- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Mission visée : Participations financières de l'État
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes | + | - |
Opérations en capital intéressant les participations financières de l'État | 0 | 3 000 000 000 |
Désendettement de l'État et d'établissements publics de l'État | 0 | 5 000 000 000 |
Nationalisation d'Opella(ligne nouvelle) | 8 000 000 000 | 0 |
TOTAUX | 8 000 000 000 | 8 000 000 000 |
SOLDE | 0 |
Cet amendement du groupe LFI-NFP vise à la nationalisation d'Opella, filiale grand public de Sanofi (médicaments sans ordonnance, vitamines et compléments alimentaires), qui produit notamment, en France, le Doliprane.
Lundi, 21 octobre Sanofi a annoncé que Sanofi et CD&R entraient en négociations exclusives pour la cession d'une participation de contrôle de 50 % dans Opella. Cette décision de Sanofi s'inscrit dans une stratégie de recherche de rentabilité court-termiste qui nuit gravement aux intérêts du pays, notamment à sa souveraineté sanitaire et industrielle, et menace les emplois. Sanofi choisit en effet de se concentrer sur les médicaments les plus rentables plutôt que sur l'ensemble des médicaments essentiels, comme le Doliprane, et sur la phase d'études cliniques en phase avancée au détriment de la recherche précoce. Les près de 30 000 emplois supprimés depuis 2015 chez Sanofi en témoignent.
Le profil de l'acheteur, CD&R, est inquiétant pour les 11 000 salariés d'Opella, dont 1 700 en France, et notamment pour les 2 sites de production français d'Opella : les 250 salariés du site de Lisieux (Calvados) et les 500 de l'usine de Compiègne (Oise).
CD&R est en effet un des pionniers du capital-investissement, le "private equity" en anglais, qui consiste à investir dans des entreprises qui ne sont pas cotées en Bourse, puis à les revendre en engrangeant une plus-value.
Dans une récente étude, l’agence de notation Moody’s relevait que les entreprises détenues par les fonds d’investissement (« private equity ») avaient un taux de défaillance de 15 % au cours de ces deux dernières années, un niveau bien supérieur aux autres entreprises. Au printemps, CD&R a notamment supprimé quelque 9 000 emplois dans la chaîne de distribution britannique Morrisons, dont il est le principal actionnaire.
Les salariés de But Conforama ont également fait les frais ces dernières années d'un plan de restructuration mené à la suite à leur rachat par CD&R.
Tout laisse craindre que la recherche de rentabilité primera sur les salariés et sur notre souveraineté sanitaire.
En réponse à ce projet de cession, le Gouvernement Barnier-Macron a cherché à sauver les apparences, mais pas davantage. Les prétendues "garanties" obtenues par l'Etat dans le cadre de l'accord tripartite Etat-Sanofi-CD&R du 21 octobre font figure d'affichage dérisoire. Une pénalité pouvant s’élever jusqu’à 40 millions d’euros s’appliquerait en cas d’arrêt de la production sur les sites de Lisieux et Compiègne. 100 000 € de pénalité par emploi supprimé par licenciement économique contraint. Comment penser que ces montants soient dissuasifs pour une entreprise comme Opella qui réalise plus de 5 milliards d'euros de chiffre d'affaire. La participation minime de 2% qu'entend prendre BPIfrance dans le capital d'Opella n'a rien non plus pour rassurer, encore moins au regard de la gestion par BPI du dossier Technip.
Nous proposons de bloquer la vente des 50% d’Opella à CD&R, notamment en utilisant le décret Montebourg qui permet de refuser que des secteurs stratégiques passent sous pavillon étranger. Nous avons aussi proposé d’ouvrir le chantier du pôle public du médicament, en nationalisant Opella et Sanofi.
C'est pourquoi cet amendement, spécifiquement, vise à la nationalisation d'Opella, dont le coût peut être évalué à près de 8 milliards d'euros pour une prise de participation équivalente aux parts cédées par Sanofi.
Pour des raisons de recevabilité financière, cet amendement procède au mouvement de crédits suivant :
- Il abonde de 8 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement le nouveau programme "Nationalisation d'Opella".
- Il minore de 3 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement l'action 01 du programme 731 Opérations en capital intéressant les participations financières de l'Etat.
- Il minore de 5 milliards d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement l'action 01 du programme 732 Désendettement de l'Etat et d'établissements publics de l'Etat.
Il convient de noter que cette proposition de mouvement de crédits est formelle, afin de respecter les règles budgétaires de l’Assemblée nationale et que nous souhaitons que le Gouvernement lève le gage.