Fabrication de la liasse

Amendement n°II-CF90

Déposé le jeudi 17 octobre 2024
Discuté
Rejeté
(mercredi 6 novembre 2024)
Photo de madame la députée Sophie Taillé-Polian
Photo de madame la députée Christine Arrighi
Photo de monsieur le député Karim Ben Cheikh
Photo de monsieur le député Tristan Lahais
Photo de madame la députée Eva Sas
Photo de madame la députée Danielle Simonnet
Photo de monsieur le député Pouria Amirshahi
Photo de madame la députée Clémentine Autain
Photo de madame la députée Léa Balage El Mariky
Photo de madame la députée Lisa Belluco
Photo de monsieur le député Benoît Biteau
Photo de monsieur le député Arnaud Bonnet
Photo de monsieur le député Nicolas Bonnet
Photo de madame la députée Cyrielle Chatelain
Photo de monsieur le député Alexis Corbière
Photo de monsieur le député Hendrik Davi
Photo de monsieur le député Emmanuel Duplessy
Photo de monsieur le député Charles Fournier
Photo de madame la députée Marie-Charlotte Garin
Photo de monsieur le député Damien Girard
Photo de monsieur le député Steevy Gustave
Photo de madame la députée Catherine Hervieu
Photo de monsieur le député Jérémie Iordanoff
Photo de madame la députée Julie Laernoes
Photo de monsieur le député Benjamin Lucas-Lundy
Photo de madame la députée Julie Ozenne
Photo de monsieur le député Sébastien Peytavie
Photo de madame la députée Marie Pochon
Photo de monsieur le député Jean-Claude Raux
Photo de madame la députée Sandra Regol
Photo de madame la députée Sandrine Rousseau
Photo de monsieur le député François Ruffin
Photo de madame la députée Sabrina Sebaihi
Photo de monsieur le député Boris Tavernier
Photo de monsieur le député Nicolas Thierry
Photo de madame la députée Dominique Voynet

I. – Après l’article 2 bis de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, il est inséré un article 2 ter ainsi rédigé :

« Art. 2 ter. – Le bénéfice des aides, directes et indirectes, dont bénéficie une entreprise éditrice, au sens de l’article 2 de la loi n° 86‑897 du 1er août 1986 portant réforme du régime juridique de la presse, présentant un caractère d’information politique et générale est subordonné à la mise en place d’une procédure d’agrément de la nomination du responsable de la rédaction mentionné au 3° de l’article 5 de la loi n° 86‑897 du 1er août 1986 précitée. L’agrément est obtenu par un vote des journalistes professionnels au sens de l’article L. 7111‑3 du code du travail que l’entreprise emploie.

« Un décret en Conseil d’État détermine les modalités d’application du présent article, notamment :

« 1° Le seuil d’effectifs de journalistes professionnels au-delà duquel l’entreprise éditrice met en place la procédure d’agrément mentionnée au premier alinéa du présent article ;

« 2° La composition du corps électoral de journalistes professionnels admis à participer à la procédure d’agrément au sein de l’entreprise éditrice, qui ne peut comprendre que ceux qui ont pour activité principale, régulière et rétribuée, l’exercice de leur profession dans ladite entreprise depuis au moins un an. »

II. – Le présent article entre en vigueur le 1er septembre 2025.

Exposé sommaire

Cet amendement inspiré des travaux de l’économiste des médias Julia Cagé et de l’association Un Bout des Médias vise à conditionner les aides à la presse des entreprises presse papier et numérique à la mise en place d’un droit d’agrément des journalistes sur la nomination de tout responsable de la rédaction. Il est issu de la proposition de loi transpartisane visant à protéger la liberté éditoriale des médias sollicitant des aides de l’État. 

Un média n’est pas une entreprise comme une autre ; c’est une entreprise qui produit un bien public, l’information. À ce titre, la liberté de la presse est un élément fondamental de la démocratie, protégé par notre Constitution.

Pourtant, un actionnaire peut imposer un directeur de rédaction à la tête d’un journal contre l’avis de 99 % des journalistes qu’il emploie, comme l’atteste la situation récente du Journal du Dimanche. Le constat est amer, l’ensemble de la rédaction assiste impuissante à un changement soudain de la ligne éditoriale qu’ils avaient choisi en intégrant le journal. La situation du JDD n’est pas isolée, les atteintes à l’indépendance des médias se multiplient. Elles sont le fait d’actionnaires qui refusent de se cantonner à jouer un rôle économique dans les médias qu’ils achètent, mais souhaitent y jouer un rôle de plus en plus politique ou commercial, quitte à exercer des pressions contre l’indépendance éditoriale des rédactions et la liberté de conscience des journalistes. 

La nomination à la tête du Journal Du Dimanche d’un nouveau directeur contre l’avis de l’ensemble de la rédaction comme le parachutage de l’ancien à Paris Match, illustrent les enjeux que revêt ce poste dans la préservation de l’honnêteté de l’information et des programmes et de la déontologie du journalisme. Dans ce difficile arbitrage entre liberté d’entreprendre et liberté de la presse, le régulateur doit jouer un rôle et prévenir les situations où la première prend le pas sur la seconde. Visiblement impuissante à empêcher la Constitution de monopoles médiatiques et à préserver l’indépendance des rédactions, la législation doit évoluer en faveur d’un renforcement des droits des journalistes, en particulier celles et ceux qui exercent dans les titres qui traitent d’information politique et générale.

Cette proposition est une mesure d’urgence, non exhaustive, qui en appelle d’autres pour répondre aux enjeux auxquels sont confrontés aujourd’hui nos médias : concentration, transparence, pluralisme, avenir de l’audiovisuel public, lutte contre la désinformation, conditions d’exercice du métier de journaliste, etc.