XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Première séance du lundi 17 mars 2025

Sommaire détaillé
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Première séance du lundi 17 mars 2025

Présidence de Mme Clémence Guetté
vice-présidente

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à seize heures.)

    1. Renforcement de la stabilité économique et de la compétitivité du secteur agroalimentaire

    Discussion, après engagement de la procédure accélérée, d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Stéphane Travert et plusieurs de ses collègues visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire (nos 954, 1104).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Travert, rapporteur de la commission des affaires économiques.

    M. Stéphane Travert, rapporteur de la commission des affaires économiques

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    J’ai l’honneur de vous présenter ce jour une proposition de loi que j’ai cosignée avec Julien Dive, du groupe LR, que je salue. Elle répond à une urgence, celle de prendre position sur le renouvellement du dispositif de relèvement de 10 % du seuil de revente à perte des produits alimentaires, dit SRP + 10, qui arrivera à échéance le 15 avril prochain.
    Un dispositif complémentaire au SRP + 10, l’encadrement des promotions en valeur et en volume, arrivera à échéance un an plus tard, le 15 avril 2026. Il nous appartient de nous prononcer également sur son renouvellement, mais aussi sur le maintien de son extension au secteur des produits de droguerie, de parfumerie et d’hygiène (DPH), entré en vigueur le 1er mars 2024, en application de la loi tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, la loi Descrozaille.
    Ces deux dispositifs font partie de l’ensemble cohérent de mesures issues des lois Egalim. Ils complètent les règles de contractualisation entre agriculteurs et transformateurs et celles relatives à l’encadrement des négociations commerciales, notamment les négociations portant sur la sanctuarisation de la matière première agricole.
    L’édiction de ce corpus de règles avait l’objectif clair de défendre la valeur de nos productions agricoles et alimentaires et, in fine, l’amélioration du revenu des agriculteurs.
    À cette fin, la valeur de leurs productions doit être reconnue tout au long de la chaîne de construction des prix et, au bout de cette chaîne, la guerre des prix entre distributeurs ne doit pas venir annihiler le travail de construction du prix « en marche avant ». Pour ces raisons, en votant, en 2018 la loi Egalim que j’avais eu le privilège de présenter en tant que ministre de l’agriculture, le Parlement avait habilité le gouvernement à instaurer par ordonnance le relèvement du seuil de revente à perte et l’encadrement des promotions sur les produits alimentaires. Ce fut chose faite avec l’ordonnance du 12 décembre 2018. Les deux dispositifs ont ensuite été prolongés jusqu’au 15 avril 2023 par l’article 125 de la loi du 7 décembre 2020 d’accélération et de simplification de l’action publique, la loi dite Asap.
    En 2023, la loi Descrozaille a prolongé le SRP + 10 jusqu’au 15 avril 2025, après que les fruits et légumes frais ont été exclus de son champ d’application. Quant à lui, l’encadrement des promotions a été prolongé jusqu’au 15 avril 2026 par la même loi.
    Il vous est proposé aujourd’hui de synchroniser de nouveau le calendrier d’application de ces deux mesures qui participent d’un ensemble cohérent. La proposition de loi tend à prolonger ces dispositifs jusqu’au 15 avril 2028.
    Il aurait été difficile de raccourcir encore ce délai. D’une part, les acteurs économiques ont besoin de visibilité et de stabilité. D’autre part, je pense que nous pouvons nous accorder sur le fait que le début de l’année 2027 sera peu propice à une discussion parlementaire sur la pérennisation de ces deux dispositifs. Une échéance commune fixée au 15 avril 2028 me semble donc pertinente.
    Je souhaite vous livrer quelques éléments d’appréciation sur l’opportunité de prolonger chacun de ces deux dispositifs. En premier lieu, la prolongation du SRP + 10 a été réclamée par les fédérations représentant les industriels, par l’ensemble des distributeurs à l’exception du leader du marché –⁠ dont la stratégie repose sur des prix bas – et par la FNSEA, la Fédération nationale des syndicats d’exploitants agricoles. Le monde agricole redoute que l’exacerbation de la guerre des prix entre distributeurs, qui suivrait inévitablement la disparition du SRP + 10, pèse sur la capacité des maillons de l’amont à répercuter les coûts de production agricole vers l’aval.
    Je suis convaincu que ce raisonnement est fondé. Toutefois, je ne me satisfais pas de l’évaluation du dispositif, telle qu’elle était faite jusqu’à présent. Cette insatisfaction a été partagée sur l’ensemble des bancs, lors de l’examen de ce texte en commission des affaires économiques, la semaine dernière.
    La commission a donc adopté plusieurs amendements permettant de renforcer le dispositif d’évaluation du relèvement du seuil de revente à perte et de l’encadrement des promotions.
    D’abord, nous avons créé une sanction de 75 000 euros pour les personnes physiques et de 375 000 euros pour les personnes morales, en cas de défaut de transmission des documents permettant de mesurer les effets de ces dispositions. Cette sanction est la même que celle déjà prévue à l’article 125 de la loi Asap en cas de non-respect de l’encadrement des promotions.
    Ensuite, et sous peine de la même sanction, nous avons étendu aux industriels, à l’exclusion des PME, l’obligation de remettre les mêmes éléments chiffrés permettant de mesurer les effets du SRP + 10. L’objectif est d’obtenir la vision la plus précise possible de l’utilisation faite du surplus de marge généré sur certains produits par le relèvement du seuil de revente à perte.
    Les rapports d’évaluation remis au Parlement en 2020 et en 2022 au sujet de l’effet inflationniste du SRP + 10 et de l’encadrement des promotions nous fournissent des enseignements. Contrairement à ce qui est parfois avancé, la hausse des prix induite est très faible et les dispositifs sont sans lien avec les tensions inflationnistes connues en 2022 et 2023.
    L’encadrement des promotions, ensuite, est peut-être plus consensuel encore que le SRP + 10. Néanmoins, nous devons, à l’occasion de sa prolongation, nous prononcer sur son champ d’application, étendu au DPH à compter du 1er mars 2024 par la loi Descrozaille. Cette extension a éloigné le dispositif de son objet initial, la préservation de la production agricole.
    Le législateur avait alors souhaité mettre fin au report des promotions appliquées aux produits du DPH parce qu’elles ne pouvaient plus l’être, depuis 2019, aux produits alimentaires.
    Selon moi, le choix n’a rien d’évident. En effet, toute contrainte sur la politique commerciale des enseignes doit être prudemment envisagée et la poursuite simultanée de plusieurs objectifs peut amoindrir l’efficacité d’un dispositif. Cependant, le secteur du DPH génère 85 000 emplois directs en France et il est normal de considérer le risque d’une fragilisation de ses entreprises.
    La commission des affaires économiques a donc adopté un amendement permettant que l’expérimentation de l’encadrement des promotions sur le DPH aille jusqu’au terme initialement prévu, le 15 avril 2026. Cette mesure va dans le sens de l’objectif de stabilité visé par le texte, et il me semble donc que nous avons trouvé là un équilibre.
    Je sais que certains veulent aller plus loin et aligner le calendrier de l’encadrement des promotions appliquées au DPH sur celui du SRP + 10 et celui de l’encadrement des promotions sur les produits alimentaires. Ils souhaitent prolonger l’expérimentation jusqu’au 15 avril 2028. Nous en discuterons à l’occasion de l’examen de leurs amendements.
    Au sujet du DPH, il me semble donc indispensable que le prochain rapport annuel évaluant l’encadrement des promotions étudie avec précision ses conséquences sur le pouvoir d’achat des consommateurs, sur l’équilibre concurrentiel du secteur, l’activité économique des très petites, petites et moyennes entreprises –⁠ TPE et PME – françaises, et sur le déport des ventes entre grandes et moyennes surfaces, d’une part, et les enseignes de discount, d’autre part.
    Tels sont les termes du débat qui débute. Je ne doute pas que nous parviendrons à trouver ensemble les compromis favorables au revenu agricole –⁠ car nous avons tous ce sujet en tête –, à la compétitivité de nos entreprises, à celle de nos territoires, et à l’emploi de nos compatriotes. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem. –⁠ M. Emmanuel Tjibaou applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée chargée du commerce, de l’artisanat, des petites et moyennes entreprises et de l’économie sociale et solidaire

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    Nous examinons aujourd’hui une proposition de loi visant notamment à prolonger une expérimentation prévue par la loi Egalim 1 et demandée par la quasi-intégralité des acteurs économiques. Sans cette proposition de loi, le dispositif en question prendrait fin dans quelques jours, le 15 avril 2025.
    L’augmentation de 10 % du seuil de revente à perte des produits alimentaires est la première disposition dont traite ce texte et je souhaite rappeler brièvement la raison pour laquelle cette mesure a été prise. M. le rapporteur la connaît bien, du fait de ses précédentes fonctions.
    Le schéma Egalim part d’un constat simple et unanimement déploré par les acteurs du secteur lors des états généraux de l’alimentation (EGA) : un agriculteur maîtrise rarement le prix de vente de sa production. Il ne choisit ni ses coûts de production ni, bien souvent, le prix de vente, si bien qu’il finit par constater une évolution de la rentabilité sans disposer de marges de manœuvre.
    Autrement dit, le prix payé à l’agriculteur était souvent la variable d’ajustement de la négociation qui avait lieu entre l’industriel et l’agriculteur. Quand bien même il s’agissait de son produit, l’agriculteur n’avait pas le contrôle de son prix.
    Les états généraux de l’alimentation ont donc souhaité favoriser la construction du prix en marche avant, qui fait de l’agriculteur le point de départ et non plus le dernier concerné. La fixation de sa rémunération devient la première étape de la négociation et n’en est plus une étape accessoire.
    Pour que le prix soit construit en marche avant, plusieurs mesures ont été prévues par le législateur. Je passe rapidement sur celles que ce texte ne concerne pas et qui pourront être examinées avec un possible texte Egalim 4 : je pense à la contractualisation écrite, à la sanctuarisation de la matière agricole, aux clauses de révision automatique et à d’autres mesures encore.
    Nous nous intéressons ici à l’expérimentation du SRP + 10, qui se termine dans moins d’un mois. L’idée était qu’obliger la grande distribution à dégager une certaine marge, qu’elle ne réalisait jusqu’à présent pas, sur la vente de produits d’appel, lui permettrait d’alléger la pression exercée sur le prix d’autres produits agricoles et alimentaires.
    De plus, cette pression moindre permettrait des négociations plus calmes et donc une meilleure revalorisation du travail des agriculteurs.
    Précisons d’emblée que le SRP + 10 ne procure aux distributeurs aucun gain net, sonnant et trébuchant, sur les ventes de produits d’appel. En effet, quand un distributeur vend un produit d’appel au prix où il l’a acheté, c’est-à-dire sans faire de marge, il continue de perdre de l’argent, puisqu’il supporte certains coûts –⁠ salariaux, de distribution, immobiliers ou d’énergie. Le SRP + 10 lui permet donc d’essuyer une moindre perte : il ne permet pas un gain net, mais plutôt un moindre déficit.
    Cela étant dit, le SRP + 10 est-il couronné de succès ? Probablement pas. Faut-il s’en passer maintenant ? Assurément non ! Je suis sûre que vous rencontrez les mêmes acteurs que moi, dans vos circonscriptions ou dans d’autres endroits –⁠ le Salon de l’agriculture par exemple – et tous, sauf un, demandent le maintien du dispositif. Pourquoi ? Ils ne le demandent pas parce que leur quotidien ou leur rentabilité se seraient soudainement améliorés, mais parce qu’ils anticipent que si le SRP + 10 est retiré, une nouvelle guerre des prix, très intense, se déclenchera du jour au lendemain.
    C’est très fortement probable, pour ne pas dire quasi certain. Il suffit d’avoir suivi les négociations commerciales qui viennent de s’achever pour constater l’importance de la bataille qui permet parfois seulement d’afficher un prix inférieur de 1 centime à celui de son voisin.
    Si, le 16 avril, les distributeurs retrouvent la possibilité de baisser de 10 % le prix des produits alimentaires d’appel, la spirale des prix bas réapparaîtra.
    Nous savons déjà qui va en souffrir : d’abord les transformateurs car, de toute évidence, la baisse de 10 % des prix en rayon se traduira par une demande de déflation de leurs tarifs ; les agriculteurs ensuite, qui subiront des négociations encore plus dures.
    Il me semble donc nécessaire de prolonger le SRP + 10. Le présent texte propose de le faire jusqu’en 2028 ; il vise aussi à aligner sur cette même échéance la durée de l’expérimentation relative à l’encadrement des promotions alimentaires.
    Ces deux mesures sont satisfaisantes, même s’il est frustrant de prolonger un dispositif qu’on aimerait pouvoir mieux évaluer. C’est pourquoi des amendements adoptés en commission prévoient d’une part des sanctions, notamment dans l’hypothèse où les distributeurs ne transmettraient pas les données chiffrées demandées ; et d’autre part que, une fois transmises, celles-ci soient rendues publiques.
    Il me paraît toutefois difficile de concilier ces deux mesures. Les chiffres concernés révèlent en effet une grande part de la stratégie commerciale des entreprises. Mettre sur la place publique le montant que représente 10 % de marge sur les produits d’appel reviendrait à permettre à tous les concurrents de savoir, à peu de frais, quel est le prix d’achat du voisin. Or il est fondamental que ces informations restent inconnues des concurrents, ou, en tout cas, que la loi n’encourage pas leur publicité. Attention, il ne s’agit pas pour autant d’encourager l’opacité ! Le gouvernement est d’ailleurs tenu de remettre au Parlement un rapport où figurent ces chiffres –⁠ comme il l’a fait en mai 2024.
    Outre les difficultés inhérentes au calcul du SRP + 10, n’oublions pas que ce dispositif n’est qu’une pierre de l’édifice Egalim, qui ne saurait répondre à lui seul à la question de l’amélioration du revenu des agriculteurs. Aussi l’amendement visant à demander au gouvernement de confier à l’Inspection générale des finances (IGF) un rapport sur les marges et leur système de péréquation est-il utile ; un tel rapport est susceptible de nous éclairer.
    Un chiffre est tout de même encourageant : entre 2020 et 2021, malgré une très forte hausse des charges, l’EBE –⁠ l’excédent brut d’exploitation – des exploitations agricoles, toutes productions confondues, a augmenté de 28 %, puis de 17 % en 2022. « Ces augmentations s’expliquent essentiellement, écrit l’Insee, par la hausse globale des prix agricoles. » Bien sûr, les lois Egalim ne sont pas les seules responsables de cette bonne nouvelle, mais elles n’y sont pas pour autant étrangères. La situation reste évidemment contrastée, le monde agricole étant toujours confronté à de nombreux défis.
    Le troisième dispositif prévu par la deuxième partie du texte est relatif à l’encadrement des promotions des produits des rayons droguerie, parfumerie et hygiène, soit 34 % en valeur et 25 % en volume selon la loi Egalim 3.
    Ce dispositif a été créé après avoir constaté que les grosses promotions, qui ne pouvaient plus concerner les produits alimentaires, visaient désormais le non alimentaire et conduisaient à une hausse du taux de générosité –⁠ à des promotions de 40 % ou 50 %.
    Députés et sénateurs, sensibles à l’argument de la nécessaire rentabilité des usines en France et des conséquences des grosses promotions, ont donc décidé d’encadrer les promotions sur les produits DPH de la même manière que sur l’alimentaire. Dans sa version initiale, la proposition de loi mettait fin dès juillet à l’encadrement des promotions sur les produits DPH. En commission, vous avez souhaité rétablir l’encadrement dans les conditions du droit actuel, de sorte que l’expérimentation puisse aller à son terme.
    De nombreux amendements ont été déposés, tendant à modifier la date de la fin de l’expérimentation du SRP + 10 et de l’expérimentation de l’encadrement des promotions sur les produits DPH. En tant que ministre chargée également de la simplification de la vie économique des entreprises, il me semble plus intéressant d’aligner les différentes durées des expérimentations afin de ne pas devoir multiplier les initiatives législatives dans les prochaines années. Il serait aussi utile d’assurer une plus grande souplesse en matière de promotions, ces bonnes affaires étant utiles aux Français. Certains amendements permettent cet équilibre ; il est sain que nous puissions en débattre.
    Je remercie sincèrement les auteurs de la proposition de loi, MM. Stéphane Travert et Julien Dive, ainsi que l’ensemble des signataires : elle permettra, je l’espère, de prolonger le SRP + 10 et de faire évoluer l’encadrement des promotions. À présent, place au débat. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR et HOR, ainsi que les bancs des commissions.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la présidente de la commission des affaires économiques.

    Mme Aurélie Trouvé, présidente de la commission des affaires économiques

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    Nous examinons la proposition de nos collègues Travert et Dive visant à faire évoluer des dispositions de la loi Egalim et de la loi Descrozaille. Nos débats en commission se sont principalement concentrés sur deux mesures. D’abord, la prolongation de l’expérimentation SRP + 10 jusqu’en 2028. Parce que cela peut paraître abscons et que nous ne nous parlons pas qu’à nous-mêmes, je précise que ce dispositif désigne une contrainte qui s’exerce sur la grande distribution : celle-ci est obligée de vendre un produit alimentaire 10 % plus cher qu’elle ne l’a acheté, afin d’éviter une guerre des prix qui se ferait au détriment des agriculteurs et des industriels qui lui ont vendu ledit produit.
    Deuxième mesure : la prolongation de l’encadrement des promotions sur les produits DPH –⁠ cette fois seulement jusqu’en 2026 –, car il est apparu en commission qu’il fallait maintenir cet encadrement –⁠ quand bien même la guerre des prix se serait un peu apaisée – en raison des craintes, somme toute légitimes, exprimées par les TPE et PME du secteur à l’idée de les voir disparaître. Ces dernières, vous le savez, trinqueraient les premières dans l’hypothèse d’une relance de la guerre des prix.
    La prolongation du dispositif SRP + 10 sur les produits alimentaires a fait l’objet de débats en commission : faut-il le maintenir et si oui, jusqu’à quand ? En réalité, nous n’avons pas les moyens de l’évaluer ! Nous sommes incapables de déterminer à qui profite ce seuil de marge minimale : aux agriculteurs, à la grande transformation, à la grande distribution ? Une loi a été votée et appliquée il y a quelques années, mais elle n’a pas été dotée des moyens d’en évaluer correctement l’efficacité.
    Un rapport devait d’ailleurs être remis au Parlement par le gouvernement : ce ne fut pas le cas, la DGCCRF –⁠ direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes – ne disposant pas, nous a-t-on dit, des données dont elle aurait besoin pour le produire. Nous devons donc à présent nous donner les moyens de procéder à l’évaluation du dispositif et il est utile, à cet égard –⁠ tout le monde en conviendra –, que la présente proposition de loi oblige les distributeurs à publier les données relatives à leurs bénéfices, même si je trouve, à titre personnel, que l’échelle des sanctions prévues s’ils ne s’exécutent pas n’est pas encore suffisante pour les contraindre à se conformer à cette obligation. Nous y reviendrons au cours des débats.
    Si le sujet plus global des négociations commerciales entre grands distributeurs et grands transformateurs revient régulièrement à l’ordre du jour de notre assemblée, c’est parce que le prix des produits alimentaires et d’autres biens essentiels à nos concitoyens en dépend.
    Ces négociations conditionnent aussi les prix payés aux agriculteurs –⁠ ou à des TPE – et ce faisant leur capacité à maintenir ou non leur activité. Manifestement, les règles en vigueur ne conviennent pas Parce qu’elles sont de plus en plus concentrées, les multinationales, qu’elles appartiennent à la grande distribution ou à de grands industriels –⁠ chacun se renvoyant la balle et la faute –, parviennent à imposer leurs prix au détriment des consommateurs et des agriculteurs. Leur but est de réaliser des profits, lesquels ne cessent de croître.
    Même s’il faut distinguer entre les multinationales et les TPE, les profits des entreprises de l’agroalimentaire ont augmenté de 10 % en moyenne en deux ans, tandis que les prix agricoles chutaient de 13 %. Ces profits sont non seulement la conséquence de la pression exercée sur les prix des produits agricoles, mais surtout de la hausse de 40 %, d’après l’Insee, des prix des produits agroalimentaires.
    Il est plus compliqué de s’exprimer au sujet de la grande distribution car il n’existe aucune donnée spécifique quant au commerce de grande consommation, les enseignes se gardant bien de publier quoi que ce soit. Grâce à l’UFC-Que choisir et l’Insee, on sait néanmoins qu’en deux ans et demi, les prix de l’alimentation à l’achat, pour les ménages, ont augmenté de presque 25 % –⁠ et de bien plus encore pour nos compatriotes ultramarins, évidemment.
    Dans ces conditions, nous ne pouvons pas traiter la question comme s’il s’agissait uniquement d’un sujet technique de court terme. Nous devrons proposer de nouveaux textes pour compléter la présente proposition et aller plus loin, afin de garantir enfin des prix rémunérateurs aux agriculteurs –⁠ après qu’ils ont baissé de 13 % en deux ans, je viens de le dire –, mais aussi de garantir des prix raisonnables aux consommateurs –⁠ qui ont connu l’augmentation de 25 % dont je parlais à l’instant.
    Nous serons bien obligés, d’une façon ou d’une autre, de plafonner à des niveaux décents les profits des grands groupes agroalimentaires et de la distribution. Ce texte nous en fournira une nouvelle occasion, plusieurs amendements ayant été déposés à cette fin. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, GDR et LIOT.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    Dans la discussion générale, la parole est à M. Thierry Benoit.

    M. Thierry Benoit

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    Au nom du groupe Horizons & indépendants, je suis heureux de m’exprimer une énième fois au sujet des négociations dites commerciales, à l’occasion de l’examen de ce texte.
    Comme je le disais il y a quelques jours en commission, de manière générale, le législateur court derrière les acteurs des négociations qui font preuve d’une grande imagination. Nous avons vu ce système, qui s’appuie en partie sur la croissance de la consommation pour créer de la richesse, évoluer au fil des années.
    En 2019, je présidais une commission d’enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution et de ses groupements dans leurs relations commerciales avec les fournisseurs. Grégory Besson-Moreau en était le rapporteur. Nous avons mené un travail de fond et de qualité, qui a débouché sur la loi Egalim 2 après avoir découvert des mauvaises pratiques, des procédés abusifs de certaines centrales d’achat, dont les négociations sont déportées hors de France. Cette question doit être abordée au niveau européen, madame la ministre, et le travail que nous effectuons devrait être mené par les parlementaires européens, de sorte que la commissaire à la concurrence s’y intéresse.
    L’imagination des acteurs est telle que le « triple net » –⁠ remises, ristournes et rabais –, les promotions, le système des services réels et parfois plus ou moins virtuels, auxquels s’ajoutent les pénalités logistiques, loin d’en créer, aboutissent à détruire de la valeur. Le SRP + 10 et l’encadrement des promotions dans le secteur alimentaire et dans celui de la DPH sont destinés à éviter que cela perdure, mais aussi à réfléchir à la manière dont les marges sont constituées et réparties au sein de la chaîne d’approvisionnement.
    Mon collègue Richard Ramos, ici présent devant moi, a proposé, pour ce qui concerne la vente de produits agricoles et les produits du secteur de la DPH, que les négociations soient dissociées en fonction de la taille des interlocuteurs, c’est-à-dire des entreprises.
    La proposition de notre collègue mérite d’être étudiée. Au nom de mon groupe, je la soutiendrai lors de l’examen du texte, car elle témoigne d’une réelle attention portée notamment aux très petites, petites et moyennes entreprises.
    Comme je l’avais fait en 2019 pour créer la commission d’enquête sur les négociations commerciales, je demanderai à la présidente de l’Assemblée nationale, au nom du groupe Horizons & indépendants, la création d’une commission d’enquête sur la constitution et la répartition de la marge au sein de la chaîne d’approvisionnement, des agriculteurs situés en amont, jusqu’à la distribution située en aval, en passant par les entreprises et le secteur de la transformation.
    Madame la ministre, il faut que nous puissions peser au niveau européen. Lorsque je présidais la commission d’enquête en 2019, très peu de monde s’était montré attentif à la question, y compris au sein du gouvernement –⁠ à l’exception d’Agnès Pannier-Runacher. Les services de Bercy et les autorités européennes chargées de la concurrence prenaient tout cela avec beaucoup de distance. Or je pense qu’il convient de s’y intéresser de près, y compris au niveau européen. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR. –⁠ M. le rapporteur applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Paul Molac.

    M. Paul Molac

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    Nous examinons une proposition de loi visant à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire. En premier lieu, je tiens à remercier le rapporteur pour son opiniâtreté sur le sujet.
    Certains d’entre nous savent que ce n’est pas la première fois que nous légiférons pour réguler les prix du secteur alimentaire –⁠ ce n’est d’ailleurs peut-être pas la dernière. Cela pourra paraître saugrenu à quelques libéraux qui pensent qu’une logique d’équilibre entre l’offre et la demande suffit à obtenir des prix rémunérateurs et à faire fonctionner le système. Or l’enjeu est bien d’intérêt général : il s’agit de maintenir l’appareil de production nécessaire à notre souveraineté alimentaire, en assurant une juste rémunération du producteur et du transformateur. Nous savons tous que face à une grande distribution en situation d’oligopole, structurée autour de quatre centrales d’achat en position dominante, la concurrence reste toute relative.
    La question est donc de savoir comment échapper à la guerre des prix parfois imposée par les distributeurs, qui fragilise, voire détruit la filière de l’alimentation. Notre rôle est bien de réguler certaines pratiques qui pourraient déstabiliser des maillons de la chaîne essentielle à notre souveraineté alimentaire et diminuer la qualité –⁠ je tiens à ce point – des produits fabriqués dans nos exploitations. Il serait illogique, voire hypocrite, de nous opposer à des traités de libre-échange comme l’Accord économique et commercial global (Ceta) et le Mercosur, tout en détournant le regard lorsqu’il s’agit de traiter la question de la production alimentaire en France.
    L’adoption des lois Egalim n’épuise pas la complexité du sujet, qui requiert quelques ajustements et la prolongation de certains dispositifs expérimentaux, le temps d’évaluer s’ils sont réellement opérationnels et utiles.
    Pourquoi est-il nécessaire, selon nous, de maintenir un seuil de prix de revente à + 10 % et un encadrement des promotions ? Les producteurs et les industriels sont les principales victimes collatérales d’un système dans lequel les distributeurs se livrent une guerre économique en matière de prix et de promotions. La loi Egalim 1 de 2018 a prévu qu’à compter de 2019, le seuil de revente à perte serait majoré de 10 %. Ce dispositif expérimental impose aux distributeurs de vendre certains produits alimentaires à leur prix d’achat majoré, au minimum, de 10 %. L’objectif était de diminuer la pression pesant sur les agriculteurs lors des négociations commerciales et de permettre –⁠ par un effet de ruissellement – une revalorisation du revenu agricole. Les agriculteurs, pour en avoir parlé avec eux, sont très sensibles à ce dispositif et ne veulent absolument pas que ce seuil de revente à perte soit abaissé.
    Toutefois, les effets de cette mesure peinent à être mesurés. On estime que la grande distribution a bénéficié, pour une part comprise entre 600 millions et 1 milliard d’euros, de l’augmentation des prix engendrée. Il est nécessaire de réinjecter cette somme au sein de la filière, au bénéfice des producteurs et des transformateurs. Nous aurions souhaité que les distributeurs jouent davantage le jeu et publient les données traduisant la part qu’ils captent du surplus créé par l’instauration du SRP + 10. S’il faut légiférer pour sanctionner ce défaut de transmission de l’information, faisons-le !
    Rappelons une évidence : l’alimentation a un coût et le producteur ne doit pas être la variable d’ajustement face au consommateur qui, lui, est en droit de rechercher les prix les plus bas. Toutefois, le problème dépasse la simple question du prix. Si la part de l’alimentation dans le budget des Français ne cesse de baisser, il s’agit de songer au pouvoir d’achat des ménages les plus modestes, car nos concitoyens n’ont pas tous les mêmes moyens.
    Pour conclure, le groupe LIOT entend les craintes des agriculteurs qui redoutent la fin de la mesure –⁠ ce dont ils seraient certainement les premières victimes. Alors que les lois Egalim ne sont pas parvenues à sacraliser le prix des matières premières, la prudence est de mise quant aux dispositifs destinés à modifier les revenus agricoles.
    Le compromis trouvé en commission est, pour nous, satisfaisant. En exposant les distributeurs et les fournisseurs à une sanction s’ils ne transmettent pas les données relatives au surplus de chiffre d’affaires résultant du SRP + 10, le dispositif devient plus contraignant. Nous devrions donc connaître les bénéfices d’une telle mesure. Tel est notre souhait, en faveur d’une agriculture vertueuse, d’un revenu juste pour les producteurs et des produits de qualité pour les consommateurs.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Nous sommes conviés à l’examen d’un texte dont le titre est pour le moins énigmatique. Afin d’assurer la stabilité économique du secteur agroalimentaire, il prévoit deux mesures : la prolongation du dispositif de majoration du seuil de revente à perte de 10 %, qui doit expirer le 15 avril prochain, et la suppression de l’encadrement des promotions sur les produits de droguerie, parfumerie et hygiène, dont le lien avec le secteur agroalimentaire n’est pas sans rappeler la « rencontre fortuite sur une table de dissection d’une machine à coudre et d’un parapluie » que décrivait Lautréamont. (Sourires.)
    Pour commencer, votre texte ne tire aucun bilan critique du SRP + 10, dont l’objectif de départ était de rééquilibrer les relations commerciales entre producteurs, transformateurs et distributeurs en limitant les pratiques commerciales agressives défavorables aux premiers. Or l’efficacité de ce dispositif instauré en 2019 est sujette à débat. Vous affirmez qu’il convient de le prolonger afin de prendre le recul nécessaire pour évaluer son impact, faisant ainsi vôtre la devise des Shadoks : « Plus ça rate, plus on a de chances que ça marche. » (Sourires.)
    L’argumentaire déployé depuis l’origine pour justifier la marge minimale de 10 % garantie à la grande distribution repose sur une variante de la théorie du ruissellement. Or rien n’indique que les sommes prélevées sur les consommateurs aient permis une revalorisation des prix d’achat ni une amélioration, en bout de chaîne, des bénéfices des agriculteurs. Une étude récente de l’UFC-Que choisir souligne que la mesure est restée sans effet sur le revenu des agriculteurs et que ce n’est nullement à leur profit que les consommateurs ont, depuis six ans, subi une inflation supplémentaire –⁠ celle-là bien réelle – estimée entre 470 millions et 1 milliard d’euros par an, soit plusieurs milliards d’euros au total.
    L’échec du SRP + 10 tient à ce qu’il demeure sans effet sur les graves déséquilibres des négociations commerciales entre les agriculteurs, les industriels et la grande distribution. Quelque 90 000 exploitations bovines et laitières doivent négocier leurs productions avec un nombre très réduit d’acheteurs : 28 laiteries collectent 76 % des volumes de lait et, pour la viande, 143 abattoirs assurent 92 % des tonnages. La concentration est encore plus marquée dans la filière porcine : en Bretagne, 90 % des abattages sont réalisés par 5 groupes seulement. En position de force, les groupes industriels peuvent ainsi s’autoriser à revenir sur des accords signés : Lactalis, après une négociation difficile sur les prix, a annoncé unilatéralement, en septembre 2024, l’arrêt de la collecte auprès de 300 exploitants d’ici à 2026.
    Il faut convenir que, malgré l’échec du dispositif, nombre d’agriculteurs soutiennent, faute de mieux, le relèvement du seuil de revente à perte, craignant que sa suspension n’entraîne un durcissement des relations commerciales. Sans améliorer les revenus des agriculteurs, ce dispositif permettrait au moins d’éviter qu’ils ne s’effondrent de nouveau. Mais ses maigres vertus s’arrêtent là, faute de la mise en œuvre de dispositifs ambitieux de sécurisation de la chaîne de valeur, comme nous le proposons.
    Par ailleurs, votre texte vise à revenir sur l’encadrement des promotions concernant les produits de droguerie, de parfumerie et d’hygiène de manière, précise l’exposé des motifs, « à redonner une plus grande liberté » aux distributeurs. Votre texte abordait d’ailleurs la question à la hussarde, avant que vous n’émettiez, monsieur le rapporteur, des réserves à la suite des auditions.
    Des amendements ont été adoptés en commission pour repousser l’entrée en vigueur de cette mesure jusqu’à la fin de l’expérimentation, soit en avril 2026. En limitant les réductions et en restreignant le volume des produits promus, la loi Descrozaille cherchait à assurer une rémunération plus équitable aux fournisseurs et à préserver la viabilité économique des petites et moyennes entreprises du secteur. En rétablissant les promotions massives de manière automatique, vous devanceriez les conclusions de l’expérimentation et laisseriez libre cours aux comportements rapaces de la grande distribution, au détriment des PME et des TPE du secteur qui emploient en France quelque 246 600 salariés. Nous sommes naturellement hostiles à cette mesure et nous y reviendrons à l’occasion de la défense de nos amendements.
    Cependant, je ne peux vous cacher notre surprise face au dépôt de cette proposition de loi qui, sous couvert de défense du pouvoir d’achat, témoigne d’une grande complaisance à l’égard de la grande distribution.

    Mme la présidente

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    Merci de conclure !

    M. André Chassaigne

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    Pour terminer, si le temps ne peut suspendre son vol, madame la présidente, nous suspendons notre vote. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS. –⁠ Mme Olivia Grégoire ainsi que MM. Paul Molac et Richard Ramos applaudissent également.)

    Mme Olivia Grégoire

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    J’applaudis le talent oratoire !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot.

    M. Alexandre Allegret-Pilot

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    La proposition de loi que nous examinons vise à renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire. L’agriculture et l’industrie agroalimentaire sont au cœur de notre souveraineté, de notre économie et de notre identité. Nous en conviendrons presque tous : il s’agit d’un enjeu fondamental pour notre pays. Reste cependant à savoir ce que nous entendons par ces concepts de « stabilité » et de « compétitivité ».
    Le texte entend encadrer les relations commerciales entre producteurs, industriels et distributeurs pour réduire les déséquilibres inhérents au rapport de force entre, d’une part, une multitude de producteurs isolés et, d’autre part, quelques distributeurs structurés –⁠ ces déséquilibres affectant in fine, ne l’oublions pas, le consommateur.
    En moyenne, 18 % des ménages d’agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté contre 13 % des ménages constitués par les autres actifs, soit proportionnellement 38 % de plus. Si les prix à la consommation alimentaire sont à peu près identiques à ceux de 1960, les prix agricoles ont, quant à eux, diminué de 60 %. Où est passé l’argent ?
    Si le SRP + 10, conformément à la théorie du ruissellement qu’il suppose, vise à empêcher les distributeurs de compenser leur marge en exerçant une pression à la baisse sur les prix payés, par l’intermédiaire de l’industriel, aux producteurs, trois points doivent nous alerter. Premièrement, nous partageons la volonté de sécuriser les revenus des producteurs et de leur garantir une meilleure répartition de la valeur. Cependant, si l’expérience tend à le suggérer de façon subjective et individuelle, les données économiques peinent à démontrer une augmentation du revenu agricole due au SRP + 10.
    Deuxièmement, nous devons nous assurer que les mesures proposées ne viennent pas fragiliser les PME et les ETI –⁠ entreprises de taille intermédiaire – agroalimentaires face aux grandes centrales d’achat et face aux exigences du commerce international. Or cela semble très incertain.
    Troisièmement, nous ne pouvons ignorer un acteur essentiel de ce système –⁠ le consommateur –, qui se trouve d’ailleurs être parfois lui-même producteur ou employé de la grande distribution. L’effet du mécanisme du SRP + 10, chiffré entre 600 millions et 1 milliard d’euros, est essentiellement pris en charge par ce dernier. Or l’agrosystème français n’évolue pas en vase clos. Ce secteur, rappelons-le, est soumis à une pression concurrentielle intense, notamment face aux centrales d’achat européennes et aux importations massives qui représentent près de 25 % de la consommation alimentaire française. En outre, ce secteur fait face à des tensions sans précédent : une inflation alimentaire qui dépasse les 11 % sur un an ; une hausse des coûts de production agricole de plus de 30 % depuis 2021 ; enfin, une baisse du pouvoir d’achat des consommateurs qui, du fait d’une importante élasticité-prix, pénalise directement la demande.
    Dans un tel contexte, imposer de nouvelles obligations, sans consultation approfondie avec les organisations professionnelles, pourrait engendrer des effets contraires à ceux qui sont recherchés, nuisant à la compétitivité du secteur plutôt que de la renforcer et risquant de créer, par un effet domino, de nouvelles charges administratives.
    Avant de légiférer, il aurait surtout été opportun de conduire une étude d’impact détaillée. Les deux derniers rapports disponibles font ainsi état d’une inflation attribuable à la loi, très différenciée selon les catégories de produits : si, en 2019, elle ne serait que de 0,1 % sur l’ensemble des produits, elle s’élèverait, par exemple, à 1 % sur le pain. Ces deux rapports ne permettent pas de chiffrer la création de valeur dans la chaîne alimentaire ni de mesurer avec précision la revalorisation du revenu agricole imputable à ces mesures –⁠ c’était pourtant bien là leur objectif.
    Ce mécanisme est peut-être nécessaire ; il n’est en tout cas pas suffisant, et ses effets ne sont pas suffisamment connus.
    Ce texte, malheureusement, comporte trop de zones d’ombre, qui devraient être clarifiées avant que nous puissions le soutenir sans réserve.
    Rappelons que le prix des denrées agricoles dépend en premier lieu des marchés, parfois mondiaux, très sensibles à l’évolution des coûts de production. Il dépend également, en second lieu, des conditions de négociation commerciale, qui dépendent elles-mêmes de la structure du marché.
    La présente proposition de loi ne s’attarde donc pas suffisamment sur les trois priorités que nous identifions : la nécessaire concertation avec les acteurs du secteur, une réelle évaluation économique du dispositif, l’impérieux rééquilibrage des forces sur le marché. Pour parvenir à ce rééquilibrage, il faudra impérativement des facilités de modernisation des exploitations et une concentration du pouvoir de négociation qui nous permettront d’être plus performants face à la concurrence étrangère, tout en répartissant la valeur de façon homogène dans la filière agroalimentaire.
    S’il est nécessaire d’éviter les dérives de nature à diminuer les marges des agriculteurs, cette proposition de loi reste cependant bien insuffisante, comme en atteste la dramatique situation qu’ils connaissent ainsi que le découplage entre le prix alimentaire et le prix agricole.
    Notre abstention, aujourd’hui, ne vaut pas rejet. Elle est un appel à plus de concertation, plus d’évaluation et de meilleurs ajustements garantissant que cette réforme soit un réel moteur de croissance, dont l’efficacité soit attestée par des données, et non une rustine insuffisante, basée sur une simple intuition. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Hélène Laporte.

    Mme Hélène Laporte

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    Nous discutons, une fois de plus, d’une loi d’urgence : dans la logique macroniste, rien n’est en effet plus urgent que ce qui est inefficace.

    Mme Olivia Grégoire

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    Oh !

    Mme Hélène Laporte

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    L’urgence du jour serait donc de prolonger à nouveau, pour trois ans, le relèvement de 10 points du seuil de revente à perte pour les produits alimentaires qui doit prendre fin le 15 avril prochain, après deux prolongations successives. Ce dispositif, introduit en 2018 par la première loi Egalim, aurait pour but de garantir aux agriculteurs des prix de vente décents de leurs productions. Aux dires de ses promoteurs, le revenu supplémentaire dégagé par la distribution allait ruisseler sur les producteurs, selon un mécanisme défiant toutes les lois de l’économie. Pensée complexe ou pensée magique ? On ne peut en tout cas que le constater : personne n’a pu apporter la preuve de l’utilité du SRP + 10 pour nos agriculteurs.
    Les tentatives en ce sens n’ont pourtant pas manqué : pas moins de huit rapports, parlementaires et gouvernementaux, se sont succédé, depuis 2019, pour tenter d’évaluer le dispositif, sans qu’aucun ne puisse mettre en lumière un quelconque effet positif sur le revenu agricole –⁠ tous l’ont admis. Comme on s’y attendait, l’échec est total. Le SRP + 10, sans aucune justification économique crédible, a gonflé le chiffre d’affaires de la grande distribution.
    Il est certain, à l’inverse, que c’est au détriment des consommateurs français que s’est réalisé cet enrichissement sans cause : chaque année, entre 600 millions et 1 milliard d’euros d’augmentation des prix des produits alimentaires sont directement imputables au relèvement du SRP.
    UFC-Que choisir a établi l’existence de hausses très significatives sur les produits de grandes marques, mais aussi sur ceux de premier prix. Les Français, depuis le covid, ont supporté le coût de plus de 20 % d’inflation alimentaire, sans aucun bénéfice pour nos agriculteurs.
    La situation est extraordinaire. Tout le monde s’accorde à dire que le SRP + 10 est inefficace et délétère : la solution ne serait-elle donc pas de laisser cette mesure, dont deux rapports du Sénat ont demandé la suspension, prendre fin à son terme légal ? Non, par une logique défiant l’entendement, c’est exactement le contraire que vous avez décidé, en souhaitant prolonger pour trois ans un système qui, en plus de n’avoir aucune utilité, a été préjudiciable aux Français.
    Cela démontre d’ailleurs à quel point est factice la posture d’opposition du NFP, qui accepte le principe de cette prolongation. Ce sont d’abord les foyers modestes qui subissent le coût de cette mesure qu’il est maintenant question d’aggraver en l’étendant aux produits vendus sous marque distributeur. Une nouvelle fois, c’est aux catégories populaires que vous vous attaquez.
    Il n’y a pas grand-chose à sauver dans ce texte. Même la sortie des produits de droguerie, d’hygiène et de parfumerie du champ d’application de l’encadrement des promotions –⁠ sa seule et unique bonne mesure – a été reportée à 2026, autrement dit à la date où le dispositif doit prendre fin selon la législation en vigueur. Il est maintenant question de maintenir cet encadrement, dans une version allégée, jusqu’en 2028, alors que le pouvoir d’achat des Français devrait seul guider notre conduite.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Eh oui !

    Mme Hélène Laporte

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    En l’état actuel du droit, le SRP + 10 doit prendre fin dans un mois, et l’encadrement des promotions dans un an. Ce calendrier laisse largement le temps à notre assemblée d’inscrire à son ordre du jour la fameuse loi Egalim 4 –⁠ annoncée depuis belle lurette et dont nous demandons qu’elle ne soit pas un quatrième renoncement.
    Il est urgent de mettre en application le cadre de contractualisation des achats de matières premières agricoles établi dans la loi Egalim 2, les sanctions qu’elle prévoyait –⁠ la Cour des comptes l’a rappelé – n’ayant encore jamais été appliquées. Il est urgent de mettre en place des prix garantis pour les producteurs, urgent de soutenir les organisations de producteurs pour favoriser un rééquilibrage des négociations. Il est également urgent de prendre conscience que la question du revenu agricole est indissociable de celle de la concurrence déloyale et de prendre toutes les mesures qui s’imposent pour y remédier : fin des surtranspositions, rejet de l’écologie punitive, sortie ou renégociation des mauvais accords commerciaux.
    C’est de cette seule façon que nous protégerons notre agriculture, et non en promettant un hasardeux ruissellement des bénéfices de la grande distribution, stratégie dont l’échec retentissant est déjà patent.
    J’invite chacun d’entre vous à consulter l’évolution des prix dans les grandes surfaces depuis janvier 2022 :?+ 26 % pour la crémerie, + 24 % pour l’épicerie sucrée, mais seulement + 12 % pour la poissonnerie. Curieusement, plus les prix sont liés au SRP + 10, plus ils augmentent.
    Je réserve pour plus tard l’annonce de notre position, qui dépendra de l’évolution de ce texte et des engagements que vous prendrez. Quant au risque du retour d’une guerre des prix, qui vous sert d’argument, il existe de toute façon dans la mesure où le même principe s’applique à tous. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Olivia Grégoire.

    Mme Olivia Grégoire

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    Alors que je vous écoutais avec attention, madame Laporte, il m’est revenu que la citation bienvenue des Shadoks que nous entendions il y a un instant était précédée de ces mots : « En essayant continuellement, on finit par réussir. »

    Mme Hélène Laporte

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    C’est pour nous que vous dites ça ?

    Mme Olivia Grégoire

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    Je ne voulais que vous répondre avec gentillesse –⁠ sans succès apparemment.

    Mme Hélène Laporte

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    La gentillesse, ce n’est pas votre genre !

    Mme Olivia Grégoire

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    Vous avez raison, évitons la gentillesse.
    Depuis 2017, la France, avec les lois Egalim, a fait le choix de mieux protéger ses producteurs agricoles, par la garantie de la non-négociabilité de leurs matières premières et par l’instauration d’un seuil de revente à perte, destiné à éviter une guerre des prix destructrice. Le SRP + 10, attendu et demandé dès 2017 par la FNSEA et par de très nombreuses filières, n’est pas seulement un sujet agricole, mais, avant tout, un sujet économique et financier. Sans ce dispositif, les acteurs les plus agressifs du marché auraient sans doute continué à tirer les prix vers le bas, comme ils le font depuis des années, fragilisant encore davantage les plus vulnérables et renforçant mécaniquement les acteurs les plus puissants.
    Ces choix, nous devons aujourd’hui les prolonger, afin de préserver un écosystème agroalimentaire déjà sous tension, qui supporterait mal un changement brutal des règles en cours de jeu. Il nous faut aussi les renforcer et les étayer, car derrière les mécanismes du SRP + 10 ou de l’encadrement des promotions se jouent tout simplement la survie de notre modèle agroalimentaire et l’indépendance de nos producteurs.
    Le groupe Ensemble pour la République, avec ce texte, défend la prolongation du SRP + 10. Même si ce n’était pas sa vocation première, il a apporté aux agriculteurs et aux industriels une protection essentielle, notamment au cours des années de très forte inflation, de 2022 à 2024. Le supprimer brutalement risquerait de déstabiliser les relations commerciales et d’ouvrir les vannes du dumping des prix.
    Pour que cette mesure soit mieux légitimée, il est cependant indispensable d’en assurer un suivi plus transparent et plus rigoureux, qui nous permettra de vérifier que le transfert de marge profite bien aux producteurs –⁠ préoccupation que nous partageons tous. Une telle démonstration a pu être faite, par exemple, dans la filière laitière. Nous proposons donc, avec le ministre Travert, rapporteur de cette proposition de loi, de prolonger cette expérimentation pour trois ans, en l’assortissant d’une obligation de transmission des données des acteurs de la chaîne agroalimentaire et de transparence.
    C’est sur ce dernier point que les débats en commission nous ont permis, par deux avancées, d’enrichir le texte. Les fournisseurs de produits alimentaires devront tout d’abord, au même titre que les distributeurs, communiquer à la DGCCRF un document détaillant la répartition de leurs marges supplémentaires. Nous avons ensuite introduit dans cette proposition de loi une sanction financière en cas de défaut de transmission de ces données. Prolonger le SRP + 10, oui, mais pas sans contrôle ; garantir une marge supplémentaire, oui, mais avec des engagements clairs et vérifiables.
    Nous soutiendrons également la proposition du député Richard Ramos tendant à intégrer les marques distributeur dans le périmètre du SRP + 10.
    Il nous faudra absolument distinguer, au cours de l’examen de cette proposition de loi, ce qui relève de la question de la souveraineté alimentaire de ce qui n’en relève pas. C’est pourquoi nous proposons de ne pas prolonger l’encadrement des promotions sur les DPH jusqu’en 2028. En effet, nous devons avant tout défendre le pouvoir d’achat des consommateurs ; or?la fin de ces promotions a entraîné une déconsommation importante, estimée par Circana a environ –⁠ 5,1 %, entre 2023 et 2024. Selon la Fédération du commerce et de la distribution (FCD), les familles de plus de cinq personnes, en 2024, ont réduit leurs achats de DPH de plus de 15 %.
    Cela étant dit, et vous avez été nombreux à le faire valoir, nous devons disposer de données plus fiables avant de décider la prolongation de ce dispositif. C’est pourquoi nous ne proposerons pas une prolongation automatique de l’encadrement des promotions sur les DPH. L’amendement tendant à demander un rapport sur ce sujet, que nous avions déposé avec le ministre Travert, n’a malheureusement pas été retenu, mais je continue, madame la ministre, à appeler de mes vœux un tel rapport qui nous permettrait d’analyser quels effets l’encadrement des promotions sur les DPH a eus sur les prix et sur le pouvoir d’achat, tout en documentant également les effets d’éviction d’achat de ces produits à l’endroit des hard-discounters.
    Nous devons donc agir avec discernement et responsabilité. Les lois Egalim ont consacré l’essentiel –⁠ la non-négociabilité des matières agricoles. Le SRP + 10, quant à lui, a en effet garanti une marge aux acteurs de l’agroalimentaire : il est désormais indispensable que, dans les deux ans à venir, ils nous expliquent comment elle est utilisée et qu’ils nous montrent comment, ainsi que je le crois, elle est utile à nos agriculteurs. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier.

    Mme Manon Meunier

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    Salon de l’agriculture 2024 : Emmanuel Macron annonce que « nous allons protéger le revenu agricole ». Comme il l’avait dit en une autre occasion : « Je ne dirais pas que c’est un échec : ça n’a pas marché ».
    Depuis bientôt huit ans, ses gouvernements successifs ont enchaîné les lois Egalim, pour –⁠ prétendument – rééquilibrer le rapport de force entre la grande distribution et les agriculteurs. La mesure phare de ces lois ? Le SRP + 10, un dispositif revenant à obliger la grande distribution à réaliser une marge minimum de 10 % au-dessus du seuil de revente à perte. L’objectif affiché par le gouvernement ? Le ruissellement des marges ainsi générées jusqu’aux agriculteurs par la sainte volonté des dirigeants des multinationales de la grande distribution.
    Six ans plus tard –⁠ surprise –, ça n’a pas marché.
    Les agriculteurs n’ont pas vu leur rémunération augmenter.
    Les profits générés par la grande distribution sont toujours aussi démentiels.
    Les consommateurs, eux, ont bien subi l’augmentation du prix des produits alimentaires.
    Peut-être aurait-on pu donner à ce dispositif technocratique –⁠ le SRP + 10 – un nom plus simple : dispositif gouvernemental permettant de gonfler les marges de la grande distribution sous prétexte d’améliorer le revenu des agriculteurs.
    Lactalis, 428 millions d’euros. Unilever, 5,74 milliards. Nestlé, 11,4 milliards. Ce sont quelques exemples des bénéfices des géants de l’agro-industrie, tandis qu’un tiers des petites et moyennes entreprises ainsi que des entreprises de taille intermédiaire de l’agroalimentaire français sont déficitaires.
    Voilà ce que votre loi a laissé faire. La grande distribution, bien évidemment, n’est pas en reste sur les profits, tandis qu’elle met en avant la défense du pouvoir d’achat des Français dans des spots publicitaires tournant en boucle à la télé. Leclerc, 2,5 millions d’euros de profits ; Intermarché, 98 millions ; Carrefour, 1,7 milliard.
    Pourtant, La France insoumise a proposé à maintes reprises dans l’enceinte de cette assemblée une solution, afin de mettre fin au gavage des multinationales sur le dos des producteurs et des consommateurs : encadrer les marges des industriels de l’agroalimentaire et de la grande distribution. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe GDR.) Nous le proposerons, une fois encore, par l’intermédiaire de nos amendements.
    En revanche, ce que vous proposez c’est de continuer comme si de rien n’était et de proroger l’application du dispositif SRP + 10, pourtant inefficace. D’ailleurs, vous n’avez publié aucune donnée chiffrée sur son expérimentation à même de justifier une telle prolongation ! Certes, il vous est difficile de publier un rapport précis sur les marges nettes pratiquées par les distributeurs et les industriels, puisque ceux-ci refusent de vous les communiquer malgré vos demandes. Néanmoins, ce n’est pas une sanction affichée de 375 000 euros qui forcera les multinationales à transmettre le montant de leurs marges. Lorsque les bénéfices se chiffrent en millions d’euros, les sanctions doivent être proportionnées à ceux-ci.
    Vous nous avez dit et répété que l’expérimentation du dispositif n’était pas terminée et qu’il fallait attendre encore trois ans avant d’être en mesure de proposer une solution alternative. Cependant, la situation est trop alarmante pour attendre aussi longtemps qu’une nouvelle loi revienne sur l’organisation des négociations commerciales.
    Croyez-vous, en effet, que les 16,2 % de ménages agricoles qui vivent sous le seuil de pauvreté attendront trois ans pour obtenir des prix rémunérateurs ? Croyez-vous que les TPE et les PME du secteur agroalimentaire, qui sont concurrencées par les multinationales, attendront trois ans pour être en mesure de négocier à armes égales avec la grande distribution ? Et pensez-vous que les 16 % de Français qui ne mangent pas à leur faim attendront également trois ans que les prix alimentaires diminuent ? En commission, vous nous avez opposé des excuses pour motif électoral : les municipales et la présidentielle. Allez expliquer à vos électeurs que nous n’avons pas le temps d’agir sur les prix alimentaires d’ici à 2028 parce que nous sommes trop occupés par les élections !
    Il vous suffirait pourtant de faire preuve d’un peu de courage politique face aux lobbys agro-industriels et d’exiger la fixation de prix rémunérateurs garantis pour les agriculteurs au cours de conventions de filières, la simplification du régime des négociations commerciales pour les industriels des PME et des ETI et l’encadrement des marges de l’agro-industrie et de la grande distribution.
    Sur les grands discours d’Emmanuel Macron, il est temps d’aligner des actes. Les députés de La France insoumise y sont prêts. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin.

    Mme Mélanie Thomin

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    Les socialistes se battent pour que celles et ceux qui nous nourrissent –⁠ les exploitants et les salariés agricoles, les ouvriers de l’agroalimentaire, les salariés de la grande distribution – obtiennent un revenu digne. À l’heure actuelle, 18 % des ménages d’agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté et un éleveur bovin sur quatre ne vit pas dignement de son travail. Dans le même temps, la grande distribution et l’industrie agroalimentaire ne se sont jamais aussi bien portées. L’avenir de notre modèle agricole et alimentaire passe nécessairement par la garantie d’une juste rémunération des agriculteurs et d’une répartition plus équitable de la valeur.
    Alors que la loi du plus fort domine toujours les négociations commerciales, nous serons amenés, dans quelques semaines, à examiner la quatrième version de la loi Egalim. L’objectif affiché est de rééquilibrer les rapports de force, face à des acteurs économiques souvent prêts à tout pour faire passer leurs marges avant l’intérêt collectif. Mais rééquilibrer les rapports de force ne peut se faire sans une exigence politique. Cette future loi devra donc aller plus loin que les précédentes et s’appuyer sur une véritable volonté de régulation. Les agriculteurs nous attendent sur ce point.
    Nous, socialistes, défendrons un meilleur partage de la valeur grâce à la sanctuarisation de la matière première agricole, à la construction du prix en marche avant, à la contractualisation, au renforcement des organisations de producteurs et au renforcement des sanctions.
    Aujourd’hui, nous sommes appelés à nous prononcer sur la prorogation de trois ans du SRP + 10. L’argumentaire initial de présentation de ce mécanisme justifiait la marge minimale de 10 % garantie à la grande distribution comme une marge destinée aux agriculteurs, par un phénomène de ruissellement. Force est de reconnaître que l’entrée en vigueur du dispositif a permis de verrouiller la guerre des prix au sein de la grande distribution, réduisant ainsi la pression sur les fournisseurs et, dans une certaine mesure, sur les agriculteurs.
    Cette guerre des prix se concentrait sur certains produits d’appel emblématiques, tels que Nutella, Coca-Cola, le thon en boîte ou encore l’emmental. L’objectif était de limiter la compétition agressive entre les distributeurs et d’éviter qu’ils ne compensent leurs pertes en révisant à la baisse l’achat des produits à forte valeur agricole.
    Chacun s’accorde à reconnaître que ce dispositif a surtout profité à la grande distribution et aux agro-industriels. Les économistes Céline Bonnet et François Gardes ont démontré que les données auxquelles nous avons accès ne permettent pas de prouver une augmentation du revenu agricole. Certes, celui-ci a augmenté de 45 % entre 2020 et 2023, mais cette progression est surtout liée à la hausse des cours mondiaux. Ainsi, il n’y a pas de lien mécanique entre hausse du revenu agricole et augmentation de la marge de la distribution.
    Une prorogation du dispositif, sans contrôle supplémentaire et sans possibilité de sanctions dissuasives, entérinerait, une fois encore, l’échec des lois Egalim à garantir aux producteurs un revenu juste.
    Le groupe Socialistes et apparentés a auditionné des représentants des syndicats, des consommateurs, des distributeurs et des industriels. À l’issue de ces échanges, notre approche est exigeante : nous ne donnerons pas un chèque en blanc à des acteurs économiques qui contournent les exigences d’une loi élaborée au service du monde agricole ! (M. Dominique Potier applaudit.)
    Dans une démarche de transparence, nous avons fait adopter, en commission, différents amendements qui consacrent l’obligation faite aux distributeurs et aux fournisseurs de transmettre au ministère de l’économie les marges exactes qu’ils estiment attribuables au SRP + 10. Nous avons aussi obtenu que ces informations soient rendues publiques.
    Il nous semble désormais nécessaire de renforcer les sanctions, en particulier en cas de non-transmission par les distributeurs ou les fournisseurs de ces documents. La sanction actuelle –⁠ une amende de 375 000 euros – est dérisoire au vu des chiffres d’affaires colossaux enregistrés par ces acteurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe EcoS.) Elle représente l’équivalent de 0,0014 % du chiffre d’affaires de Carrefour, moins de 0,0012 % de celui de Leclerc ou encore moins de 0,0017 % de celui du groupe Les Mousquetaires. C’est pourquoi nous proposons une augmentation substantielle et réellement dissuasive de cette sanction, qui serait calculée en fonction d’un pourcentage du chiffre d’affaires. (M. Pierre Pribetich applaudit.)
    Nous prônons également un renforcement des sanctions en cas de revente à perte d’un produit. On ne peut prétendre protéger les agriculteurs contre la revente à perte et les abus de la grande distribution en appliquant des sanctions aussi faibles que celles qui sont actuellement en vigueur : à peine 75 000 euros d’amende !
    Dans un même souci de transparence, nous souhaitons que le gouvernement demande chaque année un rapport à l’IGF sur les marges brutes réelles des distributeurs, détaillées par catégorie de produits alimentaires et par rayon.
    Faire appliquer les lois Egalim, c’est respecter les agriculteurs et assumer pleinement l’instauration de sanctions dissuasives. Les socialistes seront intransigeants sur ce point et leur vote dépendra du niveau de sanctions que l’hémicycle adoptera. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Mme Marie-Charlotte Garin applaudit également.)

    M. Dominique Potier

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    Excellent !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Eric Liégeon.

    M. Eric Liégeon

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    Alors que la loi d’orientation pour la souveraineté en matière agricole et le renouvellement des générations en agriculture a été définitivement adoptée il y a quelques semaines, nous examinons cet après-midi une proposition de loi non moins cruciale pour les agriculteurs et l’ensemble de la chaîne agroalimentaire. Longtemps, la filière agroalimentaire a été fragilisée par une guerre des prix menée au détriment des agriculteurs et des acteurs de la chaîne. Cette pression constante vers une réduction toujours plus importante des prix a mis en péril le revenu des agriculteurs et la rentabilité de leurs exploitations et affaibli, in fine, la souveraineté alimentaire de notre pays.
    Face à cette situation, le législateur a instauré, grâce aux lois Egalim et Asap, le dispositif du seuil de revente à perte majoré de 10 %, le fameux SRP + 10. Ce mécanisme simple oblige les distributeurs à vendre certains produits alimentaires à un prix supérieur d’au moins 10 % à leur prix d’achat, ce qui constitue un rempart essentiel contre la guerre des prix. L’objectif était de rééquilibrer les relations commerciales et de mettre un terme aux pratiques destructrices qui fragilisaient les producteurs.
    Le dispositif a désormais prouvé son efficacité. Il a permis de stabiliser les prix, d’apporter un soutien indispensable aux filières agricoles et de pacifier les relations commerciales entre producteurs, transformateurs et distributeurs.
    Pourtant, sans intervention législative, le SRP + 10 disparaîtra le 15 avril 2025, ouvrant la porte à un retour aux excès du passé. La proposition de loi que nous examinons répond donc à une urgence : celle de nous positionner sur le renouvellement du dispositif.
    Sa prorogation est essentielle pour garantir, tout d’abord, la stabilité économique de notre filière agricole. En effet, le SRP + 10 a mis un coup d’arrêt à la spirale déflationniste qui détruisait la valeur au sein de la filière agroalimentaire. Si nous laissons le dispositif s’éteindre, nous risquons de voir ressurgir une pression sur les prix, les distributeurs cherchant à imposer de nouveau des marges insoutenables aux producteurs et aux transformateurs.
    Sa prorogation est indispensable, ensuite, pour préserver notre souveraineté alimentaire. Nous traversons une période marquée par de multiples crises : inflation des coûts de production, tensions géopolitiques, impacts du changement climatique. Les agriculteurs et les entreprises agroalimentaires ont besoin d’un cadre stable et prévisible pour investir et s’adapter aux défis de demain. En prolongeant le SRP + 10, nous leur offrons cette visibilité indispensable.
    Enfin, sa prorogation est soutenue par l’ensemble des parties prenantes. C’est assez rare pour le souligner ! En effet, les agriculteurs, les transformateurs ainsi qu’une partie des distributeurs reconnaissent l’importance d’un tel mécanisme. Ce consensus est précieux dans une filière aussi complexe que l’agroalimentaire.
    Si le SRP + 10 a stoppé l’érosion des marges agricoles, sans provoquer d’envolée des prix pour les consommateurs, nous devons néanmoins mesurer ses effets à long terme. Prolonger de trois ans l’application du dispositif permettra de le faire et d’envisager, si nécessaire, des ajustements ciblés.
    Au-delà de la prolongation du SRP + 10, la proposition de loi prévoit également d’assouplir l’encadrement des promotions sur les produits de droguerie, de parfumerie et d’hygiène, dits DPH. Ceux-ci ne relèvent pas des mêmes enjeux que les denrées alimentaires. L’encadrement actuel limite la capacité des distributeurs à proposer des offres promotionnelles attractives, ce qui affecte directement le pouvoir d’achat des Français, dans un contexte où l’inflation reste un sujet de préoccupation majeur.
    Toutefois, nous devons rester vigilants. Nous savons que certaines PME et TPE, qui élaborent les produits concernés, pourraient être fragilisées par une libéralisation trop brutale des promotions. C’est pourquoi nous devons approfondir la réflexion sur ce point, afin de trouver un équilibre entre deux objectifs essentiels : protéger le pouvoir d’achat des consommateurs et assurer la pérennité économique des PME présentes dans nos territoires. Nos débats devront nous conduire à respecter ce nécessaire équilibre.
    Chers collègues, cette proposition de loi est un texte de responsabilité et d’équilibre, qui apporte une réponse pragmatique à des enjeux concrets. Elle permet de sécuriser les filières agricoles, d’offrir une visibilité aux acteurs économiques, de préserver un équilibre entre producteurs, industriels et distributeurs, tout en soutenant le pouvoir d’achat des ménages.
    Le dispositif SRP + 10 a indéniablement joué un rôle important dans la stabilisation du marché des produits agroalimentaires. Les productions agricoles doivent être valorisées à leur juste prix, tout au long de la chaîne de valeur, du producteur au distributeur. Il est essentiel aussi de faire prendre conscience au consommateur du coût réel des produits agricoles et d’en finir avec l’idée de prix constamment tirés vers le bas. C’est ainsi que nous bâtirons une agriculture plus résiliente, à même de faire face aux défis de demain et qui permette à ceux qui nous nourrissent de vivre dignement de leur travail.
    C’est pourquoi le groupe Droite républicaine votera en faveur de la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Boris Tavernier.

    M. Boris Tavernier

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    Le groupe Écologiste et social poursuit un horizon clair : défendre une juste rémunération pour les travailleurs de la terre, les ouvriers et les ouvrières de l’agroalimentaire et les employés de supermarchés, tout en œuvrant à rendre accessible une alimentation de qualité pour tous nos concitoyens.
    Pour cela, la première urgence est d’apaiser la guerre des prix : loin d’être la solution pour que chacun puisse accéder à une alimentation de qualité, elle détruit, en réalité, la valeur de notre alimentation. Si elle est déclarée par les patrons de la grande distribution, ce ne sont pas eux qui en payent le prix ; ce sont leurs salariés, dont les conditions de travail se dégradent, ainsi que leurs franchisés, toujours plus pressurés.
    Cependant, les victimes de cette guerre des prix se trouvent surtout en amont : ce sont non seulement les agriculteurs, qui sont trop nombreux à ne pas pouvoir vivre de leur métier, mais aussi le secteur agroalimentaire. Y figurent, certes, les géants de l’industrie et les multinationales qui pensent davantage à bien nourrir leurs actionnaires qu’à bien nourrir la population –⁠ ceux-là ne font pas partie de la solution –, mais aussi une multitude d’entreprises de transformation alimentaire, de taille plus modeste, des PME porteuses de savoir-faire, qui ne peuvent rivaliser face à quelques mastodontes de la grande distribution organisés en un oligopole prédateur et dominant.
    Les lois Egalim, si elles ne se montrent de toute évidence pas à la hauteur des enjeux, visent à lutter contre cela.
    Bien qu’elles soient insuffisantes, elles ont permis d’améliorer les négociations commerciales en les rééquilibrant. Elles prévoyaient notamment d’expérimenter un seuil de revente à perte majoré, le fameux SRP + 10, dont la prolongation nous est proposée aujourd’hui. Initialement, on pensait qu’en obligeant la grande distribution à dégager une marge minimale, on ferait baisser la tension lors des négociations commerciales et qu’on apaiserait ainsi la guerre des prix.
    Qu’en est-il des résultats ? Il est difficile d’être catégorique. La mesure a eu un effet inflationniste certain –⁠ on estime que les prix ont augmenté de 0,17 % entre 2019 et 2020. Cela peut paraître faible, mais pour certains porte-monnaie, une petite hausse par ici, une petite hausse par là, cela finit par peser, et compter. Par ailleurs, les surplus de marge ont-ils ruisselé jusqu’aux producteurs ? Il est permis d’en douter. Il est très difficile d’évaluer ce qu’il en est véritablement puisqu’on fait face à un jeu de poker menteur où distributeurs et transformateurs se renvoient la balle.

    M. André Chassaigne

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    Eh oui !

    M. Boris Tavernier

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    Chacun continue à jouer son rôle dans cette sorte de tragi-comédie qui ne tient que par l’opacité du système.
    Ainsi, la prolongation du SRP + 10 doit s’accompagner d’un pas en avant vers plus de transparence. Il faut exiger de la grande distribution qu’elle rende des comptes sur l’utilisation du surplus de marge –⁠ faute de quoi elle doit être sanctionnée. Nous y avons travaillé en commission. Néanmoins, le régime de sanction actuel, qui prévoit une amende administrative plafonnée à 350 000 euros, semble bien peu efficace, pour ne pas dire franchement naïf. Ces géants de la grande distribution, dont le chiffre d’affaires cumulé atteint plusieurs centaines de milliards d’euros, qui sur ce sujet ne se montrent guère coopératifs, et qui ne se conforment déjà pas à la loi, plieront-ils devant une menace si faible, et changeront-ils de comportement ? L’espoir fait vivre, mais assurons nos arrières : nous proposerons des amendements pour créer une sanction efficace, c’est-à-dire une sanction que nous n’aurons pas besoin d’appliquer puisqu’elle aura été assez dissuasive pour contraindre ces géants à respecter la loi.
    Un système alimentaire opaque est un système alimentaire injuste. C’est un système dans lequel les plus puissants dictent les règles, font les prix et décident ce qu’il y aura dans les rayons et donc dans notre assiette. C’est pourquoi nous devons exiger davantage de transparence, première étape pour aller vers un système alimentaire qui permette à tous ceux qui le font vivre de bien vivre de leur travail et aux mangeurs de savoir ce qu’ils mangent. Nous avons donc déposé un amendement pour exiger la transparence s’agissant des marges de la grande distribution et des plus gros acteurs de l’industrie agroalimentaire.
    Le SRP + 10 doit être prolongé.

    M. André Chassaigne

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    Très bien !

    M. Boris Tavernier

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    C’est un choix dicté par la sagesse –⁠ il s’agit d’éviter d’intensifier la guerre des prix –, mais c’est aussi un choix par dépit.

    M. André Chassaigne

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    Eh oui !

    M. Boris Tavernier

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    Profitons au moins de l’examen de cette loi pour avancer vers plus de transparence, mais gardons les pieds sur terre : la prolongation du seuil de revente à perte majoré ne sera pas suffisante, plus de transparence s’agissant des marges non plus –⁠ si tant est que nous l’obtenions.
    Pas moins de 45 % des Français sont contraints de se restreindre en matière d’alimentation. Un adulte sur deux est en surpoids. En vingt ans, le nombre de diabétiques a augmenté de 160 %. Près d’un agriculteur sur cinq vit sous le seuil de pauvreté. Ne perdons plus de temps à légiférer pour en faire le minimum, à nous satisfaire de prolonger ici les tickets restos, là l’encadrement des promotions. En matière d’alimentation, les enjeux sont bien plus importants. Il devient urgent de mobiliser gouvernement et parlementaires autour d’un projet clair : que les Français puissent mieux manger, que la France soit à la hauteur de sa double réputation de pays de la gastronomie et de patrie des droits de l’homme. N’attendons pas, dotons notre pays d’une ambitieuse loi-cadre faisant de l’alimentation un droit ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et GDR. –⁠ M. Richard Ramos applaudit également.)

    M. André Chassaigne

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    Excellent !

    Mme Marie-Charlotte Garin

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    Je n’aurais pas mieux dit !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Richard Ramos.

    M. Richard Ramos

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    Cher André Chassaigne, c’est bientôt l’une des dernières occasions de batailler avec vous au sujet de l’agriculture et de l’alimentation. Nous ne partageons pas toujours les mêmes idées, mais nous avons en commun le goût du territoire et des Français. Nous regretterons la façon dont vous menez vos combats en matière d’agriculture et d’alimentation. Honneur vous soit rendu ! (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, EPR, SOC, DR, EcoS, HOR, LIOT et GDR.)
    On pourrait penser que le SRP + 10 est une nouveauté de l’assurance vie ou un nouveau produit bancaire ; ce n’est pas ce dont il s’agit. Alors que nous délibérons sur la répartition de la valeur, entre le paysan qui se lève tôt tous les matins et le distributeur, nous voyons bien que le monde va mal. Aucun patron de la grande distribution ne met fin à ses jours car il ne gagne pas assez, alors que des agriculteurs sont en train d’y réfléchir en ce moment même. C’est un problème. (M. Arnaud Le Gall s’exclame.)
    Les dirigeants des petites et moyennes entreprises où l’on transforme les produits alimentaires arpentent comme jamais auparavant le chemin entre l’usine et le tribunal de commerce. Cette loi qui paraît anodine et de portée modeste doit déterminer comment on distribue la valeur entre le paysan qui se lève tous les matins et celui qui transforme le produit car il dispose d’un savoir-faire spécifique. Les petits industriels français sont souvent des artisans qui ont réussi, et qui ont gardé leur tour de main, leur recette, en les massifiant un peu pour que le produit puisse être légèrement moins cher. Cette loi permet de prendre en considération la répartition de la valeur de ce que nous mangeons.
    N’oublions jamais que manger, ce n’est pas anodin : comme respirer ou boire de l’eau, c’est vital. Manger, ce n’est pas glisser une pilule entre la lèvre supérieure et la lèvre inférieure, pilule qui contiendrait le bon nombre de calories et toutes les vitamines dont nous avons besoin. Manger, c’est un art de vivre, c’est considérer le produit. Quand on accorde une appellation d’origine protégée (AOP) à des fromages au lait cru, c’est parce que le lait d’alpage n’a pas le même goût que le lait produit en plaine. Manger, c’est raconter une histoire, c’est raconter la France.
    La grande distribution est le dernier maillon de la chaîne. Elle a parfois créé un gouffre entre celui qui produit et celui qui consomme. Autrefois, il nous suffisait d’aller voir le producteur pour savoir ce qu’on mangeait. Aujourd’hui, certains enfants pensent que le lait sort du robinet. Nous abordons par le petit bout de la lorgnette une question essentielle, la gastronomie française, qui a été inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco –⁠ je parle du repas quotidien des Français, et non du repas gastronomique.
    Le SRP + 10, ce n’est pas terrible. On ne sait pas vraiment s’il a engendré un ruissellement.

    M. Arnaud Le Gall

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    Et on compte le prolonger !

    M. Richard Ramos

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    Sous la houlette de madame la présidente et de monsieur le rapporteur, d’excellentes discussions ont eu lieu en commission entre députés de tous les bancs. Nous nous sommes tous interrogés sur les retombées du dispositif. Une seule chose est certaine : dans la cour de ferme et dans l’usine, on nous a demandé de ne pas le supprimer. Faute de quoi, il ne faudra pas mettre des caméras dans les box des animaux, mais dans les salles de négociation. On nous a dit : « Ils viendront nous étrangler encore davantage ! Alors gardez-le, s’il vous plaît ! »
    Si nous sommes à l’écoute de la France, nous devons conserver le dispositif SRP + 10. Le consommateur veut toujours que les produits soient moins chers. Méfions-nous de cette volonté de baisse des prix. Les distributeurs ont déjà pratiqué la gruge à l’emballage, en diminuant les quantités tout en conservant les mêmes conditionnements, ou en changeant les recettes des produits les moins chers, en augmentant les quantités de sucres, de gras et de sel. Dans les semaines et les mois qui viennent, nous risquons de nous retrouver avec des produits importés, alors qu’ils sont pour le moment fabriqués en France. Gardons le SRP + 10 car il nous protège et protège, certes dans une moindre mesure, les paysans.
    Sur la question des produits DPH, les débats ont fait évoluer mon positionnement. Il faut faire très attention. Je ne pleurerai pas sur le sort d’Unilever et consorts, et sur les promotions qu’ils peuvent faire ou non. Le groupe Démocrates défendra le ruissellement du dispositif SRP + 10 pour les cours de ferme, et sera vigilant quant aux produits DPH. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur plusieurs bancs des groupes SOC, EcoS et GDR.)

    M. André Chassaigne

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    Bravo ! Pour un centriste, c’était bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Lionel Vuibert.

    M. Lionel Vuibert

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    Depuis plusieurs années, notre secteur agroalimentaire est fragilisé par une guerre des prix qui menace directement les agriculteurs et les transformateurs. Cette course effrénée au prix le plus bas met sous pression les producteurs, limite leur capacité à investir et à innover et fragilise l’ensemble des chaînes de valeur. Aujourd’hui, nous sommes face à un choix crucial : préserver un cadre économique stable qui protège nos filières agricoles ou revenir à des pratiques commerciales destructrices.
    La proposition de loi défendue par le député Stéphane Travert s’inscrit dans une dynamique de protection et de renforcement de la compétitivité du secteur agroalimentaire. Elle prolonge jusqu’en 2028 le seuil de revente à perte majoré de 10 %, un dispositif ayant déjà prouvé son efficacité : il a limité la guerre des prix en garantissant aux producteurs une meilleure rémunération et en stabilisant les marges des acteurs de la filière. Par ailleurs, la loi prévoit la suppression des restrictions sur les produits de droguerie, de parfumerie et d’hygiène, ce qui permettra d’offrir aux consommateurs des prix plus attractifs tout en dynamisant le secteur de la grande distribution.
    Cette loi va dans le bon sens mais n’est pas suffisante. Nous devons aller plus loin et trouver un véritable point d’équilibre entre producteurs, consommateurs et distributeurs. Il ne s’agit pas d’opposer les intérêts, mais de bâtir une politique tenant compte de tous ces enjeux, sans en sacrifier un au profit des autres.
    Nous le voyons bien : la tentation d’une régulation excessive d’un côté ou d’un abandon complet à la loi du marché de l’autre n’apporterait pas de solution durable. Si nous voulons véritablement protéger nos agriculteurs, nous devons aussi nous assurer que leurs produits restent accessibles aux Français, déjà touchés par une inflation qui pèse lourdement sur leur budget alimentaire.
    Mais cet équilibre ne pourra être atteint sans une politique qui investit dans l’avenir. Nos agriculteurs ne demandent pas seulement une protection, mais aussi les moyens de s’adapter. La modernisation des exploitations, l’innovation technologique et l’accompagnement des transitions écologiques doivent être au cœur de notre action. Plutôt que de freiner leur compétitivité par une réglementation excessive ou des contraintes économiques mal calibrées, donnons-leur les outils pour réussir. Une agriculture forte, c’est une agriculture qui peut se projeter sur le long terme et non une filière condamnée à survivre au jour le jour sous la pression des coûts et des normes.
    Nous devons aussi rester vigilants face à un risque qui se profile au-delà de nos frontières : le retour des tensions, voire des guerres commerciales, qui ne créent en fin de compte que des perdants. À chaque fois que des blocages économiques entre nations apparaissent, ce sont les consommateurs et les producteurs qui en paient le prix. La multiplication des barrières, des représailles et des surenchères ne renforce ni notre compétitivité, ni notre souveraineté. Elle nous isole et fragilise notre position.
    C’est pourquoi notre action doit être à la fois ferme et équilibrée : il faut défendre nos producteurs tout en maintenant un cadre de négociation ouvert avec nos partenaires commerciaux. Cela ne signifie pas qu’il faudrait accepter des accords fragilisant les producteurs : l’accord avec le Mercosur n’est pas acceptable en l’état. Il créerait une concurrence déloyale pour nos agriculteurs, en favorisant des importations qui ne respectent pas les mêmes standards environnementaux et sanitaires que ceux imposés en France et en Europe. Comment demander à nos agriculteurs de fournir toujours plus d’efforts tout en ouvrant grand nos marchés à des produits qui ne répondent pas aux mêmes exigences ? Ce serait un non-sens économique et écologique. Notre souveraineté alimentaire ne peut être bradée sur l’autel du libre-échange déséquilibré.
    L’avenir de notre secteur agroalimentaire dépend de notre capacité à instaurer des règles claires, justes et cohérentes, au service de l’ensemble des acteurs. Il ne s’agit pas de céder aux pressions du court terme en prenant des mesures simplistes, mais de construire une régulation intelligente qui protège sans contraindre, qui soutient sans déséquilibrer, et qui assure aux producteurs un cadre de concurrence équitable et aux consommateurs un accès durable à des produits de qualité au juste prix.

    Mme la présidente

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    La discussion générale est close.
    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Je vous remercie tous pour vos contributions, même si je suis en désaccord sur certains points.
    Certains ont dénoncé l’absence d’étude d’impact. Je fais partie des parlementaires qui défendent depuis bien longtemps la possibilité d’obtenir une étude d’impact des propositions de loi. Peut-être n’en aurions-nous pas une dizaine à signer chaque jour si nous disposions de véritables études d’impact.

    Mme Danielle Brulebois

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    Eh oui !

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    D’autres ont souligné que le texte originel avait quelque peu évolué ; c’est un des avantages du travail en commission, de la concertation et des auditions. Les auditions que nous avons menées ont conduit à des évolutions, notamment en ce qui concerne les produits DPH. La proposition initiale supprimait l’extension du dispositif pour ces produits. Il aurait disparu dès la promulgation de la loi. En commission, nous avons abouti à un compromis : ce dispositif sera prolongé jusqu’en avril 2026.

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Les auditions, la discussion en commission permettent donc d’aboutir aux compromis nécessaires à l’élaboration d’un texte.
    Je suis totalement favorable à la proposition de Thierry Benoit de créer une commission d’enquête. Nous avons en effet besoin d’éléments objectifs, chiffrés pour mesurer l’efficacité des dispositifs que nous votons comme le SRP ou l’encadrement des promotions sur les produits alimentaires et sur les produits de droguerie, parfumerie et hygiène.
    Une clause de revoyure en 2026 s’impose. Nous aurons peut-être l’occasion de légiférer de nouveau, soit par le biais d’une proposition de loi assortie d’une étude d’impact –⁠ donc de données chiffrées – soit d’un projet de loi Egalim 4 qui semble se profiler.
    J’ai apprécié la métaphore du président Chassaigne. Permettez-moi, en tant qu’élu de la Manche –⁠ et je salue notre collègue Anna Pic –, d’affirmer que le parapluie de Cherbourg permet mieux de mesurer, au seul bruit qu’il produit, l’efficacité du ruissellement. (Sourires.) Reste que le SRP + 10, dispositif de bon sens, recueille le consensus de l’ensemble des acteurs car il a contribué à protéger agriculteurs et entreprises de la spirale de la guerre des prix, à redonner de la valeur aux produits agricoles, et permis une meilleure répartition des marges. Ce fut le cas dans la filière laitière, parce qu’elle est très contractualisée et bien organisée. Faisons donc la promotion de la contractualisation pour d’autres familles de produits.
    L’encadrement des promotions sur les produits alimentaires ne fait quant à lui pas débat : nous en avons en effet besoin pour éviter la perte de valeur sur les produits agricoles –⁠ perte qui a été en 2016 de 1 milliard d’euros, un chiffre que nous ne devons plus nous permettre. L’encadrement est aussi un moyen d’éviter de perdre les repères sur les productions alimentaires.
    Nous avons obtenu en commission de prolonger l’encadrement des promotions sur les produits de DPH jusqu’en avril 2026 ce qui nous laissera le temps d’objectiver les chiffres. En s’exprimant, parmi d’autres députés, au cours de la discussion générale, la ministre Olivia Grégoire a proposé une clause de revoyure, que nous pourrions prévoir dès le printemps 2026, afin de mesurer l’efficacité du dispositif à l’aide de chiffres fournis par les industriels mais aussi par les distributeurs.
    Je terminerai en soulignant que nous devons prêter une attention toute particulière aux petites et moyennes entreprises qui ne peuvent supporter les promotions massives des grands groupes. Les PME doivent avoir la capacité de valoriser leurs produits à travers des promotions encadrées. Nous verrons, au cours de la discussion, le délai de prolongation que vous souhaiterez instaurer.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Je remercie chacun pour son intervention. Tout le monde, je crois, est d’accord pour une meilleure répartition de la valeur ajoutée dans le monde agricole et, à cette fin, nous souhaitons tous la formation d’une équipe de France de l’agroalimentaire.
    N’oublions toutefois pas le secteur industriel qui a lui aussi besoin de marges de manœuvre pour continuer d’investir dans tout ce qui concerne la décarbonation et dans tous les outils de production nécessaires pour obtenir une meilleure rentabilité, une meilleure compétitivité.
    Manon Meunier et Hélène Laporte ont rappelé les attentes des agriculteurs. Ils sont favorables à toutes les dispositions des lois Egalim 1, 2 et 3. Heureusement que ces lois ont été votées : même si elles l’ont fait peut-être insuffisamment, elles ont protégé en partie les agriculteurs et j’en veux pour preuve l’augmentation de leur excédent brut d’exploitation, de 28 % en 2021 par rapport à 2020 et de 17 % en 2022 par rapport à 2021.
    Thierry Benoit a lui aussi fait état des préoccupations des agriculteurs et nous a invités à prendre conscience de la nécessité de travailler à l’échelon européen. Nous ne pouvons qu’être d’accord. Il y a quelques semaines, dans le cadre des contrôles qui suivent les négociations commerciales, j’ai ainsi demandé que la DGCCRF contrôle attentivement toutes les centrales européennes. Je me permets d’évoquer une piste qui sera sans doute abordée lors de l’examen du futur projet de loi Egalim 4 : une procédure a été intentée par la DGCCRF contre une centrale qui ne souhaitait pas se conformer au droit européen et dépendre d’un autre droit ; l’État a gagné en première instance mais aussi en appel, au printemps 2024, et nous attendons, dans les mois ou les années qui viennent, la décision de la Cour de cassation auprès de laquelle la centrale a formé un pourvoi. Ainsi intervenons-nous car il est essentiel de faire valoir que c’est le droit français qui prime.
    Madame Thomin, je connais l’attention que vous portez aux sanctions –⁠ c’est également le cas de Dominique Potier –, et je m’accorde avec vous pour estimer qu’il en faut –⁠ le texte et les amendements en proposent d’ailleurs pour la non-communication des documents ainsi que pour le non-respect du dispositif SRP. En revanche, nous devons toujours veiller à la proportionnalité entre la sanction et l’infraction ; or plusieurs amendements ne respectent pas cette proportionnalité.
    Vous avez presque tous regretté l’absence de document permettant d’objectiver les réflexions menées et les orientations envisagées et je ne peux que partager ce sentiment. Je rappellerai toutefois que des rapports ont tout de même été rendus. Ainsi la loi Egalim 1 de 2018 prévoyait la remise de deux rapports, un avant le 1er octobre 2021, un autre avant le 1er octobre 2022, sur les effets de la construction des prix et sur le partage de la valeur après application du SRP + 10 et sur les effets de l’encadrement de la promotion des produits alimentaires. La loi Egalim 2 de 2021 prévoyait d’aller plus loin, de compléter ces rapports par des données sur l’usage par les distributeurs du dispositif SRP + 10. Le premier rapport a été rendu public et l’autre a été communiqué au Parlement.
    La loi Egalim 3 avait prévu la remise d’un rapport chaque année au Parlement –⁠ pour les premiers, ce devait être avant septembre 2023 puis avant septembre 2024. Or ces rapports n’ont pas été rendus du fait de difficultés dont nous ont fait part les distributeurs pour nous fournir les renseignements exigés. D’abord, ces rapports ont été demandés en 2023 mais avec 2019 pour référence. Ensuite, des imprécisions comptables et juridiques ont posé problème à plusieurs distributeurs, comme la notion de surplus de chiffre d’affaires –⁠ comment l’évaluer, entre le SRP et le SRP + 10, étant entendu que ce calcul peut avoir un impact sur les volumes, un produit au prix SRP + 10 pouvant être moins vendu qu’un produit au prix SRP ? Enfin, la méthode à appliquer pour déterminer le lien entre le surplus de chiffre d’affaires et la revalorisation des prix d’achat est imprécise.
    Je comprends donc que, dans ces conditions, il soit impossible d’établir les données réclamées mais nous aurons l’occasion d’y revenir en examinant les amendements.
    Olivia Grégoire a demandé à raison une prolongation de l’encadrement des promotions sur les produits DPH.

    M. Sylvain Maillard

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    Très bien !

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Ce secteur ne relève logiquement pas des rapports prévus par les lois Egalim 1 et 2 puisque ces textes ne font pas mention du DPH. En revanche, aux termes de la loi Egalim 3, je l’ai dit, un rapport doit être remis annuellement avant le 1er octobre, portant en particulier sur l’encadrement des promotions alimentaires, d’un côté, et du secteur DPH, de l’autre. Ce rapport, je le répète, n’a pas été rendu. J’ai bien entendu votre demande d’un rapport sur des sujets connexes afin d’éclairer les parlementaires, qu’il s’agisse du pouvoir d’achat ou de l’impact de l’encadrement des promotions sur les produits de DPH concernant le hard-discount –⁠ on peut en effet penser qu’il y a eu un report des achats vers d’autres acteurs. Tout cela doit être mesuré.
    Je vous propose une remise du rapport à l’automne prochain. J’avais dans un premier temps pensé à janvier ou février 2026 mais cette échéance me paraissait trop proche du 15 avril ; or il est important que vous en disposiez plus tôt afin que vous puissiez réagir et que nous évitions une période de flou semblable à celle que nous avons connue avec le titre-restaurant.

    Discussion des articles

    Mme la présidente

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    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

    Article 1er

    Mme la présidente

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    Chers collègues, avant de donner la parole aux orateurs inscrits sur l’article 1er, je vous informe que, sur l’amendement n° 43, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Nous vivons vraiment une période incroyable. Tout le monde sait que le SRP n’a pas fonctionné. Tout le monde sait que la fin des promotions a dégradé le pouvoir d’achat des classes moyennes et des classes populaires. Mais vous voulez continuer et cela uniquement par orgueil.

    M. Sylvain Maillard, M. Richard Ramos et M. Nicolas Turquois

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    Oh !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    C’est votre trophée, c’est la mesure des macronistes concernant le monde agricole depuis sept ans. C’est votre seul élément de doctrine, à savoir le ruissellement. Comme avec la fiscalité, vous avez, avec le monde agricole, renversé les lois de la physique en inventant le ruissellement vers le haut : ce sont les classes populaires et les classes moyennes qui paient les marges de la grande distribution et qui paient les marges de la grande industrie. Voilà votre bilan.
    Vous vous êtes trompés et, comme vous êtes incapables de le reconnaître, nous devons continuer avec ces mesures absurdes.
    Le paradoxe étant que les Français n’ont jamais payé aussi cher leur alimentation et que pour la première fois depuis la seconde guerre mondiale, des familles se privent d’aliments. On observe même un retour du scorbut chez certaines d’entre elles ! C’est votre bilan ! Jamais l’alimentation n’a été aussi chère et pourtant les agriculteurs ne s’en sortent pas.
    Bien que cela n’ait pas fonctionné, vous vous obstinez ; simplement parce que vous ne voulez pas vous attaquer au pouvoir exorbitant de la grande distribution. Le marché agricole doit constituer une exception. Nous sommes pour que l’agriculture constitue une exception commerciale autant à l’échelle internationale que communautaire, parce que le marché ne fonctionne pas concernant l’agriculture.
    La grande distribution a un pouvoir exorbitant et vous avez réussi à en créer un deuxième, celui de l’industrie agroalimentaire, dotée d’un lobby puissant. C’est grâce à vous ! Vous ne voulez pas vous y attaquer ; vous préférez vous en prendre aux consommateurs. Ici comme ailleurs, vous punissez les Français, car ce serait de leur faute si les agriculteurs ne s’en sortent pas. Non ! C’est votre faute, parce que vous vous soumettez à la grande distribution et à l’industrie agroalimentaire. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier.

    M. Dominique Potier

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    L’examen de la proposition de loi que nous entamons n’appelle aucune démagogie ou simplisme, comme nous venons de l’entendre ; il exige un travail précis et engagé.
    Madame la ministre, quelles sont les échéances concernant la loi Egalim 4 ? Étant donné que les délais de remise des rapports dépendront d’elle, on a demandé des précisions à ce sujet.
    Nous nous projetons dans deux ans, mais personne ne comprendrait que nous attendions si longtemps pour nous attaquer au système oligarchique de la grande distribution, tel qu’il est régulièrement dénoncé par la gauche, mais aussi par Charles de Courson et d’autres. Nous avons besoin de précisions concernant le calendrier.
    Nous avons également besoin de savoir comment le gouvernement compte associer l’Assemblée nationale à la refonte du plan stratégique national (PSN), lequel prévoit des programmes opérationnels renforçant le pouvoir des producteurs dans le cadre des négociations commerciales. C’est très important.
    Ce dont nous débattons n’est pas le vrai sujet ; il est ailleurs. Nous avons néanmoins besoin d’avoir un horizon politique. Toute précision de votre part à ce sujet serait précieuse.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Richard Ramos.

    M. Richard Ramos

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    Monsieur Tanguy, ni les PME dans nos territoires ni les petits paysans ne sont favorables à l’abandon du SRP + 10. Ils sont pour son maintien. (Mme Olivia Grégoire applaudit.)

    Mme Hélène Laporte

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    Ce n’est pas vrai !

    M. Richard Ramos

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    Expliquez aux producteurs laitiers que cela n’a pas fonctionné ! Le seul qui est aligné avec votre position, c’est Michel-Édouard Leclerc ! Il est le seul ! Vous nous refaites l’alliance du RN avec Michel-Édouard Leclerc ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Laure Lavalette

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    À d’autres !

    M. Richard Ramos

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    Encourager les prix bas se fait parfois au détriment de la qualité des produits. Ne l’oubliez pas, monsieur Tanguy ! Courir après les prix bas, au prétexte que ce serait toujours dans l’intérêt des consommateurs, c’est mépriser les plus humbles.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Ce n’est pas ce que j’ai dit !

    M. Richard Ramos

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    Il faut d’abord renforcer la valeur, puis nous nous bagarrerons au sujet de sa répartition.
    Il faut maintenir le SRP + 10. Aujourd’hui, même si ça n’était pas dans la cour de ferme, tous les acteurs –⁠ paysans et petits industriels – nous ont appelé à le maintenir ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme Hélène Laporte et M. Jean-Philippe Tanguy

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    Ce n’est pas vrai !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles de Courson.

    M. Charles de Courson

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    Puisque cela fait trente-deux ans que j’ai le privilège d’être député, je me permets de vous dire que nous débattons depuis plusieurs décennies de savoir si une économie de marché fonctionne dans ce domaine. La réponse à cette question simple est non. (« Ah ! » sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Nous assistons à une concentration toujours plus importante dans le secteur de la grande distribution, notamment pour l’alimentaire.
    Nous avons essayé de réglementer, mais les centrales d’achat, qui sont au cœur du problème, ont été délocalisées à l’étranger. Légiférer à l’échelle nationale n’est donc pas la bonne approche. Il faudrait une directive communautaire de décartellisation de la grande distribution en Europe. Voilà la solution.
    Mme la ministre a évoqué des réflexions à ce sujet au niveau communautaire, mais elles n’aboutissent pas. Les eurodéputés doivent pousser. En attendant, le paradoxe est que nous sommes obligés de prolonger le SRP + 10, parce que, comme l’a rappelé Mme la ministre, nous sommes incapables de savoir si les lois Egalim ont été efficaces pour atteindre les objectifs que nous nous étions donnés. À savoir, une meilleure rémunération pour les produits agricoles et les produits DPH.

    Mme Hélène Laporte

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    Dans ce cas, pourquoi le maintenir ?

    M. Charles de Courson

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    Nous aboutirons seulement à un pis-aller, puisque nous ne pouvons que reconduire les dispositions existantes jusqu’en 2028, mais il faut, madame la ministre, que nous ayons une réponse à la question de savoir si les textes que nous avons déjà adoptés ont été efficaces. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.)

    Rappel au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy, pour un rappel au règlement.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Il se fonde sur les articles 1er et 2 du code de déontologie des députés. Nous n’allons pas commencer comme ça, chers collègues. Vous m’avez déjà fait le coup, lors de l’examen de la loi Descrozaille, de m’accuser d’avoir rencontré M. Leclerc. Je vous avais alors démontré que cela n’avait aucun sens, puisque je ne l’ai jamais rencontré, si ce n’est, si vous voulez tout savoir, une fois il y a dix ans, dans mon club de sport. Impossible donc de négocier grand-chose concernant les lois Descrozaille et Egalim.
    Ça suffit ; débattons argument contre argument. Je vous interdis de mettre en cause mon intégrité déontologique ainsi que ma probité. Si vous avez quelque chose à révéler à nos concitoyens, sortez de cet hémicycle qui vous protège et ayez recours à l’article 40 du code de procédure pénale. À mon avis, c’est vous qui serez condamnés. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. Inaki Echaniz

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    On se demande comment tout cela va finir !

    Article 1er (suite)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Hélène Laporte, pour soutenir l’amendement no 43.

    Mme Hélène Laporte

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    Madame la ministre, il faut de la cohérence. Si les agriculteurs manifestent dans la rue, c’est parce qu’ils sont satisfaits de leurs rémunérations –⁠ c’est bien connu.
    Faut-il s’obstiner à faire vivre un système qui n’a jamais fait ses preuves et dont les dégâts économiques sont établis ? Le SRP + 10, ce sont entre 600 millions et 1 milliard d’euros payés chaque année en plus par les consommateurs, sans aucun bénéfice pour les agriculteurs. Il peut même accroître la pression sur les prix, comme cela avait été démontré pour la filière fruits et légumes, obligée de sortir du dispositif. Les législateurs, y compris les macronistes, doivent reconnaître s’être trompés.
    Cet amendement vise à supprimer l’article 125 de la loi du 7 décembre 2020, seule mesure qu’impose le bon sens –⁠ lequel devrait pourtant nous réunir. Arrêtons les remèdes inefficaces et débattons au plus tôt des vraies réponses à apporter aux exploitations agricoles qui sont nombreuses à être au bord du gouffre. Allez en voir, ça vous changera ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Laure Lavalette

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    Exactement !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Monsieur Tanguy, vous nous alertez quant au retour du scorbut, mais il y a d’autres périls tout aussi dangereux dans le monde, à commencer par le populisme. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem. –⁠ M. Lionel Vuibert applaudit également. –⁠ « Oh ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.)
    Madame Laporte, les divergences que nous avons avec le Rassemblement national sur ce sujet sont connues –⁠ elles ont été rappelées en commission et à l’occasion de la discussion générale –, mais je trouve, malgré ces désaccords, qu’il est irresponsable de soutenir l’abandon brutal de mesures de régulation qui, certains l’ont rappelé, avaient prouvé leur efficacité, notamment dans la filière laitière.
    Votre amendement déstabiliserait à nouveau les chaînes de production et de distribution alimentaire.

    Mme Hélène Laporte

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    Ce n’est pas vrai !

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Les agriculteurs et les PME en paieraient encore le prix. C’est la raison pour laquelle ils ont demandé le maintien du SRP + 10 et le report de sa date d’expiration.

    M. Julien Guibert

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    Le dispositif n’est pas efficace !

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Je suis défavorable à votre amendement et à tous ceux qui auraient le même objet.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Madame Laporte, votre amendement, en supprimant le SRP + 10 et l’encadrement des promotions sur les produits alimentaires et produits DPH, viderait tout simplement la proposition de loi de son contenu. Vous la mettriez à nu.
    Certes, le SRP + 10 n’est pas parfait, mais personne n’a prétendu le contraire. Néanmoins, de son abandon résulterait une guerre des prix qui serait préjudiciable pour toute la chaîne économique –⁠ de l’agriculteur au distributeur, en passant par l’industriel.
    Monsieur Tanguy, vous avez attiré notre attention sur les consommateurs. Vous avez raison, mais il ne faut pas oublier qu’ils sont également des citoyens. Nous avons besoin d’agriculteurs qui vivent durablement et convenablement de leur métier ainsi que d’industries agroalimentaires –⁠ qui pour une grande part sont des PME – qui participent à la vitalité de nos territoires. C’est l’esprit de ce texte.
    Le retour en arrière que vous appelez de vos vœux serait préjudiciable. Ne plus encadrer les promotions alimentaires serait nocif pour le secteur agricole, car les agriculteurs seraient les premiers à en pâtir.
    En conséquence, j’émets un avis défavorable.
    Monsieur Potier, concernant la loi Egalim 4, nous devons d’abord tirer les enseignements des négociations commerciales qui viennent de s’achever. Comme vous le savez, elles ont été très tendues.
    Dès le printemps, nous travaillerons à un texte, avec pour objectif de le finaliser avant les prochaines négociations commerciales. Le PSN relève quant à lui des compétences de ma collègue Annie Genevard, ministre de l’agriculture.
    Monsieur de Courson, vous avez rappelé la nécessité d’obtenir des données pour nourrir nos réflexions et objectiver la situation. Nous sommes d’accord. Comme je m’y suis engagée, en réponse à une demande d’Olivia Grégoire, le gouvernement publiera un rapport à l’automne 2025 sur le sujet du SRP appliqué aux produits DPH et sur les effets de l’encadrement des promotions, notamment sur le hard-discount, sur le pouvoir d’achat des Français.
    Un amendement défendu par M. Potier conduirait le gouvernement à confier à l’IGF un rapport sur les marges brutes réelles des distributeurs par catégorie de produit et la péréquation des marges. Il apporterait des réponses et permettrait de disposer d’éléments objectifs et chiffrés pour déterminer les dispositifs à conserver selon les impacts qu’ils auront eus.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Monsieur le rapporteur, vous pouvez affirmer que le Rassemblement national est populiste : nous en sommes fiers ! D’autant plus quand il s’agit d’agriculture, puisque le populisme, historiquement parlant, est né de la défense de l’outil de travail, de la possession de la terre et de la capacité des agriculteurs à vivre de leur travail. C’est l’origine du populisme.

    M. Frédéric Petit

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    Révisez l’histoire !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Cela nous différencie de vous, qui êtes en cogestion avec les socialistes depuis bien trop longtemps, surtout au niveau européen, sur ce sujet. Alors que nous disposions d’une agriculture flamboyante, qui avait relevé tous les défis de l’après-guerre, vous l’avez mise à terre et les agriculteurs et les agricultrices ne peuvent plus vivre de leur travail. C’est votre triste bilan et nous insulter n’y changera rien.
    Avec votre petite blague, je constate que vous prenez le retour du scorbut dans notre pays avec légèreté. Il n’y a pas de quoi rire ! Si cela vous amuse que les classes populaires n’aient plus les moyens de se nourrir correctement et ne puissent plus acheter des produits agricoles français, ça en dit long sur vous. Ce n’est pas rassurant concernant les dispositions que vous avez prises ces dernières années.
    Vous n’êtes pas capables de prouver que ce que vous avez fait a fonctionné.

    Mme Olivia Grégoire

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    Vous n’êtes pas capables de prouver le contraire !

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Vous nous annoncez que l’abandon du SRP + 10 conduirait à une guerre des prix, mais dès lors que vous avez fixé un indice d’une valeur de 10 % identique pour tout le monde, la guerre des prix peut déjà avoir lieu. Si chacun dispose d’un sac de sable de dix kilos, tout le monde peut se battre avec !
    La guerre des prix a déjà lieu. La grande distribution assume d’avoir des marges tellement importantes qu’elle peut se permettre de faire des publicités toujours plus racoleuses et agressives. La guerre des prix telle que la mène le fameux Leclerc a lieu aujourd’hui. Si vous pensez que vos dispositifs ont permis de l’éviter au profit des agriculteurs, c’est que vous vivez dans une réalité parallèle.
    La réalité, c’est que votre stratagème de cogestion de la crise des revenus agricoles avec la direction de la FNSEA, la grande distribution et la grande industrie agroalimentaire, fondé sur l’argument selon lequel les difficultés économiques des agriculteurs sont imputables aux Français car ceux-ci ne paient pas assez cher leur alimentation, a échoué. Cela prouve que vous avez menti ; les seuls responsables de la misère des agriculteurs, c’est vous ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thierry Benoit.

    M. Thierry Benoit

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    Sans faire la leçon à qui que ce soit, je rappellerai que l’instauration du SRP + 10 % est le fruit d’un constat. La loi de modernisation de l’économie, votée par le Parlement il y a plus de quinze ans, a entraîné une guerre des prix et a mené à la situation que nous avons observée dans le cadre de la commission d’enquête sur la situation et les pratiques de la grande distribution, formée en 2019 : les centrales d’achats de la grande distribution négociaient systématiquement avec les industriels la baisse des prix pratiqués l’année précédente. Pour fixer les prix d’une année donnée, ils se contentaient de diminuer de 2 % ou de 5 % les prix de l’année d’avant.
    Le SRP, à mon sens, a deux avantages. Premièrement, il a mis un terme à ces négociations déflationnistes.

    Mme Hélène Laporte

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    Ce n’est pas vrai !

    M. Thierry Benoit

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    Deuxièmement, il a interdit au secteur de la distribution et à ses centrales d’achats de fixer des tarifs de revente à perte, une pratique inacceptable dans un pays comme le nôtre. La distribution avait l’habitude de revendre à perte les produits alimentaires et de se refaire une santé grâce à d’autres produits comme la parfumerie, l’hygiène ou la droguerie.
    Pour ces raisons, je pense que l’article que vous souhaitez supprimer va dans le bon sens, même si la réalité du partage de la valeur permis par le SRP reste sujette à caution. En la matière, il faut reconnaître que la théorie du ruissellement ne s’est pas vraiment vérifiée.

    Mme Hélène Laporte

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    C’est la base ! S’il n’y a pas de partage de la valeur, c’est que le dispositif ne fonctionne pas !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Turquois.

    M. Nicolas Turquois

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    Je voudrais réagir aux propos misérabilistes qu’a tenus M. Tanguy. (Exclamations sur quelques bancs du groupe RN.) Je suis fier de mon métier d’agriculteur ; de tels propos abîment l’image de l’agriculture. Il existe des agriculteurs en difficulté, mais aussi des agriculteurs qui arrivent à vivre de leur métier. En peignant une telle image, vous détournez les jeunes de l’envie de devenir agriculteur.
    Bien sûr, le métier a ses difficultés. Le SRP ne les résoudra pas toutes ; c’est une mesure parmi d’autres. Les agriculteurs doivent diversifier leur activité, constituer des collectifs de travail, se former davantage. Une démarche individuelle centrée uniquement sur l’agrandissement du terrain cultivé est condamnée à l’échec.
    Quand on voit toutes les manifestations qui se sont déroulées l’année dernière,…

    Mme Hélène Laporte

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    Justement !

    M. Nicolas Turquois

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    …on ne peut que s’étonner de voir qu’elles ont disparu après l’élection des représentants aux chambres d’agriculture. Sans prendre parti, je souligne que l’approche de cette échéance majeure a crispé les différentes organisations syndicales.
    Pour aider les agriculteurs, il faut s’attacher à les accompagner plutôt que les stigmatiser. Je dénonce donc les propos simplistes de M. Tanguy : ce n’est pas avec une solution simpliste, mais avec une solution construite que nous pourrons soutenir l’agriculture. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Olivia Grégoire.

    Mme Olivia Grégoire

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    Je rappellerai trois points. D’abord, le SRP + 10, contrairement à ce qu’a dit M. Tanguy, n’est pas né d’une collusion entre la majorité et la FNSEA –⁠ nous ne faisons pas, nous, des rappels au règlement à chaque fois que vous nous mettez en cause, car nous y passerions tout notre temps –, mais il a été demandé par de très nombreuses filières. Vous le savez pertinemment, nous n’avons pas instauré ce dispositif à leur corps défendant.
    Ensuite, le principe central des lois Egalim n’est pas le SRP + 10 mais la non-négociabilité de la matière première agricole. Nous ne vous entendons pas souvent en parler, car peu d’agriculteurs remettent cela en question ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR et sur quelques bancs du groupe Dem.)

    M. Sylvain Maillard

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    Elle a raison !

    Mme Olivia Grégoire

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    Enfin, pour que les débats se poursuivent dans l’esprit qui a présidé à ceux de la commission –⁠ enrichir le texte sans agressivité –, je poserai une question de fond. Nombre d’entre vous se sont interrogés sur les résultats effectifs du SRP + 10 ; c’est d’ailleurs le sens des demandes de rapport que nous sommes nombreux à faire et de l’engagement de la ministre à y répondre. Oui, nous manquons de données pour évaluer l’efficacité du dispositif, c’est pourquoi nous voterons probablement des sanctions et des exigences supplémentaires en la matière. Mais plutôt que de vous demander toujours ce qu’il a permis, je vous invite à vous demander aussi ce que le SRP + 10 a permis d’éviter.
    La réponse est assez simple, mais vous peinez visiblement à l’entendre. Le SRP + 10 a permis d’éviter qu’un produit soit revendu à moins de 110 % de son prix d’achat. Croyez-vous sérieusement que, sans ce dispositif, les acteurs de la grande distribution n’auraient pas cherché à le revendre à 90 ou à 80 % du prix d’achat ? Vous savez très bien qu’ils l’auraient fait. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    M. Sylvain Maillard

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    Eh oui !

    Mme Olivia Grégoire

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    Ne vous en déplaise, le principal mérite du SRP + 10 est d’avoir évité la reprise d’une guerre acharnée des prix, qui aurait été létale pour les producteurs agricoles. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 43.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        130
            Nombre de suffrages exprimés                130
            Majorité absolue                        66
                    Pour l’adoption                48
                    Contre                82

    (L’amendement no 43 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l’amendement no 20.

    Mme Mathilde Hignet

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    Je vous invite à voter cet amendement du groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire visant à plafonner à 40 % les marges de la grande distribution. Le prix de vente au consommateur final ne pourrait donc dépasser 140 % du prix d’achat au fournisseur.
    La marge brute réalisée par la grande distribution sur un paquet de pâtes a augmenté de 57 % entre 2021 et 2022. Sur un panier de courses de 100 euros, seuls 7 euros vont au producteur. Ces exemples illustrent le problème des marges telles qu’elles sont pratiquées. Puisqu’il a été souligné plusieurs fois que le SRP + 10 constitue un outil parmi d’autres, nous vous proposons un nouvel outil : la limitation à 40 % des marges de la grande distribution.
    Dans une étude publiée le 4 février, l’UFC-Que choisir montre que le revenu agricole a baissé depuis 2019 pour les céréales et la viande de porc et de bœuf, et qu’il a stagné pour la filière laitière. Dans le même temps, les consommateurs ont vu les prix flamber en rayon.
    La Cour des comptes a quant à elle constaté que les indices de prix utilisés dans les contrats sont souvent trop peu rémunérateurs et reflètent mal l’évolution réelle des coûts, voire sont inexistants. On peut ajouter que les sanctions en cas de non-respect de la loi sont extrêmement faibles. Ainsi, l’amende infligée récemment à Carrefour ne représente que 0,03 % de son chiffre d’affaires. Dans ces conditions, les industriels et la grande distribution ont les coudées franches pour imposer leurs conditions aux agriculteurs.
    Nous vous proposons de changer de méthode et d’instaurer des prix rémunérateurs garantis. Il s’agit de garantir la rémunération à tous les maillons de la chaîne et de plafonner le prix pour le consommateur final. À cette fin, nous souhaitons encadrer les marges de la grande distribution. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Ugo Bernalicis

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    Une marge à 40 %, c’est encore confortable !

    Mme la présidente

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    Sur les amendements nos 20, 21 et 22, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire de demandes de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Mon avis sera le même sur les amendements nos 20, 21 et 22. Je doute de la constitutionnalité de cette proposition, quel que soit le plafond retenu pour l’encadrement des marges. La fixation d’un taux de marge uniforme me semble contrevenir à la liberté d’entreprendre.

    M. Ugo Bernalicis

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    N’importe quoi !

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    En commission, vous avez proposé d’instaurer une marge maximale de 30 % ; son passage à 40 % ne change pas grand-chose, mon avis reste donc défavorable.
    Selon le dernier rapport de l’Observatoire de la formation des prix et des marges des produits alimentaires (OFPM), le taux de marge brute moyen dans la grande distribution, tous rayons alimentaires confondus, est de 29,3 %.

    M. Ugo Bernalicis

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    Alors ça va, si on le limite à 40 % !

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Il est de 12,1 % au rayon marée, de 13,8 % au rayon boucherie et monte à 52 % au rayon boulangerie et pâtisserie. Avis défavorable sur l’amendement et sur les deux qui suivront.

    M. Ugo Bernalicis

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    Vous devriez être favorable, avec une argumentation pareille ! On ne comprend rien à votre raisonnement !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Mon avis sera également défavorable sur les amendements nos 20, 21 et 22, qui visent respectivement à plafonner à 40 %, à 30 % et à 20 % les marges de la grande distribution.
    Je comprends que vous souhaitiez encadrer les marges, mais ce n’est pas l’effet qu’aurait votre amendement. Dans sa rédaction actuelle, il empêcherait le prix de vente de descendre sous SRP + 40. L’amendement instaurerait un prix plancher égal à 140 % du prix d’achat ; le distributeur ne pourrait vendre en dessous de ce prix, mais il pourrait toujours vendre plus cher. La rédaction de l’amendement ne me semble donc pas correspondre à votre volonté de plafonner les marges.
    Au demeurant, si l’encadrement des marges peut être appliqué dans des circonstances exceptionnelles –⁠ je pense aux mesures prises à Mayotte après le passage du cyclone Chido –, je ne crois pas souhaitable d’aller vers une économie administrée et de bloquer arbitrairement les marges pour toute la grande distribution.

    M. Ugo Bernalicis

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    Ce n’est pas arbitraire, 40 % ! Il y a de la marge, justement !

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Cette mesure me paraît excessive, d’autant qu’elle concerne la marge brute, ce qui signifie qu’elle ne tient pas compte des charges liées à la rémunération du personnel, au coût de l’énergie ou encore à la location de l’immobilier.

    Mme Ségolène Amiot

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    C’est pour ça qu’on n’a pas proposé zéro !

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Si les prix de vente étaient limités comme vous le proposez, l’opération d’achat et de revente pourrait représenter une perte nette pour le distributeur.

    Mme Ségolène Amiot

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    Pipeau !

    M. Ugo Bernalicis

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    M. le rapporteur a cité des marges de 12 % ! Ça va, 40 %, c’est large !

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Pour toutes ces raisons, mon avis est défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Hignet.

    Mme Mathilde Hignet

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    La grande distribution restera libre de fixer sa marge, à condition qu’elle soit située entre 10 % et 40 % du prix d’achat. Par cet amendement, nous demandons simplement qu’elle cesse de faire exploser les marges comme elle le fait depuis trop longtemps, avec des conséquences directes sur les consommateurs et sans le moindre ruissellement vers les producteurs. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Je vais détricoter les arguments avancés par M. le rapporteur et Mme la ministre.
    Monsieur le rapporteur, je doute fortement que la mesure soit inconstitutionnelle. Si elle l’était, il ne serait pas possible d’encadrer le prix du livre comme nous le faisons. Je ne vois pas pourquoi ce qui est pratiqué pour le livre ne pourrait pas l’être pour les produits alimentaires. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ M. Romain Eskenazi applaudit également.)

    M. Ugo Bernalicis

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    Eh oui ! Il faut se réveiller !

    M. André Chassaigne

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    Madame la ministre, vous parlez d’économie administrée. Oui, nous souhaitons que l’économie agricole soit davantage administrée, car il ne suffit pas de réunir les acteurs autour d’une table et de compter sur leur bonne volonté pour que tout s’arrange !
    Bien évidemment, l’encadrement des prix doit être différencié selon les filières, car il doit tenir compte du coût à la production et du coût à la consommation. Or ceux-ci peuvent varier, même entre deux produits laitiers ; par exemple, ils sont différents selon qu’on parle de yaourt ou de fromage, car la transformation du produit n’est pas la même. Il faut donc réaliser cet encadrement avec plus de finesse ; mais sans coefficient multiplicateur, sans encadrement des marges, cela ne marchera jamais ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin.

    Mme Mélanie Thomin

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    Nous sommes, au sein du groupe socialiste, favorables à un débat concernant l’encadrement concret des marges, à une expérimentation dans ce domaine et, de fait, aux amendements ici discutés. Nous le devons d’abord aux consommateurs, qui ont besoin, alors que leur pouvoir d’achat est particulièrement contraint, de transparence. Nous le devons aussi aux agriculteurs, qui travaillent dans un contexte compliqué de concurrence déloyale et de difficultés qui affectent leurs revenus dans plusieurs filières –⁠ je pense en particulier à la filière bovine.
    Je reviens sur ce qui a été dit concernant la mobilisation des agriculteurs. Nous ne pouvons pas dire dans cet hémicycle que la mobilisation des agriculteurs il y a un an s’est tenue par pur opportunisme avant les élections aux chambres d’agriculture. Nous n’avons pas eu les vrais débats concrets au moment de la loi d’orientation agricole, où la question du revenu a été littéralement contournée. Le dispositif SRP + 10 que nous examinons est l’occasion de faire revenir par la petite porte la question des marges et celle du revenu agricole.
    Pour évoquer les problèmes de régulation des prix, ces amendements sont intéressants. En effet, nous avons affaire à un monde opaque, celui de la grande distribution, où le législateur n’a pas accès aux marges.
    Tous ceux qui se sont entretenus avec les syndicats agricoles au Salon de l’agriculture ont entendu M. Arnaud Rousseau préconiser d’enquêter sur les marges et leur ruissellement au sein du monde agricole à travers une commission d’enquête, car il y a là une vraie question. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    J’appelle une nouvelle fois votre attention sur ce que vous votez au travers de ces amendements. Vous prévoyez un prix de vente qui ne peut pas être inférieur au SRP + 40, mais qui peut lui être supérieur. Ces amendements ne tendent pas à restreindre les marges des distributeurs ; ils ont même l’effet contraire.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 20.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        133
            Nombre de suffrages exprimés                89
            Majorité absolue                        45
                    Pour l’adoption                43
                    Contre                46

    (L’amendement no 20 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. David Guiraud, pour soutenir l’amendement no 21.

    M. David Guiraud

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    Il est absolument nécessaire d’encadrer les marges de la grande distribution. Vous avez concédé, madame la ministre, qu’il fallait le faire de manière exceptionnelle, cependant, pour les Français, la situation entière est exceptionnelle. J’ai entendu M. le rapporteur balayer d’un revers de main une remarque d’un collègue sur le retour du scorbut –⁠ je suis désolé, mais ce n’est pas drôle. Dans ma circonscription, à Roubaix, 40 % des gens vivent avec moins de 1 200 euros par mois ; ils se privent. Ce n’est pas marrant, ce qui se passe. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme Sandrine Rousseau applaudit également.) Nous sommes dans une société de la privation (Protestations sur quelques bancs du groupe EPR), voire de l’humiliation. Des Français se sont mis à compter au supermarché, alors qu’avant ils ne le faisaient pas, ce qui est vécu comme une humiliation.
    Dans le même temps, les revenus agricoles, notamment pour les producteurs de viande, ont baissé. C’est donc bien qu’entre le producteur et le consommateur, quelqu’un s’en met un peu trop dans les poches ; ça s’appelle la grande distribution. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Les Français se privent, et la privation généralisée nuit à l’unité de notre nation. Hier soir, j’ai par exemple vu sur BFM TV (« Oh ! » sur quelques bancs du groupe EPR) qu’on cherchait des responsables à la pénurie d’œufs.

    Mme Liliana Tanguy

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    Quel rapport avec l’amendement ?

    M. David Guiraud

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    Sur cette chaîne, on explique que c’est parce qu’il y a le ramadan –⁠ traduction : c’est à cause des musulmans. (Exclamations sur quelques bancs des groupes RN et EPR.) On nous l’avait déjà dit en 2022, quand M. Leclerc avait expliqué que si l’huile d’olive manquait, c’est parce qu’il fallait faire frire les moutons de l’Aïd. Si on cherche des coupables de cette manière, c’est justement parce que nous sommes dans une société de privation. En réalité, le syndicat national des industriels et producteurs d’œufs explique le manque d’œufs par une substitution liée au prix de la viande : les gens se reportent sur les œufs pour manger des protéines parce que la viande est trop chère. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    L’avis de la commission est défavorable.

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Bien évidemment, nous ne balayons pas d’un revers de main la possibilité que le scorbut revienne dans certains territoires. Si je me suis étonné de l’intervention du député Tanguy, c’est parce qu’il imputait le retour du scorbut au travail effectué la majorité présidentielle au cours de la législature précédente.
    Sur le fond, les dispositions prévues permettront de recueillir des données objectives auprès de la grande distribution, mais aussi des PME, pour vérifier la pertinence du dispositif SRP + 10.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 21.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        135
            Nombre de suffrages exprimés                91
            Majorité absolue                        46
                    Pour l’adoption                45
                    Contre                46

    (L’amendement no 21 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier, pour soutenir l’amendement no 22.

    Mme Manon Meunier

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    En France, 7 millions de personnes font appel à l’aide alimentaire ; 36 % des étudiants disent sauter régulièrement un repas ; l’inflation explose. Où ont donc ruisselé les milliards d’euros ponctionnés aux consommateurs avec la mesure SRP + 10 ?
    Ce que vous soutenez, c’est qu’en établissant une marge minimale de 10 % au-dessus du seuil de revente à perte, obligatoire pour la grande distribution, les saints PDG de la grande distribution vont, du fait de leur bonne volonté, faire ruisseler tout cet argent jusqu’aux producteurs. Il se trouve que ça n’a pas marché puisque la rémunération des agriculteurs n’a pas augmenté –⁠ au contraire, dans certaines filières, elle a même diminué. Où est donc passée la somme de 1,6 milliard d’inflation qu’a entraînée cette mesure, pointée notamment par l’étude d’UFC-Que choisir ? Eh bien, elle est passée dans la poche de la grande distribution et de ses actionnaires. Comme toujours, ces profits sont faits sur le dos des Français, à savoir des consommateurs et des producteurs.
    Nous devons donc encadrer enfin les marges indécentes de la grande distribution : pendant que les agriculteurs, qui manifestent sur les ronds-points depuis plus d’un an, n’arrivent plus à vivre de leur travail, que les étudiants, pour manger font la queue devant les banques alimentaires, des milliards d’euros de profits se font sur leur dos. Encadrons donc les marges ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ M. Boris Tavernier applaudit également.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 22, repoussé par la commission et le gouvernement.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        138
            Nombre de suffrages exprimés                93
            Majorité absolue                        47
                    Pour l’adoption                46
                    Contre                47

    (L’amendement no 22 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir les amendements nos 5, 4, 3, 2 et 1, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    Mme Mélanie Thomin

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    Comme j’ai eu l’occasion de le dire en commission des affaires économiques, ces amendements manifestent une forme d’espièglerie de la part du groupe socialiste. Elle consiste à vous interroger sur le bien-fondé du seuil de revente à perte dont l’objectif non avoué serait de faire respecter une forme de paix des braves entre tous les acteurs de la grande distribution et de l’agro-industrie. Si la marge de 10 % est actuellement factice pour les agriculteurs mais réelle pour les intermédiaires de la grande distribution, ces amendements vise à poser la question du niveau de ce seuil.
    Pourquoi, dans la genèse de la loi Egalim 1, ce dispositif a-t-il été fixé avec une marge à 10 % ? Qui peut garantir qu’il s’agit du bon taux et que ces 10 % sont intégralement reversés aux agriculteurs, augmentant leurs revenus ? Devant les nombreuses interrogations qui demeurent, madame la ministre, monsieur le rapporteur, nous souhaitons vous interroger sur le niveau de ce seuil.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces cinq amendements ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Nous avons entendu l’appel à une meilleure évaluation du dispositif SRP + 10 que vous aviez lancé pendant l’examen en commission : nous avons adopté un de vos amendements qui a pour objet de rendre effective la transparence sur l’utilisation par les distributeurs de l’excédent de marge réalisé sur un certain nombre de produits consécutivement à l’instauration du SRP + 10.
    S’agissant de ces amendements d’appel qui ont déjà été rejetés en commission, je vous rappelle que le coefficient de 1,10 résulte d’un travail de concertation entre les filières, dans le cadre des états généraux de l’alimentation, lorsque nous avons négocié la loi Egalim en 2017 et 2018, avant que ce coefficient soit adopté au Parlement.
    L’avis de la commission est donc défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Ces cinq amendements ont un objectif identique : diminuer le coefficient appliqué au SRP, pour retenir un coefficient entre 1,05 et 1,09. Comme je l’ai dit au sujet du SRP + 10, je pense qu’il faut que nous maintenions le coefficient actuel parce que –⁠ même si j’accorde qu’il n’a pas été complètement évalué – à l’exception de quelques acteurs ou même d’un seul distributeur, personne ne veut revenir en arrière. Il est salutaire de maintenir ce dispositif pour les agriculteurs.
    Il est important de rappeler que le taux de 10 % n’a pas été fixé par hasard, puisque ce sont les états généraux de l’alimentation, en 2018, qui avaient fixé ce niveau, qui était un niveau moyen intermédiaire entre une marge nulle sur les produits d’appel et d’autres produits sur lesquels une marge beaucoup plus importante était réalisée, par exemple la charcuterie.
    L’avis du gouvernement sur les cinq amendements est donc défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Nous ne voterons pas ces amendements, car vous tournez autour du pot pour faire croire que le dispositif pourrait marcher, alors que c’est le principe même qui ne fonctionne pas. Vous dites qu’il y a des zones d’ombre. Mais comme l’a souligné Hélène Laporte au cours de la discussion générale, il y a déjà eu huit rapports sur le SRP, sa non-application et son inefficacité. Vous essayez donc de gagner du temps pour quelque chose qui ne fonctionne pas.
    Lors du premier cours de comptabilité en école de commerce, le professeur nous a expliqué que ce qui comptait, ce n’était pas de respecter la loi, mais de ne pas se faire choper quand on ne la respectait pas. Voilà le principe général qui fait la différence entre vous et nous : nous considérons que les acteurs économiques que sont la grande distribution et la grande transformation vont tout faire pour contourner la loi. Vous pouvez changer le coefficient, mais ils ne la contourneront pas moins. Cela fait écho à ce que disaient nos collègues Insoumis à propos des marges : même si vous fixez les marges à une certaine limite, les acteurs économiques contourneront encore la loi pour les truquer, à travers des royalties ou des prix de transfert, car ils ne savent faire que ça.
    Les taux de marge apparents de l’industrie agroalimentaire ou de la grande distribution sont des marges bidon, établies pour ne pas payer d’impôts et pour éviter la transparence sur leurs pratiques. Et si cela est possible, comme l’avait montré Grégoire de Fournas dans son travail préliminaire dans le cadre de la commission d’enquête sur la souveraineté alimentaire, c’est parce qu’il n’y a pas de contrôle. Vous ne faites pas appliquer vos lois, ni la première, ni la deuxième, ni la troisième, ni bientôt une quatrième. Vous ne faites pas appliquer les dispositions que vous votez ici !
    Contrairement à ce qu’a dit Mme Grégoire, ce n’est pas une question de conflit d’intérêts ; je ne suis pas comme M. Ramos : je ne vous ai pas accusés d’être corrompus, mais j’ai dit que vous n’osiez pas les affronter. Vous ne voulez pas entendre, parce que vous ne voulez pas agir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Olivia Grégoire

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    Il sait tout, M. Tanguy…

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Permettez-moi de rectifier les propos affabulateurs –⁠ une fois de plus – de Jean-Philippe Tanguy. Ayant présidé la commission d’enquête sur la souveraineté alimentaire, qui n’a pas pu aller à son terme, du fait de la dissolution, je tiens à rappeler qu’aucun rapport n’a été rendu. Il n’a donc en aucun cas été montré que l’État n’effectuait pas de contrôles sur l’application des lois Egalim.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Je parle des contrôles sur pièces et sur place !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Bien au contraire, des injonctions et des mises en demeure ont été prononcées à l’encontre d’un certain nombre d’acteurs.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    C’est faux !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    J’invite l’ensemble des collègues à se reporter à ce qui subsiste publiquement de cette commission : les comptes rendus.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Richard Ramos.

    M. Richard Ramos

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    Quand j’ai dit que le Rassemblement national était aligné avec Michel-Édouard Leclerc, je ne parlais pas de M. Tanguy ! Le Rassemblement national ne se réduit pas à lui –⁠ vous savez, dans le monde agricole, le melon ne dure que trois mois.
    Quand vous retournerez dans vos circonscriptions, il faudra expliquer à vos paysans et à vos petites industries pourquoi vous ne voulez pas faire appliquer le SRP + 10. (M. Jean-Philippe Tanguy s’exclame.)
    Ce n’était donc pas vous que je visais, …

    Mme Hélène Laporte

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    Qui, alors ?

    M. Richard Ramos

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    …mais on aura appris aujourd’hui que le Rassemblement national, c’est M. Tanguy et rien que M. Tanguy ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme Hélène Laporte

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    C’est n’importe quoi !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin.

    Mme Mélanie Thomin

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    Je voudrais réagir rapidement à l’argument qui interroge l’utilité de voter des lois, si personne ne les respecte. C’est là sans doute ce qui différencie les manières de pratiquer la politique par les groupes de cette assemblée.
    Les amendements d’appel du groupe socialiste invitent à réfléchir collectivement au bien-fondé et à l’efficacité de cette loi, parce que nous soutenons la transparence que nous devons aux consommateurs et à ceux qui produisent ce qui nous nourrit.
    Surtout, nous sommes favorables à la régulation et au rôle que doit jouer notre État, afin que nous puissions tous faire société. Contrairement à M. Tanguy ou à d’autres, nous ne prônons ni l’anarchie ni le désordre social. (M. Jean-Philippe Tanguy s’exclame.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 19, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    (Les amendements nos 5, 4, 3, 2 et 1, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de six amendements, nos 19, 18, 49, 23, 36 et 39, pouvant être soumis à une discussion commune.
    Les amendements nos 23, 36 et 39 sont identiques.
    La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l’amendement no 19.

    Mme Mathilde Hignet

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    Dix ans : c’est le temps que durera l’expérimentation du SRP + 10 et de l’encadrement des promotions sur les produits alimentaires si nous prolongeons le dispositif jusqu’en 2028. Cela revient à offrir autant de répit aux multinationales qui se gavent sur le dos des agriculteurs et des consommateurs.
    La situation n’a pas changé avec le SRP + 10 ; elle s’est juste aggravée. Aujourd’hui, les profits de l’agroalimentaire captent plus de 12 % du prix de production.
    Alors que les lois Egalim devaient être la grande solution pour endiguer ce phénomène en rééquilibrant les négociations commerciales, le rapport de force reste toujours aussi inégal.
    Les agriculteurs ne sont toujours pas rémunérés à la hauteur de leur travail, et l’inflation alimentaire continue de toucher les consommateurs. En mars 2025, le panier moyen en grande surface a augmenté de 21,4 % par rapport à janvier 2022.
    Si nous reconnaissons que le SRP + 10 ne peut pas être supprimé du jour au lendemain, nous ne souhaitons pas que cette prolongation de trois ans soit une nouvelle excuse à l’inaction.
    Il y a un an, les agriculteurs étaient mobilisés pour réclamer des prix rémunérateurs. On leur a répondu qu’il fallait attendre l’évaluation de la loi Egalim 2. Maintenant que c’est chose faite, allez-vous leur répondre qu’il faut désormais évaluer les effets du SRP + 10 ?
    Cette évaluation n’arrivera probablement jamais, d’autant plus que l’amende dérisoire prévue ne contraindra pas les multinationales à communiquer leurs marges. La situation nous paraît claire : les multinationales de l’agroalimentaire continuent de faire la pluie et le beau temps pour les prix agricoles et alimentaires.
    Ne nous cachons pas derrière l’évaluation –⁠ si tant est qu’elle soit possible – du SRP + 10 pour attendre passivement et laisser la situation se dégrader jusqu’en 2028. Une réforme est attendue pour garantir un prix rémunérateur aux agriculteurs et une alimentation accessible à tous en encadrant les marges. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 18 de Mme Mathilde Hignet est défendu.
    La parole est à Mme Danielle Brulebois, pour soutenir l’amendement no 49.

    Mme Danielle Brulebois

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    Il propose d’ajuster le calendrier de l’expérimentation en cours qui vise l’encadrement des promotions sur les produits de grande consommation. Cette expérimentation a en effet été étendue aux produits de droguerie, de parfumerie et d’hygiène.
    L’objectif est d’éviter un retour en arrière qui entraînerait un déplacement de la guerre des prix vers le secteur non alimentaire, avec des promotions atteignant parfois 70 %, voire 90 %, comme entre 2019 et 2024. Ces rabais spectaculaires mettent en difficulté les entreprises, en particulier les très petites et moyennes entreprises de la filière, qui fabriquent en France.
    De nombreux emplois –⁠ 246 600 au total – sont concernés sur notre territoire, en particulier dans des petites entreprises familiales qui œuvrent dans la filière cosmétique, ainsi que dans la filière hygiène et entretien. Je pense aux entreprises Jura Clean et NFP, dans le Jura ; Hygiène et Nature, en Côte-d’Or ; et Assainol en Bourgogne-Franche-Comté. Un grand nombre d’entreprises sont également concernées dans toute la France, comme Le Petit Olivier, Le Briochin, Bernard, Hagral et Rochex, ou encore Ylaé, à Montpellier
    Préserver cette mesure est essentiel pour la compétitivité de nos entreprises. De plus, il faut renforcer l’équilibre des relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, comme l’ont rappelé les négociations âpres de ce début d’année et les pressions insupportables de la grande distribution, qui contourne nos lois grâce à des centrales d’achat dans les pays étrangers, depuis la disparition des marges arrière avec la loi de modernisation de l’économie.
    Il faut reconnaître que l’encadrement des promotions a été efficace. En 2024, le rayon DPH a enregistré une déflation totale de 2,5 %, grâce au plafonnement à 34 % des promotions. Il est donc important de conserver ce calendrier pour les produits d’hygiène et les cosmétiques.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l’amendement no 23.

    Mme Mathilde Hignet

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    Il propose de prolonger jusqu’en 2028 l’encadrement des promotions sur les produits DPH.
    Contre les pressions exercées par la grande distribution pour obtenir des promotions excessives, cet encadrement assurerait une rémunération plus équitable et préserverait la viabilité économique des PME du secteur.

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 23, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement identique no 36.

    M. André Chassaigne

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    Je reprends les mêmes arguments. Nous connaissons la pression qui pèse sur certains produits de la grande distribution, notamment sur les produits de droguerie, de parfumerie et d’hygiène. Il suffit d’observer les marchandises présentées dans les têtes de gondole pour s’en rendre compte.
    Il y a un risque réel que cette pression ait des conséquences terribles pour nos PME. Encore aujourd’hui, celles-ci sont au cœur du cyclone, en raison de l’augmentation considérable du prix de l’énergie, et donc des coûts de production.
    Si on laisse libre cours à la grande distribution, les conséquences économiques seront catastrophiques. Les auditions que vous avez menées, monsieur le rapporteur, devraient vous inciter à revenir sur la rédaction de votre proposition de loi initiale. Ce serait du bon sens.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles de Courson, pour soutenir l’amendement no 39.

    M. Charles de Courson

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    Vous vous souvenez tous que le texte initial de la loi Descrozaille portait uniquement sur les produits alimentaires. Ce sont les amendements du Parlement qui l’ont étendu aux produits de droguerie, de parfumerie et d’hygiène.
    Nous avons encadré ces promotions : limitées à 34 % du prix de vente, elles ne peuvent s’appliquer que sur une quantité de produits ne représentant pas plus de 25 % du chiffre d’affaires.
    Le texte proposé avant le passage en commission prolongeait le dispositif uniquement pour les produits alimentaires et mettait fin à son expérimentation pour les produits DPH.
    Une telle mesure est paradoxale, car l’ensemble de la profession demande le maintien de cet encadrement, qui a soutenu les nombreuses petites et moyennes entreprises concernées. Avec sagesse, la commission a prolongé ce dernier d’un an. L’amendement propose donc de s’aligner sur le calendrier des produits alimentaires.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Je donnerai d’abord mon avis sur les amendements nos 19 et 18 défendus par Mme Hignet. Comme expliqué en commission, en arrêtant la date du 1er août 2027, on a placé l’échéance au moment de l’élection présidentielle. Or nous ne siégerons pas sur ces bancs, car les travaux s’arrêtent généralement à la fin du mois de février ou au début du mois de mars –⁠ ceux qui, comme moi, sont là depuis un certain temps le savent bien.
    Il sera difficile de légiférer à ce moment-là. C’est la raison pour laquelle nous avons proposé de reporter au mois d’avril 2028 l’échéance du SRP + 10. Cela permettra aussi d’intégrer les changements de réglementation dans la négociation commerciale et dans la construction annuelle des plans d’affaires.
    Les autres amendements, nos 49, 23, 36 et 39 visent à inclure les DPH dans l’encadrement des promotions. Or l’extension de l’encadrement des promotions aux produits DPH depuis le 1er mars a éloigné le dispositif de son objectif initial, qui est la préservation de la valeur de nos productions agricoles et alimentaires.
    Au moment de la loi Egalim 3, le Parlement a choisi d’empêcher le report de la guerre des prix sur les produits de DPH. Ce secteur compte 85 000 emplois directs dans nos territoires, au sein d’entreprises de toutes tailles qui pourraient être fragilisées par le retour des méga-promotions, car elles n’ont tout simplement pas les moyens de les financer.
    Cela va dans le sens de l’objectif de stabilité poursuivi par le texte. Si nous avons trouvé un point d’équilibre en commission, entre le 15 avril 2026 et le 15 avril 2028, échéance prévue par le texte pour l’encadrement des promotions sur les produits alimentaires, je vous propose néanmoins de ne pas prolonger à ce stade l’encadrement des promotions sur les DPH. Il me semble en effet important d’attendre le rapport annuel d’évaluation de l’encadrement des promotions. Ce dernier doit nous parvenir à l’automne.
    Comme l’a dit Mme la ministre, l’objectif est aussi d’étudier avec la plus grande précision l’influence de l’encadrement du DPH sur le pouvoir d’achat des consommateurs, sur l’équilibre concurrentiel du secteur, sur l’activité économique des très petites et moyennes entreprises françaises, mais aussi en termes de déport des ventes des grandes et moyennes surfaces vers les enseignes de discounters. Ces dernières ne captent que 4 % du marché à l’heure actuelle, mais cela évolue.
    Je rappelle que ces enseignes ne font pas de promotions, mais des prix sur des lots achetés sur des plateformes étrangères. Nous devrons réfléchir à la manière de les soumettre à la loi.
    S’il ressort que l’encadrement des promotions sur les produits de DPH est une mesure vertueuse, le législateur devra se saisir de la question, afin de prolonger la mesure au-delà de 2026. Aujourd’hui, ce n’est pas ma position.
    Demande de retrait, sinon avis défavorable à ces amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Les deux premiers amendements, nos 19 et 18, prévoient la fin des expérimentations sur le SRP + 10 et l’encadrement des promotions en 2027. De plus, l’amendement no 19 alourdit les sanctions, portées à 2 % du chiffre d’affaires, en cas de manquement à l’obligation de transmission des données chiffrées.
    Comme l’a indiqué M. le rapporteur, l’année 2027 n’est pas un choix opportun.
    L’amendement no 49 de Mme Brulebois propose de prolonger les deux expérimentations –⁠ SRP + 10 et encadrement des promotions – jusqu’en 2028, en conservant les taux existants –⁠ 34 % en valeur et 25 % en volume.
    Les amendements identiques nos 23, 36 et 39 proposent également de maintenir l’encadrement des promotions sur les produits DPH jusqu’en 2028, mais ils sont un peu différents, puisqu’ils ne suppriment pas la date d’entrée en vigueur différée, initialement prévue dans le texte quand il s’agissait encore de mettre fin à l’expérimentation.
    Les amendements nos 50, de Mme Anne-Sophie Ronceret, et 16, de M. Julien Dive, qui seront examinés dans un instant, me paraissent plus intéressants. Comme les vôtres, ils visent à aligner le calendrier des expérimentations jusqu’en 2028, mais ils proposent de modifier le niveau de générosité, le faisant passer de 34 à 40 %. Il me semble que cette proposition est équilibrée et bien dosée, puisque la prolongation de l’encadrement des prix jusqu’en 2028 est contrebalancée par une augmentation du niveau des promotions. Cette disposition devrait permettre de protéger à la fois le pouvoir d’achat de nos concitoyens et notre tissu industriel. Nos entreprises, je le rappelle, ont besoin de lisibilité et de visibilité.
    À défaut de retrait, j’émettrai un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Hélène Laporte.

    Mme Hélène Laporte

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    La position du groupe La France insoumise manque une fois encore de cohérence et est assez incompréhensible. Vous dites que le SRP + 10 est délétère à la fois pour les agriculteurs et les consommateurs, et vous avez même déposé une proposition de loi tendant à le supprimer. Et pourtant, avec votre amendement no 19, vous proposez seulement d’avancer d’un an la fin de l’expérimentation. Si cette expérimentation est à ce point délétère, pourquoi ne pas avoir voté l’amendement que j’avais défendu en commission, tendant à y mettre fin dès 2026 ? Comme d’habitude, on cherche en vain la cohérence de votre position. Comme il n’y en a pas, nous voterons contre l’ensemble de ces amendements. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. Arnaud Le Gall

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    Et vous, vous ne votez pas l’encadrement des marges !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Hignet.

    Mme Mathilde Hignet

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    En l’occurrence, nous ne parlons pas de la prolongation du SRP + 10, mais de l’encadrement des promotions sur les produits DPH.
    J’aimerais revenir sur l’argument des élections présidentielles. Il ne faut pas forcément attendre que les élections aient eu lieu pour légiférer. (Mme Ségolène Amiot applaudit.) Mme la ministre s’est engagée à nous remettre un rapport à l’automne : on pourra très bien, si le contenu de ce rapport l’exige, légiférer à ce moment-là. Choisir la date de 2027, c’est s’assurer que l’on ne repassera pas la patate chaude au gouvernement qui sera formé après l’élection présidentielle. (Mme Manon Meunier applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles de Courson.

    M. Charles de Courson

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    Monsieur le rapporteur, il serait préférable d’adopter les amendements nos 23 et identiques, car si les conclusions du rapport qui nous sera remis sont positives, nous n’aurons pas à légiférer de nouveau. Si j’ai bien compris, Mme la ministre est elle-même favorable à ce que l’encadrement des promotions sur les produits DPH se prolonge jusqu’en 2028. L’amendement no 50, qu’elle a évoqué, tend à porter de 34 à 40 % le montant maximum des promotions. Pourquoi proposer une telle évolution, alors que, pour les produits alimentaires, le taux sera maintenu à 10 % ? Il me semble vraiment préférable d’adopter les amendements nos 23 et identiques.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Nicolas Turquois.

    M. Nicolas Turquois

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    Je me suis toujours demandé pourquoi les produits DPH avaient été intégrés à ce texte, qui est censé accompagner la filière agricole : ils n’ont rien à y faire. Et je ne comprends pas très bien non plus pourquoi il est sans cesse question des entreprises de nos territoires, car ce sont essentiellement de très grands groupes industriels qui commercialisent ces produits. Je ne suis pas du tout favorable à la prolongation de l’encadrement des promotions sur ces produits.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 19.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        167
            Nombre de suffrages exprimés                163
            Majorité absolue                        82
                    Pour l’adoption                35
                    Contre                128

    (L’amendement no 19 n’est pas adopté.)

    (Les amendements nos 18 et 49, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 23, 36 et 39.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        165
            Nombre de suffrages exprimés                162
            Majorité absolue                        82
                    Pour l’adoption                42
                    Contre                120

    (Les amendements identiques nos 23, 36 et 39 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 44, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisie de deux amendements, nos 50 et 16, pouvant être soumis à une discussion commune.
    L’amendement no 50 fait l’objet d’un sous-amendement, no 56.
    L’amendement no 16 fait l’objet de deux sous-amendements identiques, nos 55 et 57.
    La parole est à Mme Anne-Sophie Ronceret, pour soutenir l’amendement no 50.

    Mme Anne-Sophie Ronceret

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    Nous proposons d’aligner la prolongation de l’encadrement des promotions applicables aux produits de droguerie, parfumerie et hygiène sur celle des produits alimentaires, à savoir jusqu’au 15 avril 2028, en relevant le plafond des promotions à 40 %, à partir de la fin de l’expérimentation, au 15 avril 2026.
    L’encadrement actuel, instauré par la loi Descrozaille en mars 2023, limite les promotions à 34 % en valeur et à 25 % en volume. Cette mesure a contribué à baisser des prix en fond de rayon et à garantir le pouvoir d’achat des Français. Depuis la mise en place de l’encadrement, les prix du secteur DPH ont baissé en moyenne de 2,5 %. Pour les marques nationales en hypermarché, la baisse a atteint jusqu’à 4 %.
    En alignant la durée de l’encadrement avec celle du SRP + 10, cet amendement permet d’apporter plus de souplesse dans les relations commerciales entre entreprises et distributeurs et de garantir la visibilité et l’attractivité des 82 % de TPE-PME qui composent le secteur cosmétique français. Je vous invite donc à voter cet amendement, qui permet d’adapter le cadre promotionnel, tout en protégeant le pouvoir d’achat des Français et en préservant les 246 000 emplois directs et indirects du secteur. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Richard Ramos, pour soutenir le sous-amendement no 56.

    M. Richard Ramos

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    Passer de 34 à 40 % n’a pas beaucoup de sens. Si l’on ne supprime pas l’encadrement des promotions sur le DPH, autant aller jusqu’à 50 % : cela fait un produit offert pour un produit acheté et c’est plus clair.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Eric Liégeon, pour soutenir l’amendement no 16.

    M. Eric Liégeon

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    Si vous le permettez, madame la présidente, je défendrai en même temps mon sous-amendement no 57. S’agissant de l’encadrement des promotions sur les produits DPH, les avis ne sont pas unanimes. Il convient de trouver une position médiane pour éviter le retour brutal à un marché totalement dérégulé. Cet amendement vise donc à la fois à protéger le pouvoir d’achat des consommateurs et à assurer la pérennité économique de nos PME locales. Nous proposons d’encadrer les promotions du secteur DPH en fixant un plafond aux professionnels de 40 %, tout en rallongeant la durée de cet encadrement jusqu’en 2028.
    Avec mon sous-amendement no 57, je propose d’aller un peu plus loin en relevant le plafond des promotions à 50 %. Cela permettra d’atteindre un équilibre optimal, qui profitera un peu plus aux consommateurs, tout en protégeant la viabilité économique des PME de nos territoires.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Richard Ramos, pour soutenir le sous-amendement no 55.

    M. Richard Ramos

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    Je le répète, porter ce plafond à 50 % me paraît plus lisible.

    Mme la présidente

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    Le sous-amendement no 57 a été défendu.
    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements et ces sous-amendements ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Je ne suis pas obtus, mais nous avons trouvé un compromis en commission, qui consiste à prolonger l’encadrement des promotions sur les produits DPH jusqu’en avril 2026 et, d’ici là, à obtenir un certain nombre d’informations de la part des distributeurs et des industriels. Lorsque nous disposerons de ces données objectives, nous pourrons décider ensemble s’il convient ou non de poursuivre cette expérimentation.
    Ma position diffère un peu de celle du gouvernement et j’entends l’argument de Mme la ministre, qui souhaite éviter d’avoir à légiférer de nouveau en 2026. Je précise toutefois que, d’ici l’année prochaine, nous serons également amenés à examiner un nouveau texte Egalim. Pour ma part, je propose d’introduire une sorte de clause de revoyure en avril 2026 : nous déciderons à ce moment-là si nous voulons ou non prolonger le dispositif jusqu’en 2028, dans les mêmes termes que le SRP + 10 et que l’encadrement des promotions sur les produits alimentaires.
    Je vous invite donc à retirer vos amendements et sous-amendements.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Ces deux amendements, qui proposent de prolonger les expérimentations jusqu’en 2028 et de rehausser le taux de générosité de 34 à 40 %, me semblent avoir atteint un bon équilibre entre la nécessité de donner de la visibilité au monde économique et celle de préserver le pouvoir d’achat de nos concitoyens.
    Vous proposez, avec vos sous-amendements, de porter le taux de générosité à 50 %, ce qui revient à vendre deux articles pour le prix d’un, alors qu’un taux de 34 %, c’est trois articles pour le prix de deux. Ce sont des éléments importants en termes de marketing.
    Dans la mesure où l’expérimentation devait prendre fin en avril 2026 et où je me suis engagée à ce que le gouvernement remette un rapport à l’automne prochain, je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée nationale, même si, à titre personnel, j’ai une préférence pour l’amendement no 16, qui prévoit une date d’application au 1er juillet 2025, alors que Mme Ronceret a retenu la date du 15 avril 2026. Si le taux de 50 % doit s’appliquer, il me semble préférable qu’il s’applique le plus vite possible.
    Sur les sous-amendements également, je m’en remets à la sagesse de l’assemblée.

    (Le sous-amendement no 56 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 50.

    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        147
            Nombre de suffrages exprimés                144
            Majorité absolue                        73
                    Pour l’adoption                65
                    Contre                79

    (L’amendement no 50 n’est pas adopté.)

    (Les sous-amendements identiques nos 55 et 57 ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 16.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        150
            Nombre de suffrages exprimés                149
            Majorité absolue                        75
                    Pour l’adoption                77
                    Contre                72

    (L’amendement no 16 est adopté ; en conséquence, les amendements nos 42, 51 et 30 tombent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Hélène Laporte, pour soutenir l’amendement no 44.

    (L’amendement no 44 est retiré.)

    Mme la présidente

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    L’amendement no 38 de M. le rapporteur est rédactionnel.

    (L’amendement no 38, accepté par le gouvernement, est adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l’amendement no 24.

    Mme Mathilde Hignet

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    En 2017, l’UFC-Que choisir révélait que 46 % des surcoûts du bio proviennent des surmarges réalisées dans ce secteur par les grandes surfaces. En 2022, la Cour des comptes observait que le prix des tomates biologiques avait augmenté plus vite que celui des tomates issues de l’agriculture conventionnelle, laissant penser que la grande distribution misait sur un consentement de la clientèle à payer le bio plus cher. « L’injuste prix de notre alimentation », excellent rapport de septembre 2024 dû notamment au Secours catholique, contient une analyse, pour quinze produits, de la différence entre prix d’achat au fournisseur et de vente au consommateur : ce taux de marge atteint 44 % pour des spaghettis, ou encore près de 45 % pour l’eau Cristaline. En novembre 2024, la lettre économique des chambres d’agriculture corroborait le constat de la Cour des comptes : les consommateurs « peuvent consentir à payer plus cher pour des produits qu’ils jugent plus sains ». Il importe donc que les taux de marge, notamment sur les produits bio, soient mis en évidence dans les documents transmis au gouvernement. (Mme Manon Meunier applaudit.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Avis défavorable. Je l’ai précisé en commission, la communication des taux de marge brute et nette n’a pas sa place au sein de l’article 125 de la loi Asap, que l’article 1er tend à modifier. Votre amendement déborde de notre sujet : le SRP+10, l’encadrement des promotions dans le domaine alimentaire et celui du DPH.
    S’agissant de transparence, d’utilisation du surplus de marge résultant du SRP, nous avons, toujours en commission, amélioré ensemble le dispositif : à cet égard, l’amendement est satisfait.
    S’agissant de la nécessité de disposer de statistiques plus complètes au sujet des marges de la grande distribution, l’article L. 682-1 du code rural et de la pêche maritime dispose que l’OFPM « examine […] la répartition de la valeur ajoutée tout au long de la chaîne de commercialisation des produits agricoles ». Nous devrions faire en sorte que l’OFPM récupère plus facilement ces données, en particulier à l’étape de la transformation ; mais, encore une fois, ce n’est pas l’objet de l’article 125 de la loi Asap.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier.

    Mme Manon Meunier

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    A priori, mettre en rayon des produits bio ne demande pas aux PDG d’Auchan, de Carrefour, plus d’efforts que pour des produits cultivés de façon conventionnelle. Pourtant, en novembre 2024, selon une étude de Chambres d’agriculture France, la marge brute sur les produits bio est par exemple supérieure de 16 % pour les carottes et de 42 % pour les pommes, par rapport à leurs équivalents conventionnels !
    Ces pratiques rendent le bio inaccessible à nombre de consommateurs, ce qui explique l’effondrement des acteurs de cette filière, en particulier des exploitants. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.) C’est pour cela qu’il y avait urgence, chers collègues du Rassemblement national, à encadrer les marges au sein du secteur agroalimentaire ! Vous tenez de beaux discours contre la grande distribution et en faveur des consommateurs : pourquoi n’avez-vous pas voté en faveur de cette mesure ? (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Une nouvelle fois, chers collègues, plusieurs d’entre vous ont demandé à intervenir. Il nous reste moins d’une heure avant la fin de cette séance ; au rythme actuel des débats, trois heures seront nécessaires pour achever l’examen des amendements.

    Mme Olivia Grégoire

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    Merci, madame la présidente. C’est énorme, surréaliste !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier.

    M. Dominique Potier

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    Il y a deux ans, lorsque nous avons décidé de prolonger le dispositif Egalim, notre groupe avait demandé un rapport concernant le détail des marges, la teneur des négociations entre fournisseurs –⁠ producteurs ou industriels – et grandes ou moyennes surfaces. Mme la ministre ayant expliqué que nous ne disposions pas des documents requis, nous avons, par un amendement adopté en commission, obtenu que ces documents soient rendus obligatoires, et nous verrons tout à l’heure comment sanctionner leur absence.
    De même, par les amendements nos 46 et 47, nous réclamerons un rapport de l’IGF analysant entre autres les systèmes de péréquation entre marges. Le no 24 tend vers le même but que les nôtres ; quitte à ce que l’adoption de l’un de ces derniers le rende ensuite superfétatoire, il convient de le soutenir.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Nous voterons en faveur de l’amendement, chers collègues Insoumis : quoi que vous en pensiez, nous agissons en accord avec ce que vous appelez nos beaux discours. Je vous ai expliqué tout à l’heure que, si nous n’avions pas voté pour l’encadrement des marges, c’est parce que la grande distribution sait toujours les détourner. Vous n’avez pas voulu l’entendre : ce n’est pas grave ! Nous favoriserons la publication des données, la transparence mais, tant que le gouvernement ne fera pas appliquer la loi et ne demandera pas à la DGCCRF de contrôler la grande distribution, la grande transformation, cet amendement ne changera rien !
    Contrairement à ce qu’a déclaré le collègue Sitzenstuhl, je maintiens que notre ancien collègue Grégoire de Fournas avait effectué à la DGCCRF des contrôles sur pièces et sur place ayant trait aux trois procédures d’infraction promises par Gabriel Attal, puis interrompues par l’autorité de contrôle. En 2024 s’est tenu le procès intenté par un vigneron au titre de l’article L. 442-7 du code de commerce, issu de la loi Egalim. Or, selon la DGCCRF, faire respecter cet article, lequel vise à lutter contre les « prix de cession abusivement bas », serait si compliqué que personne ne contrôle ; en d’autres termes, même votre administration ne comprend pas ce que vous avez voulu dire. Je le répète, tout cela est du blabla : les gouvernements successifs ne font pas appliquer leurs propres lois, laissant agriculteurs et consommateurs aux mains des lobbys ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Les taux de marge n’ont pas leur place au sein de dispositions relatives au SRP+10. En revanche, comme j’ai eu l’occasion de le dire, il importe de rassembler des éléments concernant ces taux : c’est l’objet des deux amendements de M. Potier dont lui-même a fait mention. Je me suis engagée à émettre un avis favorable au second, dont l’adoption permettra que le gouvernement confie à l’IGF la rédaction d’un rapport consacré aux taux de marge par catégorie de produits et aux péréquations existant entre eux. Je vous invite donc, plutôt que le no 24, à adopter en son temps le no 47, plus factuel, précis et complet. (Mme Hélène Laporte s’exclame.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Je n’entends pas laisser le collègue Tanguy évoquer un rapport qui n’a jamais existé, puisque les travaux de la commission d’enquête visant à établir les raisons de la perte de souveraineté alimentaire de la France ont été interrompus, le 9 juin 2024, par la dissolution de l’Assemblée.
    Premièrement, vous évoquez des contrôles sur pièces et sur place effectués par le rapporteur de cette commission : celui-ci n’est plus député, il n’a pas eu le loisir de communiquer les résultats de ces contrôles…

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Ben voyons : c’est magique ! Quel dommage !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    …et, sans réunion de conclusion ni rapport, les autres membres de la commission n’ont pu en prendre connaissance.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Mais s’ils sont publics ?

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il y a donc un problème de forme à ce que vous vous saisissiez de contrôles que vous n’avez pas effectués, d’éléments jamais examinés par la représentation nationale, de conclusions qui n’ont pas été validées.
    Quant au fond, j’ai eu le temps de vérifier les comptes rendus des réunions de la commission : le 30 mai 2024, nous avons auditionné Sarah Lacoche, directrice générale de la DGCCRF –⁠ vous étiez présent. Sous serment, je vous le rappelle, elle nous a déclaré, puis a répondu à ma question sur ce point, que ses services avaient contrôlé cent relations contractuelles en 2022…

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Il est sérieux, là ? Ce n’est rien, cent contrôles !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    …et 175 en 2023. En 2024, à la demande du premier ministre de l’époque, Gabriel Attal, ces contrôles s’intensifiaient encore. Nous voilà loin des contre-vérités que vous tentez de propager dans l’hémicycle ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)

    (L’amendement no 24 est adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Eric Liégeon, pour soutenir l’amendement no 34.

    M. Eric Liégeon

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    Le IV bis de l’article 125 de la loi Asap dispose que « chaque distributeur de produits de grande consommation transmet aux ministres chargés de l’économie et de l’agriculture […] un document présentant la part du surplus de chiffre d’affaires enregistré à la suite de la mise en œuvre » du SRP + 10, document « qui ne peut être rendu public ». Or la commission est revenue sur cette disposition. Il nous paraît pourtant important de préserver le secret des affaires et d’éviter toute divulgation des données. C’est pourquoi nous proposons de revenir à la rédaction initiale en supprimant l’alinéa 12.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Je conçois votre préoccupation, d’autant qu’il s’agit ici des documents et non de l’évaluation du dispositif, qui, elle, doit d’ores et déjà être rendue publique. Toutefois, il incombe au gouvernement, lorsqu’il transmet ces éléments au Parlement, de signaler ceux qui sont couverts par le secret des affaires et ne doivent pas être publiés ; le texte pourrait contribuer à organiser tout cela.
    J’émets donc un avis de sagesse, d’autant que l’interdiction de publier ne se retrouve pas à l’alinéa 18, également introduit en commission, et qui prévoit la remise d’un document similaire par les industriels : l’adoption de votre amendement créerait alors une inégalité de traitement entre ceux-ci et les distributeurs, si bien qu’il nous faudrait revoir ce point au cours de la navette parlementaire.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Lors de l’examen du texte en commission a été exprimé le souhait de sanctionner les distributeurs ne fournissant pas les éléments exigés par la loi, ce qui, conjugué à la publicité de ces derniers, pose problème. Rendre public ce rapport, c’est donner des éléments aux concurrents. Or ces derniers n’ont pas à connaître le niveau de marge des autres entreprises, ou la stratégie commerciale qui en découle.
    C’est pourquoi j’émets un avis favorable à l’adoption de cet amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin.

    Mme Mélanie Thomin

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    L’amendement de M. Liégeon remet en cause un amendement socialiste, adopté en commission des affaires économiques.
    C’est grâce aux députés socialistes que l’Assemblée nationale a obtenu ce nouveau droit, celui d’exiger des distributeurs la transmission d’un document exposant leurs marges dans le cadre du dispositif SRP + 10, mais aussi la publication de ces informations.
    C’est un sujet sensible. Je suis étonnée de l’avis de sagesse du rapporteur et de l’avis favorable de la ministre, alors qu’il s’agit, je le répète, de revenir sur une avancée majeure obtenue en commission.
    Ce dispositif vise à améliorer la transparence. Cette avancée, nous la devons bien évidemment au monde agricole, mais aussi aux consommateurs et aux salariés de la grande distribution, aux caissiers et caissières qui travaillent tous les jours dans les rayons de nos supermarchés, et qui aimeraient bien savoir où vont les marges de leur magasin.
    Dissimuler les comptes de résultat de la grande distribution n’est pas dans l’intérêt économique du pays. Nous plaidons tous, ici, pour un meilleur partage de la valeur. C’est pourquoi nous souhaitons que ces informations soient rendues publiques –⁠ c’est l’essence même du SRP + 10.
    Monsieur le rapporteur, vous nous perdez si vous revenez sur ces avancées majeures obtenues en commission la semaine dernière. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    Sur les amendements nos 25, 26, 27 et 28, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire de demandes de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je mets aux voix l’amendement no 34.

    (Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        144
            Nombre de suffrages exprimés                139
            Majorité absolue                        70
                    Pour l’adoption                22
                    Contre                117

    (L’amendement no 34 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de sept amendements, nos 25, 26, 27, 28, 31, 6 et 32, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Manon Meunier, pour soutenir l’amendement no 25.

    Mme Manon Meunier

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    Chers collègues macronistes, vous avez la fâcheuse tendance à être faibles avec les forts, et forts avec les faibles. Vous sanctionnez toujours plus lourdement ceux qui volent un morceau de pain, mais que faites-vous contre ceux qui font du pain un bien inaccessible et ne paient pas au producteur le fruit de son travail ? Vous laissez faire !
    Que représentent 375 000 euros d’amende quand la grande distribution ou l’agroalimentaire réalisent des milliards d’euros de chiffre d’affaires, voire de bénéfices ? Absolument rien !
    Il n’y aura pas de rapport et nous ne saurons donc pas si votre mesure est efficace tant que nous ne pourrons pas contrôler ce dispositif qui permet à la grande distribution de réaliser au moins 10 % de marge sur le dos des agriculteurs qui –⁠ eux – ne voient pas leurs revenus évoluer.
    Pour une fois, chers collègues, faites preuve d’un peu de courage politique et votez notre amendement : il s’agit de prévoir une sanction à hauteur de 4 % du chiffre d’affaires pour les entreprises qui ne transmettent pas les informations. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l’amendement no 26.

    Mme Mathilde Hignet

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    Je partage les propos de Manon Meunier. Il s’agit ici de transformer l’amende forfaitaire en une sanction proportionnelle au chiffre d’affaires –⁠ à hauteur de 3 % cette fois – afin de renforcer la pression sur les distributeurs et les fournisseurs qui ne respectent pas la loi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Manon Meunier, pour soutenir l’amendement no 27.

    Mme Manon Meunier

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    Un exemple concret : Lactalis, qui réalise des centaines de millions d’euros de chiffre d’affaires. Récemment, l’entreprise a payé 500 millions d’euros au fisc pour mettre fin à un contentieux fiscal. Pensez-vous que ces 375 000 euros d’amende pour non-transmission de données seront dissuasifs ? Bien sûr que non ! Croyez-moi, ils préfèrent ne pas transmettre leurs données.
    Que font-ils en parallèle ? Ils laissent 300 éleveurs sur le carreau en résiliant leurs contrats du jour au lendemain pour délocaliser et aller produire moins cher ailleurs. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Soyons plus forts avec ces gens qui utilisent la force. (Mêmes mouvements.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Hignet, pour soutenir l’amendement no 28.

    Mme Mathilde Hignet

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    Les marges considérables des multinationales remplissent les poches des actionnaires : chez Nestlé, en 2022, ils ont reçu 19 milliards d’euros ; Danone, quant à lui, distribue 1 milliard d’euros de dividendes au détriment des Français, qui ne peuvent pas se nourrir correctement, et au détriment des producteurs, qui ne disposent pas d’un prix rémunérateur.
    Dès lors, croyez-vous qu’une amende de 375 000 euros suffise à convaincre les multinationales de l’agroalimentaire de communiquer les éléments permettant d’évaluer le SRP + 10 ?
    Pendant qu’elles s’enrichissent, les ETI et PME françaises qui les fournissent sont fragilisées : 33 % d’entre elles étaient déficitaires en 2023, contre 19 % en 2018.
    En outre, alors que ces multinationales sont capables de lutter face à la grande distribution lors des négociations commerciales, ce n’est pas le cas des PME et ETI françaises.
    Pourtant, ce n’est pas sur les produits des grandes marques que la grande distribution augmente ses marges, mais sur les produits bio et de qualité, fabriqués par des PME et ETI françaises.
    En calculant la sanction sur le chiffre d’affaires des entreprises, nous souhaitons montrer qui sont les profiteurs de crise, et les responsables de l’inflation alimentaire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Boris Tavernier, pour soutenir les amendements nos 31 et 32, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    M. Boris Tavernier

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    Ce n’est pas parce qu’on est puissant qu’on est au-dessus des lois. Plafonner l’amende administrative encourue par la grande distribution à 375 000 euros, c’est lui donner le choix de ne pas respecter la loi à un bien faible coût.
    Comme mes collègues socialistes et Insoumis, je défends un alourdissement des sanctions contre la grande distribution et les plus gros acteurs de l’industrie agroalimentaire qui refusent de transmettre à l’administration les informations nécessaires à une juste appréciation des effets du seuil de revente à perte majoré.
    Rappelons que le surcoût de ce dispositif pour les consommateurs est estimé entre 470 millions et 1 milliard d’euros par an. La grande distribution et l’industrie agroalimentaire doivent donc rendre des comptes sur son utilisation. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS. –⁠ M. Inaki Echaniz applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l’amendement no 6.

    Mme Mélanie Thomin

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    Une amende de 375 000 euros, forfaitaire, apparaît dérisoire au regard des chiffres d’affaires générés par les acteurs de la grande distribution –⁠ plusieurs dizaines de milliards d’euros chaque année en France.
    Le groupe Socialistes et apparentés estime qu’il faut réévaluer l’échelle des sanctions –⁠ à hauteur de 1 % du chiffre d’affaires au maximum – pour que la loi soit efficace car il est indispensable d’encadrer strictement le dispositif SRP + 10.
    C’est un pourcentage qui nous semble dissuasif, sachant que ce plafond pourra être modulé en fonction de l’acteur incriminé.
    Un tel pourcentage ne posera aucune difficulté aux entreprises de la grande distribution qui jouent le jeu –⁠ d’autant qu’il s’agit de marges garanties. À l’inverse, il est légitime de rappeler avec fermeté le cadre de la loi aux resquilleurs.
    Cela permettra peut-être aussi de mieux faire ruisseler les marges de ce dispositif vers les agriculteurs –⁠ c’est notre principal combat.
    C’est enfin le minimum que le législateur puisse exiger, dans la mesure où la grande distribution ne respecte pas la loi et les obligations qui lui incombent.
    Madame la ministre, nous espérons que vous serez sensible à ces arguments, au cœur de nos débats. (M. Stéphane Delautrette et Mme Sandrine Rousseau applaudissent.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Lors des débats en commission, nous avons décidé de punir les distributeurs qui ne répondent pas à leurs obligations de 75 000 euros d’amende pour une personne physique, et 375 000 euros pour une personne morale.
    Vous estimez que c’est insuffisant mais je ne suis pas de votre avis. Cela me paraît proportionné. On ne peut prévoir une sanction plus lourde pour le défaut de transparence que pour la méconnaissance de la disposition de fond !
    En outre, personne ne nous a indiqué que ces sanctions étaient insuffisantes et ne remplissaient pas leur office auprès des distributeurs –⁠ dont la réputation est en jeu.
    Je suis défavorable à tous ces amendements qui proposent un relèvement du niveau de la sanction. Mais, s’il ne fallait en retenir qu’un seul, ce serait le no 32 de M. Tavernier, le plus raisonnable, avec une sanction à hauteur de 0,1 % du chiffre d’affaires. (Mme Sandrine Rousseau applaudit.)

    Quelques députés du groupe SOC

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    Ah !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Tous ces amendements ont pour objet de relever le niveau des sanctions, qui deviendraient proportionnelles au chiffre d’affaires.
    Jusqu’à présent, les distributeurs n’encouraient aucune sanction en l’absence de communication de ces informations. La commission a adopté une sanction à hauteur de 375 000 euros. Cela me paraît proportionné. En revanche, prévoir une amende allant de 0,1 % à 4 % du chiffre d’affaires mondial est complètement disproportionné. Avis défavorable.

    M. René Pilato

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    Ça les calmerait !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Aurélie Trouvé, présidente de la commission des affaires économiques.

    Mme Aurélie Trouvé, présidente de la commission des affaires économiques

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    Sans vouloir prolonger les débats –⁠ ce sera ma seule intervention –, je tenais à rappeler que ce sujet a été au cœur de nos débats en commission, débats de grande qualité par ailleurs.
    Comment disposer de données adéquates pour évaluer la loi ? Le SRP + 10 permet-il, ou non, un ruissellement vers les revenus des agriculteurs ? Nous n’en savons rien, et nous sommes pourtant nombreux à nous être penchés sur le sujet.
    La grande distribution et la grande transformation estiment qu’ils ne peuvent pas fournir ces données depuis 2019. Mais elles savent bien sûr le faire !
    Nous, de notre côté, savons tout à fait calculer les effets propres de ce dispositif. En économétrie, cela s’appelle les effets propres des politiques publiques ! Notre seul problème est de pouvoir disposer des données de la grande transformation et de la grande distribution, qu’elles refusent de donner. C’est la raison pour laquelle notre débat sur les sanctions est très important. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs du groupe EcoS.)

    M. Antoine Léaument

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    Bien dit !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin.

    Mme Mélanie Thomin

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    Dans son rapport sur la proposition de loi tendant à renforcer l’équilibre dans les relations commerciales entre fournisseurs et distributeurs, la sénatrice Anne-Catherine Loisier indique que le SRP + 10 reconduit comme tel, c’est à-dire non assorti de sanctions ou de contrôles effectifs « s’est révélé être un chèque en blanc […] offert à la grande distribution, et un chèque en bois aux agriculteurs ».
    Nos amendements sont donc au cœur de ce même débat. Regardez de près le chiffre d’affaires des grands distributeurs –⁠ 32 milliards pour Leclerc en 2024, près de 27 milliards d’euros pour Carrefour, plus de 22 milliards d’euros pour Les Mousquetaires : pour eux, ces 375 000 euros d’amende, ce n’est rien du tout et cela ne risque pas de faire trembler la grande distribution qui ne respecte pas la loi puisque ces marges ne ruissellent pas vers le revenu des agriculteurs.
    Si nous voulons que les dispositions d’Egalim servent à quelque chose, réévaluons le montant des sanctions et calculons-les en pourcentage du chiffre d’affaires. (M. Jean-Philippe Tanguy s’exclame.) Elles auront alors un impact sur les décisions de la grande distribution. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 25.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        165
            Nombre de suffrages exprimés                147
            Majorité absolue                        74
                    Pour l’adoption                38
                    Contre                109

    (L’amendement no 25 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 26.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        166
            Nombre de suffrages exprimés                149
            Majorité absolue                        75
                    Pour l’adoption                37
                    Contre                112

    (L’amendement no 26 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 27.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        169
            Nombre de suffrages exprimés                150
            Majorité absolue                        76
                    Pour l’adoption                37
                    Contre                113

    (L’amendement no 27 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 28.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        169
            Nombre de suffrages exprimés                167
            Majorité absolue                        84
                    Pour l’adoption                113
                    Contre                54

    (L’amendement no 28 est adopté ; en conséquence, les amendements nos 31, 32, 6 et 7 tombent.)
    (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur quelques bancs des groupes SOC et EcoS.)

    M. Julien Guibert

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    Vous pouvez remercier le RN !

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 33, je suis saisie par le groupe Écologiste et social d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Boris Tavernier, pour le soutenir.

    M. Boris Tavernier

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    Un système alimentaire opaque est un système alimentaire injuste, dans lequel les puissants dictent les règles, font les prix et décident ce qu’il y aura dans les rayons –⁠ donc dans notre assiette. Cela doit cesser. Les géants de l’industrie agroalimentaire et de la grande distribution ne doivent plus pouvoir profiter de l’opacité qu’ils entretiennent sur leurs marges pour faire des profits, au mépris du droit à une alimentation choisie, saine et durable. L’amendement vise donc à renforcer la transparence en obligeant les plus gros acteurs de l’industrie agroalimentaire et de la grande distribution à communiquer leurs marges, brutes et nettes, à l’OFPM.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    J’ai évoqué précédemment le travail mené par l’OFPM sur la question. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 33, repoussé par le gouvernement.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        155
            Nombre de suffrages exprimés                154
            Majorité absolue                        78
                    Pour l’adoption                102
                    Contre                52

    (L’amendement no 33 est adopté.)
    (M. Inaki Echaniz et Mme Sandrine Rousseau applaudissent.)

    Mme la présidente

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    Les amendements nos 48 et 40 de M. le rapporteur sont rédactionnels.

    (Les amendements nos 48 et 40, acceptés par le gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : par le groupe Rassemblement national sur l’amendement no 45 ; par le groupe Ensemble pour la République sur l’article 1er.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 45, 9, 8, 29, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Hélène Laporte, pour soutenir l’amendement no 45.

    Mme Hélène Laporte

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    Par cet amendement, nous proposons la fin immédiate du SRP + 10, tout en conservant la prolongation jusqu’en 2028 de l’encadrement des promotions prévu dans la proposition de loi. C’est un compromis visant à concentrer nos efforts sur la mesure la plus défavorable aux consommateurs. Comme l’a montré par exemple l’UFC-Que choisir, l’encadrement des promotions peut trouver une justification, en particulier s’agissant des produits bruts. Aussi proposons-nous une solution d’équilibre : prolonger l’encadrement des promotions, qui doit rester une mesure provisoire, tout en mettant fin immédiatement au SRP+10. Il est temps d’arrêter les frais. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 45, repoussé par la commission et le gouvernement.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        145
            Nombre de suffrages exprimés                140
            Majorité absolue                        71
                    Pour l’adoption                55
                    Contre                85

    (L’amendement no 45 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l’amendement no 9.

    Mme Mélanie Thomin

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    Il me semblait que cet amendement du groupe socialiste faisait l’objet d’une discussion commune, madame la présidente, mais il n’y a pas de problème, je le vais le défendre.
    Il vise à réduire de trois à un an la prorogation du SRP + 10. En effet, nous avons obtenu qu’un rapport évalue ce dispositif. Il importe que son efficacité soit évaluée rapidement. Il convient en particulier de mesurer s’il contribue réellement à augmenter les revenus agricoles. C’est la raison pour laquelle nous avons choisi comme échéance l’année 2026.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l’amendement no 8.

    Mme Mélanie Thomin

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    Le principe est le même.

    Mme la présidente

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    L’amendement no 29 de Mme Mathilde Hignet est défendu.
    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Je me suis déjà exprimé précédemment sur le report de l’expérimentation et la prolongation du SRP + 10 jusqu’en avril 2028. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Même avis.

    (L’amendement no 9 est adopté ; en conséquence, les amendements nos 8 et 29 tombent.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article 1er, tel qu’il a été amendé.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        151
            Nombre de suffrages exprimés                97
            Majorité absolue                        49
                    Pour l’adoption                97
                    Contre                0

    (L’article 1er, amendé, est adopté.)

    Après l’article 1er

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne, pour soutenir l’amendement no 37 portant article additionnel après l’article 1er.

    M. André Chassaigne

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    Il est défendu.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    L’amendement, qui tend à instaurer un taux de marge minimum entre le prix d’achat et le prix de revente au consommateur, s’éloigne du dispositif du SRP tel qu’il a été conçu. Avis défavorable.

    (L’amendement no 37, repoussé par le gouvernement, est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : par le groupe Rassemblement national sur l’amendement no 41 ; par le groupe Socialistes et apparentés sur l’amendement no 12.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    Article 2

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Hélène Laporte, pour soutenir l’amendement de suppression no 41.

    Mme Hélène Laporte

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    Le SRP + 10 ne fonctionne pas, il faut donc plus de SRP + 10 : telle est la logique suivie par les collègues qui ont adopté en commission l’amendement créant l’article 2. La cause est entendue : les Français doivent payer plus cher leur alimentation, par solidarité avec les agriculteurs, qui ne voient pourtant pas un centime de l’inflation induite par ces mesures. Je vous appelle donc à voter cet amendement de suppression. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 41, repoussé par la commission et le gouvernement.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        155
            Nombre de suffrages exprimés                147
            Majorité absolue                        74
                    Pour l’adoption                60
                    Contre                87

    (L’amendement no 41 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l’amendement no 12, qui fait l’objet d’un sous-amendement no 63. 

    Mme Mélanie Thomin

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    Nous avons obtenu une avancée très importante tout à l’heure : un amendement affirmant la nécessité d’une échelle de sanctions appropriées en cas de non-respect par les acteurs de la grande distribution de l’obligation de transmission de leurs niveaux de marges nettes et brutes a été adopté. Le montant de la sanction a été fixé à 1 % du chiffre d’affaires réalisé par l’opérateur de la grande distribution ne respectant pas la loi.
    Cet amendement du groupe socialiste vise à renforcer les sanctions à l’encontre des acteurs de la grande distribution qui ne mettraient pas en œuvre le SRP + 10 dans leur magasin. En l’état actuel du droit, le non-respect de ce dernier est puni d’une amende forfaitaire de 75 000 euros –⁠ quasiment rien. Cette sanction apparaît dérisoire compte tenu des chiffres d’affaires réalisés par les fournisseurs et la grande distribution. Il est urgent et indispensable d’adopter des sanctions plus dissuasives. Le groupe socialiste étant très attaché à des sanctions définies en pourcentage du chiffre d’affaires, nous souhaitons fixer, là encore, à 1 % du chiffre d’affaires moyen annuel le montant de la sanction encourue par les opérateurs de la grande distribution qui n’adhéreraient pas au principe même du SRP + 10.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir le sous-amendement no 63.

    M. Dominique Potier

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    Soyons cohérents : nous avons adopté tout à l’heure un amendement fixant à 1 % du chiffre d’affaires le montant de l’amende prévue en cas de non-transmission de documents. Nous devons prévoir une sanction correspondant au moins à ce pourcentage en cas de non-respect du SRP + 10.
    Madame la ministre, vous trouviez ce montant trop élevé. Je rappelle qu’il s’agit d’un montant maximal. Il appartiendra à la justice administrative et à la DGCCRF de déterminer le montant des sanctions –⁠ on ne sanctionnera pas de la même manière la revente à perte de gros volumes d’un lait UHT sur une longue période et celle de quelques tonnes de tomates, mises en concurrence. En revanche, la sanction doit être au moins équivalente à celle prévue en cas de non-transmission de documents. Tel est le sens de cet amendement. Nous ne voulons pas retomber dans les mêmes ornières que les années précédentes.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur l’amendement et le sous-amendement ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Après l’adoption de l’amendement portant article additionnel de M. Chassaigne, j’émettrai un avis défavorable sur l’amendement et le sous-amendement.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Avis défavorable. J’entends vos arguments. Un amendement précédemment adopté, certes sur un autre sujet –⁠ la non-transmission des informations – fixe le montant des sanctions à 1 % du chiffre d’affaires si celui-ci est inférieur à 350 millions et 4 % s’il est supérieur à 350 millions. Ces sanctions apparaissent disproportionnées par rapport à leur objet. En outre, ces amendements concernent l’ensemble du monde économique –⁠ pas seulement les distributeurs, mais aussi les commerçants, les artisans, les entreprises, y compris les très petites. Avis défavorable.

    (Le sous-amendement no 63 est adopté.)

    Mme Hélène Laporte

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    Vous pouvez nous remercier !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 12, tel qu’il a été sous-amendé.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        160
            Nombre de suffrages exprimés                153
            Majorité absolue                        77
                    Pour l’adoption                119
                    Contre                34

    (L’amendement no 12, sous-amendé, est adopté.)

    (L’article 2, amendé, est adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 47, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
    Sur l’ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    Après l’article 2

    Mme la présidente

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    Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l’article 2.
    La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir l’amendement no 17.

    M. Hadrien Clouet

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    Il vise à rouvrir le débat sur la création d’un coefficient multiplicateur, rejeté à six voix près lors de l’examen d’un texte antérieur. Il s’agit de garantir un rapport, filière par filière et fixé par le pouvoir réglementaire, entre le prix d’achat aux fournisseurs et le prix de vente au consommateur final. En effet, un grand flou demeure en ce qui concerne le milieu de la chaîne de distribution, entre l’achat au producteur et la vente au consommateur. Nous devons faire en sorte que le texte ne soit pas hémiplégique, en ne nous limitant pas à la seule question de la rémunération du producteur, mais en analysant au contraire les deux extrémités de la chaîne de valeur.
    La rémunération du producteur est bien sûr une question fondamentale, à laquelle nous avons contribué grâce à l’adoption des excellents amendements de la non moins excellente Mathilde Hignet, mais il convient de l’articuler avec l’intérêt des consommateurs et des consommatrices : quand ceux-ci achètent des pommes de terre, des tomates ou des salades, ils se rendent compte des écarts inacceptables qui existent entre le prix sur le marché de gros consultable en ligne, le prix de vente du producteur et le prix dans les rayons de supermarché.
    Instituons donc un coefficient maximum dans chaque filière, qui permettra de fixer une limite dans le rapport entre les prix d’un bout à l’autre de la chaîne. Notre proposition a été rejetée à six voix près lors de la niche de La France insoumise. Nous pourrions l’adopter aujourd’hui avec au moins six voix d’avance ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Votre amendement est satisfait par l’adoption de l’amendement no 37 du président Chassaigne. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    M. Clouet, maintenez-vous l’amendement ?

    M. Hadrien Clouet

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    Oui.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Philippe Tanguy.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Il faudrait retirer cet amendement car il rentre en contradiction avec l’amendement de M. Chassaigne, qui tend à remédier à la mauvaise philosophie de ce texte et satisfait la majorité d’entre nous. Essayez de vous concerter ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. Sébastien Delogu

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    On n’obéit pas aux fachos !

    (L’amendement no 17 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 46 est retiré.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier, pour soutenir l’amendement no 47, qui fait l’objet du sous-amendement no 62.

    M. Dominique Potier

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    Après un dialogue avec M. le rapporteur et le gouvernement, nous retenons en effet cet amendement au détriment de l’amendement no 46, retiré. Il ne peut y avoir de justice économique sans transparence. Depuis des années, nous réclamons le SRP + 10 et nous votons des lois Egalim sans parvenir à nos fins, c’est-à-dire à un échange juste, qui n’oppose pas le pouvoir d’achat des Français à la création et au maintien d’emplois industriels et agricoles. Pour atteindre cet objectif, le commerce équitable et la transparence sont nécessaires, alors que ceux qui détiennent le pouvoir économique pratiquent la rétention d’information.
    C’est pourquoi cet amendement, élaboré avec le syndicalisme agricole dans sa diversité, vise à demander au gouvernement la publication d’un rapport de l’IGF afin d’apporter enfin la transparence sur les marges brutes réelles des distributeurs, détaillées par catégorie de produits alimentaires, ainsi que sur leur décomposition –⁠ marges arrière, revenus immobiliers, optimisation fiscale, etc. Cette vérité des prix contribuera à l’élaboration d’une véritable loi Egalim 4.
    Madame la ministre, je me souviens de votre engagement et de votre exigence à l’égard du gouvernement quand vous étiez parlementaire ; c’est pourquoi, dans l’hypothèse où cet amendement serait adopté, je vous demande que nous puissions faire œuvre d’un véritable travail parlementaire. Nous proposons que l’ensemble des groupes consultent la société civile pour recueillir les avis relatifs au cahier des charges de cette inspection de l’IGF, puis que vous les receviez à Bercy ou ici même, pour le finaliser et lancer ainsi cette opération vérité –⁠ je n’ose pas parler d’une opération mains propres – sur la grande distribution.
    Enfin, il convient que les résultats de l’inspection de l’IGF arrivent à temps pour préparer la future loi Egalim 4, promise avant la nouvelle négociation des prix, qui aura lieu probablement à l’automne 2025.

    Mme la présidente

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    Le sous-amendement no 62 de Mme Mélanie Thomin est défendu.
    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    Comme je l’ai indiqué, l’Observatoire de la formation des prix et des marges réalise déjà un rapport sur les marges des distributeurs. Votre demande est donc satisfaite. C’est au gouvernement de se prononcer sur la nature du travail qu’il doit vous remettre. Avis de sagesse.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Vous avez été très nombreux à déplorer le manque d’éléments nécessaires à la mesure des effets du SRP + 10 et du ruissellement évoqué. Je suis tout à fait favorable à une mission de l’IGF qui permettrait de rassembler des données, par catégorie de produits, relatives à la marge brute et aux effets de sa péréquation. En revanche, la fréquence annuelle d’un tel rapport me paraît superflue et une étude unique, sur une période donnée, amplement suffisante.
    Je suis également favorable à la collaboration des groupes parlementaires et à la nomination par chacun d’eux d’un représentant, afin que nous élaborions ensemble la lettre de mission et le cadrage de la mission. Nous ferons le maximum pour que le rapport soit produit dans les meilleurs délais, tout en prenant le temps nécessaire à un travail sérieux et précis.
    Si cet amendement est adopté, je m’engage donc à confier à l’IGF une telle mission, dont la teneur précise sera déterminée avec les parlementaires. Avis favorable sur l’amendement et le sous-amendement, qui confère au rapport un caractère unique et non pas annuel.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles de Courson.

    M. Charles de Courson

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    Notre groupe est tout à fait favorable à l’amendement de notre collègue Potier, seulement s’il est sous-amendé : on ne va pas produire un tel rapport chaque année. Cependant, madame la ministre, disposez-vous des moyens juridiques pour obtenir les informations nécessaires à la réalisation de ce rapport ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Dominique Potier.

    M. Dominique Potier

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    Monsieur de Courson, le sous-amendement vise précisément à ce que le rapport ne soit pas annuel.
    Ensuite, M. le rapporteur a raison d’être prudent : on va bientôt demander à l’OFPM de s’intéresser au secteur amont de l’agriculture à l’occasion de l’examen d’une prochaine proposition de loi. En l’occurrence, grâce au travail de l’IGF, l’OFPM pourra actualiser ses renseignements et sa documentation pour mieux remplir sa mission.
    En matière de délai, il serait souhaitable que l’IGF produise au moins un rapport intermédiaire avant l’examen éclairé de la loi Egalim 4.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée.

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Pour répondre à M. de Courson, l’IGF dispose de moyens d’expertise importants pour réaliser des travaux et des rapports dont nous mesurons tous la qualité : je suis sûre qu’elle produira des éléments beaucoup plus précis que ceux dont nous disposons.
    Pour répondre à M. Potier, nous ferons le maximum pour éclairer le Parlement dans les meilleurs délais. Il faudra laisser à l’IGF le temps de produire son rapport définitif, même si nous évaluerons, en cours de mission, les éléments qui pourront être communiqués au fur et à mesure.

    (Le sous-amendement no 62 est adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 47, tel qu’il a été sous-amendé.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        173
            Nombre de suffrages exprimés                162
            Majorité absolue                        82
                    Pour l’adoption                159
                    Contre                3

    (L’amendement no 47, sous-amendé, est adopté.)

    Titre

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin, pour soutenir l’amendement no 14.

    Mme Mélanie Thomin

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    Pour la coquetterie du titre, le groupe socialiste vous propose de remplacer les mots « renforcer la stabilité économique et la compétitivité du secteur agroalimentaire » par « proroger le dispositif de SRP + 10 et contrôler son efficacité économique » : un beau résumé de toutes les avancées que nous venons d’accomplir dans cet hémicycle.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Stéphane Travert, rapporteur

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    C’est un cadre global : je souhaite maintenir le titre initial. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    Mme Véronique Louwagie, ministre déléguée

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    Sagesse.

    (L’amendement no 14 n’est pas adopté.)

    Explications de vote

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Hélène Laporte.

    Mme Hélène Laporte (RN)

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    Comme je l’ai rappelé lors de la discussion générale, la prolongation du SRP + 10 et de l’encadrement des promotions, en particulier pour les produits DPH, n’ont répondu en rien aux besoins des agriculteurs et ont coûté des milliards d’euros aux Français. Reconduire ces dispositifs, même sous une forme allégée, n’a donc pas de sens. Pourtant, le texte a évolué grâce à l’apport des voix du Rassemblement national, qui a été l’arbitre de tous les votes.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Eh oui !

    Mme Hélène Laporte

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    L’adoption de l’amendement no 37, grâce aux voix du Rassemblement national, introduit un coefficient multiplicateur qui garantit un prix stable et raisonnable sur toute la chaîne de production. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.) Des mesures de transparence ont été adoptées grâce au groupe Rassemblement national, et le maintien du dispositif jusqu’en 2026 –⁠ c’était notre demande prioritaire en commission – a été voté, lui aussi grâce au Rassemblement national.
    Nous voterons donc pour ce texte. Une loi Egalim 4 nous est annoncée. Nous aurons donc l’occasion de débattre à nouveau de la pertinence des mesures, mais avant tout de bâtir un cadre législatif qui garantira réellement à nos agriculteurs la perception d’un prix rémunérateur de leur production. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN et sur quelques bancs du groupe UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Olivia Grégoire.

    Mme Olivia Grégoire (EPR)

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    Tout d’abord, je remercie l’ensemble des groupes pour la qualité de nos échanges, notamment en commission et avec l’aile gauche de cet hémicycle –⁠ je pense en particulier aux propositions de Mme Thomin et de M. Potier, que je remercie pour les demandes de rapport et de transparence.
    Ensuite, pour être très directe, quand le Rassemblement national est main dans la main avec les Insoumis pour encadrer les marges, c’est sans nous ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Hélène Laporte

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    Vous les avez fait élire !

    Mme Olivia Grégoire

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    Désolée si cela vous dérange qu’on répète une vérité mais je la répéterai autant de fois que nécessaire (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR),…

    M. Frédéric Boccaletti

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    Changez de disque !

    Mme Olivia Grégoire

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    …l’amendement no 37 du président Chassaigne voté par les deux extrêmes de l’hémicycle démontre une énième fois, si c’était nécessaire, que vous marchez ensemble.

    M. Frédéric Weber

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    Quel cynisme !

    Mme Olivia Grégoire

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    Malheureusement, nous voulions simplement prolonger un dispositif qui, ne vous en déplaise, a protégé nos agriculteurs, alors que vous avez passé votre temps à dire qu’il ne servait à rien. La réalité est qu’il a évité énormément de déboires, notamment la guerre des prix –⁠ et vous le savez comme moi. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)
    Par ailleurs, nous voulions redonner un peu de pouvoir d’achat aux consommateurs et malgré vos beaux discours et vos élucubrations, la réalité c’est que les promotions sur les produits d’hygiène, vous n’en avez cure !

    Mme Hélène Laporte

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    Et vous, c’est de la transparence que vous n’avez cure !

    Mme Olivia Grégoire

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    La réalité, c’est que les gens changent d’habitudes de consommation : ils vont chez les hard-discounters acheter leur lessive, mais vous n’en avez cure ! Vous légiférez à contre-courant !
    Malgré le remarquable travail de Stéphane Travert, notre groupe s’abstiendra.

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Où sont ses députés ?

    Mme Olivia Grégoire

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    Quand le Rassemblement national et les Insoumis sont ensemble, c’est sans nous ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    M. Gabriel Attal

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mélanie Thomin.

    Mme Mélanie Thomin (SOC)

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    Si l’on parle de rendre justice au monde agricole, ce dispositif n’est pas le Graal du partage de la valeur, mais il peut atteindre son objectif, s’il est strictement appliqué et s’il est respecté à l’aide de règles observées par tous les acteurs de l’agroalimentaire.
    Aujourd’hui, on veut bien donner des garanties aux agriculteurs –⁠ on leur en a reconnu plusieurs, en faisant adopter certains amendements. C’est sans doute de ces garanties que le SRP + 10 tire sa légitimité au terme de nos débats.
    Nous considérons aussi que, grâce aux amendements votés, la grande distribution travaillera davantage au service du monde agricole, ce qu’elle prétendait déjà faire à longueur de publicités. Grâce à l’adoption de certains amendements, la grande distribution sera lourdement sanctionnée si elle ne respecte pas la loi : ses entreprises encourent désormais une amende d’un montant équivalent à 1 % de leur chiffre d’affaires si elles ne publient pas les documents présentant leurs marges ou si elles n’adhèrent pas au principe du seuil de revente à perte.
    En plus de ces avancées significatives, nous adressons un message au monde agricole, pour lui dire que nous avons l’exigence de le défendre, à l’Assemblée nationale, contre la loi des puissants –⁠ sociétés de l’agro-industrie et de la grande distribution. Les législateurs exigeants que nous sommes, qui travaillent à plus de transparence dans les prix agricoles, ont obtenu aujourd’hui une victoire, certaines avancées et du temps.
    Les amendements portant sur la durée du dispositif que nous avons adoptés nous permettront de le réviser, si, dans quelques mois, nous nous apercevions qu’il ne contribuait pas à améliorer le revenu des agriculteurs. Ne pas attendre trois ans avant de nous dire que nous avons prêché dans le désert du secret des affaires, c’est aussi une avancée.

    Mme Caroline Parmentier

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    Qu’est-ce que c’est long !

    Mme Mélanie Thomin

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    Je me réjouis qu’un rapport de l’IGF paraisse dans les mois à venir. La transparence des documents et l’exigence d’un niveau de sanction dissuadant les opérateurs de flouer encore un monde agricole qui nous attend au tournant sont deux sources d’espérance, dans le contexte économique actuel. Espérons que le Sénat conservera les quelques avancées que nous avons obtenues ce soir !
    Je ne sais pas si, dans notre assemblée, le Rassemblement national est réellement l’arbitre des votes…

    Mme Hélène Laporte

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    Preuve en est pourtant faite ce soir !

    Mme Mélanie Thomin

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    …mais je sais que des groupes comme le mien, le groupe socialiste, sont force de proposition. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)

    Mme Hélène Laporte

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    Oh, arrêtez !

    Mme Mélanie Thomin

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    C’est d’ailleurs là l’essentiel : que le législateur soit au rendez-vous des attentes de nos concitoyens et qu’il concilie travail de terrain et travail de la loi.
    Nous sommes évidemment favorables au dispositif SRP + 10 tel qu’il a été amendé et nous souhaitons que notre travail soit poursuivi par nos collègues sénateurs. C’est en tout cas toute l’exigence que nous devons aux agriculteurs ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.)

    M. Inaki Echaniz

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Boris Tavernier.

    M. Boris Tavernier (EcoS)

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    Le seuil de revente majoré n’a pas fait ses preuves, ou plutôt si : il a fait la preuve du manque de transparence de notre système alimentaire. Il a fait la preuve de la surpuissance de la grande distribution. De sa surpuissance, elle écrase toute la chaîne de l’alimentation, jusqu’aux agriculteurs ; de sa surpuissance, elle n’a que peu de considération pour la qualité de l’alimentation qu’elle propose dans ses rayons. Face à cette surpuissance, pour protéger nos agriculteurs, nos PME de transformation alimentaire et les consommateurs, il nous faut des lois, de la transparence et des sanctions.
    La loi, d’abord, compte de grands absents : les 68 millions de consommateurs de ce pays. Bien trop de compatriotes doivent renoncer à certains aliments, bien trop d’entre eux vivent le passage en caisse comme une source de stress et d’inquiétude, si ce n’est d’humiliation. À cet égard, nous devons poursuivre nos efforts.
    La transparence, à présent, doit être imposée par la loi. Nous avons besoin de plus de transparence de la part de la grande distribution et des grands transformateurs sur les marges qu’ils pratiquent, et ce par produit.
    En matière de sanctions et de transparence, nous avons fait des progrès lors de l’examen de ce texte, grâce à l’adoption d’amendements défendus par le groupe Écologiste et social et par les autres groupes de gauche.
    Enfin, nous ne souhaitons pas que le SRP + 10 cesse brusquement, ce qui reviendrait à redonner des munitions à la grande distribution, qu’elle n’hésitera pas à utiliser pour intensifier à nouveau la guerre des prix.
    Pour toutes ces raisons, le groupe Écologiste et social votera pour ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Mathilde Hignet.

    Mme Mathilde Hignet (LFI-NFP)

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    Je veux saluer les débats qui ont accompagné l’examen de ce texte. Nous avons contribué à améliorer les effets du dispositif SRP + 10, qui était critiqué : alors qu’il devait permettre le ruissellement vers les producteurs, on voit bien que le dispositif n’a pas eu les effets escomptés.
    Plusieurs amendements, très intéressants, ont été débattus. Je pense notamment à celui tendant à sanctionner les grands groupes et donc à rappeler que les multinationales ne sont pas au-dessus des lois et qu’elles doivent transmettre les données qu’on leur demande. Je pense également à l’amendement de M. Chassaigne, relatif au coefficient multiplicateur et qui tendait à encadrer les marges dégagées par la grande distribution et l’ensemble de la chaîne de valeur.
    Nous l’avons rappelé plusieurs fois : sur les 100 euros d’un panier de courses, 7 euros seulement vont aux producteurs, ce qui n’est pas acceptable.
    Compte tenu des avancées obtenues, nous voterons pour ce texte. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Allegret-Pilot.

    M. Alexandre Allegret-Pilot (UDR)

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    On a été appelés à voter sur un mécanisme dont on ne mesurait pas réellement l’impact sur les agriculteurs, mais dont on mesurait bien l’impact sur le consommateur. On nous a parlé d’un ruissellement, qui nous a semblé relativement invisible, sinon imaginaire, ce qui nous a amenés à envisager une abstention.
    Néanmoins, les amendements adoptés, notamment ceux tendant à créer un corridor de prix, à garantir le caractère effectif des obligations grâce à des sanctions et à obtenir des données sur le système agroalimentaire sont positifs. Ils nous convainquent de voter pour le texte.
    J’appelle cependant votre attention sur plusieurs problèmes qui demeurent. Premièrement, la cartellisation du système de distribution à l’échelle européenne. Deuxièmement, l’importance de financer la modernisation des exploitations agricoles. Troisièmement, l’importance de faciliter leur concentration, ce qui améliorera leur compétitivité et renforcera leur poids dans les négociations. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes UDR et RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Paul Molac.

    M. Paul Molac (LIOT)

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    Cette proposition de loi s’inscrit déjà dans une longue succession de lois différentes, mais tendant toutes à moraliser et à rééquilibrer les relations commerciales entre la production agricole, la transformation et la distribution.
    Cette proposition de loi est modeste. Elle prolonge évidemment le relèvement de 10 % du seuil de revente à perte, elle augmente les sanctions encourues en cas de non-déclaration et tente de contrôler les marges de la grande distribution. Or le marché est complètement déséquilibré : on compte quatre centrales d’achats, quelques milliers de transformateurs et 500 000 agriculteurs –⁠ on voit tout de suite qui sera capable de faire la pluie et le beau temps !
    En définitive, c’est la vitalité de nos campagnes qui est en jeu. Je rappelle que, dans certains endroits de France, il ne reste pas grand-chose si on enlève l’agriculture et l’agroalimentaire. Je suis totalement contre la création de déserts ruraux !
    Si l’on ne soutient pas l’appareil productif français, dans un monde aussi incertain que le nôtre, c’est notre souveraineté alimentaire qui est en péril : nous devons garder cette considération à l’esprit !
    Cette proposition de loi permet d’accomplir un petit pas de plus dans la bonne direction, et notre groupe, évidemment, la votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thierry Benoit.

    M. Thierry Benoit (HOR)

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    Le groupe Horizons & indépendants ne s’opposera pas à cette proposition de loi. Ses membres soutiennent la prolongation du relèvement de 10 % du seuil de revente à perte ; ils soutiennent également l’encadrement des promotions sur les produits alimentaires ; ils soutiennent enfin l’ajustement progressif, jusqu’en 2028, de l’encadrement des promotions dans le secteur de la droguerie, de la parfumerie et de l’hygiène qu’a permis l’amendement de Julien Dive. Nous restons sensibles à la situation des unités industrielles de production de ce secteur.
    S’agissant des coefficients multiplicateurs, j’y suis personnellement sensible, voire favorable, mais ils font débat au sein de notre groupe. L’amendement qui tend à les faire appliquer ne va pas dans le mauvais sens, mais il nécessite des précisions.
    Enfin, je renouvelle le propos que j’ai tenu lors de la discussion générale : nous allons devoir, pour poursuivre le travail sur les négociations commerciales, constituer une commission d’enquête, afin de travailler sur la constitution et la répartition de la marge au sein de la filière et de la chaîne d’approvisionnement. Les agriculteurs et les consommateurs doivent savoir comment se constitue et se répartit la marge entre les industriels et la grande distribution.
    Ce débat également être ouvert au niveau européen : le déport hors de France des négociations commerciales menées par les centrales d’achat pose un réel problème. Pour cette raison, le gouvernement doit se montrer fort au niveau européen, pour que le Parlement et la commissaire européenne à la concurrence sévissent et encadrent leurs pratiques. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne (GDR)

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    J’ai terminé mon intervention dans la discussion générale ainsi : « Le temps suspend son vol et je suspends mon vote. » J’étais alors hésitant et je tremblais, même, ne sachant pas quoi voter, mais je voterai sans hésiter la proposition de loi, telle qu’elle est rédigée à l’issue de nos débats !
    Je disais que le temps suspend son vol, mais en ce qui me concerne, c’est depuis plus de vingt ans et à chaque examen d’un projet ou d’une proposition de loi relative à l’agriculture que je me bats pour l’instauration de coefficients multiplicateurs. Je n’aurais jamais pensé qu’à deux semaines de la fin de mon mandat de parlementaire, je remporterai une victoire aussi considérable ! (Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs.)

    M. Jean-Philippe Tanguy

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    Merci, le RN !

    M. André Chassaigne

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    J’avouerai, en toute humilité, que je tiens là une leçon de parlementarisme. Dans certaines circonstances, il ne faut pas défendre un amendement, mais le laisser couler, et il ne faut pas non plus demander de scrutin public. J’ai déjà vécu cette situation il y a vingt ans, avec un amendement –⁠ l’amendement no 242, relatif aux organismes génétiquement modifiés (OGM) – adopté alors que tous les scrutins publics précédents avaient conduit au rejet d’amendements presque identiques. (Sourires.)

    M. Jean Terlier

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    Quand on sait que l’amendement a été adopté avec les voix du RN, on a moins envie de rire !

    M. André Chassaigne

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    Vous le constatez, il faut profiter de mon expérience tant qu’il est encore temps ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS.)

    Vote sur l’ensemble

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        181
            Nombre de suffrages exprimés                141
            Majorité absolue                        71
                    Pour l’adoption                137
                    Contre                4

    (La proposition de loi est adoptée.)

    2. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
    Discussion de la proposition de loi visant à sortir la France du piège du narcotrafic ;
    Discussion de la proposition de loi organique fixant le statut du procureur de la République national anti-criminalité organisée.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à vingt heures quinze.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra