Fabrication de la liasse
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Photo de madame la députée Sylvie Bonnet
Photo de monsieur le député Pierre Cordier

Supprimer les alinéas 11 à 16.

Exposé sommaire

Cet amendement préserve l’existence et l’efficacité du bouclier qualité prix (BQP), et ainsi ses effets positifs pour les ménages ultramarins, en cas d’échec des négociations.

 

En effet, les dispositions visées 13 modifieraient radicalement la nature du bouclier qualité prix, qu’elles transformeraient en régime d’administration des prix outre-mer, en les alignant sur les plus bas pratiqués dans l’Hexagone. Un tel objectif n’est pas réaliste, puisqu’il revient à nier l’existence de handicaps structurels liés à l’éloignement, à l’insularité, et à l’étroitesse des marchés dans les outre-mer, qui expliquent une partie des écarts de prix avec l’Hexagone.

 

Il est important de rappeler que même le protocole - très ambitieux - visant à lutter contre la vie chère, signé le 16 octobre 2024 en Martinique, s’est donné comme objectif non pas d’aligner les prix des 54 familles de produits en cause sur les prix hexagonaux, mais de ramener le différentiel de prix moyen avec l’Hexagone à un écart compris entre 5% et 15% pour les circuits courts, et entre 5% et 25% pour les circuits longs.

 

Pour atteindre cet objectif, l’ensemble des acteurs signataires du protocole a mobilisé tous les outils disponibles : suppression de la TVA, de l’octroi de mer, neutralisation des coûts de fret, possibilité d’avoir accès aux tarifs export des fournisseurs, efforts de marge des grossistes et des distributeurs sur les familles de produits visés par l’accord. Malgré cet effort collectif et ciblé, l’alignement total avec les prix pratiqués dans l’Hexagone n’a pas été jugé suffisamment réaliste pour être retenu.

 

Aller plus loin, c’est-à-dire se donner pour objectif d’aligner les prix des DOM sur ceux de l’Hexagone, c’est aller trop loin et obliger les acteurs économiques à vendre à perte une partie des produits disponibles en rayon – ce qui serait, en soi, problématique.

 

Dans ces conditions, la production locale serait être écrasée par la « guerre des prix » qui va se livrer, tandis que seuls les distributeurs les plus gros pourraient éventuellement réussir à tenir, pendant un temps. Le résultat de tout ceci serait une concentration jamais connue de l’activité de la grande distribution autour de quelques grands hypermarchés par territoire, tandis que la totalité de la consommation locale serait désormais importée.

 

Ajoutons que le financement des collectivités locales serait gravement menacé par les pertes d’octroi de mer qui seraient imposées par l’obligation d’aligner les prix avec l’Hexagone, tandis que les assemblées délibératives des collectivités uniques et régionales se trouveraient dépossédées de leur autonomie fiscale, en l’occurrence du pouvoir de fixer librement les taux d’octroi de mer – qui reviendrait au Préfet, puisqu’en fixant des prix très bas, celui-ci imposerait aux collectivités locales de supprimer l’octroi de mer sur les produits concernés.

 

L’article L. 410-4 du code de commerce, issu de la loi Lurel de 2012, permet déjà de fixer administrativement le prix de vente de produits de première nécessité dans les collectivités d’outre-mer. Ce dispositif est entouré de solides garanties de procédure et de proportionnalité, puisqu’il requiert un décret en Conseil d’Etat, après avis public de l’Autorité de la concurrence.

 

Il est donc proposé de protéger la logique actuelle du BQP, qui est de fixer par accord un prix global pour un panier de biens de première nécessité, dans une logique de modération. Le fait de donner au représentant de l’État le pouvoir de fixer les prix dans les DROM sans le moindre garde-fou, en l’obligeant au surplus à s’aligner sur la moyenne des prix pratiqués dans l’Hexagone, voire même sur le prix le plus bas pratiqué dans l’Hexagone, est trop ambitieux pour être réaliste et donc avoir des effets sur le niveau des prix.