- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Mission visée : Travail, emploi et administration des ministères sociaux
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes | + | - |
Accès et retour à l'emploi | 0 | 0 |
Accompagnement des mutations économiques et développement de l'emploi | 0 | 10 000 000 |
Amélioration de la qualité de l'emploi et des relations du travail | 0 | 0 |
Soutien des ministères sociaux | 0 | 0 |
Lutte contre le travail illégal dans le secteur des plateformes numériques(ligne nouvelle) | 10 000 000 | 0 |
TOTAUX | 10 000 000 | 10 000 000 |
SOLDE | 0 |
Cet amendement vise à créer un programme budgétaire dédié à la lutte contre le travail illégal dans le secteur des plateformes numériques.
De nombreuses décisions de justice, notamment l’arrêt Uber 2020 de la Cour de cassation, ont permis de mettre en évidence que nombre de travailleurs des plateformes sont en réalité des salariés, liés aux plateformes par un lien de subordination économique caractérisé. L'existence de ce lien de subordination devant justifier une requalification en contrat de travail a été reconnu une nouvelle fois dans un arrêt du 24 avril 2024 de la Cour de cassation (pourvoi n°22-20.352). Le même mois, l'adoption par le Parlement européen, à l'initiative de la députée LFI Leïla Chaibi, de la directive prévoyant notamment une présomption de salariat pour tous les travailleurs des plateformes a constitué une grande victoire.
L’inspection du travail, sous l’autorité de la Direction générale du Travail, mène des actions de contrôle des plateformes afin de lutter contre le travail illégal dont les faux-statuts, excédant par ailleurs la problématique des travailleurs dits « ubérisés ». Or, les observations transmises à la commission d’enquête parlementaire relative aux Uber Files par le syndicat national du travail, de l’emploi, et de la formation professionnelle de la Confédération Générale du Travail (SNTEFPCGT) témoigne d’une réelle inertie des autorités à faire respecter le code du travail par les plateformes. Selon le syndicat, « ce n’est qu’à partir de 2020 que le plan national d’action a explicitement fixé un objectif de lutte contre le travail illégal, dont les faux statuts », avant d’ajouter : « même après 2020, la lutte contre les abus générés par les plateformes numériques et les faux statuts n’a fait l’objet d’aucune campagne d’action spécifique ». Lors de son audition par la commission d’enquête, le directeur général du travail aussi auteur du présent programme 111, M. Pierre Ramain, a reconnu qu’Uber « n’avait pas fait l’objet d’un traitement spécifique au sein de la direction générale du travail ».
À l’absence d’impulsion forte et d’une politique volontariste du Gouvernement à faire respecter la loi par les plateformes s’ajoute la carence des moyens mis en œuvre par l’administration dans le contrôle de ces plateformes. Les contrôles concernant les travailleurs des plateformes sont décrits par la directrice générale adjointe du travail comme des enquêtes particulièrement chronophages et nécessitant des moyens importants. En parallèle, il est frappant de constater la pénurie d’effectifs touchant l’inspection du travail depuis une dizaine d’années. L'inspection du travail a perdu 16 % de ses effectifs en six ans et peine de plus en plus à recruter, selon un rapport de la Cour des comptes publié en février 2024. Les chiffres publiés par la Direction générale du travail (DGT) en juin 2024 sont éloquents : notre territoire ne compterait plus que 2000 postes d'agents de contrôle, avec en moyenne un poste d'inspecteur du travail pour 10 500 salariés. Selon la CGT Travail Emploi Formation professionnelle, "le tableau est encore plus catastrophique si l’on prend en compte (...) les effectifs réellement présents, puisque le ratio est alors d’un agent de contrôle pour 13200 salarié.es. En effet, sur les 2000 postes qui subsistent, 409 sont vacant (plus de 20% !). Plus de quatre millions de salarié.es sont privé.es de service public de l’inspection du travail". Dans certaines régions, le taux de sections d'inspection vacantes atteint des sommets (41,18 % en Corse, plus de 20 % en Guyane ou en Centre-Val de Loire au 31 mars 2021).
Par cet amendement, nous proposons donc la création d’un nouveau programme « Lutte contre le travail illégal dans le secteur des plateformes numériques » abondé de 10 000 000 d’euros en autorisations d’engagement et crédits de paiement. Pour des raisons de recevabilité financière au titre de l’article 40, nous diminuons à due concurrence les crédits de paiement et autorisation d’engagement de l’action « 01 – Développement des compétences par l’alternance » du programme « 103 – Accompagnement des mutations économiques et développement de l’emploi ».