- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Mission visée : Travail, emploi et administration des ministères sociaux
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes | + | - |
Accès et retour à l'emploi | 0 | 0 |
Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi | 0 | 20 000 000 |
Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail | 0 | 0 |
Soutien des ministères sociaux | 20 000 000 | 0 |
TOTAUX | 20 000 000 | 20 000 000 |
SOLDE | 0 |
Par cet amendement, les député.es membres du groupe LFI-NFP demandent une augmentation des effectifs de l’inspection du travail.
Le plein emploi ne peut être atteint au prix du développement de zones de non droit au travail. Par leur présence sur le terrain, les inspecteurs et contrôleurs du travail ont une connaissance fine des problématiques liées au droit du travail. Par leur action, ils sont un rempart face aux pratiques illégales d’employeurs peu scrupuleux.
Et pourtant. Une pénurie d’effectifs touche l’inspection du travail depuis une dizaine d’années. L'inspection du travail a perdu 16 % de ses effectifs en six ans et peine de plus en plus à recruter, selon un rapport de la Cour des comptes publié en février 2024. Les chiffres publiés par la Direction générale du travail (DGT) en juin 2024 sont éloquents : notre territoire ne compterait plus que 2000 postes d'agents de contrôle (inspecteurs et contrôleurs), avec en moyenne un poste d'inspecteur du travail pour 10 500 salariés. Selon la CGT Travail Emploi Formation professionnelle, "le tableau est encore plus catastrophique si l’on prend en compte (...) les effectifs réellement présents, puisque le ratio est alors d’un agent de contrôle pour 13200 salarié.es. En effet, sur les 2000 postes qui subsistent, 409 sont vacant (plus de 20% !)". Dans certaines régions, le taux de sections d'inspection vacantes atteint des sommets (41,18 % en Corse, 20 % en Guyane ou en Centre-Val de Loire au 31 mars 2021).
Chaque année le nombre de postes ouverts au concours est insuffisant pour compenser les départs à la retraite. Le nombre de candidats au concours d'inspecteur a baissé de 47% entre 2015 et 2019 selon la Cour des comptes (rapport de février 2024). Par ailleurs, 40 % des places ouvertes ne sont pas attribuées. Si un plan d'action a été mis en place pour remédier au manque d'attrait pour le concours, la démarche est parcellaire (amélioration du déroulement de carrière, opération de communication, élargissement du « vivier de recrutement »...) et peu efficace à ce jour. La Cour reconnait qu'il est "nécessaire de continuer la réflexion sur le métier même". Surtout, la profession peine à attirer car elle est maltraitée et ses conditions de travail entravées : salaire insuffisant, baisse des moyens, attaques des agents par le ministère... Elle est d'autant plus maltraitée que ces nombreux postes non remplacés génèrent une surcharge et une souffrance au travail pour les agents en place.
Dans la Marne, un inspecteur du travail, Anthony Smith, a été suspendu pendant 918 jours pour avoir fait son travail et engagé une procédure de référé vis-à-vis d’une entreprise refusant de fournir des masques à ses employés lors de la crise du Covid-19. La direction régionale de l’inspection du travail avait agi sous pression de la ministre du Travail d’alors, Muriel Pénicaud. En mai 2023, plusieurs organisations syndicales ont révélé que des cadres du ministère prenaient part à des formations payantes, dispensées par un organisme privé à destination des employeurs, afin de leur apprendre à « « se défendre en cas de contentieux ou de procès-verbal par l’inspection du travail » ». Cela revenait, pour le ministère, à saper l’action de ses propres agents et donc indirectement à conforter les employeurs hors-la-loi.
Les inspecteurs du travail doivent veiller au respect des droits de plus de 20 millions de salariés en France, à l'heure où l'emploi salarié a rebondi en France au premier trimestre 2024. Pourtant, en raison du taux de vacance, plus de 4,5 millions de salariés (soit un travailleur sur cinq) seraient dans l’incapacité de se tourner vers un inspecteur du travail. Afin de remédier à cet état, particulièrement inquiétant, de renoncement à assurer la protection des salariés, nous proposons d'augmenter de 20% le nombre de postes d'agents de contrôle par rapport aux 2000 estimés aujourd'hui, soit l'équivalent de 400 agents supplémentaires pour un total de 2 400 agents. À raison de 50 000 euros par équivalent temps plein, cet amendement propose de mobiliser 20 millions d’euros pour les embauches.
En conséquence des règles de recevabilité financière, cet amendement transfère 20 000 000 d’euros en AE et CP de l’action 01 intitulée « Développement des compétences par l’alternance » du programme 103 « Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi » vers l’action 22 « Personnels mettant en œuvre les politiques d’amélioration de la qualité de l’emploi et des relations du travail » du programme 155 « Soutien des ministères sociaux ».