- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
- Mission visée : Sécurités
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport sur le bilan de la réforme visant à intégrer la formation d’officier de police judiciaire à la formation initiale des policiers et gendarmes. Ce rapport présente notamment les effets de cette réforme sur le niveau de formation des officiers de police judiciaire au respect des droits et libertés publics et individuels. Il évalue précisément l’impact de cette réforme sur les finances publiques ainsi que ses résultats réels sur l’attractivité de la fonction.
Depuis 2022, la formation d'officier de police judiciaire (OPJ) est intégrée dans la formation initiale des gardiens de la paix. Jusqu'ici, il existait une condition de trois années d'ancienneté appliquées aux policiers et gendarmes pour se présenter à l'examen d'OPJ. Cette réforme, organisée par la LOPMI a été présentée comme répondant à une "logique de redynamisation de la filière investigation". Concrètement, elle permet le passage de l'examen d'OPJ dès la fin de la scolarité en école de police ou de gendarmerie, ce qui se traduit concrètement par la mise en place d'une formation destinée à cet examen au sein de la formation initiale, qui, depuis septembre 2022, avait été rallongée à cette fin.
Au contraire de ce qu'a prétendu le gouvernement pour justifier cette réforme, la généralisation que celle-ci suppose n'aura pour effet que d'affaiblir l'investigation, en diluant la formation d'OPJ dans la formation initiale. Une aggravation des vices de procédure, et donc un allongement du temps de traitement des affaires, était d'ores et déjà attendu.
La suppression de la condition d'ancienneté nous est apparue dangereuse dès 2022. Celle-ci permettait aux officiers d'acquérir dans leur pratique une certaine expérience leur permettant d'utiliser de leurs pouvoirs, particulièrement conséquents (placements en garde à vue, réquisitions, perquisitions, visites domicilaires...), sans porter atteinte aux libertés publiques et individuelles. Justement, cet équilibre indispensable était essentiellement acquis soit par expérience, soit via le module OPJ qui permettait à celles et ceux sortant OPJ de l'école de pouvoir recevoir immédiatement leur habilitation. Cette réforme nous apparaissait dès lors d'autant plus dangereuse que la même LOPMI avait considérablement accru les pouvoirs des officiers de police judiciaire, en ouvrant le droit aux procureurs de délivrer des instructions générales. Sous prétexte d'allègements administratifs, l'article 13 avait en effet autorisé les OPJ à par exemple demander la remise d’enregistrement de vidéosurveillance des lieux d’une infraction, la recherche de comptes bancaires d’un suspect, les données d’état civil ou encore « les données relatives à la lecture automatisée de plaques d’immatriculation », pour les crimes et délits punis d’au moins 1 an d’emprisonnement et jusqu’à 6 mois.
Cette réforme de la police judiciaire, comme tant d'autres réformes sous le dernier quinquennat, n'a eu à notre sens que pour effet d'accroitre la pression pénale sur les populations les plus précaires. Le fait que cette réforme ait été organisée par une loi de programmation de la police, alors qu'elle aurait du relever du périmètre de la justice, était déjà éloquent. Deux ans après cette réforme, il est toujours aussi évident que celle-ci est passée à côté de l'enjeu fondamental, à savoir la création d'une filière dédiée à l'investigation. Nous estimons pour notre part que la police doit être reformée et que deux principaux pôles doivent l’organiser. D’une part la police de proximité, chargé de garantir la sécurité du quotidien, et d’autre part la police judiciaire recentré sur du travail au long court et notamment les enquêtes.
Le groupe LFI-NFP demande donc au gouvernement de présenter au Parlement un rapport présentant un bilan complet de cette réforme et de ses conséquences, notamment sur le taux de formation des OPJ au respect des droits et libertés publiques et individuelles. Ce rapport évaluera également les effets réels de cette réforme sur l'attractivité de la fonction, argument avancé par le gouvernement pour la justifier. Il devra enfin présenter un audit détaillant le coût de cette réforme pour les finances publiques. En effet, aucun audit n'a été conduit sur l'ensemble de la réforme de la police judiciaire. Le présent amendement entend ainsi remédier à ce défaut manifeste d'information du Parlement, chargé de contrôler l'action du gouvernement.