XVIe législature
Session ordinaire de 2023-2024

Première séance du jeudi 06 juin 2024

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Première séance du jeudi 06 juin 2024

Présidence de Mme Valérie Rabault
vice-présidente

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Accompagnement des malades et de la fin de vie

    Suite de la discussion d’un projet de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie (nos 2462, 2634).

    Discussion des articles (suite)

    Mme la présidente

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    Hier soir, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi et commencé d’examiner, à l’article 5, les amendements no 555 et identiques et les amendements no 53 rectifié et identiques, en discussion commune.

    Article 5 (suite)

    Mme la présidente

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    Les amendements ont été présentés par leurs auteurs et ont reçu un avis défavorable de la commission et du Gouvernement. Hier soir, la présidente a accepté que deux orateurs par groupe puissent s’exprimer ce matin sur ces amendements en discussion commune.

    Mme la présidente

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    Sur les amendements no 555 et identiques, je suis saisie par le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Laurence Cristol.

    Mme Laurence Cristol

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    Nous nous sommes quittés hier soir sur un point particulièrement important. Au cours des cinquante heures d’auditions de la commission spéciale, aucun des acteurs interrogés, si ce n’est l’Association pour le droit à mourir dans la dignité (ADMD), ne s’est dit favorable à l’administration de la substance létale par un proche. Nous avons tous ou bien accompagné des proches pendant une longue maladie, ou bien rencontré des personnes qui ont endossé ce rôle. Devoir administrer une substance létale à un parent revient à cumuler un très grand nombre d’épreuves. D’après les chiffres, les personnes placées dans cette situation affichent un taux important de renoncement aux soins et un taux de prévalence de problèmes de santé mentale largement supérieur à la normale. Ce n’est pas un hasard si l’on parle de « syndrome de l’aidant ».
    Mon expérience de trente années de consultations avec des personnes en fin de vie m’a convaincue de la nécessité de préserver les proches, ceux qui restent, de ces situations difficiles. Cette question irrigue nos débats depuis lundi dernier et nous avons adopté, à plusieurs reprises, des mesures visant à renforcer leur information, leurs droits et leur accompagnement. Continuons dans cette voie. Nous examinerons bientôt un amendement de notre collègue Jean-François Rousset, qui défend la même position.
    L’administration d’une substance létale par un proche serait une innovation unique au monde. Ce n’est pas une mauvaise idée : c’est une très mauvaise idée ! (MM. Gilles Le Gendre et Jocelyn Dessigny applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. David Valence.

    M. David Valence

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    La possibilité donnée à un proche d’accomplir ce geste ultime serait en effet une innovation, mais si elle était introduite dans notre droit, cette mesure permettrait de rassurer à la fois les soignants, en garantissant leur liberté de conscience, et les malades, qui auraient ainsi – Mme la rapporteure l’a souligné très justement hier – l’assurance de voir leur volonté respectée quand le personnel médical refuse d’accomplir cet acte – auquel il est pourtant autorisé –, et quand la mort est une question de jours.
    Comme vous tous, je me suis beaucoup interrogé. Le traumatisme d’un aidant ou d’un proche susceptible d’administrer la substance létale relève, en vérité, de la relation intime entre deux personnes. Certains ne pourraient pas assumer un tel geste, mais a-t-on le droit de l’empêcher lorsqu’il est possible ? Je ne le crois pas. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet.

    Mme Danielle Simonnet

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    Je reconnais que, sur cette question, j’ai douté. Pendant les auditions de la commission spéciale, j’ai changé plusieurs fois d’avis. Le décès d’un proche peut évidemment être traumatisant. La mort traumatise, surtout quand elle est violente. L’agonie de ceux qu’on aime, quand elle se mêle de souffrance, crée aussi un traumatisme. Bien sûr, il faut renforcer l’accompagnement des proches avant et après. Mais qui sommes-nous pour juger et interdire ? A fortiori lorsque l’administration d’une substance létale par un tiers est déjà une réalité.
    Vous avez tous en tête des exemples de sédation profonde et continue ayant mené au décès après qu’un proche a augmenté la dose pour abréger les souffrances du malade. Parce que la possibilité existe déjà, la seule question qui mérite d’être posée est de savoir si on protège les soignants qui entourent le malade et les aidants qui ont agi en toute conscience, en accord avec lui. Autoriser les proches à administrer la substance létale est un gage de respect pour tous.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Panifous.

    M. Laurent Panifous

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    Je serai bref car j’ai défendu hier soir ma position, inverse à celle qui vient d’être exposée, en présentant l’amendement no 986. Comme l’a souligné David Valence, la question de l’intimité est essentielle sur le sujet qui nous occupe, mais c’est précisément en raison de l’intimité qui existe au sein de la famille que l’on doit supprimer la possibilité, pour une personne ayant recours à une aide à mourir, de se faire administrer la substance létale par un proche. Ce geste est trop lourd à porter. En outre, quelle est la liberté de celui auquel un proche fait une telle demande ? Comment pourrait-il lui dire non ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette.

    M. Stéphane Delautrette

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    Nous discutons d’une question extrêmement délicate, sur laquelle nous nous sommes beaucoup interrogés et sur laquelle nous avons beaucoup varié au sein du groupe Socialistes et apparentés. Comme beaucoup d’entre vous, j’ai organisé une réunion publique sur le thème de la fin de la vie dans ma circonscription : plusieurs personnes accompagnant un proche malade depuis des années m’ont affirmé qu’elles estimaient normal de le faire jusqu’au bout et normal d’administrer la substance létale. En tant qu’aidants, elles considèrent aussi ce geste comme un moyen de faire leur deuil. J’ai conscience de la difficulté que posera l’ouverture d’une telle possibilité, mais ce qui comptera, je pense, sera l’accompagnement, dans leur processus de deuil, des proches qui ont accepté cette responsabilité en toute conscience. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RE et LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Des amendements à l’article 5 proposent même la suppression de la possibilité pour un infirmier d’administrer la substance létale.

    Mme Frédérique Meunier

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    Pas tous !

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Certains de nos collègues ont en tout cas défendu cette position.
    Sur la notion de personne volontaire et le rôle des proches, notre collègue vient de le dire, nous avons beaucoup réfléchi, écouté et discuté. Nos avis ont évolué au cours des travaux de la commission spéciale. Doit-on autoriser un proche qui souhaite – vraiment – accompagner un malade jusqu’au bout et administrer la substance létale à le faire ? Si ces amendements sont adoptés, ce ne sera pas possible. Parce que nous pensons qu’il faut faire preuve d’humanité, nous voterons donc contre.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    Madame la rapporteure, il convient, dans le rôle du proche, de distinguer la présence et l’action : l’implication n’est pas la même entre le suicide assisté et l’euthanasie. Le suicide assisté n’implique pas l’intervention du proche pour l’injection du produit létal. Le proche peut être présent, mais il n’est pas l’auteur du geste, soit une charge psychologique bien différente. Je précise, par ailleurs, que ce n’est pas l’alinéa 6, sur lequel portent les amendements, qui permettra d’éviter des poursuites pénales, mais l’alinéa 7.
    Madame la ministre, pour la procédure, vous nous renvoyez à l’article 11, qui autorise le recours à l’aide à mourir que la personne soit capable ou non de s’administrer la substance létale : il n’y aurait donc plus d’exception à l’euthanasie. D’ailleurs, n’aurait-il pas fallu attendre l’avis de la Haute Autorité de santé (HAS) sur le mode d’ingestion ou d’injection ? Ce n’est pas sans enjeu pour les tiers.
    Nous sommes confrontés à un problème de méthode. L’article 5 définit et autorise l’aide à mourir en permettant l’administration du produit létal par un proche, mais il ne précise pas qu’un malade doit pouvoir refuser qu’un proche accomplisse ce geste. Le texte doit être corrigé sur ce point.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Le sujet dont nous discutons est crucial. Un grand nombre d’entre nous avons répété que nous n’étions pas d’accord avec l’euthanasie et que nos questions légitimes s’effaceraient dès lors que la mort administrée se limiterait – si je puis dire – au suicide assisté. La charge des soignants serait ainsi allégée – ils sont nombreux à dire qu’ils ne sont pas prêts à effectuer cet acte – et les proches seraient dispensés d’une démarche lourde à porter. Qu’un proche accepte, par amour, d’administrer une substance létale ou qu’il s’y refuse, dans les deux cas, la décision est difficile. Tout atteste qu’un deuil est beaucoup plus traumatisant après une euthanasie, en raison de la transgression d’un interdit fondamental. (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – M. Vincent Bru applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Il existe peu de publications sur l’implication des proches dans un suicide assisté et sur ses conséquences, mais j’ai eu connaissance d’une étude parue en Suisse, en décembre 2007, portant sur quatre-vingt-cinq parents et amis témoins d’un suicide assisté – elle ne porte pas sur les proches qui auraient aidé au suicide, soit une situation encore plus douloureuse. Cette étude a révélé une prévalence plus élevée des états de stress post-traumatique et de deuils compliqués chez ces personnes que si elles avaient assisté à un décès naturel. Le traumatisme créé par un suicide assisté chez les proches d’une personne qui y a recouru est différent de celui que peut provoquer une mort naturelle ou un suicide normal.

    M. Hadrien Clouet

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    C’est quoi un suicide normal ?

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Je le souligne par honnêteté intellectuelle.
    Bien que le suicide assisté permette de faire ses adieux et rende le moment de la mort plus prévisible, les images de la mort peuvent causer des symptômes de stress chez les proches. Selon l’étude, 13 % des endeuillés montraient des symptômes d’état de stress post-traumatique total et 6,5 % des états partiels, 4,9 % étaient confrontés à un deuil complexe, 6 % à l’anxiété, 16 % à la dépression.

    Mme la présidente

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    Merci, chère collègue.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    De telles constatations remettent en question le caractère individuel, autonome et libre d’une fin de vie… (Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice, dont le temps de parole est écoulé.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jocelyn Dessigny.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Je me suis déjà exprimé sur ce sujet, mais la communication est l’art de la répétition. Comment faire son deuil en portant le poids de la culpabilité d’un tel geste, qu’on l’ait effectué soi-même, par amour, ou non ? Le projet de loi se concentre sur le malade, qui souffre, mais il faut aussi penser à ceux qui restent. Eux aussi souffrent, d’une manière ou d’une autre, qu’ils aient appuyé sur le bouton ou non. Ils doivent vivre avec leur conscience et les dégâts psychologiques et psychiatriques causés par leur geste peuvent être dramatiques. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.) Vous n’avez manifestement pas anticipé ces situations.

    Mme Caroline Fiat

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    Mais si !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Je vous demande d’y réfléchir. Même un geste effectué par amour peut être traumatisant. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Dharréville.

    M. Pierre Dharréville

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    De nouveau, je veux vous dire la perplexité qui est la mienne face à ce débat.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet

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    …qui n’est pas que la vôtre !

    M. Pierre Dharréville

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    Les mesures que nous examinons traduisent la philosophie du projet de loi : il s’agit de répondre à la demande de la personne et de respecter sa pleine liberté. Autoriser un proche à intervenir, s’il est volontaire ou accepte cette responsabilité, s’inscrit dans cette même philosophie.
    Comment fixer des limites à l’affirmation de ce principe ? Certains orateurs ont résumé la philosophie du texte en demandant : « Qui sommes-nous pour interdire ? » Nous pouvons aussi nous demander qui nous sommes pour autoriser, qui nous sommes pour participer. Comme je ne vois pas de bonne solution, je suis plutôt rétif à l’idée qu’on aille vers l’autorisation de l’intervention d’un proche, car je la trouverais vertigineuse.

    M. Patrick Hetzel

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    Très juste !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Le groupe La France insoumise ne votera pas ces amendements car nous sommes favorables à ce que l’intervention d’un tiers soit possible. Nous trouvons en effet paradoxale la position de leurs auteurs qui disent qu’aider à mourir ne serait pas un acte médical. Pourquoi alors les soignants en auraient-ils le monopole, pourquoi alors empêcher un tiers de l’accomplir ? Il faut savoir : soit il s’agit d’un geste à caractère médical – ce qui justifierait une exclusivité –, soit il s’agit d’un acte de compassion et de soin – et nous sommes tous capables, vis-à-vis d’un proche, d’exprimer notre compassion et d’effectuer un soin dans un cadre donné.
    Par ailleurs, j’ai été étonné par les propos de notre collègue Ménard qui a distingué suicide assisté et suicide « normal ». Pour ma part, je ne sais pas ce qu’est un suicide normal, je ne connais pas ce concept. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – MM. Joël Giraud et Gilles Le Gendre applaudissent également.) En revanche, je sais ce qu’est un acte de soin, de compassion ou d’amour et je sais qu’avoir des compétences médicales n’est pas un prérequis pour l’accomplir. (Mme Emmanuelle Ménard s’exclame.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sébastien Peytavie.

    M. Sébastien Peytavie

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    Nous parlons d’une situation extrême, avec une personne qui a des douleurs réfractaires et est en fin de vie. Une telle situation est forcément éprouvante pour les proches. Le risque de traumatisme en cas d’aide à mourir a été évoqué mais, même sans cela, voir un proche dans cet état-là est psychologiquement difficile.
    Pour le patient comme pour les personnes de son entourage susceptibles d’intervenir si elles le veulent, avoir le choix permet de vivre la situation le mieux possible. C’est subir – et ne pas avoir le choix – qui est terrible et provoque des traumatismes.
    La rédaction actuelle permet au malade de choisir – c’est un élément qu’il faut maintenir. Cela ne veut pas pour autant dire que son choix se portera forcément sur un tiers. Il se portera certainement plus souvent sur un médecin ou un soignant.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure de la commission spéciale pour les articles 4 quater à 6.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure de la commission spéciale

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    J’ai eu l’occasion de m’exprimer hier soir mais la clarté des idées du matin va me permettre de reprendre l’exemple que j’ai exposé. Évidemment, il s’agit d’une question de liberté et de choix. Imaginons un malade atteint de douleurs insupportables qui aurait décidé d’arrêter ses traitements. Atteint d’une maladie grave et incurable en stade avancé ou terminal, il a sollicité une aide à mourir qu’une décision médicale lui a accordée.
    Enfin, il demande à mourir à son domicile. Or, à vous entendre, j’ai l’impression que vous pensez que l’aide à mourir interviendra toujours dans un univers très médicalisé, à l’hôpital ou en Ehpad. En réalité, les gens voudront mourir chez eux. Nous devons leur accorder cette liberté.
    Je suis élue dans une zone rurale. Imaginons encore un instant : le médecin de famille, qui suit le malade depuis des années, accepte de tout organiser à domicile et d’accompagner le processus jusqu’au dernier moment. Invoquant sa clause de conscience, il refuse toutefois d’administrer la substance létale. En revanche, les proches se disent prêts, après en avoir parlé, à aider le malade, leur malade, dans ses derniers instants. Supprimer de l’article 5 le recours à une personne volontaire reviendrait à éliminer cette possibilité. Pire encore, puisque l’on sait que les choses auraient quand même lieu, vous rendriez pénalement responsable cette personne. Je vous invite donc à ne pas adopter ces amendements. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Mme Danielle Simonnet et M. Matthias Tavel applaudissent également.)

    M. Patrick Hetzel

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    Vous faites comme si ça se passait toujours bien !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Et dans le cas d’une famille toxique, ça se passe comment ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur général de la commission spéciale.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général de la commission spéciale

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    Très régulièrement au cours de nos débats, nous avons évoqué la nécessité du doute permanent, de l’incertitude. Nous devons bien réfléchir aux décisions que nous allons être amenés à prendre. Cette humilité et cette réflexion profonde sont particulièrement nécessaires au moment de répondre à une question susceptible de tous nous troubler, celle de l’intervention d’une personne volontaire dans le processus d’aide à mourir. Après nous être interrogés, nous devons, en tant que législateurs, prendre une position. Je me suis forgé la mienne au fil des auditions et de rencontres avec des acteurs de terrain.
    Le texte a été conçu autour de trois volontés – certes difficiles à satisfaire. La première, dans ces dernières minutes particulièrement douloureuses, est celle de l’intimité. N’oublions jamais que le moment du départ doit être profondément intime. Cette intimité doit être possible pour tous les malades qui auront sollicité et obtenu une aide à mourir.
    La deuxième volonté concerne la sécurité de l’acte. C’est pourquoi la procédure prévoit qu’un professionnel de santé soit toujours présent. Toutefois, pour préserver l’intimité, il ne sera pas obligatoirement aux côtés du malade. Il pourra être à proximité, prêt à intervenir si l’acte létal ne se passe pas comme prévu.
    Après l’intimité et la sécurité, la troisième volonté est celle de la protection. Comme cela a été dit et comme j’en suis convaincu, ce projet de loi va protéger les soignants.

    M. Fabien Di Filippo

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    C’est la loi actuelle qui les protège !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Elle va notamment protéger les médecins qui, déjà, par compassion et humanité mais dans le secret, aident à mourir. Il y aura toujours un professionnel de santé à proximité mais il faut aussi penser aux situations où le malade et un proche volontaire auront décidé ensemble que l’acte final, dans un geste d’amour et de compassion, sera effectué par ce dernier et non par un professionnel de santé.
    À titre personnel, je ne me vois pas interdire cette possibilité. Vous me demanderez peut-être pourquoi. D’une part, je pense que ces situations seront rares.

    M. Jocelyn Dessigny

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    On ne peut pas savoir !

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    D’autre part, je pense qu’elles résulteront d’un choix fait en amont et longuement réfléchi entre deux personnes qui s’aiment. Ces situations nécessiteront de prévoir un accompagnement en aval pour les personnes qui en auraient besoin. Anticipation et accompagnement sont deux notions qu’il me paraît indispensable d’associer à la possibilité qui est offerte.
    Je le répète : j’exprime ce matin le fruit d’une longue réflexion au cours de laquelle j’ai douté. Je ne vous dis pas que je ne doute plus. En revanche, je suis convaincu qu’il n’est pas possible d’interdire que, dans certaines circonstances, quand le malade le souhaite, quand le proche en est d’accord, soit accompli un geste qui, à tort ou à raison, peut être considéré comme un acte d’amour envers son prochain. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE. – Mme Danielle Simonnet applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre du travail, de la santé et des solidarités.

    Mme Catherine Vautrin, ministre du travail, de la santé et des solidarités

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    Au moment où nous en sommes de notre discussion, je reviendrai sur plusieurs points et d’abord sur les principes qui guident ce texte, des principes de liberté et de volonté – volonté du patient mais également volonté des soignants. Nous l’avons déjà souvent dit, mais il s’agit d’un point qu’il faut reprendre inlassablement.
    Un autre principe me paraît très important : celui de l’auto-administration. Il est néanmoins nécessaire de prévoir les cas où un patient qui a demandé à bénéficier de l’aide à mourir ne peut pas s’administrer le produit – c’est l’un des objets de l’article 11. Nous avons à travailler sur ces situations. C’est la raison pour laquelle nous avons saisi la HAS sur des évolutions techniques permettant d’étendre les possibilités d’auto-administration.
    Toutefois, nous devons aussi entendre la volonté des patients qui refuseraient l’auto-administration. Dans cette hypothèse-là, qui procède au geste ? Nous avons parlé du personnel médical et nous en arrivons, avec les amendements dont nous discutons, au sujet sensible des proches. Pour des raisons que nous n’avons pas à juger mais que nous devons anticiper, même une personne qui, après réflexion, aurait accepté de pratiquer le geste pourra, au dernier moment, changer d’avis. Il faut envisager cette situation.
    Vous voyez donc que nous sommes confrontés à un nombre important d’inconnues. En dépit de cela, un texte doit devenir effectif et, en l’occurrence, une personne qui a demandé l’aide à mourir doit pouvoir effectivement en bénéficier. C’est la raison pour laquelle, si l’auto-administration doit rester le principe, il faut autoriser et organiser l’intervention d’une personne autre que le patient. C’est aussi la raison pour laquelle je suis défavorable à ces amendements.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 555, 953, 986, 2308, 2788 et 3050.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        95
            Nombre de suffrages exprimés                85
            Majorité absolue                        43
                    Pour l’adoption                43
                    Contre                42

    (Les amendements identiques nos 555, 953, 986, 2308, 2788 et 3050 sont adoptés ; en conséquence, les amendements identiques nos 53 rectifié, 1730 et 2933 tombent, ainsi que tous les amendements du no 510 au no 2355 et tous les amendements du no 529 au no 1691.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de trois amendements, nos 108, 445 et 444, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 108 et 445 sont identiques.
    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 108.

    M. Thibault Bazin

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    Puisque nous venons d’éviter que les proches participent à l’euthanasie, il faudra mettre en cohérence les articles suivants avec cette décision, de manière que la loi soit intelligible et claire – mais changeons de sujet.
    L’amendement no 108, issu d’une suggestion de notre collègue Yannick Neuder, vise à préciser que les infirmiers qui pratiqueront un suicide assisté ou une euthanasie seront volontaires, agréés et inscrits sur un registre du conseil départemental de l’ordre professionnel compétent. Cela permettrait de les identifier, ce qui leur assurerait une meilleure visibilité auprès tant des patients que des pouvoirs publics. En effet, dans les pays qui ont légalisé l’euthanasie, une très faible minorité de professionnels acceptent d’effectuer ce geste : 1,3 % des médecins au Canada en 2020, par exemple. D’où l’intérêt de disposer d’une liste de volontaires locaux.
    En outre, considérant qu’administrer une substance létale n’est pas un geste anodin, nous estimons qu’un agrément, qui sanctionnerait par exemple une formation ou une sensibilisation, est nécessaire.

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 445 et 444 de M. Yannick Neuder sont défendus.

    (Les amendements identiques nos 108 et 445, repoussés par la commission et le Gouvernement, ne sont pas adoptés.)

    (L’amendement no 444, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 510 à 2355 étant tombés, la parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 1193.

    Mme Justine Gruet

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    Il s’agit de préciser que l’administration létale ne peut être réalisée par une autre personne que si la personne malade est dans l’incapacité physique de le faire elle-même et que cette incapacité physique est constatée par un médecin.
    Nous en revenons ainsi à la notion d’incapacité physique ou d’incapacité psychique. Il est à mon sens très important que la responsabilité de l’acte n’incombe pas à une tierce personne. Peut-être allez-vous penser que nous nous répétons mais le texte manquant de précision, il serait bon d’écrire les choses noir sur blanc de manière à protéger les personnes qui auront à appliquer le texte et à leur éviter des difficultés ; il ne faut pas qu’il y ait le moindre doute sur le fait que la personne qui la demande peut déléguer l’injection.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je comprends votre objectif mais rappelons le contexte : il s’agira d’une personne très gravement malade, qui souffre et qui est suivie par plusieurs médecins ; l’évaluation de son état aura lieu tous les jours, si j’ose dire. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    J’entends ce que vous dites, madame la ministre, mais je soutiens l’amendement. En effet, on observe un décalage entre vos propos et ceux de M. le rapporteur général. Ce dernier affirme qu’il y a deux choix successifs : celui du patient et celui du proche. On voit bien que le texte ne défend pas une version restrictive des choses mais qu’il y a la volonté d’ouvrir beaucoup plus largement le recours au suicide assisté et à l’euthanasie. C’est cette volonté que nous combattons. Contrairement à ce que vous indiquez, madame la ministre, il ne s’agit pas d’autoriser seulement quelques cas ; depuis l’examen du texte en commission spéciale, les choses sont claires : on veut aller vers quelque chose de très massif.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    De très massif ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles de Courson.

    M. Charles de Courson

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    Notre collègue Gruet a raison de soulever le problème. Qui sera capable de dire que le patient est dans l’incapacité physique de réaliser l’acte : lui-même, le médecin, l’infirmier, quelqu’un d’autre ? L’amendement me semble plein de sagesse. Il paraît exclu que ce soit le patient lui-même qui déclare son incapacité physique à réaliser l’acte.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Qui le sait mieux que lui ?

    M. Charles de Courson

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    Ma chère collègue, tout le monde peut dire cela et, du coup, vous allez vider le texte de son contenu. Il faut impérativement dire qui dresse ce constat. Cela ne peut être la personne concernée elle-même. Qui donc, si ce n’est le médecin ou l’infirmier ? En l’espèce, il me semble que cela relève plutôt de la compétence du médecin.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Fabien Di Filippo.

    M. Fabien Di Filippo

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    Je défends l’amendement. En effet, tout comme Patrick Hetzel, j’ai noté une réelle divergence entre la ministre et le rapporteur général à l’occasion de leurs dernières prises de parole. Autant je ne doute pas de la bonne foi de Mme la ministre, qui vient encore d’insister sur le critère de l’incapacité physique, autant j’ai perçu dans les paroles du rapporteur général des choses qui allaient bien au-delà.
    Si le constat de l’incapacité physique ne pose pas de problème, si cela se fait de manière médicale, alors inscrivons-le dans la loi de manière à sécuriser le dispositif. Hier soir, un amendement, qui n’a pas été défendu, visait à ajouter le critère de l’incapacité psychologique à accomplir le geste. Cela m’effraie : on ouvrirait ainsi la porte à des interprétations et à des évolutions réglementaires qui nous échapperaient complètement ! Je rappelle qu’à l’origine, le texte devait ouvrir une exception très encadrée. C’est un tel encadrement que nous proposons.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette.

    M. Stéphane Delautrette

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    En réalité, chers collègues de droite, vous êtes contre l’instauration d’une aide à mourir et vous faites tout votre possible pour rendre ce texte inopérant afin que personne ne puisse accéder à cette nouvelle possibilité. (« Bravo ! » et applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES. – Mmes Sandrine Rousseau et Nathalie Bassire applaudissent également.)

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Évidemment !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Julie Laernoes.

    Mme Julie Laernoes

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    Je suis totalement d’accord avec ce que vient de dire notre collègue Delautrette.
    Il existe différents modes d’administration de la substance létale, parmi lesquels l’administration par voie orale. Souvent, la personne ne sera pas en état de l’ingérer ou de faire elle-même le geste. Je fais partie des personnes qui pensent qu’on doit pouvoir choisir que cet acte soit réalisé par un médecin, parce qu’il s’agit d’un acte médical. L’auto-ingestion d’un produit peut poser des problèmes : la dose peut ne pas être la bonne, on peut vomir le produit, etc. Et oui, je plaide pour que nous ajoutions le critère de l’incapacité psychologique à celui de l’incapacité physique.

    M. Fabien Di Filippo

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    Voilà ! C’est ça, la réalité !

    Mme Julie Laernoes

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    Faut-il codifier tout ce qui concerne le produit, le mode d’administration, le processus ? Laissons le libre choix. Votre obstruction atteint ses limites.

    (L’amendement no 1193 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 529 à 1691 étant tombés, nous en venons aux amendements nos 144 et 2853, qui peuvent être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 144.

    M. Patrick Hetzel

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    Il est impératif de se préoccuper des risques d’abus de faiblesse. (Murmures. – « Cet amendement est tombé ! » sur divers bancs.) On compte chaque année, en France, au moins 500 condamnations pour abus de faiblesse. Le dispositif qui est conçu comporte des risques pour les personnes en situation de faiblesse ou de vulnérabilité. Il semble donc nécessaire de prévoir certaines garanties. D’où cet amendement qui vise à préciser que l’aide à mourir ne peut être considérée comme un soin car cela entrerait en contradiction avec ce qui a été dit jusqu’à présent.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Ce qui vient d’être dit n’a rien à voir avec l’amendement !

    M. Jérôme Guedj

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    Eh oui ! Vous avez défendu l’amendement no 529, monsieur Hetzel !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Vincent Bru, pour soutenir l’amendement no 2853.

    M. Vincent Bru

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    Cet amendement a été déposé à l’initiative de notre collègue Maud Gatel, qui y tient énormément. Il s’agit de rappeler que l’aide active à mourir n’est pas un soin et ne peut pas le devenir.
    Le mot « soin » se traduit par deux mots différents en anglais : « cure », au sens de « traiter », et « care », au sens de « prendre soin ». L’euthanasie et le suicide assisté autorisés par le présent projet de loi ne sont ni des traitements ni des manières de prendre soin.
    Si le texte permet aux médecins de pratiquer le geste létal, il importe de distinguer celui-ci du reste de leur travail, axé sur le soin.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements en discussion commune ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Avis défavorable sur les deux.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    L’objet de ces amendements est, comme vient de l’indiquer le député Bru, de définir l’aide à mourir comme ne relevant pas d’un soin. L’alinéa 2 de l’article L. 1110-5 du code de la santé publique, cité par l’amendement no 144, est ainsi rédigé : « Toute personne a le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance. Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté. »
    À cette fin, le projet de loi défend le droit de chacun à avoir une fin de vie digne et à être accompagné par un professionnel de santé ayant la charge d’apaiser sa souffrance – par « tous les moyens », je le répète, aux termes de l’article L. 1110-5 du code de la santé publique. Loin de le contredire, le texte en précise les contours. Voilà la raison pour laquelle je suis défavorable à ces amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq.

    Mme Geneviève Darrieussecq

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    Je suis favorable à ces amendements. Vous l’aurez compris depuis le temps que je le répète ici : je pense qu’il faut distinguer les soins, y compris la sédation profonde et continue prévue par la loi Claeys-Leonetti – soin ultime, pratiqué jusqu’à la fin de la vie de la personne –, de l’injection d’un produit létal, qui n’est pas un soin à mes yeux. Je n’ai pas dit qu’il ne fallait pas y recourir dans certains cas – c’est une autre question. Cet acte répond à une demande sociétale, mais, j’y insiste, n’est pas un soin. (MM. Charles de Courson et Dominique Potier applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Nous touchons, pardon de vous le dire, à une forme d’hypocrisie et d’indifférence aux patients. Est considéré comme un acte médical le fait de débrancher une personne. Vous n’avez pourtant jamais pris la parole pour demander à exclure un tel acte ou l’arrêt des soins en général de la liste des actes et des décisions relevant des médecins. En l’occurrence, l’acte demandé est un soin ultime. Pensez à des personnes qui étouffent, qui n’arrivent pas à respirer – nous ne travaillons pas sur des questions purement théoriques ! –, quel soin peut leur être administré ? Comment justifiez-vous de ne pas fournir d’aide à mourir si de telles personnes la demandent ? En quoi ne serait-ce pas un soin ? L’aide à mourir est un soin, un soin ultime. C’est en quoi notre point de vue diffère du vôtre depuis le début de ces débats ; nous le réaffirmons en nous opposant à ces amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Je défendrai l’amendement de Maud Gatel, dont l’importance tient à ce qu’il enlève la pression sur les médecins. J’entends ce que dit Mme Rousseau, mais son caractère intentionnel fait que l’aide à mourir n’a rien à voir avec le refus de l’obstination thérapeutique.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Débrancher quelqu’un, c’est intentionnel !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Le dispositif prévu par la loi Claeys-Leonetti amène certes le décès, mais il n’y a pas d’intention.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Quand vous débranchez quelqu’un, vous savez ce que vous faites !

    M. Frédéric Petit

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    On peut écouter ?

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, madame Rousseau, vous avez eu la parole. On écoute M. Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    C’est comme un accident de voiture : lorsque vous écrasez quelqu’un, avez-vous l’intention de le faire ? Pour nous, la différence est très importante. C’est pourquoi je pense qu’il faut écrire dans l’article qu’il ne s’agit pas d’un soin. C’est un acte compassionnel, que le soignant peut faire, mais ce n’est pas un soin, un acte positif, qui ferait partie de ses missions. Il importerait de le préciser à l’article 5 pour alléger un peu la charge, difficile à imaginer, qui pèse sur les épaules des médecins au moment de pratiquer un tel acte. (Mme Panosyan-Bouvet applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Ce débat est particulièrement intéressant parce qu’il met au jour les frontières qui nous séparent. La raison de notre opposition est simple : si vous inscrivez cet acte, létal, dans le continuum des soins, vous tendez à le banaliser. Voilà ce que nous ne souhaitons absolument pas. Il doit s’agir d’une exception. Nous sommes un certain nombre ici à considérer le fait de permettre une telle transgression comme une rupture anthropologique majeure : c’est un tabou que de tuer ! (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RE.)
    Dès lors qu’on le fait, il faut dire les choses. Les Anglo-saxons ont deux termes : cure et care. Ne demandez pas à ceux qui ont la charge du cure de faire leur la logique qui les conduirait à pratiquer l’acte létal – c’est d’une autre nature. Acceptez que, sur une telle question, nous ayons une conception fondamentalement différente de la vôtre.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Michel Lauzzana.

    M. Michel Lauzzana

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    Nous avons, nous aussi, des convictions et des choses à exprimer. Pour moi, l’administration d’un produit létal est un soin, le soin ultime. Les philosophes entendus par la commission spéciale l’ont bien dit.
    Cela tourne au bal des hypocrites : s’il ne s’agit pas d’un soin, la sédation profonde et continue en est-elle un ? (M. Cyrille Isaac-Sibille proteste.) Quelle est votre position ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)
    Vous n’êtes pas d’accord et vous cherchez des prétextes, arrêtez ces manœuvres dilatoires ! (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal.

    Mme Annie Vidal

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    La discussion est intéressante ; elle conduit chacun à exposer son interprétation. Pour ma part, je voudrais revenir à ce qui figure dans le texte, à savoir que l’aide à mourir n’est pas punie par la loi, au sens de l’article L. 122-4 du code pénal : « N’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires. » Si l’on s’en tient à cela, il ne s’agit pas d’un soin. (Mme Nathalie Bassire applaudit.)

    M. Charles de Courson

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    Absolument !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Les arguments que nous énonçons n’ont rien de dilatoire. Il s’agit au contraire d’une des questions fondamentales de ce débat : le fait de donner la mort est-il un soin, ou non ? Nous répondons clairement que ce n’en est pas un. L’affirmer pervertirait le sens même du soin et du rôle du médecin. (Exclamations sur quelques bancs des groupes RE et LFI-NUPES.)
    Preuve en est que vous n’avez pas voulu de notre amendement affirmant qu’il n’y a pas de continuum entre les soins palliatifs et l’aide active à mourir, dont nous considérons qu’il trace une frontière délimitant clairement le rôle de chacun. Donner la mort n’est pas soigner. C’est une évidence pour nous ; ce n’en est pas une pour vous. Nous respectons votre point de vue, respectez le nôtre en retour.

    M. Michel Lauzzana

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    Nous le respectons !

    Mme Annie Genevard

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    Nous ne voulons pas nous dérober, nos convictions nous commandent de combattre ce texte. Donner la mort n’est pas un soin, le dire n’a rien de dilatoire. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    Je vous ai bien écoutée, madame la ministre, au sujet de la phrase que vous souhaitez intégrer dans le code de la santé publique. Or la rédaction actuelle ne comporte pas d’expression synonyme de « choix de mourir », elle prescrit uniquement d’accompagner le malade jusqu’au bout avec respect, de lui offrir un soutien et des soins.
    Quant à la sédation profonde et continue, j’ai entendu dire qu’elle ne constituerait pas un soin. Le produit permettant cette sédation contient pourtant bien un anesthésique. Veut-on dire qu’anesthésier un patient avant une opération ne serait pas un soin ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Puisque le mot « soin » revient sans cesse, il me semble important de rappeler que soigner consiste à atténuer les souffrances, quelles qu’elles soient. Ainsi la loi Claeys-Leonetti prévoit-elle qu’on sédate pour atténuer les souffrances, quelles qu’elles soient. Dans le cas de l’aide à mourir, collègues, il s’agit de mettre fin aux souffrances au moyen d’une substance létale. Comme la sédation prévue par les lois Claeys-Leonetti, soin poussé jusqu’au bout, qui finit par donner la mort,…

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Sans intention de la donner !

    M. René Pilato

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    …l’aide à mourir est un soin. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier.

    M. Dominique Potier

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    La loi Kouchner prévient l’acharnement thérapeutique, la loi Claeys-Leonetti prévoit l’endormissement jusqu’à la fin. Pour répondre à la question concernant le fait de débrancher un patient, je rappelle que les débats ayant entouré cette dernière loi ont permis de clarifier un point : il ne s’agit pas de donner la mort, mais d’accompagner dans les derniers jours et les dernières heures en évitant la douleur, quitte à précipiter le moment de la mort. Il y a non-intentionnalité. Cette frontière-là est d’une extrême importance.
    À ce titre, l’amendement de Maud Gatel est fondamental. Il serait cohérent avec une affirmation que font souvent les partisans du texte : cette loi n’enlèvera rien aux autres. Voter cet amendement – je vous prie instamment de le faire – préserverait l’éthique du soin de nombreux soignants, comme de tous ceux qui sont attachés au serment d’Hippocrate, et témoignerait de notre respect pour l’épopée humaniste des soins palliatifs. Ce qui relève du soin doit être distingué de ce que vous appelez un droit à mourir et nous une euthanasie ou un suicide assisté. La distinction est des plus importantes ; il serait mal de notre part de créer de la confusion à ce sujet. Si cette loi ne doit rien enlever aux autres, qu’elle respecte au moins l’éthique du soin et tous ceux qui sont pleinement engagés dans la dynamique de la vie jusqu’au bout. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR. – M. Vincent Bru applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la rapporteure.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Ce projet de loi respecte les soins palliatifs et l’éthique du soin : son titre Ier est entièrement consacré à renforcer les moyens qui leur sont consacrés et à améliorer leur déploiement sur le territoire. Je ne crois donc pas tout à fait exact ce que vous affirmez, monsieur le député.
    L’exposé sommaire de l’amendement de M. Hetzel affirme que « l’aide à mourir [serait] incompatible avec les dispositions de l’article L. 1110-5 du code de la santé publique qui définit les soins : investigation, prévention traitements et soins ». L’article mentionné continue pourtant ainsi : « Toute personne a le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance. Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté. » À cette fin, notre projet de loi défend le droit de chacun à avoir une fin de vie digne et à être accompagné par un professionnel de santé ayant la charge d’apaiser sa souffrance. Pour cette raison, la commission spéciale a complété l’article L. 1110-5 du code de la santé publique, en ajoutant au texte l’article 5 bis, qui précise que ce droit à une fin de vie digne et apaisée comprend celui de bénéficier de l’aide à mourir.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Je comprends parfaitement la nécessité de respecter les convictions de chacun. Nous pouvons le répéter systématiquement : des positions très différentes sont tenues dans cet hémicycle, chacune méritant d’être entendue sur tous les bancs.
    La sédation longue et continue jusqu’au décès, à laquelle les uns et les autres ont fait référence, semble toutefois faire consensus : tous sont partisans de l’apaisement d’une souffrance, dont on sait que la conséquence sera le décès.
    Certains patients veulent mettre immédiatement terme à leurs souffrances. Nos travaux doivent permettre de leur apporter une réponse. Le texte que propose le Gouvernement procède de la reconnaissance de ces souffrances que la médecine ne parvient plus à soulager : nous souhaitons entendre les demandes des patients concernés, en proposant un cadre qu’il vous appartient de définir, en précisant ce qui sera autorisé ou interdit – selon vos convictions. L’enjeu du débat est de savoir si l’Assemblée considère majoritairement un tel texte comme nécessaire et à quelles conditions.
    Le texte proposé relève, en tout cas, d’une logique d’accompagnement. Je veux bien qu’on élargisse la notion de soin, mais c’est bien un soin : il s’agit pour des professionnels de santé d’aider un patient très gravement malade, dans un cadre sécurisé.
    Nous ne sommes pas en train de parler de quelqu’un qui, de chez lui, se demande quelle va être sa fin de vie. Les personnes dont nous parlons sont très malades, très entourées et il ne s’agit pas d’introduire une mesure difficile à prendre pour les professionnels médicaux, quelle que soit leur spécialité. Toutes les spécialités médicales sont reconnues, à tel point que dans la première partie du texte, nous avons voulu faire des soins palliatifs une spécialité : c’est bien que nous croyons en leur importance ! Cependant, il faut aussi avoir à l’esprit que, quelle que soit la qualité des soins palliatifs, certains patients peuvent considérer, à un moment donné, qu’ils ne suffisent plus, et demander à emprunter une autre voie. C’est l’objet de notre discussion et c’est la raison pour laquelle je suis, je le répète, défavorable à ces amendements. (M. Gilles Le Gendre et Mme Natalia Pouzyreff applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Au vu de nos débats, je retire mon amendement au profit de celui de Mme Gatel, qui est bien écrit et dit clairement les choses.

    (L’amendement no 144 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2853.

    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        85
            Nombre de suffrages exprimés                85
            Majorité absolue                        43
                    Pour l’adoption                36
                    Contre                49

    (L’amendement no 2853 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 2379, je suis saisie par le groupe Les Républicains d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Annie Genevard, pour le soutenir.

    Mme Annie Genevard

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    Je propose de clarifier un point qui me semble primordial, en complétant l’alinéa 6 du présent article par la phrase suivante : « Tout don d’organes d’une personne ayant recours à l’aide à mourir est interdit. » Cela me semble nécessaire si nous voulons garantir l’expression d’une volonté libre. On peut en effet imaginer que, par amour pour autrui, quelqu’un accepte ou demande qu’à l’issue de l’acte de suicide assisté ou d’euthanasie, ses organes soient prélevés. Par conséquent, nous pouvons craindre que le patient ne s’oblige à une forme de mort administrée altruiste (Exclamations sur les bancs des groupes RE, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES), ce qui compromettrait la liberté de sa volonté.

    Mme la présidente

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    Seule Mme Genevard a la parole !

    Mme Annie Genevard

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    Il faut que sa décision soit véritablement affranchie de toute autre considération que la seule volonté personnelle.

    M. René Pilato

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    On parle de quelqu’un qui est à l’agonie, chère collègue !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Je rappelle qu’en France, le consentement à un don d’organe est désormais présumé. L’adoption de votre amendement créerait une rupture d’égalité entre nos concitoyens et un frein supplémentaire à l’aide à mourir.
    D’autre part, un tel amendement ne me paraît pas opportun dans le contexte actuel, où l’on manque de greffons. Surtout, l’intérêt médical d’un tel prélèvement serait a priori très limité – j’essaie d’être pragmatique – puisque les personnes demandant l’aide à mourir doivent être atteintes d’une affection grave et incurable, caractérisée par des souffrances physiques réfractaires aux traitements. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Pour les mêmes raisons que la rapporteure, défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-François Rousset.

    M. Jean-François Rousset

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    Merci de me donner l’occasion de m’exprimer sur le don d’organe. Il existe une disposition qui permet, de son vivant, de donner un organe – rein ou foie par exemple – à l’un de ses proches, parent, enfant ou membre de sa famille. C’est une opération bien codifiée, qui permet un acte d’humanité et de générosité.

    Mme Annie Genevard

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    On n’y laisse pas la vie !

    M. Jean-François Rousset

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    Il n’est nul besoin de mourir pour donner un de ses organes. Cette pratique, permise par les progrès de la recherche, des techniques chirurgicales et de l’immunologie, est devenue un grand classique. Il n’est donc pas nécessaire d’aller vers ces extrémités et de mettre sur la table le sujet des transplantations.

    Mme Annie Genevard

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    Mais dans le cas que vous évoquez, il n’y a pas d’euthanasie !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Ce qui existe actuellement, dans le cadre de la loi Claeys-Leonetti, c’est la sédation profonde et continue jusqu’au décès ; ici, vous proposez de créer l’aide à mourir en y incluant le suicide assisté et l’euthanasie. Ma question se veut très précise, madame la ministre, afin d’éclairer nos débats : il existe un type de prélèvement d’organes dit Maastricht 3, effectué à la suite d’une décision médicale d’arrêt de traitement. S’applique-t-il déjà s’agissant de sédations profondes et continues, oui ou non – et si oui, dans quelle proportion ? Ensuite, quel sera l’impact, d’après l’étude d’impact dont vous disposez, de l’application de Maastricht 3 sur le projet de loi que vous nous proposez ?

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Julie Laernoes.

    Mme Julie Laernoes

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    On peut avoir des désaccords et chaque avis est respectable, mais rien n’oblige à franchir toutes les limites de la décence. (Applaudissements sur les bancs des groupes Écolo-NUPES et LFI-NUPES et sur quelques bancs du groupe RE.) Prétendre qu’on va euthanasier des gens pour prélever leurs organes dans une visée altruiste, ce n’est pas sérieux !

    M. Patrick Hetzel

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    Ce n’est pas ce que nous disons !

    Mme Julie Laernoes

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    Votre amendement ne rime à rien : le texte dont nous discutons ne s’applique pas aux personnes qui souffrent d’une affection psychiatrique, contrairement à ce qui a cours dans les pays que vous avez en tête. En outre, comme cela vient d’être rappelé, il s’agit de personnes en fin de vie : l’intérêt du don d’organe est en l’occurrence très limité.

    Mme Natalia Pouzyreff

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    Mais oui !

    Mme Julie Laernoes

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    Il semble que vous vouliez avoir une discussion sur l’impact de Maastricht 3, mais c’est hors sujet. Nous devrions passer à l’article 6 et nous concentrer sur les conditions d’accès de l’aide à mourir afin de discuter sur le fond, plutôt que de faire diversion en agitant des peurs qui n’ont pas lieu d’être. (Mêmes mouvements.)

    M. Matthias Tavel

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    Elle a raison !

    M. Bastien Lachaud

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    Ils font de l’obstruction !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Il suffit que nous ne soyons pas d’accord avec certains d’entre vous pour que la herse de la décence s’abatte sur nous – vous nous accusez d’employer des manœuvres dilatoires et de faire de l’obstruction…

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Ça fait deux jours que vous nous baladez !

    Mme Annie Genevard

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    Mais il ne s’agit pas de n’importe quel texte ! Souffrez que l’on en détaille tous les aspects et que l’on en envisage toutes les conséquences. Je clos la parenthèse car je ne veux pas trop insister sur les commentaires de certains de nos collègues, qui ont perdu le sens de ce qu’est le débat parlementaire. (Exclamations sur quelques bancs du groupe RE.)
    Je voudrais simplement dire qu’à plusieurs reprises, nous nous sommes demandé si la personne désirant mourir ne répondait pas à des injonctions intérieures l’incitant à ne pas être un poids pour les siens, à ne pas compliquer les choses –…

    Mme la présidente

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    Merci !

    Mme Annie Genevard

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    …au fond, on est malade, en fin de vie, pourquoi ne pas mourir ? Il faut que la volonté soit toujours libre et éclairée et comme vous l’avez dit, la liberté de la décision est fondamentale ;…

    Mme la présidente

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    Je vous remercie.

    Mme Annie Genevard

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    …elle ne doit obéir à aucune injonction… (Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice, dont le temps de parole est épuisé. – Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jocelyn Dessigny.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Vous êtes peut-être pleine de compassion, chère collègue Laernoes, et vous avez certainement les meilleures intentions du monde, mais admettez que sur Terre et particulièrement en France, tout le monde n’est peut-être pas aussi bienveillant que vous. Il existe des familles toxiques et des personnes malveillantes ;…

    Mme Julie Laernoes

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    Il ne s’agit pas de cela !

    M. Jocelyn Dessigny

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    …il importe donc qu’à chaque fois que ce sera nécessaire et possible, nous introduisions dans le texte les dispositifs permettant de protéger les patients des dérives et des personnes toxiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette.

    M. Stéphane Delautrette

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    Il serait bon que ceux qui appellent à l’humilité et au respect de la parole des uns et des autres s’appliquent à eux-mêmes ces principes. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NUPES et Écolo-NUPES et sur quelques bancs du groupe SOC.) Pour ce qui est du présent amendement, à ma connaissance, quand un prélèvement d’organe est effectué après décès, la loi ne permet pas que la personne décédée ait pu prévoir, dans son testament, de donner cet organe à une personne de son choix. Il sera destiné à une personne qui se trouve sur une liste d’attente,…

    Mme Anne-Laurence Petel

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    Mais oui !

    M. Stéphane Delautrette

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    …et qui en bénéficiera en fonction de ses besoins.

    Mme Annie Genevard

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    On n’a jamais dit le contraire !

    M. Stéphane Delautrette

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    De mon point de vue et sauf si vous me prouvez le contraire, cet amendement n’a donc pas de sens ; il révèle surtout, une fois de plus, que ceux qui sont opposés à l’instauration d’une aide à mourir sont prêts à utiliser tous les arguments…

    Mme Annie Genevard

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    Je vous le confirme, on argumentera !

    M. Stéphane Delautrette

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    …pour qu’elle ne puisse être votée par notre assemblée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC. – Mme Sandrine Rousseau applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Monique Iborra.

    Mme Monique Iborra

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    C’est peut-être votre subconscient qui s’exprime – je ne sais pas –, mais on a vraiment l’impression que tous vos arguments, depuis le début de l’examen du texte, sont pour le moins dissuasifs et négatifs.

    Mme Annie Genevard

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    Eh oui !

    Mme Monique Iborra

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    Celui que vous venez d’avancer, madame Genevard, nous laisse interdits : nous sommes stupéfaits que vous en arriviez jusque-là !

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Inimaginable !

    Mme Monique Iborra

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    Vous le justifiez en disant qu’il faut tout prévoir. Le problème, c’est que vous prévoyez toujours le pire, en le martelant : vous êtes contre et vous voterez de toute façon contre le projet de loi,….

    Mme Annie Genevard

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    Et vous, vous voterez pour !

    Mme Monique Iborra

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    …quels que soient les amendements que le Gouvernement pourrait accepter et que nous pourrions adopter. Reconnaissez-le, on gagnera du temps ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RE, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Caroline Fiat.

    Mme Caroline Fiat

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    Nous voterons évidemment contre cet amendement qui n’a pas lieu d’être. J’ai beau chercher à quel moment ce dont vous parlez pourrait arriver, je n’arrive pas à le concevoir. J’ai entendu un collègue parler des familles toxiques, dont il a aussi été question en commission – j’ai moi-même abordé ce problème –, mais soyez rassurés : l’article 6, qui concerne les conditions d’accès de l’aide à mourir, les critères retenus et le caractère collégial de la décision, permettra d’y faire face. Vous n’arrêtez pas de nous dire qu’il faut penser aux soignants, mais il faut aussi leur faire confiance !
    Dans le cas d’un patient entouré par ce que l’on appelle une famille toxique ou malveillante, le collège des soignants sera en mesure de donner l’alerte et la procédure sera évidemment ralentie – ou fera l’objet d’une attention particulière. Vraiment, ce n’est pas un problème : les médecins, les aides-soignants et toute l’équipe entourant le patient sauront agir en conséquence, de manière, j’y insiste, collégiale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Millienne.

    M. Bruno Millienne

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    Madame Genevard, vous savez combien je respecte vos avis mais, n’étant ni d’un côté ni de l’autre – en bon centriste que je suis –, ma pensée essaie de trouver son chemin au milieu de tous vos arguments, entre ceux qui veulent élargir ce droit et ceux qui n’en veulent absolument pas. En l’espèce, je dois vous avouer que pour une fois, j’ai vraiment beaucoup de mal à comprendre votre amendement, et je pense que nous voterons contre. En effet, ce n’est pas comme si nous ne manquions pas, en France, de dons d’organes. N’ajoutons pas du manque au manque.
    En outre, ce dont vous parlez n’a rien à voir : comme notre collègue Caroline Fiat l’a rappelé à l’instant, lorsque nous discuterons des critères relatifs aux conditions d’accès, vous verrez que votre inquiétude en la matière sera très certainement dissipée. Je veux bien que vous soyez contre…

    Mme Natalia Pouzyreff

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    Allez, on avance ! Ce n’est pas la peine d’en discuter si longuement !

    M. Bruno Millienne

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    …et il m’arrive de parfaitement comprendre votre raisonnement, sur un sujet si complexe, mais là, franchement, vous poussez le bouchon un peu loin. Je pense que le groupe MODEM votera contre cet amendement.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2379.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        90
            Nombre de suffrages exprimés                88
            Majorité absolue                        45
                    Pour l’adoption                23
                    Contre                65

    (L’amendement no 2379 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Yannick Neuder, pour soutenir l’amendement no 448.

    M. Yannick Neuder

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    Il vise à éviter toute fragmentation de la communauté médicale et paramédicale, dans l’hypothèse où ce texte serait voté. La crise du covid l’a encore montré récemment : les décisions que nous prenons, en matière de santé publique, ne font pas nécessairement consensus. On voit bien que certaines personnes étaient favorables à la vaccination tandis que d’autres ne l’étaient pas, et les personnels soignants, médicaux et paramédicaux, ont pris part à ces débats. J’y étais pour ma part favorable mais certains membres de mes équipes ne l’étaient pas.
    Je ne voudrais pas que la même chose se reproduise en l’espèce. J’ai eu des échanges avec les personnels qui travaillent dans le pôle dont je suis responsable au centre hospitalier universitaire (CHU) de Grenoble, ainsi qu’avec ceux de plusieurs communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) et de deux Ehpad de ma circonscription – La Caravelle, à Saint-Étienne-de-Saint-Geoirs, et Bellefontaine, au Péage-de-Roussillon. Je leur ai demandé s’ils accepteraient d’accomplir le geste dans le cas où le patient ne pourrait pas ou ne voudrait pas le faire lui-même, et les réponses ont été très mitigées. Au Canada, seulement 1,3 % des médecins acceptent d’accomplir le geste.
    Je propose que chaque professionnel de santé volontaire, qu’il soit membre du corps médical ou paramédical, puisse s’inscrire auprès du conseil départemental de l’ordre professionnel dont il relève. C’est une mesure de bon sens, inspirée par la réalité du terrain.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    L’amendement est satisfait. Je vous suggère de le retirer, sans quoi mon avis sera défavorable. En effet, l’article 16 du projet de loi prévoit que les professionnels de santé disposés à participer à la mise en œuvre de la procédure d’aide à mourir pourront se déclarer auprès de la commission de contrôle et d’évaluation. Celle-ci est notamment chargée de centraliser les données et d’établir un tel registre. Ce dispositif permettra un réadressage plus efficace des patients vers des professionnels de santé à même de les accompagner. Le droit d’accès à l’aide à mourir sera ainsi mieux garanti.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Nous avons abordé hier soir la question du volontariat lorsque nous avons examiné les amendements no 3284 de Mme Darrieussecq et identiques, auxquels j’ai alors donné un avis favorable.
    La commission de contrôle et d’évaluation tiendra effectivement une liste de médecins volontaires, ce qui lui permettra d’indiquer à un médecin qui ne le serait pas que tel ou tel de ses collègues l’est – ces échanges auront lieu exclusivement entre membres du personnel médical. Ce qui me gêne dans votre amendement, monsieur Neuder, c’est le caractère obligatoire de l’inscription. Ainsi, un médecin qui serait volontaire mais ne se serait pas inscrit sur le registre ne pourrait pas accompagner le patient. Cela restreindrait considérablement l’accès aux médecins volontaires. Je suis donc défavorable à l’amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Yannick Neuder.

    M. Yannick Neuder

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    J’entends vos explications, madame la ministre. La formulation de l’amendement est peut-être trop restrictive. Si vous acceptez le principe du volontariat, vous pouvez le sous-amender.

    Mme Natalia Pouzyreff

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    Vous pouvez aussi le retirer !

    M. Yannick Neuder

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    Madame la rapporteure, j’ai bien vu la disposition prévue à l’article 16, mais la commission de contrôle et d’évaluation, qui sera une instance nationale, risque d’être bien trop éloignée du terrain, alors que les ordres professionnels pourraient tout à fait consigner le volontariat des personnels médicaux et paramédicaux. Ainsi, lorsqu’un soignant invoque sa clause de conscience, il serait possible de trouver une solution dans la proximité, sans avoir à interroger une plateforme nationale.
    Je maintiens l’amendement, mais suis ouvert à ce que vous le sous-amendiez si vous trouvez sa rédaction trop restrictive.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christine Pires Beaune.

    Mme Christine Pires Beaune

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    L’amendement est effectivement satisfait par l’article 16 –…

    M. Yannick Neuder

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    Non !

    Mme Christine Pires Beaune

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    …j’espère que nous parviendrons à ce stade de l’examen du texte. Une telle clause de conscience existe déjà pour l’interruption volontaire de grossesse (IVG). Si nous créons le registre de volontaires que vous proposez, le médecin devra dire « oui » ou « non » à l’avance pour tous les cas de figure. Or chaque patient, chaque cas est unique. Ainsi, un médecin qui fera jouer sa clause de conscience dans une situation donnée ne la fera pas nécessairement jouer dans une autre. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et RE.)
    À l’instar de notre collègue Stéphane Delautrette, je constate que tous les moyens sont bons pour rendre cette loi inopérante !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    Nous avons ajouté dans le texte, à une voix près, le principe selon lequel les médecins et les infirmiers doivent être volontaires. (« Non ! » sur divers bancs.)

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Les amendements ont été rejetés.

    M. Thibault Bazin

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    En effet, excusez-moi. Cela s’est joué à pas grand-chose.
    Il ne faut pas confondre l’inscription sur une liste de volontaires et le mécanisme de la clause de conscience. Un médecin inscrit sur une telle liste gardera la possibilité d’invoquer sa clause de conscience.
    D’autre part, il serait intéressant pour les pouvoirs publics, dans l’hypothèse où ils légaliseraient le suicide assisté et l’euthanasie, d’avoir une visibilité sur les professionnels de santé qui sont prêts à accomplir le geste. Nous constatons que, dans les pays où cette légalisation a été décidée, très peu de professionnels sont prêts à le faire.

    (L’amendement no 448 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 562, 2712 et 2934.
    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 562.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Il vise à supprimer l’alinéa 7, ainsi rédigé : « L’aide à mourir est un acte autorisé par la loi au sens de l’article 122-4 du code pénal. » Ledit article dispose : « N’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires. N’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte commandé par l’autorité légitime, sauf si cet acte est manifestement illégal. »
    Autrement dit, l’alinéa 7 vise à dépénaliser ce qui est appelé dans ce projet de loi « l’aide à mourir », c’est-à-dire le suicide assisté et l’euthanasie. Or légaliser l’un et l’autre, c’est légaliser des actes hautement traumatiques, qu’il faut, bien entendu, distinguer des soins. Je le répète, l’euthanasie et le suicide assisté ne sont pas des actes individuels, autonomes et libres, comme vous voulez nous le faire croire. Ils ont évidemment des conséquences certaines sur tous les accompagnants, qu’il s’agisse de proches ou de membres du personnel soignant.

    M. René Pilato

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    Vous voulez donc les envoyer en prison ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 2712.

    M. Dominique Potier

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    Nous sommes quelques-uns à le dire ici, y compris à gauche : dès lors que la digue sera rompue, nous ferons face à un vertige que révèlent nos débats depuis près de deux jours. Vertige car les lieux de soin – établissements de santé, hôpitaux et autres Ehpad – n’auront plus le même sens pour tout un chacun. Vertige car la communauté du soin sera entraînée, indépendamment des choix individuels des soignants, dans ce que l’on peut appeler une ambiguïté, notamment parce que le soin pourrait désormais intégrer l’euthanasie ou le suicide assisté. Nous le voyons bien, la liberté individuelle que l’on veut conquérir mettra en jeu non seulement les autres, mais aussi certains de nos communs.
    En appui à mon amendement, je me permets de convoquer cette phrase de Paul Ricœur, qui m’habite depuis le début des débats : « […] si l’éthique de détresse est confrontée à des situations où le choix n’est pas entre le bien et le mal, mais entre le mal et le pire – même alors le législateur ne saurait donner sa caution. » (M. Thibault Bazin applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l’amendement no 2934.

    M. Pierre Dharréville

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    Depuis le début de l’examen du texte, j’essaie de comprendre et de me faire comprendre. De mon point de vue, ce qui se joue, c’est non pas l’ultime liberté, mais l’ultime manifestation du libéralisme. (M. Dominique Potier applaudit. – « Oh ! » sur quelques bancs du groupe RE.)
    Je conçois qu’il n’y ait ici que de bonnes intentions mais je crois que le système se nourrira de cette possibilité nouvelle. C’est une pièce adaptable à un puzzle où les droits à vivre sont abaissés, où la question sociale est aiguë, où les rapports sociaux sont toujours plus individualisés, où la volonté de l’individu fait loi, comme si la somme des volontés individuelles faisait l’intérêt général et faisait société.
    Ce projet de loi appartient éminemment et essentiellement au registre compassionnel. Or, comme avec tous les textes compassionnels, le risque est de reléguer au second plan le raisonnement, ce qui explique que l’on recoure parfois, dans notre discussion, à l’euphémisme et au déni. Tous les débats que nous avons – qui ? pour qui ? comment ? quand ? où ? – montrent que nous sommes dans une impasse législative. À chaque pas se manifeste le vertige, le malaise, l’impouvoir. Je ne crois pas que cette aspiration, que vous relayez sincèrement, puisse trouver une concrétisation qui parvienne réellement à l’honorer.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Vous souhaitez rendre pénalement responsables les professionnels de santé qui seront autorisés à accorder l’aide à mourir ou à accompagner le patient qui l’a sollicitée. Or la disposition prévue à l’alinéa 7 est très importante car elle vise à protéger les personnes qui interviennent aux différentes étapes de la procédure : autorisation donnée par le médecin ; préparation de la substance létale par la pharmacie à usage intérieur ; mise à disposition de la substance par la pharmacie d’officine ; administration de la substance.
    L’aide à mourir a vocation à constituer un acte autorisé par la loi au sens de l’article 122-4 du code pénal, aux termes duquel : « N’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires. » Mon avis est donc défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Nous le savons, l’alinéa 7 vise à ce que la responsabilité pénale de celles et ceux qui auront à accompagner les patients sollicitant l’aide à mourir ne soit pas engagée. Nous savons depuis plusieurs jours qu’un certain nombre de députés sont totalement opposés à l’aide à mourir ; ils sont donc dans la logique de leur opposition. D’autres ont la volonté d’ouvrir cette possibilité qui, je le répète, sera fondée sur l’expression de la volonté du patient et sur la volonté du médecin qui accepte de l’accompagner.
    Monsieur Potier, la communauté du soin est pleinement respectée, puisque tout soignant aura parfaitement le droit de refuser – nous le verrons lorsque nous aborderons l’article 16. Il n’en demeure pas moins que tout soignant qui acceptera d’accompagner un patient doit lui aussi être accompagné, du point de vue pénal. C’est précisément l’objet de l’alinéa 7. Le supprimer, c’est un moyen d’empêcher les soignants d’accompagner, puisque leur responsabilité pourrait être engagée.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Exactement !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Nous respectons la communauté des soignants : ceux qui ne veulent pas intervenir comme ceux qui veulent intervenir. À cette fin, l’alinéa 7 tend à dégager la responsabilité pénale des seconds. C’est pourquoi le Gouvernement est totalement défavorable aux amendements.

    Mme Natalia Pouzyreff

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    Bien sûr !

    Mme Stéphanie Rist

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Ce débat est très intéressant.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Il l’est depuis trois semaines…

    M. Patrick Hetzel

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    Soyons tout de même conscients que l’acte de donner le mort est un interdit qui figure comme tel dans le code pénal.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Oui !

    M. Patrick Hetzel

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    Or vous vous apprêtez à dépénaliser cet acte,…

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure et Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Oui !

    M. Patrick Hetzel

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    …autrement dit à rendre légal ce qui est actuellement illégal. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)

    Mme la présidente

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    Mes chers collègues, seul M. Hetzel a la parole. Vous aurez la possibilité de vous exprimer par la suite.

    M. Patrick Hetzel

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    Pouvons-nous nous mettre d’accord sur le fait que, si cet interdit est présent depuis aussi longtemps dans notre code pénal – « Tu ne tueras point » (Murmures) –,…

    M. René Pilato

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    Ce n’est pas le code pénal que vous citez là…

    M. Patrick Hetzel

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    …c’est qu’il doit bien y avoir des raisons à cela ? (Exclamations sur divers bancs.)

    M. Raphaël Gérard

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    Tu ne mentiras point !

    Mme la présidente

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    Merci, monsieur Hetzel…

    M. Patrick Hetzel

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    Le fait de dépénaliser cet acte… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Caroline Fiat.

    Mme Caroline Fiat

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    Nous ne soutiendrons pas ces amendements. Cher collègue, je ne suis pas sûre que « Tu ne tueras point » figure dans le code pénal. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    M. Patrick Hetzel

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    Si !

    Mme Caroline Fiat

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    Le texte n’est pas tout à fait celui-là.
    Vous clamez sans cesse qu’il faut protéger les soignants. Or c’est précisément l’objectif de l’alinéa 7.
    Plusieurs orateurs ont fait référence aux Ehpad. Je le répète pour la dernière fois, du moins je l’espère : laissez les Ehpad et leurs résidents tranquilles ! Le grand âge et la perte d’autonomie ne sont pas, jusqu’à ce jour, des maladies incurables. (Mêmes mouvements.) Les résidents des Ehpad ne sont pas concernés par ce projet de loi, à moins qu’ils ne souffrent d’une maladie incurable. Or le cas devient rare dans les Ehpad car, généralement, de tels patients sont pris en charge dans un établissement de santé pour y être soignés. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES et sur plusieurs bancs des groupes RE, Dem et SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Julie Laernoes.

    Mme Julie Laernoes

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    Ces amendements sont très graves. S’ils étaient adoptés, les médecins ou les personnes pratiquant l’aide à mourir telle que nous l’avons définie pourraient être pénalement poursuivis.
    Dans un certain nombre de pays, l’instauration de l’aide à mourir a pris la voie de la dépénalisation des actes qui étaient déjà pratiqués, notamment par les médecins.
    Nous savons que ces actes sont réalisés dans notre pays. Les amendements manifestent une forme d’obstruction. Il faut les rejeter avec vigueur car ils visent tout simplement à interdire l’application de l’aide à mourir sur notre territoire.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jérôme Guedj.

    M. Jérôme Guedj

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    Je partage la fermeté des propos de Caroline Fiat au sujet du vieillissement. Vieillir, même dans des conditions difficiles, n’est pas une maladie grave et incurable. Nous devrons donc garantir, le moment venu, que les maladies neurodégénératives qui frappent les personnes âgées, notamment la maladie d’Alzheimer, ne constituent pas des conditions d’éligibilité à des directives anticipées en faveur de l’aide à mourir. Mme la ministre l’a affirmé avec vigueur.

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    C’est exact !

    M. Jérôme Guedj

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    J’espère que nous serons tous rassemblés pour honorer cet engagement. (Mme Stéphanie Rist applaudit.)
    Ces amendements doivent être mis en regard des dispositions de l’article 122-4 du code pénal aux termes desquelles : « N’est pas pénalement responsable la personne qui accomplit un acte prescrit ou autorisé par des dispositions législatives ou réglementaires. »
    On peut être opposé au principe de la loi mais, si elle est votée, l’alinéa 7 est indispensable, crucial car il protège celles et ceux qui pratiqueront l’aide à mourir.

    Mme la présidente

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    Merci, monsieur Guedj.

    M. Jérôme Guedj

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    Alors, opposez-vous, mais sur d’autres arguments que… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Cécile Rilhac.

    Mme Cécile Rilhac

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    Je suis opposée à ces amendements. L’alinéa 7 permet de protéger, pénalement, les soignants qui pratiqueront l’aide à mourir. Le supprimer reviendrait à rendre illégale la possibilité d’accompagner un patient et de respecter sa volonté jusqu’au bout.
    Ces débats durent depuis dix jours. Nous sommes suffisamment éclairés pour avancer et ne pas avoir à répéter sans cesse les mêmes arguments. Ces amendements relèvent de l’obstruction délibérée. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. Thibault Bazin

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    En l’occurrence, ce ne sont pas nos amendements !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq.

    Mme Geneviève Darrieussecq

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    Mme la ministre a rappelé que certains députés sont opposés à ce texte tandis que d’autres y sont très favorables et cherchent à élargir les conditions d’accès à l’aide à mourir. Comme beaucoup d’entre nous, je me situe sur une ligne de crête et je cherche le meilleur chemin que pourraient emprunter les quelques personnes qui auraient besoin de ce dispositif.
    Notre rôle est de protéger tout le monde : les patients, les personnes les plus fragiles – qui ne devraient pas être incitées recourir à ce dispositif sans avoir la pleine conscience de sa portée – ainsi que les soignants.
    Or l’alinéa 7 est indispensable à la protection de ces derniers. Celle-ci suppose également d’instaurer un mécanisme de volontariat que je m’emploie à intégrer au texte. (Mme Astrid Panosyan-Bouvet et M. Yannick Neuder applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal.

    Mme Annie Vidal

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    Si je partage les propos de Caroline Fiat selon lesquels il faut « laisser nos Ehpad tranquilles », je reste inquiète. Selon le dernier rapport de la commission de contrôle de l’euthanasie aux Pays-Bas, les euthanasies représentent 4 % des décès du pays en 2021.

    Mme Julie Laernoes

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    Vous ne pouvez vous référer à la situation des Pays-Bas, les conditions d’accès à l’aide à mourir y sont différentes !

    Mme Annie Vidal

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    Parmi elles, 26 % concernent des personnes de 80 à 90 ans, 35 % de 70 à 80 ans, 19 % des personnes de 60 à 70 ans. Au total, 80 % des personnes ayant demandé l’euthanasie ont plus de 60 ans.

    Mme Julie Laernoes

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    Ce sont les personnes les plus malades !

    Mme Annie Vidal

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    Comme l’a souligné Jérôme Guedj, il nous faudra, le moment venu, être très vigilants sur ce sujet. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR. – M. Jérôme Guedj applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hervé de Lépinau.

    M. Hervé de Lépinau

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    Nous réfléchissons sur le « fait justificatif » qui permettrait de sortir l’euthanasie et le suicide assisté du spectre pénal. Je suis favorable aux amendements identiques en discussion pour une raison simple. L’Association pour le droit de mourir dans la dignité, qui défend ce projet de loi, nous explique qu’une centaine de cas très litigieux nécessiterait que nous légiférions. Pour ma part, je fais confiance aux juges : y a-t-il chaque année 100, 200, 300 procès dirigés contre des médecins ayant administré la mort ? La réponse est négative.
    Dans les rares cas de procès, le juge pénal tient compte des circonstances atténuantes de manière à ne pas accabler les soignants. Si nous maintenons le principe de l’interdiction de donner la mort, les juges s’adapteront aux situations. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN. – Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RE et LFI-NUPES.)

    M. Matthias Tavel

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    Alors vous défendez les juges, maintenant ?

    Mme Caroline Fiat

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    Quelle hypocrisie !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Dharréville.

    M. Pierre Dharréville

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    J’entends parler d’obstruction : si j’avais voulu la pratiquer, j’aurais déposé beaucoup d’amendements… Je ne l’ai pas fait. Ces critiques sont déplacées.
    Notre débat sera vain s’il est insincère. Sur ces sujets difficiles, délicats, douloureux, j’essaie d’être utile en faisant part de mes réflexions et interrogations. Ces dernières heures, je n’adhère souvent ni au texte proposé ni aux amendements. À un moment donné, compte tenu de ce que je viens d’entendre, il ne me restera plus qu’à me retirer de ce débat dans lequel je ne serai plus d’aucun secours.
    Permettez simplement l’expression de désaccords et l’approfondissement d’une discussion nécessaire ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mme Astrid Panosyan-Bouvet et MM. Jérôme Guedj et Dominique Potier applaudissent également.). Ce débat doit avoir lieu.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Il a lieu !

    Mme Justine Gruet

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    C’est nécessaire, nous parlons d’éthique !

    Mme la présidente

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    Je rappelle que j’accepte deux orateurs inscrits par groupe pour exprimer des opinions différentes. La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Malheureusement – ou heureusement – je n’appartiens à aucun groupe,…

    M. Hadrien Clouet

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    Malheureusement !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    …de sorte que je ne sais quelle règle s’applique dans mon cas. (Sourires sur divers bancs.)
    Certains députés n’ont pas un avis très favorable sur ce texte et défendent leurs convictions. J’en fais partie. Pour moi, comme pour d’autres, ce texte n’est pas le bienvenu car, à mon sens, il convenait d’abord de généraliser à tous les Français qui en ont besoin l’accès aux soins palliatifs avant d’envisager l’aide à mourir.

    Mme Julie Laernoes

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    Nous le savons, vous l’avez déjà dit !

    M. Léo Walter

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    Vous ne cessez de le répéter !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Pardon, mais j’ai tout de même le droit de m’exprimer !

    Mme la présidente

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    Seule madame Ménard a la parole.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Je suis prête à retirer mon amendement à condition que tous les garde-fous soient établis pour les soignants, notamment le volontariat – à mes yeux une condition sine qua non –, évoqué par Mme Darrieussecq et qui est réclamé dans les unités de soins palliatifs… (Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice, dont le temps de parole est épuisé.)

    (Les amendements identiques nos 562, 2712 et 2934 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de huit amendements, nos 149, 1332, 3177, 561, 1508, 3175, 3174 et 2427, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 561 et 1508 sont identiques.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 149.

    M. Patrick Hetzel

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    Je serai rapide car nous avons déjà évoqué cette question :…

    Mme Christine Pires Beaune

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    À de nombreuses reprises, en effet !

    M. Patrick Hetzel

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    …nous souhaitons que les termes « suicide assisté » et « euthanasie » soient utilisés dans le texte.

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 1332 de Mme Sandrine Dogor-Such et 3177 de M. Christophe Bentz sont défendus, de même que les amendements identiques nos 561 de Mme Emmanuelle Ménard et 1508 de M. Marc Le Fur, ainsi que les amendements nos 3175 et 3174 de M. Christophe Bentz et 2427 de M. Jocelyn Dessigny.
    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Madame la ministre, le Conseil d’État a appelé l’attention du Gouvernement « sur l’importance qui s’attache, au regard notamment des considérations relatives au droit pénal […], à définir de manière suffisamment claire et précise les actes entrant dans le champ de l’aide à mourir. À ce titre, il recommande de modifier le projet de loi pour prévoir expressément que l’aide à mourir couvre non seulement l’administration d’une substance létale, mais consiste aussi à mettre une telle substance à disposition d’une personne qui en a exprimé la demande, afin qu’elle se l’administre […] ».
    C’est le Conseil d’État, et non quelques députés, qui formule cette recommandation. Il est important de la rappeler à ce stade du débat où nous nous apprêtons à supprimer un élément fondamental du code pénal : l’interdiction de donner la mort. Il nous faut définir très précisément les conditions dans lesquelles nous levons cet interdit majeur.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Une nouvelle fois, nous ne voterons pas ces amendements. J’observe une dynamique positive dans ce débat : les amendements ne sont plus que « défendus » – prélude à leur futur retrait ?
    Nous ne sommes pas réunis pour faire de la recherche en sémantique ou en linguistique, pour déterminer les sens antérieurs ou concurrents de certains mots placés à certains endroits, sujet au demeurant intéressant.

    Mme Annie Genevard

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    Nous modifions le code pénal, ce n’est pas rien ! Il ne s’agit pas uniquement de sémantique.

    M. Hadrien Clouet

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    Ce qui compte, pour les parlementaires, c’est de savoir quel sens on veut donner à une action et quels termes on veut employer dans une loi. Car le contexte n’est pas neutre : les mots n’existent pas en dehors d’une intention. Or il me semble que l’intention qui est majoritairement la nôtre en la matière est d’insister sur la nature de l’acte, en l’espèce sur son caractère compassionnel. Voilà pourquoi il faut parler d’aide à mourir.

    Mme Annie Genevard

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    On modifie le code pénal ! Ce n’est pas rien ! J’aimerais que Mme la ministre…

    Mme la présidente

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    Mme la ministre a déjà donné l’avis du Gouvernement, elle l’a exprimé comme elle le souhaitait !

    (Les amendements nos 149, 1332 et 3177, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements identiques nos 561 et 1508 ne sont pas adoptés.)

    (Les amendements nos 3175, 3174 et 2427, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir les amendements nos 1394 et 1395, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    Mme Marie-France Lorho

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    J’évoquerai plus particulièrement le no 1394 que j’avais déjà déposé en commission spéciale et qui avait alors été rejeté alors qu’il soulève un problème important. La dépénalisation du suicide assisté ou de l’euthanasie ne devrait pas s’appliquer dans le cas où la personne qui donne la mort a un mobile qui l’a conduite à commettre cet acte.
    En commission spéciale, je citais, à dessein, l’exemple suisse, pays dans lequel on pénalise les suicides assistés et les euthanasies pratiqués pour un mobile dit égoïste, par exemple dans les cas où une personne intéressée donnerait la mort pour toucher un héritage. (« Ah ! » sur bancs du groupe LFI-NUPES.) Eh oui ! Pardonnez-moi mais nous ne vivons pas dans un monde de Bisounours !

    M. Matthias Tavel

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    Surtout chez vous !

    Mme Marie-France Lorho

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    Il s’agirait alors d’un homicide déguisé. Pourquoi le législateur ne prévient-il pas une telle dérive ? Car il existera forcément des dérives, corollaires de toute loi s’immisçant dans la vie des personnes de façon aussi étroite. Il me semble du devoir du législateur de prévoir de tels cas. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Vous entendez exclure toute exonération de responsabilité pénale si le tiers intervenant a été poussé par un mobile égoïste, en précisant que vous prenez pour modèle le code pénal suisse.
    Certes, on peut toujours s’inspirer d’exemples étrangers mais le code pénal français comporte certains principes. Vous n’y trouverez nulle part le mot « mobile » sauf lorsqu’il s’agit d’aborder le placement sous surveillance électronique mobile. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme Laure Lavalette

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    Ce n’est pas au niveau !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Les buts poursuivis par les personnes ayant commis des faits éventuellement répréhensibles sont examinés à l’aune de l’élément moral de l’infraction, c’est la raison pour laquelle la procédure se fonde sur la demande libre et éclairée de la personne et sa confirmation autonome tout au long de l’examen de la demande jusqu’à la réalisation de l’aide à mourir.
    Par ailleurs, la provocation au suicide est bel et bien une infraction prévue par le code pénal. L’article 223-13 punit en effet « le fait de provoquer au suicide d’autrui » de « trois ans d’emprisonnement et de 45 000 euros d’amende lorsque la provocation a été suivie du suicide ou d’une tentative de suicide ».
    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Je voterai évidemment ces deux amendements car, comme l’a dit notre collègue Lorho, nous ne vivons pas dans un monde de Bisounours. C’est d’ailleurs, depuis le début, l’écueil de votre projet de loi : vous partez du principe que nous sommes dans un monde bienveillant. Or ce n’est malheureusement pas toujours le cas, y compris sur un tel sujet. Il arrive qu’on se retrouve face à des personnes – notre collègue Fiat parlait de familles « toxiques », un adjectif que je n’emploierais pas forcément –…

    Mme Caroline Fiat

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    Ce n’est pas moi qui l’ai inventé !

    Mme Emmanuelle Ménard

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    …qui, lorsqu’elles incitent quelqu’un de leur entourage à prendre ce type de décision, ont des idées derrière la tête et n’agissent pas toujours pour des raisons très claires. On ne saurait occulter ces cas de figure. Il faut garder à l’esprit que l’entourage du patient peut compter des personnes qui ne sont pas animées d’intentions très nobles. Le motif peut être d’ordre financier mais pas uniquement. On dit que le patient craint parfois d’être un fardeau pour sa famille, or cet enjeu moral peut aussi peser sur lui.

    (Les amendements nos 1394 et 1395, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 145.

    M. Patrick Hetzel

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    Le texte accorde une importance toute particulière à la personne de confiance. Dès lors, tirons le fil jusqu’au bout. Par cet amendement, nous demandons ainsi d’indiquer explicitement, à la fin de l’article 5, que lorsque quelqu’un décide d’avoir recours à l’aide à mourir, la personne de confiance doit être prévenue de cette demande.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Yannick Neuder.

    M. Yannick Neuder

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    Je profite de l’occasion qui m’est offerte pour répondre à Mme Pires Beaune – dont je respecte beaucoup le travail parlementaire – qui, à propos du volontariat, a sous-entendu tout à l’heure que mon amendement visait à ralentir les débats. Or tel n’était pas du tout mon objectif.
    Je souhaitais, par cette mesure, éviter qu’une cassure se produise au sein du monde médical et paramédical. Vous avez donné l’exemple des médecins libéraux, qui sont libres de leur choix et exercent souvent seuls, mais il faut aussi penser à la zizanie que provoqueraient ces nouvelles dispositions au sein des équipes qui opèrent dans des établissements médico-sociaux et sanitaires – quel que soit leur statut.
    Vous avez aussi expliqué qu’en fonction des cas, la position du corps médical ou paramédical pouvait varier. Or je ne crois pas qu’on puisse décider de pratiquer l’aide active à mourir au cas par cas. Chacun choisit de procéder, ou non, à cet acte, en fonction de ses convictions. Il en va d’ailleurs de même pour l’IVG : certains souhaitent en pratiquer, d’autres pas. C’est une question d’intime conviction.
    Si j’écoute avec beaucoup d’intérêt vos propos sur les questions financières,…

    Mme Stéphanie Rist

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    Ce n’est pas flagrant !

    M. Yannick Neuder

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    …j’y suis moins sensible lorsque vous abordez les questions médicales.

    (L’amendement no 145 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs demandes de scrutin public : sur les amendements nos 147 et identiques par le groupe Les Républicains et sur le no 2467 par les groupes Les Républicains et Socialistes et apparentés.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 146.

    M. Patrick Hetzel

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    Lorsqu’on s’oriente vers une autorisation de l’aide à mourir, il convient de s’assurer qu’aucune situation d’abus de faiblesse ne risque de se présenter. Cet amendement vise à le préciser dans le texte. Je signale au passage que nous examinerons plus tard des amendements qui poursuivent le même objectif mais en proposant d’autres dispositifs – y compris une intervention du juge des contentieux de la protection.
    Je vous alerte une nouvelle fois sur cet enjeu car il faut savoir que chaque année, en France, les cas d’abus de faiblesse donnent lieu à plus de 500 condamnations. Lorsqu’on aborde des questions qui touchent à la vie et à la mort, nous devons être conscients que des intérêts sont parfois en jeu et qu’il arrive alors que les travers de certains individus prennent le pas – nous ne vivons pas dans un monde idéal. Nous devons donc placer des garde-fous pour éviter toute dérive en la matière.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Je comprends bien sûr le sens de votre demande – nous avons eu ces débats en commission spéciale. Cependant, elle me semble satisfaite. L’aptitude de la personne à manifester sa volonté de façon libre et éclairée sera évaluée dans le cadre de la procédure indiquée à l’article 8 du projet de loi.
    En outre, même si vos inquiétudes sont parfaitement fondées, j’ai la conviction que la procédure d’aide à mourir est très encadrée. Un suivi et un accompagnement sont prévus, entre autres par le personnel médical et non médical. Par conséquent, si des situations d’abus de faiblesse apparaissaient au cours de ce processus, elles seraient décelées et l’alerte serait donnée. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Tout le monde, dans l’hémicycle, est vigilant sur ce point. Déjà, les équipes soignantes nous disent – comme vous le savez puisque nombre d’entre vous ont expliqué qu’ils s’étaient rendus dans des services – qu’elles ont l’habitude de faire face à ce type de situation.
    C’est précisément pour cette raison que l’accompagnement par les équipes soignantes est important. Cela a d’ailleurs été dit à plusieurs reprises, notamment par Mme Fiat, rapporteure sur une partie du texte, qui a souvent souligné que le lien entre les soignants et le patient permettait de se prémunir contre ce type de dérive. Cet aspect est bien pris en considération par la procédure prévue notamment à l’article 8. Voilà pourquoi je suis défavorable à cet amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    L’alinéa 7 est fondamental. On comprend pourquoi il est indispensable : si l’aide active à mourir est votée, il faudra modifier le code pénal. C’est cohérent – même si nous contestons ce dispositif.
    Cet alinéa, de deux lignes seulement, est capital car il concerne une disposition fondamentale du code pénal : l’interdiction de donner la mort. Comprenez, par conséquent, que nous souhaitions, avec plusieurs de nos amendements, revenir sur cette modification en nous demandant comment nous pourrions encadrer de façon satisfaisante ce droit de donner la mort à autrui – qui n’est tout de même pas le moindre des droits.
    Madame la ministre, vous n’avez pas répondu tout à l’heure sur ce sujet parce que vous avez pensé qu’il s’agissait pour la énième fois d’un débat sémantique. En réalité, c’est un débat juridique. Il faut délimiter le droit de donner la mort.
    J’en viens à l’amendement de notre collègue.

    Mme la présidente

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    Madame la députée, je vous remercie.

    Mme Annie Genevard

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    Il faut éviter les cas d’abus de faiblesse. On compte aujourd’hui 500 condamnations par an pour ce motif.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei.

    M. Jean-Paul Mattei

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    Dans le domaine contractuel, on évoque souvent le risque d’abus de faiblesse – il s’agit de s’assurer du consentement de la personne. En cas de doute, on fait souvent appel à un médecin pour qu’il donne son avis. Or la procédure décrite dans le projet de loi va bien au-delà. Le dispositif prévu est très encadré et rassurant. Le risque d’abus de faiblesse est donc écarté.

    M. Didier Martin

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    Tout à fait !

    (L’amendement no 146 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 147 et 653.
    La parole est à M. Patrick Hetzel, pour soutenir l’amendement no 147.

    M. Patrick Hetzel

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    Il est le fruit d’un travail mené avec la Société française d’accompagnement et de soins palliatifs. Pour maintenir le lien de confiance avec les résidents et patients au sein des établissements de santé, sociaux et médico-sociaux, qui assurent des missions de service public, il faut tracer une ligne rouge, très claire, entre les soins et l’aide à mourir.
    Par conséquent, nous souhaitons préciser dans le texte que l’aide à mourir n’est pas une mission de service public pour ces établissements.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet, pour soutenir l’amendement no 653.

    Mme Justine Gruet

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    Même si le texte prévoit une clause de conscience individuelle, un sentiment de malaise ou de pression peut naître au sein d’une équipe si tout le monde ne va pas dans la même direction.
    J’entends bien que cette clause de conscience individuelle est nécessaire et peut ou non s’exercer suivant les cas de figure. L’amendement vise néanmoins à faire en sorte que la volonté d’accompagner les patients comme il le faut demeure au cœur de notre service public.
    Je souhaiterais à ce titre souligner la nécessité collective de conférer à nos soignants les moyens de faire leur travail correctement, en libérant leur temps de la charge administrative qui leur pèse, plutôt que de mettre entre leurs mains un droit nouveau, alors même qu’ils sont parfois incapables de proposer à leurs patients des soins adaptés.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Il est défavorable car le projet ne crée aucune mission de service public aux termes de laquelle il faudrait rendre accessible l’aide à mourir dans les structures sanitaires et médico-sociales. Le patient pourra choisir le lieu où il recevra cette aide, dans des conditions convenues avec le professionnel de santé chargé de l’accompagner. Tout lieu de vie ou de soins peut en être le cadre : domicile privé, établissement de santé, établissement ou service social ou médico-social, maison d’accompagnement. J’ai remarqué que, dans les pays qui ont créé un dispositif semblable, le domicile constitue le lieu principal des décès qui en découlent : c’est le cas de 40 % d’entre eux au Canada et de près de 50 % en Belgique. (M. le rapporteur général et M. Sébastien Peytavie hochent la tête.)
    Il n’est donc pas nécessaire de prévoir que l’aide à mourir n’est pas une mission de service public des établissements de santé et médico-sociaux.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Il est toujours important de lire l’exposé des motifs d’un amendement au moment de son examen. S’agissant de l’amendement no 653, la phrase suivante y figure : « Peut-on imaginer qu’un grand malade, un infirme, un vieillard ait à se demander si l’injection qui est préparée par le soignant est destinée à le soulager ou bien, avec l’accord de la famille, à le faire mourir ? » Mesdames et messieurs les députés, il faut savoir s’arrêter ! Cela n’a rien à voir avec notre texte ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RE et SOC. – M. Bruno Millienne et Mme Sandrine Rousseau applaudissent également.)
    Je lis à la fin du même exposé que cet amendement est issu de la Sfap (Société française d’accompagnement et de soins palliatifs). Je veux dire une fois de plus tout le respect que j’ai pour la Sfap et l’ensemble de ses adhérents. Je sais qu’une grande partie d’entre eux s’opposent à ce projet de loi. Mais tout de même ! Tenons-nous en dans nos discussions à ce qu’il contient. Il n’a jamais été question de créer une mission de service public pour l’accès à l’aide à mourir dans les structures sanitaires et médico-sociales.
    Notre désaccord porte sur un point précis : une grande partie des adhérents de la Sfap souhaiteraient que soit instaurée une clause de conscience collective, tandis que nous estimons que la clause de conscience est de nature individuelle. Tel est notre débat. Je maintiens ma position concernant cette clause et redis très fermement qu’il ne s’agit en aucun cas de préparer quoi que ce soit à destination d’« un grand malade, un infirme, un vieillard », sans son consentement. Cela n’a strictement aucun rapport avec le texte. Je suis tout à fait défavorable à ces amendements identiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe RE. – M. Jean-Paul Mattei applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Les arguments que vous formulez sont parfois violents pour les personnes demandeuses de l’aide à mourir. Je voudrais que l’on entende ce que vous dites : vous imaginez qu’un service public, que des serviteurs de l’État pourraient se voir confier par lui la mission d’interrompre la vie de certaines personnes. On est en plein délire !
    Par ailleurs, que promouvez-vous en creux ? Si vous refusez que l’aide à mourir soit administrée au domicile des personnes – qui se trouvent parfois au sein même d’établissements médico-sociaux –, vous ouvrez à des institutions privées la possibilité de se spécialiser dans ce domaine.

    M. Olivier Falorni, rapporteur général

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    Pas faux !

    Mme Sandrine Rousseau

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    Est-ce vraiment ce que vous voulez ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    On affirme que l’aide à mourir ne concernera qu’un nombre très limité de personnes – vous avez évoqué, madame la ministre, des personnes très malades –, tout en indiquant qu’elle pourrait être administrée à domicile. On peut toutefois se demander si notre système français d’hospitalisation à domicile (HAD) peut couvrir les besoins de personnes très malades et requérant des soins très importants, et les accompagner au mieux dans tous nos territoires. On sait bien que ce n’est pas le cas aujourd’hui.
    Le projet aura un impact sur les équipes de soignants. Les prises en charge collectives suscitent souvent de l’inquiétude parmi celles qui accompagnent les fins de vie complexes. Leurs membres sont souvent les plus réticents à se voir obligés de satisfaire une demande d’aide à mourir. On risque de faire peser sur les professionnels qui le refuseraient la responsabilité de leur mise en retrait et de mettre à mal le caractère collectif de la prise en charge des patients. Dans certains établissements, dont la philosophie s’oppose à ce texte, cela pourrait modifier la norme du soin. Ce sont justement les personnels de ces établissements qui en témoignent le plus.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Astrid Panosyan-Bouvet.

    Mme Astrid Panosyan-Bouvet

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    Hier, un directeur d’établissement m’a posé une question à laquelle je n’ai pas pu répondre : certains établissements – je pense notamment à telle ou telle structure privée à but non lucratif – pourront-ils indiquer dans leur charte que leurs équipes soignantes ne veulent pas pratiquer le suicide assisté et l’euthanasie ? (M. Gilles Le Gendre fait un geste de dénégation.)

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Non.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Dharréville.

    M. Pierre Dharréville

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    Je suis favorable à ce qu’aucun établissement ne se voie confier la mission d’administrer l’aide à mourir. Si toutefois ce geste devait avoir lieu, je ne vois pas pourquoi il faudrait le réserver à des établissements privés, notamment à but lucratif. Surtout pas !

    Mme Sandrine Rousseau

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    Surtout pas ! Vos amendements sont incroyables !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette.

    M. Stéphane Delautrette

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    Je vois, chers collègues, que vous êtes tous très pressés d’aborder les débats relatifs aux articles suivants, qui traitent de tous les points que vous évoquez. De grâce, épargnons-nous à présent ces discussions si nous souhaitons les mener sereinement le moment venu. N’encombrons pas nos débats à ce stade de l’examen du texte.

    Mme Agnès Firmin Le Bodo, présidente de la commission spéciale

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    Allez, on avance !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat.

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Je ne vois absolument aucun intérêt à faire de l’administration de l’aide à mourir une mission de service public pour les établissements concernés. Je ne connais aucun soignant qui ne pense pas par lui-même aux actions qu’il se propose d’accomplir pour un patient qu’il accompagne, et il en va de même du patient. Avant de prendre une telle décision face à une maladie, la réflexion est longue pour toutes les parties.
    Le soignant peut faire jouer sa clause de conscience, qui est individuelle et non collective. Dans les services de soins, chacun est habitué à prendre individuellement ses décisions, en fonction des patients et au moment opportun. Quant à la réflexion collégiale, elle a lieu en amont de ces choix.
    Arrêtons donc de délirer au sujet d’une mission de service public d’accompagnement à la mort. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 147 et 653.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        119
            Nombre de suffrages exprimés                108
            Majorité absolue                        55
                    Pour l’adoption                33
                    Contre                75

    (Les amendements identiques nos 147 et 653 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement no 1990.

    M. Xavier Breton

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    Cet amendement de clarification, préparé par notre collègue Blin, tend à définir le suicide assisté, en complétant l’article 5, comme étant l’acte de fournir un environnement et des moyens nécessaires à une personne pour qu’elle s’administre par elle-même une substance létale qui a pour conséquence de provoquer la mort.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Il est défavorable. Ce débat a déjà eu lieu.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Je pense qu’il est légitime de s’interroger sur le rôle des établissements. Un médecin qui dirige un service accueillant des patients atteints de la maladie de Charcot m’a fait part de son désarroi. Les malades dont il s’occupe sont au fait de nos débats et savent que nous avons souvent évoqué le mal dont ils souffrent. Ils craignent que l’issue de leur maladie ne soit la mort administrée ! (Protestations sur les bancs du groupe RE. – Mme la ministre, Mme la présidente de la commission spéciale et M. le rapporteur général secouent la tête en signe d’incrédulité.) Ils se posent la question ! Cela souligne la nécessité du lien de confiance qui unit établissement et patient.
    Savez-vous que beaucoup de malades émigrent des Pays-Bas vers l’Allemagne parce qu’ils craignent d’être euthanasiés à leur insu ? (Protestations sur les bancs du groupe RE.) C’est une réalité !

    M. Jérôme Guedj

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    Arrêtez !

    (L’amendement no 1990 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Danielle Simonnet, pour soutenir l’amendement no 2467.

    Mme Danielle Simonnet

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    Les directives anticipées constituent une déclaration que l’on rédige pour formuler des souhaits relatifs à sa fin de vie, anticipant des situations dans lesquelles on ne serait plus en état de le faire, en raison d’une affection ou du grand âge. Il est justement question dans ce texte de personnes subissant des souffrances physiques et psychologiques réfractaires à tout traitement.
    Il est possible aujourd’hui de prendre en compte ces directives et la désignation de la personne de confiance pour demander l’arrêt d’un acharnement thérapeutique ou la sédation profonde et continue jusqu’au décès. Pour quelle raison ne le ferait-on pas dans d’autres cas ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Nous avons déjà eu ce débat.

    Mme Danielle Simonnet

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    Supposons un patient qui sait que sa maladie neurodégénérative le conduit vers une phase avancée ou terminale terrible caractérisée par des souffrances insupportables. Il rédige ses directives anticipées et nomme une personne de confiance pour s’assurer que, lorsqu’il en arrivera à ce stade et ne disposera plus de ses capacités d’expression et de consentement libre et éclairé, ses volontés seront néanmoins accomplies. Si vous le lui refusez, il devra demander à recourir plus tôt à l’aide à mourir ! Pensez à de tels cas !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Nous avons déjà eu cette discussion lorsque nous examinions le titre Ier. Mon avis sera défavorable, en cohérence avec les propos de la ministre et de mon collègue rapporteur Didier Martin, même si je comprends votre intention.
    Une telle disposition serait tout à fait contraire à la philosophie du projet, qui repose sur l’autonomie du malade. Comme vous le savez, la procédure prévue au titre II exige que le malade soit en mesure de manifester sa volonté à plusieurs reprises, jusqu’à l’administration de la substance létale. Il n’est pas envisagé de créer une procédure prenant en compte les directives anticipées.

    Mme Danielle Simonnet

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    Je suis sûre qu’en réalité, vous êtes d’accord avec moi !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Nous avons déjà débattu de ce sujet et nous le ferons encore à l’article 6. Je redis que le fondement même de ce texte de loi est la volonté du patient, réitérée jusqu’au dernier moment. Je suis donc défavorable à cet amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jérôme Guedj.

    M. Jérôme Guedj

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    C’est la troisième fois au moins que nous abordons le sujet des directives anticipées et je salue l’opiniâtreté et la ténacité des collègues qui, au titre Ier, puis aux articles 4 quater et 5, ont souhaité introduire dans tous les cas de figure le recours aux directives anticipées, en prévision d’une perte de discernement.
    En opposition à cet amendement, je m’appuierai sur ce qu’a dit Caroline Fiat : laissez tranquilles les personnes âgées, les personnes atteintes de la maladie d’Alzheimer, qu’elles soient en Ehpad ou non. J’exprime mon inquiétude, et ce n’est pas de la paranoïa. J’entends les arguments de Danielle Simonnet en faveur de la validité du choix par anticipation de l’aide à mourir, mais c’est un pied dans la porte, ouvrant la brèche pour, à terme, valider les directives anticipées de personnes frappées par une maladie neurodégénérative, en particulier celle d’Alzheimer. Voilà pourquoi, au nom de ce principe, nous devons refuser cet amendement. (Mmes Annie Genevard et Natalia Pouzyreff applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Cet amendement est prématuré à ce stade de l’examen du texte, d’autant que nous aurons l’occasion de revenir sur les directives anticipées. Mais j’ouvre une piste de réflexion pour les débats à venir : à partir du moment où les critères définissant la maladie incurable et le pronostic vital engagé – ce dernier point va faire l’objet des débats à venir – sont remplis, la vraie question est la suivante : si la personne a formulé sa demande d’aide à mourir, qu’elle l’a réitérée et qu’elle perd conscience avant le moment final, faudra-t-il tout de même en tenir compte ?

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    C’est en effet la vraie question !

    M. René Pilato

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    Je rappelle que dans le cadre du plan d’accompagnement, on lui aura demandé de relire ses directives anticipées. Et je pense donc que la réponse est oui. (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    On répète qu’il faut être extrêmement prudent puisqu’il s’agit d’un acte létal. L’une des questions fondamentales, souvent soulevée par les professionnels de santé, est celle du discernement et de la clarté de la demande. Dès lors que l’on reconnaît leur caractère fluctuant, il faut bien remettre en cause toute possibilité d’avoir recours à des directives anticipées. C’est pourquoi, dans le cas prévu ici, on ne doit pas pouvoir en faire usage.

    M. Vincent Bru

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    Très bien.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Monique Iborra.

    Mme Monique Iborra

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    Cette question restera centrale probablement jusqu’à la fin de nos débats. On peut en effet être d’accord avec M. Guedj et avec Mme Fiat quand ils disent que le dispositif ne peut pas s’appliquer aux malades d’Alzheimer, mais qu’en est-il si la personne sollicite depuis longtemps le recours à l’aide à mourir, sachant que les délais imposés peuvent aboutir à ce qu’on lui demande jusqu’à sept reprises si elle est d’accord ? À la fin de ce chemin de croix – ce qui devrait satisfaire les collègues de droite car c’est tout de même la réalité –, admettons que le médecin accepte alors que la personne a entre-temps perdu son discernement. Est-il alors logique d’estimer que sa demande est annulée ? (Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice, dont le temps de parole est écoulé. – Mmes Danielle Simonnet et Marie-Noëlle Battistel applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Raquel Garrido.

    Mme Raquel Garrido

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    Il faut prendre très au sérieux cette discussion et les effets de bord que pointe notre collègue Simonnet, le premier d’entre eux étant l’accélération des demandes d’aide à mourir, puisqu’il est difficile pour le corps médical et encore plus pour la personne malade d’anticiper le moment précis où elle pourrait perdre son discernement et donc la possibilité de s’exprimer valablement, ce qui conduira à formuler cette demande plus tôt qu’initialement envisagé. Voilà déjà un risque considérable. Autre effet de bord : si la personne de confiance et le corps médical ont pris acte de la sincérité de l’expression de la volonté de mourir à un ou plusieurs moments donnés, ils répondront à cette demande, et on remet 100 balles dans la machine en maintenant une zone grise et donc un risque pénal pour ces personnes respectueuses de la volonté du malade, dans un texte censé pourtant régler le problème. (Mme Danielle Simonnet et M. Emmanuel Fernandes applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sébastien Peytavie.

    M. Sébastien Peytavie

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    C’est un sujet très important et qui nécessite en effet un long débat. Je suis contre l’ouverture de la loi aux directives anticipées. Supposons que celles-ci soient prises quand on est en bonne santé ; on ne peut pas mettre de côté le validisme, la valorisation d’un corps qui va bien, sachant que s’il se dégrade, cela change complètement la donne. L’équilibre du texte s’appuie sur la volonté de la personne, ce qui n’est pas, contrairement à ce que prétendent certains, une dérive qui permettrait tout et n’importe quoi : c’est bien la pierre angulaire et il faudra vérifier jusqu’au bout, c’est-à-dire jusqu’au moment de l’acte létal, si la personne le veut ou non. C’est pour moi la limite à la prise en compte des directives anticipées. (Mme Stéphanie Rist applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gilles Le Gendre.

    M. Gilles Le Gendre

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    Je suis contre l’amendement Simonnet parce qu’il n’a pas sa place à cet endroit du texte et qu’il est insuffisamment précis. Nous voyons bien la confusion qui est en train de s’introduire dans ce débat ô combien important. Si l’on raisonne à partir de directives anticipées rédigées par quelqu’un à 40 ans, lorsqu’il est dans la force de l’âge, on ne peut considérer qu’elles pourront s’appliquer telles quelles quand il sera tout au bout de sa vie.

    M. Vincent Bru

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    Très bien !

    M. Gilles Le Gendre

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    En revanche, prendre en compte des directives anticipées rédigées tout près de l’échéance fatale, alors que le discernement est en train de s’échapper, serait une voie de compromis. C’est ce que je défendrai à travers un amendement très spécifique. Il ne s’agit pas d’intégrer l’aide à mourir dans les directives anticipées sans condition : il faut la prévoir dans un contexte hyper-encadré. C’est là que se trouve, à mon avis, la voie menant à un compromis. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    M. Jérôme Guedj

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    Je suis d’accord !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq.

    Mme Geneviève Darrieussecq

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    Je suis opposée au compromis…

    M. Gilles Le Gendre

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    C’est pas très moderne.

    Mme Geneviève Darrieussecq

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    …parce qu’il me semble très compliqué d’envisager d’inscrire dans la loi la possibilité de directives anticipées en fonction de l’âge, des maladies, de l’état de la personne et du moment où elle les rédigerait. Ce serait absolument impossible car il y a autant de situations que de personnes. Je crois qu’il faut impérativement en rester à la primauté de la protection des plus fragiles. Et dans le cas, cité en permanence, de ceux qui perdraient conscience en toute fin de maladie, il y aura les soins palliatifs et la sédation profonde et continue. (Mme Frédérique Meunier applaudit.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 2467.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        123
            Nombre de suffrages exprimés                110
            Majorité absolue                        56
                    Pour l’adoption                16
                    Contre                94

    (L’amendement no 2467 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’article 5, je suis saisie par les groupes Renaissance, Rassemblement national, Les Républicains, Horizons et apparentés ainsi qu’Écologiste-NUPES d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Emmanuel Fernandes, pour soutenir l’amendement no 2471.

    M. Emmanuel Fernandes

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    C’est un amendement de repli puisqu’il concerne non plus la perte de discernement, mais la perte de conscience. Je pense que quels que soient nos désaccords, nous pouvons nous rejoindre sur le fait que prendre en compte, à chaque étape, la volonté du patient est un objectif juste et raisonnable. Si une personne a explicitement exprimé, dans ses directives anticipées, son souhait d’accéder à l’aide à mourir dans une situation donnée et que ce souhait peut être confirmé par une personne de confiance, elle ne doit pas être empêchée d’accéder à l’aide à mourir parce qu’elle n’est plus consciente. Si nous ne le permettons pas, quel est alors le sens des directives anticipées ? Comment justifier de priver une personne victime d’une affection occasionnant une perte de conscience, quelle qu’en soit la cause, d’accéder à l’aide à mourir quand elle en a exprimé explicitement le souhait lorsqu’elle était encore en pleine conscience ? Cela reviendrait à la contraindre à subir un état qu’elle a expressément indiqué ne pas vouloir. Je rappelle d’ailleurs que dans le cadre de la loi Claeys-Leonetti, les directives anticipées et la désignation de la personne de confiance sont prises en compte, y compris lors de la fin de vie. (Mme Danielle Simonnet applaudit.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Qu’il s’agisse de perte de discernement ou de perte de conscience, le groupe Les Républicains est hostile à l’amendement de Mme Simonnet comme il l’était au précédent. Si notre assemblée l’adoptait, cela voudrait dire concrètement qu’on pourrait euthanasier une personne inconsciente. Chacun voit bien qu’on franchirait une limite insupportable sur le plan éthique. Cela étant, je rejoins la préoccupation des auteurs de l’amendement : beaucoup de gens s’imaginent que le texte permettra de satisfaire la demande d’aide à mourir de ceux qui pensent que, s’ils ne sont plus conscients, autant partir. C’est bien pourquoi il faut lever l’ambiguïté, d’autant que ce débat nourrit chez moi le doute : je crains qu’un jour, ouvrant plus grand la porte, on en vienne à autoriser l’euthanasie de personnes inconscientes. Cela, je n’en veux pas.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Mais pas du tout !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    M. Delautrette, Mme Pires Beaune et moi-même voterons cet amendement de repli. Quant aux collègues qui s’y opposent, je leur rappelle qu’il ne faut pas le considérer isolément, mais dans le cadre des conditions cumulatives dont on va parler tout à l’heure. (Mmes Danielle Simonnet et Sandrine Rousseau applaudissent.) Notre collègue Peytavie a évoqué un cas de figure, mais il est tout aussi audible d’autoriser l’accès d’une personne à l’aide à mourir si sa demande avait été acceptée avant qu’elle perde plus ou moins conscience du fait des traitements antidouleurs. Pourquoi le lui refuserait-on alors qu’on accepte, dans les mêmes circonstances, les directives anticipées pour la sédation profonde et continue jusqu’au décès ? (Mmes Danielle Simonnet, Sandrine Rousseau et Christine Pires Beaune applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Lionel Royer-Perreaut.

    M. Lionel Royer-Perreaut

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    À titre personnel, je suis totalement opposé à l’amendement qui vient d’être défendu. En plus, on débat d’un dispositif qui sera relativement inopérant puisque, Mme Battistel l’a rappelé à l’instant, des conditions cumulatives seront prévues pour que soit réitérée la volonté de mourir.

    Mme Danielle Simonnet

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    Mais non !

    M. Lionel Royer-Perreaut

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    Ces conditions cumulatives sont restrictives par rapport au principe même des directives anticipées.
    Ce bricolage ne servira à rien. C’est pourquoi, à titre personnel, je suis opposé à cet amendement.

    Mme Danielle Simonnet

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    Ce n’est pas du bricolage mais de l’anticipation !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexis Corbière.

    M. Alexis Corbière

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    Je salue la qualité générale de nos débats et je respecte, évidemment, les opinions différentes de la mienne car le débat est sensible. Mais quel est le principe d’une directive anticipée ? C’est justement d’anticiper le moment où la maladie ne permettra plus au malade d’exprimer un jugement et d’exercer son ultime liberté ! Sinon, à quoi bon ce document ?
    Je ne comprends donc pas pour quelle raison vous ne souhaitez pas qu’on apporte une telle précision. Si, après analyse et réflexion, la personne a exprimé à l’avance, à plusieurs reprises, son souhait afin que ses directives soient respectées dans le cas où elle ne pourrait plus exprimer son opinion, il faut respecter ce souhait ! Sinon les discussions que nous tenons depuis des semaines perdraient de leur force. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Julie Laernoes.

    Mme Julie Laernoes

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    Le sujet n’a probablement pas sa place dans cet article mais le débat est important et intéressant. Je comprends votre questionnement, madame Genevard : une personne inconsciente ne peut effectivement pas donner son avis au moment où le geste est pratiqué.
    Je vous rassure, je ne me suis pas installée en France pour fuir la loi autorisant l’euthanasie aux Pays-Bas et les cars ne partent pas massivement d’Allemagne ou des Pays-Bas vers la France pour cette raison !
    Je vais vous donner un exemple néerlandais pour tenter de vous rassurer : une personne atteinte d’une maladie très grave, en fin de vie, disposait d’une date d’euthanasie mais, après un accident vasculaire cérébral qui lui a fait perdre conscience trois jours avant cette date, elle n’a pu recourir à l’aide à mourir. Pourtant, elle avait exprimé son consentement jusqu’au bout.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Cécile Rilhac.

    Mme Cécile Rilhac

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    Madame Genevard, il s’agit d’un amendement de repli mais je comprends que vous vous interrogiez sur les notions de perte de discernement et de perte de conscience. Comme d’autres, je ne sais pas si le sujet a sa place dans cet article mais nous devons en débattre : que se passe-t-il en cas de perte de conscience, si la demande d’aide à mourir a été faite et la procédure enclenchée ?
    Je suis favorable à ce que les directives anticipées prévoient très clairement ce cas de figure – nous en débattrons certainement à nouveau à l’article 6. M. Pilato s’est interrogé sur le rôle du plan personnalisé d’accompagnement dans le processus et je suis d’accord avec lui, il faut évoquer ce qui se passe en cas de perte de discernement ou de conscience.
    Je partage l’analyse de M. Corbière : à quoi servent les directives anticipées s’il est impossible de les faire valoir au moment où l’on perd conscience ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Marie-Noëlle Battistel applaudit également.)

    (L’amendement no 2471 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 3053 de M. Antoine Villedieu est défendu.

    (L’amendement no 3053, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l’amendement no 3156.

    M. Christophe Bentz

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    Il s’agit de préciser que le consentement de la personne volontaire pour être présente lors d’un suicide est attesté par une déclaration sur l’honneur, écrite et signée de sa main. C’est d’ailleurs sans doute pourquoi l’amendement n’est pas tombé.
    M. Delautrette s’est demandé si les débats sur certains sujets ne mériteraient pas de se tenir à d’autres moments de l’examen du texte. Mais nous ne sommes pas responsables de la situation, des amendements déposés sur certains articles ayant été déplacés – c’est le cas de l’amendement suivant, de ma collègue Lohro.
    En outre, monsieur Delautrette, je vous le confirme, nous, opposants au texte, cherchons bien à rendre le dispositif inopérant ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jérôme Guedj.

    M. Jérôme Guedj

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    Moi aussi, je pensais que cet amendement allait tomber car, plus tôt à l’article 5, nous avons supprimé la possibilité de recourir à une personne volontaire – proche, membre de la famille, conjoint – pour administrer la substance létale, ce dont je me félicite. Grâce à la suppression de cette disposition, je suis heureux de vous annoncer que je voterai l’article, alors que ce n’était pas le cas au début de nos débats.

    (L’amendement no 3156 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-France Lorho, pour soutenir l’amendement no 1373.

    Mme Marie-France Lorho

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    En l’état de sa rédaction, tous les verrous de ce projet de loi semblent tombés et les critères d’éligibilité restent souvent arbitraires et sujets à interprétation. Si vous nous avez répété que l’âge est un critère stable d’éligibilité au dispositif, certains collègues ont, en commission, déjà tenté d’ouvrir le dispositif aux mineurs.
    L’amendement vise donc à inscrire dans le marbre que les mineurs sont exclus des actes définis à l’article 5. Quel parent confronté à la souffrance de son enfant peut prendre une décision raisonnée ? Quel enfant, s’il souffre, dispose de suffisamment de discernement et de maturité pour le faire ? J’y insiste, les mineurs doivent être exclus. Pour eux, il faut privilégier et développer des solutions d’apaisement de la souffrance. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    (L’amendement no 1373, repoussé par la commission et le Gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article 5, tel qu’il a été amendé.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        142
            Nombre de suffrages exprimés                138
            Majorité absolue                        70
                    Pour l’adoption                88
                    Contre                50

    (L’article 5, amendé, est adopté.)
    (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à onze heures quarante, est reprise à onze heures cinquante.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    Après l’article 5

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Xavier Breton, pour soutenir l’amendement no 2633, portant article additionnel après l’article 5.

    M. Xavier Breton

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    Notre collègue Anne-Laure Blin propose de compléter le texte par un article définissant l’euthanasie comme étant « l’usage des procédés qui permettent de hâter ou provoquer délibérément la mort à la demande du malade qui désire mourir ».

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Nous avons déjà eu ce débat : avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Même avis, pour les mêmes raisons.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet

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    Le groupe La France insoumise votera contre l’amendement. Le débat sémantique est légitime mais, dès lors que nous n’avons pas retenu ce terme, je ne vois pas pourquoi nous créerions un article qui le définit. Nous pourrions nous passer d’examiner un tel amendement.

    (L’amendement no 2633 n’est pas adopté.)

    Article 5 bis

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Serge Muller.

    M. Serge Muller

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    L’article 5 bis prévoit que le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance, inscrit dans le code de la santé publique, comprend celui de bénéficier de l’aide à mourir. Or celle-ci ne relève pas du soin – son but est d’éviter l’acharnement thérapeutique –, mais de l’anti-soin. Je me refuse à voir cet article et cette loi adoptés. En autorisant le suicide assisté et l’euthanasie, nous ouvrons une brèche dans le socle éthique de notre société. Nous rendrons ainsi possibles de nombreux élargissements encore moins éthiques : cette loi banalisera l’acte de donner la mort. En forçant les familles et les patients à envisager la mort comme une solution possible à leurs souffrances, elle fera peser une pression immense sur leurs épaules.
    Le Président de la République parle d’« acte fraternel », alors qu’il s’agit d’un acte d’abandon. Nous abandonnons les soins, nous abandonnons des vies, nous abandonnons des valeurs – nous abandonnons en réalité le concept même de fraternité. (Mme Bénédicte Auzanot et M. Christophe Barthès applaudissent.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de plusieurs amendements de suppression, nos 119, 980, 1512, 1733, 2696, 2936 et 3362, qui tendent à supprimer l’article 5 bis.
    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 119.

    M. Thibault Bazin

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    L’article 5 bis crée une confusion entre un droit général et un droit qui se veut exceptionnel et dérogatoire. L’article L. 1110-5 du code de la santé publique traite de l’apaisement des souffrances ; vous souhaitez le modifier en mettant sur le même plan les soins palliatifs et le droit au suicide assisté et à l’euthanasie. Vous parlez même de « droit à », ce qui contredit ce qu’ont dit précédemment la rapporteure et la ministre en donnant un avis défavorable sur des amendements contenant cette expression.
    Le chapitre du code de la santé publique consacré aux droits de la personne consacre le droit de recevoir les traitements et les soins les plus appropriés qui garantissent le meilleur apaisement possible de la souffrance. Il évoque aussi la limite de l’obstination déraisonnable et la possibilité de recourir à une sédation profonde et continue si le pronostic vital est engagé à court terme. Pourquoi ajouter l’aide à mourir dans ce chapitre et pas dans le suivant, comme vous l’avez fait pour les autres dispositions, notamment celles du titre Ier du projet de loi ? C’est profondément contradictoire. Je vous demande donc de supprimer l’article 5 bis par souci de cohérence.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Isabelle Valentin, pour soutenir l’amendement no 980.

    Mme Isabelle Valentin

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    Comme l’a expliqué mon collègue Thibault Bazin, cet article prévoit d’inclure l’euthanasie et le suicide assisté dans la liste des soins que toute personne a le droit de recevoir pour soulager la douleur. Or les soins sont par définition des actes thérapeutiques qui visent à conserver ou rétablir la santé. Faire mourir ne peut donc être assimilé au fait de prodiguer des soins ou de soulager les souffrances grâce aux soins palliatifs. Pour respecter la vérité due au patient et le travail des soignants, il convient donc de supprimer cet article.
    Nous devons être beaucoup plus clairs dans nos formulations. Quand vous interrogez les gens, ils se prononcent en faveur de ce texte car ils ne veulent pas souffrir. Si les soins palliatifs étaient plus développés, nous n’aurions pas à débattre de ces sujets.

    M. René Pilato

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    On s’y est engagés au titre Ier !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 1512.

    M. Marc Le Fur

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    L’article place sur le même plan les soins palliatifs et le suicide assisté et l’euthanasie, ce qui pose un problème. Il faut établir une hiérarchie et accorder la priorité aux soins : les soins palliatifs, trop négligés depuis ces dernières années, doivent redevenir la nôtre.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l’amendement no 1733.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Vous semblez vous être fixé deux objectifs au travers de cet article. En introduisant l’aide à mourir à l’article L. 1110-5 du code de la santé publique, vous laissez entendre que l’euthanasie et le suicide assisté seraient des soins – nous avons vu que ce n’était pas le cas puisque les soins, ce sont les soins palliatifs.
    Ensuite, vous détournez le principe initial du droit inscrit à l’alinéa 2 de l’article L. 1110-5, qui dispose que toute personne a le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance. Si on ne peut que partager le souhait que toute personne ait une fin de vie digne et apaisée, il est dangereux de faire croire qu’administrer un produit létal en vue de supprimer la vie de la personne serait comparable aux soins dont usent, par exemple, les personnels soignants en soins palliatifs pour que la personne en fin de vie puisse appréhender la mort le plus sereinement possible.
    Cette confusion délibérément entretenue n’est pas souhaitable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 2696.

    M. Dominique Potier

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    Je laisse de côté la question de la cohérence juridique du texte et de son positionnement pour évoquer la dynamique des soins palliatifs. Comme beaucoup d’entre vous, je les ai côtoyés de près : c’est une extraordinaire aventure scientifique et humaniste.
    Je suis intimement convaincu qu’une société ne peut pas affirmer tout, en même temps. En faisant le choix radical d’accompagner quelqu’un jusqu’au bout de la vie, dans et contre la souffrance, en lui tenant la main, nous avons instauré une dynamique qui serait irrémédiablement brisée par l’instauration du droit à l’aide à mourir. Au nom de la liberté, nous perdrions un bien commun fondé sur une sagesse jusqu’alors incarnée par la République. (Mme Émilie Bonnivard et M. Marc Le Fur applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l’amendement no 2936.

    M. Pierre Dharréville

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    Je défends cet amendement au nom de tout mon groupe, du moins je crois. L’article 5 bis, introduit en commission spéciale, prévoit d’inscrire le droit de bénéficier de l’aide à mourir à l’article L. 1110-5 du code de la santé publique. L’aide à mourir serait dès lors assimilée aux soins délivrés dans le cadre de l’apaisement des souffrances de la fin de vie. Nous considérons qu’elle n’est pas un soin car elle intervient soit quand les soins s’avèrent insuffisants pour soulager les souffrances de la personne malade – c’est du moins ce que nous comprenons de la philosophie de ce texte –, soit quand celle-ci refuse un traitement et décide d’interrompre les soins. L’article 5 bis instaurerait un continuum entre la sédation profonde et continue et l’aide à mourir.
    Bien des choses ont été dites à ce sujet mais en 2018, la HAS a distingué la sédation profonde de l’aide à mourir du point de vue de leurs intentions, leurs moyens, leurs procédures, leurs résultats et leur temporalité. La sédation profonde vise à soulager une douleur réfractaire, en altérant profondément la conscience par le recours à un sédatif et en poursuivant la sédation jusqu’au décès, dans un délai imprévisible. L’aide à mourir, quant à elle, répond à une demande du patient, en provoquant la mort par l’utilisation d’une dose létale de façon immédiate, dans un délai rapide. Afin d’éviter la confusion entre les deux, nous proposons de supprimer l’article 5 bis.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hervé de Lépinau, pour soutenir l’amendement no 3362.

    M. Hervé de Lépinau

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    La problématique reste la même : l’aide à mourir par le recours à une substance létale constitue-t-elle un soin ? Selon moi, la réponse reste négative.
    La notion d’« accompagnement affectif » ne doit pas non plus être inscrite dans le code de la santé publique, car il s’agit d’une démarche humaniste, fondée sur la solidarité et l’affection, que nous n’avons pas à codifier. Laissons aux uns et aux autres la possibilité d’accompagner leurs proches en fin de vie selon les modalités qui leur conviennent.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    L’article 5 bis a été introduit en commission spéciale suite à l’adoption d’un amendement de Mme Marie-Noëlle Battistel. Il dispose que le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible de la souffrance, inscrit à l’article 1er de la loi Claeys-Leonetti, comprend le droit de bénéficier de l’aide à mourir. J’ai déposé un amendement rédactionnel pour préciser ce qui a été voté en commission spéciale. Avis défavorable.
    Pour la suite de nos débats, je vous serai reconnaissante de ne plus opposer soins palliatifs et aide à mourir, comme vous l’avez continuellement fait. (Applaudissements sur les bancs des groupes RE, LFI-NUPES, DEM, SOC et Écolo-NUPES. – Mme Frédérique Meunier applaudit également.) À aucun moment, la loi ne les oppose. Bien au contraire, le titre Ier est consacré aux soins palliatifs et aux moyens de les déployer dans les territoires. De plus, une personne qui sollicite l’aide à mourir peut choisir de ne pas recourir aux soins palliatifs. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Personne ne remet en cause la dynamique des soins palliatifs. Ils répondent à la demande de nombreux patients et il n’y a aucune raison pour que cela cesse. Nous avons passé toute la semaine dernière à travailler sur ce sujet pour mieux équiper notre pays en services de soins palliatifs. Le titre II ne remet pas en cause les soins palliatifs. Je le répète car c’est important.
    Il n’en demeure pas moins vrai que des patients, dont nous définirons les caractéristiques lors de l’examen de l’article 6, pourront dans les semaines ou les mois qui viennent, recourir à l’aide à mourir. Elle représente une autre façon d’exprimer leur volonté et, d’une certaine manière, leur liberté.
    Il faut mettre l’article 5 bis en lien avec l’amendement no 3308 que Mme la rapporteure présentera dans un instant, car il vise à préciser les conditions du droit créé par l’amendement de Mme Marie-Noëlle Battistel voté en commission spéciale, tout en en conservant l’esprit. Il s’agit d’un droit non pas absolu, mais soumis à conditions. Je serai donc favorable à l’amendement no 3308 car, puisqu’il insiste sur la notion de possibilité, il correspond davantage à la réalité. Avis défavorable aux amendements de suppression.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Madame la ministre, l’amendement auquel vous venez de donner un avis favorable tend à confirmer la modification que prévoit d’apporter l’article 5 bis à l’article L. 1110-5 du code de la santé publique, issu de la loi Claeys-Leonetti. Ce faisant, c’est l’esprit même de cette loi que vous vous apprêtez à déconstruire. Bien plus, en incluant le suicide assisté ou l’euthanasie dans l’aide à mourir, vous créerez formellement et juridiquement un continuum avec le contenu de la loi Claeys-Leonetti. C’est une rupture majeure.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierrick Berteloot.

    M. Pierrick Berteloot

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    Nombre de nos concitoyens sont malades et souffrent, autant dans leur corps que dans leur esprit. Ils sont condamnés à mourir et à vivre dans ces conditions. Ils sont en fin de vie et n’espèrent qu’une chose : que l’on apaise leur souffrance. Pour certains, cela revient à partir dignement. Accordons-leur ce droit. S’il en était ainsi, il devrait être inscrit tel quel dans le code de la santé publique.
    Je suis contre ces amendements de suppression et je continuerai à défendre cette loi pour le bien commun. Je voterai l’article 5 bis. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Je remercie Mmes la rapporteure et la ministre d’avoir réitéré leur soutien à l’article 5 bis, créé par un amendement que j’ai défendu au nom de mon groupe en commission. L’article sera complété par un amendement de la rapporteure. Il est donc important de rejeter les amendements de suppression et d’adopter celui de la rapporteure. Les explications fournies par la rapporteure et la ministre en commission et en séance nous ont convaincus. Nous voterons donc contre les amendements de suppression.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthias Tavel.

    M. Matthias Tavel

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    Nous voterons contre les amendements de suppression, par souci de cohérence pour le texte que nous examinons. D’abord, parce que nous n’opposons pas les soins palliatifs, renforcés par le droit opposable que nous avons voté la semaine dernière, à l’aide à mourir, que nous venons d’adopter à l’article 5, afin que chacun dispose de la liberté du choix. En rejetant l’article 5 bis, nous reviendrions en arrière et aboutirions à un texte incohérent.
    Ensuite, parce que le soin désigne avant tout l’acte médical, demandé et accepté par le patient, qui garantit la dignité de ce dernier. De ce point de vue, l’aide à mourir constitue bien un acte de soin, car il respecte la personne et sa volonté jusqu’à la fin. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES. – Mme Christine Pires Beaune applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Dharréville.

    M. Pierre Dharréville

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    Au risque de vous déplaire, madame la rapporteure, j’aimerais que l’on arrête de me dire quoi penser dans ce débat. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes RN et LR.)

    M. Frédéric Boccaletti

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    C’est clair !

    M. Marc Le Fur

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    C’est vrai ! Non à la censure !

    M. Pierre Dharréville

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    Je continuerai d’affirmer que les soins palliatifs et l’aide à mourir, ce n’est pas la même chose. L’amendement a été signé par des députés de mon groupe opposés à ce texte mais aussi par d’autres qui y sont favorables car ils pensent eux aussi que, sans aller jusqu’à opposer ces notions, il faut les distinguer, ne serait-ce que pour les clarifier et aider ceux qui seront amenés à agir. Je vous confirme donc qu’aux yeux des députés de notre groupe, l’aide à mourir n’est pas un soin.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    J’espère que nous cherchons tous à rédiger un texte équilibré. Je m’inquiète, parce que, après avoir affirmé que l’aide à mourir était un soin, on en est à présent à la considérer comme un droit. Il me semblait pourtant bien avoir compris qu’il ne s’agissait pas d’un nouveau droit – en tout cas, tout le monde s’est exprimé dans ce sens, jusqu’au rapporteur général.

    Mme Annie Genevard

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    Exactement !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Je m’inquiète pour l’équilibre du texte et je suis perturbé que l’on prétende que l’aide à mourir serait un droit.
    Madame la rapporteure, vous affirmez que la personne peut choisir l’aide à mourir, sans nécessairement avoir bénéficié de soins palliatifs. Or parmi les conditions à respecter pour bénéficier de l’aide à mourir figure l’existence de douleurs incoercibles. Pour savoir si une douleur est incoercible, encore faut-il essayer les soins palliatifs… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur, dont le temps de parole est écoulé.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    Madame la ministre, j’ai bien entendu ce que vous avez dit à propos des soins palliatifs, mais je rappelle que nous n’aurions pas à débattre de ces questions si le texte n’avait concerné que l’euthanasie ou le suicide assisté. Les conditions d’accès aux soins palliatifs ont été précisées il y a déjà vingt-cinq ans, mais cela fait tout aussi longtemps que l’on attend leur renforcement, ainsi que des moyens humains et financiers. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – M. Marc Le Fur applaudit également.) Ce n’est pas avec votre stratégie décennale que l’on va y arriver. Une augmentation de 1,1 milliard d’euros équivaut à une progression de 6 % – ce n’est qu’un rattrapage de l’inflation.
    Les structures médicales, les Ehpad, ferment et un quart des médecins en soins palliatifs vont quitter leur poste dans les cinq prochaines années. Comment fera-t-on ? Vous ouvrez une passerelle directe vers l’aide à mourir. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. – Mme Isabelle Valentin et M. Marc Le Fur applaudissent également.)

    (Les amendements identiques nos 119, 980, 1512, 1733, 2696, 2936 et 3362 ne sont pas adoptés.)

    Rappel au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard, pour un rappel au règlement.

    Mme Annie Genevard

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    Il se fonde sur l’article relatif à la bonne conduite de nos débats. L’adoption de l’amendement no 3308, que la rapporteure s’apprête à défendre, ferait tomber tous les autres amendements à l’article 5 bis.
    C’est pourquoi, madame la présidente, je sollicite, de votre haute bienveillance, la possibilité d’une expression plus large qu’un seul orateur par groupe. (Protestations sur plusieurs bancs du groupe RE.) En effet, le sujet abordé touche à quelque chose d’assez fondamental. Vous serait-il possible d’accorder deux prises de parole par groupe ?

    Mme la présidente

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    Comme la présidente l’a entériné hier, deux prises de parole par groupe sont prévues, quelle que soit la position des orateurs.

    Mme Annie Genevard

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    Merci !

    M. Patrick Hetzel

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    Très bien !

    Article 5 bis (suite)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 3308.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    L’adoption de cet amendement ferait effectivement tomber les huit amendements suivants. Il vise à apporter une précision qui devrait être en mesure d’apaiser les inquiétudes de M. Isaac-Sibille et j’espère qu’il sera approuvé par Mme Battistel. Il nous semble en effet préférable de parler de la possibilité d’accéder à l’aide à mourir, plutôt que du droit à en bénéficier, l’aide à mourir n’étant pas un droit inconditionnel, mais plutôt une liberté nouvelle.
    Cet amendement entre en cohérence avec ce que nous avons voté précédemment. Sa rédaction est plus précise puisqu’il renvoie aux conditions prévues par la « section 2 bis du chapitre 1er du présent titre ».

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir le sous-amendement no 3488.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Il est en partie sémantique, mais pas uniquement. Mme Annie Genevard a raison, l’adoption de l’amendement de la rapporteure ferait tomber tous les suivants. Malgré la réécriture que vous proposez de l’article, madame la rapporteure, le problème reste entier puisque vous persistez à faire entrer l’euthanasie et le suicide assisté dans le code de la santé publique. Ce faisant, vous laissez entendre que ces deux actes seraient non seulement des soins mais également un droit. À mon sens, la confusion est toujours présente aussi le sous-amendement tend-il au moins à clarifier la rédaction.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Avis défavorable au sous-amendement. Quant à l’amendement, il tend à proposer une formulation expliquant que ce droit comprend la possibilité d’accéder à l’aide à mourir dans les conditions prévues. Je crois que les mots ont un sens : avis favorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Justine Gruet.

    Mme Justine Gruet

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    D’une manière générale, vous avez des difficultés à assumer votre position et à préciser ce que vous comptez permettre ou refuser. Nous sommes à nouveau dans une forme de « en même temps », qui est malheureusement dangereux lorsqu’il s’applique à l’encadrement d’un geste létal, compte tenu des difficultés que rencontreront les personnes qui devront se référer à un texte imprécis.
    Pour ne prendre qu’un exemple, il n’est jamais indiqué précisément qui détermine l’incapacité physique d’un patient. Par conséquent, je m’interroge : madame la ministre, pourquoi refusez-vous d’être plus précise ? Plus nous le serons, plus nous serons en mesurer d’encadrer les pratiques et de limiter les dérives.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Genevard.

    Mme Annie Genevard

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    Cet amendement vise à compléter l’article 1101-5 du code de la santé publique, qui dispose que toute personne a le droit de recevoir des soins visant à soulager sa douleur. Vous proposez d’ajouter que ce droit comprend la possibilité d’accéder à l’aide à mourir. J’y suis opposée pour deux raisons.
    Tout d’abord, l’acception du mot « droit » ne s’applique pas aux mêmes dispositions. Dans le premier cas, il est question de soulager la douleur, ce à quoi tout le monde est évidemment favorable. Dans le second, il s’agit d’interrompre la douleur par la mort provoquée. À mon sens, c’est fondamentalement antagoniste.
    Ensuite, j’y suis opposée parce qu’accéder à l’aide à mourir n’est pas un droit. Si cette formulation était l’expression d’un droit, ce serait celle d’une liberté individuelle, comme si une telle décision n’avait pas d’implication collective ; collective pour les soignants, au sein d’une même structure hospitalière ou d’un même centre de soins ; collective parce que tout le corps social est concerné – cela a été dit à plusieurs reprises.
    Ce texte de loi ne vise pas seulement à garantir une liberté individuelle, il invite également l’ensemble de la société à réfléchir à son rapport aux soins, à la maladie, à la fragilité et à la vulnérabilité. C’est pourquoi je suis totalement défavorable à l’amendement de la rapporteure.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    Nous nous opposerons au sous-amendement de Mme Ménard mais nous voterons l’amendement de la rapporteure, même s’il fait tomber le nôtre, parce qu’il y est bien question d’une possibilité, en complément de tout ce que vous défendez, chers collègues, à savoir les soins palliatifs et la sédation profonde et continue. Il s’agit d’ouvrir droit à une nouvelle possibilité, celle d’accéder à l’aide à mourir. La rédaction proposée dans cet amendement nous paraît pertinente.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz

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    Je prends la parole maintenant, parce que si l’amendement est adopté, deux des miens tomberont.
    Vous voulez inscrire l’aide à mourir dans le code de santé publique. Je le répète : vous devez dire la vérité aux Français sur ce que vous faites ici et maintenant, à savoir légaliser l’euthanasie et le suicide assisté – puisqu’il n’y a plus d’exception euthanasique.
    La communication, c’est la répétition. Aussi vais-je encore le répéter : l’aide à mourir, c’est le soin, l’accompagnement et le secours des personnes jusqu’à la fin de leur vie. Cela s’appelle les soins palliatifs et il n’y a aucune raison de les inscrire dans le code de la santé publique, pour la simple raison qu’ils y figurent déjà. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Didier Martin.

    M. Didier Martin

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    L’article 5 bis prévoit que toute personne a le droit à une fin de vie digne et au meilleur apaisement possible de la souffrance.

    Mme Annie Genevard

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    Grâce aux soins palliatifs !

    M. Didier Martin

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    Les professionnels de santé mettent en œuvre tous les moyens à leur disposition pour que ce droit soit respecté.
    La rédaction défendue par Mme la rapporteure revient sur la création d’un droit supplémentaire à l’aide à mourir en proposant la possibilité d’accéder à une aide à mourir. En aucune façon, cela ne fait de l’aide à mourir un droit.

    Mme Annie Genevard et M. Marc Le Fur

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    Mais si !

    M. Didier Martin

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    Elle reste une possibilité, encadrée par les strictes conditions dont nous allons débattre à l’article 6.

    M. Marc Le Fur

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    Il y a pourtant le mot « droit » !

    M. Didier Martin

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    Je suis donc très favorable à l’adoption de l’amendement de Mme la rapporteure. (Mme Natalia Pouzyreff applaudit.)

    Mme Justine Gruet

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    Ce droit est écrit noir sur blanc !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Laure Lavalette.

    Mme Laure Lavalette

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    Faire figurer cette aide à mourir dans le code de la santé publique soulève un vrai problème : cela signifierait que soulager les souffrances équivaut à donner la mort. On a même l’impression que cela provoquerait le recul des soins palliatifs. Vous voyez bien le flou et le trouble que cela provoque !
    Nous avons bien compris que vous vouliez légaliser l’euthanasie à marche forcée, mais ne faisons pas aux soignants l’affront d’appeler cela un soin. Il faudrait que vous assumiez davantage vos choix : ce n’est pas un soin.
    Je regrette que vous n’ayez pas écouté ceux qui seront pourtant en première ligne lors de l’application de ce dispositif. (Mme Sandrine Rousseau s’exclame.) Cet article 5 bis aura nécessairement des conséquences sur toute la chaîne de soins et la façon d’accompagner les patients. Il est encore temps de faire machine arrière. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie-Noëlle Battistel.

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Madame la rapporteure, je vous ai remerciée d’avoir maintenu un avis favorable sur l’article 5 bis. Je ne comprends donc pas la modification que vous voulez y apporter et j’aimerais que vous nous donniez des précisions.
    Afin que chacun et chacune comprenne bien, permettez-moi de rappeler que le texte, tel qu’il est actuellement rédigé, prévoit que ce droit comprend celui de bénéficier de l’aide à mourir. C’est bien le patient qui est bénéficiaire et sa volonté est respectée. Madame la rapporteure, vous proposez la rédaction suivante : « Ce droit comprend la possibilité d’accéder à l’aide à mourir. » Cependant, un droit ouvre toujours une possibilité d’accéder à quelque chose.

    M. Frédéric Petit

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    Une possibilité n’est pas toujours un droit !

    Mme Marie-Noëlle Battistel

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    Je ne comprends donc pas votre choix sémantique. Par quel cheminement de pensée avez-vous abouti à la rédaction proposée dans cet amendement, qui ne fait que définir ce qu’est un droit, sans reprendre la volonté que nous avons voulu faire figurer dans l’article 5 bis ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Cyrille Isaac-Sibille.

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Je suis partiellement d’accord avec Mme Battistel : s’agit-il véritablement d’un amendement rédactionnel ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    C’est un amendement de précision !

    M. Cyrille Isaac-Sibille

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    Vous proposez de donner la possibilité d’accéder à l’aide à mourir : est-ce que ce serait une obligation ? Le terme « possibilité » peut s’entendre de deux façons : soit c’est possible, soit c’est obligatoire. Je ne vois pas ce qu’apporte l’ajout du terme « possibilité ». Il reste toujours le droit de disposer de sa vie. À mon sens, avec cette modification, le texte ne serait plus équilibré. Comme Mme Battistel, bien que pour des raisons différentes, je ne vois pas ce qu’apporte l’amendement.
    Par ailleurs, j’aimerais que vous répondiez à la question : pour vous, en cas de douleurs incoercibles, s’agit-il d’un choix entre l’aide à mourir et les soins palliatifs ? Pour déterminer le caractère incoercible de la douleur, encore faut-il que le patient ait pu bénéficier de soins antidouleur.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Michel Lauzzana.

    M. Michel Lauzzana

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    L’amendement prévoit de modifier la rédaction d’un alinéa qui s’intégrerait dans un article du code de la santé publique. Il indique que le « droit comprend la possibilité », ce qui donne un choix au patient. C’est important et c’est ce que nous défendons depuis le début : le choix du patient doit primer. Par ailleurs, je veux bien que l’on m’explique les nuances qu’apporterait la rédaction proposée par la rapporteure. En tout état de cause, il importe de donner le choix aux patients et de faire en sorte qu’ils disposent de cette possibilité.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la rapporteure.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Pardonnez-moi si j’ai manqué de clarté ; il est important que nous nous comprenions bien. Sur le fond, madame Battistel, cet amendement ne remet rien en question, mais apporte une précision sur deux points.
    Premièrement, il nous permet de faire preuve de cohérence, puisque nous n’avons pas voté l’ajout des termes « droit à l’aide à mourir » à l’intitulé du titre II – position que j’ai défendue. Nous avons dit qu’il s’agissait d’une faculté, d’une liberté et d’une possibilité. C’est donc par cohérence que je vous propose d’apporter cette précision, qui me semble importante pour suivre le fil conducteur qui sous-tend ce projet de loi.
    Deuxièmement, cette précision ne modifie pas le sens du texte. Cet amendement rédactionnel vise à préciser que le droit d’avoir une fin de vie digne et accompagnée du meilleur apaisement possible comprend la possibilité d’accéder à l’aide à mourir. Sur le fond, cela me semble ne rien modifier.
    Enfin, l’amendement vise à faire figurer la possibilité d’accéder à l’aide à mourir dans la section 2 bis du chapitre 1er du présent titre. C’est en cela que l’adoption de cet amendement ne changerait rien sur le fond.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Je rappelle au député Isaac-Sibille que le texte prévoit de proposer les soins palliatifs aux malades, mais en aucun cas de conditionner l’aide à mourir à la délivrance préalable de ces soins. Ce principe ne souffre d’aucune ambiguïté et il me semble important de le répéter.

    M. Marc Le Fur

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    Au contraire, le texte est tissé d’ambiguïtés !

    Mme Isabelle Valentin

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    Ce n’est pas clair du tout !

    (Le sous-amendement no 3488 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 3308.

    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        112
            Nombre de suffrages exprimés                107
            Majorité absolue                        54
                    Pour l’adoption                64
                    Contre                43

    (L’amendement no 3308 est adopté ; en conséquence, l’article 5 bis est ainsi rédigé et les amendements nos 150, 3178, 1929, 3179, 1000, 1860, 1013 et 2423 rectifié tombent.)

    Avant l’article 6

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Marc Le Fur, pour soutenir l’amendement no 1513.

    M. Marc Le Fur

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    Permettez-moi d’insister sur les conséquences du dernier vote : le mot « droit » apparaît désormais dans le texte, alors qu’il n’avait pas été initialement retenu par le Gouvernement. En soutenant son introduction, celui-ci va au-delà de ses intentions initiales.

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    C’est faux !

    M. Marc Le Fur

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    Voilà la réalité, voilà ce que nous combattons et voilà ce qui est inadmissible !
    Madame la ministre, votre avis dément la recherche d’une position équilibrée dont vous vous prévalez. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LR et RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie, rapporteure

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    Il est défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du Gouvernement ?

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    Monsieur le Fur, nous sommes habitués à vos déclarations mais soyons clairs : cet amendement a été adopté en commission.

    M. Marc Le Fur

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    Ce n’est pas une déclaration, c’est un propos très simple !

    Mme Catherine Vautrin, ministre

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    L’Assemblée nationale vient de réécrire l’article 5 bis afin d’accorder à la notion de possibilité une place que ne lui conférait pas l’amendement, tel qu’approuvé en commission. Tout opposé au texte que vous êtes, vous devriez considérer que sa réécriture, qui insiste sur la notion de possibilité d’accéder à l’aide à mourir, est un moindre mal. Lisez-le !
    Mon avis est donc défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Marc Le Fur.

    M. Marc Le Fur

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    Chacun l’aura compris : le mot « possibilité » a seulement été introduit pour rassurer le quidam et, ce qui est peut-être plus grave encore, les auteurs et les défenseurs de cet article.
    Une digue vient de sauter, mais c’est depuis longtemps que nous nous opposons à ce projet, lequel est d’ailleurs ancien. Jacques Attali a notamment signé dès 1981 un texte favorable à l’euthanasie, dans lequel il écrit que « L’euthanasie sera un instrument essentiel de nos sociétés futures dans tous les cas de figure. […] La logique socialiste, c’est la liberté et la liberté fondamentale, c’est le suicide ; en conséquence, le droit au suicide direct ou indirect a donc une valeur absolue dans ce type de sociétés. »
    Depuis longtemps, nous combattions une telle dérive : elle était programmée et certains militaient pour depuis bien longtemps. Preuve en est faite, je vous renvoie d’ailleurs à l’ouvrage que je citai à l’instant, L’Avenir de la vie.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Mazars.

    M. Stéphane Mazars

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    J’avoue ne pas trop comprendre l’exégèse à laquelle se livrent certains de nos collègues ni les propos tenus à l’instant par M. Le Fur.

    M. Marc Le Fur

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    Ce n’est pas une exégèse mais une lecture attentive du projet de loi.

    M. Stéphane Mazars

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    Personne ne peut nier que depuis le début de nos travaux, nous cherchons à établir un droit, qui n’est pas une obligation.

    Mme Justine Gruet

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    On vient de nous dire que ce n’était pas un droit !

    M. Stéphane Mazars

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    Tout citoyen peut exercer ou non son droit. En l’occurrence, celui dont nous traitons devrait être très encadré, ce que prévoit l’article 6 que nous nous apprêtons à discuter.
    Ainsi, il ne sera possible de solliciter l’exercice de ce droit qu’à certaines conditions, ce que ne cachent pas le Gouvernement et sa majorité. Monsieur Le Fur, vous savez très bien que l’article 14 permet aux citoyens de saisir les tribunaux français pour faire valoir leur droit d’accéder à une aide à mourir.
    L’État de droit est donc respecté au moment où nous cherchons à instituer un nouveau droit, très encadré. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RE.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Avant même que débute l’examen de ce projet de loi, je me suis interrogée sur l’intérêt d’utiliser les notions de suicide assisté ou d’euthanasie dans un texte de loi.
    Je m’étais résolue au fait que retenir la notion de suicide assisté induisait un risque de confusion des actes qui nous intéressent avec les suicides de patients dont le pronostic vital n’est pas engagé. De plus, son emploi pouvait contrevenir à la prévention des suicides, faite notamment en milieu hospitalier ou scolaire. Compte tenu de l’augmentation de la prévalence des suicides, notamment chez les jeunes, il importait donc que la loi recoure à un terme sans ambiguïté.
    De la même manière, nous ne discutons pas d’un projet de loi ouvrant droit à l’euthanasie, mais d’un projet de loi créant une exception d’euthanasie, dans le cas où le demandeur de l’aide à mourir ne serait pas capable d’accomplir lui-même son dernier geste.
    Je ne comprends donc pas les interventions que vous répétez depuis plusieurs jours au sujet des notions d’euthanasie et d’aide à mourir. Que changerait leur introduction dans la loi ? Quand bien même elles y seraient, qu’espérez-vous ? Que la loi soit illégitime parce qu’elles y figurent ? Ce ne sera pas le cas, on parle d’aide à mourir et c’est bien ainsi !

    Mme Laurence Maillart-Méhaignerie,, rapporteure

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    Elle a raison ! Nous espérons que la loi soit intelligible, car dans le cas contraire, elle serait inconstitutionnelle.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz

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    Vous tentez de faire croire aux Français que votre texte est équilibré, mais c’est tout à fait faux. Nous vous avions prévenue dès l’ouverture des débats : l’adoption du texte, dans votre version madame la ministre, fera sauter tous les garde-fous qui devaient rassurer les Français. Nous avons eu raison de sonner l’alerte, car dès l’examen en commission, ils ont disparu : preuve est faite que votre texte, loin d’être équilibré, est dangereux !

    (L’amendement no 1513 n’est pas adopté.)

    Article 6

    Mme la présidente

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    Je vous rappelle que sur cet article, la conférence des présidents a décidé qu’il pouvait y avoir jusqu’à deux inscrits par groupe.

    Rappel au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Caroline Fiat, pour un rappel au règlement.

    Mme Caroline Fiat

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    Il se fonde sur l’article 95 du règlement. Le temps de parole des orateurs inscrits sur l’article 6 est-il bien de deux minutes, sachant que les orateurs inscrits sur l’article 5 ne pouvaient s’exprimer que pendant une minute ?

    Mme la présidente

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    Les orateurs inscrits disposeront chacun de deux minutes de temps de parole, sachant que la conférence des présidents a accepté l’inscription de deux orateurs par groupe. La défense des amendements et les répliques ne pourront pas excéder une minute.

    Article 6 (suite)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Julie Laernoes.

    Mme Julie Laernoes

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    L’article 6 est important, car il détermine les conditions d’accès à l’aide à mourir telle qu’elle a été définie dans l’article 5. Contrairement à ce que prétendent les opposants au projet de loi, aucun de ses défenseurs n’envisage une aide à mourir dont l’accès serait parfaitement libre. Au contraire, nous souhaitons encadrer le nouveau droit que nous venons de voter par des conditions strictes et claires.
    En commission, l’article 6 a été modifié, notamment pour lever les ambiguïtés que prêtait le corps médical lui-même aux notions de court terme et de moyen terme. Nous leur en avons préféré d’autres, celles de phase avancée et de phase terminale, qui nous semblent indiquer plus clairement que la personne concernée atteint la fin de sa vie.
    Nous débattrons ensuite de l’âge auquel une personne peut accéder à l’aide à mourir. C’est par humanisme – le cœur de mon engagement politique – que je défendrai l’accès des mineurs à l’aide à mourir, mais également l’assouplissement des critères de résidence ou de nationalité. J’espère que nos débats seront respectueux des convictions de chacun et de chacune, comme ils l’ont été en commission.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal.

    Mme Annie Vidal

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    L’Assemblée nationale vient d’adopter la définition de l’aide à mourir, dont l’accès est désormais un droit inscrit dans le code de la santé publique. Bien que je reconnaisse au Gouvernement la volonté d’atteindre un équilibre entre la demande pressante des Français et un encadrement strict de l’accès à l’aide à mourir, je considère que ce nouveau droit modifie l’approche philosophique de la fin de vie. En effet, la loi autorisera pour la première fois un acte dont l’intention explicite est de donner un accès médical à la mort. Il s’agit là d’une évolution majeure du droit, lequel se distinguerait de notre cadre juridique et éthique actuel. Les craintes que j’exprimais en commission sont d’ores et déjà vérifiées, puisque nous avons déjà décidé de supprimer l’une des cinq conditions initiales d’accès à l’aide à mourir, et pas des moindres : l’engagement du pronostic vital à court et moyen terme.
    L’accès à l’aide à mourir étant désormais inscrit dans un horizon qui n’est plus uniquement celui de la mort imminente, car la phase avancée d’une maladie peut durer plusieurs années, les conditions associées sont très largement assouplies. Cela augure d’autres ouvertures et expose les professionnels de santé à une insécurité juridique, puisque l’appréciation de l’avancement d’une maladie est imprécise et interprétable.
    En l’état, nous ouvrons le champ des possibles au point d’entraîner des changements de comportements dans notre société que je ne cautionne pas. Le projet de loi tranche avec la législation en vigueur, qui permet de soulager les souffrances du patient, conformément aux souhaits de ce dernier et en présence de sa famille.
    Par ailleurs, une personne en fin de vie est toujours vulnérable. Soumise à des pressions extérieures et convaincue à tort par une société individualiste et âgiste d’être inutile ou d’être un fardeau, elle pourrait penser devoir demander l’aide à mourir.

    Mme Justine Gruet

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    Elle a raison, il y a des dérives !

    Mme Annie Vidal

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    La fin de vie concerne chaque famille, chaque personne ; elle charrie son lot de chagrins et nous devons maintenir, à son égard, le plus haut niveau de vigilance et de protection. (Mme Astrid Panosyan-Bouvet et M. Cyrille Isaac-Sibille applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    L’article 6 définit les conditions d’accès à l’aide à mourir ; deux d’entre elles sont liées à l’état civil du demandeur et trois à son état médical. La légalisation de l’euthanasie des mineurs en Belgique, douze ans après la dépénalisation de l’euthanasie des adultes démontre qu’une condition d’âge ne tient pas dans le temps.
    L’élargissement du champ de l’aide à mourir, qui résulte des travaux en commission spéciale, risque de créer un appel d’air dans l’Union européenne pour les personnes soumises dans leur pays à des conditions d’accès plus strictes au suicide assisté et à l’euthanasie, alors même que nos concitoyens n’ont accès ni aux soins ni aux soins palliatifs dans des conditions satisfaisantes.
    S’agissant des conditions médicales, le critère du pronostic vital à moyen terme était indéfinissable. Dans le texte issu de la commission spéciale, le critère retenu de la « maladie avancée » ouvrira la porte à toutes les dérives. Faudra-t-il euthanasier des personnes atteintes de maladies graves et incurables dont le pronostic vital ne serait pas engagé ? Faudra-t-il euthanasier une personne souffrant d’un cancer métastasé alors qu’elle suit un traitement d’immunothérapie qui allonge son espérance de vie ? Cet élargissement n’a d’autre but que de faciliter l’accès au décès alors que notre responsabilité de législateur est de faciliter l’accès aux soins.
    La prise en considération éventuelle de la souffrance psychologique montre que les auteurs de cette proposition ont une profonde méconnaissance de la réalité de la maladie. La souffrance psychologique n’est pas éventuelle et accompagne la douleur physique. Là encore, ce critère n’est pas fiable. L’affection d’un patient qui refusera un traitement pourra alors être considérée comme incurable ; le patient pourra dès lors être éligible à la mort provoquée, en vertu de cet article. Cette situation créera une confusion sur le caractère objectif de l’incurabilité.
    Qui plus est, un patient pourra demander à participer au processus de mort provoquée. Le groupe Rassemblement national a décidé que chaque membre était libre de voter ou non cet article ; pour ma part, je m’opposerai à son adoption. (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. René Pilato.

    M. René Pilato

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    L’article prévoit les conditions d’accès à l’aide à mourir. Il semble équilibré mais nous avons un profond désaccord sur la notion de court et moyen terme que vous souhaitez rétablir. Si les critères dont nous allons débattre sont réunis, notre seule et unique boussole pour déterminer le moment où l’acte ultime sera pratiqué ne peut être que le niveau de souffrance réfractaire que le patient est capable de supporter. Ce niveau étant variable d’une personne à l’autre, nous ne pouvons inscrire dans la loi un quelconque délai, ne serait-ce qu’indicatif. La mention de la phase avancée ou terminale est donc préférable.
    Nous devons faire confiance à l’équipe soignante qui entoure le malade pour apprécier et mesurer la souffrance telle qu’elle est vécue. Lorsque le patient ne supporte plus les médicaments parce qu’ils n’arrivent plus à soigner, voire provoquent des effets tellement indésirables que ce qu’il reste à vivre devient une longue et indigne agonie, lorsque le patient atteint ce stade de souffrance réfractaire insupportable, personne ne peut lui dire qu’il faut encore endurer et attendre. Tout le monde sait alors qu’il est condamné et que sa mort est inéluctable. Alors, notre devoir de fraternité nous oblige à tenir compte de sa dernière demande, celle d’en finir au moment où il estime que sa dignité reste intacte, voire lorsqu’il estime que l’acte mettant un terme à la souffrance et à l’agonie restaure sa dignité.
    Le projet de loi doit répondre à cette situation. L’Assemblée ne peut arbitrairement fixer un quelconque délai. Parce que le malade sait qu’il va mourir, que ses souffrances sont et seront de plus en plus insupportables, il doit pouvoir choisir ce moment. Tel est le sens du texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NUPES.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Patrick Hetzel.

    M. Patrick Hetzel

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    Nous abordons les conditions d’accès à l’aide à mourir. Il est troublant de constater que l’examen du projet de loi provoque d’ores et déjà une déflagration dans notre société. En effet, les premiers effets délétères se font ressentir. La légalisation du suicide assisté ou de l’euthanasie pourrait multiplier le recours à ces pratiques, selon l’effet Werther. Un certain nombre de personnes fragiles et vulnérables sont donc en train de se poser des questions. Des tribunes de parents d’enfants en situation de handicap sont publiées, nous enjoignant de faire attention ; ils nous disent « halte-là ! ». Des malades s’expriment ; un jeune étudiant, atteint de la maladie de Charcot, se demande quel type de message nous sommes collectivement en train d’envoyer.
    Je vous alerte sur le fait que face à ce droit individuel, nous avons la responsabilité d’envoyer un véritable message de fraternité : nous ne sommes pas en train de faire quelque chose d’anodin, nous devrions être très vigilants. Je fais partie des opposants à ce texte et je considère que l’élargissement des conditions d’accès, voté en commission, est absolument délétère. Nous souhaitons, pour notre part, fixer des conditions très strictes. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LR et RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Fuchs.

    M. Bruno Fuchs

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    Depuis deux semaines, nous participons à un débat d’une portée sociétale majeure, ainsi que vient de le rappeler M. Hetzel. Je salue le débat sémantique, philosophique, éthique que nous avons eu lors de l’examen de l’article 5, qui nous a permis de préciser et de définir la notion d’aide à mourir.
    Nous fixerons ensemble les conditions précises d’accès à l’aide à mourir prévues à l’article 6, afin de garantir, en notre âme et conscience, à chacun le droit à une vie apaisée, respectueuse de sa dignité.
    J’ai créé le parlement citoyen de la 6e circonscription du Haut-Rhin, composé de 150 délégués, pour la plupart tirés au sort sur les listes électorales. Ces citoyens discutent et votent les mêmes textes que nous examinons ici. Ils ont décidé de constituer une commission spéciale afin de travailler sur le projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie. De ces travaux sont nés huit amendements que je défendrai. Je souhaite remercier le rapporteur général, Olivier Falorni, qui a pris en considération cette réflexion citoyenne et a tenu à échanger durant une heure avec ces délégués, afin de les éclairer sur le texte et la façon dont il a été pensé.
    J’ai été très impressionné par l’implication de mes concitoyens dans ce débat, qui représente un véritable enjeu médical et sociétal, relève des domaines juridique et philosophique, et interroge nos valeurs de liberté, d’égalité et de fraternité. Au nom de cette réflexion et de la considération que j’ai pour le parlement citoyen du Haut-Rhin et pour ses délégués, j’ai déposé deux amendements à l’article 6.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. François Gernigon.

    M. François Gernigon

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    L’article 6 est l’article le plus important de ce texte car il fixe les conditions d’accès à l’aide active à mourir. Nous sommes tous d’accord pour dire que ce texte ne doit s’adresser qu’à un petit nombre de patients. Il est important de bien encadrer ce dispositif et de rétablir la notion de court et moyen terme, prévue dans la version initiale du texte.
    Je me pose encore une question. Je suis convaincu que le texte ne doit pas prévoir la prise en compte des directives anticipées. Toutefois, un certificat de volonté pourrait garantir l’accès à l’aide à mourir d’un patient pour lequel les médecins, de manière collégiale, ont considéré que les conditions d’accès à l’aide à mourir étaient remplies et qui a réitéré sa volonté, au cas où il perdrait conscience entre le moment où il peut accéder à cette aide et celui où il peut passer à l’acte. Je n’ai pas de certitude en la matière ; je compte beaucoup sur nos échanges pour m’éclairer sur le sujet.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christine Pires Beaune.

    Mme Christine Pires Beaune

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    Nous avons voté la définition de l’aide à mourir à l’article 5. Je le redis, cette définition est insatisfaisante et cruelle. En faisant de l’autodétermination la règle – ce qui, du reste, n’existe dans aucun autre pays – vous punissez le patient qui appelle à l’aide et qui, par peur de rater son geste, préférerait que son médecin l’accompagne jusqu’au bout.
    J’en viens à l’article 6 qui dresse la liste des conditions cumulatives d’accès à l’aide à mourir. Je salue la rédaction de la troisième condition, à savoir la substitution du « pronostic vital à court ou moyen terme » par la « phase avancée ou terminale ». (M. Stéphane Delautrette et Mme Danielle Simonnet applaudissent.) Lors des auditions de la commission spéciale, tous les médecins nous ont répété qu’ils ne savaient pas déterminer le moyen terme. Je salue donc cette réécriture ; nous nous opposerons à toute tentative de retour en arrière.
    À titre personnel, je considère que nous devrions aller encore plus loin. La maladie grave et incurable, qui s’accompagne de souffrances réfractaires, quelle qu’en soit la nature, devrait être une condition suffisante.
    La transition est toute trouvée avec la quatrième condition qui ne me satisfait pas. Là encore, vous établissez une hiérarchie entre les souffrances. En toute humilité, madame la ministre, je vous le dis : je ne sais pas si une souffrance physique est plus facilement apaisable ou acceptable qu’une souffrance psychologique. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – MM. Joël Giraud et Gilles Le Gendre applaudissent également.)
    J’en viens à la dernière condition : « être apte à manifester sa volonté de façon libre et éclairée ». Que faites-vous des directives anticipées ? Quid du patient qui, quelques mois, voire quelques semaines avant un accident de la route – qui le laissera cloué au lit, tétraplégique, dans un coma irréversible – avait très clairement indiqué dans ses directives anticipées qu’il souhaitait avoir accès à l’aide à mourir si de telles circonstances devaient se produire ? Vous jetez aux orties les directives anticipées, vous jetez à la poubelle une volonté claire, précise et exprimée quelques mois, voire quelques semaines avant la perte de conscience.
    Pour finir, je réponds à M. Patrick Hetzel : nous voulons simplement délivrer un message humaniste et fraternel. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES. – M. Gilles Le Gendre applaudit également.)

    M. Inaki Echaniz

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Dharréville.

    M. Pierre Dharréville

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    La version initiale du projet de loi allait déjà au-delà de l’approche de départ visant répondre à quelques cas exceptionnels. Au Canada, une loi votée pour 60 cas par an concerne aujourd’hui 6 000 cas par an. La loi finit par créer sa propre dynamique.
    En commission, les conditions ont été singulièrement élargies ; l’engagement du pronostic vital a ainsi été supprimé. Cet élargissement est cohérent avec les fondements philosophiques du texte, qui vise à garantir le respect absolu de la liberté de l’individu. Dans cette droite ligne, certains défendent l’idée d’un droit universel et opposable. Le principe d’égalité sera ensuite convoqué – il l’est déjà : pourquoi certains y auraient-ils accès et pas d’autres ? Cette dynamique se poursuivra.
    Certains orateurs ont clairement dit qu’il fallait aller au-delà de la version initiale du texte – je salue leur cohérence. D’autres ont dit qu’il ne fallait pas aller trop loin pour ne pas effrayer. Nous pensons que d’autres étapes pourraient être franchies. C’est le chemin sur lequel nous sommes engagés. C’est la philosophie même du texte qui nous est présenté. Je ne me reconnais pas dans cette vision de la société ; nous sommes en train de franchir une barrière éthique qui nous posera de singuliers problèmes.

    M. Patrick Hetzel

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    C’est tellement vrai !

    M. Pierre Dharréville

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    J’ai une autre conception de la fraternité et de l’humanité que celle défendue par d’autres dans l’hémicycle. Nous verrons où nous mènera l’examen de l’article 6, au cours duquel nous définirons les contours de l’accès à cette nouvelle possibilité. Les débats en commission m’ont plutôt donné raison quant aux craintes que je nourris depuis le départ. (M. Dominique Potier et Mme Astrid Panosyan-Bouvet applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.

    Mme Emmanuelle Ménard

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    Claire Dierckx est une jeune femme de 31 ans. Comme son père, elle est atteinte d’une grave maladie dégénérative, l’ataxie spinocérébelleuse de type 7. Elle est belle, jeune, mais les mots qui sortent de sa bouche sont saccadés, comme poussés par une maladie qui la saisit de l’intérieur. Son témoignage est bouleversant, parce qu’il est marqué par la mort de son père, et par sa vie à elle, qui a vécu la mort de son père.
    Un jour, la vie d’homme bien remplie de son père s’est dissoute, abîmée par la souffrance et le désespoir – désespoir qui l’a conduit à demander à être euthanasié. Le regret de Claire Dierckx : que personne n’ait eu l’audace de montrer à son père qu’il y avait un autre chemin que la mort. Son désir le plus profond : que son père continue à se battre avec nous.
    Claire a choisi la vie. « La souffrance humaine, dit-elle, restera un mystère, mais elle peut être habitée de tellement d’amour. Voilà ce qui me console. »
    Cet amour, ce courage, cette espérance, sont à l’opposé de l’article 6 : un article froid, procédurier, qui donne accès au suicide assisté ou à l’euthanasie dès lors que cinq conditions d’éligibilité sont remplies.
    La troisième de ces conditions est la plus problématique : il suffit d’être atteint d’une « affection grave ou incurable en phase avancée ou terminale » pour accéder à l’aide à mourir. Il n’est plus question de pronostic vital engagé, ni à court, ni même à moyen terme. En réalité, il n’est plus question de soulager des souffrances réfractaires, mais d’offrir un droit qui soit le plus large possible : celui de mourir quand on veut.
    Ce droit est en réalité une charge qui pèsera sur les malades, lesquels devront décider s’ils sont ou non un poids pour leurs proches ou pour la société. Parce que nul ne devrait avoir à se poser une telle question, je m’opposerai évidemment à l’article 6.

    Mme la présidente

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    Les seconds orateurs de chaque groupe inscrits à l’article pourront s’exprimer à quinze heures. La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    2. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Suite de la discussion du projet de loi relatif à l’accompagnement des malades et de la fin de vie.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à treize heures.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra