XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Première séance du jeudi 13 mars 2025

Sommaire détaillé
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Première séance du jeudi 13 mars 2025

Présidence de M. Xavier Breton
vice-président

M. le président

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à neuf heures.)

    1. Gestion des compétences eau et assainissement

    Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’une proposition de loi adoptée par le Sénat

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à assouplir la gestion des compétences eau et assainissement (nos 466, 1020).

    Présentation

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la ruralité.

    M. Fabrice Brun

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    Très beau portefeuille que celui de la ruralité !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée chargée de la ruralité

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    Nous allons donc parler eau et assainissement. De l’eau qui coule depuis fort longtemps, puisque ce sujet est devenu, depuis près de dix ans, une sorte de marronnier législatif.

    M. Fabrice Brun

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    Chez moi, il serait devenu un châtaignier !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Il fait en tout cas l’objet de débats nourris, de propositions alternatives et d’échanges. La tension grandissante que subit la ressource en eau exige que nous en sécurisions l’approvisionnement. Elle implique également un effort significatif d’investissement dans nos infrastructures, afin d’assurer une qualité de service à la hauteur des enjeux.
    Élus locaux, parlementaires, gouvernement, nous partageons tous ces objectifs et avons à cœur de trouver les meilleures solutions, adaptées à nos territoires. Toutefois, nul ne peut nier la réalité de la nature : l’eau coule sans égard pour les frontières administratives et n’obéit qu’à la gravité des bassins versants.
    Dans ce contexte, l’intérêt de la mutualisation ne peut être contesté. Nos territoires doivent relever le défi de la préservation de l’accès à la ressource. Après dix années de débat, peut-être est-il temps de conclure ? L’examen de cette proposition de loi nous donne l’occasion de le faire. Nous devons désormais aller de l’avant et mettre un terme à ces débats, raison pour laquelle nous avons engagé la procédure accélérée.
    En matière d’assainissement, vous connaissez l’état du droit. En application de la loi de 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République (loi Notre), le transfert des compétences eau et assainissement des communes vers les communautés d’agglomération est devenu effectif le 1er janvier 2020 –⁠ cette question avait déjà été tranchée pour les métropoles et les communautés urbaines.
    Au vu des difficultés réelles, voire de l’impossibilité de certains transferts, la loi du 3 août 2018 a accordé aux communautés de communes un sursis pour cette prise de compétences, jusqu’au 1er janvier 2026.

    M. Fabrice Brun

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    Enfin une ministre qui connaît ses dossiers !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Le gouvernement entend et respecte les propositions qui visent à adapter ce cadre juridique. Confiant dans la responsabilité des élus, il ne renonce pas à atteindre l’objectif de qualité et de préservation de l’eau.

    M. Vincent Descoeur

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    Très bien !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Nous comptons concilier la pérennisation des transferts d’ores et déjà achevés et la souplesse de gestion nécessaire dans les territoires qui sont, en quelque sorte, empêchés.
    Les derniers chiffres communiqués par la direction générale des collectivités locales (DGCL) révèlent que 329 communautés de communes, soit environ un tiers des communautés recensées en France, exercent la compétence eau. Compte tenu de l’important travail préparatoire au transfert de cette compétence et des moyens techniques, humains et financiers qui lui sont nécessaires, il ne serait pas raisonnable de remettre en cause ce qui a déjà été accompli.
    Toutefois, le gouvernement a bien entendu et compris la demande d’adaptation réaliste et pragmatique dans la gestion de la ressource, exprimée au niveau local, ainsi que la persévérance qu’ont manifestée les sénateurs à ce sujet pendant plus de dix ans –⁠ je pense notamment à l’auteur de la proposition de loi, Jean-Michel Arnaud, et au président du groupe Les Républicains au Sénat, Mathieu Darnaud.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Tout à fait !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Dans cette perspective, donner aux communautés de communes compétentes la possibilité de déléguer leur compétence eau à des syndicats semble relever du bon sens.

    M. Vincent Descoeur

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    Oui, c’est logique.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Telle est la philosophie du texte adopté par le Sénat en octobre dernier, et je salue le fait que la commission des lois de l’Assemblée nationale ait décidé de conserver cette mesure, prévue à l’article 1er.
    Par conséquent, une commune n’ayant pas transféré la gestion de l’eau et de l’assainissement à sa communauté de communes au 1er janvier 2026 disposera de trois possibilités : conserver la compétence à l’échelle municipale, la déléguer à un syndicat intercommunal auquel elle a choisi librement de participer ou la transférer à la communauté de communes.
    Le gouvernement n’a nullement l’intention de revenir sur les transferts déjà effectués au profit des communautés d’agglomération et des communautés de communes. On peut en effet considérer que ces transferts, s’ils ont eu lieu avant le 1er janvier 2026, ont été décidés librement et dans le plein exercice de leurs responsabilités par les communes concernées.
    Pour ce qui est des enjeux, on compte actuellement 3 600 communes qui exercent seules les compétences eau et assainissement. Elles représentent 14 % des communes membres d’une communauté de communes et pourront se tourner vers un syndicat ou vers l’intercommunalité, l’important étant de leur rappeler que leur choix reste libre, mais qu’il doit être responsable.
    La responsabilité des acteurs face à l’enjeu de la ressource et de la qualité de l’eau a été soulignée par le rapporteur. À cet égard, un cadre de discussion à l’échelle départementale doit être créé, afin que les enjeux liés à la gestion de l’eau soient débattus : c’est l’objet de l’article 3 bis.
    La commission départementale de coopération intercommunale (CDCI) en fournit le cadre adéquat. Les membres de la commission des lois ont débattu de la périodicité des réunions de cette instance et nous examinerons différents amendements portant sur ce point : le gouvernement s’en remettra à la sagesse de l’Assemblée.
    L’Assemblée nationale a introduit à l’article 5 le principe d’une solidarité territoriale. Alors que le climat change, l’objectif d’une telle disposition semble louable, mais d’autres éléments du droit positif me paraissent déjà constituer une réponse adaptée. Nous aurons l’occasion d’en débattre.
    Concernant le service public d’assainissement non collectif (Spanc), le renforcement des contrôles à l’égard des particuliers peut paraître éloigné de l’objet initial du texte, qui porte sur les compétences des collectivités.
    Le gouvernement a bien pris note des attentes et des expressions légitimes relatives aux agences de l’eau, qui accompagnent sur le terrain de nombreux acteurs territoriaux. Toutefois, nous pensons qu’il n’est ni nécessaire ni opportun de créer, par ce texte, des contraintes légales supplémentaires. Nous pourrons travailler sur les missions des agences de l’eau dans un autre cadre et selon d’autres modalités.
    Cher Jean-Luc Warsmann, je veux saluer votre engagement et la qualité de votre travail, ainsi que de celui de la commission des lois. Le gouvernement affirme ici une position raisonnable et responsable, respectueuse des spécificités territoriales, des cours d’eau et de leurs enjeux.

    M. Fabrice Brun

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    Ça coule de source !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Cette proposition est le fruit d’échanges constructifs et responsables entre le gouvernement et le parlement. Je nous invite à débattre et à faire aboutir nos discussions dans le même esprit. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR et HOR. –⁠ Mme Valérie Rossi, M. Lionel Vuibert et M. le rapporteur de la commission des lois applaudissent également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République

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    L’Assemblée nationale est réunie aujourd’hui à l’occasion d’un débat sur un sujet noble : l’une des plus belles compétences que doivent exercer les collectivités publiques dans notre pays, celle d’apporter à chacun de nos concitoyens de l’eau en qualité et en quantité suffisante. L’enjeu est considérable, tout comme celui d’assurer que les eaux usées ne posent pas de problème de salubrité. Quasi millénaire, il s’est toujours posé près des sources et des captages d’eau et a consisté, au cours des derniers siècles, à réaliser des canalisations d’eau potable desservant chacun des logements que compte notre pays.
    En règle générale, ce sont les communes qui ont pris l’initiative de relever ce défi, parfois en travaillant de concert lorsque le débit d’un captage n’était pas suffisant. C’est ainsi que se sont créés des syndicats intercommunaux. Le pays s’est donc organisé pour servir ses habitants en eau potable.
    Par la loi Notre, le législateur a voulu bouleverser cette organisation, en imposant à l’ensemble des communes du pays d’abandonner leurs compétences eau et assainissement au profit des intercommunalités.

    M. Vincent Descoeur

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    C’est vrai, mais il est encore temps de revenir en arrière !

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Très vite, le Parlement a compris qu’il avait été mal inspiré et a redonné un peu de liberté aux communes, mais à l’heure où nous débattons, l’obligation de se dessaisir de cette compétence au profit des intercommunalités avant le 1er janvier 2026 pèse toujours sur les communes. Or cet abandon n’est pas la bonne solution, car le territoire administratif d’une communauté de communes ne coïncide pas toujours avec le territoire où se posent les problèmes d’eau. En outre, le transfert supposerait, pour de nombreux territoires, une organisation moins agile et plus coûteuse.
    J’ose le dire, l’abandon obligatoire des compétences eau et assainissement des communes a été accueilli par le monde rural comme un signe supplémentaire du dérapage des pouvoirs publics nationaux, qui, considérant que les territoires ne savent pas comment organiser la vie locale, imposent une loi aux habitants et aux élus. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ M. Christophe Barthès applaudit également.)
    Aujourd’hui, je vous propose de condamner ce qui a été considéré comme la marque d’une désinvolture et de faire l’inverse.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Très bien !

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    La proposition du Sénat, profondément retravaillée par la commission des lois de l’Assemblée nationale, en étroite collaboration avec la ministre –⁠ je remercie les membres de la commission de m’avoir désigné rapporteur, et la ministre et ses équipes pour leur écoute –, est une proposition de loi de liberté.

    M. Fabrice Brun

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    Nous sommes garants de cette liberté !

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    En effet, elle vise à rendre à chaque commune la liberté d’exercer ou non sa compétence et de choisir le niveau auquel l’exercer. En outre, la commission des lois s’est montrée plus ambitieuse que le Sénat en projetant l’application de ce texte à la fois sur la compétence eau, sur la compétence assainissement non collectif et sur la compétence assainissement collectif.
    Cette proposition de loi est aussi un texte de confiance.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Oui !

    M. Fabrice Brun

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    Enfin !

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    L’adopter reviendrait à dire au monde rural et aux élus que nous leur faisons confiance, et à reconnaître qu’ils vivent sur des territoires qu’ils sont, en vertu de leur connaissance de la géographie, des usages et des habitudes de la population, les mieux à même d’organiser. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ M. Gabriel Amard applaudit également.)
    Ce message de confiance s’accompagne des moyens de s’organiser : il sera suggéré aux élus des communes d’organiser, au début de leur mandat, un débat sur les perspectives de qualité et de quantité de chaque captage d’eau. Ce débat aurait lieu aux niveaux départemental, intercommunal et communal et s’appuierait sur un rapport préalable –⁠ nous demanderons aux services de l’État de fournir informations et données, d’évaluer les risques de pénurie en eau et les risques pesant sur la qualité de l’eau. Les élus pourront ainsi décider des mesures à prendre et du cadre dans lequel il faut les prendre.
    Enfin, c’est aussi une proposition de loi de pouvoir d’achat que je défends. Rendre aux communes la liberté de s’organiser, c’est leur permettre de trouver le système garantissant le meilleur rapport qualité-prix de l’eau vendue à leurs administrés.

    M. Vincent Descoeur

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    En somme, un système plus efficace et moins coûteux.

    M. Fabrice Brun

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    Oui, il faut s’assurer que la ressource est gérée selon les meilleurs intérêts.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    J’en profite pour remercier tous les élus qui, le plus souvent bénévolement, font fonctionner de nombreux syndicats et garantissent la qualité de l’eau. (Mêmes mouvements.)
    La commission des lois propose de faire un pas supplémentaire en supprimant le contrôle –⁠ facturé aux usagers et perçu comme un impôt inutile – effectué par les Spanc sur les installations anciennes des logements et bâtiments qui ne sont pas aux normes ni obligées de l’être. J’y reviendrai, avec des exemples chiffrés, afin que vous mesuriez le coût pour ces usagers dont nous devons aussi défendre le pouvoir d’achat.
    J’espère que le travail effectué en commission des lois recueillera le soutien le plus large possible en séance, de sorte que nous puissions envoyer un beau message au monde rural dès la fin de matinée. (« Bravo » et applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ MM. Christophe Barthès et Christophe Naegelen applaudissent également.)

    Discussion générale

    M. le président

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    Dans la discussion générale, la parole est à Mme Émilie Bonnivard.

    Mme Émilie Bonnivard

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    « Le commencement est la moitié du tout », disait Pythagore. Cette phrase pourrait parfaitement résumer la situation dans laquelle nous nous trouvons, conséquence d’une décision complètement hors-sol prise il y a dix ans, lors de l’adoption de la loi Notre –⁠ dans des conditions sur lesquelles je ne reviendrai pas. En rendant obligatoire le transfert des compétences eau et assainissement des communes vers les intercommunalités, cette loi a au mieux compliqué, au pire empoisonné la vie et parfois les relations qu’entretiennent ces dernières. Un mauvais commencement annonce la suite, mais nous avons enfin l’occasion de faire en sorte que les choses se terminent bien. Voilà huit ans que nous attendons ce moment, mes collègues et moi ! (Mme la ministre déléguée sourit. –⁠ Approbation sur les bancs du groupe DR.)

    M. Fabrice Brun

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    Depuis 2017 ! J’étais déjà sur ces bancs !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Depuis dix ans, de nombreuses propositions de loi ont été déposées à l’initiative de différents groupes politiques afin de supprimer, de reporter ou d’alléger l’obligation de transérer ces compétences –⁠ Mme la ministre l’a indiqué. Je remercie Michel Barnier, à l’écoute des maires, d’avoir mis le présent texte à l’ordre du jour du Parlement à l’automne dernier, ainsi que le rapporteur, Mme la ministre et le gouvernement actuel, pour avoir fait droit à cette demande d’évolution.
    La présente proposition de loi sénatoriale est équilibrée. Elle vise à permettre aux communes qui ne le souhaiteraient pas de ne pas transférer l’une ou l’autre de ces compétences aux intercommunalités au 1er janvier 2026. Les communes retrouveront ainsi la liberté de les conserver ou de les transférer à un syndicat ou à une intercommunalité.
    Cependant, le texte ne revient pas sur les transferts déjà effectués. Il importait en effet qu’à l’instabilité subie depuis des années par les collectivités ne s’ajoute pas un détricotage de ce qui a déjà été fait, au risque d’exaspérer les élus locaux.
    La force de ce texte de compromis réside dans les trois principes fondamentaux sur lesquels il s’appuie. Premier principe : un cours d’eau ne se plie pas à un périmètre administratif, il relève de l’hydrographie et d’une organisation des bassins versants vieille de plusieurs décennies. L’égalité n’est pas l’uniformité territoriale, comme vous l’avez vous-même souligné au Sénat, madame la ministre. La gestion de l’eau est différente selon que l’on se trouve en Savoie, dans les Landes ou en Île-de-France.

    M. Fabrice Brun

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    Ou en Ardèche !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Garantir une gestion optimale suppose de tenir compte et de la réalité territoriale des bassins versants et de la manière dont l’eau a été gérée historiquement.
    Deuxième principe : l’État doit davantage faire confiance aux élus et à l’intelligence collective locale. Dans ma circonscription de montagne, il y a autant de situations, de maires et de communes que d’avis pertinents sur ce transfert des compétences, parfois nécessaire et opportun, parfois pas du tout. Le présent texte respecte la diversité des positions et la liberté de choix des élus locaux. Il permet, comme l’a dit le rapporteur, de faire à nouveau confiance à ces derniers.
    Troisième principe : il importe d’éviter les hausses de prix, liées à l’harmonisation des tarifs, qui ont parfois été constatées à la suite du transfert des compétences, lesquelles hausses ne se sont pas traduites par une amélioration du service, ce qui a eu le don d’exaspérer les élus locaux et nos concitoyens –⁠ en tout cas dans mon territoire.

    M. Fabrice Brun

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    Une question d’importance !

    Mme Émilie Bonnivard

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    N’oublions pas la question du financement, intrinsèquement liée à ce sujet bien qu’elle ne soit pas traitée par le texte. En matière d’eau et d’assainissement, les collectivités font face à un mur d’investissement. Les agences de l’eau doivent avoir pour priorité de financer le renouvellement des réseaux, de créer des raccordements aux réseaux d’assainissement existants, et ce quelle que soit la collectivité compétente. Ce message devra en effet être entendu à tous les niveaux –⁠ communes, syndicats et intercommunalités – sans distinction. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ M. Gabriel Amard applaudit également.) En l’absence de politique de financement des réseaux clairement définie par le gouvernement, assignant des missions aux agences de l’eau, cette proposition de loi risque, dans certains cas, de n’être qu’une coquille vide.
    Le groupe Droite républicaine votera en faveur du texte, tout en souhaitant le maintien de l’amendement, adopté en commission, de notre excellent collègue Descoeur…

    M. Vincent Descoeur

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    N’exagérez pas trop !

    Mme Émilie Bonnivard

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    …visant à créer de nouveaux syndicats de gestion. Nous sommes très heureux de pouvoir voter ce texte aujourd’hui. (Mêmes mouvements.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie Pochon.

    Mme Marie Pochon

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    En France, 5 667 communes gèrent encore l’eau sur leur périmètre. Dans ma circonscription –⁠ 240 communes aux confins du Vercors et des Baronnies provençales – comme dans les vôtres, la grande majorité des petites communes réclament, depuis des années, une modification de la loi Notre afin de conserver, si elles le souhaitent, les compétences eau et assainissement.

    M. Gabriel Amard

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    Exactement !

    Mme Marie Pochon

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    Pour certains élus locaux, il s’agit désormais d’une véritable course contre la montre : les communes de ma circonscription se mobilisent depuis deux ans –⁠ la révision de 2018 ayant prolongé jusqu’au 1er janvier 2026 le délai de transfert obligatoire vers les intercommunalités.
    Ce texte était attendu, c’est peu de le dire. Je remercie M. le rapporteur d’avoir été à l’initiative pour inscrire cette proposition de loi venant du Sénat à l’ordre du jour de l’Assemblée. Depuis l’examen en première lecture, en juin 2023, d’une proposition de loi similaire –⁠ là encore à l’initiative du groupe LIOT –, le groupe écologiste lui a apporté son soutien. Nous regrettons que les gouvernements successifs aient mis tant de temps à entendre la voix des élus ruraux qui ne demandaient qu’à bénéficier de la confiance de l’État, qu’à pouvoir anticiper. Par la voix de leurs élus, ces communes expriment la volonté d’avoir le choix à l’heure où, souvent, les transferts de compétences ne s’accompagnent pas d’une juste compensation, où les sources de financement et d’autonomie communale ont été recentralisées, et où la verticalité jupitérienne a abîmé tant de corps intermédiaires.
    Ces communes demandent de la cohérence : pourquoi la compétence eau devrait-elle être obligatoirement transférée aux communautés de communes alors même que les périmètres intercommunaux ne correspondent pas aux bassins versants ?
    Elles demandent de la maîtrise et de la constance pour relever l’un des plus grands défis auxquels notre génération et celles à venir feront face : l’inégalité d’accès à une eau de qualité, dans un contexte de bouleversement climatique inédit et de niveau de pollution des eaux très élevé.
    Derrière cette proposition de loi, le véritable enjeu est celui de la confiance entre les assemblées qui votent les lois de la République et les élus locaux –⁠ celles et ceux qui les appliquent dans ces petites républiques au sein de la grande. Les élus locaux assurent, souvent bénévolement, la gestion d’un service public pour leurs administrés et pour l’intérêt général.
    Nous, écologistes, sommes profondément attachés au fédéralisme et au principe de subsidiarité qui place l’action publique au plus près de celles et ceux qu’elle concerne, en vertu du principe, pourtant si abîmé, de la libre administration des communes –⁠ enjeu démocratique notable. Les élus locaux doivent pouvoir agir en toute autonomie et dans un esprit de responsabilité.
    Nous voterons pour que la possibilité de gérer l’eau soit laissée aux plus petits maillons du millefeuille territorial, à ceux qui se situent au plus près des réalités territoriales et des citoyens, au moment où s’expriment des craintes immenses face à la dépossession des compétences sur ce bien commun comme devant la voracité des acteurs privés.
    Nous, écologistes, sommes également profondément convaincus que demain, nous devrons mutualiser et œuvrer de manière concertée pour faire face aux défis de ce siècle ; mais nous devrons le faire de manière intelligente, en tenant compte des bassins versants. Chez moi, dans la communauté de communes des Baronnies en Drôme provençale, où soixante-sept communes sont concernées, on compte cinq vallées et trois bassins versants.

    M. Vincent Descoeur

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    C’est très fréquent !

    Mme Marie Pochon

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    L’enjeu est fondamental, c’est pourquoi nous soutiendrons avec force l’article 5, qui replace la question de la solidarité au cœur de la gestion de l’eau.
    Démocratie, solidarité : ces dynamiques existent déjà dans les territoires. Au sein des syndicats des eaux et des syndicats de rivières, les élus locaux s’organisent, coopèrent et mutualisent déjà leurs moyens –⁠ par exemple dans la communauté de communes du Diois, dans ma circonscription ; ils ne nous ont pas attendus.
    Nous défendrons des amendements de bon sens, garantissant un état des lieux régulier de la situation de la ressource, tout en évaluant les possibilités de mutualisation entre les communes d’un même territoire –⁠ qu’elles appartiennent à un même bassin versant ou à une même intercommunalité.
    Il y aurait tant d’autres sujets à traiter : le sous-financement de la politique publique de l’eau, les réseaux vieillissants, les budgets des agences de l’eau qui s’affaissent alors que les besoins croissent. Je pourrais parler de ce quart du territoire métropolitain où les systèmes aquifères souffrent d’une insuffisance chronique de la quantité d’eau mobilisable au regard des besoins à satisfaire, ou encore des problèmes de pollution massive des eaux dans le pays.
    Nous ne manquerons pas de débattre de l’article 6, ajouté en commission, qui vise à supprimer les contrôles sur certaines des installations d’assainissement non collectif les plus anciennes, ce qui inquiète les Spanc. L’objectif d’assouplir le transfert des compétences ne doit pas servir de prétexte à une simplification à outrance qui ne mènerait à terme qu’à une augmentation des incidents sur les installations concernées et, in fine, à la dégradation de l’eau et de l’environnement.
    Le groupe Écologiste et social soutiendra ce texte. J’espère que nous saurons être à la hauteur de celles et ceux qui, dans leur commune, agissent déjà dans un esprit de responsabilité. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. –⁠ M. le rapporteur applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Éric Martineau.

    M. Éric Martineau

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    L’eau et l’assainissement sont des compétences essentielles pour nos territoires et la vie quotidienne des habitants. Leur gestion conditionne l’accès de nos concitoyens à des services de qualité, la préservation de l’environnement et l’organisation même des collectivités. C’est la raison pour laquelle avait été entrepris le transfert de ces compétences des communes vers les intercommunalités en 2018 : parce que l’échelon intercommunal permet de mutualiser les moyens et les investissements, mais aussi d’améliorer le taux de rendement de l’eau, et parce qu’il offre la possibilité de mettre en place des dispositifs d’urgence et des mécanismes de solidarité en cas de problème d’approvisionnement en eau potable.
    Ce transfert, il ne faut pas le nier, pose néanmoins un certain nombre de difficultés. Les chiffres prouvent que les communes qui peinent le plus sont les plus isolées. Selon Intercommunalités de France, 151 des 198 services d’eau qui ont un taux de rendement inférieur à 50 % sont en gestion communalisée. Alors que les défis posés par le changement climatique sont de plus en plus nombreux –⁠ inondations, sécheresses, pollutions –, il est nécessaire de mutualiser les moyens pour sécuriser la ressource et en améliorer la qualité.
    Le groupe Les Démocrates est donc favorable à des assouplissements de la législation en vigueur, dès lors qu’ils permettent un transfert à l’intercommunalité ou à un syndicat dans les meilleures conditions, ainsi qu’un exercice souple de la compétence, qui soit adapté à la réalité de chaque territoire. Les collectivités doivent disposer d’un cadre juridique clair afin de fournir aux usagers un service sécurisé et de qualité.
    Nous ne devons toutefois pas passer par pertes et profits tout ce qui a été construit depuis 2018. Après l’adoption de la loi Notre, la plupart des communautés de communes non compétentes –⁠ à l’instar de Loir-Lucé-Bercé dans ma circonscription – ont mené des études préparatoires, financées en partie par les agences de l’eau. En 2023, 48 % des intercommunalités disposaient de la compétence eau et 56 % de la compétence assainissement collectif. Le transfert est donc déjà largement engagé, et revenir en arrière n’aurait aucun sens, si ce n’est de complexifier davantage la législation. Aussi les assouplissements et les adaptations ne doivent-ils pas se faire au détriment de la lisibilité des règles qui s’imposent aux collectivités, ou de la volonté –⁠ qui doit nous animer – d’améliorer le service. Nous savons à quel point la gestion de l’eau et de l’assainissement repose sur des investissements de long terme, sur une planification rigoureuse et sur des infrastructures qui ne peuvent pas être ballottées au gré d’allers-retours institutionnels.
    C’est pourquoi nous avons déposé plusieurs amendements visant à encourager le transfert de ces compétences vers les intercommunalités et à inciter les collectivités à prendre toute la mesure de leurs responsabilités. Nous proposons ainsi de supprimer la possibilité de créer des syndicats infracommunautaires en matière d’eau et d’assainissement, car nous considérons qu’ils contribueraient à aggraver davantage le millefeuille administratif, au moment où nous ne cessons d’appeler à la simplification de l’action publique.

    M. Vincent Descoeur

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    C’est une erreur, c’est contraire au bon sens !

    M. Sébastien Humbert

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    En effet !

    M. Éric Martineau

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    Au moment où beaucoup s’inquiètent de l’empilement des structures, il apparaît fort curieux d’inciter à un mouvement inverse.

    M. Vincent Descoeur

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    Les élus l’attendent !

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Il faut de la souplesse !

    M. Éric Martineau

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    Dans le même sens, nous proposons de subordonner la possibilité de revenir sur un transfert déjà effectué à l’approbation par une majorité qualifiée de communes membres de l’intercommunalité. En effet, on ne peut prévoir à la fois des conditions strictes pour l’obtention de nouvelles compétences et des conditions simplifiées pour le retrait de ces dernières.
    Notre groupe est attaché au principe de confiance dans les élus locaux. Il est juste que chaque commune puisse décider, selon ses spécificités et ses besoins, de conserver ou non ces compétences. Cette souplesse est une forme de réponse pragmatique aux attentes des élus et des habitants, qui connaissent les réalités de leur territoire. Mais cette liberté est exigeante. Si nous faisons confiance aux élus locaux, les Français attendent d’eux qu’ils agissent en responsabilité. L’entretien des réseaux et la surveillance des infrastructures sont essentiels. L’eau est un bien commun et nous devons veiller à ce que la qualité du service rendu aux habitants demeure une priorité absolue, quel que soit le mode de gestion choisi.
    C’est dans cette optique de responsabilisation des collectivités dans leur gestion de l’eau que nous proposons de supprimer l’article 5, qui prévoit la possibilité de transferts d’eau gratuits en cas de pénurie. L’eau n’est pas une ressource gratuite et les communes qui font le choix de conserver les compétences eau et assainissement doivent assumer pleinement cette autonomie, adopter une gestion responsable de l’eau et veiller à leurs rendements. (Mme Marie Pochon s’exclame.) Elles ne doivent pas faire reposer sur d’autres communes, qui auront fait d’autres choix, le poids de leurs responsabilités.
    Notre groupe veillera à ce que le compromis auquel le Sénat est parvenu soit respecté. Enfin, nous tenons à remercier Mme la ministre, qui a mené un important travail transpartisan. Nous sommes convaincus que ce travail doit se poursuivre.

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback.

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback

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    À l’approche de l’échéance du 1er janvier 2026, date à laquelle les compétences eau et assainissement devront obligatoirement être transférées aux communautés de communes ou d’agglomération, le législateur débat depuis plusieurs mois…

    M. Fabrice Brun

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    Depuis plusieurs années !

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback

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    …de la meilleure manière de concilier les intérêts des communes rurales et urbaines s’agissant des services publics de l’eau et de l’assainissement. Il s’agit également de favoriser les investissements nécessaires dans ces deux domaines structurants pour les territoires et nos concitoyens.
    La question de la gestion de l’eau est essentielle à l’heure où le réchauffement climatique s’accélère, où la ressource devient plus précieuse et requiert d’être mieux protégée. L’épisode de sécheresse sans précédent qu’a connu notre pays à l’été 2022 en témoigne : plus de 1 000 communes ont connu une rupture complète d’approvisionnement en eau potable et environ 2 000 communes ont été en tension ou au point de rupture.
    Dans ce contexte, il est indispensable de mener une réflexion sur la répartition des compétences eau et assainissement, afin de définir le cadre le plus propice à une gestion efficace de ces services publics. Le groupe Horizons & indépendants a conscience qu’en établissant une répartition des compétences eau et assainissement, le législateur est conduit à mettre différents intérêts en balance. D’une part, certains élus soutiennent la nécessité d’un transfert obligatoire de ces compétences aux communautés de communes ou d’agglomération. Selon eux, une telle mutualisation permet non seulement de réduire les coûts, grâce à des économies d’échelle, mais également de permettre à la collectivité d’assurer les investissements nécessaires à l’entretien et à la pérennité du réseau –⁠ investissements estimés, pour la France, à 10 milliards d’euros par an dans les trente années à venir. C’est bien un mur d’investissements qui se dresse devant nous, afin de sécuriser les installations existantes et d’éviter de graves problèmes d’épuisement de la ressource et de sécurité sanitaire dans les années à venir.
    D’autre part, d’autres élus, notamment ruraux ou de montagne, craignent les effets de bord importants qu’un tel transfert obligatoire pourrait produire. Outre une augmentation du coût pour les usagers et une hausse parallèle des dépenses de fonctionnement, ils redoutent –⁠ à juste titre – un affaiblissement du lien entre le maire et ses administrés. Le législateur doit donc se tenir à l’écoute de l’ensemble de ces intérêts, de ces craintes et de ces objections, afin de parvenir à une solution acceptable, dans la mesure du possible, par l’ensemble des parties.
    Des assouplissements ont déjà été adoptés en ce sens. Après la loi Ferrand du 3 août 2018, qui a ouvert une possibilité de report au 1er janvier 2026, la loi « engagement et proximité » du 27 décembre 2019 a facilité les modalités de ce report. Cependant, force est de constater que la superposition de ces mesures a créé une complexité supplémentaire qui ne satisfait guère les élus locaux, quelle que soit leur position sur la question. De plus, ces évolutions ne constituent pas une solution pérenne. Le groupe Horizons & indépendants tient donc à saluer les nombreux travaux parlementaires menés à ce sujet, qui visent à trouver un point d’équilibre. Ces travaux permettent également de rassurer les maires inquiets : le législateur ne cherche pas à les déposséder d’une de leurs compétences essentielles, mais bien à créer un cadre mieux adapté aux évolutions du cycle de l’eau.
    Notre groupe tient à saluer le consensus obtenu, une fois n’est pas coutume, au sein de la commission des lois. Les travaux du rapporteur ont permis d’aboutir à des solutions transpartisanes efficaces…

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Merci !

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback

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    …telles que la création d’un dispositif visant à organiser la solidarité territoriale en cas de pénurie d’eau dans une commune. Dispositif dont les communes sauront se saisir, j’en suis certaine, compte tenu des périodes de stress hydriques qui, hélas, surviennent déjà et seront amenées à se multiplier.
    Notre groupe tient toutefois à exprimer ses doutes –⁠ le mot est faible – au sujet de l’article 6, introduit par un amendement du rapporteur en commission.

    M. Gabriel Amard

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    Vous avez raison !

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback

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    S’il vise à renforcer l’efficacité des contrôles sur les installations d’assainissement, nous craignons qu’il ne constitue une porte ouverte à davantage de pollutions, avec une absence partielle ou totale de contrôles des services publics d’assainissement non collectif. (M. Gabriel Amard applaudit.) Notre groupe aurait aimé qu’un tel article ne figure pas dans ce texte.

    Mme Marie Pochon

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    On est d’accord !

    M. le président

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    La parole est à M. Yannick Monnet.

    M. Yannick Monnet

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    Ce texte est attendu. On aurait pu attendre moins longtemps puisque, dès 2021, mon collègue André Chassaigne et mon suppléant Jean-Paul Dufrègne avaient fait une proposition similaire, reprise en 2023.

    M. Fabrice Brun

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    Les Républicains en avaient aussi fait une en 2017 !

    M. Yannick Monnet

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    Ce texte est attendu en particulier par nombre d’élus municipaux, attachés comme nous à la gestion publique locale de l’eau. L’eau est un bien commun vital pour l’humanité, qui n’est pas garanti en France : en Guyane, en Guadeloupe ou à Mayotte, des personnes n’ont toujours pas accès à l’eau. Serait-ce dû au fait que l’eau n’est pas une marchandise comme les autres ? Alors que les conséquences du changement climatique se font sentir un peu plus chaque jour, les questionnements sur les modes de gestion de l’eau sont réapparus de manière récurrente dans le débat public ces dernières années.
    Nous avons toujours considéré, pour notre part, que la gestion publique de l’eau pouvait être construite en proximité, notamment dans les territoires ruraux et de montagne, et que les élus municipaux étaient les plus légitimes pour décider de la manière dont l’eau devait être gérée. Si une gestion locale organisée en régie municipale ou par l’intermédiaire d’un syndicat intercommunal est vertueuse, pourquoi imposer un autre fonctionnement ? C’est cette simple interrogation que certains d’entre nous n’ont eu de cesse de soulever, depuis dix ans, dans cet hémicycle.
    Il aura fallu dix années de mobilisation communale pour revenir enfin à la raison, après la décision d’imposer par voie d’amendement dans le cadre de la loi Notre, sans étude d’impact, ce transfert obligatoire de compétences si chères aux élus locaux comme aux habitants des territoires. Dix années de combat politique pendant lesquelles les élus ruraux et de la montagne, leurs associations, les habitants et les associations attachés à la gestion publique locale de l’eau ont réussi à faire reculer la mise en application de ce transfert de compétences imposé, sur fond de pression des grands groupes privés du secteur de l’eau et de l’assainissement.
    Toutefois, malgré quelques reculs, le principe de liberté communale –⁠ que nous avons toujours défendu – garantissant le libre choix des communes en matière de gestion de ces compétences n’est toujours pas acquis. Alors qu’aucune réelle justification n’a pu être avancée quant à l’intérêt de démanteler des modes de gestion publique locale efficaces, que ce soit par les communes ou par des syndicats intercommunaux, il n’est jamais trop tard pour bien faire.
    J’ai tout de même la conviction que nous aurions pu éviter beaucoup d’inquiétudes, de tensions locales, voire de dépenses liées aux études anticipant le transfert, si certains avaient simplement fait confiance aux élus municipaux et à leur sens des responsabilités, plutôt que de faire preuve de condescendance, voire de mépris.

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback

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    Comme souvent, avec les socialistes !

    M. Yannick Monnet

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    Contrairement à certaines critiques, souvent relevées dans les débats parlementaires de ces dernières années portant sur le sujet, j’ai toujours pensé que les élus municipaux devaient pouvoir décider librement, en toute responsabilité, du mode de gestion publique de ces deux compétences essentielles pour les habitants, et définir le mode le plus efficace pour leur territoire. Ils n’ont pas attendu que l’État les contraigne pour s’organiser au mieux, pour peu que les objectifs soient clairement définis et, surtout, que l’accompagnement financier nécessaire pour améliorer la gestion qualitative et quantitative de l’eau soit à la hauteur de leurs besoins. À moins, bien entendu, que ce transfert initial et la technicisation de la gouvernance de l’eau qui l’ont accompagné n’aient avant tout servi à dépolitiser cet enjeu au profit de grands groupes spécialisés, avides de nouveaux marchés locaux.
    Je me réjouis donc que ce chemin de sagesse trouve enfin un aboutissement avec l’adoption de ce texte, comme cela a été le cas en commission. Cependant, nous demeurons très vigilants sur deux points. Le premier, c’est celui d’une promulgation et d’une mise en application rapide de ces modifications législatives, en cas de passage en commission mixte paritaire (CMP), afin de ne pas plonger les collectivités territoriales qui n’ont pas transféré leurs compétences dans une plus grande incertitude. Le second, c’est celui du plein respect de la liberté communale retrouvée, notamment par les principaux cofinanceurs en matière d’eau et d’assainissement que sont les agences de l’eau, l’État et les autres collectivités territoriales ou établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). Le libre choix des communes dans leur mode de gestion future devra se traduire par le maintien, dans les mêmes conditions, de l’accès à l’ensemble des soutiens financiers dont elles peuvent bénéficier. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. –⁠ M. le rapporteur applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Ricourt Vaginay.

    Mme Sophie Ricourt Vaginay

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    D’où je viens, d’un coin des Alpes et de la Provence, l’eau est bien plus qu’une ressource : c’est un trésor, parfois une malédiction, toujours une conquête. Marcel Pagnol, dans Jean de Florette et Manon des Sources, a raconté comment un simple filet d’eau pouvait devenir un enjeu de pouvoir, de vie et de mort. Il a montré que dans nos terres arides, l’eau ne coule pas de source –⁠ si je puis dire –, mais se mérite.
    Nos ancêtres l’avaient compris bien avant nous. Dans les Alpes, la Provence et sur la Côte d’Azur, ils ont bâti un patrimoine hydraulique exceptionnel pour capter et dompter cette ressource précieuse. L’aqueduc de Fréjus, construit par les Romains, acheminait l’eau sur plus de 40 kilomètres. Le canal de Carpentras, creusé au XIXe siècle, a permis d’irriguer la plaine du comtat Venaissin. Le canal de Provence, immense projet du XXe siècle, alimente en eau potable et agricole l’ensemble de notre région. Les barrages de Serre-Ponçon, de Bimont ou de Sainte-Croix sont autant d’ouvrages majeurs qui garantissent notre approvisionnement et nous protègent plus que jamais des sécheresses. Ces infrastructures ont été pensées et construites par ceux qui vivent sur place et connaissent chaque vallée, chaque source, chaque rivière. Elles témoignent, après avoir traversé les siècles, de la capacité des territoires à gérer leur eau avec intelligence et prévoyance.
    Cependant, cette gestion locale et pragmatique se trouve aujourd’hui mise à mal par des décisions prises sans tenir compte des réalités du terrain. Depuis la loi Notre de 2015, les communes ont été contraintes de transférer leurs compétences en matière d’eau et d’assainissement aux intercommunalités. Si l’objectif affiché était celui de la mutualisation et de l’efficacité, la réalité a souvent été toute différente : éloignement des décisions, perte de savoir-faire communal, augmentation des coûts et complexification administrative. Pire encore, ce système a instauré une injustice flagrante : les communes qui avaient investi et bien géré leur réseau devaient désormais financer, dans le cadre de l’intercommunalité, celles qui n’avaient rien anticipé.
    Face aux critiques et aux blocages, plusieurs lois sont venues assouplir l’obligation de ce transfert : la loi du 3 août 2018 a reporté l’échéance au 1er janvier 2026 pour les communes réunissant une minorité de blocage ; la loi « engagement et proximité » de 2019 a permis aux intercommunalités de déléguer la gestion de l’eau à des syndicats existants. Toutefois, ces ajustements se sont révélés insuffisants. C’est pourquoi cette proposition de loi, adoptée par le Sénat, entend rétablir une logique plus respectueuse des territoires.
    Son article 1er met fin au transfert obligatoire pour les communes qui n’ont pas encore cédé leurs compétences. Loin de remettre en cause la mutualisation, cette réforme la rend facultative et donc plus adaptée aux réalités locales.
    L’article 3 bis instaure, à juste titre, un dialogue annuel sur l’organisation de la gestion de l’eau au sein des CDCI.
    L’article 5 introduit une solidarité librement consentie entre communes : nous saluons cette approche respectueuse de la volonté des élus locaux et garantissant une gestion plus juste de cette ressource essentielle.
    Nous nous opposons en revanche à l’article 6, qui renforce les contraintes pesant sur les ventes immobilières par de nouvelles exigences en matière d’information sur l’état des réseaux de l’eau et de l’assainissement. Inutiles lourdeurs administratives qui pénaliseraient injustement les transactions foncières, quand il existe des solutions plus efficaces pour rendre ces dernières plus transparentes.
    Ce texte corrige donc une injustice majeure, en mettant fin à un système où les communes bien gérées, ayant investi dans leurs infrastructures, se retrouvaient pénalisées, tandis que celles n’ayant rien fait bénéficiaient d’un financement intercommunal contraint. Il est temps d’arrêter de punir les bons élèves ; il est temps de laisser aux élus locaux le soin d’adapter leur gestion aux spécificités de leur territoire. Ils en ont assez de ces intercommunalités centralisatrices, qui les éloignent de la prise de décision et finissent par ignorer les problématiques locales. Nous devons leur redonner notamment la maîtrise de l’eau, cette ressource essentielle, la vie même de nos territoires : sa gestion n’est pas une compétence comme les autres.
    Comme l’aurait dit Marcel Pagnol, en Provence, l’eau, ça se mérite. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Philippe Schreck.

    M. Philippe Schreck

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    Cela fait près de dix ans que nous le savons : le transfert automatique des compétences eau et assainissement aux intercommunalités était une initiative hasardeuse. Dans sa version initiale, il est vrai, la loi Notre ne prévoyait pas un tel dispositif, qui ne fut rendu possible que par des amendements de dernière minute, adoptés sans étude d’impact ni concertation préalable.
    Si, dans certaines situations, le bilan de ce transfert à marche forcée a pu être positif, il a été accompagné d’incompréhensions, d’un alourdissement de la bureaucratie et d’une hausse des budgets de fonctionnement. Il s’est également révélé inadapté aux contraintes et caractéristiques des communes rurales et en inadéquation, parfois, avec la réalité hydrique des territoires.
    C’est là le grand tort de la loi Notre, qui a voulu imposer aux territoires ruraux le modèle de gestion propre aux métropoles.
    Après le report de la date d’entrée en vigueur du texte, plusieurs tentatives ont été faites pour assouplir le dispositif et rendre aux communes un peu de liberté dans la gestion de leur eau.
    Le Sénat, dans un premier temps, a adopté un texte revenant sur l’automaticité du transfert et instaurant son caractère optionnel et réversible. Particulièrement attachés au principe de la libre administration des collectivités territoriales, nous avions soutenu ce texte quand il avait été repris par le groupe LIOT dans sa niche parlementaire. Malheureusement, son contenu avait été détricoté en commission et certains avaient joué la montre en séance.
    Notre groupe politique, de son côté, a déposé il y a plus de deux ans une proposition de loi visant à lutter contre ce transfert automatique des compétences.
    Beaucoup de temps a donc été perdu et de nombreux investissements ont été neutralisés ou différés, notamment parce que l’acceptation des dossiers de demande de financement et de subvention était conditionnée –⁠ de façon plus ou moins avouée – au transfert des compétences au profit des communautés de communes.
    L’assouplissement proposé par le présent texte, qui répond aux demandes légitimes de beaucoup d’élus locaux, a donc notre faveur.
    Il reconnaît également le rôle central des maires et du conseil municipal dans la gestion des politiques publiques et dans l’aménagement du territoire. Les maires, en effet, connaissent et gèrent la ressource depuis des décennies. Ils maîtrisent leurs sources et leurs lieux de captage, ils connaissent leurs réseaux et leurs écosystèmes, les besoins de leurs agriculteurs, de leurs entrepreneurs et, bien entendu, de leur population.
    Nous considérons que les élus des communes rurales sont les plus à même d’apprécier s’ils doivent transférer ou non leurs compétences eau et assainissement, les laisser à la communauté de communes ou bien les reprendre.
    Le texte que nous examinons n’aborde cependant pas la possibilité d’un retour en arrière –⁠ la reprise des compétences eau et assainissement qui ont déjà été transférées, parfois sous la pression au financement exercée par l’État et les agences de l’eau. Plusieurs propositions ont été faites, en commission, pour permettre un retour en arrière conditionné : nous proposerons à nouveau des amendements en ce sens.
    Un amendement, en revanche, a été adopté en commission, qui tend à modifier le régime des contrôles des installations d’assainissement non collectif et à le rendre automatique à chaque vente immobilière.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    C’est inexact !

    M. Philippe Schreck

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    Ce dispositif n’a pas grand-chose à voir avec le sujet qui nous préoccupe et qui concerne la possibilité, pour les petites communes rurales –⁠ elles sont près de 5 000 à ce jour –, de conserver leurs compétences eau et assainissement. Nous nous opposerons donc à l’article 6, issu de cet amendement, et ce d’autant plus que l’exposé des motifs de ce dernier était quelque peu curieux : il laissait entrevoir la possibilité de sanctions financières, qui fragiliseraient les propriétaires des biens les plus modestes et risqueraient de désorganiser les Spanc.
    Nonobstant ce dernier point, ce texte, que nous appelions de nos vœux et qui traite de problèmes au sujet desquels nous sommes souvent interpellés dans nos circonscriptions, aura le soutien du groupe Rassemblement national. Il était temps de cesser d’affaiblir le rôle des communes, de leurs maires, et d’envoyer à ces derniers un message de confiance. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN. –⁠ M. Vincent Descoeur applaudit également.)

    M. Christophe Bentz

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    Bravo !

    M. le président

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    La parole est à Mme Nicole Le Peih.

    Mme Nicole Le Peih

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    Cette proposition de loi représente l’aboutissement d’un travail parlementaire rigoureux et constructif, mené conjointement par le Sénat et l’Assemblée nationale. Elle répond aux préoccupations des élus locaux et et est de nature à rendre notre cadre législatif plus efficace.
    Tout a commencé par la loi Notre, qui a instauré le transfert des compétences eau et assainissement des communes vers les intercommunalités. Elle visait à mutualiser les moyens humains, techniques et financiers, afin de garantir les investissements colossaux nécessaires à la modernisation et à l’entretien des infrastructures.
    L’application de cette réforme a toutefois soulevé des inquiétudes –⁠ et des contestations – dans plusieurs territoires. Les élus locaux, relayés par les parlementaires des deux chambres, ont fait entendre leur voix. Le Sénat s’est rapidement mobilisé pour remettre en question cette intercommunalisation, tandis que l’Assemblée nationale, elle, a plutôt cherché à y introduire des ajustements. En 2019, la loi « engagement et proximité » introduit une possibilité de subdélégation, afin que les intercommunalités puissent confier tout ou partie de leurs compétences à une commune membre ou à un syndicat intracommunautaire. D’autres avancées ont suivi, avec la loi « 3DS » du 21 février 2022, qui a pérennisé certains syndicats de gestion de l’eau, et avec le plan « eau » du président de la République prévoyant 180 millions d’euros d’aides annuelles pour lutter contre les pertes en eau.
    Ces ajustements successifs n’ont néanmoins pas suffi. Les élus locaux, qui peinent à s’y retrouver dans cette accumulation de réformes, expriment encore des inquiétudes.
    Il était donc indispensable d’agir –⁠ et plus encore à l’approche de l’échéance du 1er janvier 2026. C’est tout l’enjeu de cette proposition de loi.
    Je tiens à saluer les sénateurs qui l’ont déposée, les députés du groupe LIOT qui s’en sont emparés…

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Merci !

    Mme Nicole Le Peih

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    …ainsi que le gouvernement de Gabriel Attal qui, le premier, a ouvert les négociations avec le sénateur Jean-Michel Arnaud, à l’origine de ce texte. Malgré les remaniements, la dissolution et la censure, le dialogue s’est poursuivi –⁠ grâce à vous, madame la ministre, qui avez su entendre les préoccupations de chacun et défendre une solution d’équilibre. Ce texte est ainsi soutenu par un large éventail de groupes politiques, y compris par ceux qui, initialement, défendaient des approches différentes : le groupe socialiste, pourtant à l’origine de la loi Notre, ou encore le groupe Ensemble pour la République, privilégiant l’assouplissement du transfert plutôt que la possibilité d’y déroger. Nous avons tous évolué, en constatant sur le terrain que les ajustements ne suffisaient plus…

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Eh oui !

    Mme Nicole Le Peih

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    …et qu’une réponse plus profonde était nécessaire.
    Si je regrette que ce processus ait pris dix ans, je salue néanmoins un travail collectif qui nous permet de répondre aux attentes des élus locaux. Je souhaite adresser mes remerciements à ces derniers et en particulier à ceux qui ont relevé avec succès le défi du transfert de ces compétences. Anciennement adjointe au maire et élue d’une communauté de communes, je mesure pleinement les efforts auxquels ils ont dû consentir et l’énergie qu’ils ont dû mobiliser. Je veux rappeler à ceux d’entre eux qui feront usage des nouvelles marges de manœuvre permises par cette proposition de loi combien il est essentiel de poursuivre le travail engagé ces dernières années en vue d’une mutualisation des compétences liées à l’eau et à l’assainissement.
    Le dérèglement climatique est un signal d’alarme. L’eau devient une ressource de plus en plus fragile : la pénurie à laquelle plus de 1 000 communes ont été confrontées en 2022 en témoigne. Nos services publics doivent s’adapter et se renforcer : la mutualisation reste en cela une solution efficace pour garantir une gestion optimisée et durable de l’eau.
    Pour 14 % des communes, au demeurant, principalement en milieu rural et montagnard, l’intercommunalisation n’est pas pertinente. Nous voterons donc pour l’article 1er de la proposition de loi qui leur permet de conserver ces compétences, sans revenir sur les transferts déjà réalisés.
    Nous continuerons néanmoins à défendre une gestion de l’eau s’inscrivant dans une stratégie nationale cohérente : cette ressource appartient à tous. Nous avons ainsi soutenu, en commission, plusieurs amendements du rapporteur, qui permettent un transfert partiel de la compétence assainissement, à même de garantir une solidarité entre communes voisines en cas de pénurie d’eau, ou qui autorisent les collectivités à mener des études communes avec d’autres acteurs de leur bassin versant.
    Au nom de cette même logique de coopération, nous regrettons la réécriture de l’article 3 bis et la suppression de l’article 4, qui apportaient une précieuse vision départementale de la gestion de l’eau. Nous proposerons également de revenir sur l’article 6, afin d’éviter la réduction des contrôles des anciennes installations individuelles d’assainissement.
    Si nous espérons que quelques ajustements seront apportés au cours de nos débats, nous soutiendrons néanmoins ce texte au nom du pragmatisme et de l’adaptation aux réalités locales. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard.

    M. Gabriel Amard

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    Vous donnez enfin raison à celles et ceux qui, depuis plus de dix ans, notamment dans les communes rurales et leurs associations, entendent faire respecter leurs compétences et leurs connaissances, dans chaque bassin de vie, sur les réalités de la source, des réseaux, du captage et de la distribution –⁠ à celles et ceux qui ne souhaitent pas que la maîtrise d’ouvrage, pour un tel enjeu, dans un contexte de dérèglement climatique et de sécheresse, soit systématiquement déléguée à une plus lointaine intercommunalité.
    La loi Notre de 2015, avec son transfert obligatoire de compétences des communes vers les EPCI, a heurté beaucoup d’élus locaux, ainsi que de citoyennes et de citoyens. Elle a rendu plus difficile la compréhension de l’accès au service public.
    Le groupe La France insoumise a toujours défendu l’abrogation de cette loi et continuera à défendre une intercommunalité choisie. Nous devons soutenir les échelons d’organisation décentralisée, notamment la commune et le département, pour mettre fin aux intercommunalités géantes qui éloignent les citoyens des prises de décision.
    Cette proposition de loi arrive à temps pour que l’échéance de 2026 ne soit pas fatidique. Saluons l’action de l’Association des maires ruraux de France, qui a bataillé afin que la souveraineté communale soit respectée.
    Mon groupe est très attaché à la libre administration des communes, et plaide toujours en faveur des assouplissements favorables à ce principe.
    L’eau doit être gérée au plus près des usagers et les décisions, prises par les principaux concernés. Il faut créer de véritables structures démocratiques –⁠ des comités locaux de cogestion publique de l’eau – afin que la gestion de l’eau et de l’assainissement devienne citoyenne, publique et écologique, la gestion publique étant la plus démocratique et apte à satisfaire l’intérêt général, mais aussi à préserver, en commun, le vivant.
    Tous les citoyens doivent s’intéresser à l’impact de l’activité humaine sur l’environnement et le cycle de l’eau –⁠ n’oublions pas la contamination généralisée de l’eau aux polluants éternels, les substances per- ou polyfluoroalkylées ou PFAS.
    Malheureusement, ce texte ne traite pas des modes de gestion de l’eau, qui renchérissent encore trop souvent les factures des usagers quand la gestion est déléguée à des opérateurs privés en quête de profit. Mais ce n’est pas grave, les citoyens ont fait le travail.
    Il ne traite pas non plus de la dépollution de l’eau et de la protection de la ressource face aux polluants, dont les PFAS, pas plus que de la création d’une filière –⁠ pourtant nécessaire – de régénération des charbons actifs, ni de la destruction des PFAS à 1 400 degrés.
    Enfin, il ne traite pas plus des fuites ou de la nécessité du renouvellement des canalisations.
    Il faut gérer ces différents problèmes à l’échelle communale, c’est-à-dire au plus près de la réalité et des besoins, et les communes ont besoin d’être soutenues.
    Faire du transfert des compétences eau et assainissement aux communautés de communes une option, et non plus une obligation, est déjà une avancée, tant en matière de libre administration des communes que de meilleure gestion de l’eau et de l’assainissement.
    Nos amendements visent à rendre ce transfert optionnel pour tous les EPCI, et non uniquement pour les communautés de communes, mais surtout à permettre aux communes qui ont déjà transféré leur compétence de revenir en arrière. C’était l’ambition initiale du texte avant son examen au Sénat.
    Autoriser un tel retour en arrière est indispensable. C’est même du bon sens : pourquoi punir les 33 % de communes qui, fin 2021, selon l’Assemblée des communautés de France, ont déjà opéré le transfert, alors qu’elles ne l’ont fait que par obligation ? Pourquoi ne pas leur donner la possibilité de choisir démocratiquement si elles souhaitent récupérer ces compétences ?
    Le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire espère une prise en compte des propositions que je viens d’exposer afin de pouvoir voter le texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie-José Allemand.

    Mme Marie-José Allemand

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    Notre assemblée examine une proposition de loi qui –⁠ et c’est un euphémisme – suscite une forte attention des élus locaux de nos territoires, particulièrement dans mon département des Hautes-Alpes.
    Voilà près de dix ans que la loi Notre a été votée, et pas une année ne passe sans que le transfert obligatoire des compétences eau et assainissement aux communautés de communes fasse l’objet de nombreux débats parmi les parlementaires, et de vives contestations de la part des élus locaux.
    Les difficultés sont connues : beaucoup de territoires, notamment en zone rurale, font valoir que l’échelon intercommunal n’est pas le plus adapté au regard des caractéristiques de la ressource, de la répartition de la population, du périmètre des infrastructures, des contraintes financières ou du périmètre des bassins hydrographiques.
    Face à ces difficultés, le législateur a ouvert la voie à des adaptations pour les communautés de communes, d’une part en repoussant l’échéance du transfert au 1er janvier 2026 pour les communes réunissant une minorité de blocage et, d’autre part, en introduisant un mécanisme de délégation de tout ou partie des compétences eau et assainissement d’une communauté de communes vers l’une de ses communes membres ou un syndicat infracommunautaire.
    Malgré ces adaptations, la situation actuelle illustre l’ampleur du blocage : d’après les derniers chiffres communiqués par la DGCL, au 1er octobre 2022, seulement 29 % des communes avaient transféré la compétence eau à leur communauté de communes, tandis que 71 % d’entre elles exerçaient la compétence seule ou dans le cadre d’une structure syndicale.
    Dans les Hautes-Alpes, 78 % des communes ont conservé l’exercice de cette compétence –⁠ un record.
    En outre, certaines difficultés n’ont pas été prises en compte en 2015 : raréfaction de la ressource avec l’accélération du changement climatique ; coût croissant du traitement et de la dépollution, notamment du fait des intrants agricoles et des PFAS.
    À court terme, ni ce texte ni le cadre de la loi Notre ne peuvent y répondre. Mais, alors que la date butoir du 1er janvier 2026 approche à grands pas, nous sommes face à une question très simple : doit-on obliger les communes à transférer, coûte que coûte, ces deux compétences à leur intercommunalité ?
    Le groupe Socialistes et apparentés défendra une position pragmatique : si nous restons convaincus que la mutualisation à l’échelon intercommunal est efficace dans de nombreux cas, il serait contre-productif d’obliger toutes les communes à s’organiser de la sorte.
    Nous sommes donc ouverts à des adaptations spécifiques, sans détricotage de l’architecture de la loi Notre.
    Le texte que nous examinons a été largement remanié lors des débats au Sénat. Je salue le sénateur des Hautes-Alpes, Jean-Michel Arnaud, auteur de la proposition de loi, présent ce matin dans les tribunes du public.
    En l’état de sa rédaction, le texte met fin à l’obligation de transfert des deux compétences vers les communautés de communes, mais seulement pour les communes qui ne les ont pas encore transférées. Aucun retour en arrière n’est possible pour celles qui ont déjà procédé au transfert. Mon groupe considère d’ailleurs que ce n’est pas souhaitable, et que se désengager de transferts réalisés, pour certains depuis plusieurs années, n’est pas réaliste.
    Néanmoins, à titre personnel, je comprends que les communes qui ont déjà procédé au transfert, et ne seraient pas autorisées à reprendre la compétence, puissent y voir une injustice. C’est pourquoi j’ai cosigné l’amendement de ma collègue Sophie Pantel qui vise à ce que les intercommunalités situées en zone de montagne puissent restituer ces compétences à leurs communes. Cette position n’engage bien évidemment pas mon groupe.
    Si notre préférence allait initialement à un vote conforme afin d’aboutir rapidement, le rapporteur a déposé en commission différentes modifications rédactionnelles et proposé une nouvelle rédaction de l’article 3 bis, toutes bienvenues.
    En revanche, l’article 6, introduit en commission, prévoit de limiter le contrôle des communes en matière d’assainissement non collectif aux nouvelles installations ou aux ventes immobilières. Cela risque de fragiliser les missions des Spanc et de mettre en danger leur rôle dans la protection de la santé publique, voire leur existence.

    M. Marc Fesneau

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    C’est vrai.

    Mme Marie-José Allemand

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    Il ne faut pas conserver cet article en l’état.
    Le groupe Socialistes et apparentés est déterminé à faire aboutir cette proposition de loi, dans sa rédaction issue du Sénat complétée de certaines évolutions. Nous espérons qu’un accord sera ensuite rapidement trouvé en CMP.

    M. le président

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    La parole est à M. Lionel Vuibert.

    M. Lionel Vuibert

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    L’eau n’est pas seulement une ressource ; c’est un droit, un bien commun, un élément vital. Sans eau, pas de vie, pas de territoires dynamiques, pas d’agriculture, pas d’industrie.
    Pourtant, sa gestion reste un défi. Qui en est responsable ? À quelle échelle garantir au mieux sa qualité, sa disponibilité et un accès équitable pour tous ?
    Ce texte défend un principe simple, celui de la subsidiarité. L’eau doit être gérée par ceux qui la connaissent le mieux, c’est-à-dire les communes et leurs élus. Ces maires et leurs équipes assurent chaque jour un service public de proximité, veillent à l’entretien des infrastructures et investissent dans des réseaux performants. Leur engagement est indiscutable, leur expertise précieuse. Mais disposent-ils toujours des moyens nécessaires pour relever les défis croissants liés à la gestion de l’eau ?
    Ces défis sont immenses : sécheresses, tensions sur la ressource, pollution, financement des infrastructures, l’eau ne peut plus être gérée comme il y a vingt ans. Certains territoires ont su mutualiser leurs efforts à l’échelle intercommunale, sécuriser leur approvisionnement et améliorer la qualité du service.
    D’autres, en revanche, peinent à entretenir leurs installations, parfois gérées par quelques élus bénévoles. Disons-le, dans bien des cas, l’échelle intercommunale s’impose comme un modèle de gestion à la fois pertinent et efficace.
    Dès lors, comment assurer une gestion locale de l’eau tout en garantissant une vision à long terme, une sécurisation durable des ressources et des financements adaptés aux besoins des collectivités ?
    Ce texte fait le choix de la confiance envers les communes –⁠ une approche légitime. Mais cette confiance ne doit pas signifier isolement. Les communes doivent-elles être livrées à elles-mêmes, sans accompagnement structuré ? Peut-on maintenir une liberté totale de gestion, alors que certaines de ces communes dépendent de la vente de leur eau à leurs voisines, et qu’il ne s’agit pas d’une trajectoire d’avenir viable ?
    Garantir une gestion locale de l’eau, c’est aussi veiller à ce que chaque territoire ait les moyens d’exercer cette responsabilité. Que se passe-t-il lorsqu’une petite commune ne peut plus entretenir ses réseaux ? Quel modèle adopter pour éviter les fractures territoriales dans l’accès à l’eau potable ? Comment articuler l’échelon communal et les stratégies de long terme des régions et de l’État ?
    L’eau est une ressource stratégique : sans elle, quelle agriculture pour demain ? L’enchaînement des sécheresses nous impose d’anticiper, de stocker et de mieux répartir la ressource.
    Sans eau, j’y insiste, quel avenir pour notre industrie ? Nous voulons réindustrialiser la France, mais chaque usine, chaque activité productive repose sur un accès sécurisé à l’eau.
    Face à ces enjeux, devons-nous rajouter un échelon supplémentaire dans le millefeuille territorial, ou bien donner aux collectivités les moyens d’agir efficacement, ensemble ?
    Ce texte constitue une avancée. Il consacre un principe clair : la gestion de l’eau doit rester au plus près des territoires. Sur ce point, un consensus existe. Nous en sommes tous d’accord, de nombreux élus locaux attendent avec impatience la fin du transfert automatique de la compétence aux intercommunalités.
    Cette compétence entraîne des devoirs, notamment en matière de santé publique. Chaque consommateur doit pouvoir boire une eau potable de qualité irréprochable, et cette exigence repose avant tout sur les acteurs locaux de l’eau.
    Assurer une sécurité sanitaire optimale implique un suivi rigoureux de la qualité de l’eau, des investissements constants dans les infrastructures et une anticipation des risques liés aux pollutions ou aux évolutions climatiques.
    Il faut accompagner financièrement les collectivités pour garantir un service de qualité partout, et non y renoncer faute de moyens.
    Il faut également clarifier les coopérations entre communes, intercommunalités, syndicats et départements, afin d’éviter des blocages qui pourraient fragiliser l’approvisionnement en eau.
    Enfin, il faut mieux anticiper car, face aux défis climatiques et démographiques, il ne s’agit pas d’un enjeu de court terme.
    Ce texte ouvre une porte, mais il ne suffira pas à garantir une gestion durable et équitable de l’eau pour tous. Nous devons donc avancer, aux côtés des élus locaux, pour bâtir un modèle qui allie proximité, responsabilité et vision d’avenir.

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Castellani.

    M. Michel Castellani

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    Faisons confiance aux maires de France et aux élus municipaux de nos territoires : c’est le message que le groupe LIOT a souhaité envoyer en demandant l’inscription de ce texte à notre ordre du jour transpartisan.
    C’est un combat que nous menons depuis plusieurs années ; nous l’avions déjà inscrit dans notre niche à deux reprises.

    Mme Marie Pochon

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    Eh oui !

    M. Michel Castellani

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    La présente proposition de loi est un nouveau texte. Elle prévoit un dispositif équilibré, un juste milieu qui doit nous permettre de sortir de l’impasse et d’offrir aux élus locaux une solution à la hauteur des enjeux de la gestion de l’eau dans nos territoires.
    Les débats autour du transfert des compétences eau et assainissement n’ont que trop duré.
    Ne nous y trompons pas : si le sujet du transfert de compétences semble technique, il touche en réalité à des questions du quotidien, pour les élus comme pour les citoyens. L’efficacité de la gestion de l’eau et le maintien d’une tarification acceptable sont deux questions sensibles.
    Depuis 2015, les communes sont contraintes de céder leurs compétences eau et assainissement aux communautés de communes. Ce transfert forcé n’a pas emporté l’adhésion de tous –⁠ c’est un euphémisme. Au 1er octobre 2022, 329 communautés de communes sur 992 exercent la compétence eau, soit le tiers. C’est la preuve que le transfert obligatoire est loin de faire l’unanimité, même s’il peut bien se passer dans certains cas.
    Les parlementaires ont tenté de revenir sur cette contrainte à plusieurs reprises, en reportant la date butoir du transfert à 2026 et en donnant plus de latitude aux communes. Notre groupe estime qu’il est temps d’aller plus loin.
    La seule manière de mettre fin à ce débat est de répondre aux attentes des élus locaux en rendant le transfert optionnel : c’est la préservation du principe de libre administration des communes qui est en jeu. Le transfert de compétences ne devrait pas instaurer une tutelle de certaines collectivités sur d’autres. L’Association des maires de France et des présidents d’intercommunalité (AMF) s’est donc opposée de manière constante à ces transferts obligatoires. Notre groupe considère que le consentement plein et entier des élus municipaux est nécessaire pour qu’une intercommunalité réussisse. La proposition de loi, qui replace les compétences eau et assainissement dans la catégorie des transferts optionnels, garantira cette liberté de choix.
    De plus, en refusant d’ouvrir la possibilité d’un retour en arrière et d’une restitution de compétences, ce texte évite de déstabiliser les territoires ayant déjà procédé au transfert. Cette limite est compréhensible, car les communes ont toujours pu utiliser la minorité de blocage pour éviter le transfert.
    Par ailleurs, notre groupe estime que cette liberté de choix doit aller de pair avec une gestion efficace de l’eau et de l’assainissement. Les maires connaissent leur territoire et sont à même de faire des choix dans l’intérêt de leurs concitoyens.
    L’erreur de la loi Notre est d’avoir placé les compétences eau et assainissement dans la catégorie des compétences obligatoirement exercées par les communautés de communes, dans le prolongement de ce qui avait été prévu pour les métropoles et les communautés urbaines. Cet alignement méconnaît le caractère rural des intercommunalités. Pour une gestion efficace, il est nécessaire de proposer des solutions adaptées aux spécificités de chaque commune.
    La proposition de loi ouvre donc une porte de sortie et propose une solution équilibrée, dans un contexte de blocage que le législateur n’avait pas envisagé en 2015. Vous l’aurez compris, le groupe LIOT votera pour ce texte et appelle tous les groupes à le soutenir. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT et sur quelques bancs du groupe DR. –⁠ M. Éric Martineau applaudit également.)

    M. le président

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    La discussion générale est close.
    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Je remercie tous les orateurs pour le travail effectué. J’ai rencontré chaque groupe parlementaire pour échanger ; beaucoup d’entre vous ont prononcé les mêmes mots : liberté, confiance, pouvoir d’achat. Sur ces valeurs, nous sommes tous d’accord.
    Comme notre collègue Allemand, j’émets moi aussi le vœu, madame la ministre, qu’une commission mixte paritaire soit convoquée le plus rapidement possible, une fois que l’Assemblée nationale aura voté un texte compatible avec celui du Sénat, afin que nous disposions au plus vite d’une version définitive du texte. Il donnera enfin de la visibilité et de la clarté à tous les élus de notre pays. (M. Stéphane Lenormand et Mme Christine Pirès Beaune applaudissent.)

    Discussion des articles

    M. le président

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    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

    Article 1er A

    M. le président

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    La parole est à M. Vincent Descoeur.

    M. Vincent Descoeur

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    Ce texte est très attendu par les élus municipaux, en particulier dans les zones rurales. Lors de son examen en commission, j’ai proposé par amendement de réintroduire dans la loi la possibilité de créer des syndicats infracommunautaires, disposition qui a recueilli l’assentiment de nombreux collègues de différents groupes. L’objectif est d’offrir aux communes la possibilité de s’organiser en syndicat pour mutualiser leurs moyens. Les communes se regrouperaient en fonction des bassins versants, de l’hydrographie ou de la topographie plutôt qu’en respectant les limites administratives d’une EPCI.

    M. Fabrice Brun

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    Il a raison !

    M. Vincent Descoeur

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    Les communes aspirent à ce qu’on les laisse se regrouper comme elles l’entendent pour mener à bien des opérations aussi indispensables que le renforcement ou la sécurisation de leurs ressources en eau.
    Je souhaite appeler votre attention sur l’intérêt de ce nouvel article, qui offre aux communes qui le souhaitent –⁠ elles sont nombreuses – la possibilité de se regrouper en syndicat. Je vous mets en garde contre l’amendement de suppression qui sera examiné dans quelques instants : il vise à remettre en cause cette liberté. S’opposer au regroupement des communes à une échelle infracommunautaire, souvent plus pertinente que l’échelle intercommunale, serait une grave erreur, contraire à l’esprit de ce texte.

    M. Fabrice Brun

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    Bien sûr !

    M. Vincent Descoeur

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    En supprimant cette possibilité, nous pourrions empêcher de nombreuses initiatives locales, à l’heure où il faut au contraire introduire de la souplesse pour faciliter notamment la lutte contre le changement climatique.

    M. Fabrice Brun

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    C’est un trou dans la raquette !

    M. Vincent Descoeur

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    Il faut laisser aux communes la liberté de s’organiser comme elles le souhaitent pour gérer avec efficacité la production et la distribution d’eau potable. Faisons confiance aux communes : elles sauront faire le choix de l’organisation la plus pertinente ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard.

    M. Gabriel Amard

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    Cet article est important et, si l’on veut sincèrement défendre la libre administration et l’intercommunalité choisie, il faut absolument le conserver. Les communes qui souhaitent relever le défi de la pollution généralisée doivent être soutenues et pouvoir choisir librement les modalités de leur action. En revanche, elles ont besoin de moyens : il faut notamment créer une filière française de régénération des charbons actifs.
    J’appelle votre attention sur le fait que nous ne disposons d’aucune filière de régénération des charbons actifs qui servent à rendre l’eau potable. Dans le meilleur des cas, nous devons les transporter à l’étranger, ce qui n’est pas fait systématiquement. Ces charbons actifs qui contiennent énormément de PFAS ne sont donc pas toujours régénérés.
    En outre, la France ne dispose d’aucun incinérateur atteignant la température de 1 400 degrés. Que ce soit pour le traitement et l’incinération des déchets ou la régénération des charbons actifs, nous ne sommes donc pas souverains.
    Comme nous ne sommes pas capables de détruire l’intégralité des PFAS, nous les relâchons dans la nature. Cela serait aussi le cas si nous faisions l’erreur de soutenir la technologie de l’osmose inverse, puisque les macérats contiennent des concentrations terribles de PFAS. Les opérateurs qui envisagent de recourir à cette technique, comme le service des eaux d’Île-de-France, nous répondent qu’ils rendront les PFAS à la nature après les avoir retirés de l’eau potable : c’est complètement irresponsable.
    Il est temps de soutenir l’intercommunalité choisie en matière d’eau et d’assainissement, tout en apportant aux communes les réponses financières et techniques qui leur permettront de juguler cette situation catastrophique. (M. Sylvain Carrière applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. Sacha Houlié.

    M. Sacha Houlié

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    Je soutiendrai l’amendement de M. Fesneau, car l’article 1er A adopté en commission est doublement contraire à l’esprit du texte.

    M. Vincent Descoeur

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    C’est faux !

    M. Sacha Houlié

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    Il contrevient à l’esprit de simplification, puisqu’il crée une nouvelle strate entre les communes et les intercommunalités –⁠ des syndicats infracommunautaires.

    M. Vincent Descoeur

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    C’est mal connaître les situations locales !

    M. Fabrice Brun

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    C’est une vision hors-sol !

    M. Vincent Descoeur et M. Fabrice Brun

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    Quelle erreur d’appréciation !

    M. Sacha Houlié

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    Il est aussi contraire à la loi Notre de 2015, initialement déposée au Sénat, et soutenue pendant huit ans par la majorité. Ce texte contient des dispositions sur la mutualisation des compétences, sur la qualité et la quantité de l’eau, sur les investissements –⁠ bien des questions judicieuses.
    Il a cependant fait l’objet de deux aménagements : à l’initiative de Marc Fesneau, il a été décidé en 2018 de reporter l’entrée en vigueur de l’obligation de transfert des compétences à 2026.

    M. Fabrice Brun

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    Grâce à la proposition de loi dont j’ai été le rapporteur en 2017 !

    M. Sacha Houlié

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    On pourrait s’interroger sur le fait que nous favorisions collectivement les mauvais élèves, les communes qui n’ont pas appliqué la loi dans les délais impartis.
    En 2019, Sébastien Lecornu a aussi défendu un aménagement pour que les communes qui justifient d’un plan d’investissement suffisant puissent déléguer.
    Mutualiser l’eau est une pratique vertueuse, qu’il faut encourager.

    M. Vincent Descoeur

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    C’est ce que nous proposons !

    M. Sacha Houlié

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    La mutualisation ne doit jamais être infracommunautaire, mais supracommunale, à l’échelle du département. Dans mon département, c’est ce qui existe depuis cent ans, avec d’excellents résultats. L’article 1er de la proposition de loi se justifiait au Sénat car il était limité aux zones de montagne, un des seuls écueils que nous n’avions pas pu contourner à l’occasion des trois aménagements législatifs de la loi Notre –⁠ un dernier aménagement avait eu lieu par l’intermédiaire de la loi « 3DS ». L’article ajouté en commission compliquera les choses.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Mais non !

    M. Sacha Houlié

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    Il faut donc procéder à sa suppression en votant l’amendement de Marc Fesneau.

    M. le président

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    La parole est à M. Yannick Monnet.

    M. Yannick Monnet

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    Il faut arrêter de croire qu’on sait ce qui est bon pour les autres à leur place : ce n’est pas vrai ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC, DR et EcoS.) Dans certains départements, dont le mien, les communes s’organisent en syndicat intercommunal à vocation multiple (Sivom) : c’est leur mode d’organisation de la gestion de l’eau.

    Mme Émilie Bonnivard

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    C’est moins cher et cela marche parfois mieux !

    M. Yannick Monnet

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    Les syndicats ne sont pas une strate supplémentaire, mais un mode d’organisation. Là où cette organisation fonctionne, foutons la paix aux communes, et laissons-les décider de ce qui est bon pour elles ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ M. Frédéric Maillot et Mme Émilie Bonnivard applaudissent également.)

    M. le président

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    Sur l’amendement no 30, je suis saisi par le groupe Droite républicaine d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Marc Fesneau, pour soutenir cet amendement, qui tend à supprimer l’article 1er A.

    M. Marc Fesneau

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    J’ai déposé cet amendement de suppression pour plusieurs raisons. Comme Sacha Houlié l’a indiqué, l’article 1er A n’existait pas dans la version du Sénat.

    M. Fabrice Brun

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    Les sénateurs ont dit depuis que c’était une lacune !

    M. Marc Fesneau

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    Laissez-moi finir ! Dans sa grande sagesse, le Sénat a estimé que le texte était meilleur tel quel.

    M. Vincent Descoeur

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    Ils viennent de se rendre compte que ce n’est pas le cas !

    M. Marc Fesneau

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    Nous sommes nombreux sur ces bancs –⁠ l’idée fait presque l’unanimité – à protester contre la multiplication des strates et la création de machins et de trucs, parfois des syndicats, parfois des offices, parfois des agences…

    M. Vincent Descoeur

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    Sauf quand c’est utile !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Cela n’a rien à voir !

    M. Marc Fesneau

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    Laissez-moi finir ! Nous aurions parfois intérêt à nous poser la question de la pertinence de recréer des syndicats. Comme un certain nombre d’entre vous, je suis un élu local, je sais donc à peu près de quoi je parle. Dans les commissions départementales intercommunales, nous nous demandons souvent s’il faudrait supprimer tel ou tel syndicat.
    L’article 1er A vient en quelque sorte couronner le fait intercommunal, mais dans le cadre des syndicats, et non des établissements publics de coopération intercommunale. Il vaut quand même mieux se regrouper pour gérer les compétences eau et assainissement ! La question pouvait manifestement se poser sur certains territoires.
    Pour rassurer tout le monde et n’énerver personne –⁠ je connais le sujet –, je retire mon amendement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe DR.) Ce texte ne doit pas servir de prétexte pour recréer des structures infracommunautaires. Comme M. Monnet l’a dit, une organisation intercommunale peut se justifier pour certains territoires. Mais à tous ceux qui pensent que les communes doivent gérer seules les compétences eau et assainissement, je réponds que votre article 1er A consacre l’échelon intercommunautaire. Il est quand même étonnant que certaines communes ne s’en rendent compte : il vaut mieux, désormais, gérer ces compétences à plusieurs plutôt que seul ! (M. Éric Martineau applaudit.)

    (L’amendement no 30 est retiré.)

    (L’article 1er A est adopté.)

    Article 1er

    M. le président

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    La parole est à M. Fabrice Brun.

    M. Fabrice Brun

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    C’est avec beaucoup de plaisir et de détermination que je m’exprime sur l’article 1er, qui tend à modifier le code général des collectivités territoriales pour apporter plus de souplesse dans la gestion des compétences eau et assainissement. Je le fais huit ans après avoir allumé la mèche au nom des Républicains, en défendant une proposition de loi de l’excellent Mathieu Darnaud, sénateur ardéchois, qui laissait le choix aux communes de transférer ou non ces compétences.
    Après moult débats, nous avions obtenu un sursis jusqu’en 2026. Nous y voilà pratiquement. Près de dix ans après la loi Notre, nous pouvons sauvegarder la liberté et l’autonomie des communes, en particulier celles qui se situent dans des zones de collines ou de montagne.
    Je salue les nombreux maires ruraux qui nous écoutent, dont mon ami Sébastien Pradier.
    La gestion de l’eau ne correspond pas nécessairement au périmètre administratif d’une communauté de communes ; elle relève de l’hydrographie et de l’organisation du bassin versant. Nous, députés, sommes avant tout les garants des libertés. Les élus locaux doivent être libres de gérer l’eau au plus près des besoins du terrain, sous réserve de recevoir des agences de l’eau un financement adapté ; elles ne doivent plus se détourner des communes isolées, mais se conformer à la loi, et donc à ses évolutions.
    Pour conclure, je voudrais souligner la complexité de notre réglementation. Pendant qu’outre-Atlantique, on massacre la bureaucratie à la tronçonneuse, ici, en France, il ne nous faut pas moins de huit ans pour modifier quelques alinéas du code général des collectivités territoriales. C’est à méditer ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Plusieurs députés du groupe DR

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    Très bien !

    Mme Marie Pochon

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    On va quand même la laisser où elle est, la tronçonneuse !

    M. le président

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    La parole est à M. Nicolas Dragon.

    M. Nicolas Dragon

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    La loi Notre avait imposé, par un habile jeu d’amendements et sans étude d’impact, un transfert automatique des compétences des communes sur la gestion de l’eau aux EPCI. Ce passage en force avait suscité de nombreuses incompréhensions et réticences de la part des communes, surtout en milieu rural, comme dans mon département de l’Aisne où la gestion de l’eau repose sur une connaissance fine des ressources locales.
    Les maires ont eu raison de contester ce transfert pour plusieurs motifs légitimes : préserver l’autonomie locale, éviter des coûts excessifs, garantir la qualité du service ou encore protéger l’emploi municipal. Chaque territoire ayant ses spécificités, il est essentiel que les élus locaux conservent cette liberté de choix, afin de garder le contrôle sur la gestion de l’eau.
    Face aux difficultés rencontrées, le Sénat a corrigé cette erreur en rendant le transfert optionnel et réversible, dans l’article 1er de cette proposition de loi. Cette prise de conscience essentielle est de nature à renforcer le principe de libre administration des collectivités territoriales, auquel les maires et les députés sont profondément attachés.
    Cet article 1er répond aux attentes des communes, en particulier rurales, en réaffirmant l’autonomie des maires et de leurs conseils municipaux sur une question locale. Ces élus de terrain connaissent leurs ressources et leur environnement, qu’ils gèrent efficacement depuis des décennies, au service et pour le bien-être des habitants, des agriculteurs et des industriels.
    Le groupe Rassemblement national s’oppose fermement à l’affaiblissement des communes et de leurs maires. Trop souvent, ces derniers voient leurs prérogatives amputées au profit de structures technocratiques toujours plus déconnectées des réalités locales. Nous défendons une vision claire, celle du respect des élus locaux et de leur autonomie de gestion. Il semble impératif de mettre un terme à cette obligation pesant sur les communes. C’est pourquoi nous voterons en faveur de ce texte, qui redonne aux élus locaux la capacité de décider librement de l’avenir de leur commune. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. Vincent Descoeur

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    Très bien !

    M. le président

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    La parole est à M. Sacha Houlié, pour soutenir l’amendement no 1.

    M. Sacha Houlié

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    Il vise à revenir à la proposition initiale de la commission du Sénat, c’est-à-dire à prévoir l’annulation des transferts des compétences eau et assainissement des communes aux intercommunalités pour les seules communes classées en zone de montagne.
    Quoi qu’en dise M. Monnet, ce n’est pas penser pour les autres que d’être constant dans ses convictions et d’estimer, en l’occurrence, que la mutualisation des compétences en matière d’eau et d’assainissement est une bonne chose : confier la gestion de son réseau d’eau et d’assainissement à chaque commune ne permettra pas de répondre aux problèmes que vont constituer, demain, le réchauffement climatique, la rareté de l’eau, la qualité de l’eau potable et le traitement –⁠ collectif et non collectif – de l’assainissement.
    Que, par ailleurs, le système achoppe encore après la loi Notre et les trois modifications législatives qui ont eu lieu depuis 2017 et que cela justifie des dérogations dans les zones de montagne, à cause des bassins versants, ne signifie pas que le pays soit intégralement concerné par la restitution des compétences eau et assainissement aux communes. Cela me paraît une grave erreur, que le législateur paiera et dont il sera comptable face aux générations futures, confrontées au changement climatique.

    M. Fabrice Brun

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    Venez à Aubenas !

    M. Sacha Houlié

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    C’est la raison pour laquelle je propose que le retour à la compétence communale soit strictement limité aux zones de montagne.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Je donne bien volontiers acte à M. Houlié de la constance de ses positions et je comprends tout à fait son amendement, néanmoins vous me permettrez d’émettre un avis complètement défavorable à sa proposition, qui représenterait une véritable marche arrière. La quasi-totalité des orateurs ont répété que, partout en France, il existait des zones, en montagne ou non, où les bassins versants ne correspondaient pas aux limites des communautés de communes.

    M. Vincent Descoeur

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    Eh oui !

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Je salue à mon tour votre constance, qui me paraît néanmoins avoir perdu un peu de sa pertinence, puisque les communautés de communes avaient la liberté de transférer leurs compétences avant le 1er janvier 2026, ce qu’elles ont fait en toute responsabilité.
    Nous avons réaffirmé notre confiance dans les élus, dans leur sens des responsabilités et dans leur liberté à s’organiser, et ce que vous proposez ne me paraît pas correspondre à la réalité qu’ils affrontent sur le terrain, puisqu’à ce jour seules 25 % des communes de montagne appartenant à une communauté de communes ont déjà transféré la compétence eau, tandis qu’elles sont 29 % à l’échelle nationale.
    Si j’entends ce que vous dites, le problème me semble donc concerner l’ensemble du territoire. En outre, je crains qu’un système par trop dérogatoire nous expose à un risque d’inconstitutionnalité –⁠ sans vouloir employer les grands mots.
    Mon avis sera donc très défavorable, et j’en profite pour saluer la présence dans les tribunes du public du sénateur Jean-Michel Arnaud, passionné par la question de l’eau et de l’assainissement, et très impliqué dans la défense de la liberté et de la responsabilité des communes.

    M. le président

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    La parole est à M. Sacha Houlié.

    M. Sacha Houlié

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    Ma constance est d’autant plus pertinente, madame la ministre, que je me réfère au texte de Jean-Michel Arnaud. Pourquoi aurait-il proposé cette rédaction si elle ne reposait pas sur des différences objectives entre les communes de montagne et les autres ?

    Mme Émilie Bonnivard

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    Parce que tout était bloqué !

    M. Sacha Houlié

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    N’existe-t-il pas, pour les communes de montagne, un régime dérogatoire qui fait que toute une série de dispositions législatives ne leur sont pas opposables aujourd’hui ? N’existe-t-il pas un dispositif prévoyant la restitution des compétences aux communes de montagne les ayant déjà transférées ?
    Je le répète, vous favorisez les communes qui n’ont pas utilisé le temps imparti qui leur était donné entre 2015 et 2026 –⁠ soit onze ans – pour se conformer à la loi, transférer leurs compétences eau et assainissement aux intercommunalités ; en d’autres termes, en leur donnant raison, en modifiant la loi, vous favorisez les mauvais élèves, ceux qui ont traîné les pieds.

    M. Gabriel Amard

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    Ce ne sont pas des mauvais élèves !

    M. Sacha Houlié

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    Pour moi, cela revient à affaiblir la force de la loi, que nous votons ici, au Parlement. Cela revient aussi à affaiblir la détermination et l’engagement dont l’État fait preuve dans la lutte contre le changement climatique, dans la protection des ressources naturelles, en quantité et en qualité. C’est la raison pour laquelle, naturellement, je ne retirerai pas mon amendement.

    M. Vincent Descoeur

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    Vous persistez dans l’erreur !

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard.

    M. Gabriel Amard

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    Je m’inscris en faux contre ce qui vient d’être dit. Nous ne parlons pas de mauvais élèves mais de conseils municipaux, qui ont librement choisi, au plus près de la source, de déployer leurs compétences, au travers du bénévolat des élus parfois, de la technicité des agents de la fonction publique territoriale souvent, puisque, en milieu rural, 90 % des communes de moins de 4 000 habitants sont gérées par des régies publiques, bien souvent historiques, appuyées sur un savoir-faire qui se transmet aux fonctionnaires territoriaux de génération en génération. (Mme Marie Pochon applaudit.)

    M. Vincent Descoeur

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    Bien sûr !

    M. Gabriel Amard

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    Il est dommage que vous poussiez les feux pour obliger toutes les communes hors montagne à transférer leurs compétences, sans quoi, nous aurions pu voter votre amendement, qui introduit de la souplesse dans le dispositif, en autorisant le retour en arrière et en favorisant la gestion locale lorsque le savoir-faire existe –⁠ comme vous vous limitez aux zones de montagne, nous ne le voterons pas.
    Cela étant, la ministre oublie qu’il y a des communes qui, entre 2015 et 2018, se sont senties contraintes d’opérer le transfert de compétences, sans savoir qu’elles auraient jusqu’au 1er janvier 2026 pour le faire : on ne peut donc pas dire qu’elles se sont déterminées librement. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    Sur l’amendement n° 13 rectifié, je suis par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Christine Pirès Beaune.

    Mme Christine Pirès Beaune

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    Si mon collègue Houlié est constant dans ses positions, je le suis également, et ce depuis 2015, quand j’ai défendu, dans cet hémicycle, l’optionnalité du transfert de la compétence eau aux communautés de communes.
    Si je n’ai pas changé d’avis aujourd’hui, c’est que la règle selon laquelle plus vous êtes gros, mieux vous gérez, n’est pas vraie. Cela n’existe pas !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Exactement !

    Mme Christine Pirès Beaune

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    Il y a des élus locaux de petites communes qui ont bien géré leur réseau et peuvent proposer au consommateur des prix raisonnables –⁠ parce que la gestion se traduit aussi en termes de prix.

    M. Vincent Descoeur

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    Ça se voit sur la facture !

    Mme Christine Pirès Beaune

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    Lorsque les compétences sont transférées, on peut comprendre que les présidents d’intercommunalité, qui récupèrent des réseaux gérés en régie ou en société publique locale (SPL), souhaitent unifier la gestion,…

    M. Vincent Descoeur

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    C’est rarement synonyme d’économies !

    Mme Christine Pirès Beaune

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    …ce qui se fait souvent au prix d’une inflation du coût de l’eau.
    L’erreur de départ a été de ne pas faire de différence entre la gestion de l’eau et l’interconnexion. En zone rurale, les travaux d’interconnexion ne peuvent en effet pas être du ressort de la seule commune, car cela coûte trop cher. Mais on a mis dans un même panier l’eau et l’assainissement et on a dit à l’élu local : « Avant le 1er janvier 2026, transfère et tais-toi ! ». C’est une décision mortifère, que les élus locaux ne comprennent pas, et il n’est pas sérieux de prétendre que les communes rurales qui n’ont pas transféré leurs compétences à la communauté de communes sont de mauvais élèves. (Mme Manon Bouquin et M. François-Xavier Ceccoli applaudissent.)

    (L’amendement no 1 n’est pas adopté.)

    M. Vincent Descoeur

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    C’est la victoire du bon sens !

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements, nos 4 et 13, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Sophie Pantel, pour soutenir l’amendement no 4.

    Mme Sophie Pantel

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    La France est diverse, et il est nécessaire de trouver une solution pour les communes qui rencontrent des difficultés, quand bien même elles le voudraient, pour opérer le transfert de compétences. Rendre optionnel ce transfert dans les zones de montagne, c’est reconnaître les caractéristiques propres liées à la géographie, à l’habitat dispersé et à la faible démographie. La seule logique qui doit prévaloir en matière de gestion d’eau –⁠ cela a été dit par mon collègue du Cantal –, c’est la logique des bassins versants et non celle des frontières administratives, qui sont artificielles. Nous proposons donc de prendre acte de la réalité du terrain et des impasses dans lesquelles sont certains territoires de montagne, sans rien enlever aux territoires dont la configuration géographique peut permettre le transfert aux intercommunalités.
    Pour illustrer ces impasses dans lesquelles se trouvent certaines communes parce que, à un moment donné, il a fallu trouver et réunir 5 000 habitants dans une intercommunalité, je prendrai l’exemple de la mienne : 620 kilomètres carrés, trois vallées et un massif montagneux pour dix-neuf communes et 360 kilomètres de réseau. Face à ces données, on comprend vite que la mutualisation, présentée comme un avantage, ne peut pas fonctionner concrètement. Les communes qui ont choisi le transfert ont dû renoncer à l’exploitation en régie, et ce sont des entreprises privées qui ont mis la main sur l’eau –⁠ un bien commun. Non seulement cela s’est traduit par une explosion des prix pour les habitants, mais, en plus, aucun investissement n’a été consenti, ce qui fait peser un risque sur les infrastructures.
    Cet amendement prévoit donc que, lorsqu’aucun investissement structurant –⁠ la définition de ce dernier étant renvoyée à un décret – n’a été engagé et sous réserve d’une approbation par la majorité du territoire concernée, une restitution est possible.

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard, pour soutenir l’amendement no 13 rectifié.

    M. Gabriel Amard

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    Il s’inscrit dans ce que j’ai affirmé lors de la discussion générale : nous sommes en faveur de la liberté de choix pour les communes en matière de projets partagés dans le cadre d’une intercommunalité. C’est ce qu’on appelle l’intercommunalité choisie.
    Nous privilégions notre amendement, qui va plus loin que l’amendement no 4 et que je vous appelle à soutenir.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Mon avis est défavorable, d’abord au nom d’un principe de stabilité pour les communes qui ont transféré leurs compétences et à qui l’on propose de revenir en arrière. L’amendement no 13 rectifié s’appliquerait même à des agglomérations de communes qui ont choisi de transférer leurs compétences dès 2020. À quoi cela servirait-il d’envoyer un tel signal ?
    Ensuite, l’amendement no 4 réserve la faculté de revenir sur le transfert de compétences aux communes qui n’auraient pas encore opéré d’investissements structurants ; or tout service intercommunal gérant des réseaux opère chaque année des investissements dans au moins une commune. Cette condition me paraît dès lors inopérante.
    Enfin, les deux amendements proposent une marche arrière bien plus importante que les avancées réalisées. Lorsqu’une communauté de communes veut prendre en charge une compétence qui était jusque-là facultative, il faut qu’elle réunisse le soutien de deux tiers des conseils municipaux représentant au moins la moitié de la population de l’agglomération ou de la moitié des conseils municipaux représentant les deux tiers de la population de l’agglomération. C’est sur cette recherche de consensus que s’est construite l’intercommunalité. Le retour proposé par les amendements nécessiterait seulement le soutien de la moitié des conseils municipaux.
    L’Assemblée nationale, en adoptant ces deux amendements, enverrait un très mauvais signal. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Dix ans après la loi Notre, nous essayons de corriger et d’assouplir ce qui peut l’être.

    Mme Marie Pochon

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    Ah bon ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Cette loi avait décidé de faire de la France un jardin à la française, en considérant qu’il fallait de l’uniformité dans la gestion de l’eau et qu’elle devait opérer à l’échelle du périmètre administratif. Dix ans ont été nécessaires pour que l’eau coule selon le principe du bassin versant.
    Depuis son adoption, on a constaté que la loi était trop rigide et qu’elle avait provoqué une série d’irritants, notamment dans les communautés de communes, où certains avaient rappelé que nous avions inventé un principe de subdélégation. On a donc essayé d’améliorer la situation en assouplissant la loi.
    De manière générale, et sans philosopher, je vous demande si nous serons capables d’opter pour le jardin à l’anglaise, et non à la française, quand il sera question de textes relatifs aux territoires et aux collectivités et donc de faire confiance aux élus locaux.
    Le transfert de compétences en matière de gestion de l’eau est un sujet compliqué. Il n’est pas fait de façon automatique, car il soulève un certain nombre d’enjeux financiers et d’organisation. Les intercommunalités qui ont été obligées ou qui ont fait le choix de transférer leurs compétences sortent de deux ou trois années d’un exercice très difficile.
    Dans les territoires, j’entends que si l’on venait à détricoter et à retricoter à l’envers ce qui a été décidé, alors ces agglomérations, qui viennent tout juste de sortir la tête de l’eau, auraient pour perspective de devoir faire face à de nouvelles difficultés au cours des trois ou quatre prochaines années.

    M. Guillaume Garot

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    Eh oui !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Regrettons ce qui a été fait il y a dix ans…

    M. Gabriel Amard

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    Il était temps !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Vous savez, je n’ai aucun problème à dire cela, car j’ai toujours pensé que l’on aurait pu faire différemment. Aujourd’hui, nous sommes où nous sommes et il s’agit d’aller de l’avant. Sortons de cette situation sans provoquer de nouvelles irritations et des migraines infernales –⁠ sans parler de ce que cela nous coûterait.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Ils vont péter un boulard !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Exactement ! D’autant plus que je suis favorable à ce que l’on ne revienne pas en arrière concernant les transferts qui ont déjà été réalisés. C’est une demande qui nous a été faite. Le gouvernement veut adopter une position responsable et raisonnable.
    Privilégions la raison, car je ne suis pas favorable à ce que l’on annonce aux agglomérations et aux communautés de communes que l’on effacera tout ce qui a été fait. Il faut constater la situation, guérir les irritants qui peuvent l’être et surtout ne pas en créer de nouveaux.
    Vous l’aurez compris, je ne suis pas favorable à vos amendements.

    Rappel au règlement

    M. le président

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    La parole est à M. Bastien Lachaud, pour un rappel au règlement.

    M. Bastien Lachaud

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    Il se fonde sur l’article 100. J’aimerais que la présidence m’explique la façon dont l’ordre d’examen des amendements a été décidé, car l’amendement no 13 rectifié, en touchant à l’alinéa 5 auquel ne touche pas l’amendement no 4, modifie plus profondément le texte de la proposition de loi. Or la règle veut que l’examen des amendements se fasse de celui qui porte le plus de modifications à celui qui en porte le moins. L’amendement no 13 rectifié aurait donc logiquement dû être examiné d’abord, ce qui n’a pas été le cas. La présidence pourrait-elle m’expliquer pourquoi ?

    M. le président

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    J’ai bien pris note de votre question.

    Article 1er (suite)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Pierre Vigier.

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Nous, élus de montagne, réunis au sein de l’Association nationale des élus de la montagne, plaidons pour préserver la liberté de choix en matière de gestion de l’eau et de l’assainissement.

    M. Thibault Bazin

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    Il a raison !

    M. Jean-Pierre Vigier

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    Les maires doivent conserver la maîtrise d’un service de proximité qu’ils gèrent avec efficacité et souvent depuis des générations. Nous devons leur garantir des outils adaptés aux réalités locales pour effectuer ce service essentiel.
    Dans certains cas, les transferts de compétences ont été rapides et forcés. Je suis favorable à l’amendement no 4 qui permet, sous conditions –⁠ j’insiste sur ce point –, de revenir sur ce transfert pour les territoires de montagne, et uniquement pour eux.

    M. le président

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    La parole est à M. Marc Fesneau.

    M. Marc Fesneau

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    Monsieur Vigier, l’amendement no 4 n’autoriserait pas seulement les territoires de montagne à revenir sur le transfert de compétences, puisqu’il dispose au sujet des communautés de communes ou des communautés d’agglomération dont tout ou partie des communes sont situées en zone de montagne. On engagerait de fait un grand détricotage !
    Je suis souvent d’accord avec Mme Pantel, qui connaît bien les territoires ruraux, mais ouvrir cette boîte de Pandore entraînera plusieurs conséquences.
    Premièrement, les conditions de sortie d’un EPCI deviendront plus lâches que les conditions d’entrée : il faudra donc assouplir les conditions d’entrée –⁠ d’autant plus que l’assouplissement des seules conditions de sortie aura pour effet d’affaiblir la solidarité au sein des conseils communautaires, puisqu’au gré des alternances, chacun voudra tirer la couverture à soi.
    Deuxièmement, alors que nous sommes tous soucieux de l’état des finances publiques, en particulier des collectivités, cela entraînera des coûts, puisque des dépenses ont déjà été engagées pour le transfert des compétences, notamment pour les services de gestion qui ont été créés et les études qui ont été réalisées au sujet de la création des EPCI. Après les études réalisées pour y entrer, il faudrait en réaliser de nouvelles pour en sortir ?
    Par ailleurs, comment définir l’investissement structurant ? Par une somme ? Par l’infrastructure qu’il concerne ? Il y a là une imprécision légistique qui ouvrira la voie à des recours devant les tribunaux administratifs.
    Nous essayons d’assouplir, et vous savez que j’y ai été favorable malgré mes réticences, mais avec ces amendements nous ne sommes plus dans l’assouplissement, mais dans une forme de détricotage. Et si nous posons cette question pour la gestion de l’eau et de son assainissement, elle se posera pour toutes les compétences. On ouvrira alors un autre débat. Nous n’y sommes pas favorables.

    M. le président

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    Monsieur Lachaud, en réponse à votre question, je vous indique que la logique qui a prévalu pour définir l’ordre d’examen des amendements a été celle de leur ordre de dépôt.
    La parole est à M. Gabriel Amard.

    M. Gabriel Amard

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    Arrêtons de nous raconter des histoires. J’ai été élu local pendant vingt-cinq ans, dont dix-neuf passés à la tête d’un exécutif chargé de la gestion de l’eau et de son assainissement. Vous inventez des problèmes là où il n’y en a pas.
    Quand une commune souhaite exercer elle-même une compétence qui était jusque-là partagée au sein d’une intercommunalité, fût-ce depuis des décennies, les ouvrages qui relevaient de l’utilisation exclusive par la commune lui reviennent et les ouvrages qui relevaient d’une utilisation partagée sont régis par une simple convention d’usage partagé.
    Il ne faut pas prétendre que la reprise des compétences par une commune serait un retour en arrière et qu’elle serait compliquée, voire impossible, pour des raisons techniques, alors qu’elle est possible dès lors qu’il y a une majorité autorisant une commune à sortir d’un syndicat intercommunal.
    Je ne suis pas d’accord avec vos arguments d’autorité qui visent seulement à nous faire peur et qui laisseraient penser que la représentation nationale ne connaît rien à la vie communale. Ce n’est pas sérieux.

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Pantel.

    Mme Sophie Pantel

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    Je suis d’accord avec les arguments de M. Amard.
    Les transferts de compétences ont été opérés de façon très rapide et, comme l’a rappelé M. Vigier, parfois sous la pression des préfets pour les accélérer.
    On ne peut pas à la fois monter à la tribune pour tenir des discours sur la libre administration et le droit à la différenciation, prétendre que la France souhaitait l’uniformisation des dispositifs, et ne pas prendre en considération les spécificités des territoires, en particulier des territoires de montagne.
    Concernant ces derniers, il existe une définition des communes de montagne. On n’ouvre donc pas la boîte de Pandore.
    J’en appelle à votre soutien pour l’amendement no 4, dans l’intérêt de communes qui sont aujourd’hui dans une impasse. Certaines ont transféré leurs compétences eau et assainissement, pourtant, il ne se passe rien. Il y aura un trou dans la raquette, madame la ministre.

    (L’amendement no 4 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 13 rectifié.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        99
            Nombre de suffrages exprimés                98
            Majorité absolue                        50
                    Pour l’adoption                21
                    Contre                77

    (L’amendement no 13 rectifié n’est pas adopté.)

    M. le président

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    L’amendement no 21 de M. le rapporteur est rédactionnel.

    (L’amendement no 21, accepté par le gouvernement, est adopté ; en conséquence, l’amendement no 33 tombe.)

    M. le président

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    Je suis saisi de deux demandes de scrutin public : sur l’amendement no 28, par le groupe Rassemblement national ; sur l’amendement no 36, par le groupe Ensemble pour la République.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Philippe Schreck, pour soutenir l’amendement no 28.

    M. Philippe Schreck

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    Madame la ministre, vous avez parlé de migraine et d’irritants, mais lorsque le Parlement adopte un texte inadapté –⁠ cela peut arriver – et qui crée de surcroît des difficultés pour les collectivités territoriales, qu’importent les irritations, il nous appartient de le modifier, voire de revenir en arrière.
    La réversibilité du transfert des compétences eau et assainissement était d’ailleurs prévue, y compris dans les premiers textes tendant à assouplir le dispositif.
    Malgré les difficultés que cela pose, revenir sur le transfert des compétences eau et assainissement est nécessaire pour deux raisons de justice.
    Premièrement, de nombreuses petites communes ont transféré leurs compétences alors qu’elles ignoraient que la date de transfert automatique serait prorogée au 1er janvier 2026. D’autres les ont transférées récemment, parce qu’elles ignorent les modifications que nous pourrions apporter à la date d’entrée en vigueur.
    Deuxièmement, de nombreuses petites communes ont transféré leurs compétences parce qu’elles ont subi, directement ou indirectement, un chantage aux subventions et au financement. On leur a expliqué que ces financements n’étaient envisageables qu’à condition qu’elles transfèrent leurs compétences aux intercommunalités. Une fois qu’elles les avaient transférées, on leur a dit de voir avec l’intercommunalité.
    Je crois donc que le retour en arrière est justifié par les principes de justice et de libre administration des collectivités. Il doit être soumis à conditions, aussi proposons-nous par cet amendement deux conditions notables. Premièrement, il ne faut pas que toutes les communes membres d’une communauté de communes aient déjà transféré les compétences parce que, dans ce cas, la restitution des compétences aux communes relèverait effectivement du détricotage. Deuxièmement, il ne faut pas que la communauté de communes ait effectué des investissements, parce que cela créerait un effet d’aubaine pour les communes qui pourraient, après avoir bénéficié d’un investissement commun, reprendre leurs compétences. Ces deux cas mis à part en vertu du bon sens, le retour en arrière doit pouvoir se faire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Avis défavorable, pour plusieurs raisons.
    Premièrement, il faut assurer la sécurité juridique du dispositif. Deuxièmement, votre proposition entraînerait un coût significatif pour de nombreuses collectivités. Troisièmement, elle vise à faire en sorte que la marche arrière soit plus facile que la marche avant, puisqu’il suffirait que la moitié des conseils municipaux vote la restitution des compétences. Quatrièmement, une collectivité de communes qui exerce les compétences eau et assainissement prévoit un programme d’investissement tous les ans, ne serait-ce que pour accompagner les travaux de voirie : quand on refait la voirie, on rénove évidemment les infrastructures d’assainissement, voire les canalisations d’eau ! Dans tous les cas où les compétences ont été transférées, il y a donc eu des investissements. Comme l’a dit Mme la ministre, la prise des compétences consiste pour la communauté de communes à définir un programme d’investissement pour améliorer les réseaux dans les dix ans à venir.
    Enfin, je précise que nous avons adopté tout à l’heure l’article 1er A, qui est issu de l’adoption par la commission d’un amendement de M. Descoeur et qui permet aux communautés de communes souhaitant se réorganiser de déléguer certaines compétences à un syndicat infracommunautaire.
    La proposition de loi vise non pas à enclencher la marche arrière, mais à permettre de tourner le volant. Les communautés de communes auront la possibilité de se réorganiser, mais je vous invite à refuser le retour en arrière.

    Mme Marina Ferrari

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    Très bien !

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    L’amendement de M. Descoeur adopté en commission répond à votre préoccupation en rendant possible la création de syndicats infracommunautaires. Je comprends vos arguments, et je vous avoue considérer qu’avoir mis dix ans pour revenir à la raison en la matière relève de l’exploit. Cela dit, il faut partir du point où nous sommes. En décidant de se retirer de l’intercommunalité et de reprendre ses compétences, une commune mettrait en danger les autres communes membres.
    Regrettons les erreurs du passé, mais évitons de créer des difficultés supplémentaires. Vous avez sans doute été élu local dans une intercommunalité ; j’en ai moi-même présidé une et je suis encore déléguée communautaire. Forte de cette expérience, je sais que de nombreux considérants juridiques et financiers s’imposent à quiconque souhaite défaire ce qui a été fait. Une telle décision ne modifie pas seulement le rapport entre la commune et l’intercommunalité ; elle a aussi des conséquences sur l’ensemble des communes membres et met en danger les programmes d’investissement qui ont été actés.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Bien sûr !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Je crois que les solutions proposées dans le texte sont pleines de souplesse. Puisque la proposition de loi vise à corriger des irritants, il faut surtout éviter d’en créer d’autres. Je privilégie la raison et la responsabilité ; mon avis est donc défavorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard.

    M. Gabriel Amard

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    L’amendement nous pose un problème. Nous sommes favorables à ce qu’une commune puisse, au nom de la liberté communale, reprendre des compétences qu’elle a transférées à contrecœur car elle pensait que cela était obligatoire et à ce qu’elle puisse, si elle est opposée aux orientations décidées par l’intercommunalité en matière d’eau et d’assainissement, faire valoir des arguments en faveur d’une communauté de projet différente.
    En revanche, je ne suis pas d’accord avec M. Schreck lorsqu’il dit que le retrait d’une commune met en difficulté financière les autres communes membres…

    M. Philippe Schreck

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    Ce n’est pas moi qui l’ai dit, c’est le rapporteur et la ministre !

    M. Gabriel Amard

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    …ou que la possibilité de reprendre ses compétences après avoir bénéficié d’investissements réalisés par l’EPCI crée un effet d’aubaine. En effet, au moment où la commune transfère ses compétences à l’EPCI, l’état et la valeur du réseau de distribution d’eau sont évalués, les compteurs des usagers sont dénombrés et le nombre de mètres cubes d’eau facturés est relevé ; lorsqu’elle se retire, elle récupère l’administration des installations à l’usage exclusif de son territoire. Si celles-ci ont été rénovées entretemps, les travaux ont été financés non par l’EPCI mais par les usagers, par l’intermédiaire de leur facture d’eau et de leur redevance assainissement. Ce sont donc les usagers qui ont payé, à proportion de leur consommation, les installations dédiées à l’assainissement et à la distribution d’eau potable.
    Quant au reste des infrastructures concernées, elles font l’objet d’une convention d’utilisation partagée qui fixe le montant dû à l’EPCI, lequel ne court donc pas de risque financier particulier.
    Pour toutes ces raisons, nous voterons contre l’amendement.

    M. le président

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz

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    J’apporte mon soutien à l’amendement. Je me réjouis sincèrement que cette proposition de loi nous soit soumise, mais elle ne va pas assez loin ; c’est d’ailleurs pourquoi j’avais déposé l’amendement no 33, tombé à la suite de l’adoption de l’amendement no 21.
    Monsieur le rapporteur, j’approuve votre triptyque : liberté, confiance et pouvoir d’achat. Suivons donc votre logique. La liberté, c’est la possibilité donnée aux communes d’exercer ou non la compétence de la gestion de l’eau. La confiance, c’est le principe de subsidiarité, qui permet de choisir l’échelon le plus approprié pour la gestion d’une compétence –⁠ en l’occurrence, c’est bien souvent l’échelon communal. Quant au pouvoir d’achat, il a pâti du transfert de compétences, car celles-ci ont souvent été ensuite déléguées au secteur privé, ce qui a fait doubler ou tripler le prix de l’eau.
    Pour toutes ces raisons, et parce que de nombreuses communes qui ont été contraintes de transférer leurs compétences le regrettent désormais, nous proposons par cet amendement la réversibilité du transfert. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 28.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        94
            Nombre de suffrages exprimés                92
            Majorité absolue                        47
                    Pour l’adoption                27
                    Contre                65

    (L’amendement no 28 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Marc Fesneau, pour soutenir l’amendement no 36.

    M. Marc Fesneau

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    Il fait écho à ce que vient de dire le rapporteur : puisque nous organisons la réversibilité du transfert, il faut au moins s’assurer qu’il n’est pas plus facile de sortir de l’administration commune qu’il ne l’a été d’y entrer. L’amendement vise donc à ce que le transfert des compétences de l’intercommunalité vers les communes soit approuvé à la majorité qualifiée.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Je comprends la démarche de M. Fesneau, mais il veut, pour ainsi dire, ralentir la marche avant ! (Sourires.) La délégation des compétences –⁠ car nous parlons ici de délégation, non de transfert inversé – se décide à la majorité simple ; requérir la majorité qualifiée, c’est appuyer à la fois sur l’accélérateur et sur le frein. Cela va contre l’esprit du texte, qui vise à redonner de la liberté aux collectivités locales.
    Je vous propose donc de retirer l’amendement, sans quoi je lui donnerai à regret un avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Je reprendrai l’image du rapporteur : vous souhaitez appuyer à la fois sur deux pédales, celle de la marche avant et celle de la marche arrière ou du frein.
    Je comprends ce qui sous-tend votre amendement : la reconnaissance que toute décision individuelle d’une commune a un impact sur le collectif, car l’intercommunalité est un espace de coopération. Néanmoins, l’amendement me paraît un peu créatif, si j’ose dire : d’une part, parce qu’il ne s’agit que de déléguer et non de transférer dans l’autre sens ; d’autre part, parce que la majorité qualifiée ne s’applique pas dans d’autres cas tout à fait similaires. Vous proposez de créer une disposition spécifique s’appliquant à un sujet particulier au sein de l’intercommunalité.
    Vous l’aurez compris, je vous demande donc respectueusement de retirer l’amendement ; à défaut, l’avis du gouvernement serait défavorable.

    M. le président

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    La parole est à Mme Christine Pirès Beaune.

    Mme Christine Pirès Beaune

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    Je suis opposée à l’amendement, car l’objet du texte est de permettre le statu quo : les communes n’ayant pas encore transféré leurs compétences pourront en rester là. Personnellement, je suis hostile au retour en arrière et au détricotage des transferts qui ont déjà eu lieu, qu’ils soient partiels ou totaux.
    Néanmoins, Mme Pantel a soulevé un réel problème. Que faire dans le cas des communes qui ont transféré bon gré mal gré leurs compétences, mais n’ont pas encore réalisé les investissements nécessaires ? J’appelle votre attention sur ce point. Ces communes ont joué le jeu de la mutualisation mais, pour des raisons certainement financières –⁠ cela demanderait une analyse objective –, elles n’ont pas encore investi dans les travaux nécessaires.
    En tout cas, je pense que nous devrions simplement assumer nos responsabilités et donner la possibilité aux communes qui ne l’ont pas encore fait de ne pas transférer leurs compétences. Chercher à ralentir les choses et multiplier les systèmes dérogatoires ne me paraît pas la bonne approche.

    M. le président

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    La parole est à M. Marc Fesneau.

    M. Marc Fesneau

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    J’entends la demande de retrait de M. le rapporteur et de Mme la ministre et les remercie de leur respect, mais je leur réponds tout aussi respectueusement qu’il y a tout de même un problème de fond, même s’agissant de la délégation des compétences et non de leur transfert.
    La loi Notre n’a pas seulement organisé le transfert des compétences, elle a aussi forcé les communes et les intercommunalités à se rassembler dans des structures plus élargies. Cela a créé des problèmes car les différentes collectivités n’avaient pas les mêmes compétences, ce qui a parfois conduit à retirer des compétences –⁠ qui le scolaire, qui la voirie – à une collectivité qui avait l’habitude de s’en acquitter ou, à l’inverse, à en confier à une collectivité qui n’en avait pas l’expérience.
    Je maintiens l’amendement. Je considère que ni la délégation ni le transfert de compétences ne constituent un acte anodin et qu’il faut donc que ce type de décision soit approuvé à la majorité qualifiée du conseil communautaire.

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 36.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        93
            Nombre de suffrages exprimés                89
            Majorité absolue                        45
                    Pour l’adoption                23
                    Contre                66

    (L’amendement no 36 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard, pour soutenir l’amendement no 11.

    M. Gabriel Amard

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    Je me fais ici l’interprète de l’Association des maires ruraux de France, qui appréhende de voir le texte rigidifier in fine les choses : il pourrait redonner aux communes une liberté en trompe-l’œil qui serait ensuite niée ou inversée par des décrets en Conseil d’État. En conséquence, j’aimerais que Mme la ministre ou M. le rapporteur me donnent des exemples de ce qui est entendu par la phrase qui conclut les alinéas 11 et 19 de l’article 1er : « Les autres modalités de cette convention sont définies par décret en Conseil d’État ». Si ce ne sont pas les organes délibérants qui fixent les modalités de la convention, mais que celles-ci leur sont imposées par décret en Conseil d’État sans que soient consultés le Parlement ni les communes, le texte n’aura pas servi à grand-chose.
    Voilà pourquoi, par cet amendement, nous proposons de supprimer la dernière phrase de l’alinéa 11 et celle de l’alinéa 19, tout en conservant le reste du dispositif défini dans ces alinéas.

    M. le président

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    Sur l’article 1er, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission sur l’amendement ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    J’ai regardé la formulation avec beaucoup d’attention et objectivement, sous réserve de ce que dira Mme la ministre, je n’ai pas vu de loup. Je suis intellectuellement séduit par une manière d’écrire la loi qui aboutit à une rédaction peu bavarde et qui –⁠ ce qui est une démarche habituelle dès lors qu’on se donne un tel objectif – renvoie à un décret pour formuler les grands principes.
    L’avis de la commission est donc défavorable, et le sera encore plus si la ministre nous expose les intentions du gouvernement quant à ce qui pourrait figurer concrètement dans le décret en Conseil d’État.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Monsieur le député Pilato…

    M. Gabriel Amard

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    Je m’appelle Amard, non Pilato.

    M. le président

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    M. Pilato en est le premier signataire, mais c’est M. Amard qui a défendu l’amendement.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Je rends à César ce qui appartient à César, pardonnez-moi !
    J’en viens à la réponse que vous attendez sûrement. Nous cherchons un équilibre –⁠ nous le disons tous – entre la responsabilité et la sécurisation. Tous les orateurs ont soutenu à juste raison que l’eau était un enjeu essentiel et qu’il nous fallait veiller à la sécurité et à la qualité de cette ressource, dans une approche très collective. Nous affirmons que les élus locaux seront suffisamment responsables pour choisir le mode de gestion qui garantisse d’atteindre ces objectifs.
    Cela étant, la représentation nationale, après avoir soutenu que l’eau était un enjeu exceptionnel et que nous aurions dû ajouter d’autres dispositions dans le texte –⁠ cependant je rappelle que nous ne traitons que de la compétence –, peut exiger d’atteindre certains objectifs. Adopter un principe de convention qui fixe une durée, qui établit un programme d’investissement et qui décide de la gouvernance peut aider les territoires, donner une certaine sécurité aux élus qui pourraient être démunis. Nous assumons totalement la responsabilité qui est la nôtre concernant l’enjeu de l’eau –⁠ sans pour autant la détailler jusqu’au troisième alinéa du quatrième chapitre. Nous donnons les éléments essentiels, charge ensuite aux élus d’organiser leur convention.
    Dans une vie précédente, j’étais présidente d’une association départementale des maires et je me souviens que très souvent des élus ou des membres d’une intercommunalité venaient frapper à la porte pour nous demander si nous avions des modèles de convention qu’ils pourraient adapter.
    Vous l’avez compris, l’avis du gouvernement est défavorable.

    (L’amendement no 11 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard, pour soutenir l’amendement no 12.

    M. Gabriel Amard

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    Je le retire.

    (L’amendement no 12 est retiré.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’article 1er.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        93
            Nombre de suffrages exprimés                91
            Majorité absolue                        46
                    Pour l’adoption                86
                    Contre                5

    (L’article 1er, amendé, est adopté.)

    Article 3 bis

    M. le président

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    L’amendement no 22 de M. le rapporteur est rédactionnel.

    (L’amendement no 22, accepté par le gouvernement, est adopté.)

    M. le président

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    La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l’amendement no 35.

    M. Christophe Bentz

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    Il s’agit d’un autre amendement sur la réversibilité des compétences eau et assainissement, par lequel je propose simplement que le conseil municipal délibère sur la réintégration des compétences eau et assainissement dans le champ des compétences communales, encore une fois, par esprit de subsidiarité. Puisque vous faites confiance aux communes, il faut adopter ces amendements de réversibilité.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    L’amendement aurait pu être retiré, dès lors que nous n’avons pas décidé, dans les votes successifs sur les amendements à l’article 1er, d’enclencher la marche arrière. Vous demandez en effet que le conseil municipal délibère sur la réintégration dans le champ des compétences communales des compétences eau et assainissement. Or nous venons de refuser d’inscrire dans la loi une telle démarche. Je me permets donc respectueusement de vous suggérer de retirer l’amendement, sans quoi j’émettrai un avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Pour les raisons présentées par le rapporteur, par cohérence avec les votes précédents et avec ce que nous avons dit, l’avis du gouvernement est défavorable.
    Nous affirmons tous ici le sens de la responsabilité des élus et leur liberté ; cependant, il n’y a pas de liberté sans responsabilité. Nous pouvons regretter la situation actuelle, néanmoins c’est d’elle qu’il faut partir. La détricoter créerait à nouveau de l’incertitude, de l’irritation et de la tension.

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-René Cazeneuve.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Qu’on apporte de la souplesse et qu’on réponde à la demande des élus locaux, c’est une chose, mais il est impossible de revenir en arrière sur une disposition à ce point fondamentale. D’abord, nous avons besoin de stabilité dans les politiques publiques, y compris vis-à-vis des élus locaux. Ensuite, les coûts d’investissement pour régler les problèmes d’eau et d’assainissement ainsi que le rôle de la coopération au niveau de l’intercommunalité ou des agences sont tels que c’est se tromper qu’imaginer que la commune serait systématiquement la bonne échelle pour régler ce genre de problèmes. Apporter de la souplesse, oui ; revenir en arrière, non.

    (L’amendement no 35 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    L’amendement no 23 de M. le rapporteur est rédactionnel.

    (L’amendement no 23, accepté par le gouvernement, est adopté.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie Pochon, pour soutenir l’amendement no 17.

    Mme Marie Pochon

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    Lors de l’examen du texte en commission, il a été décidé que la commission départementale de coopération intercommunale relative à la gestion de la ressource en eau ne serait plus réunie qu’à une seule occasion, après les élections municipales. Les réunions de la CDCI sur ce sujet pourtant central n’auraient donc lieu qu’une fois tous les six ou sept ans.
    Nous estimons préférable de revenir à la version initiale, qui proposait une réunion annuelle, ce qui permettrait d’évaluer de façon régulière l’état de la ressource et les améliorations possibles dans chaque département. Qu’il s’agisse des conséquences des changements climatiques ou des pollutions aux nitrates ou aux PFAS, en espaçant de six ans les réunions de la CDCI, on manque l’occasion de créer une instance régulière de discussion qui serait plus à même d’anticiper la dégradation potentielle de la ressource.
    Nous appelons donc, au travers de l’amendement, à revenir à une version où la CDCI se réunirait tous les ans et formulerait des recommandations aux gestionnaires tout en suivant régulièrement l’évolution de la ressource. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC.)

    M. le président

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    Sur l’amendement n° 17, je suis saisi par les groupes La France insoumise-Nouveau Front populaire et Écologiste et social d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Le texte adopté par la commission des lois constitue une très grande avancée, si ce n’est une révolution. (« Oui ! » sur les bancs du groupe DR.) Nous avons prévu qu’après chaque élection municipale –⁠ car c’est bien là que cela se joue – la commission départementale de coopération intercommunale se réunirait ; mais ce que la commission a ajouté et qui est beaucoup plus important pour moi, c’est qu’il y aurait aussi un débat dans chaque conseil municipal et dans chaque conseil de communauté de communes.
    Quel est l’équilibre auquel la commission est parvenue ? L’État, en la personne du préfet, présentera à la commission départementale de coopération intercommunale l’état des perspectives pour les dix ans à venir en quantité et en qualité de chaque captage d’eau. Il exposera, par exemple, qu’étant donné que le captage d’une commune montre qu’elle atteint la concentration limite pour tel ou tel polluant, il y a une forte probabilité que cette limite soit dépassée dans les cinq ans, ou qu’une autre commune a été très proche de l’insuffisance et qu’en cas d’été très sec, la quantité d’eau risque d’être insuffisante. C’est très bien que le débat ait lieu au niveau départemental –⁠ j’ai repris sur ce point le texte du Sénat. Néanmoins, il me semble suffisant qu’il ait lieu une fois après les élections municipales.
    Si je peux me permettre, ne restez pas au premier étage de la fusée ; c’est sur le deuxième et le troisième que je compte beaucoup. Là encore, nous pouvons faire confiance aux élus locaux. Quels que soient son métier et son âge, un membre de conseil municipal comprendra très bien si on lui présente un travail montrant que le captage d’eau de la commune ne sera plus suffisant ou risque d’être pollué.

    M. Fabrice Brun

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    C’est du bon sens !

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Faisons donc confiance aux élus. Les outils sont disponibles et, là où c’est possible, nous procédons à des interconnexions entre les communes. Les élus de la grande ruralité savent que l’interconnexion est difficile car quand le débit d’eau est insuffisant, il faut purger sans arrêt les canalisations.
    Le principe est de donner l’information après les élections municipales –⁠ on irrigue tout le peuple des élus du pays, si je puis dire. L’information est coordonnée au niveau départemental puis déléguée et chacun trouve des solutions. Je pense donc que nous avons trouvé un bon équilibre. Franchement, je ne vois pas l’utilité, la valeur ajoutée, de réunir formellement la CDCI chaque année.
    Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée nationale.

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette.

    M. Stéphane Delautrette

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    Je soutiens l’amendement, en m’appuyant sur un cas concret. Le préfet de la Haute-Vienne s’est saisi du sujet de l’eau et de l’assainissement ; il réunit très régulièrement la CDCI sur la question du transfert de ces compétences, mais pas uniquement, parce que, comme cela a été dit sur tous les bancs, l’eau est un enjeu crucial pour l’avenir. Je crois que les CDCI ne sont pas suffisamment mobilisées ni utilisées, eu égard à tout ce qu’elles pourraient apporter en matière de réflexion sur la dynamique intercommunale et la coopération entre les communes et les intercommunalités. (M. Gabriel Amard et Mme Marie Pochon applaudissent.)
    Si nous pouvions envoyer ce signal d’utiliser mieux les CDCI au service d’un enjeu majeur, qui est celui de l’eau, ce serait une bonne chose. En tout cas, dans mon territoire, la CDCI se réunit régulièrement, et ça marche. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et EcoS. –⁠ M. Jean-François Coulomme applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard.

    M. Gabriel Amard

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    Je soutiens moi aussi cet amendement, pour la simple et bonne raison que la CDCI est l’instance qu’il faut privilégier pour un travail de prospective et de concertation entre les autorités organisatrices des services d’eau et d’assainissement, sous l’autorité des préfets, mais aussi en présence de la représentation des maires.
    Je rappelle que, même quand il y a une intercommunalité, c’est toujours l’État –⁠ donc les maires, en vertu de leur fonction de représentants de l’État dans la commune – qui est responsable de la quantité et de la qualité. Le transfert de la compétence ne dédouane donc pas les maires de leur responsabilité pénale à l’égard des usagers, en cas notamment d’empoisonnement de la population.
    Voilà pourquoi je pense qu’il n’est pas suffisant de réunir la CDCI en début de mandat, mais qu’il faut maintenir la fréquence annuelle. Les pollutions émergentes évoluent. Certaines peuvent disparaître si des choix de pratiques et d’activités humaines conduisent à les faire reculer. D’autres peuvent apparaître quand malheureusement l’État local est en totale contradiction dans ses pratiques ; on sait en effet que des préfets autorisent des épandages dans les cultures destinées à l’alimentation de boues d’épuration qui contiennent des PFAS. On voit bien là qu’il est nécessaire d’évaluer la situation année après année, car la nature des problèmes posés est en perpétuelle évolution. Considérez donc, s’il vous plaît, que la sagesse consiste à adopter l’amendement de Mme Pochon. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-René Cazeneuve.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Le texte traite du transfert des compétences. On ne va pas en discuter chaque année, en changeant d’avis une fois sur deux !

    Mme Marie Pochon

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    Ce n’est pas ce dont parle l’amendement !

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Non, mais c’est ce dont traite la proposition de loi.
    Le débat doit avoir lieu à chaque renouvellement des instances, mais pas chaque année : cela risquerait de créer une instabilité qui nuirait à l’application de cette politique publique. En outre, il existe de nombreuses autres instances où l’on peut évoquer l’approvisionnement en eau.
    Je ne voterai pas pour l’amendement.

    M. Matthias Tavel

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    Cela n’a rien à voir avec lui !

    M. Gabriel Amard

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    De toute évidence, vous n’en avez pas lu le texte…

    M. Hadrien Clouet

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    C’était complètement hors sujet !

    M. le président

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    La parole est à Mme Émilie Bonnivard.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Je m’interroge sur la fréquence des réunions de la CDCI, qui serait convoquée soit tous les ans, soit tous les six ans. Cela me paraît excessif dans les deux cas. Vu les enjeux, il ne serait pas inintéressant que la CDCI se réunisse, mais une réunion annuelle ne me semble ni utile ni pertinente ; on risque de se poser des questions sans grande valeur. Ne pourrait-on pas trouver une voie intermédiaire, en réunissant la CDCI tous les trois ans ?

    M. Thibault Bazin

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    Elle a raison : il faut le faire quand c’est nécessaire !

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Quels élus peuvent agir pour régler les problèmes de la vie courante ? Ce sont les maires, ainsi que les conseils municipaux et intercommunaux. Cette proposition de loi vise à leur rendre leur liberté : elle ne doit pas prévoir qu’une commission examinera et jugera leur travail tous les ans !
    Comme je le disais, les deuxième et troisième étages de la fusée sont les plus importants.
    Madame Bonnivard, je suggère de nous en tenir au texte de l’Assemblée : une réunion de la CDCI dans les six mois suivant chaque renouvellement général des conseils municipaux. Ce n’est pas la position du Sénat. Il reviendra à la CMP de trouver la voie que vous indiquez –⁠ il faut toujours avoir des choses à négocier.
    Je vous invite à ne pas voter pour l’amendement. Ensuite, nous ferons de notre mieux en CMP.

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Je ferai la même proposition que le rapporteur.
    Il me semble important de mobiliser la CDCI sur ces sujets, car ce que nous faisons aujourd’hui, c’est donner aux communes qui n’ont pas encore transféré leurs compétences la liberté de ne pas le faire. Toutefois, la situation peut évoluer. Le préfet pourra montrer, de manière calme et apaisée, comment les objectifs de préservation et de qualité de la ressource sont atteints dans le département. Cela sensibilisera tous les acteurs.
    Quant à la fréquence des réunions de la CDCI, la CMP, qui réunit en son sein la sagesse du Sénat et celle de l’Assemblée, devrait pouvoir trouver une réponse pertinente et intelligente à cette question.

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 17.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        94
            Nombre de suffrages exprimés                92
            Majorité absolue                        47
                    Pour l’adoption                29
                    Contre                63

    (L’amendement no 17 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    L’amendement no 24 de M. le rapporteur est rédactionnel.

    (L’amendement no 24, accepté par le gouvernement, est adopté.)

    (L’article 3 bis, amendé, est adopté.)

    Article 5

    M. le président

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    Sur l’amendement n° 39, tendant à supprimer l’article 5, je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Marc Fesneau, pour soutenir l’amendement.

    M. Marc Fesneau

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    Aux termes de l’alinéa 2 de l’article 5, « lorsque le service public d’eau potable d’une commune connaît une pénurie d’eau potable pour la première fois sur une période de cinq ans, le maire peut demander à une commune voisine excédentaire en eau potable la mise à disposition d’eau potable au bénéfice de sa commune. La ressource en eau est fournie gratuitement par la commune excédentaire et la commune déficitaire finance son acheminement. »
    Nul besoin d’écrire dans la loi que la commune peut demander de l’aide ! Fort heureusement, quand une commune manque d’eau, généralement sa voisine accepte de lui en donner. Dans le cas contraire, cela lui vaudrait des articles dans la presse, tels que : « Le maire de Marchenoir –⁠ c’est ma commune – refuse de donner de l’eau à son voisin ! »
    Ce qui pose un problème, en revanche, c’est que l’article 5 ne précise pas la durée ni le montant de l’aide.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    En effet !

    M. Marc Fesneau

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    Si la solidarité doit s’exprimer, cela ne doit pas être au prix de dépenses supplémentaires –⁠ au-delà de l’acheminement, il faut aussi tenir compte du forage et du coût de l’électricité. Une journée, on ne va pas la facturer –⁠ mais qu’en sera-t-il si cela dure plusieurs semaines ou plusieurs mois ? Je ne vois pas pourquoi l’on prend une disposition qui suscitera une dépense supplémentaire pour la collectivité qui donne de l’eau.
    En outre, l’article vise la première pénurie d’eau, mais pas les autres. Pourquoi ?
    Bref, je ne comprends pas le sens de cet article, qui va à l’encontre de la libre administration des collectivités locales. Laissons les élus s’organiser entre eux. C’est ce que nous avons l’habitude de faire lorsque nous avons un problème d’eau –⁠ et quand ce n’est pas le cas, c’est le préfet qui s’en occupe.

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Très bien !

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    L’article 5 pourrait s’intituler « Don de l’eau » ou « Solidarité ».
    En l’état du droit, ce qui s’applique, c’est le plan Orsec –⁠ organisation de la réponse de sécurité civile –, qui est déclenché sous l’autorité du préfet. Le présent texte incite au volontariat : les communes vont s’entendre entre elles, étant entendu qu’une commune ne va pas demander de l’eau gratuite pendant un an, ni une autre en donner pendant un an.
    Si nous avons écrit que cela ne serait possible qu’une fois tous les cinq ans, c’est parce que cela nous a été suggéré lors de son audition par l’AMF, qui a estimé que l’idée était bonne, mais que cette possibilité ne devait pas se transformer en une prime pour ceux qui ne font pas bien leur travail, en les incitant à demander chaque été de l’aide à leurs voisins qui bénéficient d’un bon captage d’eau.
    Par conséquent, l’article prévoit que lorsqu’une difficulté se pose pour la première fois, les communes peuvent s’entendre. Je trouve plus beau qu’elle se résolve sur la base du volontariat plutôt que par le déclenchement du plan Orsec.
    Quant à l’équilibre financier, soyons francs : quels sont les frais de la commune qui offre de l’eau ? Elle paie quelques kilowatts pour la pomper, c’est tout ! Le don n’est pas colossal, il est symbolique.

    M. Nicolas Sansu

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    Cela existe déjà !

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Oui, cette pratique existe déjà et c’est bien pour cela qu’il a été suggéré au cours des auditions de poser le principe d’un don d’eau, une fois, par solidarité. La commune qui en a besoin paie le transport. Cela sert de leçon à son conseil municipal et l’incite à trouver une solution pour la suite, parce qu’il sait que cela ne pourra pas se répéter.

    M. Nicolas Sansu

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    Parfois, il n’y a pas de solution…

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Tel est le sens de cet article, et c’est pourquoi je suis contre sa suppression. Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Depuis le début, nous parlons de responsabilité et de solidarité : n’oublions jamais ces principes.
    Il existe déjà un dispositif, prévu par la loi, que le préfet peut activer : c’est le plan Orsec, qui règle les questions d’obligation de solidarité et de mobilisation des ressources. Il est plutôt bien fait, car on ne m’a jamais signalé de difficultés pendant les crises de grande sécheresse. N’ajoutons donc pas un nouveau dispositif.
    Pardonnez-moi, monsieur le rapporteur, mais j’émettrai par conséquent un avis différent du vôtre : je suis favorable à l’amendement.

    M. le président

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    La parole est à M. Marc Fesneau.

    M. Marc Fesneau

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    Quand les choses fonctionnent bien, nul besoin d’écrire un nouveau texte, d’ajouter de la loi à la loi ! Comme la ministre, je n’ai jamais entendu parler de difficultés avérées dans l’application du droit existant.
    On est en train de rigidifier le système ! Actuellement, il arrive qu’on se donne de l’eau sans même avoir besoin de se parler. Là, l’entraide vaudra pour une fois, par exemple lors d’une coupure d’eau d’une journée parce qu’on aura eu besoin de nettoyer le réservoir de stockage –⁠ et après ?
    Je ne vois pas du tout en quoi le dispositif sera opérant. Il suffit que les maires dialoguent entre eux. Cela relève de la libre administration des collectivités : inutile de l’inscrire dans la loi.

    M. le président

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    Je me demande vraiment ce qu’apporte l’article 5.

    M. Marc Fesneau

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    Voilà !

    M. Thibault Bazin

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    Vous prévoyez que le maire peut émettre la demande si la commune connaît une pénurie d’eau « pour la première fois sur une période de cinq ans » –⁠ mais cela peut arriver à plusieurs reprises au cours de la même période ! Dans ce cas, le dialogue entre communes voisines permet de trouver les moyens d’agir, gratuitement ou non ; on en discute librement entre communes, dans la liberté et la confiance. Pourquoi rigidifier les choses ? En effet, l’article 5 pourrait signifier que la commune qui voudrait faire un don d’eau en cas de deuxième pénurie en moins de cinq ans ne le pourrait plus.

    M. Marc Fesneau

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    Oui, laissons les choses en l’état !

    M. Thibault Bazin

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    Mme la ministre l’a dit : aujourd’hui, rien n’empêche une commune d’être solidaire avec sa voisine. N’alourdissons pas le dispositif, car cela pourrait se retourner contre ceux qui en auraient besoin. (M. Marc Fesneau applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard.

    M. Gabriel Amard

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    Nous voterons contre l’amendement, parce qu’il est judicieux que la représentation nationale montre la voie. Si l’Association des maires de France nous invite à prendre une telle disposition, c’est que la réalité locale est parfois moins évidente que vous ne le dites.
    Je pense à la situation des territoires d’outre-mer, en particulier à la Martinique, où les trois syndicats se tirent la bourre et ne se vendent pas d’eau ; celui du Nord, en particulier, refuse de partager ses ressources avec la régie publique de Fort-de-France.
    Il faut donc que nous puissions dire aux collectivités que si elles font le maximum pour être prêtes, dans le contexte du dérèglement climatique, des imprévus peuvent se produire et qu’il peut y avoir des pénuries d’eau.
    J’appelle aussi votre attention sur le fait que l’État et les préfets oublient qu’ils ont en la matière un pouvoir de réquisition ; en tout cas, ils ne l’exercent pas.
    Inscrire dans la loi qu’il convient de favoriser le dialogue nous permettrait de souligner que, dans un contexte où les pénuries d’eau risquent d’être de plus en plus fréquentes, le chemin à tracer est celui de la coopération.

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Comme l’a bien dit notre collègue, loin de complexifier le dispositif, nous le simplifions. Il est inutile de recourir au plan Orsec alors que les communes pourraient régler elles-mêmes le problème ! L’article leur laisse la liberté de s’organiser.
    Symboliquement, il serait important de faire figurer le principe de solidarité dans la loi. Le maire d’une commune dans le besoin pourra s’appuyer sur le présent article pour solliciter l’aide de son voisin. (M. Gabriel Amard applaudit.)
    Le nombre de communes qui connaissent des pénuries d’eau à certaines périodes de l’année est en augmentation.

    M. Frédéric Maillot

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    C’est vrai !

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Par exemple, dans les Ardennes, dont je suis l’un des élus, des communes ont rencontré des pénuries d’eau il y a deux ou trois ans –⁠ je sais que ce n’est pas l’image que l’on se fait spontanément de ce département.

    M. Thibault Bazin

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    En Meurthe-et-Moselle, aussi !

    M. Frédéric Maillot

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    Et dans les outre-mer !

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Et oui, il arrive que des communes refusent d’aider leurs voisines.

    M. Marc Fesneau

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    Ce ne sera pas une aide volontaire, alors !

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    L’article montre la voie, cher collègue. Le maire de la commune qui manque d’eau pourra le montrer à son collègue pour chercher une entente. (M. Gabriel Amard et Mme Marie Pochon applaudissent.)
    Je suis surpris de ce débat, car cette mesure respecte la liberté des communes, sans compliquer le droit. Inutile de déranger le préfet et de déclencher le plan Orsec si deux maires peuvent s’entendre dans l’intérêt de la population ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme Marie Pochon applaudit également.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 39.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        94
            Nombre de suffrages exprimés                91
            Majorité absolue                        46
                    Pour l’adoption                28
                    Contre                63

    (L’amendement no 39 n’est pas adopté.)
    (M. Gabriel Amard applaudit.)

    M. le président

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    L’amendement no 26 de M. le rapporteur est rédactionnel.
    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Sagesse.

    (L’amendement no 26 est adopté.)

    (L’article 5, amendé, est adopté.)

    Article 6

    M. le président

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    La parole est à M. Laurent Croizier.

    M. Laurent Croizier

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    Les députés du groupe Démocrates voteront pour les amendements tendant à supprimer l’article 6, parmi lesquels figure celui de notre collègue Nicole Le Peih. Je travaille depuis plusieurs mois en liaison étroite avec les élus locaux de ma circonscription sur la mise en conformité des installations d’assainissement non collectif. Ils m’ont alerté à juste titre sur le fait que cet article va cantonner les Spanc au contrôle des particuliers ayant fait l’effort de réhabiliter leur installation et tenir à l’écart des contrôles les installations anciennes, qui risquent justement de polluer gravement nos sols, nos nappes phréatiques, nos cours d’eau et nos terres agricoles.
    Je rappelle que la France compte 5 millions d’installations d’assainissement non collectif et que 80 % d’entre elles ne sont pas conformes. Ce qui importe, ce n’est pas de supprimer les contrôles, qui sont absolument nécessaires, c’est de les rendre plus efficaces. Tel est d’ailleurs le sens d’une proposition de loi sur laquelle je travaille actuellement.
    L’article 6 va à l’encontre de la protection de l’environnement. Nous voterons donc pour les amendements tendant à le supprimer et nous vous invitons à faire de même. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe Dem.)

    M. le président

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    La parole est à M. Bertrand Bouyx.

    M. Bertrand Bouyx

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    La suppression des contrôles ne va pas dans le sens de l’histoire. Je suis député du Calvados, qui compte une zone littorale. Les personnes qui ont des activités en mer, notamment les conchyliculteurs, sont victimes de la pollution des eaux, qui est liée à la vétusté d’un certain nombre d’installations d’assainissement non collectif. Plutôt que de supprimer les contrôles, il serait salutaire de faire des propositions pour améliorer la montée en gamme de ces installations. Les solutions que vous proposez n’en sont pas. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe HOR. –⁠ M. Laurent Croizier applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard.

    M. Gabriel Amard

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    Il faut absolument supprimer l’article 6. Sous prétexte que la redevance annuelle de 150 euros serait une punition pour ceux qui ne sont pas raccordés à l’assainissement collectif, vous voulez supprimer les contrôles annuels. Or il est essentiel de les maintenir, parce que même les installations qui ont été requalifiées peuvent être mal entretenues.
    Le fond de l’affaire, c’est que si 12 millions de Français, si 5 millions de foyers n’ont pas d’assainissement collectif, c’est à cause des choix que nous avons faits ; c’est parce que des autorités organisatrices ont fait des arbitrages et décidé que telle partie d’une commune ou que tel hameau ne serait pas desservi par l’assainissement collectif.
    Et les voilà confrontés, non seulement à des contrôles, mais aussi à des préconisations ! À ceux qui sont dans un bourg, dans un espace contraint, on conseille de faire une microstation d’épuration à 15 000 euros, avec une aide qui peut atteindre 25 % dans le meilleur des cas, et un reste à charge que les petits propriétaires ne peuvent pas assumer. À ceux qui ont un terrain, on propose un système de phytoépuration à 5 000 euros.
    Bref, nous disons que nous nous préoccupons de la préservation des sols, des sous-sols et des nappes phréatiques, qui forment un tout,…

    M. le président

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    Merci de conclure, cher collègue.

    M. Gabriel Amard

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    …mais certains y contribuent de manière indolore en payant une redevance d’assainissement collectif, tandis que d’autres subissent une double peine, puisqu’on leur impose des contrôles et qu’ils doivent financer seuls leurs installations. Ce qu’il faut, c’est que les Spanc soient financés de la même façon que l’assainissement collectif, par une redevance indolore. Cela étant, il ne faut pas supprimer… (Le temps de parole étant écoulé, M. le président coupe le micro de l’orateur.)

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette.

    M. Stéphane Delautrette

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    Je suis très étonné par cet article et j’aimerais revenir à l’essence de cette proposition de loi, qui devait résoudre deux problèmes : la revendication légitime d’une liberté de choix des communes quant au transfert des compétences eau et assainissement à l’intercommunalité, d’une part ; la demande formulée par les collectivités d’une plus grande stabilité, d’autre part.
    L’article 6, dont je ne vois pas très bien le lien avec l’objectif du texte, met en péril la stabilité financière des Spanc ; or tous ceux qui ont exercé un mandat local savent combien elle est fragile.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Ce n’est pas un argument !

    M. Stéphane Delautrette

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    Cet article est très dangereux, parce qu’il pourrait remettre en cause l’existence même des services publics d’assainissement non collectif, dont le rôle est essentiel. C’est pourquoi nous voterons pour les amendements tendant à le supprimer.

    M. le président

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    Sur les amendements identiques nos 8, 18, 29 et 34, je suis saisi par les groupes Rassemblement national, Ensemble pour la République, La France insoumise-Nouveau Front populaire, d’une demande de scrutin public.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Et par la commission !

    M. le président

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    Par la commission aussi, c’est noté, monsieur le rapporteur.
    Sur l’amendement no 19, je suis saisi par le groupe Écologiste et social d’une demande de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Émilie Bonnivard.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Pour ma part, je ne suis pas étonnée par cet article. Je remercie le rapporteur d’avoir soulevé la question des Spanc et de nous donner l’occasion d’en débattre.
    La question qui se pose est celle de l’efficience d’une dépense que l’on impose à nos concitoyens, dans l’intérêt général. Et la réalité, c’est que les contrôles effectués par les Spanc sont totalement inutiles et que leur intervention peut parfois s’apparenter à du racket –⁠ pardonnez-moi si le terme paraît un peu fort –, dans la mesure où elle n’entraîne aucune amélioration de l’assainissement. Leur inutilité, pour moi, peut avoir quelque chose d’exaspérant.
    Cela étant, monsieur le rapporteur, l’idée de jeter le bébé avec l’eau du bain…

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Oh non, jamais ! (Sourires.)

    Mme Émilie Bonnivard

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    …me paraît un peu radicale. Ce dont je suis persuadée, c’est qu’il faut réformer la manière dont les Spanc travaillent. Il faudrait par exemple que, lorsqu’un Spanc préconise des travaux, ces derniers aient un caractère obligatoire ; en revanche, il faut mettre fin au caractère systématique des contrôles, car c’est un problème pour nos concitoyens.
    Pour le coup, je ne suis absolument pas d’accord avec l’argument qui consiste à dire que l’on risque de mettre ces structures en difficulté. On ne va pas continuer à soumettre nos concitoyens à un prélèvement inutile dans le seul but de préserver les Spanc. Ce n’est pas de cette manière-là que l’on doit se poser la question.
    Je suis un peu partagée. L’un de nos collègues a évoqué les problèmes auxquels sont confrontés les conchyliculteurs ; des problèmes du même ordre se posent en montagne. On ne peut pas tout laisser faire quand il est question de la qualité de notre eau, qui a des effets sur notre consommation et notre agriculture.

    M. le président

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    La parole est à Mme Constance de Pélichy.

    Mme Constance de Pélichy

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    Ce que personne ne doit oublier, c’est que l’assainissement coûte cher, qu’il soit ou non collectif. C’est un enjeu sanitaire et environnemental dont nous devons tous nous saisir.
    Le contrôle des stations d’épuration non collectives doit perdurer : c’est un enjeu fondamental car, dans nombre de territoires, ce service public permet d’identifier des non-conformités. Fort heureusement, un grand nombre d’entre elles sont mineures, mais certaines aussi sont majeures et, lorsque tel est le cas, l’intervention des techniciens est essentielle. Il est vraiment important de supprimer cet article et de continuer à accompagner nos concitoyens pour améliorer l’assainissement non collectif.
    Monsieur Amard, vous ne pouvez pas dire que si des quartiers entiers sont à l’écart de l’assainissement collectif, c’est uniquement du fait de choix politiques. Ce n’est pas vrai. On n’a pas toujours la possibilité de raccorder à l’assainissement collectif certains hameaux éloignés et nombre de collectivités font comme elles peuvent. Sachez qu’il est souvent difficile de déployer des projets de raccordement à l’assainissement collectif dans des quartiers éloignés et qu’il est très compliqué d’être bien accompagné par les agences de l’eau.

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    La parole est à la défense, puisque j’ai l’impression d’avoir été un peu incompris –⁠ et je l’ai ressenti dès la discussion générale.
    Il se trouve que j’ai un peu étudié la question. Que dit le droit actuel, s’agissant du service public d’assainissement non collectif ? D’abord, que si vous construisez une maison, vous devez la construire aux normes, et que si vous achetez une maison, vous devez la mettre aux normes dans un délai d’un an. Dans ce cadre, le Spanc, en tant que support technique, est indispensable.
    Se pose ensuite une question de salubrité : plusieurs d’entre vous ont évoqué des problèmes qui se posent par exemple dans la conchyliculture ou à la montagne. Le maire a évidemment le pouvoir d’intervenir lorsqu’il y a des problèmes de salubrité et le Spanc est là pour l’aider à analyser les dysfonctionnements –⁠ on peut aller jusqu’au pénal.
    Sur le premier point, la construction ou la vente de maison, cet article n’introduit aucune obligation supplémentaire. Le droit reste exactement le même. Sur le deuxième point également, à savoir les questions de salubrité, le rôle du Spanc reste le même.
    Qu’est-ce qui changerait ? Pour l’instant, il est prévu que le Spanc contrôle toutes les installations d’assainissement individuel une fois tous les dix ans. Cela signifie que tous les logements du pays ont déjà été contrôlés et ont fait l’objet d’un rapport sur la conformité de leur fosse septique. Le législateur a décidé de ne créer une obligation que pour les maisons qui se vendent, et non pour l’ensemble d’entre elles.
    Alors que toutes les maisons ont fait l’objet d’un rapport, on continue à faire des contrôles. J’ai sous les yeux le règlement d’un Spanc, qui prévoit des contrôles dont la périodicité est comprise entre un et neuf ans. C’est conforme à la loi, qui prévoit qu’un Spanc peut contrôler une fois tous les dix ans des installations pour lesquelles il n’y a aucune obligation de faire des travaux. D’après le même règlement, pour une installation dont le volume est inférieur ou égal à 5 mètres cubes, l’intervention coûte 132 euros ; pour un volume compris entre 5 et 10 mètres cubes, le prix s’élève à 198 euros ; et, au-delà de 10 mètres cubes, à 297 euros.
    Comment justifier que, cinq ans après avoir contrôlé l’installation de quelqu’un, on lui demande 198 euros pour la contrôler à nouveau, alors qu’elle n’a pas changé ? Sachant qu’on ne va même pas l’obliger à la changer !
    La question de l’obligation des travaux est une autre question, mais je ne vois pas pourquoi on laisserait, dans le monde rural, des personnes facturer tous les trois, quatre ou cinq ans, des contrôles qui ne servent à rien parce qu’un rapport a déjà été fait ! Je considère pour ma part que cela ne peut pas se défendre –⁠ et mon devoir était de susciter ce débat. (M. Vincent Descoeur applaudit.) Au moment où l’on parle tant du pouvoir d’achat, supprimer une redevance qui est ressentie comme un impôt –⁠ et cela n’enlève rien à la qualité des techniciens – me semble une bonne chose. La pratique actuelle, qui consiste à faire des contrôles qui restent sans conséquences, ne sert à rien.
    Voilà pourquoi je suis contre ces amendements de suppression. Et la commission se joint à la demande de scrutin public qui a été formulée par plusieurs groupes : beaucoup de députés se disant attachés au monde rural, cela va être l’occasion d’en débattre et de prendre position.

    Mme Stella Dupont

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    Ah là là !

    M. le président

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    Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 8, 18, 29 et 34, tendant à supprimer l’article 6.
    La parole est à Mme Nicole Le Peih, pour soutenir l’amendement no 8.

    Mme Nicole Le Peih

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    Cet amendement tend à supprimer l’article 6, qui affaiblit gravement le contrôle des installations d’assainissement non collectif en supprimant les visites des installations anciennes.
    Un tel recul serait dangereux : faute de suivi, ces équipements risquent de se détériorer, ce qui provoquera des pollutions qui coûteront cher aux collectivités et auront des répercussions sur la qualité des eaux, notamment sur le littoral –⁠ la métropole, à elle seule, possède 5 500 kilomètres de côtes. Comment peut-on se permettre d’ignorer ce risque ?
    Cet assouplissement constituerait en outre une injustice flagrante envers les propriétaires qui auront fait l’effort de mettre aux normes leur installation, alors que les autres bénéficieront d’un assouplissement injustifié. Où est l’équité ?
    Enfin, cette disposition mettrait en péril les Spanc, dont l’existence tient en grande partie à ces contrôles. Les affaiblir, c’est fragiliser tout notre système de surveillance et de prévention. Nous ne pouvons sacrifier une politique d’assainissement rigoureuse sur l’autel de la simplification administrative, ni sur celui de prétendues économies ! Protection de l’environnement et salubrité publique relèvent de la responsabilité collective. Je vous invite à voter cet amendement.

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie Pochon, pour soutenir l’amendement no 18.

    Mme Marie Pochon

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    Les Spanc contrôlent, assurent le traitement et vérifient la conformité des installations d’assainissement non collectif de plus de 5 millions de personnes habitant des territoires ruraux. Ajouté lors de l’examen du texte en commission, l’article 6, qui prévoit la suppression pure et simple du contrôle des plus anciens de ces équipements, est dangereux à plusieurs titres : premièrement, il n’a rien à voir avec l’objet de la proposition de loi ; deuxièmement, si les installations sont régulièrement contrôlées, c’est pour s’assurer de leur conformité aux normes et de leur fonctionnement optimal ; troisièmement, la suppression de ces contrôles ou leur maintien uniquement en cas de vente immobilière, ce qui de fait les espacera, risque d’entraîner une augmentation significative des incidents. Nous appelons donc, de même que d’autres groupes, à la suppression de cet article qui nous semble dangereux du point de vue sanitaire et environnemental. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs du groupe SOC.)

    M. le président

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    L’amendement no 29 de M. Christophe Marion est défendu.
    La parole est à M. Christophe Bentz, pour soutenir l’amendement no 34.

    M. Christophe Bentz

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    La politique en matière d’assainissement non collectif mérite mieux qu’un article créé en commission par voie d’amendement et qui sème dans le débat une certaine confusion : il déstabiliserait les Spanc, affecterait mécaniquement les propriétaires modestes, soumettrait les acquéreurs à un surcroît de pression bien inutile et finalement irait à l’encontre de votre triptyque, monsieur le rapporteur, puisqu’il nuit à la liberté, à la souplesse, à la confiance, au pouvoir d’achat. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Non, il n’y aura aucune pression sur les acquéreurs, aucune obligation nouvelle, aucune dépense supplémentaire ; on n’aura aucun centime à débourser du fait de l’article. En revanche, adopter les amendements de suppression reviendrait à autoriser la facturation de millions de contrôles qui ne servent à rien !

    M. Laurent Croizier

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    Mais enfin !

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Si vous vouliez rendre les travaux obligatoires et prévoir un contrôle visant à s’assurer qu’ils ont bien été réalisés, cela ne me poserait pas de problème ; mais prévoir un état des lieux puis un contrôle payant tous les cinq à sept ans, sans qu’il y ait aucune obligation de travaux, ne me semble pas équilibré.
    Enfin, l’article ne menace absolument pas la salubrité, bien au contraire : je préfère que les techniciens des Spanc se concentrent sur les zones de montagne, de littoral, où les problèmes sont réels, plutôt que de visiter en pure perte toutes les maisons de France.
    En d’autres termes, je souhaite des Spanc plus efficaces, qui luttent contre l’insalubrité, et je ne peux moralement consentir au fait que la loi –⁠ nos prédécesseurs ne l’avaient certainement pas vu – impose aux particuliers de payer des contrôles inutiles.
    Tout le monde l’aura compris, avis défavorable.

    M. Thibault Bazin

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    C’est une question de bon sens, finalement !

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Tout d’abord, merci au rapporteur de donner l’alerte ; ensuite, on débat –⁠ c’est la raison d’être de cette chambre.
    Il se trouve que je suis Bretonne, d’une région dont le littoral a connu d’importants problèmes sanitaires affectant en particulier les conchyliculteurs, ostréiculteurs compris.

    M. Nicolas Sansu

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    C’est encore le cas !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Ceux d’entre vous, Bretons ou autres, que je vois acquiescer doivent se souvenir que lors de la période de Noël, cruciale pour la vente, des arrêtés préfectoraux interdisant la commercialisation de coquillages avaient dû être pris. Personne n’avait pensé que l’assainissement individuel pouvait influer autant sur la question sanitaire, sans parler des enjeux écologiques et environnementaux ; c’était pourtant le cas, surtout dans le Morbihan –⁠ mais aussi en montagne. Il fut alors décidé, à juste titre, que les Spanc se montreraient plus assidus, comme l’a rappelé M. le rapporteur.
    J’entends que les contrôles des installations non collectives sont parfois perçus comme désagréables, voire agressifs. Sans doute faudra-t-il demander aux préfets de réunir les représentants des structures qui gèrent les Spanc afin d’examiner comment ils opèrent et d’élaborer éventuellement des procédures plus bienveillantes, moins rigoureuses. Il faudra aussi examiner la question du financement. En tout cas, compte tenu des risques actuels, j’émets un avis favorable sur les amendements identiques.

    M. le président

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    La parole est à M. Jimmy Pahun.

    M. Jimmy Pahun

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    J’ajouterai à ce qu’a dit la ministre que des moyens considérables ont été consacrés, en particulier dans le pays de Retz –⁠ près de 50 millions d’euros, je crois –, à réorganiser l’assainissement et, surtout, raccorder aux fosses septiques collectives les fosses individuelles, sans doute à l’origine des pollutions qui ont donné lieu à ces interdictions de vente. Il serait important de poursuivre les contrôles, donc de supprimer l’article.

    M. le président

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    La parole est à M. Sébastien Humbert.

    M. Sébastien Humbert

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    Le problème est que ces contrôles se multiplient dans la ruralité, notamment dans les Vosges, où de petits propriétaires subissent une double peine : paiement d’amendes et nécessité de financer des travaux onéreux, entre 5 000 et 15 000 euros.
    De plus, obliger les acquéreurs d’une installation non conforme à la mettre aux normes dans un délai d’un an…

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    C’est faux !

    M. Thibault Bazin

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    L’article 6 ne traite pas de ce point !

    M. Sébastien Humbert

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    …n’est pas réaliste, compte tenu du manque de disponibilité des entreprises compétentes. Il serait plus judicieux de donner aux propriétaires les moyens financiers de réaliser ces travaux : s’agissant d’assainissement non collectif, les aides distribuées par les agences de l’eau sont quasi inexistantes. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Fabrice Brun.

    M. Fabrice Brun

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    Les propos du rapporteur sont empreints de bon sens, tous les contrôles requis ayant lieu lors de la mise en service de l’installation. Il y a là une question à la fois de simplification et de pouvoir d’achat, puisque, en dernier lieu, ce sont les usagers qui paient.
    Faut-il rappeler à nos collègues que les agences de l’eau ont cessé de financer l’assainissement autonome depuis que la loi de finances pour 2018 leur a imposé un plafond mordant ? (« Eh oui ! » sur quelques bancs du groupe DR.) Chaque année, 500 ou 600 millions d’euros versés par les usagers au titre de leurs factures sont transférés au budget général de l’État ; des milliards ont ainsi été soustraits aux agences en violation du principe, énoncé il y a un demi-siècle, selon lequel « l’eau paie l’eau ». Au-delà de l’article, que nous serons nombreux à soutenir, le réel enjeu consiste à remettre l’église au milieu du village. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR.–⁠ M. Christophe Bentz applaudit également.)

    Plusieurs députés du groupe LFI-NFP

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    La mairie, pas l’église !

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Je tiens à rectifier une inexactitude de notre collègue du Rassemblement national. Je le répète, l’acquéreur ne se verra imposer aucune obligation supplémentaire, il n’aura pas à verser un centime de plus. Si vous supprimez cet article introduit en commission des lois, vous continuez d’autoriser dans toutes les zones rurales des contrôles quotidiens, aux frais du contribuable, totalement dénués d’effet. (Exclamations sur divers bancs.) Au contraire, en rejetant les amendements de suppression, vous mettriez un terme au paiement de redevances inutiles. À chacun de se prononcer !

    M. le président

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 8, 18, 29 et 34.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        105
            Nombre de suffrages exprimés                101
            Majorité absolue                        51
                    Pour l’adoption                92
                    Contre                9

    (Les amendements identiques nos 8, 18, 29 et 34 sont adoptés ; en conséquence, l’article 6 est supprimé et les amendements nos 19 et 25 tombent.)
    (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS. –⁠ M. Laurent Croizier applaudit également.)

    Après l’article 6

    M. le président

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    Je suis saisi de deux amendements portant article additionnel après l’article 6.
    Sur l’amendement no 15, je suis saisi par la commission et par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
    Sur l’ensemble de la proposition de loi, je suis saisi par les groupes La France insoumise-Nouveau Front populaire et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires d’une demande de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Gabriel Amard, pour soutenir l’amendement no 14.

    M. Gabriel Amard

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    Cet amendement d’appel consiste en une demande de rapport : il s’agit de rappeler la coexistence de différents modes de gestion de l’eau potable et de l’assainissement. Je ne reviendrai pas sur les raisons, liées à l’histoire du pays, pour lesquelles 75 % à 80 % des services compétents sont gérés par des régies publiques, tandis que 6 000 font l’objet d’une délégation de service public à un opérateur privé. Reste qu’une régie publique ne paie ni impôts locaux ni impôt sur les sociétés, intègre ses excédents en fin d’année aux recettes de l’année suivante, ne consacre à la bonne marche du service que des moyens humains. Sans dogmatisme, il serait temps de mettre les choses à plat et de nous demander quel mode de gestion se révèle le plus performant, le plus sobre, sachant que toute dépense est financée par les factures d’usagers pour qui les fins de mois commencent de plus en plus tôt.
    Cela ayant été dit, nous retirons l’amendement. (M. Thomas Portes applaudit.)

    (L’amendement no 14 est retiré.)

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard, pour soutenir l’amendement no 15.

    M. Gabriel Amard

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    Un 22 mars, il n’y a pas si longtemps, M. le président de la République invitait les collectivités, organisatrices du service de l’eau et de l’assainissement, à adopter une tarification progressive et différenciée. Force est de constater qu’il ne s’est rien passé depuis. À l’occasion de l’examen de ce texte, lequel vise justement à davantage de souplesse, nous demandons un rapport sur la mise en place de cette tarification, qui rendrait les mésusages de l’eau plus onéreux et assurerait le droit à l’eau dans un contexte où, du fait des sécheresses et des inondations répétées, la ressource se raréfie. Or on ne peut survivre trois jours sans eau ! La question de la tarification différenciée selon les usages, autorisée par notre droit et par les arrêts du Conseil d’État, se pose donc avec une particulière acuité. Puisque le chef de l’État incite à une mesure qui devrait faire l’unanimité dans l’hémicycle, adoptons cette demande de rapport ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    J’admets parfaitement la nécessité d’un débat sur la tarification différenciée de l’eau. Néanmoins, j’ai eu l’honneur d’être président de la commission des lois il y a quelques années et je n’ai pas changé d’avis entretemps : je ne suis pas favorable à demander, de façon répétée, des rapports au gouvernement, que très peu d’entre nous lisent et qui font perdre du temps aux services de l’État.

    M. Gabriel Amard

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    Donc on ne fait rien ?

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Si vous voulez débattre de cette question, faisons-le plutôt à l’occasion de l’examen d’une proposition de loi transpartisane, comme celle de ce matin, qui nous a permis d’aborder de nombreux sujets.
    Avis défavorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Nous déployons déjà une politique sociale de l’eau envers les publics fragiles, en particulier les personnes sans domicile fixe, les gens du voyage, ceux qui vivent dans des campements ou des squats, ou encore les personnes issues de communautés non sédentaires et les populations ultramarines. Des mesures sont donc appliquées.
    Pour répondre à votre question, monsieur le député Amard,…

    M. Vincent Descoeur

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    Il n’écoute pas !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Monsieur le député, je m’efforce de répondre à votre question qui porte sur un sujet intéressant !

    M. Thibault Bazin

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    Elle est très bien, humainement, cette ministre ! Cela change !

    M. Gabriel Amard

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    Excusez-moi, madame la ministre. Je vous écoute.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Il existe aussi des aides à l’investissement, puisque des dotations, telles que la DETR, la dotation d’équipement des territoires ruraux, ou la DSIL, la dotation de soutien à l’investissement local, permettent de mettre en place plusieurs dispositifs. Il suffit par conséquent de vérifier comment les dispositions existantes sont déployées.
    D’autre part, je pense, comme M. le rapporteur, que les commissions ou les délégations parlementaires peuvent se saisir de tous les sujets. C’est pourquoi, au lieu de demander un rapport au gouvernement sur le déploiement par ses soins d’une tarification différenciée –⁠ d’autant que vous semblez mettre en doute sa volonté de le faire –, il serait préférable que vous vous saisissiez de ce sujet.
    Avis défavorable.

    M. le président

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    La parole est à Mme Émilie Bonnivard.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Dans la discussion générale, je vous interrogeais sur les agences de l’eau et soulevais la question du financement. Nous ne pouvons pas conclure ce débat sans l’aborder. La proposition de loi permet aux communes de conserver les compétences eau et assainissement, alors qu’elles ont devant elles un mur d’investissements et qu’elles ne disposent pas de moyens pour les financer. Il faut impérativement envoyer un message très clair aux agences de l’eau –⁠ je ne sais pas si c’est la volonté du gouvernement : elles ne pourront plus tenir le discours selon lequel les subventions ne seront accordées qu’aux communes qui auront transféré leurs compétences.

    M. Thibault Bazin

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    C’est très important !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Dès lors que la proposition de loi aura été adoptée, ce ne sera plus possible. Par conséquent, quel message le gouvernement enverra-t-il aux agences de l’eau ?
    Je partage le point de vue de mon collègue Fabrice Brun : auparavant, les agences de l’eau étaient les premiers partenaires pour les travaux réalisés en matière d’assainissement et de réseaux. C’était fondamental.

    M. Thibault Bazin

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    Eh oui !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Les communes n’ont pu réaliser l’assainissement collectif que parce que les subventions accordées par les agences de l’eau étaient élevées. Or c’est fini.

    M. Thibault Bazin

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    Il y a longtemps !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Cela met les communes et nos territoires dans des situations très difficiles. La question du plafond mordant est certes compliquée, mais j’aimerais savoir quel message sera envoyé aux agences de l’eau s’agissant des priorités de financement dans leur politique –⁠ d’autant qu’elles n’appliquent pas toutes la même politique. Compte tenu des investissements nécessaires, la question des subventions accordées aux communes et aux intercommunalités en matière d’eau et d’assainissement doit redevenir prioritaire. Je connais des communes qui ont monté des dossiers de financement complexes, et à qui l’on a donné une réponse positive avant de se rétracter : cela crée chez les élus une frustration et une colère que je partage totalement. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe DR.)

    M. le président

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    Je mets aux voix l’amendement no 15.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        109
            Nombre de suffrages exprimés                107
            Majorité absolue                        54
                    Pour l’adoption                36
                    Contre                71

    (L’amendement no 15 n’est pas adopté.)

    M. le président

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    Nous avons achevé l’examen des articles de la proposition de loi.

    Explications de vote

    M. le président

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    Nous en venons aux explications de vote. J’invite les orateurs à respecter un format de deux minutes, afin que nous puissions avant la levée procéder au vote, voire commencer l’examen du texte suivant.
    La parole est à M. Fabrice Brun.

    M. Fabrice Brun (DR)

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    Enfin ! Nous nous apprêtons enfin à adopter l’assouplissement du transfert des compétences eau et assainissement. Notre vote doit être perçu comme une marque de confiance envers les maires et les élus locaux et comme la garantie que ce bien précieux qu’est l’eau sera géré au plus près des besoins du terrain, en fonction des bassins hydrographiques et des bassins versants.
    Nous avons le sentiment du devoir accompli puisque cette liberté retrouvée des communes et le retour au caractère facultatif du transfert des compétences aux communautés de communes étaient l’objet de la première proposition de loi que je défendais, en 2017, sur ces bancs –⁠ j’étais à votre place, monsieur le rapporteur –, au nom du groupe Les Républicains.

    M. Thibault Bazin

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    C’est vrai !

    M. Vincent Descoeur

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    Je m’en souviens !

    M. Fabrice Brun

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    C’est la preuve qu’il ne faut jamais rien lâcher.
    Permettez-moi cependant de saisir l’occasion pour redire, dans le prolongement des propos de ma collègue Émilie Bonnivard, qu’il faut tordre le bras aux agences de l’eau afin qu’elles accompagnent toutes les communes, y compris celles qui sont isolées. En effet, le cadre législatif évolue et l’accompagnement des agences de l’eau, qui devront se conformer à la loi, doit suivre.
    Dans la ruralité, les investissements dans les réseaux d’eau et d’assainissement coûtent une blinde en raison de la faible densité de la population, de l’étendue des réseaux, de la dispersion des hameaux et de l’habitat, des particularités géographiques –⁠ pente, pierrosité –, etc.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Exactement !

    M. Fabrice Brun

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    Le groupe Droite républicaine votera donc en faveur de la proposition de loi, tout en rappelant la nécessité que les agences de l’eau accompagnent les investissements dans toutes les intercommunalités, dans tous les syndicats des eaux et dans toutes les communes, y compris celles dites isolées. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    M. Thibault Bazin

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    Très important !

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Claude Raux.

    M. Jean-Claude Raux (EcoS)

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    Nous allons enfin en finir avec une disposition de la loi Notre qui avait fait couler beaucoup d’encre et de salive. Cette perspective sera sans doute bien accueillie par les élus locaux, notamment dans les communes rurales, qui profiteront d’une avancée législative.
    Au-delà de cette dimension, il nous faut également prendre la mesure des enjeux. Nous ne sommes plus dans une trajectoire linéaire sur le plan de la qualité ou de la quantité de la ressource. Mme la ministre, comme d’autres ce matin, a prononcé le mot de responsabilité ; sur le plan collectif, elle est immense et elle pèsera de manière de plus en plus pressante sur les épaules des maires et des présidents et présidentes d’intercommunalités. Pour l’instant, les mesures prises par l’État sont loin, très loin d’être à la hauteur des préconisations du rapport interministériel visant à préserver la ressource en eau ; le plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc) souligne notre vulnérabilité accrue. Ma collègue Bonnivard a rappelé le fameux mur d’investissements : nous sommes loin d’en être à la pose de la première pierre !
    Le groupe Écologiste et social votera en faveur de la proposition de loi. Néanmoins, nous appelons à nous emparer de la question de la gestion de l’eau, non pas uniquement en tant que compétence mais comme une urgence absolue. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)

    M. le président

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    La parole est à M. Éric Martineau.

    M. Éric Martineau (Dem)

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    Nous saluons les évolutions, en séance, du texte de la proposition de loi, évolutions qui doivent rester lisibles. Certes, des difficultés persistent et nous avons eu des désaccords. Néanmoins, nous avons été constructifs. Grâce à ce texte, nous laissons des libertés, en maintenant la possibilité de créer des syndicats infracommunautaires, même si nous souhaitons alléger et simplifier le millefeuille administratif.
    Oui, nous avons confiance en nos élus locaux –⁠ d’ailleurs, nombre d’entre nous le sont encore. Le plus important est de ne pas revenir en arrière. C’est pourquoi, par respect pour les communes qui sont à l’origine de ces avancées, nous tenons à souligner que l’intercommunalité est, à nos yeux, l’échelon le plus pertinent pour gérer les compétences eau et assainissement.
    Pour ces raisons, le groupe Démocrates votera en faveur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe EPR. –⁠ M. Olivier Marleix applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback.

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback (HOR)

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    Comme je l’ai annoncé lors de la discussion générale, le groupe Horizons & indépendants est favorable à la proposition de loi, pour la bonne raison que cela fait des années que nous en parlons et qu’il y a déjà eu de nombreux rapports d’information et études sur ce thème. D’ailleurs, dans le cadre des travaux de la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation, j’avais publié, avec l’ancienne députée Catherine Couturier (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP), un rapport sur l’exercice des compétences relatives à l’eau et à l’assainissement par les communes et leurs groupements.
    Par conséquent, je me réjouis de l’avancement de ce dossier. Je ressens néanmoins une certaine tristesse à l’idée que nos concitoyens ne perçoivent pas tous les travaux réalisés et notre bonne volonté en la matière. Au fond, c’est si simple d’ouvrir le robinet !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    C’est vrai !

    Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback

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    Il faudrait réfléchir à la manière de mieux sensibiliser les usagers, eu égard aux nombreux investissements qui devront être faits dans les années à venir.
    En conclusion, le groupe Horizons & indépendants votera contre… pardon, pour la proposition de loi. (« Ah ! » sur divers bancs.) Désolée, monsieur le rapporteur, j’avais toujours en tête l’article 6 ! (Rires. –⁠ M. François-Xavier Ceccoli applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Constance de Pélichy.

    Mme Constance de Pélichy (LIOT)

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    Nous sommes tous très attachés à la décentralisation et au principe de libre administration des collectivités. Quand les choses fonctionnent, laissons faire les élus ! Laissons-les apprécier si les compétences eau et assainissement sont mieux exercées à l’échelle communale ou intercommunale. Les réalités territoriales, géographiques, politiques ou environnementales sont différentes d’un territoire à l’autre. Si travailler de manière uniforme sur l’ensemble du territoire peut sembler efficace en théorie, ce serait oublier la grande diversité de la France.
    Que propose ce texte, en définitive ? Il permet de redonner le pouvoir de décision aux élus locaux et de sortir d’une impasse qui n’a que trop duré. La proposition de loi offre avant tout une solution d’équilibre : elle rend optionnel le transfert des compétences eau et assainissement des communes, afin de garantir une liberté pleine et entière de choix. Dans le même temps, elle évite un retour en arrière et une restitution des compétences pour les communes qui ont déjà entériné le transfert. Il s’agit d’une garantie nécessaire, qui évitera de déstabiliser les territoires qui ont déjà effectué celui-ci.
    La proposition de loi constitue une porte de sortie équilibrée d’une situation de blocage qui dure depuis plus de dix ans. C’est pourquoi le groupe LIOT votera en sa faveur et espère qu’elle sera adoptée à l’unanimité. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT. –⁠ MM. Jean-Paul Mattei et Olivier Marleix applaudissent également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Nicolas Sansu.

    M. Nicolas Sansu (GDR)

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    L’eau n’est pas un bien comme un autre : il s’agit d’un bien public essentiel et mon collègue Yannick Monnet a rappelé combien certains territoires et, par conséquent, leurs populations souffrent de problèmes d’accès à l’eau –⁠ en particulier dans les pays dits d’outre-mer : Guadeloupe, Guyane, Mayotte et autres. Or cette question ne sera pas réglée par le texte que nous examinons aujourd’hui ; il faut un investissement massif de l’État pour assurer ce service essentiel de l’accès à l’eau, en y affectant en priorité –⁠ des collègues l’ont souligné – les ressources qui proviennent des usagers, notamment celles des agences de l’eau.
    Ce texte a au moins le mérite de ne pas s’entêter sur un dispositif de la loi Notre qui était inopportun, parce que déconnecté des réalités. En effet, si le travail en commun des élus et des communes est nécessaire, il doit avant tout être cohérent. Permettez-moi de donner l’exemple de mon territoire, dans lequel l’intercommunalité a obtenu les compétences eau et assainissement, avec cependant quelques incongruités : il y a deux bassins versants au sein de l’EPCI et l’usine d’adduction d’eau potable principale sert des syndicats d’eau situés en dehors de l’EPCI. Voilà la réalité ! Oui, il faut améliorer les interconnexions d’eau potable ; oui, il faut régler les problèmes d’assainissement et défendre l’environnement et la qualité de nos eaux. Néanmoins, je suis persuadé que l’intelligence des élus locaux aurait dû être respectée il y a dix ans, afin de s’appuyer sur des réalités hydrographiques plutôt qu’administratives.

    M. Jean-Claude Raux

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    En effet !

    M. Nicolas Sansu

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    J’ajoute que la bonne qualité des eaux et le renouvellement des réseaux nécessiteront des investissements massifs –⁠ certains ont évoqué un mur d’investissements –, qui ne peuvent pas peser uniquement sur l’usager. Cette politique publique doit faire l’objet d’un vrai plan d’investissement de la part de l’État, avec des choix de gestion qui ne servent pas les actionnaires de sociétés privées à vide.
    Nonobstant ces remarques, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine soutiendra cette proposition de loi qui redonne de la confiance aux élus locaux et aux communes. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR, ainsi que sur quelques bancs du groupe DR. –⁠ M. Jean-Paul Mattei applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Christophe Bentz.

    M. Christophe Bentz (RN)

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    Depuis dix ans, les maires et les conseillers municipaux sont peu à peu dépossédés de leur pouvoir d’action, alors même qu’ils sont légitimes, au nom de la démocratie, et efficaces, en raison de leur proximité. Ils mettent tout leur cœur et toute leur énergie au service de leur commune et du bien commun.
    Cette proposition de loi est très attendue par les maires, en particulier ruraux, qui sont légitimement inquiets du caractère obligatoire du transfert des compétences eau et assainissement en 2026 vers un échelon qui n’est ni pertinent ni adapté. Elle est d’autant plus bienvenue qu’elle remet partiellement en cause la loi Notre de 2015. Cette loi, voulue par François Hollande, a mis en échec le fonctionnement des collectivités –⁠ ce texte en est la preuve : il témoigne de la nécessité de remettre de la subsidiarité, de défendre les collectivités locales de proximité, de faire confiance aux élus municipaux et de leur redonner des compétences et les moyens de les exercer.
    Il y a deux ans, mon collègue Nicolas Meizonnet et moi-même avions déposé au nom du groupe Rassemblement national une proposition de loi proche de celle-ci, quoique mieux-disante. Afin d’offrir davantage de souplesse et d’autonomie aux communes, nous proposions de leur laisser la liberté de transférer ou non une nouvelle compétence vers les EPCI et de rendre le transfert de compétence réversible pour les communes l’ayant déjà opéré.
    Les communes disposent d’une ingénierie locale quasi bénévole, la gestion de terrain étant souvent assurée par les élus locaux eux-mêmes. Ces derniers connaissent mieux que personne –⁠ en tout cas mieux que les EPCI – leur territoire et leur réseau d’eau. La loi Notre est un texte parisien et bureaucratique, symptomatique de la déconnexion de ses auteurs des réalités de terrain –⁠ des technocrates ont plaqué des problématiques urbaines sur les zones rurales, sans tenir compte des spécificités territoriales. Partout en France, des élus locaux engagés pour leur commune sont découragés par des lois déracinées. Je veux leur rendre hommage et les remercier pour leur travail si précieux et si indispensable au service des Français et des territoires.
    Enfin, la loi Notre est une loi non de décentralisation mais de recentralisation. Elle tend à supprimer les échelons de proximité au bénéfice d’un système lointain et déconnecté des réalités, articulé autour des EPCI, des eurorégions et du fédéralisme européen.
    Voter pour cette proposition de loi, c’est réaffirmer qu’il n’y a qu’un seul modèle d’organisation territoriale qui vaille : les trois seuls échelons de l’efficacité politique concrète au service des Français sont la commune, le département et la nation. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Nicole Le Peih.

    Mme Nicole Le Peih (EPR)

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    Avec responsabilité et dans un souci de pragmatisme, le groupe Ensemble pour la République votera pour la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem. –⁠ Mmes Nadège Abomangoli et Christine Pirès Beaune applaudissent également.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Et en Européen !

    M. le président

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    La parole est à M. Gabriel Amard.

    M. Gabriel Amard (LFI-NFP)

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    Le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire votera pour ce texte. Nous nous félicitons de donner enfin –⁠ cela aura pris dix ans – de la souplesse aux communes et de réaffirmer que le bloc communal est compétent et capable de gérer plus sobrement les problèmes relatifs à la qualité et à la quantité de l’eau ainsi qu’à la qualité de l’assainissement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Nous avons également abordé au cours du débat le rôle des agences de l’eau, qui sont de formidables outils de planification. Nous devons leur donner des moyens grâce à des redevances nouvelles, notamment sur les usages professionnels de l’eau. Alors que 90 % des pollutions émergentes proviennent de l’activité économique, ce sont les ménages qui prennent en charge 70 % du coût de la dépollution du petit cycle de l’eau. Voilà un beau chantier à venir dans le prolongement de la proposition de loi.

    M. Jean-François Coulomme

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    C’est vrai !

    M. Gabriel Amard

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    Enfin, nous avons évoqué les Spanc. Il était temps : 12 millions de nos concitoyens sont concernés ! Pas moins de 5 millions de foyers doivent se débrouiller eux-mêmes pour financer des microépurations. Ils sont régulièrement punis à coups de contrôles facturés 150 euros, contrôles qui ne débouchent sur rien parce que les ménages concernés n’ont pas les moyens de faire face au reste à charge. Voilà un beau chantier transpartisan en perspective (Mêmes mouvements) : proposer un texte qui permette le financement, au même titre que pour l’assainissement collectif, de toutes les microépurations nécessaires pour l’assainissement individuel.
    Nous nous réjouissons des avancées permises grâce au travail transpartisan et nous voterons pour la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    La parole est à M. Stéphane Delautrette.

    M. Stéphane Delautrette (SOC)

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    Les députés du groupe socialiste voteront dans leur très grande majorité pour le texte.
    Nous avions à cœur d’affirmer la liberté de choix des communes en leur redonnant la possibilité de transférer ou non les compétences eau et assainissement et de déterminer elles-mêmes l’échelle pertinente, en rendant possible le transfert à une autre échelle que l’intercommunalité, afin de tenir compte des bassins versants. Cet objectif a été atteint.
    Nous souhaitions également lever des irritants : depuis quelques années, communes et communautés de communes sont trop souvent opposées. Le texte remet de la fluidité dans la relation entre les communes et les intercommunalités.
    Enfin, la proposition de loi répond à l’attente de stabilité souvent exprimée par les élus. Afin de respecter le travail effectué par les collectivités ayant déjà transféré les compétences, il nous importait que l’on ne puisse pas revenir en arrière.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Très bien !

    Vote sur l’ensemble

    M. le président

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    Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        116
            Nombre de suffrages exprimés                116
            Majorité absolue                        59
                    Pour l’adoption                113
                    Contre                3

    (La proposition de loi est adoptée.)

    M. le président

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Jean-Luc Warsmann, rapporteur

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    Je remercie tous les groupes pour le travail effectué en commission et en séance publique. Ce texte représente un progrès. Son adoption à la quasi-unanimité envoie un beau signal aux élus et aux territoires ruraux. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et LIOT. –⁠ M. Mickaël Cosson applaudit également)

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée.

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    D’abord, je vous remercie pour la qualité des débats et pour la manière très constructive dont nous avons travaillé sur ce texte depuis son dépôt au Sénat, avec le soutien du gouvernement. Je remercie en particulier le rapporteur et la commission des lois.
    Je m’engage à ce que la CMP soit convoquée très rapidement…

    M. Fabrice Brun

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    Merci, madame la ministre !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    …et à ce que le texte soit promulgué au plus vite –⁠ nous n’attendrons pas dix ans ! (Sourires.)
    Ensuite, j’ai écouté attentivement vos propos sur les agences de l’eau. Cela n’était pas l’objet du texte, mais je relaierai vos questions auprès de ma collègue Agnès Pannier-Runacher.

    M. Fabrice Brun

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    C’est là que les choses se gâtent !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Sachez que je suis très sensible au fait que les agences de l’eau accompagnent les collectivités qui exercent les compétences eau et assainissement –⁠ y compris les petites communes.
    Enfin, nous devons tirer les leçons des ajustements que nous avons opérés par rapport à la loi adoptée il y a dix ans. La loi Notre a encouragé le développement de l’intercommunalité. Je suis pour ma part favorable à la coopération –⁠ elle a permis à des petites communes rurales de disposer de services.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Tout à fait !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Cependant, cette loi a construit pour la France un jardin à la française monochrome, alors que celle-ci ressemble davantage à un jardin à l’anglaise –⁠ vous n’avez cessé de le répéter. Nous devons prendre en considération la différenciation et la diversité des territoires.

    M. Vincent Descoeur

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    Très juste !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Arrêtez d’adopter des dispositions uniformes. L’égalité n’est pas l’uniformité. (M. Gabriel Amard applaudit.)
    Souvenons-nous de ce que vous avez dit : faisons confiance aux élus locaux.

    M. Vincent Descoeur

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    Eh oui !

    Mme Françoise Gatel, ministre déléguée

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    Ils sont non seulement libres, mais aussi responsables. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. –⁠ Mme Valérie Rossi et M. Christophe Bex applaudissent également.)

    Suspension et reprise de la séance

    M. le président

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à douze heures quarante, est reprise à douze heures quarante-cinq.)

    M. le président

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    La séance est reprise.

    2. Lutte contre les fermetures abusives de comptes bancaires

    Discussion d’une proposition de loi adoptée par le Sénat

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi visant à lutter contre les fermetures abusives de comptes bancaires (nos 321, 1025).

    Présentation

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    La proposition de loi de M. le sénateur Philippe Folliot que vous examinez aujourd’hui vise à lutter contre les fermetures abusives de comptes bancaires. Elle obligeait initialement les banques à motiver sur demande expresse du client toute décision de résiliation unilatérale d’un compte de dépôt.
    La portée de ce texte a été, contre l’avis du gouvernement précédent, significativement étendue par le Sénat. Dans la version transmise à l’Assemblée nationale, il prévoyait en effet l’obligation de motiver toute résiliation de comptes de dépôt lorsque le client en fait la demande, sauf si la divulgation du motif contrevenait aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l’ordre public.
    À cette obligation s’est ajoutée l’allongement de deux à quatre mois du délai de préavis de résiliation pour les comptes détenus par un Français résidant hors de France et, surtout, l’interdiction de toute résiliation de convention de compte de dépôt motivée par l’absence de rentabilité de ce dernier, le refus par le client d’accepter une modification de la convention ou des montants de retraits jugés excessifs.
    Les travaux de la commission des finances ont davantage encore renforcé ces obligations. Si l’allongement du délai de préavis pour les Français résidant à l’étranger a été supprimé, l’obligation de motivation a été systématisée à l’ensemble des clôtures, et non plus aux seuls cas où le client en ferait la demande.
    En outre, la liste des motifs d’interdiction de résiliation des comptes a été allongée, pour inclure la qualité d’élu de la République.
    Enfin, la proposition de loi prévoit désormais que les rapports des médiateurs bancaires fassent mention de l’ensemble des litiges relatifs aux résiliations de convention de compte dont ils ont eu à connaître et des motifs de résiliation unilatérale invoqués, et que le gouverneur de la Banque de France établisse chaque année un rapport sur les motifs de ces résiliations.
    Le gouvernement partage la volonté qui est la vôtre de protéger les droits des consommateurs dans la relation qui les lie aux banques. Les services bancaires constituent un élément essentiel de la vie courante et il est très important que les Français y aient accès dans les meilleures conditions. Néanmoins, cette proposition de loi, établie sans analyse de fond préalable et sans diagnostic objectif partagé, comporte des dispositifs complexes et difficiles à appliquer, pose de sérieuses questions de proportionnalité et de constitutionnalité et pourrait entraîner, si elle était adoptée, des effets contre-productifs.
    En premier lieu, plutôt que de faciliter l’accès aux services bancaires, le texte risque d’accroître l’exclusion financière de certaines portions de la population. Si vous interdisez à une banque de pouvoir fermer un compte, elle deviendra mécaniquement plus exigeante à l’ouverture d’un compte classique, excluant de ce fait un nombre croissant de personnes des services bancaires classiques. Ces personnes pourront certes bénéficier du droit au compte, dispositif exceptionnel et de dernier recours, mais elles n’auront alors accès qu’à une offre de services très basiques. En définitive, elles verront leurs conditions de bancarisation fortement dégradées, ce qui –⁠ je pense – n’est pas l’objectif de cette proposition de loi et va à l’encontre de tous les efforts déployés ces dernières années.
    En effet, comme vous le savez, il existe dans notre droit plusieurs dispositifs exceptionnels et efficaces pour garantir l’accès aux services bancaires, notamment le droit au compte. Ce droit vise à garantir l’accès aux services bancaires de base aux personnes ne parvenant pas à se bancariser dans le secteur concurrentiel. Le recours à ce dispositif a significativement diminué ces dernières années, passant de près de 69 000 comptes ouverts dans ce cadre en 2015 à moins de 30 000 en 2024. Si nous ne disposons malheureusement pas de données relatives aux résiliations unilatérales de conventions de compte, nous pouvons néanmoins déduire de la diminution du recours au droit au compte que la multiplication des offres bancaires, au sein d’un paysage de plus en plus concurrentiel, a permis de sensiblement réduire la part des Français ne parvenant pas à se bancariser.
    Le développement de l’offre bancaire grâce aux néobanques contribue également à faciliter la bancarisation de nos concitoyens. Or la proposition de loi risque de conduire les banques à refuser d’ouvrir des comptes à certaines catégories de population, par crainte de ne pouvoir ensuite les résilier.
    Un tel dispositif d’interdiction de résiliation existe bien, à l’article L. 312-1 du code monétaire et financier, dans le cadre du droit au compte. Il est essentiel de garder à l’esprit que cette interdiction s’insère dans un tout autre contexte, qui est celui d’un service de dernier recours, dans le cadre duquel les banques répondent à des obligations légales strictes. Dans ce cadre, la banque désignée n’est pas libre de refuser l’ouverture du compte et, surtout, la résiliation du compte entraînerait de fait une impossibilité totale pour le client de se bancariser. Le périmètre de la proposition de loi que vous examinez aujourd’hui est, lui, tout autre et la transposition de ces interdictions aux relations contractuelles de droit commun entre les banques et leurs clients aurait des conséquences particulièrement négatives pour ces derniers.
    La deuxième difficulté réside dans le fait que ce texte, bien que ce ne soit pas son objectif, porte atteinte à notre politique de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme. Cette réserve n’est pas neutre, puisqu’il s’agit là d’un objectif de politique publique absolument majeur, auquel nous sommes tous attachés, quelles que soient nos appartenances politiques ou nos fonctions. Le financement du terrorisme forme bien évidemment le socle même de tout attentat. Le blanchiment de capitaux constitue quant à lui un rouage essentiel de la criminalité, dans toute sa diversité. Il est la condition de sa profitabilité et lutter contre ce phénomène revient à lutter contre la rentabilité de la criminalité en général.
    Vous le savez particulièrement bien, puisque sera discutée dans cette assemblée, à partir de la semaine prochaine, la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic, qui consacre un titre entier à la lutte contre le blanchiment du produit de ces infractions. Parmi ses dispositions figurent de nombreuses mesures allant dans ce sens, notamment le renforcement des pouvoirs d’investigation en matière de renseignement financier, de nouveaux outils en matière de lutte contre le blanchiment par l’intermédiaire de sociétés écrans, ou encore le renforcement de la prévention du blanchiment dans certains secteurs particulièrement exposés.
    La présente proposition de loi, dans sa rédaction actuelle, va à rebours de l’objectif que visent ces mesures. En effet, comme vous le savez, les banques sont autorisées à clôturer un compte après avoir fait une déclaration de soupçon au renseignement financier national, mais, pour préserver l’efficacité de la lutte contre le blanchiment, la loi interdit aux banques de porter à la connaissance du propriétaire des sommes ou de l’auteur des opérations suspectes l’existence de cette déclaration. Cette confidentialité est la pierre angulaire de l’efficacité de notre renseignement financier et nous ne pouvons y toucher qu’avec une très grande prudence. Elle permet de préserver non seulement la confidentialité des enquêtes, mais également l’intégrité des personnels de l’établissement ayant effectué la déclaration.
    Deux dispositifs de la proposition de loi viennent porter une atteinte significative à cet impératif. Le premier concerne l’obligation de motivation par les banques de toute résiliation de convention de compte, sauf lorsque cette motivation contrevient aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l’ordre public. La commission des finances a systématisé cette procédure, qui était auparavant cantonnée au seul cas dans lesquels le client en fait la demande.
    Je veux souligner le caractère très problématique de cette disposition. Le fait que les banques ne fournissent pas de motivation lorsque cette dernière contreviendrait aux objectifs de sécurité nationale ou de maintien de l’ordre public ne suffit pas à préserver la confidentialité du renseignement financier et du travail des forces de l’ordre. En effet, face au silence de la banque quant à la motivation de la clôture, l’individu concerné pourra aisément en déduire que la fermeture était motivée par des impératifs de sécurité nationale.
    Si un tel dispositif existe dans le cadre du droit au compte, j’appelle votre attention sur le fait que la situation est alors tout autre : par construction, le client ne dispose pas d’autres comptes avec lesquels il est susceptible de blanchir des fonds ou sur lesquels il pourrait transférer les sommes en cause. Dans le cas qui nous concerne, les conséquences d’une telle divulgation seraient bien plus problématiques. Le fraudeur serait non seulement en mesure de transférer ses fonds vers d’autres banques mais, plus généralement, de prendre des dispositions pour dissimuler ses activités sur d’autres comptes et échapper à toute investigation en cours, limitant ainsi considérablement nos moyens d’action.
    Du reste, les ordres de grandeur ne sont pas du tout les mêmes entre le droit au compte et le schéma bancaire classique. Un peu moins de 30 000 comptes ont été ouverts en 2024 au titre du droit au compte, tandis qu’il existe environ 80 millions de comptes bancaires classiques –⁠ je vous invite à calculer le ratio. C’est donc un volume bien plus important de suspects qui seraient susceptibles d’être avertis dans ce cas.
    Le second dispositif portant atteinte à l’objectif de lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme est l’interdiction de clôturer un compte au motif de montants de retraits d’espèces jugés trop importants par l’établissement de crédit. Comme vous le savez, les espèces continuent de constituer un vecteur majeur de blanchiment de capitaux. À cet égard, les retraits massifs sont un indicateur essentiel d’une activité potentiellement frauduleuse, susceptible de motiver la transmission d’une déclaration au renseignement financier. Une telle interdiction contraindrait les établissements de crédit à maintenir en fonctionnement un compte utilisé uniquement à des fins de blanchiment de capitaux par le biais d’espèces.
    Enfin, le dernier obstacle est que ce texte remet en cause une liberté fondamentale, qui est le choix du cocontractant, consacré dans notre code civil, ainsi que la liberté d’entreprendre, qui a valeur constitutionnelle. De même qu’un client peut choisir librement de quitter sa banque sans devoir en exposer les motifs –⁠ et je pense que nous sommes favorables à lui conserver ce droit –, le droit reconnaît à la banque cette même possibilité. L’introduction d’interdictions fermes de résiliation pour certains motifs, dont la plupart présentent des contours flous et difficiles à appréhender, nous semble, à cet égard, poser de très forts risques d’inconstitutionnalité. Par exemple, l’absence de rentabilité d’une relation bancaire individuelle avec un particulier est très difficile, voire impossible à caractériser.
    Les fortes réserves que je viens de vous exposer auraient pu conduire le gouvernement à déposer trois amendements de suppression, relatifs à chacun des dispositifs porteurs de risques au sein de la proposition de loi. Pourtant, le gouvernement n’a pas voulu faire preuve de défiance à l’égard du travail du Sénat et de votre assemblée ; c’est pourquoi il n’a pas déposé d’amendements de suppression. Cependant, je vous invite à adopter les amendements qui visent à éviter un certain nombre d’écueils majeurs que présente le texte –⁠ je pense en particulier à l’amendement de suppression de l’article 2.
    Je vous le répète : le gouvernement partage votre objectif de faciliter les relations commerciales entre les banques et leurs clients. Toutefois, loin d’atteindre ce but, ce texte constitue à notre sens un important recul en ce qui concerne la préservation de l’intérêt des clients eux-mêmes, la lutte contre le blanchiment de capitaux et le financement du terrorisme et la préservation de la liberté contractuelle. Pour l’ensemble de ces raisons, le gouvernement formule un avis fermement défavorable sur la proposition de loi. (Mme Félicie Gérard applaudit.)

    M. le président

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    3. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance, cet après-midi, à quinze heures :
    Suite de la discussion de la proposition de loi visant à lutter contre les fermetures abusives de comptes bancaires ;
    Discussion de la proposition de résolution tendant à la création d’une commission d’enquête sur les effets psychologiques de TikTok sur les mineurs.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à treize heures.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra