- Texte visé : Projet de loi de finances pour 2025, n° 324
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire
- Mission visée : Outre-mer
Modifier ainsi les autorisations d'engagement et les crédits de paiement :
(en euros) | ||
Programmes | + | - |
Emploi outre-mer | 0 | 10 850 000 |
Conditions de vie outre-mer | 10 850 000 | 0 |
TOTAUX | 10 850 000 | 10 850 000 |
SOLDE | 0 |
Le PLF 2025 prévoit que les crédits destinés à l'action 4 Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports du programme 123 Conditions de vie outre-mer diminuent de 10,85 millions d’euros (- 51,67 %) en AE et en CP pour atteindre 10,15 millions d’euros en AE et en CP.
Les documents budgétaires rappellent pourtant eux-mêmes que « Les collectivités d’outre-mer présentent des fragilités en santé publique, exacerbées par rapport à celles de France hexagonale. Dans l’ensemble, les indicateurs de santé y sont moins bons voire se dégradent. Ils démontrent une forte prévalence des maladies chroniques et d’importants enjeux en matière de périnatalité et/ou vieillissement. Elles sont par ailleurs exposées à des maladies et pathologies spécifiques ainsi qu’à des risques environnementaux qui nécessitent des solutions adaptées, principalement liés :
• au climat tropical : paludisme, dengue, chikungunya, zika ;
• à l’environnement : mercure et plomb en Guyane, chlordécone, sargasses et brumes de sable aux Antilles, amiante en Nouvelle-Calédonie ».
Cette baisse des crédits réduira notamment l’accompagnement du ministère de l’outre-mer en faveur du territoire de Wallis-et-Futuna, qui avait pu bénéficier en 2024 d’aides importantes au titre du filet social et de soutien à l’agence de santé. Des économies ont également été prévues à hauteur de deux millions d’euros d’AE et de CP correspondant, d’une part, à la non reconduction d’actions en faveur de la sécurité routière et d’autre part, à l’accompagnement des personnes atteintes d’un cancer. Le gouvernement considère en effet que ces dépenses relèvent respectivement des ministères de l’intérieur et de la santé.
Or, ces économies ne seront pas compensées dans les dépenses des ministères de l’intérieur et de la santé – sauf engagement contraire du Gouvernement.
Le désengagement de l’État en matière d’accompagnement des personnes atteintes d’un cancer parait particulièrement choquant au regard du lien existant entre la pollution à la Guadeloupe et à la Martinique par le chlordécone et la responsabilité de l’État à cet égard, reconnue par l’Assemblée nationale lors du vote, le 29 février 2024, en première lecture, de la Proposition de loi n° 2061 visant à reconnaître la responsabilité de l’État et à indemniser les victimes du chlordécone.
Or l’exposition à cette substance a des conséquences avérées sur la santé des populations (augmentation du risque de survenue et de récidive du cancer de la prostate, augmentation du risque d’un accouchement prématuré et de troubles du développement cognitif chez l’enfant). Pour mémoire, comme le rappelle le rapport d’information n ° 2699 du 30 mai 2024 de M. Nicolas Sansu sur les interventions territoriales de l’État au titre du plan Chlordécone IV et du plan Sargasses 2, « une partie importante de la population présente des taux de chlordécone dans le sang pour lesquels le risque pour la santé ne peut pas être écarté : 14 % de la population adulte en Guadeloupe et 25 % de la population adulte en Martinique présentent un dépassement de la valeur toxicologique de référence (VTR) chronique interne fixée à 0,4 μg par litre de plasma, selon les données de l’étude Kannari 1 (2013-2014). Cette étude révèle aussi que l’exposition à très faible dose au chlordécone est généralisée dans la mesure où 90 % des échantillons dosés relevaient des concentrations détectables de chlordécone (supérieure à 0,02 μg par litre de plasma) ».
Sur la sécurité routière, il faut rappeler que la moyenne annuelle du nombre de personnes tuées par million d’habitants sur 2019-2021 est globalement plus élevée en Outre-mer qu’en métropole. Elle s’élève par exemple, pour un millions d’habitant, à 171 décès en Nouvelle-Calédonie, 143 décès en Guadeloupe ou 108 en Polynésie française contre 45 décès en France hexagonale. On observe en outre en Outre-mer une surreprésentation des 25-34 ans, dont le taux de mortalité par million d’habitants est 3 fois supérieur à celui observé dans l’hexagone.
En conséquence, en responsabilité au regard de la situation financière de la France, le rapporteur spécial demande une reprise à l’identique pour le budget 2025 des crédits de la LFI 2024 destinés aux secteurs Sanitaire, social, de la culture, de la jeunesse et des sports en outre-mer.
Afin d’assurer la recevabilité financière de cet amendement, il est donc proposé de majorer de 10 850 000 euros en autorisations d’engagements et en crédits de paiement, les crédits de l’action 04 Sanitaire, social, culture, jeunesse et sports du programme n° 123 Conditions de vie outre-mer et de minorer à due concurrence l’action 01 Soutien aux entreprises du programme 138 Emploi outre-mer.