XVIe législature
Session ordinaire de 2023-2024

Deuxième séance du jeudi 06 juin 2024

Sommaire détaillé
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Deuxième séance du jeudi 06 juin 2024

Présidence de M. Sébastien Chenu
vice-président

M. le président

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à quinze heures.)

    1. Accompagnement des malades et de la fin de vie

    Suite de la discussion d’un projet de loi

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie (nos 2462, 2634).

    Discussion des articles (suite)

    M. le président

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    Ce matin, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi et commencé d’entendre les orateurs inscrits sur l’article 6.

    Article 6 (suite)

    M. le président

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    La parole est à Mme Anne-Laurence Petel.

    Mme Anne-Laurence Petel

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    L’article 6 est essentiel car il fixe les conditions d’accès à l’aide à mourir. Pour bénéficier de ce droit, qui, rappelons-le, remet le patient au centre de la décision et respecte sa volonté, une personne doit répondre à cinq critères cumulatifs. En commission spéciale, nous avons modifié le troisième critère – être atteint d’une affection grave et incurable – en remplaçant les mots « engageant son pronostic vital à court ou moyen terme » par les mots « en phase avancée ou terminale ». Il n’existe pas, en effet, de définition juridique de la notion de moyen terme et la Haute Autorité de santé (HAS) n’en donnera pas avant le deuxième trimestre 2025. Parce que cette mention ferait courir un risque pénal aux médecins concernés, nous devons conserver la rédaction adoptée par la commission spéciale. D’ailleurs, la terminologie « en phase avancée ou terminale » existe déjà : elle est clairement inscrite dans le code de la santé publique et même utilisée par le ministère de la santé pour définir la fin de vie.
    Les mots « affection grave et incurable en phase avancée ou terminale » ne sont nullement ambigus. Les digues n’ont pas sauté, comme l’affirment certains. Au mieux les portes du droit se sont-elles entrouvertes pour des affections comme la maladie de Charcot, ce qui est heureux, car aucun d’entre nous n’imaginerait légiférer sur l’aide à mourir en oubliant ceux qui la réclament ! Le projet de loi redonne la parole aux malades. (Mme Annie Genevard s’exclame.)
    Il est également primordial, s’agissant du quatrième critère, de considérer la souffrance psychologique à la même hauteur que la souffrance physique, comme le fait le Conseil d’État. La souffrance psychologique est une souffrance à part entière ; nous ne saurions hiérarchiser les souffrances et rendre certaines plus légitimes. Comme d’autres collègues, je proposerai donc de rétablir la version initiale du texte, qui prenait en considération la « souffrance physique ou psychologique » et nous paraissait donc plus humaine. Les malades soulagés par des traitements adaptés, mais qui affrontent une détresse psychologique insupportable, pourraient ainsi bénéficier du droit à l’aide à mourir.
    Le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie est un texte humaniste, qui offrira aux malades qui le souhaitent l’ultime liberté de reprendre en main le cours de leur vie, en fixant eux-mêmes les limites de leurs souffrances, en décidant eux-mêmes du moment de leur mort et du rituel qui l’accompagnera. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – M. Emmanuel Fernandes et Mme Danielle Simonnet applaudissent également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Thomas Ménagé.

    M. Thomas Ménagé

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    Nous entamons l’examen de l’un des articles les plus importants du projet de loi, puisqu’il définit qui aura droit ou non à l’aide active à mourir. Je le rappelle : je suis favorable, à titre personnel, comme une partie des députés du Rassemblement national, à l’ouverture du droit au suicide assisté. Quand on sait que la mort est proche et que la douleur est devenue si insupportable qu’elle ôte tout intérêt à la vie, on a le droit de demander, souverainement, après y avoir mûrement réfléchi et donné son consentement libre et éclairé, à en finir, à éteindre la lumière, entourés de ceux qu’on aime.
    Aujourd’hui, nous allons aussi réparer l’inégalité qui existe entre ceux qui ont les moyens de se rendre à l’étranger pour accéder à l’aide à mourir en échange de milliers d’euros et ceux qui, en raison de leur situation sociale, ne peuvent pas se le permettre.

    M. Christophe Bentz

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    Eh oui !

    M. Thomas Ménagé

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    Si je suis favorable à l’aide à mourir, ce n’est cependant pas dans n’importe quelles conditions. Sur ce sujet, je reste humble et j’ai encore des doutes. En tant que législateurs, nous avons la responsabilité d’être vigilants afin de calibrer le mieux possible le dispositif que nous créons. Nos compatriotes semblent majoritairement favorables à des évolutions, mais ils rejettent toutes les dérives qui pourraient en découler. Je pense aux Pays-Bas et au professeur Théo Bauer, fervent défenseur du suicide assisté et de l’euthanasie, qui a admis récemment que son pays était allé trop loin. Je pense aussi à la Belgique, où l’on peut demander à mourir au motif de souffrances psychologiques insupportables ou même d’une dépression.
    Je le répète, je suis favorable à une évolution, mais je ne veux pas que demain, en France, le droit à l’aide à mourir soit accordé à n’importe qui, n’importe comment, sans critères clairs et précis. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN. – Mme Frédérique Meunier applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet.

    Mme Danielle Simonnet

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    L’article 6 est sans doute le plus important du projet de loi car il définit les conditions d’accès à l’aide à mourir. Le groupe La France insoumise n’est pas favorable à un service public du suicide et souhaite que ce droit soit accordé selon des critères bien définis. Nous voulons un texte équilibré et pas trop restrictif, pour ne pas exclure nombre de cas qui ont tant ému notre société – 90 % des Français souhaitent l’ouverture, dans le droit, de cette ultime liberté.
    Lors des travaux de la commission spéciale, nous avons réécrit l’alinéa 7 afin de supprimer la référence à un « pronostic vital engagé à court ou moyen terme ». Quelle qu’en soit la cause, certaines affections graves et incurables engendrent des souffrances réfractaires à tout traitement et ne s’accompagnent pas d’un pronostic vital engagé à trois, six ou douze mois – plusieurs associations nous l’ont dit. En outre, aucun médecin n’est devin et ne peut prévoir, de manière certaine, un pronostic vital à court ou moyen terme. Lors de toutes les auditions, cette notion a été décriée. Certains accidents peuvent nous plonger dans un état très grave, en phase terminale, dans le coma, sans que le pronostic vital soit engagé. Conservons, par conséquent, la rédaction adoptée par la commission spéciale – « être atteinte d’une affection grave et incurable en phase avancée ou terminale » ! L’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD), l’association Le choix, la Mutuelle générale de l’éducation nationale (MGEN), l’Union nationale des syndicats autonomes (Unsa) et les associations de soutien à la recherche sur la maladie de Charcot nous le demandent.
    Enfin, nous devons prendre en compte les directives anticipées rédigées par le patient, qui a désigné une personne de confiance pour le moment où il ne pourra plus manifester, de manière libre et éclairée, sa volonté d’accéder à l’aide à mourir. À quoi serviraient les directives anticipées si elles ne permettent pas de prévoir une fin de vie digne ?
    Ce projet de loi est un grand texte laïque, qui respecte la diversité des orientations spirituelles et religieuses. Chacun peut, en liberté de conscience, choisir ou non d’user du droit à l’aide active à mourir le moment venu. L’article 6 doit garantir, par une approche humaine, l’accès à ce droit dans la diversité des cas compliqués que les soins palliatifs et d’accompagnement n’ont pu soulager. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Joël Giraud applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    L’article 6 est censé fixer des critères autorisant l’accès au suicide assisté et à l’euthanasie. Quels sont-ils et dans quelle limite s’appliqueront-ils ? Seront-ils définitifs ou provisoires ? Plusieurs personnalités auditionnées par la commission spéciale, à la fin du mois d’avril, ont indiqué que le projet de loi constituait une première étape, ce qui m’inquiète.
    La commission spéciale a supprimé le critère d’un pronostic vital engagé à court ou moyen terme, ce qui signifie que des personnes qui ne sont pas menacées de mourir demain et qui ne reçoivent pas de traitement pour soulager leurs souffrances pourraient bénéficier de l’aide à mourir. Un nombre très large de situations pourraient donc être concernées, bien loin des quelques cas annoncés, ce qui est tout aussi préoccupant.
    Nos collègues de gauche envisagent d’ouvrir l’aide à mourir aux enfants et nous demandent de rester calmes face à cette hypothèse. Les Pays-Bas ont autorisé ce droit pour les moins de 12 ans après l’avoir interdit dans un premier temps. Jusqu’où irons-nous en France, chers collègues, si nous nous engouffrons dans cette brèche ? En l’état actuel des choses, le cadre n’est pas clair : les critères retenus ouvrent la voie à des dérives dangereuses, alors que votre discours initial se voulait rassurant, madame la ministre. La confusion règne. Ces critères visent-ils, comme vous l’affirmez, un faible nombre de cas ? Garantissez-vous que ces critères assouplis en commission spéciale ne le seront pas davantage à l’avenir sous la pression de la demande d’égalité devant le droit – puisque l’article 5 bis fait de l’aide à mourir un droit ?
    Vos lignes rouges et vos avis ont fluctué depuis votre présentation initiale et l’examen en commission spéciale. Désormais, vous reconnaissez l’aide à mourir comme un droit à part entière. Vous nous renvoyez régulièrement au Conseil d’État, mais celui-ci ne préconisait pas de l’inscrire dans le chapitre préliminaire du code de la santé publique, sur le même plan que les soins palliatifs. Il recommandait de le mentionner au chapitre Ier. Cette évolution est pour le moins inquiétante. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq.

    Mme Geneviève Darrieussecq

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    Vous l’avez tous dit, l’article 6 est important. Nous avançons toujours sur la même ligne de crête, avec humilité et lucidité, car nous savons que chaque individu est un cas particulier – deux personnes ne sont pas égales face à la maladie –, mais nous devons légiférer pour tous. Le sujet est complexe.
    De toute évidence, le critère d’un pronostic vital engagé à moyen terme n’était pas satisfaisant. Il n’a d’ailleurs été approuvé par aucune des personnalités auditionnées par la commission spéciale, à commencer par les représentants du corps médical. Je suis toutefois gênée par la suppression des mots « engageant son pronostic vital ». Parler « d’une affection grave et incurable en phase avancée ou terminale, engageant le pronostic vital » serait certes redondant, mais permettrait de sécuriser le texte. Voilà ce que nous proposons. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. Thibault Bazin

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    Très bien !

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Nous voilà au cœur du débat sur les conditions d’accès à l’aide à mourir, ce nouveau droit offert aux patients qui souhaitent en finir avec des souffrances intolérables. Ces conditions doivent être raisonnables et assurer l’effectivité de l’aide à mourir. Rien ne serait pire, en effet, que de créer un droit sans garantir son accès.
    Nous devons être particulièrement vigilants quant aux conditions d’accès que nous nous apprêtons à examiner et réfléchir attentivement à la rédaction du troisième critère, selon lequel, pour accéder à l’aide à mourir, une personne doit « être atteinte d’une affection grave et incurable en phase avancée et terminale ». Nous demandons que la mention d’un pronostic vital engagé à court ou moyen terme ne soit pas rétablie. Toutes les auditions ont démontré l’impossibilité de définir la notion de moyen terme. J’ajoute que cette mention exclut les pathologies neurologiques comme la maladie de Charcot et la sclérose en plaques, les affections accidentelles paralysantes – le cas de Vincent Humbert est dans toutes les mémoires – et les maladies orphelines.
    Le groupe Socialistes et apparentés sera également vigilant sur la question de la capacité du patient à exprimer sa volonté dans des directives anticipées – question qui, vous l’avez rappelé, n’avait pas sa place à l’article 5. Le patient doit être au cœur du projet de loi. Sa volonté doit être respectée. Alors que nous nous apprêtons à examiner l’article 6, nous entendons porter une attention particulière aux conditions fixées pour l’accès à l’aide à mourir, avec un seul objectif : rendre effectif l’accès à ce nouveau droit et éviter l’adoption d’un texte décevant pour les Françaises et les Français qui souffrent et attendent de nous cet ultime accompagnement fraternel, empreint d’humanité. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à M. Charles de Courson.

    M. Charles de Courson

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    L’article 6 définit le champ des personnes éligibles au droit à mourir en fixant cinq critères. Le premier, le deuxième et le cinquième sont précis ; je dirai quelques mots du troisième et du quatrième.
    La commission spéciale a commis une erreur au sujet du troisième critère en substituant aux termes « engageant son pronostic vital à court ou moyen terme » les mots « en phase avancée ou terminale ». Il est indispensable, en effet, de conserver l’idée que le pronostic vital est engagé. Quant à choisir entre les mots « en phase avancée ou terminale » et les mots « à court ou moyen terme », le moyen terme étant une notion floue contrairement au court terme, il paraît préférable de rétablir la rédaction initiale du texte en réintroduisant, au minimum, les mots « engageant son pronostic vital ».
    Quant au quatrième critère, la commission spéciale a amélioré le texte gouvernemental en substituant aux mots « une souffrance physique ou psychologique liée à cette affection » les mots « une souffrance physique, accompagnée éventuellement d’une souffrance psychologique liée à cette affection ». Dans la version initiale, des souffrances psychologiques permettaient à elles seules d’accéder à l’aide à mourir. La commission spéciale a longuement débattu de ce sujet et travaillé dans le bon sens.

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Pour notre part, nous sommes prêts à accepter de réintroduire à l’article 6 la notion de pronostic vital engagé. En revanche, celle de court ou moyen terme nous amène à nous interroger sur le rôle du médecin dans le processus. En effet, elle positionne le médecin comme devant prédire l’échéance de la mort, ce qui n’est pas spécifiquement son métier – déterminer ce qu’est un moyen terme est difficile pour lui. Nous trouvons que les termes « phase avancée ou terminale » correspondent mieux aux compétences spécifiques des médecins, qui posent un diagnostic pour savoir si la maladie se situe à un de ces stades. En revanche, déterminer l’échéance à laquelle la vie d’un patient est menacée est un exercice de prévision qui nous semble dépasser le rôle du médecin. C’est la raison pour laquelle nous soutiendrons la réintroduction de la notion de pronostic vital engagé mais serons vigilants quant à la notion de court et de moyen terme. (Mme Sandra Regol, M. Joël Giraud et M. Gilles Le Gendre applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Laurent Panifous.

    M. Laurent Panifous

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    Si, concernant les conditions d’accès, je n’ai pas de difficulté – je soutiens l’essentiel des critères –, je formulerai deux observations. Tout d’abord, la notion de phase avancée ou terminale me semble satisfaisante car il s’agit de critères médicaux objectifs – cela a été souligné –, alors que le court ou le moyen terme sont plus difficiles à établir pour le corps médical. Il est nécessaire d’ajouter la notion de pronostic vital engagé pour éviter toute ambiguïté – certains jugeront que c’est redondant, mais il est important de clarifier les choses.
    Ensuite, la commission spéciale a abandonné l’expression « souffrances physiques ou psychologiques », qui permettait de ne pas créer de gradation entre les deux types de souffrances. Aux termes de la nouvelle rédaction, les souffrances psychologiques ne sont plus suffisantes pour accéder à une aide à mourir. Je défendrai un amendement visant à rétablir la rédaction initiale.

    M. le président

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    Nous avons terminé d’entendre les orateurs inscrits sur l’article 6.
    Sur les amendements no 76 et identiques, je suis saisi par les groupes Rassemblement national et Écologiste-NUPES d’une demande de scrutin public. Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisi de plusieurs amendements identiques, nos 76, 148, 390, 581, 654, 1334, 1514 et 2550, tendant à supprimer l’article 6.
    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 76.

    M. Thibault Bazin

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    L’article 6 n’est pas suffisamment clair, et les conditions d’accès à l’aide à mourir ne sont pas suffisamment encadrées. Vous avez prévu seulement cinq conditions. Résisteront-elles dans le temps ? La première, être majeur, nous amène à nous interroger sur le cas des adultes en situation de handicap, pour lesquels l’âge de la majorité est établi à 20 ans et non à 18 ans. La deuxième, « être de nationalité française ou résider de façon stable et régulière en France » pousse à se demander s’il y aura des migrations à cet effet.

    Mme Michèle Peyron

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    Oh non, monsieur Bazin !

    M. Thibault Bazin

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    Quant à la troisième, « être atteinte d’une affection grave et incurable en phase avancée ou terminale », vous avez totalement supprimé le pronostic vital engagé, ce qui à mon avis est très inquiétant. Concernant la quatrième, on peut s’interroger sur les souffrances dans les situations où la personne ne reçoit pas de traitement. Lui procurer des traitements est une exigence dans notre société. Comment cette condition sera-t-elle objectivée ? Enfin, pour la cinquième condition, vous avez retenu la rédaction « être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée ». Ne pourrions-nous pas plutôt écrire « manifester sa volonté libre et éclairée » ?
    Enfin, il faudrait les compléter les critères car il en manque. Nous pourrions ajouter : ne pas faire l’objet d’une mesure de protection avec assistance ou représentation ; ne pas être atteint d’une maladie psychiatrique qui altère gravement le discernement lors de la démarche ; ne pas faire l’objet d’une mesure de privation de liberté. J’espère vraiment que nous encadrerons mieux les conditions prévues par cet article. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Émilie Bonnivard, pour soutenir l’amendement no 148.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Vous l’aurez compris, nous sommes totalement opposés à l’abandon de la notion de pronostic vital engagé. La nouvelle rédaction de l’article 6 est pour moi d’une violence inouïe pour tout une partie de nos concitoyens qui ont subi un accident dramatique. Une de mes amies s’est retrouvée tétraplégique à 26 ans à la suite d’un accident de la route. C’était une grande sportive. Quand je l’ai vue après son accident, elle m’a dit qu’elle ne voulait plus vivre, et je pense que beaucoup d’entre nous, à sa place, auraient eu la même volonté, qui était apparemment libre – je m’interroge sur la réalité effective de la liberté quand le corps et l’âme ont subi une telle déflagration. Avec la nouvelle rédaction, qui abandonne le pronostic vital engagé, cette amie pourrait prétendre au droit à l’aide à mourir…

    Mme Sandrine Rousseau

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    Ce n’est pas vrai !

    Mme Émilie Bonnivard

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    …– si cette disposition avait existé à l’époque, elle ne serait peut-être plus là aujourd’hui. (Exclamations sur quelques bancs des groupes RE et LFI-NUPES.)

    M. Thibault Bazin

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    Laissez-la parler !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Maintenant, je vais vous dire ce qui s’est passé. Son compagnon est resté à ses côtés. Les heures, les jours, les années ont passé. (Mme Sandrine Rousseau s’exclame.)

    M. le président

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    Je crois que le sujet est suffisamment grave pour laisser chacun s’exprimer en l’écoutant. Poursuivez, madame Bonnivard. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR et sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme Émilie Bonnivard

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    Des interventions lui ont permis de gagner en autonomie. La vie a continué, elle est tombée enceinte et elle a aujourd’hui un petit garçon d’une dizaine d’années. Alors oui, la vie est dure, mais elle a continué. Mon amie a des activités, elle conduit, on rit et on pleure ensemble, et son petit garçon est là.

    M. le président

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    Veuillez conclure.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Le chemin a été dur, mais il n’y en avait qu’un de possible pour elle : celui du combat, de l’accompagnement et de la vie. Le message qu’on doit à ces personnes, c’est que nous sommes à leurs côtés. (M. le président coupe le micro de l’oratrice, dont le temps de parole est écoulé. – Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard, pour soutenir l’amendement no 390.

    Mme Annie Genevard

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    En cohérence avec ma position concernant le titre II, en particulier l’article 5, je m’opposerai évidemment à l’article 6. À la suite de l’adoption de l’amendement de Mme la rapporteure, l’aide à mourir est désormais un droit, que n’atténue pas le mot « possibilité ». Plusieurs des conditions d’accès posent problème à mes yeux. Tout d’abord, nous sommes nombreux à penser – vous-même, madame la ministre, en êtes d’accord – que la notion d’affection grave et incurable en phase avancée ou terminale est beaucoup trop large et imprécise, et surtout, que les critères ne sont pas objectivables médicalement. Mais si nous revenions à la formulation initiale, ce qui est votre souhait, je ne pense pas que nous puissions parler de retour à l’équilibre, car cela supposerait qu’il y en ait eu un préalablement. Or, du point de vue de beaucoup d’entre nous, tel n’est pas le cas. Nous considérons qu’il s’agit d’un véritable basculement éthique, nous ne pouvons donc pas être pour ce texte au motif d’un prétendu équilibre.

    M. le président

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    Merci, madame Genevard

    Mme Annie Genevard

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    Concernant la souffrance physique réfractaire, admettez que l’on ne peut pas en juger tant que les soins palliatifs ne sont pas accessibles partout et pour tous. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et RN.)

    M. Thibault Bazin

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    Elle a raison !

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 581. Nous conservons le principe d’un temps de parole d’une minute, chers collègues.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Nous l’avons indiqué à plusieurs reprises, le qualificatif de « phase avancée ou terminale » est inadapté et même dangereux. L’Académie nationale de médecine l’a souligné : « Une fois le pronostic vital effacé, il risque d’inclure les personnes atteintes d’une maladie, certes a priori incurable, mais avec laquelle il est possible de vivre longtemps. Il en est ainsi, par exemple, des malades atteints de maladies neurodégénératives sévères, des malades atteints [de] cancers avec métastases, des personnes en situation de handicap important ou de celles atteintes d’une maladie chronique avec des complications. »
    En outre, une discussion s’engagera probablement sur la notion de moyen terme. Vous avez affirmé, madame la ministre, que vous aviez demandé à la Haute Autorité de santé de donner un avis sur ce point. Quand interviendra-t-il ? Avant ou après le vote ?

    M. Patrick Hetzel

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    Très bonne question !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Cela n’a pas beaucoup de sens, c’est pourquoi nous devons supprimer cet article.

    Rappel au règlement

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard, pour un rappel au règlement.

    Mme Annie Genevard

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    Il se fonde sur l’article de notre règlement relatif à la bonne tenue de nos débats. Tout d’abord, l’article 6 est un article principiel, d’une très grande importance, tout comme l’article 5.

    Un député du groupe RE

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    Nous sommes d’accord !

    Mme Annie Genevard

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    C’est vraiment très compliqué, monsieur le président, de développer une pensée construite en une minute. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN.) Nous avons accepté le principe d’une minute par amendement, mais pour des dispositions comme celle-ci, il faudrait pouvoir disposer de deux minutes.
    Ensuite, les députés du groupe Les Républicains se sont peu livrés à des exemples personnels, considérant qu’au fond, en tant que législateur, nous ambitionnons de créer une loi pour tous, et que l’exemple personnel ne suffit pas toujours.

    Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

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    Et Mme Bonnivard ?

    Mme Annie Genevard

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    Nous pourrions tous en faire valoir. Nous avons tous dans notre entourage matière à développer,…

    M. le président

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    On déborde un petit peu du rappel au règlement. Je vous demanderai de conclure.

    Mme Annie Genevard

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    …et nous nous y sommes peu livrés. Mme Bonnivard l’a fait, je ne crois pas que nous l’ayons beaucoup fait pendant ces débats. En tout cas, quand nous l’avons fait, nous aurions aimé avoir la même qualité d’écoute… (M. le président coupe le micro de l’oratrice, dont le temps de parole est écoulé. – M. Patrick Hetzel applaudit.)

    M. le président

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    Il ne vous a pas échappé que vous avez pu déborder jusqu’à une minute trente précisément pour vous permettre de terminer vos raisonnements. Nous conservons le principe d’une minute par amendement, mais je saurai l’appliquer avec souplesse.

    Article 6 (suite)

    M. le président

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    La parole est à M. Philippe Juvin, pour soutenir l’amendement no 654.

    M. Philippe Juvin

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    Une des difficultés de ce texte réside dans la définition de l’affection grave et incurable en phase avancée ou terminale. Les termes « phase avancée » ne veulent rien dire. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN et sur quelques bancs du groupe RE. – Mme Laurence Cristol et M. Emmanuel Pellerin applaudissent également.) J’entends que dans le langage commun, chacun puisse avoir sa petite définition, mais médicalement, cela ne veut rien dire. La phase terminale non plus, pardon : que signifie le qualificatif « terminale » ? On a l’impression que c’est pre mortem.
    Il y a une vraie difficulté.

    Mme Danielle Simonnet

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    C’est dans le code de la santé publique !

    M. Philippe Juvin

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    Nous légiférons, mais derrière, des professionnels devront appliquer la loi. Ils ne sont pas députés : ce sont des soignants, qui accompagneront les patients et qui devront juger de la possibilité de les inclure dans le dispositif. Vous ne me croyez pas ? Le diabète est une maladie, grave, incurable, qui peut être en phase avancée, et on peut vivre trente ans avec. Certains malades qui sont atteints de cancers – c’est une maladie grave –, incurables, en phase avancée, vivront pourtant des années grâce aux nouvelles immunothérapies. Et donc cette rédaction est totalement inadaptée. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such, pour soutenir l’amendement no 1334.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    Je rejoins les propos de mes collègues au sujet de ces amendements de suppression. Nous ne pouvons pas aller plus loin que la loi Leonetti. Comme l’affirme Jean Leonetti, ouvrir la voie à l’aide à mourir, ce n’est pas aller plus loin : « c’est aller ailleurs ». L’interdit de tuer est un élément fondateur de notre droit. Les lois Leonetti de 2005 et Claeys-Leonetti de 2016 défendent trois grands principes : le non-abandon, la non-souffrance et le non-acharnement thérapeutique. Et ces principes reflètent l’attente des Français : il s’agit d’accompagner les personnes en fin de vie mais en aucun cas d’autoriser à donner la mort. Il sera difficile de fixer les limites.
    Ensuite, si ce projet de loi instaure le droit de donner la mort à celui qui la réclame, quel message envoyons-nous à toutes les personnes vulnérables ? Cela revient à leur dire qu’elles ont perdu une part de leur dignité, et qu’il est légitime qu’elles disparaissent. C’est un conflit de valeurs entre l’autonomie de la personne, d’une part, la solidarité et la protection des plus fragiles, d’autre part. Malheureusement, la mise en application de ces lois est difficile. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 1514.

    M. Marc Le Fur

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    Mes collègues ont bien exprimé la situation quant à ce fameux article 6, qui ouvre trop largement le droit d’achever quelqu’un – c’est bien ce dont il s’agit. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE, LFI-NUPES et SOC.) J’insisterai sur un groupe particulier, par lequel je suis saisi – et je ne suis pas le seul : les familles de personnes porteuses d’une trisomie 21, qui ne sont pas exclues des dispositions de l’article, ce qui signifie qu’elles pourront, en règle générale, faire l’objet d’un suicide assisté ou d’une euthanasie. Et je suis saisi…

    Mme Agnès Firmin Le Bodo, présidente de la commission spéciale et Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Non !

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure de la commission spéciale

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    Non ! C’est faux !

    M. Marc Le Fur

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    Vous allez me dire le contraire ! Permettez-moi de m’exprimer, madame la ministre, au lieu de changer d’avis. Je suis saisi en particulier par Emmanuelle, la sœur de Myriam, porteuse d’une trisomie 21. Il ne suffit pas d’applaudir un grand film qui est actuellement sur les écrans et qui démontre que l’on peut associer le talent et le handicap… Nous devons aussi défendre ces catégories de personnes – c’est ce que je m’efforce de faire. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jocelyn Dessigny, pour soutenir l’amendement no 2550.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Madame la ministre, vous avez affirmé que ce texte ne concernerait que de très rares cas. Cependant, si nous nous référons à ce qui se passe dans les pays voisins, nous parlons d’au minimum 13 000 personnes – 13 000 décès, soit l’équivalent de la population de la ville de Villers-Cotterêts et des villages qui l’entourent. Ces cas ne sont donc pas si rares que cela. De plus, lors des auditions, le Comité consultatif national d’éthique (CCNE) a indiqué que ce texte constituait une première étape. La commission l’a allègrement franchi en mettant fin aux garde-fous.
    Madame la présidente de la commission spéciale, vous l’avez dit vous-même : ce n’est plus le même texte. Votre problème, c’est que pour faire passer ce projet de loi, il vous faut l’appui de l’extrême gauche, et que celle-ci, à propos de ce texte, est en roue libre, allant jusqu’à proposer l’euthanasie des enfants.
    Monsieur le rapporteur général, vous militez en faveur d’une loi sur l’aide à mourir depuis votre proposition de loi de 2017. Toutefois, ce texte va plus loin que toutes les lois adoptées dans d’autres pays. Où vous arrêterez-vous ? Écoutez plutôt ceux qui, dans lesdits pays, expriment maintenant des regrets.

    M. le président

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    Merci, monsieur le député !

    M. Jocelyn Dessigny

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    N’allons pas plus loin. Chers collègues, n’ouvrons pas une porte que nous ne pourrons pas refermer. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure de la commission spéciale pour les articles 4 quater à 6, afin de donner l’avis de la commission sur ces amendements de suppression.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure de la commission spéciale

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    Avec l’article 5, l’article 6 forme la pierre angulaire de ce projet de loi. Il fixe cinq conditions strictes pour accéder à l’aide à mourir. Comme nous sommes appelés à en discuter longuement, je ne m’étendrai pas dessus, mais je tiens à rappeler qu’elles sont cumulatives car certains d’entre vous ont employé des arguments susceptibles de choquer ceux qui nous écoutent.
    La première condition est d’être âgé d’au moins dix-huit ans, et donc doté d’une pleine capacité juridique. La deuxième, qui vient donc s’ajouter à la première, est d’être de nationalité française ou de résider de façon stable et régulière en France. La troisième est d’être atteint d’une affection grave et incurable en phase avancée ou terminale.

    M. Philippe Juvin

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    Phase avancée, mais qu’est-ce que cela veut dire ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Monsieur Juvin, les termes « en phase avancée ou terminale » figurent dans la loi Claeys-Leonetti. Sur cette condition, nous aurons bien sûr l’occasion de débattre de manière approfondie. La quatrième condition est de « présenter une souffrance physique, accompagnée éventuellement d’une souffrance psychologique liée à cette affection, qui est soit réfractaire aux traitements, soit insupportable lorsque la personne ne reçoit pas de traitement ou a choisi d’arrêter d’en recevoir ». Certains d’entre vous se gardent de la citer et font peur aux gens en prétendant que des personnes handicapées ou trisomiques seraient éligibles à l’aide à mourir, ce qui est faux.
    Je termine par la dernière condition, qui est d’être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée – critère très important. À tout moment, le malade doit pouvoir décider, arbitrer, donner son accord, réitérer sa décision, mais aussi renoncer, s’il le souhaite.

    Mme Annie Genevard

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    Et qu’en est-il pour les personnes sous curatelle ou sous tutelle ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Ces amendements en venant supprimer l’article 6 suppriment les conditions qu’il fixe. Avis défavorable. (M. Michel Lauzzana applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités, pour donner l’avis du Gouvernement.

    Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

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    S’opposer au texte dans l’absolu est une chose, s’opposer à l’article 6 en est une autre, maintenant que l’article 5 a été adopté. Cela revient en effet à vouloir supprimer les cinq conditions cumulatives qu’il fixe pour encadrer strictement l’accès à l’aide à mourir. Il me paraît délicat, dans une même intervention, d’appeler à la fois à un allongement de la liste des critères et à leur suppression.
    Si nous voulons progresser afin d’encadrer cet accès, ce que nous souhaitons tous – à des degrés divers, je l’entends bien –, il faut que nous puissions examiner l’ensemble de l’article 6. C’est la raison pour laquelle je suis totalement opposée à ces amendements de suppression.

    M. Joël Giraud

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    Très bien !

    M. le président

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    La règle est toujours de donner la parole à deux orateurs par groupe. Je laisse le soin aux deux groupes dont trois membres se sont inscrits de décider qui interviendra.
    La parole est à Mme Astrid Panosyan-Bouvet.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet

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    Plusieurs lois étrangères ont connu des évolutions. Au Canada, en 2021, il a été mis fin à la condition de la prévisibilité du décès posée initialement dans la loi fédérale de 2016. En 2014, les dispositions de la loi belge de 2002 ont été étendues aux mineurs. L’Académie suisse des sciences médicales n’évoque plus depuis 2021 la nécessité que la fin de vie soit proche parmi les conditions d’accès au suicide assisté, autorisé par la loi fédérale de 1942. Les Pays-Bas, après avoir voté la loi de 2001, ont posé en 2020 le principe selon lequel les directives anticipées valent consentement et procédé en 2023 à une extension aux mineurs de moins de 12 ans.
    Madame la ministre, je vous remercie de vouloir encadrer l’aide à mourir en posant cinq conditions cumulatives. Ce qui m’inquiète toutefois, c’est notre capacité à l’encadrer de manière durable. Les exemples étrangers montrent que les conditions strictes initialement posées, motivées par les mêmes intentions que celles qui vous animent aujourd’hui, ont connu un élargissement pour répondre à la demande sociétale. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR. – M. Emmanuel Pellerin applaudit également.)

    M. Xavier Breton

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    Ça finira pareil !

    M. le président

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    La parole est à M. Dominique Potier.

    M. Dominique Potier

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    Je voudrais dénoncer ici la fiction que constitue le modèle français de la fin de vie promu par le Président de la République. Les évolutions que nous craignions de voir se déployer dans les cinq prochaines années ont été proposées en l’espace de cinq jours et la liste des amendements montre qu’il y a encore des demandes d’élargissement.
    Dans cette loi, l’accès à l’euthanasie et au suicide assisté est justifié par une liberté, qui devient un droit puis une créance, philosophie que nous condamnons. Contre vents et marées, je le réaffirme : je crois profondément en une autre vision de la personne, celle d’un être auquel la vie est donnée qui contracte une dette mutuelle au sein de la société dans laquelle il grandit. Cet être social doit être protégé dans sa vulnérabilité, ce qui nous renvoie à l’interdit de donner la mort. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et LR. – M. Vincent Bru, M. Charles de Courson et M. Emmanuel Mandon applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz

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    Je formule à nouveau le vœu que nos débats restent apaisés et que le respect et l’écoute prévalent dans cet hémicycle. L’article 6 forme le cœur de ce projet de loi puisqu’il fixe les critères d’accès à l’aide à mourir, autrement dit le suicide assisté et l’euthanasie. Je le dis avec gravité, madame la ministre, vous vous êtes fait dépasser en commission spéciale à la fois par l’extrême gauche et par une partie de la majorité présidentielle macroniste, ce qui était prévisible. Votre texte autorise en effet toutes les dérives. La version initiale du Gouvernement porte en elle la possibilité d’une évolution radicalisée. Nous l’avons bien vu en commission spéciale où les garde-fous ont sauté un à un.
    Revenons au bon sens et restons sur la voie des soins à prodiguer à la personne et de la vie. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette.

    M. Stéphane Delautrette

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    À mon tour de formuler le vœu que nos débats soient respectueux et apaisés. Nous ne pouvons toutefois pas laisser dire n’importe quoi. Monsieur Le Fur, on achève un animal blessé mais on accompagne les hommes et les femmes en souffrance. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et Écolo-NUPES. – Mme Danielle Simonnet applaudit également.)
    Comment imaginer que nous pourrions envisager d’administrer la mort à une personne trisomique ? (M. Marc Le Fur s’exclame.) Où avez-vous cela dans le texte ?
    Ces amendements de suppression signifient-ils, chers collègues, que vous êtes partisans d’une aide à mourir sans conditions ? Permettez-moi d’en douter. Comme je l’ai dit ce matin, je pense que vous cherchez plutôt à rendre le projet de loi inopérant. Défendez plutôt vos arguments au travers de vos amendements visant à durcir les critères, comme c’est votre droit, ou en vous opposant aux nôtres. Faisons en sorte de progresser dans l’examen de ce texte. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. Michel Lauzzana

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    Bravo !

    M. le président

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    La parole est à M. Aurélien Pradié.

    M. Aurélien Pradié

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    Au terme de nos débats, il restera dans cet hémicycle des députés favorables à ce texte et d’autres qui y sont hostiles. Nous n’avons à juger ni les uns ni les autres. Il ne faudrait toutefois pas que ce débat sur les conditions tende à masquer une opposition de principe qui, quelles que soient les évolutions apportées, demeurera.
    Ce projet de loi n’est pas comme les autres. Deux choses importantes doivent être prises en considération. La première est la nécessité de rechercher le plus grand consensus possible parmi ceux qui sont favorables à ce texte. Je le dis à l’intention de ceux qui voudraient aller plus loin, trop loin : sur un sujet comme celui-ci, c’est risquer de perdre en chemin ceux qui, comme moi, doutent. La deuxième chose, c’est d’être attentifs au fait que nous ne nous contentons pas d’inscrire des protocoles. Nous décidons de grands principes sociétaux et je rejoins sur ce point plusieurs de mes amis. Certains des critères que nous fixerons dans la loi seront inopérants. Les termes de « stade ultime » n’ont peut-être pas de fondement d’un point de vue technique et médical mais ils disent quelque chose à la société. La loi est à la fois pratique et politique : elle adresse un message à la nation.

    M. le président

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Ce matin, nous avons adopté une définition de l’aide à mourir. Cela a suscité des débats, ce qui est normal, mais à présent, nous avons à nous déterminer sur un autre enjeu : les critères d’éligibilité. Contrairement à ce qui a pu être dit, peu de droits s’appliquent de manière absolue. Une majorité, au contraire, est entourée de conditions. Le droit de vote suppose une condition d’âge.

    M. Thomas Ménagé

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    De nationalité aussi ?

    M. Hadrien Clouet

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    Le droit à l’interruption de grossesse est lui aussi soumis à des conditions.
    Nous avons acté un principe de droit et il nous appartient maintenant de nous pencher sur son application concrète : qui est éligible, qui ne l’est pas ? Voici l’enjeu de la discussion que nous souhaitons avoir ici. C’est la raison pour laquelle nous voterons bien sûr contre ces amendements de suppression.
    Certains souhaitent exclure de l’accès à l’aide à mourir les personnes atteintes d’une affection qui leur fait endurer de profondes souffrances mais leur laisse encore quelque temps à vivre. Ils font trois confusions : d’abord, entre vivre et survivre – et la personne concernée est la mieux placée pour faire la distinction ; ensuite, entre capacité à vivre et volonté de vivre ; enfin, entre santé et dignité humaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Élise Leboucher.

    Mme Élise Leboucher

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    Alors que l’Assemblée a adopté la définition de l’aide à mourir, supprimer cet article précisant les critères à remplir pour y accéder entraînerait une forte incertitude sur les conditions d’application de ce droit. Après un long travail de consultation, de réflexion, de débat en commission, le législateur se priverait de sa raison d’être, qui est de faire la loi.
    Par ailleurs, j’ai du mal à comprendre le raisonnement de notre collègue Bazin, qui refuse de poser des critères, autrement dit des garde-fous,…

    M. Thibault Bazin

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    Au contraire, j’en veux plus !

    Mme Élise Leboucher

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    …au motif que ces conditions seraient susceptibles d’évoluer dans un avenir indéfini. C’est précisément en l’absence de règles et d’encadrement que des dérives peuvent survenir puisque les pratiques restent clandestines et échappent à tout contrôle. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)
    Madame Dogor-Such, arrêtez de nous opposer en permanence la sédation profonde et continue. Vous n’auriez pas voté la loi Claeys-Leonetti si vous aviez été sur ces bancs en 2016. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES et RE.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Mais qu’en savez-vous ?

    Mme Élise Leboucher

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    S’agissant du critère du pronostic vital engagé à court ou moyen terme, nous avons entendu les remarques des professionnels de santé sur la difficulté à traduire concrètement cette notion, spécialement pour le moyen terme. C’est la raison pour laquelle la commission a retenu un critère plus adapté : être atteint d’une affection « en phase avancée ou terminale », termes utilisés dans l’article 2 de la loi Leonetti et à l’article 10 de la loi Claeys-Leonetti. Il repose donc sur une définition juridique. Chers collègues, débattons des critères et sortons des caricatures. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Julie Laernoes.

    Mme Julie Laernoes

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    Nous avons adopté à l’article 5 la définition de l’aide à mourir. Et je constate que les auteurs des amendements de suppression ont une position plus maximaliste que celle qu’ils me prêtent.

    M. Julien Odoul

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    Vous êtes la porte-parole du Gouvernement ?

    Mme Julie Laernoes

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    Supprimer l’article 6 revient en effet à supprimer les conditions encadrant l’aide à mourir. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Mme Annie Genevard

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    Sophisme !

    Mme Julie Laernoes

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    Je suis stupéfaite de voir votre volonté d’obstruction aller jusqu’à de telles absurdités.
    Pour avoir un débat de fond apaisé, il serait bon d’arrêter de brandir des chiffons rouges destinés à faire peur. Ainsi a-t-on entendu certains évoquer la notion d’appel d’air – on sait comme elle est chère à l’extrême droite : des Néerlandais fuiraient par cars entiers vers l’Allemagne pour échapper à la législation de leur pays ; des personnes viendraient se faire euthanasier chez nous si la loi était adoptée.

    Mme Annie Genevard

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    Personne n’a dit ça !

    Mme Julie Laernoes

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    Il faudrait choisir. Vous dites tout et son contraire. Restez-en au fond du débat et travaillez sur les amendements et les conditions d’accès. (Applaudissements sur les bancs du groupe Écolo-NUPES.)

    M. Jocelyn Dessigny

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    Écoutez plutôt les gens quand ils parlent !

    M. le président

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    La parole est à Mme Stéphanie Rist.

    Mme Stéphanie Rist

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    L’article 6 représente le point d’équilibre du projet de loi. Je souhaite d’ailleurs que des évolutions permettent de rétablir la rédaction initiale proposée par le Gouvernement. Il est étrange de vouloir sa suppression : en adoptant l’article 5, nous venons d’autoriser l’aide à mourir, qu’il convient désormais d’encadrer, non pour aboutir à un compromis mou entre ceux qui veulent adopter ce texte et les autres, mais bien parce que l’efficacité même de ce texte sera proportionnelle à sa précision. Je crois donc qu’il ne faut pas adopter ces amendements de suppression. (M. Gilles Le Gendre et Mme Charlotte Parmentier-Lecocq applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Comme ma collègue Rist, je voterai contre ces amendements de suppression parce que nous devons débattre des conditions d’accès et du périmètre de l’aide à mourir. Est-elle compassionnelle et exceptionnelle, ou constitue-t-elle un nouveau droit ? Il faudra choisir entre les notions de « moyen terme » et de « phase avancée ». La première a l’avantage d’être mesurable, la seconde ne veut rien dire dans la mesure où elle se rapporte à une dynamique qui ne définit pas précisément le stade de la maladie. Le débat est donc nécessaire pour préciser les conditions d’ouverture de l’accès à l’aide à mourir. Dans l’hémicycle, nous ne traduisons pas les termes du texte de la même manière. Aussi faut-il absolument les préciser très finement.

    M. le président

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    S’agissant des conditions d’accès à l’aide à mourir, un courrier de l’ADMD daté du 21 mai interprète ainsi l’alinéa 7 de l’article 6 : « Cette rédaction permet de prendre en compte les situations les plus difficiles, même si le pronostic vital n’est pas engagé à brève échéance. Elle permet également de prendre en compte les situations provoquées par des maladies comme par des accidents laissant de lourdes séquelles. […] Cette rédaction permet de répondre à des personnes qui sont encore en trop bonne santé et donc qui pourraient bénéficier du suicide assisté, voire de l’euthanasie. » Ma question est simple et précise, madame la ministre : partagez-vous l’interprétation de l’ADMD ou vous inscrivez-vous en faux contre elle ? L’avis du Gouvernement nous semble important.

    M. le président

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    La parole est à M. Thomas Ménagé.

    M. Thomas Ménagé

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    L’article 6 est le cœur nucléaire du projet de loi. Même si je suis favorable à une évolution de la loi en faveur d’une aide active à mourir, il convient de poser des garde-fous et de définir des critères d’accès très clairs. Parce que ce débat est nécessaire, je voterai contre ces amendements de suppression. Cela étant, si nous ne rétablissons pas la rédaction initiale de l’article 6, je voterais bien entendu contre le texte, car, avec la suppression de la référence au « pronostic vital engagé à court ou moyen terme », il n’offre plus de protection suffisante. Certains collègues vont même jusqu’à dire que, dans l’attente de l’avis de la HAS, on pourrait assouplir encore davantage les conditions d’accès en retenant le critère d’une maladie « en phase avancée ou terminale ». Sur un tel sujet, nous devons au contraire avancer avec prudence. La seconde lecture du projet de loi, éclairée par l’avis de la HAS, nous permettra d’aller dans la bonne direction. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Laurent Panifous.

    M. Laurent Panifous

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    Après avoir voté le principe de l’aide à mourir à l’article 5, il est absolument essentiel d’en fixer les conditions strictes d’accès. Je voterai donc contre ces amendements de suppression, qui sont contraires à la logique. Je m’inscris également en faux contre l’argument, souvent répété, selon lequel nous ouvririons la boîte de Pandore dans la mesure où les critères que nous fixons, si stricts soient-ils, pourraient toujours évoluer demain. Mais seule la loi pourrait permettre une telle évolution. Il convient donc de travailler sereinement et patiemment à l’encadrement du dispositif, ce qui – nous le constatons – n’est guère aisé. S’il doit évoluer plus tard, il ne le fera qu’avec l’aval du Parlement. (M. David Valence applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Anne Bergantz.

    Mme Anne Bergantz

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    Je suis vraiment désolée et dépitée d’entendre certains tenter une nouvelle fois de nous faire croire que l’aide à mourir serait ouverte aux personnes handicapées et aux personnes âgées, en tant qu’elles seraient handicapées ou âgées. Rappelons que le critère central est évidemment la maladie.
    Des statistiques ont été citées ce matin à propos de l’âge moyen des personnes ayant eu accès à l’aide à mourir aux Pays-Bas. Il faut toujours manier et analyser les chiffres avec beaucoup de précaution. En l’occurrence, j’en citerai d’autres : l’âge médian du diagnostic de cancer en France – 70 ans pour les hommes, 68 ans pour les femmes – et l’âge médian du décès à la suite d’un cancer – 63 ans pour les hommes, 77 ans pour les femmes. La majorité des situations d’aide à mourir concernera donc probablement des personnes âgées de plus de 70 ans, non parce qu’elles sont âgées, mais simplement parce qu’elles sont malades !

    Mme Annie Genevard

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    Vous n’en savez rien, vous ne pouvez pas l’affirmer !

    M. le président

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    La parole est à Mme Emeline K/Bidi.

    Mme Emeline K/Bidi

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    Cette assemblée est partagée entre ceux qui sont favorables au texte et ceux qui y sont opposés. Nous ne sommes pas là pour être convaincus, puisque nous en débattons depuis des semaines et que beaucoup d’entre nous ont déjà arrêté leur position. En revanche, nos arguments doivent être clairs et sincères parce que d’autres nous regardent et ont besoin de clarté pour pouvoir se faire une opinion. (M. Gilles Le Gendre applaudit.) Nous devons donc débattre des conditions d’accès de l’aide à mourir, rappeler qu’elles sont cumulatives, et réfuter les mensonges que l’on peut lire, que certains propagent même au sein de cette assemblée et qui induiraient en erreur ceux qui nous regardent. Enfin, si nous avons peur de légiférer sous prétexte que des évolutions pourraient survenir dans de futures législatures, alors nous ne ferons jamais rien. Si ceux qui nous ont précédés avaient eu cette crainte, ni l’interruption volontaire de grossesse (IVG) ni la procréation médicalement assistée (PMA) n’auraient été adoptées…

    M. Benoit Mournet

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    Ça n’a rien à voir !

    Mme Emeline K/Bidi

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    …et nous n’avancerions pas au rythme des évolutions de notre société.

    M. le président

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    La parole est à M. Sébastien Peytavie.

    M. Sébastien Peytavie

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    Le débat relatif aux conditions d’accès à l’aide à mourir est important. Il s’articule autour d’un critère temporel – c’est la notion de « court ou moyen terme », dont la définition est délicate au dire de nombreux médecins – et d’un critère relatif au stade d’avancement de la maladie – c’est la notion d’« affection grave et incurable en phase avancée ou terminale », qui donne un caractère très spécifique à la pathologie concernée. Le second critère me semble plus facile à évaluer par le personnel médical. Par ailleurs, monsieur Hetzel, quand vous dites que des situations de handicap pourraient entrer dans le champ de l’aide à mourir, vous auriez raison si nous n’avions pas retenu un ensemble des critères cumulatifs, notamment l’existence de douleurs réfractaires. Grâce à ce cumul, les situations de handicap sortent du périmètre du dispositif. (Mmes Julie Laernoes, Brigitte Liso et Sandra Regol applaudissent.)

    M. Benoit Mournet

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    Dans le texte, je lis « soit…soit… », ce n’est pas la même chose que « et » !

    M. le président

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    La parole est à M. Pierre Dharréville.

    M. Pierre Dharréville

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    S’il y a des personnes favorables et opposées au texte, j’ai aussi croisé des indécis. Il serait dommage que cette loi soit adoptée par imprécision, par défaut ou sans réelle conviction. Pour que tel ne soit pas le cas, le débat demeure nécessaire. Dès lors que l’aide à mourir existe, des conditions d’accès à ce droit doivent être définies. Leur suppression serait problématique, même si je crois impossible de pouvoir fixer de bons critères : ma situation est donc délicate. En outre, mal nommer les choses fait remonter à la surface les questions de fond que j’ai essayé de poser depuis le début de l’examen du texte : cela rend notre débat plus difficile.

    M. le président

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    La parole est à M. Charles de Courson.

    M. Charles de Courson

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    Quel que soit notre vote à l’article 5, dès lors qu’il est adopté, il faut discuter de l’article 6. (« Eh oui ! » sur divers bancs.) Si on le supprimait, ce serait la victoire du libertarisme le plus absolu, puisqu’il n’y aurait aucun critère d’accès à l’aide à mourir ! Certains s’en réjouiraient peut-être, pas moi ! Nous sommes donc condamnés à examiner l’article 6. (M. Gilles Le Gendre et Mme Stéphanie Rist applaudissent.)

    M. le président

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 76, 148, 390, 581, 654, 1334, 1514 et 2550.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        138
            Nombre de suffrages exprimés                130
            Majorité absolue                        66
                    Pour l’adoption                41
                    Contre                89

    (Les amendements identiques nos 76, 148, 390, 581, 654, 1334, 1514 et 2550 ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 151, qui fait l’objet d’un sous-amendement.

    M. Patrick Hetzel

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    La logique du suicide assisté relève pour nous d’une exception à certaines dispositions de notre code pénal. D’une part, l’euthanasie est illégale. D’autre part, chacun peut être condamné pour non-assistance à personne en danger. L’une des lignes de fracture du texte se situe donc à ce point précis. Madame la ministre, là encore, pourriez-vous nous préciser la position du Gouvernement ? Le suicide assisté et l’euthanasie seront-ils considérés comme légaux et les dispositions du code pénal relatives à la non-assistance à personne en danger cesseront-elles de s’appliquer ?

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir le sous-amendement no 3491.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Reprenant une proposition défendue en commission par notre collègue Yannick Neuder, il prévoit de compléter l’alinéa 2 de l’amendement de mon collègue Hetzel par la phrase suivante : « La personne doit au préalable avoir bénéficié d’une prise en charge en soins palliatifs mentionnés aux articles L. 1110-9 et L. 1110-10 du code de la santé publique. » Chacun le sait, en effet : lorsque les soins palliatifs sont correctement prodigués en amont, peu de malades demandent à mourir. Il convient donc d’en faire un préalable nécessaire avant d’envisager l’euthanasie ou le suicide assisté. Ajouter une telle condition pourrait mettre tout le monde d’accord, puisque cela constituerait un garde-fou empêchant toute dérive.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Par cet amendement, vous souhaitez inscrire dans le code pénal les dispositions relatives au suicide assisté. Puisque vous proposez de réécrire totalement l’article, vous remettez en cause l’ensemble des dispositions qu’il contient, aussi mon avis sera-t-il défavorable.
    De plus, les critères proposés sont plus souples que ceux que contient actuellement l’article. En effet, vous ne mentionnez pas les souffrances rencontrées par le malade, qui constituent un critère d’accès cumulatif et important. De même, vous substituez la formule « en état d’exprimer sa volonté » à la formule « apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée », qui me paraît plus forte et plus exigeante. Pour toutes ces raisons, je m’oppose à l’amendement.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je commencerai par rappeler à Mme Ménard que l’article 7, alinéa 10 précise que le médecin doit commencer par proposer au patient – qui n’est pas obligé d’accepter – de bénéficier de soins palliatifs. Le sous-amendement est donc satisfait.
    Quant à l’amendement de réécriture de M. Hetzel, son adoption ferait disparaître les conditions liées à l’âge et à la capacité du patient de manifester sa volonté de façon libre et éclairée.
    Vous me demandez si la pratique de l’aide à mourir pourrait donner lieu à des poursuites pénales. Dès lors qu’elle aura été accomplie conformément à la procédure définie par la loi, elle sera couverte par l’article 122-4 du code pénal, qui dispose qu’une personne accomplissant un acte autorisé par la loi n’est pas passible de poursuites.
    Avis défavorable sur l’amendement et le sous-amendement.

    M. le président

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Mme la ministre fait valoir que le médecin devra proposer des soins palliatifs au patient, mais encore faut-il que celui-ci y ait accès ! Je rappelle que ce n’est pas le cas d’un Français sur deux ; il faut donc se poser la question.
    Madame la rapporteure, vous avez insisté sur le caractère cumulatif des critères. Toutefois, il est possible d’être atteint d’une maladie grave et incurable sans présenter de souffrances physiques réfractaires, et inversement. Mme Panosyan-Bouvet a donc eu raison de souligner le risque que les critères soient élargis dans l’avenir, comme ils l’ont été dans tous les pays qui se sont dotés de dispositions similaires. Vous verrez : la demande sociétale appellera l’élargissement. C’est un des motifs pour lesquels nous ne voulons pas voter ce texte.

    M. le président

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    La parole est à M. Jérôme Guedj.

    M. Jérôme Guedj

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    Nous sommes évidemment défavorables à la réécriture totale de l’article 6 proposée dans l’amendement no 151. Néanmoins, je dois avouer que l’article 6 me pose un problème méthodologique, ce qui m’amène, madame la ministre, à vous poser une question. Comme beaucoup de mes collègues, je ne comprends pas les nuances du débat qui oppose les critères de « phase avancée et terminale » d’une part, de « pronostic vital engagé à court ou à moyen terme » d’autre part. Chacune de ces options a été défendue avec une grande sincérité par plusieurs députés ; ce débat oppose même la présidente de la commission spéciale au rapporteur général.
    De quels éléments disposons-nous pour nous éclairer, à part la sincérité des uns et des autres ? Le 22 avril, vous avez annoncé à la commission spéciale que vous aviez saisi la Haute Autorité de santé pour qu’elle précise le concept de « pronostic vital engagé à moyen terme ». Or la HAS, si j’ai bien compris, nous livrera ses premières conclusions à la fin de l’année et sa recommandation formelle au premier trimestre 2025. Si j’étais taquin, je vous demanderais si vous avez réellement saisi la HAS et si nous aurons une réponse ; comme je ne le suis pas, je me contenterai de vous demander quelles autres sources pourraient nous éclairer, car je ne sais pas qui croire.

    M. le président

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    La parole est à M. Benoit Mournet.

    M. Benoit Mournet

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    Je soutiens le sous-amendement de Mme Ménard, car faire des soins palliatifs une condition préalable à l’aide à mourir plutôt qu’une option me paraît s’inscrire dans la logique du texte.
    En ce qui concerne les critères retenus – il faut bien en débattre –, trois sur cinq me paraissent clairs : l’âge, la nationalité et la capacité du patient à exprimer sa volonté de manière libre et éclairée. En revanche, les deux autres me semblent assez flous, en particulier le quatrième, qui introduit une alternative. Il précise que la souffrance doit être « soit réfractaire », « soit insupportable ». Je préférerais que ces deux termes soient liés par un « et ».
    J’ai le plus grand respect pour les positions de chacun, mais comprenez la frustration que suscite chez ceux qui, comme moi, pensent que nous ferions une bêtise en adoptant ce texte, le constat que les critères sont suffisamment flous et interprétables pour ouvrir la voie à autre chose.

    M. le président

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    La parole est à M. David Valence.

    M. David Valence

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    Nous sommes tous d’accord pour que des soins palliatifs soient proposés à chaque personne atteinte d’une maladie incurable et présentant des souffrances réfractaires ; nous l’avons dit en long, en large et en travers lors de l’examen du titre Ier. Toutefois, le sous-amendement de Mme Ménard va plus loin et me paraît contrevenir à la loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades, car il vise à créer une obligation de soin pour les malades concernés, préalable à tout accès à l’aide à mourir. L’adopter reviendrait à remettre en cause la loi Kouchner, un texte fondamental en matière de droits des malades.
    Nous examinerons d’ailleurs un autre amendement à cet effet, l’amendement no 452 de M. Neuder. Il me semble essentiel de rejeter de telles propositions, car nous ne saurions revenir sur le droit de refuser un traitement, dont je rappelle que les Français y sont très attachés. (M. Michel Lauzzana et Mme Christine Pires Beaune applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Julien Odoul.

    M. Julien Odoul

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    Si nous débattons des critères d’accès à l’euthanasie, c’est en raison de l’échec du développement des soins palliatifs. (« Mais non ! » sur plusieurs bancs du groupe RE.) Si un grand nombre de nos concitoyens se tournent spontanément vers l’euthanasie, c’est à cause de votre échec criant et dramatique à leur donner accès aux soins palliatifs. Les statistiques le montrent, les soignants le disent : quand on offre à nos compatriotes en fin de vie l’accès aux soins palliatifs et qu’on traite leur douleur, ils ne veulent plus mourir. (Mmes Brigitte Liso et Sandrine Rousseau s’exclament.)
    Certains d’entre vous semblent oublier qu’il y a des personnes qui, même lorsqu’elles sont en fin de vie, qu’elles souffrent d’une maladie incurable et que leur pronostic vital est engagé, ne souhaitent pas mourir, mais veulent profiter de leurs derniers jours pour peu que leur souffrance soit traitée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN. – M. Marc Le Fur applaudit également.)

    M. David Valence

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    Et que faites-vous pour les autres ? Rien !

    M. le président

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    La parole est à Mme Perrine Goulet.

    Mme Perrine Goulet

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    De nombreuses raisons me poussent à vouloir voter contre l’amendement de réécriture. J’interpellerai M. Hetzel sur l’une d’entre elles, car la question me taraude. Vous proposez de remplacer le critère d’âge, fixé à dix-huit ans, par le critère de majorité civile, ce qui pourrait conduire à ouvrir l’aide à mourir aux mineurs émancipés. (Assentiment sur plusieurs bancs du groupe RE.) Le critère de majorité me semble bien plus dangereux que le critère des dix-huit ans ; je rappelle qu’aux termes de l’article 413-6 du code civil, « Le mineur émancipé est capable, comme un majeur, de tous les actes de la vie civile. »
    Votre amendement aurait pour effet de donner aux mineurs émancipés le droit à l’aide à mourir. Je vous invite donc à préférer le critère de l’âge à celui de la majorité civile.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Très bien !

    M. le président

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    La parole est à Mme Laure Lavalette.

    Mme Laure Lavalette

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    Je soutiens le sous-amendement de Mme Ménard : le traitement par des soins palliatifs doit être un préalable à l’euthanasie. En commission spéciale, l’extrême gauche a essayé pendant toute une après-midi de décorréler complètement la demande de mort de la souffrance, ce qui représenterait un changement anthropologique encore plus grand que celui que vous tentez d’imposer. Vous ne pouvez pas demander au législateur et à la société d’organiser l’euthanasie si vous la décorrélez de la souffrance ; cela me paraît intellectuellement inacceptable. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. Christophe Bentz

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    Eh oui !

    M. le président

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Le groupe La France insoumise votera contre l’amendement et le sous-amendement. Nous comprenons l’intention de M. Hetzel : il souhaite inscrire les dispositions relatives à l’aide à mourir non dans le code de la santé, mais dans le code pénal, parce qu’il estime – et c’est là le cœur du débat – qu’il ne s’agit pas d’un soin ni d’un acte de compassion, mais d’une exception à une règle de droit pénal. C’est la source de notre désaccord. Nous considérons que la notion de soin n’est pas uniquement curative, mais englobe tout ce qui contribue à guérir, à maintenir et à apaiser. Or le texte contribue à apaiser. Il participe donc d’une démarche de soin.

    M. le président

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    La parole est à Mme Emeline K/Bidi.

    Mme Emeline K/Bidi

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    Le code de la santé publique fait de la liberté de choix du patient un principe fondamental. Cette liberté implique la possibilité pour le patient de choisir son praticien, son établissement et son traitement, mais aussi de refuser le traitement. Si le patient ne souhaite pas accéder aux soins palliatifs, personne ne peut l’y obliger ni en faire dépendre l’accès à un autre droit. Le sous-amendement de Mme Ménard va profondément à l’encontre du principe de liberté de choix du patient.

    (Le sous-amendement no 3491 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 151 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements, nos 195 et 1734, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 195.

    M. Thibault Bazin

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    Je pense inopportun de codifier ces éléments dans le code de la santé publique, car ils s’opposent à ses principes fondamentaux ; c’est pourquoi cet amendement vise à supprimer les alinéas 1 à 3 de l’article 6. Pour vous rassurer, je précise que cela ne nous empêchera pas d’examiner les critères d’accès au dispositif, qui font l’objet des alinéas 4 et suivants.
    Nous ne sommes pas contre le principe de fixer des critères – bien au contraire, nous pensons que si vous légalisez le suicide assisté et l’euthanasie, il y faut des critères clairs et plus stricts que les vôtres –, mais nous sommes contre la rédaction actuelle de l’article, qui n’est ni satisfaisante, ni claire, ni même intelligible, ce qui entraîne d’ailleurs un risque d’inconstitutionnalité. Forte de votre expérience parlementaire et légistique, vous savez bien, madame la ministre, que les amendements tendant à supprimer un article sont malheureusement toujours examinés avant ceux qui visent à le modifier. En l’occurrence, cela est dommage, car nous préférons réexaminer les conditions d’accès au dispositif, mais ces amendements de suppression sont le seul moyen d’exprimer notre opposition à l’article en l’état.
    Sur le fond, l’amendement no 2494 du Gouvernement nous donne raison. Dans l’exposé des motifs, vous affirmez que « sans cet amendement, [le suicide assisté ou l’euthanasie] serait accessible avec une maladie grave et incurable sans engagement du pronostic vital. Par ailleurs, sans précision et au sens médical, [la notion de] ’’phase avancée’’ est trop large. » À vous en croire, le contenu de l’article est très inquiétant et le restera si votre amendement n’est pas voté ! L’adoption de l’article en l’état déséquilibrerait gravement le texte ; retirerez-vous le projet de loi le cas échéant ?

    M. le président

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 1734.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Il est similaire à celui de M. Bazin. L’euthanasie et le suicide assisté ne peuvent être considérés comme des soins ou comme des actes thérapeutiques. Par conséquent, il convient de supprimer les alinéas 1 à 3, qui auraient pour effet d’inscrire ces dispositions dans le code de la santé publique. L’amendement tend à revenir sur cette codification introduite en commission.

    (Les amendements nos 195 et 1734, repoussés par la commission et le Gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    M. le président

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille, pour soutenir l’amendement no 2337.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    La question se pose de savoir s’il faut inscrire le dispositif relatif à l’aide à mourir dans le code de la santé publique ou dans le code civil. Toutefois, nous en avons débattu lors de l’examen de l’article 5 et les amendements visant à l’inscrire dans le code civil n’ont alors pas été adoptés ; je retire donc celui-ci.

    (L’amendement no 2337 est retiré.)

    M. le président

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    La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 1515.

    M. Marc Le Fur

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    Je profite de l’amendement pour poser de nouveau quelques questions de principe. Dans notre société, deux philosophies se sont traditionnellement affrontées, tout en se retrouvant sur l’essentiel, sur des principes communs : l’attention aux plus faibles et l’interdit de tuer. D’une part, la tradition chrétienne, fondée sur le principe de la personne humaine, être social par excellence, et sur le respect de la vulnérabilité.

    M. Hadrien Clouet

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    On ne s’entre-tuait pas forcément avant le christianisme, vous savez !

    M. Marc Le Fur

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    D’autre part, une tradition plus laïque, de gauche, était aussi fondée sur la solidarité. Ces deux traditions d’origine très différente admettaient implicitement que le degré de civilisation d’un pays se mesure à la place réservée aux plus vulnérables. Je m’inscris dans l’une de ces traditions ; je crois que d’autres peuvent également se retrouver autour du principe de l’attention aux plus vulnérables. Or, avec ce projet de loi, nous nous en éloignons terriblement. La logique de ce texte est que chacun doit s’assumer, que cela ne regarde pas les autres, qu’au mieux la société doit encadrer l’euthanasie et le suicide assisté, mais en aucun cas protéger les plus fragiles. (M. Julien Odoul applaudit.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Avis défavorable. Nous avons déjà débattu de la sémantique.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Vous pourrez vérifier les définitions auprès du site du Centre national de ressources textuelles et lexicales. Je ne reviendrai pas sur ce que nous avons déjà dit ; je rappelle simplement que l’euthanasie se définit par le fait de donner volontairement la mort à une personne qui ne l’a pas demandé. (Protestations sur quelques bancs des groupes RN et LR.)

    M. Julien Odoul

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    N’importe quoi !

    (L’amendement no 1515 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l’amendement no 3063.

    M. Christophe Bentz

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    Il vise à exclure du dispositif « les personnes dont une maladie ou un trouble psychique ou neuropsychique altère gravement le discernement et l’exercice de leur volonté libre et éclairée », afin d’éviter toute forme d’abus moral et psychologique à leur encontre.
    Puisque, madame la ministre, vous fondez tout sur la question du choix, celui-ci doit être totalement libre.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Je rappelle que les conditions d’accès fixées par l’article 6 ne permettent pas à des personnes dont le discernement serait gravement altéré d’avoir accès à l’aide à mourir.
    J’ajoute que l’alinéa 3 de l’article 8, que nous avons déjà évoqué, exclut explicitement les personnes « dont une maladie altère gravement le discernement lors de la démarche de demande d’aide à mourir », car elles ne peuvent être regardées « comme manifestant une volonté libre et éclairée ». Il me semble donc que votre demande est satisfaite.
    L’avis de la commission est donc défavorable.

    (L’amendement no 3063, repoussé par le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such, pour soutenir l’amendement no 69.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    Face à l’opposition des 800 000 soignants ainsi que des médecins en soins palliatifs à ce projet de loi, ne serait-il pas judicieux de laisser aux seuls médecins volontaires l’administration de cette mort programmée ?
    Vingt organisations de soignants ont signé une tribune dans la presse pour exprimer leur opposition à ce texte. Si vous faites une recherche sur la fin de vie sur internet, vous trouverez le nom de toutes les organisations de soignants opposées au projet de loi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    (L’amendement no 69, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de six amendements, nos 898, 152, 3180, 1396, 716 et 66, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 898.

    M. Charles de Courson

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    Nous avons eu un grand débat en commission spéciale entre ceux qui voulaient que tous les patients concernés aient le choix entre deux branches d’une alternative et ceux qui le refusaient en soulignant que le Gouvernement, dans l’exposé des motifs, mentionne une « exception d’euthanasie », sans proposer au patient un choix entre l’administration de la substance létale par lui-même ou par un tiers. Avant que nous examinions les cinq critères d’éligibilité, je vous propose de préciser qu’il s’agit d’une « assistance au suicide avec exception d’euthanasie », car il faut souligner qu’il s’agit d’une exception.

    M. le président

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    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 152.

    M. Patrick Hetzel

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    Pour plus de clarté, il vise à employer les mots « euthanasie et au suicide assisté » plutôt que « aide à mourir ».

    M. le président

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    L’amendement no 3180 de M. Christophe Bentz est défendu.
    La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l’amendement no 1396.

    Mme Marie-France Lorho

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    L’emploi de l’expression « aide à mourir » souligne la proximité du Gouvernement avec l’Association pour le droit à mourir dans la dignité. Michel Castra, professeur de sociologie à l’université Lille 1, soulignait récemment dans Le Monde que cette formule était apparue dans les sondages réalisés par l’ADMD dans les années 1980-1990. C’est une expression idéale pour les personnes favorables à l’euthanasie et au suicide assisté, qui leur permettait de soutenir qu’une large majorité de Français étaient favorables à l’évolution de la législation. Cette hypocrisie dans l’emploi des termes nous choque d’autant plus que le principe de la sédation profonde et continue est assez mal connu des Français, alors même qu’il s’agit d’une solution éthique.
    À travers cet amendement, nous appelons une nouvelle fois le Gouvernement à faire usage des termes exacts : suicide assisté et euthanasie. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Julien Odoul, pour soutenir l’amendement no 716.

    M. Julien Odoul

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    Nous ne le rappellerons jamais assez, l’aide à mourir existe déjà : c’est la sédation profonde et continue jusqu’au décès, inscrite dans la loi Claeys-Leonetti en 2016 ; elle est pratiquée chaque jour par des soignants. Ce n’est pas l’euthanasie.
    Il faut être clair avec les mots pour être clair avec les actes. C’est une protection pour les soignants et surtout pour les patients en fin de vie, pour qu’il n’y ait pas de doute dans leur esprit. Quand on leur proposera l’aide à mourir dans la palette de solutions qui leur est présentée, il ne faut pas qu’ils se disent que celle-ci peut mener à l’euthanasie. Il faut avoir conscience que les patients en fin de vie peuvent changer d’avis très régulièrement, parce que leur état se modifie ou parce qu’ils reçoivent des avis contradictoires.

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such, pour soutenir l’amendement no 66.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    Monsieur le rapporteur général, vous avez expliqué au début de l’examen du texte que le terme « euthanasie », selon vous, n’était pas adapté à la législation de notre pays. L’amendement vise donc simplement à lui substituer l’expression « mort programmée ». (M. Christophe Bentz applaudit.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Nous avons déjà eu cette discussion à de nombreuses reprises. L’avis de la commission est défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    M. le président

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    La parole est à Mme Christine Pires Beaune.

    Mme Christine Pires Beaune

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    Nous voterons contre ces amendements. Comme certains persistent à prétendre que la loi Claeys-Leonetti suffit, je voudrais vous lire un témoignage, dont je précise qu’il ne concerne pas des personnes de mon entourage.

    M. Aurélien Pradié

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    Il ne faut pas faire ça !

    Mme Christine Pires Beaune

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    « Si j’avais pu transporter mon fils dans ma voiture et l’emmener en Belgique, je l’aurais sans doute fait, mais il était devenu intransportable hormis en ambulance. Les Belges et les Hollandais sont-ils des meurtriers ? Je ne le pense pas. Tous les membres de ma famille et de la famille de mon mari m’ont soutenue et n’ont pas compris que l’on ait pu laisser vivre mon fils dans ces conditions. Quand commence l’acharnement ? Où est l’humanité lorsqu’on s’obstine à ignorer la souffrance de l’autre ? Combien de temps allons-nous encore attendre avant que les mentalités changent sur le sujet, avant que, courageusement, on fasse évoluer la loi ? Combien de malades doivent encore tant souffrir ? J’en appelle à chacun. Merci de se poser la question suivante : comment réagiriez-vous si cela touchait votre fils, votre fille ou un être cher ? Afin que chacun puisse mourir dans l’apaisement et dans la dignité selon son désir ou à travers la parole d’un tiers qui l’aimera suffisamment et qui saura prendre ses responsabilités pour parler à sa place, j’en appelle à Mmes et MM. les députés : la loi Claeys-Leonetti a le mérite d’exister mais n’est pas adaptée au plus grand nombre. » (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    M. Julien Odoul

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    À une minorité, pas au plus grand nombre !

    M. le président

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet.

    Mme Danielle Simonnet

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    Dans les rangs du Rassemblement national, on nous explique que l’expression « aide à mourir » serait hypocrite, qu’elle masquerait la réalité. Quelle hypocrisie que de dire cela ! Vous estimez que la loi Claeys-Leonetti devrait suffire. Combien de fois faudra-t-il vous expliquer ce que signifie la « sédation profonde et continue jusqu’au décès » ? Quand un patient est placé en sédation profonde et continue jusqu’au décès, on arrête l’hydratation et l’alimentation.

    M. René Pilato

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    Eh oui !

    M. Julien Odoul

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    Mais on n’administre pas la mort !

    Mme Danielle Simonnet

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    Les Françaises et les Français le savent pertinemment : s’ils sont favorables à 90 % au droit à mourir dans la dignité, c’est parce que, précisément, ils estiment qu’une agonie qui peut durer plusieurs jours ou plusieurs semaines est en dehors de l’humanité. Ils souhaitent avoir une autre fin de vie digne. Dans ce but, que l’administration de la solution létale soit faite par le patient lui-même ou par un tiers, cela revient au même : il s’agit d’une aide à mourir, et les Français la plébiscitent.

    M. le président

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz

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    Je n’ai pas défendu l’amendement no 3180, car j’estime que nous avons eu ce débat. Cependant, madame la rapporteure, vous nous relancez, car ce que vous dites n’est pas vrai : nous avons eu le débat sémantique sur l’euthanasie et le suicide assisté, pas sur la mort programmée, qui fait l’objet de l’amendement no 66. Il est différent de parler d’aide à mourir ou de mort provoquée ou administrée. Nous vous avons reproché à de nombreuses reprises la sémantique mensongère que vous utilisez. Je vous poserai une question précise : quelle est la différence entre administrer une substance létale et administrer la mort ?

    M. Bruno Millienne

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