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Emmanuel Grégoire

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Céline Hervieu

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Dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement remet au Parlement un rapport qui évalue les conséquences de la réforme du mode d’élection des membres du Conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille sur les financements des campagnes électorales dans les communes de Paris, Lyon et Marseille.

Exposé sommaire

La réforme du mode de scrutin à Paris, Lyon et Marseille a un impact direct sur la manière dont se dérouleront les campagnes électorales dans ces villes, notamment en termes de financement et de contrôle des dépenses électorales. 


Cet amendement souligne les difficultés pratiques et juridiques qui en découleront. 


Avec deux scrutins simultanés, les campagnes électorales seront duales : il y aura des campagnes pour les listes de candidats au Conseil de Paris (ou conseil municipal central) et des campagnes pour les listes de candidats aux conseils d’arrondissement. 


Actuellement, pour une élection municipale classique, chaque liste doit tenir un compte de campagne et respecter un plafond de dépenses calculé en fonction du nombre d’habitants de la commune. 


Dans les villes PLM, en 2020, chaque liste d’un secteur parisien ou marseillais avait un compte de campagne englobant l’ensemble de sa dépense, sachant que cette dépense servait à la fois pour conquérir des sièges d’arrondissement et des sièges au conseil central. 


Demain, cette organisation sera rendue caduque si la présente proposition de loi venait à être adoptée. Au lieu d’une seule campagne par secteur (Paris) ou par secteur municipal (Marseille), il y aura deux campagnes distinctes à chaque échelon. Par exemple, à Paris : une campagne « ville de Paris » couvrant toute la commune (si une liste parisienne unique) et 17 campagnes d’arrondissement en parallèle ; à Marseille : une campagne « ville de Marseille » couvrant la commune entière et 8 campagnes de secteur. Soit, au total, 25 campagnes séparées à Paris-Lyon-Marseille aujourd’hui (1 par secteur x 3 villes) contre potentiellement 37 campagnes après la réforme (1 par arrond/secteur + 1 par ville x 3). Chaque campagne impliquera des dépenses (meetings, tracts, affiches, professions de foi spécifiques, etc.) et des obligations comptables distinctes. Le corps électoral n’étant pas identique (électeurs d’un arrondissement vs électeurs de toute la ville), il n’est pas possible juridiquement de fusionner ces comptes.


L’État rembourse aujourd’hui une partie des frais de campagne des listes ayant obtenu au moins 5 % des suffrages (au 1er tour) et dûment justifié leurs dépenses, dans la limite de 47,5 % du plafond légal. Avec cette démultiplication des campagnes, l’État sera sollicité pour rembourser un nombre bien plus important de listes. Aujourd’hui, seules quelques listes par secteur dépassent 5 % et obtiennent remboursement. Demain, on peut imaginer qu’une liste « locale » obtienne plus de 5 % dans un arrondissement (ouvrant droit à remboursement pour sa campagne d’arrondissement) même si elle est inexistante à l’échelle de la ville. Multiplié par le nombre d’arrondissements, cela représente potentiellement des dizaines de remboursements supplémentaires rien qu’à Paris. Le passage de 3 scrutins (un par ville) à 37 scrutins locaux équivaudrait, en termes de coûts de campagne remboursés par l’État, à augmenter fortement le nombre d’élus (donc de dépenses publiques) – ce qui a motivé son alerte au titre de l’article 40. 


Par ailleurs, les règles de contrôle devront être précisées. La Commission nationale des comptes de campagne (CNCCFP) aura à vérifier deux comptes pour chaque parti ou coalition présente aux deux élections. Comment imputer par exemple les frais généraux communs (local de campagne, affiches portant à la fois le nom du candidat maire et des candidats d’arrondissement) ? Il y a un risque de chevauchement des dépenses entre comptes, qui pourrait aboutir à des rejets de comptes ou des sanctions si le cadre n’est pas clarifié en amont. Il faudra sans doute des instructions spécifiques pour que les candidats ventilent correctement leurs dépenses entre le compte de la liste municipale et celui de la liste d’arrondissement, sans dépasser les plafonds de chacun. 


Il aurait fallu examiner l’augmentation attendue des dépenses de campagne globales et du coût de leur remboursement public, mais également la nécessité d’adapter les montants des plafonds de dépenses (faudra-t-il un plafond particulier pour la campagne parisienne ? Maintient-on les barèmes existants par habitant, ce qui conduirait à un cumul Paris + arrondissements potentiellement deux fois plus élevé ?), ainsi que les mesures de coordination comptable pour éviter le contentieux post-électoral (contestations de résultats pour dépassement de plafond, etc.). 

En résumé, la réforme aura un impact budgétaire et juridique substantiel sur le financement des campagnes à Paris, Lyon, Marseille, qui fragilisera la sincérité du scrutin et la bonne utilisation des deniers publics.