- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Au deuxième alinéa du a quinquies du I de l’article 219 du code général des impôts, le taux : « 12 % » est remplacé par le taux : « 100 % ».
Le gouvernement annonce un « effort budgétaire » de dizaines de milliards d’euros, qui va fortement impacter la vie et le portefeuille des Français, en particulier des ménages pauvres et modestes : décalage de la revalorisation des pensions de retraite, fin du bouclier tarifaire sur l’électricité, baisse de l'indemnisation des arrêts de travail, baisse du remboursement des consultations médicales, coupe dans le budget destiné à la rénovation thermique des bâtiments, etc.
Alors que, dans le même temps, les chercheurs de l’Institut des Politiques Publiques nous expliquent, dans une note publiée en juin 2023, que les milliardaires du pays échappent à l’impôt en organisant légalement leurs fortunes en dehors de l’assiette de l’impôt sur le revenu et de ce qui reste de l’impôt sur la fortune. En effet, l’ensemble des impôts personnels reste en partie progressif jusqu’à un niveau élevé de revenu (600 000 euros de revenu économique annuel, soit le top 0,1% des Français les plus riches), mais une fois cette barrière dépassée, l’impôt devient régressif. Ainsi, les 378 ménages les plus aisés ne paient que 2% d’impôts sur leur revenu économique…
Mais comment s’explique ce phénomène ? Toujours selon cet Institut, « au fur et à mesure que l’on s’élève dans la distribution des revenus, les foyers fiscaux reçoivent de plus en plus de revenus par le biais des bénéfices des sociétés qu’ils détiennent ». Ainsi, pour les 0,01% des foyers les plus riches, l’impôt sur les sociétés devient prépondérant, contrairement à l’impôt sur le revenu. Le problème c’est que le taux d’imposition sur le revenu et le patrimoine personnels se situe au plus haut autour de 59%, alors que celui de l’impôt sur les sociétés s’élève à 25%.
Autre petit problème : parmi ces sociétés d’où proviennent leurs bénéfices, il y a notamment les fameuses holdings financières. En effet, depuis 1985, le taux théorique d’impôt sur les sociétés a été divisé par deux en France, passant de 50 % à 25 %. Cette baisse a encouragé les hauts patrimoines à détenir leurs actifs via des sociétés holdings, leur permettant, entre autres, d’échapper à l’impôt sur le revenu en transférant leurs dividendes à des holdings. Par ailleurs, grâce à ce système financier, ils peuvent vivre sur la holding pour leurs dépenses personnelles (via des « faux frais ») ou acheter des biens immobiliers par son intermédiaire (comme des résidences secondaires). C’est là que réside en grande partie la source de l’inégalité fiscale !
Selon l’Observatoire de la Justice fiscale, il existe donc des niches fiscales, qui profitent presque uniquement aux très riches et qui sont à la source de ce phénomène d’optimisation fiscale via des holdings financières. Une des principales niches : la « niche Copé ». La niche Copé est un mécanisme voté à l'occasion de la loi de finances pour 2005 de décembre 2004, qui prévoit l’exonération des plus-values sur les cessions de titres de participation détenus depuis plus de 2 ans par des sociétés soumises à l’impôt sur les sociétés. Cette niche aurait coûté 7 milliards d’euros en 2018.
Cet amendement de repli vise donc à relever la quote-part pour frais et charges (QPFC) applicable aux plus-values (« niche Copé ») à 100%. Relever la QPFC de 12% à 100% permettrait simplement d'appliquer le taux normal d'impôt sur les sociétés (IS) sur les plus-values réalisées en cas de cessions de titres comme cela était le cas jusqu'en 2004.
Cette imposition au taux normal d’IS est d’autant plus nécessaire qu’il est établi que, chez les contribuables les plus aisés, les sommes perçues au sein des holdings suite aux cessions de titres ne sont que rarement distribuées aux actionnaires, et donc presque jamais imposées.
Cet amendement permettra de lutter contre le caractère dégressif de l’impôt et contribuera à faire respecter le principe de la progressivité de l’impôt, fondamental dans notre système fiscal. En effet, comme le rappelle la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, qui a toujours valeur constitutionnelle, la charge fiscale doit être « également répartie entre tous les citoyens, en raison de leurs facultés ».