XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023
Séance du mercredi 24 mai 2023
- Présidence de Mme Élodie Jacquier-Laforge
- 1. Programmation militaire 2024-2030
- Discussion des articles (suite)
- Article 2 et rapport annexé (suite)
- Amendements nos 1488 et 1667
- M. Jean-Michel Jacques, rapporteur de la commission de la défense nationale et des forces armées
- M. Sébastien Lecornu, ministre des armées
- Amendements nos 263, 56, 845, 1654 rectifié, 311, 228, 1036, 1050, 1334, 1440 rectifié, 453, 312, 1335, 1178, 1179, 538, 863 et 864
- Sous-amendement nos 1794, 1796
- Amendements nos 1001, 1070, 1032, 1067, 865 et 866
- Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel
- Amendements nos 214, 167, 577, 675, 1339, 1006 et 1068
- M. Thomas Gassilloud, président de la commission de la défense nationale et des forces armées
- Rappel au règlement
- Suspension et reprise de la séance
- Article 2 et rapport annexé (suite)
- Rappel au règlement
- Article 2 et rapport annexé (suite)
- Rappel au règlement
- Article 2 et rapport annexé (suite)
- Rappel au règlement
- Article 2 et rapport annexé (suite)
- Article 2 et rapport annexé (suite)
- Discussion des articles (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
1e séance
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à la programmation militaire pour les années 2024 à 2030 et portant diverses dispositions intéressant la défense (nos 1033, 1234 rectifié).
Hier soir, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant aux amendements identiques nos 1488 et 1667 au rapport annexé à l’article 2.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1488 et 1667.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l’amendement no 1488. Je serai bref car nous avons déjà débattu de cette question. Cet amendement rédactionnel vise à supprimer l’adjectif possessif « nos », placé devant « outre-mer ». L’amendement no 1667 de M. Aurélien Saintoul est défendu.
La parole est à M. Jean-Michel Jacques, rapporteur de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour donner l’avis de la commission sur ces amendements identiques. Ils visent à supprimer l’adjectif possessif « nos », qui, selon vous, serait empreint de paternalisme. Or je vous appelle « mon cher collègue » de manière très respectueuse et affectueuse. On n’a pas la même histoire ! Pas de déclaration d’amour dans l’hémicycle ! Il en va de même lorsque je parle de nos territoires d’outre-mer et de nos régions. Avis défavorable. La parole est à M. le ministre des armées, pour donner l’avis du Gouvernement. Cette question dépend de la personne qui s’exprime et de la manière dont elle le dit. En outre-mer, j’ai souvent entendu les personnes y vivant parler de « nos outre-mer », je le dis sous votre contrôle, monsieur le député, comme on évoque souvent « nos régions », « nos campagnes », « nos territoires ». Il importe surtout de remplacer toutes les occurrences du mot « métropole » par le mot « Hexagone ». Cette correction est importante. Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable. La parole est à M. Bastien Lachaud. J’entends bien vos arguments. Malheureusement, monsieur le rapporteur, vous et moi, issus de la France métropolitaine hexagonale, n’avons pas la même histoire que les habitants d’anciennes colonies, devenues des territoires ultramarins. Nous maintenons donc l’amendement. (Les amendements identiques nos 1488 et 1667 ne sont pas adoptés.) Je suis saisie de cinq amendements, nos 263, 56, 845, 1654 rectifié et 311, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 56, 845 et 1654 rectifié sont identiques.
Sur l’amendement no 263, je suis saisie par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Louis Thiériot, pour le soutenir. Cet amendement de ma collègue Christelle D’Intorni vise à souligner que se greffe bien entendu à l’enjeu des outre-mer celui des zones économiques exclusives – ZEE –, qui sont un des éléments majeurs de la puissance française. En effet, grâce aux ZEE, nous sommes la deuxième puissance maritime du monde.
Par conséquent, après le mot « outre-mer », nous suggérons d’insérer les mots « , particulièrement nos zones économiques exclusives (ZEE) ». Cet amendement tend à souligner à quel point les ZEE sont un élément important des ambitions maritimes françaises et justifient les moyens que nous allouons à notre marine outre-mer. Très bien ! La parole est à Mme Caroline Colombier, pour soutenir l’amendement no 56. Notre zone économique exclusive a été l’un des angles morts des débats en commission. Elle est pourtant un élément essentiel de notre politique de protection du territoire national. La ZEE de la France est la deuxième plus importante du monde, après celle des États-Unis, puisqu’elle s’étend sur une superficie de plus de 11 millions de kilomètres carrés. Il faut donc tenir compte de la tyrannie des distances et défendre nos eaux territoriales, les zones de pêche et les ressources minérales. À ce titre, la ZEE, qui constitue un point stratégique de notre politique de défense et de sécurité nationale, est, en réalité, un outil phare de projection et de rayonnement de nos armées. Ce territoire est essentiel pour notre activité économique, en raison de ses ressources naturelles énergétiques et halieutiques.
Ainsi, cet amendement vise à inscrire dans la loi que la protection du territoire national ne doit pas faire l’impasse sur notre ZEE, tout particulièrement dans le contexte de la montée en puissance de la Chine et de la Russie. Nous proposons, après le mot « outre-mer », d’insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) ». Très bien ! La parole est à Mme Gisèle Lelouis, pour soutenir l’amendement identique no 845. Il vise également à insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) », après le mot « outre-mer » dans le rapport annexé. Vous remarquerez que, sur ce sujet, les amendements du groupe RN, de la manière dont ils sont rédigés, s’intègrent plus facilement dans le rapport annexé que l’amendement du groupe LR – du reste, Mme D’Intorni brille par son absence.
Nous sommes plusieurs à insister sur cette question ; tant mieux ! La France est grande : elle possède la deuxième plus importante ZEE du monde – près de 11 millions de kilomètres carrés – après celle des États-Unis. Il est nécessaire, dans ce texte, d’en rappeler l’importance, fortement liée à nos territoires ultramarins. En effet, la France n’est pas une nation européenne fermée sur ce continent, mais une nation mondiale avec de nombreux territoires maritimes. Nos ZEE font la grandeur de notre pays et la puissance de nos ambitions. Leur contrôle est un enjeu majeur de souveraineté, en particulier quand nos ressources, notamment halieutiques, sont exploitées par vous savez qui au large de Saint-Pierre-et-Miquelon, en violation du droit international. Nous devons préserver nos droits souverains en matière d’exploitation, d’exploration, de conservation et de gestion des ressources naturelles biologiques – ou non – de nos fonds marins, y compris de leur sous-sol, et de recherche et de préservation de notre milieu marin.
Que ferez-vous pour l’île de Clipperton, dans l’océan Pacifique, qui nous rapporte tant mais dont la souveraineté est constamment violée, au même titre que la ZEE qui l’entoure, par des pêcheurs étrangers, qui n’ont pas le droit d’exercer leur activité, ou des trafiquants en tout genre ? Sa zone économique exclusive s’étend sur 450 000 kilomètres carrés. Son potentiel halieutique, mal connu, est regardé avec attention par d’autres, tout comme les nodules polymétalliques contenant les terres rares – le nouvel or noir. L’État sera-t-il au rendez-vous géostratégique de l’histoire, en étant favorable à mon amendement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Christophe Blanchet, pour soutenir l’amendement no 1654 rectifié. Il vise également à insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) », après les mots « ensuite, il s’agit d’améliorer notre contribution à la protection du territoire national, singulièrement de nos territoires d’outre-mer ».
Les problèmes relatifs à la pêche et au développement durable ont été évoqués. Je souhaite insister sur la question des hydrocarbures, qui, demain, pourraient être source de conflits, notamment dans les îles Éparses. Leurs fonds regorgent de l’équivalent de 15 milliards de barils de pétrole et de 5 milliards d’euros de réserves de gaz naturel, ce qui représente 2 000 milliards d’euros potentiels. Demain, ces fonds pourraient susciter des convoitises, si nous ne montrons pas que nous les protégeons véritablement et que nous ne laisserons personne polluer ces territoires, porter atteinte à l’environnement ou entacher notre souveraineté, en récoltant le fruit de ces gisements. Voilà pourquoi nous devons mentionner les ZEE dans le rapport annexé. La parole est à Mme Laurence Robert-Dehault, pour soutenir l’amendement no 311. Les zones économiques exclusives françaises revêtent un caractère stratégique en raison des atouts que représentent leurs ressources disponibles, mais également leur environnement et leur biodiversité marine. Certains de ces territoires sont menacés par des revendications territoriales ou se situent dans des zones marquées par une résurgence des tensions géopolitiques.
Ces questions sont loin d’être théoriques, puisque les ZEE françaises de l’Indo-Pacifique sont régulièrement violées par d’autres États. Depuis 2012, au mépris le plus total de la souveraineté française, le président comorien délivre des permis d’exploration d’hydrocarbures dans le périmètre de la ZEE de Mayotte et des pêcheurs malgaches violent régulièrement les ZEE françaises autour des îles Éparses. En Guyane et aux Antilles françaises, il est également du devoir de la France d’assurer l’intégrité des ZEE et la sécurité de millions de nos compatriotes français, confrontés aux narcotrafiquants et aux pirates qui sévissent dans cette zone.
L’insuffisante protection de nos ZEE a été soulignée dans un rapport sénatorial sur la stratégie maritime nationale, publié en 2022, qui relève le sous-dimensionnement de la flotte française chargée de la protection des zones maritimes. En effet, la souveraineté n’existe réellement que si la France est en mesure de contrôler et d’intervenir en permanence, afin de dissuader les éventuelles revendications territoriales ou les pilleurs de ressources. La question des moyens affectés à ces missions est plus que jamais un enjeu stratégique.
L’objet de cet amendement est donc d’inscrire explicitement, au sein du rapport annexé, l’objectif de renforcement de la protection de nos ZEE. Ainsi, à la première phrase de l’alinéa 8, après le mot « outre-mer », nous proposons d’insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) ». (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ? J’émets un avis favorable sur l’ensemble de ces amendements, sauf sur celui de Mme D’Intorni, qui vise à insérer les mots « plus particulièrement » devant « ZEE ». De mon point de vue, cette mention ne se justifie pas car il s’agit de préserver tout autant les territoires d’outre-mer. Quel est l’avis du Gouvernement ? S’agissant de la méthode retenue dans le cadre de nos débats, je rendrai des avis plus succincts. Cette nuit, nous avons démontré que nous prenions le temps de débattre de sujets graves et importants, tels que la dissuasion nucléaire. Nous allons enchaîner l’examen d’amendements qui, s’ils donneront lieu à des débats légitimes, auront un effet limité sur le fond du projet de loi.
Sur le fond, je suis favorable à tous ces amendements visant à mentionner les ZEE. M. Blanchet a rectifié la rédaction de son amendement, qui soulevait une question d’accord au singulier ou au pluriel. En tout état de cause, il importe que cet alinéa fasse référence aux ZEE, d’autant que cela valorisera le travail accompli par la marine nationale. La parole est à M. Jean-Louis Thiériot. Si la rédaction de l’amendement de Mme D’Intorni pose problème, je propose de la rectifier, puisque nous en avons la possibilité, en supprimant le mot « plus particulièrement ». La parole est à M. Davy Rimane. Le principe de l’ajout de la mention relative aux ZEE ne pose pas de problème. Toutefois, il ne faut pas qu’on donne l’impression que les territoires dits d’outre-mer ne représenteraient, pour la France, qu’un bénéfice en termes de ZEE. Exactement ! En effet, lorsqu’on écoute la majorité d’entre vous, il n’y a que cela qui importe.
Or je rappelle que, comme certains, ici, ont pu le dire, ces territoires souffrent d’un sous-développement chronique, d’une importante pauvreté et d’une très grande faiblesse économique. Il est bien beau d’évoquer les ZEE, mais qu’en est-il des moyens de développement ? Les territoires d’outre-mer ne peuvent pas être uniquement les béquilles vertes ou bleues de la France hexagonale. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES. – M. Bastien Lachaud applaudit également.) L’amendement no 263, tel qu’il vient d’être rectifié par M. Thiériot, étant désormais identiques aux autres amendements, les nos 56, 845 et 1654 rectifié, je mets aux voix les quatre amendements. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 91
Nombre de suffrages exprimés 84
Majorité absolue 43
Pour l’adoption 84
Contre 0 (Les amendements identiques no 263, tel qu’il vient d’être rectifié, nos 56, 845 et 1654 rectifié sont adoptés. En conséquence, l’amendement no 311 tombe.) Très bien ! La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 228. Il s’agit, ici, de mentionner les missions de contrôle de zone, ce dernier terme étant entendu au sens militaire. Je pense en particulier à la zone indo-pacifique, comme on dit maintenant. Dès lors qu’elle pourrait être le théâtre d’un conflit majeur entre les États-Unis et la Chine, nous devons y être présents d’une manière ou d’une autre.
Mais ce n’est pas tout d’affirmer des principes ; encore faut-il se donner les moyens de les appliquer et de protéger nos zones, lesquelles abritent notamment des ressources halieutiques, que des pêcheurs qui n’auraient pas de droit à pêcher pourraient venir piller,… C’est déjà le cas ! …ou d’autres ressources naturelles que nous pourrions, comme l’expliquait à l’instant notre collègue Blanchet, exploiter demain, car il ne s’agit pas de les laisser en friche. Pour cela, il nous faut des navires. Si j’ai bien compris, le projet de loi de programmation militaire (LPM) prévoit trois patrouilleurs outre-mer. Sera-ce suffisant, monsieur le ministre ? Certes, ces navires ne sont pas les seuls à pouvoir intervenir, mais ceux-ci sont les mieux adaptés à ce type de mission.
Au-delà de la pétition de principe, qui peut nous réunir, je souhaiterais savoir si nous disposerons des moyens adéquats pour contrôler ces territoires gigantesques. Plusieurs l’ont déjà dit, notre zone économique exclusive est la deuxième du monde, derrière celle des États-Unis. Quel est l’avis de la commission ? Vous évoquez la surveillance de la zone indo-pacifique et, de façon générale, de notre espace maritime, le deuxième du monde, vous l’avez rappelé. Toutefois, il serait trop réducteur de ne mentionner qu’elle : si l’on en cite une, il faut les citer toutes. La zone indo-pacifique n’est pas mentionnée dans l’amendement ! Quant à la surveillance de l’ensemble des zones, elle s’exerce, grâce à notre modèle d’armée, qui est complet, dans l’espace maritime et l’espace aérien, à l’aide de différents matériels, qui ne se limitent pas aux patrouilleurs maritimes. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Nous aurons un long débat sur l’outre-mer ultérieurement ; nous devons prendre le temps nécessaire pour en discuter. Ce sera le cas, non pas, hélas ! lors de l’examen des tableaux relatifs aux contrats opérationnels – le nombre d’amendements déposés sur cette partie du rapport annexé n’est pas assez important –, mais lors de l’examen des tableaux capacitaires.
Dans votre amendement, monsieur Le Fur, vous désignez une des missions que peuvent remplir les armées : le contrôle de zone, lequel peut être maritime ou aérien. En réalité, il ne suffit plus. C’est pourquoi les manœuvres de renseignement – dont nous traiterons plutôt lors de la discussion de la partie normative du projet de loi – sont importantes.
De fait, nous devons réfléchir à ce que seront ces contrôles, demain. Ont été évoquées avec raison la tyrannie des distances et l’immensité des zones concernées. De fait, l’ensemble des dispositifs que nous vous proposons dans le domaine spatial auront, on le voit bien, un rôle majeur à jouer dans le contrôle de la zone économique exclusive de la Polynésie française ou dans la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane, par exemple – autant d’enjeux qui doivent être pris en compte.
Pourquoi mentionner uniquement le contrôle de zone, et non pas le contrôle du ciel, les manœuvres de renseignement ou les manœuvres spatiales ? La rédaction de l’amendement est trop précise. Nous entrons là – je pense d’ailleurs à un autre de vos amendements portant sur la défense opérationnelle du territoire (DOT) – dans le concret opérationnel des armées. En la matière, il faut que nous prévoyions, à chaque fois, les moyens capacitaires correspondants : en l’espèce, des patrouilleurs – vous l’avez dit –, mais aussi des drones. Nous devons en effet, je crois, déployer les nouvelles technologies d’abord dans les territoires d’outre-mer, alors que ceux-ci ont longtemps été les derniers servis. C’est une question clé.
Nous devons également développer, lorsqu’elle est possible – il arrive qu’elle ne soit absolument pas recommandée –, la coopération avec certains pays voisins. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
En conclusion, compte tenu notamment de l’emplacement de l’amendement, demande de retrait ou avis défavorable. Maintenez-vous cet amendement, monsieur Le Fur ? Je crois que M. Rimane demandait la parole. Je vois que vous n’avez pas perdu vos réflexes de vice-président, mon cher collègue ! (Sourires.) Quoi qu’il en soit, il ne pourra pas la prendre car je vais retirer l’amendement, compte tenu des réponses qui m’ont été données, même si celles-ci ne sont que partiellement satisfaisantes. Pourquoi ? J’ai évoqué l’exemple de la zone indo-pacifique, mais celle-ci ne figure pas dans le texte de mon amendement, qui porte sur l’ensemble des zones. Oui, bien sûr ! De surcroît, j’ai bien écrit « notamment », de manière à insister sur un point sans exclure les autres – c’est le sens de cet adverbe.
J’aurais souhaité que cet amendement soit adopté, car il convient de veiller à ce que, au-delà des pétitions de principe qui nous rassemblent, nous ayons les moyens adéquats pour exercer ces missions. Mais nous aurons ce débat ultérieurement. Je retire donc l’amendement, en m’excusant auprès de mon excellent collègue de nos outre-mer. (Sourires.) Quelle concorde, cet après-midi ! (L’amendement no 228 est retiré.) La parole est à M. Laurent Panifous, pour soutenir l’amendement no 1036. Il s’agit de faire évoluer le système des missions de courte durée (MCD) des forces terrestres déployées dans les territoires ultramarins, en portant leur durée, qui est actuellement de quelques semaines, à trois ans. Nous manifesterions en effet notre volonté d’assurer la continuité territoriale de notre défense en privilégiant les affectations en famille et en renforçant l’ancrage territorial de nos militaires. Quel est l’avis de la commission ? Demande de retrait ou avis défavorable. Je comprends votre démarche, mais les missions de courte durée correspondent à des besoins opérationnels précis. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je comprends votre intention, mais il s’agit d’une fausse bonne idée. Au fond, ce n’est pas tant la durée du séjour qui compte que les besoins opérationnels dans les différents territoires. Des forces de souveraineté y sont prépositionnées en permanence, auxquelles s’ajoutent, selon les besoins, des renforts en provenance de l’Hexagone. C’est notamment le cas lorsqu’il faut durcir un contrôle de zone, dans le cadre de l’opération Harpie, par exemple.
Pour le dire de manière directe, sans langue de bois, il faut avoir de cette question une approche en termes non pas de ressources humaines mais de sécurité des territoires d’outre-mer : c’est l’opérationnel qui doit déterminer le format des forces – dont j’ai indiqué qu’elles seraient en augmentation, à bien des égards. Il y aura donc toujours un mix entre longs et courts séjours. Demande de retrait. Maintenez-vous l’amendement, monsieur Panifous ? Oui. (L’amendement no 1036 n’est pas adopté.) La parole est à M. Tematai Le Gayic, pour soutenir l’amendement no 1050. Nous souhaitons insister sur l’importance de coordonner l’ensemble des stratégies, notamment la stratégie indo-pacifique, avec les collectivités locales et les députés de l’ensemble des territoires d’outre-mer. En effet, ces stratégies ne doivent pas être élaborées sans ces territoires. Nous ne voulons pas être uniquement des porte-avions ou des ponts pour la France hexagonale ; nous voulons que ces stratégies servent d’abord le rayonnement des outre-mer, puis, par ruissellement, la France hexagonale. Mauruuru ! Quel est l’avis de la commission ? Nous aimons trop nos territoires d’outre-mer pour que je vous laisse dire que la France les considère uniquement comme des porte-avions. Vous voulez dire que, nous, nous ne les aimons pas ? (Sourires.) Puisque nous aborderons cette question ultérieurement, et nous serons alors très heureux d’en débattre, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement. Mauruuru ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Maintenez-vous l’amendement, monsieur Le Gayic ? J’aimerais, monsieur le ministre, que vous me donniez les raisons pour lesquelles votre avis est défavorable. J’ai compris que nous discuterions des outre-mer plus tard. Ce n’est pas moi qui ai choisi que mon amendement soit examiné à ce moment-là… Si, c’est vous qui avez choisi de le déposer à cet endroit-là du texte ! …mais le service de la séance. Vous avez tout de même choisi de le déposer sur cette partie du rapport annexé. Cependant, je veux bien faire l’effort de le retirer si, plus tard, monsieur le ministre, vous acceptez d’évoquer les outre-mer. Oui ! (L’amendement no 1050 est retiré.) La parole est à M. Mickaël Bouloux, pour soutenir l’amendement no 1334. La France est une grande puissance, mais elle a besoin d’alliés pour exercer son influence sur tous les océans. Aussi nouer des partenariats avec les pays voisins de nos territoires ultramarins est-il nécessaire pour défendre nos intérêts vitaux. La LPM doit donc être l’occasion de clarifier la stratégie de présence militaire menée en partenariat, je pense aux pays de l’Association of Southeast Asian Nations, l’Asean, dont la France se rapproche diplomatiquement. En témoigne son entrée en tant que membre observateur à la réunion énergie des ministres de la défense.
Ces partenariats devront s’accompagner d’une stratégie globale, y compris commerciale avec les pays limitrophes, afin d’assurer autant que possible une interopérabilité entre leurs équipements et les nôtres. Quel est l’avis de la commission ? Cet amendement répond en quelque sorte à celui qu’a défendu tout à l’heure M. Le Fur. Il est vrai que, concernant ces zones à surveiller, le partenariat est un appui très important. Toutefois, il en sera question plus tard dans le rapport annexé et, en outre, votre amendement est satisfait. C’est donc un avis défavorable ou une demande de retrait. Quel est l’avis du Gouvernement ? L’amendement étant en effet satisfait, c’est également une demande de retrait ou un avis défavorable. J’ajouterai que le mot « interopérabilité » correspond à une réalité militaire particulière, et que ce n’est pas le terme que j’emploierais ici. La parole est à Mme Caroline Colombier. Même en s’entendant bien avec certains pays, nous ne pouvons pas pratiquer l’interopérabilité avec n’importe qui, et cet amendement nous paraît donc curieux. (L’amendement no 1334 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 1440 rectifié. À une époque où les frontières entre acteurs étatiques et non étatiques dans les conflits deviennent de plus en plus floues, il est impératif de répondre au défi posé par la prolifération des mercenaires et des sociétés militaires privées. Nous en avons débattu récemment et condamné les exactions de la milice Wagner.
Ces entités, agissant souvent en dehors des cadres légaux, posent de sérieuses questions de responsabilité, d’éthique et de sécurité. L’histoire a maintes fois prouvé les dangers d’une telle prolifération, et l’utilisation de ces acteurs par certains États ou entités peut mener à une dissolution de la responsabilité, à une augmentation de la violence et à une déstabilisation à large échelle. Les sociétés militaires privées agissent avec impunité, suscitant des conflits au lieu de les résoudre et alimentant l’instabilité au lieu de la réguler.
Il est de notre responsabilité, en tant que législateur, de protéger nos nations et nos citoyens contre ces risques. C’est là que réside l’importance de cet amendement proposé par le groupe Écologiste. Il ne s’agit pas seulement d’une question de sécurité, mais aussi d’une question de principe et de valeurs. Si nous ne prenons pas les mesures nécessaires pour réguler ces acteurs, nous abandonnons notre engagement en faveur de la justice et de la paix.
Nous exprimons notre volonté d’entamer la négociation de traités spécifiques, dans le cadre d’une démarche proactive, visant à prévenir l’exploitation de ces acteurs des théâtres d’opérations par des entités malveillantes et à limiter les dégâts potentiels qu’ils peuvent causer. Nous ne pouvons pas attendre que les problèmes se posent pour agir. Il est temps de prendre des mesures préventives pour protéger nos sociétés et maintenir la paix. Quel est l’avis de la commission ? La question des milices paramilitaires, comme Wagner, est d’autant plus importante qu’elles sont présentes non seulement en Ukraine mais aussi, très largement, au Sahel et en Afrique. Cela étant, nous luttons déjà contre ces mercenaires, qui participent de ce que l’on nomme la guerre hybride ; en outre, votre demande n’a pas à figurer dans le rapport annexé mais relève, en vertu de l’article 52 de la Constitution, du Président de la République. J’émettrai donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Bien évidemment, le Parlement a, lui aussi, tenu à se faire entendre, avec la résolution récente que vous avez adoptée. (Approbations sur les bancs du groupe GDR-NUPES.) C’était un signal on ne peut plus clair et, pour le coup, vous m’accorderez que la France joue un rôle moteur dans ce domaine.
Nous pourrons en reparler en commission des affaires étrangères ou en commission de la défense mais, en toute rigueur, le rapport annexé a pour objet de définir le format des armées françaises, dont ne font évidemment pas partie les milices ou les mercenaires. Dans la mesure, par ailleurs, où nos orientations internationales et diplomatiques sont connues, ce sera également une demande de retrait ou un avis défavorable, même si je partage votre amendement sur le fond. Sur l’amendement no 453, je suis par le groupe Renaissance d’une demande de scrutin public.
Sur les amendements identiques nos 1178 et 1179, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Bastien Lachaud. Le groupe Renaissance a, avec d’autres, jugé utile et nécessaire de faire adopter par cette assemblée une résolution demandant au Gouvernement d’inscrire l’organisation Wagner sur la liste des organisations dites terroristes, résolution qui a recueilli notre unanimité. L’amendement du groupe Écologiste s’inscrit dans la même veine, puisqu’il invite le Gouvernement à agir en créant un traité international interdisant ces organisations.
Hier soir, nous avons tous, hormis le Rassemblement national, adopté un amendement rappelant nos engagements dans le cadre du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP)… Parce que nous sommes une puissance dotée ! C’est cela qui fait le lien avec nos armées. En effet, monsieur le ministre, mais l’interdiction des milices privées dans le droit international est un réel enjeu pour nos forces armées, dans la mesure où cela influera sur la manière dont elles auront à se comporter face à d’éventuels compétiteurs ou agresseurs. Si Wagner était condamnée par le droit international, les choses se passeraient autrement en Afrique, et le modèle d’armée que nous y déployons serait donc différent.
Cet amendement a logiquement toute sa place dans ce texte, et il serait totalement incompréhensible que notre assemblée rejette l’idée d’un traité international pour interdire le mercenariat, quinze jours après avoir condamné la milice Wagner. J’avoue donc, monsieur le ministre ne pas comprendre le raisonnement qui vous pousse à rejeter cet amendement, qui appelle au respect du droit international et réitère les engagements de la France en la matière. Il n’y a absolument aucune raison de voter contre. (L’amendement no 1440 n’est pas adopté.) La parole est à M. Nicolas Metzdorf, pour soutenir l’amendement no 453. Monsieur le ministre, à la lecture du projet de LPM, on voit que vous n’avez pas oublié vos premières amours, les outre-mer : vous leur dédiez 13 milliards d’euros, 800 millions d’euros pour la modernisation des infrastructures, et 800 militaires supplémentaires – merci pour ces moyens.
L’objet de cet amendement est de préciser davantage la stratégie de la nation concernant les outre-mer. On parle souvent de les protéger, de garantir leur souveraineté ou de les défendre contre la pêche illicite, mais ces territoires peuvent également être utiles à la France, notamment en servant de relais à la politique nationale. Ils lui permettent d’asseoir sa diplomatie et ses positions militaires dans les régions où ils sont situés. C’est la raison pour laquelle l’amendement prévoit que la politique militaire de la nation s’appuie sur les outre-mer, dont la seule vocation n’est pas d’être des territoires protégés, mais qui servent pleinement la nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Quel est l’avis de la commission ? Avis favorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Davy Rimane. Nous soutiendrons sans problème cet amendement. Je souhaite simplement ajouter que, lorsqu’il y a des échanges diplomatiques avec des pays voisins de nos territoires, nos élus, parlementaires ou élus locaux, ne font pas partie des délégations, ce qui est très dommage. On est donc loin aujourd’hui de s’appuyer sur les outre-mer comme le demande M. Metzdorf. La parole est à M. Laurent Jacobelli. Nous n’avons pas non plus de problème de principe avec cet amendement, d’autant que les territoires d’outre-mer sont partie intégrante de la République – j’ai d’ailleurs été choqué par l’emploi qu’a fait tout à l’heure du verbe « enraciner » l’un de nos collègues du groupe LIOT, qui semblait perdre de vue, en les distinguant, que les outre-mer, c’est la République, et que la République, ce sont les outre-mer.
Cela me gêne ; me gêne encore plus le fait que l’amendement laisse penser qu’il s’agirait de s’appuyer exclusivement sur les territoires d’outre-mer. Il aurait suffi d’ajouter l’adverbe « notamment » pour corriger cet amendement, en l’état extrêmement mal rédigé malgré ses intentions louables. Je mets aux voix l’amendement no 453. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 111
Nombre de suffrages exprimés 80
Majorité absolue 41
Pour l’adoption 79
Contre 1 (L’amendement no 453 est adopté.)
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) La parole est à M. Laurent Jacobelli, pour soutenir l’amendement no 312. Je vais attendre, pour le présenter, que tout le monde se calme, car c’est un peu compliqué autrement. (M. Laurent Jacobelli semble gêné par le léger brouhaha qui suit le scrutin public.) Je vous trouve assez injuste, monsieur Jacobelli, car l’ambiance est extrêmement calme, cet après-midi ! Si vous le dites… Notre base industrielle et technologique de défense (BITD) doit être protégée des malveillances extérieures, on le sait aujourd’hui. Les attaques cyber, en particulier, peuvent être très nuisibles – on l’a notamment vue avec la frégate britannique intentionnellement endommagée fin 2022, alors qu’elle était en chantier. Notre BITD n’est pas à l’abri de telles attaques et constitue, on le sait, une cible pour certains États étrangers mais aussi pour des organisations non gouvernementales, des militants ou, tout simplement, des concurrents. Cela pourrait avoir de graves conséquences en termes de retard ou de défaillance dans les livraisons de matériel.
Pour nous prémunir contre ces actes, nous proposons donc d’ajouter à la fin de l’alinéa 8 que « La protection des capacités de production de recherche et de développement d’exportation de notre BITD fera l’objet d’une attention particulière ». Quel est l’avis de la commission ? Cet amendement est déjà satisfait du fait, notamment, du travail de la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) et de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), qui protègent notre BITD. D’ailleurs, il ne faut pas hésiter, comme j’ai déjà eu l’occasion de le faire, à aller, sur le terrain, rencontrer les personnels de la DRSD et de la DGSI. Cela permet ensuite de faire le lien avec les entreprises, et c’est important.
C’est donc une demande de retrait. Quel est l’avis du Gouvernement ? Cet amendement traite d’une question que nous avons eu récemment l’occasion d’évoquer avec la délégation parlementaire au renseignement (DPR). J’ignore s’il s’agit d’un amendement d’appel, il permet en tout cas d’aborder le sujet devant vous. Cela dit, vous connaissez mon avis sur le fait d’alourdir le rapport annexé avec ce que Marc Le Fur qualifiait tout à l’heure de vœux ou de pétitions.
Quoi qu’il en soit, il est clair que, avec l’accroissement de la compétition entre les États, on est passé d’un espionnage économique « classique », qui méritait déjà, en tant que tel, des réponses ad hoc, à des manœuvres relevant plus de l’ingérence, voire du sabotage ou de la destruction. C’est un enjeu d’autant plus essentiel que notre BITD est étroitement imbriquée dans notre modèle d’armée.
Il existe à cela plusieurs types de réponse, la première étant évidemment très régalienne et renvoyant, comme l’a dit le rapporteur, à la DRSD. Nous traiterons plus tard des questions de renseignement, mais disons d’ores et déjà qu’il était temps de renforcer les moyens de cette direction. Un travail important a été entrepris par le général Bucquet, puis par le général Susnjara pour la faire monter en puissance, à quoi s’ajoute le doublement de son budget – cela a été largement documenté en DPR et je n’en dis pas plus.
Il faut ensuite réfléchir – et j’ai missionné sur cette question la direction générale de l’armement (DGA) – à la manière dont les industriels doivent s’organiser face à cette menace. Je pense ici aux mécanismes de redondance : si une machine unique est sabotée, c’est l’ensemble de la chaîne de production qui s’effondre. Or, avec la fin de la guerre froide, le recours à la redondance est un réflexe qui s’est perdu. C’est pourquoi Emmanuel Chiva, le délégué général pour l’armement, s’emploie actuellement à développer un plan qui concerne toutes les entreprises du secteur : celles-ci, comme l’État qui les protège, ont des obligations. L’industrie de l’armement n’est pas une industrie comme les autres et doit, en conséquence, faire preuve de diligence ; pour le dire vite, on constate un progrès général, avec une acculturation plus ou moins rapide selon les entreprises.
Je demande donc le retrait de l’amendement, à défaut de quoi l’avis sera défavorable. Vous pointez du doigt un élément important, mais si je donnais un avis favorable à tous les amendements de ce genre, nous aboutirions, à l’issue de l’examen du texte, à un rapport annexé de 600 pages, ce qui le rendrait parfaitement illisible. Revenons-en à ce qui est l’essence d’un rapport annexé : un document sur le format de nos armées. La parole est à M. Loïc Kervran. Pour avoir traité de ces sujets pendant de nombreuses années au sein de la DPR, je puis vous confirmer que la pression sur notre BITD ainsi que les volontés de pillage ou de sabotage sont très importantes. Cela étant, je ne suis pas convaincu que l’ajout d’une phrase au rapport annexé y changerait quelque chose.
Toujours en ma qualité d’ancien membre de la DPR, mais aussi de la commission de vérification des fonds spéciaux (CVFS) de l’Assemblée nationale – je salue d’ailleurs notre collègue Colombier, qui m’y a succédé –, j’ajoute que nous pouvons faire confiance à nos services, particulièrement à la DRSD et à la DGSI, lesquels sont très actifs sur ces questions, et ce, j’insiste, alors qu’ils font face à une pression et à une adversité très importantes. La parole est à M. Bastien Lachaud. Monsieur le ministre, au moins nous confirmez-vous les propos que tenait mon collègue Saintoul hier sur l’existence d’une guerre économique larvée qui menace nos entreprises et nos industries, c’est-à-dire notre BITD. On ne l’avait pas attendu ! En effet, il ne s’écoule pas un mois sans que l’un de nos fleurons passe sous contrôle étranger. Sous contrôle étranger : carrément ! De la même manière, il ne passe pas quelques mois, ou quelques années, sans que soit révélé un scandale d’espionnage concernant nos entreprises et impliquant des pays que nous considérons comme nos alliés. Le scandale Alstom est à cet égard dans les mémoires de tous, et nous savons le rôle joué par certains services de renseignement dans cette affaire.
Malheureusement, le présent amendement est insuffisamment contraignant pour être utile, d’ailleurs le groupe LFI-NUPES s’abstiendra, mais il n’en demeure moins impératif d’instituer un dispositif strict afin d’empêcher les prises de contrôle et de préserver les compétences et les savoir-faire français. (L’amendement no 312 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l’amendement no 1335. Il vise à compléter l’alinéa 8, afin de consolider notre lutte contre les ingérences. En effet, la multiplication des conflits et des compétitions mondiales induit un renforcement de ces compétitions et des ingérences, aussi bien dans l’Hexagone qu’outre-mer, vis-à-vis de notre ZEE – nous avons eu l’occasion d’en débattre lors de l’examen d’amendements précédents.
L’ouverture de nouvelles voies dans l’Arctique en raison du réchauffement climatique crée de nouvelles possibilités économiques et fait de l’océan Atlantique le théâtre d’influences elles aussi nouvelles. Près de nos côtes, comme au large de la mer d’Iroise, il n’est ainsi pas rare d’observer des démonstrations de force de la part de certains de nos compétiteurs. Nous avons d’ailleurs eu à ce sujet des échanges nourris au sein de la commission de la défense nationale et des forces armées.
Dès lors, afin de permettre à la marine nationale de se consacrer pleinement à ses missions en haute mer, il apparaît nécessaire de renforcer notre surveillance côtière et de proximité, en lien avec nos collectivités territoriales et les acteurs locaux. Quel est l’avis de la commission ? L’établissement d’un lien entre nos armées et les collectivités territoriales est bien entendu nécessaire dans les communes côtières pour les motifs que vous évoquez, mais il l’est en réalité partout en France. La défense de notre pays appartient à tous : c’est pourquoi je ne crois pas utile d’ajouter au rapport annexé la précision que vous nous proposez. L’avis est donc défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Nous avons en effet eu un long débat en commission sur cette question. Avis défavorable. (L’amendement no 1335 n’est pas adopté.) Sur l’amendement no 538, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisie de trois amendements, nos 1178, 1179 et 538, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1178 et 1179 sont identiques.
La parole est à M. Christophe Bex, pour soutenir l’amendement no 1178. Il porte sur les données sensibles, leur utilisation et leur gestion étant un sujet majeur qui mérite toute notre attention.
En effet, eu égard à l’actualité et à ce que l’on appelle la guerre hybride, la vulnérabilité des câbles sous-marins qui transportent ces données nous amène à nous interroger. Pas moins de 80 % de nos données sont hébergées dans des centres situés aux États-Unis. La communication entre notre territoire et ces centres n’est possible que grâce à ces câbles, lesquels sont de plus en plus vulnérables à des attaques de la part de puissances étrangères hostiles. Les espaces maritimes par lesquels ces données transitent, piliers de la mondialisation contemporaine, représentent donc un enjeu géopolitique significatif.
Or la surveillance de ces câbles est impossible, alors même qu’une défaillance majeure pourrait paralyser un pays, voire un continent entier. Sommes-nous seulement capables d’assurer une communication internet et GPS dans les territoires français en cas de coupure entre le continent américain et le nôtre ? Nous sommes infiniment dépendants de la connectivité moderne, tous nos modes de fonctionnement sociaux étant imbriqués avec la technologie. Cette situation devrait nous inciter à rapatrier nos données, du moins nos données critiques, afin d’assurer notre souveraineté et notre indépendance. C’est d’ailleurs ce qu’a suggéré le ministre des armées lors de l’examen du projet de loi en commission. La parole est à M. Arnaud Le Gall, pour soutenir l’amendement no 1179. Identique au précédent, il vise à augmenter la résilience des réseaux et à protéger les données qui s’y trouvent, en élaborant un programme de relocalisation des données sur le territoire national, dans des serveurs relevant du droit français. Étant bien sûr conscients qu’une telle entreprise ne pourrait avoir lieu en un jour, précisons que nous donnerions la priorité aux données sensibles, même si, comme vient de le dire Christophe Bex, la question concerne un très grand nombre d’activités qui ne relèvent pas du projet de loi de programmation militaire stricto sensu .
Pourquoi vous soumettons-nous ces amendements ? Parce qu’il convient de réagir à deux grandes sources de vulnérabilité.
La première est juridique. Pour dire les choses rapidement, nous avons un problème de normes et nous savons bien que l’Europe et les États-Unis sont en concurrence en matière de gestion des données. Il s’agit d’un vrai sujet, qui m’a d’ailleurs conduit à déplorer que les paiements en ligne avec le futur euro numérique aient été confiés à Amazon – l’ancien directeur de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) a d’ailleurs également considéré que ce choix était un scandale.
Quant à la seconde source de vulnérabilité, elle est technique. Si les câbles sont coupés, nous perdons 80 % de nos données. Mais le pire, le plus insidieux, est bien l’espionnage. Ne nous voilons d’ailleurs pas la face : certains pays européens sont des plateformes d’espionnage, y compris pour le compte de certains de nos alliés. En 2021, il a en effet été révélé que le Danemark avait été, en Europe, le principal point d’entrée des activités de la NSA – l’Agence nationale de sécurité des États-Unis – pour écouter des dirigeants et de nombreuses entreprises. Et comment cet espionnage a-t-il été possible ? Grâce aux câbles sous-marins transatlantiques qui arrivent au Danemark.
Il convient donc de réduire notre vulnérabilité, de ne pas nous montrer naïfs et d’engager un plan de rapatriement de l’ensemble de nos données, en commençant par les plus critiques et sensibles. La parole est à Mme Caroline Colombier, pour soutenir l’amendement no 538. Conformément aux discussions que nous avons eues en commission et aux recommandations du ministre, nous devons affirmer la nécessité de relocaliser nos données sensibles sur le territoire national. Il s’agit évidemment d’un élément central du renforcement de la protection de nos territoires face aux menaces actuelles et futures, protection qui passe obligatoirement par la maîtrise des fonds marins. La lutte informationnelle, les ingérences et la multiplication des conflictualités hybrides rendent cette relocalisation urgente – d’autant qu’elle permettrait également de créer des emplois directs en France. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ? Il convient effectivement d’avancer au sujet de la relocalisation des données, mais notre action doit avoir lieu dans le cadre européen. C’est pourquoi je donne un avis défavorable à ces amendements.
S’agissant de nos armées, je tiens tout de même à souligner que la LPM prévoit 8 milliards d’euros de crédits pour conforter la résilience de nos systèmes numériques et 4 milliards pour le cyber, ce qui montre combien nous tenons compte de cet enjeu. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est vrai que nous avons eu un débat intéressant en commission sur ce sujet, au cours duquel plusieurs principes ont été énoncés. Cependant, je vous avoue que la rédaction de ces amendements ne me convient toujours pas. J’avais initialement prévu de déposer un sous-amendement, mais nous avons finalement estimé, avec Jean-Noël Barrot, qu’il valait mieux renvoyer cette question aux dispositions sur le cyber.
Voici l’alinéa que nous souhaitons insérer dans un article du titre II, relatif aux dispositions normatives intéressant la défense nationale : « Les données sensibles du ministère des armées sont stockées en interne ou sur le territoire national dans des serveurs relevant du droit français. »
Une telle disposition permettrait en outre de traiter le cas particulier des serveurs hébergeant les données de nos bases militaires à l’étranger.
Je demande donc le retrait de ces amendements, à défaut de quoi l’avis sera défavorable. La parole est à M. Davy Rimane. Ces amendements sont très importants, et nos collègues ont bien résumé la situation.
S’agissant des territoires d’outre-mer, du moins de la Guyane – mais je parlais de ce sujet avec mon collègue Le Gayic, élu de Polynésie –, le câble nous connectant à internet vient des États-Unis. S’il est coupé, nous ne perdrons donc pas 80 %, mais bien 100 % de nos données. Il n’y aura plus rien !
Comble de l’ironie : alors que la Guyane accueille le premier lanceur européen envoyant des satellites en orbite dans le monde entier, il n’est pas couvert par les satellites de télécommunications. Mais si ! Dans le même ordre d’idée, les renforts militaires envoyés en Guyane pour appréhender les assassins du maréchal des logis-chef Arnaud Blanc ont dû déployer des moyens supplémentaires venus de l’Hexagone pour être en mesure de communiquer au sein de la forêt guyanaise et de mener leurs opérations.
Le groupe GDR-NUPES votera donc ces amendements avec les deux mains, car il est très important pour les territoires ultramarins que notre souveraineté en matière de télécommunications soit assurée. La parole est à M. Aurélien Lopez-Liguori. L’amendement proposé par Mme Colombier est de bon sens. Vous avez expliqué, monsieur le ministre, que l’armée française allait relocaliser ses données en France, mais ce ne sont pas les seules à être sensibles. Nos prestataires, nos sous-traitants, les OIV – opérateurs d’importance vitale – ou encore les OSE – opérateurs de services essentiels – devraient également héberger leurs données en France, ou du moins au sein de l’Union européenne, et nulle part ailleurs. Or nous en sommes loin.
J’insiste, tous les acteurs que je viens d’énumérer traitent de données sensibles, et nous ne pouvons pas faire confiance à des entreprises étrangères comme AWS – Amazon Web Services – ou Microsoft, qui propose l’application Azure, pour les héberger, étant donné que le pays dont elles sont issues a le pouvoir légal d’y accéder. Or nous devons nous protéger contre toute tentative d’ingérence étrangère, à plus forte raison dans un domaine aussi sensible que la sécurité nationale et alors que nous avons les moyens d’héberger nos données en France. Nous disposons d’un écosystème technologique adapté : des entreprises françaises souveraines telles que Docaposte, avec sa solution NumSpot, ou Scaleway peuvent nous aider en ce sens.
Les données sont précieuses : elles sont l’or noir du XXIe siècle. Nous devons protéger et faire fructifier cette ressource. Il y va de notre de notre souveraineté, de notre sécurité et de la défense de nos intérêts vitaux. J’espère donc que la représentation nationale sera présente en masse lors de l’examen et du vote de l’article 35 bis , l’avant-dernier du texte, qui est justement consacré à ce sujet très important. Nous pouvons rattraper notre retard dans la technologie de la collecte de données. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Je mets aux voix les amendements identiques nos 1178 et 1179. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 142
Nombre de suffrages exprimés 142
Majorité absolue 72
Pour l’adoption 52
Contre 90 (Les amendements identiques nos 1178 et 1179 ne sont pas adoptés.) Je mets aux voix l’amendement no 538. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 121
Nombre de suffrages exprimés 121
Majorité absolue 61
Pour l’adoption 32
Contre 89 (L’amendement no 538 n’est pas adopté.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 863 et 864, sur lesquels le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale a demandé un scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l’amendement no 863. Il est important car il traite d’un sujet – les pôles et les Terres australes et antarctiques françaises (Taaf) – qui n’a pas encore trouvé sa place dans le rapport annexé alors qu’il devrait y figurer. Ces territoires ont une importance fondamentale dans la lutte contre le réchauffement climatique. L’océan Austral, en effet, capte à lui seul 70 % de l’augmentation d’origine anthropique des températures. Par ailleurs, les Terres australes, inhabitées, ont conservé un territoire vierge et donc utile à l’étude du climat.
Il est donc essentiel de les préserver. La marine nationale, l’armée de l’air et de l’espace et, d’une certaine manière, l’armée de terre ont un rôle à jouer dans la défense et la protection de ces espaces. La France compte parmi les rares nations antarctiques et il est indispensable qu’elle en tire les conséquences. La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 864. En complément des propos de mon collègue Lachaud, je voudrais citer un poète célèbre : « À quoi sert une banquise trop fragile pour les pas d’un ours ? » La France doit être une puissance motrice dans la préservation des pôles afin d’en faire un bien commun de l’humanité. En proposant d’inscrire cette intention dans le rapport annexé, cet amendement nous donne l’occasion d’intégrer la question dans nos débats. La parole est à M. le ministre, pour soutenir les sous-amendements nos 1794 et 1796, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée. La question a été évoquée en commission. Elle doit, comme vous l’avez souligné, être intégrée à nos travaux. Toutefois, pour des raisons de forme, je vous propose d’alléger le long dispositif que vous proposez, afin de recentrer l’effort de préservation sur le périmètre du ministère des armées. Quel est l’avis de la commission ? Favorable, sous réserve de l’adoption des sous-amendements. (Les sous-amendements nos 1794 et 1796, successivement mis aux voix, sont adoptés.) Je mets aux voix les amendements identiques nos 863 et 864, sous-amendés. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 125
Nombre de suffrages exprimés 122
Majorité absolue 62
Pour l’adoption 122
Contre 0 (Les amendements identiques nos 863 et 864, sous-amendés, sont adoptés.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1001 et 1070.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l’amendement no 1001. Il s’inscrit dans la même logique que l’amendement précédent. Le réchauffement climatique, nous le savons, est malheureusement à l’œuvre et son action contribue à l’ouverture d’un passage maritime passant par le nord de la Russie et permettant de circuler entre l’océan Pacifique et l’océan Atlantique. Il est donc nécessaire que des accords internationaux régissent la navigation par ce passage. L’amendement propose d’affirmer la nécessité de défendre les intérêts de la défense française lors de leur négociation. L’amendement no 1070 de M. Aurélien Saintoul est défendu.
Quel est l’avis de la commission ? Le Gouvernement défendra toujours les intérêts de la France. Avis défavorable. (Les amendements identiques nos 1001 et 1070, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1032 et 1067.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l’amendement no 1032. Il prévoit la rédaction d’un rapport sur le rôle stratégique des zones polaires et des Terres australes et antarctiques françaises. J’imagine que vous direz « non » à cette demande de rapport, mais j’espère que ce sera pour mieux dire « oui » aux demandes suivantes. La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 1067. Le dérèglement climatique provoque le réchauffement des pôles qui, à son tour, conduit à l’ouverture de nouvelles voies maritimes. Ce phénomène ne va pas simplement favoriser la découverte d’épaves de bateau prisonnières de la banquise depuis des siècles : il va entraîner la mise en concurrence de différentes puissances. La France doit être en pointe sur le sujet. Un rapport rédigé par l’Observatoire défense et climat sur le rôle stratégique de ces zones y contribuerait. Il faut également défendre l’intérêt de la France lors de la négociation internationale d’accords commerciaux sur la navigation dans ces zones. Quel est l’avis de la commission ? Le rôle stratégique des pôles face au changement climatique est déjà traité dans un document sur la stratégie polaire de la France publié en avril 2022. Ces amendements me semblent donc inutiles. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? La stratégie concernant les pôles doit être coordonnée, mais aussi différenciée, car les deux pôles n’obéissent pas tout à fait aux mêmes logiques physiques, géographiques et de gouvernance. Le rôle des États n’y est pas le même, c’est le moins que l’on puisse dire.
M. Piquemal l’a rappelé : le réchauffement climatique induit de nouvelles opportunités, qui sont d’ailleurs plutôt des risques. L’ouverture de nouvelles voies maritimes mérite d’être regardée de près, notamment parce que ces voies pourront permettre la jonction de marines de guerre.
Une fois de plus, j’émettrai une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable à cette demande de rapport. Néanmoins, j’ai demandé à la DGRIS – direction générale des relations internationales et de la stratégie – de formaliser une feuille de route pour les mois à venir. Certes, il ne s’agit pas d’un rapport, puisque la teneur de ce document interne est opérationnelle, mais la DGRIS pourra, si cela vous intéresse, le présenter devant la commission de la défense.
Le rôle stratégique des zones polaires touche à des questions importantes : marine ; équilibre géostratégique ; lignes maritimes commerciales par lesquelles transitent, entre autres, les matières premières ; biodiversité et Taaf. Ce sujet a un intérêt majeur et il doit être documenté au fur et à mesure, au-delà même de l’exécution de la loi de programmation militaire. La parole est à M. Bastien Lachaud. Je considère que l’amendement est satisfait par la feuille de route dont a parlé M. le ministre, qui est quasiment l’équivalent d’un rapport. Nous serons attentifs à son rendu et je suis sûr que M. le président Gassilloud organisera un débat sur ce document au sein de la commission. (Les amendements identiques nos 1032 et 1067 sont retirés.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 865 et 866.
La parole est à M. Emmanuel Fernandes, pour soutenir l’amendement no 865. Il vise à supprimer la mention au service national universel dans le rapport annexé. Le SNU est en effet un dispositif mal conçu et inutile. Alors que la précarité étudiante ronge les universités et que les files d’attente devant les banques alimentaires s’allongent, le Gouvernement propose à la jeunesse un dispositif coûteux, visant à la discipliner, qui ne remplit aucun objectif de défense, d’éducation ou de cohésion sociale.
Le repas à 1 euro pour tous dans les Crous, les centres régionaux des ?uvres universitaires et scolaires, coûterait 60 millions par an alors que le SNU, s’il était généralisé, coûterait au total, selon un rapport d’information du Sénat publié en mars 2023, plus de 2 milliards par an. Le SNU ne bénéficie pas, c’est le moins qu’on puisse dire, d’une image favorable : propos racistes, punitions collectives – comme à Strasbourg –, sorties en montagne dangereuses et mal encadrées… (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE et RN.) N’importe quoi ! Lisez la presse, qui a rapporté ces faits en divers endroits du territoire.
Il existe de meilleures manières de faire vivre les valeurs et les principes républicains et de développer une culture de l’engagement. Nous soutenons le projet d’une conscription citoyenne qui permettrait de rémunérer au Smic une classe d’âge pendant neuf mois. Cette mobilisation de jeunes adultes, sans casernement, dans des activités militaires ou civiles d’utilité sociale et écologique, pour faire face notamment au bouleversement climatique, nous semble préférable.
Cette conscription permettrait de remédier à l’exclusion du peuple de la gestion des questions de sécurité et de défense… Veuillez conclure. …et d’agir contre la précarisation généralisée de la jeunesse. Loin du gadget folklorique du SNU… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est épuisé. – Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 866. Pour le SNU, vous naviguez à vue, en faisant chaque mois une annonce différente. Il n’est pas question ici de mettre en cause les personnes qui y participent ou l’encadrent avec bonne volonté. Toutefois, nous sentons bien, quand nous discutons avec celles-ci, que le bateau tangue. Qu’adviendra-t-il du SNU ? Prévoyez-vous une nouvelle annonce ?
Madame la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel, je ne sais pas si, comme M. le ministre, vous avez lu le superbe fascicule consacré par La France insoumise à la loi de programmation militaire. (L’orateur agite un document.) Merci, cher collègue, de ne pas utiliser de documents à l’appui de votre propos. Outre que nous aimerions savoir que sera le SNU « dans votre projet », pour reprendre une expression célèbre, nous aimerions débattre avec vous de la conscription volontaire que nous proposons. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ? Précisons tout d’abord que le SNU n’est pas l’objet de la LPM. Même si je comprends que vous profitiez de ces débats pour l’évoquer, comme c’est bien légitime, j’espère que la question ne prendra donc pas une place disproportionnée.
Sur le fond, c’est avec plaisir que je participerai à un débat sur le SNU, quand il sera à l’ordre du jour, et que je vous donne mon avis sur ces amendements. En tant que député de terrain, j’ai suivi de très près l’expérimentation du SNU, dont le Morbihan a été un département pilote. J’ai observé la construction des séquences pédagogiques, écouté les témoignages des jeunes participants et ce que j’ai vu est extraordinaire. Tout doucement, une cohésion impressionnante est apparue grâce à la vie collective. Les jeunes ont beaucoup appris concernant le secourisme, la sécurité routière ou nos institutions ; ils étaient ravis de leur séjour. Le SNU est une belle expérience et j’espère qu’elle sera développée.
En revanche, je suis très réservé quant à votre proposition d’obliger tous les jeunes de France à effectuer un service militaire de neuf mois, car elle leur fermera des occasions d’étudier, de travailler et ainsi de suite. C’est une usine à gaz, dont vous ne chiffrez d’ailleurs pas le coût – le livret que vous agitiez gentiment ne contient aucun chiffre. C’est faux ! C’est un tract sans valeur, qui n’exprime rien de sérieux. Avis défavorable. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel, pour donner l’avis du Gouvernement. Je suis ravie de vous retrouver cet après-midi pour revenir sur un projet qui nous tient à cœur, celui du service national universel, dont 50 000 jeunes volontaires ont bénéficié depuis 2019. Le SNU a lieu dans des territoires qui sont accompagnés, au sein de centres qui sont le plus souvent gérés par des collectivités ou d’éducation populaire, au cours de séjours permettant la mixité sociale et territoriale ainsi qu’un renouveau des mobilités entre les outre-mer et la métropole. Le service national universel est un service civil, un temps et une expérience uniques.
Quant à votre proposition, j’y suis défavorable, puisque le SNU doit continuer à être expérimenté. Cependant, je suis tout à fait ouverte à un débat, qui devra avoir lieu à un moment ou à un autre. Le président de la commission de la défense en a d’ailleurs déjà organisé un, de très grande qualité.
Je me tiens évidemment à la disposition de l’ensemble des groupes et des commissions pour apporter un éclairage plus complet. Surtout, j’invite les parlementaires qui s’intéressent à la question à visiter un centre lors des séjours de cohésion. Eh oui ! Il ne faut pas lire les journaux mais aller sur place ! C’est encore la meilleure manière d’éviter les caricatures malheureuses et les critiques trop rapides. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La parole est à M. Loïc Kervran. En tant que député du Cher, département où le SNU est expérimenté depuis sa création, j’ai accompagné des séjours et même accueilli des jeunes participants pendant vingt-quatre heures – ou un peu moins, justement, parce que lors du SNU, les règles sont respectées.
Je ne comprends pas la mauvaise image dont celui-ci souffre. Quelque 75 % des Français y sont favorables. En réalité, dans ma circonscription, les demandes de participation des jeunes sont trop nombreuses au regard des places disponibles. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe HOR.)
Répétons-le, le SNU est une chance pour les jeunes, pour notre nation, pour la culture de l’engagement. C’est enfin une formidable chance pour les territoires. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes HOR et Dem ainsi que sur quelques bancs des groupes RN et LR.) Très bien ! Je souhaite m’exprimer contre l’amendement ! Le nombre de prises de parole est restreint à une pour, une contre l’amendement. (Les amendements identiques nos 865 et 866 ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Michèle Martinez, pour soutenir l’amendement no 214. Le renforcement du lien entre la nation et l’armée est important pour notre pays. Il importe donc de mentionner dans le rapport annexé le service militaire volontaire (SMV) et le service militaire adapté (SMA), qui sont salutaires pour de nombreux concitoyens et jouent un rôle de tremplin vers la vie professionnelle. Ainsi, au terme du SMA, plus de 76 % des volontaires trouvent un emploi ou s’engagent dans une formation qualifiante.
Ces services permettent également de faire découvrir le monde de la défense et font naître l’envie de s’engager dans l’armée – dans les forces d’active ou en tant que réserviste. Ils méritent donc la même promotion que le service national universel qui, lui, n’entre pas dans le champ de la LPM et n’a pas de vocation militaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission ? Avis de sagesse. Quel est l’avis du Gouvernement ? Sagesse. Même si l’alinéa du rapport indexé choisi pour cette précision n’est pas forcément le plus pertinent, celle-ci montrera l’efficacité et l’utilité des dispositifs visés. La parole est à M. Christophe Blanchet. Six régions de France bénéficient du service militaire volontaire, qui, comme l’ont montré de multiples auditions, constitue une opportunité pour bon nombre d’entre elles et pour bon nombre de jeunes. Il faut dès lors favoriser l’implantation du SMV dans chaque région, pour donner la même chance à tous les jeunes du territoire national. Très bien ! (L’amendement no 214 est adopté.)
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) Je suis saisie de plusieurs amendements identiques, nos 167, 577, 675 et 1339.
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 167. Il vise à supprimer toute mention du service national universel du projet de loi de programmation militaire. En effet, ce service n’est ni national, ni universel ; sa finalité est obscure, ses objectifs ne sont pas clairement définis et il n’est en rien militaire. Il ne correspond à aucun besoin et aucune demande de l’institution militaire, contrairement au SMA et au SMV. La parole est à M. Christophe Bex, pour soutenir l’amendement no 577. Cela a été dit, le SNU est mal conçu et inutile. Alors que la précarité étudiante ronge les universités, que des classes sont fermées dans les écoles et que des centaines de professeurs attendent d’être remplacés, vous promouvez un dispositif coûteux, qui ne vise aucun objectif légitime en matière de défense, d’éducation, d’insertion, de cohésion sociale, de résilience ou de solidarité. Discipliner la jeunesse n’est pas un projet politique.
Si nous refusons le SNU, nous soutenons le projet d’une conscription citoyenne des jeunes adultes, bien différente du service national de ma prime jeunesse. Celle-ci permettrait de rémunérer au Smic une classe d’âge pendant neuf mois, sans encasernement. Les jeunes adultes concernés seraient mobilisés dans des activités civiles, éventuellement militaires, d’utilité sociale et écologique, notamment face au bouleversement climatique.
Une telle conscription serait un tremplin pour beaucoup, un moyen d’insertion et un dispositif égalitaire au service de l’intérêt général – contrairement à l’encasernement des mineurs que vous prévoyez, qui les soumettra à des simulacres d’activités militaires. Elle permettrait en outre à toutes les classes d’âge et à toutes les classes sociales de se retrouver, pour construire demain une société beaucoup plus solidaire. La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 675. Monsieur le rapporteur, vous êtes injuste. Vous n’avez pas lu le livret de La France insoumise sur la loi de programmation militaire, qui évoque le SNU à la page 48… Si, j’ai lu votre fascicule, je l’ai même ici ! Très bien ! Ouvrez-le, il contient de nombreuses informations intéressantes. Surtout, il ne contient aucun chiffre, comme toujours avec vous. C’est faux.
Vous nous avez fait part de votre amour pour le Casimir de « L’Île aux enfants ». Eh bien, le SNU est un gloubi-boulga digne de l’inspecteur Gadget. On ne sait trop où il va, à l’image d’un gouvernement dont les projets manquent de sens sur les plans moral et politique – en matière d’éducation, par exemple.
Au contraire, notre proposition de conscription citoyenne – qui permettra de tourner la jeunesse vers l’action, en la rémunérant – est cohérente avec la planification écologique et avec les positions que nous avons défendues tout à l’heure sur la préservation des pôles ou l’importance de penser l’armée du futur – celle de l’après-pétrole, des défis et des catastrophes liés au dérèglement climatique ; nous proposons ainsi la création de casques bleus climatiques à l’ONU.
Nous proposons ainsi un projet politique global, qui a un sens, celui de la planification écologique, contrairement à vous, qui vous reposez sur des concepts fourre-tout – celui de « mixité sociale » veut tout et rien dire, par exemple, et personne ne sait plus ce qu’il recouvre en l’occurrence ; je serai curieux de savoir ce que vous y mettez.
De même, au niveau budgétaire, le SNU coûtera-t-il vraiment 2 milliards d’euros ? Non ! Donnez-nous donc son coût. Nous voudrions en outre savoir s’il sera financé sur le budget alloué à la LPM. Non ! Très bien ! Expliquez donc à la représentation nationale sur les budgets de quels ministères les sommes seront prélevées. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Exactement ! La parole est à Mme Anna Pic, pour soutenir l’amendement no 1339. Comme les précédents, il vise à supprimer la référence au SNU, puisque celui-ci ne nous semble pas être à même de remplir le rôle qui lui est assigné, du moins dans les formes proposées ces derniers mois, toutes à cheval entre l’éducation nationale et les armées. Le SNU fait l’objet de nombreux débats et suscite le rejet de nombreux enseignants et de nombreux jeunes, notamment dans les syndicats lycéens ; les échos dans son encadrement sont également très mauvais.
La dernière mouture du SNU, dévoilée dans Politis , ne tient même plus compte de l’enjeu de mixité sociale, pourtant mis en avant dans un premier temps. Ce service n’est pas universel, il ne valorise pas l’engagement et ne rapproche pas l’armée et la défense nationale de la jeunesse. Il fait entrer dans l’éducation nationale une symbolique simplificatrice de la discipline militaire, ce qui a pour effet de dévaloriser tant l’armée que l’éducation nationale.
Si nous ne sommes évidemment pas opposés à des projets permettant à toute la jeunesse de s’engager et de vivre des moments collectifs, la participation à ceux-ci doit reposer sur un principe de volontariat, d’engagement choisi et d’émancipation. Quel est l’avis de la commission ? Sans surprise, mon avis sera défavorable. En outre, je m’interroge sur votre projet de conscription citoyenne de neuf mois que vous voulez imposer aux jeunes, alors que certains seront en cours d’études et que d’autres commenceront leur vie professionnelle. Enfin, le contenu des activités envisagées n’a aucun sens. Quel est l’avis du Gouvernement ? Vous m’avez posé des questions claires, auxquelles je vais tenter de répondre. Quel est le budget du SNU et est-il intégré au projet de LPM ? Non, le budget du service national universel a toujours été inscrit au sein du programme 163, Jeunesse et vie associative . Je n’opposerai jamais l’accompagnement et les besoins liés à la précarité des jeunes aux sujets liés à l’engagement. Cette année, le budget s’élève à 140 millions d’euros, en augmentation par rapport aux 110 millions d’euros de l’an dernier. De même, le budget de l’éducation nationale est en hausse. Enfin, vous débattez d’un projet de LPM afin de doter nos armées face aux nouvelles menaces et, je le répète, le budget du SNU n’est pris ni sur celui de l’éducation nationale ni sur celui de nos armées. Eh oui… Il s’appuie sur les acteurs qui accompagnent, comme ceux de l’éducation populaire qui l’encadrent. Ils viennent de la Ligue de l’enseignement, des Francas, de la fédération Léo Lagrange. Ah oui ? Ils accueillent ces jeunes dans leurs centres. Y a-t-il du casernement, pour reprendre votre terme ? Non. Ces jeunes vivent-ils en internat ? Oui.
Le SNU est un temps civil, organisé en trois grands moments : un séjour de cohésion qui dure treize jours, une mission d’intérêt général où l’on découvre l’engagement sur son propre territoire, qui dure quatre-vingt-quatre heures ou douze jours, et un engagement volontaire qui dure de trois mois à un an, qui peut être un service civique, un engagement au sein de nos réserves ou une mission de coopération internationale. Le SNU peut être effectué à partir de 16 ans.
Je ne vois pas en quoi notre projet de service national universel serait en contradiction ou en opposition avec votre proposition, qui commence à 18 ans. Votre seul but semble être de supprimer cette opportunité pour les jeunes,… Exactement ! …alors qu’ils ont le droit de participer volontairement à un projet patriotique et d’engagement, sans qu’on méprise la forme de leur engagement. Les 50 000 jeunes qui ont participé au SNU sont particulièrement heureux de l’avoir fait, neuf jeunes sur dix se déclarant très satisfaits.
Le SNU fait grandir notre jeunesse et lui permet de découvrir d’autres départements et des formes d’engagement qui prennent parfaitement leur place dans leur parcours de citoyenneté. Avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – M. Nicolas Forissier applaudit également.) J’ai sept demandes de prise de parole. Il convient de les équilibrer. Je vous propose donc de prendre deux orateurs pour et deux orateurs contre les amendements. Cela vous convient-il ? J’ouvre le débat car je l’estime nécessaire.
La parole est à M. Jean-Louis Thiériot. Je reconnais que le SNU pose un problème : beaucoup de jeunes voudraient le faire et ne le peuvent pas ! C’est vrai. Quelle est mon expérience du SNU ? C’est une fierté retrouvée pour ceux qui y participent. Ainsi, j’étais à l’Arc de Triomphe avec des jeunes, participant au SNU, qui venaient de banlieue en uniforme et rendaient hommage au soldat inconnu. C’est la belle jeunesse de France ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RE, Dem et HOR.)
J’ai vu des jeunes participant au SNU dans mon département de Seine-et-Marne, de toutes les origines, et qui, grâce au dispositif, découvraient une mixité qu’ils n’auraient jamais connue autrement. Enfin, j’ai constaté l’efficacité du dispositif : parmi les jeunes en SNU à Montereau, dans ma circonscription, qui ne connaissaient donc pas la marine nationale, trois sont désormais réservistes de la marine. Madame la secrétaire d’État, merci de soutenir un tel dispositif !
En outre, et c’est heureux, le SNU n’est pas financé sur les crédits prévus par le projet de LPM. Eh oui ! Si tel avait été le cas, je m’y serais opposé. Je suis donc fermement contre ces amendements.
Enfin, soyons sérieux : vous proposez une conscription payée au Smic à une cohorte de 700 000 jeunes. L’argent des Français, celui des contribuables, ce n’est visiblement pas votre souci, messieurs de La France insoumise ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RE, Dem et HOR. – M. Pierrick Berteloot applaudit également.) La parole est à M. Christophe Blanchet.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l’amendement no 1488. Je serai bref car nous avons déjà débattu de cette question. Cet amendement rédactionnel vise à supprimer l’adjectif possessif « nos », placé devant « outre-mer ». L’amendement no 1667 de M. Aurélien Saintoul est défendu.
La parole est à M. Jean-Michel Jacques, rapporteur de la commission de la défense nationale et des forces armées, pour donner l’avis de la commission sur ces amendements identiques. Ils visent à supprimer l’adjectif possessif « nos », qui, selon vous, serait empreint de paternalisme. Or je vous appelle « mon cher collègue » de manière très respectueuse et affectueuse. On n’a pas la même histoire ! Pas de déclaration d’amour dans l’hémicycle ! Il en va de même lorsque je parle de nos territoires d’outre-mer et de nos régions. Avis défavorable. La parole est à M. le ministre des armées, pour donner l’avis du Gouvernement. Cette question dépend de la personne qui s’exprime et de la manière dont elle le dit. En outre-mer, j’ai souvent entendu les personnes y vivant parler de « nos outre-mer », je le dis sous votre contrôle, monsieur le député, comme on évoque souvent « nos régions », « nos campagnes », « nos territoires ». Il importe surtout de remplacer toutes les occurrences du mot « métropole » par le mot « Hexagone ». Cette correction est importante. Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j’émettrai un avis défavorable. La parole est à M. Bastien Lachaud. J’entends bien vos arguments. Malheureusement, monsieur le rapporteur, vous et moi, issus de la France métropolitaine hexagonale, n’avons pas la même histoire que les habitants d’anciennes colonies, devenues des territoires ultramarins. Nous maintenons donc l’amendement. (Les amendements identiques nos 1488 et 1667 ne sont pas adoptés.) Je suis saisie de cinq amendements, nos 263, 56, 845, 1654 rectifié et 311, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 56, 845 et 1654 rectifié sont identiques.
Sur l’amendement no 263, je suis saisie par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-Louis Thiériot, pour le soutenir. Cet amendement de ma collègue Christelle D’Intorni vise à souligner que se greffe bien entendu à l’enjeu des outre-mer celui des zones économiques exclusives – ZEE –, qui sont un des éléments majeurs de la puissance française. En effet, grâce aux ZEE, nous sommes la deuxième puissance maritime du monde.
Par conséquent, après le mot « outre-mer », nous suggérons d’insérer les mots « , particulièrement nos zones économiques exclusives (ZEE) ». Cet amendement tend à souligner à quel point les ZEE sont un élément important des ambitions maritimes françaises et justifient les moyens que nous allouons à notre marine outre-mer. Très bien ! La parole est à Mme Caroline Colombier, pour soutenir l’amendement no 56. Notre zone économique exclusive a été l’un des angles morts des débats en commission. Elle est pourtant un élément essentiel de notre politique de protection du territoire national. La ZEE de la France est la deuxième plus importante du monde, après celle des États-Unis, puisqu’elle s’étend sur une superficie de plus de 11 millions de kilomètres carrés. Il faut donc tenir compte de la tyrannie des distances et défendre nos eaux territoriales, les zones de pêche et les ressources minérales. À ce titre, la ZEE, qui constitue un point stratégique de notre politique de défense et de sécurité nationale, est, en réalité, un outil phare de projection et de rayonnement de nos armées. Ce territoire est essentiel pour notre activité économique, en raison de ses ressources naturelles énergétiques et halieutiques.
Ainsi, cet amendement vise à inscrire dans la loi que la protection du territoire national ne doit pas faire l’impasse sur notre ZEE, tout particulièrement dans le contexte de la montée en puissance de la Chine et de la Russie. Nous proposons, après le mot « outre-mer », d’insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) ». Très bien ! La parole est à Mme Gisèle Lelouis, pour soutenir l’amendement identique no 845. Il vise également à insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) », après le mot « outre-mer » dans le rapport annexé. Vous remarquerez que, sur ce sujet, les amendements du groupe RN, de la manière dont ils sont rédigés, s’intègrent plus facilement dans le rapport annexé que l’amendement du groupe LR – du reste, Mme D’Intorni brille par son absence.
Nous sommes plusieurs à insister sur cette question ; tant mieux ! La France est grande : elle possède la deuxième plus importante ZEE du monde – près de 11 millions de kilomètres carrés – après celle des États-Unis. Il est nécessaire, dans ce texte, d’en rappeler l’importance, fortement liée à nos territoires ultramarins. En effet, la France n’est pas une nation européenne fermée sur ce continent, mais une nation mondiale avec de nombreux territoires maritimes. Nos ZEE font la grandeur de notre pays et la puissance de nos ambitions. Leur contrôle est un enjeu majeur de souveraineté, en particulier quand nos ressources, notamment halieutiques, sont exploitées par vous savez qui au large de Saint-Pierre-et-Miquelon, en violation du droit international. Nous devons préserver nos droits souverains en matière d’exploitation, d’exploration, de conservation et de gestion des ressources naturelles biologiques – ou non – de nos fonds marins, y compris de leur sous-sol, et de recherche et de préservation de notre milieu marin.
Que ferez-vous pour l’île de Clipperton, dans l’océan Pacifique, qui nous rapporte tant mais dont la souveraineté est constamment violée, au même titre que la ZEE qui l’entoure, par des pêcheurs étrangers, qui n’ont pas le droit d’exercer leur activité, ou des trafiquants en tout genre ? Sa zone économique exclusive s’étend sur 450 000 kilomètres carrés. Son potentiel halieutique, mal connu, est regardé avec attention par d’autres, tout comme les nodules polymétalliques contenant les terres rares – le nouvel or noir. L’État sera-t-il au rendez-vous géostratégique de l’histoire, en étant favorable à mon amendement ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) La parole est à M. Christophe Blanchet, pour soutenir l’amendement no 1654 rectifié. Il vise également à insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) », après les mots « ensuite, il s’agit d’améliorer notre contribution à la protection du territoire national, singulièrement de nos territoires d’outre-mer ».
Les problèmes relatifs à la pêche et au développement durable ont été évoqués. Je souhaite insister sur la question des hydrocarbures, qui, demain, pourraient être source de conflits, notamment dans les îles Éparses. Leurs fonds regorgent de l’équivalent de 15 milliards de barils de pétrole et de 5 milliards d’euros de réserves de gaz naturel, ce qui représente 2 000 milliards d’euros potentiels. Demain, ces fonds pourraient susciter des convoitises, si nous ne montrons pas que nous les protégeons véritablement et que nous ne laisserons personne polluer ces territoires, porter atteinte à l’environnement ou entacher notre souveraineté, en récoltant le fruit de ces gisements. Voilà pourquoi nous devons mentionner les ZEE dans le rapport annexé. La parole est à Mme Laurence Robert-Dehault, pour soutenir l’amendement no 311. Les zones économiques exclusives françaises revêtent un caractère stratégique en raison des atouts que représentent leurs ressources disponibles, mais également leur environnement et leur biodiversité marine. Certains de ces territoires sont menacés par des revendications territoriales ou se situent dans des zones marquées par une résurgence des tensions géopolitiques.
Ces questions sont loin d’être théoriques, puisque les ZEE françaises de l’Indo-Pacifique sont régulièrement violées par d’autres États. Depuis 2012, au mépris le plus total de la souveraineté française, le président comorien délivre des permis d’exploration d’hydrocarbures dans le périmètre de la ZEE de Mayotte et des pêcheurs malgaches violent régulièrement les ZEE françaises autour des îles Éparses. En Guyane et aux Antilles françaises, il est également du devoir de la France d’assurer l’intégrité des ZEE et la sécurité de millions de nos compatriotes français, confrontés aux narcotrafiquants et aux pirates qui sévissent dans cette zone.
L’insuffisante protection de nos ZEE a été soulignée dans un rapport sénatorial sur la stratégie maritime nationale, publié en 2022, qui relève le sous-dimensionnement de la flotte française chargée de la protection des zones maritimes. En effet, la souveraineté n’existe réellement que si la France est en mesure de contrôler et d’intervenir en permanence, afin de dissuader les éventuelles revendications territoriales ou les pilleurs de ressources. La question des moyens affectés à ces missions est plus que jamais un enjeu stratégique.
L’objet de cet amendement est donc d’inscrire explicitement, au sein du rapport annexé, l’objectif de renforcement de la protection de nos ZEE. Ainsi, à la première phrase de l’alinéa 8, après le mot « outre-mer », nous proposons d’insérer les mots « et de nos zones économiques exclusives (ZEE) ». (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ? J’émets un avis favorable sur l’ensemble de ces amendements, sauf sur celui de Mme D’Intorni, qui vise à insérer les mots « plus particulièrement » devant « ZEE ». De mon point de vue, cette mention ne se justifie pas car il s’agit de préserver tout autant les territoires d’outre-mer. Quel est l’avis du Gouvernement ? S’agissant de la méthode retenue dans le cadre de nos débats, je rendrai des avis plus succincts. Cette nuit, nous avons démontré que nous prenions le temps de débattre de sujets graves et importants, tels que la dissuasion nucléaire. Nous allons enchaîner l’examen d’amendements qui, s’ils donneront lieu à des débats légitimes, auront un effet limité sur le fond du projet de loi.
Sur le fond, je suis favorable à tous ces amendements visant à mentionner les ZEE. M. Blanchet a rectifié la rédaction de son amendement, qui soulevait une question d’accord au singulier ou au pluriel. En tout état de cause, il importe que cet alinéa fasse référence aux ZEE, d’autant que cela valorisera le travail accompli par la marine nationale. La parole est à M. Jean-Louis Thiériot. Si la rédaction de l’amendement de Mme D’Intorni pose problème, je propose de la rectifier, puisque nous en avons la possibilité, en supprimant le mot « plus particulièrement ». La parole est à M. Davy Rimane. Le principe de l’ajout de la mention relative aux ZEE ne pose pas de problème. Toutefois, il ne faut pas qu’on donne l’impression que les territoires dits d’outre-mer ne représenteraient, pour la France, qu’un bénéfice en termes de ZEE. Exactement ! En effet, lorsqu’on écoute la majorité d’entre vous, il n’y a que cela qui importe.
Or je rappelle que, comme certains, ici, ont pu le dire, ces territoires souffrent d’un sous-développement chronique, d’une importante pauvreté et d’une très grande faiblesse économique. Il est bien beau d’évoquer les ZEE, mais qu’en est-il des moyens de développement ? Les territoires d’outre-mer ne peuvent pas être uniquement les béquilles vertes ou bleues de la France hexagonale. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES. – M. Bastien Lachaud applaudit également.) L’amendement no 263, tel qu’il vient d’être rectifié par M. Thiériot, étant désormais identiques aux autres amendements, les nos 56, 845 et 1654 rectifié, je mets aux voix les quatre amendements. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 91
Nombre de suffrages exprimés 84
Majorité absolue 43
Pour l’adoption 84
Contre 0 (Les amendements identiques no 263, tel qu’il vient d’être rectifié, nos 56, 845 et 1654 rectifié sont adoptés. En conséquence, l’amendement no 311 tombe.) Très bien ! La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 228. Il s’agit, ici, de mentionner les missions de contrôle de zone, ce dernier terme étant entendu au sens militaire. Je pense en particulier à la zone indo-pacifique, comme on dit maintenant. Dès lors qu’elle pourrait être le théâtre d’un conflit majeur entre les États-Unis et la Chine, nous devons y être présents d’une manière ou d’une autre.
Mais ce n’est pas tout d’affirmer des principes ; encore faut-il se donner les moyens de les appliquer et de protéger nos zones, lesquelles abritent notamment des ressources halieutiques, que des pêcheurs qui n’auraient pas de droit à pêcher pourraient venir piller,… C’est déjà le cas ! …ou d’autres ressources naturelles que nous pourrions, comme l’expliquait à l’instant notre collègue Blanchet, exploiter demain, car il ne s’agit pas de les laisser en friche. Pour cela, il nous faut des navires. Si j’ai bien compris, le projet de loi de programmation militaire (LPM) prévoit trois patrouilleurs outre-mer. Sera-ce suffisant, monsieur le ministre ? Certes, ces navires ne sont pas les seuls à pouvoir intervenir, mais ceux-ci sont les mieux adaptés à ce type de mission.
Au-delà de la pétition de principe, qui peut nous réunir, je souhaiterais savoir si nous disposerons des moyens adéquats pour contrôler ces territoires gigantesques. Plusieurs l’ont déjà dit, notre zone économique exclusive est la deuxième du monde, derrière celle des États-Unis. Quel est l’avis de la commission ? Vous évoquez la surveillance de la zone indo-pacifique et, de façon générale, de notre espace maritime, le deuxième du monde, vous l’avez rappelé. Toutefois, il serait trop réducteur de ne mentionner qu’elle : si l’on en cite une, il faut les citer toutes. La zone indo-pacifique n’est pas mentionnée dans l’amendement ! Quant à la surveillance de l’ensemble des zones, elle s’exerce, grâce à notre modèle d’armée, qui est complet, dans l’espace maritime et l’espace aérien, à l’aide de différents matériels, qui ne se limitent pas aux patrouilleurs maritimes. Avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Nous aurons un long débat sur l’outre-mer ultérieurement ; nous devons prendre le temps nécessaire pour en discuter. Ce sera le cas, non pas, hélas ! lors de l’examen des tableaux relatifs aux contrats opérationnels – le nombre d’amendements déposés sur cette partie du rapport annexé n’est pas assez important –, mais lors de l’examen des tableaux capacitaires.
Dans votre amendement, monsieur Le Fur, vous désignez une des missions que peuvent remplir les armées : le contrôle de zone, lequel peut être maritime ou aérien. En réalité, il ne suffit plus. C’est pourquoi les manœuvres de renseignement – dont nous traiterons plutôt lors de la discussion de la partie normative du projet de loi – sont importantes.
De fait, nous devons réfléchir à ce que seront ces contrôles, demain. Ont été évoquées avec raison la tyrannie des distances et l’immensité des zones concernées. De fait, l’ensemble des dispositifs que nous vous proposons dans le domaine spatial auront, on le voit bien, un rôle majeur à jouer dans le contrôle de la zone économique exclusive de la Polynésie française ou dans la lutte contre l’orpaillage illégal en Guyane, par exemple – autant d’enjeux qui doivent être pris en compte.
Pourquoi mentionner uniquement le contrôle de zone, et non pas le contrôle du ciel, les manœuvres de renseignement ou les manœuvres spatiales ? La rédaction de l’amendement est trop précise. Nous entrons là – je pense d’ailleurs à un autre de vos amendements portant sur la défense opérationnelle du territoire (DOT) – dans le concret opérationnel des armées. En la matière, il faut que nous prévoyions, à chaque fois, les moyens capacitaires correspondants : en l’espèce, des patrouilleurs – vous l’avez dit –, mais aussi des drones. Nous devons en effet, je crois, déployer les nouvelles technologies d’abord dans les territoires d’outre-mer, alors que ceux-ci ont longtemps été les derniers servis. C’est une question clé.
Nous devons également développer, lorsqu’elle est possible – il arrive qu’elle ne soit absolument pas recommandée –, la coopération avec certains pays voisins. Nous aurons l’occasion d’y revenir.
En conclusion, compte tenu notamment de l’emplacement de l’amendement, demande de retrait ou avis défavorable. Maintenez-vous cet amendement, monsieur Le Fur ? Je crois que M. Rimane demandait la parole. Je vois que vous n’avez pas perdu vos réflexes de vice-président, mon cher collègue ! (Sourires.) Quoi qu’il en soit, il ne pourra pas la prendre car je vais retirer l’amendement, compte tenu des réponses qui m’ont été données, même si celles-ci ne sont que partiellement satisfaisantes. Pourquoi ? J’ai évoqué l’exemple de la zone indo-pacifique, mais celle-ci ne figure pas dans le texte de mon amendement, qui porte sur l’ensemble des zones. Oui, bien sûr ! De surcroît, j’ai bien écrit « notamment », de manière à insister sur un point sans exclure les autres – c’est le sens de cet adverbe.
J’aurais souhaité que cet amendement soit adopté, car il convient de veiller à ce que, au-delà des pétitions de principe qui nous rassemblent, nous ayons les moyens adéquats pour exercer ces missions. Mais nous aurons ce débat ultérieurement. Je retire donc l’amendement, en m’excusant auprès de mon excellent collègue de nos outre-mer. (Sourires.) Quelle concorde, cet après-midi ! (L’amendement no 228 est retiré.) La parole est à M. Laurent Panifous, pour soutenir l’amendement no 1036. Il s’agit de faire évoluer le système des missions de courte durée (MCD) des forces terrestres déployées dans les territoires ultramarins, en portant leur durée, qui est actuellement de quelques semaines, à trois ans. Nous manifesterions en effet notre volonté d’assurer la continuité territoriale de notre défense en privilégiant les affectations en famille et en renforçant l’ancrage territorial de nos militaires. Quel est l’avis de la commission ? Demande de retrait ou avis défavorable. Je comprends votre démarche, mais les missions de courte durée correspondent à des besoins opérationnels précis. Quel est l’avis du Gouvernement ? Je comprends votre intention, mais il s’agit d’une fausse bonne idée. Au fond, ce n’est pas tant la durée du séjour qui compte que les besoins opérationnels dans les différents territoires. Des forces de souveraineté y sont prépositionnées en permanence, auxquelles s’ajoutent, selon les besoins, des renforts en provenance de l’Hexagone. C’est notamment le cas lorsqu’il faut durcir un contrôle de zone, dans le cadre de l’opération Harpie, par exemple.
Pour le dire de manière directe, sans langue de bois, il faut avoir de cette question une approche en termes non pas de ressources humaines mais de sécurité des territoires d’outre-mer : c’est l’opérationnel qui doit déterminer le format des forces – dont j’ai indiqué qu’elles seraient en augmentation, à bien des égards. Il y aura donc toujours un mix entre longs et courts séjours. Demande de retrait. Maintenez-vous l’amendement, monsieur Panifous ? Oui. (L’amendement no 1036 n’est pas adopté.) La parole est à M. Tematai Le Gayic, pour soutenir l’amendement no 1050. Nous souhaitons insister sur l’importance de coordonner l’ensemble des stratégies, notamment la stratégie indo-pacifique, avec les collectivités locales et les députés de l’ensemble des territoires d’outre-mer. En effet, ces stratégies ne doivent pas être élaborées sans ces territoires. Nous ne voulons pas être uniquement des porte-avions ou des ponts pour la France hexagonale ; nous voulons que ces stratégies servent d’abord le rayonnement des outre-mer, puis, par ruissellement, la France hexagonale. Mauruuru ! Quel est l’avis de la commission ? Nous aimons trop nos territoires d’outre-mer pour que je vous laisse dire que la France les considère uniquement comme des porte-avions. Vous voulez dire que, nous, nous ne les aimons pas ? (Sourires.) Puisque nous aborderons cette question ultérieurement, et nous serons alors très heureux d’en débattre, je vous demande de bien vouloir retirer l’amendement. Mauruuru ! Quel est l’avis du Gouvernement ? Défavorable. Maintenez-vous l’amendement, monsieur Le Gayic ? J’aimerais, monsieur le ministre, que vous me donniez les raisons pour lesquelles votre avis est défavorable. J’ai compris que nous discuterions des outre-mer plus tard. Ce n’est pas moi qui ai choisi que mon amendement soit examiné à ce moment-là… Si, c’est vous qui avez choisi de le déposer à cet endroit-là du texte ! …mais le service de la séance. Vous avez tout de même choisi de le déposer sur cette partie du rapport annexé. Cependant, je veux bien faire l’effort de le retirer si, plus tard, monsieur le ministre, vous acceptez d’évoquer les outre-mer. Oui ! (L’amendement no 1050 est retiré.) La parole est à M. Mickaël Bouloux, pour soutenir l’amendement no 1334. La France est une grande puissance, mais elle a besoin d’alliés pour exercer son influence sur tous les océans. Aussi nouer des partenariats avec les pays voisins de nos territoires ultramarins est-il nécessaire pour défendre nos intérêts vitaux. La LPM doit donc être l’occasion de clarifier la stratégie de présence militaire menée en partenariat, je pense aux pays de l’Association of Southeast Asian Nations, l’Asean, dont la France se rapproche diplomatiquement. En témoigne son entrée en tant que membre observateur à la réunion énergie des ministres de la défense.
Ces partenariats devront s’accompagner d’une stratégie globale, y compris commerciale avec les pays limitrophes, afin d’assurer autant que possible une interopérabilité entre leurs équipements et les nôtres. Quel est l’avis de la commission ? Cet amendement répond en quelque sorte à celui qu’a défendu tout à l’heure M. Le Fur. Il est vrai que, concernant ces zones à surveiller, le partenariat est un appui très important. Toutefois, il en sera question plus tard dans le rapport annexé et, en outre, votre amendement est satisfait. C’est donc un avis défavorable ou une demande de retrait. Quel est l’avis du Gouvernement ? L’amendement étant en effet satisfait, c’est également une demande de retrait ou un avis défavorable. J’ajouterai que le mot « interopérabilité » correspond à une réalité militaire particulière, et que ce n’est pas le terme que j’emploierais ici. La parole est à Mme Caroline Colombier. Même en s’entendant bien avec certains pays, nous ne pouvons pas pratiquer l’interopérabilité avec n’importe qui, et cet amendement nous paraît donc curieux. (L’amendement no 1334 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 1440 rectifié. À une époque où les frontières entre acteurs étatiques et non étatiques dans les conflits deviennent de plus en plus floues, il est impératif de répondre au défi posé par la prolifération des mercenaires et des sociétés militaires privées. Nous en avons débattu récemment et condamné les exactions de la milice Wagner.
Ces entités, agissant souvent en dehors des cadres légaux, posent de sérieuses questions de responsabilité, d’éthique et de sécurité. L’histoire a maintes fois prouvé les dangers d’une telle prolifération, et l’utilisation de ces acteurs par certains États ou entités peut mener à une dissolution de la responsabilité, à une augmentation de la violence et à une déstabilisation à large échelle. Les sociétés militaires privées agissent avec impunité, suscitant des conflits au lieu de les résoudre et alimentant l’instabilité au lieu de la réguler.
Il est de notre responsabilité, en tant que législateur, de protéger nos nations et nos citoyens contre ces risques. C’est là que réside l’importance de cet amendement proposé par le groupe Écologiste. Il ne s’agit pas seulement d’une question de sécurité, mais aussi d’une question de principe et de valeurs. Si nous ne prenons pas les mesures nécessaires pour réguler ces acteurs, nous abandonnons notre engagement en faveur de la justice et de la paix.
Nous exprimons notre volonté d’entamer la négociation de traités spécifiques, dans le cadre d’une démarche proactive, visant à prévenir l’exploitation de ces acteurs des théâtres d’opérations par des entités malveillantes et à limiter les dégâts potentiels qu’ils peuvent causer. Nous ne pouvons pas attendre que les problèmes se posent pour agir. Il est temps de prendre des mesures préventives pour protéger nos sociétés et maintenir la paix. Quel est l’avis de la commission ? La question des milices paramilitaires, comme Wagner, est d’autant plus importante qu’elles sont présentes non seulement en Ukraine mais aussi, très largement, au Sahel et en Afrique. Cela étant, nous luttons déjà contre ces mercenaires, qui participent de ce que l’on nomme la guerre hybride ; en outre, votre demande n’a pas à figurer dans le rapport annexé mais relève, en vertu de l’article 52 de la Constitution, du Président de la République. J’émettrai donc une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Bien évidemment, le Parlement a, lui aussi, tenu à se faire entendre, avec la résolution récente que vous avez adoptée. (Approbations sur les bancs du groupe GDR-NUPES.) C’était un signal on ne peut plus clair et, pour le coup, vous m’accorderez que la France joue un rôle moteur dans ce domaine.
Nous pourrons en reparler en commission des affaires étrangères ou en commission de la défense mais, en toute rigueur, le rapport annexé a pour objet de définir le format des armées françaises, dont ne font évidemment pas partie les milices ou les mercenaires. Dans la mesure, par ailleurs, où nos orientations internationales et diplomatiques sont connues, ce sera également une demande de retrait ou un avis défavorable, même si je partage votre amendement sur le fond. Sur l’amendement no 453, je suis par le groupe Renaissance d’une demande de scrutin public.
Sur les amendements identiques nos 1178 et 1179, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Bastien Lachaud. Le groupe Renaissance a, avec d’autres, jugé utile et nécessaire de faire adopter par cette assemblée une résolution demandant au Gouvernement d’inscrire l’organisation Wagner sur la liste des organisations dites terroristes, résolution qui a recueilli notre unanimité. L’amendement du groupe Écologiste s’inscrit dans la même veine, puisqu’il invite le Gouvernement à agir en créant un traité international interdisant ces organisations.
Hier soir, nous avons tous, hormis le Rassemblement national, adopté un amendement rappelant nos engagements dans le cadre du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires (TNP)… Parce que nous sommes une puissance dotée ! C’est cela qui fait le lien avec nos armées. En effet, monsieur le ministre, mais l’interdiction des milices privées dans le droit international est un réel enjeu pour nos forces armées, dans la mesure où cela influera sur la manière dont elles auront à se comporter face à d’éventuels compétiteurs ou agresseurs. Si Wagner était condamnée par le droit international, les choses se passeraient autrement en Afrique, et le modèle d’armée que nous y déployons serait donc différent.
Cet amendement a logiquement toute sa place dans ce texte, et il serait totalement incompréhensible que notre assemblée rejette l’idée d’un traité international pour interdire le mercenariat, quinze jours après avoir condamné la milice Wagner. J’avoue donc, monsieur le ministre ne pas comprendre le raisonnement qui vous pousse à rejeter cet amendement, qui appelle au respect du droit international et réitère les engagements de la France en la matière. Il n’y a absolument aucune raison de voter contre. (L’amendement no 1440 n’est pas adopté.) La parole est à M. Nicolas Metzdorf, pour soutenir l’amendement no 453. Monsieur le ministre, à la lecture du projet de LPM, on voit que vous n’avez pas oublié vos premières amours, les outre-mer : vous leur dédiez 13 milliards d’euros, 800 millions d’euros pour la modernisation des infrastructures, et 800 militaires supplémentaires – merci pour ces moyens.
L’objet de cet amendement est de préciser davantage la stratégie de la nation concernant les outre-mer. On parle souvent de les protéger, de garantir leur souveraineté ou de les défendre contre la pêche illicite, mais ces territoires peuvent également être utiles à la France, notamment en servant de relais à la politique nationale. Ils lui permettent d’asseoir sa diplomatie et ses positions militaires dans les régions où ils sont situés. C’est la raison pour laquelle l’amendement prévoit que la politique militaire de la nation s’appuie sur les outre-mer, dont la seule vocation n’est pas d’être des territoires protégés, mais qui servent pleinement la nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.) Quel est l’avis de la commission ? Avis favorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Même avis. La parole est à M. Davy Rimane. Nous soutiendrons sans problème cet amendement. Je souhaite simplement ajouter que, lorsqu’il y a des échanges diplomatiques avec des pays voisins de nos territoires, nos élus, parlementaires ou élus locaux, ne font pas partie des délégations, ce qui est très dommage. On est donc loin aujourd’hui de s’appuyer sur les outre-mer comme le demande M. Metzdorf. La parole est à M. Laurent Jacobelli. Nous n’avons pas non plus de problème de principe avec cet amendement, d’autant que les territoires d’outre-mer sont partie intégrante de la République – j’ai d’ailleurs été choqué par l’emploi qu’a fait tout à l’heure du verbe « enraciner » l’un de nos collègues du groupe LIOT, qui semblait perdre de vue, en les distinguant, que les outre-mer, c’est la République, et que la République, ce sont les outre-mer.
Cela me gêne ; me gêne encore plus le fait que l’amendement laisse penser qu’il s’agirait de s’appuyer exclusivement sur les territoires d’outre-mer. Il aurait suffi d’ajouter l’adverbe « notamment » pour corriger cet amendement, en l’état extrêmement mal rédigé malgré ses intentions louables. Je mets aux voix l’amendement no 453. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 111
Nombre de suffrages exprimés 80
Majorité absolue 41
Pour l’adoption 79
Contre 1 (L’amendement no 453 est adopté.)
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) La parole est à M. Laurent Jacobelli, pour soutenir l’amendement no 312. Je vais attendre, pour le présenter, que tout le monde se calme, car c’est un peu compliqué autrement. (M. Laurent Jacobelli semble gêné par le léger brouhaha qui suit le scrutin public.) Je vous trouve assez injuste, monsieur Jacobelli, car l’ambiance est extrêmement calme, cet après-midi ! Si vous le dites… Notre base industrielle et technologique de défense (BITD) doit être protégée des malveillances extérieures, on le sait aujourd’hui. Les attaques cyber, en particulier, peuvent être très nuisibles – on l’a notamment vue avec la frégate britannique intentionnellement endommagée fin 2022, alors qu’elle était en chantier. Notre BITD n’est pas à l’abri de telles attaques et constitue, on le sait, une cible pour certains États étrangers mais aussi pour des organisations non gouvernementales, des militants ou, tout simplement, des concurrents. Cela pourrait avoir de graves conséquences en termes de retard ou de défaillance dans les livraisons de matériel.
Pour nous prémunir contre ces actes, nous proposons donc d’ajouter à la fin de l’alinéa 8 que « La protection des capacités de production de recherche et de développement d’exportation de notre BITD fera l’objet d’une attention particulière ». Quel est l’avis de la commission ? Cet amendement est déjà satisfait du fait, notamment, du travail de la direction du renseignement et de la sécurité de la défense (DRSD) et de la direction générale de la sécurité intérieure (DGSI), qui protègent notre BITD. D’ailleurs, il ne faut pas hésiter, comme j’ai déjà eu l’occasion de le faire, à aller, sur le terrain, rencontrer les personnels de la DRSD et de la DGSI. Cela permet ensuite de faire le lien avec les entreprises, et c’est important.
C’est donc une demande de retrait. Quel est l’avis du Gouvernement ? Cet amendement traite d’une question que nous avons eu récemment l’occasion d’évoquer avec la délégation parlementaire au renseignement (DPR). J’ignore s’il s’agit d’un amendement d’appel, il permet en tout cas d’aborder le sujet devant vous. Cela dit, vous connaissez mon avis sur le fait d’alourdir le rapport annexé avec ce que Marc Le Fur qualifiait tout à l’heure de vœux ou de pétitions.
Quoi qu’il en soit, il est clair que, avec l’accroissement de la compétition entre les États, on est passé d’un espionnage économique « classique », qui méritait déjà, en tant que tel, des réponses ad hoc, à des manœuvres relevant plus de l’ingérence, voire du sabotage ou de la destruction. C’est un enjeu d’autant plus essentiel que notre BITD est étroitement imbriquée dans notre modèle d’armée.
Il existe à cela plusieurs types de réponse, la première étant évidemment très régalienne et renvoyant, comme l’a dit le rapporteur, à la DRSD. Nous traiterons plus tard des questions de renseignement, mais disons d’ores et déjà qu’il était temps de renforcer les moyens de cette direction. Un travail important a été entrepris par le général Bucquet, puis par le général Susnjara pour la faire monter en puissance, à quoi s’ajoute le doublement de son budget – cela a été largement documenté en DPR et je n’en dis pas plus.
Il faut ensuite réfléchir – et j’ai missionné sur cette question la direction générale de l’armement (DGA) – à la manière dont les industriels doivent s’organiser face à cette menace. Je pense ici aux mécanismes de redondance : si une machine unique est sabotée, c’est l’ensemble de la chaîne de production qui s’effondre. Or, avec la fin de la guerre froide, le recours à la redondance est un réflexe qui s’est perdu. C’est pourquoi Emmanuel Chiva, le délégué général pour l’armement, s’emploie actuellement à développer un plan qui concerne toutes les entreprises du secteur : celles-ci, comme l’État qui les protège, ont des obligations. L’industrie de l’armement n’est pas une industrie comme les autres et doit, en conséquence, faire preuve de diligence ; pour le dire vite, on constate un progrès général, avec une acculturation plus ou moins rapide selon les entreprises.
Je demande donc le retrait de l’amendement, à défaut de quoi l’avis sera défavorable. Vous pointez du doigt un élément important, mais si je donnais un avis favorable à tous les amendements de ce genre, nous aboutirions, à l’issue de l’examen du texte, à un rapport annexé de 600 pages, ce qui le rendrait parfaitement illisible. Revenons-en à ce qui est l’essence d’un rapport annexé : un document sur le format de nos armées. La parole est à M. Loïc Kervran. Pour avoir traité de ces sujets pendant de nombreuses années au sein de la DPR, je puis vous confirmer que la pression sur notre BITD ainsi que les volontés de pillage ou de sabotage sont très importantes. Cela étant, je ne suis pas convaincu que l’ajout d’une phrase au rapport annexé y changerait quelque chose.
Toujours en ma qualité d’ancien membre de la DPR, mais aussi de la commission de vérification des fonds spéciaux (CVFS) de l’Assemblée nationale – je salue d’ailleurs notre collègue Colombier, qui m’y a succédé –, j’ajoute que nous pouvons faire confiance à nos services, particulièrement à la DRSD et à la DGSI, lesquels sont très actifs sur ces questions, et ce, j’insiste, alors qu’ils font face à une pression et à une adversité très importantes. La parole est à M. Bastien Lachaud. Monsieur le ministre, au moins nous confirmez-vous les propos que tenait mon collègue Saintoul hier sur l’existence d’une guerre économique larvée qui menace nos entreprises et nos industries, c’est-à-dire notre BITD. On ne l’avait pas attendu ! En effet, il ne s’écoule pas un mois sans que l’un de nos fleurons passe sous contrôle étranger. Sous contrôle étranger : carrément ! De la même manière, il ne passe pas quelques mois, ou quelques années, sans que soit révélé un scandale d’espionnage concernant nos entreprises et impliquant des pays que nous considérons comme nos alliés. Le scandale Alstom est à cet égard dans les mémoires de tous, et nous savons le rôle joué par certains services de renseignement dans cette affaire.
Malheureusement, le présent amendement est insuffisamment contraignant pour être utile, d’ailleurs le groupe LFI-NUPES s’abstiendra, mais il n’en demeure moins impératif d’instituer un dispositif strict afin d’empêcher les prises de contrôle et de préserver les compétences et les savoir-faire français. (L’amendement no 312 n’est pas adopté.) La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l’amendement no 1335. Il vise à compléter l’alinéa 8, afin de consolider notre lutte contre les ingérences. En effet, la multiplication des conflits et des compétitions mondiales induit un renforcement de ces compétitions et des ingérences, aussi bien dans l’Hexagone qu’outre-mer, vis-à-vis de notre ZEE – nous avons eu l’occasion d’en débattre lors de l’examen d’amendements précédents.
L’ouverture de nouvelles voies dans l’Arctique en raison du réchauffement climatique crée de nouvelles possibilités économiques et fait de l’océan Atlantique le théâtre d’influences elles aussi nouvelles. Près de nos côtes, comme au large de la mer d’Iroise, il n’est ainsi pas rare d’observer des démonstrations de force de la part de certains de nos compétiteurs. Nous avons d’ailleurs eu à ce sujet des échanges nourris au sein de la commission de la défense nationale et des forces armées.
Dès lors, afin de permettre à la marine nationale de se consacrer pleinement à ses missions en haute mer, il apparaît nécessaire de renforcer notre surveillance côtière et de proximité, en lien avec nos collectivités territoriales et les acteurs locaux. Quel est l’avis de la commission ? L’établissement d’un lien entre nos armées et les collectivités territoriales est bien entendu nécessaire dans les communes côtières pour les motifs que vous évoquez, mais il l’est en réalité partout en France. La défense de notre pays appartient à tous : c’est pourquoi je ne crois pas utile d’ajouter au rapport annexé la précision que vous nous proposez. L’avis est donc défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? Nous avons en effet eu un long débat en commission sur cette question. Avis défavorable. (L’amendement no 1335 n’est pas adopté.) Sur l’amendement no 538, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisie de trois amendements, nos 1178, 1179 et 538, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 1178 et 1179 sont identiques.
La parole est à M. Christophe Bex, pour soutenir l’amendement no 1178. Il porte sur les données sensibles, leur utilisation et leur gestion étant un sujet majeur qui mérite toute notre attention.
En effet, eu égard à l’actualité et à ce que l’on appelle la guerre hybride, la vulnérabilité des câbles sous-marins qui transportent ces données nous amène à nous interroger. Pas moins de 80 % de nos données sont hébergées dans des centres situés aux États-Unis. La communication entre notre territoire et ces centres n’est possible que grâce à ces câbles, lesquels sont de plus en plus vulnérables à des attaques de la part de puissances étrangères hostiles. Les espaces maritimes par lesquels ces données transitent, piliers de la mondialisation contemporaine, représentent donc un enjeu géopolitique significatif.
Or la surveillance de ces câbles est impossible, alors même qu’une défaillance majeure pourrait paralyser un pays, voire un continent entier. Sommes-nous seulement capables d’assurer une communication internet et GPS dans les territoires français en cas de coupure entre le continent américain et le nôtre ? Nous sommes infiniment dépendants de la connectivité moderne, tous nos modes de fonctionnement sociaux étant imbriqués avec la technologie. Cette situation devrait nous inciter à rapatrier nos données, du moins nos données critiques, afin d’assurer notre souveraineté et notre indépendance. C’est d’ailleurs ce qu’a suggéré le ministre des armées lors de l’examen du projet de loi en commission. La parole est à M. Arnaud Le Gall, pour soutenir l’amendement no 1179. Identique au précédent, il vise à augmenter la résilience des réseaux et à protéger les données qui s’y trouvent, en élaborant un programme de relocalisation des données sur le territoire national, dans des serveurs relevant du droit français. Étant bien sûr conscients qu’une telle entreprise ne pourrait avoir lieu en un jour, précisons que nous donnerions la priorité aux données sensibles, même si, comme vient de le dire Christophe Bex, la question concerne un très grand nombre d’activités qui ne relèvent pas du projet de loi de programmation militaire stricto sensu .
Pourquoi vous soumettons-nous ces amendements ? Parce qu’il convient de réagir à deux grandes sources de vulnérabilité.
La première est juridique. Pour dire les choses rapidement, nous avons un problème de normes et nous savons bien que l’Europe et les États-Unis sont en concurrence en matière de gestion des données. Il s’agit d’un vrai sujet, qui m’a d’ailleurs conduit à déplorer que les paiements en ligne avec le futur euro numérique aient été confiés à Amazon – l’ancien directeur de l’Agence nationale de la sécurité des systèmes d’information (Anssi) a d’ailleurs également considéré que ce choix était un scandale.
Quant à la seconde source de vulnérabilité, elle est technique. Si les câbles sont coupés, nous perdons 80 % de nos données. Mais le pire, le plus insidieux, est bien l’espionnage. Ne nous voilons d’ailleurs pas la face : certains pays européens sont des plateformes d’espionnage, y compris pour le compte de certains de nos alliés. En 2021, il a en effet été révélé que le Danemark avait été, en Europe, le principal point d’entrée des activités de la NSA – l’Agence nationale de sécurité des États-Unis – pour écouter des dirigeants et de nombreuses entreprises. Et comment cet espionnage a-t-il été possible ? Grâce aux câbles sous-marins transatlantiques qui arrivent au Danemark.
Il convient donc de réduire notre vulnérabilité, de ne pas nous montrer naïfs et d’engager un plan de rapatriement de l’ensemble de nos données, en commençant par les plus critiques et sensibles. La parole est à Mme Caroline Colombier, pour soutenir l’amendement no 538. Conformément aux discussions que nous avons eues en commission et aux recommandations du ministre, nous devons affirmer la nécessité de relocaliser nos données sensibles sur le territoire national. Il s’agit évidemment d’un élément central du renforcement de la protection de nos territoires face aux menaces actuelles et futures, protection qui passe obligatoirement par la maîtrise des fonds marins. La lutte informationnelle, les ingérences et la multiplication des conflictualités hybrides rendent cette relocalisation urgente – d’autant qu’elle permettrait également de créer des emplois directs en France. Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements ? Il convient effectivement d’avancer au sujet de la relocalisation des données, mais notre action doit avoir lieu dans le cadre européen. C’est pourquoi je donne un avis défavorable à ces amendements.
S’agissant de nos armées, je tiens tout de même à souligner que la LPM prévoit 8 milliards d’euros de crédits pour conforter la résilience de nos systèmes numériques et 4 milliards pour le cyber, ce qui montre combien nous tenons compte de cet enjeu. Quel est l’avis du Gouvernement ? Il est vrai que nous avons eu un débat intéressant en commission sur ce sujet, au cours duquel plusieurs principes ont été énoncés. Cependant, je vous avoue que la rédaction de ces amendements ne me convient toujours pas. J’avais initialement prévu de déposer un sous-amendement, mais nous avons finalement estimé, avec Jean-Noël Barrot, qu’il valait mieux renvoyer cette question aux dispositions sur le cyber.
Voici l’alinéa que nous souhaitons insérer dans un article du titre II, relatif aux dispositions normatives intéressant la défense nationale : « Les données sensibles du ministère des armées sont stockées en interne ou sur le territoire national dans des serveurs relevant du droit français. »
Une telle disposition permettrait en outre de traiter le cas particulier des serveurs hébergeant les données de nos bases militaires à l’étranger.
Je demande donc le retrait de ces amendements, à défaut de quoi l’avis sera défavorable. La parole est à M. Davy Rimane. Ces amendements sont très importants, et nos collègues ont bien résumé la situation.
S’agissant des territoires d’outre-mer, du moins de la Guyane – mais je parlais de ce sujet avec mon collègue Le Gayic, élu de Polynésie –, le câble nous connectant à internet vient des États-Unis. S’il est coupé, nous ne perdrons donc pas 80 %, mais bien 100 % de nos données. Il n’y aura plus rien !
Comble de l’ironie : alors que la Guyane accueille le premier lanceur européen envoyant des satellites en orbite dans le monde entier, il n’est pas couvert par les satellites de télécommunications. Mais si ! Dans le même ordre d’idée, les renforts militaires envoyés en Guyane pour appréhender les assassins du maréchal des logis-chef Arnaud Blanc ont dû déployer des moyens supplémentaires venus de l’Hexagone pour être en mesure de communiquer au sein de la forêt guyanaise et de mener leurs opérations.
Le groupe GDR-NUPES votera donc ces amendements avec les deux mains, car il est très important pour les territoires ultramarins que notre souveraineté en matière de télécommunications soit assurée. La parole est à M. Aurélien Lopez-Liguori. L’amendement proposé par Mme Colombier est de bon sens. Vous avez expliqué, monsieur le ministre, que l’armée française allait relocaliser ses données en France, mais ce ne sont pas les seules à être sensibles. Nos prestataires, nos sous-traitants, les OIV – opérateurs d’importance vitale – ou encore les OSE – opérateurs de services essentiels – devraient également héberger leurs données en France, ou du moins au sein de l’Union européenne, et nulle part ailleurs. Or nous en sommes loin.
J’insiste, tous les acteurs que je viens d’énumérer traitent de données sensibles, et nous ne pouvons pas faire confiance à des entreprises étrangères comme AWS – Amazon Web Services – ou Microsoft, qui propose l’application Azure, pour les héberger, étant donné que le pays dont elles sont issues a le pouvoir légal d’y accéder. Or nous devons nous protéger contre toute tentative d’ingérence étrangère, à plus forte raison dans un domaine aussi sensible que la sécurité nationale et alors que nous avons les moyens d’héberger nos données en France. Nous disposons d’un écosystème technologique adapté : des entreprises françaises souveraines telles que Docaposte, avec sa solution NumSpot, ou Scaleway peuvent nous aider en ce sens.
Les données sont précieuses : elles sont l’or noir du XXIe siècle. Nous devons protéger et faire fructifier cette ressource. Il y va de notre de notre souveraineté, de notre sécurité et de la défense de nos intérêts vitaux. J’espère donc que la représentation nationale sera présente en masse lors de l’examen et du vote de l’article 35 bis , l’avant-dernier du texte, qui est justement consacré à ce sujet très important. Nous pouvons rattraper notre retard dans la technologie de la collecte de données. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Je mets aux voix les amendements identiques nos 1178 et 1179. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 142
Nombre de suffrages exprimés 142
Majorité absolue 72
Pour l’adoption 52
Contre 90 (Les amendements identiques nos 1178 et 1179 ne sont pas adoptés.) Je mets aux voix l’amendement no 538. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 121
Nombre de suffrages exprimés 121
Majorité absolue 61
Pour l’adoption 32
Contre 89 (L’amendement no 538 n’est pas adopté.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 863 et 864, sur lesquels le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale a demandé un scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l’amendement no 863. Il est important car il traite d’un sujet – les pôles et les Terres australes et antarctiques françaises (Taaf) – qui n’a pas encore trouvé sa place dans le rapport annexé alors qu’il devrait y figurer. Ces territoires ont une importance fondamentale dans la lutte contre le réchauffement climatique. L’océan Austral, en effet, capte à lui seul 70 % de l’augmentation d’origine anthropique des températures. Par ailleurs, les Terres australes, inhabitées, ont conservé un territoire vierge et donc utile à l’étude du climat.
Il est donc essentiel de les préserver. La marine nationale, l’armée de l’air et de l’espace et, d’une certaine manière, l’armée de terre ont un rôle à jouer dans la défense et la protection de ces espaces. La France compte parmi les rares nations antarctiques et il est indispensable qu’elle en tire les conséquences. La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 864. En complément des propos de mon collègue Lachaud, je voudrais citer un poète célèbre : « À quoi sert une banquise trop fragile pour les pas d’un ours ? » La France doit être une puissance motrice dans la préservation des pôles afin d’en faire un bien commun de l’humanité. En proposant d’inscrire cette intention dans le rapport annexé, cet amendement nous donne l’occasion d’intégrer la question dans nos débats. La parole est à M. le ministre, pour soutenir les sous-amendements nos 1794 et 1796, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée. La question a été évoquée en commission. Elle doit, comme vous l’avez souligné, être intégrée à nos travaux. Toutefois, pour des raisons de forme, je vous propose d’alléger le long dispositif que vous proposez, afin de recentrer l’effort de préservation sur le périmètre du ministère des armées. Quel est l’avis de la commission ? Favorable, sous réserve de l’adoption des sous-amendements. (Les sous-amendements nos 1794 et 1796, successivement mis aux voix, sont adoptés.) Je mets aux voix les amendements identiques nos 863 et 864, sous-amendés. (Il est procédé au scrutin.) Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 125
Nombre de suffrages exprimés 122
Majorité absolue 62
Pour l’adoption 122
Contre 0 (Les amendements identiques nos 863 et 864, sous-amendés, sont adoptés.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1001 et 1070.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l’amendement no 1001. Il s’inscrit dans la même logique que l’amendement précédent. Le réchauffement climatique, nous le savons, est malheureusement à l’œuvre et son action contribue à l’ouverture d’un passage maritime passant par le nord de la Russie et permettant de circuler entre l’océan Pacifique et l’océan Atlantique. Il est donc nécessaire que des accords internationaux régissent la navigation par ce passage. L’amendement propose d’affirmer la nécessité de défendre les intérêts de la défense française lors de leur négociation. L’amendement no 1070 de M. Aurélien Saintoul est défendu.
Quel est l’avis de la commission ? Le Gouvernement défendra toujours les intérêts de la France. Avis défavorable. (Les amendements identiques nos 1001 et 1070, repoussés par le Gouvernement, ne sont pas adoptés.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 1032 et 1067.
La parole est à M. Bastien Lachaud, pour soutenir l’amendement no 1032. Il prévoit la rédaction d’un rapport sur le rôle stratégique des zones polaires et des Terres australes et antarctiques françaises. J’imagine que vous direz « non » à cette demande de rapport, mais j’espère que ce sera pour mieux dire « oui » aux demandes suivantes. La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 1067. Le dérèglement climatique provoque le réchauffement des pôles qui, à son tour, conduit à l’ouverture de nouvelles voies maritimes. Ce phénomène ne va pas simplement favoriser la découverte d’épaves de bateau prisonnières de la banquise depuis des siècles : il va entraîner la mise en concurrence de différentes puissances. La France doit être en pointe sur le sujet. Un rapport rédigé par l’Observatoire défense et climat sur le rôle stratégique de ces zones y contribuerait. Il faut également défendre l’intérêt de la France lors de la négociation internationale d’accords commerciaux sur la navigation dans ces zones. Quel est l’avis de la commission ? Le rôle stratégique des pôles face au changement climatique est déjà traité dans un document sur la stratégie polaire de la France publié en avril 2022. Ces amendements me semblent donc inutiles. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable. Quel est l’avis du Gouvernement ? La stratégie concernant les pôles doit être coordonnée, mais aussi différenciée, car les deux pôles n’obéissent pas tout à fait aux mêmes logiques physiques, géographiques et de gouvernance. Le rôle des États n’y est pas le même, c’est le moins que l’on puisse dire.
M. Piquemal l’a rappelé : le réchauffement climatique induit de nouvelles opportunités, qui sont d’ailleurs plutôt des risques. L’ouverture de nouvelles voies maritimes mérite d’être regardée de près, notamment parce que ces voies pourront permettre la jonction de marines de guerre.
Une fois de plus, j’émettrai une demande de retrait ou, à défaut, un avis défavorable à cette demande de rapport. Néanmoins, j’ai demandé à la DGRIS – direction générale des relations internationales et de la stratégie – de formaliser une feuille de route pour les mois à venir. Certes, il ne s’agit pas d’un rapport, puisque la teneur de ce document interne est opérationnelle, mais la DGRIS pourra, si cela vous intéresse, le présenter devant la commission de la défense.
Le rôle stratégique des zones polaires touche à des questions importantes : marine ; équilibre géostratégique ; lignes maritimes commerciales par lesquelles transitent, entre autres, les matières premières ; biodiversité et Taaf. Ce sujet a un intérêt majeur et il doit être documenté au fur et à mesure, au-delà même de l’exécution de la loi de programmation militaire. La parole est à M. Bastien Lachaud. Je considère que l’amendement est satisfait par la feuille de route dont a parlé M. le ministre, qui est quasiment l’équivalent d’un rapport. Nous serons attentifs à son rendu et je suis sûr que M. le président Gassilloud organisera un débat sur ce document au sein de la commission. (Les amendements identiques nos 1032 et 1067 sont retirés.) Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 865 et 866.
La parole est à M. Emmanuel Fernandes, pour soutenir l’amendement no 865. Il vise à supprimer la mention au service national universel dans le rapport annexé. Le SNU est en effet un dispositif mal conçu et inutile. Alors que la précarité étudiante ronge les universités et que les files d’attente devant les banques alimentaires s’allongent, le Gouvernement propose à la jeunesse un dispositif coûteux, visant à la discipliner, qui ne remplit aucun objectif de défense, d’éducation ou de cohésion sociale.
Le repas à 1 euro pour tous dans les Crous, les centres régionaux des ?uvres universitaires et scolaires, coûterait 60 millions par an alors que le SNU, s’il était généralisé, coûterait au total, selon un rapport d’information du Sénat publié en mars 2023, plus de 2 milliards par an. Le SNU ne bénéficie pas, c’est le moins qu’on puisse dire, d’une image favorable : propos racistes, punitions collectives – comme à Strasbourg –, sorties en montagne dangereuses et mal encadrées… (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE et RN.) N’importe quoi ! Lisez la presse, qui a rapporté ces faits en divers endroits du territoire.
Il existe de meilleures manières de faire vivre les valeurs et les principes républicains et de développer une culture de l’engagement. Nous soutenons le projet d’une conscription citoyenne qui permettrait de rémunérer au Smic une classe d’âge pendant neuf mois. Cette mobilisation de jeunes adultes, sans casernement, dans des activités militaires ou civiles d’utilité sociale et écologique, pour faire face notamment au bouleversement climatique, nous semble préférable.
Cette conscription permettrait de remédier à l’exclusion du peuple de la gestion des questions de sécurité et de défense… Veuillez conclure. …et d’agir contre la précarisation généralisée de la jeunesse. Loin du gadget folklorique du SNU… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est épuisé. – Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 866. Pour le SNU, vous naviguez à vue, en faisant chaque mois une annonce différente. Il n’est pas question ici de mettre en cause les personnes qui y participent ou l’encadrent avec bonne volonté. Toutefois, nous sentons bien, quand nous discutons avec celles-ci, que le bateau tangue. Qu’adviendra-t-il du SNU ? Prévoyez-vous une nouvelle annonce ?
Madame la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel, je ne sais pas si, comme M. le ministre, vous avez lu le superbe fascicule consacré par La France insoumise à la loi de programmation militaire. (L’orateur agite un document.) Merci, cher collègue, de ne pas utiliser de documents à l’appui de votre propos. Outre que nous aimerions savoir que sera le SNU « dans votre projet », pour reprendre une expression célèbre, nous aimerions débattre avec vous de la conscription volontaire que nous proposons. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ? Précisons tout d’abord que le SNU n’est pas l’objet de la LPM. Même si je comprends que vous profitiez de ces débats pour l’évoquer, comme c’est bien légitime, j’espère que la question ne prendra donc pas une place disproportionnée.
Sur le fond, c’est avec plaisir que je participerai à un débat sur le SNU, quand il sera à l’ordre du jour, et que je vous donne mon avis sur ces amendements. En tant que député de terrain, j’ai suivi de très près l’expérimentation du SNU, dont le Morbihan a été un département pilote. J’ai observé la construction des séquences pédagogiques, écouté les témoignages des jeunes participants et ce que j’ai vu est extraordinaire. Tout doucement, une cohésion impressionnante est apparue grâce à la vie collective. Les jeunes ont beaucoup appris concernant le secourisme, la sécurité routière ou nos institutions ; ils étaient ravis de leur séjour. Le SNU est une belle expérience et j’espère qu’elle sera développée.
En revanche, je suis très réservé quant à votre proposition d’obliger tous les jeunes de France à effectuer un service militaire de neuf mois, car elle leur fermera des occasions d’étudier, de travailler et ainsi de suite. C’est une usine à gaz, dont vous ne chiffrez d’ailleurs pas le coût – le livret que vous agitiez gentiment ne contient aucun chiffre. C’est faux ! C’est un tract sans valeur, qui n’exprime rien de sérieux. Avis défavorable. La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la jeunesse et du service national universel, pour donner l’avis du Gouvernement. Je suis ravie de vous retrouver cet après-midi pour revenir sur un projet qui nous tient à cœur, celui du service national universel, dont 50 000 jeunes volontaires ont bénéficié depuis 2019. Le SNU a lieu dans des territoires qui sont accompagnés, au sein de centres qui sont le plus souvent gérés par des collectivités ou d’éducation populaire, au cours de séjours permettant la mixité sociale et territoriale ainsi qu’un renouveau des mobilités entre les outre-mer et la métropole. Le service national universel est un service civil, un temps et une expérience uniques.
Quant à votre proposition, j’y suis défavorable, puisque le SNU doit continuer à être expérimenté. Cependant, je suis tout à fait ouverte à un débat, qui devra avoir lieu à un moment ou à un autre. Le président de la commission de la défense en a d’ailleurs déjà organisé un, de très grande qualité.
Je me tiens évidemment à la disposition de l’ensemble des groupes et des commissions pour apporter un éclairage plus complet. Surtout, j’invite les parlementaires qui s’intéressent à la question à visiter un centre lors des séjours de cohésion. Eh oui ! Il ne faut pas lire les journaux mais aller sur place ! C’est encore la meilleure manière d’éviter les caricatures malheureuses et les critiques trop rapides. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et HOR.) La parole est à M. Loïc Kervran. En tant que député du Cher, département où le SNU est expérimenté depuis sa création, j’ai accompagné des séjours et même accueilli des jeunes participants pendant vingt-quatre heures – ou un peu moins, justement, parce que lors du SNU, les règles sont respectées.
Je ne comprends pas la mauvaise image dont celui-ci souffre. Quelque 75 % des Français y sont favorables. En réalité, dans ma circonscription, les demandes de participation des jeunes sont trop nombreuses au regard des places disponibles. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe HOR.)
Répétons-le, le SNU est une chance pour les jeunes, pour notre nation, pour la culture de l’engagement. C’est enfin une formidable chance pour les territoires. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes HOR et Dem ainsi que sur quelques bancs des groupes RN et LR.) Très bien ! Je souhaite m’exprimer contre l’amendement ! Le nombre de prises de parole est restreint à une pour, une contre l’amendement. (Les amendements identiques nos 865 et 866 ne sont pas adoptés.) La parole est à Mme Michèle Martinez, pour soutenir l’amendement no 214. Le renforcement du lien entre la nation et l’armée est important pour notre pays. Il importe donc de mentionner dans le rapport annexé le service militaire volontaire (SMV) et le service militaire adapté (SMA), qui sont salutaires pour de nombreux concitoyens et jouent un rôle de tremplin vers la vie professionnelle. Ainsi, au terme du SMA, plus de 76 % des volontaires trouvent un emploi ou s’engagent dans une formation qualifiante.
Ces services permettent également de faire découvrir le monde de la défense et font naître l’envie de s’engager dans l’armée – dans les forces d’active ou en tant que réserviste. Ils méritent donc la même promotion que le service national universel qui, lui, n’entre pas dans le champ de la LPM et n’a pas de vocation militaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.) Quel est l’avis de la commission ? Avis de sagesse. Quel est l’avis du Gouvernement ? Sagesse. Même si l’alinéa du rapport indexé choisi pour cette précision n’est pas forcément le plus pertinent, celle-ci montrera l’efficacité et l’utilité des dispositifs visés. La parole est à M. Christophe Blanchet. Six régions de France bénéficient du service militaire volontaire, qui, comme l’ont montré de multiples auditions, constitue une opportunité pour bon nombre d’entre elles et pour bon nombre de jeunes. Il faut dès lors favoriser l’implantation du SMV dans chaque région, pour donner la même chance à tous les jeunes du territoire national. Très bien ! (L’amendement no 214 est adopté.)
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) Je suis saisie de plusieurs amendements identiques, nos 167, 577, 675 et 1339.
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 167. Il vise à supprimer toute mention du service national universel du projet de loi de programmation militaire. En effet, ce service n’est ni national, ni universel ; sa finalité est obscure, ses objectifs ne sont pas clairement définis et il n’est en rien militaire. Il ne correspond à aucun besoin et aucune demande de l’institution militaire, contrairement au SMA et au SMV. La parole est à M. Christophe Bex, pour soutenir l’amendement no 577. Cela a été dit, le SNU est mal conçu et inutile. Alors que la précarité étudiante ronge les universités, que des classes sont fermées dans les écoles et que des centaines de professeurs attendent d’être remplacés, vous promouvez un dispositif coûteux, qui ne vise aucun objectif légitime en matière de défense, d’éducation, d’insertion, de cohésion sociale, de résilience ou de solidarité. Discipliner la jeunesse n’est pas un projet politique.
Si nous refusons le SNU, nous soutenons le projet d’une conscription citoyenne des jeunes adultes, bien différente du service national de ma prime jeunesse. Celle-ci permettrait de rémunérer au Smic une classe d’âge pendant neuf mois, sans encasernement. Les jeunes adultes concernés seraient mobilisés dans des activités civiles, éventuellement militaires, d’utilité sociale et écologique, notamment face au bouleversement climatique.
Une telle conscription serait un tremplin pour beaucoup, un moyen d’insertion et un dispositif égalitaire au service de l’intérêt général – contrairement à l’encasernement des mineurs que vous prévoyez, qui les soumettra à des simulacres d’activités militaires. Elle permettrait en outre à toutes les classes d’âge et à toutes les classes sociales de se retrouver, pour construire demain une société beaucoup plus solidaire. La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 675. Monsieur le rapporteur, vous êtes injuste. Vous n’avez pas lu le livret de La France insoumise sur la loi de programmation militaire, qui évoque le SNU à la page 48… Si, j’ai lu votre fascicule, je l’ai même ici ! Très bien ! Ouvrez-le, il contient de nombreuses informations intéressantes. Surtout, il ne contient aucun chiffre, comme toujours avec vous. C’est faux.
Vous nous avez fait part de votre amour pour le Casimir de « L’Île aux enfants ». Eh bien, le SNU est un gloubi-boulga digne de l’inspecteur Gadget. On ne sait trop où il va, à l’image d’un gouvernement dont les projets manquent de sens sur les plans moral et politique – en matière d’éducation, par exemple.
Au contraire, notre proposition de conscription citoyenne – qui permettra de tourner la jeunesse vers l’action, en la rémunérant – est cohérente avec la planification écologique et avec les positions que nous avons défendues tout à l’heure sur la préservation des pôles ou l’importance de penser l’armée du futur – celle de l’après-pétrole, des défis et des catastrophes liés au dérèglement climatique ; nous proposons ainsi la création de casques bleus climatiques à l’ONU.
Nous proposons ainsi un projet politique global, qui a un sens, celui de la planification écologique, contrairement à vous, qui vous reposez sur des concepts fourre-tout – celui de « mixité sociale » veut tout et rien dire, par exemple, et personne ne sait plus ce qu’il recouvre en l’occurrence ; je serai curieux de savoir ce que vous y mettez.
De même, au niveau budgétaire, le SNU coûtera-t-il vraiment 2 milliards d’euros ? Non ! Donnez-nous donc son coût. Nous voudrions en outre savoir s’il sera financé sur le budget alloué à la LPM. Non ! Très bien ! Expliquez donc à la représentation nationale sur les budgets de quels ministères les sommes seront prélevées. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Exactement ! La parole est à Mme Anna Pic, pour soutenir l’amendement no 1339. Comme les précédents, il vise à supprimer la référence au SNU, puisque celui-ci ne nous semble pas être à même de remplir le rôle qui lui est assigné, du moins dans les formes proposées ces derniers mois, toutes à cheval entre l’éducation nationale et les armées. Le SNU fait l’objet de nombreux débats et suscite le rejet de nombreux enseignants et de nombreux jeunes, notamment dans les syndicats lycéens ; les échos dans son encadrement sont également très mauvais.
La dernière mouture du SNU, dévoilée dans Politis , ne tient même plus compte de l’enjeu de mixité sociale, pourtant mis en avant dans un premier temps. Ce service n’est pas universel, il ne valorise pas l’engagement et ne rapproche pas l’armée et la défense nationale de la jeunesse. Il fait entrer dans l’éducation nationale une symbolique simplificatrice de la discipline militaire, ce qui a pour effet de dévaloriser tant l’armée que l’éducation nationale.
Si nous ne sommes évidemment pas opposés à des projets permettant à toute la jeunesse de s’engager et de vivre des moments collectifs, la participation à ceux-ci doit reposer sur un principe de volontariat, d’engagement choisi et d’émancipation. Quel est l’avis de la commission ? Sans surprise, mon avis sera défavorable. En outre, je m’interroge sur votre projet de conscription citoyenne de neuf mois que vous voulez imposer aux jeunes, alors que certains seront en cours d’études et que d’autres commenceront leur vie professionnelle. Enfin, le contenu des activités envisagées n’a aucun sens. Quel est l’avis du Gouvernement ? Vous m’avez posé des questions claires, auxquelles je vais tenter de répondre. Quel est le budget du SNU et est-il intégré au projet de LPM ? Non, le budget du service national universel a toujours été inscrit au sein du programme 163, Jeunesse et vie associative . Je n’opposerai jamais l’accompagnement et les besoins liés à la précarité des jeunes aux sujets liés à l’engagement. Cette année, le budget s’élève à 140 millions d’euros, en augmentation par rapport aux 110 millions d’euros de l’an dernier. De même, le budget de l’éducation nationale est en hausse. Enfin, vous débattez d’un projet de LPM afin de doter nos armées face aux nouvelles menaces et, je le répète, le budget du SNU n’est pris ni sur celui de l’éducation nationale ni sur celui de nos armées. Eh oui… Il s’appuie sur les acteurs qui accompagnent, comme ceux de l’éducation populaire qui l’encadrent. Ils viennent de la Ligue de l’enseignement, des Francas, de la fédération Léo Lagrange. Ah oui ? Ils accueillent ces jeunes dans leurs centres. Y a-t-il du casernement, pour reprendre votre terme ? Non. Ces jeunes vivent-ils en internat ? Oui.
Le SNU est un temps civil, organisé en trois grands moments : un séjour de cohésion qui dure treize jours, une mission d’intérêt général où l’on découvre l’engagement sur son propre territoire, qui dure quatre-vingt-quatre heures ou douze jours, et un engagement volontaire qui dure de trois mois à un an, qui peut être un service civique, un engagement au sein de nos réserves ou une mission de coopération internationale. Le SNU peut être effectué à partir de 16 ans.
Je ne vois pas en quoi notre projet de service national universel serait en contradiction ou en opposition avec votre proposition, qui commence à 18 ans. Votre seul but semble être de supprimer cette opportunité pour les jeunes,… Exactement ! …alors qu’ils ont le droit de participer volontairement à un projet patriotique et d’engagement, sans qu’on méprise la forme de leur engagement. Les 50 000 jeunes qui ont participé au SNU sont particulièrement heureux de l’avoir fait, neuf jeunes sur dix se déclarant très satisfaits.
Le SNU fait grandir notre jeunesse et lui permet de découvrir d’autres départements et des formes d’engagement qui prennent parfaitement leur place dans leur parcours de citoyenneté. Avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR. – M. Nicolas Forissier applaudit également.) J’ai sept demandes de prise de parole. Il convient de les équilibrer. Je vous propose donc de prendre deux orateurs pour et deux orateurs contre les amendements. Cela vous convient-il ? J’ouvre le débat car je l’estime nécessaire.
La parole est à M. Jean-Louis Thiériot. Je reconnais que le SNU pose un problème : beaucoup de jeunes voudraient le faire et ne le peuvent pas ! C’est vrai. Quelle est mon expérience du SNU ? C’est une fierté retrouvée pour ceux qui y participent. Ainsi, j’étais à l’Arc de Triomphe avec des jeunes, participant au SNU, qui venaient de banlieue en uniforme et rendaient hommage au soldat inconnu. C’est la belle jeunesse de France ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RE, Dem et HOR.)
J’ai vu des jeunes participant au SNU dans mon département de Seine-et-Marne, de toutes les origines, et qui, grâce au dispositif, découvraient une mixité qu’ils n’auraient jamais connue autrement. Enfin, j’ai constaté l’efficacité du dispositif : parmi les jeunes en SNU à Montereau, dans ma circonscription, qui ne connaissaient donc pas la marine nationale, trois sont désormais réservistes de la marine. Madame la secrétaire d’État, merci de soutenir un tel dispositif !
En outre, et c’est heureux, le SNU n’est pas financé sur les crédits prévus par le projet de LPM. Eh oui ! Si tel avait été le cas, je m’y serais opposé. Je suis donc fermement contre ces amendements.
Enfin, soyons sérieux : vous proposez une conscription payée au Smic à une cohorte de 700 000 jeunes. L’argent des Français, celui des contribuables, ce n’est visiblement pas votre souci, messieurs de La France insoumise ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LR, RE, Dem et HOR. – M. Pierrick Berteloot applaudit également.) La parole est à M. Christophe Blanchet.