- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur, n° 856
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission du développement durable et de l'aménagement du territoire
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Supprimer cet article.
Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à supprimer l’article 2 qui vise tout à la fois à remettre en cause l’indépendance de l’Anses, à faciliter l’usage du drone pour l’épandage de produits phytopharmaceutiques et à réintroduire l’utilisation des néonicotinoïdes.
En premier lieu, les alinéas 3 à 9 remettent en cause le mode de fonctionnement de l’Anses à plusieurs titres :
- Tous les avis et recommandations émis par le directeur général de l’Anses seront transmis au ministère de tutelle, soit 4 000 décisions par an.
- Le comité de suivi des autorisations de mise sur le marché de l’Anses pourra s’autosaisir et donc potentiellement retarder voire remettre en cause une décision prise par le DG de l’Anses en matière de mise sur le marché d’un produit phytopharmaceutique. Cela risque d’exposer le comité à d’éventuelles pressions extérieures et de nuire à la transparence des décisions prises.
- L’Anses sera tenue, préalablement à l’adoption de toute décision de rejet, de communiquer les motifs pour lesquels elle envisage de rejeter la demande de mise sur le marché d’un produit phytopharmaceutique. Cette rédaction laisse penser que l’Anses ne motiverait pas aujourd’hui ses décisions d’interdiction de mise sur le marché ce qui est faux et a été rappelé par le DG de l’Anses Benoît Vallet lors de son audition par la commission du développement durable.
En tout état de cause, l’ensemble des ces alinéas sont de nature à jeter le discrédit sur l’Anses, alimentant ainsi la grave dérive climatosceptique et de remise en cause des faits scientifiquement établis.
En second lieu, les alinéas 13 à 24 concernent l’épandage par drone en reprenant les dispositions de la loi portée par Jean Luc Fugit (EPR) et récemment promulguée. Dès lors l’ensemble de ces alinéas deviennent « satisfaits » et ont déjà fait l’objet d’une analyse précise dans le cadre de l’examen de ce texte à l’Assemblée il y a quelques mois.
En troisième lieu, les alinéas 26 à 38 visent à instaurer un nouveau régime dérogatoire en matière d’utilisation des néonicotinoïdes dont la dangerosité pour la santé humaine et environnementale, en particulier pour les abeilles, a été établis d’un point de vue scientifique. Ces dérogations conduiront in fine à affaiblir les filières concernées qui sont parfois proche d’établir des solutions alternatives aux molécules, notamment à travers des systèmes intégrés pour combiner des solutions, éprouvés sur le terrain et par l’Inrae.
Enfin, les alinéas 40 à 46 visent à imposer à l’Anses la mise en place d’un calendrier d’instruction et d’information sur l’avancement de l’instruction des autorisations de mise sur le marché. Très concrètement, sera considéré comme un usage prioritaire « toute solution permettant de lutter contre un organisme nuisible ou un végétal indésirable qui affecte ou est susceptible d’affecter de manière significative le potentiel de production agricole et alimentaire lorsque les alternatives sont inexistantes, insuffisantes ou susceptibles de disparaître à brève échéance. »
Un conseil d’orientations sera chargé d’informer le ministère de l’agriculture des usages qu’il considère comme prioritaire.
Sur cette base, l’Anses devra établir un calendrier des usages prioritaires en tenant compte du cycle cultural.
Dans le cadre de son audition, le DG de l’Anses Benoît Vallet a souligné que ce dispositif serait inopérant dans la réalité car l’Anses est en flux continue et risque d’emboliser largement l’agence. Par ailleurs ce dispositif ne respecte par le droit européen et constituerait une source de contentieux extrêmement importante. In fine, les décisions seraient influencées pour des raisons économiques et l’agence perdrait l’indépendance qui la caractérise depuis 2014.
Pour toutes ces raisons, il s’agit de supprimer cet article aussi incohérent que dangereux pour la santé humaine et environnementale.