- Texte visé : Texte de la commission sur la proposition de loi, après engagement de la procédure accélérée, de M. Sylvain Maillard et plusieurs de ses collègues visant à réformer le mode d'élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille (451)., n° 1247-A0 rectifié
- Stade de lecture : 1ère lecture (1ère assemblée saisie)
- Examiné par : Assemblée nationale (séance publique)
Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport qui évalue les conséquences de la réforme du mode d’élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille sur les contentieux électoraux dans les communes de Paris, Lyon et Marseille.
Le présent amendement vise à anticiper les litiges électoraux qui pourraient découler du nouveau mode de scrutin.
Par « contentieux électoral », on entend les recours en annulation d’élections ou en correction de résultats portés devant les tribunaux administratifs puis le Conseil d’État (en matière municipale). Il est à craindre qu’un scrutin aussi complexe et inédit engendre de nombreux recours.
Plusieurs facteurs y contribuent, à commencer par le risques d’irrégularités matérielles. Deux urnes et deux bulletins par électeur, c’est multiplier les possibilités d’erreurs (bulletins mélangés entre urnes, confusion dans les procès-verbaux, etc.). Un exemple simple : si un électeur par mégarde introduit les deux bulletins dans une même enveloppe, comment sera comptabilisé son vote ? Ce type de cas, s’il est fréquent, pourrait donner lieu à contestation de la sincérité du scrutin dans tel bureau.
Par ailleurs, le scrutin tel que présenté dans la proposition de loi risquerait d’être illisible pour l’électeur. Si le système n’est pas bien compris par les votants (par exemple, ne pas savoir que l’on peut panacher son choix en votant pour une liste A à la ville et B à l’arrondissement), certains pourraient invoquer avoir été trompés. L’exigence constitutionnelle de sincérité du scrutin implique que les électeurs connaissent les enjeux de leur vote. Le Conseil constitutionnel, dans une décision de 2003, a censuré l’inscription sur le bulletin de noms de personnes non candidates car « une telle inscription risquerait de créer la confusion dans l’esprit des électeurs et, ainsi, d’altérer la sincérité du scrutin ». Il faudra veiller que les bulletins et bulletins explicatifs ne prêtent pas à confusion.
Bien que relevant davantage du contentieux de l’action administrative que du contentieux de l’élection elle-même, les conflits entre décisions du conseil municipal et d’un conseil d’arrondissement pourraient aussi faire l’objet de recours en annulation ou en excès de pouvoir. Comment gérer un conflit ou une incohérence entre une délibération votée en conseil d’arrondissement et en Conseil de Paris ? Certes, ce n’est pas le juge électoral mais le juge administratif qui trancherait, mais cela souligne la nécessité de clarifier en amont les champs respectifs de compétence pour éviter ces litiges.
Notons également que la loi de 2019 a inscrit dans le code électoral un délai pré-électoral d’un an pendant lequel on ne modifie pas les règles du scrutin. Ici, le délai entre la réforme et les élections de 2026 sera inférieur à un an, ce qui rend l’examen de ce texte particulièrement hasardeux, laissant le législateur débattre sur un dispositif rédigé à la hâte et dans l’improvisation.
Les impensés de cette proposition de loi sont multiples. Le scrutin tel qu’envisagé ne permettra pas de garantir que l’expression du suffrage des Parisiens, Lyonnais et Marseillais ne soit pas remise en cause par une insécurité juridique.