- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
- Mission visée : Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes | + | - |
Compétitivité et durabilité de l'agriculture, de l'agroalimentaire et de la forêt | 0 | 0 |
Sécurité et qualité sanitaires de l'alimentation | 0 | 0 |
Conduite et pilotage des politiques de l'agriculture | 0 | 0 |
Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG) | 0 | 15 000 000 |
Développement des expérimentations de caisses locales d’alimentation(ligne nouvelle) | 15 000 000 | 0 |
TOTAUX | 15 000 000 | 15 000 000 |
SOLDE | 0 |
Cet amendement vise à permettre l’expérimentation, pour une durée de 5 ans, de dispositifs de sécurité sociale de l’alimentation (SSA) dans la continuité des dispositifs déployés par plusieurs communes françaises.
En France, la précarité alimentaire est en nette augmentation. Dans un contexte de forte inflation, 16% des Français déclarent ne pas avoir toujours à manger selon les résultats d’une étude du Crédoc menée en novembre 2022. L’aide alimentaire en France est indispensable en cela qu’elle répond à un enjeu de santé publique, en permettant aux personnes en situation de précarité de subvenir au besoin vital de se nourrir correctement. Néanmoins, la logique de l’aide alimentaire ne peut être la seule réponse à la précarité alimentaire : Une personne sur deux en précarité alimentaire n’y a pas recours. Par ailleurs, la couverture qu'elle offre aux bénéficiaires est partielle, en moyenne seulement 40% de leurs besoins caloriques. Cette aide est également distribuée de manière inégale en raison de la multitude de structures associatives impliquées, chacune ayant son propre mode de fonctionnement. Enfin, il est important de prendre en compte le sentiment de honte éprouvé par les bénéficiaires, ce qui constitue une explication importante du non-recours.
Pour de nombreux spécialistes de l’alimentation, la réponse à la précarité alimentaire se trouve aussi dans le fait de donner “des droits pleins et entiers” aux personnes, notamment à travers l’instauration à terme d’une sécurité sociale de l’alimentation, potentielle nouvelle branche de la sécurité sociale. Cette dernière est une réflexion initiée en 2017 et portée par un collectif d’organisations regroupant citoyens et professionnels de l’agriculture, de l’alimentation et de l’éducation populaire (ISF-Agrista, Réseau CIVAM, VRAC France, Réseau Salariat…).
La mise en place et le financement de caisses alimentaires, adoptant un fonctionnement préfigurant ce que pourrait être celui d’une sécurité sociale de l'alimentation, respecte trois principes :
Le principe d’universalité pour garantir le droit pour toutes et tous d'accéder à une alimentation choisie, saine et de qualité, quels que soient nos moyens ;
Le principe de solidarité via un système de cotisation à travers des caisses locales dédiées ;
Le conventionnement démocratique qui donne la possibilité aux citoyens de décider en assemblées collectives des types de produits qu'ils souhaitent manger et du juste prix pour les producteurs.
La sécurité sociale alimentaire s’inscrit dans une recherche de transformation globale des filières. Elle constitue un levier pour la création de nouveaux droits sociaux en assurant conjointement l’accès de tous à une alimentation choisie et de qualité, la transition vers une agriculture respectueuse de l’environnement et le revenu des producteurs.
Partout en France, des initiatives inspirées des principes de la sécurité sociale de l’alimentation se sont multipliées, à l’échelle locale ou départementale : Montpellier, Cadenet (Vaucluse), Saint-Etienne, Dieulefit (Drôme), Paris, Lyon, Grenoble, la Gironde avec quatre territoires impliqués dont la ville de Bordeaux…Si ces expérimentations diffèrent par leur taille, leur degré d’avancement, le nombre de participants, le montant de la cotisation ; toutes appliquent à leur échelle un système de redistribution alimentaire inspiré de de la sécurité sociale de l’alimentation. En tout, ce sont près de trente expérimentations locales qui existent aujourd’hui et légitiment le travail vers une expérimentation plus large de la sécurité sociale de l’alimentation.
A Montpellier, une caisse alimentaire commune a été élaborée démocratiquement par les habitants et plus d’une vingtaine d'associations implantées sur le territoire. Le principe est simple : chaque participant cotise librement, chaque mois, selon ses moyens, de 1 à 150 euros, et reçoit en retour une allocation alimentaire de 100 euros par mois, utilisable dans des commerces conventionnés pour avoir accès à des produits durables et de qualité issus de l'agriculture paysanne. Ces produits sont choisis au préalable démocratiquement par les citoyens gérant la caisse.
En 2025, 600 foyers participeront au total à cette expérimentation (350 de plus qu'il y a 3 ans) pour un budget global de 1 254 500 €, financé par les cotisations citoyennes, par l'Etat via le Secrétariat général à l'Investissement (SGPI), et les collectivités (Ville de Montpellier, métropole, région Occitanie).
La caisse alimentaire de Montpellier fait partie des expérimentations les plus abouties, à l'appui d'un financement tripartite entre l'Etat, les collectivités et les citoyens. Afin de permettre aux expérimentations de changer d'échelle, la part de l'Etat est donc indispensable à leur développement, pour appuyer le financement de la caisse alimentaire et les dépenses de fonctionnement importantes qui en résultent.
Sur le modèle de l'expérimentation Territoire Zéro Chômeur de longue durée (permise par la loi n°2016-231 du 29 février 2016), Cet amendement budgétaire vise à permettre à 30 expérimentations de caisses locales d'alimentation d’environ 5000 habitants de changer d'échelle en 2025, à l'appui d'un financement de l'Etat pour un tiers soit un total de 15 millions d’euros pour l’année 2025 (5 millions d’euros de financement des dépenses de fonctionnement et 10 millions d’euros de financement de la caisse alimentaire).
En raison des contraintes de recevabilité financière au titre de l’article 40 de la Constitution de la Vème République, le présent amendement procède au mouvement de crédits suivant :
Il abonde de 15 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement un nouveau programme "Développement des expérimentations de caisses locales d’alimentation".
Il minore de 15 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement l’action 01 "Allègements de cotisations et contributions sociales" du programme 381 "Allègements du coût du travail en agriculture (TODE-AG)".
Nous demandons au Gouvernement de lever le gage.