Fabrication de la liasse

Amendement n°CL2

Déposé le vendredi 11 octobre 2024
Discuté
Photo de monsieur le député Sacha Houlié

Supprimer cet article.

Exposé sommaire

Le présent article vise à réintroduire dans le code pénal des peines planchers pour certains délits, ce qui n’est ni souhaitable, ni efficace.

Le principe d’individualisation des peines, consacré depuis 1789 par l’article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen doit rester un principe cardinal de la procédure pénale. Il permet au juge de prononcer une peine juste et adaptée, porteuse de sens pour la personne à laquelle elle est infligée. De surcroît, l’Etat de droit est fondé sur la confiscation du droit à la vengeance et sur l’impérative confiance due au juge pour apprécier cette juste peine qui demeure toujours susceptible de recours. Aussi, s’inscrire dans une position de défiance générale à l’égard des magistrats comme le font ceux qui défendent le mécanisme des peines planchers revient à miner l’Etat de droit et altérer inévitablement la confiance du citoyen dans l’institution judiciaire en laissant croire que la justice n’est pas au rendez-vous.

En matière d’efficacité, nous disposons déjà d’une expérimentation grandeur nature conduite sous le quinquennat 2007-2012. Il est ainsi établi avec certitude de l’inefficience totale des peines planchers dans la lutte contre la récidive tout comme dans la sévérité des sanctions prononcées par les magistrats.

En somme, les peines planchers n’ont pas entraîné un recours plus important aux peines d’emprisonnement et leur abrogation n’a pas entraîné une moindre sévérité des juridictions pénales dans les quanta de peines infligées. En effet, 

-       d’une part, le taux prononcé d’une peine d’emprisonnement ferme pour un majeur en récidive était de 55,7% pour la période 2006-2010 (comportant des peines planchers) contre 69% pour celle 2016-2020 (n’en comportant plus),

-       d’autre part, le quantum des peines en matière délictuelle comme en matière criminelle en état de récidive a augmenté (moyenne de 6,8 mois en 2001 à 9 mois en 2021 en matière délictuelle ; moyenne de 14,4 années en 2001 contre 16,1 années en 2021 en matière criminelle).

Enfin, les dispositions de la proposition de loi font fi d’ignorer qu’en matière de protection des personnes dépositaires de l’autorité publique, la loi pour la confiance dans l’autorité judiciaire adoptée en 2021 a supprimé les remises de peines automatiques pour les agresseurs de personnes chargées d’une mission de service public. La loi du 24 janvier 2022 relative à la responsabilité pénale et la sécurité intérieure a, quant à elle, créé des incriminations spécifiques afin d’aggraver la répression des actes de violence commis à l’encontre de ceux qui assurent la sécurité dans l’espace public. Enfin, la loi du 24 août 2021 confortant le respect des principes de la République a créé deux nouveaux délits protégeant les forces de l’ordre et les personnes chargées d’une mission de service public : le délit de menaces séparatistes et la mise en danger par la diffusion d’informations personnelles. 

Le retour des peines planchers est donc un artifice de communication du Rassemblement national aussi dangereux qu’inefficace. La suppression de cet article s’impose.