. Mélenchon l’a proposée lorsqu’il était ministre. S’il avait mis autant de fougue au sujet des lycées professionnels qu’il en déploie dans les vaines polémiques, nous aurions peut-être avancé ! Emmanuel Macron l’avait annoncé et, lui, il le fait.

    Mme Clémence Guetté

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    Laissez-nous faire !

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    Non, nous ne renonçons pas à la scolarisation des jeunes pour autant. Au contraire, nous allons corriger les fragilités des élèves au lycée professionnel. (M. Alexis Corbière, Mme Raquel Garrido et M. Jean-François Coulomme s’exclament.) Les matières fondamentales seront donc renforcées dès la rentrée 2023, puis à la rentrée 2024, grâce notamment à des groupes à effectifs réduits, permettant de mieux accompagner les élèves en mathématiques et français.
    Vous le voyez, nous ne nous satisfaisons pas du statu quo qui conduit nos jeunes à l’échec. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Nous défendons une réforme ambitieuse et le Gouvernement investit plus d’un milliard d’euros supplémentaires par an. Notre objectif est clair : zéro décrochage, 100 % d’insertion ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Hausse des prix

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marietta Karamanli.

    Mme Marietta Karamanli

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    Ma question s’adresse à Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique. Selon l’Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), l’inflation restera élevée jusqu’à la fin de l’année 2023 dans notre pays – entre 5,5 et 6,5 %. Cette forte hausse générale des prix à la consommation affectera aussi bien le pouvoir d’achat des ménages que la croissance du PIB et le niveau de chômage du pays.
    Il y a deux mois, le Gouvernement prédisait une baisse d’ici l’été, mais nous n’y serons pas. En mars dernier, l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) a fait état d’une augmentation de près de 15 % des prix alimentaires sur douze mois.
    Évidemment, des mesures ont été prises, mais on est loin du compte. Les plus modestes connaissent de grandes difficultés pour acheter les biens de première nécessité et honorer les dépenses contraintes. Il n’existe aucune perspective d’évolution des petits salaires qui ne sont pas soumis à l’indexation, juste au-dessus du Smic. Les retraites de base ont augmenté de 0,8 % le 1er janvier 2023, mais l’inflation a été supérieure à 5 % l’année passée.
    Dans de nombreux territoires ruraux ou périurbains, la facture énergétique a augmenté plus fortement encore qu’ailleurs, de 20 à 40 %, alors qu’on y trouve des logements moins isolés et plus énergivores. Si le dispositif MaPrimeRénov’ a suscité de l’intérêt, le recours à cette prime s’est transformé en galère, avec des travaux à payer malgré la lenteur des versements.
    La Commission européenne plaidait pour taxer les superprofits du secteur de l’énergie, mais vous avez refusé. De nombreux économistes plaident pour faire contribuer les hyper-riches dont le taux d’imposition effectif n’est que de 2 %, mais vous refusez de restaurer la justice fiscale, pour des raisons purement idéologiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Benjamin Lucas applaudit également.)
    Pour remédier à cette situation, des propositions existent : diminuer les taxes sur l’énergie ; organiser des négociations salariales afin d’accélérer l’augmentation des salaires, en particulier les plus modestes ; améliorer l’accès à la rénovation énergétique en abaissant les seuils et en prévoyant un reste à charge nul pour les plus modestes. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
    Qu’allez-vous faire ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion.

    M. Olivier Dussopt, ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion

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    Permettez-moi de répondre à la fois en tant que ministre du travail, du plein emploi et de l’insertion et en tant qu’ancien ministre délégué chargé des comptes publics.

    M. Fabien Di Filippo

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    Et en tant qu’ancien camarade !

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    Votre critique porterait davantage, madame la députée, si le groupe Socialistes et apparentés, auquel vous appartenez, avait voté toutes les mesures de soutien au pouvoir d’achat.

    M. Sylvain Maillard

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    Eh oui !

    M. Olivier Dussopt, ministre

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    Nous sommes le gouvernement qui a pris le plus grand nombre de mesures. Elles visent à lutter contre l’inflation et à accompagner les ménages, notamment grâce à la prise en charge des factures énergétiques. Face à l’inflation, elles visent également à faire du partage de la valeur une réalité. D’abord – c’est normal, c’est la loi –, nous avons revalorisé le Smic, de 6,2 % sur un an, au risque de favoriser l’inflation. Comme le faisait la Première ministre lorsqu’elle était, avant moi, au ministère du travail, nous veillons à ce que le comité de suivi des négociations salariales soit pleinement actif, afin de relancer le dialogue social chaque fois qu’un des niveaux conventionnels d’une branche passe en dessous du Smic.
    Dans les toutes prochaines semaines, nous soumettrons à l’Assemblée nationale un projet de loi visant à transposer l’accord national interprofessionnel sur le partage de la valeur en entreprise. Signé par quatre des cinq organisations syndicales et trois organisations patronales (Mme Valérie Rabault s’exclame), celui-ci permettra d’avancer en matière d’intéressement et de participation dans les entreprises de onze à cinquante salariés et dans le cas des entreprises qui réalisent des résultats exceptionnels, afin qu’elles puissent verser un intéressement tout aussi exceptionnel. À chaque fois nous serons au rendez-vous ; j’espère qu’à cette occasion, au contraire des précédentes, vous le serez avec nous. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Contrôles à la frontière franco-italienne

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Alexandra Masson.

    Mme Alexandra Masson

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    Le 5 mai dernier, un migrant guinéen lançait en direct sur BFM TV : « On va vous envahir ! » Il était au poste-frontière du pont Saint-Louis, à Menton, dans ma circonscription, quelques minutes après que j’avais moi-même vérifié l’absence de tout contrôle de police à ce poste, malgré toutes vos annonces de renfort, monsieur le ministre de l’intérieur.
    Deux jours plus tôt, Jordan Bardella, mes collègues du groupe Rassemblement national Bryan Masson et Lionel Tivoli, et moi-même avions constaté, pour la énième fois, que les effectifs de la police aux frontières étaient largement insuffisants face à la vague migratoire, qui a quadruplé en moins d’un an.
    En réponse à cette déferlante, monsieur le ministre de l’intérieur, vous n’avez rien trouvé de mieux que traiter la cheffe du gouvernement italien d’« incapable » !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il a raison ! Bravo, monsieur Darmanin !

    Mme Alexandra Masson

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    Comme vous n’êtes pas à un paradoxe près, en novembre, lorsque Giorgia Meloni refusait d’accueillir les ONG qui récupèrent les migrants dans les eaux libyennes, vous l’accusiez à l’inverse d’être « inhumaine » et « irresponsable » ! Vos propos et vos actions sont désastreux, vos déclarations irresponsables !

    M. Jérôme Guedj

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    Voilà la porte-parole de l’extrême droite italienne !

    Mme Alexandra Masson

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    Au moment où nos deux pays doivent plus que jamais être partenaires, vous avez affaibli et terni l’image de la France en Italie, ainsi qu’auprès des milliers d’Italiens qui vivent et travaillent chaque jour dans notre pays. Allez-vous présenter vos excuses à l’Italie ?
    Allez-vous prendre vos responsabilités et installer à cette frontière des effectifs pérennes à même de protéger les Français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. Rémy Rebeyrotte

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    C’était la porte-parole de Mme Meloni !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.

    M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer

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    Depuis le 1er janvier, 42 200 personnes se sont présentées à la frontière italienne, c’est-à-dire quatre fois plus qu’en 2022. Vous auriez d’ailleurs pu remercier les forces de l’ordre, puisque les interpellations et les refoulements à la frontière franco-italienne ont augmenté de 80 % : vous n’avez pas eu un mot pour elles mais moi, je les remercie ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs des groupes Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs des groupes RN et LR.)
    Ne vous énervez pas comme ça : vous avez le droit de ne pas soutenir les forces de l’ordre ! (Protestations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Emeric Salmon

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    Si, on les soutient !

    Un député du groupe RN

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    C’est honteux !

    M. Gérald Darmanin, ministre

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    Il faudrait que tous les pays européens se mettent d’accord pour établir un enregistrement, à savoir des contrôles externes aux frontières de l’Europe, afin de pouvoir y refouler les personnes. Il est vrai également qu’il faudrait instaurer une procédure d’asile unique pour éviter les difficultés que vous évoquez. Il faudrait aussi réviser totalement le règlement « Dublin », car nos amis italiens n’acceptent quasiment plus aucun dubliné.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Il faudrait surtout qu’on arrive !

    M. Gérald Darmanin, ministre

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    C’est si vrai qu’au Parlement européen, vous agissez à l’inverse des positions que vous défendez ici et dans votre circonscription : le 20 avril dernier, M. Bardella, président de votre parti, a voté contre le mandat de négociation visant à résoudre ces problèmes. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE, Dem et HOR.)
    Vous ne vivez que des problèmes ; nous essayons de les résoudre ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Caroline Parmentier

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    Ça ne marche pas !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Alexandra Masson.

    Mme Alexandra Masson

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    Je vous les dis régulièrement depuis le 2 août : je soutiens beaucoup plus que vous les forces de l’ordre (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Exclamations sur les bancs du groupe RE),…

    M. Laurent Jacobelli

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    Ils le savent !

    Mme Alexandra Masson

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    …notamment aux postes-frontières, où je vais régulièrement. J’y écoute leurs difficultés, qui sont terribles : vous oubliez de dire qu’en ne résolvant pas le problème migratoire, vous les mettez en danger tous les jours. Des accidents surviennent régulièrement. Sur place, les forces de l’ordre souffrent, beaucoup plus que vous ne le pensez. Arrêtez d’être incompétent, venez sur place et résolvez le problème ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre.

    M. Gérald Darmanin, ministre

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    Je constate qu’il a fallu cette remarque de ma part pour que vous souteniez les policiers, mais c’est un progrès. (Protestations sur les bancs du groupe RN.) Vous ne devez pas être souvent dans votre circonscription, sans quoi vous auriez constaté l’arrivée de 280 CRS : 280 CRS, ça se voit – encore faut-il aller à leur rencontre ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)

    Réouverture des négociations commerciales

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Agnès Carel.

    Mme Agnès Carel

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    Le pouvoir d’achat reste la première préoccupation des Français, majoritairement touchés de plein fouet par l’inflation. Nous saluons la hausse du Smic entrée en vigueur le 1er mai, mais il rattrape les bas salaires ; les difficultés pour finir les fins de mois sont le lot commun de beaucoup de nos concitoyens.
    Les Français ont le sentiment que l’augmentation des prix est sans fin, notamment dans l’alimentation. En effet, l’inflation a continué de grimper, et la hausse dans ce domaine atteignait en mars 15,8 % sur un an. Pourtant, le coût de l’énergie a baissé, tout comme celui du transport ; le prix du blé a perdu 15 % depuis deux mois, celui des engrais 35 %. Ce constat vaut pour la plupart des matières premières, mais ne se traduit pas à la pompe, malgré la baisse significative du prix du baril.
    Certes, en France, les prix ne sont pas recalculés automatiquement, puisque les négociations ne sont organisées qu’une fois par an – elles ont déjà eu lieu cette année. Mais concrètement, les industriels et les distributeurs semblent profiter de cette situation.
    Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté économique, vous avez demandé aux industriels de l’agroalimentaire et à la grande distribution de nouvelles négociations commerciales, pour faire baisser les prix dans les magasins. Le Gouvernement souhaite qu’après l’État et les distributeurs, qui « ont fait des efforts avec le trimestre anti-inflation, en prenant sur leurs marges », les industriels de l’agroalimentaire prennent leur part pour répercuter la baisse des cours de certaines matières premières, par exemple le blé.
    Vous espérez ainsi que les prix baisseront sensiblement à la rentrée de septembre. Cependant, les Français attendent et la rentrée leur semble loin, beaucoup trop loin. À l’approche de l’été, pouvez-vous faire un point sur ces avancées et rassurer nos concitoyens ? (Applaudissements sur quelques bancs des groupes HOR et RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

    M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

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    Il y a un an, les grands industriels sont venus nous voir, Olivia Grégoire – ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme –, Roland Lescure – ministre délégué chargé de l’industrie – et moi, nous disant que le prix du fret maritime flambait, passant à 12 000, 13 000, 15 000 euros par container, comme le prix du blé et du pétrole, et qu’ils avaient absolument besoin de répercuter immédiatement la hausse des prix de gros sur les prix de détail, sans quoi les industries seraient menacées. Nous leur avons tout de suite permis d’indexer l’augmentation des prix de détail, pour protéger les industriels et les emplois.

    M. Julien Dive

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    Le cours du blé chute !

    M. Bruno Le Maire, ministre

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    Désormais, les prix de gros baissent, comme ceux du fret et du blé ; les prix du pétrole brut sont très faibles : les industriels doivent sans délai répercuter ces diminutions sur les prix de détail, afin de protéger nos compatriotes de l’augmentation des prix dans le domaine alimentaire, car elle leur est insupportable. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    M. Sébastien Chenu

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    Je croyais que le pic était passé !

    M. Bruno Le Maire, ministre

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    Je rencontrerai les distributeurs cette semaine pour examiner avec eux comment prolonger le trimestre anti-inflation au-delà du 15 juin. La semaine prochaine, je réunirai tous les grands industriels, de l’agroalimentaire notamment, pour leur demander de répercuter sans délai la baisse des prix de gros sur les prix de détail, lors des négociations commerciales, afin de protéger nos compatriotes de la spirale inflationniste, insupportable pour eux. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) Soit ils l’acceptent, soit, en l’absence de mouvement, Roland Lescure, Olivia Grégoire et moi nous réservons le droit d’utiliser tous les moyens à notre disposition pour que les prix baissent et que nos compatriotes paient les produits alimentaires moins cher. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Agnès Carel.

    Mme Agnès Carel

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    Nous comptons sur vous, monsieur le ministre. (Rires sur les bancs du groupe RN.) Il faut redonner du pouvoir d’achat. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Les Français attendent ; un tel signal leur redonnerait confiance. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe HOR.)

    Opération Wuambushu

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Estelle Youssouffa.

    Mme Estelle Youssouffa

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    Alors que la police et la gendarmerie multiplient les arrestations d’envergure sur le terrain, la mobilisation de Mayotte pour soutenir l’opération Wuambushu ne faiblit pas. Des milliers de nos compatriotes ont encore défilé ce week-end à Acoua dans le nord de l’île, mais aussi à Lyon, à Marseille et à Saint-Denis de La Réunion.
    L’extraordinaire mobilisation citoyenne mahoraise traduit notre aspiration à vivre en sécurité et notre reconnaissance pour les efforts déployés afin de nous permettre de retrouver une vie normale. Elle manifeste aussi notre gratitude pour l’écoute et pour la solidarité qui se sont exprimées, ici, par-delà les clivages politiques, dans les médias et lors des manifestations. Il est capital d’être enfin entendus, que nos compatriotes nous comprennent ; cela nous redonne espoir en l’avenir de Mayotte. Pour cela, nous vous disons à tous merci.
    La mobilisation citoyenne révèle la dignité et le courage d’un peuple face au mensonge du président comorien, qui encourage implicitement la terreur et nie notre souveraineté nationale à Mayotte. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LIOT. – M. Jean-Charles Larsonneur applaudit aussi.) Azali Assoumani s’est entretenu hier avec le Président de la République, Emmanuel Macron, à l’Élysée. Il se permet de faire la leçon à la France ici, à Paris,…

    M. Patrick Hetzel

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    C’est scandaleux, effectivement !

    Mme Estelle Youssouffa

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    …et de bloquer l’un des volets de l’opération, en refusant de reprendre ses ressortissants en situation irrégulière.
    Monsieur le ministre de l’intérieur et des outre-mer, les négociations diplomatiques ont-elles abouti ?

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Il a détourné l’argent !

    Mme Estelle Youssouffa

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    Les Comores vont-elles enfin autoriser les reconduites à la frontière ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT. – MM. Nicolas Turquois et Frédéric Valletoux applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.

    M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer

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    Merci pour votre soutien à l’action du Gouvernement et, surtout, aux femmes et aux hommes qui travaillent pour l’État, en particulier aux forces de l’ordre, placées sous l’autorité du préfet. Je les salue. Depuis le début de l’opération, 134 interpellations ont eu lieu. Un tiers des bandes criminelles que la justice, la police et la gendarmerie avaient dans le viseur ont été interpellées à Mayotte : c’est le résultat concret du travail en faveur de la paix publique qu’a voulu le Président de la République.
    L’opération a mené à la destruction d’habitats illégaux, à l’interpellation de fauteurs de troubles et de délinquants et à des reconduites à la frontière…

    M. Pierre Cordier

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    Combien ?

    M. Gérald Darmanin, ministre

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    …vers plusieurs pays – Sri Lanka, Madagascar, Afrique des Grands Lacs et Comores.
    Depuis une dizaine de jours, les liaisons maritimes avec les Comores sont interrompues – pas les liaisons aériennes. La ministre de l’Europe et des affaires étrangères et moi-même avons rencontré nos homologues ce jour, à midi. À quinze heures a été publié un communiqué commun, dont je vous donne lecture : « Les deux délégations ont réaffirmé leur volonté de lutter contre les trafics et contre les passeurs, […] y compris par la reprise des liaisons maritimes. »
    Les liaisons maritimes entre les Comores et Mayotte vont donc reprendre, grâce à l’action du Président de la République qui a reçu hier M. Azali Assoumani. Le travail que nous menons à Mayotte pour la paix publique se poursuivra donc ; les policiers et les gendarmes resteront aussi longtemps que nécessaire. Tous les jours, ils font ce qu’aucun autre gouvernement n’a fait pour Mayotte et pour les Mahorais, qui en ont bien besoin. Par votre entremise, madame Youssoufa, et par celle de M. Kamardine, je veux leur dire que nous entendons leur soutien et que nous les en remercions. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Continuité territoriale

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.

    M. Jean-Philippe Nilor

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    Madame la Première ministre, à la veille de la commémoration de l’abolition de l’esclavage, une nouvelle forme de servitude s’abat de plein fouet sur les populations dites ultramarines, dont la mobilité est forcément captive. Pour le seul mois de mars, le coût du billet d’avion a augmenté de plus de 50 % en Martinique et en Guadeloupe. Entre le 1er et le 25 août, il faudra débourser 2 231 euros pour un Paris-Fort-de-France, contre 1 037 euros pour un Paris-Miami. Objectivement, la flambée du coût du kérosène et la guerre en Ukraine n’expliquent pas une telle différence de prix pour des durées de vol équivalentes. Les tarifs plus qu’abusifs, imposés par des compagnies aériennes oligopolistiques à des peuples qui ploient déjà sous la vie chère, constituent un véritable scandale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Christine Pires Beaune et M. Frédéric Maillot applaudissent également.)
    Depuis 1976, l’État a doté la Corse d’une délégation de service public. Au titre de la continuité territoriale, il y dépense aujourd’hui 220 millions d’euros, ce qui nous réjouit, contre seulement 45 millions pour l’ensemble des territoires dits d’outre-mer, ce qui nous révolte. Madame la Première ministre, au nom du principe d’égalité, quand adopterez-vous enfin, dans les territoires dits d’outre-mer, une vraie politique de continuité territoriale dotée de véritables moyens budgétaires, à l’instar de la Corse ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Frédéric Maillot applaudit également.)

    M. Carlos Martens Bilongo

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.

    M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer

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    Je vous prie d’excuser Jean-François Carenco, qui est actuellement à Saint-Pierre-et-Miquelon. (Protestations sur les bancs du groupe RN.) J’ai conversé avec lui ce matin et, comme l’ensemble des membres du Gouvernement, il a tout à fait conscience de l’augmentation des prix dans l’espace aérien, notamment pour nos compatriotes des Antilles. Nous avons augmenté de 50 % la prise en charge des billets par l’État, mais ce n’est sans doute pas encore assez. Jean-François Carenco a rendez-vous avec Bruno Le Maire dans les tout prochains jours pour évoquer ce sujet, en particulier l’inflation des prix des billets d’avion. S’agissant de la continuité territoriale, Jean-François Carenco et Clément Beaune recevront, à la fin de cette semaine ou au début de la prochaine, l’ensemble des parlementaires d’outre-mer et singulièrement, les parlementaires antillais.
    Permettez-moi de rappeler que les collectivités locales ont la possibilité de contribuer, avec l’État, à cet effort supplémentaire visant à diminuer les prix pratiqués par les compagnies aériennes pour nos concitoyens ultramarins, en lien avec la politique de Bercy : elles n’y ont pas recouru jusqu’à présent. (Mme Mathilde Panot s’exclame.) Quoi qu’il en soit, vous posez là une question importante, monsieur le député. L’État a apporté une première réponse en augmentant de 50 % sa prise en charge, mais nous devons aider davantage encore nos compatriotes antillais.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Philippe Nilor.

    M. Jean-Philippe Nilor

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    Monsieur le ministre, je vous parle du prix des transports aériens et vous essayez de me mener en bateau ! (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Dans tous les outre-mer, la colère gronde et les gens ont de plus en plus le sentiment d’être rackettés par les compagnies aériennes organisées en oligopoles, sous le regard complice de l’État et de la Commission européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES, dont certains députés se lèvent pour applaudir. – Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN. – Mme Christine Pires Beaune applaudit également.)

    M. Carlos Martens Bilongo

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    Bravo !

    Mme Caroline Parmentier

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    Il a raison !

    Réforme des retraites

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthieu Marchio.

    M. Matthieu Marchio

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    Monsieur le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique, la colère des Français contre la réforme des retraites ne retombe pas ! Vous vous êtes obstiné à mener cette réforme injuste et antisociale dans un contexte pourtant particulièrement difficile pour nos compatriotes. La hausse des prix est durement ressentie par les classes populaires et moyennes, celles-là mêmes que vous assommez un peu plus en les condamnant à trimer plus longtemps au travail ou au chômage, avant de gagner une retraite qui ne leur permettra même pas de boucler leur fin de mois. Vous avez menti à tous ces Français modestes en leur promettant une retraite minimale à 1 200 euros ! Ce ne sont pas les mesures que vous annoncez qui feront oublier vos perfidies : vous distribuez des chèques, qui ne sont en rien une réponse durable aux besoins des Français, mais qui vous permettent – du moins l’espérez-vous – d’acheter la paix sociale. Là encore, personne n’est dupe.
    Votre politique gouvernementale est devenue l’archétype d’une déconnexion profonde d’avec la réalité que vivent la majorité des Français. Alors que nombre d’entre eux peinent à faire le plein et à assurer l’entretien de leur véhicule, vous faites la promotion d’un plan vélo de 2 milliards d’euros !

    M. Sébastien Chenu

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    Surréaliste !

    M. Matthieu Marchio

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    Allez donc dire aux habitants du bassin minier de prendre leur vélo sur la rocade minière pour aller travailler : vous n’avez décidément rien compris ! Vos priorités consistent à créer une cellule de communication anti-RN ou à forcer les mairies à apposer le drapeau européen sur leur fronton : avec ça, les gens vont sûrement vivre mieux ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Quelle démagogie !

    M. Matthieu Marchio

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    Puisque vous nous reprochez de citer Marine Le Pen – dont la popularité vous dérange –, je vais vous prendre au mot et citer plutôt du Macron : quand mettrez-vous fin au mépris social pour les gens « qui ne sont rien » ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique.

    M. Emeric Salmon

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    Et des prix Goncourt !

    M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique

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    Les solutions du Rassemblement national sont totalement déconnectées de la réalité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – M. Croizier applaudit également.) Qu’est-ce que cela aurait donné, concrètement, si nous les avions suivies ces dernières années pour résoudre les problèmes des Français ? Le retour à la retraite à 60 ans aurait ruiné le système de retraites par répartition. (Protestations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Laurent Jacobelli

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    N’importe quoi !

    M. Bruno Le Maire, ministre

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    Nous serions sortis de l’euro, comme l’avait proposé Marine Le Pen, alors même que l’euro nous a protégés pendant la crise du covid-19 en nous permettant d’émettre de la dette en commun. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    Un député du groupe RN

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    Et M. Le Maire aurait eu le prix Goncourt !

    M. Bruno Le Maire, ministre

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    Pendant cette crise, nous aurions tous été soignés à la chloroquine : je ne suis pas sûr que la santé des Français s’en serait bien portée ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Si nous avions suivi les solutions de Marine Le Pen, nous serions aujourd’hui du côté de la Russie et non de celui de l’Ukraine, du côté de l’oppresseur et non de celui de la liberté, du côté de l’agresseur et non de celui du résistant. Voilà la réalité des propositions de Marine Le Pen ! (Mêmes mouvements.) Quant à l’inflation, quelle proposition avez-vous défendue ? Vous n’avez voté ni le gel des prix du gaz, ni le plafonnement des prix de l’électricité, ni l’indemnité carburant pour les travailleurs, ni la revalorisation des minima sociaux. Mesdames et messieurs les députés du Rassemblement national, vous n’avez voté aucune des mesures protégeant les Français de l’inflation ! (Vives exclamations sur les bancs du groupe RN.) Votre seule solution est la baisse de la TVA, qui engraisserait les distributeurs au lieu de protéger les consommateurs.

    M. Sébastien Chenu

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    Personne ne vous croit !

    M. Bruno Le Maire, ministre

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    Les solutions du Front national ne sont depuis dix ans que des illusions : nous ne cesserons de les dénoncer pour proposer des solutions concrètes, efficaces et tangibles. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthieu Marchio.

    M. Matthieu Marchio

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    Il y a un an, en visite dans le bassin minier, Emmanuel Macron avait entendu ce que les gens pensaient de son projet. Leurs sentiments n’ont pas changé : ils n’attendent rien de vous.

    Mme Caroline Parmentier

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    Rien !

    M. Matthieu Marchio

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    Vivement l’alternance ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Année européenne des compétences

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Charlotte Goetschy-Bolognese.

    Mme Charlotte Goetschy-Bolognese

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    La semaine dernière, le Président de la République détaillait les grands axes de la réforme des lycées professionnels : lutte contre le décrochage scolaire, insertion professionnelle et revalorisation du travail des enseignants. Ces annonces sont cruciales, car elles concernent un très grand nombre de lycéens : chaque année, un collégien sur trois s’oriente vers un lycée professionnel, ce qui représente 621 000 élèves et 64 000 apprentis. Ces annonces sont importantes, alors que nous entrons dans l’année européenne des compétences, qui devra notamment permettre une meilleure mobilité internationale des apprentis par le biais du programme Erasmus +. Pendant longtemps, les lycées professionnels ont été dévalorisés : il nous appartient désormais de leur donner le rayonnement qu’ils méritent. À ce titre, nous ne pouvons que nous réjouir des mesures annoncées, que ce soit l’adaptation de la terminale à chaque lycéen, la gratification des stages ou encore le renforcement du lien entre lycées et entreprises.
    Parce qu’une main-d’œuvre qualifiée est synonyme d’emploi mieux rémunéré, il est primordial d’accompagner les jeunes vers les secteurs d’avenir. Aussi, madame la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels, pouvez-vous me préciser si une réforme de la carte des formations tenant compte des spécificités de chaque territoire est envisagée ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    M. Sylvain Maillard

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels

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    Effectivement, en cette Journée de l’Europe, nous lançons l’année européenne des compétences, qui prend la suite de l’année européenne de la jeunesse. La réforme du lycée professionnel, présentée la semaine dernière à Saintes par le Président de la République, s’inscrit dans une dynamique dont la France est leader, grâce à l’augmentation exceptionnelle de l’apprentissage, grâce à la large popularisation du compte personnel de formation et grâce à l’évolution et au développement de la validation des acquis de l’expérience. Cette réforme vise très concrètement à lutter contre le décrochage scolaire, trop fréquent en lycée professionnel. Je tiens à rappeler que celui-ci n’est pas dû aux lycées eux-mêmes ni aux personnels éducatifs : ces fragilités existaient auparavant.
    Nous avons déjà travaillé à la réduction du décrochage scolaire dès le primaire et le collège et nous poursuivrons cette tâche, afin de favoriser l’insertion professionnelle et la poursuite d’études réussies pour les élèves, ainsi que la valorisation des filières stratégiques pour le pays. Le changement d’image de la voie professionnelle que nous devons opérer passera par la réussite des jeunes, ainsi que par l’ouverture de filières ouvrant de véritables perspectives professionnelles. C’est pourquoi de nouvelles formations seront ouvertes dès la rentrée prochaine, avec de nombreuses places sur les 1 000 places ouvertes au total.
    Nous mènerons également un énorme travail relatif à l’attractivité des filières et des métiers, dès leur découverte par les élèves et le démarrage de la formation. Parallèlement, nous fermerons les formations dont les taux d’insertion ne sont pas suffisants – certains atteignent à peine 10 %. Les formations seront ouvertes en fonction des territoires : parmi les dix métiers les plus recherchés, les sept premiers les concernent tous. Chaque année, 1 milliard d’euros supplémentaires seront investis. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    Valdunes

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Fabien Roussel.

    M. Fabien Roussel

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    Ce matin, avec une délégation d’élus communistes, j’étais à Trith-Saint-Léger pour rencontrer des salariés de Valdunes, entreprise menacée par le départ de son principal actionnaire, le chinois MA Steel. Valdunes, avec son site de Trith-Saint-Léger et sa forge de Leffrinckouke, est la seule entreprise française capable de fabriquer des roues, des axes et des essieux permettant de faire rouler nos trains, nos métros et nos tramways : le savoir-faire de ses 346 salariés est unique. Nous avons besoin de ces deux sites, Trith-Saint-Léger et Leffrinckouke, pour livrer le matériel nécessaire aux régions par le biais d’Alstom et aux entreprises publiques que sont la SNCF et la RATP.
    Il y a des années, cette usine a été livrée à des actionnaires étrangers qui s’en vont aujourd’hui : dont acte. C’est l’occasion de reprendre la main sur un outil stratégique indispensable à la filière industrielle comme à la transition écologique. Avant tout, il revient à la SNCF de faire travailler la France plutôt que d’autres pays. Il y a dix ans, la SNCF commandait encore à Valdunes 45 000 roues et 5 000 essieux par an. L’année dernière, ce chiffre est tombé à 3 500 roues et 3 essieux. La SNCF, la RATP et Alstom, qui vivent largement de l’argent public, doivent s’engager à travailler d’abord avec Valdunes, plutôt que de profiter avec cynisme de la concurrence libre et non faussée : une heure de travail qui part en Chine ou, plus généralement, à l’étranger, c’est une heure de chômage que nous payons en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES. – Mme Cécile Untermaier applaudit également.)

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Va dire ça à tes camarades chinois !

    M. Fabien Roussel

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    Il faut arrêter cette fuite, qui tue notre industrie et nos emplois. Pour rendre compétitive Valdunes, il faut aussi investir dans sa forge et lui garantir du gaz et de l’électricité peu chers et décarbonés : c’est possible. Il faut régler ce problème énergétique. Monsieur le ministre délégué chargé de l’industrie, vous travaillez à un plan en faveur de l’industrie verte : Valdunes doit en faire partie. BPIFrance doit pouvoir entrer rapidement dans le capital de l’entreprise pour garantir son avenir et attirer des investisseurs, des industriels et non des prédateurs financiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES. – Mme Eva Sas et M. Jean-Claude Raux applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre délégué chargé de l’industrie.

    M. Roland Lescure, ministre délégué chargé de l’industrie

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    D’abord, je reconnais que, contrairement à d’autres qui découvrent l’entreprise MG Valdunes depuis qu’elle fait la une de l’actualité, depuis déjà de nombreuses semaines, vous êtes aux côtés des 130 salariés qui travaillent à Leffrinckouke et des 250 autres qui travaillent à Trith-Saint-Léger, et que vous m’avez alerté sur cette situation délicate. L’entreprise MA Steel, rachetée, depuis, par Baosteel Group, grande entreprise chinoise…

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Ah !

    M. Roland Lescure, ministre délégué

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    …qui, étant détenue par l’État, n’a pas le droit d’aider les entreprises à l’international, avait acheté MG Valdunes, en espérant vendre des roues en Chine, ce qui n’a pas été possible.

    M. Fabien Roussel

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    Non !

    M. Roland Lescure, ministre délégué

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    Du coup, l’entreprise est en surcapacité car elle ne vend des roues qu’en France et en quantité insuffisante – vous l’avez dit. Dès lors, nous devons d’abord regarder de très près la situation avec l’actionnaire et la direction pour qu’à court terme l’activité puisse continuer. En effet, il existe un risque de rupture d’approvisionnement en acier, qui sert à fabriquer les roues de l’entreprise MG Valdunes, lequel vient de Chine. Telle est ma priorité pour les jours et les semaines qui viennent. En outre, nous avons besoin de nous assurer que le coût de l’approvisionnement en énergie par Ascoval n’est pas trop élevé. (M. Fabien Roussel acquiesce.)
    À moyen terme, nous devrons trouver un repreneur alors que l’outil de travail, la forge, qui a plus de cinquante ans, est obsolète. Les besoins d’investissements sont donc importants. Nous avons également besoin de redonner de la compétitivité au site qui fabrique les roues. J’ai bien peur que l’aide de la BPIFrance ne soit pas suffisante. Nous ne nationaliserons pas la production de roues : nous devons donc trouver un investisseur stratégique, et non financier – vous l’avez dit –, qui redressera tout ou partie de l’activité. En attendant, nous suivons très près la situation, notamment celle des salariés qui travaillent encore pour cette entreprise. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Enjeux géostratégiques

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Virginie Duby-Muller.

    Mme Virginie Duby-Muller

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    Ma question s’adresse au ministre des armées. Le 4 avril dernier, vous avez présenté la loi de programmation militaire 2024-2030 (LPM). Ce texte, qui fixe les orientations de notre politique de défense pour les sept prochaines années, alloue un budget de 413 milliards d’euros à nos armées, soit 2,1 % du PIB. Cet effort budgétaire important n’est pas un luxe : c’est un impératif eu égard à la dégradation du contexte géopolitique, marqué par la guerre en Ukraine ainsi que par l’émergence de nouvelles menaces – terrorisme, notamment en Afrique, prolifération des armes nucléaires en Corée du Nord et en Iran, guerre sous voûte nucléaire de la Russie, menaces hybrides, en particulier dans les outre-mer.
    À cette instabilité géopolitique s’ajoutent des sauts technologiques continus dans les domaines de la robotique, des drones et, bientôt, de la technologie quantique ou de l’intelligence artificielle. Dans ce monde chaque jour plus dangereux, la guerre en Ukraine a montré que la manière de faire la guerre évolue également. Outre les champs de conflictualité traditionnels – air, terre et mer –, il faut désormais ajouter l’espace et les fonds marins, ainsi que les champs immatériels, tels que le cyberespace ou les fake news. La France ne peut ignorer ces nouveaux enjeux géostratégiques si elle veut assurer ses missions prioritaires en matière de défense.
    Certes, la LPM consacre des moyens budgétaires importants en vue d’adapter nos armées aux enjeux actuels, notamment en matière technologique. Ainsi, 4 milliards sont dédiés au cyber, 6 milliards à l’espace, 8 milliards au numérique et 10 milliards à l’innovation. Toutefois, on peut regretter que ces investissements ne soient pas au niveau de ceux réalisés par le Royaume-Uni ou l’Allemagne et que, surtout, ils soient réalisés après le quinquennat d’Emmanuel Macron, alors qu’il faudrait prévoir une montée en puissance dès 2025. Sans compter que la politique de défense est avant tout une affaire humaine : l’armée a besoin d’hommes et de femmes prêts à s’engager pour leur pays. Dès lors, comment comptez-vous mettre les ressources humaines en cohérence avec les ambitions stratégiques de la LPM ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    M. Patrick Hetzel

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée des anciens combattants et de la mémoire.

    Mme Patricia Mirallès, secrétaire d’État chargée des anciens combattants et de la mémoire

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    Je vous prie d’excuser Sébastien Lecornu, ministre des armées, qui suit la situation en Guyane. Les cyberattaques auxquelles notre pays est confronté sont, depuis quelques mois, de plus en plus nombreuses. En effet, sont menées des actions cybercriminelles, par exemple, contre l’hôpital de Corbeil-Essonnes, des actions de groupes de hackers, comme celle menée contre le site internet du Sénat la semaine dernière, des actions plus stratégiques provenant d’États, telles que le sabotage de renseignements. Sachez que la France prend déjà la menace cyber très au sérieux. Les agents de l’Anssi – Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information –, qui dépendent de la Première ministre, sont les pompiers cyber de la France. Nous renforcerons leurs prérogatives dans la prochaine loi de programmation militaire. D’autres ministères sont également impliqués, notamment Bercy,…

    M. Marc Le Fur

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    Ce n’est pas la réponse à la question !

    Mme Patricia Mirallès, secrétaire d’État

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    Pardon ? …le ministère de la justice, le ministère de l’intérieur et des outre-mer et le Quai d’Orsay. Quant au ministère des armées, il développe ses capacités cyber pour garantir que les opérations militaires, notamment la dissuasion, pourront continuer malgré d’éventuelles attaques cyber. Le ministère des armées contribue aussi à la cyberdéfense de la nation – permettez-moi de rester discrète à ce sujet. Les services de renseignements participent à l’imputation d’attaques et la DGA – direction générale de l’armement – met à disposition son centre d’expertise pour analyser les logiciels malveillants. Le ministère est chargé de la réponse cyber à une attaque.
    Face à l’augmentation des menaces, nous souhaitons que la France reste dans le match des grandes nations du cyber, afin de développer notre capacité de détection sur nos systèmes et nos moyens de riposte, notamment en utilisant l’intelligence artificielle et le quantique. Dans la LPM, nous proposons d’instaurer une filière d’excellence cyber autour de l’École polytechnique. Nous souhaitons ainsi doubler la réserve cyber, qui est un pont entre les entreprises et l’État. C’est un effort auquel toute la nation doit se préparer : le ministère des armées prendra sa part en répondant à ces besoins, dans le cadre de la LPM, qui sera débattue tout à l’heure en commission.

    M. Pierre Cordier

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    Ce n’est pas le sujet !

    M. Patrick Hetzel

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    Cela reste très vague !

    Lutte contre le crime organisé

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Paul-André Colombani.

    M. Paul-André Colombani

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    « L’infiltration de nos sociétés par les réseaux criminels dépasse toutes les fictions ». Cette citation pourrait être l’accroche d’une série policière. Il n’en est pourtant rien. Ces mots, ce sont ceux prononcés récemment par Laure Beccuau, procureure de Paris, à la tête de la juridiction nationale chargée de la lutte contre la criminalité organisée. Elle décrit l’essor vertigineux du crime organisé en Europe, dépassant aujourd’hui toute imagination. La situation est pour le moins inquiétante : les groupes mafieux sont, dit-elle, aujourd’hui « sans limites » en ce qui concerne « les financements, la projection géographique et le recours à la violence ».
    Des pays voisins ou frontaliers, comme les Pays-Bas ou la Belgique, constatent avec impuissance l’emprise grandissante de la Mocro Maffia, qui menace sérieusement leur fonctionnement démocratique. La Commission européenne s’est emparée du sujet et annonce vouloir légiférer en matière de la lutte contre le crime organisé. La France elle-même n’est évidemment pas épargnée par les phénomènes mafieux, tant s’en faut. Face à ce constat, monsieur le garde des sceaux, vous l’avez souligné avec lucidité dans une interview accordée au Parisien la semaine dernière : « Il n’est désormais plus possible de fermer les yeux. » À ce sujet, je vous ai déjà interpellé sur la mise en œuvre de trois mesures, également réclamées par les collectifs antimafia : premièrement, la nécessaire évolution du statut de repenti ; deuxièmement, la confiscation systématique des avoirs criminels, qui fait d’ailleurs l’objet d’une proposition de loi présentée par mon collègue Jean-Luc Warsmann, qui a fourni un travail remarquable ; enfin, une évolution législative inspirée des normes ayant déjà fait leur preuve en Italie, dans le cadre du dispositif qui protège les marchés publics relatifs au tunnel Lyon-Turin. Aussi, êtes-vous prêt à inscrire ces mesures au cœur de votre stratégie de lutte contre la mafia et à faire de celle-ci votre grande priorité ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

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    Votre question est intéressante. Pendant trop longtemps, nous avons négligé ces phénomènes criminels. Vous avez rappelé, à juste titre, ce que des organisations criminelles ont été capables de faire récemment en Belgique et aux Pays-Bas. La réponse est triple, si j’ose dire. D’abord, elle est européenne, n’en déplaise aux eurosceptiques : conduite d’enquêtes communes, rôle d’Eurojust – unité de coopération judiciaire de l’Union européenne –, projet de règlement et projet de directive « E-evidence » – « preuves électroniques » –, sur lesquels nous avons travaillé. Qu’il me soit permis de dire que, récemment, les enquêtes communes ont permis de démanteler les deux plus gros trafics de drogue de l’histoire.

    M. Sylvain Maillard

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    Eh oui !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Deuxièmement, vous avez mille fois raison, il faut taper au portefeuille. L’Agrasc – Agence de gestion et de recouvrement des avoirs saisis et confisqués –, dont nous avons multiplié les antennes, travaille sur la confiscation des avoirs criminels. Récemment, Gabriel Attal et moi-même sommes allés faire une vente qui nous a rapporté beaucoup d’argent. Vous le savez, nous pouvons confisquer des immeubles et les distribuer à des associations caritatives. Je veux remercier chaleureusement le député Warsmann, avec lequel nous travaillons en permanence.
    Troisièmement, s’agissant du statut du repenti, il y a une dizaine de jours, je suis allé en Italie pour m’inspirer de ce qu’ils font car, hélas, depuis très longtemps, ils sont confrontés aux phénomènes mafieux. Je veux remercier Sacha Houlié, président de la commission des lois, mais également le président Marcangeli, avec lequel nous avons commencé à travailler. Je vous annonce qu’un texte sur la question des repentis sera prêt avant la fin de l’année. (M. Laurent Croizier applaudit.)

    Mme Christine Arrighi

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    Il était temps !

    Rénovation énergétique des écoles

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Holroyd.

    M. Alexandre Holroyd

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    Un parc immobilier zéro émission avant 2050, telle est l’ambition qu’a fixée le Parlement européen il y a quelques semaines à Strasbourg. En cette Journée de l’Europe, qui est chère à nombre d’entre nous, je veux insister sur un objectif triplement essentiel. Il est essentiel, d’abord, car vital pour notre planète. Le bâtimentaire représente 36 % des émissions de gaz à effet de serre de l’Union européenne. Il est essentiel, ensuite, pour le portefeuille des Français. En effet, 1 euro sur 20 dépensés par nos concitoyens est consacré au chauffage. Il est primordial, enfin, pour notre souveraineté nationale et européenne, en vue de réduire nos dépendances énergétiques qui constituent une faiblesse collective majeure dans un monde toujours plus incertain. Depuis plus de six ans, la majorité s’est pleinement engagée pour réaliser la décarbonation de notre parc immobilier.

    Mme Eva Sas

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    Pas vraiment !

    M. Alexandre Holroyd

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    Je pense à la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Elan, et à la loi du 22 août 2021 portant lutte contre le dérèglement climatique et renforcement de la résilience face à ses effets, dite loi climat et résilience. Ce matin, j’étais à vos côtés, en ma qualité de président de la commission de surveillance de la Caisse des dépôts et consignations, avec notre collègue Thomas Cazenave, président de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, pour le lancement du vaste chantier national de rénovation thermique de toutes les écoles du pays. Nous parlons de 12 millions d’écoliers, de collégiens et de lycéens, et de 50 000 écoles, collèges et lycées en France, soit la moitié du bâtimentaire public. À l’image des immenses chantiers du XIXe siècle de Guizot et de Ferry, ce grand projet de restauration écologique de nos écoles doit fédérer toutes les forces vives de notre pays autour de l’ambition alliant transition écologique, souveraineté énergétique, vertu pédagogique et bon sens financier.
    Monsieur le ministre, pouvez-vous ici, devant la représentation nationale, détailler comment, avec les collectivités territoriales, vous entendez garantir à de réels ou hypothétiques petits-enfants que leur école atteindra l’objectif européen, où qu’elle se situe sur le territoire national ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

    M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

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    Vous avez évoqué la réunion de travail de ce matin, qui a permis à l’ensemble des forces vives de se retrouver autour de ce grand chantier, promis par le Président de la République, le 24 avril dernier, qui est une des briques essentielles de la planification écologique que la Première ministre coordonne. L’ensemble du bâti scolaire représente dans notre pays 130 millions de mètres carrés, ce qui donne une idée du triple enjeu à relever : un enjeu climatique pour diminuer nos émissions de gaz à effet de serre ; un enjeu budgétaire pour que les collectivités puissent maîtriser l’évolution de leur facture énergétique, compte tenu des tendances actuelles ; enfin, un enjeu de transmission – si j’ose dire –, car la qualité de la transmission pédagogique est altérée dans des bâtiments trop chauds ou trop froids. Il convient donc d’instaurer un cadre, afin d’aider nos enseignants et nos professeurs dans la continuité des actions menées par Pap Ndiaye et Carole Grandjean.
    Cinq outils sont à la disposition des collectivités territoriales. D’abord, 220 millions d’euros sont alloués au programme Actee + – Action des collectivités territoriales pour l’efficacité énergétique –, dans le cadre duquel sont délivrés les C2E – certificat d’économie d’énergie. Ensuite, le fonds Chaleur bénéficiera de 520 millions et, le Fonds vert, qui est la nouveauté de l’année, de 2 milliards. Du reste, j’ai le plaisir de vous indiquer que, parmi les 1 300 premiers lauréats, 200 sont des bâtiments scolaires qui vont bénéficier d’une rénovation.

    M. Alexandre Holroyd

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    Très bien !

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Ensuite, je souhaite annoncer deux nouvelles. D’abord, aujourd’hui même, seront soumis à consultation les décrets d’application de la loi visant à ouvrir le tiers financement à l’État, à ses établissements publics et aux collectivités territoriales pour favoriser les travaux de rénovation énergétique, présentée par Thomas Cazenave, votée à l’unanimité à l’Assemblée nationale et au Sénat. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    M. Sylvain Maillard

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    Eh oui !

    M. Christophe Béchu, ministre

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    Enfin, la Caisse des dépôts et consignations, sous votre surveillance, monsieur le président, lance le programme EduRenov – au cœur de la réunion de ce matin –, dans le cadre duquel la rénovation énergétique de 10 000 écoles sera lancée d’ici la fin du quinquennat. Ce programme sera décliné avec toutes les associations d’élus à la mi-mai. Puis, avant le début de l’été, nous mènerons une campagne de communication ciblée, afin de préciser à tous les maires de France les moyens de relever ensemble ce chantier du siècle pour le climat, pour le budget et pour nos enfants. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    Manifestation d’extrême droite

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marianne Maximi.

    Mme Marianne Maximi

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    Monsieur le ministre de l’intérieur et des outre-mer, hier, nous commémorions la victoire des Alliés sur la barbarie nazie ; samedi, des nostalgiques des jeunesses hitlériennes défilaient bien tranquillement dans les rues de Paris, accompagnés de deux proches de Mme Le Pen.

    M. Frédéric Cabrolier

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    Diffamation !

    Mme Marianne Maximi

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    Depuis, silence sur les bancs des ministres. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Puisque vous êtes si prompt à condamner et à interdire, faut-il comprendre que votre silence vaut approbation ? Alors que des dizaines d’événements contre la réforme des retraites sont régulièrement interdits, cette manifestation était autorisée par la préfecture, qui a considéré qu’il n’y avait pas de risque de troubles à l’ordre public. Comment le croire, dans un contexte où les agressions d’extrême droite se multiplient ? Ainsi, il y a quelques jours, des néonazis qui se rendaient à la finale de la Coupe de France de football ont agressé des passants, simplement parce qu’ils n’étaient pas blancs, et tabassé un de nos assistants parlementaires qui essayait de filmer ces exactions…

    Mme Danielle Simonnet

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    C’est une honte !

    Mme Marianne Maximi

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    …– je vous confirme que celui-ci a bien déposé plainte.
    Comment le croire, quand on sait que la préfecture a autorisé, par un arrêté du 5 mai, l’emploi de drones précisément pour surveiller cette manifestation et prévenir les atteintes à l’ordre public ? La préfecture est de mauvaise foi quand elle se cache derrière le risque d’annulation d’une interdiction par le tribunal administratif. De nombreuses interdictions de manifester contre la réforme des retraites ont déjà été cassées par la justice sans que cela vous empêche de continuer à prendre de telles décisions ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Pourquoi ce deux poids deux mesures ? Doit-on comprendre que les casseroles sont plus dangereuses pour l’ordre public que des fascistes violents ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) C’est malheureusement le message que vous envoyez lorsque vous permettez que le Président fasse vider les Champs-Élysées pour défiler à l’abri du bruit des casseroles et que l’on autorise le bruit des bottes à retentir dans nos rues (Protestations sur quelques bancs du groupe RE), grâce à la complicité silencieuse des pantoufles du Gouvernement ! (« Honteux ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES – M. Olivier Faure applaudit également.)
    Cessez de stigmatiser le peuple qui lutte et voyez la violence d’extrême droite, qui s’organise sous votre nez ! Quand allez-vous agir ? (Les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent. – MM. Gérard Leseul et Olivier Faure applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la citoyenneté.

    Mme Sonia Backès, secrétaire d’État chargée de la citoyenneté

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    Oui, la Première ministre et le ministre de l’intérieur l’ont dit, les images que nous avons vues samedi sont insupportables.

    M. Thomas Portes

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    Nous n’aurions jamais dû les voir !

    Mme Sonia Backès, secrétaire d’État

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    Mais la boussole du ministère de l’intérieur, c’est le respect de l’État de droit et des décisions de justice. Le respect de l’État de droit, c’est décider, sur le fondement de la loi et des décisions de justice, si une manifestation peut se tenir ou pas. Le respect de l’État de droit, c’est ne pas avoir eu la main qui tremble lorsque, comme l’a fait le ministre de l’intérieur, on a dissous douze groupuscules d’ultradroite depuis 2017. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Le respect de l’État de droit, c’est la dissolution, il y a quelques mois, des Zouaves de Paris, qui organisaient des actions racistes, antisémites, et contre les homosexuels et les transsexuels. Le respect de l’État de droit, c’est l’interdiction par les préfets de plusieurs manifestations d’ultradroite ces derniers mois, à Montpellier, à Paris, à Lyon. Le respect de l’État de droit, c’est l’enquête qui est en cours sur l’agression dont a été victime votre collaborateur parlementaire. Le respect de l’État de droit, c’est la décision, rendue publique il y a quelques instants par Gérald Darmanin, d’interdire toutes les manifestations d’ultradroite.

    Mme Aurélie Trouvé

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    Fascistes, pas d’ultradroite !

    Mme Sonia Backès, secrétaire d’État

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    Car le respect de l’État de droit, c’est aussi la sanction systématique et sans concession de tous les propos et de toutes les actions à caractère raciste ou antisémite.

    Réforme de l’enseignement professionnel

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Croizier.

    M. Laurent Croizier

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    Électriciens, menuisiers, agents de sécurité, maçons, boulangers, vendeurs, conducteurs d’engins, cuisiniers, comptables, aides-soignants, professionnels de la petite enfance ou de l’aide à la personne : au masculin comme au féminin, ces métiers ont en commun d’être exercés par des personnes qui travaillent au quotidien auprès des Français et, pour beaucoup d’entre eux, de s’apprendre au lycée professionnel.
    Les députés du groupe Démocrate (MODEM et indépendants) considèrent que la réforme du lycée professionnel, présentée jeudi dernier par le Président de la République, est un enjeu majeur pour l’avenir de notre jeunesse et un défi du quinquennat : tout d’abord parce que le lycée professionnel accueille un lycéen sur trois ; ensuite, parce qu’il accueille majoritairement des élèves qui cumulent les vulnérabilités scolaires ou sociales ; enfin, parce qu’aujourd’hui encore, il est, hélas ! rarement un choix alors qu’il forme des femmes et des hommes qui seront les faiseurs de nos grandes transitions, les bâtisseurs des futures grandes innovations et les acteurs de l’accompagnement humain et social, qui nous est cher.
    Pour toutes ces raisons, le groupe Dem est très exigeant quant à l’ambition de la réforme. Le lycée professionnel se doit d’être une voie de réussite professionnelle, une voie de réussite personnelle, une filière d’excellence. La réforme doit porter en elle la promesse républicaine de l’ascenseur social. Seul un lycéen sur deux parvient à occuper un emploi une année après l’obtention de son diplôme. Madame la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels, nous devons à ces jeunes un parcours vers la réussite : nous leur devons l’égalité des chances. L’objectif de parvenir à 100 % d’insertion professionnelle est ambitieux. Comment entendez-vous favoriser la réussite professionnelle en atténuant les inégalités sociales qui persistent ? Comment entendez-vous agir contre le décrochage scolaire, qui est un problème clé ? En résumé, comment comptez-vous conforter le lycée professionnel dans sa mission d’ascenseur social ? (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels

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    Je sais votre engagement dans ce domaine. Vous pouvez compter sur notre implication dans la lutte contre le décrochage scolaire, qui est un enjeu majeur de la réforme. En effet, un élève d’un lycée professionnel a dix fois plus de risques de décrocher et deux tiers des décrocheurs viennent de la voie professionnelle. Cette situation est due, non pas aux enseignants ou aux équipes pédagogiques, mais aux nombreuses fragilités du système. Orientation subie, niveau scolaire plus faible, difficultés diverses – notamment sociales, liées au handicap ou à la maîtrise de la langue française –, jeunesse des élèves : les fragilités sont telles que, si nous n’agissons pas, ils ne vont pas au bout de leur parcours.
    Au cours du quinquennat précédent, nous avons pris des mesures concernant l’école primaire. Actuellement, Pap Ndiaye entreprend une réforme du collège pour prendre en compte les fragilités scolaires. Nous devons faire également du lycée professionnel un acteur engagé de la lutte contre le décrochage. C’est pourquoi des moyens inédits lui seront alloués. Il bénéficiera en effet de plus de 1 milliard d’euros par an supplémentaires, qui permettront de favoriser le travail en petits groupes, de mieux prendre en considération les fragilités scolaires, d’augmenter le nombre des options et les ouvertures culturelles, de favoriser l’estime de soi et la confiance en soi, et de faciliter les stages ainsi que l’insertion professionnelle, notamment dans le cadre du mentorat – un ensemble de partenaires nous aideront à mieux préparer les élèves.
    Il nous faut organiser la lutte contre le décrochage avec l’école de la deuxième chance, l’Établissement pour l’insertion dans l’emploi (Epide), les missions locales : tout un réseau de partenaires qui peuvent nous aider à agir très tôt. Nous devons également nous pencher sur les stages. Il s’agit d’améliorer leur qualité, de développer un réseau d’entreprises pour ceux qui n’en ont pas en aidant les jeunes à rechercher celles dans lesquelles ils iront en faire et accumuler de l’expérience professionnelle. Enfin, nous devons favoriser l’orientation choisie, la découverte et l’attractivité des métiers – France 2030 nous permettra d’investir afin de rendre des filières visibles. Parce que le pacte du lycée professionnel est très orienté vers cet objectif, nous n’allons lâcher aucun jeune, ni avant le certificat d’aptitude professionnelle (CAP) ou le baccalauréat professionnel, ni après le diplôme,…

    Mme la présidente

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    Merci beaucoup, madame la ministre déléguée.

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    …car nous devons faire en sorte que chacun ait une solution.

    Signature électronique

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Valérie Bazin-Malgras.

    Mme Valérie Bazin-Malgras

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    Monsieur le garde des sceaux, le projet de loi d’orientation et de programmation de la justice, que vous avez présenté en Conseil des ministres la semaine dernière, prévoit l’embauche de 10 000 personnes, dont 1 500 magistrats et 1 500 greffiers. C’est une bonne nouvelle sur le papier, qui tend à rassurer et à donner enfin des moyens à notre justice. C’est un bon début, mais il est encore bien insuffisant, quand on sait qu’il faudrait, au bas mot, deux ou trois greffiers pour un magistrat, afin de fluidifier son travail. Je m’en suis rendu compte lors d’une visite que j’ai effectuée, pas plus tard que la semaine dernière, au tribunal judiciaire de Troyes, où plusieurs juridictions croulent sous des stocks insurmontables d’affaires à gérer, faute de personnel suffisant pour traiter tous ces dossiers dans un délai raisonnable.
    Les Français attendent de vous des réponses et des actes pour désengorger nos tribunaux. La situation provoque un ressenti négatif dans la population, qui peut la conduire à choisir un vote populiste. Vous le savez, monsieur le garde des sceaux, je défends mon tribunal et je plaide pour son bon fonctionnement, comme pour celui de tous les tribunaux de France. Or l’ouverture prochaine de la maison d’arrêt de Troyes-Lavau, qui est nécessaire pour notre territoire et permettra de désengorger les prisons d’Île-de-France, augmentera l’activité du tribunal de Troyes. Je vous ai déjà sollicité plusieurs fois pour que soient pourvus les postes vacants, voire pour augmenter les effectifs, notamment ceux de magistrats et de greffiers. Nos magistrats du siège pourraient par ailleurs gagner du temps et être plus efficaces grâce à une mesure que vous pourriez mettre en œuvre immédiatement. Je veux parler d’un décret qui autoriserait le recours à la signature électronique au civil comme cela existe au pénal. Cette mesure soulagerait les magistrats en simplifiant leur travail, notamment dans les contentieux liés aux soins psychiatriques ou pour le contrôle des mesures d’isolement et de contention. Monsieur le garde des sceaux, quand prendrez-vous ce décret ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

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    Tout d’abord, je vous remercie de m’avoir posé cette question. Je veux dire – ou, plus exactement, redire car vous avez d’ores et déjà présenté les choses – qu’un projet de loi de programmation a été présenté : merci de souligner qu’il va dans le bon sens ! Il prévoit en effet le recrutement non seulement de 1 500 magistrats et de 1 500 greffiers, mais aussi d’attachés de justice, en nombre, pour aider nos juridictions.
    Sur le plan des moyens réglementaires, si j’ose dire, je veux instaurer l’amiable en matière civile. Enfin, troisième volet : le numérique. Le décret relatif à la signature électronique pourrait, dites-vous, être immédiatement publié. Vous allez un peu vite, car nous devons au préalable disposer d’un outil qui nous permette de conserver de façon électronique les décisions rendues. Il est en cours d’installation ; il ne sera pas disponible tout de suite – pardon de vous décevoir –, mais dès cet automne. Si la juridiction qui vous est si chère ainsi qu’à M. Baroin, le tribunal judiciaire de Troyes, souhaite expérimenter cet outil de signature électronique, qu’il me le fasse savoir : je suis d’accord. Ils ont, avec vous, une interlocutrice de qualité. (« Oh ! » et sourires sur plusieurs bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Valérie Bazin-Malgras.

    Mme Valérie Bazin-Malgras

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    J’ai bien compris. Mon tribunal sera candidat, j’en suis certaine !

    Réforme du lycée professionnel

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Claude Raux.

    M. Jean-Claude Raux

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    Je me garderai bien de critiquer l’incritiquable réforme du lycée professionnel annoncée à Saintes – un signe en soi. Aussi me contenterai-je de dire que nous avons de la chance d’avoir un président qui promet l’excellence, rien de moins, aux plus défavorisés sur le plan scolaire. Un président qui a changé de méthode : après l’absence totale d’écoute et le mépris, la concertation mais sans les syndicats, un peu ou très oubliés, et les professionnels, un peu aidés, voire remplacés par une start-up. Rendez-vous compte de la chance que nous avons : 1 milliard d’euros pour la voie professionnelle : on pourrait presque l’appeler la voie royale ! Et il va payer les élèves. Entre 1,43 euro et 2,86 euros de l’heure, mais ce sera toujours bon à prendre pour faire adhérer les familles les plus pauvres à la vision présidentielle.

    M. Inaki Echaniz

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    Eh oui !

    M. Jean-Claude Raux

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    En plus, les élèves auront des mentors. Des retraités bénévoles, peut-être ? Non, ils seront au boulot et beaucoup moins disponibles, de ce fait. J’ai failli oublier le superpacte proposé aux enseignants, du moins celles et ceux qui resteront au lycée professionnel parce que M. le ministre enverra un certain nombre de profs voir ailleurs. Et puis les élèves auront du temps en plus en terminale – enfin, en moins, en réalité, puisqu’on avance l’examen –, et ils auront de l’argent en plus s’ils arrêtent là leur scolarité bien peu émancipatrice, pour finir par des stages pendant que les autres profiteront du dernier trimestre. Pour être au diapason de la réforme, je citerai le président Macron : « Nous ne sommes pas au rendez-vous de la promesse que nous devons à ces élèves. »

    M. Inaki Echaniz

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    Excellent !

    M. Jean-Claude Raux

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    Car peut-être tout cela n’est-il qu’une opération de com’ bien huilée pour se refaire une image sociale après le fiasco des retraites. Tout cela n’est qu’un cadeau de plus fait aux entreprises, un miroir aux alouettes pour les élèves et leurs familles.
    Madame la ministre, je sais que vous allez nous rassurer avec vos éléments de langage, mais je vous demande quand même de me dire que cette grande cause nationale n’est pas, en fin de compte, qu’une instrumentalisation de l’enseignement professionnel, instrumentalisation que nous récusons de toutes nos forces. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES. – M. Inaki Echaniz applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels

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    N’avez-vous pas eu recours à vos propres éléments de langage lorsque vous avez déclaré, il y a quelques semaines, qu’aucune annonce budgétaire n’accompagnait l’évolution de la carte des formations ? Pourtant, plus de 1 milliard d’euros supplémentaires seront investis chaque année dans le lycée professionnel pour favoriser l’acquisition par les lycéens de compétences qui leur permettront, ainsi qu’au pays, de relever les grands défis auxquels est confrontée la nation.
    Nous accompagnerons cette carte des formations par le plan France 2030 avec 2,5 milliards d’euros consacrés aux plateaux techniques, aux formations des enseignants et au renforcement de l’attractivité des filières d’avenir. Si, sur ces sujets, vos éléments de langage restent bloqués, pour notre part nous avançons. Vos éléments de langage évoquent par ailleurs une pseudo-concertation. Gare aux pseudo-vérités, car nous n’avons cessé d’organiser des concertations. Nous avons ainsi largement consulté les parties prenantes, dès la rentrée 2022, qu’il s’agisse de professeurs, d’élèves, de parents d’élèves, de représentants d’établissements, d’académies, des partenaires sociaux, des régions et des associations. Plus de 160 personnes ont participé à ces groupes de travail pendant plus de trois mois.

    M. Inaki Echaniz

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    Participer ne veut pas dire valider !

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    Elles ont émis 200 propositions. Des débats ont également été organisés à l’Assemblée et au Sénat. Vous pouvez donc le constater, monsieur le député, la réforme allie méthode et ambition – nous le devons aux lycéens professionnels – et nous la mènerons jusqu’au bout pour favoriser de meilleures conditions de travail pour les personnels éducatifs et une meilleure réussite pour les jeunes.

    M. Inaki Echaniz

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    Même les chefs d’établissement sont contre !

    Fonds vert

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Henri Alfandari.

    M. Henri Alfandari

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    Grâce à l’action du Gouvernement et au travail effectué par la majorité présidentielle, nous avons lancé ensemble des politiques ambitieuses en matière de transition énergétique et écologique. L’État s’engage financièrement auprès des Français, des entreprises et des collectivités pour être à la hauteur de ces ambitions. Néanmoins, comme plusieurs de nos collègues, j’ai pu constater, sur le terrain, des difficultés d’application des décisions prises au niveau national, difficultés notamment dues aux instructions des différents services déconcentrés de l’État.

    M. Pierre Cordier

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    Très juste !

    M. Henri Alfandari

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    Monsieur le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires, vous avez défendu la création du Fonds vert pour accompagner les collectivités dans leurs investissements, en particulier ceux concernant les bâtiments publics. Ces investissements sont essentiels à l’heure où nous devons non seulement limiter nos émissions et montrer l’exemple, mais aussi limiter les factures énergétiques afin de pouvoir garantir les services publics que les collectivités rendent à nos concitoyens. Je citerai l’exemple d’une commune qui a un projet de chaufferie biomasse. Ce projet était parfaitement éligible à la dotation de soutien à l’investissement local (DSIL). Des instructions ont été données pour réorienter ce type de projet vers le Fonds vert. Or pour être éligible à ce dernier, il faut réunir au moins trois critères, et comme l’isolation du bâtiment concerné avait été bien faite, le projet n’en réunit que deux. Aussi est-il est recalé alors même qu’il ferait économiser plus de 60 % de consommation et donc réaliser autant d’économies.
    Je pourrais vous parler de problèmes similaires concernant les permis de construire, les énergies renouvelables ou encore les aides de minimis qui limitent le déploiement de projets dont nous avons besoin. Comment pouvez-vous intervenir pour que ce bel objet qu’est le Fonds vert ne soit pas abîmé par des lourdeurs administratives qui nous empêcheront de réaliser nos objectifs ? (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)

    M. Thierry Benoit

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    Excellent !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires.

    M. Christophe Béchu, ministre de la transition écologique et de la cohésion des territoires

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    Le Fonds vert est victime de son succès : ce matin, nous en étions à 10 476 dossiers déposés pour bénéficier de ces crédits, soit une somme de 3,7 milliards d’euros qui généreraient 16 milliards d’euros de travaux. Nous en sommes au début du processus. Le dépôt des dossiers a commencé le 27 janvier et, à la minute où je vous parle, nous n’avons que 1 527 lauréats – soit seulement 200 millions d’euros attribués. Les autres dossiers sont en cours d’examen.
    Comme pour n’importe quel dispositif nouveau, il faut trouver le temps et la manière de faire bien fonctionner le mécanisme. Il faut bien comprendre que, dans un premier temps, le Fonds vert représente à lui seul autant que la DSIL et la dotation d’équipement des territoires ruraux (DETR) réunies. Les enveloppes d’investissements s’en trouvent doublées. Certains pré-arbitrages ont conduit au recours à la DSIL et d’autres au Fonds vert mais, in fine, comme chaque département connaît la somme qui lui est attribuée, je ne doute pas que, dans les prochaines semaines, nous ferons en sorte de consommer l’enveloppe disponible et d’attribuer les sommes concernées aux projets vraiment efficaces – et il y en a dans tous les territoires : on en compte 91 chez vous, dans l’Indre-et-Loire, mais aussi 328 dans le Pas-de-Calais ou encore 63 en Martinique.
    Le 24 mai prochain se tiendra la première réunion de retour d’expérience pour savoir, dans le cadre de mon administration, ce que nous pouvons encore simplifier dès le début des démarches en refusant les appels à projets et les appels à manifestation d’intérêt (AMI) et en donnant aux préfets la maîtrise des crédits afin que la procédure soit souple et déconcentrée. Nous avons voulu éviter les lourdeurs et je vous assure que nous allons, dans le détail, examiner comment respecter la philosophie et atteindre les objectifs. En attendant, cet outil de territorialisation de la planification écologique montre bien que, quand on accompagne les élus locaux pour le climat, pour la biodiversité, les résultats sont au rendez-vous.

    M. Pierre Cordier

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    Il faut répondre à la question maintenant !

    M. Christophe Béchu, ministre

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    La Première ministre, le 11 avril dernier, a annoncé la pérennisation de ce dispositif. Dès lors, au-delà de l’année 2023, nous allons voir de quelle manière, en 2024, nous pourrons en éliminer les inconvénients constatés jusqu’à présent tout en en gardant les avantages.

    Contribution de vie étudiante et de campus

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Lionel Tivoli.

    M. Lionel Tivoli

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    Madame la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche, à la suite de crise de la covid-19 et à cause, désormais, de l’hyperinflation qui entame sérieusement le pouvoir d’achat des Français, les conditions de vie des étudiants se sont largement dégradées. Chaque semaine, ce sont des files d’étudiants qui se forment à l’entrée d’associations caritatives pour obtenir de l’aide alimentaire. Or vous prévoyez une augmentation de 5 % de la contribution de vie étudiante et de campus (CVEC), contribution qui atteint désormais la barre des 100 euros. (Murmures sur divers bancs.) La CVEC est devenue de fait un impôt étudiant qui pénalise en particulier les étudiants des classes moyennes. Pire, la CVEC est devenue un outil financier au service de la propagande woke. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Inaki Echaniz

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    Ça va…

    M. Lionel Tivoli

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    Ce sont désormais des projets délirants qui sont financés par le biais de la CVEC, visant à endoctriner les étudiants à des idéologies dangereuses servant l’extrême gauche.

    M. Inaki Echaniz

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    C’est vous qui êtes dangereux !

    M. Lionel Tivoli

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    Or l’objectif de la CVEC est d’améliorer les conditions de vie des étudiants. Aussi, est-ce que le financement par la CVEC d’un podcast queer sur les questions de genre à l’université de Lyon ou l’introduction à l’art du drag à l’université de Bordeaux améliore les conditions de vie des étudiants ?

    M. Inaki Echaniz

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    Mais oui ! Vous n’avez aucune d’ouverture d’esprit !

    M. Lionel Tivoli

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    En quoi le financement par la CVEC du projet du « Mois décolonial » à l’université de Grenoble ou l’organisation de séances de baby-foot non genré à l’université d’Aix-Marseille améliore-t-il les conditions de vie des étudiants ?

    Mme Sandrine Rousseau

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    Ça s’appelle la réflexion intellectuelle !

    M. Lionel Tivoli

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    Madame la ministre, aurez-vous l’honnêteté et le courage de surseoir à l’augmentation de la CVEC pour ne pas aggraver les mauvaises conditions de vie des étudiants…

    Mme Ségolène Amiot

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    Et il y a encore du boulot !

    M. Lionel Tivoli

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    …et surtout de ne plus vous en servir pour des délires woke ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Cyrielle Chatelain

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    N’importe quoi !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.

    Mme Sylvie Retailleau, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche

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    Permettez-moi tout d’abord de vous rappeler qu’en même temps que la création de la CVEC étaient supprimées plusieurs cotisations : sécurité sociale, Fonds de solidarité et de développement des initiatives étudiantes (FSDIE) ou santé étudiante. En 2018, un étudiant, hors frais de scolarité, payait 238 euros par an alors qu’en 2023 il paiera 100 euros, vous l’avez mentionné, au titre de la CVEC, soit une économie pour chaque étudiant non boursier de 138 euros. En outre, c’est le législateur qui a indexé cette contribution sur l’inflation, le Gouvernement ne peut donc la geler. Elle sera ainsi de 100 euros pour 2023. Elle permet d’améliorer la vie étudiante et de campus sur plusieurs points. Je rappellerai le rôle qu’elle a joué pendant la crise sanitaire.

    M. Bryan Masson et Mme Caroline Parmentier

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    Répondez à la question !

    Mme Sylvie Retailleau, ministre

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    Elle a aidé les étudiants isolés, elle les a aidés à passer au numérique, elle a aidé les épiceries solidaires.

    M. Bryan Masson

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    Et maintenant, en 2023, que faites-vous ?

    Mme Sylvie Retailleau, ministre

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    La CVEC joue un rôle dans cinq domaines : l’accueil des étudiants, l’accompagnement social, sanitaire, culturel et sportif. L’université de Caen, en utilisant la CVEC sur plusieurs années, a ainsi installé sur son campus des équipements sportifs accessibles à tous les étudiants. L’année dernière, 1,7 million d’étudiants ont payé la CVEC pour un total de 150 millions d’euros, dont 127 millions ont été reversés aux établissements et 22,5 millions aux centres régionaux des ?uvres universitaires et scolaires (Crous), pour des actions financées et choisies par et pour les étudiants. Dernier point : un rapport à l’attention du Parlement est en préparation et vous sera très prochainement remis. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Lionel Tivoli.

    M. Lionel Tivoli

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    Si je comprends bien, madame la ministre, vous rétablissez la double peine non pas pour les délinquants mais pour les étudiants. Vous braquez les étudiants non boursiers, ce qui est un comble et, de plus, vous les prenez en otage de vos délires woke. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. Sacha Houlié

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    Vous n’y comprenez rien !

    Sécurité dans le Vaucluse

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-François Lovisolo.

    M. Jean-François Lovisolo

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    Monsieur le ministre de l’intérieur et des outre-mer, dans le Vaucluse, la ville de Cavaillon, de 26 000 habitants, a vécu un événement dramatique, la semaine dernière, sur fond de trafic de stupéfiants. Vous êtes venu en août 2021 pour y créer un groupe de sécurité et de proximité. Conjugués aux importants moyens mis en place par la commune, vos engagements ont permis un net recul de la délinquance à Cavaillon en 2022. Comme quoi, l’insécurité n’est pas une fatalité – là où il y a une volonté, il y a un chemin. L’État s’est également engagé aux côtés de la ville en faveur d’une rénovation urbaine à hauteur de 117 millions d’euros. Forces de l’ordre et rénovation urbaine sont sans doute l’alpha et l’oméga d’une politique de la ville ambitieuse et réussie. Pourtant, le Vaucluse, cinquième département le plus pauvre, reste un territoire fragile – comme l’illustre le règlement de comptes qui a fait deux morts à Cavaillon, dans la nuit du 1er au 2 mai, illustrant la nécessité d’un renforcement des moyens.
    Dès le 2 mai au matin, je vous ai contacté, monsieur le ministre, pour vous demander une audience à laquelle j’ai naturellement associé Gérard Daudet, maire de Cavaillon. Cette rencontre a eu lieu vendredi matin et votre réponse est sans précédent : ce sont 104 policiers supplémentaires pour assurer la sécurité publique dans le Vaucluse, dont 60 CRS affectés de manière pérenne au département. C’est une réponse forte à une demande que je vous avais faite, mais la situation du Vaucluse l’exigeait. Ce sont aussi plus de 40 policiers à Avignon, Carpentras et Cavaillon. C’est le fruit d’un travail collaboratif entre Mme la préfète, les élus locaux, Gérard Daudet, Cécile Helle, Serge Andrieu et votre serviteur.
    Mais ce n’est pas fini car, demain, nous allons travailler conjointement dans les territoires ruraux et péri-urbains, grâce à la loi d’orientation et de programmation du ministère de l’intérieur (Lopmi). Nous pourrons ainsi compléter le maillage territorial, notamment dans le Vaucluse.
    Monsieur le ministre, c’est le moment de vous dire merci au nom de l’ensemble des Vauclusiens, à l’exception des élus du Rassemblement national, qui n’ont pas su se réjouir de cette bonne nouvelle. (Mme Marie-France Lorho fait signe que non.) Les échecs et les immobilismes les font en effet prospérer et nos réponses les font reculer. Ils vont voir que, pour le Vaucluse, cela ne fait que commencer. Je me permets de vous interroger, monsieur le ministre, sur les conditions et les délais du déploiement de ces renforts exceptionnels. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’intérieur et des outre-mer.

    M. Gérald Darmanin, ministre de l’intérieur et des outre-mer

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    Je salue évidemment votre action en tant que député élu dans le Vaucluse, je salue également le maire de Cavaillon mais aussi ceux de Carpentras et d’Avignon pour leur travail quotidien auprès des forces de l’ordre, pour soutenir leur lutte contre la drogue. Votre département est caractérisé en effet par un regain du trafic depuis de nombreuses années. Mais, pour la première fois en 2022, avec le concours des services du ministère de la justice, nous faisons reculer ce trafic : cinquante-deux gardes à vue, dix-neuf kilogrammes de cannabis saisis,…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Eh oui !

    M. Gérald Darmanin, ministre

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    …et 25 % de points de deal en moins – il y en avait quatre-vingt-quatre en 2022 et ils ne sont plus que soixante-trois – certes soixante-trois de trop. Dans la belle ville de Cavaillon, après neuf à dix mois de calme, puisque nous avons mis fin à des réseaux très dangereux, le trafic reprend. J’ai reçu, à votre demande, le maire de Cavaillon. Je confirme les annonces que j’ai alors faites : 43 policiers de plus en septembre prochain à Cavaillon, à Avignon et à Carpentras et une unité de CRS à demeure dans le Vaucluse tout au long de l’année, soit quelque 200 policiers de plus si je compte les 92 policiers que nous y avons déployés depuis deux ans. Ces moyens sont sans précédent.
    Vous êtes le seul des cinq députés du Vaucluse à ne pas appartenir au Rassemblement national. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Vous avez, avec discrétion, apporté des réponses, fait venir au ministère de l’intérieur des élus qui n’étaient pas de votre circonscription – c’est le cas de Cavaillon. Je regrette qu’il ait fallu attendre presque la fin des questions au Gouvernement pour qu’un député, en votre personne, se réjouisse des efforts de la police nationale pour faire reculer le trafic de drogue. (Mêmes mouvements.) Je regrette qu’aucun des quatre autres députés n’ait posé de question comme vous l’avez fait, marque de leur désintérêt, et qu’ils ne se réjouissent pas, monsieur le député, quand vous obtenez 200 policiers et gendarmes de plus pour votre beau département du Vaucluse. Certains essayent de résoudre les problèmes quand d’autres vivent avec. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes RE et Dem.)

    Fermetures de classes

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Joël Aviragnet.

    M. Joël Aviragnet

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    Monsieur le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse,…

    M. Boris Vallaud

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    Il n’est pas là !

    M. Joël Aviragnet

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    …qui est effectivement absent, la République française s’est construite et ancrée comme un idéal d’émancipation grâce à l’école. Les fameux hussards noirs, par leur engagement au service du pays, ont permis à des générations entières d’accéder à l’instruction, cassant ainsi la prison sociale dans laquelle certains jeunes Français étaient enfermés. Pour une nation, une école forte est la garantie d’un avenir serein.
    La situation de l’école est néanmoins très inquiétante. L’été dernier, on apprenait en effet que l’État ne parvenait pas à recruter suffisamment de professeurs qualifiés, le nombre de candidats étant en forte baisse. Depuis plusieurs années, les parents d’élèves constatent, impuissants, que les professeurs absents ne sont pas remplacés. Dans ma circonscription, par exemple, un professeur d’anglais enseignant dans un collège situé près de la frontière espagnole n’a pas été remplacé pendant près d’un an. Un peu plus loin, pareille situation a eu lieu, au lycée, avec un professeur de français, alors que ses élèves devaient passer le bac.
    Selon le principal syndicat d’enseignants du primaire, le nombre de fermetures de classes prévues pour la rentrée prochaine dans le premier degré s’établissait mi-mars à 4 944, contre 2 685 ouvertures,…

    M. Inaki Echaniz

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    C’est une honte !

    M. Joël Aviragnet

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    …soit un solde négatif de 2 259 classes. Nous savons qu’une fois de plus les territoires ruraux en paieront le plus lourd tribut.

    M. Inaki Echaniz

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    Eh oui !

    M. Joël Aviragnet

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    Il est inacceptable de voir nos services publics fermer les uns après les autres : la colère qui gronde se nourrit aussi de cet abandon des territoires ruraux par l’État. À cet égard, la baisse de la démographie pour expliquer les fermetures de classes n’est pas une justification acceptable.

    M. Boris Vallaud

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    Absolument !

    M. Joël Aviragnet

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    S’il y a moins d’élèves par classe, l’enseignement ne pourra être que meilleur.

    M. Inaki Echaniz

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    Eh oui !

    M. Joël Aviragnet

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    Vous avez annoncé une revalorisation du salaire des enseignants dès la rentrée prochaine. Cette annonce est positive, car nous avons besoin de renforcer l’attractivité de ce métier. Cela étant, que comptez-vous faire pour assurer le remplacement des professeurs absents, comme l’avait promis le Président de la République ? Pourquoi ne pas se saisir de la baisse démographique pour améliorer les conditions d’enseignement à l’école, au lieu de fermer des classes ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – MM. Frédéric Mathieu et Yannick Monnet applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels.

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée chargée de l’enseignement et de la formation professionnels

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    L’élaboration de la carte scolaire a lieu dans un contexte de baisse démographique que vous avez rappelé. En moins de dix ans, la France est passée de 830 000 à 738 000 naissances par an : après une baisse démographique de 300 000 élèves au cours des cinq dernières années, 500 000 élèves de moins sont attendus d’ici à 2027.
    Attachée au service public de l’éducation pour tous les territoires, Mme la Première ministre a annoncé un plan relatif à l’école dans les territoires ruraux et un changement de méthode s’agissant des fermetures de classes, avec l’adoption d’une approche nouvelle, sur trois années et en concertation avec les élus, afin de trouver des réponses adaptées aux territoires. De plus, comme vous le savez, le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse a redéployé 400 postes supplémentaires pour éviter des fermetures de classes dans certains territoires ruraux.
    S’agissant du vôtre, la fermeture envisagée n’est pas confirmée, la décision finale devant être prise en juin prochain.

    M. Joël Aviragnet

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    C’est déjà annoncé !

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    S’il n’y a pas de fermeture de classe, l’école de Couret comptera 17,5 élèves par classe à la rentrée prochaine, contre 23 élèves par classe dans le cas contraire, niveau qui se situe donc sous le seuil de vingt-quatre élèves.

    M. Inaki Echaniz

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    C’est trop !

    Mme Carole Grandjean, ministre déléguée

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    Ces chiffres sont donc conformes aux engagements pris par le Président de la République, la Première ministre et le ministre de l’éducation nationale et de la jeunesse. Une vigilance particulière est accordée à la ruralité.
    En tant que député, vous êtes en lien avec les interlocuteurs de l’éducation nationale dans votre circonscription et vous savez donc que deux nouveaux territoires éducatifs ruraux y ouvriront à la rentrée prochaine. (M. Inaki Echaniz s’exclame.) Je ne doute pas que vous ferez montre de la même énergie pour les valoriser : quoi qu’il en soit, vous pourrez compter sur la nôtre.
    Je le répète, le Gouvernement tient compte de la problématique des écoles en milieu rural. Nous prendrons toutes les mesures nécessaires pour garantir une éducation de qualité partout sur le territoire. (Exclamations sur les bancs du groupe SOC.)

    M. Inaki Echaniz

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    C’est faux ! Vous ratiboisez !

    M. Yannick Monnet

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    Vous fermez des classes !

    Mme la présidente

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    Nous avons terminé les questions au Gouvernement.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures vingt, sous la présidence de Mme Hélène Laporte.)

    Présidence de Mme Hélène Laporte
    vice-présidente

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    2. Inscrire le groupe militaire privé Wagner sur la liste des organisations terroristes

    Discussion d’une proposition de résolution

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion, en application de l’article 34-1 de la Constitution, de la proposition de résolution visant à appeler la France et l’Union européenne à inscrire le groupe militaire privé Wagner sur la liste des organisations terroristes (no 1032).

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Benjamin Haddad.

    M. Benjamin Haddad

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    Ce 9 mai, jour de l’Europe, est pour la deuxième année consécutive une journée endeuillée par la guerre d’agression que mène sur notre continent la Russie contre l’Ukraine – dont je tiens à saluer la présence, dans les tribunes, de l’ambassadeur, M. Vadym Omelchenko. Depuis plus d’un an, les Ukrainiens résistent de façon héroïque à l’invasion et la France, avec ses alliés européens, soutient leur pays par les sanctions, par les livraisons d’armes et par la diplomatie.
    Aux côtés de la Russie de Poutine, une armée du chaos conforte les régimes despotiques en Afrique et au Moyen-Orient. Au Soudan, en Libye, en Syrie, au service du régime de Bachar al-Assad, dans la guerre d’agression contre l’Ukraine, au Sahel où les intérêts de la France ont été directement visés par des opérations de désinformation, partout où ils s’implantent, les membres du groupe Wagner sèment l’instabilité et la violence. À Moura, à Bakhmout, à Bossangoa, à Boutcha, à Bria, ils assassinent et torturent, ils massacrent et pillent, ils intimident et manipulent dans une impunité quasi totale. Le rôle joué par Wagner dans ces exactions nombreuses a été révélé par des ONG et des journalistes, et je salue la présence de certains d’entre eux dans les tribunes. C’est grâce à leur travail d’investigation courageux et déterminé que l’on peut aujourd’hui avoir ce débat. Non, les membres du groupe Wagner ne sont pas de simples mercenaires attirés par l’appât du gain. Du Mali à l’Ukraine, ils poursuivent une stratégie globale de soutien à la politique d’agression du régime de Poutine contre nos démocraties. Ils sont un instrument de guerre hybride.

    Mme Constance Le Grip

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    C’est vrai !

    M. Benjamin Haddad

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    L’ennemi nous a désignés. Nous ne l’avons pas choisi, mais nous devons l’assumer. Il s’attaque à nos intérêts, à nos valeurs, à nos systèmes de gouvernement, partout où il le peut. Il s’ingère dans nos processus démocratiques, comme aux États-Unis en 2016 ou en France en 2017, avec les usines à trolls de Prigojine. Il monte des faux charniers pour faire accuser la France, comme à Gossi l’an dernier, et amplifie la propagande antifrançaise sur le continent africain. Donnons-nous les moyens de le combattre et de le vaincre, avec nos partenaires européens. Seuls onze membres du groupe font actuellement l’objet de sanctions, alors qu’ils étaient 9 000 à travers le monde fin 2021 et que plus de 50 000 sont désormais déployés en Ukraine, avec des chars d’assaut, des hélicoptères, des avions de combat.
    Il faut nommer les choses. L’activité du groupe Wagner répond à la définition européenne du terrorisme : intimider des populations civiles, contraindre indûment des pouvoirs publics, déstabiliser gravement ou détruire des institutions. À travers cette résolution, nous appelons les autorités européennes à renforcer considérablement leur coopération et leurs instruments judiciaires et financiers pour faire la lumière sur cette organisation tentaculaire et opaque, lutter contre elle et ceux qui rendent ses opérations possibles et mettre fin à ses activités. L’inscription sur la liste des groupes terroristes de l’Union européenne sert cet objectif. Certains de nos partenaires comme les États-Unis n’hésitent pas à utiliser la force de leur droit et de leurs instruments financiers pour défendre leurs intérêts et leur sécurité à travers le monde. Un nouveau régime de sanctions, inspiré du statut d’organisation criminelle transnationale qu’utilisent les Américains, serait une piste à explorer.
    C’est à la France de mener ce combat. Notre assemblée peut être à l’avant-garde d’une campagne européenne et je remercie le groupe Renaissance de porter cette résolution, mais salue aussi les députés des groupes Démocrate, Horizons et apparentés, Les Républicains, Socialistes et apparentés, Écologiste-NUPES qui, par leur soutien, ont montré que, pour défendre nos valeurs démocratiques, les forces de notre hémicycle savent se rassembler.
    Oui, la France doit mener ce combat parce que nous avons été désignés par Wagner comme l’ennemi numéro un, depuis des années, avant même le début de l’invasion de l’Ukraine le 24 février 2022, alors que le Rassemblement national proposait toujours une alliance avec la Russie dans son programme. Faiblesse ? Naïveté ? Complicité ? Toutes vos positions opportunistes affichées aujourd’hui ou demain, tous vos retournements de veste ne feront oublier à personne l’indulgence coupable dont vous avez fait preuve pendant des années. Vous voulez sortir des alliances, vous n’aimez pas l’Europe, fort bien. Nous, nous considérons que les menaces contre nos frères européens sont des menaces contre nous-mêmes, que la France se grandit à être aux côtés de ses partenaires, que c’est dans son intérêt même. En l’occurrence, ce n’étaient pas l’Allemagne, l’Estonie ou les États-Unis qui étaient visés, c’était la France et, pourtant, vous étiez de l’autre côté.
    C’est à la France de mener ce combat parce que nous portons haut et fort le projet d’une Europe qui se défend, qui renforce ses instruments sur les plans non seulement économique, militaire, technologique, mais aussi juridique, pour assumer sa souveraineté, sa sécurité, si nécessaires quand ses alliés lui font défaut. La France doit être la voix du réarmement mental et matériel du continent, d’une Europe qui refuse d’être un théâtre passif des rivalités entre grandes puissances et de sortir de l’Histoire, d’une Europe qui ne laisse pas son voisinage, de la Méditerranée à l’Afrique, des Balkans à l’Europe de l’Est, aux mains rapaces des régimes autoritaires, une Europe qui assume sa puissance : c’est le sens de notre combat que nous menons avec le Président de la République depuis six ans. Oui, c’est à la France de mener ce combat parce que la voix de la France doit toujours être du côté de la justice et de liberté. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jérôme Buisson.

    M. Jérôme Buisson

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    Le groupe Wagner, comme l’ensemble des sociétés militaires privées à travers le monde, connaît un essor rapide au gré des signatures de nouveaux contrats menant à des engagements dans un nombre croissant de pays. Si nous constatons que ces sociétés constituent souvent pour les États un outil de leur politique étrangère, le groupe Wagner est, quant à lui, une arme au service du pouvoir russe, une arme qui déstabilise certains pays africains en opérant des prélèvements sur leurs ressources naturelles en guise de rémunération, une arme qui attaque directement les intérêts de la France dans les pays africains, une arme qui pratique la désinformation pour dénigrer l’armée française. Selon des experts du Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme (HCDH), c’est probablement l’arme qui tue des centaines de civils maliens à Moura et Hombori. Enfin, c’est l’arme qui sévit depuis le 24 février 2022 en Ukraine, l’arme qui mène depuis quelques mois l’offensive à Bakhmout – je salue, moi aussi, la présence de l’ambassadeur d’Ukraine dans les tribunes.
    Le groupe Wagner est donc une entité qui attaque les intérêts français, déstabilise les pays dans lesquels il intervient et y commet, selon des experts, des exactions. Pour tout crime de guerre, nous demandons que soient systématiquement diligentées des enquêtes internationales indépendantes, sous l’égide des Nations unies ou de la Cour pénale internationale (CPI), des enquêtes à même d’établir les responsabilités de ceux qui les perpètrent.
    Il nous paraît clair que ce groupe paramilitaire porte atteinte à nos intérêts nationaux et que certaines de ses actions revêtent un caractère illégal, voire criminel. Au nom du respect de nos intérêts comme du droit international, le groupe Rassemblement national votera cette proposition de résolution. Toutefois, nous déplorons, une nouvelle fois, la dimension hors-sol voire incantatoire que prend notre politique étrangère. Cette résolution invite notamment le Gouvernement à se mobiliser pour demander l’inscription du groupe Wagner sur la liste des organisations terroristes établie par l’Union européenne. La portée réelle de cette classification nous semble cependant limitée, l’entité visée n’ayant pas d’existence légale au sein de l’Union européenne et ses dirigeants faisant déjà l’objet de sanctions. Cette résolution relève donc du symbole. Nous connaissons tous l’importance qui y est attachée mais le symbole ne fait pas l’action, mes chers collègues. Pour faire reculer le groupe Wagner en Afrique où la Russie nous mène une guerre d’influence, les résolutions ne nous aideront guère. Nous devons réinvestir notre partenariat avec les pays africains dans le cadre de relations bilatérales respectueuses de la souveraineté des États, contrer la propagande antifrançaise et construire une politique de codéveloppement permettant de stabiliser ces pays.
    La lutte contre le groupe Wagner, comme l’ensemble de la politique étrangère de la nation, ne peut se réduire à une succession de postures et d’incantations. Nous ne devons pas, comme en a pris l’habitude le Président de la République, venir en Afrique exposer les canons de la gouvernance et enchaîner les sorties teintées de paternalisme, voire de mépris. Ces envolées verbales relèvent encore une fois du symbole, mais un symbole qui entache gravement nos relations diplomatiques. Par ses actions, le président Macron est un acteur de notre perte d’influence ainsi que de l’effondrement de nos échanges commerciaux avec les pays du continent. Malheureusement, cette déroute de la diplomatie présidentielle laisse la place à d’autres acteurs comme la Chine ou la Russie. Nous devons, au même titre que les autres puissances du monde, manier les leviers diplomatiques, économiques, militaires, culturels ou informationnels qui sont à notre disposition.
    Bien qu’ayant subi les effets d’une politique désastreuse à bien des égards, la France ne manque pas d’atouts : notre réseau diplomatique est encore le troisième du monde ; notre langue, le français, est une des plus parlées – la francophonie sera l’un des piliers de la politique étrangère conduite par notre présidente ; nombre de nos groupes sont présents dans des secteurs stratégiques ; enfin, notre armée est puissante et dispose d’une capacité de projection.
    En tant que force d’alternance, le Rassemblement national prône pour la nation une politique indépendante, proactive, intransigeante vis-à-vis de ses intérêts mais empreinte de la retenue et du professionnalisme caractéristiques de l’art de la diplomatie. En votant cette proposition de résolution, nous souhaitons réaffirmer la voix singulière de la France dans le concert des nations, notre attachement à la défense de nos intérêts et au droit international, ainsi que notre soutien sans ambiguïté à l’Ukraine agressée par la Russie à travers ce groupe paramilitaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. Rémy Rebeyrotte

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    C’est nouveau !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Ersilia Soudais.

    Mme Ersilia Soudais

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    La France, comme toute grande nation, se doit de mettre les moyens de sa puissance au service de l’intérêt général du peuple humain. Seule la coopération internationale pourra endiguer les menaces qui pèsent sur l’humanité, qu’il s’agisse du changement climatique, des guerres ou des pandémies. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) La guerre que mène la Russie de Poutine contre l’Ukraine, dont je salue la présence, dans les tribunes, de l’ambassadeur, a rebattu toutes les cartes de la diplomatie européenne, voire internationale. Parmi ses pions, le président Poutine en possède un qu’il a toujours eu du mal à reconnaître, voire parfois à contrôler : le groupe Wagner, société militaire privée qui agit dans une semi-obscurité depuis 2014, partout où la Russie a des intérêts, principalement économiques. Que ce soit au Mali, en Libye, en Centrafrique, en Syrie ou encore en Ukraine, Wagner s’est tristement illustré par des exactions commises à l’encontre des populations civiles locales, qu’il s’agisse d’exécutions, de viols ou encore de pillages. Il est de notre devoir de parlementaires de dénoncer ces crimes de guerre commis par son organisation.

    Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères

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    Oui !

    Mme Ersilia Soudais

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    Oui, Prigojine est un criminel de guerre. Nous condamnons les milices Wagner, ainsi que la guerre insupportable menée par Poutine contre l’Ukraine. La France et l’Union européenne doivent œuvrer en faveur de la paix. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) C’était d’ailleurs le sens du vote des parlementaires européens membres de La France insoumise, dans le cadre de l’examen de la résolution du Parlement européen sur la désignation de la Fédération de Russie comme État soutenant le terrorisme, en faveur d’un amendement déclarant : « Les attaques et atrocités perpétrées délibérément par la Fédération de Russie contre la population civile ukrainienne […] constituent des actes de terreur […] et des crimes de guerre. »

    M. Erwan Balanant

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    Par contre, vous ne votez pas les aides à l’Ukraine !

    Mme Ersilia Soudais

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    Vous nous demandez aujourd’hui de nous prononcer sur la reconnaissance du groupe Wagner en tant qu’organisation terroriste. Permettez-nous de nous interroger, l’imprécision de ce qualificatif nous laissant dubitatifs : le mot « terroriste » renvoie à une réalité politique et juridique précise, que vous avez largement galvaudée ! Nous saisissons la portée symbolique de votre texte. Cependant, le Parlement européen s’est déjà penché sur la question, la France ne possédant pas de liste d’organisations terroristes : la décision se joue désormais au niveau du Conseil de l’Union européenne, qui peine à trancher. Rappelons d’ailleurs que les États-Unis eux-mêmes ont renoncé à cette qualification. Ne craignez-vous pas que la portée symbolique de la présente proposition de résolution ne se heurte fortement au principe de réalité ?
    Par ailleurs, les dix premières sociétés militaires privées sont américaines, britanniques et canadiennes : qu’il s’agisse de Blackwater, de Black Shield ou de Wagner, elles sont toutes dans le viseur de la justice pour des crimes de guerre. Nous ne comprenons donc pas pourquoi seule la milice Wagner devrait être inscrite sur la liste européenne des organisations terroristes. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Nous condamnons unanimement tous les crimes de guerre quels qu’ils soient (Mme Mathilde Panot applaudit) et appelons à mettre le sujet sur la table concernant toutes les sociétés militaires privées. C’est pourquoi nous refusons de cautionner une indignation à géométrie variable. Il faut dénoncer la privatisation de la guerre, qui permet aux sociétés et aux États, y compris à la France – balayons devant notre porte –, de se défausser de la responsabilité de l’usage de la violence et de la force, pour reprendre les mots de l’ONG War on Want. Nous n’oublions pas non plus le mercenaire français Bob Denard, impliqué dans de nombreux coups d’État en Afrique.

    Mme Natalia Pouzyreff

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    N’était-il pas belge ?

    Mme Ersilia Soudais

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    Le groupe Wagner est de plus en plus présent sur ce continent. Il est devenu un véritable outil géopolitique et géostratégique de la Russie, remplaçant peu à peu les militaires de l’ONU, de l’Otan ou de la France dans les pays africains. Ne risque-t-on pas, en déclarant que leur principal sous-traitant en matière de sécurité intérieure est une organisation terroriste, de s’aliéner ces pays, alors même que le ressentiment antifrançais comme ancien pays colonialiste est déjà très fort dans certains ?
    Enfin, les Wagner Leaks ont démontré comment la galaxie Prigojine s’est étendue bien au-delà des activités paramilitaires, notamment en Afrique. Prigojine est aujourd’hui à la tête d’une organisation de plus de 400 sociétés chapeautées par le Concord Group. Des sanctions ont été prises par l’Union européenne afin de bloquer les actifs de ce chien de guerre. Toutefois, quelle est leur efficacité ? Il les juge lui-même raisonnables. C’est un sujet auquel nous devrons réfléchir sérieusement. Car, oui, ce qui nourrit le mercenariat, c’est la recherche du profit. « Le capitalisme porte en lui la guerre comme la nuée porte l’orage », vous dirait Jean Jaurès. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Catherine Colonna, ministre

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    Oh là là !

    Mme Ersilia Soudais

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    D’ailleurs, c’est bien la raison pour laquelle le groupe Wagner cherche à se retirer du conflit ukrainien, comme en attestent plusieurs articles de presse récents. Finalement, la rentabilité espérée n’est pas au rendez-vous. Nous n’avons, je le répète, aucun souci à reconnaître les crimes de guerre de cette organisation mais nous avons conscience que cette résolution relève essentiellement de la déclaration d’intention et que la symbolique l’emporte sur la sémantique.

    Mme Natalia Pouzyreff

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    La sémantique, c’est de la symbolique !

    Mme Ersilia Soudais

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    Seriez-vous prêts, chers collègues, à engager une démarche d’ampleur, à l’instar des Britanniques, afin d’examiner au cas par cas toutes les milices privées et de renforcer la lutte contre les sociétés mercenaires auxquelles la France et des sociétés françaises ont parfois recours elles-mêmes ? Tel était le sens de la proposition de résolution que la Guinée équatoriale a soumis en 2019 à ses pairs du Conseil de sécurité de l’ONU, visant à renforcer la lutte contre les mercenaires dans le centre de l’Afrique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Erwan Balanant

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    Je n’ai pas compris si vous voterez en faveur de ce texte ou non. Ce n’était pas très clair !

    M. Jean-François Coulomme

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    Si, c’était limpide !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Vincent Seitlinger.

    M. Vincent Seitlinger

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    En préambule, je souhaiterais saluer le travail de qualité réalisé par notre collègue Benjamin Haddad et le remercier de ce texte dont le vote honorera l’Assemblée nationale.

    M. Jean-Louis Bourlanges

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    Bravo !

    M. Vincent Seitlinger

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    Quel symbole que cette proposition de résolution soit discutée le 9 mai, jour de l’Europe, l’Europe de Robert Schuman, député de la Moselle comme moi, qui défendit le principe d’union des peuples par la culture, le commerce et non par les armes, comme le souhaite le groupe Wagner ! Il revient à la représentation nationale de se prononcer sur la proposition de résolution visant à appeler la France et l’Union européenne à inscrire le groupe militaire privé Wagner sur la liste des organisations terroristes. Cette milice russe privée opère dans les zones de guerre, avec pour mission, sinon de défendre les intérêts du Kremlin dans sa guerre d’influence, du moins de vendre son mercenariat aux potentats des pays dans lesquels elle intervient. Wagner alimente la violence, pille les ressources, massacre les civils, en violation constante du droit international.
    Partout où passe la milice, on entrevoit ce qu’il y a de pire chez l’homme. Wagner, ce sont les mises à mort sommaires de rebelles syriens ; les tirs du haut d’hélicoptères sur les Maliens désarmés de Moura ; ce sont les massacres perpétrés à Boutcha, en Ukraine ; ce sont ces soldats goguenards mutilant leurs prisonniers de guerre. Je cherche les mots qui pourraient traduire le plus dignement possible, dans cet hémicycle, la réalité des souffrances, de l’humiliation et de la néantisation de l’être. Que sont les mots pour raconter la nuit des âmes, l’assassinat de civils désarmés ? Par-delà cet abîme, il nous faudrait plonger dans les profondeurs ténébreuses de la conscience humaine pour comprendre.
    Mais Wagner, c’est également le symbole de la dégénérescence d’un pays en mal d’influence, à l’image de son chef, Evgueni Prigojine, repris de justice multicondamné, devenu chef d’entreprise proche du Kremlin, avant de se lancer dans la défense paramilitaire. Nous sommes réunis aujourd’hui afin de combattre, au moyen de la justice, le groupe Wagner et de déterminer s’il peut être placé sur la liste des organisations terroristes. Au-delà de la portée symbolique d’une telle décision, cela permettrait, d’une part, de consacrer contre cette officine les outils européens de lutte contre le terrorisme et, d’autre part, de geler ses avoirs dans l’Union européenne et d’interdire aux entités qui y sont établies de mettre des fonds à sa disposition. Ce dispositif serait d’autant plus efficace que nous sommes dans le contexte d’une guerre hybride, face à une société paramilitaire privée qui doit payer ses mercenaires. Or une grande partie des fonds nécessaires transitent par l’Europe. En s’ajoutant à celles déjà prises par les États-Unis, les sanctions européennes permettraient ainsi d’asphyxier la capacité de nuisance du groupe Wagner en le privant de ressources financières.
    Pour décider si le groupe Wagner doit être placé sur la liste des organisations terroristes, référons-nous à la définition du Conseil de l’Union européenne qui précise que les atteintes à la vie d’une personne sont qualifiées de terroristes lorsqu’elles sont commises dans le but de gravement intimider une population ou de détruire les structures politiques d’un pays. Or la communauté internationale a accumulé suffisamment de preuves en la matière. Les ONG, les services de renseignements et la presse ont déjà documenté de nombreux faits démontrant que Wagner est une organisation terroriste. En conséquence, le groupe Les Républicains votera en faveur de cette proposition de résolution. Au-delà de la nécessité d’une telle décision, c’est la capacité de l’Europe à faire preuve de résilience qui sera mesurée. Adopter cette résolution sans ambiguïté, inscrire une parole officielle durable, constitue, nous l’espérons, une première étape sur le chemin qui verra M. Prigojine et tous les oligarques du crime répondre seuls, dans leur barbarie, à la justice de tous. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Frédéric Petit.

    M. Frédéric Petit

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    Depuis février 2022, nous pouvons enfin mettre des mots concrets et du sens sur des valeurs que certains élus qualifient de fumeuses, affirmant qu’après tout les valeurs européennes sont des concepts imaginés ou des valeurs qui existent ailleurs. Je prends souvent l’exemple de la langue – ou de nos fameuses vingt-quatre langues : si elle est, chez nous, émancipatrice, elle peut être synonyme d’assignation à résidence dans un monde impérialiste ; ou encore les exemples de l’histoire, qui est une science chez nous, ou de l’information qui est un partage mais qui peut aussi être utilisée comme une arme de guerre dans une société impérialiste.
    Dans le cas du groupe Wagner, nous touchons une question absolument fondamentale en démocratie et sur le plan de nos valeurs : qui se bat ? En démocratie, les soldats sont d’abord et avant tout des citoyens, et non des commerçants ou des prisonniers. On se bat pour son pays, pour sa nation, non pour un patron ou pour soi-même. Dès 2018, la commission des affaires étrangères de notre assemblée, sous la présidence de Marielle de Sarnez, s’était intéressée à ce phénomène des proxys, à ces zones de guerre dans lesquelles la lutte armée devient un business, en Syrie, en Irak, en Libye, y compris chez les Américains. Nous nous étions posé cette question : que devient la démocratie lorsque ce ne sont plus les États qui commandent les armées ? Que devient la diplomatie ?
    Le groupe Wagner a été créé en 2014 dans le Donbass. Il répond à une gestion d’entreprise privée, sa division Afrique disposant même d’un plan stratégique comme dans de grandes entreprises – des journalistes courageux, que je salue, nous ont permis de le découvrir. Certes, nous savons tous que sur les théâtres d’opérations, le groupe Wagner massacre, pille, saccage et viole, autant de crimes de guerre de plus en plus documentés. Que ce soit en Syrie, en Libye, au Soudan, en Centrafrique, au Mozambique, au Mali ou en Ukraine, il sème la terreur. Mais une fois installé, conformément au business plan de l’entreprise, c’est-à-dire à la stratégie des chefs d’entreprise, j’insiste sur ce point, le groupe Wagner se lance dans l’exploitation des ressources minières, aurifères ou du bois. Je ne serais pas surpris outre mesure d’apprendre que le détour opéré par les forces de Wagner sur Soledar, lorsqu’elles avançaient vers Bakhmout, ne soit une opération économique et que des prisonniers soient actuellement au fond de la mine au lieu de se battre.
    Ce groupe est lié à l’armée russe, quoi qu’on nous dise, d’abord parce que plusieurs armées privées se font concurrence – il n’existe pas que la milice Wagner : le ministre russe des armées a aussi la sienne et Gazprom est en train d’en constituer également. Ces groupes sont donc liés, tels les concurrents d’un même business. Mais surtout, ils sont utilisés comme ballons d’essai, comme un laboratoire de ce qui peut se faire ou non, avec des exemples très concrets : « En 2014, je me rends dans le Donbass sans y être et j’observe la réaction internationale ; huit ans plus tard, j’envahis et j’essaie de rejoindre Kharkiv, au moyen d’une opération prétendument spéciale. » Deuxième exemple, l’incorporation des prisonniers : 40 000 d’entre eux auraient été recrutés par Wagner ; or, désormais, ce n’est plus la milice qui propose des contrats aux prisonniers, c’est l’armée russe elle-même !
    Si Wagner est une entreprise certainement lucrative, c’est une mauvaise armée – car une bonne armée repose nécessairement sur l’engagement des citoyens. À chaque confrontation de terrain, Wagner est battu : au Mali, il a avancé parce que nous ne voulions pas nous engager dans un combat trouble ; il a été écrasé lors des quelques accrochages qu’il a eus en Syrie avec l’armée américaine ; il a été bloqué en Ukraine. Ne nous trompons pas : Wagner n’est ni une armée d’élite, ni une armée puissante, c’est le bras armé d’un pouvoir mafieux, cupide et profondément cynique. La France et l’Europe doivent exprimer une parole forte au sujet des groupes de cette nature, du phénomène de sous-traitance de la guerre et des anti-start-up de cette économie innovante et macabre. Inscrire Wagner sur la liste des groupes terroristes, ce n’est effectivement que du droit – certains l’ont souligné –, mais ce droit est notre arme. Plus qu’une menace pour nos intérêts, le groupe Wagner constitue une menace pour notre modèle. Le groupe Démocrate votera donc en faveur de cette proposition de résolution. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et RE. – M. Vincent Seitlinger applaudit également.)

    M. Jean-Louis Bourlanges, président de la commission des affaires étrangères

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alain David.

    M. Alain David

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    La proposition de résolution que nous examinons a pour objet de demander à la France et à l’Union européenne d’inscrire le groupe militaire privé Wagner sur la liste des organisations terroristes. Ce groupe a été créé en 2014 à l’occasion de l’annexion de la Crimée par la Fédération de Russie et de la guerre dans le Donbass : il est financé et dirigé par l’oligarque russe Evgueni Prigojine, proche de Vladimir Poutine. Les miliciens du groupe Wagner se sont tristement distingués en étant particulièrement actifs en Syrie, dans des entraînements mais aussi dans des opérations de combat direct, en soutien au régime de Bachar al-Assad. Wagner a ensuite développé ses activités en Afrique. Concrètement, il fonctionne comme une milice armée, financée par les gouvernements qui lui font appel et par des activités de prédation économique : récupération de mines d’or et de diamant, vente d’alcool ou encore trafic d’animaux.
    Les contrats de Wagner avec les gouvernements visent également à exercer des activités d’influence, de désinformation et de déstabilisation. Parallèlement à ses fameuses fermes de trolls destinées à mener des campagnes de propagande sur internet, Wagner emploie la violence armée et commet de graves atteintes aux droits humains à l’encontre de populations civiles et d’opposants politiques – certains de nos collègues et M. le rapporteur ont évoqué ses exactions en Syrie, au Mali ou encore en Centrafrique. Dans le cas de l’agression de l’Ukraine – dont je salue, moi aussi, la présence de l’ambassadeur dans les tribunes –, Wagner sert de milice parallèle à l’armée régulière de la fédération de Russie. Selon le journal Der Spiegel, les services de renseignement allemands posséderaient des enregistrements de conversations prouvant que des miliciens du groupe se trouvaient à Boutcha lors du massacre et qu’ils y faisaient référence.
    Si Wagner comptait quelque 9 000 hommes dans le monde jusqu’à fin 2021, la guerre en Ukraine a démultiplié ses effectifs : pas moins de 50 000 mercenaires sont actuellement présents en Ukraine. Cette croissance exponentielle est probablement le résultat du recrutement problématique de 40 000 repris de justice : une vidéo diffusée en septembre 2022 montre Evgueni Prigojine s’adresser aux prisonniers d’une colonie pénitentiaire russe et leur proposer le contrat suivant : « Si vous faites six mois en Ukraine, vous êtes libres. Mais si vous n’y arrivez pas et que vous décidez que ce n’est pas pour vous, nous vous exécuterons. » Il y a quelques semaines, une fuite de documents internes du groupe – les Wagner Leaks – a confirmé plusieurs informations concernant les opérations de déstabilisation et d’influence de Wagner dans les processus électoraux, ainsi que ses achats d’armes. La milice a été sanctionnée par l’Union européenne en 2021 et 2023 ; elle est également dans le viseur du FBI pour son ingérence reconnue dans les élections américaines de 2016 et de 2020.
    Pour ces raisons, la présente proposition de résolution invite le Gouvernement à se mobiliser diplomatiquement auprès de l’Union européenne afin d’inscrire l’entité militaire privée Wagner sur sa liste des organisations terroristes. Cette inscription facilitera la prise de sanctions. Les violations graves aux droits humains perpétrées par Wagner, sa pratique de la terreur contre les populations civiles de nombreux pays, les preuves accumulées de sa responsabilité dans les massacres de plusieurs centaines de personnes à Moura, au Mali, ou à Boutcha, en Ukraine, sa présence et son influence croissantes dans de nombreuses régions du monde et sa capacité d’ingérence dans les processus électoraux, documentée et confirmée, laissent peu de doutes quant à la nécessité de placer ce groupe militaire privé sur la liste des organisations terroristes.
    Ce classement constituerait un signal important, à l’heure où cette milice instrumentalise ouvertement le sentiment antifrançais – et plus globalement anti-occidental – sur le continent africain, et à l’heure où elle manifeste des velléités dans d’autres régions du monde. Pour toutes ces raisons, les députés du groupe Socialistes et apparentés voteront en faveur de ce texte. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem. – M. Julien Bayou applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Stéphanie Kochert.

    Mme Stéphanie Kochert

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    Exécutions sommaires, exactions, crimes de guerre : voilà l’actif du groupe Wagner, organisation paramilitaire qui œuvre au Proche-Orient, au Venezuela, en Afrique, et tout dernièrement en Ukraine – je tiens, moi aussi, à saluer la présence de son ambassadeur dans les tribunes. Cette organisation n’a pas d’identité juridique : c’est une société fantôme, irresponsable devant le droit international et agissant hors de tout cadre juridique. Elle constitue une menace pour la sécurité mondiale, une menace, d’abord, parce que les mercenaires qui agissent sous sa bannière se sont rendus coupables des actes les plus ignobles – comment désigner autrement l’exécution de civils lors de la bataille de Tripoli, ainsi que les massacres au Mali et en Centrafrique ?
    Elle est une menace, ensuite, car elle mène une guerre hybride contre notre nation, nos institutions démocratiques et celles de nos partenaires européens. Ses agents sont des professionnels de la désinformation : ils ont cyniquement créé de toutes pièces une fosse commune au Mali, tentant de décrédibiliser l’action de l’armée française en l’accusant d’exactions. Les mensonges de Wagner vont bien au-delà, car à ces agissements criminels s’ajoutent des usines à trolls, ces milliers de faux comptes créés sur les réseaux sociaux pour remettre en cause les fondamentaux de notre démocratie et diffuser massivement la propagande du Kremlin.
    Wagner est une menace, enfin, car il est de facto une branche du ministère de la défense russe. Tous deux ont beau mettre en scène leurs désaccords, la Russie équipe les mercenaires de Wagner et leur donne du matériel, des munitions et des infrastructures d’entraînement.
    Le 30 novembre dernier, l’Assemblée nationale a adopté une résolution condamnant l’agression de l’Ukraine par la Russie et la stratégie de terreur de cette dernière. Sachant que cette stratégie de terreur s’appuie sur un bras armé, ce bras armé est, en toute logique, une organisation terroriste. Si Wagner est bel et bien une organisation terroriste, c’est aussi parce que son action correspond en tout point à la définition qu’en donnent les institutions européennes. L’Union européenne qualifie en effet de terroristes les actes qui sont commis pour intimider gravement une population, pour contraindre indûment les pouvoir publics, ou pour déstabiliser ou détruire les structures politiques, constitutionnelles, économiques ou sociales fondamentales d’un pays. C’est un fait : partout où Wagner est implanté, la population est mise en danger. Ses mercenaires utilisent des tactiques brutales et inhumaines : assassinats ciblés, enlèvements, exécutions sommaires. En outre, le groupe Wagner fait pression sur les pouvoirs publics par la violence, l’intimidation et la corruption. Il est devenu la garde prétorienne des dictatures militaires en Afrique et s’approprie les ressources naturelles, telle une puissance coloniale d’un nouveau genre, au service d’Evgueni Prigojine. La seule implication de Wagner dans la guerre en Ukraine, l’une des plus grandes opérations de déstabilisation d’une démocratie européenne depuis la fin de la seconde guerre mondiale, devrait suffire à nous convaincre de la nature de son action.
    En toute cohérence, nous devons donc appeler, comme le fait la présente proposition de résolution, à ce que le groupe Wagner soit inscrit sur la liste des organisations terroristes de l’Union européenne. Les institutions européennes et internationales doivent continuer à enquêter sur les multiples exactions de cette organisation paramilitaire. Nous devons aussi renforcer notre capacité à lutter contre les actions d’influence de ce groupe chez nos partenaires et alliés. Le groupe Horizons et apparentés votera donc en faveur de cette proposition de résolution. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes HOR, RE, LR et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Bayou.

    M. Julien Bayou

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    Beaucoup a été dit sur les atrocités commises par la milice de Wagner ; aussi me permettrai-je d’élargir quelque peu le sujet. Depuis de longues années, la Russie de Vladimir Poutine menace l’équilibre du monde et met en péril les intérêts de la paix et la stabilité mondiale. Depuis de longues années, Moscou foule aux pieds les normes les plus élémentaires du droit international, tout en continuant d’être invité à la table de nos dirigeants : il réussit ainsi à imposer son rythme de désordre et de déséquilibre.
    Il faut le reconnaître : la France a longtemps péché par sa naïveté, alors qu’il suffit de se retourner sur l’histoire récente du continent européen pour y recenser les crimes de guerre, les crimes contre l’humanité et les crimes d’agression perpétrés par la Russie. Dès les années 2000, la ville de Grozny, en Tchétchénie, a été rasée de la carte après des mois de bombardements intensifs : les principales victimes en ont été des civils. En 2008, la Russie a envahi militairement la Géorgie : elle a cherché à légitimer son action en reconnaissant l’indépendance d’entités séparatistes et en apportant une protection supposée aux populations russes de ces territoires. En 2014, prétendant à nouveau protéger des populations russes, la Russie a décrété l’annexion de la Crimée, à la suite d’un pseudo-référendum organisé sous occupation militaire – certains parlementaires, ici, se sont déshonorés à reconnaître les résultats de ce référendum. (M. Stanislas Guerini applaudit.) Puis, la Russie a déclenché le conflit du Donbass, bafouant la souveraineté et l’intégrité territoriales de l’Ukraine – dont je salue la présence de l’ambassadeur dans les tribunes. En 2015, nous avons assisté, impuissants, aux crimes de la Russie en Syrie.
    Nous savions donc qu’un dictateur tel que Vladimir Poutine ne pouvait être raisonné. Le président Emmanuel Macron a pourtant cru que, seul et contre tous, il pouvait influencer ses actes. Il l’a reçu avec tous les honneurs en 2017, au cœur de notre patrimoine, à Versailles, puis au fort de Brégançon, avec la volonté de réinitialiser les relations avec la Russie. Péché d’orgueil ! Sans égard pour la diplomatie européenne, le Président a cru naïvement pouvoir ramener M. Poutine à la raison lors d’entretiens mis en scène, dans une tentative médiatique et politique de se placer au cœur du jeu européen, contre l’avis de nos partenaires. Le résultat n’en est que plus amer : ce dialogue privilégié n’a pas empêché le pire, l’agression russe de l’Ukraine le 24 février 2022 et une guerre qui dure depuis plus d’un an. La naïveté de la politique française, misant sur une médiation vaine et sur l’idée qu’une sortie honorable devait être trouvée pour le dictateur Poutine, nous a fait omettre l’objectif premier : la Russie doit perdre cette guerre, l’Ukraine doit gagner, la démocratie doit prévaloir.
    Il faut ouvrir les yeux sur la réalité de la guerre avant qu’il ne soit trop tard – le Président de la République semble enfin l’avoir compris : tant mieux. Il y a peu, lors de la cinquante-neuvième conférence de Munich sur la sécurité, il a déclaré à propos du groupe Wagner : « Le président Poutine me disait : ces gens de Wagner, ils ne sont pas à nous, ils nous posent aussi des problèmes en Russie. » Il a ajouté qu’à l’époque, il accordait du crédit à cette déclaration et croyait le président Poutine. Là était la naïveté.

    M. Jean-Louis Bourlanges, président de la commission des affaires étrangères

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    Ce n’est pas vrai !

    M. Julien Bayou

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    « Ils ont maintenant officialisé le fait que Wagner était un truchement explicite direct diplomatico-militaire néomafieux de la Russie partout dans le monde », a-t-il poursuivi. Cette prise de conscience est salutaire, même si elle est tardive – la milice privée Wagner était déjà active dès 2014 en Crimée et dans le Donbass. Espérons que cette prise de conscience témoigne d’une naïveté révolue.
    Au-delà des divergences qui peuvent nous opposer – notamment avec des partis qui ont été financés par le Kremlin –, nous partageons le constat que ces exactions et ces crimes ne doivent pas être passés sous silence. (M. Inaki Echaniz applaudit.) Aussi le groupe Écologiste-NUPES soutient-il la proposition de résolution. Je salue le travail effectué par Benjamin Haddad pour inscrire l’entité militaire privée Wagner sur la liste européenne des organisations terroristes et pour traquer ses dirigeants, ses membres et ses soutiens, dont nous devons pouvoir saisir directement les avoirs. La liste est trop longue des oligarques russes qui apportent leur soutien à cette organisation et qui profitent impunément de nos stations de ski pour les sports d’hiver ou de nos ports pour amarrer leurs yachts, produits de la corruption et de la prédation. J’attends du Gouvernement qu’il donne suite au vote de cette résolution par des actes : il faut lutter contre la milice Wagner autant que contre ses donneurs d’ordres, et les traiter pour ce qu’ils sont, les complices d’un État criminel que nous devons considérer comme un paria des Nations unies. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo-NUPES et SOC et sur quelques bancs du groupe GDR-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Paul Lecoq.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Cette proposition de résolution visant à appeler la France et l’Union européenne à inscrire le groupe militaire privé Wagner sur la liste des organisations terroristes est une excellente occasion de débattre des entreprises de sécurité privées. Si des mercenaires ont été employés depuis qu’existent les guerres entre États, on assiste, avec la montée en puissance du néolibéralisme depuis les années 1980, à une explosion de l’usage des entreprises militaires privées.
    S’il est commode de faire appel à elles pour ne pas s’avouer responsable de telle ou telle opération et pour faire croire que la guerre ne fait pas de morts, ces entreprises absorbent des sommes colossales d’argent public. En Afghanistan, en 2011, les personnels de ces entreprises privées étaient plus nombreux que les militaires américains, soit 113 000 contre 90 000. En Irak, ces personnels ont bénéficié d’une immunité légale, ce qui a entraîné de graves débordements comme des exécutions de dizaines de civils commises notamment par l’entreprise Blackwater, et même des cas de torture. L’entreprise CACI a ainsi fourni des tortionnaires à la tristement célèbre prison d’Abou Ghraib.
    Depuis quelques années, l’attention s’est déplacée vers la Russie et la compagnie Wagner. Wagner est le surnom du fondateur de ce groupe militaire, Dmitri Outkine, un ancien officier du renseignement militaire russe néonazi, qui l’a choisi en hommage au compositeur préféré d’Hitler. Wagner est surtout le symbole de la porosité de la frontière entre civils et combattants, de l’effacement des frontières entre la paix et la guerre, et de la nouvelle guerre qui se mène sur tous les champs et dans tous les milieux, qui repose aussi bien sur la désinformation ou sur l’usage des cybertechnologies que sur les combats armés.
    À l’origine, Wagner n’était qu’un outil de désinformation soutenu par Evgueni Prigojine, l’autre fondateur du groupe, qui servait à relayer la communication officielle russe et la propagande visant à affaiblir les adversaires ou à mobiliser les groupes prorusses dans des espaces disputés comme le Donbass ou l’Ukraine.
    Puis le groupe s’est implanté en Afrique et en Syrie. En République centrafricaine, le travail de propagande n’a malheureusement pas été difficile pour eux, car l’État français n’a jamais été capable de comprendre son rôle délétère dans ses anciennes colonies et n’a jamais voulu voir que sa politique militaire, économique et monétaire en Afrique était totalement rejetée par les populations.
    Peu à peu, Wagner a ajouté un pilier militaire à cette machine de propagande, sans jamais lui donner d’existence juridique ou légale. Ce flou lui permet d’être présent en Russie malgré l’interdiction du mercenariat dans ce pays. Cela lui évite d’assumer la responsabilité juridique et légale des crimes qu’il commet, ce qui pose un grave problème. En effet, les crimes de masse odieux commis par Wagner ont été documentés au plus haut niveau, notamment aux Nations unies, et sa culpabilité ne semble pas pouvoir être mise en doute.
    C’est pourquoi le groupe Gauche démocrate et républicaine votera en faveur de cette résolution, en espérant que l’Union européenne entendra cette demande et que les restrictions de mouvement des personnels et les gels des avoirs seront véritablement efficaces.
    Attention cependant à ne pas faire de Wagner l’arbre qui cache la forêt. Le monde des sociétés militaires privées est constellé d’entreprises violentes, aux contours flous, qui agissent dans des zones grises de la légalité internationale. Beaucoup d’entre elles ont violé des droits et commis des crimes dans différents théâtres d’opérations.
    Par conséquent, la proposition de résolution aurait été plus forte si elle avait demandé à l’exécutif de s’engager, non seulement à suivre certaines recommandations à l’égard de Wagner, mais plus généralement à effectuer un travail diplomatique afin d’améliorer l’encadrement de l’ensemble de ce secteur, par exemple en renforçant le statut juridique du document de Montreux et le groupe de travail des Nations unies consacré à ce sujet.
    La privatisation de fonctions régaliennes telles que les fonctions militaires devrait rester le plus limitée possible. Certes, ce combat est loin d’être gagné, mais la France s’honorerait à défendre plus fortement cette position. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Julien Bayou applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bertrand Pancher.

    M. Bertrand Pancher

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    La société Wagner fondée par Evgueni Prigojine il y a près de dix ans n’a cessé depuis lors de déstabiliser les États et de perpétrer des crimes de guerre et contre l’humanité. Je reviendrai sur les multiples terrains d’opérations où cette milice est intervenue.
    D’abord, bien sûr, elle est intervenue en Ukraine. En 2014, le groupe a apporté un soutien militaire aux forces séparatistes en Crimée, en infraction avec le droit international. Depuis 2022, le groupe participe aux opérations militaires en soutien aux forces régulières de la fédération de Russie. Son rôle dans les multiples atrocités et massacres découverts, comme à Boutcha, est de mieux en mieux documenté.
    Ensuite, Wagner mène au Sahel de fausses opérations de maintien de l’ordre pour dissimuler ses deux véritables objectifs. Le premier est de piller les ressources naturelles et de faire de la guerre un business. Différents analystes ont en effet prouvé les liens entre les opérations de ce groupe et les concessions pour l’exploitation de mines de cobalt, de diamants et d’or. Le deuxième objectif de Wagner en Afrique est de jeter l’opprobre sur la France, en particulier sur ses opérations extérieures contre les menaces terroristes. Pourtant, je te tiens à le rappeler, les forces armées françaises n’ont agi qu’à la demande et avec l’accord des États concernés.
    Les succès militaires de Wagner sont plus que discutables. Au Mozambique, non seulement sa présence n’a pas rétabli l’ordre, mais son départ prématuré a permis à l’État islamique de s’emparer de la région de Cabo Delgado. Nous pouvons avoir les plus grandes craintes pour le Mali, dont le dirigeant putschiste se sert de Wagner comme garantie du maintien de son pouvoir personnel.
    Enfin, il faut faire toute la lumière sur l’implication de Wagner dans les élections ces dernières années. Plusieurs enquêtes soupçonnent le groupe de graves tentatives de déstabilisation d’élections démocratiques. Ses fermes à trolls auraient ainsi participé à une guerre de l’information lors de la présidentielle américaine de 2016. Le groupe aurait également manipulé les élections malgaches de 2018. Enfin, chers collègues, il aurait tenté de déstabiliser la campagne électorale française de l’élection présidentielle en 2017.
    Le groupe n’est pas seulement inefficace sur le terrain pour rétablir la sécurité, il met aussi tout en œuvre pour rompre le pacte démocratique en se livrant à des stratégies de désinformation et d’influence insidieuses. Wagner est l’un des grands acteurs qui alimentent le sentiment antifrançais dans le monde.
    Je ne reviendrai pas sur les relations officieuses entre le Kremlin et cette organisation criminelle. Les rangs de Wagner sont nourris par des repris de justice russes qui rejoignent le groupe en échange de réduction de peine, qui sont ensuite formés par des instructeurs de l’armée régulière de la fédération de Russie et qui finissent comme chair à canon.
    Les massacres de civils, les crimes atroces, le blanchiment d’argent, la corruption des autorités, le trucage et la désinformation opérée durant des élections sont autant de tentatives de chantage sur les peuples libres et les États indépendants. C’est pourquoi nous soutenons la proposition de résolution appelant le Gouvernement à faire inscrire le groupe Wagner sur la liste des organisations terroristes de l’Union européenne.
    Voter la résolution mobilisera les États européens, aussi bien dans leurs relations bilatérales qu’au sein des organisations internationales, et alertera sur le danger que représente cette milice. Voter la résolution, c’est demander le gel et la saisie d’avoirs du groupe et de ses responsables et c’est interdire aux individus liés à cette entreprise l’accès à notre territoire et ensuite à l’Europe. Certes, l’inscription sur la liste des organisations terroristes n’est pas nécessaire pour que de telles sanctions soient prises, mais il ne faut pas oublier la dimension symbolique de cette résolution.
    En effet, voter ce texte, c’est lutter contre les atteintes aux droits de l’homme, protéger l’organisation d’élections libres et réitérer notre soutien au peuple ukrainien face à l’agresseur russe. Pour autant, l’Assemblée nationale ne peut se contenter de déclarations. Le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires appelle l’ensemble des représentants de la nation à œuvrer pour opposer une action forte et déterminée à Wagner et aux dirigeants de la fédération de Russie. C’est pourquoi notre groupe votera avec conviction la présente résolution.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Crâne rasé, joues tombantes, regard de furie – nul ne peut oublier le visage d’Evgueni Prigojine. L’oligarque russe, proche de Vladimir Poutine, est aujourd’hui à la tête de l’organisation paramilitaire Wagner, fondée en 2014 notamment par Dmitri Outkine, ancien membre des forces spéciales russes, tatoué de symboles nazis.
    Si elle est entrée en action pour la première fois lors de la guerre de Crimée, c’est en Afrique, en Syrie et aux frontières de l’Europe que sont implantés ces mercenaires qui arborent des écussons brodés d’une tête de mort qui tient un poignard entre les dents.
    En quelques années, de petite milice observée du coin de l’œil par la communauté internationale, Wagner est devenu une organisation structurée qui vend ses services tout en développant une véritable machine à cash capable de payer elle-même ses mercenaires.
    En 2017, en Syrie, certains membres de Wagner avaient brillé par leur cruauté, allant jusqu’à filmer leurs exactions les plus perverses. Souvenez-vous de cette vidéo où l’on voit un déserteur syrien torturé à coups de masse avant d’être décapité et brûlé, attaché par les pieds après avoir été aspergé d’essence. En arrière-plan de la vidéo, ce sont des hommes parlant russe que l’on entend plaisanter sur le « barbecue » en préparation. L’horreur ! Après enquête, il s’avère qu’au moins un des bourreaux, dont on voit le visage, était bien employé par la société Wagner.
    En Centrafrique, leur réputation est la même. Sans foi ni loi, ils préfèrent tuer plutôt que de laisser d’éventuels opposants derrière eux. Selon un récent rapport de Human Rights Watch, des massacres sont perpétrés depuis 2019. À Aïgbado, en 2022, soixante-dix civils auraient été décimés par des hommes de Wagner. Les survivants parlent d’une véritable tuerie de masse. Ennemi direct de la France, le groupe Wagner ne cache pas sa volonté de nous bouter hors d’Afrique, espérant ainsi exploiter ses richesses. C’est une raison supplémentaire pour nous montrer intraitables.
    Selon les services de renseignement allemands, c’est encore Wagner et ses hommes de l’ombre qui sont responsables des quelque 460 cadavres découverts dans les fosses communes de Boutcha en Ukraine. Mi-avril, le président ukrainien Zelensky lui-même dénonçait les agissements de ces « monstres » russes après la publication sur les réseaux sociaux d’une vidéo montrant la décapitation d’un prisonnier de guerre ukrainien présumé.
    Les accusations de cette sorte concernant Wagner sont légion. Interrogé à plusieurs reprises à ce sujet, Vladimir Poutine nie toute responsabilité dans ces exactions. Wagner n’est pas l’armée régulière russe, se contente-t-il d’affirmer. Elle est pourtant surnommée l’armée secrète de Poutine, alors même que les sociétés privées militaires sont en principe interdites en Russie. Mais Wagner a manifestement ses entrées au Kremlin.
    Tout le problème est là : Wagner et ses hommes sans scrupules ont visiblement pour mission d’effectuer les sales besognes de l’État russe. En novembre dernier, le Parlement européen a adopté une résolution qui reconnaissait la Russie comme un État soutenant le terrorisme et comme un État qui a recours aux moyens du terrorisme. La résolution a été adoptée par 494 voix pour, 58 contre et 44 abstentions. Je vous laisse regarder qui a voté contre et qui s’est abstenu.
    Ce soutien au terrorisme a un nom : il s’appelle Wagner. Terroriste ? Bien sûr ! Il suffit de se référer à la définition des actes de terrorisme, rappelée par le Conseil européen à plusieurs reprises depuis 2002 : il s’agit d’actes illégaux portant gravement atteinte à un pays et ayant pour but d’intimider sa population, ou de gravement déstabiliser ou détruire ses structures. Il ne fait donc pas de doute que les actes commis par Wagner, et la communication macabre ou la désinformation qui les accompagne, constituent bien des actes de terrorisme.
    Si cette résolution n’aura bien sûr aucune valeur contraignante, elle permettra d’envoyer un message politique fort visant à dénoncer Wagner et l’État russe qui se cache derrière ce groupe. Ce message, nous le devons aux victimes, mais également à tous ceux qui, chaque jour, continuent de se battre contre la Russie, en Ukraine comme en Afrique. S’abstenir ou voter contre, ce serait choisir le camp d’un dictateur et de ceux qui accomplissent ses basses œuvres. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.)

    Mme la présidente

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    La discussion générale est close.
    Sur la proposition de résolution, je suis saisie par le groupe Renaissance d’une demande de scrutin public.

    M. Sylvain Maillard

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme la ministre de l’Europe et des affaires étrangères.

    Mme Catherine Colonna, ministre de l’Europe et des affaires étrangères

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    Permettez-moi de réserver mes premiers mots pour témoigner de notre émotion commune à l’égard des victimes du groupe Wagner, de notre compassion pour tous ceux qui subissent sa présence, et, surtout, de notre indignation devant les exactions et les crimes qu’il commet chaque jour.
    Mesdames et messieurs les députés, cette indignation, que je retrouve totalement dans la proposition de résolution de M. Benjamin Haddad, s’est également exprimée avec force dans vos interventions au nom de vos groupes parlementaires respectifs. Cette indignation nous rassemble, elle témoigne de notre attachement commun au respect du droit international et des droits de l’homme, qui constituent l’un des fondements de la République. Les signataires de la proposition de résolution viennent de nombreux bancs de l’Assemblée, preuve du profond et sincère attachement aux valeurs que la France entend continuer à défendre partout dans le monde.
    S’agissant de Wagner, le constat est implacable : que ce soit en Ukraine, au Mali, en République centrafricaine, au Mozambique, en Syrie, au Soudan ou encore en Libye, on trouve dans son sillage exactions, violations des droits de l’homme et du droit international humanitaire, prédation et pillage des ressources – en un mot, toutes les atteintes aux droits des populations et à la souveraineté des États, mais aussi toutes les atteintes à la dignité de la personne humaine.
    Les cas de l’Ukraine et du Mali sont tout à fait représentatifs.
    En Ukraine, Wagner est présent depuis qu’il a participé à l’invasion de la Crimée, en 2014 – vous l’avez rappelé.

    M. Sylvain Maillard

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    Eh oui !

    Mme Catherine Colonna, ministre

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    Son implication au cœur de l’agression russe est tellement centrale que même le Kremlin, qui, malgré l’évidence, s’est pendant un temps acharné à prétendre que ce groupe était une entité privée, s’en remet désormais ouvertement à M. Prigojine pour pallier les lacunes criantes de son armée régulière.
    Le groupe Wagner était en première ligne en mars 2022 pendant l’occupation de Boutcha. Il y a tué, torturé, violé ; des dizaines de sépultures d’habitants de la ville, que j’ai eu la douleur de voir personnellement lorsque je m’y suis rendue, portent sa marque. Ce qui est vrai pour Boutcha l’est également pour Soledar ou, aujourd’hui, pour Bakhmout.
    Les postures publiques de Prigojine oscillent entre celles d’un bandit de grand chemin et celles d’un pseudo-ministre de la défense, mais une chose est certaine : le groupe qu’il dirige, qui recrute massivement parmi les pires criminels de Russie, ne respecte aucune règle, aucune loi, aucun des principes du document de Montreux, qui vise à réguler le comportement des sociétés militaires privées et qu’il n’a d’ailleurs pas signé. L’ordre donné à ses mercenaires, le 23 avril, de ne plus faire de prisonniers à Bakhmout, en est un exemple supplémentaire : il s’agit là, tout simplement, de la reconnaissance de crimes de guerre – une reconnaissance froide et assumée – par ceux-là mêmes qui les commettent.
    Au Mali, nous avons tous en mémoire le massacre de Moura, en mars 2022, où, pour la seule raison qu’ils étaient Peuls, plus de 300 Maliens ont été sommairement exécutés après avoir été contraints de creuser leurs propres fosses communes. L’implication directe du groupe Wagner dans ce crime infâme a été clairement documentée par le Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme. Au Mali – comme, d’ailleurs, en République centrafricaine –, la nature des exactions du groupe Wagner est aussi diverse qu’effroyable : assassinats, viols, violences sexuelles, arrestations arbitraires, installations de camps de torture, mutilations. Cette liste, qui heurte profondément la conscience morale, nous est rapportée par les Nations unies, mais aussi par la presse et des organisations de la société civile. Je veux, devant vous, rendre hommage à leur engagement (Applaudissements sur les bancs du groupe RE, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes Dem et HOR et quelques bancs du groupe LR) pour qu’aucun de ces crimes barbares ne demeure dans l’ombre, malgré tous les risques qu’ils peuvent encourir en les dénonçant.
    Les exactions commises par le groupe Wagner ne sont pas des actes isolés ou des accidents de parcours. Ils sont le fruit d’une doctrine qui vise à instaurer un régime de terreur. Ils sont aussi le bilan quotidien d’un groupe qui, pour servir ses intérêts économiques, isole et déstabilise les pays qui l’accueillent, au prix de leur souveraineté. Jamais les interventions de Wagner n’ont permis de rétablir la sécurité ou d’endiguer la menace terroriste – jamais. Il n’a d’ailleurs jamais cherché à y parvenir, car il ne sert rien d’autre que ses propres intérêts, et ceux de quelques dirigeants désireux de se maintenir à tout prix au pouvoir en hypothéquant l’avenir de leur population. Là où s’implante Wagner, les groupes armés progressent et la démocratie s’étiole – la République centrafricaine et le Mali en sont des exemples malheureux.
    Je tiens à vous dire que, devant ce constat, notre diplomatie est pleinement mobilisée, et qu’elle mène des actions concrètes et complémentaires.
    Premièrement, nous agissons pour entraver préventivement les déploiements du groupe Wagner, grâce à des échanges directs, francs et exigeants avec les pays qui pourraient être tentés d’y avoir recours. Cette action diplomatique, menée en étroite concertation avec nos partenaires internationaux, vise à alerter les pays sur les risques induits, qui, comme on l’a vu, sont immenses. Ainsi, avant même que la junte malienne ne décide de recourir au groupe Wagner, nous l’avions prévenue qu’un tel déploiement ne ferait qu’accentuer la dégradation de la situation sécuritaire en Afrique occidentale et aggraver la situation des droits de l’homme au Mali. C’est tout le sens du communiqué conjoint publié le 23 décembre 2021, que nous avons cosigné avec quinze de nos partenaires européens et internationaux.
    Deuxièmement – et c’est à juste titre rappelé dans la proposition de résolution –, nous nous mobilisons, de manière résolue et déterminée, pour ne jamais laisser de place à l’impunité lorsque des exactions sont commises. La France soutient ainsi activement le travail essentiel mené par la Cour pénale internationale. En Ukraine, le bureau du procureur de la Cour pénale internationale a ouvert une enquête dès le 2 mars 2022 à la requête de quarante et un États, dont les vingt-sept États membres de l’Union européenne – y compris la France.
    Notre soutien à la Cour pénale internationale est, du reste, parfaitement concret : troisième contributeur à son budget, nous avons en outre versé une contribution volontaire au bureau du procureur en 2022, pour lui permettre de continuer à enquêter sur toutes les situations, malgré l’accroissement de ses activités. La France a également partagé un certain nombre d’informations avec la Cour, afin de l’aider à documenter les crimes commis par la Russie et ses supplétifs – notamment à Boutcha. Elle met à sa disposition un magistrat et des enquêteurs. En outre, nous avons déployé en Ukraine deux missions de l’Institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale, en particulier à Boutcha et Izioum, et livré deux laboratoires d’analyses mobiles en appui aux investigations ukrainiennes. Le second laboratoire, matériel unique que la France est l’un des rares pays au monde à posséder, est en ce moment même remis aux autorités ukrainiennes par notre ambassadeur.
    Enfin, sous l’impulsion de la présidence française du Conseil de l’Union européenne, le mandat de l’unité de coopération judiciaire de l’Union européenne, Eurojust, a été renforcé. Il doit permettre à cette agence de préserver, stocker et analyser des preuves de crimes de guerre, crimes contre l’humanité et génocides, en vue de les redistribuer aux enquêtes pénales ouvertes par l’Ukraine, mais aussi par les différentes autorités judiciaires des États membres de l’Union européenne et la Cour pénale internationale. De même, au Mali, nous appelons la Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation au Mali (Minusma) à utiliser son mandat en matière de droits de l’homme, pour faire en sorte que les responsables d’exactions – notamment ceux du massacre de Moura – soient poursuivis.
    Troisièmement, nous avons instauré des sanctions à l’égard du groupe Wagner, de ses responsables et de ses entités associées. Comme la prédation des ressources naturelles est au cœur de ce modèle économique criminel, les sanctions sont au cœur de la proposition de résolution que vous avez présentée, M. Haddad. Dans ce domaine, nous sommes pleinement mobilisés avec nos partenaires européens. Ainsi, à l’initiative de la France, le groupe Wagner, dix-neuf individus et douze entités lui étant liés, ont déjà fait la cible de deux paquets de sanctions de l’Union européenne – le premier il y a plus de deux ans, le second en février 2023. Ces sanctions ont d’ores et déjà des conséquences concrètes : elles entraînent le gel des avoirs dans l’Union européenne, mais aussi l’interdiction de mettre des fonds et des ressources économiques à disposition des personnes et des entités sanctionnées. Pour être parfaitement claire, je précise que figurent notamment parmi celles-ci Evgueni Prigojine, le leader du groupe Wagner, et Dmitri Outkine, son fondateur, mais aussi Ivan Maslov, qui dirige sa branche au Mali, ou encore Vitalii Perfiliev, personnage clé de Wagner en République centrafricaine.
    D’un point de vue strictement juridique, l’inscription de la milice Wagner sur la liste des entités terroristes de l’Union européenne au titre du régime dit « PC 931 » n’aura pas d’effet direct supplémentaire, mais nous ne devons pas sous-estimer l’importance symbolique d’une telle désignation, ni le caractère dissuasif qu’elle pourrait avoir – espérons-le – pour les États aujourd’hui tentés d’y avoir possiblement recours.
    C’est à cette aune que je tiens à saluer la proposition de résolution soumise à votre examen, dans la lignée des initiatives prises par plusieurs parlements, dont le Parlement européen, le 23 novembre 2022. Ce sujet, si important et si légitime, mérite que nous l’expertisions pleinement, avec nos partenaires européens, bien sûr, mais également avec nos principaux partenaires en matière de sanctions – les États-Unis et le Royaume-Uni – car nous ne serons efficaces que si nous parvenons à afficher un front uni. La désignation du groupe Wagner comme entité terroriste n’est aujourd’hui pas un tabou, tant les éléments qui justifient une telle décision sont nombreux. Je veux donc vous assurer que votre message a été entendu et que je partage très largement votre point de vue : rien ne sera négligé pour que ce groupe rende des comptes et qu’un terme définitif soit mis à ses exactions. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs des groupes Dem et HOR. – M. Paul-André Colombani applaudit également.)
    Parallèlement, et comme y invite la proposition de résolution, nous étudions la possibilité de renforcer encore les sanctions européennes contre Wagner, tout en développant des instruments additionnels permettant de lutter efficacement contre ses actions déstabilisatrices. Des discussions s’engageront à Bruxelles à cette fin, et vous pouvez compter sur notre détermination sans faille. Les lignes d’action que j’ai mentionnées et les réflexions additionnelles que nous menons par ailleurs convergent toutes vers un seul et même objectif : entraver, avec détermination, les actions déstabilisatrices du groupe Wagner, et l’empêcher de commettre ses exactions, dont les populations civiles sont les premières victimes.
    Soyez assurés que notre mobilisation est constante et totale, à la fois parce que notre détermination est aussi forte que notre indignation, et parce que nous sommes tous, ici, farouchement attachés à ce que la règle de droit demeure le fondement de l’ordre international et des relations entre États. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE et sur plusieurs bancs des groupes Dem et HOR.)

    Explications de vote

    Mme la présidente

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    Dans les explications de vote (Exclamations), la parole est à M. Hadrien Ghomi. Je rappelle que ces explications ont été demandées par les groupes parlementaires : merci de les écouter en silence.

    M. Hadrien Ghomi (RE)

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    Avant qu’il soit procédé au vote, je tenais à vous dire à quel point les membres du groupe Renaissance se réjouissent de ce que le texte fasse l’objet d’un quasi-consensus. Je remercie mon collègue Benjamin Haddad, qui l’a déposé, de son travail.
    Ainsi que l’ont fort bien expliqué plusieurs orateurs, l’entité militaire privée Wagner constitue une nuisance qu’il nous faut combattre. Depuis près de dix ans, sa présence dans certaines des pires zones de conflit du globe y aggrave bien souvent la situation, pour le plus grand malheur des populations. En Syrie, au Donbass, en République centrafricaine, au Mali ou encore au Soudan, on ne compte plus les exécutions sommaires, tortures et autres atrocités auxquelles se sont livrées des membres de ce groupe – sans parler des crimes de guerre commis en Ukraine, où ils bombardent des villes, tuent des civils, ne laissent derrière eux, comme à Boutcha, que charniers et désolation.
    Mme la ministre l’a affirmé : en tant qu’humanistes, défenseurs des libertés, nous avons le devoir d’appeler la France et l’Union européenne à réagir en inscrivant le groupe Wagner sur la liste des organisations terroristes, comme le demande mon collègue. Il ne fait aucun doute que les exactions imputables à ses mercenaires correspondent à cette qualification. Quel autre nom que celui de terrorisme donner au fait de déstabiliser les autorités de plusieurs pays africains afin que les troubles politiques servent les seuls intérêts de ce groupe, d’alimenter le sentiment antifrançais par des opérations d’influence et de désinformation menées par des miliciens, de tenter d’assassiner des détenteurs élus du pouvoir, par exemple le président ukrainien Volodymyr Zelensky ? Inscrire cette entité sur la liste de l’Union européenne des organisations terroristes reviendra non seulement à combattre son pouvoir de nuisance, mais aussi à signifier à ses membres, à leurs soutiens, que nous ne laisserons pas la terreur prospérer impunément. (« Très bien ! » et applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Louis Thiériot.

    M. Jean-Louis Thiériot (LR)

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    Il existe un droit sous les armes, un droit dans la guerre, jus in bello : le groupe Wagner constitue à cet égard un exemple de régression de la civilisation. Alors que la violence légitime est le monopole des États, aujourd’hui, au cœur du continent européen, une milice constituée de mercenaires défigure l’Ukraine – que je salue en la personne de son ambassadeur qui assiste à nos débats –, tout comme elle défigure l’Afrique en renouant avec les traditions militaro-mafieuses des mercenaires de la Renaissance, lansquenets ou condottieri, qui mêlaient armée et business en vue de s’assurer le contrôle d’un territoire et en dernier lieu la fortune, celle des Visconti reposant ainsi sur le marbre de Carrare, celle d’Albrecht von Wallenstein sur les mines de sel du Salzkammergut.
    Nous ne voulons pas revenir à cette époque, mais que la civilisation et l’État de droit continuent de progresser ; c’est pourquoi notre groupe votera bien évidemment en faveur de cette proposition de résolution ! Je salue le travail de Benjamin Haddad, qui a réussi à fédérer toutes les bonnes volontés autour de ce texte, auquel j’espère que pas une seule voix ne fera défaut. Nous donnerons ainsi de la France l’image que nous avons appris à aimer ! (« Bravo ! » et applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR, RE, Dem, HOR et LIOT, ainsi que sur quelques bancs du groupe SOC. – M. Julien Bayou applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Louis Bourlanges.

    M. Jean-Louis Bourlanges (Dem)

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    Le groupe MODEM votera évidemment pour ce texte, de même que l’immense majorité des membres de notre assemblée. En guise de contribution au débat, je voudrais signaler un élément essentiel : le caractère effrayamment moderne de la toxicité du groupe Wagner, qui révèle une double dérive de la société internationale. La première réside dans le règne de la communication. Ce qui distingue la violence de cette organisation d’une brutalité simple, ordinaire, classique, banale, c’est le fait qu’elle soit mise au service d’une stratégie d’intimidation, de désorganisation et de contrainte, qu’elle devienne un instrument de communication – violence et communication, c’est la marque du terrorisme.
    La seconde, comme le rappelait à l’instant Jean-Louis Thiériot, consiste en une tendance extrêmement développée à l’irruption dans la vie internationale de comportements mafieux – à ce que des acteurs mafieux acquièrent le statut d’acteurs tout court et remettent en cause l’autorité des États, naguère détenteurs incontestés de la violence légitime. Bien sûr, Wagner dépend des Russes et de M. Poutine, mais le pouvoir de M. Poutine est-il finalement autre chose qu’une dérive mafieuse de l’État de Pierre le Grand ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et RE.) Ne sommes-nous pas face à la prise de contrôle par des groupes financiers véreux, profondément toxiques, d’une grande nation et d’un grand peuple ? De ce point de vue, en votant en faveur de la proposition de résolution, nous dénoncerons, je le répète, une dérive mortelle pour la communauté internationale. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem, RE, HOR et LIOT, ainsi que sur quelques bancs du groupe LR.)

    M. Erwan Balanant

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Julien Bayou.

    M. Julien Bayou (Écolo-NUPES)

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    Premièrement, je regrette que la ministre des affaires étrangères n’ait fait preuve d’aucun recul concernant l’aveuglement, ces dernières années, de la diplomatie française : un tel examen de conscience serait utile en vue de ne pas retomber dans les mêmes erreurs à l’égard d’autres dictateurs, que ce soit en Turquie ou en Chine.
    Deuxièmement, puisque la ministre a cité les noms de certains oligarques, je souhaiterais savoir quelles sanctions sont concrètement prévues à leur encontre. Je pense en particulier à Timour Ivanov, le vice-ministre de la défense, chargé – je peine à prononcer ces mots – de la reconstruction de Marioupol. Toute la famille de ce criminel de guerre multiplie les voyages en Europe ; on a vu, il y a peu, sa compagne Svetlana Manevich faire tranquillement du shopping à Courchevel ! Il est absolument incompréhensible que ces familles de criminels de guerre multiplient les voyages en Europe et puissent mener la grande vie en France, en dépit des sanctions françaises et européennes. (Murmures sur plusieurs sur les bancs du groupe RE.) C’est pourquoi j’appelle, je vous appelle – mais cela dépend du Gouvernement – à soutenir très concrètement ces dernières, autrement dit à soutenir l’effort en vue de la victoire ukrainienne.
    Enfin, puisque l’ambassadeur de l’Ukraine assiste à nos débats, je conclurai par ces mots : slava Oukraïni, heroïam slava – gloire à l’Ukraine, gloire aux héros ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Écolo-NUPES, ainsi que sur quelques bancs des groupes LFI-NUPES et SOC.)

    Vote sur la proposition de résolution

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix la proposition de résolution.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        331
            Nombre de suffrages exprimés                331
            Majorité absolue                        166
                    Pour l’adoption                331
                    Contre                0

    (La proposition de résolution est adoptée.)
    (Applaudissements sur divers bancs.)

    Rappel au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Aymeric Caron, pour un rappel au règlement.

    M. Aymeric Caron

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    Il se fonde sur l’article 70, alinéa 3, de notre règlement. J’ai été gravement mis en cause (« Oh ! » sur plusieurs bancs des groupes Re et Dem), calomnié (Mêmes mouvements), par Mme Yadan, du groupe Renaissance. Interrogée par la chaîne de télévision i24News au sujet de l’allocution…

    Mme la présidente

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    Monsieur Caron, cette mise en cause n’ayant pas eu lieu dans l’hémicycle, nous sommes en dehors de notre débat. Je vous remercie. (Brouhaha. – Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Mathilde Panot

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    Non, il y a des précédents !

    M. Aymeric Caron

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    C’était une mise en cause personnelle !

    Mme la présidente

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    Nous sommes hors débat ! Avant de passer au point suivant de l’ordre du jour, je suspends la séance quelques minutes.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-huit heures quarante, est reprise à dix-huit heures cinquante.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    3. Pavoisement des drapeaux français et européen sur le fronton des mairies

    Discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion de proposition de loi de M. Mathieu Lefèvre, Mme Aurore Bergé et plusieurs de leurs collègues visant à rendre obligatoire le pavoisement des drapeaux français et européen sur le fronton des mairies (nos 1011, 1180).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Mathieu Lefèvre, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    Nous sommes réunis un 9 mai, Journée de l’Europe qui rend hommage à la déclaration de Robert Schuman en 1950. En cette journée symbolique, j’ai l’honneur de rapporter une proposition de loi qui l’est tout autant, et je l’assume. J’en profite pour remercier la présidente du groupe Renaissance, Aurore Bergé, pour son engagement européen que je lui connais chevillé au corps.
    Car symbolique ne veut pas dire anecdotique, bien au contraire. Et ceux qui, d’un trait de plume, balayent les symboles en dehors du champ du débat public contreviennent en réalité aux articles 2 et 88 de notre Constitution et à cette République que d’aucuns, de part et d’autre de notre hémicycle, jugent mauvaise sans avoir les moyens démocratiques de la changer.
    Ceux qui balayent d’un trait de plume l’histoire d’un drapeau né cinquante ans avant le traité constitutionnel de 2005 en méconnaissent également le sens et la portée. Ils iront expliquer à l’Ukraine, membre du Conseil de l’Europe, que la France refuse de se prévaloir d’un drapeau que ce pays arbore, à la recherche d’une paix abîmée par la haine. Ce sont d’ailleurs en général les mêmes qui, à l’instar de Mme Le Pen, proposent de retirer le drapeau européen de tous les bâtiments publics ou qui, comme M. Mélenchon, se sont indignés devant la présence de ce qu’ils nomment une forfaiture démocratique au sein de notre assemblée. (M. Arnaud Le Gall s’exclame.)

    M. Jean-François Coulomme

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    Il n’est pas là, M. Mélenchon !

    Mme Mathilde Panot

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    Il vous manque !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Si les symboles n’avaient pas d’importance, jamais le Rassemblement national n’aurait proposé de rapatrier les cendres de Napoléon III.

    M. Erwan Balanant

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    Ils ont fait ça ?

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Si les symboles n’avaient pas d’importance, jamais les Insoumis n’auraient proposé de pavoiser cet hémicycle aux couleurs des Nations unies.
    À dire vrai, ceux qui s’opposent au pavoisement de nos mairies, symboles de la proximité et de la vitalité du pacte républicain, aux couleurs tricolores et européennes ne s’opposent pas au drapeau mais à l’idée européenne elle-même.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Quelle idée !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    J’en profite pour remercier nos collègues écologistes, singulièrement la présidente Chatelain, pour leur cohérence sur ce sujet.
    Ne vous cachez pas derrière des faux-semblants juridiques, mes chers collègues, pour rejeter une proposition que j’assume comme politique en cette journée si symbolique. En réalité, ceux qui ont du mal, parmi nous, à masquer leur malaise face au drapeau étoilé, ont tout autant de mal à masquer leurs rêves de Frexit déguisé – rouge pour les uns, brun pour les autres. (M. Jean-Philippe Tanguy s’exclame.) Du Rassemblement national à La France insoumise, ceux-là nous disent de concert vouloir faire prévaloir leur propre programme sur les traités et les règles communes, comme si l’on pouvait s’en extraire sans conséquences pour notre pays et pour les Français. C’est votre droit, mes chers collègues, mais vous assumerez ces conséquences devant les Français, tout comme vous assumerez les risques que vous ferez courir à notre pays.

    M. Emeric Salmon

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    Aucun problème.

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Ces conséquences, nous ne les connaissons que trop bien : isolement, désagrégation et fragilisation d’un édifice vecteur de paix, de démocratie et de prospérité.

    M. Jean-François Coulomme

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    Vous parlez des retraites ?

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Au groupe Renaissance tout au contraire, nous sommes fiers de réaffirmer notre attachement au projet européen et à l’idéal des pères fondateurs, d’autant plus en cette heure où les armes sévissent à nouveau sur notre continent.
    Ceux qui s’opposeront à ce texte ne s’opposeront pas aux morceaux de tissu sur lesquels ils sont amenés à se prononcer mais aux valeurs que ceux-ci emportent, que nos prédécesseurs ont arrachées et défendues de haute lutte : les droits de l’homme, le pluralisme, la démocratie, l’unité nationale et la cohésion entre les États européens. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.)

    M. Alexis Corbière

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    Il n’y a pas beaucoup d’applaudissements ! C’est ridicule ! (M. Ugo Bernalicis rit.)

    M. Erwan Balanant

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    Ne vous inquiétez pas, il y en aura d’autres !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Ils trouveront les mots pour expliquer leur refus aux héros de la place Maïdan en Ukraine, qui arboraient fièrement le drapeau européen face à la répression. Ils l’expliqueront également aux Géorgiens qui le brandissaient en étendard face à l’oppresseur russe. Ils trouveront les mots pour l’expliquer au président Zelensky, qui met en avant les drapeaux européen et ukrainien.
    Par le passé, notre assemblée a été conduite à légiférer sur ce sujet sans que cela ne vaille discorde, bien au contraire. En 2013, à l’occasion de la discussion d’un projet de loi soutenu par le gouvernement Ayrault, le groupe de l’Union pour un mouvement populaire (UMP) avait proposé un amendement pour pavoiser nos écoles aux couleurs tricolores et européennes ; cet amendement avait été adopté à l’unanimité. Que s’est-il passé pour que dix ans plus tard nous soyons incapables de nous réunir autour de ces valeurs de cohésion ?

    M. Erwan Balanant

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    Ça, c’est une bonne question !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Pourquoi vouloir que nos mairies, symboles de proximité républicaine et auxquelles les Français sont attachés – à raison – fassent l’objet d’un traitement différent de nos écoles ? Entre-temps, ceux qui voulaient sortir de l’euro se sont convertis à la monnaie unique. Entre-temps, ceux qui voulaient sortir de l’espace Schengen s’y sont convertis. Entre-temps, ceux qui voulaient quitter l’Union ont préféré la quitter de l’intérieur, dans une préférence nationale qui sied tant à l’extrême gauche qu’à l’extrême droite. Mes chers collègues, vouloir plus d’Europe, ce n’est pas vouloir moins de France (« Si ! » sur les bancs du groupe RN), et la citoyenneté européenne telle qu’elle est pensée depuis Maastricht ne se substitue pas à l’identité française. En vérité, la haine de l’Europe relève d’une peur panique du changement et de l’altérité dont se nourrissent les populismes.

    M. Philippe Gosselin

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    C’est caricatural, monsieur le rapporteur.

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Je vous le dis tout net : nous ne sommes pas des eurobéats, et il n’y en a pas dans cet hémicycle. Nul n’ignore les failles, les frustrations, les échecs parfois de la vie à vingt-sept. Nous mesurons chacun les attentes de nos concitoyens à l’égard d’une Europe plus concrète et ancrée dans leur quotidien.

    M. Arnaud Le Gall

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    Ça vous sert d’excuse !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Mais je le dis avec tout autant d’évidence : ceux qui croient que nous pourrons exister seuls dans le concert des nations, coincés entre les États-Unis et la Chine, ceux qui croient qu’il est possible d’aider nos frères ukrainiens sans aucune coordination, ceux qui pensent que la bataille climatique peut se limiter au strict cadre de nos frontières hexagonales, ceux-là mentent aux Français.

    Mme Raquel Garrido

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    Dieu que c’est bête !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Ils sont en général très prompts à passer sous silence toutes les réussites de l’Union : taxe carbone à ses frontières (Mme Alma Dufour s’exclame), imposition minimale des grands groupes, relance budgétaire pendant la crise sanitaire, régulation des géants du numérique. Je pourrais continuer ainsi et égréner tous les succès obtenus pendant la présidence française du Conseil de l’Union européenne.
    Mes chers collègues, nos débats nous donneront l’occasion de revenir en détail sur les points d’achoppement du texte comme sur reproches techniques, fondés ou non, qui lui ont été faits. Je pense à la question de la libre administration des collectivités territoriales ou bien à celle du coût que cette charge représenterait pour les municipalités, que le groupe Horizons a soulevées à juste titre. Mais je le redis : le vote qui sera le vôtre tout à l’heure sera un vote en faveur ou en défaveur de la construction européenne, ni plus ni moins. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. Thomas Ménagé

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    La ficelle est trop grosse !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Il départagera ceux qui considèrent que sans la France, l’Europe ne serait pas l’Europe, et que sans l’Europe, la France ne serait pas la France, de ceux qui ont la construction européenne et le drapeau honteux. Je ne mets cependant pas sur le même plan ceux qui ont exprimé des réserves sur ce texte en raison du coût que peut représenter le pavoisement pour les plus petites communes. En commission, certains se sont abstenus pour cette raison, ce qui a entraîné l’adoption des amendements de suppression.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Petit politicien. Juste avant les élections européennes…

    M. Erwan Balanant

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    C’est dans un an, tout de même.

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Je pense en particulier à nos collègues du MODEM, dont chacun connaît l’attachement à l’Europe. J’ai entendu ces réserves. Nous avons parfaitement conscience que le pavoisement peut représenter un coût important pour les petites communes. C’est la raison pour laquelle je donnerai un avis favorable à l’amendement de notre collègue Saulignac visant à en dispenser les communes de moins de 3 500 habitants, que notre collègue Rebeyrotte proposera de sous-amender pour fixer le seuil à 1 500 habitants. (Rires sur plusieurs bancs des groupes RN et LFI-NUPES. – M. Jean-Paul Lecoq rit également.)

    M. Frédéric Boccaletti

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    La loi n’est pas la même pour tous !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Il me semble que nous parviendrons ainsi à un compromis qui permettra de réunir une majorité de voix dans cet hémicycle. (Brouhaha sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Puisque j’évoquais un amendement du groupe socialiste, permettez-moi…

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, chers collègues, un peu de silence.

    M. Ugo Bernalicis

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    Avouez que c’est drôle, madame la présidente !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    …de conclure en citant les vœux du Président Mitterrand le 31 décembre 1994, les derniers qu’il ait présentés à la nation. Si cette intervention est restée dans les mémoires pour sa conclusion (Mêmes mouvements.)
    Souffrez, chers collègues de La France insoumise, que l’on puisse entendre le président Mitterrand dans cet hémicycle ! « Ne séparez jamais la grandeur de la France de la construction de l’Europe. C’est notre nouvelle dimension, et notre ambition pour le siècle prochain. » Voilà ce que disait le président Mitterrand et voilà où en est aujourd’hui La France insoumise !

    M. Erwan Balanant

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    Les masques tombent !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    C’est bien là le sens de notre débat : un symbole, oui, trois fois oui, mais un symbole plus que jamais utile dans la France et dans l’Europe d’aujourd’hui. C’est pourquoi j’invite tous ceux qui, dans cet hémicycle, savent que c’est lorsqu’elle assume son destin européen que la France se grandit, à adopter cette proposition de loi. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

    M. Jean-Paul Lecoq

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    C’est raté ! Quels arguments ! Quelle campagne électorale !

    M. Ugo Bernalicis et M. Alexis Corbière

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    Puisque nous ne sommes pas 3 500 dans l’hémicycle, il faudrait donc retirer le drapeau européen ? (Sourires.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de l’Europe.

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État chargée de l’Europe

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    À Kiev en novembre 2013, à Bucarest en février 2017, en Pologne en octobre 2021, à Tbilissi en mars dernier : quand ils manifestent pour la paix, pour la liberté, pour les droits des femmes, contre la corruption, c’est le drapeau européen que brandissent les peuples d’Europe. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Ben voyons !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Ces peuples qui se soulèvent en brandissant le drapeau européen incarnent ces paroles prononcées par Robert Schuman, il y a soixante-treize ans aujourd’hui, dans le salon de l’Horloge du Quai d’Orsay : « Pour que la paix puisse vraiment courir sa chance, il faut, d’abord, qu’il y ait une Europe. »

    M. Jocelyn Dessigny

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    Ce n’est pas sur le fronton de leurs mairies mais ici, en France, que vous voulez l’imposer ! Revenez en France !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Et toujours, dans ces manifestations, le drapeau européen est accompagné. Il est accompagné des drapeaux des pays de ces peuples qui se lèvent…

    M. Erwan Balanant

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    Du drapeau breton, souvent. (Sourires.)

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    …car le drapeau européen ne vient pas seul, il vient toujours avec les étendards nationaux. Il leur est consubstantiellement lié. De même, l’identité européenne complète harmonieusement les identités nationales.
    Elle n’enlève rien, ne retranche rien. Elle augmente nos identités parce que l’Europe renforce notre souveraineté.
    Porter les couleurs de l’Europe, c’est affirmer des valeurs communes : démocratie, liberté, État de droit.

    M. Jocelyn Dessigny

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    On n’est pas dans un État fédéral !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Je sais, cela vous échappe…

    M. Jocelyn Dessigny

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    Ce qui vous échappe, c’est que nous ne sommes pas aux États-Unis !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Porter les couleurs de l’Europe, c’est affirmer que nous sommes unis dans la diversité. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    M. Sylvain Maillard

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    Exactement !

    M. Laurent Jacobelli

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    Hors sujet !

    M. Sylvain Maillard

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    Vous n’aimez pas la diversité !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Et vous, vous n’aimez pas la France !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Porter les couleurs de l’Europe, c’est les afficher au fronton de nos mairies, au côté de nos couleurs nationales. C’est bien l’illustration que cette union dans la diversité nous rend plus forts.
    Tel est le sens de la proposition de loi qui nous est présentée à l’initiative de Mathieu Lefèvre. Elle vise à rendre obligatoire le pavoisement du drapeau français et du drapeau européen sur le fronton de nos mairies.

    Mme Raquel Garrido

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    Non, de 10 % des mairies seulement !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    J’entends ceux qui disent que cette assemblée devrait plutôt se préoccuper de l’inflation, du pouvoir d’achat et des soucis quotidiens des Français. (« Eh oui ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Arnaud Le Gall applaudit également.)
    Oui, la situation reste difficile pour trop de Français.

    M. Thomas Ménagé

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    C’est bien de le dire, mais réagissez !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Mais il n’y a ni opposition, ni substitution entre toutes les lois adoptées depuis des mois – pas par vous ! – pour protéger les Français contre la vie chère,…

    Mme Alma Dufour

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    Arrêtez de dire qu’ils sont protégés !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    …qui est le résultat de l’agression russe en Ukraine,…

    M. Jocelyn Dessigny

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    Elle a bon dos, l’Ukraine ! La crise existait déjà avant !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    …et l’importance de ce que représente ce drapeau.
    Nous avons mis en place les boucliers nécessaires pour protéger les Français et nous continuons de le faire. La solidarité européenne a assuré l’approvisionnement de l’énergie cet hiver.
    Réaffirmer nos valeurs européennes quand les populistes d’extrême droite ou d’extrême gauche instrumentalisent tous les jours les difficultés des Français, cherchent à les diviser,…

    M. Jocelyn Dessigny

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    On essaie de vous ouvrir les yeux ! Vous vivez les yeux fermés, vous êtes hors sol, déconnectés !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    …c’est réaffirmer l’unité du peuple français : tous citoyens européens !
    Cette proposition devrait nous rassembler. Elle s’inscrit dans un mouvement qui a débuté en 2008 et que toutes les majorités ont porté. Le 10 janvier 2007, dans cet hémicycle, Catherine Colonna formait le vœu que vienne le jour où le drapeau européen côtoierait ici même le drapeau français.

    Mme Raquel Garrido

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    Il y est !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Un an plus tard, son vœu était exaucé : le président Accoyer proposait au bureau de l’Assemblée d’installer le drapeau européen dans l’hémicycle. Ce fut accepté et le drapeau n’a plus quitté sa place, il est là, au cœur de notre démocratie. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)
    En 2013, comme le rappelait M. le rapporteur, votre assemblée décidait de rendre obligatoire le drapeau européen au côté du drapeau français au fronton de nos écoles. Cet amendement de la majorité socialiste de l’époque avait reçu un large soutien. En 2019, c’est Éric Ciotti qui avait proposé que le drapeau français et le drapeau européen soient obligatoirement affichés dans chaque salle de classe des établissements scolaires du premier et du second degré, publics ou privés sous contrat. Tous les matins en allant à l’école, nos enfants et leurs parents voient ces deux drapeaux accolés.
    Enfin, le 27 novembre 2017, l’Assemblée a adopté une résolution encourageant le Gouvernement à promouvoir les symboles européens de manière complémentaire avec les symboles nationaux. La proposition de loi qui vous est soumise aujourd’hui concrétise cette résolution.
    Évidemment, le Rassemblement national (« Ah ! » sur les bancs du groupe RN) a toujours combattu ce mouvement.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Les Français vous ont dit non, et c’était il y a dix-huit ans !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    J’ai même entendu dernièrement un député, Jean-Philippe Tanguy – j’espère qu’il est présent sur ces bancs –, affirmer que le drapeau européen ne renvoyait à aucune histoire, à aucun symbole.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Eh oui !

    M. Sylvain Maillard

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    Oh là là !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Vraiment ? Je ne vous ferai pas l’injure de vous rappeler que c’est un 9 mai que l’histoire de l’Union européenne a commencé, avec la Communauté européenne du charbon et de l’acier,…

    M. Laurent Jacobelli

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    Qui n’avait pas de drapeau, reconnaissez-le !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    …dans un discours prononcé à Paris. J’espère que vous vous en rappelez. Ce jour-là, le 9 mai 1950, Robert Schuman déclarait ceci : « L’Europe n’a pas été faite, nous avons eu la guerre. »
    L’Union européenne, c’est l’histoire de la France depuis la fin de la seconde guerre mondiale. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Ah non !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Et la construction européenne qui a lieu depuis est le renforcement cohérent et constant de la souveraineté de la France et du continent.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Ce n’est pas parce que vous répétez des inepties qu’elles deviennent vraies !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Oui, monsieur Tanguy, l’Europe a une histoire.

    M. Jocelyn Dessigny

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    L’Europe, oui, mais pas l’Union européenne !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Une fois de plus, je ne ferai l’injure à personne de rappeler ce que la construction européenne doit à la France. Que diraient Jean Monnet, Robert Schuman, Simone Veil, Jacques Delors et tant d’autres ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Comment est-il possible de nier cela,…

    M. Laurent Jacobelli

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    Et que disent les Français ? Non ! Ils ont dit non !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    …alors même que l’Europe se tient droit et ses États membres unis face à l’agression russe en Ukraine ? La guerre à nos portes – je vous le rappelle, car vous oubliez parfois l’histoire –, les tensions géopolitiques,…

    M. Laurent Jacobelli

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    Et vous croyez qu’un drapeau y changera quoi que ce soit ?

    M. Arnaud Le Gall

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    L’un de vos prédécesseurs, Hubert Védrine, expliquait pourtant que la paix n’avait rien à voir avec l’Europe !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    …la montée des autocraties, les fausses informations sont autant de défis pour la construction européenne qui exigent que nous restions unis.

    M. Roger Chudeau

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    Vous êtes hors sujet !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    C’est pourquoi le Président de la République défend la notion de souveraineté européenne…

    M. Laurent Jacobelli

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    Ça n’existe pas !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    …qui change l’Europe, pour qu’elle soit plus forte et plus protectrice.
    Remettre l’Europe en cause, je vous le dis, c’est faire le jeu de Poutine et de tous les autocrates ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI-NUPES.)

    M. Sylvain Maillard

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    Elle a raison !

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous n’y croyez pas vous-même ! J’espère que vous allez virer l’assistant qui vous a écrit ça !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Mais le Rassemblement national n’est pas seul dans ce rejet de l’Europe. Je le rappelais : le drapeau européen est témoin des débats qui ont lieu dans cet hémicycle depuis 2008. C’est d’ailleurs Jean-Luc Mélenchon…

    M. Antoine Léaument

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    Il nous manque !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    …qui avait fait mine de s’en offusquer lorsqu’il a rejoint l’Assemblée nationale en 2017. C’est Manon Aubry, députée européenne, qui affirme que le drapeau européen « renvoie aussi à une forfaiture démocratique quand on est Français ». Comme l’écrit la sénatrice Mélanie Vogel : « Sérieusement. »
    Le traité de Lisbonne a été signé par la France et ratifié par 560 députés français. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI-NUPES.) Eh oui !

    M. Antoine Léaument

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    Il n’y est pas fait mention du drapeau européen !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Les Français ont dit non !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Alors à ceux qui disent que cette proposition de loi ne servirait à rien, je réponds : au contraire ! Elle vise à sécuriser la présence de ce drapeau face aux velléités de celles et ceux qui le rejettent et qui veulent affaiblir la France.

    M. Emeric Salmon

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    Ce drapeau, c’est vous qui l’avez sali !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Je le répète : il ne s’agit pas de remplacer le drapeau français mais de le renforcer. Comme le disait Lionel Jospin, nous voulons « faire l’Europe sans défaire la France ».
    Le drapeau européen symbolise cette appartenance des citoyens à l’Union européenne – appartenance que nous avons placée au cœur de notre action lors de la présidence française du Conseil européen, l’an dernier. Ce drapeau européen, au cas où vous l’auriez oublié, nous rappelle que chaque citoyen d’un État membre est aussi citoyen européen.

    M. Laurent Jacobelli

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    Pourquoi voulez-vous imposer aux Français tout ce dont ils ne veulent pas ?

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Par leur vote, les citoyens européens peuvent s’exprimer sur le projet européen et la direction qu’il doit prendre – et c’est ce qu’ils feront de nouveau l’an prochain.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Et le référendum de 2005, quel en fut le résultat ?

    M. Laurent Jacobelli

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    L’Europe n’est pas une nation et ne le sera jamais !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Par leur vote, ils détermineront la direction que doit prendre l’Europe.

    M. Laurent Jacobelli

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    Ils vous l’ont déjà dit plusieurs fois mais vous ne les écoutez pas !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Le drapeau européen est identifié dans le monde entier et la France, dans ce projet politique inédit, porte une responsabilité majeure : elle en a été à l’avant-garde. Le Gouvernement donnera naturellement un avis favorable à l’adoption de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem et sur quelques bancs du groupe HOR.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous en avez, du temps à perdre !

    M. Thomas Ménagé

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    Pendant ce temps-là, on ne peut plus remplir son frigo et on crève de faim !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes.

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Parce que l’Europe est un projet politique, elle est porteuse de symboles.

    M. Thomas Ménagé

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    Symbole de la déconnexion macroniste !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Le drapeau bleu aux douze étoiles…

    M. Jean-François Coulomme

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    Pourquoi douze ?

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    …en est un, reconnu par tous les Français comme l’héritage européen de notre pays, membre fondateur de l’Union européenne.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Pour qu’il y ait un héritage, il faut une histoire !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Parmi les Vingt-Sept, il est un symbole de l’unité européenne, de la réconciliation après les millions de morts, les souffrances, les atrocités des conflits qui déchirèrent les peuples européens. En Ukraine, en Moldavie, en Géorgie, il est brandi lors des manifestations et pavoise les bâtiments officiels, jusque dans l’hémicycle de la Rada ukrainienne, à Kiev. Il représente un espoir de paix et de liberté pour des millions de citoyens de ces pays.

    M. Jocelyn Dessigny

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    C’est la fiche de la secrétaire d’État, que vous lisez ?

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    L’Ukraine est attaquée car elle a fait le choix, avec la révolution du Maïdan en 2014, de se tourner vers l’Europe. Elle est attaquée pour ce qu’elle est : un pays libre, démocratique et ouvert, qui regarde vers l’Union européenne et son drapeau. La Géorgie et la Moldavie sont déstabilisées par les Russes pour les mêmes raisons. Ces pays sont des cibles parce qu’ils nous ressemblent, parce qu’ils croient en la démocratie libérale, respectueuse de l’individu, des minorités et des droits fondamentaux. Cette guerre en Ukraine et ces déstabilisations sont au fond des attaques contre les valeurs de l’Europe, contre ce qui fonde notre identité d’Européens. Ce n’est pas pour rien si les Ukrainiens pavoisent ce drapeau dans toutes les rues d’Ukraine.
    Dans ces moments si singuliers, chacun ressent le changement d’époque que nous sommes en train de vivre. Nous savons que notre avenir en commun, que notre capacité à nous, Européens, de défendre notre modèle et nos valeurs, que ce qui fait notre singularité dans ce siècle se décident maintenant.
    Nous soutenons l’Ukraine car l’agression dont elle est victime, en violation de tous les fondements du droit international, est insupportable et que la loi du plus fort ne saurait être consacrée.

    M. Laurent Jacobelli

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    Quel rapport avec le drapeau ?

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Mais nous la soutenons aussi car nous comprenons que si nous ne sommes pas capables de résister à ses côtés, alors nous perdrons tout ce que nous avons construit depuis la fin de la seconde guerre mondiale : la liberté, la paix et la sécurité pour les générations à venir. Poutine ne veut pas seulement rayer l’Ukraine de la carte ; il veut redéfinir à sa manière l’ordre de sécurité en Europe. (M. le rapporteur et M. Sylvain Maillard applaudissent.)
    Ce moment de bascule, les dirigeants européens l’ont parfaitement saisi. Là où Poutine espérait la division, il a trouvé un front uni. Là où il pensait voir l’Europe se disloquer, il la voit se renforcer comme jamais.

    M. Thomas Ménagé

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    Quel rapport avec le pavoisement des mairies ? Vous croyez qu’il mettra fin à la guerre ?

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Plus qu’un drapeau, le drapeau européen est le symbole de cette résistance. Le voilà, mesdames et messieurs du Rassemblement national, le lien avec la proposition de loi !

    M. Jocelyn Dessigny

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    N’auriez-vous pas un petit numéro vert en stock ?

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    La semaine passée, un responsable de l’extrême droite – Mme la secrétaire d’État l’a rappelé à l’instant – ne voyait ni histoire ni symbole dans ce drapeau. Hier encore, un 8 mai, une responsable politique de La France insoumise, députée européenne de surcroît, assimilait dans le même élan europhobe le drapeau européen à une forfaiture démocratique.
    Rappelons-leur que le drapeau européen est le symbole de la paix, de la liberté et de la démocratie pour tous les peuples de notre continent, et qu’il ne remplace aucun drapeau national.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Nous ne sommes pas un État fédéral !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Aucun drapeau français ne sera remplacé par un drapeau européen sur les frontons des mairies, aucun drapeau français ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Toutes celles et ceux qui, faisant preuve de duplicité, s’en prennent avec autant de violence et de véhémence au drapeau européen cachent mal leur cible. Leur cible, c’est la destruction et la déconstruction du projet européen. Voilà ce qu’ils veulent mettre à terre en s’en prenant au drapeau européen !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Vous avez vraiment pris le texte de la secrétaire d’État !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Ce faisant, ils se font les idiots utiles de pouvoirs autoritaires (Exclamations sur les bancs du groupe RN) qui rêvent d’affaiblir l’Europe et ils jouent un jeu dangereux. Dans ce moment si particulier, nous savons que l’Europe est notre meilleure chance et un levier de puissance pour répondre aux grands défis que nous affrontons.

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous croyez qu’on va oublier les retraites ?

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Qu’aurait-on fait sans l’Europe lors du covid ? (Rires, exclamations continues et applaudissements sur les bancs du groupe RN.) C’est grâce à l’Europe que nous avons pu acheter en commun des vaccins ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Jean-Charles Larsonneur applaudit également.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous devriez faire une carrière de comique !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Je vois l’extrême droit protester, mais si nous avions écouté Mme Le Pen, nous aurions des vaccins russes, et si nous avions écouté M. Mélenchon, nous aurions des vaccins chinois ou cubains !

    M. Antoine Léaument

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    Vous n’aimez pas les Cubains !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Qu’aurait-on fait sans l’Europe après la pandémie de covid ? (Brouhaha.) C’est grâce à elle et à son plan de relance, grâce aux 750 milliards d’euros que nous avons empruntés en commun, que nous avons évité les faillites.

    M. Emeric Salmon

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    C’est notre argent ! C’est notre argent !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Voilà la meilleure réponse que nous avons apportée aux Européens, à nos entreprises, à nos artisans, à nos commerçants, à nos très petites, petites et moyennes entreprises. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)
    Dans la majorité, nous continuerons de défendre l’Europe…

    M. Emeric Salmon

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    Contre la France ! Contre les Français !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    …face à ceux qui veulent la défaire – comme vous en montrez encore aujourd’hui le parfait exemple. Elle est notre meilleure chance. Nous avons toujours assumé et défendu une France forte dans une Europe souveraine.

    Mme Raquel Garrido

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    On parle de 10 % de la France !

    M. Antoine Léaument

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    C’est vous qu’il faut vacciner !

    M. Frédéric Boccaletti

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    On n’est pas au Conseil européen, ici, mais à l’Assemblée nationale !

    M. Pieyre-Alexandre Anglade, président de la commission des affaires européennes

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    Mais nous aurons aussi à la faire évoluer. C’est ce que nous défendrons dans les semaines et les mois à venir, et c’est pour cela que nous défendons le drapeau européen sur le fronton de nos mairies ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    Motion de rejet préalable

    Mme la présidente

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    J’ai reçu de Mme Mathilde Panot et des membres du groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale une motion de rejet préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 5, du règlement.
    La parole est à M. Arnaud Le Gall.

    M. Antoine Léaument

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    On va enfin entendre parler d’Europe !

    M. Erwan Balanant

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    Une motion de rejet : ce n’est pas chic !

    M. Ugo Bernalicis

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    Qui a des actions chez les fabricants de drapeau ? (Sourires.)

    M. Sylvain Maillard

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    Il y en a dans le Nord ! C’est chez vous ! (Sourires.)

    M. Arnaud Le Gall

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    Nous examinons aujourd’hui la proposition de loi visant à rendre obligatoire le pavoisement des drapeaux français et européen sur le fronton des mairies. Les drapeaux et l’Europe sont des sujets sérieux, j’y reviendrai, mais en pleine crise sociale et politique, il y avait des enjeux plus urgents à traiter pour nos concitoyens et concitoyennes. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Vous avez voulu, encore une fois, faire diversion. Personne n’est dupe. Un grand quotidien soucieux de la cohésion du bloc néolibéral va jusqu’à citer des collègues des groupes Horizons ou MODEM évoquant, je cite, un sujet complètement en dehors des préoccupations des Français. (« Excellent ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Des collègues du groupe Renaissance se plaignent du fait que, comme souvent, l’objectif n’est pas de légiférer, mais de cliver et de faire parler.

    M. Antoine Léaument

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    Exactement !

    M. Arnaud Le Gall

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    Tout le monde aura compris que ce projet de loi n’a aucune utilité pratique.

    M. Louis Boyard

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    Il a raison !

    M. Arnaud Le Gall

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    D’abord, la grande majorité des mairies de France sont déjà pavoisées sans qu’existe une quelconque obligation de le faire, en dehors de certaines journées symboliques. Je me permets d’ajouter qu’avec l’amendement annoncé par le rapporteur, son texte ne changera rien puisque 90 % des communes seront exclues du périmètre de la loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Pourquoi ne pas laisser leur liberté aux communes ? Les maires, qui pour beaucoup se demandent comment ils vont équilibrer leur prochain budget, dès lors que vous laissez les fournisseurs d’énergie se gaver sur le dos de tout le monde, ont d’autres urgences à traiter.
    Inversement, quitte à rendre obligatoire des symboles d’appartenance à la nation française et à l’Europe, pourquoi ne pas rendre également obligatoire l’inscription de la devise spécifique à la République Liberté, Égalité, Fraternité ?

    M. Antoine Léaument

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    Exactement !

    M. Arnaud Le Gall

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    Vous faites là de bien mauvais défenseurs de la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    II ne s’agit pas pour vous de débattre de la meilleure manière d’articuler appartenance nationale et appartenance européenne. Votre objectif principal est de tenter de camoufler la colère du peuple. Le sujet central de préoccupation des Français et des Françaises, ce sont en effet les deux ans que vous voulez leur voler avec votre réforme des retraites inutile, antidémocratique et inégalitaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Vous me direz peut-être que votre proposition renvoie à l’actualité, car la crise actuelle a aussi un lien avec l’Union européenne telle qu’elle est. En effet, un des objectifs de votre réforme des retraites est de souscrire aux critères austéritaires que Bruxelles impose avec votre plein accord. Si je parle de l’Union européenne « telle qu’elle est », c’est-à-dire fondamentalement néolibérale, c’est parce que jamais nous n’accepterons le débat binaire que vous tentez d’imposer avec vos gros sabots. Il est écrit par avance que vous repeindrez quiconque refusera votre proposition de loi en nationaliste borné ou en frexiteur.
    Non, non et non ! Dès 1957, un fervent partisan de la construction européenne comme Pierre Mendès France pouvait, dans un discours qui n’a pas pris une ride, regretter à cette même tribune que rien ne soit envisagé pour « la généralisation rapide des avantages sociaux à l’intérieur de tous les pays du marché commun » afin d’éviter une concurrence généralisée entre les États membres. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Antoine Léaument

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    Et voilà !

    M. Arnaud Le Gall

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    Il s’inquiétait de même de la quasi-disparition des protections douanières nous exposant à une concurrence déloyale. Enfin, il craignait que la libre circulation des capitaux provoque « une diminution des investissements productifs ». Non seulement notre illustre prédécesseur avait vu juste, mais l’orientation européenne contre laquelle il mettait en garde a été mise en œuvre au-delà de tout ce qu’il pouvait craindre.
    Il n’y a donc pas d’un côté les proeuropéens ouverts et progressistes que vous prétendez incarner et de l’autre les antieuropéens rabougris dont nous serions un énième avatar.

    M. Sylvain Maillard

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    Un peu, quand même.

    M. Arnaud Le Gall

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    Un peu ? Vous allez voir la suite.
    Il y a ceux, dont nous faisons partie, qui militent, avec des propositions maintes fois exprimées, pour une Europe faite de solidarité entre les peuples, d’harmonisation sociale et fiscale, d’orientation des investissements vers une planification industrielle et écologique au service de la transition énergétique et d’indépendance vis-à-vis des puissances comme la Chine, les États-Unis ou la Russie. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Sylvain Maillard

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    Rien à voir avec les drapeaux !

    M. Arnaud Le Gall

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    Et il y a ceux qui, tels les cabris du général de Gaulle, invoquent une Europe mythique pour mieux masquer leur adhésion de fond à l’Union européenne telle qu’elle est : néolibérale, autoritaire, atlantiste. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Vous avez beau parler, dans l’exposé des motifs du texte, de « promesses de paix, de prospérité et de fraternité », le réel vous rattrapera ! S’agissant de la paix, pour être crédibles, vous auriez au moins pu avoir la délicatesse d’interdire le défilé dans Paris, deux jours avant la célébration de la victoire sur le Troisième Reich, de manifestants néonazis affirmant leur nostalgie du nouvel ordre européen nazi. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Raquel Garrido

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    Exactement !

    M. Sylvain Maillard

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    Nous vivons dans une société de droit ! Nous le regrettons aussi, mais c’est la décision d’un juge !

    M. Arnaud Le Gall

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    C’est ballot, mais nous ne vous avons pas entendu sur le sujet.
    Il n’y a par ailleurs pas de paix durable possible sans prospérité et fraternité. Concrètement, et sans revenir sur l’ensemble des politiques catastrophiques des dernières décennies, qu’a fait l’Union pour les faire avancer pendant et depuis la pandémie de covid-19 ? Elle a d’abord mis en place un prétendu plan de relance, qui n’en était pas un.

    Mme Caroline Abadie

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    Prétendu ?

    M. Arnaud Le Gall

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    Lisez les gens qui s’y connaissent.
    Pour nourrir l’image de grand sauveur de l’Europe qu’il essaie de vendre depuis 2017, et s’octroyer la paternité de ce plan, Emmanuel Macron a cédé et a avalé sans discuter les critères de compatibilité avec l’ordolibéralisme allemand. Ce plan de 750 milliards était très inférieur aux pertes subies au sein de l’Union pendant la crise alors qu’un pays comme les États-Unis alignait des milliers de milliards. Il ne comportait ni conditionnalité écologique et sociale ni investissement pour gagner en indépendance énergétique avant que l’on soit mis au pied du mur. Il ne créait aucune ressource propre supplémentaire, en raison du refus de taxer les très hauts profits des entreprises ou les transactions financières. Sa seule règle claire était le retour annoncé à l’austérité une fois passée la pandémie.

    M. Laurent Croizier

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    On connaît désormais votre position sur l’Europe !

    M. Arnaud Le Gall

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    Depuis 2022, alors que la reprise économique est plus que timide, que la guerre sévit aux portes du continent et que nous faisons face à une inflation née des profits éhontés de profiteurs de guerre et de crise, la Banque centrale européenne (BCE) augmente les taux d’intérêt, sous prétexte de lutter contre l’inflation. Ce choix, qui risque de créer une crise économique majeure, ne répond en rien à la nature d’une inflation provoquée par une boucle pénurie-profits. Cette politique monétaire ne sert qu’à préserver les revenus du capital et l’épargne accumulée par les plus aisés, aux dépens des travailleurs qui voient chaque mois leurs revenus rognés par l’inflation. Il ne s’agit pas pour la BCE de lutter contre l’inflation, mais de la faire payer aux plus modestes.
    Enfin, fin avril, la Commission annonçait, sans que vous n’y trouviez à redire, le retour d’un pacte budgétaire dont la règle des 3 %, qui n’a aucune forme de pertinence économique, a été en son temps adoptée sur un coin de table. On connaît la suite, déjà annoncée : sous le prétexte de respecter ces règles vous allez détruire encore un peu plus les services publics de santé, d’éducation, de transports ; vous allez continuer à privatiser ce qui est encore privatisable ; vous allez encore rogner un système de protection sociale qui fait pourtant notre force et vous ne programmerez pas les investissements publics nécessaires à la transition écologique, entre autres. Si on ne l’arrête pas, le tour de vis sera sans fin, puisque cette même politique affaiblit l’économie, donc les rentrées fiscales, ce qui vous sert ensuite à justifier toujours plus d’austérité.

    M. Antoine Léaument

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    Exactement !

    M. Arnaud Le Gall

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    Nos compatriotes ne supportent plus cela. Vous le savez, c’est pourquoi vous préférez des propositions métaphysiques sur les symboles aux débats concrets sur la politique européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Antoine Léaument

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    Nous y voilà !

    M. Arnaud Le Gall

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    Cela étant posé, vous me direz que les désaccords que nous pouvons avoir avec le gouvernement de la République française ne nous amènent pas à questionner le drapeau tricolore. C’est qu’il y a une différence fondamentale, chers collègues. Dans le cas de l’Union, le néolibéralisme n’est pas un choix conjoncturel de telle ou telle majorité : le dogmatisme ayant été poussé à l’extrême, ce choix politique est gravé dans le marbre des traités européens. Ces traités sont en théorie indéboulonnables puisque, comme l’avait dit l’ancien président de la Commission Jean-Claude Juncker, il ne peut pas y avoir de choix démocratique contre les traités européens. De fait, quiconque propose de ne pas mentir aux Français, donc de leur dire que pour bâtir une Europe sociale il faut impérativement désobéir aux traités, est aussitôt classé comme antieuropéen dans votre vision binaire du monde.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Voire complotiste !

    M. Arnaud Le Gall

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    Voire comme complotiste, en effet. Pire, les traités en vigueur sont issus d’un piétinement de la souveraineté populaire. Pour ne s’en tenir qu’au cas de la France, en 2005 le peuple français a rejeté par référendum le traité constitutionnel européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Mais il lui a été imposé deux ans plus tard, avec un nouveau nom et dans une version à peine modifiée.

    Mme Mathilde Panot

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    La honte !

    M. Arnaud Le Gall

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    À vous observer, je comprends que vous ayez d’autres préoccupations que d’essayer de soigner une fracture démocratique née il y a dix-huit ans et qui n’a cessé de s’aggraver depuis, mais l’ignorer est délétère. Si vous voulez réconcilier le peuple français avec l’Europe, il faudra d’autres mesures que d’imposer sur les mairies un symbole d’appartenance à une organisation sur la politique de laquelle il n’a pas son mot à dire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Quant à l’existence d’un peuple européen, encore faudrait-il s’entendre sur sa définition. Pour nous, dès lors qu’il s’agit de décider de la chose commune, le peuple se définit avant tout comme le souverain. Il est un acteur collectif dont les membres sont reliés entre eux par l’exercice de leur souveraineté, par des mécanismes de solidarité, et, dans une certaine mesure, par des histoires partagées.
    Pour la souveraineté populaire, c’est déjà réglé : dans l’Union actuelle, elle est étroitement limitée.

    M. Antoine Léaument

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    Et ils se disent démocrates !

    M. Arnaud Le Gall

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    La solidarité n’existe pas au quotidien car votre Europe n’a cessé de mettre en compétition les travailleurs entre eux. Quant à l’histoire commune, elle existe, inséparable des histoires nationales et de l’histoire mondiale. Encore faudrait-il ne pas la fantasmer ni la réduire à des mythes. En tout état de cause, à elle seule, elle ne peut suffire à faire un peuple.
    Quand on n’a aucun projet fondé sur la souveraineté populaire à proposer, ce qui reste, en dernier ressort, est l’identité, une identité que vous pensez pouvoir faire tenir sur un seul drapeau, une identité rabougrie et évanescente, réduite à des valeurs communes mobilisées au gré des circonstances et que vous n’avez de cesse de bafouer vous-mêmes. Dans ce contexte, que peut faire un drapeau, si ce n’est masquer le désastre annoncé ?
    Reste, paraît-il, l’« autonomie stratégique » chère au président Macron, autrement dit la souveraineté sans les peuples. Cependant, voilà encore un objectif inatteignable dans le cadre des traités actuels. À supposer qu’on puisse surmonter les antagonismes qui dictent les politiques extérieures des États membres, comment voulez-vous bâtir une autonomie stratégique sans politique industrielle dans les domaines de pointe ?
    Ce manque, qui découle encore une fois des dogmes qui corsètent l’Union, aboutit à des aberrations. Comment oser parler de souveraineté européenne lorsque la Banque centrale choisit Amazon pour la phase test des moyens de paiement de l’euro numérique ? Une décision scandaleuse selon l’ancien directeur de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi), que j’avais interrogé à ce sujet en commission. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Comment faire croire en la possibilité d’une Europe de la défense autonome quand l’inscription dans le cadre de l’Otan est gravée dans le marbre des traités ? Vous pouvez considérer, selon nous à tort, qu’on ne peut pas se défendre sans l’Otan, mais alors soyez cohérent et dites ce qu’il en coûte. Il est en effet mensonger de prétendre que l’autonomie est possible dans ce cadre : toute l’histoire depuis la seconde guerre mondiale le démontre. L’indépendance de l’Europe vis-à-vis de la Chine, de la Russie et des États-Unis suppose au moins une politique industrielle et énergétique ambitieuse, pilotée par la puissance publique. Elle implique d’en finir avec la concurrence de tous contre tous au sein de l’Union européenne elle-même. Elle ne saurait advenir sans l’institution de mesures réelles de protectionnisme écologique et social à l’échelle de l’Union. Ces objectifs sont rigoureusement incompatibles avec les traités actuels.
    Acceptez de débattre d’une révision sérieuse de ces traités et de la manière dont la France peut y contribuer. Nous accepterons alors de prendre au sérieux vos propositions. En attendant, c’est non !

    M. Erwan Balanant

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    Vous dites non à quoi ?

    M. Arnaud Le Gall

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    Nous proposons avec cette motion de rejet de gagner un temps précieux. (Les députés du groupe LFI-NUPES se lèvent et applaudissent. – M. Jean-Paul Lecoq et M. Frédéric Maillot applaudissent également.)

    M. Laurent Croizier

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    À quand une liste commune avec le Rassemblement national ?

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État.

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    L’Union européenne serait, selon vous, une organisation dans laquelle le peuple n’a pas son mot à dire. Allez donc le dire au plus de 700 députés européens élus, dont le mandat sera renouvelé en 2024.

    M. Frédéric Mathieu

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    Le Parlement est l’institution européenne qui a le moins de pouvoir !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    En parlant de l’Europe, vous avez énuméré pratiquement tous les mots de votre novlangue : néolibéral, atlantiste, autoritaire, ordolibéral… C’est le bréviaire de l’antieuropéaniste ! Quel remaniement… (« Bravo, quel lapsus ! » sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Quel reniement de ce que la France, grande nation européenne, a pu bâtir pour garantir la paix et la prospérité sur notre continent !
    Si vous voulez bien m’écouter, comme j’ai eu la politesse de le faire, je vous mets en garde sur ce que représentent les positions des deux extrêmes de cet hémicycle : un danger pour la France, un danger pour le projet européen, un danger pour l’avenir de nos enfants.

    Mme Clémence Guetté

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    Répondez sur le fond !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Il est beaucoup plus facile de proclamer le Grand Soir que de travailler avec assiduité et sans relâche comme le Président de la République le fait depuis 2017 pour transformer l’Europe afin de la rendre plus efficace, plus démocratique, plus unie et plus à même de peser de toute son influence pour protéger les Européens et les Français. (M. Mathieu Lefèvre, rapporteur, et Mme Caroline Abadie applaudissent.)
    Vous avez parlé du quotidien. Parlons donc de l’Europe de la santé. Face à la pandémie, l’Europe unie a su prendre rapidement des mesures fortes pour protéger les plus fragiles. Parlons également de l’Europe économique : face à la crise économique, M. le rapporteur l’a rappelé, nous avons mobilisé un plan de relance à l’échelle européenne, pour la première fois dans l’histoire de l’Europe. Son envergure inédite a permis d’accompagner les entreprises, les commerces de proximité et l’ensemble de nos concitoyens. Parlons aussi de l’Europe de la défense…

    M. Frédéric Mathieu

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    Ça fait cinquante ans qu’on en parle !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Face à la guerre aux portes de l’Union européenne, nous avons apporté une réponse humanitaire, militaire et financière dans des temps records et posé les fondations de l’Europe de la défense. Parlons enfin de l’Europe écologique : face à la crise climatique, c’est l’Europe qui affiche aujourd’hui la plus grande ambition de toutes les régions du monde.
    Au quotidien, les politiques européennes permettent à l’ensemble de nos concitoyens de mieux vivre. La PAC – politique agricole commune – permet de distribuer tous les ans près de 60 milliards d’euros aux États membres, et l’Europe garantit un salaire minimum aux travailleurs européens, depuis la présidence française du Conseil. De même, l’Europe encadre les pratiques des plateformes, protège les données personnelles, lutte contre la déforestation, facilite la mobilité étudiante et celle des apprentis – c’est l’objet d’un autre texte dont vous débattrez ce soir. Vous parlez, nous faisons.
    Voilà ce que vous promettez de détricoter, de déconstruire, d’abolir en surjouant les effarouchés quand nous vous proposons d’afficher un drapeau européen.
    Le président Giscard d’Estaing déclarait que l’Europe « est une grande réussite et c’est ce qui irrite » ; cela se vérifie ce soir. Vous en êtes arrivés à un tel degré de détestation que vous souhaitez le rejet préalable du texte, sans débat, alors que nous sommes ici pour débattre. (« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Rires et exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Sylvain Maillard

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    Vous n’aimez pas le débat !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Après n’avoir cessé de recourir au 49.3 !

    Mme Laurence Boone, secrétaire d’État

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    Le débat vous fait-il peur ? Pour utiliser à nouveau le mot de la sénatrice écologiste Mélanie Vogel sur l’intervention de Manon Aubry : « sérieusement » ? Mon avis est défavorable sur cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Le dépôt d’une motion de rejet préalable sur cette proposition de loi montre que la mesure n’est pas aussi anecdotique que d’aucuns voulaient le faire croire.

    M. Alexis Corbière

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    En tout cas, c’est une manœuvre !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Surtout, par-delà cette motion de rejet, où est votre motion de projet, mes chers collègues ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Dem. – « Zéro ! » et exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    En vérité, votre projet alternatif est de repli nationaliste, exactement comme celui de nos collègues de l’extrême droite. (M. Louis Boyard proteste.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Quelle déconnexion !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Monsieur Le Gall, vous prétendez que cette proposition de loi ne vise qu’à « faire parler ».

    Mme Ségolène Amiot

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    Eh oui ! Au moins, nous, nous avons un vrai projet ! Vous ne proposez que symboles et coquilles vides !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Madame, souffrez que nous parlions de l’Europe calmement.

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, chers collègues.

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Il est impossible de s’exprimer, c’est dommage. Monsieur Le Gall, vous prétendez que les citoyens européens n’ont pas voix au chapitre. Quelle insulte pour le président Giscard d’Estaing (« Oh là là ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES) et pour tous les parlementaires européens ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.) Quelle conception avez-vous de la citoyenneté européenne ? Où est passé le Jean-Luc Mélenchon qui votait en faveur du traité de Maastricht, lequel a institué cette citoyenneté européenne ? Chers collègues, vous vous perdez !

    M. Emeric Salmon

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    Vous, vous insultez les Français !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    Surtout, monsieur Le Gall, il est intéressant que vous nous reprochiez de vouloir parler d’Europe. Je comprends que pour votre part, vous n’en ayez aucune envie, car vous avez de plus en plus de mal à défendre votre projet d’un Frexit masqué et à le faire comprendre aux Français. Alors qu’il y a dix ans, comme Mme Le Pen, vous étiez favorables à une sortie de l’Union européenne,…

    M. Manuel Bompard

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    N’importe quoi !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    …vous êtes désormais favorables à une sortie des traités,…

    M. Frédéric Mathieu

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    Parce qu’ils ne sont pas démocratiques !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    …que vous ne parviendrez jamais à mener à bien. Si vous remportez l’élection présidentielle, croyez-vous que nos partenaires européens suivront vos projets simplement parce que vous le demandez ? Personne d’autre n’a une telle conception des règles européennes de l’unanimité et de la solidarité entre les nations ! La vraie forfaiture démocratique, c’est la vôtre,…

    M. Frédéric Mathieu

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    C’est vous qui n’êtes pas démocrates !

    M. Laurent Croizier

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    Monsieur Mathieu, ne parlez pas de démocratie, vous ne savez pas ce que c’est !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    …c’est votre mensonge aux Français sur votre projet pour l’Union européenne et pour eux.

    Mme Sandrine Rousseau

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    N’importe quoi !

    M. Mathieu Lefèvre, rapporteur

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    En conséquence, il faut évidemment rejeter cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    Sur la motion de rejet préalable, je suis saisie par les groupes Renaissance, Rassemblement national et La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Nous en venons aux explications de vote – dans le calme, s’il vous plaît, chers collègues.
    La parole est à M. Philippe Pradal.

    M. Philippe Pradal (HOR)

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    « La paix mondiale ne saurait être sauvegardée sans des efforts créateurs à la mesure des dangers qui la menacent. » Rappelons que c’est par ces mots que s’ouvre la déclaration de Robert Schuman du 9 mai 1950. Le dépôt d’une motion de rejet préalable est prévu dans deux cas : lorsqu’un texte est inconstitutionnel – ce n’est pas le cas de celui-ci et cette question n’a d’ailleurs pas été évoquée – ou lorsqu’il n’y a pas lieu d’en délibérer. En l’occurrence, les membres du groupe Horizons et apparentés pensent le contraire.

    M. Thomas Ménagé

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    Non, il n’y a pas lieu de délibérer !

    M. Philippe Pradal

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    Nous voulons examiner ce texte et les amendements déposés par les députés des différents groupes, parce que nous voulons parler d’Europe. Nous voterons donc résolument contre cette motion. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Rémy Rebeyrotte. (Brouhaha sur les bancs des groupes RN, LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
    S’il vous plaît, chers collègues !

    M. Rémy Rebeyrotte (RE)

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    Naturellement, le groupe Renaissance votera contre cette motion, parce que, comme l’orateur précédent, nous aussi voulons un débat sur la place du drapeau national, du drapeau européen, de l’attachement aux valeurs de la France et de l’Europe.

    M. Jocelyn Dessigny

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    De quelle Europe parle M. Rebeyrotte ?

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Celle-ci est composée de nations démocratiques, éprises de liberté, de dialogue, de respect des droits de l’homme.

    Mme Danièle Obono

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    Votre Europe est surtout illibérale !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Nous remercions déjà tous ceux qui souhaiteront, comme nous, que le débat ait lieu ce soir sur l’Europe. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy.

    M. Jean-Philippe Tanguy (RN)

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    Évidemment, nous voterons pour cette motion de rejet préalable…

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Comme vos amis de l’extrême gauche !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    …et contre la tenue d’un débat, car celui-ci n’a pas lieu d’être. Les Français l’ont déjà clos en disant « non ».
    Vous êtes ici par la seule volonté du peuple et vous n’avez jamais reçu mandat de défaire ce que le peuple a fait. Ce que le peuple français a fait par référendum, seul le peuple peut le défaire par référendum. Vous n’avez jamais eu ce pouvoir et vous ne l’aurez jamais. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Nicolas Dupont-Aignan applaudit également.)
    Vous ne faites jamais rien au hasard. Si, malgré le vote des Français, contre leur volonté, vous avez imposé ce drapeau dans nos rues et nos mairies, sur les façades des ministères, dans cet hémicycle, derrière le Président de la République dans son bureau, c’est parce que vous méprisez le peuple français. (Exclamations continues sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.) À chaque fois que vous apparaissez devant ce drapeau, vous affirmez votre mépris.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Jean-Marie Le Pen, sors de ce corps !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Attention, monsieur Rebeyrotte, à ce que vous allez dire !

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, chers collègues !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Quel respect la Macronie a-t-elle encore pour le peuple français, pour lui imposer ainsi ce qu’il a refusé ? (« Calmez-vous ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.)
    Que vous le vouliez ou non, les Français ne partagent pas et ne partageront jamais votre rêve d’étouffer les nations. Ils ne s’inclinent que devant trois couleurs pour leurs morts, dans leurs écoles, pendant les cérémonies : le bleu, le blanc et le rouge. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Le drapeau bleu aux douze étoiles que vous défendez ne renvoie à aucun symbole ; vous-même ne connaissez pas son origine. Vous justifiez le passé par le présent. Depuis quand justifie-t-on un drapeau qui n’est pas enraciné dans le passé par son existence présente ? (M. Philippe Vigier proteste.)
    Au contraire, le blanc de notre drapeau renvoie à mille ans de l’histoire éternelle de la France, au manteau des églises, à l’étincelante lumière de la Révolution. Quant au rouge et au bleu, ils symbolisent l’union du peuple de Paris dans la grande Révolution, et, à travers le temps et l’espace, le peuple de France. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Raquel Garrido.

    Mme Aurore Bergé

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    La belle alliance des Insoumis et du RN !

    Mme Raquel Garrido (LFI-NUPES)

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    Il faut rejeter cette proposition de loi. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.) Ayez l’humilité de comprendre que notre rôle, à l’Assemblée nationale, n’est pas de contredire l’expression démocratique des Français. S’il est rare que nous soyons saisis…

    Mme Laurence Robert-Dehault

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    De quel « nous » parlez-vous ? Il n’y a personne, sur les bancs du groupe LFI-NUPES !

    Mme Raquel Garrido

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    …de sujets sur lesquels les Français ont eu la possibilité de s’exprimer par référendum ; c’est le cas aujourd’hui.
    Vous le savez très bien, en 2005, le projet de traité constitutionnel européen, qui comprenait un article sur les symboles, a été rejeté par la majorité des Français – 55 % d’entre eux – après un débat approfondi.

    M. Laurent Croizier

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    Partez vite en campagne avec les écolos pour les européennes !

    Mme Raquel Garrido

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    Il faut écouter ce choix. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Un député du groupe RE

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    Ce référendum date d’il y a presque vingt ans !

    M. Pierre Cordier

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    Hors sujet !

    Mme Raquel Garrido

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    Dans l’exposé des motifs de la proposition de loi, vous rappelez vous-même l’absence de règles relatives au pavoisement. Vous êtes vous demandé pourquoi il n’avait pas été jugé nécessaire d’imposer le drapeau aux Français ? C’est parce que, dans une société démocratique, ils doivent y adhérer naturellement, par coutume, par consentement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    L’esprit républicain impose de le comprendre : si la Constitution dispose simplement que le drapeau national est bleu, blanc, rouge, que la devise de la République est Liberté, Égalité, Fraternité, que son principe est le « gouvernement du peuple, par le peuple et pour le peuple », l’emploi de ces symboles n’est en rien obligatoire. Les Français y adhérent d’eux-mêmes, ils les reprennent, les protègent même, dans leurs manifestations et leurs autres expressions. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Si vous étiez réellement démocrates et européens, vous n’imposeriez pas l’Europe par la discipline, mais chercheriez la libre adhésion des consciences. C’est cela qui compte ! Vous prétendez que l’Europe, c’est la démocratie. Eh bien, soyez démocrates jusqu’au bout des ongles comme nous le sommes en France et rejetez cette proposition de loi, qui est inutile et agressive ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Frédéric Mathieu se lève pour applaudir.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Gosselin.

    M. Philippe Gosselin (LR)

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    Les couleurs de la République, reconnues par la Convention le 15 février 1794,…

    M. Antoine Léaument

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    Vive la Révolution !

    M. Philippe Gosselin

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    …devraient nous unir, mais, aujourd’hui, parce que la majorité a voulu y adjoindre d’autres éléments, elles nous divisent, dans un débat électrique. Celui-ci semblera d’autant plus pitoyable – oui, pitoyable – à nos concitoyens (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES) que notre drapeau est honorable. Il enveloppe ceux qui sont morts pour la République et sert à rendre hommage aux soldats morts pour la France, dont il recouvre le cercueil.
    Le drapeau européen peut peut-être trouver sa place dans le débat, mais pas sous la forme proposée.

    M. Antoine Léaument

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    Exactement !

    M. Philippe Gosselin

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    Vous dévoyez malheureusement un débat important. Nous nous étripons sur les drapeaux. Pour autant – j’y reviendrai tout à l’heure dans la discussion générale –, nous pourrions peut-être nous accorder.

    Mme Annaïg Le Meur

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    Il y aura donc une discussion générale !

    M. Philippe Gosselin

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    En tout cas, il n’est pas question à ce stade de diviser davantage et le débat doit se poursuivre ; les uns et les autres doivent pouvoir avancer leurs arguments. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Nous espérons qu’à la fin de ce débat, qui paraîtra bien illégitime et long, nous pourrons nous retrouver.

    M. Thomas Ménagé

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    Nous allons surtout perdre du temps !

    M. Philippe Gosselin

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    Les membres du groupe Les Républicains parient que nous nous retrouverons derrière le drapeau de la République et autour de sa devise, Liberté, Égalité, Fraternité.

    Mme la présidente

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    Merci, cher collègue.

    M. Philippe Gosselin

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    Je vous appelle donc au consensus autour des valeurs républicaines et des valeurs… (Mmes Émilie Bonnivard et Annie Genevard applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Erwan Balanant.

    M. Erwan Balanant (Dem)

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    Le début de ce débat – qui doit évidemment avoir lieu, selon nous – oppose les proeuropéens, heureux de la construction européenne, aux autres. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe GDR-NUPES.)

    M. Vincent Descoeur

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    Quelle suffisance !

    M. Philippe Gosselin

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    C’est une caricature !

    M. Erwan Balanant

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    Parmi ces autres, il y a, d’un côté, les membres du groupe Rassemblement national, dont la diatribe de M. Tanguy montre la haine viscérale de la construction européenne, et, au fond, de la paix elle-même (Applaudissements sur les bancs du groupe RE ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem), car, rappelons-le, l’Europe c’est la paix ; de l’autre, M. Le Gall et les membres de son groupe. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Monsieur Le Gall, je n’ai pas bien compris votre position, preuve que nous devons débattre.

    M. Manuel Bompard

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    Il fallait écouter !

    M. Erwan Balanant

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    Pour des raisons idéologiques, vous vous opposez au modèle politique européen actuel, mais le drapeau européen symbolise-t-il celui-ci ?

    M. Alexis Corbière et M. Antoine Léaument

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    Oui !

    M. Erwan Balanant

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    Non ! Vous, les Insoumis, êtes à côté de la plaque. Vous vous opposez au drapeau européen parce que vous vous opposez à la construction européenne. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem.)
    Si vous aimiez la construction européenne, vous aimeriez ce drapeau. De la même manière, on peut être en désaccord avec le président Macron et aimer le drapeau français. (Mêmes mouvements.) Nous avons besoin d’aller au bout de ce débat pour que les masques tombent ce soir. (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix la motion de rejet préalable.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        299
            Nombre de suffrages exprimés                282
            Majorité absolue                        142
                    Pour l’adoption                121
                    Contre                161

    (La motion de rejet préalable n’est pas adoptée.)
    (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Pradal.
    Je remercie ceux qui quittent l’hémicycle de sortir rapidement.

    M. Antoine Léaument

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    Vous partez, l’Europe ne vous intéresse pas ?

    M. Philippe Pradal

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    Le drapeau tricolore est un symbole de la République française, comme l’a dit Lamartine : « La France et le drapeau tricolore, c’est une même pensée, un même prestige, une même terreur, au besoin, pour nos ennemis. »
    Il symbolise l’unité de notre nation ; à ses côtés, le drapeau de l’Union européenne, fort de ses douze étoiles dorées sur fond bleu, rappelle l’unité, la solidarité et l’harmonie entre les peuples européens. L’importance des symboles, justement, a nourri nos débats en commission des lois la semaine dernière et la date d’aujourd’hui, Journée de l’Europe, est également symbolique et donc bien trouvée pour l’examen de ce texte. Au-delà du drapeau – l’objet –, le sujet de cette journée est bien l’avènement sur notre continent de la paix, qu’il nous faut plus que jamais défendre. Le groupe Horizons et apparentés soutiendra donc cette proposition de loi. (M. Thomas Rudigoz applaudit.)
    En effet, nous sommes profondément convaincus que les symboles nationaux permettent de renforcer l’unité de la nation en construisant une mémoire et une histoire communes. Marianne et le drapeau tricolore sont intrinsèquement liés à la Révolution et accompagnent l’émergence de la nation républicaine. Ils incarnent notre histoire et forment la base de notre culture commune. Il nous paraît pertinent de prévoir le pavoisement des 34 955 mairies françaises : c’est le symbole de la présence de l’État dans les territoires, et de notre attachement à une histoire partagée.
    Ensuite, nous sommes profondément attachés à la construction européenne. Les douze étoiles du drapeau, qui représentent le mouvement dans la stabilité, sont terriblement d’actualité. L’unité des peuples européens est chaque jour plus déterminante à l’heure où la guerre est à nos portes. Le drapeau européen symbolise une Europe souveraine, unie et démocratique, que nous devons nous atteler à protéger, à développer et à chérir, car c’est l’arme la plus puissante dont nous disposons face aux défis de demain.
    Nous nous étonnons donc de certains amendements qui, tout en souhaitant l’installation du drapeau français sur les préfectures, commissariats, casernes et autres bâtiments publics, visent à exclure le drapeau européen.
    Dans cet hémicycle, les débats sont vifs sur la position à adopter par rapport au projet européen, voire au sujet de l’existence même de l’Europe et de son drapeau. Sans entrer dans les querelles internes, je tiens à souligner que si la démocratie n’est dans cet hémicycle la propriété de personne, il nous appartient à tous de protéger nos biens communs les plus précieux : la liberté et la paix.
    Finalement, la force du symbole est de se passer de mots : ce double pavoisement reflète notre fidélité à notre histoire et notre volonté d’un avenir commun. « Oui, c’est l’Europe, depuis l’Atlantique jusqu’à l’Oural, c’est l’Europe, c’est toute l’Europe, qui décidera du destin du monde ! » a dit le général de Gaulle. Nombre de nos compatriotes ont dû se battre pour défendre les valeurs incarnées par le drapeau tricolore, et celui de l’Europe incarne la paix, que le génie des peuples européens a su construire sans reniement.
    Nous appelons toutefois l’attention du Gouvernement sur le coût important que peuvent représenter l’achat et l’installation de ces drapeaux pour les communes, notamment les plus petites. Contraints par les règles de recevabilité des amendements, nous ne pouvons que demander un rapport – c’est l’objet de l’unique amendement de notre groupe –, mais insistons en faveur d’un financement par l’État de ce dispositif. Le groupe Horizons et apparentés votera cette proposition de loi. Il espère que le Gouvernement donnera les moyens aux maires de répondre à cet appel républicain. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR, RE et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jérémie Iordanoff.

    M. Jérémie Iordanoff

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    Le décor majestueux et désuet de la Ve République accueille ces jours-ci un théâtre bien curieux. On y trouve un président sans peuple ; on y observe un gouvernement sans projet ; les quelques badauds qui s’attardent peuvent même apercevoir une majorité sans majorité. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Antoine Léaument

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    Bien envoyé !

    M. Jérémie Iordanoff

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    On y voit une troupe de députés subordonnés, inaptes à faire tomber un exécutif qui ne rend pourtant plus compte à personne. C’est dans ce paysage en déliquescence que le groupe Renaissance a eu l’ingénieuse idée de nous faire parlementer sur les drapeaux. Faut-il en rire ou en pleurer ? Nul ne le sait. À l’extérieur, le monde tourne.
    Alors, pour vous distraire de cette tragicomédie franco-française dont, il faut bien le reconnaître, nous sommes tous un peu las, laissez-moi planter le décor de l’Europe que nous voulons, nous, écologistes.
    Nous voulons une Europe qui mette en place une économie sobre, adaptée aux ressources de notre continent, aux limites planétaires, et qui mette un terme à l’effondrement de la biodiversité. Nous voulons une Europe solide et volontaire, pour défendre l’État de droit et les libertés fondamentales face aux réactionnaires, aux illibéraux, aux xénophobes qui nous menacent de l’extérieur comme de l’intérieur.
    Nous voulons une Europe humaniste et accueillante, qui garantisse la dignité des personnes. Nous voulons une Europe qui prévienne et répare les injustices sociales, qui redistribue les richesses. Nous voulons une intégration fiscale pour éviter les logiques de dumping entre les États membres. Nous voulons une Europe qui mette fin aux paradis fiscaux.
    Nous voulons une Europe qui accompagne nos paysans vers une agriculture qui protège notre environnement et qui assure notre souveraineté alimentaire. Nous voulons une Europe qui relocalise ses industries et qui assure notre indépendance énergétique. C’est une question de souveraineté mais c’est aussi une question de responsabilité : externaliser les coûts sociaux et environnementaux n’est pas une solution.
    Nous voulons une défense européenne afin de faire face aux mutations profondes de l’ordre géopolitique mondial. Nous voulons une diplomatie européenne puissante pour promouvoir notre culture et nos valeurs, pour assurer la paix et la stabilité dans le monde. Enfin, nous voulons une Europe populaire, une Europe politique et démocratique. Nous voulons une Europe fédérale.
    Alors c’est vrai, nous n’avons pas l’Europe que nous voulons – du moins celle-ci n’est-elle pas achevée. Mais nous avons déjà l’Union européenne ; c’est beaucoup et les choses avancent. Nous n’avons pas l’Europe que nous voulons, mais nous n’avons pas non plus la France que nous voulons. Pourtant, nous aimons la France et nous aimons l’Europe.
    Il faut des actes pour le dire – surtout des actes. Faut-il aussi des drapeaux ? Qu’est-ce qu’un drapeau ? C’est un signe d’attachement, de ralliement : accrocher sur le fronton de nos mairies les bannières française et européenne, c’est reconnaître que l’Histoire nous lie intimement ; c’est prendre conscience et affirmer que nos valeurs sont communes ; c’est clamer haut et clair que nous partageons le même avenir. Pavoiser nos mairies aux couleurs de la France et à celles de l’Europe, c’est proclamer que nous sommes citoyens français ; c’est proclamer que nous sommes citoyens européens.
    Si légiférer sur les drapeaux ne suffit en aucune manière à asseoir une politique forte et ambitieuse, ni pour la France ni pour l’Europe, les écologistes exprimeront par leur vote leur indéfectible attachement à la construction européenne. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur quelques bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Davy Rimane.

    M. Davy Rimane

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    En commission, le groupe GDR a été clair : il ne s’agit en aucun cas de rejeter l’héritage révolutionnaire de la France, ou de remettre en cause le projet européen, mais l’intérêt de cette proposition de loi nous paraît bien nébuleux et son existence est, en elle-même, un aveu d’incohérence de la part de la majorité présidentielle.
    D’un côté, le Président de la République affirme honnir l’empilement législatif et est allé jusqu’à estimer, il y a quelques semaines, que nous passions trop souvent par la loi. De l’autre, la majorité présidentielle, cherchant à apparaître plus europhile que Jean Monnet, propose un texte qui, non seulement, veut contraindre les maires à respecter une pratique déjà en cours chez une grande majorité d’entre eux, mais qui, en outre, leur coûterait cher dans un contexte de finances locales déjà tendues.
    Dans une réponse à une question écrite en 2019, M. Castaner, alors ministre de l’intérieur, avait lui-même considéré que « le principe de libre administration des collectivités leur garantit de pouvoir librement organiser le pavoisement des édifices leur appartenant », ajoutant : « Ce dispositif équilibré confère au pavoisement une valeur commémorative et honorifique qu’il convient de préserver, en ne le banalisant pas. »
    Quatre ans plus tard, retournement de veste : rendre obligatoire le pavoisement des édifices publics ne reviendrait plus à en banaliser l’aspect commémoratif et honorifique mais, finalement, il s’agirait d’homogénéiser la pratique sur le territoire national.
    Avant de se pâmer d’admiration devant le drapeau européen, et de l’afficher à toutes les sauces sur nos bâtiments publics, commençons peut-être par respecter les règles communautaires plutôt que d’en multiplier les violations et d’enchaîner les condamnations par les instances européennes.
    En outre, si l’euroscepticisme et la défiance progressent et gagnent en puissance au sein de la population, c’est avant tout la conséquence de mesures imposées par voie parlementaire à une population qui n’a, justement, rien demandé. La contrainte n’a jamais été rassembleuse, et imposer ce double pavoisement permanent contreviendrait au but premier de l’acte de pavoiser, soit manifester de manière démonstrative et symbolique une joie, une fierté, un honneur.
    Pour conclure, j’ai noté avec surprise que, pour une fois, l’exposé des motifs mentionne expressément les collectivités à statut particulier, ce qui est certainement une manière détournée, mais tout de même indélicate, de manifester une opposition aux velléités autonomistes – voire indépendantistes – d’une majorité des territoires dits d’outre-mer, illustrées par le résultat des récentes élections en Polynésie. (M. Jean-Victor Castor et M. Antoine Léaument applaudissent.)
    À l’instar du drapeau tricolore et du drapeau européen, que vous voulez réglementer, le pavoisement aux couleurs des drapeaux régionaux ne fait pas l’objet d’une législation spécifique – l’État français ne reconnaît pas officiellement cette pratique, mais ne l’interdit pas non plus. J’en profite donc pour vous proposer d’aller plus loin dans votre volonté affichée de pallier un vide juridique : actez la possibilité pour les collectivités de pavoiser avec leurs drapeaux régionaux ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES.)

    M. Antoine Léaument

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    Exactement !

    Mme la présidente

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    4. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
    Suite de discussion de la proposition de loi visant à rendre obligatoire le pavoisement des drapeaux français et européen sur le fronton des mairies ;
    Discussion de la proposition de loi visant à faciliter la mobilité internationale des alternants, pour un « Erasmus de l’apprentissage ».
    La séance est levée.

    (La séance est levée à dix-neuf heures cinquante-cinq.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra