- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Mission visée : Cohésion des territoires
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes | + | - |
Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables | 250 000 000 | 0 |
Aide à l'accès au logement | 0 | 0 |
Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat | 0 | 250 000 000 |
Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire | 0 | 0 |
Politique de la ville | 0 | 0 |
Interventions territoriales de l'État | 0 | 0 |
TOTAUX | 250 000 000 | 250 000 000 |
SOLDE | 0 |
Le présent amendement, adopté en commission des finances, est déposé par des député.e.s de plusieurs groupes politiques pour faire face à un problème grave : aujourd'hui, en France, des femmes, des hommes et des enfants vivent à la rue.
Selon le baromètre 2024 de la Fédération des acteurs de la solidarité et de l'UNICEF France, 2 043 enfants, dont 467 de moins de 3 ans, sont contraints de dormir dans la rue. Le nombre de places est à l'évidence insuffisant.
L'an dernier, nous avions réussi à faire adopter en commission des finances des amendements pour pallier cette situation. Le gouvernement, après les avoir balayés via 49.3, avait fini par promettre, devant les premiers mors de janvier 2024, 120 millions d'euros. Ce budget n'a jamais été débloqué.
Le présent amendement vise à corriger cette situation scandaleuse.
Dans le détail, le projet annuel de performance du BOP 177 pour 2024 prévoit la stabilisation du parc d’hébergement à 203 000 places en moyenne annuelle. Il est précisé qu’à ces 203 000 places sont intégrées les 1 000 nouvelles places dédiées aux femmes victimes de violences intrafamiliales annoncées par la Première ministre suite au Grenelle contre les violences conjugales, et dont l’ouverture a débuté en 2023. Le nombre total de places dédiées aux femmes victimes de violences intrafamiliales sera donc porté à 11 000 en 2024.
Cependant, la ligne de crédits permettant de financer les places d’hébergement d’urgence est rabotée de 70M€ par rapport au PLF 2024. Pire, ce même budget 2024 est déjà inférieur de 100 M€ par rapport au budget consommé en 2023. Dès lors, il parait impossible pour les associations et pour l’Etat de maintenir le parc à son niveau actuel avec une telle baisse de financement.
De plus, cette mesure proposant le maintien du nombre de places est insuffisante au regard des demandes non pourvues qui ne cessent de croître d’années en années. En effet, le 19 septembre 2022 nous comptabilisions 6351 demandes d’hébergement au 115 non pourvues contre 8351 le 2 octobre dernier. Deux tiers de ces demandes d’hébergement non pourvues concernent des personnes en famille. Par ailleurs, le dernier baromètre des enfants à la rue de la FAS et l’UNICEF souligne qu’au moins 2 043 enfants étaient sans solution d’hébergement dans la nuit du 19 août 2024, soit une hausse de 120% par rapport à 2020. Parmi eux, 467 ont moins de trois ans. En effet, de nombreuses personnes à la rue, découragées, ne sollicitent plus le 115 et ne sont, de fait, pas comptabilisées.
L’insuffisance du nombre de places disponibles, mise en exergue par ces chiffres, a conduit en 2024 à une priorisation des publics et donc à une remise en cause de l’inconditionnalité de l’accueil, principe fondateur du secteur « Accueil, Hébergement, Insertion » (AHI), consacré à l’article 345-2-2 du Code de l’action sociale et des familles.
Le constat est d’autant plus alarmant que le nombre de personnes sans domicile n’est pas près de diminuer au regard du contexte, marqué par une forte inflation qui ne cesse de fragiliser les ménages les plus précaires et par une crise du logement qui complexifie l’accès au logement des plus modestes, embolisant le parc d’hébergement.
La baisse du pouvoir d’achat, corrélée à une augmentation générale des prix, notamment de l’énergie, impacte la capacité des ménages à payer leurs loyers et leurs charges. Par ailleurs, les associations du secteur AHI, et plus largement l’ensemble des acteurs du logement, craignent que l’adoption de la loi de protection contre l’occupation illicite des logements, dite loi « anti-squat », engendre une augmentation significative du nombre d’expulsions locatives et, en conséquence, du nombre de personnes à la rue.
Il est important de rappeler que le Conseil d'État reconnaît que le droit à l'hébergement d'urgence est une liberté fondamentale et qu’il existe une obligation de résultat à la charge de l’Etat s’agissant de ses obligations en la matière (CE, 22 décembre 2022, n°461869).
Enfin, l’Etat a agréé en juin dernier un accord permettant de revaloriser les salariés de la branche qui a ensuite été étendu à l’ensemble de la branche sanitaire sociale et médico-sociale à but non lucratif le 6 août dernier. Toutefois, cette revalorisation n’est toujours pas compensée par l’Etat ce qui ne permet pas aux associations de revaloriser légitimement leurs salariés. Cette revalorisation pour les crédits du programme 177 est estimée aux alentours de 80 M€.
Nous proposons en conséquence d'abonder les crédits de l’action12 “Hébergement et logement adapté” du programme 177 ”Hébergement, parcours vers le logement et insertion des personnes vulnérables” de 250 000 000 d'euros. Cette augmentation est compensée par une diminution du même montant des crédits de l’action 04 “ Réglementation, politique technique et qualité de la construction” du programme 135 ”Urbanisme, territoires et amélioration de l'habitat”. Cette réduction a pour but de se conformer aux exigences de la loi organique relative aux lois de finances qui oblige, lorsque l’auteur d’un amendement souhaite augmenter les crédits d’un programme, à diminuer les crédits d’un autre programme d’autant. Il n’est pas envisagé de restreindre les moyens alloués à l’amélioration de l'habitat.
Notre intention n’est pas de ponctionner un autre programme : nous appelons le Gouvernement à lever ce gage financier, et nous rappelons les nouveaux moyens fiscaux obtenus par le groupe Ecologiste et social et par les autres groupes du Nouveau front populaire (NFP) en première partie du présent projet de loi de finances.
Le présent amendement est soutenu par la Fédération des acteurs de la solidarité (FAS), l’UNICEF France et la Fédération Nationale des Samu Sociaux (FNSS).