- Texte visé : Proposition de loi, adoptée par le Sénat, après engagement de la procédure accélérée, visant à lever les contraintes à l’exercice du métier d’agriculteur, n° 856
- Stade de lecture : 1ère lecture (2ème assemblée saisie)
- Examiné par : Commission des affaires économiques
Sous réserve de son traitement par les services de l'Assemblée nationale et de sa recevabilité
Supprimer l'alinéa 9.
Cet amendement du groupe Socialistes et apparentés vise à supprimer l’alinéa 9 qui remet en cause le fonctionnement et l’indépendance de l’Anses.
Les alinéas 3 à 9 remettent en cause le mode de fonctionnement de l’Anses à plusieurs titres :
– Tous les avis et recommandations émis par le directeur général de l’Anses seront transmis au ministère de tutelle, soit 4 000 décisions par an.
– Le comité de suivi des autorisations de mise sur le marché de l’Anses pourra s’autosaisir et donc potentiellement retarder voire remettre en cause une décision prise par le DG de l’Anses en matière de mise sur le marché d’un produit phytopharmaceutique. Cela risque d’exposer le comité à d’éventuelles pressions extérieures et de nuire à la transparence des décisions prises.
– L’Anses sera tenue, préalablement à l’adoption de toute décision de rejet, de communiquer les motifs pour lesquels elle envisage de rejeter la demande de mise sur le marché d’un produit phytopharmaceutique. Cette rédaction laisse penser que l’Anses ne motiverait pas aujourd’hui ses décisions d’interdiction de mise sur le marché ce qui est faux et a été rappelé par le DG de l’Anses Benoît Vallet lors de son audition par la commission du développement durable.
En tout état de cause, l’ensemble de ces alinéas sont de nature à jeter le discrédit sur l’Anses, alimentant ainsi la grave dérive climatosceptique et de remise en cause des faits scientifiquement établis.
La commission d’enquête sur les causes de l’incapacité de la France à atteindre les objectifs des plans successifs de maîtrise des impacts des produits phytosanitaires initiée par le groupe Socialistes et apparentés sous la précédente législature a permis de rappeler avec précision l’histoire de l’Anses et son rôle.
Le souci d’avoir une évaluation du risque plus indépendante, fondée sur les données scientifiques, s’est traduit, en 2006, par le transfert des compétences de la Commission d’étude de la toxicité des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés, des matières fertilisantes et des supports de culture, à l’Agence française de sécurité sanitaire de l’alimentation (Afssa). Pour mémoire, cette agence avait été créée le 1er avril 1999 en réponse au scandale de la « vache folle », avec pour mission d’évaluer la sécurité sanitaire des aliments sur l’ensemble de la chaîne alimentaire.
Afin de parachever cette évolution, la France a, en 2014, fait le choix de transférer également les décisions d’autorisation de mise sur le marché à l’Anses, dans le but d’éviter tout soupçon de conflits d’intérêts.
Ce transfert a été acté par la loi du 13 octobre 2014 (4), qui a modifié en conséquence l’article L. 1313‑1 du code de la santé publique relatif aux compétences de l’Anses, laquelle exerce désormais, « pour les produits phytopharmaceutiques et les adjuvants mentionnés à l’article L. 253‑1 du code rural et de la pêche maritime, des missions relatives à la délivrance, à la modification et au retrait des différentes autorisations préalables à la mise sur le marché et à l’expérimentation ».
La philosophie sous-jacente à cette décision était qu’en séparant l’évaluation de la gestion, la gestion serait plus objective et moins biaisée en faveur des intérêts pesant sur le ministère – intérêts agricoles en l’occurrence.
L’Agence nationale de sécurité sanitaire de l’alimentation, de l’environnement et du travail (Anses), créée 1er juillet 2010, a repris les missions dévolues à l’Afssa ainsi qu’à l’Afsset (Agence française de sécurité sanitaire de l’environnement et du travail). L’Anses s’est ainsi trouvée chargée de l’évaluation des risques en vue de l’autorisation de mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques.
À noter que ce transfert s’est traduit par une réorganisation des directions et des procédures au sein de l’Anses, afin de séparer l’évaluation du risque de la prise de décision d’autorisation, lesquelles relèvent de deux directions distinctes.
Ce transfert de compétence a représenté une révolution copernicienne. Il a permis de couper le cordon ombilical entre le ministère de l’agriculture et la régulation du secteur des produits phytopharmaceutiques. Il permet de renforcer le caractère scientifique de la décision prise, qui ne peut que reposer sur les résultats de l’évaluation scientifique faite en amont.