Troisième séance du mardi 13 juin 2023
- Présidence de M. Sébastien Chenu
- 1. Améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels
- Discussion des articles (suite)
- Article 1er (suite)
- Amendement no 714
- M. Frédéric Valletoux, rapporteur de la commission des affaires sociales
- Amendement no 1088
- Sous-amendements nos 1125, 1126, 1174, 1175, 1176, 1177, 1173, 1172, 1128, 1127, 1169, 1170, 1171, 1129, 1132 et 1130
- M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention
- Amendements nos 639, 504, 615, 151, 458, 765, 616, 552 et 664
- Sous-amendement no 1131
- Amendements nos 149, 233, 984, 550, 124, 640, 715, 150, 826, 827, 825, 496, 590, 119, 919, 1078, 1079, 1080, 1084, 1092, 1112, 267, 22, 303, 327 et 355, 622, 1023
- Sous-amendement no 1123
- Amendements nos 619, 578, 620 et 1046
- Après l’article 1er
- Article 1er (suite)
- Discussion des articles (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de M. Sébastien Chenu
vice-président
M. le président
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à vingt et une heures trente.)
1. Améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels
Suite de la discussion d’une proposition de loi
M. le président
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi visant à améliorer l’accès aux soins par l’engagement territorial des professionnels (nos 1175, 1336).
Discussion des articles (suite)
M. le président
Cet après-midi, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles de la proposition de loi, s’arrêtant aux amendements nos 714 et identique à l’article 1er.
Article 1er (suite)
M. le président
Les amendements identiques nos 714 et 1088 font l’objet de plusieurs sous-amendements dont certains sont identiques.
La parole est à M. Frédéric Valletoux, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour soutenir l’amendement no 714.
M. Frédéric Valletoux, rapporteur de la commission des affaires sociales
Il vise à clarifier la liste des membres des conseils territoriaux de santé (CTS), dont le nombre varie entre une trentaine et une cinquantaine. Le sujet a déjà été abordé hier : il faut toujours, dans ces cas-là, trouver un équilibre entre la volonté d’assurer la représentativité la plus large possible et celle d’éviter l’inefficacité d’une assemblée pléthorique.
La liste est équilibrée. On y retrouve des représentants de l’État : le préfet de département et le directeur de l’agence régionale de santé (ARS). Il est important que l’État soit autour de la table, surtout sur une matière qui relève de sa pleine compétence.
M. Jean-Paul Lecoq
C’est vrai, c’est sa responsabilité !
M. Fabrice Brun
La santé est tout de même une compétence régalienne !
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
C’est normal, mais chacun relèvera que c’est une nouveauté par rapport à la composition actuelle des CTS. On y trouvera aussi des directeurs des organismes locaux d’assurance maladie, des élus – parlementaires et des élus locaux –, des représentants des établissements de santé et des établissements et services médico-sociaux, des représentants des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) pour le monde libéral et la médecine de ville, des représentants des maisons de santé pluridisciplinaires et des centres de santé – c’est très important –, le guichet unique départemental d’accompagnement des professionnels de santé et, enfin, des représentants des usagers, qui incarnent la démocratie sanitaire.
Je précise d’ores et déjà qu’afin de préserver l’équilibre de la rédaction initiale, j’émettrai un avis défavorable sur tous les sous-amendements, à l’exception des sous-amendements identiques nos 1129 de Hadrien Clouet et 1132 de Servane Hugues, lesquels précisent que le CTS « garantit en son sein la participation des usagers, notamment celle des personnes en situation de pauvreté et celle des personnes en situation de handicap. » En effet, cette précision est tout à fait fondée.
Mon amendement indique également que le CTS devra être présidé par une personne élue parmi ses membres, et non par une personne désignée par je ne sais pas qui. Sous sa présidence, le CTS devra former un bureau, qui sera le bras armé de son fonctionnement au quotidien.
M. le président
La parole est à M. François Gernigon, pour soutenir l’amendement no 1088.
M. François Gernigon
C’est le même amendement que celui de M. le rapporteur. (Mme Laetitia Saint-Paul applaudit.)
M. le président
La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir le sous-amendement no 1125.
Mme Mathilde Hignet
Nous souhaitons apporter quelques modifications à la composition du CTS proposée dans l’amendement. Vous voulez en faire une instance cohérente qui soit en mesure d’assurer le pilotage de la santé dans les territoires. Il faut donc lui permettre d’être au plus près de la réalité. Pour ce faire, il faut réintégrer un certain nombre d’acteurs qui correspondent à cette réalité. Je pense aux organisations syndicales et aux représentants des usagers.
Par ailleurs, le représentant de l’État le plus à même d’intervenir dans le secteur de la santé est le directeur général de l’ARS. Le rapport du Sénat relatif à la crise du covid-19 pointait un manque de clarté entre le champ d’action de ce dernier et celui du préfet en temps de crise.
M. Fabrice Brun
C’est le moins que l’on puisse dire !
Mme Mathilde Hignet
C’est pourquoi la représentation de l’État dans le CTS doit être assurée par le seul directeur général de l’ARS, représentant de l’État sur le territoire dans le domaine de la santé. Cela renforcerait la clarté de la nouvelle gouvernance que vous souhaitez instaurer. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. le président
La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir le sous-amendement no 1126.
M. Hadrien Clouet
Dans la continuité de ce qu’a dit ma collègue, il nous semble qu’il y a une redite à faire siéger le préfet au CTS, où le directeur général de l’ARS est déjà censé représenter les intérêts de l’État. C’est même ainsi qu’il est défini. Dès lors, à quoi bon ce doublon ? Simplifions les choses et retirons le préfet de la liste. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. le président
Monsieur Bazin, vous voulez bien soutenir ensemble les sous-amendements nos 1174, 1175, 1176, 1177, 1173 et 1172 ?
M. Thibault Bazin
Oui, monsieur le président. La raison pour laquelle j’en ai déposé autant est que l’adoption de l’amendement du rapporteur fera tomber un certain nombre d’amendements aux alinéas 10, 11 et 12, ce qui nous privera de débat. Mais je vais faire vite, pour rassurer M. Philippe Vigier.
Le sous-amendement no 1174 vise à intégrer au CTS le recteur ou son représentant. En effet, la santé globale comporte une dimension éducative ; c’est tout l’enjeu de la prévention.
Le sous-amendement no 1175 vise à intégrer le directeur départemental de l’emploi, du travail et des solidarités (DDETS) car un grand nombre de sujets sont à la frontière entre le médico-social, le social et le sanitaire, notamment concernant les publics les plus vulnérables.
Le sous-amendement no 1176 vise à y intégrer les représentants des ordres des professions de santé. Il serait bon d’avoir des interlocuteurs des ordres sur un certain nombre de sujets qui touchent à l’organisation de notre santé.
Le sous-amendement no 1177 vise à y intégrer des représentants des centres communaux et intercommunaux d’action sociale, les CCAS et CIAS. Nous avons déjà eu ce débat sur le projet de loi portant mesures pour bâtir la société du bien vieillir – je sais d’ailleurs plus où il en est, mais peut-être Mme Iborra le sait-elle.
Le sous-amendement no 1173 vise à ajouter « et de leurs groupements » à l’alinéa 8 mentionnant les collectivités territoriales.
Le sous-amendement no 1172 vise à faire mention des établissements « de santé privés, des centres de lutte contre le cancer et des établissements ». C’est important. Les centres de santé privés et les centres de lutte contre le cancer ont un statut particulier. En matière de cancérologie, en particulier, il est important d’avoir une organisation territoriale des réseaux.
J’espère que vous n’émettrez pas un avis défavorable sur tous les sous-amendements, monsieur le rapporteur ; ce ne serait pas correct.
M. le président
La parole est à Mme Farida Amrani, pour soutenir le sous-amendement no 1128.
Mme Farida Amrani
Depuis de nombreuses années, nous constatons une dégradation continue de l’offre de soins sur le territoire national. Dans ma circonscription, à Évry-Courcouronnes, le centre municipal de santé est actuellement menacé de fermeture, faute de moyens. La municipalité ne se mobilise pas pour empêcher cela. Il est urgent de garantir une offre de soins de qualité aux populations les plus précaires. La vocation de service public de ces centres est indéniable et doit être notre cap commun.
Les collectivités territoriales ont évidemment un rôle à jouer dans le processus permettant l’accès aux soins, notamment par le déploiement des maisons de santé. C’est pour cette raison que la généralisation des CTS permettra une meilleure coordination des acteurs territoriaux.
Étant donné que le conseil territorial de santé établit les objectifs prioritaires en matière d’accès aux soins sur le territoire, il est logique que les représentants syndicaux puissent prêter leur voix à leur élaboration, notamment pour défendre les conditions de travail et les besoins des professionnels de santé dont ils assurent la représentation. C’est le sens de notre sous-amendement, qui propose de modifier la composition du CTS pour y inclure les représentants d’organisations syndicales de salariés des filières de santé du territoire.
Même si les derniers mois n’ont fait que confirmer le mépris du Gouvernement pour la concertation avec les partenaires sociaux, il nous apparaît primordial d’inclure les représentants de syndicats de salariés dans la composition du CTS. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. le président
La parole est à Mme Ersilia Soudais, pour soutenir le sous-amendement no 1127.
Mme Ersilia Soudais
La part de femmes qui reportent des soins ou y renoncent s’élève à 64 %, soit près de 9,5 millions de femmes chaque année. On estime à 81 % la part de femmes qui se préoccupent de la santé de leurs proches avant la leur. La société le leur rend mal. En effet, nombre de besoins spécifiques des femmes en matière de soins passent au second plan.
Prenons l’exemple de la gynécologie médicale. Dans mon département de Seine-et-Marne, nous ne recensons qu’un gynécologue pour 30 000 femmes ; et encore, nous sommes chanceux. Dans quatorze départements, il n’y a aucun gynécologue médical. La suppression de la gynécologie médicale dans les programmes de médecine dans les années 1980 y est pour beaucoup. Comme le souligne Marie Stagliano, codirectrice du comité de défense de la gynécologie médicale, cela aboutit à des diagnostics de plus en plus tardifs qui ont des conséquences dramatiques pour les femmes. Relevons que 61 % des nouveaux cas de cancer sont gynécologiques. Ajoutons que les gynécologues peuvent diagnostiquer d’autres pathologies comme les infections sexuellement transmissibles (IST) ou l’endométriose.
Prenons aussi l’exemple de la dépression post-partum. Chloé Bedouet, de l’association Maman Blues, nous apprend que cette dépression touche 20 à 30 % des mères, mais qu’un tiers d’entre elles ne sont pas diagnostiquées et que seul un tiers bénéficie d’une prise en charge adaptée. Or le suicide est la première cause de mortalité maternelle durant la première année.
Parce qu’il est important que les besoins spécifiques des femmes en matière de soins soient correctement pris en compte, nous demandons la garantie de la parité de genre parmi les représentants des usagers présents au conseil territorial de santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. le président
La parole est à M. Thibault Bazin, pour la présentation commune, s’il l’accepte, des sous-amendements nos 1169, 1170 et 1171.
M. Thibault Bazin
Bien sûr, monsieur le président, pour vous être agréable.
M. le président
J’adore entendre cela. (Sourires.)
M. Thibault Bazin
Le sous-amendement no 1169 vise à préciser, après l’alinéa 14, que des CTS intégreront les représentants des conseils départementaux de l’ordre des médecins. Il me semble important de construire la politique de santé avec eux.
Le sous-amendement no 1170 vise à y inclure les professionnels de santé autres que les médecins, dont un certain nombre se sont organisés en ordre.
Le sous-amendement no 1171 vise à y inclure des représentants des internes en médecine et des étudiants en santé. L’un des enjeux actuels en matière de santé dans les territoires, c’est l’installation de jeunes ; pour qu’il y ait des installations, il faut leur donner envie de s’installer. On n’est par exemple jamais obligé de choisir la médecine libérale : on peut très bien rester salarié ou bien choisir une autre forme d’exercice, laquelle est parfois préconisée dans d’autres pays. Il me semble essentiel de construire des solutions avec les internes, d’où l’intérêt de leur participation aux CTS.
Je précise, monsieur le ministre de la santé et de la prévention, que je vais m’absenter quelques minutes pour une pause technique ; mes collègues me résumeront votre avis ainsi que celui du rapporteur.
M. le président
Merci pour ces intéressantes informations, monsieur le député.
Je suis saisi de deux sous-amendements identiques, nos 1129 et 1132.
La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir le sous-amendement no 1129.
Mme Mathilde Hignet
Il vise à permettre à chaque conseil territorial de santé de continuer à garantir la participation et l’expression des personnes en situation de pauvreté ou de handicap. Il est dommage que cette précision disparaisse du code de la santé publique, car la précarité et le handicap constituent deux motifs majeurs d’inégalité d’accès aux soins.
Nous considérons comme essentielle l’ambition visant à garantir la pleine expression des usagers concernés lors de l’identification des besoins de santé du territoire et de l’élaboration du projet territorial de santé (PTS). (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. le président
La parole est à Mme Servane Hugues, pour soutenir le sous-amendement identique no 1132.
Mme Servane Hugues
Il précise que le conseil territorial de santé assure la participation des usagers, en portant une attention particulière aux personnes en situation de pauvreté, de précarité ou de handicap.
La prise en compte de ces vulnérabilités est primordiale pour garantir correctement l’accès aux soins. Selon la Drees – direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques –, « les personnes pauvres en conditions de vie ont trois fois plus de risques de renoncer à des soins que les autres » ; et les autres facteurs de risque sont le mauvais état de santé, en particulier le handicap, ainsi que l’isolement social. Des réponses territoriales de qualité sont une condition indispensable à la prise en charge sanitaire efficace de ces personnes.
Par conséquent, le CTS, lieu de dialogue de tous les acteurs de la santé sur un territoire donné, doit porter la voix des personnes les plus vulnérables et les plus éloignées de la santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE.)
M. le président
La parole est à M. Maxime Laisney, pour soutenir le sous-amendement no 1130.
M. Maxime Laisney
Il vise à permettre au conseil territorial de santé de se doter d’une commission pour chaque spécialité en tension sur un territoire donné. Une telle mesure se justifie pleinement, puisque, comme l’indique l’exposé des motifs du texte, « 25 % des médecins spécialistes couvrent [seulement] 5 % du territoire » et « une quarantaine de départements sont aujourd’hui sous le seuil critique de 40 spécialistes pour 100 000 habitants ». On sait quelles spécialités sont particulièrement touchées, notamment la psychiatrie, la gynécologie et la pédiatrie – nous avons déjà eu l’occasion de le dire. L’exposé des motifs ajoute que « 23,6 % des femmes vivent dans un désert médical gynécologique » et que « 27,5 % des enfants vivent dans un désert médical pédiatrique ».
En dix ans, mon département, la Seine-et-Marne, qui est classé 98e sur 101 en matière d’accès à la santé, a gagné plus de 90 000 habitants mais il a perdu 200 médecins. Cela se traduit, pour certaines spécialités, par une véritable tension. Selon la Drees, en Seine-et-Marne, il y a 80 ophtalmologues et nous en avons perdu 4 ces dernières années ; la densité de ces spécialistes est donc de 5,57 pour 100 000 habitants, et il en faudrait 44 de plus. En cardiologie, on compte 97 spécialistes mais il en faudrait 60 de plus ; on compte aussi 722 dentistes, et il en manque 218. Quant aux infirmiers libéraux ou mixtes, ils sont un peu plus de 1 300 : il faudrait quasiment doubler leur nombre.
J’ai pris l’exemple de la Seine-et-Marne, mais ce constat est valable pour de nombreux autres départements. C’est la raison pour laquelle il nous semble essentiel d’instituer ces commissions spécialisées au sein des CTS, pour les domaines qui connaissent les carences les plus importantes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur les sous-amendements ?
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Je ne vais pas reprendre tous ces sous-amendements un par un, mais je précise qu’il n’est pas question d’exclure telle ou telle des catégories qui ont été citées : elles sont toutes utiles à l’exercice du soin. Certains disaient que les conseils territoriaux de santé risquaient d’être inopérants ; mais s’ils deviennent des agoras de soixante ou soixante-dix personnes, ce trait de caractère sautera aux yeux de tous.
Pour ma part, je crois, contrairement à vous, monsieur Clouet, qu’il est important que le préfet soit présent. L’ARS est organisée au niveau régional : c’est l’administration sanitaire de l’État dans les territoires. Mais le préfet a aussi, cette fois au niveau départemental, des compétences qui sont bien utiles.
Pour tous les acteurs du soin qui interviennent dans les territoires, que ce soient les soignants, les élus locaux ou les associations d’usagers – je n’étendrai pas la liste au-delà de ce qui est prévu dans les articles de la proposition de loi –, il est essentiel que l’administration préfectorale soit présente, afin que, là encore, l’État ne parle que d’une seule voix. Et on sait qu’en matière sanitaire, même si je ne voudrais pas ouvrir un débat qui n’a pas lieu d’être aujourd’hui, il arrive parfois – on l’a vu pendant la crise – que des petits frottements se fassent jour entre les ARS et les administrations préfectorales. Mais ce n’est pas le sujet du jour.
Monsieur Laisney, s’agissant des commissions thématiques, il faut laisser la liberté à chaque conseil territorial de santé et à ceux qui vont les animer de s’organiser comme ils le veulent. Ceux qui voudront créer des commissions thématiques pour répondre à des manquements et à des besoins criants dans telle spécialité, concernant telle pathologie, sur tel territoire, pourront le faire librement. La vérité d’un territoire sera forcément différente de celle d’un autre.
Merci d’avoir longuement évoqué la Seine-et-Marne ; c’est sans doute pour essayer de m’amadouer, ou en tout cas de me faire craquer pour que j’accepte vos sous-amendements ;…
M. Hadrien Clouet
Qui sait ?
M. Thierry Benoit
Il faut l’amadouer ! Il faut insister !
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
…j’y suis sensible, mais ça ne marche pas !
J’en reste à ce que j’ai dit tout à l’heure : je ne serai favorable qu’aux sous-amendements qui permettent de souligner la situation des personnes en situation de pauvreté ou de handicap. En effet, les situations de pauvreté cachent bien souvent des phénomènes de renoncement aux soins, qui ont tendance à augmenter dans notre société : il faut absolument que tous les territoires soient équipés pour veiller à les empêcher. En ce qui concerne les situations de handicap, je vous renvoie aux travaux admirables de la charte Romain Jacob et à tout ce qu’essaie de faire Pascal Jacob pour mobiliser en faveur de l’accès aux soins des personnes handicapées. Nous avons accumulé sur ces sujets des retards qui nous renvoient à des réalités parfois bien douloureuses.
Aux sous-amendements nos 1129, présenté par Hadrien Clouet, et 1132, présenté par Servane Hugues, je donne donc un avis favorable ; pour tous les autres, l’avis est défavorable.
M. le président
La parole est à M. le ministre de la santé et de la prévention, pour donner l’avis du Gouvernement.
M. François Braun, ministre de la santé et de la prévention
J’essaie de traîner un peu, le temps que M. Bazin revienne pour entendre ma réponse. (Sourires.) Je ne vais pas, moi non plus, reprendre l’ensemble des sous-amendements, mais j’indiquerai tout de suite que je suis bien sûr favorable à l’amendement no 714, parce qu’il apporte de la clarté dans l’organisation de ces CTS, et nous en avons besoin.
Dans la même logique, et comme les inégalités d’accès à la santé concernent de façon majeure les personnes en situation de handicap et les personnes en situation de pauvreté, je suis favorable aux sous-amendements nos 1129 et 1132.
En revanche, je suis défavorable à l’ensemble des autres sous-amendements. J’apporterai simplement une précision. Comme l’a dit le rapporteur, il est important que le préfet, qui est le représentant de l’État dans le département – on a beaucoup parlé des départements, tout à l’heure –, soit présent, d’autant plus que sur ces bancs, pendant la crise sanitaire, j’ai entendu nombre d’entre vous – et j’en entends encore certains – regretter que le rôle du préfet n’ait pas été assez clairement identifié dans la gestion de ce moment particulier. Il serait dommage, après avoir réclamé la clarification de son rôle dans des situations de crise sanitaire, que vous l’excluiez de réflexions d’ordre sanitaire.
En outre, je me permets de préciser que les associations agréées de sécurité civile, entre autres, participent très largement à la réponse sanitaire sur les territoires, et qu’elles sont à la main du préfet ; il en est de même, bien entendu, pour les sapeurs-pompiers. Il est bon de disposer d’une vision globale sur l’ensemble des territoires. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)
M. le président
La parole est à M. Pierre Dharréville.
M. Pierre Dharréville
Nous allons donc continuer l’examen de ce texte en rondelles de saucisson. Le problème de votre amendement, monsieur le rapporteur, c’est que, dans le cercle que vous tracez pour faire vivre cette démocratie sanitaire, il manque en effet de nombreuses personnes, par exemple les associations d’élus locaux, le mouvement mutualiste, la médecine du travail, la santé à l’école ou encore les organisations syndicales, qui auraient toute leur place dans ces échanges !
Si l’on veut s’inscrire dans une logique qui ne se limite pas aux soins mais qui s’étende à la prévention et à la santé dans sa globalité, la présence de tous ces acteurs est nécessaire. J’ajouterai le médecin inspecteur du travail, pour peu qu’il y en ait un – d’après les derniers chiffres mis à ma disposition, plus de la moitié des postes n’étaient pas pourvus dans le pays. On aurait besoin de l’ensemble de ces acteurs pour que les délibérations portent vraiment sur l’ensemble du champ de la santé.
Pour résumer, et même si je demeure assez dubitatif sur les effets de cette organisation, quand on trace un cercle, il faut aller au bout ! Or certains acteurs sont exclus de la proposition que vous faites, de manière selon moi assez problématique. J’ajoute que, compte tenu de tout ce qui vient d’être dit, il faudra créer une infrastructure administrative pour permettre aux CTS de fonctionner.
M. le président
La parole est à M. Christophe Bentz.
M. Christophe Bentz
Je suis d’accord avec les propos que tenait Pierre Dharréville lors de son rappel au règlement à la fin de notre dernière séance : il est un peu compliqué, monsieur le rapporteur, de travailler dans ces conditions. Lors de la commission, vous aviez déjà déposé, à l’article 1er, plusieurs amendements de réécriture dont l’adoption avait fait tomber beaucoup de nos amendements ; c’est aussi certainement ce qui va se passer ici.
S’agissant de la composition du conseil territorial de santé, nous approuvons la présence du préfet de département, d’associations d’usagers et évidemment de parlementaires, mais j’avais pour ma part, en commission comme en séance, déposé des amendements sur la départementalisation des ARS ; nous devons en débattre car c’est un sujet crucial.
Je voudrais d’ailleurs interpeller M. le ministre, François Braun : votre collègue du Gouvernement, Mme Firmin Le Bodo, avait annoncé qu’elle était favorable à la départementalisation des ARS, et j’aurais aussi aimé connaître votre position sur le sujet. Le cas échéant, il faudrait introduire dans chaque conseil territorial de santé non l’ARS en tant qu’entité régionale, mais sa délégation départementale.
(Les sous-amendements nos 1125, 1126, 1174, 1175, 1176, 1177, 1173, 1172, 1128, 1127, 1169, 1170 et 1171, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(Les sous-amendements identiques nos 1129 et 1132 sont adoptés.)
(Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
(Le sous-amendement no 1130 n’est pas adopté.)
(Les amendements identiques nos 714 et 1088, sous-amendés, sont adoptés ; en conséquence, les amendements qui suivent tombent jusqu’à l’amendement no 639.)
M. le président
Nous en venons donc à l’amendement no 639.
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille pour le soutenir.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Plus de quatre-vingts amendements sont tombés, nous reprenons le fil. Pour clarifier le rôle du CTS, je propose de préciser que le diagnostic territorial a trois objectifs : identifier les besoins sanitaires sociaux et médico-sociaux ; tenir compte des caractéristiques géographiques, démographiques et épidémiologiques ; identifier les insuffisances en termes d’offres, d’accessibilité, de coordination, de continuité des services sanitaires, sociaux et médico-sociaux et de permanence des soins.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
C’est un amendement de dévitalisation complète : il supprimerait quasiment toutes les missions du CTS. C’est aller un peu loin dans la cure d’amaigrissement souhaitée. Il ne resterait plus rien du CTS, sauf ce qu’il est actuellement, c’est-à-dire un organisme qui se réunit pour dresser un constat, puis rentre chez lui jusqu’à la fois suivante. Ce n’est évidemment pas du tout le sens de la proposition de loi. Je demande le retrait de cet amendement qui nous ferait faire un sacré bond en arrière par rapport à l’ambition du texte. À défaut, j’émettrais un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Braun, ministre
Même avis.
M. le président
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Si vous estimez que mon amendement amaigrit le CTS, dites-nous le rôle que vous entendez faire jouer à cet organisme.
M. le président
La parole est à M. le rapporteur.
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Je vais être bref car nous en discutons depuis lundi et que je ne voudrais pas allonger à l’infini les débats. Le rôle du CTS est de permettre de concrétiser l’idée que tout le monde dialogue non pas pour constater comme le propose cet amendement – une fois le constat effectué, on se dit merci, au revoir, à dans un an –, mais pour élaborer des stratégies à partir du constat.
Comment aboutir à la permanence des soins, bâtir des politiques de prévention, favoriser la coopération entre les uns et les autres – l’hôpital, la ville, les paramédicaux, les médicaux et autres ? Comment faire en sorte que les forces médicales soient bien réparties dans un territoire ? Comment progresser collectivement et répondre à des enjeux de service en direction, par exemple de ceux qui sont en difficulté ou en situation de handicap ?
L’idée est que chaque territoire se saisisse de ses urgences, de ses priorités, à partir de ce socle commun proposé dans la loi. Il ne s’agit certainement pas de dévitaliser le CTS et d’en faire un simple observatoire. Il doit être un lieu où l’on bâtit des stratégies communes, comme je l’ai déjà expliqué à plusieurs reprises.
(L’amendement no 639 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 504 de M. Thierry Frappé est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Braun, ministre
Même avis.
M. le président
La parole est à M. Thibault Bazin.
M. Thibault Bazin
Monsieur le rapporteur, ces débats donnent l’impression que nous sommes en train de tout réinventer. Cela m’étonne car les missions actuelles du CTS en font déjà plus qu’un observatoire : il participe à réalisation du diagnostic ; il contribue à l’élaboration, à la mise en œuvre, au suivi et à l’évaluation du projet régional de santé. En quoi cet article va-t-il changer quelque chose ? Nous avons plutôt le sentiment que les instances de concertation et les comités Théodule ne manquent pas, mais que nous avons du mal à passer aux réalisations concrètes et efficaces dans les territoires.
M. Jean-Paul Lecoq
Dès qu’on a des médecins, ça marche ! C’est ça qui manque !
M. Thibault Bazin
La proposition de notre collègue Isaac-Sibille est intéressante car elle apporterait de la simplification et la lisibilité. Soyons clairs sur les missions du CTS. Pour ma part, j’ai l’impression que vous nous décrivez les missions existantes. Qu’est-ce qui change ?
M. le président
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Selon vous, monsieur rapporteur, le CTS fait le diagnostic et élabore une stratégie. Qui décide de cette stratégie ? Comment cela se passe-t-il ? Y a-t-il un vote ? Qui vote ? Comment est définie la stratégie, monsieur le rapporteur ?
M. Thibault Bazin
C’est l’ARS qui décide de tout !
(L’amendement no 504 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 615 de M. Yannick Monnet est défendu.
(L’amendement no 615, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 151, 458 et 765.
La parole est à Mme Isabelle Valentin, pour soutenir l’amendement no 151.
Mme Isabelle Valentin
Proposé par notre collègue Yannick Neuder, il vise à ajouter la prévention et l’amélioration de l’espérance de vie en bonne santé aux objectifs prioritaires du projet territorial de santé. Il est essentiel pour la nation de systématiser des politiques de prévention à l’échelle territoriale. Il s’agit à la fois de limiter la survenue de pathologies ou d’en réduire le plus possible les conséquences sur la santé et l’autonomie des personnes. En effet, l’espérance de vie sans incapacité, aussi appelée espérance de vie en bonne santé, est moins élevée en moyenne en France que dans de nombreux pays comparables, non seulement les pays scandinaves mais aussi l’Italie et l’Espagne.
M. le président
La parole est à M. Joël Aviragnet, pour soutenir l’amendement no 458.
M. Joël Aviragnet
Il est d’autant plus important de faire figurer la prévention et l’espérance de vie sans incapacité dans le projet territorial de santé que la prévention n’est pas suffisamment prise en compte dans nos politiques de santé.
M. le président
La parole est à M. Sébastien Peytavie, pour soutenir l’amendement no 765.
M. Sébastien Peytavie
Nous n’avons pas rencontré un grand succès lors du débat sur le bien vieillir. Nous devrions pourtant faire de l’espérance de vie en bonne santé notre boussole, modifiant complètement notre rapport à notre environnement, à notre mode de vie, à nos temps de repos et à la prévention. En somme, cette notion vient bouleverser notre rapport à la vie.
Lors de la période du covid, nous avons vu que la société pouvait tout à coup être guidée par autre chose que le travail et l’économie. Même s’il y a d’autres éléments à prendre en compte, l’espérance de vie en bonne santé devient quelque chose d’essentiel – nous avons perçu les conséquences qu’il y aurait à la négliger. C’est le moment de se donner cette boussole, ce cap.
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques ?
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Je suis assez sensible à l’émergence de cette notion d’espérance de vie en bonne santé, définie formellement comme l’espérance de vie sans incapacité. Nos politiques de santé ont longtemps eu comme boussole l’espérance de vie tout court, un concept qui ne suffit plus comme l’ont très bien dit M. Peytavie et d’autres. L’espérance de vie en bonne santé doit devenir un point cardinal de nos objectifs en matière de santé. Je remercie les auteurs et signataires de ces trois amendements auxquels je suis favorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Braun, ministre
Je ne doute pas que tout le monde comprend bien que la santé est prise dans son ensemble au cours de nos débats, ce qui inclut la prévention, le dépistage, le soin et les suites de soins. Toutefois, en tant que ministre de la santé et de la prévention, je ne peux qu’être favorable à ces amendements qui précisent bien le rôle essentiel de la prévention dans notre système de santé actuel et futur.
M. le président
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Le ministre vient de répondre à l’instant, mais j’imaginais mal comment le volet prévention qui, à mon avis, devrait avoir avant tout une déclinaison territoriale, aurait pu recevoir un avis défavorable. Au travers du CTS, on pourra sensibiliser les différents acteurs, notamment de l’éducation nationale car la prévention commence dès le plus jeune âge. Il est bon d’en faire une base de la structuration de l’organisation sociétale. Je vais évidemment voter pour ce bel amendement.
M. le président
La parole est à M. Pierre Dharréville.
M. Pierre Dharréville
Première remarque : nous n’avons pas inclus certains acteurs de la prévention dans le cercle, dans la composition du CTS, ce qui pose un problème.
M. Thibault Bazin
Il a raison !
M. Pierre Dharréville
C’est très bien d’ajouter la prévention dans les missions du CTS, mais encore faudrait-il que les gens concernés au premier chef par ce sujet soient autour de la table.
Deuxième remarque : je ne peux pas m’empêcher de vous dire que l’Assemblée nationale devrait elle-même définir quelques objectifs prioritaires en matière d’espérance de vie en bonne santé. Les dernières décisions prises en la matière – elles ne l’ont pas été ici puisqu’elles nous ont été imposées – ne vont pas dans la bonne direction. (« À quel âge prend-on sa retraite ? » sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
(Les amendements identiques nos 151, 458 et 765 sont adoptés.)
M. le président
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l’amendement no 616.
M. Pierre Dharréville
Cet amendement propose une articulation des projets territoriaux de santé avec les schémas départementaux relatifs aux personnes âgées et aux personnes en situation de handicap.
Nous pensons que le projet territorial de santé doit être un outil de mise en cohérence de l’ensemble des projets des acteurs – projets des établissements de santé et médico-sociaux, des CPTS, des projets médicaux partagés des groupements hospitaliers de territoire (GHT) – et d’organisation des coopérations sur le territoire. Cet amendement vise à étendre cette mise en cohérence aux schémas départementaux médico-sociaux ou schémas personnes âgées et personnes en situation de handicap.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Monsieur Dharréville, vous revenez sur les périmètres en insistant à juste titre sur la nécessaire cohérence des projets. Les acteurs de terrain, représentant différentes institutions, seront en cohérence avec ceux qu’ils soutiennent dans leurs institutions d’origine. Pour en revenir aux périmètres, quand on évoque le schéma départemental, il faudrait quasiment dire que l’on a un projet territorial départemental. Or nous avons déjà estimé qu’aucun périmètre ne doit être privilégié par rapport à un autre. Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Braun, ministre
Nous pouvons tous souhaiter que tous les sujets concernant la santé et le médico-social fassent partie des discussions au sein des CTS. C’est déjà dans le texte puisque, comme nous l’avons vu hier, les CTS reprennent tous les rôles des ARS, en particulier ces missions-là. Il ne semble pas opportun de surcharger le texte en apportant une telle précision. Je demande le retrait de cet amendement. À défaut, j’émettrais un avis défavorable par souci de simplification.
M. le président
La parole est à M. Thibault Bazin.
M. Thibault Bazin
L’amendement de notre collègue Pierre Dharréville est très intéressant, comme l’illustrent les structures liées au vieillissement de la population : les Ehpad et les services d’aide et d’accompagnement à domicile (Saad), qui vont évoluer vers les services d’aide à l’autonomie comme les services de soins infirmiers à domicile (Ssiad) et les services polyvalents d’aide et de soins à domicile (Spasad). On ne peut pas conduire une politique efficiente sans mise en cohérence de l’ensemble des projets et des diagnostics.
D’un côté, le conseil départemental va légitimement voter sur le schéma, puisque les conseillers sont tous élus. De l’autre, nous aurons le CTS et une direction de l’ARS qui va prendre la décision.
Cela pose la question de la cohérence avec les projets spécifiques de tous les autres échelons. Dans le rapport – assez long, mais très intéressant – que vous avez rédigé sur le texte, vous indiquez, monsieur le rapporteur, qu’il existe douze échelons territoriaux compétents en matière de santé et vous recommandez de désigner le territoire de santé comme étant le plus pertinent. Mais les préconisations formulées à cet échelon seront-elles cohérentes avec celles des GHT ou des groupements de coopération sanitaire (GCS), ou encore avec celles qui figurent dans les contrats locaux de santé (CLS) – autant d’acronymes que vous connaissez bien ? Le CTS assumera-t-il une supériorité hiérarchique ? La compatibilité des différentes recommandations sera-t-elle exigée ? J’ai bien compris que, d’après l’article 1er, si l’organisation définie par le conseil territorial de santé ne permet pas de répondre aux besoins, l’ARS pourra prendre des mesures. Sera-t-elle, dans le cadre de cette démocratie sanitaire, tenue de suivre les objectifs prioritaires arrêtés par le CTS ?
(L’amendement no 616 n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de trois amendements, nos 552, 664 et 149, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 552 et 664, qui font l’objet du sous-amendement no 1131, sont identiques.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 552.
M. Thibault Bazin
Depuis le début de la séance, j’ai l’impression que seuls les amendements de M. Clouet sont adoptés. (Sourires.)
M. Hadrien Clouet
C’est le rapport de force ! Je vous montrerai comment s’y prendre !
M. Thibault Bazin
Celui-ci devrait cependant faire exception, dans la mesure où il est identique à celui du rapporteur. Je forme donc le vœu qu’il recueille un avis favorable, car il serait gênant que le rapporteur émette un avis défavorable contre son propre amendement – à moins qu’il ne le retire ! (M. le rapporteur sourit.)
Plus sérieusement, il s’agit, par cet amendement, de prévoir qu’« au moins une fois par an, le directeur général de l’agence régionale de santé présente au conseil territorial de santé ses observations sur l’état de santé de la population du territoire et l’offre de soins disponible sur ce dernier ». Il me semble important d’apporter cette précision, dans la mesure où les CTS dressent parfois des diagnostics valant pour plusieurs années, sans qu’un tel suivi soit assuré. Nous devons, me semble-t-il, avoir le souci de l’évaluation et du suivi si nous voulons être agiles.
Cette remarque renvoie d’ailleurs à une autre question que nous évoquerons peut-être ultérieurement, à savoir la nécessité d’actualiser plus régulièrement les zonages et les différents dispositifs d’accompagnement. Nous irions ainsi dans le bon sens.
M. le président
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 664.
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Il s’agit d’un amendement important. J’émettrai bien entendu un avis favorable sur celui de M. Bazin, dans un souci de cohérence avec moi-même. (Sourires.)
Au-delà, la présentation de cet amendement est pour moi l’occasion de répondre à la question soulevée précédemment par M. Bazin, à laquelle je n’avais pas répondu pour ne pas rallonger les débats : le conseil territorial de santé a vocation à devenir l’instance de gouvernance territoriale des politiques de santé. Toutes les actions susceptibles d’être déclinées à l’échelle territoriale seront pensées et articulées dans le périmètre du CTS. Il est donc important que le directeur de l’ARS…
M. Sylvain Maillard et M. Thierry Benoit
Écoutez le rapporteur, monsieur Bazin !
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Pour une fois que j’émets un avis favorable à votre amendement, vous ne m’écoutez donc pas !
M. Thibault Bazin
Mais si, je vous écoute ! (Protestations et sourires sur les bancs des groupes RE et HOR.)
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Très bien. Je continue donc. Il est important que le directeur général de l’ARS présente une fois par an – ou davantage, chaque instance trouvera ensuite son rythme – l’état de santé de la population du territoire concerné. Ce bilan permettra aussi aux acteurs de mesurer le résultat des efforts fournis et des stratégies collectivement mises en œuvre – nous débattrons de cette question à l’occasion de l’examen d’autres amendements portant sur les indicateurs de suivi. Je suis donc favorable à mon propre amendement, mais surtout à celui de M. Bazin.
M. Thibault Bazin
Vous pourriez retirer le vôtre au profit du mien ! (Sourires.)
M. le président
La parole est à M. Thierry Frappé, pour soutenir le sous-amendement no 1131.
M. Thierry Frappé
J’espère obtenir un avis identique à celui que vous avez donné à M. Bazin, puisque le sous-amendement vise à compléter son amendement en prévoyant que le rapport annuel du directeur général de l’ARS sera présenté non seulement au conseil territorial de santé, mais aussi au conseil départemental de l’ordre compétent, qui pourra ainsi l’incorporer à ses données et disposer d’une analyse parfaite de l’ensemble des parties prenantes à l’échelle du territoire de santé.
M. le président
Sur l’amendement no 233, je suis saisi par le groupe Renaissance d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
M. Sylvain Maillard
Très bien !
M. le président
La parole est à M. Freddy Sertin, pour soutenir l’amendement no 149.
M. Freddy Sertin
Comme l’ont précisé mes collègues, il est important de prendre périodiquement la photographie sanitaire d’un territoire et de la partager avec l’ensemble des membres du CTS.
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement et sur l’amendement no 149 ?
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
L’amendement défendu par M. Sertin est très proche, dans l’esprit, des amendements nos 552 et 664. Pour des raisons de rédaction juridique, je vous demande de le retirer, au profit des amendements présentés par M. Bazin et moi-même. Je suis en outre défavorable au sous-amendement no 1131 de M. Frappé.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Braun, ministre
Il est favorable aux amendements, et défavorable au sous-amendement.
(Le sous-amendement no 1131 n’est pas adopté.)
(Les amendements identiques nos 552 et 664 sont adoptés ; en conséquence, l’amendement no 149 tombe.)
M. le président
La parole est à M. Christophe Marion, pour soutenir l’amendement no 233.
M. Christophe Marion
Déposé par mon collègue François Cormier-Bouligeon, il vise à intégrer dans le projet territorial de santé la notion de zone de conventionnement des médecins. Ces zones géographiques seraient déterminées en fonction des besoins médicaux des territoires, identifiés grâce au diagnostic territorial partagé mentionné à l’article L. 1434-10 du code de la santé publique.
Dans les zones considérées comme sous-dotées en médecins par le projet territorial de santé, les consultations seraient majorées pour les médecins et intégralement remboursées pour les patients. À l’inverse, dans les zones suffisamment dotées, les médecins ne pourraient s’installer qu’en s’inscrivant en secteur 3. Cette modulation du niveau de conventionnement en fonction de la densité médicale des territoires pourrait inciter les médecins à s’installer dans les bassins de vie en tension.
Je remercie les collègues qui rejoignent l’hémicycle pour débattre de cet amendement.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Par cet amendement, vous mettez le doigt – ou le pied, si vous préférez – sur le principe de conventionnement sélectif. J’estime que le débat ne doit pas être abordé par ce biais. Il me semble, surtout, que ce n’est pas à l’échelle des CTS qu’il convient de poser la question de l’organisation des zones dans lesquelles un conventionnement sélectif pourrait être instauré : une telle hypothèse renvoie, au moins à court terme, à une conception du système de santé qui n’est pas la mienne. Avis très défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Braun, ministre
Les réflexions sur les zonages, le conventionnement, la régulation, ou encore l’incitation à l’installation des médecins sont essentielles et méritent bien entendu d’être abordées. Toutefois, les dispositions dont il est question et l’article du code de la santé publique auquel vous proposez de les intégrer ne sont absolument pas adaptés. Par ailleurs, vous indiquez que les médecins désireux de s’installer dans une zone surdense ne pourront le faire qu’en exerçant hors convention. J’y vois une porte ouverte à l’avènement d’un système de santé à deux vitesses, absolument incompatible avec les valeurs de solidarité et d’égal accès aux soins. Avis défavorable.
M. le président
La parole est à M. Thierry Benoit.
M. Thierry Benoit
Nous en arrivons au premier amendement relatif aux dispositifs de modulation, de régulation ou de conventionnement sélectif. Personnellement, je le voterai, parce que nous nous bornons depuis trop longtemps, dans cet hémicycle, à prendre des mesures dites incitatives pour convaincre les médecins de s’installer partout sur le territoire. Le constat est clair : ces mesures sont insuffisantes. Il faut donc désormais s’employer à instaurer, en plus des mesures incitatives qui peuvent être renforcées et améliorées, des mesures dites de régulation.
M. Fabrice Brun
Il a raison !
M. Thierry Benoit
L’amendement no 233 de notre collègue François Cormier-Bouligeon vise à restreindre l’installation des médecins conventionnés aux zones où le besoin s’en fait sentir. De nos jours, tous les métiers sont soumis à une régulation ou à une autorisation.
C’est cette question qui mobilisera de nombreux députés dans les jours à venir. Pour le reste – l’organisation, les conférences territoriales de santé –, le texte se maintient sur la trajectoire historique que nous suivons déjà : il s’agit d’encourager les acteurs à échanger et à partager les projets. La régulation et le conventionnement sélectif, voilà ce qui fera débat ici, à l’Assemblée nationale. Il est temps que les députés se mobilisent sur la question de la régulation des installations. (Mme Cécile Untermaier, MM. Yannick Favennec-Bécot et Fabrice Brun applaudissent.)
M. le président
Au vu du grand nombre de demandes de prise de parole, je laisserai quatre orateurs s’exprimer sur cet amendement.
La parole est à M. Nicolas Sansu.
M. Nicolas Sansu
Cet amendement est évidemment très séduisant, en ce qu’il introduit la notion de conventionnement sélectif, qui constitue une forme de régulation – une régulation un peu stricte, certes, mais une régulation tout de même. Il y a cependant un petit hic : l’amendement emporte le risque de créer une médecine à deux vitesses, certaines zones étant appelées à être dépourvues de conventionnement.
M. Didier Martin
Eh oui !
M. Nicolas Sansu
Toutefois, ne nous faisons pas d’illusions : cette situation existe déjà.
M. François Cormier-Bouligeon
Exactement !
M. Nicolas Sansu
Pour obtenir un rendez-vous avec un ophtalmologue dans le Cher, il faut attendre huit à dix mois, tandis qu’en allant à Paris et en déboursant 90 euros ou 120 euros, huit à dix jours suffisent. Voilà la réalité ! J’estime, pour ma part, qu’il est bon de soulever le problème.
Surtout, j’invite mes collègues, si d’aventure cet amendement n’était pas adopté, à voter en faveur de l’amendement no 1, qui prévoit un dispositif beaucoup moins strict, mais de nature à faire un pas vers la régulation : il ne s’agit pas d’interdire l’installation de médecins conventionnés dans les zones dites surdotées, mais de la conditionner au remplacement d’un médecin partant en retraite ou quittant le territoire. Il me semble que cet amendement, qui sera examiné ultérieurement, est susceptible de rassembler tout le monde. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)
M. le président
La parole est à M. Yannick Neuder.
M. Yannick Neuder
On touche ici du doigt le fondement de la proposition de loi Valletoux, dont l’article 1er consiste, globalement, à ajouter une surcharge administrative que personne – ni les patients, ni les professionnels de santé – ne souhaite, et surtout à faire le lit d’une coercition déguisée. Ouvrir la voie vers une telle évolution à travers un amendement de déconventionnement reviendrait à instaurer une médecine à deux vitesses : les patients suffisamment aisés pour payer des médecins déconventionnés continueront de les consulter, sans que cela ne règle aucunement les problèmes causés par la démographie médicale et surtout par sa répartition.
Aux collègues qui estiment que les mesures incitatives prises depuis des années n’ont produit aucun effet, je rappelle simplement que le monde a changé, que les générations de médecins ont évolué, que le rapport au travail n’est plus le même et que la crise sanitaire est passée par là. Je crains qu’en adoptant une telle disposition, nous prenions surtout le risque d’inciter les médecins à retirer leur plaque, à se déconventionner, et à se détourner de la pratique libérale. Soyons raisonnables : ce n’est pas par la coercition que nous parviendrons à résoudre les problèmes. (MM. Jean Terlier, Philippe Juvin et Éric Pauget applaudissent.)
M. le président
Sur l’amendement no 984, je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouvelle Union populaire, écologique et sociale d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Jean-François Rousset.
M. Jean-François Rousset
Nous y voilà : nous abordons les propositions de coercition et d’obligation en matière d’installation. Vous êtes dans la défiance, alors que nous sommes dans la confiance. (« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq
Exactement !
M. Jean-François Rousset
Notre point de vue est clair. Depuis 2017, le Président de la République l’a dit, Aurore Bergé l’a confirmé et nous le répétons à tout bout de champ : nous voulons créer les conditions d’un bel exercice de la médecine et donner aux praticiens l’envie de s’installer.
M. Sylvain Maillard
Il a raison !
M. Jean-François Rousset
Nous faisons confiance aux acteurs pour se mettre autour de la table.
M. Fabrice Brun
Voilà six ans qu’on attend !
M. Jean-François Rousset
Les soignants exerçant en CPTS que j’ai rencontrés la semaine dernière dans l’Hérault soignaient 70 000 personnes. Les professionnels qui y travaillent souhaitent s’y réunir pour évoquer la prévention, l’organisation, la prise en charge des gardes – bref, pour s’organiser collectivement. Voilà ce que nous devons développer.
Je tiens d’ailleurs à rappeler l’argument que nous partageons avec la Drees : toutes les mesures de régulation seront contre-productives. Le gain permis par la disparition du numerus clausus que nous avons votée en 2018…
M. Fabrice Brun
Il a été remplacé par le numerus apertus, qui ne permettra jamais qu’une augmentation de 20 % du nombre de médecins !
M. Jean-François Rousset
…devra être fléché vers les territoires qui en ont besoin. Si nous prenons des mesures coercitives – et chacun doit voter en conscience –, nous risquons de détourner les futurs jeunes médecins des carrières offertes par la médecine générale : ils seront embauchés par des entreprises du numérique ou par des laboratoires. Ils partiront à l’étranger, où la formation dont ils bénéficient est très appréciée.
M. Fabrice Brun
Ne changeons rien, tout va bien !
M. Jean-François Rousset
Soyons raisonnables et vigilants si nous ne voulons pas devoir assumer, dans vingt ans, les conséquences d’un vote comparable à celui qui, en 1970, nous a conduits à la pénurie de médecins que nous déplorons actuellement.
Mme Charlotte Parmentier-Lecocq
Exactement !
M. Jérôme Nury
Merci, les médecins !
M. Jean-François Rousset
Notre message est clair : nous sommes contre toutes les formes de coercition ou d’obligation à l’installation. (Applaudissements sur de nombreux bancs du groupe RE.)
M. le président
La parole est à M. le ministre.
M. François Braun, ministre
Nous y voilà ! Certes un peu plus tôt que prévu : je pensais que nous aurions cette discussion plus tard, à l’occasion de l’examen d’autres amendements, et non à propos de ce couperet que représente le conventionnement sélectif.
De qui parle-t-on ? De 3 600 médecins généralistes qui finissent leurs études chaque année. Ils ne choisissent pas ce métier par hasard mais parce qu’ils en ont la vocation ; parce qu’ils ont une volonté, en particulier celle d’exercer la médecine sous la forme libérale. En effet, à moins de tout chambouler immédiatement et de prévoir que désormais les médecins ne seraient que salariés, le système de santé marche sur ses deux jambes que sont la médecine libérale et le service public hospitalier.
Nous parlons également de 48 % des médecins inscrits au Conseil national de l’Ordre qui ont plus de 60 ans. Vous pouvez estimer que c’est de peu d’importance mais vous allez voir que ce point est au contraire essentiel dans mon argumentation.
Vous voulez aller vers la contrainte.
M. Jérôme Nury
Ce que nous voulons, c’est la régulation !
M. François Braun, ministre
Pendant la crise du covid, je ne sais pas si vous vous en souvenez, mais nous avons au contraire fait confiance aux professionnels des territoires, et ça a marché. Leur imposer aujourd’hui la contrainte, ce serait nier tout ce qu’ils ont fait pendant la crise sanitaire : ils se sont alors donnés corps et âme à leurs patients ; ils ont monté des centres de vaccination ; ils ont vacciné très largement. Ce serait un message particulier que de leur dire : « Merci pour ce que vous avez fait mais désormais nous n’avons plus confiance et nous allons vous imposer des mesures contraignantes. »
On dit beaucoup de choses sur les médecins et je vais profiter de l’occasion qui m’est offerte pour rétablir des vérités.
Ainsi, on les accuse d’être corporatistes. Ce n’est pas le cas : ils sont seulement attachés à bien faire leur métier à l’échelle des territoires, à savoir prendre en charge correctement les patients. Et, croyez-moi, je connais bien ce milieu, je me suis beaucoup déplacé pour rencontrer les médecins libéraux, eh bien, ils sont les premiers à souffrir quand ils exercent dans un désert médical sans pouvoir prendre de nouveaux patients. Ils ne sont pas ces affreux professionnels qui ne veulent plus rien faire ; ce sont des gens engagés qui veulent bien faire, qui veulent mieux faire. On constate d’ailleurs que, dans les endroits où tout va bien, ils s’organisent entre eux et avec d’autres professionnels.
Je m’élèverai également contre un autre mensonge. J’ai entendu en effet qu’on leur payait leurs études et qu’ils n’avaient qu’à le rendre à la société.
M. Thierry Benoit
Qui a dit ça ?
M. François Braun, ministre
Mais de quoi parle-t-on ? Voulez-vous que, demain, toutes les études universitaires soient payantes, comme aux États-Unis ? Voulez-vous que plus aucun jeune ne puisse y accéder quand il n’est pas issu des populations les plus aisées ? Savez-vous qu’un étudiant médecin, quand il travaille, à partir de la quatrième année, le fait à l’hôpital et cela pour 250 euros par mois, à raison de vingt à trente heures par semaine ?
Mme Danielle Brulebois
Eh oui !
Plusieurs députés du groupe LFI-NUPES
Et vous trouvez ça normal !
M. François Braun, ministre
Ensuite, lorsqu’il est interne, il vient aussi travailler à l’hôpital, au maximum pour 500 euros par semaine pour quarante heures en moyenne. (Mme Sophia Chikirou et M. Christophe Naegelen s’exclament.) Si vous examinez les chiffres, que je tiens à votre disposition, l’État ne perd pas d’argent quand il forme ses médecins, il en économise au contraire puisque, par la suite, des médecins travaillent au sein de l’hôpital public – et vous savez tous qu’ils sont essentiels.
J’ai par ailleurs entendu des comparaisons internationales : la situation de l’autre côté de la frontière serait extraordinaire, les médecins pourraient faire plein de choses. Je vous invite à lire le rapport de la Drees de décembre 2021 car il est, en la matière, édifiant. Les comparaisons internationales sont régionales, ce qui ne change rien à l’existence de déserts médicaux à l’échelon infrarégional. Autrement dit, ces données ne nous apportent rien. Au cours de la discussion générale, j’ai entendu parler de l’Allemagne dont nous devrions imiter le modèle. Savez-vous comment il fonctionne ? Il prévoit un médecin pour 1 627 patients. Au-delà, on considère que le territoire est sous-doté.
Appliquons donc ce système à la France : deux départements seulement seront sous-dotés – Mayotte et Wallis-et-Futuna. Tous les autres seront considérés comme surdotés. Selon le modèle allemand, on est en effet sous-doté en dessous de 60 médecins pour 100 000 habitants. Or même en Mayenne, monsieur Garot, le ratio est de 90 médecins pour 100 000 habitants.
M. Jérôme Nury
C’est faux ! On en est à 50 médecins pour 100 000 habitants, revoyez vos fiches !
M. François Braun, ministre
Appliquer le modèle allemand signifie qu’on vous prendra des médecins pour les mettre ailleurs. Méfions-nous donc de vouloir mettre en œuvre en France un modèle étranger.
Et que se passera-t-il si l’on impose ces contraintes, qu’on les nomme conventionnement sélectif ou autrement ? Explosera tout d’abord un conflit social majeur avec les médecins. On peut estimer que ce n’est pas grave, mais je ne vois pas comment appliquer une réforme du système de santé sans les médecins – ce sera très compliqué. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)
Mme Ségolène Amiot
Ça ne vous dérange pas quand il s’agit de faire travailler les salariés plus longtemps !
M. le président
Seul le ministre à la parole.
M. François Braun, ministre
Que se passera-t-il ensuite ? Vous allez pousser ces 3 600 jeunes professionnels à ne plus choisir la médecine générale. Ils vont choisir une autre spécialité voire un secteur quelque peu parallèle comme la médecine esthétique.
Mme Sophia Chikirou
Mais c’est déjà le cas !
M. François Braun, ministre
Ils ne vont plus choisir leur spécialité par passion, pour aller dans les territoires s’occuper des patients, mais seulement en fonction du territoire où ils voudront s’installer. Aussi aboutirons-nous, avec le type de procédure que vous appelez de vos vœux, à une diminution de l’offre de soins globale alors que vous voulez exactement l’inverse.
Savez-vous, par ailleurs, que, parmi les 3 600 médecins formés chaque année, seuls 11 % s’installent ?
M. Sylvain Maillard
Eh oui ! C’est ça, les chiffres : 11 % !
M. François Braun, ministre
Les autres n’y sont pas prêts et c’est bien pourquoi nous avons voté que les futurs médecins généralistes effectueraient une quatrième année d’internat. Sinon, si on vous suit, demain ils ne seront plus 11 % mais 0 % à vouloir s’installer à l’issue de leurs études et ils iront faire des remplacements, entre autres choses. (Brouhaha. – Exclamations sur divers bancs.)
Que se passera-t-il encore ?
Mme Sophia Chikirou
Parlons déjà de ce qui se passe maintenant !
M. François Braun, ministre
Les médecins exerceront différemment et choisiront le déconventionnement. Ce sera parfait, nous aurons ainsi une médecine à deux vitesses. Est-ce ce que vous voulez : que tous les médecins se déconventionnent ? (Mme Sophia Chikirou s’exclame vivement.)
M. le président
Madame Chikirou, s’il vous plaît, laissez le ministre d’exprimer.
M. François Braun, ministre
Peut-être voulez-vous également que tous les médecins se salarient. Ils iront dès lors dans les laboratoires et Philippe Vigier sera ravi, mais cela ne réglera pas le problème des déserts médicaux.
M. Sylvain Maillard
Le ministre a raison !
M. François Braun, ministre
En outre, quel message enverrions-nous aux presque 50 % de médecins de plus de 60 ans ? Car mon objectif est qu’ils restent sur le terrain : nous aurons besoin d’eux dans les années à venir, avant de bénéficier des fruits de la suppression du numerus clausus. Si nous leur adressons le message qu’implique cet amendement, ils vont enlever leur plaque et partir à la retraite.
M. Fabrice Brun
C’est faux !
M. François Braun, ministre
Là où vous croyez envoyer un médecin dans un territoire grâce à votre proposition, vous en perdrez deux. C’est une catastrophe annoncée pour notre système de santé. Vous êtes prêts à faire la même erreur qu’avec l’instauration du numerus clausus, que nous payons quarante ans plus tard.
Les solutions sont connues et nous en avons déjà discuté : il ne s’agit pas d’avoir recours à la contrainte. Il faut améliorer les conditions de travail – c’est ce qu’on préconise dans tous les pays –, permettre aux médecins de travailler de façon collaborative avec d’autres professionnels de santé.
M. Jérôme Nury
C’est du pipeau, ça ne fonctionne pas !
M. François Braun, ministre
Il faut partager les compétences, développer les maisons de santé pluriprofessionnelles (MSP). Déjà, pour réduire la complexité des aides, nous avons instauré le guichet unique grâce à la loi portant amélioration de l’accès aux soins par la confiance aux professionnels de santé, la loi Rist.
M. Sylvain Maillard
L’excellente loi Rist !
M. François Braun, ministre
Nous avons donc mis en place des solutions qui fonctionnent. Allez donc voir là où elles marchent et non là où elles n’ont pas encore été appliquées.
En conclusion, même si, j’espère, nous aurons l’occasion d’en reparler, je dirai que ce conventionnement sélectif, cette contrainte à l’installation que vous appelez de vos vœux, elle existe déjà et elle ne fonctionne pas. Elle existe dans le service public hospitalier. Croyez-vous qu’un médecin hospitalier s’installe où il veut ? Non, il s’installe où il y a de la place. (M. Cyrille Isaac-Sibille applaudit.) Il est donc contraint, dans son installation.
M. Pierre Dharréville
Vu le nombre de postes vacants à l’hôpital, ils ont pourtant le choix !
M. François Braun, ministre
Aussi, si ce système de contrainte fonctionne, monsieur Vigier, monsieur Garot, j’imagine qu’il n’y a aucun problème dans vos hôpitaux ! Je suis sûr qu’aucun poste n’est vacant… Eh bien, non, il ne fonctionne pas et il détruit même l’offre de soins. Ce que vous allez faire, avec le conventionnement sélectif, en poussant les médecins à faire ce qu’ils ne veulent pas, c’est détériorer de façon définitive l’offre de soins. (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes RE, LR et Dem.)
M. Cyrille Isaac-Sibille
Bravo !
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 233.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 173
Nombre de suffrages exprimés 140
Majorité absolue 71
Pour l’adoption 13
Contre 127
(L’amendement no 233 n’est pas adopté.)
(Mme Danielle Brulebois et M. Cyrille Isaac-Sibille applaudissent.)
M. le président
La parole est à M. Thierry Benoit, pour soutenir l’amendement no 984.
M. Thierry Benoit
Cet amendement de notre ami Jérémie Patrier-Leitus propose que le fameux diagnostic territorial partagé (DTP) – j’ignore si c’est ce qui va soigner les gens… – ne soit pas réservé aux seuls territoires sous-dotés selon le zonage ARS, et qu’on prenne en compte l’ensemble des territoires caractérisés par une sous-densité manifeste. Le DTP est censé établir l’état des lieux dans les domaines sanitaire, social et médico-social. Or chacun sait que les zonages ARS datent quelque peu et quand le DTP sera élaboré, certains territoires dont la situation aura évolué et où l’offre sera devenue faible pourront être pris en compte grâce à notre amendement.
Je me répète, mais est-ce cela qui soignera les gens ? J’y insiste parce que, franchement, la préoccupation de nos concitoyens est l’accès aux soins. Or, avec tout ce que nous avons inventé depuis quarante ans, l’Inspection générale des affaires sociales (Igas), les ARS, les CTS, les contrats locaux de santé, si nous ne connaissons pas l’état sanitaire du pays, les bras m’en tombent. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe HOR.)
M. Philippe Vigier
Excellent amendement !
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
L’amendement répète ce qui se trouve déjà dans le texte en réaffirmant que la priorité consistant à s’appuyer sur la créativité des acteurs de terrain, leur capacité à adapter au plus près une offre de soins, concerne évidemment ceux qui ont le plus de mal à accéder aux soins, concerne les territoires les moins dotés. Or cette ambition est définie par l’article 1er. Cet amendement étant satisfait, j’en propose le retrait, faute de quoi j’émettrai un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Braun, ministre
Même avis : je demande qu’il soit retiré puisqu’il est satisfait, sinon j’y serai défavorable.
M. Bruno Millienne
Il n’est pas satisfait !
M. le président
La parole est à M. Philippe Vigier.
M. Philippe Vigier
Monsieur le rapporteur, vous venez de parler d’ambition ; eh bien, précisément, il faut l’afficher. Émettre un diagnostic territorial partagé signifie que sont mobilisés à cette fin tous les acteurs d’un territoire et les CTS. En outre, grâce à l’index que vous proposera notre groupe transpartisan, on pourra, pour chacune des professions majeures de santé, connaître les besoins dans le détail et établir une projection pour les années suivantes. Affichons d’autant plus cette ambition que – et Thierry Benoit a raison –, à seulement 3 kilomètres de distance, deux communes peuvent être l’une en zone sous-dense et l’autre en zone normale, c’est une vérité que nous avons tous pu vérifier. Les zonages ARS ne correspondent à rien.
Avec ce que nous proposons, nous nous donnerions les moyens d’obtenir une répartition homogène – et, excusez-moi, mais un DTP ne peut être différent pour deux communes distantes, je le répète, de 3 kilomètres. J’aurais des exemples de ce genre à vous donner dans mon propre territoire, en Eure-et-Loir.
Il serait donc vraiment important, monsieur le rapporteur, j’y insiste, d’afficher une telle ambition, afin que les DTP servent de feuille de route pour tous les acteurs.
M. Bruno Millienne
Très bien !
M. le président
La parole est à M. Yannick Neuder.
M. Yannick Neuder
Attention, monsieur Vigier, la densité peut être faussement indicative : pour deux communes distantes de 3 kilomètres, il suffit que soit installé dans l’une des deux un siège de SOS Médecins où se trouvent une quarantaine de médecins, si chacun consulte sans rendez-vous, vos chiffres seront complètement différents.
Nous ferions mieux de réfléchir à la manière de caractériser l’exercice professionnel des médecins présents dans les territoires, car les praticiens de SOS Médecins ou ceux qui consultent sans rendez-vous n’accomplissent pas le même travail que les médecins traitants qui assurent le suivi de patients atteints de maladies chroniques. Soyons donc prudents avec les localisations, car il est possible de faire dire ce qu’on veut aux index : ce n’est pas le Graal !
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 984.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 177
Nombre de suffrages exprimés 175
Majorité absolue 88
Pour l’adoption 92
Contre 83
(L’amendement no 984 est adopté.)
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, Écolo-NUPES et GDR-NUPES.)
M. le président
L’amendement no 550 de M. le rapporteur est de coordination.
(L’amendement no 550, accepté par le Gouvernement, est adopté.)
M. le président
La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 124.
M. Philippe Juvin
Il vise à supprimer partiellement l’article 1er. Quelles que soient les grandes qualités personnelles de l’auteur du texte, je continue de ne pas comprendre pourquoi nous appliquerions à la médecine libérale un millefeuille administratif ressemblant à l’organisation de l’hôpital. Laissez les médecins travailler et cessez de les occuper dans des réunions et autres machins qui ne résoudront pas la question de l’accès aux soins !
Plutôt que de demander aux médecins de participer à des réunions qui ne régleront rien, libérez-leur du temps, donnez-leur la possibilité de s’organiser eux-mêmes, et vous récupérerez du temps médical précieux ! Encore une fois, l’hypercontrôle administratif et une organisation inspirée de l’hôpital ne doivent pas s’appliquer à la médecine de ville : les choses ne peuvent fonctionner de cette manière.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Depuis le début de nos débats, notre collègue Juvin persiste à penser que nous cherchons à créer des bataillons de fonctionnaires, des étages administratifs, bref de la norme administrative et du temps perdu pour tout le monde, alors que nous essayons simplement de faire en sorte que les gens se parlent.
M. Fabrice Brun
La réunionite !
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Je connais l’attachement de votre famille politique à l’initiative collective au plus près du terrain et à la décentralisation, monsieur Juvin, tout comme je sais la confiance que vous accordez aux acteurs de terrain, mais si nous n’organisons pas le dialogue entre les uns et les autres, chacun continuera de travailler comme il le fait depuis quarante ans, c’est-à-dire de manière très cloisonnée. Le public parlera au public, le privé au privé, les infirmières aux infirmières, les médecins aux médecins. Les choses s’amélioreront peut-être comme par magie et nous pouvons effectivement continuer de la sorte, en mettant la tête dans le sable, en estimant que le dialogue ne sert à rien et que l’ambition de porter des projets en commun pour une meilleure prise en charge de nos concitoyens est vaine. (M. Philippe Juvin proteste.)
Ce n’est pas ma conception des choses. C’est pourquoi nous souhaitons établir des lieux où le dialogue sera possible, où s’élaboreront des projets collectifs en matière de santé, lesquels permettront justement le décloisonnement progressif – car les gens devront apprendre à se parler et à partager des ambitions – des fonctions des uns et des autres.
Je l’ai dit de nombreuses fois, mais suis prêt à le répéter à l’infini, le CTS n’est pas une administration supplémentaire : il existe depuis plusieurs années. Nous cherchons à lui donner de la cohérence et des missions concrètes de sorte qu’il soit utile à la prise en charge de nos concitoyens.
À l’instar d’autres amendements déjà examinés, celui-ci tend à supprimer les missions et les leviers d’action du directeur général de l’ARS dans le cas où ce dernier constaterait que la communauté des parties prenantes n’aboutit à rien et que le dialogue que nous souhaitons favoriser ne débouche sur aucun projet. Il convient pourtant de prévoir des leviers d’action dans les territoires pour faire face à cette éventualité, ceux-ci étant placés entre les mains de l’administration, en l’espèce du directeur général de l’ARS.
Adopter votre amendement reviendrait donc à dénaturer sa capacité d’action et à dévitaliser la proposition de loi.
M. Philippe Juvin
C’est effectivement le but de l’amendement.
M. Fabrice Brun
Revitalisons la bureaucratie !
M. Frédéric Valletoux, rapporteur
Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du Gouvernement ?
M. François Braun, ministre
J’ai du mal à comprendre votre argumentaire, monsieur Juvin. Vous dites ne pas vouloir que les médecins se réunissent avec les autres professionnels de santé à l’échelle de leur territoire en vue de proposer une solution à la question de l’accès aux soins. Or je présume qu’en tant que chef de service, vous tenez des réunions pluriprofessionnelles, notamment avec les infirmières, afin précisément de définir la politique relative à votre territoire, c’est-à-dire votre service, et de réfléchir aux moyens de mieux répondre aux besoins des patients. Je présume également qu’en bout de chaîne, un arbitre prend les décisions – probablement vous-même, en votre qualité de chef de service. C’est exactement le même modèle qui est ici proposé, dans le but de mieux répondre aux besoins de la population. L’avis est évidemment défavorable.
M. le président
La parole est à M. Lionel Tivoli.
M. Lionel Tivoli
Par cet amendement, nos collègues cherchent à s’opposer à la brutalité de cette proposition de loi. Faute d’avoir obtenu un consensus chez les professionnels de santé, vous essayez en effet de faire passer par la fenêtre ce qui n’est pas passé par la grande porte.
Les médecins vous demandent moins de strates administratives : vous leur en imposez de nouvelles. Les médecins réclament plus d’autonomie : vous donnez davantage de pouvoir aux agences régionales de santé. Les médecins vous demandent davantage de soutien : vous les délaissez. Cet article est irresponsable et va à l’encontre du bon sens. C’est à se demander si vous vous préoccupez réellement du sort de cette profession et, partant, de la santé des Français.
Si cet article est adopté, nous risquons de voir des médecins stopper définitivement leur activité, ou aller l’exercer dans un autre pays européen. Nous voterons donc cet amendement visant à réduire les strates administratives. Pour illustrer mon propos, je tiens à vous lire, parmi tous ceux que j’ai reçus, le message qu’un médecin m’a envoyé : « Actuellement gynécologue médical, je m’interroge sur mon avenir professionnel. Il y a un an, je n’aurais jamais envisagé le déconventionnement ou un changement de profession. J’aime mon métier, mais je fermerai mon cabinet et changerai de métier si les mesures conventionnelles et les lois continuent dans cette direction. » (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Philippe Juvin applaudit également.)
M. le président
La parole est à M. Philippe Juvin.
M. Philippe Juvin
Sachez que je vous aime beaucoup, monsieur le ministre, car en cherchant à contester le bien-fondé de mon amendement, vous l’avez en réalité justifié. En effet, ce que je reproche à cette proposition de loi de M. Valletoux, c’est justement de vouloir appliquer l’organisation hospitalière très administrative à la médecine de ville.
M. Cyrille Isaac-Sibille
C’est son ADN !
M. Philippe Juvin
M. Valletoux me répond que ce n’est pas le cas : c’est son droit, il défend son texte. Quant à vous, monsieur le ministre, vous me dites qu’en tant que chef de service, je sais comment les choses se passent et que les réunions sont indispensables. Vous reconnaissez donc que vous souhaitez bel et bien appliquer l’organisation hospitalière à la médecine de ville.
Or oui, en tant que chef de service, qualité que vous avez aimablement répétée, je sais le temps que nous perdons en réunions, au détriment de celui que nous accordons aux patients.
M. Jean-Paul Lecoq
Le rapporteur n’est pas chef de service : les députés ne peuvent pas être partout !
M. Philippe Juvin
Voilà ce qu’il faut éviter pour la médecine de ville. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR, RN et HOR. – Mme Emmanuelle Ménard applaudit également.)
M. Jérôme Nury
La réunionite aiguë !
M. le président
La parole est à M. le ministre.
M. François Braun, ministre
Monsieur le député, cher confrère, ne me faites pas dire ce que je n’ai pas dit. En aucune manière je ne souhaite rapprocher le fonctionnement de l’hôpital et le fonctionnement de la médecine libérale. J’ai simplement dit que dans toute organisation qui dispense des soins, qui s’occupe de santé, il était bon de se parler entre professionnels, afin de construire ensemble un projet. Voilà tout ce que j’ai voulu dire, et vous le savez bien.
(L’amendement no 124 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l’amendement no 640.
M. Cyrille Isaac-Sibille
Il vise à rendre opérationnel le conseil territorial de santé. En effet, comme nous en avons déjà discuté, je crains qu’il ne s’agisse d’une grand-messe, au cours de laquelle il sera difficile de prendre des décisions. Il convient donc de missionner certaines personnes pour élaborer la stratégie, laquelle serait ensuite validée par le CTS dans sa globalité et confrontée à l’avis de l’ARS.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Frédéric Valletoux, rapporteur