XVIe législature
Session ordinaire de 2022-2023

Première séance du mercredi 29 mars 2023

Sommaire détaillé
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Première séance du mercredi 29 mars 2023

Présidence de M. Sébastien Chenu
vice-président

M. le président

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à quinze heures.)

    1. Protection des logements contre l’occupation illicite

    Deuxième lecture

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à protéger les logements contre l’occupation illicite (nos 818, 1010).

    Présentation

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux, ministre de la justice.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice

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    Nous examinons en deuxième lecture la proposition de loi du président Kasbarian, qui nous apportera des moyens indispensables pour lutter contre les squats qui pourrissent la vie d’un certain nombre de nos concitoyens. Nombre d’entre nous ont ainsi été saisis par de petits propriétaires qui, ayant parfois économisé toute leur vie pour acquérir un bien, se trouvent dans l’impossibilité de récupérer le fruit de leur travail et de leurs économies. La lutte contre les squats est capitale, aussi tiens-je, monsieur le rapporteur, à saluer votre engagement en la matière – car oui, la loi doit d’abord protéger les honnêtes gens.
    Concrètement, votre proposition de loi telle qu’issue des travaux du Sénat et de l’Assemblée nationale en première lecture clarifie la notion de domicile en précisant qu’elle recouvre tout local d’habitation contenant des biens meubles, qu’une personne y habite ou non et qu’il s’agisse ou non de sa résidence principale. Il s’agit là d’une avancée indispensable. J’en profite pour rappeler que, contrairement à ce qu’affirment certains médias, le squat d’une résidence secondaire est bien constitutif du délit de violation de domicile et que, puisqu’il s’agit d’une infraction continue, l’intervention des forces de police pour faire cesser cette situation est possible à tout moment.
    Le texte entend aller au-delà de la protection du domicile et protéger également la propriété en tant que telle. Il ne s’agit cependant pas de faire primer le droit de propriété sur tout autre droit social, mais de répondre de manière proportionnée et adaptée à des situations individuelles profondément injustes. Je tiens à souligner l’important travail parlementaire ayant conduit à préciser le champ du délit d’introduction ou de maintien dans un local autre que le domicile. Tout d’abord, ces travaux ont permis de limiter le champ de la répression aux seuls actes frauduleux en prévoyant, s’agissant des locaux autres que le domicile, que seule l’introduction à l’aide de manœuvres, de menaces, de voies de fait ou de contrainte, ou le maintien après une telle introduction, seront réprimés. En excluant ainsi de la répression les locataires défaillants qui ne font l’objet d’aucune procédure d’expulsion, cette restriction du champ de l’infraction répond aux inquiétudes exprimées par certains et aux réserves que j’avais émises lors de l’examen du texte en première lecture.
    Les travaux parlementaires ont également conduit à instaurer dans l’échelle des peines une gradation tout à fait bienvenue. Ainsi, le squat d’un domicile, lieu particulièrement protégé en tant que lieu de la vie privée et de l’intime, est puni d’une peine de trois ans d’emprisonnement, alors que le squat d’un local autre que le domicile est puni d’une peine de deux ans d’emprisonnement. Ces quanta de peine assurent la cohérence de la répression des faits en question.
    Enfin, je souhaite évoquer brièvement la dernière infraction créée par ce texte, pour souligner la nécessité de préserver les équilibres que nous avons trouvés : ce délit vise à punir d’une peine d’amende de 7 500 euros le fait pour un locataire qui a fait l’objet d’une décision de justice définitive et exécutoire ayant donné lieu à un commandement régulier de quitter les lieux depuis plus de deux mois de se maintenir dans un local à usage d’habitation. Bien que la voie civile reste la plus adaptée dans ce cas, la rédaction issue du Sénat et de la commission des affaires économiques de l’Assemblée nationale me semble satisfaisante à plusieurs égards. Tout d’abord, les garanties qu’elle comporte permettent de protéger les locataires précaires et d’aboutir à une répression adaptée. Ensuite, le quantum de la peine encourue pour ce délit s’inscrit dans une gradation cohérente et proportionnée des peines au regard des délits de violation de domicile et de violation d’un local autre que le domicile. Il me semble donc que les travaux parlementaires ont permis d’aboutir à un bon équilibre entre la défense de la propriété immobilière, qui concerne aussi les petits propriétaires, et le droit au logement, dans le respect des principes constitutionnels.
    L’Assemblée nationale et le Sénat sont convenus d’élargir le champ d’application de la procédure d’évacuation administrative, qui pourra être mise en œuvre pour la libération des domiciles comme des logements vacants. Cela répondra plus efficacement aux besoins des petits propriétaires souhaitant retrouver leur bien. J’en profite pour saluer l’amendement présenté par M. le rapporteur qui, pour consolider juridiquement le dispositif, entend inscrire dans la loi la réserve exprimée par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 24 mars 2023. Le Sénat et votre commission sont également convenus de circonscrire ce dispositif aux cas de squat ; il ne sera donc pas applicable aux personnes entrées régulièrement dans les lieux, telles que les locataires impécunieux. Je m’en félicite, car la procédure d’évacuation administrative ne me paraissait pas indiquée pour régler ce type de litige.
    Le texte aborde également la procédure d’expulsion qu’on pourrait dire de droit commun. À cet égard, les deux assemblées ont souhaité l’insertion automatique dans le bail d’une clause de résiliation de plein droit en cas d’impayés de loyers. Cette généralisation constitue un progrès du point de vue de la lisibilité du droit, de la simplification procédurale et de l’équité de traitement entre les locataires en cas de litige avec le bailleur. Elle sécurise le bailleur sans porter préjudice à la capacité du locataire de se défendre devant le juge en cas de litige de nature à provoquer la résiliation du bail. En outre, il s’est trouvé un consensus pour accélérer le rythme de la procédure d’expulsion. Pour n’en citer qu’un exemple, le délai renouvelable que peut accorder le juge aux occupants en phase d’expulsion lorsque leur relogement ne peut avoir lieu dans des conditions normales est réduit de trois à un an. Je ne peux qu’approuver ce nouvel équilibre qui permet d’accélérer la procédure d’expulsion tout en préservant le droit au logement, en faveur duquel le Gouvernement est pleinement mobilisé, en particulier mon collègue Olivier Klein.
    Je tiens enfin à souligner la volonté commune des deux chambres de réserver aux occupants de mauvaise foi un traitement plus sévère en les privant non seulement du délai de deux mois entre le commandement de quitter les lieux et l’expulsion, mais aussi de la possibilité d’obtenir un délai de grâce. Cette mesure me paraît aller dans le sens d’une protection accrue des propriétaires, attendue de nos concitoyens, particulièrement lorsqu’ils sont confrontés à des locataires malintentionnés.
    S’agissant des propriétaires, vous avez souhaité réagir à la jurisprudence de la Cour de cassation du 15 septembre 2022 en les exonérant de leur obligation d’entretien de leur bien lorsque survient un dommage pendant la période d’occupation. Tel est l’objet de l’article 2 bis de la proposition de loi ; je me félicite que cette disposition fasse consensus entre le Sénat et votre commission.
    Mesdames et messieurs les députés, je souhaite que cette seconde lecture nous permette de poursuivre nos débats pour parfaire encore ce texte porteur d’espoir, mais surtout porteur de solutions concrètes et de bon sens pour nombre de nos concitoyens qui aspirent simplement à jouir du fruit de leur labeur – ce qui, vous me le concéderez, est bien le moins. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR. – M. Philippe Gosselin applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre délégué chargé de la ville et du logement.

    M. Olivier Klein, ministre délégué chargé de la ville et du logement

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    La proposition de loi qui nous revient du Sénat est un texte enrichi, à l’équilibre renforcé. Je me félicite de ces avancées nécessaires et précieuses. Je tiens à saluer tout particulièrement le travail solide des deux rapporteurs de la chambre haute, André Reichardt et Dominique Estrosi Sassone, ainsi que les sénateurs qui ont permis des améliorations concrètes.

    Mme Annie Genevard

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    Les députés aussi !

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    Ils ont été attentifs aux inquiétudes et aux retours du terrain sans dénaturer la juste ambition qui a présidé à l’élaboration de votre texte initial, cher Guillaume Kasbarian. La navette parlementaire a été gage de protection, de clarification et de sécurisation juridique. Ainsi, les sénateurs ont établi une distinction plus nette entre la situation du squatteur, qui doit être sanctionné à la mesure de sa faute, et celle du locataire défaillant, qui doit pouvoir être accompagné lorsqu’il est de bonne foi.
    Oui, nous assumons de sanctionner plus durement le squatteur, mais également de protéger et d’accompagner le locataire dont la situation le justifie. Nous avons longuement débattu de ce sujet et avons pris les alertes en considération. Le texte ne conduira donc pas les locataires en prison pour impayés de loyer, ce dont je me réjouis. Il ne réduira pas davantage l’accompagnement social ; au contraire, il permettra de le stabiliser, de le clarifier et de le déclencher plus tôt dans la procédure, afin d’enrayer dès que possible la spirale de la pauvreté.
    Il n’empêche pas le juge d’accorder des délais aux locataires qui peuvent payer leurs loyers mais qui ont été confrontés à une période difficile. Le juge conservera donc le pouvoir de juger au cas par cas, en fonction des demandes faites par le locataire et de sa situation financière.

    Mme Danielle Simonnet

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    Pas vraiment !

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    Ce pouvoir du juge est gagnant-gagnant : gagnant pour le locataire, qui peut se maintenir dans le logement ; gagnant pour le propriétaire, à qui la dette sera remboursée et le loyer payé sans attendre une expulsion, qui est toujours, pour moi, et je suis sûr que vous en conviendrez, un signe d’échec.
    Le texte renforce le rôle des commissions de coordination des actions de prévention des expulsions locatives, les CCAPEX. Grâce au chapitre ajouté par le Sénat, celles-ci seront désormais davantage territorialisées, car les élus locaux y seront plus nombreux. Elles auront un plus grand pouvoir de décision, par exemple s’agissant du maintien des aides personnelles au logement (APL). Je les inviterai évidemment, dans le contexte actuel, à garder l’esprit ouvert face aux difficultés rencontrées par nombre de nos concitoyens. Elles pourront commencer plus tôt leur travail, pour que le diagnostic social et financier soit prêt dès que possible.
    Je crois très important de conserver tous les efforts faits en faveur de la prévention des expulsions locatives. Il faut laisser du temps au travail social, laisser au juge le pouvoir d’analyser chaque situation, d’être au plus proche des réalités, difficiles, d’une expulsion, qui est toujours un échec.
    Enfin, et cela me tenait à cœur, ce texte renforce les sanctions contre les marchands de sommeil. En tant que maire de Clichy-sous-Bois, j’ai été confronté à ceux qui, indûment, organisent des squats en faisant croire qu’ils sont propriétaires des logements, en toute illégalité et au détriment des plus faibles.
    Une telle politique s’inscrit dans la lutte que mène le Gouvernement contre l’habitat indigne, dont les procédures ont été renforcées et simplifiées par la loi portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique – la loi Elan –, adoptée lors de la précédente législature. Notre mobilisation sur ce sujet est constante ; elle se traduit dans ce texte et se poursuivra dans les prochaines semaines, avec vous et avec les élus locaux de tous bords.
    Mesdames et messieurs les députés, loin des caricatures et des surenchères, vous avez aujourd’hui à vous prononcer sur un texte équilibré et proportionné, bâti dans une logique de compromis grâce au travail attentif du rapporteur. Ce texte a été amélioré et équilibré par les sénateurs mais aussi, dès la première lecture, par le travail des députés…

    Plusieurs députés du groupe LR

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    Quand même !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur de la commission des affaires économiques

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    Il faut le dire !

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    …des trois groupes de la majorité.

    Mme Annie Genevard

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    Et de l’opposition !

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    Cette proposition de loi n’a jamais eu pour objectif de résoudre la crise du logement en France, mais elle permet de lutter contre les abus, contre ceux qui profitent du système et arnaquent les petites gens. Elle permet de résoudre des cas insupportables, des situations humaines dont vous recevez le témoignage lors de vos rendez-vous en circonscription…

    M. Sylvain Maillard

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    Eh oui !

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    …et qui ont été mis en lumière lors des auditions, qu’il s’agisse de petits propriétaires dont le bien est squatté de manière intolérable ou de locataires de bonne foi se retrouvant temporairement en difficulté pour payer leurs loyers. Ce texte protège les uns comme les autres. Il assure la juste conciliation entre le droit à la propriété et le droit au logement, deux droits essentiels qu’il ne faut pas opposer.
    Pour ma part, je n’oppose pas la lutte contre le squat et l’occupation illicite et une politique ambitieuse et sociale du logement. Une politique du logement ne peut pas être une politique du squat ni des impayés de loyer, mais elle doit répondre à toutes les attentes légitimes.
    Je le répète, face au mal-logement, l’objectif, c’est l’accès à un logement pérenne. Le Gouvernement est pleinement mobilisé pour l’atteindre et pour cela, je sais pouvoir compter sur les députés de notre majorité.

    Plusieurs députés du groupe LR

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    Et les autres ?

    Mme Annie Genevard

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    Non mais, ce n’est pas possible ! Et l’opposition alors ?

    M. Philippe Gosselin

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    Heureusement que le garde des sceaux est là ! (Sourires.)

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    Cet accès passe par la politique du logement d’abord, que nous poursuivons cette année, l’année prochaine et l’année suivante, autant que nécessaire. Il implique également de construire plus là où les besoins sont les plus importants, afin que chacun puisse se loger dignement et construire ainsi son parcours résidentiel, son parcours de vie.
    Je serai tout particulièrement attentif aux conclusions de la mission d’information sur les moyens de faire baisser les prix du logement en zones tendues, au nom de laquelle les députés Annaïg Le Meur et Vincent Rolland, que je salue, présenteront prochainement leur rapport. Je souhaite étudier leurs propositions concrètes avec eux et l’ensemble des parlementaires qui le souhaiteront.
    J’étudierai également avec attention les travaux du Conseil national de la refondation (CNR) dédié au logement qui, sans nul doute, proposera des évolutions fortes et attendues.
    Mesdames et messieurs les députés, ce texte a été amélioré et rendu équilibré grâce à un travail transpartisan des deux chambres. Il témoigne de notre capacité à construire des compromis au service de l’intérêt général, en réponse aux attentes concrètes et quotidiennes des Français. Je suis certain que nos débats permettront de faire œuvre utile…

    Mme Danielle Simonnet

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    Avec le RN !

    M. Olivier Klein, ministre délégué

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    …et de préserver l’équilibre de cette proposition de loi, qui va dans le bon sens. Je vous invite à l’adopter. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    Rappel au règlement

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard, pour un rappel au règlement. Sur quel fondement ?

    Mme Annie Genevard

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    Sur le fondement de l’article relatif au déroulement de nos débats.

    M. le président

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    Lequel ?

    M. Philippe Gosselin

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    Le 100 !

    Mme Annie Genevard

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    L’article 100. Monsieur le ministre délégué, je vous ai écouté attentivement. Je me permets de vous dire que les députés de la majorité ne sont pas les seuls à avoir travaillé sur ce texte.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur de la commission des affaires économiques

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    C’est vrai !

    Mme Annie Genevard

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    Nous avons été nombreux à y apporter, je le crois en toute immodestie, notre utile contribution. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Je trouve de mauvais aloi que nos débats commencent par des déclarations qui tendent à effacer de facto le rôle des oppositions. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RE.)

    Présentation (suite)

    M. le président

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    La parole est à M. Guillaume Kasbarian, président et rapporteur de la commission des affaires économiques.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur de la commission des affaires économiques

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    Nous voici de nouveau réunis pour parler d’un problème important qui indigne nos concitoyens : celui du squat, qui évoque, quand on l’examine plus profondément, la question du respect des autres, dans leur intimité et dans leur propriété. Dans une période turbulente, où se déchaînent les professionnels de la destruction du bien d’autrui,…

    M. Andy Kerbrat

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    Vous parlez des promoteurs de la réforme des retraites ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    …il est crucial d’accorder toute sa place à ce débat central, qui permet de bien distinguer les positions des uns et des autres. La protection de la propriété, principe fondateur de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, demeure en effet une pierre angulaire de notre pacte républicain.
    Nous nous soucions depuis longtemps de l’occupation illicite. En 2018, déjà, dans la loi Elan, nous avons renforcé les procédures judiciaires de traitement des squatteurs. En 2020, dans la loi, dite Asap, d’accélération et de simplification de l’action publique, nous avons réussi à accélérer, de manière décisive, la procédure administrative qui permet leur expulsion. Nous avons donc progressé sur le sujet. Il restait pourtant plusieurs défis à relever : la hiérarchie des peines n’était pas claire ; certains cas de squat échappaient à toute définition légale ; les situations locatives n’étaient pas couvertes par les précédentes avancées.
    Devant ce constat, la proposition de loi que nous étudions repose sur une stratégie reposant sur trois piliers.
    Le premier consiste à renforcer dans notre droit l’importance du respect de la propriété privée. Ces articles ont été étoffés au cours des débats – je salue en particulier l’excellent travail des sénateurs et des députés d’opposition sur cette question. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs des groupes RE et LR.) Ils clarifient et élargissent le régime des sanctions encourues, que je rappellerai brièvement ici. L’article 1er, que les sénateurs ont adopté conforme, dispose que ceux qui squattent le domicile d’autrui sont passibles de trois ans de prison et de 45 000 euros d’amende. Ceux qui squattent un autre local d’habitation ou un local à usage économique sont passibles de deux ans de prison et de 30 000 euros d’amende, comme le dispose l’article 1er A – je salue le travail de notre collègue Annie Genevard sur le sujet. (« Ah ! » et applaudissements sur les bancs des groupes RE, LR et Dem.)

    M. Philippe Gosselin

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    Ah ! Il fallait bien un rappel au règlement !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    L’article 1er bis institue une peine de trois ans de prison et de 45 000 euros d’amende pour les marchands de sommeil. L’article 1er A dispose que les personnes qui se maintiennent dans les lieux en dépit d’une décision de justice définitive sont passibles de 7 500 euros d’amende. Enfin, l’article 1er bis A instaure une peine de 3 750 euros d’amende pour les personnes qui incitent au squat par la publicité et la propagande.
    Ces sanctions, graduées et proportionnées à la gravité des faits, doivent permettre de rassurer nos concitoyens sur l’application de la loi et de dissiper l’impression d’une impunité dont certains jouiraient.
    Le deuxième pilier est la meilleure protection apportée aux victimes de squatteurs. Comme en ont attesté les auditions que nous avons menées et les centaines de témoignages que j’ai recueillis depuis le début de l’examen de ce texte, celles-ci se sentent démunies, désemparées, face à des personnes malhonnêtes qui les grugent de manière systématique et abusent de leur vulnérabilité.
    C’est pourquoi la proposition de loi contient les évolutions suivantes. D’abord, elle tend à fluidifier l’expulsion administrative des squatteurs en obligeant l’administration fiscale à établir le droit du demandeur et en permettant au maire de constater l’occupation illicite – je salue le travail du groupe Horizons sur l’article 2. L’article 2 bis vise à exonérer les propriétaires de l’obligation d’entretien, pour éviter qu’ils payent les dommages causés par l’absence d’entretien d’un bien, alors même que celui-ci est squatté et qu’ils ne peuvent y mener de travaux – je salue l’engagement de notre collègue Jean-Louis Thiériot sur cette question.

    M. Philippe Gosselin

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    Très bien !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    L’article 6 tend à renforcer l’indemnisation par l’État du propriétaire lorsque le concours de la force publique est refusé pour l’expulsion des occupants.
    Au-delà de ces cas de squats, le troisième pilier concerne une zone grise, celle qui concerne la minorité de locataires qui cesse durablement de remplir ses obligations locatives.

    M. William Martinet

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    Et pourquoi ils ne paient pas ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Nous ne pouvons passer de telles situations sous silence, même si, il faut le répéter, une écrasante majorité de locataires paient leur loyer rubis sur l’ongle.
    Ceux qui cessent durablement de le faire mettent toutefois dans la difficulté les bailleurs, pour qui le logement constitue souvent un complément de revenu indispensable. Nous en avons reçu plusieurs en audition – je tiens à les remercier de nouveau pour les témoignages, ainsi que les centaines de personnes qui ont pris le temps de nous écrire. Ils nous ont raconté leur histoire, et ce sont ces cas qui choquent tant les Français.
    Nombreux sont d’ailleurs les propriétaires qui, par peur de ne pas pouvoir récupérer leur bien, décident de quitter le marché locatif, frustrés ou désillusionnés qu’ils sont devant la difficulté des procédures applicables quand la relation locative se dégrade.
    C’est pour cette raison que cette proposition de loi de la majorité, très différente des autres qui ont pu être proposées sur le sujet, comporte un volet sur les rapports locatifs, qui contient des mesures importantes. D’après l’article 4, le bail devra contenir une clause résolutoire qui prévoit la résiliation en cas de non-paiement du loyer. Pour obtenir la suspension de l’activation de cette clause lors d’une audience, le locataire devra en formuler explicitement la demande. L’article 5 tend à réduire les délais de procédure. Il prévoit également que les délais post-audience ne pourront pas dépasser un an, contre trois ans auparavant. L’article 7 tend à anticiper la prise en charge des locataires en difficulté par la CCAPEX afin de résoudre plus en amont les problèmes d’impayés.
    Nous défendons une loi à la fois ciblée et ambitieuse, qui aura pour conséquence d’améliorer durablement la confiance des petits propriétaires, et donc de faire revenir sur le marché les biens qui l’ont quitté.
    J’entends que ce texte fait hurler au sein de la NUPES. Mais, chers collègues, mettez-vous à la place d’un propriétaire (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES) :…

    Mme Farida Amrani

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    Mettez-vous donc à la place d’un locataire !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    …quel intérêt a-t-il, dans le contexte actuel, à investir dans l’immobilier, à garder en location des appartements, à demander moins de cautions, de certificats, de garanties ?
    Ce texte constitue un signal positif lancé en direction des parties prenantes de l’offre de logement en faveur de la sécurité et de la pérennité de leurs investissements. Nous en arrivons au cœur, à la raison d’être de ce texte. Pourquoi nous préoccuper de ces sujets ?

    Mme Danielle Simonnet

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    Pourquoi mépriser ainsi les pauvres ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Je vois les pancartes ; j’entends les slogans ; j’écoute les attaques. Certains disent que Kasbarian est obnubilé par le squat. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. François Piquemal

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    Monsieur Squat !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    D’autres disent que Kasbarian est insensible aux arguments de certaines associations. D’autres encore prétendent que Kasbarian n’a pas de cœur. D’autres enfin supputent – à tort – que Kasbarian est multipropriétaire. (Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES miment une grosse tête.) Je vous rassure tout de suite : je ne suis pas bailleur.

    M. Andy Kerbrat

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    Vous êtes juste au service des propriétaires !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Je ne possède que mon domicile, acheté à crédit, une chaumière dans un petit village d’Eure-et-Loir, près de Chartres.
    Mais revenons au fond du sujet, et partons d’un constat : le logement est le premier budget des Français, qu’il s’agisse du loyer ou du remboursement de l’emprunt. Les prix excessifs ont de multiples causes, au nombre desquelles figure, en première place, l’insuffisance chronique de l’offre. Nous connaissons une situation de déséquilibre de marché, où la demande continue de croître rapidement, pour diverses raisons, notamment démographiques, tandis que l’offre, elle, stagne, ou parfois même décroît dans certains territoires. Face à une telle conjoncture, nous devons impérativement – je l’affirme en tant que président de la commission compétente en la matière – nous donner les moyens d’une politique de l’offre ambitieuse et travailler à restaurer la confiance des acteurs du marché.
    Cette proposition de loi n’est qu’un des chantiers que nous menons sur le front de l’accroissement et de l’amélioration de l’offre de logements. D’autres chantiers sont en cours à l’Assemblée nationale. Nous menons des travaux pour amplifier la rénovation énergétique des logements dans le cadre d’une mission commune. Nous réfléchissons aux moyens de concilier la construction de logements neufs avec nos engagements écologiques. Annaïg Le Meur et Vincent Rolland travaillent sur la mobilisation des logements dans les zones tendues, où les besoins sont les plus forts. Des propositions sont élaborées, notamment par notre collègue Guillaume Vuilletet, pour réhabiliter le bâti dégradé et améliorer le traitement des copropriétés. Dominique Da Silva travaille sur le renforcement du lien entre logement et emploi.
    Vous l’aurez compris, cette proposition de loi n’est qu’une des briques d’une politique du logement plus vaste. Elle ne se substitue pas à d’autres initiatives encore à venir. Mais elle permet de donner un signal fort, favorable à l’économie du logement, destiné à encourager l’augmentation de l’offre de logements en mobilisant le parc existant et en incitant les particuliers à mettre leurs biens en location. Nous aurons l’occasion d’y revenir au cours de nos débats et, je l’espère, dans les prochains mois. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, Dem et HOR.)

    M. Mathieu Lefèvre

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    Excellent !

    Motion de rejet préalable

    M. le président

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    J’ai reçu de M. Boris Vallaud et des membres du groupe Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES) une motion de rejet préalable déposée en application de l’article 91, alinéa 5, du règlement.
    La parole est à M. Inaki Echaniz.

    M. Inaki Echaniz

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    Réforme des retraites, réforme de l’assurance chômage, réforme du RSA, lutte contre les impayés de loyers : en quelques mois, la majorité aura réussi à détériorer chacune des étapes de vie des Français déjà précaires.

    M. Philippe Gosselin

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    Cela n’a rien à voir !

    M. Inaki Echaniz

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    Depuis le début de la nouvelle législature, elle n’a en effet de cesse de pressurer les plus précaires et les victimes d’accidents de la vie.
    Aucune augmentation significative du salaire minimum alors que l’inflation dépasse les 5 % – et même les 10 % s’agissant des denrées alimentaires – et que les loyers explosent (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et GDR-NUPES) ; recul de l’âge de départ à la retraite alors que le taux d’emploi des plus de 55 ans plafonne à 55 % ; diminution drastique de la durée d’indemnisation du chômage alors qu’il existe 3 millions de chômeurs pour seulement 360 000 emplois vacants ; caractère nébuleux des conditions d’obtention du RSA alors qu’un tiers des bénéficiaires n’entreprennent déjà pas les démarches pour accéder à leurs droits… Aujourd’hui, c’est à celui qui n’a pas – ou plus – les moyens de payer son loyer d’être caricaturé par cette proposition de loi.
    Toutes ces mesures pourraient s’appliquer en cascade. Prenons un exemple dramatiquement concret : Pierre a 60 ans. Il lui reste quatre ans avant de toucher sa retraite,…

    Mme Farida Amrani

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    Qu’il n’aura pas !

    M. Inaki Echaniz

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    …mais après plusieurs années de travail payé au Smic, son employeur souhaite s’en séparer. Pierre ne retrouve pas d’emploi : il est trop vieux.

    Mme Farida Amrani

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    Et grâce à vous, il devient squatteur !

    M. Inaki Echaniz

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    Il n’a pas pu se constituer une réserve financière pour faire face aux imprévus. Le montant de l’indemnisation de son chômage est raboté de 25 %. Lorsque ses droits s’éteignent, il demande le RSA, mais son obtention est désormais soumise à de nouveaux critères. Or Pierre vit dans une zone rurale, à des dizaines de kilomètres du lieu où il devrait travailler pour toucher son allocation. Il ne peut plus payer son loyer, alors que sa demande de logement social est toujours en attente : il sera bientôt expulsé. Efficacement.

    M. Philippe Gosselin

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    Caricature !

    M. Inaki Echaniz

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    La kyrielle de conditions instaurées depuis plusieurs mois ne peut qu’accentuer les effets de la précarité : c’est un terreau fertile pour voir naître ou perdurer des situations d’impayés de loyers ou de squat.
    Combattre ces situations par l’augmentation des expulsions et la criminalisation des personnes au parcours de vie fragilisé est non seulement inutile, puisqu’une personne insolvable ne le sera pas moins après son expulsion, mais aussi, et surtout, contre-productif, car précariser des publics déjà fragiles ne fera que multiplier les squats, les impayés de loyers et les occupations de l’espace public que vous souhaitez combattre. Dans votre scénario, que deviendront toutes ces personnes, monsieur le rapporteur ?
    L’ensemble des associations, de nombreux syndicats, la Commission nationale consultative des droits de l’homme (CNCDH) se sont alarmés de la teneur de cette proposition de loi, dont les dispositions risquent d’entraîner une forte augmentation du nombre de sans-domicile fixe. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Sylvain Maillard

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    Mais non, c’est faux !

    M. Inaki Echaniz

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    Si combattre les situations abusives et les fraudes pour permettre aux propriétaires de récupérer leur bien et de louer sereinement est un objectif compréhensible,…

    M. Philippe Gosselin

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    Ah, quand même !

    M. Inaki Echaniz

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    …il ne faut pas perdre de vue que les cas médiatiques qui ont entraîné le dépôt de votre proposition de loi masquent des enjeux plus larges, liés à l’hyperconcentration de la propriété et à l’ampleur du mal-logement. Pas moins de 14,8 millions de personnes sont touchées par le mal-logement en France en 2023. Si elles sont moins médiatiques, ces situations n’en sont pas moins dignes d’intérêt, puisqu’avoir un logement est un facteur déterminant d’insertion et de sortie de la pauvreté.
    Pourtant, ce sujet est quasiment invisible dans les politiques menées par la majorité depuis plusieurs mois. La Fondation Abbé Pierre a d’ailleurs dénoncé un décalage inquiétant avec la réalité. Il est de notre responsabilité d’accorder au logement la place qu’il mérite dans le débat public en lui dédiant des textes législatifs ambitieux, qui répondent à l’urgence – et ce n’est pas de libérer des logements pour qu’ils deviennent vacants ou de criminaliser la misère sociale.
    L’urgence est partout. Bien sûr, je ne peux m’empêcher de penser à mon territoire touristique, où le prix des habitations est si élevé et le nombre de meublés en location longue si bas que les habitants en sont chassés. L’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), et plus récemment, l’Inspection générale des finances (IGF) alertent sur la nécessité de supprimer les niches fiscales incitant à la location de courte durée. Il est également nécessaire de renforcer les outils des maires pour lutter contre des pratiques illégales connues, comme le détournement du bail mobilité ou du congé pour vente, des abus fréquents en zone tendue. J’espère de tout mon cœur qu’un texte sur ce sujet sera discuté avant l’été.
    Mais, plus largement, je pense à l’état de notre parc social et au manque de logements sociaux, pour lesquels la demande est chaque année plus importante. Fin 2020, plus de 2 millions de dossiers étaient en cours d’instruction, et de nombreux ayants droit, découragés, ne réalisent même plus les démarches pour obtenir un logement social.
    Je pense également au faible nombre de places d’hébergement d’urgence, alors que depuis 2001, le nombre de SDF a triplé et le nombre de femmes vivant dans la rue alors qu’elles sont enceintes ou ont des enfants en bas âge ne cesse de croître. En France, en 2023, il existe dix fois plus de logements vides que de SDF : faisons marcher notre bon sens ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Je pense, en outre, à tous les outils ingénieux qui permettent de sécuriser la relation locative, et dont vous ne vous saisissez pas : la garantie Visale – visa pour le logement et l’emploi –, publique et gratuite, est sous-utilisée alors qu’elle permet une indemnisation rapide en cas d’impayés de loyer ou de dégradation du bien. Le principe de la garantie universelle et obligatoire des loyers est aussi source potentielle d’apaisement dans les rapports locatifs, et mériterait à ce titre votre attention, mais vous ne vous y intéressez pas.
    Je pense, enfin, à l’importance d’améliorer le pouvoir d’achat des Français en agissant contre la hausse des loyers et des charges, qui représentent aujourd’hui 28 % de leurs dépenses, contre 20 % dans les années 1990, et en soutenant l’achat d’habitation grâce à des dispositifs comme l’aide personnalisée au logement pour l’accession à la propriété, dite APL accession, que vous avez supprimée alors qu’elle permettait aux ménages à faibles revenus de devenir propriétaires – une arme précieuse compte tenu de la crise du logement et quand on sait qu’il faut six générations pour sortir de la pauvreté.
    Monsieur le rapporteur, occuper illégalement un logement ou ne plus payer son loyer est rarement le jeu de personnes malhonnêtes aux revenus confortables : je ne peux croire que l’exemple des « profiteurs » que vous citez pour justifier votre texte représente la majorité des cas concernés.

    M. Philippe Gosselin

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    La mauvaise foi existe aussi, vous en êtes d’ailleurs un exemple !

    M. Inaki Echaniz

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    De nombreux Français sont sous-payés et mal-logés : il est temps de regarder comment « faire plus pour ceux qui ont moins » – ce n’est pas de moi : c’est le slogan de la stratégie nationale de prévention et d’action contre la pauvreté d’Emmanuel Macron – et comment agir contre la crise immobilière et les comportements abusifs de certains propriétaires.

    M. Philippe Gosselin

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    Vous n’y contribuez pas, en tout cas ! Vous encouragez les impayés !

    M. Inaki Echaniz

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    Sur un marché très tendu, certains bailleurs sont en position de force et en profitent pour ne pas respecter la loi : conservation de caution sans fondement, loyers exorbitants outrepassant l’encadrement légal, location de logements insalubres assortie d’un refus d’effectuer des travaux. Ce sont autant de sujets que, par honnêteté, il faut évoquer en détail.

    M. Philippe Gosselin

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    C’est vrai, ce sont des sujets importants.

    M. Inaki Echaniz

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    L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme garantit le droit au respect du domicile, entendu au sens large. L’article 1er de la loi du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement dispose : « Garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble de la nation. »

    M. Philippe Gosselin

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    À condition d’être de bonne foi !

    M. Inaki Echaniz

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    Ces principes devraient être la boussole de nos politiques publiques et constituer une priorité au moment de prendre des décisions en matière de logement : je me désole qu’ils n’aient pas inspiré la loi Asap ni cette proposition de loi. Il existe pourtant des solutions qui n’opposent pas, ne précarisent pas, n’isolent pas.
    Considérant que le texte n’emploie pas la bonne méthode ; qu’il aura des conséquences dramatiques pour les personnes concernées, dont la situation particulière ne pourra être correctement prise en considération ; qu’il pourrait avoir des effets imprévus sur les baux verbaux, ou encore sur le droit de grève, qui pourrait être menacé au sein des locaux à usage économique, le groupe Socialistes et apparentés vous propose d’adopter cette motion de rejet préalable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    Mme Caroline Fiat

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    Bravo !

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Cher collègue qui avez porté la voix du groupe Socialistes et apparentés, vous vous êtes dit désolé que les dispositions de la loi Asap aient contribué à renforcer la procédure expresse d’expulsion. Je fais remarquer à notre assemblée qu’à l’époque, votre groupe avait soutenu cette démarche – vous n’étiez pas encore là, mais Mme Jourdan, en particulier, était présente, comme en témoignent les résultats du scrutin no 2916. Depuis, le groupe Socialistes et apparentés s’est manifestement un peu durci – ou un peu « mélenchonisé ». (« C’est vrai ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    M. Sylvain Maillard

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    Exactement ! Il s’est « nupisé » !

    M. le président

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    Nous en venons aux explications de vote, dans le silence de circonstance, mes chers collègues.
    La parole est à M. Aurélien Taché.

    M. Aurélien Taché (Écolo-NUPES)

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    Nous voilà donc dans la dernière lecture de ce que vous auriez pu appeler la PPL « CNews » ou « BFM » : une proposition de loi honteuse, qui vient uniquement en réaction aux 170 cas de squats dans notre pays, que la droite et l’extrême droite récupèrent pour stigmatiser toujours les mêmes – les plus pauvres et les étrangers. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)
    Comment une majorité comme la vôtre peut-elle en arriver à s’allier à la droite et au Rassemblement national pour voter un texte si indigne et si préoccupant pour le droit au logement, alors même que 4 millions de personnes sont mal-logées dans notre pays – cela vient d’être rappelé ? Au moins, chers collègues, vous tenez enfin la majorité derrière laquelle court désespérément votre Première ministre !
    Je me demande tout de même comment nous avons pu en arriver là. Comment un président de la République élu en 2017 sous une bannière progressiste peut-il aujourd’hui préférer criminaliser la pauvreté plutôt que de chercher à l’éradiquer ? Sur ce sujet comme sur celui des libertés, nous revenons au XIXe siècle, quand la bourgeoisie voyait en tout membre de la classe laborieuse un potentiel délinquant.

    M. Philippe Gosselin

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    Oh là là…

    Mme Virginie Duby-Muller

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    C’est caricatural !

    M. Aurélien Taché

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    Votre bilan en matière de politique du logement est calamiteux ; pourtant, vous choisissez de mettre ce texte en avant. Au fond, il y a une certaine logique : au flop du dispositif MaPrimeRénov’, qui a conduit à distribuer moins de 50 000 primes alors que l’Agence nationale de l’habitat (Anah) en espérait au moins 200 000, vous répondez par la répression du collectif Dernière rénovation. À la grogne contre la baisse des APL – à hauteur de 5 euros pour les particuliers et de 50 euros pour les habitants des HLM –, vous répondez par une répression féroce des manifestations des étudiants inquiets pour leur avenir et laissez s’effondrer la production de logements sociaux. Face à l’explosion du nombre de sans-abri, qui sont désormais plus de 330 000, vous criminalisez les impayés de loyers et laissez votre police les rudoyer, comme nous avons pu le voir récemment.

    Mme Maud Bregeon

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    C’est votre police aussi !

    M. Aurélien Taché

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    À quand la réintroduction du délit de vagabondage, pour enfin envoyer en prison les personnes sans domicile ?
    Bref : toujours à court d’idées pour éradiquer la pauvreté, chers collègues, vous en débordez pour la criminaliser. Comme avec les retraites, vous prenez les choses à l’envers : les Écologistes voteront évidemment en faveur de cette motion de rejet. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Peu.

    M. Stéphane Peu (GDR-NUPES)

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    Cette proposition de loi est paradoxale à plusieurs titres.
    Premier paradoxe : alors que votre bilan en matière de politique du logement est absolument catastrophique – jamais aussi peu de logements n’ont été construits dans notre pays – et que la crise du logement ne cesse de s’aggraver, entraînant une hausse constante de la part du budget des ménages consacrée à ce poste, plutôt que d’essayer d’apporter des réponses à cette situation, vous proposez un texte qui, au prétexte de lutter contre le squat, vise en réalité les personnes qui rencontrent des difficultés pour payer leur loyer – car c’est bien sur ce sujet que se concentre votre proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Philippe Gosselin

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    Non ! Vous mélangez tout et encouragez les inégalités !

    M. Stéphane Peu

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    Autre paradoxe : c’est bien la droite sénatoriale qui a tenté d’éliminer les aspects les plus extrêmes de votre proposition initiale, qui était davantage marquée du sceau de l’extrême droite que par votre prétendue centralité. Votre texte vient rompre avec trente ans d’une politique sociale par laquelle tous les gouvernements successifs ont essayé de concilier les droits des propriétaires avec ceux des locataires. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)
    En cet instant, j’ai une pensée pour Jean-Louis Borloo, qui doit être bien triste en voyant nos débats.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Vous ne devriez pas parler à sa place !

    M. Stéphane Peu

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    Résumons : votre proposition de loi tend à entraîner un incroyable déséquilibre. À vos yeux, un propriétaire a toujours a priori raison, et un locataire a priori tort. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Pourquoi un squatteur aurait-il a priori raison ?

    M. Stéphane Peu

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    Partant, tout ce que vous allez parvenir à faire, c’est offrir un immense cadeau aux marchands de sommeil. Moi qui connais la réalité des quartiers populaires et qui suis un praticien de la politique du logement, je trouve que c’est une véritable honte. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)

    M. Philippe Gosselin

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    On parle des petits propriétaires qui sont spoliés ! Vous mélangez tout !

    M. le président

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    La parole est à M. Paul Molac.

    M. Paul Molac (LIOT)

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    Eskerrik asko, Inaki :…

    M. Sylvain Maillard

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    Je n’ai pas compris ! Traduction ?

    M. Paul Molac

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    …une fois n’est pas coutume, c’est en basque que je remercie Inaki d’avoir pointé plusieurs problèmes de la politique du logement. Il a notamment déploré les deux erreurs qu’ont été la fin de l’APL accession et la ponction de l’État sur les APL.
    Comme moi, élu de Bretagne, vous venez d’une zone tendue qui connaît de gros problèmes en matière de logement : le Pays basque. Néanmoins, cher collègue, vous prêtez à cette proposition de loi un poids qu’elle n’a pas.

    M. Philippe Gosselin

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    Exactement !

    M. Paul Molac

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    L’objectif du texte est tout d’abord de pouvoir mettre fin le plus rapidement possible à un squat. Plusieurs scandales ont éclaté, après que des personnes en déplacement pour les vacances ou parties voir leurs enfants ont retrouvé leur logement squatté. Ce n’est pas acceptable – ou alors, quelque chose ne va pas.
    Ensuite, le texte vise à assurer le paiement des loyers. Cet aspect de la proposition de loi est peut-être plus contestable, c’est vrai, mais les ajouts du Sénat ont permis d’aboutir à un texte beaucoup plus équilibré. Personnellement, j’aurais préféré qu’on prévoie directement une garantie universelle des loyers (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES)

    Mme Annie Genevard

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    Et qui la paierait ?

    M. Paul Molac

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    …ce qui aurait permis de sécuriser certains petits propriétaires, comme il y en a dans ma circonscription, qui se retrouvent en difficulté parce qu’ils ne touchent plus les loyers du logement – un seul, souvent – qu’ils louent pour compléter leurs revenus – une pension de retraite, par exemple – ou parce qu’ils rencontrent des difficultés professionnelles.
    Je n’en dirai pas davantage, mais nous aurions dû aller jusque-là : cela nous aurait enlevé une épine du pied.

    Mme Annie Genevard

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    Et qui paierait cette garantie universelle ?

    M. Paul Molac

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    Pour autant, monsieur le rapporteur, nous ne voterons pas pour la motion de rejet : nous souhaitons pouvoir continuer d’examiner et d’améliorer le texte.

    M. le président

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    Sur la motion de rejet préalable, je suis saisi par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Paul Midy.

    M. Paul Midy (RE)

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    Cette motion n’est pas acceptable : elle n’a aucun sens, car elle reviendrait à nier la réalité, le caractère ubuesque de situations dans lesquelles se trouvent beaucoup de nos compatriotes. Je vais vous en donner deux exemples. Prenons tout d’abord une affaire qui remonte à quelques mois : un logement squatté, que son propriétaire ne peut donc entretenir, se dégrade ; un garde-corps contre lequel s’appuyait le squatteur se rompt, ce dernier tombe, se blesse, demande réparation (M. Jean-François Coulomme s’exclame), et la justice condamne le propriétaire à lui verser 60 000 euros.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est ubuesque, en effet !

    M. Paul Midy

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    C’est là une double peine intolérable : indemniser le squatteur qui est cause que le bien n’a pu être réparé !

    M. Stéphane Peu

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    Ce n’est pas très clair…

    M. Philippe Gosselin

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    Si, si : nous avons tous bien compris !

    M. Paul Midy

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    Second exemple : Cécilia…

    M. Alexis Corbière

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    Sarkozy ?

    M. Paul Midy

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    …a acheté il y a six ans un appartement de 35 mètres carrés en Île-de-France. Elle le loue à un couple qui, dès le deuxième mois, cesse de verser le loyer ; depuis ce temps, il occupe le logement sans rien payer (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES) et poste chaque semaine sur les réseaux sociaux des photos de son week-end à Marrakech ou dans quelque autre ville tout aussi sympathique. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.) Face à 75 000 euros d’impayés, Cécilia, quant à elle, est contrainte de vendre avec une forte décote cet appartement squatté et de déménager elle-même, ne pouvant plus acquitter ses charges. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Dans de tels cas, ce texte ne changera rien !

    M. Paul Midy

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    Je le répète, de telles situations ne sont pas plus acceptables qu’il n’est correct de déposer une motion de rejet d’un texte qui vise à y remédier ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE, ainsi que sur les bancs des commissions. – Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Vous savez bien que c’est faux !

    M. le président

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    S’il vous plaît, chers collègues, voulez-vous bien écouter celui d’entre vous qui a la parole !
    La parole est à M. Michaël Taverne.

    M. Michaël Taverne (RN)

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    Il n’est pas étonnant qu’une fois de plus, la NUPES veuille rejeter un texte nécessaire…

    M. Stéphane Peu

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    Dupond-Moretti dans le texte !

    M. Michaël Taverne

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    …à la défense des honnêtes gens, du droit à la propriété, tout en présentant l’intérêt d’améliorer l’accompagnement des locataires en difficulté. Vous nous donnez à longueur de journée des leçons de justice, mais, comme d’habitude, votre raisonnement demeure hors-sol et profondément injuste. Vous avez évoqué l’extrémisme, opposé les locataires aux propriétaires : hors sujet ! De fait, vous préférez défendre ceux qui agissent en toute illégalité plutôt que ceux qui respectent les lois de la République, devenant ainsi des victimes désignées. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.) Pensez-vous un instant à ces retraités qui, après une vie de travail, en sont réduits à dormir dans leur voiture pendant que des squatteurs occupent leur maison ?
    Notre première lecture de ce texte a eu lieu en toute sérénité, en toute responsabilité : ce doit pouvoir être également le cas de la deuxième. Une nouvelle fois, l’extrême gauche se laisse guider par l’idéologie ; c’est pourquoi le groupe Rassemblement national votera contre la motion de rejet, car nous voulons débattre du texte et continuer de l’améliorer. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. William Martinet.

    M. William Martinet (LFI-NUPES)

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    La Macronie fait preuve d’une certaine cohérence : chaque fois que des gens sont, socialement parlant, en difficulté, vous cherchez à leur enfoncer la tête sous l’eau. (« Exactement ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Tel est le cas, dans cette proposition de loi, des locataires. Les loyers sont aujourd’hui très élevés ; beaucoup de nos concitoyens ont du mal à les payer, même en travaillant dur.

    M. Philippe Gosselin

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    Ce n’est pas le sujet !

    M. Sylvain Maillard

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    Il ne s’agit pas des locataires, mais des squatteurs !

    M. le président

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    Chers collègues, s’il vous plaît !

    M. William Martinet

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    Ils travaillent, je le répète, et doivent pourtant faire des sacrifices pour être en mesure de boucler leur budget à la fin du mois !
    L’alimentation, la santé, la scolarité des enfants deviennent autant de problèmes. Depuis un an, qu’avez-vous fait pour eux ? Premier acte : vous avez augmenté de 3,5 % l’indice de référence des loyers (IRL), c’est-à-dire pris la décision inédite d’une hausse des loyers, en cours de bail, de 3,5 % ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Farida Amrani

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    Eh oui !

    M. William Martinet

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    Deuxième acte : en pleine crise énergétique, vous refusez que les copropriétés et bailleurs sociaux bénéficient du tarif régulé de l’énergie, entraînant, partout dans le pays, l’explosion du montant des charges locatives – ce sont 50, 100, 150 euros de plus que les locataires doivent verser tous les mois. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES.) Troisième acte : cette future loi dite Kasbarian, grâce à laquelle les expulsions iront plus vite,…

    M. Philippe Gosselin

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    Dans des cas bien précis !

    M. William Martinet

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    …le juge sera moins consulté, l’arbitraire du préfet accru, les possibilités de traitement social réduites. De pauvres gens qui squattent un garage vide risqueront désormais la prison ! En bref, après avoir créé toutes les conditions nécessaires pour que nos concitoyens ne puissent plus payer leur loyer, vous faites en sorte de faciliter leur expulsion. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES, ainsi que sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES. – M. Inaki Echaniz applaudit également.) Quel est votre but, chers collègues ? Ne voyez-vous pas que la situation sociale est catastrophique, qu’il y a des gens désespérés ? (Mêmes mouvements. – Exclamations sur quelques bancs du groupe RE.) Voulez-vous battre le record du nombre de personnes sans abri ? Souhaitez-vous l’explosion ?

    M. le président

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    Merci, cher collègue.

    M. William Martinet

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    Nous voterons pour la motion de rejet ; retirez cette proposition de loi, elle est irresponsable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES, dont quelques membres se lèvent, ainsi que sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES. – M. Inaki Echaniz applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Philippe Gosselin.

    M. Philippe Gosselin (LR)

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    Au nom du groupe Les Républicains, je souhaiterais faire quelques remarques. Il est indéniable que la France connaît une crise du logement, que rarement l’on en a aussi peu construit – il y a là une carence de l’État, mais pas seulement. La difficulté à se loger est réelle. Reste que nous ne parlons pas ici du droit au logement, car il n’existe aucun droit à occuper sans titre un logement dont on n’est pas propriétaire ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, RN, LR et Dem.)

    Mme Natalia Pouzyreff

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    Eh oui !

    M. Philippe Gosselin

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    Nous visons des occupations illicites et de mauvaise foi. Sur certains bancs, bien sûr, on défend les squatteurs contre le petit propriétaire, cet affreux capitaliste ! On se fiche pas mal des années de travail que représente sa maison ; on l’écarte, on le spolie… (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. le président

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    Un instant, monsieur Gosselin. Chers collègues, n’empêchez donc pas les orateurs d’exprimer leur point de vue. J’ai demandé et obtenu le silence pour votre intervenant ; laissez à présent parler M. Gosselin ! (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) En attendant la suite du débat, ne couvrez pas la voix de l’orateur.

    M. Alexis Corbière

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    Si, nous en avons le droit !

    M. le président

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    C’est un principe : on respecte les orateurs. Cela suffit, monsieur Corbière ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, RN et LR. – M. Alexis Corbière s’exclame.) Monsieur Gosselin, vous seul avez la parole !

    M. Philippe Gosselin

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    Merci, monsieur le président ! Je disais donc que le droit au logement ne confère aucun droit à occuper illégalement un logement. Ceux qui le font savent pertinemment qu’ils spolient un petit ou parfois un plus grand propriétaire, dont il importe de rappeler que lui aussi a des droits. Où allons-nous lorsqu’une justice incompréhensible le condamne à la requête du squatteur ? Quoi qu’il en soit, il n’est évidemment pas question de vous suivre dans cette voie : nous voterons contre la motion de rejet. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RE, RN et Dem.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Très bien !

    M. le président

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    La parole est à M. Romain Daubié, que nous écouterons également en silence.

    M. Romain Daubié (Dem)

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    La proposition de loi que nous étudions vise à protéger les logements contre l’occupation illicite : par cette motion de rejet préalable, certains de nos collègues souhaitent nous empêcher de jouer notre rôle de législateurs et d’avoir un débat utile. C’est pourquoi le groupe Démocrate votera contre, car nous voulons que la discussion ait lieu. Dans nos circonscriptions respectives, nous avons souvent été sollicités en raison de problèmes d’occupation illégale ; ceux qui se sont investis aux côtés du rapporteur ont pris connaissance des témoignages poignants de propriétaires spoliés de leurs droits. Encore une fois, l’Assemblée nationale peut et doit débattre, légiférer en vue de remédier à ces situations. Ne pas le faire serait ajouter de l’injustice à l’injustice !

    M. Sylvain Maillard

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    Il a raison !

    M. Romain Daubié

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    Les gens honnêtes, le droit à la propriété doivent être défendus. Depuis le début de l’examen du texte, notre groupe veille à ce que soit bien établie la distinction entre squatteur et occupant temporairement défaillant : il n’est pas question de multiplier les expulsions de locataires de bonne foi (« Mais si ! » sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES) victimes des aléas de la vie, mais de faire respecter, je le répète, le droit à la propriété, qui a valeur constitutionnelle. Ce texte mérite donc un débat de fond, que nous appelons de nos vœux ; c’est pourquoi, encore une fois, nous rejetons la motion. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RE et Dem. – M. le rapporteur et M. Jean-Yves Bony applaudissent également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Vincent Thiébaut.

    M. Vincent Thiébaut (HOR)

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    Squatter, mes chers collègues, est illégal et ne constitue pas un droit, mais un délit. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) L’associer à l’exercice du droit au logement, c’est confondre deux choses bien distinctes ! Par ailleurs, si la crise du logement ne fait aucun doute, ne la mettez pas entièrement sur le dos de l’État : je ne dresserai pas ici la liste des grandes villes qui ont décidé de geler les permis de construire (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE),…

    M. Sylvain Maillard

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    Eh oui !

    M. Vincent Thiébaut

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    …aggravant la situation dans des zones déjà tendues. Je pourrais vous citer leurs noms ! La municipalité de Strasbourg, à qui l’État verse 48 millions d’euros par an au titre du logement d’urgence, a-t-elle construit quoi que ce soit ?

    Mme Sandra Regol

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    Elle a créé plus de 600 places !

    M. Vincent Thiébaut

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    Non et non ! Cessons donc ce débat, qui n’a aucun sens. En outre, je ne vous comprends pas : contrairement à ce que vous affirmez, ce ne sont pas tant les bailleurs, les grands propriétaires,…

    Mme Aurore Bergé

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    Plutôt les petits !

    M. Vincent Thiébaut

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    …qui pâtissent du squat que des gens qui ont travaillé toute leur vie (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES) en vue d’acquérir un bien – résidence principale, secondaire, ou investissement locatif dont le revenu devait compléter leur pension de retraite. Les exemples choisis par Paul Midy étaient éloquents.

    M. Loïc Prud’homme

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    Ce n’est pas vrai ! Ces cas de figure, c’est peanuts !

    M. Vincent Thiébaut

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    À ces gens frustrés de la récompense de leur labeur, nous devons justice. Le squat n’est pas admissible !

    Mme Danielle Simonnet

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    La chasse aux pauvres non plus !

    M. Vincent Thiébaut

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    Accéder à la propriété est une source de fierté, défendre les petits propriétaires relève de la justice sociale. (Exclamations sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.) Pour toutes ces raisons, vous aurez compris, chers collègues, que les membres du groupe Horizons ne s’associeront pas à la motion de rejet préalable et voteront même contre avec grand plaisir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe RE et quelques bancs du groupe Dem.)

    M. le président

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    Je mets aux voix la motion de rejet préalable

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        185
            Nombre de suffrages exprimés                181
            Majorité absolue                        91
                    Pour l’adoption                60
                    Contre                121

    (La motion de rejet préalable n’est pas adoptée.)
    (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Discussion générale

    M. le président

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    Dans la discussion générale, la parole est à M. Aurélien Taché.

    M. Aurélien Taché

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    Puisqu’il va finalement falloir que nous débattions de ce texte, je le répète aujourd’hui avec force : la proposition de loi que nous avons à étudier aujourd’hui est certainement l’une des pires que j’ai eue à examiner dans cet hémicycle depuis six ans. En installant insidieusement l’idée qu’être mal logé ou être pauvre serait un délit, vous franchissez une limite qu’aucune majorité n’avait osé franchir avant vous. Je pensais même que vous risquiez d’effrayer une partie de la droite républicaine sans laquelle votre majorité est pourtant condamnée, mais je suis rassuré : il n’en est rien.

    Mme Annie Genevard

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    Cette proposition de loi vise les squatteurs, et nous l’assumons.

    M. Aurélien Taché

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    Car si vous vous défendez depuis le début de vouloir envoyer en prison les mauvais payeurs, c’est pourtant la peine que risquait un locataire dans la version initiale de votre texte.
    Eh oui, chers collègues de la majorité : pour que cette disposition soit supprimée, il a fallu que le Sénat, dont la majorité est à droite, revienne – grâce aux Écologistes, je tiens à le souligner – sur votre volonté de sanctionner d’une peine de six mois de prison les locataires en situation de loyers impayés continuant d’occuper un logement. Une amende exorbitante reste néanmoins prévue. Que voulez-vous ? Réinventer la prison pour dettes, qui est pourtant abolie en France depuis 1867 ? Je le dis avec gravité, monsieur le rapporteur, et au nom de tous les écologistes : je ne me résignerai jamais à ce que la justice de mon pays demande à une femme avec des enfants de choisir entre la rue et la prison si, désormais incapable de payer son loyer, elle a trouvé un immeuble où se réfugier. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES. – M. Inaki Echaniz applaudit également.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Arrêtez les slogans !

    M. Aurélien Taché

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    Chers collègues de la majorité, votre proposition de loi est dangereuse et honteuse à bien des égards.
    Elle l’est d’abord sur le plan politique. J’ai lu avec attention votre rapport, monsieur Kasbarian, et j’ai relevé ce passage dans lequel vous soulignez qu’au Parlement « le nombre de textes déposés à ce sujet au cours des dernières années témoigne de l’intérêt accordé à ces sujets dans les permanences des parlementaires ». C’est vrai : rien que pour l’extrême droite, je compte deux propositions de loi de Marine Le Pen, une du vice-président Sébastien Chenu et une de Stéphane Ravier, désormais membre du parti d’Éric Zemmour. Neuf autres ont été déposées par les groupes Les Républicains de l’Assemblée et du Sénat.

    Mme Annie Genevard

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    Absolument.

    M. Aurélien Taché

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    Cela témoigne d’un intérêt, certes, mais de la part de la droite et de l’extrême droite qui, sur ce thème comme trop souvent, font de la récupération politique et politicienne sur le dos des plus fragiles. (Rires sur les bancs des groupes RN et LR.)

    Mme Annie Genevard

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    Pas vous, peut-être ?

    M. Frédéric Boccaletti

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    Vous savez ce dont vous parlez !

    M. Aurélien Taché

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    Nul doute que leurs voix s’ajouteront et se mêleront aux vôtres, tant le texte que vous proposez est destiné aux propriétaires et criminalise les plus précaires.
    Cette proposition de loi est donc préoccupante sur le plan politique, mais aussi et surtout du point de vue du droit au logement. Jamais, en France, celui-ci n’a été à ce point menacé. Peu de monde s’en émeut, pourtant, comme si c’était en quelque sorte une fatalité. En effet, le texte que nous étudions aujourd’hui va toujours plus loin, reprenant une disposition du Sénat qui étend la violation de domicile aux logements non meublés. La notion de squat y est même étendue aux situations dans lesquelles il n’est pas possible de prouver que le maintien dans le logement a été précédé d’une introduction forcée ! Le tout dans un contexte où la rénovation thermique n’avance pas et où la construction de logements sociaux s’effondre : alors qu’elle s’établissait à 123 000 logements en 2016, elle se situe aux alentours de 95 000 logements par an depuis l’application de votre odieuse réforme de la réduction de loyer de solidarité (RLS).
    Mes chers collègues, absolument rien ne va dans votre texte. Alors qu’il y a urgence à s’attaquer aux inégalités d’accès au logement, vous allez voter une loi qui permettra aux propriétaires délinquants de continuer à exploiter tranquillement les souffrances des plus précaires. Votre texte prévoit en effet l’insertion systématique dans les contrats de location d’une clause de résiliation automatique en cas d’impayés de loyers. Je vous rappelle tout de même que huit personnes sont décédées rue d’Aubagne à Marseille et que l’été dernier, une adolescente a perdu la vie dans un incendie à Garges-lès-Gonesse parce que son logement était totalement insalubre.
    Alors, collègues de la majorité, à votre inextinguible soif de répression – que nous constatons tous les jours en ce moment –, je vais une nouvelle fois opposer quelques chiffres. Depuis le début du parcours législatif du texte, en effet, vous semblez faire comme s’ils n’existaient pas. La Fondation Abbé Pierre estime à 330 000 le nombre de personnes sans domicile en France en 2022, soit 30 000 de plus que l’année précédente. Fin août 2022, 42 000 enfants vivaient dans des hébergements d’urgence, dans des abris de fortune ou dans la rue, selon les données de l’Unicef France et de la Fédération des acteurs de la solidarité. C’est une crise du logement inédite depuis la seconde guerre mondiale ! Surtout, chers collègues, voici un chiffre sur lequel vous ne pouvez fermer les yeux : 623 personnes sont mortes dans la rue en 2021 !
    Votre proposition de loi va bien au-delà du durcissement des peines à l’encontre de ceux que vous appelez des squatteurs. D’abord, le droit actuel prévoit déjà de protéger le domicile d’une occupation et il est donc totalement inutile et injuste de vouloir condamner les occupants à des peines allant jusqu’à deux ans de prison et 30 000 euros d’amende. Pensez-vous que des personnes avec si peu de ressources soient effrayées à l’idée de cette amende ? Vous voulez des peines de deux ans d’emprisonnement pour ceux qui s’abritent, avec leur famille, dans des immeubles souvent vides depuis de trop longues d’années : vous souhaitez donc les envoyer en prison plutôt que de leur permettre de se loger, alors qu’il y a eu 623 morts dans la rue !
    Votre proposition de loi se contente de mettre sous le tapis les véritables enjeux actuels du logement. Vous prétendez sécuriser les rapports entre propriétaires bailleurs et locataires mais vous ne vous attaquez jamais au problème à la racine : pour nous, Écologistes, il est urgent – Paul Molac vient de le rappeler – de s’attaquer à la question de la garantie universelle des loyers, afin de rassurer les propriétaires et de permettre à tous d’être logés sans crainte. C’est une question de droit et de dignité. C’est en permettant de sécuriser locataires et propriétaires en amont de la location, avec un système de garantie véritablement universelle, que nous permettrons l’accès au logement. S’attaquer à ce sujet en ne ciblant que les impayés, c’est tomber dans la démagogie : cela ne contribuera jamais à favoriser une location sereine pour l’ensemble des parties, et cela reviendra toujours à criminaliser la pauvreté.
    Je vous en conjure, chers collègues : n’entachez pas votre mandat en votant cette loi scélérate ; réfléchissons plutôt ensemble à la façon de faire du droit au logement une réalité. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES et sur quelques bancs du LFI-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Peu.

    M. Stéphane Peu

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    Décidément, chers collègues, vous êtes incorrigibles : toujours pressés quand il s’agit de retirer des droits et toujours entêtés, persuadés d’avoir raison seuls contre tous. En 2017, le candidat Emmanuel Macron promettait le « zéro SDF ». Pourtant, aussitôt élu Président de la République, il s’attaquait au pouvoir d’achat des locataires les plus modestes en réduisant l’aide personnalisée au logement et aux organismes HLM en leur imposant notamment la réduction de loyer de solidarité – contribuant ainsi à une aggravation profonde de la crise du logement dans notre pays. Résultat : notre pays n’a jamais aussi peu construit de logements, le nombre de demandeurs de logement HLM n’a jamais été aussi important et les victimes de la crise du logement sont toujours plus nombreuses. Mais vous, vous ne trouvez pas mieux que de proposer un texte qui va engendrer plus de détresse, plus de chaos et, accessoirement, engorger un peu plus des tribunaux saturés sans régler aucun problème.
    « Entêtés », c’est bien le mot qui vous caractérise quand vous persévérez contre l’avis de tous les acteurs du logement qui dénoncent cette proposition de loi et vous mettent en garde. Tout cela, avouez-le, est assez désespérant ! Lors de l’examen du texte en première lecture, en novembre dernier, notre groupe GDR-NUPES s’était fermement opposé à l’ensemble de ses dispositions en vous expliquant, exemples à l’appui, qu’il prend le contre-pied des politiques conduites depuis plus de trente ans pour reconnaître le droit au logement et intégrer l’accès au logement et la prévention des expulsions locatives dans les objectifs prioritaires des politiques sociales. Nous avons tenté de vous montrer un autre chemin, celui de la cohésion sociale et de l’équilibre. Mais vous avez tout rejeté en bloc. Heureusement, son examen au Sénat a permis d’émousser légèrement les arêtes les plus acérées de votre texte.
    Vous mettez en avant des situations d’occupations illicites de logements – que l’arsenal juridique existant, aussi dramatiques soient-elles, peut déjà faire cesser – pour vous en prendre, en réalité, aux locataires en difficulté. Ce texte ne vise pas les squats, mes chers collègues : il vise les locataires en situation d’impayé de loyers. Vous nous proposez ainsi un train de mesures profondément régressives, après avoir fait du logement social le parent pauvre des politiques publiques et après avoir réformé les aides au logement sur le dos des allocataires.
    Dans un contexte de flambée des prix de l’énergie, d’augmentation des prix et de stagnation des salaires et des pensions, l’urgence n’est naturellement pas à saper mais au contraire à défendre le droit au logement, le droit de chacun à une vie digne, quelles que soient ses difficultés. Oui, nous pensons qu’il est possible de prévenir les drames humains tout en protégeant les droits des propriétaires. (M. Inaki Echaniz applaudit.) Cela impose de prendre des mesures, mais pas celles que vous nous proposez : d’autres, plus urgentes et plus utiles, comme la remise sur pied de la garantie universelle des loyers, le renforcement des moyens d’hébergement et la relance ambitieuse de la construction de logements HLM. (MM. Inaki Echaniz et Aurélien Taché applaudissent.) Car loin de pacifier et de sécuriser les relations entre propriétaires et locataires, vos mesures vont les empoisonner un peu plus. Vous n’avez cessé de rappeler en commission comme en séance que l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen érige la propriété en un droit « inviolable et sacré ».

    M. Paul Midy

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    Exactement.

    M. Stéphane Peu

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    Vous avez raison, mais vous oubliez simplement de rappeler qu’en République, ce droit de propriété que vous érigez en valeur suprême a pour limite l’intérêt général, et que l’on ne peut pas en faire un usage prohibé par les lois ou les règlements. Vous omettez surtout sciemment de rappeler que le droit au logement a lui aussi une valeur constitutionnelle, que votre texte bafoue.
    Une fois encore, nous avons pris soin de déposer des amendements visant à parvenir à une loi d’équilibre. Nous espérons qu’ils sauront vous convaincre, faute de quoi nous ne pourrons pas voter en l’état cette proposition de loi indécente. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et Écolo-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. Paul Molac.

    M. Paul Molac

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    Le logement est la pierre angulaire de l’insertion : sans toit, pas d’accès à l’emploi, à la scolarité ou à la santé. Pourtant, nos concitoyens sont de plus en plus nombreux à éprouver des difficultés à se loger. Les zones tendues, qui se cantonnaient jusqu’alors à quelques villes, s’étendent à de nouveaux territoires, en particulier à toutes nos zones touristiques. Les prix des loyers grimpent et jamais nos concitoyens n’ont consacré autant d’argent pour disposer d’un simple toit. Cette situation pèse sur leur pouvoir d’achat. Alors que les alertes se multiplient, l’exécutif ne semble pas toujours prendre la mesure de la crise qui couve ! La politique du logement menée par le Gouvernement nous mène vers des difficultés. Le choc de l’offre promis par le Président de la République lors du premier quinquennat n’est jamais arrivé, et ce second mandat démarre avec des chiffres de construction au plus bas : moins de 100 000 agréments ont été accordés pour des logements sociaux en 2022, alors qu’on nous avait promis 125 000 logements par an !
    Vous me direz que cette proposition de loi n’a pas vocation à répondre à la crise du logement en France. Pour ma part, je considère que nous ne pouvons légiférer en oubliant ce contexte critique. Nous ne pouvons rester sourds aux alertes des associations, qui s’inquiètent d’une précarisation des locataires les plus fragiles. Rappelons-le : l’inflation, qui se répercute sur les coûts de l’énergie et sur les loyers, rend difficilement soutenables les fins de mois pour une partie des Français. Ce n’est une surprise pour personne, le risque d’impayé des charges et des loyers augmente.
    Dans ce contexte, la volonté initiale de criminaliser les locataires en difficulté était très contestable. Fort heureusement, les discussions à l’Assemblée puis au Sénat ont permis de supprimer cette disposition problématique et de revenir à un texte globalement plus équilibré. Notre groupe LIOT remercie les sénateurs d’avoir aussi ajouté un volet relatif à l’accompagnement des locataires en difficulté. Le texte renforce désormais la capacité d’action des acteurs du logement avec une intervention plus rapide des CCAPEX, un délai allongé à trois mois au lieu de deux pour le diagnostic social et financier, ou encore le renforcement des pouvoirs du juge pour maintenir l’APL ou pour demander le versement des aides directement au bailleur.
    Il reste tout de même quelques interrogations. Le texte accélère certains délais de traitement des arriérés de loyers. Il faut désormais s’assurer que les services sociaux et les CCAPEX disposent d’effectifs suffisants pour systématiser les diagnostics sociaux et financiers, sur lesquels les juges ne peuvent aujourd’hui s’appuyer pour rendre leur décision que dans 30 % des cas. Il faudrait pourtant qu’ils les aient automatiquement à disposition afin d’identifier les causes de l’impayé et de proposer le dispositif de prévention le plus adapté à la situation de l’occupant.
    S’agissant des mesures relatives aux squatteurs, nous y étions dès le début favorables. Certains individus continuent de se jouer des failles de la loi pour se maintenir illégalement dans des logements qui ne leur appartiennent pas. La loi Asap avait proposé de corriger quelques écueils relatifs à la procédure d’évacuation accélérée du logement par décision administrative. Cette proposition de loi vient combler les dernières lacunes. Deviennent ainsi éligibles à la procédure d’évacuation forcée les logements occupés par des squatteurs entre deux locations ou juste après l’achèvement de la construction, avant que le propriétaire n’ait eu le temps d’emménager. La proposition de loi opère également une dissociation entre l’introduction par voie de fait, d’une part, et le maintien dans les lieux par voie de fait, d’autre part. Cela devrait permettre de sanctionner le squatteur qui resterait dans le logement par la contrainte mais qui serait entré en trouvant, par exemple, la porte ouverte.
    Nous considérons que ce n’est pas aux petits propriétaires d’endosser les conséquences de la crise du logement et de la politique défaillante du Gouvernement en la matière. La majeure partie des dispositions de cette proposition de loi permet désormais, après réécriture, de préserver l’équilibre entre droit de propriété et droit au logement, et nous y sommes favorables. Néanmoins, nous avons besoin d’avancer sur le sujet du logement, en particulier dans les zones tendues. Les élus locaux le demandent, les citoyens également. Cela passe par des aménagements fiscaux et par des outils visant à limiter les locations de courte durée, par exemple. Nous avons besoin d’adaptations législatives et réglementaires dans ce domaine ; j’espère, monsieur le ministre délégué, qu’elles arriveront très prochainement.

    M. le président

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    La parole est à M. Paul Midy.

    M. Paul Midy

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    La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui grâce au président Guillaume Kasbarian tend à protéger les petits propriétaires contre les squatteurs qui utilisent les failles de notre droit pour s’approprier le bien d’autrui. Elle ne vise pas à compliquer encore la vie des petits locataires en galère passagère, quand ils sont de bonne foi. Ces derniers sont protégés par le droit et doivent le rester.
    Ce texte ne constitue pas non plus notre politique du logement. Celle-ci s’appuie sur la construction de logements, le développement du logement social, la lutte contre le mal-logement, le développement de l’accès à la propriété et l’accélération de la rénovation énergétique.

    M. Inaki Echaniz

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    Mais bien sûr…

    M. Paul Midy

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    Nous avons pour cela un gouvernement et un ministre – que je salue – mobilisés et des moyens en augmentation – 17 milliards d’euros en 2022.
    Les députés de La France insoumise défendent le squat, dont ils font un élément à part entière de la politique du logement. Ils considèrent que ce peut être une politique publique que de donner comme perspective à quelqu’un qui peine à se loger celle de s’approprier le bien d’autrui par la force ou la contrainte.
    En défendant le squat, vous démontrez une fois de plus votre volonté d’inverser les valeurs, d’inverser les valeurs inscrites dans la Constitution ou dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, d’inverser les valeurs communes que nous partageons dans notre République.

    M. Jean-François Coulomme

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    Chacun voit midi à sa porte.

    M. Paul Midy

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    Défendre les squatteurs face aux petits propriétaires, c’est aller contre l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui dispose que « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé ».
    Défendre les casseurs face aux forces de l’ordre, c’est aller contre l’article 2 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, qui consacre la sûreté et la sécurité comme droit naturel et imprescriptible de l’homme.
    Encourager une manifestation illégale à Sainte-Soline, c’est aller contre l’article 10 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, aux termes duquel « nul ne doit être inquiété pour ses opinions, même religieuses, pourvu que leur manifestation ne trouble pas l’ordre public établi par la loi ».

    Mme Sandra Regol

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    Un trou au milieu des champs trouble l’ordre public !

    M. Paul Midy

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    Lorsque vous remettez en cause nos processus institutionnels et le résultat des élections, par la voix de votre chef, M. Mélenchon, vous défendez l’inverse de l’article 3 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen.

    M. Jean-François Coulomme

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    Où voyez-vous M. Mélenchon dans cet hémicycle ?

    Mme Andrée Taurinya

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    Vous en rêvez la nuit ?

    M. Paul Midy

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    Et lorsque vous dressez des listes d’élus à menacer et à vilipender, c’est l’article 7 de cette même déclaration que vous bafouez.

    M. Jean-François Coulomme

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    Nous n’avons menacé personne !

    M. Paul Midy

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    En défendant l’inverse de notre socle de valeurs démocratiques et républicaines, vous semez la confusion dans le débat public et dans l’esprit de certains de nos concitoyens. Je crains que vous ne le fassiez pas uniquement pour faire le buzz sur les réseaux sociaux mais pour saper les fondements du système. Vous voulez le renverser par vos actions, trop souvent violentes, plutôt que par les urnes, là où votre chef, M. Mélenchon, a échoué trois fois.

    Mme Sandra Regol

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    Quand allez-vous donc parler du logement ? Il est vrai que ce sujet ne vous intéresse pas !

    M. Paul Midy

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    Je le dis à nos concitoyens : soyons très attentifs à ce qui se passe ici, à l’extrême gauche comme à l’extrême droite !

    M. Jean-François Coulomme

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    L’extrême droite est avec vous !

    M. Paul Midy

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    Comptez sur nous pour défendre nos valeurs démocratiques et républicaines, sur le fond, sans hurler ni insulter, sans violence ni appels à la violence, dans le cadre de nos institutions démocratiques et républicaines !

    Mme Danielle Simonnet

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    Avec le 49.3, surtout !

    M. Paul Midy

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    Pour ce qui est des heures à venir, nous allons défendre la valeur du droit de propriété pour tous.

    Mme Danielle Simonnet

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    Le droit des grands propriétaires, oui !

    M. Paul Midy

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    Car c’est un acquis de notre histoire commune : quand il n’y a pas de droit de propriété pour tous, alors tout appartient aux mêmes, c’est-à-dire au tyran ou à une caste de privilégiés. C’est tout l’inverse de nos valeurs démocratiques et républicaines et de ce pour quoi nous nous battons. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et HOR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michaël Taverne.

    M. Michaël Taverne

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    Un homme frappé par trois jeunes qui squattaient son logement, en juin 2022 à Vienne, dans l’Isère ;…

    M. Jean-François Coulomme

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    C’est la faute à Mélenchon !

    M. Michaël Taverne

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    …un septuagénaire rentrant chez lui après quelques jours d’absence et qui trouve son appartement squatté à Besançon, en octobre 2022 ;…

    M. Jean-François Coulomme

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    C’est la faute à Mélenchon !

    M. Michaël Taverne

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    …plus récemment, une propriétaire condamnée par la justice à payer des dommages et intérêts à des squatteurs : trois cas de squat, parmi tant d’autres, dont la presse s’est fait l’écho.
    Alors même que la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen a consacré en 1789 la propriété comme « droit inviolable et sacré », l’état actuel de notre législation ne permet pas de le garantir. Trop souvent, pour ne pas dire presque toujours, la procédure privilégie les squatteurs plutôt que de protéger et d’aider le propriétaire.
    Songeons un instant, mes chers collègues, à la réalité de ce qui se joue derrière ces situations. Des propriétaires qui ont acquis un bien immobilier, une résidence principale ou secondaire, un appartement qu’ils louent pour compléter leurs revenus, s’en trouvent dépossédés du jour au lendemain. Ils seront confrontés à des mois, voire des années de démarches et de procédures administratives et judiciaires lourdes, durant lesquels ils devront prouver que la maison léguée par leurs parents, la maison construite grâce à leur travail ou l’appartement dans lequel ils ont investi pour s’assurer une retraite sereine est bien à eux !
    Pour l’immense majorité des propriétaires, un logement squatté signifie la perte de revenus indispensables, souvent destinés à rembourser un crédit immobilier. Non, les premières victimes des squatteurs ne sont pas les riches propriétaires, ce sont toujours les mêmes : les classes moyennes ! Comme 64 % des propriétaires bailleurs, elles ne possèdent qu’un seul logement en location et elles n’ont pas les moyens d’engager un gestionnaire ou une entreprise privée de protection, encore moins de se passer de ces revenus !
    Face à cette dépossession, à ce sentiment d’impuissance, il était plus qu’urgent que la représentation nationale se saisisse enfin de ce sujet et qu’une proposition de loi permettant enfin d’apporter des réponses soit inscrite à l’ordre du jour de notre assemblée. Les députés du groupe Rassemblement national accueillent donc avec satisfaction ce texte, enrichi et amélioré au cours de la navette parlementaire.

    M. Loïc Prud’homme

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    Merci qui ?

    M. Michaël Taverne

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    En effet, si le texte initial était déjà porteur de mesures attendues et nécessaires, que nous appelions de nos vœux, la première lecture, à l’Assemblée nationale comme au Sénat, a permis d’élargir la portée de la proposition de loi. Ainsi, il est prévu que l’État peut indemniser les propriétaires victimes de squat, dans le cas où le préfet refuserait de recourir à la force publique pour exécuter une décision d’expulsion. Une autre disposition libère le propriétaire de son obligation d’entretien du bien squatté. D’autres mesures, bienvenues, visent à accompagner les locataires en difficulté.
    Ce projet, tel qu’il nous est revenu de la Chambre haute, contient, pour l’essentiel, des mesures proposées par Marine Le Pen. Elles ont été reprises dans une proposition de loi qu’elle avait déposée en mars 2021, et dans une autre, déposée en novembre 2022. Il est vrai que de nouvelles dispositions ont été votées, à commencer par celles qui visent à sécuriser les rapports locatifs. Leur nécessité ne fait aucun doute.
    En toute cohérence, nous nous prononcerons une fois encore en faveur de ce texte. Néanmoins, nous regrettons l’absence de certaines de nos propositions : la possibilité, pour l’autorité administrative, de diligenter une expulsion d’urgence dans le cas où l’occupation sans droit ni titre constituerait une atteinte à l’ordre public ; la protection des propriétaires afin qu’ils n’aient en aucun cas à régler les charges et les frais courants nés durant la période d’occupation illicite de leur bien – autrement dit, ils ne doivent pas avoir à payer les factures d’eau et d’électricité consommées par les squatteurs.
    Nous défendrons donc une nouvelle fois des amendements pour améliorer, dans un esprit constructif, le texte. Cette proposition de loi est nécessaire, elle permettra de mieux lutter contre cette atteinte absolue au droit de propriété qu’est le squat ; en ce sens, elle devrait faire l’unanimité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet.

    Mme Danielle Simonnet

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    Je voudrais dédier cette intervention à Aminata. Aminata a 10 ans, elle est en CM2, elle dort dans son école avec sa maman car elles sont sans logement ; d’autres parents, solidaires, dorment dans les mêmes locaux. En France, 42 000 enfants sont SDF !
    Je pense aussi aux locataires de ma circonscription qui se mobilisent en ce moment car ils ont découvert que leurs charges locatives mensuelles allaient augmenter de 200 euros par mois – vous rendez-vous compte ?, parce que vous avez refusé de bloquer les prix de l’énergie. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Monsieur Kasbarian, vous nous dites : « Mettez-vous à la place des propriétaires ! » Je vous demande de vous mettre à la place d’Aminata, de ces locataires qui ont peur, qui se disent qu’ils ne pourront pas payer le loyer, qu’ils seront les futurs expulsés. Mettez-vous à la place de ces gens-là !

    M. Frédéric Cabrolier

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    Accueillez-les chez vous !

    Mme Danielle Simonnet

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    Monsieur le ministre du logement, vous avez reconnu que « cette proposition de loi n’a jamais eu pour objectif de résoudre les problèmes du logement en France ». Au moins, c’est un aveu honnête : cette loi ne résout rien ; au contraire, elle contribuera à aggraver les situations. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Quel sens du timing vous avez, à quelques jours de la fin de la trêve hivernale, alors que nombre d’associations anticipent une explosion des impayés et des expulsions ! Cette loi antilocataires est une honte absolue !
    Vous prévoyez de condamner à trois ans de prison et 45 000 euros d’amende les sans-logis qui occupent un local ou un logement vacant ; or ils le font pour éviter la rue, parce que la rue tue ! Vous prévoyez aussi d’attaquer les locataires pour impayés de loyer, en portant à 7 500 euros l’amende punissant le maintien dans le logement après un jugement d’expulsion. Enfin, vous avez décidé de réduire les délais de procédure et de grâce, entravant la prévention des impayés des expulsions : il ne sera plus possible d’établir un échéancier, sauf si le locataire a repris avant l’audience le versement intégral du loyer courant.
    Bref, vous aggraverez les problèmes des plus précaires, enfoncerez encore davantage les personnes en difficulté. Vous vous apprêtez à voter une loi antilocataires, une loi antipauvres.
    Par ailleurs, cette proposition de loi est inefficace du point de vue des intérêts des petits propriétaires : le squat d’un domicile privé est déjà puni d’un an de prison. La proposition de loi entraînera une hausse du nombre d’expulsions, donc du nombre de personnes contraintes de se réfugier je ne sais où pour survivre. Elle aggravera encore l’engorgement des tribunaux et contribuera à allonger les délais dans lesquels la justice est rendue.
    Pourtant, la prévention est bien plus efficace que la répression, y compris du point de vue des propriétaires : un locataire qui parvient à rembourser ses échéances pendant quelques mois devient éligible au Fonds de solidarité pour le logement (FSL), ce qui lui permet de solder le reste de sa dette auprès du propriétaire.
    Là où il faudrait d’urgence une garantie universelle des loyers, là où il faudrait d’urgence un plan ambitieux de construction de logements sociaux, là où il faudrait d’urgence engager la baisse des loyers, que nous proposez-vous ? Cette proposition de loi scélérate, injuste et inefficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Pourtant, les alertes sont nombreuses et viennent de toutes parts : de la Défenseure des droits, du président de la CNCDH, qui a écrit aux parlementaires, du Collectif des associations unies, de la Fondation Abbé Pierre, du Secours catholique, d’ATD Quart-Monde, de l’association Droit au logement. Tous les experts du logement considèrent que si elle devait être adoptée, cette loi serait un désastre !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Rien que ça !

    Mme Danielle Simonnet

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    Un désastre qui criminalisera les locataires en impayés de loyer et facilitera, dans ce contexte de crise, les expulsions !
    Je vous le dis, monsieur Kasbarian, votre proposition de loi, soutenue par l’aile la plus brutale de la Macronie, accompagnée de députés LR, emboîte allègrement le pas au Rassemblement national…

    M. Jean-François Coulomme

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    Exact !

    Mme Danielle Simonnet

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    …en reprenant les propositions de ce dernier contre les locataires, au prétexte de quelques faits divers qu’à l’époque, la ministre Emmanuelle Wargon elle-même décrivait comme anecdotiques.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Ne parlez pas à sa place !

    Mme Danielle Simonnet

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    Vous allez condamner à la rue et à la prison des milliers de mal-logés et de locataires en impayés de loyer. Votre proposition de loi viole au passage nombre de droits fondamentaux comme l’écrit le président de la CNCDH : liberté d’association, liberté d’expression, liberté de la presse et même droit de grève, puisqu’elle permet de pénaliser les piquets de grève, alors qu’un bras de fer est engagé sur la réforme des retraites ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    De tous les points de vue, cette loi est scélérate, c’est une honte !

    Mme Martine Etienne

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    Oui, c’est honteux !

    Mme Danielle Simonnet

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    Nous la combattrons de toutes nos forces. Je vous invite à rejoindre la manifestation qui aura lieu le 1er avril, pour marquer la fin de la trêve hivernale. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Le squat est un enjeu de société, comme en atteste hélas l’actualité récente. Ces occupations illicites placent les propriétaires, souvent modestes, ou les locataires, dans une détresse absolue. Elles sont si éprouvantes que certains propriétaires, cherchant désespérément des moyens d’accélérer la procédure d’expulsion, vont jusqu’à entamer une grève de la faim.
    Les squatteurs exploitent les failles laissées par les vides juridiques et rivalisent d’astuces frauduleuses pour demeurer dans un local sans y être légalement autorisés.

    Mme Isabelle Périgault

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    Absolument !

    Mme Annie Genevard

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    Parmi ces aberrations, on compte même la diffusion d’une brochure en ligne donnant des conseils pour occuper illégalement un logement. Un comble !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice et M. Rémy Rebeyrotte

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    Eh oui !

    M. Frédéric Boccaletti

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    Tout à fait !

    Mme Annie Genevard

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    À cela s’ajoute parfois, il faut le dire, l’inaction de l’administration qui, par crainte des troubles à l’ordre public, choisit parfois de ne pas procéder à l’expulsion des occupants. C’est d’autant plus anormal que la Cour de cassation a estimé en 2019 que le droit de faire expulser des squatteurs constitue un droit absolu, lié au droit de propriété protégé par la Constitution et qu’il ne peut être mis en balance avec le droit au respect du domicile de l’occupant.
    Le législateur devait donc s’emparer du sujet pour mettre fin à l’insécurité juridique et à ces situations heurtant le bon sens et l’impératif de justice. Lors de la précédente législature, sous l’impulsion de Julien Aubert, le groupe Les Républicains avait déposé une proposition de loi visant à punir pénalement l’appropriation du bien d’autrui sans motif légitime.

    Mme Isabelle Périgault

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    Eh oui !

    Mme Annie Genevard

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    Nous prévoyions déjà d’aggraver les peines existantes en cas d’introduction dans le domicile et de les tripler en cas de maintien. Toutefois, notre texte avait été inexplicablement rejeté au bénéfice de mesures insuffisantes, ce dont l’actualité nous a apporté la preuve depuis.
    J’ai moi-même déposé une proposition de loi en septembre dernier, et si j’ai été prise de vitesse par la majorité, cher président Kasbarian (Sourires sur les bancs de la commission), j’ai jugé utile d’apporter ma contribution au texte de votre majorité. Notre groupe a ainsi été à l’origine d’avancées, que je crois déterminantes.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Tout à fait !

    Mme Annie Genevard

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    Elles consistent en la définition du délit d’occupation frauduleuse, qui constitue un pas important dans la restauration de la justice bafouée par les squatteurs et en la prise en compte de la diversité des situations de squat, grâce à l’intégration des locaux à usage d’habitation et de ceux à usage économique. Enfin, l’initiative de notre excellent collègue Thiériot a permis de libérer les propriétaires de leur obligation d’entretien du bien pendant le squat, leur responsabilité ne pouvant plus être engagée en cas de dommages résultant du défaut d’entretien,…

    M. Romain Daubié

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    Très bien !

    Mme Annie Genevard

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    …les marchands de sommeil, qui n’ont aucune excuse, étant bien entendu exclus de cette disposition.

    M. Stéphane Peu

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    Comment faites-vous la différence entre les uns et les autres ?

    Mme Annie Genevard

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    Le groupe Les Républicains est en faveur de ce texte qui vise à protéger plus efficacement les propriétaires, grâce au triplement de la peine prévue pour le squat du domicile, à sécuriser les rapports locatifs, à réduire les délais contentieux et à distinguer, chers collègues de la NUPES, les squatteurs des locataires défaillants ou en difficulté, tout en accompagnant ces derniers.
    Il est toutefois regrettable que la proposition de loi reste silencieuse sur certains sujets.
    Il convient de reconnaître pleinement les situations de squat pour les locaux à usage économique. Il ne s’agit pas de demi-squats : si le domicile est protégé au titre de l’atteinte à la vie privée, le local économique doit l’être également. Même si je salue l’extension de la procédure d’évacuation forcée, jusque-là réservée au domicile, aux locaux à usage d’habitation, le sort réservé aux locaux à usage économique demeure préoccupant : la seule possibilité offerte à leurs propriétaires est d’obtenir l’expulsion par voie judiciaire, avec les retards et délais dus à l’engorgement du système judiciaire.
    Le texte ne revient pas sur la peine appliquée au propriétaire lésé qui aurait cherché à récupérer son bien par ses propres moyens. Par une folle inversion des valeurs, il se voit infliger une peine d’emprisonnement supérieure à celle prévue pour les squatteurs.

    Mme Caroline Parmentier

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    Ce n’est pas normal !

    Mme Annie Genevard

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    Il faut revenir sur ce point, qui ne me paraît pas conforme à l’esprit de justice.

    M. Nicolas Forissier

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    C’est scandaleux !

    Mme Annie Genevard

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    Enfin, la proposition de loi ne prévoit aucune obligation de remise en état du logement, ce qui conduit à dédouaner le squatteur de la responsabilité des dégradations occasionnées durant la période d’occupation illégale.
    Les sommes que doivent engager les propriétaires atteignent pourtant parfois des montants considérables : le propriétaire d’un immeuble squatté à Lyon a ainsi dû payer 500 000 euros, un demi-million, pour effectuer les réparations nécessaires à la remise en état de son bien occupé illégalement !

    M. Nicolas Forissier

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    C’est considérable !

    Mme Annie Genevard

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    Ajoutons que les charges locatives liées à la consommation d’énergie et d’eau durant la période du squat restent à la charge des propriétaires.

    M. le président

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    Il faut conclure, madame la députée.

    Mme Annie Genevard

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    La proposition de loi, certes utile, a bénéficié de toute notre implication, mais elle sera probablement à reprendre car certaines injustices perdureront malgré son adoption. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Éric Martineau.

    M. Éric Martineau

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    Chacun d’entre nous garde en tête la médiatisation récente d’affaires ayant mis en évidence les grandes difficultés auxquelles ont été confrontés des propriétaires en raison de l’occupation illicite de leur logement, affaires qui ont fait naître un profond sentiment d’injustice. Les auditions menées par M. le rapporteur nous ont montré combien les personnes exposées à de telles situations, qu’il s’agisse de leur résidence principale ou de leur résidence secondaire, pouvaient se sentir désabusées et découragées.
    Nous sommes conscients de la nécessité d’améliorer la loi pour lutter contre ces occupations inacceptables. La propriété privée est l’un des principes fondamentaux de notre constitution, inscrit dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, et nous nous devons d’agir lorsque celle-ci est remise en cause.

    M. Paul Midy

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    Eh oui !

    M. Éric Martineau

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    Rappelons, une fois de plus, que la plupart des propriétaires immobiliers sont de petits propriétaires.

    M. Romain Daubié

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    Très juste !

    M. Éric Martineau

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    Issus de la classe moyenne, ils ont souvent dû épargner durant de nombreuses années, voire leur vie durant, pour se doter d’un patrimoine dont les revenus devraient compléter leur retraite.
    La loi doit donc évoluer, lorsque cela est possible et utile. Le squat est d’ores et déjà puni par notre droit. Une procédure accélérée d’expulsion des squatteurs a été créée en 2007, mais des fragilités subsistent dans ce dispositif. Nous considérons que la caractérisation légale du squat inscrite dans la proposition de loi va dans le bon sens, ainsi que l’alourdissement des sanctions à l’encontre des marchands de sommeil voté en commission.
    En première lecture, nous avons émis le souhait que toutes les situations puissent être prises en compte. S’il y a des abus, il y a aussi des locataires en grande difficulté que les pouvoirs publics doivent être en mesure d’aider en prenant le relais. Nous avons donc veillé à ce que le texte établisse une différence entre le locataire de bonne foi et celui qui ne l’est pas. Il n’est pas question de faire exploser le nombre de contentieux et d’expulsions impliquant des locataires de bonne foi qui se retrouveraient en difficulté de manière temporaire.
    Pour toutes ces raisons, nous estimons que certaines évolutions adoptées par le Sénat en première lecture et retenues par notre commission en deuxième lecture vont dans le bon sens. Je pense au fait de considérer le squat comme un vol et au maintien du pouvoir d’office du juge de manière qu’il s’autosaisisse afin d’accorder des délais de paiement aux locataires défaillants et de suspendre la résiliation du bail pour ceux qu’il estime de bonne foi. Nous avons également souhaité qu’aucune peine de prison ne soit appliquée aux locataires défaillants qui se maintiendraient dans les lieux.
    Par ailleurs, il nous semble raisonnable de conserver un délai de six semaines entre l’assignation et le commandement de payer, un délai trop court risquant d’engorger rapidement les tribunaux. Cette disposition adoptée au Sénat permettra dans de nombreux cas au locataire défaillant de régler sa dette.
    Enfin, nous nous félicitons de la protection qu’apportera cette loi aux résidences secondaires, qui n’étaient pas protégées auparavant face au squat.
    Le groupe Démocrate (MODEM et indépendants) salue la démarche visant à protéger davantage les propriétaires mais il veillera à ce que le droit français demeure juste et proportionné. Préserver le droit de propriété tel qu’il est garanti par les institutions, donner aux propriétaires des outils efficaces et offrir à chacun les moyens et l’accompagnement nécessaires pour être logé dignement, tel est notre objectif.
    Parce que la proposition de loi n’entache en rien la poursuite de notre combat en faveur d’un logement digne et accessible à tous, nous travaillerons à une grande loi sur le logement avec vous, monsieur le ministre délégué chargé de la ville et du logement. Vous pouvez compter sur nous ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, RE et HOR.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur et M. Romain Daubié

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    Très bien !

    M. le président

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    La parole est à M. Inaki Echaniz.

    M. Inaki Echaniz

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    « Une proposition de loi brutale », « un recul sans précédent du droit au logement » aboutissant à « un accroissement considérable du nombre de personnes sans domicile » : tels sont les termes employés par soixante-neuf associations et syndicats, particulièrement inquiets du contenu du texte que nous examinons.
    Dans un contexte de difficultés accrues pour les Français, qui subissent inflation et crise du logement, cette proposition de loi semble déconnectée des réalités du terrain. Atténuée par le Sénat, elle constitue néanmoins une épée de Damoclès pour des milliers de personnes en situation de précarité et handicape les associations qui œuvrent, jour et nuit, pour leur venir en aide.
    J’aimerais à ce titre saluer le travail remarquable des acteurs associatifs et des bénévoles qui font face, très concrètement, à la misère et la contiennent autant que faire se peut. Le temps n’est pas venu d’alourdir leur fardeau. Or cette proposition de loi fait peser une charge supplémentaire sur les épaules d’acteurs fatigués par l’accroissement de la pauvreté dans nos rues, par le creusement des inégalités, par la persistance de la précarité. Il faut, plus que jamais, prendre soin de ce réseau associatif d’experts et de volontaires qui assurent un maillage précieux de notre territoire.
    Comme je l’ai souligné en défendant la motion de rejet préalable, l’urgence est d’agir en amont pour éviter les situations d’impayés menant à l’expulsion des logements et les squats de structures qui sont, rappelons-le, en majorité vacantes et loin d’offrir le moindre confort. Moins simple, plus onéreuse, cette solution serait en cohérence avec les priorités affichées par le Gouvernement : votre Plan quinquennal pour le logement d’abord et la lutte contre le sans-abrisme ne fait-il pas de « l’accès direct au logement une priorité pour la réinsertion des personnes sans domicile » ? Cette proposition de loi va à l’encontre de cet objectif mis en avant par votre majorité depuis 2017.
    Elle renforce en effet brutalement les sanctions contre les squats et les impayés de loyers en introduisant quatre nouvelles infractions dans le code pénal, dont deux criminalisent les individus connaissant de grandes difficultés financières. Ces derniers se verront ainsi grevés d’une nouvelle dette et les squatteurs seront passibles de plusieurs mois de prison. La réalité, c’est que ces mesures constituent un obstacle supplémentaire pour ceux qui essaient de sortir de la misère. Une telle sévérité à l’encontre de personnes qui, dans la majorité des cas, ne sont pas délinquantes est disproportionnée.
    Que deviennent les personnes une fois expulsées ? D’après une enquête publiée par la fondation Abbé Pierre en mars 2022 : un à trois ans plus tard, 32 % des ménages ne retrouvent pas de logement et vivent à l’hôtel, chez un tiers, dans d’autres formes de non-logement ou à la rue. Ceux qui se sont relogés ont mis en moyenne onze mois pour retrouver un toit. Parmi les personnes interrogées pour l’enquête, 29 % des expulsés n’ont pu poursuivre leur activité professionnelle. À cela s’ajoutent les conséquences sur la scolarité des enfants, ainsi que sur la santé physique et psychologique des personnes concernées.
    Votre texte va aussi à l’encontre de vos propres ambitions en matière d’insertion et de plein emploi ! La création d’un nouveau délit de propagande ou de publicité en faveur de méthodes incitant ou facilitant l’occupation de logements est une menace pour les associations. La CNCDH a rappelé que cette disposition « pourrait pénaliser les activités associatives d’information et d’accompagnement à l’accès aux droits des personnes occupant des lieux de vie informels, voire entraver la liberté d’expression et la liberté de la presse lorsque les conditions de vie des personnes en cause font l’objet de récits ou de reportages par les associations ou les médias ».
    D’autres conséquences indirectes pourraient résulter de l’application de ce texte : pensons aux baux verbaux portant sur un logement à usage d’habitation principale ou au droit de grève susceptible d’être gravement mis à mal par l’extension de l’infraction d’occupation aux locaux à usage économique. C’est un mauvais signal en ces temps particulièrement durs pour les Français qui se mobilisent pour leurs droits.
    Si nous ne pouvons pas nier l’existence des difficultés dans lesquelles se retrouvent certains propriétaires, il n’est pas compréhensible que le premier texte de cette majorité consacré au logement vise à lutter contre les situations d’occupation illicite alors qu’il reste tant à faire pour traiter les causes du mal-logement.
    Si l’on peut saluer le travail qu’a mené le Sénat pour pondérer certaines mesures et intégrer des dispositifs relatifs à la prévention, conduisant le rapporteur à se déplacer vers la gauche, notamment à l’article 7, les modifications qu’il a apportées ne constituent que des améliorations mineures. L’équilibre général du texte demeure malheureusement sensiblement identique à celui issu de la première lecture. Aussi voterons-nous à nouveau contre la proposition de loi.

    M. le président

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    La parole est à M. Luc Lamirault.

    M. Luc Lamirault

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    Nous examinons aujourd’hui la proposition de loi visant à protéger les logements contre l’occupation illicite, proposée par notre collègue Guillaume Kasbarian. S’il est vrai que le phénomène du squat n’est pas massif en France, ce texte n’en est pas moins utile pour répondre aux situations inadmissibles de violation de la propriété, qui suscitent une émotion légitime dans notre pays. Il s’agit donc de renforcer la protection de la propriété des personnes, principe fondamental de notre République.
    Le texte a été enrichi par le Sénat et au cours des travaux menés en commission des affaires économiques, afin qu’il apporte des réponses concrètes et efficaces, attendues sur le terrain. Ainsi, l’article 1er bis prévoit le triplement de la peine pour le délit de violation de domicile, qui passera à trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende.
    L’article 1er A crée également un nouveau délit dans le code pénal pour l’occupation frauduleuse d’un local à usage d’habitation ou à usage économique, assorti d’une peine de deux ans de prison et de 30 000 euros d’amende. Il s’agit d’une réponse indispensable au vide juridique qui existait jusqu’à présent.
    Par ailleurs, les propriétaires n’auront plus à entretenir un bien occupé frauduleusement ; les sanctions pour escroquerie à la location sont renforcées ; l’expérimentation de l’occupation temporaire des logements, visant à éviter qu’ils ne soient occupés illégalement, est pérennisée.
    Enfin, les délais des procédures contentieuses d’impayés de loyer sont réduits. En effet, l’article 5 ramène de deux à un mois le délai minimal entre l’assignation au titre de l’audience et le jour de l’audience, ce qui permettra au propriétaire de retrouver l’usage de son bien plus rapidement.
    Lors de l’examen du texte en première lecture, le groupe Horizons et apparentés a défendu plusieurs dispositions. Tout d’abord, la création d’une sanction permettant de pénaliser la propagande et l’incitation au squat : ainsi, la publicité ou la propagande, quel qu’en soit le mode, visant à faciliter ou à inciter au délit d’occupation illicite est désormais punie de 3 750 euros. Ensuite, notre groupe a souhaité mentionner explicitement le pouvoir du maire pour la constatation de l’occupation illicite, constitutive d’un squat de domicile. Je vous remercie d’avoir accepté ces ajouts.
    Je tiens enfin à saluer le travail mené sur ce sujet par notre collègue Guillaume Kasbarian depuis la loi Asap, ainsi que par collègue Philippe Pradal, qui siège sur nos bancs.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Tout à fait !

    M. Luc Lamirault

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    Le groupe Horizons et apparentés votera donc la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR, ainsi que sur quelques bancs des groupes RE et Dem.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Protéger sa propriété et avoir le droit de jouir de son bien en toute quiétude : ce sont deux évidences, et pourtant ! Depuis des années, la presse relate le calvaire quotidien de propriétaires honnêtes qui, du jour au lendemain, ne peuvent plus franchir la porte de leur maison ou de leur appartement, parce que leur logement est squatté par une autre famille qui se trouve protégée par un droit faiblard, pour ne pas dire complaisant.
    Les témoignages abondent. À Grenoble, un retraité de 77 ans s’est vu déposséder de sa maison, qu’il devait vendre pour assurer sa retraite, par une famille roumaine de neuf personnes. Lorsque la police a enfin pu intervenir, la maison avait été pillée et saccagée. Ce fut un drame pour cet homme et une honte pour notre État de droit.
    À Marseille, un couple de retraités s’est retrouvé contraint de vivre dans un camping-car, à cause d’un locataire qui n’avait pas payé son loyer pendant deux ans !

    M. Jean-Luc Bourgeaux

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    Inadmissible !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Leur histoire avait ému la France entière tant leur détresse était criante. Finalement, la squatteuse et sa fille ont fini par être expulsées de la maison après que le couple a dépensé 18 000 euros en frais de procédure.
    À Vannes, c’est une jeune femme de 30 ans qui, après avoir hérité de deux maisons divisées en appartements, a vécu un véritable enfer. Trois appartements sur quatre ont été squattés : carreaux cassés, serrures changées, lettres recommandées déchirées et jetées dans le jardin. La maison de sa mère a été ravagée. La propriétaire a dû saisir la justice pour tenter d’obtenir l’expulsion des squatteurs. La préfecture avait justifié son inaction en expliquant que les trois conditions à l’évacuation d’une habitation squattée n’étaient pas réunies : le local squatté n’était ni meublé ni habité ; les occupants n’empêchaient donc pas réellement la plaignante de disposer de son domicile ; par ailleurs, l’occupation n’avait pas été constatée par un officier de police judiciaire. Nouvel aveu d’impuissance ; nouveau sentiment d’injustice ! Des abus comme ceux-là, il y en a tous les jours.
    Le droit de propriété est pourtant un droit constitutionnel, consacré en ces termes à l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen : « La propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé, si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité. » Ce droit est trop souvent bafoué, ce qui provoque toujours l’indignation. Les conséquences sont importantes et traduisent une véritable défaillance de l’État ; celle-ci n’est plus tolérée par les Français et risque d’engendrer des actions individuelles pour mettre fin à des situations le plus souvent scandaleuses, mais parfois aussi totalement ubuesques. En un mot, devant l’impuissance de l’État, certains pourraient être tentés de se faire justice eux-mêmes.
    L’objectif de la proposition de loi est bon, puisqu’il vise à simplifier la procédure d’expulsion pour la rendre plus efficace et permettre au propriétaire de jouir à nouveau paisiblement de son bien, y compris s’il s’agit d’une résidence secondaire ou occasionnelle, comme je l’avais préconisé dans une proposition de loi déposée en septembre 2020. C’est une bonne nouvelle, naturellement, tant il est urgent d’en finir avec ces individus qui se croient au-dessus des lois, qui profitent des lacunes de notre droit et jouissent d’une impunité de fait tant ils connaissent par cœur le guide du parfait squatteur, disponible sur internet. Car, n’en déplaise à l’extrême gauche, nous n’avons pas toujours affaire à de gentilles familles fuyant les rigueurs de l’hiver.
    Dans ces conditions, les dispositions rendant possibles l’expulsion, même si le relogement de l’occupant n’a pu être réalisé dans des conditions normales, dès lors que l’habitation a été occupée au moyen de manœuvres, de menaces ou par la contrainte, vont évidemment dans le bon sens.
    Je me réjouis également que ce texte ait été enrichi notamment par le Sénat, lequel a prévu que les victimes de squat puissent être indemnisées par l’État dès lors que le préfet compétent refuse de recourir à la force publique pour faire exécuter la décision d’expulsion. Je ne peux aussi que saluer la levée de l’obligation, pour le propriétaire, d’entretenir le bien squatté, de sorte que sa responsabilité ne puisse plus être engagée en cas de dommage résultant d’un défaut d’entretien du bien pendant la période d’occupation. Là encore, ce n’est que justice.
    Parce que l’impunité doit cesser et que notre droit doit se placer du côté des victimes, je me félicite de toutes ces mesures qui durcissent le ton à l’encontre des squatteurs. C’est donc tout naturellement que je voterai la proposition de loi. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RN et LR.)

    M. Jean-Luc Bourgeaux

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    Très bien !

    M. le président

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    La discussion générale est close.

    Discussion des articles

    M. le président

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    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi sur lesquels les deux assemblées n’ont pu parvenir à un texte identique.

    Avant l’article 1er A

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Taché, pour soutenir l’amendement no 52.

    M. Aurélien Taché

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    Cet amendement, qui a surtout une valeur symbolique, vise à rétablir une certaine vérité et à faire la lumière sur vos véritables intentions, monsieur le rapporteur et chers collègues de la majorité : afin que tous les Français comprennent la portée de votre loi, je propose de substituer au titre actuel du chapitre 1er « Mieux réprimer le squat » l’intitulé suivant : « Mieux réprimer les personnes sans-abri ».
    C’est en effet à cela qu’aboutira, en définitive, votre proposition de loi. Vous n’avez tenu compte d’aucune des remarques des grandes associations qui viennent en aide aux sans-abri et aux mal-logés, qu’il s’agisse de la Fondation Abbé Pierre ou de bien d’autres. Soyez au moins cohérents et acceptez de modifier le titre de ce chapitre ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Il a raison !

    M. le président

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    La parole est à M. Guillaume Kasbarian,  rapporteur, pour donner l’avis de la commission.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Vous souhaitez transformer le titre pour faire croire que nous souhaiterions réprimer les personnes sans-abri plutôt que le squat. C’est de la provocation, monsieur Taché, et c’est profondément faux ! Vous ne voulez ni admettre qu’il existe des squatteurs malintentionnés ni reconnaître que le squat est un délit dans notre pays. Vous assimilez les squatteurs à de pauvres personnes de bonne foi sans abri. Vous niez totalement que les squatteurs existent, que le squat est un délit et qu’il n’est pas seulement le fait de personnes sans abri. Vous mixez les concepts entre eux. Avis défavorable sur cet amendement de provocation.

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux, pour donner l’avis du Gouvernement.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Défavorable également.

    (L’amendement no 52 n’est pas adopté.)

    Article 1er A

    M. le président

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    Je vous informe que sur les amendements identiques nos 1, 22, 36, 66, 88, 110 et 133, je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article.
    La parole est à M. Frédéric Boccaletti.

    M. Frédéric Boccaletti

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    Le présent article vise à compléter le code pénal par un chapitre intitulé : « De l’occupation frauduleuse d’un local à usage d’habitation ou à usage économique ». Selon la dernière étude de l’Observatoire des squats, sur les cinq premiers mois de l’année 2021, pas moins de 124 demandes de procédures d’expulsion de squatteurs ont été recensées. La création d’un chapitre traitant de ce sujet dans le code pénal est un signal positif pour les victimes, qui avaient l’impression de ne pas être reconnues en tant que telles. L’instauration d’une amende, ainsi que d’une peine de prison, l’est tout autant.
    On peut cependant craindre la multiplication de manœuvres en tous genres de la part de professionnels de l’abus de droit, qui s’engouffreront dans les dérogations du texte pour gagner du temps. En outre, aucune garantie n’est prévue dans l’hypothèse où le représentant de l’État, ou le juge, surinterpréterait cet article. Par exemple, il est arrivé qu’un préfet refuse l’application d’une décision d’expulsion, au prétexte que la période était trop proche du début de la trêve hivernale.
    Notre groupe présentera donc plusieurs propositions d’amélioration afin de réduire les risques liés à l’interprétation du texte ; nous espérons qu’elles retiendront toute votre attention et qu’elles ne seront pas systématiquement rejetées, par sectarisme. En ce qui nous concerne, notre seule boussole étant l’intérêt général, nous voterons l’article. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. William Martinet.

    M. William Martinet

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    Avec cet article, vous faites la démonstration de la grande confusion, voire du mensonge, que vous essayez d’insuffler dans l’esprit des gens. Vous nous faites croire depuis le début – nous l’avons d’ailleurs bien entendu dans les interventions de la minorité présidentielle – que la proposition de loi vise les squatteurs qui occuperaient notamment le domicile de pauvres gens partis en vacances qui, revenant chez eux, constateraient que leur maison est occupée. Mais pas du tout ! Elle ne concerne pas cette situation…

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    L’article 1er, si ! Lisez-le !

    M. William Martinet

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    …pour une raison très simple : la loi n’a pas besoin d’être modifiée pour ce type de situations. Heureusement, dans notre pays, lorsque vous rentrez de vacances et que quelqu’un occupe votre domicile, vous pouvez solliciter l’aide de la police pour reprendre possession des lieux. La proposition de loi ne traite donc pas ces cas. L’article 1er A permet, en réalité, de s’attaquer à des gens qui sont dans la misère, sans abri, et qui, par exemple, occuperaient un parking de supermarché, un garage vide ou s’installeraient dans un local situé dans une zone industrielle, ce qui correspond à une stratégie de survie.
    Vous nous accusez de mauvaise foi. C’est très intéressant. Mais je vous propose, en tant que législateurs, de nous intéresser à des gens qui, se trouvant sans abri, sont obligés d’occuper ces locaux par stratégie de survie. Il est désolant et inacceptable de constater que de telles situations existent dans notre pays, sixième puissance économique mondiale, mais c’est une réalité : des gens ou des familles avec des enfants sont parfois obligés de choisir entre dormir sur le trottoir ou occuper un local vide. Et que leur répondez-vous ? Que l’occupation illégale est punie de trois ans d’emprisonnement !
    Disons-le très franchement, vous démontrez, avec cet article, que vous ne luttez pas contre le squat de domicile, mais que vous voulez criminaliser la pauvreté.

    M. Frédéric Boccaletti

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    Il s’agit de criminaliser le squat !

    M. William Martinet

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    Telle est l’essence de la proposition de loi. C’est pourquoi nous rejetterons l’article 1er A, comme l’ensemble du texte.

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Je veux souligner qu’avant la contribution apportée par le groupe Les Républicains, il n’existait pas de délit ni de peine pesant sur le squat d’un immeuble, sur le fondement de l’atteinte au droit de propriété. Nous avons donc déposé un amendement en commission, lors de l’examen du texte en première lecture, afin d’ajouter au code pénal un nouveau chapitre relatif à l’occupation frauduleuse d’un immeuble.
    Nous avons aussi voulu élargir le délit d’introduction sans titre aux locaux à usage d’habitation ou à usage économique, afin de protéger les locaux vides d’entreprises, de commerces et d’immeubles de bureaux.
    Nous soutenons la modification introduite par le Sénat concernant la gradation des peines. Initialement, en effet, il était prévu une peine de trois ans de prison assortie de 45 000 euros d’amende. Le Sénat a souhaité affaiblir ce quantum en l’abaissant à deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende. Cela a toutefois eu une conséquence fâcheuse, puisqu’un propriétaire qui cherche à récupérer son bien est pénalisé plus lourdement qu’un squatteur : il encourt un an de prison de plus qu’un individu qui squatte un immeuble à usage d’habitation ou à usage économique. Où est la justice ? Je reviendrai sur ce sujet lorsque je défendrai mon amendement no 146. 

    M. le président

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    Je suis saisi de sept amendements identiques, nos 1, 22, 36, 66, 88, 110 et 133, visant à supprimer l’article 1er A.
    La parole est à M. Inaki Echaniz, pour soutenir l’amendement no 1.

    M. Inaki Echaniz

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    « La protection du droit de propriété est bien évidemment un objectif légitime, un droit fondamental même, au sens de l’article 17 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen. Le droit au respect du domicile, garanti par l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, est toutefois aussi fondamental », a rappelé le président de la Commission nationale consultative des droits de l’homme au sujet de la présente proposition de loi. Dans un courrier de janvier dernier, la CNCDH s’est inquiétée des atteintes au droit disproportionnées que crée le texte, en raison de la sévérité des sanctions contre les personnes et les associations, et de la réduction des garanties dont bénéficient les personnes menacées d’expulsion.
    La criminalisation des ménages précaires ne constitue en rien une solution aux difficultés des petits bailleurs. Non seulement ces sanctions ne sont pas dissuasives, car on ne tombe pas dans la précarité par choix, mais encore les ménages ne pourront pas s’acquitter des amendes : elles continueront de les maintenir la tête sous l’eau, alors qu’ils essayent tant bien que mal de s’en sortir. En outre, aucune compensation n’est apportée aux petits bailleurs pour la perte de revenus liée aux loyers non perçus. Seul un mécanisme de garantie universelle et obligatoire des loyers pourrait satisfaire un tel besoin – nous en avons parlé à plusieurs reprises, même au-delà des bancs de la NUPES. Vous fermez malheureusement les yeux à ce sujet, comme vous le faites pour la garantie Visale. Nous appelons donc à supprimer l’article 1er A.

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 22.

    M. Stéphane Peu

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    S’il s’agissait de lutter efficacement contre la violation de domicile, nous serions au rendez-vous pour voter cet article, voire pour en renforcer l’efficacité. À l’occasion d’une précédente loi, j’ai d’ailleurs moi-même proposé d’étendre la notion de violation de domicile à des biens non meublés pour lesquels un bail était signé. Dans ma vie d’élu local, j’ai en effet constaté que, lorsque des squatteurs investissent des lieux entre la signature du bail et l’emménagement des occupants, période souvent mise à profit pour réaliser des travaux de peinture et des aménagements, on est confronté à un flou juridique.
    Ce n’est toutefois pas de cela qu’il s’agit ici. En étendant la notion de violation de domicile à tous les biens, y compris économiques, vous l’affaiblissez. Cette extension a une conséquence très dangereuse, puisqu’elle pourrait s’appliquer aux occupations d’entreprise et aux piquets de grève. Rappelons-le : nous avons connu des entreprises que leurs patrons ont quittées et dont les salariés ont occupé les locaux, parfois pendant plusieurs mois ou plusieurs années, en entretenant l’outil de travail afin de permettre une reprise ultérieure de l’activité. Les exemples pullulent d’activités économiques, en particulier industrielles, qui ont été sauvées grâce à la persévérance de salariés ayant occupé l’entreprise et entretenu les machines afin qu’un repreneur puisse relancer l’activité. Avec cet article, vous interdisez l’occupation d’entreprises par des salariés, et vous faites tomber ceux-ci sous le coup de la loi ; ce faisant, vous empêchez la réindustrialisation de certains territoires.

    M. le président

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    La parole est à M. François Piquemal, pour soutenir l’amendement no 36.

    M. François Piquemal

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    Les connaissez-vous ? (L’orateur montre à l’assemblée le portrait de deux femmes.) Il s’agit de Simone et Christiane. (« Il est interdit de montrer des documents ! » sur les bancs des groupes RE, RN et LR.)

    M. Damien Adam

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    Vous n’avez aucun respect pour cette assemblée !

    M. le président

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    Veuillez ranger immédiatement ce document, monsieur le député : le règlement de l’Assemblée nationale ne permet pas d’en exhiber. Il serait dommage que vous subissiez une sanction. (M. François Piquemal range le document.)

    M. François Piquemal

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    Il s’agit donc de Simone et Christiane… (Protestations sur les bancs des groupes RE, RN et LR.) Si vous vouliez bien cesser vos injectives, je pourrais poursuivre.

    M. le président

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    Monsieur le député, je vous rappelle que notre règlement interdit de montrer des documents dans l’hémicycle. Je vous ai demandé de ranger votre document, et vous pouvez vous exprimer durant le temps qui vous est imparti : il vous reste une minute trente.

    M. François Piquemal

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    Simone et Christiane, sœurs jumelles, vivaient depuis leur naissance dans un appartement à Nice. Elles n’avaient pas de contrat de location : comme beaucoup de Français, elles se situaient dans une zone grise du logement. Elles assuraient les fonctions de concierges dans l’immeuble, en contrepartie de quoi la propriétaire d’alors les laissait occuper un appartement. Un nouveau propriétaire est arrivé et les a expulsées. Il était dans son droit, puisqu’elles étaient occupantes sans droit ni titre. Aucune proposition de relogement n’a été faite à ces deux femmes de 75 ans, qui perçoivent des pensions de retraite très basses. Elles se sont retrouvées seules et isolées devant la porte de leur appartement. Elles occupent désormais une cave. Avec votre loi, monsieur le rapporteur, elles risquent deux ans de prison, puisqu’elles sont considérées comme des occupantes sans droit ni titre – c’est-à-dire, selon vous, comme des squatteuses et des voleuses. (M. Damien Adam s’exclame.)
    Votre loi criminalise des personnes comme Simone et Christiane, qui n’ont pas accès au logement et se retrouvent expulsées parce qu’elles se situent dans une zone grise, ou qui sont parfois victimes d’un propriétaire malhonnête ou peu consciencieux. Ces personnes seront désormais menacées de prison. Le projet de loi n’effectue aucune distinction entre les situations ; c’est pourquoi il est dangereux. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Sandra Regol et M. Stéphane Peu applaudissent également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Taché, pour soutenir l’amendement no 66.

    M. Aurélien Taché

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    En répondant à mon amendement précédent, M. le rapporteur a essayé de nous faire croire que les squatteurs étaient tous des gens de mauvaise foi, qui refusaient de payer : ce seraient tous d’odieux criminels.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Le squat est un délit !

    M. Aurélien Taché

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    Il oublie que souvent, les personnes qui sont en situation de squat n’ont nulle part où aller. Si l’article 1er A est adopté, une famille qui s’installe dans un bureau ou dans un garage vide – M. Martinet l’a évoqué –, voire sur terrain avec une tente, parce qu’elle n’a nulle part où aller, encourra deux ans d’emprisonnement pour avoir voulu se mettre à l’abri. Il en sera de même pour les militants du droit au logement qui s’efforcent, par certaines actions, de réveiller les pouvoirs publics. Je l’avais déjà rappelé en première lecture : en 2007, quand Les Enfants de Don Quichotte ont installé des tentes le long du canal Saint-Martin, la droite de l’époque, à savoir M. Chirac, n’a pas réagi en réprimant les squatteurs, mais en créant un droit au logement opposable. Vous, vous proposez deux ans de prison aux militants du droit au logement !

    M. Frédéric Boccaletti

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    Et aux zadistes !

    M. Aurélien Taché

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    Vous proposez deux ans de prison aux familles qui n’ont nulle part où aller !
    Par ailleurs, l’article 1er A s’étend à des gens qui ne sont absolument pas des squatteurs, mais qui ont des loyers impayés – depuis le début, vous essayez d’entretenir la confusion.

    M. Paul Midy

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    Cela n’a rien à voir !

    M. Aurélien Taché

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    Pourquoi se trouvent-ils dans cette situation ? M. Martinet l’a expliqué : vous avez augmenté les loyers, vous avez réduit les APL et vous avez réduit les allocations chômage. (M. Jean-François Coulomme applaudit.)

    Mme Anne-Laurence Petel

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    Et nous avons réduit le chômage !

    M. Aurélien Taché

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    Voilà pourquoi les gens ne peuvent plus payer leur loyer et sont en difficulté. Vous voudriez maintenant leur infliger 7 500 euros d’amende ? On marche sur la tête ! Votre politique antisociale fera exploser le nombre de sans-abri ; vous devrez en porter la responsabilité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Stéphane Peu applaudit également.)

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est extraordinaire !

    M. le président

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    La parole est à M. Hubert Julien-Laferrière, pour soutenir l’amendement no 88.

    M. Hubert Julien-Laferrière

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    Vous auriez pu proposer un texte équilibré, qui protège à la fois les petits propriétaires et les locataires fragiles ; mais vous ne l’avez pas voulu. Vous préférez criminaliser des dizaines de milliers de locataires et d’habitants défavorisés, y compris des mineurs, des personnes âgées et des malades – de nombreux exemples ont été évoqués. Le champ d’application de votre texte est tellement large qu’il couvre jusqu’aux bâtiments industriels vides. Nous nous opposons donc à l’article 1er A, et nous invitons les députés à voter nos amendements de suppression. (M. Stéphane Peu applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 110.

    Mme Sandra Regol

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    En pleine crise économique due à l’inflation, au lieu de vous attaquer à la crise du logement qui frappe de plein fouet nos concitoyens, vous faites – comme trop souvent – le choix de la répression. Vous ne proposez pas de solutions pour loger tout le monde à un coût abordable. M. Molac a évoqué la garantie universelle des loyers : si vous vouliez lutter contre les impayés et punir les réels fraudeurs, si vous vouliez aider les petits propriétaires, et par conséquent ouvrir le marché et contenir les coûts, c’est ce mécanisme que vous devriez mettre en place.
    Après la protection du rien et du vide à Sainte-Soline, vous proposez la protection de locaux vides – entrepôts, hangars – en introduisant deux nouveaux délits dans le code pénal, avec, à la clé, des peines de prison et des amendes. C’est une réponse disproportionnée à la pauvreté et à la paupérisation qui frappent les plus précaires. Oubliée, la promesse du Président de la République de 2017 selon laquelle plus personne ne serait à la rue d’ici à la fin de l’année ! Six ans plus tard, vous faites l’inverse : vous proposez de remettre les personnes à la rue – sachant par ailleurs que de nombreuses places d’hébergement d’urgence doivent être supprimées partout en France.
    Nous parlons ici de personnes, de familles, d’enfants qui traversent une période difficile. Notre devoir de législateur, d’hommes et de femmes politiques et de citoyens est de leur tendre la main et de les aider à rebondir. Tel n’est pas votre choix – c’est bien dommage. Parce que les personnes précaires doivent être protégées, nous proposons de supprimer cet article. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES. – M. Stéphane Peu applaudit également.)

    M. le président

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    L’amendement no 133 de Mme Cyrielle Chatelain est défendu.
    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Dans notre droit, monsieur Taché, le squat est…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Un délit !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    …un délit. J’aimerais que vous nous expliquiez si, oui ou non, vous reconnaissez les lois de la République.

    M. Paul Midy

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    Bonne question !

    M. Sylvain Maillard

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    Eh oui !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Condamnez-vous le squat, qui est considéré comme un délit par la loi ? Reconnaissez-vous que le squat est un délit ? Si vous répondez par la négative, j’en conclurai que vous défendez des délinquants.

    Mme Anne Le Hénanff

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    Exactement !

    M. Paul Midy

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    Ce ne sera pas la première fois !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    M. Piquemal a évoqué des victimes, les personnes en situation de précarité. Pour notre part, nous écoutons tout le monde : les victimes en situation de précarité, les locataires qui ont du mal à joindre les deux bouts, et les petits propriétaires…

    M. William Martinet

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    Les gros propriétaires !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    …qui se retrouvent dans des situations difficiles. Mme Simonnet était présente lors des auditions de la commission ; elle sait donc que nous avons entendu des victimes – car oui, il existe des petits propriétaires victimes d’occupations illicites durant des années.

    Mme Danielle Simonnet

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    Combien sont-ils ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Ils ne perçoivent plus de loyers mais doivent malgré tout rembourser des prêts, payer des charges et acquitter des taxes. Ils ne s’en sortent plus et se retrouvent eux-mêmes en difficulté et dans la précarité. Vous citez des victimes, mais reconnaissez qu’il en existe d’autres, y compris dans votre département, monsieur Piquemal. Je pourrais vous communiquer des courriers d’habitants de Toulouse qui sont victimes de telles situations ; ils attendent des députés qu’ils les protègent d’occupations illicites qui durent depuis des années. Un peu d’équilibre ne nuirait pas.

    M. Paul Midy

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    Eh oui !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Selon M. Julien-Laferrière, nous aurions dû proposer un texte qui protège à la fois les petits propriétaires et les locataires fragiles : c’est exactement ce que nous faisons.

    M. Paul Midy

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    C’est vrai.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Le texte est équilibré. Le travail parlementaire qui a eu lieu en première lecture, à l’Assemblée et au Sénat, a permis de l’améliorer, de l’équilibrer et d’y ajouter des dispositions afin qu’il protège à la fois les petits propriétaires victimes et les locataires en difficulté : des mesures d’accompagnement social ont en effet été intégrées au texte. Je suis donc défavorable à ces amendements de suppression.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Défavorable. Je tiens à répondre à certains propos. Je remercie tout d’abord Mme Ménard et Mme Genevard, la première pour avoir cité des exemples que nous avons tous à l’esprit, la seconde pour avoir rappelé qu’il y a parfois une véritable organisation autour des squatteurs. Voilà comment ils procèdent : ils passent deux fois devant un immeuble d’habitation qui semble inoccupé, et ils y déposent un papier ; s’il n’est pas retiré, ils en concluent que l’immeuble est vide et s’y installent.
    Prenons un autre exemple, que j’avais également donné en première lecture : une vieille dame qui a travaillé toute sa vie décide, parce qu’elle ne peut pas faire autrement, d’aller vivre dans un Ehpad. Passent quelques malfrats – c’est ainsi qu’il faut les appeler –, qui considèrent qu’ils sont chez eux chez elle.

    Mme Annie Genevard

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    Exactement !

    M. Paul Midy

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    Il a raison !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    La fille de cette vieille dame arrive et proteste : c’est l’appartement de sa mère. Ce à quoi les malfrats répondent : « Expulsez-nous donc ! » Un document rédigé par un avocat est même collé sur la porte du logement pour expliquer à la fille de la propriétaire que, si elle venait à forcer les choses, elle serait poursuivie. Et vous trouvez cela formidable ?

    M. William Martinet

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    Mais qu’est-ce que votre loi va changer à cela ?

    Mme Danielle Simonnet

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    Allonger une peine d’un an à trois de prison n’y change rien !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Pardon de vous le dire, mais, dans cet hémicycle, il y a, d’un côté, les députés qui ont du bon sens et, de l’autre, comme d’habitude, les idéologues, les dogmatiques. (Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Vous ne respectez pas le droit de propriété inscrit dans la Constitution. D’ailleurs, vous ne respectez pas la Constitution non plus, alors cette règle-là ou une autre… (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et RN. – Mme Emmanuelle Ménard applaudit également. – Protestations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Que vous ne respectiez pas le code de procédure pénale, le code pénal et le code civil, la belle affaire ! Que vous méprisiez quotidiennement nos institutions, les propriétaires, les grands comme les petits, au fond, cela correspond à votre posture. Mais ce n’est pas la nôtre. Ce que nous voulons n’est pas très compliqué : nous voulons que ceux qui rentrent dans un domicile qui n’est pas le leur soient sanctionnés ;…

    M. Paul Midy

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    Exactement !

    M. Christophe Blanchet

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    Eh oui !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …nous voulons que plus jamais des gens n’aient à subir cette injustice – une injustice totale, à laquelle il faut mettre un terme définitivement.
    Cette réponse vaudra pour les différents amendements que vous avez déposés. Il y a la raison d’un côté, l’idéologie de l’autre : les auteurs de ces amendements sont dans l’idéologie. À propos, je suis allé voir ce qu’était la propriété privée au Venezuela : c’est gratiné ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)

    M. Jean-François Coulomme

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    Ridicule !

    M. le président

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Monsieur le garde des sceaux, vous le savez, les prisons sont pleines. Alors, quand vous dites que vous allez mettre les squatteurs en prison, permettez-nous de rigoler !

    M. Paul Midy

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    Il faut les empêcher de squatter, c’est ça le principe !

    M. René Pilato

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    Je ne fais qu’énoncer un fait. Quant à la propriété privée au Venezuela, je peux y revenir sans problème si vous le souhaitez.
    Au moyen des textes qu’il soumet au Parlement, le Gouvernement organise la précarité. Quand les locataires ont des difficultés pour payer leur loyer, leur situation est de plus en plus précaire et ils n’ont d’autre solution que de devenir squatteurs. Il est là le problème !

    M. Frédéric Cabrolier

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    Ce sont des gens malhonnêtes !

    M. René Pilato

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    Dans une société toujours plus inégalitaire et injuste, les gens ont de plus en plus de mal à boucler leurs fins de mois et à payer leur loyer.

    M. Frédéric Cabrolier

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    Ça ne se passe pas comme ça !

    M. René Pilato

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    Ils deviennent squatteurs et vous les criminalisez.

    M. Frédéric Cabrolier

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    Les honnêtes gens ne font pas ça !

    M. René Pilato

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    Cette proposition de loi reflète la politique que vous menez depuis que vous êtes au pouvoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. Rémy Rebeyrotte.

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Chers collègues, permettez-moi de formuler un vœu au moment où nous examinons cette proposition de loi. Aujourd’hui, un grand nombre de propriétaires renoncent à louer leurs biens,…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Eh oui !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    …lesquels seraient d’ailleurs, dans certains cas, des biens à loyers modérés, voire très modérés. Ce que ces propriétaires nous disent est simple : « La loi ne nous protège pas, ne nous protège plus des locataires indélicats. » (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.) Il convient de distinguer l’occupant sans titre, qui ne jouit pas de son logement de manière conforme à la loi,…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Voilà !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    …du locataire qui en jouit de manière classique, en payant son loyer et en prenant soin du logement qu’il occupe.

    M. Frédéric Boccaletti

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    Les députés de La France insoumise ne savent pas ce que c’est !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Voilà ce qui est en cause ! J’attends donc aussi de la proposition de loi qu’elle donne envie à un grand nombre de propriétaires, et de petits propriétaires, de remettre enfin leurs biens sur le marché.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Tout à fait !

    M. Frédéric Boccaletti

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    Eh oui !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Étant donné ce que je vois à l’échelle de ma circonscription, je pense que des dizaines de milliers, voire des centaines de milliers de logements pourraient être reloués dans notre pays ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – Mme Maud Petit et M. Frédéric Cabrolier applaudissent également.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Très bien !

    M. le président

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 1, 22, 36, 66, 88, 110 et 133.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        109
            Nombre de suffrages exprimés                109
            Majorité absolue                        55
                    Pour l’adoption                18
                    Contre                91

    (Les amendements identiques nos 1, 22, 36, 66, 88, 110 et 133 ne sont pas adoptés.
    (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 23.

    M. Stéphane Peu

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    Il fait écho à l’amendement de suppression que j’ai défendu il y a quelques minutes puisqu’il propose de supprimer l’extension de l’article 1er A aux locaux à usage économique. Je ne reviendrai donc pas sur les exemples que j’ai donnés et sur les effets de bord d’une disposition qui mélange des biens à usages différents – logements à usage d’habitation, biens non meublés pour lesquels un bail a été signé, locaux à usage économique –, ni sur les aspects vertueux que peuvent avoir pour l’emploi et l’économie certaines occupations par des salariés.
    Monsieur le garde des sceaux, sur le sujet que nous examinons, il n’y a pas, d’un côté, les idéologues et, de l’autre, les pragmatiques. Faut-il rappeler que la moitié des membres de votre gouvernement n’ont jamais été élus ni exercé de responsabilités publiques ? En tant qu’élu local depuis maintenant une trentaine d’années, ancré dans mon territoire, je prétends avoir une vision pragmatique de la question du logement : c’est ce qui me pousse à rechercher un équilibre entre les droits des propriétaires et ceux des locataires. Je ne souhaite pas que notre pays soit encore un peu plus fracturé, ni que le désordre et la misère s’y installent. Vos lois sont univoques et ce texte ne se préoccupe que d’une infime partie de la population : les propriétaires.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-François Coulomme.

    M. Jean-François Coulomme

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    Vous dites que nous sommes anticonstitutionnels, monsieur le garde des sceaux, mais votre gouvernement traîne tant de casseroles qu’il n’est plus un gouvernement, mais une batucada !
    Vous prétendez vouloir développer la construction de nouveaux logements, mais, récemment, vous avez fait adopter une loi qui préempte le budget du livret A pour financer des centrales nucléaires. Comment ne pas douter de votre volonté de développer le logement social quand vous détournez de tels moyens de financement au profit des énergies non renouvelables ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Aurélien Taché applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Marc Le Fur.

    M. Marc Le Fur

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    Je n’ai pas la même conception que mon collègue et ami Stéphane Peu. Il vient de nous dire que cette proposition de loi visait les propriétaires, c’est-à-dire, selon ses mots, « une infime partie de la population ».

    Mme Annie Genevard

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    C’est faux : 58 % des Français sont propriétaires !

    M. Stéphane Peu

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    En l’occurrence, on ne parle que des propriétaires bailleurs.

    M. Marc Le Fur

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    Dans mon territoire, les propriétaires sont souvent des retraités du secteur agricole qui ont voulu compléter leur retraite en transformant leur maison en un logement qu’ils louent. Quand ils perdent l’avantage de cette location, en raison de l’occupation de leur bien par des squatteurs ou par des locataires qui ont cessé de payer leur loyer, c’est une vraie difficulté pour eux. Il me semble indispensable, quand nous légiférons, de penser aussi à cette catégorie de Français. Les propriétaires modestes sont nombreux et ne représentent pas « une infime partie de la population », cher collègue !

    Mme Annie Genevard

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    Très bien !

    (L’amendement no 23 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 148.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Il procède à une clarification juridique en précisant la portée de la mesure. Dans la formule « l’introduction dans un local à usage d’habitation ou à usage économique », je vous propose de remplacer le mot « économique » par les mots « commercial, agricole ou professionnel ». Cette rédaction me semble plus précise.
    J’aimerais toutefois connaître l’avis de Mme Genevard sur cet amendement, puisque c’est elle qui, la première, a soulevé le problème spécifique des locaux à usage économique.

    M. Fabien Di Filippo

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    C’est vrai !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    La modification me semble utile, mais Mme Genevard peut-elle me confirmer qu’elle est fidèle à ce qu’elle souhaitait ?

    M. le président

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    Monsieur le garde des sceaux, si vous en êtes d’accord, je vais donner la parole est à Mme Genevard avant de vous demander votre avis sur l’amendement.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je la lui cède bien volontiers.

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Si vous me certifiez que cette nouvelle rédaction conforte le texte sur le plan juridique, je vous fais confiance et je suis prête à l’accepter, monsieur le rapporteur. Je vous remercie d’ailleurs de subordonner votre avis au mien – j’y suis bien sûr sensible. Reste que, logiquement, ce qui est commercial et agricole est aussi professionnel. Par ailleurs, le terme « professionnel » est-il suffisamment large pour inclure les locaux artisanaux et tous ceux auxquels nous n’aurions pas pensé ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Oui !

    Mme Annie Genevard

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    Si vous pensez que cette nouvelle formulation sécurise le texte, alors j’y souscris.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Oui, nous le pensons !

    M. le président

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    Monsieur le garde des sceaux, si cela vous convient, je propose de donner la parole à M. Martinet. Vous pourrez ensuite donner votre avis sur l’amendement et répondre aux orateurs.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je suis d’accord, monsieur le président.

    M. le président

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    La parole est à M. William Martinet.

    M. William Martinet

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    Considérons-nous que le squat est un délit, a demandé M. le rapporteur ? À cette question, notre réponse est claire : occuper le domicile d’une personne contre son gré est absolument inacceptable. Personne n’a le droit de s’installer chez vous. (« Ah ! » et applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et Dem.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    On progresse ! (Sourires.)

    M. William Martinet

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    Cela dit, parlons des dispositions prévues par la proposition de loi en cas d’occupation d’un local commercial, agricole ou professionnel. Il est facile, quand on est un député confortablement installé dans l’hémicycle et qu’on va regagner ce soir un endroit chaud, un bel appartement ou une belle maison, de dire : « Une telle occupation est illégale ! Elle va à l’encontre de la Constitution et du droit de propriété ! ». (Protestations sur plusieurs bancs des groupes RE, RN et LR.)
    Je vous invite à adopter un autre point de vue et à rencontrer les associations qui luttent contre le mal-logement et qui accompagnent les personnes sans abri. Quand vous êtes une famille à la rue, vous occupez un local professionnel – en fait un garage vide – tout simplement parce que vous avez peur de mourir de froid dehors. Ce qui vous prend aux tripes, quand vous dormez dans la rue, c’est que tous les matins, vous vous demandez si vos gamins vont se réveiller. Vous n’êtes pas sûrs qu’ils ne sont pas morts pendant la nuit.

    M. Rémy Rebeyrotte et M. Marc Le Fur

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    Démagogie !

    M. Paul Midy

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    Le squat ne peut pas être la solution à cela ! Nous sommes en France !

    M. Fabien Di Filippo

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    Il y a des dizaines de milliers de Français qui se logent illégalement !

    M. William Martinet

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    Dans de telles conditions, occuper un garage vide n’est peut-être pas légal, monsieur le rapporteur, mais c’est moral, parce que c’est une question de survie ! Ce qui fera toujours la différence entre vous et nous, c’est notre humanité ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Aurélien Taché applaudit également.)

    M. Fabien Di Filippo

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    C’est votre propension à violer la loi qui fait la différence entre vous et nous !

    M. Rémy Rebeyrotte

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    Nous n’avons pas de leçon d’humanité à recevoir de la part de La France insoumise !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement sur l’amendement de M. le rapporteur ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Madame Genevard, les locaux artisanaux et industriels, mais aussi les locaux des professionnels libéraux et tous ceux qui se rattachent à une activité professionnelle, sont inclus dans la rédaction proposée par l’amendement no 148, dont le sens est très large. L’amendement sécurise le texte de manière opportune. Le Gouvernement y est évidemment favorable.

    M. Jean-François Coulomme

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    Vous avez oublié les cabanes à outils !

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Il y a une question que j’ai oublié de poser à M. le garde des sceaux et à M. le rapporteur : la mesure sera-t-elle applicable que le local soit en activité ou non, qu’il soit l’objet d’un bail professionnel ou non ?

    M. Jean-François Coulomme

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    Mais oui ! Même si c’est une ruine, pendant qu’on y est !

    Mme Annie Genevard

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    Quelle est la réponse ?

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Nous pensons que oui. La mesure s’appliquerait à tout local défini comme étant « à usage commercial, agricole ou professionnel », qu’il soit en activité ou non.

    M. le président

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    M. le garde des sceaux souhaite également répondre.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Oui, pour dire un peu la même chose, monsieur le président. Nous avons évoqué au Sénat la condition d’exploitation, et la rédaction choisie va dans le sens que vous préconisez, madame la députée.

    (L’amendement no 148 est adopté ; en conséquence, les amendements identiques nos 4, 53, 87, 109 et 132 tombent.)

    M. Aurélien Taché

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    Pourquoi les amendements identiques sont-ils tombés ?

    M. le président

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    Ils sont tombés du fait de l’adoption de l’amendement du rapporteur.
    L’amendement no 124 de M. Romain Baubry est défendu.

    M. Jean-François Coulomme

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    Présentez-le ! Un peu de courage dans l’antisocial !

    (L’amendement no 124, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Sur l’amendement no 146, je suis saisi par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisi de deux amendements, nos 100 et 146, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Marine Hamelet, pour soutenir l’amendement no 100.

    Mme Marine Hamelet

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    Il vise à compléter le dispositif législatif prévu à l’alinéa 4 de l’article 1er A, en prévoyant le doublement de la peine encourue pour le délit d’introduction frauduleuse dans les logements ou les locaux commerciaux, lorsqu’il est commis en état de récidive légale.
    L’occupation illégale de locaux est un fléau qui doit faire l’objet d’une réponse pénale ferme. Ce sont souvent des logements secondaires, vacants ou en attente d’être vendus, qui sont la proie des spécialistes du squat, et la mission des représentants de la nation est de garantir un cadre législatif adapté au fonctionnement et aux conséquences d’une telle délinquance.
    Nos compatriotes ne supportent plus, à juste titre, que des spécialistes du squat continuent de pourrir la vie des honnêtes gens sans être pour autant sanctionnés à la hauteur de la gravité de leurs délits. Le doublement de la peine prévue pour le délit d’introduction frauduleuse dans un local, qu’il soit à usage économique ou d’habitation, apparaît complètement justifié et proportionné. C’est ce qui est ici proposé : en adoptant cet amendement, vous avez l’occasion, chers collègues, de redonner confiance aux Français en la justice. Au nom de tous ceux qui subissent ces situations inextricables, je vous remercie. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement no 146.

    M. Jean-François Coulomme

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    Essayez de faire mieux que le RN, quand même ! Mettez une grosse amende, pas une petite !

    M. Vincent Thiébaut

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    Ça va, c’est bon !

    Mme Annie Genevard

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    Si nous adoptons l’alinéa 4 de l’article 1er A en l’état, il sera ainsi rédigé : « L’introduction dans un local à usage d’habitation ou à usage économique à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contrainte […] est punie – retenez bien ces chiffres – de deux ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. »

    M. Fabien Di Filippo

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    Ça vous suffit ?

    Mme Annie Genevard

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    Or, selon une disposition en vigueur du code pénal, l’article 226-4-2 : « Le fait de forcer un tiers à quitter le lieu qu’il habite sans avoir obtenu le concours de l’État […] à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contraintes, est puni – retenez bien le premier chiffre – de trois ans d’emprisonnement et de 30 000 euros d’amende. »
    Autrement dit, le propriétaire qui déciderait de se faire justice lui-même, ce qui n’est certes pas acceptable au regard de la loi, est puni plus lourdement que le squatteur qui lui porte préjudice !

    Mme Danielle Simonnet

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    Heureusement !

    Mme Annie Genevard

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    Ce n’est pas possible ! C’est immoral.

    Mme Danielle Simonnet

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    Mais les violences sur les personnes, c’est plus grave !

    Mme Annie Genevard

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    C’est la raison pour laquelle mon amendement no 146 vise – parce que je n’ai pas d’autre solution – à augmenter le quantum de la peine prévue pour le squatteur afin qu’il soit identique à celui de la peine qui s’applique au propriétaire lésé de la jouissance de son bien.

    Mme Danielle Simonnet

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    Eh bien, non !

    M. Christophe Blanchet

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    Mais si ! C’est du bon sens.

    Mme Annie Genevard

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    Il faut apporter une réponse à cette situation parfaitement injuste.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Dans le texte issu de la première lecture à l’Assemblée nationale, il était prévu que ce délit soit puni de trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende ; or il se trouve que la majorité sénatoriale a décidé de proposer une hiérarchie un peu différente en introduisant une proportionnalité des peines.

    M. Jean-François Coulomme

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    Par charité !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Elle a ainsi distingué le squat de domicile, pour lequel les peines ont été triplées – trois ans d’emprisonnement et 45 000 euros d’amende – à l’article 1er, et le squat de locaux, y compris les locaux à usage commercial, agricole ou professionnel, pour lequel il a été décidé d’un quantum de peine légèrement inférieur, mais qui reste tout de même une peine de prison assortie d’une belle amende. La majorité sénatoriale s’est accordée sur ce point, et je comprends l’argument du Sénat ! Les sénateurs ont jugé qu’une hiérarchie devait être établie et qu’il était pire de squatter le domicile d’autrui, d’entrer dans l’intimité d’un salon et de s’y installer, que de s’introduire dans des locaux à usage économique. Ne souhaitant pas mettre les deux pratiques exactement sur le même plan, ils les ont distinguées. Afin de clore le sujet rapidement – nous sommes en deuxième lecture –, je serais d’avis de suivre l’avis sénatorial.
    J’ajoute enfin que la comparaison que vous faites avec le délit mentionné à l’article 226-4-2 du code pénal n’est pas tout à fait pertinente, madame Genevard.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Eh non !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    En effet, ce délit ne concerne pas uniquement le propriétaire qui mettrait à la porte un squatteur : il vise aussi toute personne qui forcerait quelqu’un à quitter le lieu où il habite. Il s’applique à toute situation dans laquelle quiconque déciderait d’expulser lui-même un squatteur, un locataire ou toute personne d’un domicile : cela comprend par exemple le cas où votre voisin décide de venir vous expulser de chez vous. Le délit auquel vous faites référence, ce n’est pas uniquement le délit sanctionnant les propriétaires victimes qui délogent des squatteurs : il sanctionne le fait d’expulser de son domicile toute personne…

    Mme Annie Genevard

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    Y compris le squatteur !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    …« à l’aide de manœuvres, menaces, voies de fait ou contraintes ». Il ne faut donc pas comparer ce qui n’est pas exactement comparable. J’entends vos arguments, mais je trouve que la comparaison est peut-être légèrement abusive.
    De mon côté, je l’ai dit, je propose de nous en tenir à la sagesse sénatoriale sur ce sujet. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Selon vous, madame la députée, il faudrait aggraver les peines pour redonner confiance en la justice – votre amendement no 100 en témoigne. Cela se discute, et longuement – et certainement pas de façon manichéenne. Un tel débat mérite beaucoup de nuance. Si j’avais la même conviction que vous, voyez-vous, je présenterais un projet de loi visant à doubler le quantum de toutes les peines, et je le ferais en affirmant éradiquer ainsi la délinquance. C’est un peu ce que vous suggérez régulièrement ; pardon de ne pas partager votre sentiment.
    Madame Genevard, je vais procéder comme vous. Vous nous avez dit : « retenez bien ces chiffres », et vous les avez déclinés, mais retenons bien, si vous me le permettez, les situations auxquelles ils s’appliquent. La première, c’est celle d’un squatteur qui s’introduit dans un local qui n’est pas un domicile – j’insiste : qui n’est pas un domicile ! La deuxième, qui est punie d’une peine supérieure – un an de plus –, c’est celle d’un propriétaire – cela vient d’être rappelé – qui expulse un locataire, y compris s’il est de bonne foi. Lorsque vous dites que ces deux délits ont la même gravité, pardon de vous le dire mais je ne partage pas votre avis. Je pense en effet qu’il est plus grave d’aller expulser manu militari un locataire de bonne foi, sans autre forme de procès, si vous me permettez l’expression – mais elle est particulièrement adéquate –, que de s’introduire dans un garage qui n’est pas un domicile.
    Voilà la raison pour laquelle je suis défavorable à votre amendement. Je sais que vous y tenez beaucoup, mais je tiens beaucoup, pour ma part, à l’équilibre que je viens de rappeler.

    Rappel au règlement

    M. le président

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    La parole est à M. Inaki Echaniz, pour un rappel au règlement.

    M. Inaki Echaniz

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    Sur le fondement de l’article 100 de notre règlement, censé garantir la clarté et la sincérité de nos débats. Je reviens un peu en arrière, sur l’adoption de l’amendement no 148 qui a fait tomber les amendements nos 4, 53, 87, 109 et 132. Sauf erreur de notre part, ces amendements auraient dû faire partie d’une discussion commune, parce qu’ils avaient trait au même thème que celui qui a été adopté. Nous nous interrogeons sur cette possible erreur qui nous a empêchés de nous exprimer.

    M. le président

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    Il n’y a aucune erreur d’appréciation : puisque l’amendement no 148 modifie l’alinéa 4 de l’article 1er A, son adoption a fait tomber les amendements suivants.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Tout à fait !

    M. le président

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    Rassurez-vous, monsieur Echaniz – …

    M. Inaki Echaniz

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    Ils auraient dû être en discussion commune !

    M. le président

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    …pour le moment, vous n’avez pas la parole –, il n’y a aucune erreur d’appréciation.

    M. Inaki Echaniz

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    Mais si !

    M. le président

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    Non, non. Tout va bien ! Merci, monsieur Echaniz.

    Article 1er A (suite)

    M. le président

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Nous assistons aux premières petites querelles du syndicat des multipropriétaires, qui se réunit ici parmi nous.
    Nous avons M. Kasbarian, qui a piqué une proposition de loi que le Rassemblement national veut mettre à l’ordre du jour depuis 2018 ;…

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Oh ! C’est honteux !

    M. François Piquemal

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    …d’ailleurs, le Rassemblement national ne cesse de vous féliciter, monsieur Kasbarian, et en cas de dissolution, vous avez peut-être une investiture à jouer de ce côté-là ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Aurélien Taché applaudit également. – Exclamations sur les bancs du groupe RE.)

    M. Paul Midy

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    C’est une honte !

    M. François Piquemal

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    Nous avons ensuite le Rassemblement national, donc, qui veut rétablir cette sanction de trois ans. M. Dupond-Moretti, quant à lui, essaie de mettre un peu d’huile dans les rouages, parce qu’il revient un peu à la raison : se rendre coupable de violence sur des personnes, ce n’est pas la même chose que casser une porte. Et nous avons Mme Genevard, qui est un petit peu au milieu de tout cela.
    De toute façon, vous aurez beau les punir de dix ans de prison, les personnes qui sont à la rue n’ont d’autre choix que d’essayer de trouver un abri. Vous n’allez pas résoudre la situation de cette manière.
    En revanche, des réflexions intéressantes ont été émises par deux de nos collègues. M. Le Fur a dit, à juste titre, que des petits retraités comptaient sur le logement qu’ils mettaient en location pour s’assurer un complément de retraite. C’est pourquoi nous vous avons proposé, lors de l’examen de la réforme des retraites, d’augmenter les pensions de retraite à 1 600 euros minimum, afin qu’aucun petit retraité ne soit contraint d’espérer le loyer d’une location pour s’en sortir financièrement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Aurélien Taché applaudit également.)

    M. Frédéric Boccaletti

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    Non mais sérieusement ? Il faut arrêter, à un moment donné !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Tout ça pour que le logement soit squatté !

    M. François Piquemal

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    Et cela, vous l’avez refusé.
    M. Rebeyrotte nous a ensuite dit : nous, les propriétaires, nous avons du mal à mettre notre logement en location, parce qu’on a peur que le locataire ne paie pas ses loyers. Nous vous avons proposé, lors de nos débats, deux solutions à ce problème : d’une part, l’encadrement à la baisse des loyers, qui permet aux locataires de payer ; et d’autre part, la garantie universelle des loyers, qui permet à la puissance publique, en cas d’impayé de loyers, de se substituer au locataire et ainsi de rassurer le propriétaire. Dans les deux cas, vous avez refusé : c’est la preuve que le sort des petits propriétaires, en vérité, vous importe peu. C’est davantage celui des multipropriétaires qui vous préoccupe ; eux peuvent se permettre de laisser un logement vacant sans le louer. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Monsieur le rapporteur, monsieur le ministre, je vais reprendre vos arguments que je trouve un peu spécieux.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Oh !

    Mme Annie Genevard

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    D’abord, je considère que le squat, c’est un délit. Il n’y a pas d’un côté le squat du domicile qui serait un vrai délit, et de l’autre le squat d’un local à usage d’habitation ou économique qui ne serait qu’un demi-squat, donc un demi-délit.

    M. Marc Le Fur

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    Tout à fait !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ce sont des délits, mais pas les mêmes !

    Mme Annie Genevard

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    C’est une première remarque. Je ne suis pas pour l’aggravation de la peine par principe et par construction, monsieur le ministre ; pas du tout ! Pour tout vous dire, j’aurais souhaité que l’on affaiblisse la peine encourue par le propriétaire, pour qu’elle soit au même niveau que celle infligée au squatteur. Mais ce n’était pas possible, en deuxième lecture, en raison de la règle dite de l’entonnoir. C’est la raison pour laquelle j’ai proposé cette aggravation de la peine du squatteur, pour la mettre au niveau de celle du propriétaire.
    Enfin, aucun de vous deux n’ignore que la justice a été amenée à prononcer des peines contre des propriétaires.

    M. Marc Le Fur

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    Eh oui !

    Mme Annie Genevard

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    À Lyon, récemment – cela remonte au 15 mars dernier –, une propriétaire a été condamnée à indemniser ses squatteurs !

    M. Christophe Blanchet

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    C’est vrai !

    M. Marc Le Fur

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    C’est le monde à l’envers !

    Mme Annie Genevard

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    Nous sommes bien d’accord sur un point : il n’y a pas de justice privée, et le propriétaire qui se fait justice lui-même n’est pas en règle avec la loi.
    Mais vous ne pouvez pas infliger aux propriétaires victimes de squat une peine supérieure à celle que l’on inflige aux squatteurs. Ce n’est pas possible.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Si !

    Mme Annie Genevard

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    Mais non, ce n’est pas juste, c’est contraire à l’esprit de justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Marc Le Fur applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Comme je l’ai déjà dit, je sais à quel point vous tenez à votre amendement, mais sachez que, pour ma part, je tiens vraiment à l’équilibre.

    Mme Annie Genevard

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    Moi aussi !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je vais essayer de vous convaincre, madame la députée, même si je sais que cela ne va pas être simple. Même si un squatteur reste un squatteur, je préfère qu’il vienne dans mon garage que dans mon lit – pour le dire d’une façon un peu familière. Et pour une même infraction, le code pénal connaît traditionnellement des gradations.

    Mme Annie Genevard

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    Je suis d’accord sur ce point !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Eh bien si vous êtes d’accord…

    Mme Annie Genevard

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    Mais pas sur la peine infligée au propriétaire !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Attendez, j’y viens ! Vous allez trop vite, madame Genevard, vous êtes bien plus rapide que moi. Premièrement, une infraction peut recouvrer des réalités différentes punies de peines différentes. Deuxièmement, nous avons affaire ici à quelqu’un qui n’est pas un bon propriétaire, mais à un type qui s’affranchit de toutes les règles et vire manu militari – j’ai utilisé l’expression à dessein – un locataire avec droit et titre qui paye son loyer.
    Pour ma part, je pense que nous sommes parvenus à un équilibre juste. Il me semble plus grave de virer un locataire pour récupérer son bien (Mme Annie Genevard s’exclame) en ne respectant pas un bail, plutôt que de s’introduire dans un garage pour l’occuper. Le souci d’équilibre peut raisonnablement nous conduire à rejeter votre amendement.
    J’en viens maintenant à l’intervention de M. Piquemal qui nous dit : si vous aviez augmenté le montant des pensions de retraite, le petit propriétaire, qui a bossé toute sa vie pour s’acheter un petit appartement, n’aura même plus besoin de le louer. Eh bien voyons, il va vous le donner ! Les oreilles m’en tombent ! On rêve ! Comment peut-on dire des choses pareilles ? (M. Jean-François Coulomme s’exclame.) Je ne sais pas, je vous laisse la responsabilité de vos propos. Ayant des oreilles et un cerveau au milieu, je me dis que nous sommes sur une autre planète quand je vous entends dire ça.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Très bien !

    (L’amendement no 100 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 146.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        95
            Nombre de suffrages exprimés                94
            Majorité absolue                        48
                    Pour l’adoption                38
                    Contre                56

    (L’amendement no 146 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Marine Hamelet, pour soutenir l’amendement no 99.

    Mme Marine Hamelet

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    Comment accepter de voir des retraités, devenus propriétaires au terme de toute une vie de travail acharné, subir de telles situations ? Comment accepter de voir des travailleurs – qui se privent pour investir, préparer leurs vieux jours et protéger l’avenir de leurs enfants – subir de telles situations ? La loi doit être du côté des honnêtes gens.
    Face à un laxisme généralisé depuis bien trop d’années, à une législation qui a tendance à pencher du mauvais côté, mais aussi au délire idéologique de la gauche,…

    M. Rémy Rebeyrotte

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    De l’extrême gauche !

    Mme Marine Hamelet

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    …les Français demandent des actes. Alors, si la présente proposition de loi poursuit un objectif salutaire dans sa volonté de combattre l’occupation illicite et de défendre nos compatriotes, j’affirme qu’il faut corriger la mesure décidée au Sénat de réduction de trois à deux ans d’emprisonnement de la peine encourue pour occupation illicite de locaux.
    Par le présent amendement, je vous propose de renforcer à la hauteur attendue par les Français, la sanction encourue pour l’introduction frauduleuse et le maintien dans un logement ou un local commercial.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ce que vous proposez est déjà dans la loi !

    Mme Marine Hamelet

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    Par souci de justice et d’équité, la peine que je vous propose permet de mieux protéger tous les locaux, qu’ils soient à usage d’habitation ou commercial. Ce sont les plus sujets au squat et ils doivent donc être mieux protégés par la loi. Ainsi la sanction applicable serait alignée sur celle pesant sur les propriétaires excédés par la lenteur de la justice et qui, finalement, cèdent à la colère et expulsent des squatteurs de leur logement par leurs propres moyens. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    Avant de donner la parole à M. le rapporteur, j’informe l’Assemblée que, sur l’amendement no 37, je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Sur les amendements nos 105, 101, 102 et 103, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutins publics.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission sur l’amendement no 99 ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Vous proposez un doublement de la peine en cas de récidive légale. L’alinéa 4 que nous venons d’étudier, prévoit déjà des peines suffisamment renforcées. Après débat avec les sénateurs, nous avons trouvé un accord tacite sur une gradation de peines qui me semble équilibrée et bien hiérarchisée. Comme précédemment, je vous propose d’en rester à la sagesse sénatoriale qui a consisté, je le rappelle, à renforcer les sanctions, mais sans faire de la surenchère.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Madame la députée, les peines sont déjà doublées en cas de récidive. C’est la loi. Proposez-moi un triplement, quadruplement ou quintuplement des peines et je vous répondrai. En l’occurrence, ce que vous demandez est dans la loi. Si je veux être particulièrement aimable – et je veux l’être –, je vous propose de retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.
    Vous demandez quelque chose qui est déjà dans la loi, mais je note que cela vous permet évidemment d’évoquer le laxisme. Regardez les textes et le code pénal, vous verrez que ce que je dis est vrai.

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Taché.

    M. Aurélien Taché

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    Je suis évidemment défavorable à cet amendement.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Merci, monsieur le rapporteur ! (Sourires.)

    M. Aurélien Taché

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    M. Kasbarian a demandé si nous condamnions les personnes en situation de squat et si nous les considérions comme des délinquants. Je partage la réponse donnée par M. Martinet : en cas de violation de domicile, lorsque des gens entrent dans le domicile de quelqu’un et font changer les serrures, ils doivent encourir une peine de prison.
    Doit-on avoir le même raisonnement dans le cas cité par mon collègue Piquemal, celui de Christiane et Simone qui se retrouvent dans leur cave parce qu’elles n’ont plus de quoi payer leur loyer ? Doivent-elles encourir deux ans de prison ? M. le garde des Sceaux vient de nous dire qu’il trouvait juste qu’un locataire de bonne foi encourt une peine inférieure au propriétaire qui se fait justice lui-même. Christiane et Simone, qui sont dans leur cave, doivent-elles encourir une peine plus sévère que le propriétaire qui se fait justice lui-même ? Je ne le crois pas.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Que faites-vous du juge ?

    M. Aurélien Taché

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    Malheureusement, après que des amendements divers ont été adoptés, mon seul espoir est que la justice française reconnaisse l’état de nécessité pour des personnes comme Christiane et Simone. Il arrive qu’un juge reconnaisse l’état de nécessité quand quelqu’un vole de la nourriture dans un supermarché parce qu’il n’a pas d’autre choix pour survivre.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Eh bien voilà !

    M. Aurélien Taché

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    J’espère qu’il en sera ainsi dans ce type de cas, parce qu’on ne peut s’en remettre qu’à la justice, certainement pas à vous. (M. Andy Kerbrat applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Monsieur le député, j’ai un peu de mal à comprendre le sens de votre intervention car la réponse est dans la question : le cas échéant, le juge peut effectivement retenir l’état de nécessité, ce que la loi ne peut définir. Dans des situations extrêmes, le juge tirera toutes les conséquences qui s’imposent. Je n’ai pas bien compris cette intervention et je mets immédiatement un terme à la mienne.

    (L’amendement no 99 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l’amendement no 37.

    Mme Danielle Simonnet

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    La sanction pénale pour squat de domicile existe déjà. La surenchère pénale voulue dans ce texte résoudrait-elle certains cas ? J’ai participé aux auditions d’avocats spécialisés dans la défense des propriétaires, organisées par M. le rapporteur, et pour être honnête avec vous, je dois reconnaître qu’ils étaient favorables à sa proposition de loi.
    Je leur ai néanmoins posé des questions. En tant que spécialiste, à combien de cas êtes-vous confrontés par an ? leur ai-je demandé. Pas plus de cinq, m’ont-ils répondu. La surenchère pénale prévue dans ce texte aurait-elle pu permettre de mieux résoudre les dossiers sur lesquels vous avez pu travailler auparavant ? leur ai-je encore demandé. Aucunement, m’ont-ils répondu. Aucunement. Dans ce genre de délits, les gens n’anticipent pas, ce n’est pas parce qu’ils encourent un an, deux ans ou trois ans de prison qu’ils vont préférer être à la rue que rester dans une stratégie de survie.

    M. Paul Midy

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    Ce sera écrit dans le guide du squat quand même !

    Mme Danielle Simonnet

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    Par conséquent, vous faites fausse route. En outre, vous voulez sanctionner l’occupation de n’importe quel type de local – qu’il soit « commercial, agricole ou professionnel » – en faisant fi de sa vacance. Vous faites croire que vous vous préoccupez de cette pauvre retraitée qui part en Ehpad et qui a besoin de son logement pour le financer,…

    M. Laurent Jacobelli

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    Oui, nous nous en préoccupons !

    Mme Danielle Simonnet

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    …mais vous êtes en train de protéger notamment les 4,4 millions de mètres carrés de bureaux et les 3 millions de logements vides parce que leur vacance permet d’alimenter la spéculation à un moment où nous avons 4 millions de mal-logés.

    M. Jean-François Coulomme

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    Exactement !

    Mme Danielle Simonnet

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    Qui est hors la loi ? C’est l’État, lui qui doit faire appliquer la loi de mars 2007 instituant le droit au logement opposable et portant diverses mesures en faveur de la cohésion sociale, dite loi Dalo. Cette loi n’est pas respectée, et seulement 11 % des appels au 115 de Paris aboutissent. Faites appliquer la loi Dalo et les réquisitions.

    M. le président

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    Merci, madame la députée.

    Mme Danielle Simonnet

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    Cet amendement de repli demande l’exemption de sanctions pour les occupants de locaux…(M. le président coupe le micro de l’oratrice.)  (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Aurélien Taché applaudit également.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-François Coulomme.

    M. Jean-François Coulomme

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    Cette criminalisation de l’occupation illégale…

    M. Fabien Di Filippo

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    Illégale, c’est bien le mot !

    M. Jean-François Coulomme

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    …de locaux d’habitation va conduire à emprisonner des gens. La Macronie veut-elle faire de l’incarcération, la nouvelle formule du logement social ?

    M. Fabien Di Filippo

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    Nous, nous voulons seulement que les gens respectent la loi !

    M. le président

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    La parole est à Mme Caroline Yadan.

    Mme Caroline Yadan

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    Non, madame Simonnet, nous ne protégeons pas les logements vacants, mais l’un des principes fondateurs de notre droit : la propriété privée. Nous ne protégeons pas les logements vacants car, depuis 2017, nous avons précisément essayé de changer les choses et de loger les mal-logés.
    Depuis 2017, nous avons ouvert 40 000 places d’hébergement pour les sans-abri, plus de 2 milliards d’euros ont été investis dans les hébergements d’urgence, 330 000 SDF ont accédé à un logement pérenne grâce au plan Logement d’abord. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Paul Midy

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    Elle a raison, c’est important de le dire !

    Mme Danielle Simonnet

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    Ça ne marche pas ! Il y a des morts dans la rue.

    Mme Caroline Yadan

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    Depuis 2017, nous avons mis en place le bouclier loyer pour éviter une hausse inconsidérée des loyers et nous avons augmenté les APL. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) J’ajoute que le locataire, qui a déposé un dossier Dalo, ne peut pas être expulsé. Le locataire en grande difficulté est donc désormais protégé par la loi. Protégeons ceux qui en ont besoin, mais protégeons aussi les propriétaires de leur logement, car, vous l’admettrez, il y a là aussi une difficulté réelle. (M. Paul Midy applaudit.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 37.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        91
            Nombre de suffrages exprimés                90
            Majorité absolue                        46
                    Pour l’adoption                16
                    Contre                74

    (L’amendement no 37 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Julie Lechanteux, pour soutenir l’amendement no 106.

    Mme Julie Lechanteux

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    Ne vous en déplaise, monsieur le ministre, cet amendement vise à durcir les sanctions pour les personnes qui, en plus de squatter un logement ou le local d’une entreprise, y commettent des dégradations.
    En l’état, pour les infractions visées aux alinéas 4 et 5, le texte prévoit deux ans d’emprisonnement et 30 000 euros d’amende pour les squatteurs.
    Je propose de porter ces peines à trois ans d’emprisonnement et à 45 000 euros d’amende lorsque l’occupation illicite est accompagnée de la dégradation du bien immobilier squatté. Punir sévèrement les dégradations de logements et de locaux d’entreprise est une nécessité, comme en témoigne, par exemple, la situation d’une propriétaire lyonnaise dont le bien a été squatté et entièrement saccagé : cette pauvre dame doit s’acquitter de 500 000 euros de travaux.

    M. Jean-François Coulomme

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    Ce n’est pas possible ! Habitait-elle un château, cette pauvre dame ?

    Mme Julie Lechanteux

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    Une vingtaine de personnes logeaient en effet dans son bien, qui a été utilisé à des fins de vente de drogue et de prostitution. Le plus scandaleux, dans cette histoire, c’est que la justice française a obligé cette pauvre dame à verser 3 000 euros d’indemnisation à ses squatteurs, au motif qu’elle avait condamné l’entrée de son bien en leur absence pour les empêcher d’accéder à sa propriété. C’est un scandale absolu.
    C’est pour défendre les propriétaires comme elle qu’il faut agir avec fermeté. L’avocate des squatteurs lyonnais a affirmé qu’ils avaient été expulsés illégalement. J’affirme que l’action de cette propriétaire est une juste réponse, une réponse sans violence à l’inaction de l’État et de la justice. On peut même affirmer que ces derniers, non contents de rester inactifs, protègent les squatteurs. C’est en tout cas le constat qu’imposent des décisions de justice aussi honteuses. Le droit ne doit pas être du côté de ceux qui piétinent la loi, mais du côté des honnêtes gens. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Je reprendrai l’argument déjà avancé précédemment : le quantum des peines applicables a été défini en accord avec les sénateurs. Il me semble vraiment préférable d’en rester à l’équilibre auquel nous sommes parvenus avec eux. J’émets donc un avis défavorable.
    Je saisis cette occasion pour souligner que lors de l’examen du texte en première lecture, la commission des affaires économiques a adopté un excellent amendement CE29, déposé par M. Jean-Louis Thiériot, qui est devenu l’article 2 bis et traite de la question de l’entretien du logement. Nous pourrons donc en débattre lorsque nous examinerons cet article.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je m’étonne d’entendre une parlementaire critiquer ainsi une décision de justice. Je rappelle l’existence des principes de séparation des pouvoirs et d’indépendance de la justice. (Murmures sur les bancs du groupe RN.) Pardon, mais cela vaut également pour vous. La seule façon de contester une décision de justice est d’exercer les voies de recours. Vous pouvez estimer que c’est honteux, mais cela s’appelle tout simplement la séparation des pouvoirs. Je tenais à le rappeler.

    M. Laurent Jacobelli

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    On vote la loi, ici !

    Mme Michèle Peyron

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    Mais tout n’est pas permis !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Vous vous affranchissez parfois d’un certain nombre de règles en matière de justice. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Et pas vous, peut-être ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Non, pas moi. J’ajoute d’ailleurs que si ce n’est pas le garde des sceaux qui vous rappelle ces règles, je ne sais pas qui le fera.
    Pour en venir à l’amendement à proprement parler…

    M. Laurent Jacobelli

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    Un garde des sceaux mis en examen !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Allez-y, répétez-le une fois encore…

    M. Laurent Jacobelli

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    Comptez sur nous pour le faire !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Très bien. Ne vous inquiétez pas : j’en ai bien d’autres à vous raconter…

    M. Jocelyn Dessigny

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    D’autres affaires ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …sur vos comportements.
    Madame la députée, vous connaissez évidemment la différence entre une circonstance aggravante et un élément constitutif du délit. Vous expliquez – et je suis prêt à vous entendre – qu’en cas de dégradation, la pénalité doit être aggravée. Seulement, l’alinéa 4 mentionne les voies de fait : l’article 1er A comporte donc déjà la notion de dégradation.
    Dès lors que vous saisissez bien la différence entre l’élément constitutif et la circonstance aggravante, je vous propose de retirer votre amendement. À défaut, j’émettrai un avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Peu.

    M. Stéphane Peu

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    L’application de la règle selon laquelle ne s’expriment que deux orateurs, respectivement pour et contre chaque amendement, ne m’a pas permis de prendre la parole plus tôt…

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Il faut avancer !

    M. Stéphane Peu

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    …pour aborder la question que je souhaite poser depuis un moment au rapporteur et au ministre. J’ai demandé, sans obtenir de réponse, si le fait que le champ de l’article 1er A s’étende aux locaux à usage économiques pourrait conduire à ce que le texte s’applique aux occupations d’entreprises parfois pratiquées dans le cadre de l’exercice du droit de grève. De telles occupations peuvent en effet être décidées, parfois pour de longues périodes. Elles ont notamment permis d’empêcher certains patrons voyous – car, ne vous en déplaise, il en existe –…

    M. Christophe Blanchet

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    C’est vrai.

    M. Stéphane Peu

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    …de déménager des entreprises.
    Si nous adoptons l’article 1er A dans sa rédaction actuelle, qui tend à élargir la notion de squat pour englober l’introduction dans un bâtiment à usage économique, il est à craindre que la proposition de loi soit utilisée pour traiter des salariés occupant une entreprise comme des squatteurs,…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Mais non !

    M. Stéphane Peu

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    …ce qui constituerait un effet de bord attentatoire au droit de grève. Je souhaite obtenir une réponse sur ce point, car ce risque me semble indéniable. (M. Jean-François Coulomme applaudit.)

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Pas du tout !

    (L’amendement no 106 n’est pas adopté.)

    M. Jean-François Coulomme

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    Vous auriez pu prendre la parole pour répondre à M. Peu !

    M. le président

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    La parole est à M. Inaki Echaniz, pour soutenir l’amendement no 5.

    M. Inaki Echaniz

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    Le fait de traiter les ménages en situation d’impayé comme des délinquants, comme le prévoit l’alinéa 6 de l’article 1er A, est particulièrement violent et inutile. Il s’agit d’une punition supplémentaire, qui ne dissuadera aucunement des personnes au pied du mur et incapables de se reloger et de payer leur dette locative. Nous l’avons dit et répété : une telle disposition ne fera que précariser les personnes concernées, qui se trouvent déjà dans des situations compliquées.
    Écoutons plutôt les associations qui, dans leur majorité, rejettent cette proposition de loi et les experts qui ne cessent d’appeler à la construction de nouveaux logements. Je pense notamment aux conclusions de la commission pour la relance durable de la construction de logements, présidée par François Rebsamen, composée d’experts et d’élus, qui faisaient état de la nécessité de construire 400 000 à 500 000 unités par an d’ici à 2030. Cette commission a remis son rapport au Gouvernement en 2021 : il est désormais temps d’agir.
    Je reviens enfin à une question déjà posée précédemment : depuis le début de l’examen du texte, le rapporteur indique que cette proposition de loi permettra de traiter de nombreux cas et qu’il a connaissance de nombreux témoignages. Concrètement, toutefois, combien de situations semblables à celles qu’il assure vouloir traiter existe-t-il en France ? Merci de nous apporter une réponse chiffrée.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Vous voulez supprimer l’amende prévue à l’encontre des personnes qui se maintiendraient dans un lieu sans payer à l’issue de la procédure judiciaire – laquelle, je le répète, peut durer plusieurs années –, après avoir épuisé tous les recours possibles et imaginables, et dont le juge aurait ordonné l’expulsion, laquelle ne pourrait pas intervenir avant la fin de la trêve hivernale. Il est donc question, ici, de dossiers parvenus en toute fin de parcours judiciaire, concernant des personnes qui se maintiendraient dans les locaux malgré une décision du juge leur ordonnant de partir, alors qu’elles ne disposent plus d’aucun recours judiciaire et que la procédure est parvenue à son terme.
    La rédaction initialement adoptée par l’Assemblée nationale prévoyait une amende de 7 500 euros d’amende assortie de six mois de prison. Les sénateurs ont jugé préférable de retirer du texte la peine d’emprisonnement pour ne retenir que l’amende, opérant ainsi un rééquilibrage. Comme précédemment, je propose que nous nous en remettions à la sagesse sénatoriale et que nous maintenions l’amende de 7 500 euros prévue dans les cas que je viens de décrire. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-François Coulomme.

    M. Jean-François Coulomme

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    Si nous prévoyons des amendes, les seuls qui pourront les payer seront, par définition, ceux qui auraient les moyens de payer un loyer,…

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Ces cas existent ! La mauvaise foi existe !

    M. Jean-François Coulomme

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    …si modeste soit-il, pour se loger dans un petit réduit, dans un gourbi – enfin, quelque part. Ceux qui ne pourront pas payer l’amende sont précisément ceux qui squattent, et qui ne le font pas par plaisir. Contrairement à ce que prétend l’extrême droite, qui semble d’ailleurs aussi penser que ceux qui traversent la Méditerranée pour se réfugier en France viennent y faire du tourisme social,…

    M. Frédéric Boccaletti

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    Pas du tourisme, non : ils viennent profiter des aides sociales, tout simplement !

    M. Jean-François Coulomme

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    …un squatteur ne fait pas du tourisme économique : il se retrouve dans cette situation parce qu’il en est réduit à cette extrémité. Lui infliger une amende de 7 500 euros ne servira donc à rien, puisqu’il ne pourra pas la payer. Que se passera-t-il alors ? Il finira au gnouf ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Mais non !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Aucune peine de prison n’est prévue, l’article mentionne uniquement une amende !

    M. le président

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    La parole est à M. Fabien Di Filippo.

    M. Fabien Di Filippo

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    M. Echaniz a fait preuve d’une grande mauvaise foi en soutenant son amendement : il prétend que les sanctions prévues à l’alinéa 6 s’appliqueraient à des personnes accusant des impayés de loyer ou des retards de paiement, ce qui n’est absolument pas le cas. Il est question ici de personnes qui, refusant l’exécution d’une décision de justice, entendent se soustraire à une expulsion : l’affaire a été jugée, elle a fait l’objet de tous les recours possibles et, dès lors que la décision est devenue exécutoire, les occupants sont appelés à quitter leur logement.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Et cela n’intervient qu’après la fin de la trêve hivernale !

    M. Fabien Di Filippo

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    Voilà la réalité des situations visées. L’alinéa 6 concerne donc des personnes qui violent doublement la loi, et non des ménages éprouvant simplement des difficultés à payer leur loyer pendant quelques mois. Remettons les choses à leur juste place. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Très juste !

    (L’amendement no 5 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Julie Lechanteux, pour soutenir les amendements nos 105, 101 et 102, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    Mme Julie Lechanteux

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    Ils visent à supprimer le délai de deux mois prévu avant que le maintien dans un logement squatté puisse être puni par la justice. Sanctionner les squatteurs qui demeurent dans un bien occupé illégalement dès que le juge leur ordonne de quitter les lieux est la moindre des choses. Pourquoi prévoir un si long délai avant qu’une sanction soit prononcée ?
    La procédure judiciaire permettant de déloger un occupant illicite est en effet déjà bien trop longue et complexe : les propriétaires doivent suivre un processus rigoureux, qui implique des notifications, des audiences et des délais à respecter pour obtenir une ordonnance d’expulsion. Si des avancées législatives ont été réalisées – et c’est tant mieux –, ce processus peut malheureusement prendre des mois, voire des années. Dans de trop nombreux cas, l’occupant illicite profite de ce délai pour prolonger son occupation et, potentiellement, causer des dommages aux biens immobiliers. Cela a été constaté à maintes reprises. Cette situation est injuste pour le propriétaire. C’est pourquoi j’ose affirmer que la loi doit être ferme avec les squatteurs.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Elle l’est !

    Mme Julie Lechanteux

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    Nous devons envoyer un message fort aux occupants illicites. La justice doit être dissuasive, défendre les honnêtes propriétaires et punir les squatteurs, qui agissent dans l’illégalité la plus totale, pour rétablir l’ordre en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    La période de deux mois correspond au délai dont dispose l’occupant pour former un recours auprès du juge de l’exécution contre la décision de justice dont il est question à l’alinéa 6.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Eh oui !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Supprimer ou réduire cette période en faisant disparaître les mots « depuis plus de deux mois » ou en les remplaçant par « quinze jours » ou « un mois » reviendrait à supprimer le dernier recours prévu dans la procédure, ce qui ne serait pas tenable : une telle disposition serait censurée par le Conseil constitutionnel.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Exactement !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Il me semble donc préférable de nous en tenir à la rédaction actuelle, sans quoi le texte ne respecterait pas les délais de recours en vigueur et risquerait d’être frappé d’inconstitutionnalité. Demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    L’application du droit implique le respect du contradictoire – c’est aussi simple que cela. Comme M. le rapporteur l’a parfaitement expliqué, le délai de deux mois que vous souhaitez supprimer permet l’exercice d’un droit de recours effectif. Vous êtes libres de vouloir une justice sans contradictoire ni recours, mais ce n’est pas ainsi que j’envisage les choses.
    Et puis, vous revendiquez en permanence une fermeté, dont vous avez fait votre mantra. Or, précisément, la proposition de loi que nous examinons est un texte de fermeté…

    M. Jean-François Coulomme

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    Ça ! C’est même le moins que l’on puisse dire !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …contre les squatteurs.

    M. Stéphane Peu

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    Contre les locataires !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Mais non, pas contre les locataires !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Il se trouve que c’est notre majorité qui le défend, avec tous ceux qui font preuve de bonne foi – j’ai notamment relevé quelques interventions de députés du groupe Les Républicains et d’autres qui, parmi vous, voteront ce texte. En revanche, invoquer la fermeté en permanence, nous faire un procès en laxisme, ou encore déposer un amendement visant à doubler une peine en cas de récidive alors que la loi le prévoit déjà, c’est uniquement de l’affichage, pardonnez-moi de le dire !

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous ne faites jamais appliquer cette règle !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Je sais cependant que ma voix porte assez peu dans vos rangs,…

    M. Frédéric Boccaletti

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    Ça se comprend un peu !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …ce qui, au fond, n’est pas une si mauvaise chose. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Lisez le code pénal : cela vous fera du bien !

    M. Laurent Jacobelli

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    Quant à vous, lisez le code de bonne conduite : cela vous fera du bien !

    M. le président

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    La parole est à M. William Martinet.

    M. William Martinet

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    Je crains que certains ne méconnaissent totalement le profil des ménages qui se maintiennent dans un logement après une décision de justice. L’impayé de loyer ayant entraîné l’expulsion n’est pas, pour eux, un simple problème de trésorerie : nous ne parlons pas de personnes qui éprouvent des difficultés à payer leur loyer pendant quelques mois et qui parviennent ensuite à s’en sortir.
    De qui est-il question, ici ? De ménages qui, parce qu’ils habitent dans une grande ville où les loyers sont très élevés, affichent un taux d’effort lié au logement particulièrement élevé, à tel point qu’ils dépensent chaque mois 40 % à 50 % de leurs revenus pour payer leur loyer. Comment une famille dont les deux parents sont payés au Smic, par exemple, pourra-t-elle espérer payer un loyer de 800 euros par mois si l’un des conjoints est licencié et perd son travail ? Elle n’y parviendra tout simplement plus, du jour au lendemain. Encore une fois, il ne s’agit pas d’une simple question de trésorerie : ces personnes entrent alors dans la spirale infernale de l’impayé de loyer, qui peut conduire à un jugement d’expulsion.
    Que faut-il faire pour ces familles ? Il faut tenter de leur proposer une solution de relogement. Voilà ce que vous diraient les travailleurs sociaux et les associations qui luttent contre le mal-logement si vous preniez la peine de les consulter : quand une famille est engagée dans une procédure d’expulsion parce qu’elle doit s’acquitter d’un loyer incompatible avec son niveau de revenus, chacun, y compris les services de l’État et du département, s’efforcent de la reloger pour éviter qu’elle finisse à la rue et pour lui trouver, par exemple, un logement social au loyer plus abordable.
    C’est de ces personnes-là que nous parlons, celles qui se maintiennent dans leur logement…

    M. Paul Midy

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    On en connaît, des personnes qui préfèrent se maintenir dans leur logement !

    M. William Martinet

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    …plutôt que d’aller vivre dans la rue avec leur famille et leurs enfants.
    C’est bien compréhensible. D’ailleurs, la vérité, c’est qu’à leur place nous ferions la même chose.
    C’est pourquoi la possibilité de condamner ces personnes au bout de deux mois apparaît comme absolument insupportable, scandaleuse. Quand j’entends le Rassemblement national demander que ce délai soit réduit à quinze jours, j’ai l’impression d’être sur une autre planète. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. Christophe Blanchet.

    M. Christophe Blanchet

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    Sur cet amendement, je suis de l’avis du Gouvernement et du rapporteur. J’aimerais cependant revenir sur les propos de notre collègue M. Peu car ils m’ont fait réfléchir. Si je comprends que la loi n’apporte pas toutes les précisions relatives au sujet qu’il a abordé, nos débats doivent pouvoir donner une indication sur l’esprit de cette loi.
    M. Peu a donné un exemple qui m’a semblé pertinent. Il existe des cas, peu nombreux certes, mais nous en connaissons tous, de chefs d’entreprise qui, le vendredi, ferment leur entreprise en emportant avec eux le matériel si bien que lorsque les salariés arrivent le lundi, il n’y a plus rien. Même si cette situation est rare, elle existe. C’est une réalité que nous ne pouvons pas cautionner.
    La question de M. Peu mérite donc un éclaircissement de votre part. Même si cette précision ne figure pas dans la loi, au moins le débat que nous avons aujourd’hui, en apportant une précision sur l’esprit du texte, sera peut-être utile, demain si la justice doit se prononcer. J’aimerais donc vraiment obtenir une réponse sur ce point.

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 105.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        93
            Nombre de suffrages exprimés                92
            Majorité absolue                        47
                    Pour l’adoption                29
                    Contre                63

    (L’amendement no 105 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 101.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        91
            Nombre de suffrages exprimés                90
            Majorité absolue                        46
                    Pour l’adoption                28
                    Contre                62

    (L’amendement no 101 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 102.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        95
            Nombre de suffrages exprimés                95
            Majorité absolue                        48
                    Pour l’adoption                30
                    Contre                65

    (L’amendement no 102 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis maintenant saisi de trois amendements, nos 103, 150 et 104, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Julie Lechanteux, pour soutenir l’amendement no 103.

    Mme Julie Lechanteux

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    Si vous le permettez, je défendrai en même temps l’amendement no 104. L’un comme l’autre visent à augmenter la peine infligée à ceux qui violent délibérément une décision de justice en continuant à squatter, coûte que coûte.
    En première lecture, la proposition de loi visait à sanctionner cette infraction de six mois d’emprisonnement. Je trouve désolant que cette peine ait été vidée de son caractère dissuasif par les sénateurs. Je rappelle qu’à Marseille une décision d’expulsion avait été prononcée par la justice à l’encontre d’une habitante qui résidait depuis plus de deux ans dans un logement appartenant à un couple de retraités et que cette squatteuse a pu librement déposer un recours devant le tribunal administratif pour suspendre la procédure qui prévoyait une intervention de la force publique.
    Il faut agir. Il est urgent de donner un caractère dissuasif aux mesures d’expulsion pour que les juges expulsent réellement les squatteurs. La peine infligée contre cette infraction doit donc comprendre plusieurs mois de prison ferme.
    Les Français en ont plus que marre de voir que, dans notre pays, les squatteurs ont davantage de droits que les honnêtes propriétaires.

    Mme Danielle Simonnet

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    C’est faux !

    Mme Julie Lechanteux

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    Alors agissons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Romain Baubry, pour soutenir l’amendement no 150.

    M. Romain Baubry

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    Il vise à instituer une peine d’emprisonnement à l’encontre de ceux qui ne tiennent pas compte des décisions de justice afin d’envoyer un signal à ceux qui se jouent de la loi en sachant pertinemment qu’ils échapperont aux sanctions.
    Nous comptons sur ce caractère dissuasif pour mettre fin à des situations telles que les propriétaires se retrouvent dans la rue ou plongent dans la précarité. Par cette mesure, nous espérons leur rendre justice. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    L’amendement no 104 de Mme Julie Lechanteux a été défendu il y a un instant.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    J’aimerais qu’il n’y ait aucune confusion. Tel que nous l’avons adopté en première lecture, l’article 1er de la proposition de loi – qui porte bien, je le rappelle, sur les squatteurs de domicile – comporte des peines de trois ans de prison…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Ce n’est pas rien !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    …accompagnés de 45 000 euros d’amende. Il a été adopté sans modification par les sénateurs et il n’est donc plus en discussion : il est désormais inscrit dans le texte dont nous discutons.
    Si, comme je l’espère, nous votons la proposition de loi, je souhaite que, lorsque nous rencontrerons nos concitoyens en circonscription, nous leur indiquions la peine désormais prévue à l’encontre des squatteurs : trois ans de prison et 45 000 euros d’amende.
    Vos amendements portent sur une autre sanction, que nous avons également créée – les fameux 7 500 euros d’amende, auxquels nous avions ajouté six mois de prison avant que cette dernière peine soit supprimée par les sénateurs – non pas à l’encontre des squatteurs mais des locataires en situation d’impayé, arrivés tout au bout de la procédure de contentieux locatif et qui, après avoir épuisé tous les recours, se maintiennent dans les lieux, après de nombreuses années, malgré une décision exécutoire de la justice. Le compromis trouvé avec le Sénat sur cette question a consisté à se limiter à une amende et donc à supprimer, je l’ai dit, la peine de prison.
    J’espère que les choses sont claires. Ne confondons pas tout. Il me semble nécessaire de bien distinguer les situations lorsque nous expliquons à nos concitoyens les différentes sanctions. Demande de retrait et, à défaut, avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Même avis. La distinction entre locataire et squatteur est absolument fondamentale. Certains prétendent ici que le squatteur serait mieux traité que d’autres. Or cette loi vise justement à punir les squatteurs…

    Mme Danielle Simonnet

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    Ils le sont déjà !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …à la juste hauteur de l’acte qu’ils commettent, c’est-à-dire violer la propriété d’autrui.
    Je note au passage un paradoxe assez cocasse. Vous demandez, sur les bancs du Rassemblement national, que des peines de prison soient prononcées contre ceux qui ne respectent pas les décisions de justice. Pourtant l’une d’entre vous vient de qualifier certaines de ces décisions de « honteuses ». C’est assez singulier.

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandra Regol.

    Mme Sandra Regol

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    J’ai entendu de nombreux orateurs exprimer leur volonté d’aider les petits propriétaires à lutter pour récupérer leur bien. Mais si la volonté d’aider ces personnes était réelle et partagée dans cet hémicycle, on agirait pour leur permettre de ne se pas retrouver privées de leurs loyers en créant par exemple un fonds visant à compenser les sommes manquantes. Cela laisserait le temps de trouver des solutions pour des personnes qui ne cherchent pas toutes à exploiter une situation mais qui vivent simplement dans une précarité financière et sociale. Il faudrait se donner les moyens d’agir pour les propriétaires et surtout pour les personnes précaires, en veillant à ne pas léser les propriétaires.
    Or votre volonté de sanctionner, au lieu d’aider les deux parties, témoigne du fait que vous ne vous préoccupez ni du sort des petits propriétaires ni de celui des personnes précaires. Ce qui vous intéresse, c’est uniquement de prendre des mesures d’affichage et d’infliger des sanctions qui n’ont aucun effet sur les personnes qui ont réellement besoin d’être aidées.

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 103.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        92
            Nombre de suffrages exprimés                91
            Majorité absolue                        46
                    Pour l’adoption                30
                    Contre                61

    (L’amendement no 103 n’est pas adopté.)

    (Les amendements nos 150 et 104, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    Sur les amendements nos 8 et 9, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public. Sur le vote de l’article 1er A, je suis saisi par le groupe Renaissance d’une demande de scrutin public.
    Tous ces scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Michaël Taverne, pour soutenir l’amendement no 19.

    M. Michaël Taverne

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    Par cet amendement, nous proposons une aggravation de la peine. Il vise en effet à augmenter le montant de l’amende prévue dans le cas où une personne se maintiendrait sans droit ni titre dans un local à usage d’habitation plus de deux mois après qu’une décision de justice définitive et exécutoire a été prononcée.
    Le non-respect d’une décision de justice étant inacceptable, il convient d’alourdir la sanction.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Nous avons déjà eu ce débat. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Je me permets d’interrompre ce congrès de multipropriétaires qui se tient dans une ambiance feutrée, un peu comme dans un salon de thé, pour vous demander, monsieur le rapporteur, si vous avez auditionné Camille François, chercheur qui a étudié dans un ouvrage récent les expulsions locatives – je vous ai d’ailleurs invité à assister à une audition de cet auteur que j’ai moi-même menée.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Oui, je suis au courant, j’ai vu vos tweets !

    M. François Piquemal

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    Il ne s’est pas livré à une analyse express, dans l’enceinte feutrée et, si j’ose dire, glorieuse, de l’Assemblée nationale mais il est allé rencontrer, dans un bureau, des personnes qui travaillent sur les expulsions locatives. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Si vous n’appréciez pas l’ambiance de cette enceinte, sortez !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Eh bien sortez !

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous pouvez sortir si vous n’êtes pas à l’aise !

    M. François Piquemal

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    Je vous ai écoutés, chers collègues. Faites de même, c’est le moindre des respects.
    Voici un extrait de ce livre, dans lequel il cite les chiffres tels qu’ils sont : « […] entre 2010 et 2019, le nombre d’expulsions prononcées par les juges et réalisées par la police a augmenté plus fortement que le nombre de recours judiciaires déposés par les propriétaires – respectivement + 11 % et + 40 % contre + 4 %. Autrement dit, si les expulsions locatives ont augmenté en France […] c’est aussi parce que l’État expulse davantage que par le passé et davantage que ce que laisserait présager la seule augmentation des procès intentés par les bailleurs. » Il ajoute que « la fréquence et la gestion des expulsions locatives sont influencées par les réformes néolibérales auxquelles est soumis le secteur public, comme le rétrécissement de l’État social » et rappelle, à ce titre, « la baisse des prestations sociales », j’en passe et des meilleures.

    M. Fabien Di Filippo

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    Le respect du droit à la propriété, c’est néolibéral !

    M. François Piquemal

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    Ce que propose le Rassemblement national est finalement assez intéressant. Nous sommes pour le droit au logement tandis que vous êtes pour le droit à la prison. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.) Lorsqu’une personne n’arrive plus à payer son loyer, selon vous, il faut l’envoyer en prison. Qu’avez-vous donc contre les surveillants pénitentiaires ?

    M. Fabien Di Filippo

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    Oh là là !

    M. François Piquemal

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    Alors que les prisons sont déjà pleines, vous voulez y envoyer de nouvelles personnes. Il suffirait pourtant de construire massivement, par exemple, du logement très social pour que les personnes aient accès à un logement.

    M. Frédéric Boccaletti

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    Qu’ils ne paieraient pas évidemment !

    M. François Piquemal

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    Ce n’est pas ce que fait le Gouvernement.
    Vous êtes, au fond, à côté de la plaque, à côté de la réalité. Nos concitoyens n’ont pas besoin d’aller en prison mais d’avoir un logement accessible financièrement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    (L’amendement no 19 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Lionel Tivoli, pour soutenir les amendements nos 8 et 9, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    M. Lionel Tivoli

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    Tout d’abord, je tiens à répondre à mon collègue qui vient d’affirmer que nous étions « pour le droit à la prison » qu’en raison des mensonges qu’il profère, certaines personnes pourraient se retrouver injustement derrière les barreaux. En effet, Christiane et Simone – l’exemple que vous brandissez depuis tout à l’heure –, qui vivent dans mon département, n’ont pas été mises dehors par leur propriétaire parce qu’elles ne payaient pas leur loyer, mais parce qu’il souhaitait mettre leur logement aux normes, après qu’elles ont reçu une proposition de relogement. Je ferme la parenthèse. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
    Par ces amendements, je propose de modifier la législation pour alourdir et étendre considérablement le panel de sanctions prévues à l’encontre des personnes déjà condamnées définitivement pour occupation illicite d’un bâtiment.
    Trop nombreux sont ceux qui occupent illégalement des logements – parmi eux figurent des récidivistes – en profitant des failles juridiques et des principes des droits humains tels qu’ils sont appliqués dans notre pays. Alors que celui-ci se montre très bienveillant à leur égard, ces individus gâchent la vie des petits propriétaires en détruisant et en détériorant leurs biens alors que ceux-ci ont besoin des rentes de leur loyer pour s’assurer des revenus ou même de leur maison secondaire pour y vivre une partie de l’année. Ce n’est pas parce que l’on est propriétaire que l’on est riche ni que l’on doit accepter de voir sa maison squattée et saccagée.
    L’amendement no 8 vise à rendre inapplicables les dispositions relatives au droit au logement opposable pendant une durée d’un an pour les récidivistes définitivement condamnés pour une utilisation frauduleuse d’un bien immobilier ou une occupation sans droit ni titre d’un immeuble ou d’une propriété à usage d’habitation appartenant à un tiers.
    L’amendement no 9 prévoit, pour ces mêmes personnes, la suppression de l’APL, de l’ALF, l’allocation de logement familiale, et de l’ALS, l’allocation de logement sociale. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Nous avons déjà eu ce débat en commission. Vous proposez en réalité une forme de double peine puisque votre amendement no 8 prévoit que les personnes condamnées une première fois ne peuvent se prévaloir du droit au logement opposable pendant un an.
    Cette sanction me semble excessive et ne ferait pas avancer la procédure pour les petits propriétaires victimes de squatteurs ou d’impayés. Or l’objectif de cette proposition de loi a toujours été l’accélération des procédures. Ce n’est pas en introduisant une double peine qu’on peut l’atteindre. Avis défavorable sur les deux amendements.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Les peines, les sanctions automatiques sont anticonstitutionnelles. Je suis donc doublement défavorable puisqu’il y a deux amendements.

    M. le président

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Pour répondre à M. Tivoli du Rassemblement national. Est-ce que vous êtes allés voir Simone et Christiane, dans votre département ? Moi oui. J’ai été les voir, et contrairement à ce que vous racontez, le propriétaire les a expulsées non afin de vivre dans ce logement mais pour en profiter via Airbnb (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES), divisant en trois le logement dans le vieux Nice pour faire de la spéculation locative. Voici comment vous traitez les personnes modestes françaises, et de la part du Rassemblement national, c’est assez éclairant : on peut leur mettre la tête sous l’eau sans que vous bougiez, tandis que, lorsque les multipropriétaires spéculent sur le logement et virent nos anciens et nos mamies,…

    M. Lionel Tivoli

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    Ce n’est pas ce que j’ai dit !

    M. François Piquemal

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    …cela ne vous pose aucun problème, vous êtes là pour les défendre. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 8.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        97
            Nombre de suffrages exprimés                97
            Majorité absolue                        49
                    Pour l’adoption                32
                    Contre                65

    (L’amendement no 8 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 9.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        95
            Nombre de suffrages exprimés                95
            Majorité absolue                        48
                    Pour l’adoption                32
                    Contre                63

    (L’amendement no 9 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 128.

    Mme Sandra Regol

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    Une expulsion, c’est en moyenne une année de scolarité perdue pour un enfant. Combien d’entre eux vivent en hôtel social ou dans un bidonville, souffrent déjà de la pauvreté, voire de la misère, et tentent malgré tout de s’accrocher ? Certains de ces enfants se sont regroupés dans le collectif École pour tous, et ils ne demandent que le droit à pouvoir suivre une scolarité. Le collectif propose de créer une trêve scolaire, sur le modèle de la trêve hivernale, d’où cet amendement. Monsieur le rapporteur, lors de la première lecture, vous vous êtes dit favorable à ce dispositif, mais, en deuxième lecture, sur les quatre amendements déposés à ce sujet, seul cet amendement de repli a été étudié. Ils sont 100 000 enfants, en France aujourd’hui, à être privés d’accès à l’école – parmi eux Maria, 4 ans, vivant dans un hôtel social, à laquelle le maire de Noisy-le-Grand a refusé l’école. Heureusement, le Conseil d’État a agi.

    M. Bruno Millienne

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    Les institutions sont tout de même bien faites !

    Mme Sandra Regol

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    Parmi ces enfants, il y a aussi Salvi, Rom de Bulgarie, qui a grandi en bidonville, expulsé sans arrêt, et qui a fini en Segpa – section d’enseignement général et professionnel adapté –, malgré un bon niveau de base ; aujourd’hui, il devient pompier pour que les camps de tous les enfants roms ne flambent pas encore comme il les a vus flamber. Et Jassem, comorien, refusé à l’entrée au lycée, s’est accroché, s’est battu pour avoir une éducation, et prépare aujourd’hui l’agrégation en mathématiques après avoir passé un bac avec 18 sur 20 de moyenne. Ce sont ces enfants, capables de faire la France de demain, qu’il s’agit de protéger aujourd’hui. Leur scolarité est théoriquement protégée par le droit, en l’espèce par le code de l’éducation et par des conventions internationales, dont la Convention internationale des droits de l’enfant, et pourtant, ce droit est malmené, il n’est pas respecté. Et votre proposition de loi, monsieur Kasbarian, aggrave encore la difficulté pour eux de recourir au droit. Cette situation est véritablement inacceptable. Nous devons faire respecter le droit de ces enfants à une scolarisation, faire primer l’intérêt de l’enfant ; pour cela, nous devons instaurer une trêve scolaire. Je suis aujourd’hui le porte-parole de ces enfants qui vous appellent à l’aide. (Mme Andrée Taurinya applaudit.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Je ne sais pas à quel moment j’ai pu être favorable à cet amendement… J’en suis étonné parce que cela ne me ressemble pas.

    M. Pierre Cazeneuve

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    C’est de gauche ! (Sourires.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    En tout cas, vous proposez la création d’une trêve scolaire qui suspendrait toute expulsion, quel que soit le lieu d’habitation, du début à la fin de l’année scolaire, c’est-à-dire du mois de septembre jusqu’au mois de juin, hors donc les mois de juillet et d’août. Vous proposez en réalité une extension de la trêve hivernale, qui couvrirait ainsi dix mois sur douze. Autant dire qu’on ne pourrait procéder à des expulsions qu’en juillet et en août. J’entends l’intérêt du sujet, mais vous proposez une extension maximaliste de la trêve hivernale… L’étape d’après, ce sera une trêve annuelle qui s’appliquera aux douze mois de l’année, et il n’y aura plus du tout d’expulsions locatives. Je crois que c’est excessif.

    Mme Andrée Taurinya

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    Un peu d’humanité pour les enfants !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    J’en profite pour passer un message, car je vois dans la presse beaucoup d’articles sur les squats et je lis beaucoup de commentaires : la trêve hivernale ne s’applique pas aux squatters.

    Mme Andrée Taurinya

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    Mais ce sont des enfants !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Dans notre droit actuel, que ce soit en janvier, en mars ou l’été, si quelqu’un rentre chez vous et squatte votre canapé, il est soumis à une procédure express d’expulsion prévue par l’article 38 de la loi Dalo, disposition renforcée en 2020, et vous êtes protégé ; cela marche hiver comme été. Sinon, quelqu’un qui s’introduirait chez vous au mois de novembre pourrait attendre l’arrivée des beaux jours pour que vous puissiez récupérer votre domicile. Par conséquent, je le répète, en l’état actuel du droit, la trêve hivernale ne s’applique pas aux squats. L’avis est défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Taché.

    M. Aurélien Taché

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    On peut regretter que la trêve hivernale ne s’applique pas aux squats – comme vous dites –, puisque quand des gens vivent dans des bidonvilles ou en sont réduits à vivre dans des situations…

    M. Frédéric Boccaletti

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    Extraordinaire !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Accueillez les squatters !

    M. Aurélien Taché

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    Faut-il rappeler encore une fois ce qu’est un squat, car peut-être n’avez-vous pas véritablement étudié le sujet ? Parfois, des gens se logent dans des abris de fortune. Je trouve absolument regrettable qu’en plein hiver, on expulse les familles, enfants compris, qui se trouvent sur ce type de terrain. Je suis même favorable à ce qu’il n’y ait aucune expulsion sans proposition de relogement quand il s’agit d’une famille, surtout avec des enfants en bas âge. C’est à l’État, qui a mis en place un droit au logement opposable, de reloger ces personnes avant de les expulser. Et ce texte va bientôt les criminaliser si elles ont le malheur d’aller trouver refuge dans un garage, dans un local ou dans n’importe quel abri qui leur éviterait de mettre leur vie en danger.
    Je pense donc que l’amendement de ma collègue Sandra Regol est de bon sens : ce serait faire preuve d’un minimum d’humanité que de reconnaître que, quand il y a des enfants dans ce type de situation, on ne peut pas procéder à une expulsion.

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Pour ma part, je suis très gênée par ce débat que je trouve très manichéen.

    M. Paul Midy

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    Exactement !

    Mme Annie Genevard

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    Depuis le début de l’après-midi, on oppose les méchants propriétaires et les légitimes squatteurs.

    Mme Sandra Regol

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    Est-ce que j’ai dit cela ?

    Mme Annie Genevard

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    Un tel sujet mérite un autre débat. Si la situation des enfants à la rue est absolument insupportable, personne ne pouvant la justifier, croyez-vous vraiment qu’on ne puisse régler ces situations inacceptables qu’en commettant un délit ? Croyez-vous vraiment que le squat soit une réponse adaptée quand un enfant est dans la rue ? Croyez-vous qu’investir un local pas chauffé, pas éclairé et souvent insalubre, sans savoir si l’on ne sera pas délogé par la force publique, soit un environnement qu’on puisse espérer pour des enfants ? Ne croyez-vous pas qu’il y a dans nos villes des services sociaux et dans nos départements des services adaptés au traitement de ces situations qui sont en effet très douloureuses ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur plusieurs bancs du groupe Dem.)

    Mme Sandra Regol

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    Mais ils sont à la rue, ces enfants !

    (L’amendement no 128 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’article 1er A.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        100
            Nombre de suffrages exprimés                100
            Majorité absolue                        51
                    Pour l’adoption                82
                    Contre                18

    (L’article 1er A, amendé, est adopté.)

    Article 1er B

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Castellani.

    M. Michel Castellani

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    Je comprends la finalité de cet article car pouvoir disposer de son bien est un droit constitutionnel incontournable et en être exclu de fait une privation de liberté injuste. Pourtant, je ne peux pas me départir d’une certaine retenue, voire d’un certain malaise, parce que derrière l’occupation illégale, il y a aussi très souvent de la détresse humaine. Protéger la propriété, défendre le droit, ne signifie nullement, du moins dans l’esprit des députés du groupe LIOT, être étranger à l’existence des sorts incertains et ignorer la nécessité d’une politique active de logement social. Voilà tout ce que je voulais dire, sans prétention et sans vouloir donner de leçon à personne.

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie-France Lorho.

    Mme Marie-France Lorho

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    L’article 1er B restaure opportunément l’équilibre de l’article L. 412-3 du code des procédures civiles d’exécution tel que modifié par la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté. Cet article offre actuellement au juge la faculté d’accorder des délais renouvelables aux occupants sans titre dont l’expulsion a été ordonnée judiciairement. La problématique qui s’impose au juge de l’expulsion est la suivante : la conciliation entre le droit de propriété et le droit au respect du domicile en tant qu’émanation directe du droit au respect de la vie privée. L’office du juge est celui d’un contrôle de proportionnalité entre, d’une part, l’ingérence que représente pour quelqu’un une expulsion de son domicile et, d’autre part, la légitimité du but poursuivi, à savoir la protection de la propriété privée. Or en accordant des délais renouvelables d’expulsion à des occupants sans droit ni titre et qui sont juridiquement expulsables, le législateur a fait un peu trop pencher la balance dans le sens de l’occupant au détriment du propriétaire lésé dans son droit.
    Il est important de souligner deux points. Le premier, c’est que le droit de propriété et le respect du domicile ne sont pas d’égale valeur car si le droit de propriété est un principe de valeur constitutionnelle, le respect du domicile n’est qu’un objectif à valeur constitutionnelle. Selon la Cour de cassation, le droit au logement est seulement une finalité assignée par le législateur, il ne s’agit pas d’un droit subjectif au logement permettant à chacun de revendiquer le droit d’obtenir concrètement un logement. Parler de droit au logement est donc un abus de langage. Le second, le plus important, c’est qu’il est dangereux d’antagoniser ces deux droits. Ils doivent au contraire être conciliés dans un souci d’apaisement pour que le marché de l’immobilier fonctionne. Les opposer, c’est mettre en péril ce marché et provoquer une crise du logement.
    Il était donc nécessaire afin de réduire l’antagonisme créé par le législateur, que l’article 1er B rééquilibre le dispositif de l’article 412-3 du code des procédures civiles d’exécution en supprimant la faculté pour le juge d’accorder des délais renouvelables aux occupants sous le coup du prononcé d’une expulsion lorsque ces derniers sont entrés dans des locaux à l’aide de manœuvre, menace, voie de fait ou contrainte. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Éric Coquerel.

    M. Éric Coquerel

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    Je profite de l’examen de cet article – qui aggrave encore la situation des personnes occupant un lieu de manière illégale en limitant la faculté pour le juge d’accorder des délais d’expulsion –, pour vous répondre, madame Genevard.
    Vous savez que je vous respecte, car vous manifestez des préoccupations humanistes dans la plupart de vos interventions, mais votre dernier propos illustre la situation anormale dans laquelle nous nous trouvons. Vous vous êtes demandé s’il était supportable pour des enfants de vivre dans un squat. Mais est-il supportable pour des enfants de dormir dehors sur le trottoir, dans nos grandes villes ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.) Là est le problème. Vous savez comme moi que 330 000 personnes dans notre pays dorment dehors, y compris des femmes et des enfants, et que ce chiffre est chaque année en augmentation. Voilà la situation qui est anormale. Et l’État a failli. Je vous rappelle qu’en Seine-Saint-Denis, le dispositif Dalo n’existe plus. Ainsi, quand une famille fait valoir son droit au logement, le préfet répond : « Ok, elle y a droit, mais je n’ai aucun logement disponible. »

    M. Paul Midy

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    C’est le problème !

    M. Éric Coquerel

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    À partir du moment où l’État a failli et où des locataires se retrouvent dans des logements sociaux indignes – j’ai fait une vidéo à l’Île-Saint-Denis que je vous conseille de regarder –, alors même qu’ils payent leur loyer –, bref quand la situation du logement est à ce point catastrophique, je revendique le fait que le droit au logement prime le droit de propriété. (Mêmes mouvements.) Et je ne comprends pas les réactions de certains collègues qui comptent sur le fait que nos concitoyens ne connaîtraient pas la loi. La question du squat d’un logement servant de domicile a été réglée par la loi de 2020.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    C’est incroyable qu’il salue la loi de 2020 !

    M. Éric Coquerel

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    On n’est donc pas en train d’évoquer le cas d’une personne qui, rentrant chez elle et trouvant quelqu’un à son domicile, ne pourrait rien faire. Il s’agit ici très clairement de squatteurs installés dans des immeubles vides ou dans des locaux commerciaux vacants, et qui ne devraient pas l’être puisque l’État pourrait les réquisitionner. (Mêmes mouvements.) Je trouve scandaleux que des gens, des enfants, des familles vivent dehors, sur les trottoirs de nos cités ! Et on devrait tous s’entendre sur ce point. (Mêmes mouvements.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Caroline Yadan.

    Mme Caroline Yadan

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    Mes collègues sont favorables à ce que les individus qui sont expulsés et ne peuvent pas se reloger puissent rester dans leur logement. Mais, pardon de le dire, c’est bien ce que le droit permet aujourd’hui ! En effet, la loi Dalo du 5 mars 2007 vise à garantir le droit au logement, qui constitue aussi un devoir de solidarité pour l’ensemble de la nation ; par ailleurs, elle reconnaît un droit au logement décent et indépendant aux personnes qui ne peuvent y accéder ou s’y maintenir par leurs propres moyens. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) En d’autres termes, la mise en œuvre du droit au logement ne passe plus aujourd’hui par une obligation de moyens, mais par une obligation de résultat. Le droit, en l’état actuel, répond donc exactement à ce que vous demandez.
    Les personnes susceptibles de bénéficier de cette loi sont celles dont vous parlez dans vos interpellations, puisque ce sont des demandeurs de logement social ; il s’agit de personnes mal logées, voire non logées, qui font l’objet d’une procédure d’expulsion et demandent un hébergement. Une fois le droit au logement reconnu, le préfet a l’obligation de proposer un logement dans un certain délai. (M. Éric Coquerel s’exclame.)

    M. Aurélien Taché

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    Ils ne sont pas logés !

    Mme Caroline Yadan

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    Et cela fonctionne, il suffit de regarder les chiffres : entre 2008 et 2020, 333 848 ménages ont été reconnus éligibles au Dalo (M. Aurélien Taché proteste) et 207 399 d’entre eux ont bel et bien accédé à un logement, soit 61 % de l’ensemble de ces ménages.

    M. Éric Coquerel

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    Revenez à la vie réelle !

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Je veux dire au président Coquerel qu’il existe des procédures légales, telles que la réquisition. En son temps, un certain président de la République, de notre sensibilité politique,…

    M. François Piquemal

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    Jacques Chirac !

    M. William Martinet

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    C’était le bon temps ! (Sourires.)

    Mme Annie Genevard

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    …avait procédé à des réquisitions. Je ne crois pas que l’illégalité soit une réponse à une situation moralement inacceptable. Le groupe Les Républicains est favorable au renforcement de l’efficacité des procédures judiciaires d’expulsion des squatteurs et soutient également la suppression, opérée par l’article 1er B, de la possibilité laissée au juge d’accorder des délais de relogement en cas de squats de locaux.

    M. le président

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    Nous en venons à la discussion des amendements.
    Je suis d’abord saisi de six amendements identiques, nos 2, 24, 38, 67, 111 et 134, tendant à la suppression de l’article.
    La parole est à M. Inaki Echaniz, pour soutenir l’amendement no 2.

    M. Inaki Echaniz

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    Cet article supprime la possibilité qui est laissée au juge civil d’accorder des délais à la personne qui squatte un logement ou des locaux à usage professionnel, lorsque son expulsion a été ordonnée par voie judiciaire. Il est nécessaire de laisser le juge apprécier chaque situation et de permettre aux personnes de bénéficier d’un peu plus de temps pour trouver une solution de logement. D’autant que notre pays traverse une grave crise du logement, qui affecte 14,8 millions d’individus, comme nous l’avons rappelé.
    Le nombre de logements sociaux et de places d’hébergement est très insuffisant ; il est donc loin de répondre aux besoins. Écoutez bien ceci, madame Yadan : selon la Fondation Abbé Pierre, une personne expulsée met en moyenne onze mois à retrouver un logement, ce qui montre bien que la loi Dalo ne fonctionne pas. Aujourd’hui, 32 % des ménages ne retrouvent pas de logement pendant les trois premières années.

    M. Paul Midy

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    C’est là-dessus qu’il faut travailler, pas sur le squat !

    M. Inaki Echaniz

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    Ne venez donc pas nous dire que la loi Dalo fonctionne et offre des solutions de logement à toutes les personnes en difficulté : ce n’est pas vrai ! Le délai accordé par le juge s’avère donc précieux pour les personnes concernées, justement pour pallier le désengagement de l’État et l’absence de solutions proposées en raison du manque de logements d’urgence.
    Je reviens aux propos de M. Coquerel. Voyez-vous, j’ai travaillé cinq ans dans un établissement scolaire en Seine-Saint-Denis : à cette époque, il m’est souvent arrivé de devoir prendre en charge des familles qui se trouvaient à la rue ou faisaient l’objet de procédures d’expulsion ; j’ai passé des heures au téléphone, espérant obtenir une réponse du 115, en vain.

    M. Paul Midy

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    Alors c’est ce problème qu’il faut résoudre !

    M. Inaki Echaniz

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    Voilà la réalité de notre pays !
    Monsieur le rapporteur, vous parlez des délinquants depuis tout à l’heure. Or vous n’avez aucun chiffre à nous donner pour illustrer ces situations concrètes ! Pour ma part, je vous parle de millions de personnes qui sont mises à la rue et ne bénéficient d’aucune solution du fait du désengagement de l’État ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    M. le président

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    Sur les amendements nos 2 et identiques, je suis saisi par le groupe Socialistes et apparentés (membre de l’intergroupe NUPES) d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 24.

    M. Stéphane Peu

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    Premièrement, nous parlons de cas où l’expulsion a été jugée. Jusqu’à présent, le juge pouvait accorder des délais, non pas systématiquement, mais notamment lorsque les familles expulsées comptaient des enfants en bas âge, afin de leur donner le temps de trouver une solution de logement ou, à défaut, d’hébergement. J’ignore si c’est le cas dans tous les départements mais, en Seine-Saint-Denis, ce n’est même pas la peine d’appeler le 115 : la ligne est saturée !
    Deuxièmement, le droit au logement opposable ne fonctionne pas. Nous sommes dans une situation où une loi de la République, votée ici, n’est pas appliquée dans un certain nombre de départements (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES), en conséquence de quoi l’État est régulièrement condamné par le tribunal administratif.

    M. Paul Midy

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    Encore une fois, c’est à cela qu’il faut remédier !

    M. Stéphane Peu

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    Oui, il faut des délais lorsque des enfants sont susceptibles de se retrouver à la rue ! De deux choses l’une : soit les lois que nous votons ici s’appliquent toutes – en l’occurrence, les enfants concernés auraient au moins un toit au-dessus de leur tête, assurant ainsi leur protection –, soit nous ne sommes pas capables de les appliquer, ce qui est le cas de la loi Dalo et de la loi relative à l’hébergement d’urgence, et, dans cette hypothèse, il faut au moins que le juge puisse accorder des délais afin d’empêcher que des enfants dorment à la rue – ce n’est pas compliqué à comprendre !
    Bref, nous devons considérer tous les points de vue possibles pour prendre une décision responsable. Je ne vois pas pourquoi on supprimerait la possibilité donnée au juge d’accorder des délais quand il n’est pas possible d’appliquer les autres lois permettant d’héberger les gens en souffrance. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Martine Etienne, pour soutenir l’amendement no 38.

    Mme Martine Etienne

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    Il vise lui aussi à supprimer l’article 1er B qui, comme l’ensemble de cette proposition de loi, est inhumain et complètement décalé par rapport aux réalités matérielles et sociales de notre pays. L’expulsion, sans possibilité de relogement, vous permet simplement de stigmatiser les plus précaires, alors que la trêve hivernale touche à sa fin, et ce pour éviter d’avoir à traiter la crise du logement. Les associations ne cessent de vous le dire : l’occupation illicite n’est qu’une conséquence de l’état du mal-logement en France. C’est vous qui avez choisi de démanteler le parc locatif français, c’est vous qui avez choisi de précariser les citoyens et les locataires ! En effet, de 2016 à 2021, soit en cinq ans, nous sommes passés de 124 000 logements sociaux financés à seulement 91 000.
    Le Gouvernement avait promis de construire 250 000 logements sociaux au cours des deux dernières années : évidemment, cette promesse n’a pas été tenue. Emmanuel Macron, qui affirmait que plus personne ne dormirait dans la rue à la fin de son premier mandat, n’a pas tenu parole. Aujourd’hui, le nombre de personnes sans domicile a plus que doublé, soit 330 000 personnes, selon les estimations. Et voilà que vous nous soumettez une proposition de loi pour pouvoir expulser les habitants, sans leur proposer de solutions de relogement. Cet article ne va servir qu’à augmenter le nombre de sans-abri, sans leur venir en aide. Je pense qu’on se souvient tous de ces scènes de policiers qui, en 2021, ont délogé 200 migrants sans abri place de la République, à Paris, les forçant à sortir de leurs tentes à coups de gaz lacrymogène et de matraque.

    M. Paul Midy

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    Quel est le rapport avec la proposition de loi ?

    Mme Martine Etienne

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    C’est cela le traitement des sans-abri en France aujourd’hui ! L’article ne protège en rien les petits propriétaires ; il stigmatise et criminalise les plus précaires en les privant du peu de garanties sociales et de recours judiciaires que la loi leur offre actuellement. Vous êtes dans une logique de surenchère répressive,…

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est consternant !

    Mme Martine Etienne

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    …vous préférez voir les gens dormir dans la rue plutôt que de vous attaquer à la crise du logement en réquisitionnant des logements ou en investissant dans les logements sociaux.

    M. le président

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    Merci de conclure !

    Mme Martine Etienne

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    Retirez cet article, d’autant que nous sommes à la fin de la trêve hivernale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Taché, pour soutenir l’amendement no 67.

    M. Aurélien Taché

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    Tout à l’heure, le garde des sceaux nous a dit que le juge pouvait déjà reconnaître l’état de nécessité. Or il ne l’a jamais fait pour des situations de mal-logement. La proposition de loi est si terrible que la jurisprudence évoluera forcément. J’ai confiance en la justice de mon pays : au-delà des vols de nourriture, les juges finiront peut-être par reconnaître l’état de nécessité pour les mal-logés. Pourquoi ne pas continuer à leur faire confiance ?
    On vient de vous le dire : la loi qui prévoit la conditionnalité de l’hébergement d’urgence ne peut pas être respectée. Le code de l’action sociale et des familles énonce que toute personne en détresse doit être hébergée. Or nous ne pouvons que déplorer le manque de places d’hébergement aujourd’hui : vous avez beau appeler le 115 dès six heures du matin, on vous répond qu’il n’y a déjà plus de places, même si vous êtes une femme avec des enfants !
    Mme Yadan nous a expliqué que de plus en plus de gens étaient reconnus éligibles au droit au logement opposable. C’est vrai, sauf que la loi Dalo n’est pas appliquée ! Savez-vous ce qui se passe lorsque le droit au logement opposable n’est pas respecté ? L’État se condamne lui-même à payer des amendes, qui abondent le Fonds national d’accompagnement vers et dans le logement (FNAVDL), destiné à accompagner socialement les ménages en difficulté. Lorsque le juge accorde un délai, ce fonds permet justement l’intervention de travailleurs sociaux et la mise en place d’un accompagnement pour apurer les dettes, réinsérer les gens et leur épargner une situation de mal-logement.
    Contrairement à ce que nous entendons depuis tout à l’heure sur les bancs de cette assemblée – et à ce que vient encore de dire M. Midy –, ce que nous défendons est totalement en lien avec cette proposition de loi. Plus vous aggravez le nombre de personnes expulsées, plus vous augmentez le nombre de sans-abri, si bien qu’il sera encore plus difficile d’appliquer ces belles lois qui ont permis, pendant trente ans, d’avoir un consensus sur la politique sociale du logement en France et d’endiguer l’augmentation du nombre de familles avec enfants à la rue. Vous remettez en cause ces principes fondamentaux. De tous les droits de l’homme proclamés par la Déclaration de 1789, vous n’en connaissez qu’un : le droit de propriété. Mais je vous rappelle le droit à vivre dignement, le droit au logement et le droit à être respecté même si l’on souffre de difficultés financières ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)

    M. le président

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    Sur l’article 1er B, je suis saisi par le groupe Renaissance d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Jean-Claude Raux, pour soutenir l’amendement no 111.

    M. Jean-Claude Raux

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    Avec l’article 1er B, vous nous proposez d’accélérer les expulsions en supprimant la possibilité laissée au juge d’accorder des délais aux occupants du lieu d’habitation concernés. Or une telle accélération conduira à priver encore un peu plus les locataires de leur chance de payer les loyers qu’ils ont du mal à régler, notamment en cette période où les coûts de l’énergie et de l’alimentation explosent, ou de bénéficier d’un accompagnement social adapté à leurs difficultés. Ce devrait pourtant être une priorité ! L’article aura donc pour conséquence de mettre ces personnes précaires à la rue encore plus rapidement. Peut-être s’agit-il de la volonté de la coalition présidentielle, qui se satisfait de cette solution antisociale. En tout cas, ce n’est pas celle du groupe Écologiste : voilà pourquoi nous demandons la suppression de l’article.

    M. le président

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    La parole est à Mme Cyrielle Chatelain, pour soutenir l’amendement no 134.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    J’espère encore pouvoir vous en convaincre : nous devons tous faire confiance au droit, ainsi qu’aux juges qui l’appliquent. Vous nous demandez de supprimer la possibilité pour le juge de décider, compte tenu des éléments en sa possession, d’accorder à des personnes un délai supplémentaire avant d’être expulsées. Vous allez me dire que seules les squatteurs sont visés, c’est-à-dire à des personnes qui seraient entrées dans un lieu qui ne leur appartient pas. Or, je vous le dis, personne ne fait le choix de vivre dans un squat…

    M. Emeric Salmon

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    Mais si !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    …ou dans un bidonville ; personne ne fait le choix de vivre dans des squats trop exigus, qui ne sont pas aux normes et sont potentiellement insalubres ; personne ne fait le choix de laisser vivre ses enfants dans ce type de logements. Aujourd’hui, la seule chose que vous faites, c’est de criminaliser ces individus, en plus de vouloir les faire disparaître. J’ai parlé avec des assistantes sociales œuvrant auprès de personnes en situation administrative complexe – sans papiers ni revenus, elles vivent sur notre territoire et se trouvent contraintes de loger dans des squats ou des bidonvilles –, qui m’ont dit : « Nous nous occupons de ceux que personne ne veut voir ; nous sommes nous-mêmes invisibles. » Avec ce texte, c’est toute une profession que vous mettez en souffrance, en plus de ceux qui sont obligés de vivre dans des lieux pareils !
    Vous ne voulez pas voir la pauvreté que vous créez. Voilà dix ans que des familles en situation administrative complexe vivent dans ma circonscription, en Isère, et y créent des liens. Or on refuse toujours de leur reconnaître le droit au logement.
    Aujourd’hui, nous souhaitons faire confiance à la justice. Ne supprimons pas la possibilité laissée au juge de décider, en son âme et conscience, au vu des éléments dont il dispose, d’accorder du temps aux milliers de personnes qui ont été expulsées l’année dernière et qui vivaient dans des squats. Vraiment, je ne vois pas l’intérêt de légiférer dans le but d’ôter du pouvoir aux juges.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Même position.

    M. Éric Coquerel

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    Voilà…

    M. le président

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Monsieur le rapporteur, peut-être-connaissez vous la série Game of Thrones ? L’un des personnages, Ned Stark, y affirme, donnant une leçon à son fils : « Celui qui prononce la sentence doit tenir l’épée. »

    Mme Véronique Riotton

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    C’est le degré zéro de l’argumentation !

    M. François Piquemal

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    Avez-vous auditionné des agents de police chargés des expulsions ? Peut-être me répondrez-vous.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Non.

    M. François Piquemal

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    Le chercheur Camille François, pour sa part, a interrogé ces agents, qui relèvent soit d’une unité de police administrative (UPA), soit d’une brigade d’information de voie publique (BIVP). Il leur a demandé quelle vision ils avaient de la tâche qui leur est confiée. Voici ce qu’a répondu une brigadière cheffe : « C’est une mission que si on nous la retirait, on serait content. Parce que virer les gens, […] c’est pas notre tasse de thé ! Ce n’est pas une mission agréable. » Un autre policier a déclaré : « Les expulsions, pour moi, c’est la partie la plus pénible du boulot. C’est pour ça que je me le garde pour moi, et que je laisse ma collègue tranquille avec ça – pour pas qu’elle se barre ! »
    En augmentant le nombre d’expulsions, vous imposerez à davantage d’agents de mettre des gens dehors, avec tout ce que cela signifie en matière de violence. Oui, votre proposition de loi est violente. Oui, être jeté hors de son domicile lorsque l’on est un locataire qui n’arrive plus à payer son loyer, c’est subir une violence, à la fois physique et symbolique.
    Avez-vous pris la peine, monsieur le rapporteur, d’interroger les agents que vous allez envoyer à votre place, sur le terrain, exécuter la basse besogne que vous êtes en train de préparer ? (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    M. le président

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 2, 24, 38, 67, 111 et 134.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        98
            Nombre de suffrages exprimés                98
            Majorité absolue                        50
                    Pour l’adoption                16
                    Contre                82

    (Les amendements identiques nos 2, 24, 38, 67, 111 et 134 ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’article 1er B.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        100
            Nombre de suffrages exprimés                100
            Majorité absolue                        51
                    Pour l’adoption                83
                    Contre                17

    (L’article 1er B est adopté.)

    Article 1er bis A

    M. le président

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    Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 68, 112 et 135, tendant à supprimer l’article 1er bis A.
    La parole est à M. Aurélien Taché, pour soutenir l’amendement no 68.

    M. Aurélien Taché

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    L’article 1er bis A vise à créer un nouveau délit – encore un ! –, celui d’incitation à occuper un logement de manière illicite.
    Que font aujourd’hui les services de l’État ? Rien, sinon que disperser les mal-logés et les repousser toujours un peu plus loin, du nord de Paris jusqu’en Seine-Saint-Denis. Peut-être les repousseront-ils demain jusque dans ma circonscription du Val-d’Oise.
    Dès lors, il arrive que des associations qui viennent en aide aux mal-logés essaient de sensibiliser la population et les pouvoirs publics en installant ces personnes dans des lieux où elles sont plus visibles.
    L’association qui s’inquiète le plus de l’adoption de cet article, c’est le Secours catholique. On ne peut pas dire qu’elle réunisse de dangereux gauchistes ou la méchante racaille écologiste d’extrême gauche ! Nous pouvons faire confiance au Secours catholique pour accompagner dignement ceux qui en ont le plus besoin.
    On ne cesse de criminaliser les associations. La loi « séparatisme » a déjà permis de réprimer certaines d’entre elles, limitant ainsi la liberté associative. On ira désormais plus loin encore, en réprimant celles qui viennent en aide aux plus démunis dans notre pays. Voilà une illustration supplémentaire du caractère infâme de la proposition de loi de M. Kasbarian.

    M. le président

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    L’amendement no 112 de Mme Sandra Regol est défendu.
    La parole est à Mme Cyrielle Chatelain, pour soutenir l’amendement no 135.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Je dois reconnaître qu’il y a une vraie cohérence dans la politique du Gouvernement. Quand le Parlement s’exprime, vous n’aimez pas cela et vous l’empêchez de voter. (« Et l’obstruction ? » sur les bancs du groupe RE.) Le dialogue social et les syndicats, vous n’aimez pas cela non plus ; vous ne les écoutez pas. Il est donc cohérent que vous souhaitiez bâillonner les associations.
    Le début de l’alinéa 3 de l’article 1er bis A est ainsi rédigé : « Lorsque le délit est commis par la voie de la presse écrite ou audiovisuelle ». Autrement dit, une association qui donnerait son avis sur la question du mal-logement en affirmant que des personnes sont contraintes de squatter ou que le droit au logement est supérieur au droit de propriété serait concernée par ce délit. Du point de vue de la liberté d’expression, c’est honteux.

    M. Paul Midy

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    Ce n’est pas le sujet !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Vous êtes cohérents : vous n’aimez pas les contre-pouvoirs ; vous n’aimez pas que l’on puisse contester vos décisions, qui sont complètement idéologiques. Et je comprends pourquoi : cela vous met face à vos responsabilités.
    Les associations ne sont pas seules à contester votre proposition de loi répressive. La CNCDH relève qu’elle « aura […] pour conséquence immédiate et injuste de stigmatiser et fragiliser encore plus les personnes vulnérables » et « [exposera] la France à une condamnation par la Cour européenne des droits de l’homme ». Voilà ce que vous êtes en train de faire, et vous voudriez en sus faire taire les associations qui se démerdent avec les gens que vous avez plongés dans la pauvreté ?

    Mme Prisca Thevenot

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    N’importe quoi !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    C’est inadmissible ! Nous nous battons pour la liberté de la presse, pour les associations et contre vos lois répressives ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES. – Exclamations sur les bancs du groupe RE.)

    Un député du groupe RN

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    Arrêtez de crier !

    M. Paul Midy

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    Respectez les institutions ! On en reparlera après !

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements de suppression ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Il est tout de même extraordinaire que l’excitation soit telle, alors que l’article 1er bis A vise à sanctionner la propagande en faveur du squat et la promotion de celui-ci.

    M. Jean-François Coulomme

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    Il s’agit de modes d’emploi.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Vos propos sont totalement excessifs. Vous montez un sujet en épingle, alors que nous disons simplement qu’il n’est pas normal que circulent des guides expliquant comment gruger, comment occuper des lieux, comment contourner les règles, etc.

    M. Jean-François Coulomme

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    Valeurs actuelles indique bien comment faire de l’évasion fiscale !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Nous avons découvert tout à l’heure que vous refusiez de condamner le délit de squat et qu’en réalité, vous souteniez les squatteurs. Nous découvrons à présent que vous ne condamnez pas non plus ceux qui encouragent à commettre ce délit. Vous avancez masqués, derrière des arguments fallacieux.
    Nous aurions pu éventuellement comprendre votre combat en faveur des locataires qui ne parviennent plus à payer leur loyer. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) En l’occurrence, vous venez de dévoiler votre jeu : vous êtes des promoteurs du squat.

    M. Éric Coquerel

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    On parle de SDF et de gens qui n’ont pas de logement !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Vous êtes précisément en train d’essayer de promouvoir le squat. Avis défavorable. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Monsieur Taché, qui avez tout de même été élu sous la bannière LREM,…

    M. Aurélien Taché

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    Ça fait longtemps que j’en suis parti !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …vous avez la foi des nouveaux convertis ! À vous entendre, j’ai parfois l’impression que nous ne vivons pas en France. Interrogez ceux qui vivent dans un pays du tiers-monde.

    M. Paul Midy

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    Exactement !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    J’ai un peu voyagé dans ma vie (« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES) et beaucoup de gens dans le monde nous envient la gratuité des soins et de la justice, l’école, les services sociaux.

    M. William Martinet

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    La retraite à 60 ans ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Vous foulez absolument tout aux pieds. Tout ce que vous touchez, vous le salissez ! (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) À vous entendre, nous avons basculé dans un état totalitaire et la police tue. Quant à vos promenades bucoliques dans les champs, vous les faites avec des jerrycans remplis d’essence. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme Danielle Simonnet

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    Ça suffit !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Au bout d’un moment, il y en a ras le bol !

    Mme Danielle Simonnet

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    Vous êtes en train de craquer complètement !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Nous sommes en train de nous battre contre des gens qui incitent à squatter, autrement dit à occuper des propriétés en toute illégalité. Voilà ce dont il est question. Mme Genevard en a parlé tout à l’heure, très légitimement, car cela existe ; nous avons vu ces documents. Et vous, naturellement, vous pensez que nous voulons nous en prendre à la presse de notre pays.

    M. Aurélien Taché

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    Non, au Secours catholique !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Un peu de calme, un peu d’apaisement ! Rassurez-vous ! (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. François Piquemal

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    C’est le bras d’honneur qui dit ça ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Bien sûr, certaines choses méritent d’être mieux faites. C’est la raison pour laquelle vous êtes là et pour laquelle, peut-être, je suis là moi aussi. En tout cas, je vous le dis franchement, je n’ai pas du tout, mais alors pas du tout, envie de vivre dans la société que vous nous proposez. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Éric Coquerel

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    Il y a de moins en moins de gens qui ont envie de vivre dans la vôtre !

    Rappel au règlement

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandra Regol, pour un rappel au règlement.
    Sur quel fondement le formulez-vous, madame Regol ?

    Mme Sandra Regol

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    Sur celui de l’article 70, alinéa 2.
    Nous sommes dans un parlement, à l’Assemblée nationale. Il n’est pas acceptable que le ministre de la justice dise qu’il en a ras le bol de l’opposition.

    M. Éric Coquerel

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    C’est incroyable !

    Mme Sandra Regol

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    Cela ne relève ni d’un débat démocratique ni d’un cadre parlementaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES. – Exclamations sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. le président

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    On s’éloigne. L’alinéa 2 concerne une éventuelle « scène tumultueuse », madame Regol, il ne faut pas exagérer.

    Mme Sandra Regol

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    Non, l’alinéa 2 porte sur la « mise en cause » d’un député ou d’un groupe de députés.

    M. le président

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    Veuillez achever votre propos et nous verrons bien.

    Mme Sandra Regol

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    Je souscris à l’appel au calme, mais je demande que soient créées les conditions d’un appel au calme.

    M. le président

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    Vous venez de dire n’importe quoi et de me contredire. L’article 70, alinéa 2, concerne tout membre de l’Assemblée « qui se livre à des manifestations troublant l’ordre ou qui provoque une scène tumultueuse ». Apprenez à lire le règlement, madame Regol. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN et sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme Sandra Regol

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    Apprenez à faire la différence entre l’alinéa 2 et le 2o !

    M. le président

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    Vous mettez en cause la présidence, monsieur Coulomme ?

    M. Jean-François Coulomme

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    Non, j’évoquais la collusion entre la droite extrême et l’extrême droite.

    Article 1er bis A (suite)

    M. le président

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    La parole est à Mme Cyrielle Chatelain.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Il n’est pas étonnant qu’un ministre qui fait des bras d’honneur à ses alliés insulte aussi ses opposants. On ne pouvait guère s’attendre à autre chose. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)
    Je regrette profondément, monsieur le ministre, que vous n’ayez pas exercé la même verve pour défendre les juges lorsque nous avons examiné l’article 1er B de ce texte, qui restreindra leur pouvoir de décision ; nous ne vous avons pas entendu à ce moment-là. En réalité, vous recourez à des artifices politiques ; vous parlez de choses qui n’ont absolument rien à voir avec cette proposition de loi.
    Monsieur le rapporteur, ceux qui montent un sujet en épingle et dévoilent leur jeu, c’est vous ! Le squat de domicile touche 170 propriétaires par an.

    M. Jean-François Coulomme

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    Exactement !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Vous vous servez de ces 170 cas annuels pour élaborer une loi extrêmement régressive. Je le répète, ceux qui la condamnent, ce ne sont pas tant vos opposants que la CNCDH. Vous pouvez faire comme si nous versions dans l’affabulation politique. Ceux qui refusent de regarder la réalité et préfèrent criminaliser la pauvreté plutôt que de donner aux personnes concernées les moyens de vivre dignement, c’est vous ! Vous pouvez condamner et gesticuler autant que vous voulez, mais il est normal qu’une personne qui vit dehors avec ses enfants et souffre du froid cherche à se protéger.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Vous n’avez pas le monopole du cœur.

    M. Paul Midy

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    C’est ça, votre projet de société ?

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Oui, j’assume de le dire, lorsqu’un logement à vocation d’habitation est vide depuis des années, voire des dizaines d’années, son propriétaire a le devoir de faire en sorte qu’il puisse être habité. Ce n’est pas moi qui le dis ; c’est la loi. C’est un devoir de solidarité avec l’ensemble de la nation.
    J’aurais aimé qu’ensemble, dans cette assemblée, nous fassions respecter ce devoir de solidarité nationale, plutôt que de monter en épingle quelques cas individuels. D’ailleurs, la loi protège déjà ces propriétaires : une personne qui squatte un domicile est susceptible d’être expulsée en trois jours. Vous vous servez de ces cas, j’ose le dire, de manière dégueulasse, pour faire voter une loi des plus régressives. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)
    En matière d’élégance, monsieur le ministre, vous n’avez aucune consigne à nous donner. (Mêmes mouvements.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Caroline Yadan.

    Mme Caroline Yadan

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    La Bible du squat, Guide du squatteur mondain, Le Squat résiste, Le Squat de A à Z, Comment ouvrir un squat en cinq étapes… J’en aurais pour des heures à énumérer les ouvrages qui distillent les meilleurs conseils, pratiques et juridiques, pour ouvrir un squat sans en être expulsé. Il me paraît néanmoins intéressant de vous lire quelques lignes que l’on trouve dans l’un de ces fameux guides : « Squatter, c’est prendre une part de l’interdit, briser la soumission à la légalité. C’est une recherche d’autonomie. C’est aussi un moyen de ne pas payer le loyer. Chaque squat est différent dans la mesure où il bouleverse parfois, même involontairement, l’ordre social et la propriété privée. »
    En encourageant la propagande de ces ouvrages qui appellent à commettre un délit, le délit de squat, et donc à passer outre notre État de droit, vous êtes, mes chers collègues, dans votre ligne habituelle, c’est-à-dire dans la volonté de changer les règles de notre droit, de ne jamais vous soumettre à l’autorité, de porter atteinte aux forces de l’ordre, à nos institutions, à nos règles, et même au règlement de l’Assemblée nationale.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    C’est vous qui voulez changer le droit avec ce texte.

    Mme Caroline Yadan

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    …de ne jamais vous soumettre à l’autorité, de porter atteinte aux forces de l’ordre, à nos institutions, et même au règlement de l’Assemblée nationale.
    C’est votre logique, une logique révolutionnaire ; ce n’est pas la nôtre. La nôtre, c’est de respecter l’État de droit. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Mme Claire Guichard

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    Bravo !

    (Les amendements identiques nos 68, 112 et 135 ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    Sur l’article 1er bis A, je suis saisi par le groupe Renaissance d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    L’amendement no 98 de M. Yoann Gillet est défendu.

    (L’amendement no 98, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michaël Taverne, pour soutenir l’amendement no 18.

    M. Michaël Taverne

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    Il vise à faire passer de 3 750 à 7 500 euros la peine d’amende punissant l’incitation à la commission du délit d’introduction, comme à l’article 1er A.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Pour revenir sur cette histoire de propagande, Mme Yadan est visiblement bien renseignée… (Exclamations sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. le président

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    Monsieur Piquemal, voulez-vous en rester à l’amendement ?

    M. François Piquemal

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    Je pensais qu’il y avait une conversation intéressante à avoir… (Exclamations sur les bancs des groupes RE et RN.)

    M. le président

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    Non, il n’y a pas de conversation : nous ne sommes pas dans un salon, mais à l’Assemblée nationale. Je vous laisserai poursuivre si c’est en rapport avec l’amendement.

    M. François Piquemal

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    Dans ce cas, je laisse se dérouler le salon des multipropriétaires et j’interviendrai à un moment plus opportun. (Exclamations sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Le groupe LR est favorable à la création de cette sanction afin de combattre le foisonnement des guides et modes d’emploi en tout genre. Moi aussi, je me suis livrée à la lecture de l’un d’entre eux, et j’ai constaté que cette opération ne correspond en rien aux situations humaines que vous avez décrites. C’est presque une action de principe contre le fait d’acquitter un loyer.
    Il y a, par exemple, le témoignage d’un squatteur professionnel : « On a quadrillé tout Paris pour faire des repérages. » Il s’improvise enquêteur : « Une fois qu’un bâtiment est en ligne de mire, on s’intéresse aux propriétaires, à l’historique des lieux, au cadastre, aux appels d’offres, aux articles, aux voisins, aux comptes rendus des conseils d’arrondissement. »
    Parmi les cibles, il y en a une que j’ai trouvée particulièrement cynique quand les squatteurs s’intéressent aux instances d’héritage. Il y a là quelque chose d’un cynisme absolu.

    M. le président

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    Puisque M. Piquemal a renoncé à s’exprimer, la parole est à M. Jean-François Coulomme.

    M. Jean-François Coulomme

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    Tout sous-groupe humain trouve des moyens de s’organiser, et j’aurais aimé voir chez vous la même indignation à l’égard de ceux qui pratiquent le détournement fiscal, au bénéfice desquels une large part de la presse française consacre ses colonnes à expliquer par le détail comment soustraire l’impôt à l’intérêt général. (Exclamations sur les bancs des groupes RE et RN.) Car, finalement, la défiscalisation correspond à la même volonté d’optimiser un comportement. Vous voulez condamner l’un ; pour l’autre, vous n’avez à aucun instant envisagé la moindre pénalisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Frédéric Boccaletti

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    Sur des morts ! C’est honteux !

    M. le président

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    La parole est à M. le garde des sceaux.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Avec la désobéissance civile, c’est-à-dire, en clair, la désobéissance à la loi, qui est votre mantra un peu partout…

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Eh oui !

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    …vous restez dans votre droite ligne, si j’ose dire. On a le droit, maintenant, de squatter, de créer ces organisations, d’aller guigner des héritages. Tout cela, ça vous va très bien !

    M. Jean-François Coulomme

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    C’est notre côté gestionnaire de fortune !

    Rappel au règlement

    M. le président

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    La parole est à M. William Martinet, pour un rappel au règlement.

    M. William Martinet

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    Il se fonde sur l’article 54.
    Monsieur le président, tout à l’heure, vous avez coupé la parole à mon collègue François Piquemal. Je rappelle que l’article 54 du règlement de l’Assemblée nationale indique que « l’orateur ne doit pas s’écarter de la question ». La question, c’est bien évidemment celle des expulsions, du logement, etc. M. Piquemal traitait donc absolument de la question. (Exclamations sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. le président

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    Monsieur le député, vous faites fausse route.

    M. William Martinet

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    L’article 54 ne dit pas que l’orateur ne doit pas s’écarter de l’amendement, mais qu’il ne doit pas s’écarter de la question. Il y a une différence entre les deux. Si vous voulez modifier le règlement de l’Assemblée nationale, vous pouvez le faire.

    M. le président

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    J’ai rappelé à M. Piquemal qu’il ne devait pas s’écarter de l’amendement et je lui ai proposé de poursuivre son intervention s’il ne s’écartait pas de l’amendement ; il y a renoncé. C’est pour cela que M. Coulomme a eu la parole ensuite.

    Mme Danielle Simonnet

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    Dans le règlement, c’est « la question » !

    Article 1er bis A (suite)

    M. le président

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    Nous revenons à l’amendement no 18.

    (L’amendement no 18 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    L’amendement no 25 de M. Stéphane Peu est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Défavorable.

    M. le président

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    La parole est à Mme Cyrielle Chatelain.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    L’amendement vise à exclure les associations ou les syndicats du champ des sanctions prévues à l’article. En donnant un avis défavorable, vous confirmez que vous ne souhaitez pas qu’ils puissent s’exprimer librement sur la question qui nous occupe puisqu’ils seront soumis à la règle générale.
    Par ailleurs, oui, nous avons une tradition de désobéissance civile.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Au moins, c’est clair.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Je comprends que vous ne la compreniez pas, puisque vous confondez légalité et légitimité. Le 49.3 pour imposer les retraites contre le vote de cette assemblée, c’est légal, mais c’est complètement illégitime. La légitimité, vous la tenez du peuple et de l’adhésion populaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Paul Midy

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    En démocratie, c’est honteux ! Nous ne sommes pas en tyrannie.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Une démocratie repose sur deux choses, le droit et l’adhésion populaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) Vous avez perdu l’adhésion populaire et vous voulez tordre le droit, contre les valeurs de l’Europe et de la France. (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe RE.) C’est ce que vous dit la CNCDH.
    Je le répète : oui, l’article vise les associations et les syndicats.

    M. Damien Adam

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    Vous n’avez jamais vu de désobéissance civile, vous ne savez pas ce que c’est !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Plus que vous…

    M. Damien Adam

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    Vous êtes en minorité, nous sommes la majorité : acceptez-le.

    (L’amendement no 25 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Andy Kerbrat, pour soutenir l’amendement no 39. (Brouhaha continu sur les bancs des groupes RE et Dem.)

    M. Andy Kerbrat

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    Par cet amendement, nous proposons que les cas de réquisition citoyenne ou d’aide humanitaire soient exclus du champ répressif de l’article. La réquisition citoyenne – je pense que vous ne savez pas ce que c’est – consiste à occuper un bâtiment jusque-là inoccupé à des fins militantes.

    M. Bruno Millienne

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    On sait…

    M. le président

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    S’il vous plaît, écoutez M. Kerbrat.

    M. Andy Kerbrat

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    La réquisition citoyenne diffère du squat dans la mesure où elle ne sert pas de logement stable ou durable à ses occupants.
    Si l’objectif du texte est de réprimer les squats, les réquisitions citoyennes et l’action humanitaire ne devraient pas être incluses dans le champ de cet article.
    Les articles L. 641-1 et suivants du code de la construction et de l’habitation donnent au préfet, après consultation du maire, le pouvoir de réquisitionner les logements vides pour protéger les sans-abri. La défaillance des préfets dans l’identification et la publication des listes et des logements vacants est totale. En conséquence, les réquisitions citoyennes viennent combler la carence de l’État et des collectivités pour protéger les sans-abri.
    Avec cet article, la publicité que peuvent faire les associations pourrait devenir criminelle. Jamais notre République n’a connu autant de familles et d’enfants à la rue. Si vous condamnez toutes les réquisitions et la possibilité même d’indiquer où se trouvent des refuges, même éphémères, vous condamnez les gens à mourir, là où ils souffrent sous nos yeux. (« Oh ! » sur quelques bancs du groupe RE.) Eh oui, c’est la réalité, mes pauvres amis.
    Souvenez-vous de l’hiver 1954 : il y a eu de très nombreuses réquisitions citoyennes pour répondre à l’appel de l’abbé Pierre. Aujourd’hui, l’association Droit au logement nomme ses réquisitions en référence à cet épisode. Et vous voulez punir ces actions d’une amende de 3 700 euros ! Avec votre logique, si demain l’abbé Pierre lançait un nouvel appel, plutôt que de l’aide, vous lui enverriez une prune. Vous êtes vraiment très pitoyables. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Défavorable.

    M. Andy Kerbrat

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    Vous pourriez répondre, quand même !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    C’est tellement pitoyable…

    Mme Michèle Peyron

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    Quel manque de décence !

    M. le président

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    C’est M. Martinet qui s’exprimera sur cet amendement !

    M. le président

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    Monsieur Piquemal, à chaque fois que je vous donne la parole, vous n’en voulez pas ! (Sourires.)
    La parole est à M. William Martinet.

    M. William Martinet

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    Je remarque que, quand mon collègue a évoqué la question des morts de la rue, il y a eu un brouhaha dans l’hémicycle. Peut-être faut-il rappeler clairement que, chaque année, dans notre pays, plus de 2 000 personnes meurent de la rue. En France, au XXIe siècle, dans la sixième puissance économique mondiale, il y a plus de 2 000 personnes qui, parce qu’elles sont sans abri, parce qu’elles dorment sur les trottoirs de nos villes, finissent par mourir. Chaque fois que nous votons une loi qui, comme celle-ci, facilite les expulsions, cela fait davantage de personnes à la rue. Je suis désolé si cela vous dérange, mais la conséquence de cette proposition de loi, c’est qu’il y aura très certainement plus de personnes qui mourront de la rue. C’est peut-être désagréable à entendre, mais c’est la réalité. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
    J’ai entendu nos collègues macronistes parler de la nécessité de respecter l’État de droit. Très bien, mais alors, parlons des articles L. 441 et suivants du code de la construction et de l’habitat, c’est-à-dire des dispositions qui correspondent à la loi Dalo. Dans ce pays, normalement, c’est la responsabilité de l’État, donc du préfet, de proposer un logement à toute personne qui n’a pas la capacité de se loger par ses propres moyens. Chers collègues, est-ce que vous êtes au courant que cette loi ne fonctionne pas ?

    Mme Danielle Simonnet

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    Exactement !

    M. William Martinet

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    La loi Dalo n’est pas respectée ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)
    Chaque jour, il y a des dizaines de condamnations de l’État devant le tribunal administratif parce que les préfets ne relogent pas ; pire, parfois, au lieu de reloger des personnes en situation d’expulsion dont on a reconnu qu’elles relevaient du dispositif Dalo, le préfet envoie la police pour faire appliquer la procédure d’expulsion. Alors, s’il vous plaît, ne nous donnez pas de leçon en matière d’État de droit.

    Mme Caroline Yadan

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    Mais 60 % des ménages sont relogés !

    M. William Martinet

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    J’ajoute qu’en vertu des articles L. 345-2 et suivants du code de l’action sociale et des familles sur l’hébergement inconditionnel, toute personne en situation de détresse, quelle que soit sa situation, notamment administrative, doit avoir le droit à l’hébergement.

    M. le président

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    Monsieur le député, il faut conclure : votre temps de parole est écoulé.

    M. William Martinet

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    Est-ce que ce droit est respecté ? Non, notamment à cause de vous. (M. le président coupe le micro de l’orateur.) (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    (L’amendement no 39 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’article 1er bis A.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        89
            Nombre de suffrages exprimés                89
            Majorité absolue                        45
                    Pour l’adoption                73
                    Contre                16

    (L’article 1er bis A est adopté.)

    Article 1er bis

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 26 visant à supprimer l’article 1er bis.

    M. Stéphane Peu

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    Faisant face à une loi très idéologique défendue par la majorité, nous tâchons de l’examiner et de l’amender avec notre pragmatisme d’élus de terrain. Je vais vous donner un gage de bonne foi en retirant cet amendement de suppression ; laissez-moi vous expliquer pourquoi.
    Dans ma vie d’élu, j’ai constaté que certaines personnes se livrent à un trafic de logements, en louant des logements qui appartiennent à des bailleurs sociaux. L’article vise à condamner de tels actes, ce qui est une bonne chose. À ce titre, nous l’approuvons.
    En revanche, comme souvent dans ce texte, vous étendez le champ de la mesure jusqu’à créer des amalgames. En l’occurrence, un locataire sous-louant temporairement son appartement risque les mêmes sanctions qu’une personne usurpant le titre de propriétaire. Cela n’est pas acceptable. Je ne dis pas qu’il est vertueux de sous-louer son appartement sans l’accord du propriétaire, mais cela peut arriver.
    Je retire l’amendement de suppression car l’article répond à la nécessité de condamner certains actes, mais attention à ne pas faire d’amalgame entre la location frauduleuse d’un bien par une personne ayant usurpé le titre de propriétaire et la sous-location d’un bien par son locataire. (M. Frédéric Boccaletti s’exclame.)

    (L’amendement no 26 est retiré.)

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Monsieur Peu, je salue vos propos et je me réjouis que vous reconnaissiez la nécessité de cet article. Je tiens à répondre à votre inquiétude. En effet, votre amendement de suppression nous a menés à consulter nos services pour examiner cette question. Nous en avons conclu que nous ne partageons pas votre interprétation de l’article 313-6-1 du code pénal, qui dispose : « Le fait de mettre à disposition d’un tiers, en vue qu’il y établisse son habitation moyennant le versement d’une contribution ou la fourniture de tout avantage en nature, un bien immobilier appartenant à autrui, sans être en mesure de justifier de l’autorisation du propriétaire ou de celle du titulaire du droit d’usage de ce bien, est puni d’un an d’emprisonnement et de 15 000 euros d’amende. »
    La précision relative à l’autorisation « du titulaire du droit d’usage de ce bien » signifie que le titulaire d’un bail n’est pas visé par cette disposition pénale, quand bien même il sous-louerait son bien sans l’accord du propriétaire.

    M. Frédéric Boccaletti

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    Bien sûr !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Selon notre analyse juridique, votre crainte n’est pas fondée.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Exactement : le titulaire du droit d’usage, c’est le locataire qui sous-loue !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Je tenais à vous répondre pour rassurer ceux qui nous écoutent et pour que cette précision soit inscrite au compte rendu. Nous convenons, comme vous, de la nécessité de sanctionner par cet article les marchands de sommeil, mais nous ne partageons pas votre crainte, car l’amalgame nous semble impossible du fait de la rédaction de l’article 313-6-1 du code pénal.

    (L’article 1er bis est adopté.)

    Article 2

    M. le président

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    Plusieurs orateurs sont inscrits sur l’article 2.
    La parole est à M. Emmanuel Taché de la Pagerie.

    M. Emmanuel Taché de la Pagerie

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    J’ai été interpellé par deux retraités habitant la ville d’Arles, dans ma circonscription, dont le logement est squatté depuis 2021. En avril 2022, le juge a demandé par référé au préfet de procéder à l’expulsion des occupants. Pourtant, les propriétaires ne sont toujours pas maîtres de ce bien familial qui représente les économies de toute une vie et qui devrait héberger leur petit-fils venant juste de trouver son premier emploi. J’ai moi-même rappelé cette semaine au préfet, par voie épistolaire, qu’il doit faire procéder à l’expulsion du tiers à l’issue de la trêve hivernale, soit dans quarante-huit heures.
    Cette situation insoutenable affecte trop de Français. L’article 2 va dans le bon sens : il améliore les procédures d’expulsion des squatteurs en agissant tant sur la définition de l’infraction de violation de domicile prévue par le code pénal que sur la procédure administrative prévue pour évacuer les spoliateurs.
    Nous saluons la possibilité pour le propriétaire ou le locataire dont le logement est illégalement occupé de saisir le préfet sans recourir à un juge ; à lui d’exiger que l’occupant frauduleux quitte les lieux dans un délai défini. Nous nous félicitons aussi que l’article permette au maire et au commissaire de police de constater l’occupation illicite. Le Rassemblement national a rédigé un amendement visant à étendre ce rôle aux adjoints du maire, puisque ces derniers agissent également en qualité d’officiers de police judiciaire (OPJ). L’extension de la définition du domicile est également la bienvenue, même si nous souhaitons la renforcer par un amendement tendant à étendre le dispositif aux locaux d’habitation qui ne sont pas habités.
    Nous voterons donc de manière constructive pour l’article 2, en espérant que nos amendements seront adoptés, pour protéger concrètement les propriétaires contre la spoliation manifeste que constitue le squat.

    M. le président

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    La parole est à M. Éric Coquerel.

    M. Éric Coquerel

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    Je commence par rappeler que l’article 2 prévoit d’étendre la procédure d’expulsion dérogatoire sans jugement prévue à l’article 38 de la loi Dalo pour la rendre applicable dans des lieux qui ne sont pas des résidences principales ou secondaires : de grâce, ne relançons donc pas la polémique en imaginant une personne qui verrait un squatteur s’installer dans sa résidence principale. La situation dont il s’agit est tout autre.
    Vos arguments m’inspirent également quelques autres rappels. Premièrement, le droit au logement fait partie des droits-créances reconnus par la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, qui est inscrite dans le préambule de notre Constitution, ce qui a fait dire au Conseil constitutionnel dans sa décision du 19 janvier 1995 que le droit au logement « est un objectif à valeur constitutionnelle ». Voilà ce qui devrait motiver notre action.
    Deuxièmement, la loi Dalo, que nous citons depuis tout à l’heure sans en développer le sigle, signifie « droit au logement opposable » et instaure d’ailleurs un dispositif visant à garantir le droit à l’hébergement opposable, dit Daho. M. le garde des sceaux nous accuse d’appeler à désobéir aux lois, mais l’État lui-même désobéit constamment à cette loi, votée par les parlementaires, qui dispose que personne, en France, ne devrait être à la rue (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe Écolo-NUPES) et qu’il revient à la puissance publique de proposer un hébergement à chacun. Or vous savez tous que tel n’est pas le cas.
    La loi du 31 mai 1990 visant à la mise en œuvre du droit au logement, dite loi Besson, dispose que « garantir le droit au logement constitue un devoir de solidarité pour l’ensemble de la nation ». Alors que l’État n’est pas capable de garantir cette solidarité de la nation, vous criminalisez les associations qui, s’acquittant à sa place de cette mission, permettent aux personnes à la rue d’occuper un local commercial inoccupé de longue date et parfaitement inutile. Pour ma part, j’estime qu’elles pallient ainsi les insuffisances de l’État : voilà en quoi nos logiques diffèrent. (Mêmes mouvements.)
    Je considère que c’est cette question qu’il nous faut traiter, plutôt que de se concentrer sur les termes polémiques et de crier à l’extrémisme. Comment agissez-vous concrètement ?
    Ma circonscription abrite le plus grand squat de migrants du pays.

    M. le président

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    Merci de conclure, monsieur le président.

    M. Éric Coquerel

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    Je termine, monsieur le président. Je travaille avec le préfet et le sous-préfet pour faire en sorte que l’évacuation puisse se dérouler dans les meilleures conditions. Heureusement que cet article 2 n’est pas promulgué, car il fera obstacle à de telles initiatives, et produira des évacuations si expéditives qu’elles rendront la vie impossible à tout le monde, y compris aux représentants de l’État ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Le groupe Les Républicains est favorable aux modifications apportées à la procédure d’évacuation forcée prévue à l’article 38 de la loi Dalo. La clarification de la notion de domicile représente une avancée pour sécuriser les biens temporairement vides de meubles.
    Nous saluons également l’extension du champ d’application de l’évacuation forcée au-delà du domicile, pour inclure le squat d’un local d’habitation. Je regrette néanmoins que les locaux à usage économique en aient été exclus. En effet, un local peut rester vide pendant la période qui sépare la cessation d’une activité et le début d’une autre, en raison de travaux ou encore de procédures administratives ou commerciales. Si ce local est squatté pendant ce temps et que l’évacuation forcée n’est pas possible, cela compromettra l’installation d’une nouvelle activité économique. Tout en ayant bien conscience qu’il n’était pas possible de raccrocher les locaux à usage économique à l’article 38 de la loi Dalo, je déplore l’existence de ce vide juridique qui peut se révéler préjudiciable à un propriétaire.

    M. le président

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    La parole est à M. Paul Midy.

    M. Paul Midy

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    Je souhaite revenir sur le débat que nous venons d’avoir.

    M. William Martinet

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    Attention à ne pas s’écarter de la question !

    M. Paul Midy

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    Quand on a un problème de transport, on ne légalise pas le vol de voitures : on mène une politique du transport. Quand on a un problème de logement, on ne légalise pas le squat : on mène une politique du logement. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Éric Coquerel

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    C’est là où le bât blesse !

    M. Stéphane Peu

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    Vous n’en faites pas !

    M. Paul Midy

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    Si la politique du transport ou du logement n’est pas suffisamment efficace, il convient de l’améliorer. Si elle s’appuie sur des moyens insuffisants, il faut lui en accorder davantage.

    M. Stéphane Peu

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    En matière de construction de logements, votre bilan est le pire depuis quarante ans !

    M. Paul Midy

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    Je trouve honteux que la seule perspective que vous offriez, en tant qu’élus de la nation, aux personnes sans logement, soit le squat. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.) C’est une honte ! En tant qu’élus, notre rôle est de définir un projet de société,…

    M. Éric Coquerel

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    Eh bien, justement ! Vous avez été incapables de faire des réquisitions.

    M. Paul Midy

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    …une organisation permettant à la société de fonctionner, pas d’organiser le chaos !

    M. Éric Coquerel

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    C’est votre politique qui sème le chaos !

    M. Paul Midy

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    Je vous rappelle qu’en l’absence de règles, c’est la loi du plus fort qui s’impose. C’est tout l’inverse de la mission du Parlement. Tâchons donc de prendre les choses dans le bon sens. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    M. le président

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    Nous en venons aux amendements. Je suis d’abord saisi de cinq amendements identiques, nos 27, 40, 69, 113 et 136, tendant à supprimer l’article 2.
    La parole est à M. Stéphane Peu, pour soutenir l’amendement no 27.

    M. Stéphane Peu

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    Il est extraordinaire de vous entendre parler ainsi, alors que votre politique du logement est un désastre total. Tout le monde s’accorde à le dire.

    M. Paul Midy

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    Alors faisons une autre loi sur le logement !

    M. Stéphane Peu

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    Vous avez tout fait pour que la construction de logements baisse. Le résultat est là : elle n’a jamais été aussi faible. Les files d’attente des demandeurs de logement ne cessent de s’allonger.

    M. Paul Midy

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    C’est cela qu’il faut améliorer ! Si vous n’avez pas de logement, cela ne vous donne pas pour autant le droit de squatter celui des autres.

    M. Stéphane Peu

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    C’est le résultat de votre politique, qui a plongé le secteur du logement dans le chaos absolu : prix en augmentation, revenus en baisse, raréfaction des biens… Avec un tel bilan, la moindre des choses serait de faire preuve d’un peu de modestie, ou de mener une politique du logement plus ambitieuse – nous serions les premiers à nous réjouir d’un tel revirement.
    J’ai déposé cet amendement de suppression pour une raison simple. L’article 38 de la loi Dalo permettait de condamner la violation de domicile, ce qui était une très bonne chose. En 2020, l’Assemblée nationale l’a modifié pour étendre son application aux résidences secondaires.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Tout à fait !

    M. Stéphane Peu

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    Soit. À présent, vous voulez appliquer la violation de domicile à des biens vides de meubles. Ce faisant, vous ôtez tout son sens à la notion de domicile, qui était étroitement liée à la notion de vie privée. Vous mélangez tout ; vous portez atteinte à la notion même de violation de domicile en proposant de l’étendre à toute sorte de logement, domicile ou non, meublé ou non.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Pas du tout !

    M. Stéphane Peu

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    Par vos amalgames, vous affaiblissez un droit protecteur de la vie privée et du domicile.

    M. le président

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l’amendement no 40.

    Mme Danielle Simonnet

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    Vous nous accusez de ne pas respecter la loi au motif que nous défendons la désobéissance civile. Nous vous répondons que vous n’appliquez pas la loi qui permet à l’État de réquisitionner des logements, alors que la France compte 3 millions de logements vacants. Dans la seule région Île-de-France, on dénombre plus de 4,4 millions de mètres carrés de bureaux vacants !

    M. Paul Midy

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    C’est épuisant…

    Mme Danielle Simonnet

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    Le pays compte pourtant 4 millions de personnes mal logées. Oui, quand des collectifs citoyens décident de réquisitionner des immeubles laissés vacants depuis des années, ils font œuvre utile.
    Figurez-vous qu’ayant été conseillère de Paris,…

    M. Bruno Millienne

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    Vous êtes gonflée de parler de ça ! Vous occupiez un logement social pour ne pas donner d’argent au privé !

    Mme Danielle Simonnet

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    …j’ai eu connaissance de plusieurs dossiers de réquisitions citoyennes s’étant conclus par des actions d’expropriation qui ont permis à des logements d’échapper à la spéculation et de retrouver des habitants puisqu’ils ont été transformés en logements sociaux. Oui, il y a actes de désobéissance civile servent l’intérêt général.

    M. Paul Midy

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    C’est la loi du plus fort… C’est l’état de nature.

    Mme Danielle Simonnet

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    Nous estimons essentiel de supprimer l’article 2, car si la procédure d’expulsion dérogatoire, expéditive, sans jugement, est légitime lorsqu’il s’agit du domicile privé d’une personne, il est inacceptable de l’étendre aux autres locaux à usage d’habitation et aux locaux à usage économique. En effet, vous confondez la question de la propriété privée et de son exploitation avec la question de l’inviolabilité du domicile.
    Cette confusion, du point de vue du droit, est inacceptable, car ce qui est important, au contraire, c’est de faire primer le droit au logement sur le droit de spéculer sur le logement. Le droit fondamental d’avoir un toit doit être garanti à tous. C’est dans l’intérêt général.

    M. Paul Midy

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    C’est la loi du plus fort !

    Mme Danielle Simonnet

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    Supprimez l’article 2 ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. Bruno Millienne

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    Je vous répondrais volontiers, madame Simonnet, mais ce ne serait pas correct de ma part.

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Taché, pour soutenir l’amendement no 69.

    M. Aurélien Taché

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    Comme l’a dit Mme Simonnet, la loi sur la réquisition n’est pas appliquée.
    Mme Genevard signalait à l’instant qu’un logement pouvait être vide temporairement en s’inquiétant de la possibilité que l’installation d’une autre activité soit empêchée s’il n’existe pas de procédure dérogatoire pour expulser rapidement.
    Pourquoi la loi de réquisition n’est-elle pas appliquée ? Il faudrait tenir le même raisonnement. En général, quand on constate qu’un logement est vide et que – ça arrive de temps en temps – les autorités de l’État envisagent de le réquisitionner, tout d’un coup, le propriétaire qui avait laissé des bureaux ou des logements vides depuis des années remet un meuble ou quelque chose qui fait que le logement n’est plus vide et que la procédure de réquisition ne peut pas s’appliquer.
    Le raisonnement que vous tenez sur les locaux vacants temporairement devrait vous amener à des conclusions quant à l’application de la loi sur la réquisition aux locaux vacants de manière prolongée.
    Parlons précisément de ce que prévoit cet article. Encore une fois, on étend au-delà du domicile une procédure dérogatoire au cours de laquelle le magistrat n’a plus à se prononcer. On n’est pas très surpris : on a bien vu que, depuis le début de l’examen de ce texte, personne, ni le rapporteur ni le garde des sceaux, n’a vraiment envie de défendre la possibilité pour le magistrat d’intervenir ; on réduit cette possibilité sans que ça ne choque personne.
    Monsieur le garde des sceaux, vous vous êtes permis de faire référence à mes expériences politiques passées. Vous étiez vous-même avocat, avant d’être ministre, je crois. Alors, vous aviez au moins le souci du droit au recours, le souci que le justiciable puisse faire appel à la justice. En réduisant encore une fois le délai de cette procédure d’exception, en l’étendant au-delà du domicile, vous faites reculer les droits de ces justiciables. Plutôt que de vous soucier de ce que je fais de mes week-ends, peut-être devriez-vous vous soucier un peu plus des droits des justiciables. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandra Regol, pour soutenir l’amendement no 113.

    Mme Sandra Regol

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    Comme cela a été rappelé, il y a dix fois plus de logements vacants que de personnes à la rue. Il y a des millions de personnes mal logées, des millions de précaires qui doivent choisir entre se nourrir et avoir un toit. Comment répondez-vous à cette crise historique ? D’abord par le bilan catastrophique en matière de construction de logements accessibles qu’a rappelé Stéphane Peu, mais également par des sanctions qui s’abattent plus particulièrement sur les plus précaires. Si encore les mesures que vous voulez prendre répondaient aux besoins des petits propriétaires et contribuaient à remettre sur le marché des appartements accessibles, on pourrait imaginer qu’elles obéissent à une logique, mais, ce que vous proposez ne répond même pas à leurs besoins. En revanche, cela répond certainement aux attentes des gros propriétaires, des multipropriétaires, comme le rappelait François Piquemal.
    Nous devons nous soucier de tous les Français qui ont acheté des appartements pour leurs enfants, lesquels n’y habitent plus ; ils ont besoin qu’on prenne soin d’eux. Pour répondre à ce souci, vous étendez à tous les locaux d’habitation les possibilités d’expulsion administrative rapide, sans recours au juge et donc sans que les personnes expulsées puissent exercer leur droit à un procès équitable ou à bénéficier d’un délai raisonnable. Pourtant ces droits-là devraient être respectés, comme il est prévu à l’article 6 de la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales (CEDH).
    Cela pose un sérieux problème, dans un État de droit, de s’asseoir à ce point sur ce qui constitue les droits des plus faibles, qu’il s’agisse de celles et ceux qui ont besoin d’un logement ou de celles et ceux qui aimeraient qu’on les aide à conserver le leur. Nous vous proposons donc de supprimer l’article 2 qui ne répond en rien aux besoins des Français.

    M. le président

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    La parole est à Mme Cyrielle Chatelain, pour soutenir l’amendement no 136.

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Nous avons un point d’accord avec Paul Midy : nous reconnaissons que c’est la loi qui protège les plus fragiles d’entre nous. Chacun doit garder cela à l’esprit en légiférant.

    M. Paul Midy

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    La loi et la démocratie !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Il y a un petit doute sur le fait que vous appliquiez la démocratie, mais c’est une autre question.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    On vous retourne le compliment !

    Mme Cyrielle Chatelain

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    Qui sont les plus fragiles ? Ce sont les 122 enfants qui dormaient dans la rue à Paris la nuit du 5 décembre ; les 5 000 personnes qui cette nuit-là, sur l’ensemble du territoire national, dormaient à même le sol. C’est à eux qu’il faut penser.
    Quand vous élaborez une proposition de loi qui remet en cause l’équilibre entre le droit à l’habitation et le droit à la propriété, ce sont justement eux que vous mettez en danger.
    Jamais votre politique du logement ne témoigne de ce souci. Le résultat de cette politique est une chute brutale de la construction, qui est passée de 437 000 mises en chantier en 2017 à 378 000 en 2022. Vous prenez 1,3 milliard d’euros dans la poche des bailleurs sociaux tous les ans.
    Si on veut légiférer dans l’intérêt des plus précaires, des plus fragiles, de ceux qui sont à la rue, on doit retirer cette proposition de loi, se mettre tous autour de la table et concevoir une loi forte sur le logement, qui aborde le droit au logement, la construction, l’intermédiation locative, le plan Logement d’abord, en somme. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES, LFI-NUPES et SOC.) Voilà ce qui devrait nous réunir.
    Le fait que la première loi sur le logement du quinquennat vise à précariser et à mettre en danger les plus faibles en dit beaucoup de votre vision de la politique du logement. (Mêmes mouvements.)

    M. Inaki Echaniz

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    Elle a raison !

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur les amendements de suppression ?

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Je vais revenir à ce que contient réellement l’article 2, qui modifie l’article 38 de la loi Dalo. Introduit en 2007, ce dernier article prévoyait une procédure d’expulsion des squatteurs. En étudiant cette question, on s’est rendu compte que cette disposition n’était jamais utilisée, que le dispositif ne fonctionnait pas, que les préfets ne l’utilisaient jamais, que l’article n’était pas bien écrit et qu’il fallait modifier la loi.
    En 2020, grâce à la loi Asap, la majorité, le Parlement et moi avons proposé de revoir cette procédure pour la renforcer. Nous l’avons renforcée en clarifiant ce qu’était un domicile, pour y inclure certaines résidences secondaires et des pied-à-terre qui jusque-là n’étaient pas éligibles.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Exactement.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    On a amélioré les délais de réponse des préfectures, car on avait remarqué que certaines ne répondaient pas en renvoyant les propriétaires à la justice au lieu d’utiliser l’article 38 de la loi Dalo. Depuis la loi Asap, la réponse est très claire : les victimes de squatteurs doivent porter plainte, faire constater le squat, prouver qu’elles sont propriétaires et saisir le préfet. Le préfet n’a plus le choix : il a l’obligation de répondre sous quarante-huit heures. Il ne peut refuser d’agir que s’il ne s’agit pas réellement d’un cas de squat. Vingt-quatre heures plus tard, il met en demeure l’occupant de partir. Soixante-douze heures après la demande adressée au préfet, l’occupant du squat est sommé de partir et, si besoin, la force peut être employée. Cette procédure fonctionne même pendant la trêve hivernale.
    Depuis 2020, l’article 38 de la loi Dalo protège effectivement les victimes des squatteurs grâce à une mesure administrative qui permet aux préfets d’agir et aux propriétaires de récupérer leur domicile. Cette procédure fonctionne plutôt bien : d’après la première année d’application, il semble qu’elle soit utilisée 170 à 200 fois par an. De nombreuses préfectures l’utilisent, certaines plus que d’autres – reconnaissons qu’il y a encore un petit effort à faire dans quelques départements.
    Après ces ajustements effectués en 2020, on a constaté qu’il était possible d’améliorer encore ce dispositif et cette procédure d’expulsion, en permettant aux maires ou aux commissaires de justice de constater l’occupation illicite, tandis que, jusqu’à présent, cela relevait d’un OPJ. L’article 2 vise donc à permettre à d’autres personnes de venir constater le squat. C’était une demande forte des élus locaux qu’a relayée le groupe Horizons et que nous avons intégrée.
    Ensuite, on a demandé à l’administration fiscale si elle pouvait prouver la propriété, car apporter cette preuve peut être un peu compliqué pour une personne dont quelqu’un occupe le salon ou la maison en l’empêchant d’y entrer. On n’a pas toujours son titre de propriété ou son bail sur soi.

    Mme Danielle Simonnet

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    C’est réglé, ça !

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Je rappelle que les locataires peuvent aussi être victimes de squat ; c’est le cas à Paris, par exemple. L’article 2 vise à demander à l’administration fiscale de prouver qui est le titulaire du logement grâce à un bail ou un titre de propriété.
    La rédaction proposée élargit aussi un peu l’usage du dispositif en l’étendant aux locaux à usage d’habitation et non seulement aux domiciles et aux résidences secondaires. Cet élargissement est assorti de délais de procédure un peu différents, ce qui devrait assurer sa recevabilité constitutionnelle, car ces délais permettent notamment de faire appel.
    Je précise que l’article 38 de la loi Dalo a fait l’objet d’une question prioritaire de constitutionnalité (QPC), qui a donné lieu à une décision du Conseil constitutionnel du 24 mars 2023, lequel a validé la conformité de l’article 38 dans sa rédaction de 2020. Il est donc déclaré conforme à la Constitution modulo une réserve sur laquelle je vous proposerai un petit ajustement pour prendre en compte la décision du Conseil constitutionnel. La procédure définie par l’article 38 de la loi Dalo, tel que nous l’avions rédigé en 2020, a donc été validée par le Conseil constitutionnel.
    L’article 2 de la proposition de loi vise à sécuriser encore l’application de l’article 38 et à résoudre les problèmes très concrets que les parlementaires ont relayés depuis 2020.
    Je vous propose bien sûr de voter contre les amendements de suppression, puisque je suis convaincu que ce que nous proposons permettra d’appliquer davantage cette procédure d’expulsion et de protéger encore mieux des petits propriétaires ou des locataires victimes de squatteurs qui entrent dans leur salon et occupent leur domicile.

    M. Éric Coquerel

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    Ce n’est pas ça, votre article ! Il n’a rien à voir avec les locataires !

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    Défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. François Piquemal.

    M. François Piquemal

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    Monsieur le rapporteur, je commence à m’habituer au fait que vous n’apportez pas de réponse à nos questions.

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    Tenez-vous en aux amendements et à l’article !

    M. François Piquemal

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    Monsieur le rapporteur, vous n’êtes pas la police de l’Assemblée. Vous n’êtes pas la police, puisque vous l’envoyez à votre place faire le sale boulot (« Oh ! » sur les bancs des groupes RE et RN) que vous définissez actuellement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    M. Guillaume Kasbarian, rapporteur

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    C’est honteux !

    M. François Piquemal

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    C’est bien ce que j’ai dit. Vous étendez la possibilité d’expulsion prévue initialement pour le domicile à quelque chose d’assez flou. Qui est pour l’augmentation des loyers et pour celle des prix de l’immobilier ? Pourriez-vous lever la main ? (Exclamations sur divers bancs.) Connaissez-vous Leilani Fahra, monsieur le rapporteur ?

    M. le président

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    Monsieur le député, c’est moi qui organise les votes, ici. Terminez votre propos, mais rappelez-vous que vous n’organisez pas de scrutin.

    M. François Piquemal

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    C’est simplement pour mettre un peu d’interaction.

    M. le président

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    J’entends bien.

    M. François Piquemal

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    Leilani Farha a été rapporteure spéciale au logement à l’ONU. Monsieur le garde des sceaux, je vous vois taper sur votre pupitre, mais elle existe bien et elle a remis un rapport sur le logement à l’échelle mondiale. Elle y montre comment laisser vacants des logements et des immeubles constitue une stratégie claire et déterminée de gros groupes financiers qui y placent leur argent et font de la spéculation locative ou immobilière.

    M. Éric Dupond-Moretti, garde des sceaux

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    C’est au-delà du réel, c’est la quatrième dimension, là !

    M. François Piquemal

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    Je prendrai un exemple à Toulouse. Il y a dix ans, un promoteur a acheté un bâtiment à la métropole de Toulouse pour 4 millions d’euros. Il l’a laissé vide pendant dix ans, puis l’a revendu 11 millions d’euros. Qu’auriez-vous fait de personnes qui se seraient introduites dans ce logement parce qu’ils n’avaient pas d’abri ? Vous les auriez considérées comme des squatteurs et des voleurs. Pourtant, le malpropre, ici, c’est le promoteur qui a spéculé sur un logement vide pendant dix ans (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES),…

    Une député du groupe RE

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    Il a payé une taxe !

    M. François Piquemal

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    …ce qui a fait monter les prix aux alentours parce que la rareté du logement crée l’augmentation des prix de l’immobilier et des loyers. Pourtant, là-dessus, vous n’avez rien à dire.

    M. Éric Coquerel

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    Pour vous, c’est même un modèle !

    M. François Piquemal

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    Mme Genevard a parlé de la loi de réquisition…

    M. le président

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    Monsieur Piquemal, achevez votre propos.

    M. François Piquemal

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    Je dois finir ?

    M. le président

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    Oui, au bout d’un moment, vous devez finir !

    M. François Piquemal

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    Je rappelle que c’est Charles de Gaulle qui, le premier, a appliqué la loi de réquisition pour accueillir les pieds-noirs. Visiblement, à cette époque-là, il existait une droite républicaine qui avait encore un peu de bon sens. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    (Les amendements identiques nos 27, 40, 69, 113 et 136 ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    2. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
    Suite de la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi visant à protéger les logements contre l’occupation illicite ;
    Discussion de la proposition de loi visant à lutter contre les arnaques et les dérives des influenceurs sur les réseaux sociaux.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à vingt heures.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra