XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Deuxième séance du mardi 03 décembre 2024

Sommaire détaillé
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Deuxième séance du mardi 03 décembre 2024

Présidence de Mme Yaël Braun-Pivet

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à quinze heures.)

    1. Questions au gouvernement

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle les questions au gouvernement.

    Fermeture de sites ArcelorMittal

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sébastien Chenu.

    M. Sébastien Chenu

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    Delphine, Sébastien et leurs camarades des sites de Reims et de Denain d’ArcelorMittal voudraient travailler encore. Travailler encore, comme dans la belle chanson de Bernard Lavilliers, « forger l’acier rouge avec des mains d’or ». (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    Mme Clémentine Autain

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    Ah non, pas vous ! Quelle honte !

    M. Alexis Corbière

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    Un peu de respect !

    M. Nicolas Sansu

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    Mais quelle honte !

    M. Sébastien Chenu

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    Oui, ArcelorMittal a annoncé la fermeture des sites de Reims et de Denain, laissant sur le carreau 134 salariés. Pour notre département du Nord, cette annonce cynique représente une énième désindustrialisation.
    La réindustrialisation de notre pays est une illusion. Entre avril et août 2024, les annonces de fermeture ont été plus nombreuses que celles d’ouverture. Les politiques menées par les gouvernements successifs ont aggravé la situation. Le coût de l’énergie a explosé, handicapant notre compétitivité. Certains secteurs ont été fragilisés par les politiques européennes.
    Avec Marine Le Pen (Exclamations sur quelques bancs des groupes EPR, DR et HOR),…

    M. Jean-René Cazeneuve

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    Avec la censure !

    M. Pierre Cordier

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    Voilà, il a gagné 10 euros !

    M. Sébastien Chenu

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    …nous proposons pourtant de sauver l’outil industriel français, plutôt que de voir notre pays transformé en friche à ciel ouvert. Nous proposons de réorienter la politique d’apprentissage vers les métiers de l’industrie.

    M. Jean-Yves Bony

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    Vous proposez le chaos, voilà votre projet !

    M. Sébastien Chenu

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    Nous proposons de développer une politique tournée vers des filières ciblées, c’est-à-dire l’inverse de la vôtre, qui est d’ailleurs dénoncée par la Cour des comptes dans son rapport. Nous proposons de retrouver un prix de l’énergie cohérent.

    M. Erwan Balanant

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    Quelle est la question ?

    M. Sébastien Chenu

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    Des usines, ce sont des emplois à forte valeur ajoutée et des cotisations sociales. C’est un vrai levier de cohésion sociale. Comment ArcelorMittal compte-t-il sauver cet outil industriel ? Quelles perspectives comptez-vous offrir aux ouvriers de notre pays ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

    M. Antoine Armand, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie

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    Vous nous interrogez sur les sites de Denain et de Reims gérés par la société ArcelorMittal, qui a annoncé un plan de réorganisation. Vous avez nommé 2 des 135 salariés ; je m’associe à leur inquiétude extraordinairement légitime, ainsi qu’à celle de l’ensemble des salariés concernés. Cette inquiétude est partagée par le gouvernement et par les services de l’État, qui reçoivent depuis plusieurs semaines la direction et les organisations syndicales pour trouver des solutions. Encore demain, ils recevront au plus haut niveau, avec mes équipes, l’ensemble de la direction de l’entreprise, pour qu’aucun salarié ne soit laissé de côté.
    Il faut nous interroger sur la raison de ces fermetures de sites dans le secteur de la sidérurgie et de l’acier. Vous en avez mentionné certaines causes. Nous avons besoin d’une Europe forte en matière de sidérurgie et d’acier, parce que la surcapacité mondiale atteint 2,7 fois la capacité de production européenne et que la demande européenne d’acier a baissé de 25 %. Dans ce contexte, nous devons changer de langage avec nos partenaires et concurrents asiatiques, dont les pratiques de concurrence clairement déloyales et agressives appellent une réponse ferme et appropriée de l’Union européenne.
    Cette réponse – c’est le sens de l’action qu’a menée le gouvernement ces dernières semaines – doit être double. Nous devons décarboner l’industrie au niveau européen et au niveau national. Premièrement, au niveau national, le Sénat a adopté par amendement 1,5 milliard d’euros de crédits pour soutenir des projets comme celui d’ArcelorMittal à Dunkerque. Il nous faut également assurer la compétitivité énergétique de la France grâce à l’industrie nucléaire et à la déclinaison de l’accord avec EDF, que nous devons poursuivre. Deuxièmement, au niveau européen, nous devons défendre le pacte pour une industrie propre. Pour cela, bien sûr, il faut raisonner en Européens. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    Motions de censure

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Stéphanie Rist.

    Mme Stéphanie Rist

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    662 milliards : c’est le budget de la sécurité sociale. 662 milliards consacrés à nos hôpitaux, à nos Ehpad, à nos retraités, à nos entreprises. Ces 662 milliards, c’est aussi l’ouverture de droits nouveaux pour protéger nos concitoyens. Ce sont les aides très attendues par les agriculteurs.
    662 milliards. Certains députés n’en veulent pas. Ils vont choisir d’abandonner ce budget. Demain, chaque député fera face à un choix lourd de conséquences.

    Un député du groupe EPR

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    Elle a raison !

    Mme Stéphanie Rist

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    Peut-on promettre un jour à nos concitoyens d’être leurs premiers défenseurs et, le lendemain, balayer l’ensemble du budget pour plonger dans un grand saut vers l’inconnu ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)
    Notre groupe, Ensemble pour la République, a soutenu le gouvernement depuis le début (Vives exclamations et rires sur plusieurs bancs des groupes RN, SOC et EcoS) et jusqu’au vote de la commission mixte paritaire, car nous savons le coût de l’instabilité. Les Français n’ont pas à payer le prix de l’irresponsabilité…

    Mme Clémentine Autain

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    Parlons-en !

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Qui nous a mis dans le mur ? Qui est irresponsable ?

    Mme Stéphanie Rist

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    …d’une Marine Le Pen trop inquiète de son procès et de l’immaturité d’un Jordan Bardella traumatisé de ne pas être premier ministre. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. Emeric Salmon

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    C’est vous, les irresponsables !

    Mme Stéphanie Rist

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    Les Français n’ont pas à payer la fascination pour le désordre et le chaos de La France insoumise de Mélenchon, qui, hélas, déteint sur le Parti socialiste. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Ceux qui voteront la motion demain, je le crois, n’aiment pas la France (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR – Rires et exclamations prolongées sur les bancs du groupe RN), n’aiment pas les Français et ne veulent pas la stabilité du régime.

    M. Emeric Salmon

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    Les Français ne vous aiment pas, vous !

    Mme Stéphanie Rist

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    Ma question est donc simple. Les Français sont inquiets. Que se passera-t-il si le budget, notamment celui de la sécurité sociale, est abandonné à la suite du vote d’une motion de censure ? (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR et sur plusieurs bancs des groupes DR, Dem et HOR.)

    M. Sébastien Chenu

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    Les Français vous détestent !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre du budget et des comptes publics.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics

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    Vous avez raison : la commission mixte paritaire, en responsabilité (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe RN),…

    M. Emeric Salmon

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    Trois secondes seulement !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    …est parvenue à un vote majoritaire pour continuer à financer la protection sociale. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, Dem et HOR.) Oui, il y a une majorité de parlementaires responsables dans ce pays. (M. Alexandre Dufosset désigne les bancs du groupe RN. – M. Jean-Paul Lecoq s’exclame.)
    Vous m’avez demandé quelles conséquences aurait l’absence de budget. La première c’est tout simplement que le déficit social se creuserait d’au moins 12 milliards d’euros.

    Mme Olivia Grégoire

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    Eh oui !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Cela démontrerait notre incapacité collective à maintenir à l’équilibre le financement de la protection sociale, alors que nous le souhaitons tous.
    La seconde, c’est l’abandon de mesures très concrètes. Vous avez cité celles qui concernent les agriculteurs ; la ministre de l’agriculture aura l’occasion d’y revenir dans quelques minutes. On peut aussi mentionner l’engagement en faveur des Ehpad : si la censure était votée, 6 500 emplois ne pourraient voir le jour. Les mesures de simplification et d’investissement en faveur des Ehpad, mais aussi de l’hôpital, tomberaient avec le projet de loi de financement de la sécurité sociale.

    M. Philippe Vigier

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    Eh oui !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Je pense encore à la série de mesures sur le cumul emploi-retraite des médecins, visant à lutter contre les déserts médicaux.
    Mais l’abandon du PLFSS, hélas, ne serait pas le seul problème consécutif à l’adoption d’une motion de censure. L’impôt sur le revenu augmenterait pour 18 millions de Français et près de 400 000 foyers supplémentaires deviendraient imposables si vous commettiez une telle irresponsabilité. (« C’est faux ! » et vives exclamations sur les bancs du groupe RN. – Mme Marine Le Pen secoue la tête.)

    M. Emeric Salmon

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    Menteur !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Que l’on parle du PLFSS ou du PLF, le déficit et l’instabilité augmenteraient. Or le pays a besoin de retrouver l’équilibre financier et la stabilité politique. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR. – M. Jean-Pierre Bataille applaudit également. – Les députés du groupe EPR se lèvent pour applaudir.)

    AME

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Dominique Voynet.

    Mme Dominique Voynet

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    Monsieur le premier ministre, dans un entretien accordé au Figaro, vous avez annoncé votre intention de réduire notablement les soins pris en charge par l’aide médicale de l’État. Le panier de soins va être « sensiblement diminué », avez-vous précisé, annonçant une réforme de l’AME pour « éviter les abus et les détournements ».
    Éviter les abus ? Pas besoin de loi pour ça, qu’il s’agisse de vérifier l’identité ou l’ancienneté du séjour d’un bénéficiaire. Je subodore donc qu’au fond, vous n’avez pas grand-chose à faire de l’AME. Il s’agit, alors que vous n’avez jamais cherché à échanger avec les députés de gauche (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR. – « C’est faux ! » sur plusieurs bancs des groupes EPR et DR), de donner, au mépris de vos convictions, des gages à l’extrême droite.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Eh oui, vous l’avez fait pour satisfaire le RN !

    M. Philippe Vigier

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    À cause de qui ?

    Mme Dominique Voynet

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    Cette concession piteuse et déshonorante ne vous sauvera sans doute pas demain (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EcoS, LFI-NFP et SOC), mais là n’est pas mon sujet. Des milliers de médecins ont dénoncé votre position et huit anciens ministres de la santé vous ont alerté sur les conséquences sanitaires, humaines, sociales et économiques inacceptables qu’aurait une restriction ou une suppression de l’accès à l’AME. (M. François Cormier-Bouligeon s’exclame.) Roselyne Bachelot, Agnès Buzyn, Frédéric Valletoux, Aurélien Rousseau : ce ne sont pas des gauchistes ! (Plusieurs députés du groupe EPR s’exclament en désignant les bancs du groupe SOC, où siège M. Aurélien Rousseau.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Ah, des références !

    Mme Dominique Voynet

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    Ils vous ont expliqué que le panier de soins était déjà restreint, que l’AME était l’un des instruments indispensables d’une politique de santé qui nous protège toutes et tous et qu’en restreindre l’accès conduirait à prendre en charge plus tardivement des pathologies plus graves et plus coûteuses. (Mme Mélanie Thomin applaudit.) Le coronavirus, le VIH ou le bacille de Koch…

    Un député du groupe RN

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    La peste, le choléra !

    Mme Dominique Voynet

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    …ne se préoccupent pas de savoir si leur cible a des papiers en règle. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, SOC et sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et GDR).

    M. Sébastien Chenu

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    C’est mauvais !

    Mme Dominique Voynet

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    L’AME représente 0,5 % des dépenses de santé (« C’est faux ! » sur plusieurs bancs du groupe RN) : c’est moins de deux jours des dépenses annuelles. Vous avez vous-même admis, monsieur le premier ministre, que son montant est stabilisé ou presque. Ma question est simple : au pied du mur, serez-vous du bon côté de l’histoire…

    Plusieurs députés du groupe DR

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    Et vous ?

    Mme Dominique Voynet

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    …en admettant le rôle essentiel de l’AME dans une politique de santé efficace et responsable ? (De nombreux députés des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR se lèvent et applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes.

    M. Paul Christophe, ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes

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    Permettez-moi d’excuser l’absence de la ministre de la santé, retenue à Bruxelles où elle représente la France au Conseil emploi, politique sociale, santé et consommateurs.
    Vous l’avez dit, l’AME permet la prise en charge des frais de santé des personnes en situation irrégulière présentes depuis plus de trois mois sur le territoire français ou disposant de faibles ressources – moins de 47 euros par mois pour une personne seule en métropole. Comme le documente le rapport de MM. Évin et Stefanini, remis en 2023, d’autres États de l’Union européenne permettent aux migrants en situation irrégulière d’accéder, au-delà des soins d’urgence, à des soins courants. Je pense à l’Allemagne, à la Belgique, à l’Espagne, au Portugal ou encore à l’Italie. En France, l’octroi de l’AME est conditionné à un faible niveau de ressources et à une durée minimale de résidence. C’est bien légitime.
    Le principe de ce dispositif n’est pas remis en cause, mais au regard de la situation financière des publics français et de la situation budgétaire de l’État, nous devons faire des efforts. En ce sens, il est légitime de s’interroger sur la portée de l’AME.
    M. le premier ministre s’est engagé à réviser l’AME au début de l’année 2025, en s’appuyant sur des travaux documentés, notamment le rapport de MM. Evin et Stefanini. Vous le savez, des travaux sont en cours en ce sens, auxquels participent notamment le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, et la ministre de la santé, Geneviève Darrieussecq. Que les choses soient bien claires : l’AME est un dispositif fondamental, nous l’avons identifié comme tel ; il ne s’agit pas de le supprimer mais de le faire évoluer. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, Dem et HOR.)

    Motions de censure

    Mme la présidente

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    Avant de donner la parole à Mme Émilie Bonnivard pour le groupe Droite républicaine, je veux rendre hommage avec vous à M. René Couanau, décédé le 30 novembre dernier. Il a été pendant plus de vingt ans membre de notre assemblée et pendant vingt-quatre ans maire de Saint-Malo. Au nom de la représentation nationale, j’exprime nos condoléances les plus sincères à sa famille et à ses proches. (Applaudissements.)
    La parole est à Mme Émilie Bonnivard.

    Mme Émilie Bonnivard

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    René Couanau a été un formidable maire de Saint-Malo.
    Monsieur le premier ministre, notre pays se trouve au bord d’un abîme, au bord du gouffre d’une crise financière. Certains, sur ces bancs, s’apprêtent à l’y précipiter en sacrifiant l’intérêt supérieur des Français à leurs calculs politiciens. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et EPR.)

    M. Jean-Luc Bourgeaux

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    Elle a raison !

    M. Emeric Salmon

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    C’est vous qui nous y précipitez !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Monsieur le premier ministre, vous avez dit la vérité aux Français et vous avez parlé avec respect à tous les groupes politiques de cet hémicycle. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Vous avez accepté des compromis jusqu’au dernier moment sur ce budget dans l’intérêt de notre pays. Malheureusement, le RN et ses alliés de LFI ne veulent pas de compromis.

    M. Thibault Bazin

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    C’est vrai !

    Mme Émilie Bonnivard

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    À votre main tendue, ils préfèrent prendre le risque de nous plonger un peu plus dans la crise, alors que notre pays est déjà fragilisé.

    M. Julien Odoul

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    C’est mauvais !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Comment, en conscience, peuvent-ils prendre ce risque ?
    En effet, ce sont les Français qui en paieront le prix fort. Que se passera-t-il en cas de censure ? Plus de 18 millions de Français verront leurs impôts augmenter. (« Eh oui ! » et applaudissements prolongés sur les bancs du groupe DR.)

    Mme Hanane Mansouri

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    Mensonge !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Finie, la hausse des budgets des armées, de la sécurité ou encore de la justice, alors que notre pays en a tant besoin.

    M. Philippe Gosselin

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    Elle a raison !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Supprimé, le financement de 100 millions d’euros supplémentaires pour nos aînés dans les Ehpad. Annulées, toutes les mesures attendues depuis si longtemps par les agriculteurs. Adieu, la renégociation du Mercosur. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR ainsi que sur quelques bancs des groupes EPR et HOR.) Cela entraînera des conséquences financières, économiques et sociales dont personne ici ne peut mesurer la gravité. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Philippe Gosselin

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    Il faut dire la vérité aux Français, effectivement !

    M. Loïc Prud’homme

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    Calmez-vous !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Merci, madame Le Pen ! Face à cette censure, la responsabilité qui nous incombe à tous est immense. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    M. Philippe Gosselin

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    Ils en porteront la responsabilité !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Nous sommes à un tournant. La question est simple et s’adresse à tous ici : qui préfère son profit électoral, le risque du chaos, à la stabilité et au redressement du pays ? (Exclamations prolongées sur les bancs du groupe RN.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous avez voté Macron !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Avec la Droite républicaine et Laurent Wauquiez, notre choix est clair : nous choisirons toujours l’intérêt supérieur de l’État et des Français avant tout le reste. C’est à ce titre que nous vous soutenons, monsieur le premier ministre. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, EPR et HOR ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

    M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur

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    Vous avez parfaitement raison de parler de chaos et d’abîme. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP ainsi que sur quelques bancs du groupe GDR.) En effet, demain, certains, d’une extrémité à l’autre de cet hémicycle, s’apprêtent à jouer le destin de la France et des Français à la roulette russe, ni plus ni moins. Il est sûr que, si une censure était votée, elle précipitera la France et les Français dans une situation intenable. (« Non ! » sur les bancs du groupe RN.) Bien entendu, ce sont les Françaises et les Français les plus modestes, les plus fragiles, qui seront d’abord touchés, comme nous l’avons vu pendant la crise en Grèce. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Théo Bernhardt

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    C’est faux !

    M. Bruno Retailleau, ministre

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    On nous avait dit qu’une telle situation ne pouvait pas se produire. Regardez pourtant ce qui s’est passé la semaine dernière : le taux d’intérêt de la Grèce pour emprunter sur les marchés financiers était moins élevé que celui de la France. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    Mme Dieynaba Diop

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    Vous êtes aussi ministre des finances ?

    M. Thibault Bazin

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    Il a raison !

    M. Emeric Salmon

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    C’est vous qui en êtes responsables ! C’est la politique que vous menez !

    M. Bruno Retailleau, ministre

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    Que s’est-il passé ? La semaine dernière, de grandes entreprises ont perdu 15 % et même plus de leur valeur. Quand elles perdent leur valeur, elles deviennent des proies pour des offres publiques d’achat hostiles. Cela menace notre souveraineté sur les plans de l’emploi et de l’économie.

    M. Emeric Salmon

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    Dehors ! Allez faire vos cartons !

    M. Bruno Retailleau, ministre

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    C’est le mariage de la carpe et du lapin.

    Plusieurs députés du groupe RN

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    La carpe et le lapin, c’est vous !

    M. Bruno Retailleau, ministre

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    Madame Le Pen, comment pouvez-vous accepter de mêler vos voix, celles de votre groupe, à cette extrême gauche qui, il y a quelques jours, déposait une proposition de loi pour abroger le délit d’apologie du terrorisme ? C’est lamentable. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et DR. – Protestations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Vincent Rolland

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    Mais quelle honte, quelle honte !

    Plusieurs députés du groupe RN

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    C’est vous qui êtes lamentable !

    M. Bruno Retailleau, ministre

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    C’est l’inverse de la politique.

    M. Emeric Salmon

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    Ils vous ont fait élire !

    M. Bruno Retailleau, ministre

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    La politique repose sur les convictions et non sur la tambouille politicienne. Vive la France ! Nous, nous combattrons jusqu’au bout pour les Français, avec le premier ministre Michel Barnier, qui a toujours montré beaucoup de respect et d’ouverture au compromis. (Les députés du groupe DR ainsi que quelques députés du groupe EPR se lèvent et applaudissent. – Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, Dem et HOR. – Plusieurs députés du groupe RN font au revoir de la main.)

    Mme Clémence Guetté

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    C’est une honte !

    Éducation à la vie sexuelle

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christelle D’Intorni.

    Mme Christelle D’Intorni

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    L’objectif du nouveau programme d’éducation sexuelle (« Ah ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP), qui vise à accompagner les enfants pour les aider à devenir des adultes épanouis, est louable. Pourtant, ce nouveau programme suscite de nombreuses craintes et les polémiques se multiplient à juste titre. L’enseignement catholique et les associations de parents d’élèves de l’enseignement libre ont exprimé de « sérieuses réserves » et 100 sénateurs viennent de publier une tribune où ils déclarent ce programme « inacceptable ».

    Mme Fatiha Keloua Hachi

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    Ils ne l’ont pas lu !

    Mme Christelle D’Intorni

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    Même votre ministre délégué, M. Portier, a reconnu publiquement que ce programme n’était pas adapté. (Exclamations sur les bancs du groupe SOC.)

    Mme Dieynaba Diop

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    Quelle honte !

    Mme Christelle D’Intorni

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    Ce n’est pas votre cas : vous estimez au contraire qu’il n’y a aucun sujet. En tant que maman d’une petite fille de 9 ans, je peux vous dire qu’il y a là un vrai sujet. Je me demande comment vous pouvez affirmer que la théorie du genre n’existe pas dans votre programme…

    Mme Fatiha Keloua Hachi

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    Elle n’existe pas !

    Mme Christelle D’Intorni

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    …alors que l’on y compte dix-sept fois la notion « d’identité de genre » et alors que dans vos manuels de sciences de la vie et de la terre des classes de quatrième et de seconde, vous invitez nos enfants à choisir leur sexe, en leur expliquant qu’ils peuvent librement se sentir homme, femme, ou les deux. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP, SOC et EcoS.)
    Je me demande comment vous pouvez tolérer que les supports pédagogiques proposés à nos enseignants expliquent à nos enfants de 11 ans l’art de la fellation pour arriver à l’orgasme ou les initient à la pratique de l’anulingus. (Mêmes mouvements.) C’est surréaliste.
    Je me demande à quel enseignement pédagogique vous espérez rattacher ces mêmes supports dont les publications expliquent à des enfants de 11 ans comment utiliser le préservatif lors d’une sodomie.
    Alors, madame la ministre de l’éducation nationale, modifierez-vous sans délai les supports pédagogiques pour qu’ils soient enfin adaptés et respectueux de l’âge et de la maturité de nos enfants ? L’éducation nationale ne peut arracher l’innocence des enfants contre la volonté de leurs parents. (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR, dont quelques députés se lèvent, ainsi que sur les bancs du groupe RN et sur quelques bancs du groupe DR.)

    Mme la présidente

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    J’aimerais qu’il y ait davantage de silence dans cet hémicycle pour que nous puissions écouter la réponse de la ministre.
    La parole est à Mme la ministre de l’éducation nationale.

    Mme Anne Genetet, ministre de l’éducation nationale

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    Merci pour votre question qui me permet de parler de l’école, à un moment où elle a plus que jamais besoin qu’on la soutienne. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Je rappelle que l’école est là où nous forgeons des consciences libres.

    M. Éric Ciotti

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    Répondez à la question !

    Mme Anne Genetet, ministre

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    J’y viendrai. Sur ces bancs, je pense que nous sommes tous d’accord pour renforcer les savoirs fondamentaux. Pour tout cela, l’école a besoin de moyens. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI-NFP.)

    Un député du groupe RN

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    Ce n’est pas la question !

    Mme Anne Genetet, ministre

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    Au moment où certains d’entre vous s’apprêtent à choisir de priver notre pays du budget dont il a besoin, je veux rappeler que c’est priver l’école des moyens qui lui sont nécessaires. (Mêmes mouvements.)

    M. Laurent Jacobelli

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    Vous ne répondez pas à la question !

    Mme Anne Genetet, ministre

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    Vous m’interrogez plus précisément sur le programme d’éducation à la vie affective, relationnelle et, pour le second degré, à la sexualité. Ce programme n’a pas été publié ; je ne sais pas sur quoi vous vous appuyez pour en parler.

    Mme Caroline Parmentier

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    Sur les déclarations de M. Portier !

    Mme Anne Genetet, ministre

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    Ensuite, je l’ai dit et je le redis : il n’y a pas de théorie du genre, donc il n’y en a pas dans ce programme.

    M. Thibault Bazin

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    Il faut voir les choses en face, il y a un vrai risque !

    Mme Anne Genetet, ministre

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    Ce programme est progressif et adapté. (M. Boris Vallaud applaudit.) Je l’ai lu, relu et revu. Il sera présenté au Conseil supérieur de l’éducation le 12 décembre. Je vais vous dire sur quoi il porte, car manifestement vous ne savez pas ce qu’il contient exactement. Pour les tout-petits, il s’agit de parler des émotions et de la manière de les gérer. Chez les plus grands, on parlera de respect et de consentement, de l’égalité entre les femmes et les hommes. On s’efforcera de répondre aux questions auxquelles les enfants n’ont pas toujours de réponse. Actuellement, où les cherchent-ils ? L’Arcom a établi que, chaque mois en France, 2,3 millions de mineurs consultent des sites pornographiques pour trouver à leurs questions des réponses qu’ils ne trouvent pas ailleurs.

    Mme Brigitte Barèges

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    Ce n’est pas une réponse !

    M. Nicolas Meizonnet

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    Ça n’a rien à voir !

    Mme Anne Genetet, ministre

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    Le rôle de l’école, aux côtés des parents, est d’apporter des réponses aux questions des enfants. C’est fondamental car, voyez-vous, je ne me résigne pas à laisser la pornographie éduquer nos enfants. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. – Mme Justine Gruet applaudit également.) Je rappelle en outre que trois enfants par classe sont victimes de violences sexuelles. Nous devons aussi lutter contre cela. (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’oratrice. – Plusieurs députés des groupes EPR et Dem et quelques députés du groupe SOC applaudissent cette dernière.)

    Mme Marie-Pierre Rixain

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    Excellente réponse !

    Grève des taxis

    Mme la présidente

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    La parole est à M. David Taupiac.

    M. David Taupiac

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    Ma question s’adresse à Mme la ministre de la santé. Sortons des questions purement politiciennes et des polémiques pour parler des vraies gens, comme ceux qui manifestent sur l’esplanade des Invalides. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.) De nouveau, les territoires ruraux vont se trouver affectés par une mesure mal calibrée, qui ne prend pas en compte leur spécificité. Cette fois, c’est l’accès aux soins dans des territoires marqués par une forte proportion de déserts médicaux qui va être mis à mal. Dans les zones rurales, le transport sanitaire des patients dépend majoritairement des taxis, mode de transport indispensable pour des personnes isolées et non véhiculées. Malgré leur fonction essentielle, leur modèle économique demeure cependant fragile et dépend d’une polyvalence de ressources, dont les transports sanitaires qui représentent une grande partie de leur chiffre d’affaires. Après les efforts importants déjà fournis sur le transport partagé, la nouvelle tarification de la Caisse nationale de l’assurance maladie, qui doit entrer en vigueur en janvier, est jugée insoutenable pour leur activité : certains risquent de perdre 40 % de leurs revenus.
    Le modèle économique ne marchera plus pour ces taxis en milieu rural car il leur est difficile de compenser les pertes attendues par une augmentation du volume d’activité en raison d’un habitat très dispersé. Le risque de précarisation, d’ubérisation de l’activité, voire de fermeture d’entreprises, se profile, avec la disparition d’un pilier essentiel du lien social et des soins de proximité. Je prends l’exemple du Gers, qui fait partie des quatre départements les plus sinistrés en transport en commun, comme le montre la récente étude de l’UFC-Que choisir, phénomène qui touche 60 à 80 % des Gersois. Dans ce département dépourvu par exemple de tout service de radiothérapie, que proposerez-vous donc à nos concitoyens lorsqu’ils n’auront plus accès au transport sanitaire proposé par les taxis ruraux qui fermeront faute de rentabilité ? Nous pouvons entendre qu’il faut faire des économies, mais pas au mépris des patients ni à celui des territoires ruraux, fatigués de subir des mesures inapplicables et contre-productives qui ne font que nourrir une colère citoyenne et démocratique. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT, ainsi que sur quelques bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS. – M. Fabrice Brun et Mme Brigitte Barèges applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes.

    M. Paul Christophe, ministre des solidarités, de l’autonomie et de l’égalité entre les femmes et les hommes

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    Vous le savez, on dénombre 40 000 taxis conventionnés en France. Les remboursements effectués par l’assurance maladie pour le transport des malades ont représenté 2,88 milliards d’euros en 2023 ; ce montant est en hausse de 9 %. Vous l’avez mentionné, pour assurer la soutenabilité de ce poste de dépenses, un nouveau modèle tarifaire est en cours de discussion avec l’assurance maladie pour la période 2025-2029. Ce nouveau modèle doit être plus simple et lisible. Rappelons qu’actuellement, la tarification des taxis s’appuie sur des tarifs préfectoraux et est différente dans chaque département. Une harmonisation des règles de tarification est proposée autour de trois piliers : un forfait unique de prise en charge et d’accompagnement, un tarif kilométrique départemental et des suppléments pour des trajets longs, par exemple, ou pour le transport de personnes à mobilité réduite.
    Les taxis doivent garder une part essentielle dans le transport des malades, qui représentent 45 % des transports. La hausse du besoin de transport est le reflet du vieillissement de la population, vous l’avez dit, mais aussi de l’évolution des modes de prise en charge sur des plateaux techniques spécialisés. En parallèle, nous devons être vigilants quant au bon usage des ressources de la sécurité sociale. Nous pouvons donc optimiser ces dépenses, notamment en développant le transport partagé en accord avec la profession.

    M. Sébastien Delogu

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    Non !

    M. Paul Christophe, ministre

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    Cela représente un double enjeu, vous le savez. D’une part, cela permettra une gestion plus efficiente des dépenses de l’assurance maladie : on peut ainsi transporter plus de patients pour un coût identique. D’autre part, il y a un enjeu écologique, car il s’agit de réduire l’empreinte environnementale des transports.

    Mme Mathilde Panot

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    On parle des personnes malades !

    M. Paul Christophe, ministre

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    Vous le savez, les fédérations des taxis seront reçues dans les prochains jours par l’assurance maladie. De nouvelles propositions seront faites. Je souhaite que ces discussions soient fructueuses et permettent de parvenir à un accord respectueux de tous. Nous y veillerons.

    Budget de la sécurité sociale

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Guillaume Garot.

    M. Guillaume Garot

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    Monsieur le premier ministre, vous avez présenté un budget de la sécurité sociale injuste, qui fait peser l’effort de redressement sur les malades, l’hôpital et les Ehpad, sans mettre à contribution ceux qui en ont les moyens.

    Une députée du groupe SOC

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    Absolument !

    Mme Émilie Bonnivard

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    Encore moins grâce à vous !

    M. Guillaume Garot

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    Vous vous êtes tourné vers le RN pour faire passer ce budget, en multipliant – vainement, d’ailleurs – les concessions, en allant même jusqu’à citer nommément Mme Le Pen – et elle seule –…

    Un député du groupe RN

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    Et alors ?

    M. Nicolas Meizonnet

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    Jaloux !

    M. Guillaume Garot

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    …dans un communiqué de Matignon, daté d’hier, sans avoir mené de dialogue sérieux et approfondi avec la gauche.

    M. Pierre Cordier

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    Vous allez voter avec eux !

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Vous justifiez le fait que vous allez voter avec Le Pen demain !

    M. Guillaume Garot

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    Cela vous conduit dans l’impasse, avec le 49.3 que vous avez déclenché hier.

    Un député du groupe DR

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    La motion de rejet du PLFSS remonte à quinze jours !

    M. Guillaume Garot

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    Ce 49.3 signe probablement l’échec d’une méthode.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Et surtout la trahison du front républicain !

    M. Guillaume Garot

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    Pourtant, nous croyons qu’un autre chemin était – et sera toujours – possible pour bâtir des compromis. C’est ce que nous avons engagé dans un groupe de travail transpartisan, consacré aux déserts médicaux, avec des députés de gauche, de droite et du centre.

    M. Julien Odoul

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    Sans le RN !

    M. Guillaume Garot

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    L’objectif est de trouver des solutions nouvelles et efficaces pour la santé des Français et l’accès aux soins. Nous avons pris le temps du dialogue en nous réunissant chaque semaine et nous avons rédigé une proposition de loi, qui a été signée par 256 députés. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Sébastien Peytavie applaudit aussi.)
    Nous espérons bien sûr qu’elle pourra être discutée ici prochainement. Êtes-vous prêt à marquer vos convictions sur le sujet et à accompagner un changement de méthode, pour redonner espoir à ceux qui n’ont plus de médecin et, au-delà, à tous les Français ? (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe EcoS.)

    Un député du groupe DR

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    Quelle hypocrisie !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée auprès du premier ministre, porte-parole du gouvernement.

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du gouvernement

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    Vous entendre accuser le gouvernement de s’être tourné vers le Rassemblement national…

    Plusieurs députés du groupe SOC

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    Eh oui !

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée

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    …alors même qu’après avoir été élus grâce aux voix de La France insoumise,…

    Plusieurs députés du groupe SOC

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    Vous aussi !

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée

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    …vous vous apprêtez à mêler les vôtres à celles de Mme Le Pen pour faire chuter le gouvernement, c’est un peu fort de café. (Vives exclamations sur les bancs du groupe RN, LFI-NFP et SOC. – Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et DR.)

    Mme la présidente

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    Je vous prie d’écouter madame la ministre.

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée

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    Nommé il y a deux mois, ce gouvernement a présenté un budget dans un contexte très difficile.

    Une députée du groupe RN

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    Catastrophique !

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée

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    Nous-mêmes l’avons qualifié de perfectible, dès le début des débats que nous avons voulu faire durer pour respecter le Parlement. Le ministre du budget, Laurent Saint-Martin, s’est tourné vers l’ensemble des groupes du socle commun, que je voudrais remercier aujourd’hui, et des groupes des oppositions.

    Mme Ayda Hadizadeh

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    C’est faux !

    M. Jérôme Guedj

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    Il n’y a rien eu !

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée

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    Le premier ministre a proposé à tous les présidents de groupe de discuter et de dialoguer, mais pour cela, il faut être deux. (Exclamations sur les bancs du groupe SOC. – Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et DR.)

    Mme Florence Herouin-Léautey

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    Eh oui !

    Un député du groupe SOC

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    Vous avez dit que vous ne vouliez pas !

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée

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    Notre main n’a cessé d’être tendue, vous avez refusé de la saisir. Le vote de la motion de censure est un droit pour les 577 députés de cet hémicycle, de même qu’ils auront le devoir d’aller s’expliquer devant les Français,…

    M. Thibault Bazin

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    Surtout les agriculteurs !

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée

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    …en circonscription, sur les conséquences d’une éventuelle adoption. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et DR.)

    M. Théo Bernhardt

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    Pas de problème !

    Mme Dieynaba Diop

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    C’est bien, demain ce sera fini !

    Situation de la filière automobile

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Lise Magnier.

    Mme Lise Magnier

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    Ma question porte sur la filière automobile française. Je ne souhaite pas vous parler des grands constructeurs, mais des dizaines, voire des centaines, d’entreprises et d’usines qui constituent la filière automobile dans tous nos départements français.

    M. Pierre Cordier

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    Elle a raison !

    Mme Lise Magnier

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    Ces sous-traitants, équipementiers et fournisseurs nous le disent : produire en France n’est plus un privilège dans les relations commerciales avec des constructeurs automobiles pourtant français. En effet, ces derniers se tournent désormais vers la concurrence chinoise, mettant en péril nos entreprises et leur capacité à investir dans la transition vers le véhicule électrique. Il ne s’agit pas de panser les plaies mais d’éviter l’hémorragie ; pas d’accompagner les plans de sauvegarde de l’emploi mais d’éviter d’y recourir. Ma question est simple : quelle action concrète comptez-vous mener pour que les constructeurs automobiles français garantissent la fabrication en France de leurs véhicules ? (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)

    M. Pierre Cordier

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    Cela fait cinq ans qu’on vous le demande !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’économie, des finances et de l’industrie.

    M. Antoine Armand, ministre de l’économie, des finances et de l’industrie

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    Je vous remercie pour votre engagement en faveur des équipementiers automobiles. Vous soulignez l’importance de ce tissu industriel qui représente plus de 100 000 emplois sur notre territoire et qui est souvent moins mis en lumière que les grands constructeurs que vous avez évoqués. Les équipementiers souffrent aussi de la concurrence déloyale de certaines entreprises asiatiques, dont les prix sont artificiellement diminués de 10 ou 20, voire 30 %.
    C’est tout l’enjeu du plan automobile présenté par le premier ministre Michel Barnier, au côté duquel se trouvaient le ministre de l’industrie Marc Ferracci et moi-même, vendredi 29 novembre à Limoges. La réponse doit être européenne, avec le relèvement des droits de douane de 30 à 50 % pour lutter contre la concurrence déloyale et un futur pacte pour une industrie propre. Au niveau national, la levée d’un fonds de soutien à l’automobile concernera en particulier ces sous-traitants, répartis partout sur le territoire. Ces derniers doivent consentir des investissements massifs et équitables pour accompagner la transition. De même, les constructeurs doivent produire davantage en Europe et cesser d’externaliser leur production en recourant à des pratiques d’assemblage, alors qu’ils sont soutenus au niveau européen et national.
    C’est le sens de ce fonds de soutien et du comité stratégique de filière qui sera réuni avant la fin de l’année 2024, afin de faire le point et d’impliquer l’ensemble des constructeurs et des équipementiers français, dans la loyauté, l’équité et la solidarité. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR. – Mme Justine Gruet applaudit aussi.)

    Motions de censure

    Mme la présidente

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    La parole est à M. André Chassaigne.

    M. André Chassaigne

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    Monsieur le premier ministre, vous avez décidé d’engager la responsabilité de votre gouvernement pour imposer votre budget de la sécurité sociale. Si demain nous entrons en terre inconnue, c’est votre responsabilité. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS. – Exclamations sur les bancs du groupe DR.)

    M. Sylvain Maillard

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    Non, c’est votre choix !

    M. André Chassaigne

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    Après la dissolution brutale de juin dernier, la défaite cinglante du camp gouvernemental et le refus obstiné de reconnaître cette défaite et de nommer un premier ministre issu de la gauche, conformément au verdict des urnes ; après la nomination d’un gouvernement illégitime sous contrôle du RN, parti que vous avez cajolé jusqu’à la dernière minute ; après que vos prédécesseurs ont plongé le pays dans un déficit budgétaire abyssal, la situation est chaotique, c’est vrai, mais elle est de la responsabilité du camp présidentiel. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS. – Exclamations sur les bancs du groupe HOR.)

    M. Pierre Cordier

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    Vous allez voter avec l’extrême droite ! Des gens que vous avez combattus toute votre vie !

    M. Philippe Gosselin

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    Arrêtez ! Vous allez voter avec eux !

    M. Jean-Pierre Taite

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    Vous défilez avec des gens qui veulent tuer la police !

    M. André Chassaigne

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    La crise démocratique, sociale et économique était prévisible : elle est la conséquence d’une stratégie du chaos et de choix politiques qui balayent l’expression du peuple. Dès 2018, les gilets jaunes, violemment réprimés, n’ont pas été entendus. Pire, leurs doléances croupissent aujourd’hui dans les caves des sous-préfectures. (Applaudissement sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC. – Exclamations sur quelques bancs du groupe DR.)
    La mobilisation inédite, massive et durable du pays contre votre réforme des retraites a été tout autant méprisée par le camp présidentiel. La semaine dernière encore, avec la droite, ce dernier a empêché l’abrogation tant attendue de cette réforme.
    Les agriculteurs, les soignants, les professeurs, les salariés injustement licenciés, les étudiants, tous ceux qui subissent la brutalité de cette politique de régression sociale ne récoltent que du mépris. Que de mal a été fait à la France par entêtement et dogmatisme ! Nous ne fuirons pas nos responsabilités pour redonner confiance au peuple. (Exclamations sur les bancs du groupe DR. – De nombreux députés des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS se lèvent et applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le premier ministre.

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Si le président Chassaigne me le permet, je voudrais d’abord dire un mot de René Couanau, auquel vous avez justement rendu hommage, madame la présidente. Il était un député d’Ille-et-Vilaine très actif et un grand maire de Saint-Malo. Il se trouve d’ailleurs qu’il y a très longtemps j’ai été membre du même cabinet ministériel que lui – il était mon chef de cabinet auprès du ministre de la jeunesse et des sports.

    Mme Élisa Martin

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    On s’en fout ! (Très vives exclamations sur les bancs du groupe DR. – Mme Élisa Martin fait à plusieurs reprises des gestes d’excuse.)

    M. Pierre Cordier

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    Mais quel scandale !

    M. Jean-Pierre Taite

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    Vous êtes la honte de la France !

    Mme la présidente

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    Deux minutes, s’il vous plaît, monsieur le premier ministre. J’entends qu’on se respecte dans cet hémicycle. Nous parlons de la mémoire d’un homme qui vient de décéder, madame la députée. C’est scandaleux ! (Brouhaha général et prolongé. – Les députés des groupes RN, EPR, DR, Dem, HOR, LIOT et UDR se lèvent et applaudissent. – Quelques députés des groupes SOC et GDR applaudissent aussi.)

    M. Pierre Cordier

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    Quelle honte !

    Un député du groupe DR

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    Ce sont des voyous !

    Mme Élisa Martin

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    Pardon, je n’avais pas compris !

    Mme la présidente

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    Nous reprenons. Silence, s’il vous plaît. Merci de laisser parler le premier ministre.

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Juste du respect et un peu plus de calme aussi. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.) Monsieur Chassaigne, il m’arrive de penser comme vous que cette Assemblée nationale a bien changé. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Quand on m’a prévenu que vous alliez me poser une question sur la situation politique, je me suis pris à imaginer, dans une sorte de rêve, que le président du groupe du parti communiste – grand parti traditionnellement républicain, favorable à l’ordre et à la stabilité – allait m’apporter son soutien et que vous alliez annoncer que, dans un élan de responsabilité, vous ne voteriez pas la censure demain. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et LFI-NFP.) À l’évidence, je me suis trompé sur la finalité de votre question.
    Sur la forme, je ne peux accepter que vous-même – ou M. Garot tout à l’heure – disiez qu’il n’y a pas de respect et de dialogue de la part du gouvernement.

    Un député du groupe GDR

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    Si !

    M. Michel Barnier, premier ministre

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    Non, depuis trois mois, nous avons exprimé le respect que nous devons – que je dois et que j’ai pratiqué – à l’égard de tous les groupes de cette assemblée, quels qu’ils soient, parce que tous, vous représentez des citoyens et êtes dépositaires d’un morceau, d’une parcelle de la légitimité républicaine.
    J’ai donc du respect pour vous, comme pour tous les autres parlementaires. Le travail du gouvernement a montré ce respect, cette écoute et ce dialogue. D’ailleurs, je veux dire à M. Garot, qui a posé une bonne question, que nous sommes favorables à toutes les initiatives transpartisanes ou intergroupes, sur le sujet des déserts médicaux comme sur d’autres. Je resterai attentif à ces propositions. Voilà pour la forme, monsieur Chassaigne.
    Sur le fond, tout le monde sait que la situation est difficile. D’abord, elle l’est sur le plan budgétaire – je l’ai dit dès le début en cherchant à montrer la vérité aux Français : la situation est plus grave qu’on ne l’a cru, avec une dette que tout le monde devra payer un jour. Ensuite, elle l’est sur le plan économique et social. Tout à l’heure, l’un de vos collègues parlait de la Chapelle Darblay et d’ArcelorMittal et je m’attendais à une question sur Michelin. Je suis cela très attentivement avec le ministre de l’industrie, le ministre de l’économie et des finances ainsi que le ministre du travail. Tous les jours, nous veillons à apporter notre soutien aux salariés et aux territoires qui sont touchés. Enfin, la situation est difficile sur le plan financier. Je suis avec une grande vigilance les marchés financiers, que je connais assez bien.
    Il y a une chose dont je suis sûr, retenez bien ce que je vous dis aujourd’hui : la censure dont il est question pour demain rendra tout plus difficile et plus grave. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)

    M. Vincent Descoeur

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    Il faut accepter de l’entendre !

    Mouvements sociaux

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gabriel Amard.

    M. Gabriel Amard

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    Ma question s’adresse au ministre de l’intérieur. En Macronie, la situation des travailleurs se dégrade chaque jour. Après avoir sacrifié les aides-soignants, les accompagnants d’élèves en situation de handicap, les enseignants, les retraités aux pensions modestes, vous avez trouvé une nouvelle cible : les chauffeurs de taxi, déjà écrasés par l’ubérisation et la flambée des prix. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Sandrine Rousseau applaudit également. – M. Ian Boucard s’exclame.) Si rien n’est fait, leur rémunération pour le transport médical passera de 1,50 à 1 euro par kilomètre. Comme le dit M. Saïd Djili, taxi à Villeurbanne : « Les taxis ne font que répondre à une convention qu’ils ont signée et à une prescription médicale. Et la Cnam compte ne pas respecter sa signature ? »
    Ces chauffeurs transportent des êtres humains, non des colis. Voulez-vous les obliger à prendre en charge plusieurs patients à la fois, transformant une course en tournée ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP. – Mme Sandrine Rousseau applaudit aussi.) J’imagine les conséquences qu’une telle pratique aurait eues pour mon épouse, pendant ses mois de chimiothérapie et de radiothérapie.
    Votre monde est un monde de malheur : travailleurs précaires, services publics détruits, conditions de soins inacceptables. Partout, la colère gronde. Entendez la voix populaire, les cheminots qui se mobiliseront le 11 décembre, les fonctionnaires qui le feront jeudi contre les jours de carence et les suppressions de postes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Les Français sont dans la rue ; vous, dans l’aveuglement. Hier encore, votre premier ministre s’illustrait en piétinant la démocratie.

    M. Vincent Descoeur

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    Vous êtes, vous, de vrais démocrates !

    M. Gabriel Amard

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    Après Élisabeth Borne, le monarque a trouvé son nouveau compteur à 49.3. Nous n’attendons plus rien de vous, ou plutôt une dernière chose : l’organisation d’une élection présidentielle anticipée. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes EPR et DR.) Y êtes-vous prêt, monsieur le ministre ? Nous, nous le sommes ! (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent.)

    Mme Sandra Marsaud

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    Un poste de ministre avec beau-papa ?

    M. Philippe Gosselin

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    C’est vous qui bordélisez le pays !

    M. Pierre Cordier

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    Quelle était la question, au fait ?

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

    M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur

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    Ainsi, le sort des catégories socioprofessionnelles que vous venez d’énumérer vous importe peu. (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe DR.) Votre question ne portait pas sur le fond (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP), mais sur la tenue d’une présidentielle anticipée. C’est scandaleux ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et DR ainsi que sur quelques bancs du groupe Dem.)
    Je vais vous rassurer : le ministère de l’intérieur est une organisation formidable. Nous avons été en mesure d’organiser de façon très démocratique les législatives anticipées dans chaque circonscription ; nous sommes prêts à tout. Pour ma part, je suis issu de la famille gaulliste, attaché aux institutions de la Ve République. Les articles 6 et 7 de la Constitution disposent que le président de la République, démocratiquement et légitimement élu, exerce son mandat pendant cinq ans. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et DR. – Mme Blandine Brocard applaudit également.) Avec votre idée de censure, vous voulez, au chaos économique et social, ajouter le chaos institutionnel. C’est inacceptable ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR, DR, Dem et HOR. – Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Crise agricole

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Hubert Ott.

    M. Hubert Ott

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    Madame la ministre de l’agriculture, cette agriculture constitue notre grande fierté : non seulement elle nous nourrit, mais ses produits d’exception comptent parmi les symboles de nos traditions et de notre histoire. Or les trésoreries serrées, les crises sanitaires, les récoltes bouleversées, la complexité administrative abîment nos agriculteurs. Je comprends leur épuisement et leur sentiment d’injustice lorsqu’ils constatent que leurs revenus ne sont plus corrélés à leurs efforts. Les jeunes, dont dépend l’avenir, se retrouvent face au mur d’une transmission trop coûteuse, alors même que les biens en cause ont été acquis au prix des sacrifices de plusieurs générations.
    Depuis janvier, les gouvernements précédent et actuel ont prévu des mesures dont certaines, très attendues, figurent au sein des textes budgétaires. Ces textes, l’alliance des contraires, si elle vote la censure, entraînera leur rejet. Comment peut-on se permettre de priver l’agriculture française des dispositions promises ? (Applaudissements sur quelques bancs des groupes Dem, EPR, DR et HOR.) Des allégements de charges pour les travailleurs occasionnels, dont le concours est indispensable ?

    Plusieurs députés du groupe DR

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    Censurés !

    M. Hubert Ott

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    Des aides visant à favoriser l’installation ?

    Plusieurs députés du groupe DR

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    Censurées !

    M. Hubert Ott

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    De la réforme des retraites des agriculteurs, calculée sur les vingt-cinq meilleures années, et de la hausse des petites pensions ?

    Plusieurs députés du groupe DR

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    Censurées !

    M. Hubert Ott

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    Les aides à l’élevage bovin, les avancées en matière de transmission du foncier, les dispositifs de soutien à la compétitivité,…

    Plusieurs députés du groupe DR

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    Censurés !

    M. Hubert Ott

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    …tout sera anéanti !

    M. Vincent Descoeur et Mme Marie-Christine Dalloz

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    Eh oui !

    M. Philippe Gosselin

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    Il faut l’avoir en tête !

    M. Xavier Breton

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    Vous irez l’expliquer sur le terrain !

    M. Emeric Salmon

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    C’est de votre faute !

    M. Hubert Ott

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    De cet accès d’irresponsabilité, nos agriculteurs ne retiendront qu’une chose : on les laisse délibérément s’enfoncer. Nous n’avons pas le droit de les sacrifier ! Dans ce contexte de difficultés économiques, sanitaires et climatiques, face à une concurrence internationale exacerbée, comment défendre ces mesures, je le répète, nécessaires, attendues et promises ? (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, EPR, DR et HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt.

    Mme Annie Genevard, ministre de l’agriculture, de la souveraineté alimentaire et de la forêt

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    Cette censure, les agriculteurs en paieront l’addition, qui sera lourde. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR, ainsi que sur plusieurs bancs du groupe EPR et sur quelques bancs des groupes Dem et HOR.) C’est terrible ! L’année aura été pour eux extrêmement cruelle :…

    Mme Danièle Obono

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    La faute à qui ?

    Mme la présidente

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    S’il vous plaît, madame Obono !

    Mme Annie Genevard, ministre

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    …dès les premiers mois, leurs révoltes ont témoigné de leurs attentes. La suspension de l’action politique, dont vous connaissez les raisons, les crises qui se sont succédé durant l’été, ont soumis le monde agricole à une tension extrême, à des difficultés énormes. Les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2025 prévoyaient bon nombre de mesures de soutien, dont les exploitants ont un besoin impérieux. Censurer ce budget (M. Sébastien Delogu fait au revoir de la main) leur signifierait, à eux qui travaillent pour nous nourrir, que peu importent leurs difficultés : seules comptent la petite vie politicienne, la chute du gouvernement ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)

    Mme Danièle Obono

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    Plus vite vous partirez, mieux ce sera !

    Mme Annie Genevard, ministre

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    Votre sort, leur diriez-vous, ne nous intéresse pas !
    Vous connaissez parfaitement le monde agricole, ses difficultés, ses attentes. J’invite chacun de vos collègues à la responsabilité : si, demain, le budget est censuré, ils en rendront compte aux agriculteurs ! (Vifs applaudissements sur les bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR, dont certains députés se lèvent. – « C’est vous qui rendrez des comptes ! » sur plusieurs bancs du groupe RN, dont certains députés montrent du doigt les travées de ces groupes.)

    Situation politique

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pouria Amirshahi.

    M. Pouria Amirshahi

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    Monsieur le premier ministre, voilà quatre-vingt-dix jours que vous avez été nommé – issu du seul parti qui n’avait pas accompagné l’immense élan républicain du 7 juillet. Pire, vous avez constamment tourné le dos à l’espoir naissant pour faire les yeux doux à l’extrême droite.

    M. Pierre Cordier

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    Tu vas voter avec elle ! Quel culot !

    M. Pouria Amirshahi

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    Cela a commencé par les déclarations de Bruno Retailleau insultant l’État de droit et s’est terminé hier par un communiqué de presse déshonorant appelant Mme Le Pen à la rescousse, en passant par le recadrage du seul de vos ministres à avoir osé rappeler ce qu’est l’arc républicain. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Certes, en l’absence de majorité nette au sein de notre assemblée, la situation n’était pas simple ; elle vous offrait pourtant l’occasion d’accorder enfin au Parlement le respect qui lui est dû dans toute démocratie moderne.

    M. Pierre Cordier

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    Avec une motion de rejet de M. Guedj !

    M. Pouria Amirshahi

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    Nous avons joué notre rôle : lors du débat budgétaire, des compromis entre groupes ont été obtenus en vue de nous procurer les recettes qui manquent à notre action publique, par exemple en pérennisant la surtaxe des hauts revenus.

    M. Laurent Jacobelli

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    La taxe, la taxe, vous n’avez que cela à la bouche !

    M. Pouria Amirshahi

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    Guillaume Garot a rappelé tout à l’heure les propositions que nous avions faites au sujet des déserts médicaux ; vous avez choisi le passage en force. Votre nomination avait été justifiée au nom de la stabilité institutionnelle du pays. Regardez donc, regardons tous autour de nous : pas une composante de la société, si ce n’est les ultrariches, n’est réellement apaisée. Dans les campagnes comme dans les villes, dans les usines comme au sein des services publics, le désarroi monte ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.) Regardez plus loin, au-delà de nos frontières : les gouvernements occidentaux, y compris européens, ont désormais un chef puissant en la personne de Trump ; la Chine, la Russie, d’autres encore se réorganisent.

    M. Ian Boucard et Mme Olivia Grégoire

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    Et vous voulez censurer !

    M. Pouria Amirshahi

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    Dans cette situation incertaine, l’extrême faiblesse du président de la République aurait dû vous conduire à laisser l’Assemblée nationale jouer son rôle de pilier de la République. Je m’adresse ici à tous : qui sait où nous mène l’impuissance de nos institutions, doublée du bruit de notre mésentente définitive ?

    M. Philippe Gosselin

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    Et vous, où nous menez-vous ?

    M. Pouria Amirshahi

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    Le groupe Écologiste et social l’affirme avec gravité : nous sommes prêts à gouverner en respectant le Parlement, en faisant confiance à la société, afin d’engager collectivement la France dans deux années utiles, sous le signe du progrès écologique et social. Vous, monsieur le premier ministre, qu’aurez-vous fait de ces trois mois ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR. – Mme Danielle Simonnet et M. Nicolas Bonnet se lèvent pour applaudir.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement.

    Un député du groupe RN

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    Elle ne l’est plus pour longtemps !

    Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée chargée des relations avec le Parlement

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    Le premier ministre a effectivement engagé sa responsabilité sur un compromis : un texte adopté en commission mixte paritaire,…

    M. Sébastien Chenu

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    La CMP, c’est sept députés !

    Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée

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    …ce qui n’avait pas été le cas depuis quatorze ans ; un texte de protection sociale issu du dialogue, de la concertation. Nous avons laissé l’Assemblée, puis le Sénat, en débattre des heures durant ; ils sont parvenus à cet accord. Voici le moment de vérité : au sujet de textes financiers utiles, nécessaires aux Français, nous assumons nos responsabilités, en attendant de voir si vous en ferez autant.
    Demain est prévu l’examen par votre assemblée du projet de loi de finances de fin de gestion pour 2024, tel qu’adopté, là encore, en commission mixte paritaire. Ce texte prévoit d’allouer 1 milliard d’euros à la Nouvelle-Calédonie,…

    M. Christophe Blanchet

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    Eh oui !

    Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée

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    …sans compter le reste : fonds de solidarité destiné aux entreprises, prise en charge de l’activité partielle des salariés, compensation aux collectivités territoriales, financement de nos militaires en opération extérieure (« Eh oui ! » sur plusieurs bancs du groupe EPR),…

    Mme Sandrine Rousseau

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    Arrêtez le théâtre !

    Mme Nathalie Delattre, ministre déléguée

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    …soutien à l’Ukraine. S’y ajoutent les salaires de la fonction publique, éducation nationale comprise, notamment des accompagnants d’élèves en situation de handicap, les primes liées aux Jeux olympiques et paralympiques pour les agents du ministère de l’intérieur, des dépenses sociales telles que l’allocation aux adultes handicapés, les bourses sur critères sociaux ou encore le parc d’hébergement. Le premier ministre s’est engagé à financer ces mesures ; je le répète, prenez vos responsabilités, car nous nous prenons les nôtres ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR et DR.)

    Plateforme des achats de l’État

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Sabatou.

    M. Alexandre Sabatou

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    Ma question s’adresse au ministre chargé du budget et des comptes publics. Depuis quelques années, la France de Macron s’illustre par l’ajout à de nombreux intitulés ministériels de la notion de souveraineté : alimentaire, numérique, industrielle.

    M. Fabien Di Filippo

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    Souveraineté énergétique !

    M. Alexandre Sabatou

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    Cette ambition légitime de voir la France maîtresse de ses choix stratégiques se heurte à des décisions paradoxales, comme le montre l’exemple de Place – Plateforme des achats de l’État – qui centralise les appels d’offres ministériels : alors qu’elle joue un rôle crucial dans la gestion de nos marchés publics, sa maintenance a été confiée d’emblée à l’entreprise canadienne CGI, excluant sans recours les sociétés françaises jusque-là chargées de cette tâche.
    Cette situation est d’autant plus problématique que Place gère des données extrêmement sensibles concernant l’identité des intervenants économiques, leurs sous-traitants, leurs sites de production, le tout dans des secteurs comme la défense. Ces informations sont mises en danger par le fait qu’un acteur étranger ait accès à l’intégralité du code de la plateforme. Qu’est-ce qui empêche qu’un accès dérobé, une backdoor, y soit créé, de manière à récupérer le contenu des réponses aux appels d’offres, ce qui compromettrait des secrets industriels et stratégiques majeurs ? L’existence de ce risque devrait d’ailleurs alerter particulièrement M. le ministre des armées, car il y va de la confidentialité de tout notre tissu industriel militaire, garant de notre souveraineté.
    Alors que la DGSI a récemment signalé des campagnes d’exfiltration de données stratégiques orchestrées par des cabinets internationaux, peut-on courir un tel risque ? Pourquoi avoir confié la maintenance d’une plateforme aussi critique à une entité étrangère, sans même recourir à une procédure de marché public afin d’assurer la transparence de cette décision ? Qui l’a prise, d’ailleurs, et qui l’a validée ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre du budget et des comptes publics.

    M. Laurent Saint-Martin, ministre du budget et des comptes publics

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    Vous posez une question importante concernant l’avenir de Place, la plateforme des achats de l’État. L’Agence pour l’informatique financière de l’État a passé un marché en 2020, pour l’appuyer dans sa maîtrise d’œuvre – notamment pour Place, qui était gérée par l’éditeur français Atexo. Cette société n’a pas été retenue à l’issue du dernier appel d’offres…

    M. Alexandre Sabatou

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    Il n’y a pas eu d’appel d’offres !

    M. Laurent Saint-Martin, ministre

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    Si, si ! Elle n’a pas été retenue, en raison de critères de coût et de qualité de services, c’est-à-dire compte tenu du rapport qualité-prix, auquel l’État est attentif. Nous partageons tous ici ce souci de l’efficacité de la dépense publique. Une partie du marché antérieur sera ainsi confiée à la filiale française de la société canadienne CGI, que vous avez mentionnée.
    Permettez-moi de rappeler certains faits : la filiale française de CGI, à qui le marché a été confié, n’aura accès à aucune information confidentielle – comme c’était d’ailleurs le cas d’Atexo depuis 2020. Ensuite, toutes les clauses relatives au traitement des données de la sécurité sont appliquées, dans le cadre du marché de l’Union des groupements d’achats publics. Enfin, ce marché est conforme au cadre des marchés publics relatifs aux systèmes d’information.
    Vous avez également posé une question subsidiaire très stratégique, celle des armées. Je veux vous rassurer sur ce point : les informations particulièrement sensibles du ministère des armées font l’objet d’une protection renforcée ; elles ne sont pas publiées sur Place, mais sur une plateforme dédiée, intitulée Ixarm, propre au ministère.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexandre Sabatou.

    M. Alexandre Sabatou

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    Il n’y a pas eu d’appel d’offres, monsieur le ministre ! Vous êtes passés par l’Ugap, afin de contourner le marché public. Par ailleurs, les marchés relatifs à la fourniture de drones ou à l’acquisition d’un drone sous-marin sont bien présents sur la plateforme Place, alors qu’ils concernent le secteur de l’industrie militaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN et sur quelques bancs du groupe UDR.)

    Conflit au Moyen-Orient

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marianne Maximi.

    Mme Marianne Maximi

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    Chaque jour, le Moyen-Orient sombre un peu plus dans la violence et le chaos. (« Ah ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Depuis le 7 octobre !

    M. Julien Odoul

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    Ah ! Il était temps qu’on en parle !

    Mme Marianne Maximi

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    Hier, l’Unrwa, l’agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens, annonçait qu’elle se voyait contrainte de cesser l’approvisionnement humanitaire qui transite par Kerem Shalom, principal point d’accès à la bande de Gaza. Voilà les sinistres conséquences de la loi israélienne adoptée en octobre dernier, qui empêche l’agence de remplir sa mission humanitaire ! Pourtant, Catherine Colonna, qui occupait il y a peu le poste de ministre des affaires étrangères, a dirigé une enquête rigoureuse qui bat en brèche la thèse mensongère d’une collusion entre les Nations unies et le Hamas. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – M. François Ruffin applaudit également.) Voilà l’honneur de la diplomatie française ! Mais cet honneur est introuvable lorsqu’elle invente une immunité à des criminels. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
    Une fois encore, une fois de trop, le gouvernement génocidaire israélien viole sciemment le droit international (Mêmes mouvements) en refusant d’assurer la sécurité des checkpoints et des convois humanitaires, en laissant le chaos prospérer…

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Ça suffit !

    Mme Marianne Maximi

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    …et en alimentant activement la spirale de destruction et de misère.
    La bande de Gaza est ravagée par la famine. Le secrétaire général de l’ONU annonce que celle-ci compte désormais « le plus grand nombre d’enfants amputés par habitant au monde », souvent opérés sans anesthésie.

    M. Loïc Prud’homme

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    Quelle honte !

    Mme Marianne Maximi

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    Demain, vous serez renversés. C’est donc à l’ensemble des députés du socle commun que je m’adresse.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Adressez-vous à vos amis du RN ! Vous allez voter avec eux !

    Mme Marianne Maximi

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    Combien de temps encore laisserez-vous prospérer cette entreprise de destruction méthodique d’un peuple, d’une culture et d’un territoire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Combien de temps encore accompagnerez-vous le déluge de mensonges et de désinformation qui visent à dissimuler les crimes commis au sein des territoires palestiniens ? Quand la France parlera-t-elle enfin d’une seule voix et s’engagera-t-elle à appliquer les mandats de la Cour pénale internationale à l’encontre de Benyamin Netanyahou notamment ? (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent et applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée du commerce extérieur et des Français de l’étranger.

    Mme Sophie Primas, ministre déléguée chargée du commerce extérieur et des Français de l’étranger

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    La poursuite de la guerre à Gaza, où la situation humanitaire ne cesse de se dégrader du fait de l’intensification des opérations au nord de l’enclave, est injustifiable et intenable, d’autant qu’elle entraîne les désastres humanitaires que vous évoquez. Elle ne peut d’ailleurs amener ni la paix ni la sécurité.
    Après avoir obtenu, en lien avec nos partenaires américains, un accord de cessez-le-feu au Liban il y a quelques jours, il est temps désormais d’aboutir à un accord à Gaza. (M. Thomas Portes s’exclame.) Tel est le message que le ministre de l’Europe et des affaires étrangères, Jean-Noël Barrot, a délivré le 7 novembre dernier en Israël et dans les territoires palestiniens.

    Mme Danièle Obono

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    Avec quel effet !

    Mme Sophie Primas, ministre déléguée

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    Tel est le message qu’il a renouvelé hier à la conférence humanitaire pour Gaza, organisée par l’Égypte. La France s’engage afin de venir en aide aux populations civiles de Gaza, en situation d’urgence humanitaire absolue.

    Mme Danièle Obono

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    Que faites-vous pour le cessez-le-feu à Gaza ?

    Mme Sophie Primas, ministre déléguée

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    Nous mobiliserons 50 millions d’euros supplémentaires à cet effet, ce qui portera notre contribution à 250 millions depuis le début de la crise.

    M. Pierre Cordier

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    Si le budget est voté !

    Mme Danièle Obono

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    Arrêtez d’envoyer des munitions à Israël !

    Mme Sophie Primas, ministre déléguée

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    Si le budget est adopté, bien sûr. La France agit également pour aboutir à un accord qui permette d’obtenir la libération de tous les otages ainsi qu’un cessez-le-feu ; il devra permettre également de préparer le jour d’après à Gaza.

    Mme Danièle Obono

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    Il n’y a plus de Palestiniens à Gaza !

    Mme Sophie Primas, ministre déléguée

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    Il est temps de retrouver le chemin du dialogue, pour aboutir enfin à une situation à deux États, la seule qui soit à même de garantir une paix juste et durable. La France poursuivra ses efforts, en lien avec ses partenaires régionaux. (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Marianne Maximi

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    Et la CPI ?

    Mme Danièle Obono

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    Quelle honte !

    Situation politique

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Baumel.

    M. Laurent Baumel

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    Monsieur le premier ministre, nous voyons se déployer une stratégie de communication assez peu subtile, qui vise à faire porter la responsabilité de votre chute à tout le monde, sauf à ceux qui en sont véritablement responsables ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC ainsi que sur quelques bancs du groupe EcoS.) Le premier responsable de votre chute, c’est vous-même !
    Mon collègue Guillaume Garot a rappelé à quel point votre choix politique d’écarter toute discussion de fond avec la gauche vous a exposé à la versatilité tactique du Rassemblement national.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Après avoir torpillé Hollande, ils veulent torpiller Macron !

    M. Laurent Baumel

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    Néanmoins, je voudrais également pointer la responsabilité des députés du bloc central qui, après avoir apporté un soutien plutôt discret à votre gouvernement, s’effraient désormais à grand bruit de votre chute.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Nous n’avons pas besoin de donneurs de leçons !

    M. Laurent Baumel

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    Collègues macronistes, vous nous appelez à la responsabilité, alors qu’en refusant de respecter la logique du scrutin démocratique, vous avez imposé la nomination d’un premier ministre ultraminoritaire, soumis au bon vouloir du Rassemblement national. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC, ainsi que sur quelques bancs du groupe EcoS.)
    Collègues macronistes, vous nous appelez à la responsabilité, alors que c’est vous qui avez refusé toute ouverture lors de la discussion budgétaire,…

    M. Charles Fournier

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    C’est vrai !

    M. Laurent Baumel

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    …en désertant l’hémicycle et en choisissant d’y être représentés par la fraction des vôtres la plus radicale, la plus obstinément rétive à toute mesure de justice sociale, la plus enfermée dans ses certitudes de détenir la vérité économique, la plus incapable de tirer les leçons minimales du vote des Français ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et EcoS – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe EPR.)
    On nous a reproché de vouloir appliquer « tout le programme du NFP », ce qui n’a jamais été notre position collective. En réalité, ce qui bloque la présente législature, c’est votre volonté de défendre tout le bilan. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS.)
    Collègues macronistes, aucun 49.3, aucune obstruction ne changera rien au fait que vous avez perdu le pouvoir. Le temps est venu pour vous de l’accepter !
    Monsieur le premier ministre, la condition pour que votre chute ne débouche pas sur un chaos n’est pas que la gauche rende les armes en votant un budget de droite. La condition, c’est que les groupes qui ont bénéficié du front républicain acceptent désormais la possibilité même d’un gouvernement de gauche et consentent à s’engager réellement dans la logique du dialogue parlementaire. (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur. – Les députés du groupe SOC se lèvent et applaudissent ce dernier. – Quelques députés du groupe EcoS applaudissent également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre déléguée auprès du premier ministre, porte-parole du gouvernement.

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée auprès du Premier ministre, porte-parole du gouvernement

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    Pourquoi n’assumez-vous pas simplement que vos voix se mêlent avec celles des Insoumis et du Rassemblement national ? (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe SOC.) Est-ce qu’après des années à affirmer votre culture de gouvernement, c’est la culture de la censure qui prend le dessus chez les socialistes ? Pourquoi ne dites-vous pas simplement qu’après avoir fait alliance avec La France insoumise, vous vous apprêtez à être le trait d’union avec le Rassemblement national ? (Mme Danièle Obono s’exclame.)
    Je ne prétends pas devant vous que, depuis deux mois, tout a été fait à la perfection.

    M. Gérard Leseul

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    Vous avez échoué !

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée

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    Nous aurions probablement pu faire différemment et mieux, parfois.

    Mme Dieynaba Diop

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    Vous n’avez pas été à la hauteur ! Assumez votre échec !

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée

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    Néanmoins, ce sera votre responsabilité si notre pays s’enfonce dans un trou noir…

    Mme Dieynaba Diop

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    C’est vous qui l’avez entraîné dans un trou noir !

    Mme Maud Bregeon, ministre déléguée

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    …et subit un affaiblissement dont il mettra des mois, voire des années, à se relever ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DR, ainsi que sur quelques bancs des groupes EPR et Dem.)

    Mme Dieynaba Diop

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    Où étiez-vous pendant le débat budgétaire ?

    Jeu vidéo Fursan al-Aqsa

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Antoine Villedieu.

    M. Antoine Villedieu

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    Alors que la France est confrontée à une explosion des actes antisémites et que nos concitoyens de confession juive vivent dans la peur constante d’une agression, le jeu vidéo Fursan al-Aqsa, récemment interdit en Angleterre, est un véritable outil de propagande islamiste et antisémite. Malgré tout, ce titre reste accessible librement en France. Contraire à nos valeurs, il encourage la haine d’Israël et glorifie des actes de terrorisme, en reproduisant le pogrom du 7 octobre, au cours duquel 1 200 personnes, dont 37 enfants, ont perdu la vie sous les balles des terroristes du Hamas.
    Ce jeu promeut des scènes intolérables de haine et de violence, constituant une atteinte grave aux valeurs fondamentales de notre République, avec un risque majeur d’incitation à la radicalisation, en particulier chez les jeunes.
    Alors que notre pays s’engage fermement contre les discours et les dérives radicales de l’islamisme, il est inacceptable que de tels contenus soient tolérés dans notre pays. Chaque minute où ce jeu reste accessible est, de la part de l’État, une capitulation vis-à-vis de nos valeurs et un abandon insupportable de nos compatriotes de confession juive.
    Madame la ministre de la culture, ma question est donc la suivante : attendez-vous que ce jeu conduise à reproduire les attaques terroristes du Bataclan pour l’interdire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. Raphaël Arnault

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    Ce sont des antisémites qui disent ça !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre de l’intérieur.

    M. Bruno Retailleau, ministre de l’intérieur

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    Permettez-moi de répondre en lieu et place de ma collègue Rachida Dati, absente aujourd’hui. Pour en avoir visionné plusieurs séquences, j’estime que ce jeu fait, sans aucun doute, l’apologie du terrorisme. On y voit d’ailleurs les joueurs prendre la place de terroristes du Hamas, des références aux massacres du 7 octobre, ainsi que des cibles civiles toutes désignées – on comprend très bien de quels civils il s’agit.
    Par conséquent, les ministères de l’intérieur et de la culture ont engagé plusieurs démarches : ce jeu a non seulement été signalé à la plateforme Pharos, mais également à l’autorité judiciaire, sur le fondement de l’article 40 du code de procédure pénale, qui invite à dénoncer tout délit d’apologie du terrorisme – c’est bien la preuve que nous devons conserver dans nos textes la possibilité de sanctionner un tel délit.
    J’en profite d’ailleurs pour rappeler que le Hamas n’est pas un mouvement de résistance ; c’est, très clairement, un mouvement terroriste. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et DR, ainsi que sur quelques bancs des groupes RN, Dem et UDR.) J’ajoute qu’il a instrumentalisé la cause palestinienne, qu’il ne soutient pas ; il l’a défigurée et déshumanisée. Ceux qui considèrent qu’il s’agit d’un mouvement de résistance devraient se souvenir que lorsqu’il a mis la bande de Gaza en coupe réglée, il a pratiqué des assassinats politiques sur d’autres Palestiniens, défenestré des homosexuels et dominé la société gazaouie.
    Vous avez raison, ce jeu doit tomber, selon moi, sous le coup de la loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR, ainsi que sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR. – M. Charles Rodwell applaudit également.)

    Quotas de pêche européens

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Stéphane Buchou.

    M. Stéphane Buchou

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    Ma question s’adresse à Mme Catherine Vautrin. Il y a quelques semaines, les Sables-d’Olonne étaient sous les projecteurs lors du départ du Vendée Globe, l’Everest des mers. Quarante skippers, derniers héros des temps modernes, se sont élancés avec courage et esprit de dépassement. Aujourd’hui, certains ont franchi le mythique cap de Bonne-Espérance. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Bravo !

    M. Stéphane Buchou

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    L’espérance, cette force motrice qui anime chaque marin, devrait inspirer certains d’entre nous pour soutenir nos autres héros des mers : les pêcheurs. Ces femmes et ces hommes affrontent quotidiennement les défis de l’océan en faisant preuve de résilience. Ils pratiquent l’une des pêches les plus durables au monde, sont des piliers de notre souveraineté alimentaire et des acteurs essentiels de la préservation des océans, qu’ils contribuent activement à protéger. Or leur espérance vacille. La fermeture du golfe de Gascogne pendant un mois chaque année jusqu’en 2026 et les réductions envisagées pour certaines espèces dans le cadre des négociations annuelles sur les quotas, qui se tiendront la semaine prochaine à Bruxelles, fragilisent l’activité des ports concernés, et par extension la filière. Les pêcheurs qui nous regardent demandent de la visibilité, du soutien et des garanties – et non des aides. Ils veulent pouvoir partir en mer et vivre de leur métier. Pour cela, ils attendent des responsables politiques le même courage et le même esprit de dépassement que ceux des skippers du Vendée Globe.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Très bien !

    M. Stéphane Buchou

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    Les enjeux sont cruciaux. Alors que nous érigeons la pêche française au rang d’intérêt national majeur, le RN et le NFP, main dans la main, sans aucun scrupule, envisagent de renverser le gouvernement en votant la censure, ce qui plongerait nos près de 15 000 pêcheurs dans l’inconnu. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.) C’est non seulement dramatiquement concret pour eux, mais surtout totalement irresponsable de la part de ceux qui prétendent vouloir un jour gouverner le pays.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Préférez les marins à Marine !

    M. Stéphane Buchou

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    Je serai à Bruxelles. Si l’alliance de la carpe et du lapin venait à se confirmer, la France sera-t-elle en mesure de faire entendre, malgré tout, sa voix, et de défendre nos pêcheurs ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation.

    Mme Catherine Vautrin, ministre du partenariat avec les territoires et de la décentralisation

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    Merci de la passion avec laquelle vous rendez hommage aux marins (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem), que ce soient les héros du Vendée Globe ou ceux du quotidien – celles et ceux qui vivent de la pêche, activité si importante. Oui, la France sera au rendez-vous des négociations relatives aux totaux admissibles de captures la semaine prochaine à Bruxelles. Fabrice Loher, le ministre délégué chargé de la mer et de la pêche, que je vous prie de bien vouloir excuser, a d’ailleurs déjà rencontré le nouveau commissaire Costas Kadis, dont j’ai fait la connaissance jeudi à Bruxelles en marge du Conseil des affaires générales (cohésion) – il a été nommé à midi, je l’ai vu à quatorze heures.
    Ce fut l’occasion de lui redire l’importance que notre pays attache au pavillon français dans toutes ses dimensions : le golfe de Gascogne – vous l’avez mentionné –, la Méditerranée, la négociation sur la façade Atlantique et celle avec le Royaume-Uni, qui n’est pas la plus facile. La visibilité pour nos pêcheurs dépend de la capacité à apporter des réponses à ces enjeux. Vous pouvez compter sur la France, d’autant plus qu’elle sera demain sortie de ce moment de chaos – c’est la responsabilité de chacune et de chacun des députés de cet hémicycle. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    Nous avons terminé les questions au gouvernement.

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à seize heures quinze, est reprise à seize heures trente, sous la présidence de M. Xavier Breton.)

    Présidence de M. Xavier Breton
    vice-président

    M. le président

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    La séance est reprise.

    2. Création d’un centre hospitalier universitaire en Corse

    Discussion d’une proposition de loi (procédure de législation en commission)

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Paul-André Colombani et plusieurs de ses collègues visant à la création d’un centre hospitalier universitaire en Corse (nos 341, 624).
    La conférence des présidents a décidé que ce texte serait examiné dans son intégralité selon la procédure de législation en commission. En application de l’article 107-3 du règlement, nous entendrons d’abord les interventions du rapporteur de la commission et du gouvernement, puis les explications de vote des groupes. Nous passerons ensuite directement au vote sur l’ensemble du texte adopté par la commission.

    Présentation

    M. le président

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    La parole est à M. Paul-André Colombani, rapporteur de la commission des affaires sociales.

    M. Paul-André Colombani, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    C’est avec une certaine émotion que je m’exprime pour la première fois devant vous, dans cet hémicycle, en tant que rapporteur d’une proposition de loi. C’est bien sûr un honneur pour moi, mais aussi et surtout, une grande responsabilité – une lourde responsabilité même, car le texte que je promeus aujourd’hui touche à un sujet d’une importance absolue : la capacité des Corses à se soigner dignement chez eux. Comme vous le savez, la Corse est la seule région à ne pas disposer de centre hospitalier universitaire (CHU) sur son sol.

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Avec la Guyane !

    M. Paul-André Colombani, rapporteur

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    Il n’existe pourtant pas moins de trente et un CHU répartis sur l’ensemble du territoire, qui seront bientôt rejoints par le futur CHU de Guyane…

    M. Jean-Paul Lecoq

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    Voilà !

    M. Paul-André Colombani, rapporteur

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    …et l’actuel centre hospitalier régional (CHR) de Metz-Thionville. Il faut dire que les CHU ne sont pas nouveaux : ils sont aussi vieux que la Ve République et constituent depuis 1958 le fleuron de la recherche médicale et les piliers du système de santé.
    Pendant des décennies, la Corse a été tenue à l’écart de ce formidable progrès dans l’accès à un droit fondamental, celui de la santé. L’objet de cette proposition de loi est donc très simple : réparer l’injustice et la rupture d’égalité dont souffre la Corse, grande oubliée de cette répartition territoriale.
    Si je peux défendre aujourd’hui devant vous le projet de création d’un CHU en Corse, c’est parce que cette revendication vient de loin : soutenue de longue date par la famille nationaliste, elle a fini par faire l’objet d’un consensus total, qu’ont su trouver la population, les associations, l’université, les professionnels de santé et les élus de l’île.
    Je ne pourrai pas citer tous les artisans de ce projet, tant ils sont nombreux, mais je tiens à saluer la pugnacité du docteur Fanfan Benedetti, fondateur du Collectif pour le CHU. Si nous discutons de ce texte, c’est aussi grâce à la détermination des élus de l’Assemblée de Corse, au travail du comité de pilotage institué par le président de l’exécutif de Corse, Gilles Simeoni, et de sa conseillère exécutive chargée de la santé, Bianca Fazi.
    C’est encore grâce au soutien sans faille du groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires, auquel j’appartiens, mais aussi du groupe Horizons & indépendants, présidé par Laurent Marcangeli, ainsi que de tous les députés de la Corse et de tous ceux qui ont permis que ce texte soit inscrit à l’ordre du jour de l’Assemblée. Je pense particulièrement à Charlotte Parmentier-Lecocq, Paul Christophe et Marc Ferracci, que je remercie à nouveau pour leur précieux soutien au printemps dernier. Chers collègues qui nous avez rejoints, c’est grâce à vous que cette petite idée a cheminé depuis la Corse jusqu’à Paris. C’est grâce enfin au travail des administrateurs de l’Assemblée nationale, Mmes Charlotte Sicard et Charline Renaud, qui m’ont épaulé et que je remercie, et à celui de mon équipe parlementaire, notamment Guillaume Luciani.
    À travers ma voix, ce sont des milliers de Corses qui s’adressent à la représentation nationale pour lui dire le déchirement que représente un départ par avion sanitaire pour se soigner ou pour accompagner un parent ou un enfant malade. Ce message, je sais que vous l’avez entendu et compris. Je ne peux que vous témoigner ma satisfaction que la commission des affaires sociales, comme au printemps dernier, ait adopté à l’unanimité cette proposition de loi. Non seulement elle a renouvelé son vote, mais elle l’a fait avec encore plus de force et de conviction que la première fois. Tous les groupes et toutes les sensibilités politiques se sont exprimés à l’unisson pour dire qu’il était grand temps de mettre fin à cette anomalie qui n’a que trop duré et qu’il fallait impérativement doter la Corse d’un CHU. Au moment où notre assemblée connaît un tumulte politique majeur, le consensus transpartisan que vous avez su former autour de ce texte est un motif d’espoir quant à notre capacité à légiférer en bonne intelligence.
    Si nous actons aujourd’hui la fin de cette injuste situation d’exception sanitaire, nous enverrons un signal fort à un peuple dont les aspirations démocratiques ont souvent été balayées d’un revers de la main à Paris. Derrière la revendication populaire et politique, il existe en effet une réalité concrète : l’absence de CHU en Corse emporte de lourdes conséquences pour sa population. Tout d’abord, elle représente, de l’aveu de l’ensemble des acteurs que j’ai eu le plaisir d’auditionner, un frein indéniable à l’attractivité médicale de l’île, qui se traduit par une dégradation de la démographie médicale et une difficulté structurelle à attirer des internes pour renouveler les générations.
    C’est d’autant plus préjudiciable que notre système de santé est caractérisé par des spécificités très défavorables. Vous le savez, la Corse cumule les difficultés : son relief d’île-montagne, la prégnance de la précarité – elle est, en la matière, championne de France des régions de l’Hexagone – et sa démographie, marquée par le vieillissement, la forte croissance de la population et un phénomène de saisonnalité. Ainsi, la Corse voit sa population décupler en été, passant de 350 000 à 3 millions de résidents, ce qui représente un extraordinaire défi dans la prise en charge sanitaire.
    Aussi l’incapacité de notre système de santé à répondre aux besoins de la population se traduit-elle par deux phénomènes néfastes. D’une part, les déplacements médicaux vers le continent se multiplient : le chiffre est vertigineux, avec 28 000 transferts médicaux par an entre la Corse et le continent, ce qui représente un Corse sur huit – pratiquement toutes les familles corses sont donc confrontées à cette dure réalité chaque année. Je vous laisse imaginer les conséquences humaines et financières dramatiques : frais colossaux d’hébergement et de restauration, arrêt de l’activité professionnelle, stress et souffrance causés par le déplacement. D’autre part – et c’est une conséquence encore plus grave du point précédent –, nous assistons à un renoncement massif au recours aux soins, donc à une perte de chances pour les patients trop fragiles pour se déplacer.
    Quelles réponses apporter à ces phénomènes dramatiques ? Le constat est terrible à dresser : les carences de l’action étatique sont colmatées depuis plus de quinze ans par l’engagement des associations bénévoles Inseme et La Marie Do, qui effectuent un travail remarquable pour venir en aide aux patients et à leur famille. Rendez-vous compte : en 2024, la Corse ne dispose toujours pas du moindre appareil de tomographie par émission de positions (PET-scan) ; les Corses atteints d’un cancer sont donc condamnés à se rendre à Marseille ou à Nice pour effectuer cet examen. Je ferai mienne la formule de Mme Riera, présidente de l’association La Marie Do : « La solidarité ne peut pas remplacer durablement la responsabilité politique. »
    Depuis quelques années, cependant, les lignes semblent enfin bouger. Il faut saluer la volonté du gouvernement de permettre à l’université de Corse de proposer l’intégralité du premier cycle d’études de médecine en 2025 et de regrouper les étudiants corses à l’université d’Aix-Marseille pour le second cycle.
    En revanche, je dois faire part des vives inquiétudes et de la colère provoquées par la décision prise par le gouvernement de surtaxer les billets d’avion entre la Corse et le continent. Alors que la population corse ne bénéficie pas des mêmes moyens sanitaires que sur le continent, il est injuste de la pénaliser financièrement dans ses déplacements. Mettez-vous à la place des gens qui doivent accompagner un conjoint, un parent ou un enfant pour une chimiothérapie sur le continent, et qui doivent avancer des sommes astronomiques pour payer le transport, l’hébergement et les frais sur place : une telle surtaxation de leurs déplacements est vécue comme une violence intolérable. J’incite donc le gouvernement à tenir compte du fait que, lors de l’examen du projet de loi de finances, nous avons voté l’exonération de cette surtaxe pour la Corse et les outre-mer.
    Pour l’ensemble de ces raisons, vous l’aurez compris, la Corse ne peut plus se contenter de progrès fragiles et d’horizons incertains. La création d’un CHU est une œuvre de longue haleine qui requiert de la stabilité. C’est pourquoi il nous appartient aujourd’hui de graver dans le marbre de la loi une trajectoire que nous devrons tenir dans la durée. Accomplissons un acte fondateur et créons un choc de confiance pour des familles corses depuis trop longtemps confrontées à l’inégalité en matière d’accès aux soins. Faisons entrer la Corse dans la modernité, en réparant l’injustice historique qui l’en a privée depuis soixante ans ! (Applaudissements.)

    M. Laurent Marcangeli

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    Excellent rapporteur !

    M. Philippe Juvin

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    Synthétique et excellent !

    M. Vincent Descoeur

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    Nous soutenons la Corse !

    M. le président

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    La parole est à M. le ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche.

    M. Patrick Hetzel, ministre de l’enseignement supérieur et de la recherche

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    L’accès effectif à la santé partout sur le territoire relève de l’équité et de la solidarité nationale. Il s’agit d’une préoccupation majeure, y compris, bien évidemment, en ce qui concerne le territoire de Corse.
    Les déterminants de cet accès sont multiples : outre des facteurs sociaux, économiques et démographiques, il dépend d’éléments structurels tels que l’accès à des professionnels de santé bien formés et bien répartis sur le territoire, ainsi que l’accès à des établissements de soins de première ligne ou de recours. Dans le cadre du présent débat, il importe d’avoir ces deux dimensions à l’esprit. Elles relèvent de la responsabilité commune du ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche et du ministère de la santé et de l’accès aux soins, que je représente tous deux aujourd’hui – je tiens à excuser l’absence de ma collègue ministre de la santé, retenue à Bruxelles.
    Au cours des soixante dernières années, la création des trente-deux centres hospitaliers régionaux universitaires (CHRU) que compte la France a été la principale avancée qui a déterminé les politiques publiques en matière de formation, de soins et de recherche en santé. Les CHRU permettent d’adosser aux centres hospitaliers des facultés de santé et de médecine de plein exercice, de développer des pratiques médicales innovantes en association avec les grands organismes de recherche et de formaliser des conventions de formation pour les écoles professionnelles de santé.
    Plus récemment, ces centres hospitaliers universitaires sont devenus le pivot de la création de réseaux entre hôpitaux généraux, ou parfois régionaux, pour l’organisation des soins. Ils assurent leur mise en cohérence, avec une dimension hospitalo-universitaire qui semble se confirmer. À l’avenir, cet ensemble me semble devoir s’enrichir d’un partenariat avec les activités de soins ambulatoires exercées par des professionnels de santé hors de l’hôpital.
    Il ne s’agit pas de minimiser le rôle des CHU – bien au contraire –, ni de prétendre que l’absence de CHU n’est pas préjudiciable. Pourtant, l’implantation d’un CHU n’est pas la seule solution pour répondre au plus près aux besoins des territoires en santé et en formation. En mobilisant les ressources d’encadrement et de promotion universitaire dans les territoires, il s’agit de définir des espaces territoriaux de responsabilité universitaire en s’appuyant sur des réseaux d’hôpitaux couvrant une zone donnée, avec leur conventionnement universitaire propre, notamment en l’absence d’une faculté de médecine de plein exercice définitivement constituée.
    Ce modèle présente l’avantage de pouvoir s’adapter à de nombreux territoires français qui souhaitent une meilleure structuration universitaire en santé et disposent d’un réseau hospitalier local solide, tout en permettant de s’assurer de leur complémentarité effective. Derrière la proposition de loi adoptée en commission, c’est cette attente qu’il faut avant tout entendre et à laquelle il faut impérativement répondre.
    Le texte que nous examinons fait référence à l’échelle régionale, qui peut s’avérer l’échelle pertinente, mais qui n’est évidemment pas la seule – j’insiste sur le fait que l’échelle pertinente peut varier en fonction des spécificités de chaque territoire. Derrière la mention de la région, c’est à la situation particulière de la Corse que vous avez souhaité faire référence, à la fois pour la structuration des études en santé autour d’un CHR et pour l’achèvement du premier cycle complet d’études médicales à l’université de Corse-Pascal-Paoli, dont le siège est à Corte. Bien évidemment, l’expression de cette position est légitime et pleinement reconnue par le gouvernement, et je crois important de réfléchir à partir des besoins concrets de la Corse.
    Sur le plan de l’accès aux soins, la Corse fait face, comme de nombreux territoires, à des défis. Certains sont liés à son insularité qui, en l’absence d’une couverture médicale suffisante sur le territoire, entraîne pour les patients des frais et des fatigues – les voyages sont très difficilement supportables pour les malades. D’autres sont liés à la démographie médicale. Enfin, la Corse présente des problématiques de santé particulières ; je pense notamment au traitement des cancers féminins et à l’absence de certains équipements permettant de déployer des traitements spécifiques en proximité.
    Sur le plan de la formation, les avancées de ces vingt dernières années ont permis de créer, au sein de l’université de Corse, une première année d’entrée dans les études de santé, ce qui a facilité l’accès des étudiants corses à ces études. Il est désormais question de compléter le premier cycle, notamment grâce au soutien de la convention tripartite signée entre l’université, la collectivité de Corse et l’État, qui s’est engagé dans ce cadre à hauteur de 500 000 euros par an.
    Pour répondre à ces besoins, la Corse dispose de ressources locales, en l’occurrence trois centres hospitaliers de référence, auxquels il revient de déterminer leur rôle respectif, tant dans la perspective du développement des études de santé sur le territoire que dans celle de l’éventuelle conclusion d’une convention entre l’université et l’un d’entre eux, qui deviendrait ainsi un CHRU.
    De son côté, l’État doit travailler aux modalités d’accompagnement de la montée en puissance de la filière en santé. Je pense en particulier au développement du premier cycle, aux mobilités des étudiants et à leur répartition dans les différents centres hospitaliers lors de leurs stages. Pour ce faire, nous devons impérativement formaliser, avec les acteurs du soin et de l’université, une stratégie territoriale, qui peut prendre des formes diverses.
    Il faut être réaliste : la piste du CHU, si elle est tout à fait légitime, n’aboutira qu’à moyen terme, du fait notamment de difficultés liées à la constitution d’une faculté de médecine de plein exercice, à la dispersion des moyens actuels et à la nécessité de disposer d’une taille critique, notamment pour mener une activité de recherche, plus particulièrement de recherche clinique. Or nous ne pouvons pas attendre d’atteindre cet objectif optimal pour avancer.
    À court terme, une première réponse serait d’approfondir les conventionnements existants entre l’université de Corte et ses universités partenaires pour les étendre aux autres établissements hospitaliers du territoire corse, en vue de faciliter les parcours de formation des étudiants.

    M. Thibault Bazin

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    Ils ont aussi besoin d’équipements !

    M. Patrick Hetzel, ministre

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    À plus long terme, il faudra également penser à l’intégration des professions paramédicales et des métiers intermédiaires de la santé dans un tel schéma, pour tenir compte de l’ensemble des besoins de la population corse. Nous aurons donc besoin d’une concertation avec tous les acteurs de la santé pour parfaire ces orientations et proposer les compléments nécessaires au présent texte.
    L’occasion nous est donnée de concevoir, pour l’ensemble du pays, une stratégie territoriale de santé nouvelle, complémentaire du modèle hospitalo-universitaire classique. Dans un premier temps, cette stratégie pourrait évidemment être pleinement déployée en Corse. J’insiste toutefois sur le fait que nous travaillons ici à l’élaboration d’une politique universitaire en santé qui pourrait s’appliquer à l’ensemble du territoire français.
    Le gouvernement a bien conscience de la légitimité des attentes exprimées par la proposition de loi dont nous débattons. Il accompagnera sans équivoque sa mise en œuvre. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, Dem et LIOT. – M. le rapporteur applaudit également.)

    Explications de vote

    M. le président

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    Nous en venons aux explications de vote.
    La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat.

    Mme Nicole Dubré-Chirat (EPR)

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    Le groupe Ensemble pour la République a toujours soutenu ce texte visant à renforcer et optimiser l’offre de soins sur l’île de Beauté. L’absence de CHU en Corse occasionne de très nombreux déplacements des malades et de leurs familles vers la métropole, ce qui fait peser sur chacun d’eux des difficultés relationnelles et financières.
    La création d’un CHRU requerra la coordination des acteurs de l’enseignement supérieur, de la recherche et de la santé ; celle des instances locales et de l’exécutif.
    Il est nécessaire de mieux équilibrer la répartition des CHRU dans l’ensemble de nos régions. C’est pourquoi notre groupe soutiendra cette proposition de loi. Vutaremu per – nous voterons pour ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR – M. Laurent Marcangeli applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Hadrien Clouet.

    M. Hadrien Clouet (LFI-NFP)

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    Monsieur le président, collègues, monsieur le ministre – pendant encore vingt-huit heures, si mes calculs sont exacts (Exclamations sur les bancs des groupes DR et Dem) –,…

    M. Thibault Bazin

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    Quel mépris !

    M. Hadrien Clouet

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    …deux bonnes nouvelles nous réunissent aujourd’hui : un vote en faveur de l’ouverture d’un CHU et le fait que M. Barnier ne l’inaugurera pas, puisqu’il aura été renversé depuis longtemps.

    M. Thibault Bazin

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    Vous n’en savez rien !

    M. Hadrien Clouet

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    Il faut voter en faveur de cette proposition de loi, car le pouvoir central avait délibérément renoncé à tout investissement dans le domaine de la santé publique en Corse, qui était dès lors l’unique région dépourvue de CHU.
    Pendant plus de deux siècles, la Corse a été un territoire d’eaux thermales pour continentaux, tandis que, sur la côte orientale, on mourait du paludisme dans l’indifférence quasi générale. Cette indifférence était l’écho d’une sujétion confinant au racisme. Ainsi pouvait-on lire dans le Dictionnaire encyclopédique des sciences médicales publié en 1877 que les Corses étaient placés « entre les races cultivées et les peuples à l’état d’enfance ». Voilà ce que l’on imprimait à l’époque sur le continent pour justifier l’abandon de toute une population et son exploitation. Car quel destin lui était réservé ? Arroser de sa sueur des vignes dont on extrayait un vin frelaté destiné à l’exportation.
    Bien sûr, certains résidents du territoire ont bel et bien accès aux soins. J’ai ici une plaquette qui évoque la possibilité de prendre un « rendez-vous médical de proximité », en vue de « soins chirurgicaux » ou d’actes de « prévention au quotidien », dans un lieu accessible « vingt-quatre heures sur vingt-quatre en quelques minutes, entre Bastia et Porto-Vecchio ». Mais cette offre de soins n’est pas destinée à la population corse. Bien au contraire, elle lui passe sous les yeux : c’est celle que propose The World, le plus grand yacht du monde, immatriculé aux Bahamas et dont les cabines coûtent 2 millions d’euros – il faut les acheter, on ne peut pas les louer. Il a été amarré pendant plusieurs mois sur l’île en 2018.
    L’accès de la population corse aux soins, quant à lui, recule. En conséquence, l’espérance de vie stagne. En effet, la rencontre de deux forces contraires qui s’exercent sur la Corse suscite un effet de ciseau.
    Il s’agit, d’une part, de la désertification médicale. Par habitant, la Corse compte 10 % de pédiatres, 28 % de sages-femmes ou encore 33 % de psychologues de moins que le continent. Chaque année, 30 000 Corses sont obligés de quitter l’île pour bénéficier d’une consultation ou recevoir des soins souvent très dispendieux ! Pour ne rien arranger, le gouvernement entreprend de ruiner les taxis qui assurent le transport sanitaire – j’en profite pour saluer nos camarades de lutte réunis juste à côté de l’Assemblée, qui ont bien raison de refuser de se laisser dépouiller ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – M. Sébastien Peytavie applaudit également.)

    M. Thibault Bazin

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    Ils ne votent pas pour vous !

    M. Hadrien Clouet

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    Voilà l’une des raisons pour lesquelles, demain à la même heure, le gouvernement sera tombé !
    Il s’agit, d’autre part, du vieillissement considérable de la population corse et de sa dissémination dans de petites communes, à distance encore accrue des soignants. Quelque 18 % des seniors à domicile y sont en mauvaise santé ou en très mauvaise santé. C’est le chiffre le plus déplorable de tout le pays : triste record !
    Ce CHU est donc nécessaire. Il faut un lieu unique où l’on puisse trouver des soignantes et des soignants, des enseignantes et des enseignants, des activités de recherche et un plateau technique.

    M. Ugo Bernalicis

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    Il a raison !

    M. Hadrien Clouet

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    Nous voterons ce texte avec beaucoup de vigueur et de volonté. Mais ce n’est que le début du combat : il faudra ensuite lutter pour que les soignantes et les soignants y soient bien payés, pour que l’apprentissage et l’enseignement soient accessibles à la jeunesse, pour que les crédits alloués à la recherche soient abondés, bref pour que nous ayons les moyens de faire fonctionner ce CHU lorsqu’il sera ouvert.
    Comme l’écrit Jérôme Ferrari, « chaque possible porte en lui sa souillure ». Le possible, on le vote ; la souillure, on la censure ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – M. Sébastien Peytavie applaudit également.)

    Mme Mathilde Panot

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    Excellent !

    M. le président

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    La parole est à M. Elie Califer.

    M. Elie Califer (SOC)

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    La Corse, comme bien d’autres territoires, est confrontée à de nombreux défis et problématiques. Cependant, à la différence des autres régions, elle ne dispose d’aucun CHU.
    Les arguments plaidant pour la création d’une telle structure ne manquent pourtant pas. Avec seulement 258 médecins en activité régulière pour 100 000 habitants, la Corse accuse en effet un grave déficit médical, par contraste avec la région Provence-Alpes-Côte d’Azur ou l’Île-de-France, bien mieux dotées. Son offre de réanimation est également l’une des plus faibles du pays : elle ne compte que huit lits pour 100 000 habitants. Cela impose une réaction, une décision.
    À ceci s’ajoute le fait que la Corse cumule plusieurs facteurs de risque qui accentuent la nécessité d’améliorer son infrastructure médicale. Chaque été, sa population augmente de 3 millions de personnes en raison de l’activité touristique. Sa démographie connaît en outre un dynamisme certain : en seulement dix ans, la population corse a crû de près de 12 %, tandis que 21 000 personnes âgées supplémentaires sont attendues dans ce territoire d’ici à 2030. Enfin, on ne peut omettre de mentionner le taux de pauvreté, qui ne cesse de progresser, ce qui suscite un accroissement de la demande de soins.
    L’inégalité dont pâtit la Corse en matière d’offre de soins a des conséquences directes sur la qualité de vie des Corses et sur les comptes de la sécurité sociale : au bas mot, 30 000 déplacements sont comptabilisés chaque année entre la Corse et l’Hexagone, en vue de recevoir des soins médicaux.
    Il faut mettre fin à cette inégalité. La création d’un CHU permettrait non seulement de renforcer l’offre de soins grâce à un plateau technique mais aussi de soutenir l’enseignement et la recherche. L’université y est prête.
    Cette création serait une réponse cruciale aux besoins de santé croissants de la population : elle permettrait d’offrir à celle-ci des soins de qualité, de réduire la mortalité et d’améliorer les conditions de vie en général.
    Lors des auditions menées dans le cadre de l’examen de cette proposition de loi, un éminent professeur de médecine de renommée internationale affirmait que « ne pas avoir de CHU en Corse relève de l’inexplicable ». On ne peut qu’être d’accord : une telle carence est de nature à aggraver l’inégalité dont pâtissent les Corses devant l’offre de soins.
    Les auteurs de cette proposition de loi nous invitent à faire œuvre de justice sanitaire. Pour toutes les raisons que j’ai évoquées, le groupe Socialistes et apparentés la votera. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Sébastien Peytavie applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. François-Xavier Ceccoli.

    M. François-Xavier Ceccoli (DR)

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    Je remercie le rapporteur et l’ensemble des groupes politiques d’avoir élaboré cette proposition de loi transpartisane et consensuelle. J’en profite pour remercier particulièrement le ministre, que nous avons saisi au sujet du premier cycle des études de médecine à l’université de Corse. Je sais que vous vous investissez sur ce dossier, monsieur le ministre ; les étudiants et l’ensemble des Corses comptent beaucoup sur vous.
    Corse moi-même, je suis fier que nous travaillions ensemble à doter la Corse d’un CHU. Nous envoyons un signal important à tous les Corses. Certes, à regarder froidement les chiffres – l’île de Beauté compte 355 000 habitants –, des esprits malintentionnés pourraient douter de l’intérêt de cette création. Mais la Corse est singulière, au premier chef par son insularité. Nous devons absolument l’intégrer dans toutes les politiques publiques.
    Je rappelle que, pendant la crise du covid, il ne s’y trouvait qu’une trentaine de lits de soins intensifs. Le gouvernement a donc dû affréter un navire militaire pour évacuer un certain nombre de malades. Vous voyez où nous en sommes…
    Il s’agit en outre de la seule région de France à n’être pas dotée d’un PET-scan. Les malades qui ont besoin d’un examen au moyen d’un tel appareil – examen indispensable pour diagnostiquer certains cancers – sont donc obligés de se déplacer vers le continent, dans des conditions parfois très difficiles, y compris pour leur entourage.
    Chaque année, 26 000 patients sont transférés sur le continent, faute d’une offre de soins ou d’une prise en charge adaptée sur l’île. Toutes les familles corses ou presque sont confrontées un jour à de tels transferts, qui entraînent, je l’ai dit, des difficultés considérables pour des personnes déjà éprouvées par la maladie. On ne peut que remercier les associations qui se sont saisies du problème et participent au mieux-être de toute la population affectée.
    En raison notamment de l’absence de PET-scan dans l’île, quand vous êtes Corse et que vous avez un cancer, vous êtes mieux soigné si vous vous rendez sur le continent. Cette situation conduit certaines personnes à renoncer aux soins : croyez-le ou non, des patients refusent de se faire soigner pour échapper à un tel déplacement. D’où les souffrances que vous pouvez imaginer pour les familles.
    Grâce au futur CHU, la Corse va développer des filières universitaires et des parcours de soins. De mes longues discussions avec des médecins et des professeurs, je retire que l’attrait d’un CHU sera un atout formidable pour notre territoire, notamment du point de vue de la qualité des personnels. En effet, si la filière universitaire est absente, les établissements ne parviennent pas à être aussi attractifs que le sont certains CHU du continent. On doit bien le reconnaître : pour avoir les meilleurs, il faut aussi proposer ce qui se fait de mieux.
    L’autre conséquence concrète a trait à la démographie médicale. Actuellement, les étudiants en médecine doivent s’exiler sur le continent pendant une partie de leurs études, et certains d’entre eux ne reviennent jamais, pour des raisons diverses que chacun peut entendre.

    M. Thibault Bazin

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    Hélas !

    M. François-Xavier Ceccoli

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    Avoir un CHU en Corse, c’est donc multiplier les chances d’avoir de jeunes médecins corses exerçant en Corse. Il y a quelques jours, le président de l’université de Corse,…

    M. Thibault Bazin

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    Un bel esprit !

    M. François-Xavier Ceccoli

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    …avec lequel j’évoquais le cycle complet des études de médecine, m’a fait part d’une tendance encourageante : 70 % des étudiants qui ont leur première année en Corse reviennent sur l’île. Or l’île de Beauté en a besoin, car il y a un déficit important de médecins généralistes et de spécialistes, qui s’accentuera dans les prochaines années, puisque 100 % des rhumatologues, 80 % des gynécologues, 65 % des endocrinologues et des gériatres ont plus de 55 ans. Cela laisse songeur sur l’offre médicale à venir.
    Nous allons créer un CHU dans un contexte où, bien entendu, le nombre de professeurs des universités-praticiens hospitaliers et de chefs de clinique des universités-assistants des hôpitaux n’est pas illimité. Nous raisonnons dans un cadre où les CHU existants ne peuvent se permettre des suppressions de poste, et c’est pourquoi l’effort devra être à la hauteur des enjeux. Pour que la création de ce CHU soit une réussite, nous devons embarquer avec nous les doyens et penser la transition du centre hospitalier vers le CHU.
    Quoi qu’il en soit, nous pouvons nous réjouir de l’adoption de cette proposition de loi par l’ensemble des députés. Je vous en remercie tous, et je suis reconnaissant au groupe Droite républicaine d’avoir bien voulu soutenir ce texte à mes côtés. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR. – M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales, et M. Sébastien Peytavie applaudissent également.)

    M. Philippe Juvin

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    Excellent !

    M. le président

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    Sur l’ensemble de la proposition de loi, je suis saisi par le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Hendrik Davi.

    M. Hendrik Davi (EcoS)

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    Pourquoi créer un CHU en Corse ? La réponse est simple : pour sauver des vies. Car l’absence de CHU entraîne des retards de diagnostic et des renoncements aux soins. Je ne prendrai que l’exemple de la chirurgie cardiaque, qui ne peut pas être réalisée en Corse. Un travail scientifique récent montre que seulement deux tiers des patients qui avaient besoin d’un remplacement valvulaire par une méthode non effractive en ont bénéficié. Les autres sont décédés dans l’attente de l’opération – un médecin me l’a confirmé.
    Ce n’est donc pas pour rien que l’égal accès à des soins de qualité pour toutes et pour tous était, en 1945, un principe fondateur de l’assurance maladie. En l’absence de CHU, 26 000 Corses sont contraints chaque année de se rendre sur le continent pour obtenir des soins, faute de spécialistes ou du matériel médical adéquat. Certes, des associations de bénévoles organisent l’hébergement des familles sur le continent – on les a citées : La Marie Do et Inseme –, mais est-ce normal ? Non.
    La Corse est la seule région à ne pas avoir de CHU.

    M. Philippe Vigier

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    Non.

    M. Hendrik Davi

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    Ce n’est pas normal non plus. Je rappellerai ici les nombreuses spécificités de la Corse qui y justifient la création d’un CHU.
    La première spécificité, c’est une grande pauvreté : 18 % des Corses vivent sous le seuil de pauvreté, et 9 % perçoivent le minimum vieillesse. C’est donc une population précaire, qui a besoin d’une politique de prévention ambitieuse et d’un accès aux soins d’urgence.
    C’est aussi une population vieillissante, cela a été rappelé : 25 % des habitants sont âgés de plus de 65 ans, ce qui conduit mécaniquement à des dépenses de santé plus élevées.
    Il y a en outre une forte population touristique, ce qui a été trop peu rappelé au cours du débat : entre avril et septembre 2023, 3 millions de nuitées ont été dénombrées dans l’île, ce qui a multiplié la population par dix. Par conséquent, la pression sur les hôpitaux est plus forte l’été.
    Quant à l’insularité, elle complique l’accès aux soins et conduit à une multiplication des trajets en avion. De plus, le milieu montagnard, le rapporteur l’a rappelé, allonge les temps de trajet : il faut trois heures de voiture pour faire les 150 kilomètres qui séparent Ajaccio de Bastia.
    Enfin, cela n’a pas été mentionné, il existe en Corse de nombreuses maladies émergentes, comme la fièvre hémorragique du Congo, dont la présence dans les tiques a été confirmée, et la dengue.
    Un CHU est donc la solution. Sa création permettrait, on l’a aussi rappelé, de former des spécialistes sur l’île, donc de favoriser leur maintien en Corse. Nous avons la preuve que c’est possible : les étudiants issus de la première année d’études de médecine à l’université de Corse et qui choisissent la médecine générale reviennent dans l’île dans près de 70 % des cas, et 80 % font leur internat sur place. Toutefois, c’est impossible pour de nombreuses spécialités, et les médecins sont alors recrutés ailleurs, ce qui est une perte sèche pour l’île.
    Pour toutes ces raisons, nous devons soutenir la proposition de loi. La revendication d’un CHU est formulée depuis longtemps par les élus de l’île, et il s’agit d’une forte demande populaire. Dès lors, pourquoi n’y en a-t-il pas déjà un ? Il est temps de se poser la question. La réponse est simple : la mise en place d’un CHU implique nécessairement davantage de moyens, ce dont peu d’orateurs ont parlé.

    M. Thibault Bazin

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    On ne peut pas déshabiller Pierre pour habiller Paul !

    M. Hendrik Davi

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    Il s’agit de recruter des professeurs des universités et des soignants, et d’investir dans le matériel. Or le gouvernement s’est toujours refusé à y consacrer les moyens nécessaires.

    M. Thibault Bazin

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    C’est faux ! Il y a des moyens supplémentaires !

    M. Hendrik Davi

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    Nous l’avons encore vu lors de l’examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale quand la majorité LR-RN-Renaissance a refusé les recettes supplémentaires que nous proposions, que ce soit la taxe sur les milliardaires et sur les superprofits, l’augmentation de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du capital, qui rapporterait 5 milliards d’euros – elle a pourtant été votée en séance – ou la baisse des exonérations de cotisations sociales, qui rapporterait 13 milliards.
    Pour conclure, je note que l’université de Corse forme déjà les étudiants en première année de médecine, qu’une unité des virus émergents a ouvert et que certaines spécialités sont déjà à la pointe des techniques. Mais il faut aller plus loin. Comme me l’a écrit un médecin, les solutions relevant du bricolage, qui reposent sur les associations ou sur la bonne volonté de quelques professeurs, ont assez duré. Elles ne sont pas pérennes. Nous soutenons donc évidemment avec force cette proposition de loi.
    Nonobstant, monsieur le ministre, permettez-moi de vous interpeller : si vous semblez favorable au texte, à aucun moment dans votre discours vous n’avez réellement pris position en affirmant que le gouvernement s’engageait à créer un CHU en Corse d’ici à 2030 ; vous ne l’avez pas dit clairement. Surtout, à aucun moment vous n’avez évoqué les moyens que vous comptez mettre à disposition à cette fin. Or ils ne tomberont pas du ciel ! À un moment ou à un autre, il faudra recruter et former des praticiens hospitaliers ; il faudra attribuer à la Corse les professeurs et les équipements nécessaires pour créer ce CHU. (M. Sébastien Peytavie applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier (Dem)

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    Nous vivons un moment important. Je rappelle d’ailleurs à l’ensemble de la représentation nationale que, dans le territoire où je suis élu, il a fallu plus de vingt ans pour obtenir la création du CHU d’Orléans.

    Mme Christine Arrighi

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    C’est grave !

    M. Philippe Vigier

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    Au passage, Monsieur Davi, vous avez commis une petite erreur lorsque vous avez indiqué que la Corse était la seule région à ne pas disposer de CHU. En effet, c’est aussi le cas de la Guyane, qui devrait en être pourvue en 2026.

    M. Hendrik Davi

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    C’est vrai.

    M. Philippe Vigier

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    La réparation que nous allons accorder en créant un CHU en Corse est le fruit d’un combat mené depuis de longues années par Paul-André Colombani et tous les élus qui l’accompagnent. Cela montre que, souvent, il faut tracer son chemin et parvenir à convaincre les acteurs, notamment les ministères de tutelle, comme nous l’avons fait pour le CHU d’Orléans. Vous avez rappelé, monsieur le ministre, l’engagement de vos services et de ceux de la ministre de la santé, mais je tiens à rappeler que ce texte répond avant tout à une exigence d’équité en matière d’accès aux soins. En tout cas, nous partageons là un beau moment de concorde.
    Hadrien Clouet semblait impatient de renverser le gouvernement.

    M. Hadrien Clouet

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    Ce n’est pas de l’impatience !

    M. Philippe Vigier

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    Or celui-ci, fût-ce dans sa brièveté, aura au moins obtenu ce résultat. Pour ma part, je n’oublie pas que c’est la gauche de gouvernement qui m’a refusé le CHU d’Orléans. Je n’oublie pas que, pendant vingt ans, j’ai livré ce combat souvent un peu seul, jusqu’à l’arrivée de ma collègue Stéphanie Rist. Et nous avons fini par réussir.

    M. Ugo Bernalicis

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    Ne nous regardez pas ! Regardez plutôt M. Hollande !

    M. Philippe Vigier

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    Bien évidemment, il faut toujours mesurer l’impact des décisions dans le temps. S’il est un thème qui nous réunit tous, c’est l’accès aux soins. À cet égard, je ne suis pas certain que toutes les bonnes décisions ont été prises dans notre pays depuis quarante ans. Mais soyons positifs et saluons la magnifique création d’un CHU en Corse.
    Que chacun se rende compte du message que l’on envoie ainsi à la communauté médicale et à la communauté soignante. C’est une reconnaissance formidable pour les hommes et pour les femmes qui, malgré l’absence d’un CHU, ont tout de même fait le choix, très fort, d’exercer leur art en Corse. Dorénavant, l’attractivité des métiers du soin s’en trouvera complètement changée.
    M. Davi soulevait la question des moyens. Je lui rappelle – M. Marcangeli le ferait bien mieux que moi – que l’État a financé intégralement l’hôpital d’Ajaccio, qui a coûté 183 millions d’euros. Comme en amour, il faut des signes forts. Or en voilà un, qu’il était bon de rappeler cet après-midi devant la représentation nationale.
    Les évacuations sanitaires sont un autre aspect essentiel, pour les Corses comme pour les 3 millions de personnes qui passent l’été sur l’île. Lorsque j’étais ministre délégué chargé des outre-mer, j’ai traité la question des évacuations sanitaires de Mayotte vers La Réunion : les délais de prise en charge étaient encore plus longs et le pronostic vital était parfois engagé. À cet égard, plusieurs d’entre vous ont évoqué l’absence de PET-scan en Corse ; c’est un exemple très parlant.
    Réjouissons-nous de ce beau moment de concorde, car on va enfin pouvoir couvrir l’ensemble du territoire hexagonal. Cela dit, un hôpital ne marche bien que s’il comporte un volet recherche et un volet universitaire. Vous êtes un universitaire réputé, monsieur le ministre, ce n’est donc pas à vous que je l’apprendrai, et je sais bien que vous n’entendez nullement en priver la Corse.
    La proposition de loi prévoit la création d’un CHU en Corse d’ici à 2030, mais je vous invite à être encore plus ambitieux et à raccourcir ce délai. Ce serait la garantie absolue de la constitution – enfin ! – d’une filière universitaire, à laquelle la recherche a vocation à s’adosser, et qui permettra l’accès aux modes de diagnostic les plus élaborés et les plus performants. On ne peut pas accepter que certains territoires ne bénéficient pas de l’égalité des chances.
    Le groupe Les Démocrates soutiendra, sous l’œil attentif du président Mattei,…

    M. Hadrien Clouet

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    Président à vie ?

    M. Ugo Bernalicis

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    Il est revenu ?

    M. Philippe Vigier

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    …la création d’un CHU en Corse. Cela montre bien que, dans la concorde, nous sommes capables de faire de belles choses, de manière transpartisane. Gardons cet esprit, si possible, pour demain. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et DR. – M. Sébastien Peytavie applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Laurent Marcangeli.

    M. Laurent Marcangeli (HOR)

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    Beaucoup a été dit, et je m’inscris bien sûr dans la droite ligne des arguments que j’ai entendus, notamment ceux du rapporteur, qui a parfaitement expliqué les raisons qui nous amènent à soutenir fortement cette proposition de loi. Je rappelle qu’elle aurait pu être adoptée plus tôt par l’Assemblée nationale : elle avait déjà fait l’objet d’un vote à l’unanimité en commission des affaires sociales, mais la dissolution de juin a interrompu le processus législatif.

    Un député du groupe LFI-NFP

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    Merci, Macron !

    M. Laurent Marcangeli

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    Cette proposition de loi répond à trois exigences : la justice, l’égalité et la démocratie.
    Il s’agit, premièrement, d’une exigence de justice. Certains orateurs l’ont rappelé, le territoire insulaire souffre de plusieurs injustices en matière de santé publique : des pertes de chance, des voyages qui pénalisent les familles, le manque d’accès à certaines spécialités. Des gens finissent, hélas, par y perdre la vie. Tout cela pourrait être amélioré par la création d’un CHU.
    Le texte vise ensuite à remplir une exigence d’égalité. Notre territoire compte trente-trois CHU, et la Corse est la seule région métropolitaine à ne pas en posséder, en dépit des spécificités rappelées par M. le rapporteur. Cette situation ne peut pas nous laisser indifférents, car c’est un manquement au principe d’égalité, qui fait partie des valeurs de notre république.
    Il y a, enfin, une exigence démocratique. La semaine dernière, en commission des affaires sociales, pas une voix ne s’est élevée contre le texte. Sans préjuger de ce que les représentants des autres groupes diront après moi, nous nous dirigeons vers l’unanimité.
    Cette unanimité existe aussi sur le territoire insulaire, où tous les acteurs politiques ont fait savoir depuis longtemps qu’en dépit de leurs divergences, ils étaient d’accord pour la création d’un centre hospitalier universitaire.
    Pour toutes ces raisons incontestables, pour répondre à une exigence de justice, au nom du principe d’égalité qui nous est cher, et dans l’espoir d’un vote unanime qui viendrait donner un grand poids démocratique au texte, le groupe Horizons & indépendants votera en faveur de la proposition de loi de notre ami Paul-André Colombani. (Applaudissements sur les bancs des groupes HOR et DR et sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EPR. – M. Jean-Paul Mattei applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Castellani.

    M. Michel Castellani (LIOT)

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    Si trente-trois CHU se répartissent sur l’ensemble du territoire français, la Corse est la seule région à en être dépourvue. Comme cela a été dit maintes fois, l’île souffre d’une faible densité médicale. Elle reste un territoire relativement peu attractif en raison de la faiblesse des perspectives de carrière et de l’absence de CHU. Pourtant, l’accroissement rapide du nombre d’habitants et leur vieillissement entraînent une augmentation continue des besoins, tandis que la période estivale marquée par le doublement de la population crée des situations de saturation difficilement gérables. Sur l’île, l’accès aux soins nécessite souvent de pénibles déplacements. Enfin, le contexte social y est caractérisé par la faiblesse des revenus et l’importance de la précarité.
    Pour toutes ces raisons, la création d’un CHU est une revendication ancienne. L’existence d’une unité d’enseignement et de recherche, fondée en partenariat avec l’université, renforcerait l’attractivité de l’île et la qualité des soins. Nous nous réjouirons au passage de l’annonce par Mme Vautrin de l’ouverture d’une deuxième année de médecine à l’université de Corse, une déclaration dont nous espérons qu’elle sera suivie d’effets.
    Je souligne également la sous-dotation en équipements qui oblige chaque année des milliers de Corses à se déplacer vers le continent pour se soigner, ce qui coûte 30 millions d’euros à l’assurance maladie et aggrave le déficit des hôpitaux insulaires, financés en fonction de leur activité. Ce voyage constitue une épreuve pour des personnes déjà affaiblies, quand sa seule perspective n’en conduit pas certaines à renoncer aux soins. Beaucoup de Corses ont connu l’épreuve et le coût que représentent ces déplacements, souvent entrepris pour des traitements lourds. Il faut d’ailleurs remercier les associations qui apportent un soutien financier et moral aux malades et à leurs familles, comme Inseme ou La Marie Do.
    Je remercie aussi tous les acteurs qui se sont mobilisés sur ce sujet. La demande d’un CHU, soutenue par le conseil exécutif de Corse depuis des années, a fait l’objet de plusieurs délibérations unanimes de l’Assemblée de Corse et a donné lieu à la création d’un groupe d’étude, qui a souligné la nécessité d’une telle création. Enfin, cette proposition de loi de Paul-André Colombani, que je remercie pour son action, a été votée à l’unanimité en commission des affaires sociales, en juin puis la semaine dernière. Vous l’aurez compris, le groupe LIOT espère qu’elle sera adoptée car la mesure qu’elle contient est juste et utile.
    La Corse compte deux structures hospitalières, une à Bastia, qui couvre de son influence 60 % de la population insulaire, et une à Ajaccio, pour les 40 % restants. Par ailleurs, le bras armé de la recherche est l’université, située pour l’essentiel à Corte. Le futur CHU doit se structurer sur la base de cette complémentarité, en associant également le secteur privé.
    Toutefois, notre débat d’aujourd’hui m’interpelle. On peut se demander pourquoi il faut une loi pour implanter un CHU en Corse quand, ailleurs, une simple décision administrative suffit ; pourquoi il a fallu des années de bataille pour décider de la reconstruction de l’hôpital de Bastia, qui était insuffisant et obsolète ; pourquoi il a fallu des années de revendications et de répression pour obtenir la réouverture de l’université ; pourquoi on doit plaider dans cette enceinte chaque année pour la revalorisation de la dotation de continuité territoriale, gelée depuis 2009 ; pourquoi il faut lutter ici à intervalles réguliers pour arracher la prolongation d’un crédit d’impôt indispensable sur le plan économique. Pourquoi est-il impossible d’avancer vers un statut fiscal de développement et, plus encore, vers les institutions dont la Corse a besoin pour améliorer sa vie économique et sociale, pour conforter sa langue, qui est mourante, et pour lutter contre une spéculation dévastatrice ? Pourquoi les députés de la Corse sont-ils considérés comme d’éternels quémandeurs alors qu’ils ne font qu’exprimer la requête de solutions légitimes et le refus d’une évolution catastrophique pour un peuple dont ils ont ici la responsabilité des intérêts matériels et moraux ?
    Et pourquoi les gouvernements successifs refusent-ils de considérer la Corse dans ce qu’elle est, dans sa complétude, dans sa personnalité et dans ses intérêts fondamentaux ? Parce que nous nous heurtons à l’immobilisme, au centralisme (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP), à l’indifférence voire, quelquefois, à l’hostilité de certains à l’égard de la Corse et des Corses. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et EcoloS.)
    Je ne sais pas quel sera le gouvernement de la France demain. Je sais en revanche que nous devons sortir de ce mode de gestion calamiteux où, nous, députés de Corse, sommes réduits à une représentation velléitaire. Nous devons tous nous efforcer de jouer gagnant-gagnant. Je dis que c’est possible au moment où j’espère que nous adopterons cette proposition de loi pour la création d’un CHU indispensable à la Corse. (Applaudissements sur les bancs du groupe LIOT ainsi que sur quelques bancs des groupes LFI-NFP, SOC, DR et EcoS. – M. le rapporteur applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Victor Castor.

    M. Jean-Victor Castor (GDR)

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    Par cette proposition de loi, nos collègues corses mettent en lumière l’injustice de la fracture territoriale en matière d’offre de soins. En tant que député de la Guyane, je les en remercie. Les politiques publiques décidées depuis Paris sont inégalitaires. Elles privent des milliers de personnes d’une offre de soins de qualité et de proximité et, à l’heure d’un accroissement de la désertification médicale, elles empêchent la formation et la fidélisation de soignants.
    En l’absence d’un CHRU, près de 28 000 personnes partent tous les ans de Corse pour être soignées à Marseille ou à Nice. Avec quel coût économique, humain et psychologique ? L’accès à la santé est d’autant plus un enjeu de justice sociale que le taux de pauvreté atteint 16,1 % en Corse-du-Sud et 20,6 % en Haute-Corse, tandis que celui du renoncement aux soins est particulièrement préoccupant.
    Ce grave problème dépasse le cadre de la Corse car l’inégalité sanitaire est également perceptible ailleurs. À ce titre, cette proposition œuvre pour le bien public puisqu’elle consacre l’obligation légale d’avoir dans chaque région au moins un centre hospitalier universitaire.
    Je me permets de relayer les démarches engagées depuis plusieurs années par notre collègue Jean-Paul Lecoq pour doter l’hôpital du Havre du statut de CHU. Couvrant un bassin de population de 450 000 habitants, il s’agit du plus grand centre hospitalier de France qui ne soit pas universitaire. L’universitarisation de certaines filières dont il bénéficie déjà prouve que le chemin est ouvert et que la demande répond à un besoin puisque les deux CHU normands, sous forte tension, ne suffisent pas pour former en nombre suffisant les futurs praticiens, notamment ceux de l’agglomération havraise confrontée à une pénurie de médecins. Or, sous le prétexte qu’il existe déjà deux CHU en Normandie, la création de celui du Havre est bloquée sur le seul fondement d’une position de principe. Comme nous le faisons aujourd’hui pour la Corse, nous devons, par pragmatisme et au nom de l’utilité de cette création, aider à débloquer la situation.
    Et que dire des territoires que vous qualifiez ici comme étant d’outre-mer, notamment la Guyane ? Depuis Paris, il est aisé de la positionner dans la zone géographique Antilles-Guyane et, partant de là, de considérer que tout peut être mutualisé pour les trois territoires qui composent cette zone. C’est ce qui a longtemps prévalu pour l’éducation, jusqu’à ce que le peuple de Guyane se soulève et impose la création d’une académie puis d’une université de plein exercice. C’est encore ce qui prévaut dans de nombreux domaines tels que la justice ou la santé.
    Penser ainsi revient à oublier que, contrairement à la Martinique et à la Guadeloupe, la Guyane n’est pas une île mais un pays de la taille du Portugal.

    M. Hadrien Clouet

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    Emmanuel Macron n’était pas au courant !

    M. Jean-Victor Castor

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    Cela revient à oublier aussi que la Guyane est plus amazonienne que caribéenne, réalité qui nécessite une application différenciée de la politique de santé et une appréhension de ses espaces de recherche, universitaire ou médicale, adaptée à sa géographie. Cela revient aussi à oublier que la population guyanaise, en augmentation constante, passera de 329 000 habitants en 2023 à 574 000 en 2040, d’après les estimations officielles.
    Penser la politique guyanaise de santé publique dans un ensemble Antilles-Guyane, c’est faire subir un triple enclavement aux habitants du territoire.

    M. Philippe Vigier

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    C’est vrai !

    M. Jean-Victor Castor

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    En effet, pour se faire soigner, il faut d’abord être évacué de l’intérieur vers le littoral, puis du littoral vers la Martinique et, enfin, de la Martinique vers la France. Quel coût humain et économique !
    Dans ce contexte, la création d’un CHRU est vitale pour la Guyane comme pour la Corse. Il s’agit du seul moyen pour élever le niveau de l’offre de soins, pour former et fidéliser des médecins du territoire et pour limiter durablement le nombre des évacuations sanitaires. Avec à peine 150 médecins de ville, dont la moitié sont proches de la retraite, la Guyane est le plus grand désert médical de France. En l’absence d’information sur le territoire et de plateaux techniques de qualité, le turnover dans les hôpitaux de Guyane est tellement important qu’il génère une discontinuité mortifère des soins.
    Cependant, je mets en garde mes collègues corses car, même quand le principe du CHRU est acté, il faut encore batailler. Ainsi, en Guyane, on nous propose un CHRU mort-né, sans aucuns moyens structurels, sans financements et dans un hôpital qui tombe en lambeaux alors que toute la communauté guyanaise exige un CHU neuf. Quels médecins, quels chercheurs, quels enseignants viendront s’installer de façon pérenne dans un hôpital rafistolé où l’eau s’infiltre des toits des blocs opératoires ?
    Cette conviction est largement partagée par la population, les professionnels de santé et les élus locaux. Le constat a été fait, des rapports ont été rédigés, mais les arbitrages pris à Paris, dans les ministères, continuent d’ignorer la réalité du territoire. Devoir encore se battre en 2024 pour un égal accès aux soins est une honte. En prévoyant pour chaque région un centre hospitalier universitaire au moins, la proposition de loi tend à remettre les choses dans le bon ordre. Le groupe GDR votera donc bien évidemment en sa faveur. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et LIOT et sur quelques bancs des groupes SOC, EcoS et Dem. – Mme Nadège Abomangoli applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Antoine Villedieu.

    M. Antoine Villedieu (RN)

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    La proposition de loi vise à doter la collectivité de Corse d’un centre hospitalier universitaire, ce qui répondrait à plusieurs urgences. Sur une île où on dit volontiers que « le meilleur médecin, c’est l’avion », les infrastructures de santé accusent un retard criant qui exacerbe les inégalités d’accès aux soins.
    La Corse connaît un vieillissement important de sa population : en 2040, 40 % des habitants seront des seniors. Ce défi démographique s’ajoute à une carence en équipements médicaux de pointe. Si l’hôpital d’Ajaccio a récemment été reconstruit, celui de Bastia demeure vétuste et l’île manque de technologies essentielles, comme un appareil à PET-scan pour le diagnostic du cancer.
    En conséquence, 20 % des soins des Corses sont réalisés hors de l’île, ce qui représente 26 000 transferts médicaux par an et un coût de 30 millions d’euros pour la sécurité sociale. Cette situation conduit à des pertes de chances dramatiques, certains patients fragiles ne pouvant pas se déplacer pour des interventions vitales.
    La première année des études de médecine en Corse est un succès, avec des taux d’abandon faible et un niveau équivalent à celui des autres universités. La création d’un CHU permettrait de confirmer cet élan. Actuellement, 80 % des généralistes ayant suivi leur première année d’études en Corse reviennent y exercer une fois diplômés, mais seulement 30 % des spécialistes.
    Dans un territoire où le vieillissement et les besoins sanitaires sont en hausse, il est urgent d’agir. Dans la mesure où la création d’un CHU requiert plusieurs années, il est impératif de lancer ce projet sans délai. Soutenir cette initiative, c’est œuvrer pour un meilleur accès aux soins en Corse. C’est la raison pour laquelle le groupe Rassemblement national soutiendra la proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Vote sur l’ensemble

    M. le président

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    Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        144
            Nombre de suffrages exprimés                143
            Majorité absolue                        72
                    Pour l’adoption                142
                    Contre                1

    (La proposition de loi est adoptée.)

    3. Réduire et encadrer les frais bancaires sur succession

    Deuxième lecture

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion, en deuxième lecture, de la proposition de loi visant à réduire et à encadrer les frais bancaires sur succession (nos 158, 632).

    Présentation

    M. le président

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    La parole est à Mme la secrétaire d’État chargée de la consommation.

    Mme Laurence Garnier, secrétaire d’État chargée de la consommation

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    Nous examinons aujourd’hui une proposition de loi qui répond à une préoccupation profondément humaine et légitime : soulager les familles dans les moments douloureux qui suivent la perte d’un proche. Dans ces moments difficiles, où les personnes sont fragilisées, il faut veiller à faciliter et à encadrer leurs démarches, en particulier auprès des établissements bancaires. À la peine de l’absence ne doivent pas s’ajouter des frais bancaires excessifs, souvent mal compris et peu lisibles pour nos concitoyens. Cette proposition de loi vise donc à encadrer ces frais de manière plus juste et plus transparente. Elle constitue une avancée pour protéger les familles et rétablir la confiance dans le système bancaire dans les moments critiques qui suivent le décès d’un proche.
    Je tiens à saluer le travail rigoureux et l’engagement des parlementaires sur ce texte, en particulier ceux de la députée Christine Pirès Beaune et du sénateur Hervé Maurey. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.) Leur investissement sur cette question et leur détermination pour faire adopter cette proposition de loi dans les meilleurs délais sont applaudis par l’ensemble des acteurs.
    Pour rappel, depuis plusieurs années, les pouvoirs publics se sont attachés à mieux encadrer les frais bancaires, notamment pour protéger les publics les plus fragiles. En 2013 a été introduite dans la loi l’offre spécifique « clientèle fragile », à destination des personnes en situation de fragilité financière. Ce dispositif limite les frais en cas d’incident de paiement et garantit des services bancaires de base à un coût encadré, plafonné à 3 euros par mois. Aujourd’hui, toutes les banques sont tenues de proposer cette offre. En 2019, un décret est venu renforcer cet encadrement, permettant à plus de 4 millions de Français de bénéficier de protections accrues. Enfin, en 2020, une étape supplémentaire a été franchie, avec l’homologation d’une charte pour l’inclusion bancaire et la prévention du surendettement, signée par tous les établissements de crédit et entreprises d’investissement. Cette charte constitue une pierre angulaire de notre action pour renforcer l’inclusion financière.
    Ces mesures traduisent l’engagement continu du gouvernement pour limiter les frais bancaires et protéger les plus fragiles. La proposition de loi examinée aujourd’hui en deuxième lecture à l’Assemblée nationale s’inscrit dans le prolongement de cette ambition, et le gouvernement est pleinement mobilisé pour en assurer le succès.
    Le contenu du texte est, d’apparence, simple : la proposition de loi a pour objectif de réduire et d’encadrer les frais bancaires liés aux successions, en instaurant la gratuité pour les successions modestes, celles concernant des mineurs et les successions simples. Les situations plus complexes, en revanche, ne bénéficieraient pas de la gratuité, puisque les frais seraient plafonnés à 1 % des avoirs.
    Je salue le travail de coconstruction réalisé en parfaite intelligence avec Mme la rapporteure tout au long de la navette parlementaire. Ce travail a permis d’élaborer un dispositif qui nous semble équilibré et paraît à même de protéger les Français, tout en reconnaissant le rôle des banques, qui fournissent des services substantiels dans le cadre des successions. En effet, avant la clôture des comptes d’un défunt, les banques accomplissent des démarches importantes comme l’accompagnement des familles, l’obtention des pièces justificatives et la vérification de l’authenticité de l’acte de décès. Elles réalisent aussi des opérations techniques, telles que le gel des avoirs, leur déclaration à l’administration fiscale, la désolidarisation des comptes joints et le transfert des fonds aux héritiers selon les instructions du notaire. Ces opérations mobilisent des services bancaires spécialisés, souvent composés de nombreux collaborateurs, qui travaillent en lien avec les notaires. Les coûts que tout cela représente justifient que l’option de la gratuité totale soit écartée dans les cas où l’opération est complexe.
    Il restait donc une difficulté à lever : il fallait préciser davantage les cas où la gratuité des opérations bancaires ne peut pas s’appliquer du fait de la complexité du dossier. Dans le cadre de nos échanges constructifs avec la rapporteure, une attention particulière a été portée aux situations de complexité manifeste, qui excluent la gratuité.
    Les amendements de la rapporteure, dont nous discuterons dans quelques minutes, permettent d’atteindre un point d’équilibre pertinent. Ils visent en effet à exclure de la gratuité certains types de produits d’épargne dont la valeur fluctue rapidement, comme les plans d’épargne en actions (PEA), les comptes PME innovation ou les plans d’épargne avenir climat, et à mieux préciser ce qu’il faut entendre par « complexité ».
    Je me réjouis que ces échanges, nourris et continus, nous aient permis de déboucher sur ce compromis. Nous sommes également parvenus à trouver un accord pour reporter la date d’entrée en vigueur du dispositif de trois à six mois après la promulgation de la loi.
    Madame Pirès Beaune, je vous remercie une nouvelle fois pour votre travail et pour l’écoute dont vous avez fait preuve, vous et vos équipes ; ils ont permis de faire avancer ce dossier avec rigueur et équilibre. Ce dispositif, une fois voté, représentera un progrès important en matière de protection des Français, tout en préservant un équilibre nécessaire pour le bon fonctionnement des services bancaires. Le gouvernement réaffirme son souhait d’inscrire ce texte à l’ordre du jour du Sénat dès que possible, afin d’en permettre l’adoption dans les meilleurs délais. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire.

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure de la commission des finances, de l’économie générale et du contrôle budgétaire

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    Madame la secrétaire d’État, merci pour vos mots introductifs, votre soutien et votre engagement.
    Il y a un peu moins d’un an, nous adoptions à l’unanimité, en première lecture, la proposition de loi visant à réduire et à encadrer les frais bancaires sur succession. Ce texte a été conçu pour répondre à un problème qui affecte tous les Français : les frais imposés par les établissements bancaires lors du règlement d’une succession.
    Alors que l’application des frais bancaires est encadrée par plusieurs lois, comme celle du 26 juillet 2013, qui plafonne les commissions d’intervention en cas de dépassement du découvert autorisé, les frais liés aux successions ne font toujours l’objet d’aucune régulation. Pourtant les opérations bancaires concernées, comme la clôture de comptes, sont souvent comparables à celles réalisées dans d’autres contextes, où elles sont pourtant gratuites. Comment, par exemple, justifier que la fermeture d’un compte bancaire après le décès d’un enfant puisse être facturée plus de 100 euros quand la même opération, pour un compte d’une personne vivante, est gratuite, conformément à l’article L. 312-1-7 du code monétaire et financier ?
    Ces frais apparaissent comme profondément injustes, opaques et imprévisibles. Injustes, car ils surviennent dans le moment le plus difficile, celui de la perte d’un proche. En plein deuil, les héritiers découvrent avec stupeur qu’ils doivent payer des sommes importantes pour accéder aux avoirs de leur proche défunt. Opaques, car ils échappent généralement à l’attention des titulaires de comptes au moment de choisir leur établissement bancaire. Ils sont dissimulés dans les dernières pages des brochures tarifaires, rarement consultées en détail par les usagers. En effet, contrairement aux frais de tenue de compte ou aux commissions sur transactions, les frais successoraux ne sont pas des préoccupations immédiates des consommateurs – et on peut les comprendre. Imprévisibles, car ces frais s’imposent à des héritiers qui n’ont pas pu les choisir ni en être informés. Ils deviennent une dépense contrainte, souvent inattendue, touchant particulièrement les familles modestes, qui peinent à récupérer les derniers avoirs d’un proche décédé.
    Cette situation est d’autant plus préoccupante qu’elle est exacerbée par l’absence totale de régulation. Cela permet au secteur bancaire de pratiquer des tarifs totalement déconnectés du coût réel des opérations effectuées. Aujourd’hui, les frais de succession atteignent en moyenne 200 euros par dossier et plus de 300 euros pour les dossiers complexes, avec une augmentation de 25 % depuis 2021, après une hausse déjà significative de 28 % entre 2012 et 2021. Pire encore, depuis l’adoption de ce texte en première lecture, plusieurs banques ont augmenté leurs tarifs de manière substantielle, jusqu’à 50 % en un an pour certaines d’entre elles. À ce jour, si le texte était promulgué, seuls 2 établissements bancaires sur 122 respecteraient les critères qu’il énonce.
    Cette situation contraste fortement avec celle de nos voisins européens. En Espagne, par exemple, les frais pour une succession simple s’élèvent à environ 80 euros, soit près de trois fois moins qu’en France. En Allemagne, la réglementation va plus loin : le code civil interdit purement et simplement les frais bancaires sur succession, considérés comme discriminatoires en l’absence de justification claire et compréhensible. Pourquoi la France, pourtant attentive à protéger ses consommateurs dans d’autres domaines, laisse-t-elle prospérer un tel écart par rapport à ses homologues de l’Union européenne ?
    Face à cette réalité, cette proposition de loi marque une avancée inédite en encadrant les frais bancaires sur succession. Elle s’inscrit dans une série d’initiatives parlementaires menées ces dernières années, comme la proposition de loi déposée en 2022 par le sénateur Hervé Maurey, jamais discutée, ou l’amendement que j’avais déposé en janvier 2022 sur la proposition de loi de notre actuel rapporteur général Charles de Courson. D’autres efforts, comme la proposition de loi de Richard Ramos en 2023, sont restés lettre morte. Parallèlement, le gouvernement s’était engagé en 2021 à négocier un accord de place avec les banques pour encadrer ces frais. Plus de trois ans après, cet accord n’est jamais advenu. C’est pourquoi il est désormais nécessaire de faire aboutir une régulation.
    Cette proposition de loi, dans la rédaction que nous examinons en deuxième lecture, institue d’abord trois cas de gratuité répondant à des situations spécifiques.
    Premièrement, les banques ne pourront prélever aucuns frais lorsque le titulaire du compte décédé était mineur. Ce premier cas de gratuité vise à répondre aux situations insupportables que connaissent certains parents au moment du décès de leur enfant. Je pense bien entendu au cas médiatisé des parents de Léo, 9 ans, décédé d’un cancer en 2021, auxquels il a été demandé 138 euros pour la clôture de son livret A. Ce texte interdit enfin de telles aberrations.
    Ensuite, le texte prévoit la gratuité des opérations lorsque le total des soldes des comptes et des produits d’épargne du défunt est inférieur à 5 909 euros. Ce seuil – cela fait partie des nouveautés introduites par le Sénat – est fixé par référence à un arrêté ministériel, ce qui permet son évolution dans les mêmes proportions que l’inflation. Il permet de faire automatiquement bénéficier de la gratuité plus de 30 % de la population.
    Le dernier cas de gratuité concerne l’ensemble des autres situations, à condition que les héritiers soient connus. Pour que l’opération soit gratuite, elle doit pouvoir soit être réalisable dans un délai raisonnable par les banques, soit, lorsque cela n’est pas possible, n’être caractérisée par aucun motif de complexité, comme l’absence d’héritier en ligne directe ou la présence de sûretés. Cette disposition vise à éviter l’application de frais bancaires lorsque les opérations à effectuer sont tellement simples qu’elles ne requièrent aucune diligence particulière de la part de l’établissement bancaire.
    La proposition de loi prévoit également un encadrement des frais bancaires pouvant être prélevés dans les cas non couverts par ces trois dispositifs de gratuité. Cet encadrement se caractérise par un double mécanisme. D’une part, les frais prélevés ne peuvent dépasser ni 1 % du montant total des avoirs présents sur les comptes du défunt, ni un plafond en valeur fixé par décret. Cette dernière mesure vise à contrecarrer la tentation, pour les banques, de facturer des montants excessivement élevés en présence de sommes importantes sur les comptes. D’autre part, ces plafonds sont complétés par un barème en pourcentage dégressif selon le montant des avoirs, fixé là aussi par décret. Ce mécanisme permettrait une limitation des frais bancaires à un maximum de 200 euros pour 80 % des consommateurs.
    Fort de nombreux enrichissements, le texte revenant du Sénat apparaît cependant perfectible,…

    Mme Nathalie Oziol

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    C’est certain !

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    …et je sais que cette position est partagée sur ces bancs. La semaine dernière, en commission, je vous avais fait part des réflexions en cours avec le gouvernement et le sénateur Maurey pour parvenir à une adoption conforme de la proposition de loi lors de sa deuxième lecture au Sénat.
    Ce travail a été poursuivi en étroite collaboration avec le gouvernement – je remercie Mme la ministre ainsi que ses équipes – afin de parvenir à un texte aussi équilibré que possible. Le sénateur Maurey m’a également confirmé son accord au sujet de toutes les modifications que je vous proposerai, y compris celles portant sur la définition des cas de complexité, sous réserve de l’adoption d’un sous-amendement du groupe socialiste. Un vote conforme au Sénat apparaît donc comme une perspective parfaitement envisageable à condition que le texte soit inscrit à l’ordre du jour, ce que j’espère voir advenir rapidement.

    M. Thibault Bazin

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    Après la censure, ce sera difficile !

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    Il y aura un gouvernement, monsieur le député, quel qu’il soit.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Mais quand ? L’été dernier, il a fallu deux mois !

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    J’ai également sollicité l’avis de la Banque de France…

    M. Thibault Bazin

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    Trois mois !

    M. le président

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    Monsieur Bazin, n’interrompez pas Mme la rapporteure !

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    …ainsi que celui de l’UFC-Que choisir, qui ne s’y opposent pas. Ces amendements apportent des précisions et des clarifications indispensables.
    Les améliorations que je vous propose s’articulent autour de cinq axes : premièrement, l’extension du champ d’application de la proposition de loi, initialement limité aux seules clôtures de comptes, à toutes les opérations bancaires liées aux successions ; deuxièmement, l’exclusion des plans d’épargne en actions, des comptes PME innovation et des plans d’épargne avenir climat du périmètre du texte ; troisièmement, la redéfinition des motifs de complexité visera à garantir une rédaction claire et précise. À ce titre, je proposerai de supprimer le critère relatif au nombre de comptes – clôturer six comptes n’est guère plus complexe qu’en clôturer quatre ou cinq – et la mention d’un « délai raisonnable », insuffisamment précise et peu pertinente pour définir ce qu’est une opération complexe. Une telle mention pourrait, de surcroît, avoir un effet pervers, incitant certaines banques à rallonger volontairement les délais d’instruction des dossiers afin que les cas soient considérés comme complexes et ouvrent droit à l’application de frais.
    En revanche, deux nouveaux cas de complexité seraient introduits, le premier tenant à la présence de contrats de crédit immobilier et le second à la nature professionnelle du compte. Ces deux situations excluraient la gratuité automatique, mais les frais auxquels elles pourraient donner lieu seraient encadrés.
    Quatrièmement, l’entrée en vigueur de la présente proposition de loi serait décalée de trois mois afin de laisser aux acteurs concernés le temps de s’adapter – Mme la ministre l’a indiqué. Cinquièmement, le rapport prévu à l’article 2 inclurait désormais une estimation du nombre de personnes bénéficiant de la gratuité instaurée – je salue Mme Dalloz, qui a introduit cette demande de rapport dans le texte en commission.
    Dans le contexte politique actuel, cette proposition de loi représente un véritable modèle de travail transpartisan et consensuel. Élaboré en concertation avec toutes les parties prenantes – vous, mes chers collègues, le Sénat, le gouvernement et les acteurs de la société civile –, ce texte illustre, en effet, les vertus d’une démarche, la consultation menée avec sérieux et transparence, qui constitue l’un des fondements essentiels à l’instauration du climat de confiance indispensable à l’élaboration d’une législation qui réponde à l’intérêt général et aux attentes des Français.
    Je forme le vœu que nous puissions, au cours des mois à venir, avancer dans cette logique de responsabilité et de consensus autour de propositions comme celle-ci. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. André Chassaigne, Mme Marie-Christine Dalloz, M. Daniel Labaronne et M. Jean-Paul Mattei applaudissent également.)

    Discussion générale

    M. le président

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    La parole est à Mme Nathalie Oziol.

    Mme Nathalie Oziol

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    Nous sommes dans cet étrange entre-deux qui précède la chute d’un gouvernement : nous examinons des textes de loi comme si la vie parlementaire pouvait suivre son cours indépendamment du fait que les ministres chargés des textes en discussion seront censurés dans quelques heures.
    Hier, Michel Barnier, premier ministre issu du groupe parlementaire ayant obtenu 5 % à l’élection législative, utilisait, à cette même tribune, les dispositions de l’article 49.3 pour le vingt-quatrième passage en force d’un texte budgétaire depuis le début du second quinquennat Macron. Il l’a fait parce qu’il n’a pas de majorité à l’Assemblée nationale.

    M. Thibault Bazin

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    Vous non plus !

    Mme Nathalie Oziol

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    Le Nouveau Front populaire, qui dispose de la majorité relative dans cette assemblée, a d’ailleurs fait adopter par amendement des dispositions alternatives tant dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale que dans le projet de loi de finances pour 2025. Ces dispositions visaient à augmenter les recettes plutôt qu’à diminuer les dépenses ; à mettre les plus riches à contribution plutôt que de saboter encore les services publics ; à renforcer l’hôpital public plutôt que de céder la filière qui produit le Doliprane aux États-Unis.

    M. Daniel Labaronne

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    Et le texte ?

    Mme Nathalie Oziol

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    Demain, nous voterons la motion de censure déposée par le Nouveau Front populaire, comme nous l’avons fait en septembre dernier. Si elle avait été adoptée à ce moment-là, nous nous serions épargné cet épisode : Barnier présentant le budget le plus austéritaire jamais proposé en France.

    Mme Émilie Bonnivard

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    Michel Barnier ! M. Michel Barnier !

    Mme Nathalie Oziol

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    Et aujourd’hui, nous nous trouvons dans cette période intermédiaire, traversant une crise politiquement, socialement, démocratiquement inédite, qui s’apprête à connaître un revirement extraordinaire.
    C’est dans ce temps en suspens, qui précède un épisode exceptionnel, que revient à l’Assemblée ce texte dont nous avions discuté en première lecture il y a neuf mois sur les frais bancaires liés aux successions. L’ironie de la situation – nous discutons, précisément dans cette période, de la voracité du capitalisme financier, qui permet aux banques de réaliser du profit, entre autres, sur le dos des morts – n’aura échappé à personne.

    M. Daniel Labaronne

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    Et les frais bancaires sur les successions, ça vous intéresse ?

    M. le président

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    Chers collègues, laissez parler l’oratrice !

    Mme Nathalie Oziol

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    Pendant trois mois, nous avons combattu, avec La France insoumise et le Nouveau Front populaire, des textes budgétaires gouvernementaux néolibéraux, favorisant l’accumulation par les uns et l’absence de redistribution des richesses aux autres : plutôt faire contribuer les Françaises et les Français déjà étouffés que les 147 milliardaires du pays !
    Sous un gouvernement du Nouveau Front populaire, nous aurions quelques idées pour empêcher les banques de se gaver sur le dos des morts et des vivants ; dans le monde néolibéral, vénéré par les macronistes et par la droite, il ne faut pas encadrer le marché. En conséquence, les banques peuvent pratiquer les taxes qu’elles souhaitent sur les frais de succession, sans contrainte. Concrètement, les frais peuvent varier du simple au quadruple et atteindre des niveaux deux à trois fois supérieurs à ceux pratiqués dans d’autres pays de l’Union européenne. Sont autorisés des abus manifestes, comme des frais de 200 euros pour des transferts d’un compte à un autre n’excédant pas 500 euros, lorsque l’héritier n’est pas client de la même banque que le défunt.
    Ces frais injustes et indécents pratiqués impunément par les banques ne constituent qu’un échantillon des pratiques bancaires abusives : ils représentent 2,5 % des 11 milliards d’euros de frais imposés par les banques, véritables impôts privés sans contrôle ni contrainte.
    C’est pourquoi le groupe La France insoumise avait déposé, en 2020, une proposition de loi visant à plafonner l’ensemble des frais bancaires. Comme je l’avais dit il y a neuf mois, nous sommes prêts à encourager tout ce qui contribue à encadrer le secteur bancaire. Ce texte ne peut toutefois être qu’une étape, puisqu’il prévoit que le seuil de gratuité automatique sera fixé par décret, sans indiquer de limite de temps. Selon le rapport de l’UFC-Que choisir d’octobre 2021, les membres des quatre déciles de la population les plus pauvres laissent derrière eux un héritage inférieur ou égal à 8 000 euros. Nous avions proposé de faire de ce montant le seuil de gratuité afin de protéger les personnes qui n’ont déjà pas beaucoup, d’autant plus vulnérables face aux banques.
    Ce ne peut être qu’une étape, car, selon le collectif Consommation Logement Cadre de vie (CLCV), dans les territoires d’outre-mer, la transmission d’un patrimoine financier de 17 000 euros est facturée 616 euros, contre 479 en métropole – une différence, exorbitante, de plus de 10 %.
    Nous ne sommes pas dupes : la lutte contre le capitalisme financier ne sera menée ni sous un gouvernement Barnier, ni sous quelque gouvernement libéral-macroniste que ce soit. Pour résoudre la crise politique, la crise de régime et réguler les banques dans le pays, il faut que Barnier s’en aille, et Macron après lui. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Pantel.

    Mme Sophie Pantel

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    Pendant que nous vivons ici un moment inédit, la vie de nos concitoyennes et de nos concitoyens continue. Parfois, malheureusement, elle s’arrête. Lorsque survient la perte d’un être cher, les conjoints, les enfants, les frères et sœurs, les neveux et nièces, tous les membres de la famille et de l’entourage veulent pouvoir vivre leur deuil, aussi loin que possible des considérations matérielles, afin de pouvoir l’accepter et de se reconstruire.
    Dans un tel contexte, il est intolérable qu’une banque profite du vide juridique, de l’opacité régnante et de la position de force qu’elle occupe dans un moment où les proches du défunt souffre d’une grande vulnérabilité pour capter des millions d’euros.
    Un vivant peut fermer un compte par un simple courrier sur papier libre et, surtout, sans frais. Quelle logique autorise à demander des frais parfois exorbitants aux héritiers ? Certes, lorsque le propriétaire d’un compte décède, les banques engagent des opérations de gestion et tout travail mérite salaire. Ce texte, équilibré, en tient compte puisqu’il ne propose pas la gratuité totale.
    En l’absence de toute réglementation et du moindre encadrement, les frais bancaires liés à une succession sont librement déterminés par les banques elles-mêmes. Or, fin 2021, l’UFC-Que choisir pointait du doigt la cherté des frais appliqués sur les comptes des défunts par les établissements bancaires – l’oratrice précédente l’a rappelé –, mais aussi l’anarchie tarifaire qui caractérise le secteur. En effet, les frais peuvent varier du simple au quadruple d’une banque à l’autre. La situation est d’autant plus anormale que ces frais sont deux à trois fois plus élevés que chez nos voisins européens et qu’ils ont augmenté de 25 %, voire de 28 % en un peu plus de dix ans, bien au-delà de l’inflation. Ces opérations rapporteraient d’ailleurs quelque 150 millions d’euros aux banques chaque année.
    Initialement socialiste mais devenue transpartisane, la proposition de loi de ma collègue Christine Pirès Beaune – je salue le sérieux et la rigueur constante de son travail – prévoit donc d’instaurer une véritable transparence et de modérer les frais bancaires liés aux successions. Et ce, avec une double exigence : veiller à ce que ces frais correspondent aux coûts réellement supportés par les banques et ne soient pas démesurés par rapport aux montants en jeu ; établir les situations dans lesquelles ces frais ne pourront pas être facturés, à savoir lorsque le dossier est simple, lorsque les montants sont faibles, ou, surtout, et c’est le plus important, lors de la perte d’un enfant mineur.
    Vous l’aurez compris, le groupe Socialistes et apparentés votera en faveur du texte avec force et conviction. Nous espérons d’ailleurs que ce texte de justice sociale rencontrera une belle unanimité, au service des Françaises et des Français, car l’avancée est d’importance pour toutes nos familles. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Contrairement aux oratrices qui m’ont précédée, je n’aborderai ni la motion de censure ni la dissolution pour ne m’attacher qu’à la proposition de loi qui nous est présentée puisque, dans l’hémicycle, nous sommes amenés à voter des textes qui concernent les conditions de vie de nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et Dem.)

    M. Jean-Michel Jacques

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    Vous avez raison !

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    La proposition de loi visant à réduire et à encadrer les frais bancaires sur succession traite d’un problème économique et sociétal qui touche l’ensemble de la population française. En cas de décès d’un client, les banques qui effectuent différents actes, tels que le gel des avoirs, la déclaration à l’administration fiscale, le transfert des fonds aux ayants droit, génèrent des opérations bancaires, pour lesquelles des frais de traitement, couramment appelés « frais bancaires de succession », sont facturés aux héritiers.
    Actuellement, ces frais ne sont pas réglementés. Librement déterminés par les banques, ils sont très variables, y compris au sein d’un même groupe bancaire, et peuvent être multipliés par sept d’un établissement à un autre.
    Selon une étude de l’UFC-Que choisir de février 2024, les frais bancaires acquittés par les héritiers pour une succession de 20 000 euros s’échelonnent entre 80 et 527,50 euros. Toutes banques confondues, ces frais s’élevaient à 291 euros en moyenne en 2023, à l’issue d’une hausse de 25 % depuis 2021 et de 50 % depuis 2012. Il s’agit donc d’un marché en constante progression !
    Aussi les frais appliqués par les établissements teneurs de comptes au titre des opérations liées aux successions sont-ils évalués en France à un montant total annuel d’environ 125 millions d’euros, voire à 200 millions selon une estimation haute. Une véritable opacité entoure ces frais sur succession puisqu’aucune corrélation avec la réalité des coûts supportés par les banques qui les appliquent n’a pu être établie.
    À ce titre, le groupe de la Droite républicaine a inséré un article 2 demandant au gouvernement un rapport annuel, qui doit permettre d’évaluer l’effet de la future loi sur l’évolution des frais appliqués dans le cadre des opérations liées à la clôture des comptes et des produits d’épargne du défunt. La demande semble d’autant plus légitime que les frais ainsi facturés en France seraient près de trois fois supérieurs à ceux pratiqués en Belgique et en Italie, et même près de quatre fois plus élevés qu’en Espagne, ce qui ne laisse pas d’interroger.
    La proposition de loi met donc en lumière des dérives qui touchent des familles endeuillées, dans un moment douloureux. C’est la raison pour laquelle elle a été adoptée à l’unanimité en première lecture.
    L’application de ces frais avait déjà suscité l’indignation : en mai 2021, le cas de parents s’étant vus réclamer des frais de 138 euros pour clôturer le livret A de leur enfant décédé   à 8 ans avait provoqué une vive émotion. C’est inacceptable ! Comment pourrions-nous continuer à tolérer ce genre de situation ? La difficulté n’est donc pas seulement d’ordre économique : elle est aussi d’ordre moral.
    Une fois ce texte adopté, aucuns frais ne pourront être appliqués si le détenteur du compte était mineur au moment du décès, si l’héritier justifie de sa qualité d’héritier auprès de l’établissement bancaire, dans le cadre d’une succession simple, ou encore – Mme la ministre l’a rappelé tout à l’heure – s’agissant des successions les plus modestes, lorsque le total des soldes des comptes est inférieur à un seuil fixé à 5 000 euros. C’est une réelle avancée : il faut que les héritiers puissent bénéficier de telles sommes sans restriction ; on doit faire preuve d’humanité.

    M. Philippe Gosselin

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    Oui, il faut un peu d’humanité !

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    L’objectif de la proposition de loi était partagé par notre groupe ; l’examen par le Sénat a permis d’affiner et de clarifier le dispositif tout en l’améliorant. Les sénateurs ont également procédé au plafonnement des frais applicables à hauteur de 1 % du montant des sommes détenues par le défunt, ce qui permet de garantir davantage de transparence sur les prélèvements pratiqués.
    En raison de tous ces éléments et parce que cette proposition de loi est avant tout une mesure de justice – certains ont sans cesse ce mot à la bouche, il s’agirait de la pratiquer de temps en temps –, le groupe de la Droite républicaine votera pour qu’elle s’applique au moment angoissant et dramatique de la succession. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR, EPR et Dem. – Mme la rapporteure applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Christine Arrighi.

    Mme Christine Arrighi

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    Les frais bancaires sur succession, prélevés par les établissements de crédit sur les comptes du défunt au titre de diverses opérations administratives et du transfert des avoirs aux héritiers, suscitent depuis bien longtemps des interrogations, en raison de leur ampleur et de l’absence de réglementation encadrant ces transactions. La latitude accordée aux banques leur confère une flexibilité totale dans l’établissement des tarifs applicables à ces opérations, ce qui crée des disparités significatives entre les différentes institutions. Nous nous interrogeons sur l’inaction du gouvernement à ce sujet, quand nous apprenons par ailleurs sa complaisance en faveur du secteur bancaire dans l’affaire CumCum.
    Le groupe Écologiste et social salue la proposition de loi de notre collègue Christine Pirès Beaune ; nous avons soutenu ce texte dès sa première lecture à l’Assemblée et nous continuons bien entendu à le soutenir dans sa version améliorée par le Sénat.
    L’étude de l’UFC-Que choisir mentionnée dans l’exposé des motifs du texte initial révèle une variation du simple au quadruple, souvent assortie de montants forfaitaires élevés, affectant de manière disproportionnée les successions de moindre envergure. Ces frais représentent pour les banques un revenu annuel d’au moins 150 millions d’euros, le montant unitaire moyen s’élevant à 233 euros. Depuis 2012, lesdits frais ont d’ailleurs connu une hausse moyenne de 28 %, trois fois supérieure à l’inflation.
    Nous nous interrogeons aussi sur la discordance entre les frais sur succession et les coûts réellement supportés par les banques. L’Association de défense des consommateurs de France, ADC France, a mis en lumière des cas dans lesquels ces frais atteignent près de la moitié du solde du compte, ce qui constitue une véritable confiscation.
    Depuis l’adoption du texte en première lecture, la situation ne s’est pas améliorée. Comme l’a rappelé Mme la rapporteure, les pratiques commerciales ont peu évolué puisque certains établissements ont procédé à des augmentations significatives de leurs tarifs, jusqu’à une multiplication par 1,5. Un tel constat souligne le caractère urgent d’un encadrement rigoureux des frais bancaires liés aux successions et illustre le sentiment d’impunité complète éprouvé par les banques, pourtant informées des travaux de notre assemblée.
    Il ressort de la comparaison avec nos voisins belges, italiens et espagnols que nos établissements bancaires appliquent des frais deux à trois fois supérieurs aux leurs ; d’ailleurs, ces frais sont illégaux en Allemagne ! Il est donc possible de faire autrement. Si ces pays ont su protéger leurs citoyens de telles pratiques, on ne voit pas pourquoi la France ne pourrait pas en faire autant.
    La proposition de loi nous offre l’occasion d’instaurer un juste encadrement des frais pratiqués par les établissements bancaires sur les successions ; saisissons-la ! La version initiale que nous avions votée a été enrichie par le Sénat, qui a ajouté des mesures portant sur les cas de gratuité : il a précisé les critères permettant d’en bénéficier et déterminé les cas dans lesquels la gratuité ne s’applique pas. Notre groupe était favorable à la version initialement adoptée à l’Assemblée et soutiendra le texte dans sa version modifiée. Nous appelons à un consensus – comme quoi il est possible de l’atteindre, quand chacun y met du sien !
    Le secteur bancaire est encore beaucoup trop dérégulé ; il réalise des profits disproportionnés qui continuent d’enrichir une poignée d’actionnaires, au détriment des plus précaires, davantage affectés par ces frais prohibitifs. C’est une question d’équité plus que de morale ; en l’occurrence, en adoptant ce texte, nous pourrions rééquilibrer un rapport de force qui, en l’état, est très défavorable à nos concitoyens, surtout les plus vulnérables. Nous leur enverrions alors un signal fort, celui d’un parlement à l’écoute, qui agit concrètement pour protéger leurs droits face aux excès des banques.
    L’encadrement des frais bancaires post mortem est une mesure de justice et de dignité ; je vous exhorte donc à emboîter le pas de Christine Pirès Beaune. Votons ensemble pour ce texte visant à réduire les disparités existantes et à alléger le fardeau de nos concitoyens, particulièrement dans les moments difficiles liés au deuil ! Votons pour enregistrer une avancée tangible en matière de régulation bancaire et de protection de nos concitoyens ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC. – Mme la rapporteure et M. Philippe Gosselin applaudissent également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei.

    M. Jean-Paul Mattei

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    Le texte qui nous est soumis n’est pas nouveau ; il s’inscrit dans la continuité d’un processus législatif amorcé au cours de la précédente législature. Nous avions été amenés à nous prononcer une première fois à son sujet en février dernier, dans le cadre de la niche socialiste. Nous avions alors reconnu, à l’unanimité, la nécessité d’apporter une réponse législative rapide à un angle mort de la régulation des frais bancaires : les frais bancaires appliqués lors des successions. Je salue l’engagement de Christine Pirès Beaune sur ce sujet, comme sur d’autres, d’ailleurs, concernant le droit des successions – mais celui-là est particulièrement important.
    Des avancées significatives ont été réalisées depuis 2017 pour réduire les frais bancaires – vous l’avez dit, madame la ministre –, en ciblant particulièrement les personnes en situation de fragilité financière. Après un long travail de concertation avec les banques, les frais bancaires ont été plafonnés pour les bénéficiaires de l’offre spécifique dédiée à la situation de fragilité financière, et les banques se sont engagées, pour les clients concernés, à plafonner les frais d’incidents bancaires à 25 euros par mois.
    Toutefois, s’agissant des frais bancaires qui s’appliquent en cas de succession, un long chemin reste à parcourir : en l’absence de réglementation, les banques fixent librement leur montant. Il en résulte de très fortes disparités, c’est-à-dire des tarifs pouvant varier de un à quatre selon les établissements, pour des avoirs financiers identiques. Dans les cas où le compte clôturé contient de faibles sommes, les frais appliqués peuvent même représenter plus de la moitié du montant total. De telles pratiques sont inacceptables.
    Bien qu’il eût été préférable de parvenir à une solution de compromis dans le cadre des instances de concertation de place, il apparaît désormais nécessaire, après trois années de négociations infructueuses, de légiférer pour mettre fin aux dérives. Il me semble que l’approche consistant à laisser les acteurs tenter de répondre au problème avant d’intervenir légalement, en cas de blocage ou d’insuffisance, est satisfaisante. Nous devrions d’ailleurs user de cette méthode plus souvent.
    La présente proposition de loi est le fruit d’un travail transpartisan effectué à l’Assemblée nationale comme au Sénat, qui permet d’aboutir de manière très consensuelle à un texte efficace et équilibré – comme quoi on peut y arriver ! Un tel exemple peut laisser présager un avenir radieux, si nous faisons tous preuve d’un peu de bon sens.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Très bien, monsieur Mattei !

    M. Jean-Paul Mattei

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    Sans remettre en cause la réalité des coûts auxquels les banques doivent faire face, le dispositif définit trois cas de gratuité ciblant à la fois les clients les plus modestes et les successions les plus simples. Aucuns frais ne seront applicables lorsque l’héritier justifiera facilement de sa qualité d’héritier auprès de l’établissement de crédit, lorsque le montant total des soldes des comptes sera inférieur au seuil permettant de bénéficier de la procédure de clôture simplifiée et, enfin, lorsque le détenteur des comptes est mineur à la date du décès – afin de ne pas alourdir davantage la douleur insupportable que représente la perte d’un enfant.
    Au-delà de ces cas de gratuité, un barème de plafonnement des frais a été utilement précisé par le Sénat dans le domaine de la loi. Ces frais ne pourront pas dépasser 1 % du montant total des avoirs du défunt détenus par l’établissement, ainsi qu’un plafond en valeur qui sera déterminé par décret. Ce meilleur encadrement du champ d’intervention du pouvoir réglementaire est bienvenu : il permettra d’une part de renforcer la sécurité juridique du dispositif législatif, d’autre part d’éviter que le décret ne vide celui-ci de sa substance.
    Compte tenu du caractère consensuel du sujet, nous avons déposé plusieurs amendements identiques à ceux proposés par la rapporteure, qui visent à améliorer encore le dispositif. Nous devrons néanmoins être attentifs à bien circonscrire les cas de gratuité, afin de bien tenir compte des coûts administratifs réellement engagés par les banques dans les cas de successions complexes.
    Pour conclure, le groupe Démocrates soutiendra ce texte qui répond aux impératifs de justice et de transparence en matière de frais bancaires, mais aussi, comme le disait tout à l’heure notre collègue Gosselin, à l’exigence d’humanité face au deuil.

    M. Philippe Vigier

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    Bien dit !

    M. Jean-Paul Mattei

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    J’espère qu’il recueillera l’unanimité de notre assemblée. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et DR. – Mme la rapporteure, M. Gérard Leseul et M. Arnaud Simion applaudissent également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Jocelyn Dessigny.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Si nous débattons aujourd’hui de cette question essentielle, c’est pour répondre à une injustice sociale, celle qui a trait aux frais bancaires appliqués lors des successions. Le sujet fait consensus au sein de notre hémicycle et nous concerne tous, indépendamment de nos sensibilités politiques. Il touche des milliers de familles françaises, souvent confrontées à des frais exorbitants, parfois injustifiés, qui viennent alourdir une épreuve déjà difficile. Les frais pénalisent les plus petits héritages et soustraient une partie du fruit du travail d’une vie, au bénéfice des établissements bancaires.
    Ces frais, qui ne sont actuellement pas encadrés, augmentent chaque année et varient de manière incohérente d’un établissement à l’autre. Il n’est pas rare qu’une succession de 20 000 euros donne lieu à des frais bancaires supérieurs à 500 euros, ce qui est inacceptable. Imaginez-vous lors du décès d’un proche, submergés par la douleur, occupés par l’organisation des obsèques et par toutes les démarches administratives liées à cette perte ! À l’issue de tout cela, vous vous apercevez que la banque prélève un pourcentage de votre héritage, simplement pour avoir appuyé sur une touche de clavier.
    J’y insiste : de tels frais, prélevés dans un contexte de deuil, sont abusifs et injustifiés. Certains secteurs, en particulier celui de la finance, dégagent des profits significatifs sur les successions. En 2023, les banques françaises ont engrangé à ce titre près de 30 milliards d’euros de bénéfices, certaines ayant même battu des records historiques en la matière. Ce constat peut paraître choquant pour nombre de nos concitoyens ; il illustre l’importance d’une action collective contre ce type de pratiques.
    Cependant, je tiens à exprimer un regret : le texte, bien qu’essentiel, ne s’attaque qu’à la partie émergée de l’iceberg en matière de frais de succession et de frais bancaires. Le groupe Rassemblement national aurait souhaité qu’il s’inscrive dans une démarche globale plus ambitieuse, à même de traiter en profondeur toutes les injustices relatives à ce sujet. C’est pourquoi nous voterons l’amendement de la rapporteure visant à étendre le champ d’application du texte à l’ensemble des opérations bancaires liées aux successions.
    La proposition de loi vise à plafonner les frais à 1 % des sommes appartenant au défunt et détenues par la banque, le barème ayant vocation à être dégressif, et introduit la gratuité pour les successions des mineurs et des plus modestes. De telles mesures sont essentielles pour garantir un traitement équitable entre les citoyens, en fonction de leur situation financière.
    Nous espérons vivement qu’il sera adopté ici à l’unanimité, comme il le fut en commission, car il représente une avancée, même partielle. C’est un pas dans la bonne direction, et il mérite d’être soutenu par l’ensemble des députés.
    Nous devons agir dès maintenant pour que les familles ne soient plus spoliées après le décès d’un proche. Il est impératif d’encadrer les frais bancaires, pour alléger le fardeau des héritiers mais aussi pour leur permettre de jouir pleinement du bien qui leur est légué. C’est pourquoi le Rassemblement national soutient fermement cette proposition de loi. Il est temps que l’État prenne ses responsabilités et assure une protection effective des citoyens dans ce domaine. Il y va de notre dignité. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Castellani.

    M. Michel Castellani

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    Cette proposition de loi de notre collègue Christine Pirès Beaune, dont je salue l’engagement, vise à encadrer les frais bancaires sur succession. Je le dis d’emblée, le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires soutient sans réserve cette initiative.
    Ce texte répond à une préoccupation ancienne et légitime : encadrer les frais, volontiers excessifs et opaques, facturés par les établissements bancaires lors de la clôture des comptes d’un défunt. Ces frais, souvent dénoncés par les associations de consommateurs et les citoyens, constituent une charge supplémentaire pour les héritiers, déjà confrontés à des démarches complexes dans des moments douloureux. Cette année, l’UFC-Que choisir révélait que les banques facturent 303 euros en moyenne, ce qui représente un montant deux à trois fois plus élevé que chez nos voisins européens. C’est une hausse considérable, de 50 %, par rapport à 2012. À l’heure où nos concitoyens font face à des difficultés sociales majeures, un texte de cette nature n’est pas anodin.
    Je tiens à rendre hommage à deux de mes collègues, l’ancien président de notre groupe, Bertrand Pancher, et l’éminent rapporteur général de la commission des finances, Charles de Courson. Je rappelle qu’ils s’étaient engagés sur cette question, notamment en déposant une proposition de loi en février 2022. Lors de son examen en commission, des amendements avaient été proposés pour aligner les frais facturés sur les coûts réels supportés par les banques ou pour interdire purement et simplement ces frais. Bien que ces propositions n’aient pas été adoptées, elles ont marqué une étape importante dans la prise de conscience collective à ce sujet.
    Je me réjouis que la présente proposition de loi s’inscrive dans ce sillon et j’espère qu’elle sera adoptée. Ce texte traduit une volonté, sans doute unanime, des parlementaires de mettre fin à une situation injuste et déséquilibrée. Elle introduit un dispositif juridique clair et équilibré : l’interdiction des frais pour les successions modestes et pour les comptes détenus par des mineurs ; le plafonnement de ces frais à 1 % des avoirs dans les autres cas. Ces mesures répondent aux attentes de chacun, tout en tenant compte des contraintes opérationnelles des établissements bancaires.
    En première lecture, la proposition de loi a été adoptée à l’unanimité par l’Assemblée nationale, ce qui témoigne d’un véritable consensus entre tous les groupes politiques. Quant aux sénateurs, ils l’ont accueillie favorablement et ont travaillé à la sécurisation du dispositif. Ces ajustements, qui n’ont en rien altéré l’esprit du texte, demeurent fidèles à l’objectif initial.
    En deuxième lecture, notre discussion en commission des finances s’est pleinement inscrite dans cet état d’esprit. Les membres de la commission ont soutenu à l’unanimité la proposition de loi.
    Je suis convaincu que celle-ci aura des effets concrets et positifs dans la vie des Français. Elle apportera davantage de justice et de transparence dans un domaine marqué par des disparités importantes et des pratiques parfois abusives. En harmonisant les règles et en introduisant des plafonds, ce texte permettra d’alléger le fardeau des familles, tout en améliorant la confiance entre les consommateurs et leurs banques.
    Nous tenons à féliciter notre collègue Christine Pirès Beaune pour son engagement et la qualité du travail réalisé. Convaincu de la pertinence et de l’importance du texte, notre groupe votera résolument en sa faveur ; il soutiendra au préalable les amendements de Mme la rapporteure.
    Vous pourrez, madame la rapporteure, compter sur notre soutien pour que les dispositions adoptées soient appliquées efficacement, de sorte qu’elles renforcent la justice sociale dans les pratiques bancaires. (Mme la rapporteure et M. Philippe Gosselin applaudissent.)

    M. le président

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    La parole est à M. Édouard Bénard.

    M. Édouard Bénard

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    L’année 2024 devrait être encore meilleure que celle de 2023 pour les banques françaises, alors même qu’il s’agissait déjà d’une année record puisque les cinq plus grosses avaient engrangé 28,6 milliards d’euros de bénéfices. Il faut dire que les banques françaises disposent d’un précieux savoir-faire dans les activités d’investissements, dixit le directeur général de BNP Paribas, mais aussi pour réaliser des profits sûrs et robustes.
    Dans cette perspective, les frais bancaires constituent la véritable vache à lait des établissements : l’ensemble de ces frais de toutes sortes rapporte aux banques commerciales plus 6,5 milliards d’euros par an. Et ce chiffre devrait croître encore en 2025 puisque, selon une étude menée par le site internet MoneyVox sur la base de 121 plaquettes d’établissements bancaires applicables au 1er janvier 2025, les tarifs bancaires vont encore augmenter.
    S’il est compréhensible de facturer les opérations qui induisent un coût, il ne faut pas que le prix affiché soit totalement décorrélé du coût réel de l’opération. Or une telle déconnexion est favorisée par l’opacité qui entoure le calcul de certains frais, comme la fameuse commission d’intervention. Ces frais posent d’autant plus problème qu’ils touchent en proportion bien davantage les ménages les plus modestes et sont susceptibles d’accélérer la spirale du surendettement.
    Dès lors, comment expliquer que cette situation perdure depuis si longtemps ? Il faut sans doute y voir l’influence du lobby bancaire, qui a systématiquement annihilé toute tentative de régulation. Ainsi le fameux bouclier sur les frais bancaires, négocié en 2022 par Bruno Le Maire, s’est-il avéré, in fine, une véritable passoire.
    Nous pouvons donc nous féliciter du tour que prend l’examen du texte de notre collègue Pirès Beaune. Il a beau ne concerner qu’une petite partie de ces frais, il représente une évolution significative.
    Les frais en question sont ceux que les banques appliquent aux opérations réalisées à la suite d’un décès, communément appelés frais bancaires sur succession. Ce ne sont pas forcément les plus connus, mais ils représentent tout de même la coquette somme de 150 millions d’euros. Ils englobent la facturation de diverses opérations, pour lesquelles les tarifs sont à ce jour totalement libres. Selon une étude du site MoneyVox, pour une succession de 15 000 euros, 122 établissements appliquent des frais bancaires, lesquels peuvent varier de la gratuité à plus de 450 euros, ce qui est une preuve supplémentaire de leur totale déconnexion avec le coût réel des opérations.
    Cette situation est d’abord due à l’opacité qui entoure le montant de ces frais lors de la signature des contrats et au fait qu’ils sont soigneusement noyés dans de multiples autres frais et impôts liés à la succession, le tout étant aggravé par l’absence totale de régulation.
    Il fallait donc prendre des mesures. C’est le sens de cette proposition de loi, qui a été remaniée au Sénat et en commission depuis sa précédente adoption ici. Elle vise d’une part à exonérer de frais les opérations induites par certaines successions, notamment les plus simples, et celles portant sur des encours inférieurs à un seuil fixé par décret. D’autre part, lorsque les conditions de la succession permettent la facturation des opérations par les banques, elle encadre doublement les frais : par un plafond global en pourcentage, fixé à 1 % – comme nous l’avions proposé ici lors de l’examen en première lecture –, et par un plafond en valeur.
    Les travaux en commission ont permis d’apporter des précisions. Nous espérons que le Sénat adoptera le texte de manière conforme et que le gouvernement prendra rapidement les décrets d’application une fois le texte adopté définitivement, afin que ses dispositions s’appliquent au plus vite.
    Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera cette proposition de loi qui vise à protéger les ménages modestes et moyens de l’appétit vorace des banques – en l’absence de régulation, celles-ci ne se privent jamais de ponctionner toujours un peu plus là où elles le peuvent. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – Mme la rapporteure applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Matthieu Bloch.

    M. Matthieu Bloch

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    La présente proposition de loi a été votée en première lecture par notre assemblée lors de la législature précédente, puis par le Sénat. Elle prévoit des mesures intéressantes pour réduire et encadrer les frais bancaires sur les successions.
    Chacune et chacun d’entre nous a connu ou connaîtra un deuil. Dans ce moment douloureux psychologiquement, il n’est pas rare d’avoir aussi à résoudre des problèmes patrimoniaux : ceux de l’ouverture de la succession. Le passage chez le notaire, la gestion des divers organismes, l’organisation des obsèques et le traitement du passif sont pour beaucoup une source d’inquiétude et de stress qui s’ajoutent à la peine du deuil.
    Au-delà des problèmes d’organisation, la question de l’acceptabilité d’une succession peut aussi se poser. Au cours de ma carrière dans le notariat, j’ai vu nombre de familles modestes s’inquiéter de la capacité de l’actif à absorber le passif de la succession, et s’interroger sérieusement sur l’opportunité d’accepter celle-ci. À cet égard, les frais prélevés par les établissements bancaires pour le traitement des successions ne sont pas sans poser des difficultés, du fait de leur montant mais aussi de l’opacité qui entoure leur mode de calcul. Une famille qui constate que 800 ou 1 000 euros de frais bancaires seront prélevés sur les 1 500 euros qui restent de la succession après avoir réglé les frais d’obsèques se posera forcément la question de la renonciation.
    Il est donc très important que le législateur intervienne pour limiter ces frais, dont le montant est parfois trop important, voire disproportionné. Les héritiers pourront ainsi accepter plus sereinement les petites successions. Cela réduira le nombre de renonciations à succession, évitant leur enregistrement aux greffes de tribunaux déjà surchargés et la transmission des dossiers par les notaires au service des Domaines – autrement dit, cela désengorgera les administrations concernées. Il convient en outre de rendre ces frais bancaires plus lisibles et de les homogénéiser.
    La proposition de loi comporte des mesures intéressantes, comme la gratuité pour les successions simples et modestes ou le plafonnement pour les successions les plus complexes. Elle prévoit un contrôle par l’Autorité de contrôle prudentiel et de résolution ainsi que par la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes, garantissant ainsi une application rigoureuse des dispositions.
    Cependant, nous sommes attentifs aux conséquences que pourrait avoir la loi sur les petites banques et les établissements locaux. Il ne faudrait pas que le plafonnement des frais affecte leur rentabilité, notamment pour celles qui ne disposent pas des économies d’échelle des grands groupes. Prenons garde à ce que cette régulation ne mette pas en péril la diversité de notre secteur bancaire.
    Nous devons aussi veiller à ce que l’application de la réforme ne se traduise pas par une surcharge administrative pour les banques, au risque de freiner leur capacité à fournir des services personnalisés. À cet égard, nous approuvons les garde-fous proposés.
    Nous devons enfin nous prémunir du risque d’effets pervers : les banques pourraient être tentées de compenser cette perte de revenus en augmentant le tarif d’autres services, ce qui pénaliserait indirectement les clients.
    Le groupe UDR restera donc vigilant quant à l’application de ces dispositifs. Il est également essentiel d’accompagner la réforme d’une pédagogie claire auprès des familles et des professionnels, afin que les nouvelles règles soient comprises par tous.
    Cette proposition de loi relève du bon sens car il était devenu nécessaire d’encadrer les pratiques bancaires en matière de successions. Il est de notre devoir de la soutenir, tout en restant attentifs à ses conséquences à long terme. Ce texte sera une avancée concrète pour nos concitoyens : elle préservera leur droit à une transmission patrimoniale équitable, tout en responsabilisant les banques.
    En votant pour, le groupe UDR affirme son engagement en faveur d’une France juste, où la solidarité ne se limite pas aux paroles, mais se traduit en actes. En votant cette loi, nous permettrons aux familles modestes d’accepter plus facilement les successions qui les concernent ; nous limiterons le nombre d’enregistrements de renonciation à succession aux greffes des tribunaux ; nous désengorgerons le service des Domaines, qui traite des successions déficitaires ou vacantes ; nous clarifierons l’application des frais bancaires aux successions, assurant ainsi l’égalité et la transparence indispensable dans ces moments douloureux pour nos concitoyens. (Applaudissements sur les bancs des groupes UDR et RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Christophe Plassard.

    M. Christophe Plassard

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    La perte d’un proche est une épreuve personnelle et morale à laquelle s’ajoutent parfois des épreuves administratives, que nous devons réduire à leur strict nécessaire. Depuis 2017, plusieurs mesures ont été prises pour mieux encadrer les frais bancaires, notamment au bénéfice des plus fragiles, mais nous devons encore avancer sur la question spécifique des frais sur succession, qui varient du simple au quadruple suivant les banques.
    Selon l’UFC-Que Choisir – dont je salue le travail –, ces frais représentent une manne de 150 millions pour les banques. Pour les Français dans la douleur du deuil, c’est une charge moyenne de 300 euros, sur une succession moyenne de 20 000 euros. Si le montant peut sembler peu significatif pour les particuliers, il l’est encore moins pour les banques.
    Ce qui est condamnable est peut-être moins la somme prélevée que la méthode. D’abord, lors de la signature du contrat, les clients lisent trop rarement – pour ne pas dire presque jamais – les dispositions applicables en cas de décès, ce qui accentue d’autant l’opacité de ces frais. Ensuite, lorsque les proches reçoivent la facture, ils n’ont que très rarement – pour ne pas dire jamais – le cœur à regarder le détail de ces coûts. Ils paient alors des frais qui sont en moyenne deux fois plus élevés dans notre pays que chez nos voisins européens.
    Je tiens à saluer le travail effectué par la rapporteure pour réécrire cette proposition de loi. L’amélioration permanente du dispositif est passée notamment par le dépôt d’amendements après l’examen du texte en commission ; j’appelle de mes vœux leur adoption. Ils visent à étendre le champ de la proposition de loi à l’ensemble des opérations et frais bancaires, en lieu et place des seules opérations de clôture de compte, et à inclure dans le rapport remis par le gouvernement au Parlement une évaluation du nombre de personnes bénéficiant du dispositif de gratuité soumis à notre examen.
    Je salue également l’inscription du texte à l’ordre du jour. En première lecture, sous la précédente législature, il avait été adopté à l’unanimité tant par l’Assemblée que par le Sénat. C’est la preuve que, malgré l’éclatement politique – plus que jamais d’actualité –, nous pouvons voter des textes utiles, dépasser les clivages et les calculs politiques, travailler pour améliorer le quotidien de nos concitoyens, toutes choses que ceux-ci attendent de leurs élus. Le groupe Horizons & indépendants votera en faveur de ce texte. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes HOR, DR et Dem. – Mme la rapporteure applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à M. Daniel Labaronne.

    M. Daniel Labaronne

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    À la douleur de perdre un enfant s’ajoutent bien souvent des injustices que l’on aurait peine à imaginer. C’est ce qu’ont vécu les parents de Léo, un petit garçon de 9 ans emporté par un cancer en 2021. Vous l’avez rappelé, madame la rapporteure, ils ont découvert avec stupéfaction un prélèvement de 138,20 euros correspondant aux frais de clôture du livret A de leur fils. Ce fut une consternation pour ces parents déjà accablés par le deuil.
    Les frais bancaires liés à la succession représentent pour les banques une ressource financière d’environ 150 millions d’euros par an. En 2021, ces frais, supposés couvrir les opérations administratives post mortem, ont atteint en moyenne 233 euros par succession en France, un montant jusqu’à trois fois supérieur à celui constaté dans d’autres pays européens. Une opacité persistante entoure ces pratiques, avec de grandes disparités entre les banques, ainsi que Mme la rapporteure l’a évoqué.
    Depuis 2017, des avancées significatives ont été obtenues pour réduire les frais bancaires et mieux protéger les épargnants, notamment les personnes en situation de fragilité financière – nous y avons contribué les uns et les autres. En 2019, un décret a renforcé l’encadrement bancaire pour les publics fragiles, au bénéfice de 4 millions de Français. En 2022, la loi portant mesures d’urgence pour la protection du pouvoir d’achat a instauré de nouvelles règles, notamment pour protéger les victimes de fraudes.
    Je salue l’engagement de Bruno Le Maire, alors ministre de l’économie, pour réduire les frais bancaires grâce à des travaux ambitieux et une concertation constructive avec les acteurs du secteur bancaire. Cependant, il est regrettable que le secteur n’ait pas saisi l’occasion d’encadrer les frais sur succession dans le cadre des travaux du Comité consultatif du secteur financier (CCSF). Un ou des accords de place – qui relèvent de ce que l’on appelle la soft law – auraient évité une intervention législative.

    Mme Christine Arrighi

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    Les banques ne sont pas raisonnables !

    M. Daniel Labaronne

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    Je tiens à saluer ici le travail du CCSF, qui participe à la régulation de l’activité bancaire, ainsi qu’à l’amélioration de la lisibilité et de la comparabilité des tarifs et contrats d’assurance ou des contrats bancaires.
    Le groupe Ensemble pour la République soutient pleinement cette proposition de loi visant à encadrer les frais bancaires liés aux successions et à renforcer la protection des épargnants. Ce texte mettra un terme à des situations inacceptables, comme celle vécue par les parents de Léo. Désormais, aucune banque ne pourra plus profiter de la douleur des familles endeuillées, notamment celles qui ont perdu un enfant mineur. Adopté à l’unanimité par la commission des finances, ce texte garantira que les frais bancaires et opérations facturés aux comptes de paiement et comptes sur livret des défunts soient en rapport avec les coûts réellement supportés par les établissements de crédit teneurs desdits comptes.
    Le groupe EPR défendra des amendements identiques à ceux de Mme la rapporteure – je salue la qualité de son travail et son esprit de concertation. Ils visent notamment à clarifier le champ d’application de la proposition de loi et à reporter de trois mois sa date d’entrée en vigueur, dans un souci de sécurité juridique.
    Ce travail collectif illustre ce que nous pouvons accomplir lorsque l’intérêt général prime. Au sein de cette assemblée, nous avons fait preuve de pragmatisme et de responsabilité. Avec le Sénat et le gouvernement, nous avons œuvré à une réforme ambitieuse mais réaliste.
    Dans le même esprit, il est essentiel de progresser sur d’autres fronts, pour mieux protéger les citoyens. J’appelle ainsi à une mise en œuvre rapide des recommandations du CCSF, formulées dans son avis du 8 octobre 2024, visant à clarifier et renforcer les garanties des contrats d’assurance obsèques. Si cette soft law restait lettre morte, le législateur devrait intervenir pour garantir pleinement les droits des consommateurs.

    M. Emmanuel Duplessy

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    Soft law ? Bien dit, madame la duchesse !

    M. Daniel Labaronne

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    Il s’agit de faire, pour les contrats d’assurance obsèques, un travail analogue à celui que nous sommes en train de réaliser pour les frais bancaires sur succession.
    Parce que chaque famille endeuillée mérite respect et dignité, parce que les frais bancaires ne doivent jamais aggraver la douleur d’un deuil, nous avons la responsabilité d’agir. Nous appelons à une adoption rapide et unanime de la proposition de loi, afin que les familles puissent bénéficier de cette avancée essentielle le plus rapidement possible. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes DR et Dem. – Mme la rapporteure applaudit également.)

    M. le président

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    La discussion générale est close.

    Discussion des articles

    M. le président

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    J’appelle maintenant dans le texte de la commission les articles de la proposition de loi sur lesquels les deux assemblées n’ont pu parvenir à un texte identique.

    Article 1er

    M. le président

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    Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 1, 8 et 17.
    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 1.

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    Comme nous avons trois amendements identiques, je propose à M. Daniel Labaronne de défendre le sien.

    M. le président

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    L’amendement no 8 de Mme Christine Arrighi est défendu.

    M. le président

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    La parole est à M. Daniel Labaronne, pour soutenir l’amendement no 17.

    M. Daniel Labaronne

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    Nous avons déposé des amendements identiques à l’initiative de Mme la rapporteure. Je la remercie et salue son geste qui montre l’esprit de concertation que j’ai évoqué tout à l’heure.
    Le présent amendement clarifie la rédaction du texte en précisant que le dispositif s’applique aux seules opérations entrant dans le cadre d’une succession. D’autre part, il étend le champ d’application de la proposition de loi à l’ensemble des opérations bancaires liées aux successions – le champ ne sera donc plus limité aux seules clôtures de compte. Cette modification vise à inclure notamment les frais liés au paiement de factures pour le compte des ayants droit, à l’évaluation des avoirs du conjoint survivant, aux successions internationales ou encore à la gestion prolongée des dossiers non réglés. Une telle approche tend à éviter le risque d’un transfert des frais de clôture vers d’autres catégories de frais successoraux.

    M. le président

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    Quel est l’avis du Gouvernement sur ces trois amendements identiques ?

    Mme Laurence Garnier, secrétaire d’État

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    Favorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Jocelyn Dessigny.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Comme je l’ai indiqué lors de la discussion générale, le groupe Rassemblement national votera en faveur de ces amendements, l’enjeu étant de limiter au maximum, voire de supprimer, les frais financiers lors des successions.

    (Les amendements identiques nos 1, 8 et 17 sont adoptés.)

    M. le président

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    Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 2, 9, 14 et 18.
    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 2.

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    Je laisse à Mme Arrighi le soin de présenter le sien.

    M. le président

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    La parole est à Mme Christine Arrighi, pour soutenir l’amendement no 9.

    Mme Christine Arrighi

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    Il vise à garantir la cohérence technique et juridique de la proposition de loi en étendant l’exclusion prévue pour le PEA à d’autres dispositifs d’épargne spécifiques, tels que le plan d’épargne en actions destiné au financement des petites et moyennes entreprises et des entreprises de taille intermédiaire (PEA-PME), le compte PME innovation et le plan d’épargne avenir climat. Ces produits, similaires au PEA, sont investis dans des comptes-titres dont la valorisation est sujette à des fluctuations significatives rendant complexe l’évaluation des frais sur succession. L’amendement vise à tenir compte des spécificités techniques et économiques de ces produits, tout en préservant leur finalité de soutien à l’innovation, aux PME et à la transition écologique.
    La proposition de loi de Mme Christine Pirès Beaune, que nous remercions pour sa ténacité et sa pugnacité (M. Inaki Echaniz applaudit), traite d’un sujet connu depuis longtemps. Si nous l’examinons ce soir, c’est parce que ni le gouvernement ni le réseau bancaire n’ont tenu compte des alertes !

    M. Emmanuel Duplessy

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    Excellent !

    M. le président

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    Les amendements nos 14 de M. Jean-Paul Mattei et 18 de M. Daniel Labaronne sont défendus.
    Quel est l’avis du gouvernement sur ces quatre amendements identiques ?

    Mme Laurence Garnier, secrétaire d’État

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    Madame Arrighi, le gouvernement a souhaité donner le temps à une discussion de place de se tenir. Puis, actant de l’échec de celle-ci, il a travaillé avec Mme la rapporteure pour faire aboutir la proposition de loi examinée aujourd’hui.
    Le gouvernement est favorable à ces quatre amendements. Je remercie la rapporteure et les députés pour le travail qu’ils ont réalisé afin de préciser le champ d’application du texte.

    M. le président

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    La parole est à M. Daniel Labaronne.

    M. Daniel Labaronne

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    Je confirme que le CCSF, dans lequel je siégeais en qualité de représentant de l’Assemblée nationale pendant l’ancienne législature – Mme Constance Le Grip m’y a succédé –, avait inscrit à son ordre du jour la question des frais bancaires liés aux successions. Néanmoins, comme je l’ai expliqué dans mon intervention au cours de la discussion générale, il n’y a pas eu d’accord de place, de sorte que les parlementaires ont dû s’emparer du dossier.
    Il n’en demeure pas moins que, sur de nombreux autres sujets, le CCSF a permis des avancées significatives, grâce à des accords de place rendant inutile l’intervention du législateur. Ses avis sont intéressants ; je vous invite à les consulter. Il s’agit de soft law, que tous les acteurs s’engagent à respecter. Ces accords ont amélioré la traçabilité, la lisibilité et la comparabilité des contrats, et ont favorisé un alignement des tarifs bancaires.
    La proposition de loi relative à la déshérence des contrats de retraite supplémentaire, que j’ai fait adopter, a été inspirée par les travaux du CCSF. Elle a permis de rendre 5 milliards d’euros aux retraités.

    M. le président

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    La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Vous souhaitez étendre l’exclusion aux différents types de PEA. Qu’en est-il des PEA souscrits, dans les délais légaux, dans le cadre d’une assurance vie ? Il me semble qu’il y a une ambiguïté à ce sujet.

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure.

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    L’assurance vie n’entre pas dans le champ de la proposition de loi.
    En première lecture, nous avions exclu les PEA du champ d’application de la gratuité, mais nous avions oublié notamment les PEA-PME. Ces amendements visent à réparer cet oubli en étendant le périmètre de l’exclusion. J’espère avoir dissipé vos inquiétudes.

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    Merci !

    (Les amendements identiques nos 2, 9, 14 et 18 sont adoptés.)

    M. le président

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    Les amendements identiques nos 3 de Mme la rapporteure et 10 de Mme Christine Arrighi sont rédactionnels.

    (Les amendements identiques nos 3 et 10, acceptés par le gouvernement, sont adoptés.)

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 7, qui fait l’objet du sous-amendement no 21.

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    Il tend à exclure des critères de complexité le nombre de comptes et des produits d’épargne à clôturer. En effet, le nombre de comptes à clôturer – quatre, cinq, six… – ne rend pas l’opération de clôture plus complexe.
    En revanche, je propose d’ajouter deux critères de complexité : la présence d’un contrat de crédit en cours – ce point fait l’objet du sous-amendement – et la nature professionnelle du compte à clôturer. Un contrat de crédit en cours, notamment s’il est lié à un bien immobilier, peut ralentir et complexifier l’opération de clôture. Les banques peuvent également considérer qu’il faut plus de temps pour clôturer un compte professionnel, même si ce n’est pas toujours le cas.

    M. le président

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    La parole est à M. Jacques Oberti, pour soutenir le sous-amendement no 21.

    M. Jacques Oberti

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    Nous proposons de préciser que la présence d’un contrat de crédit en cours à la date du décès ne peut être invoquée comme facteur de complexité que lorsqu’il s’agit d’un crédit immobilier – et non d’un crédit à la consommation.

    M. le président

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    Quel est l’avis de la commission sur le sous-amendement ?

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    Avis favorable.

    M. le président

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    Quel est l’avis du gouvernement sur l’amendement et sur le sous-amendement ?

    Mme Laurence Garnier, secrétaire d’État

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    J’émets un avis favorable sur l’amendement no 7, qui tend à préciser les critères qui permettent de caractériser ce qui constitue une opération manifestement complexe. Je donne également un avis favorable au sous-amendement, puisqu’il s’agit d’exclure les crédits à la consommation des facteurs de complexité. Les crédits à la consommation peuvent certes introduire une dose de complexité, mais pas systématiquement, contrairement aux crédits immobiliers, dont le traitement est nécessairement complexe.

    M. le président

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    Sur les amendements identiques nos 4, 11, 15 et 19, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Philippe Gosselin.

    M. Philippe Gosselin

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    Malgré la volonté de simplifier et le désir de faire preuve de justice et d’humanité, les choses ne sont pas toujours simples, et le naturel revient vite au galop. Il ne faudrait pas que certains établissements bancaires continuent d’oublier qu’ils ont aussi des obligations morales, indépendamment de la loi. Notre collègue parlait des actions du CCSF, et c’est très bien – loin de moi l’idée de mettre à mal le système bancaire. Force est pourtant de reconnaître que le fait d’avoir enclenché un processus législatif a ramené les banques à davantage de raison, ce qui ne serait sans doute pas arrivé en l’absence d’un tel processus. Les précisions apportées par l’amendement et le sous-amendement sont les bienvenues, et j’espère qu’elles seront suffisantes – c’est en tout cas le vœu que je forme.

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure.

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    Nous amendons le texte pour essayer de l’améliorer car les choses ne sont effectivement pas toujours simples. Le rapport d’évaluation jouera un rôle très important. Je ne sais pas qui sera dans cet hémicycle dans un ou deux ans…

    M. Philippe Gosselin

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    Déjà qu’on ne sait pas bien qui y sera demain ! (Sourires.)

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    En tout cas, le rapport nous amènera peut-être à compléter la liste des facteurs de complexité ou à en supprimer certains qui n’auraient pas lieu d’être.

    M. Philippe Gosselin

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    Il ne faudrait pas que la complexité soit un argument pour ne pas agir !

    (Le sous-amendement no 21 est adopté.)

    (L’amendement no 7, sous-amendé, est adopté.)

    M. le président

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    Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 4, 11, 15 et 19.
    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 4.

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    J’invite M. Mattei, s’il le souhaite, à présenter le sien.

    M. le président

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    L’amendement no 11 de Mme Christine Arrighi est défendu.

    M. le président

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    La parole est à M. Jean-Paul Mattei, pour soutenir l’amendement no 15.

    M. Fabrice Brun

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    Il va faire la synthèse !

    M. Jean-Paul Mattei

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    Je remercie Mme la rapporteure de son geste élégant. Comme cela a été évoqué lors de la présentation du texte, nous proposons qu’il entre en vigueur non pas trois mois, mais six mois après sa promulgation. Cela donnera trois mois supplémentaires aux banques pour adapter leurs systèmes, notamment pour appliquer la gratuité dans les cas prévus par la loi.

    M. Fabrice Brun

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    Excellent !

    M. le président

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    L’amendement no 19 de M. Daniel Labaronne est défendu.
    Quel est l’avis du gouvernement sur ces quatre amendements identiques ?

    Mme Laurence Garnier, secrétaire d’État

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    Avis favorable.

    M. le président

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    La parole est à M. Jocelyn Dessigny.

    M. Jocelyn Dessigny

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    Nous voterons contre ces amendements, car nous estimons que le délai initial de trois mois laisse suffisamment de temps aux banques pour modifier leurs procédures. Nous ne comprenons pas l’intérêt d’allonger ce délai.

    M. Jean-Paul Mattei

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    C’est une question d’efficacité !

    M. Jocelyn Dessigny

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    Les entreprises bancaires disposent d’effectifs suffisants pour ce faire. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Christine Arrighi.

    Mme Christine Arrighi

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    J’appelle l’attention de mes collègues sur le fait que cette extension du délai permettra aussi au gouvernement de publier le décret d’application nécessaire à la mise en œuvre effective du dispositif. Nous souhaitons que cette publication intervienne très rapidement. Le gouvernement matérialisera ainsi l’avis favorable qu’il a donné au texte, les banques n’ayant guère montré qu’elles étaient raisonnables – je renvoie aux explications de M. Labaronne.

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure.

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    Je remercie Mme Arrighi de cette précision. En première lecture, le gouvernement s’était engagé à consulter l’ensemble des groupes parlementaires pour rédiger le décret. J’espère que cet engagement reste d’actualité, et qu’il vaudra aussi à l’avenir. Si une concertation doit avoir lieu, un délai de six mois ne me paraît pas démesuré – étant entendu que, si elle peut se tenir dans un délai plus court, ce sera encore mieux.

    M. le président

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    Je mets aux voix les amendements identiques nos 4, 11, 15 et 19.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        127
            Nombre de suffrages exprimés                114
            Majorité absolue                        58
                    Pour l’adoption                62
                    Contre                52

    (Les amendements identiques nos 4, 11, 15 et 19 sont adoptés.)

    (L’article 1er, amendé, est adopté.)

    Article 2

    M. le président

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    Les amendements identiques nos 5 de Mme la rapporteure et 12 de Mme Christine Arrighi sont rédactionnels.

    (Les amendements identiques nos 5 et 12, acceptés par le gouvernement, sont adoptés.)

    M. le président

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    Sur l’ensemble de la proposition de loi, je suis saisi par les groupes Rassemblement national et Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisi de quatre amendements identiques, nos 6, 13, 16 et 20.
    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 6.

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    Il tend à compléter la demande de rapport d’évaluation introduite en première lecture par la commission à l’initiative de Mme Dalloz. Je propose que ce rapport donne une estimation du nombre de personnes bénéficiant de la gratuité grâce au présent texte. C’est, selon moi, un point important. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe SOC.)

    Mme Marie-Christine Dalloz

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    C’est une bonne idée !

    M. le président

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    Les amendements nos 13 de Mme Christine Arrighi, 16 de M. Jean-Paul Mattei et 20 de M. Daniel Labaronne sont défendus.

    (Les amendements identiques nos 6, 13, 16 et 20, acceptés par le gouvernement, sont adoptés.)

    (L’article 2, amendé, est adopté.)

    Vote sur l’ensemble

    M. le président

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    Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    M. le président

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        144
            Nombre de suffrages exprimés                144
            Majorité absolue                        73
                    Pour l’adoption                144
                    Contre                0

    (La proposition de loi est adoptée.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, EcoS et GDR, ainsi que sur quelques bancs des groupes RN, EPR, DR et Dem.)

    M. Inaki Echaniz

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    Pirès Beaune à Bercy !

    M. le président

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    La parole est à Mme la rapporteure.

    Mme Christine Pirès Beaune, rapporteure

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    Je remercie les députés de tous les groupes qui ont travaillé à l’élaboration de ce texte, ainsi que les ministres et les cabinets précédents, notamment Mme Olivia Grégoire, qui était au banc lors de la première lecture. Je remercie également Mme la ministre ici présente et ses équipes. Je remercie enfin les deux administrateurs de l’Assemblée qui ont travaillé sur le texte en première et en deuxième lecture, ainsi que mes collaborateurs. (Applaudissements.)

    Suspension et reprise de la séance

    M. le président

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-huit heures cinquante-cinq, est reprise à dix-neuf heures cinq.)

    M. le président

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    La séance est reprise.

    4. Protection et accompagnement des parents d’enfants atteints de cancers, de maladies graves et de handicaps

    Discussion d’une proposition de loi

    M. le président

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Vincent Thiébaut et plusieurs de ses collègues visant à optimiser la protection et l’accompagnement des parents d’enfants atteints de cancers, de maladies graves et de handicaps (nos 277, 625).

    Présentation

    M. le président

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    La parole est à M. Vincent Thiébaut, rapporteur de la commission des affaires sociales.

    M. Vincent Thiébaut, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    La proposition de loi que nous allons examiner est le fruit d’une réflexion et d’un travail collectifs menés par de nombreuses associations – en particulier l’association Eva pour la vie et la fédération Grandir sans cancer –, des médecins et professionnels spécialisés et des élus venant de l’ensemble du territoire. Cosignée par plus de 140 députés issus de différents groupes parlementaires et que je remercie vivement, elle repose sur le diagnostic partagé des difficultés rencontrées par les familles et vise avant toute chose à faciliter un quotidien bouleversé par le cancer, la maladie ou le handicap de l’enfant.
    Je suis honoré de défendre à la tribune ce sujet d’importance. Je tiens à remercier particulièrement Charlotte Goetschy-Bolognese, députée suppléante de M. Olivier Becht, qui fut à l’initiative du texte. Je me réjouis de débattre avec vous pour améliorer cette proposition de loi adoptée à l’unanimité la semaine dernière en commission des affaires sociales.

    M. Sébastien Peytavie

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    Oui !

    M. Vincent Thiébaut, rapporteur

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    En France, entre 1,5 million et 4 millions d’enfants âgés de 0 à 20 ans sont atteints d’une maladie chronique et 2 500 enfants sont diagnostiqués porteurs d’un cancer. En outre, environ 560 000 enfants sont en situation de handicap.
    Chacun peut l’imaginer, la détection d’une maladie grave ou d’un handicap chez un enfant constitue un bouleversement intime et immense dans sa vie et dans celle de sa famille. À la détresse et à l’inquiétude s’ajoutent de nombreux changements pratiques qui chamboulent la vie quotidienne. Pour les familles, c’est souvent la double peine : aux préoccupations directement liées à la maladie ou au handicap s’ajoutent des difficultés financières et administratives qui peuvent prendre une ampleur considérable, en particulier pour les familles les moins aisées.
    Depuis 2017, le législateur est intervenu pour améliorer le quotidien des familles concernées, témoignant de sa forte mobilisation sur le sujet. La proposition de loi que nous examinons aujourd’hui s’inscrit dans le prolongement de ce travail parlementaire, particulièrement dans la continuité de la loi du 19 juillet 2023 votée à l’initiative de Paul Christophe, laquelle comporte des avancées majeures.
    Les évolutions législatives de ces dernières années sont saluées par le monde associatif et par les familles, mais de nombreuses difficultés demeurent. Certains textes sont insuffisamment appliqués, par défaut d’organisation ou par manque de moyens. Au-delà de la trop faible application des textes, des failles existent encore dans le droit, auxquelles nous entendons précisément remédier par cette proposition de loi.
    Les trois premiers articles visent tout particulièrement à remédier aux problèmes de logement et d’hébergement auxquels sont encore trop souvent confrontées les familles, en particulier les plus modestes.
    L’article 1er consacre le droit au logement des familles « éprouvant des difficultés particulières pour se loger en raison de l’état de santé d’un enfant à charge atteint d’une maladie, d’un handicap ou victime d’un accident d’une particulière gravité ». Il modifie à cette fin l’article 1er d’une loi emblématique du droit au logement, la loi Besson du 31 mai 1990, et reconnaît ainsi aux familles d’enfants malades le droit à une aide de la collectivité pour accéder à un logement décent.

    M. Thibault Bazin

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    C’est juste !

    M. Vincent Thiébaut, rapporteur

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    L’article 1er bis, introduit en commission, réaffirme une disposition de la loi du 19 juillet 2023 interdisant le non-renouvellement du bail de locataires ayant à charge un enfant atteint d’une affection grave.
    L’article 2 vise plus spécifiquement à donner une voie de recours aux proches d’enfants malades qui seraient confrontés à des difficultés pour rembourser un emprunt, en particulier un crédit immobilier.

    M. Thibault Bazin

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    C’est un vrai problème !

    M. Vincent Thiébaut, rapporteur

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    Il prévoit ainsi que les bénéficiaires de l’allocation journalière de présence parentale (AJPP) puissent solliciter auprès du juge la suspension de leurs obligations de remboursement de crédit, conformément à la procédure prévue dans le code de la consommation. L’examen de la situation personnelle et financière des familles par le juge permettra un ajustement au cas par cas des conditions de cette suspension.
    L’article 3 concerne moins le logement que l’hébergement des proches à proximité des lieux d’hospitalisation et de soins de l’enfant. Si plusieurs solutions d’hébergement existent déjà, telles que les maisons des parents, les foyers d’accueil ou encore les chambres « parent-enfant », elles sont très souvent saturées et coûteuses. Or la présence des parents aux côtés de l’enfant hospitalisé est un droit et joue un rôle fondamental dans son bien-être psychologique et dans le vécu de son parcours de soins. L’article permet ainsi aux établissements de santé de proposer aux parents d’enfants atteints d’une affection grave une place d’hébergement au sein d’un hôtel hospitalier le temps que dure l’hospitalisation de l’enfant.
    L’article 4 instaure une expérimentation visant à accélérer les délais de traitement des demandes de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé (AEEH), dont bénéficient actuellement 464 000 enfants et jeunes en situation de handicap. En effet, l’attente peut être excessivement longue, malgré l’urgence dans laquelle sont placées les familles concernées. Si le délai moyen de traitement s’élève à 4,2 mois à l’échelle nationale, ce chiffre masque des disparités considérables : à titre d’exemple, le délai moyen est de 6,2 mois en Haute-Garonne, de 7,7 mois dans le Rhône, de 11 mois en Martinique et de 13 mois à Mayotte. De tels délais risquent de précariser les familles, alourdissent leur charge administrative et fragilisent le principe d’égalité de traitement entre les citoyens. Nous avons réécrit l’article 4 en commission afin de le rendre plus opérant. Dans le cadre de cette expérimentation, une avance sur l’AEEH sera automatiquement versée deux mois après la demande.
    L’article 5 modifie les règles de renouvellement de l’allocation journalière de présence parentale.

    M. Thibault Bazin

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    C’était attendu !

    M. Vincent Thiébaut, rapporteur

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    Il porte en effet à quatorze mois la durée maximale du bénéfice de l’AJPP avant renouvellement, actuellement fixée à douze mois. Cette évolution doit éviter aux parents se trouvant dans l’obligation de s’arrêter entièrement de travailler pour s’occuper de leur enfant de renouveler leur demande pour seulement deux mois.
    L’article 6 prévoit la possibilité de partager l’AJPP entre les deux parents en cas de garde alternée, par dérogation à la règle de l’allocataire unique. Actuellement, si les parents en couple peuvent bénéficier simultanément ou alternativement de l’AJPP, tel n’est pas le cas des parents séparés ou divorcés. Dans cette hypothèse, le parent qui n’est pas l’allocataire unique peut se trouver dans l’obligation de poser des congés sans solde. Cette application du droit fragilise financièrement le parent concerné et n’encourage pas la répartition équilibrée de la prise en charge de l’enfant entre les deux membres du couple. En cela, cette mesure répond donc aussi à l’évolution de la société.
    L’article 8 instaure la gratuité du stationnement à l’hôpital public pour les personnes ayant à charge un enfant atteint d’une affection grave. Certains établissements accordent déjà cette gratuité, mais ce n’est pas le cas de tous, notamment lorsque la gestion des parkings a été concédée à des opérateurs économiques privés. Or le nombre de déplacements requis et leur durée – parfois de plusieurs jours en cas d’hospitalisation – peuvent entraîner des coûts cumulés de stationnement particulièrement significatifs.

    M. Thibault Bazin

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    C’est vrai ! Là encore, il y a un vrai problème.

    M. Vincent Thiébaut, rapporteur

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    C’est pourquoi l’article 8 améliorera nettement le quotidien des familles concernées.
    L’article 9 répond à une demande des associations de parents d’enfants gravement malades, lesquelles rapportent que les prestations d’auxiliaires médicaux comme les ergothérapeutes et les psychomotriciens n’engendrent pas de dépenses pour les familles lorsqu’elles sont dispensées à l’hôpital, mais sont payantes dans le cadre de la médecine de ville. L’article prévoit également le remboursement intégral des séances de l’enfant gravement malade avec un psychologue, au-delà de la limite actuellement fixée à douze séances annuelles.
    L’article 9 bis, ajouté en commission, invite le gouvernement à remettre au Parlement un rapport d’évaluation sur la mise en œuvre de la loi. Comme annoncé en commission, notre collègue Sophie Delorme Duret et moi-même avons retravaillé la rédaction de l’article et déposé en conséquence un amendement de réécriture. Il vise à inclure dans le champ du rapport les sujets qui n’ont pu être traités lors de l’examen parlementaire. Cela concerne notamment les dépenses non intégralement couvertes des familles d’enfants gravement malades – liées par exemple aux déplacements nécessaires aux soins de leur enfant –, les difficultés rencontrées par la fratrie de l’enfant ou encore les thérapies devant s’effectuer à l’étranger faute de soins équivalents en France.
    Le texte est important pour les familles concernées, dont le quotidien serait simplifié par ces nécessaires évolutions. J’espère que notre assemblée, pour une fois, présentera un visage unanime, au vu des difficultés rencontrées par ces familles. Je me réjouis d’avance de pouvoir montrer aux Français et aux Françaises que nous savons nous retrouver lorsque le sujet en vaut la peine. J’ai hâte de débattre avec vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR et sur plusieurs bancs des groupes EPR, SOC, DR et EcoS.)

    M. le président

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    La parole est à Mme la ministre déléguée chargée de la famille et de la petite enfance.

    Mme Agnès Canayer, ministre déléguée chargée de la famille et de la petite enfance

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    Par cette proposition de loi, vous souhaitez optimiser la protection et l’accompagnement des parents dont l’enfant est atteint de cancer, d’une maladie grave ou d’un handicap. Il s’agit avant tout d’un texte d’humanité et de prévention.
    Un texte d’humanité d’abord, car plusieurs milliers de jeunes et leurs familles sont concernés par ces drames, auxquels s’ajoutent souvent les difficultés financières et logistiques qui en découlent. Les parents de ces jeunes doivent souvent quitter leur emploi ou l’exercer à temps partiel pour s’occuper de leur enfant, ce qui les conduit à subir une perte importante de revenus.
    Un texte de prévention ensuite, car dès lors qu’un parent se heurte à la précarité et à la souffrance, il existe un risque accru de dysfonctionnement préjudiciable à l’enfant. Or si le parent en difficulté est efficacement accompagné, ce risque sera réduit.

    M. Thibault Bazin

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    C’est vrai !

    Mme Agnès Canayer, ministre déléguée

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    Toutes les familles méritent la même attention mais, par leur action, les pouvoirs publics doivent particulièrement soutenir les plus fragiles afin d’éviter que les fragilités s’accumulent de manière irréversible quand une famille est frappée par de telles épreuves.
    Je veux saluer le travail qui a permis la construction de ce texte, tout comme l’engagement des 145 parlementaires cosignataires de la proposition, au premier rang desquels M. le rapporteur Vincent Thiébaut, pour le groupe Horizons, dont je connais l’investissement sur le sujet. Je tiens à saluer aussi les associations qui ont apporté leur concours et leur éclairage, notamment l’association Eva pour la vie et la fédération Grandir sans cancer, qui ne cessent d’agir pour apaiser les parents et les proches touchés par ces drames.
    Votre volonté, monsieur le rapporteur, est partagée par le gouvernement. C’est en ce sens que le ministre Paul Christophe avait déjà défendu, comme député, la loi du 19 juillet 2023 pour renforcer la protection des familles d’enfants atteints d’une maladie, d’un handicap ou victimes d’un accident d’une particulière gravité.

    M. Thibault Bazin

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    Nous l’avions tous votée !

    Mme Agnès Canayer, ministre déléguée

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    Cette loi protège les salariés contre le licenciement pendant le congé de présence parentale, allonge le congé pour décès d’un enfant et accélère le versement des aides financières accordées aux parents, notamment grâce à des avances. Elle permet de mieux soutenir les familles dans les épreuves douloureuses qu’elles traversent.
    Votre proposition s’inscrit dans la continuité de cette loi ; elle tend à mieux accompagner ces parents en les aidant financièrement lorsqu’ils sont contraints d’arrêter partiellement ou totalement leur activité professionnelle pour s’occuper de leur enfant atteint d’une maladie. Le gouvernement partage l’ambition de mieux soutenir la parentalité, de faciliter les démarches des parents et d’augmenter la prise en charge financière des frais qui sont à débourser par ces familles.
    La détresse des parents d’enfants atteints par un cancer, un handicap ou une maladie grave impose de leur faciliter la vie et d’accélérer autant que possible leurs démarches administratives. Chacun d’entre nous connaît les complexités administratives et se représente à quel point elles peuvent se révéler éprouvantes dans de telles circonstances.
    Monsieur le rapporteur, vous connaissez les contraintes budgétaires et les difficultés légistiques soulevées par votre proposition de loi. Vous avez vous-même procédé à la réécriture de certains articles. Le gouvernement est ainsi favorable aux modifications de l’article 2 qui prévoit explicitement et de manière plus large le traitement par le juge d’une suspension du remboursement d’un crédit pour les parents ayant obtenu le droit à l’allocation journalière de présence parentale. Par accord de principe avec l’intention du texte, le gouvernement émettra un avis favorable ou de sagesse selon les dispositions adoptées.
    À l’article 3, il soumettra un amendement au vote des députés, afin que le texte corresponde à l’objectif visé sans créer d’effets pervers ni d’inégalités de traitement entre les familles en difficulté quant à la prise en charge des solutions d’hébergement par les établissements sanitaires.
    Un travail transversal doit aussi être mené avec mes collègues ministres des solidarités, du logement, de la santé et du budget. C’est nécessaire pour appliquer les dispositions prévues à l’article 1er sur l’accès au logement pour ces familles, ainsi que pour régler les questions relatives aux délais d’attribution de l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé. L’hétérogénéité des délais de traitement par les commissions des droits et de l’autonomie des personnes handicapées (CDAPH) est évidemment un problème. Il faut avant tout accompagner ces commissions dans l’amélioration de leurs procédures, dans l’objectif, précisément, de réduire ces délais.
    Enfin, je sais que les frais de stationnement à proximité des établissements font partie des restes à charge invisibles des patients et que des travaux doivent amener à une adaptation de ces dépenses pour les familles touchées.
    Par ailleurs, nous sommes conscients que l’allongement de la période au-delà de laquelle il est nécessaire de recourir à un certificat médical à l’échéance du nombre maximal de versements de l’allocation journalière de présence parentale de droit commun pourrait contribuer à simplifier l’utilisation de l’AJPP par les parents. Il en va de même pour l’adaptation de cette allocation pour les parents en garde alternée. Ainsi, nous sommes favorables aux rédactions proposées et élaborées avec vous, monsieur le rapporteur.
    Accompagner financièrement les parents qui s’occupent d’un enfant atteint d’un cancer, d’une maladie grave ou d’un handicap, est une proposition louable que le gouvernement soutiendra dans son principe,…

    M. Thibault Bazin

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    Très bien ! Encore une raison de ne pas le censurer !

    Mme Agnès Canayer, ministre déléguée

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    …mais qui exige encore un travail de fond pour renforcer les effets attendus.
    Nous devons, comme vous l’avez fait, nous rassembler au-delà des clivages partisans pour offrir davantage d’humanité face à l’épreuve la plus difficile qui soit pour un parent : la souffrance de son enfant, une épreuve que chaque parent peut être amené à vivre. Ce texte, nous le souhaitons, permettra, dans des circonstances difficiles, de ne pas alourdir le fardeau financier et administratif de ces familles. C’est là notre rôle. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et HOR, sur quelques bancs du groupe EPR et sur les bancs des commissions.)

    Discussion générale

    M. le président

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    Dans la discussion générale, la parole est à M. Sébastien Saint-Pasteur.

    M. Sébastien Saint-Pasteur

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    La période de turbulence, de tumultes, de chahuts, d’incertitudes que nous traversons nous fait parfois oublier le privilège immense dont nous disposons. Ce privilège, à la fois si simple et si précieux, ne s’accompagne pas forcément de désaccords, de confrontations, de débats houleux. Ce privilège est simplement celui de faire la loi, de pouvoir, en changeant un mot, une phrase, sinon changer la vie des gens, tout du moins avoir un effet positif sur elle.

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    Très bien !

    M. Sébastien Saint-Pasteur

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    Ce privilège nous oblige, il nous engage ; cette proposition de loi nous donne l’occasion d’en faire bon usage. Elle nous offre en effet la possibilité d’améliorer la situation des parents dont les enfants sont atteints d’un cancer, d’une maladie grave ou d’un handicap. Si son titre est volontairement englobant, voire ambitieux, cette proposition de loi vise à structurer des réponses aux cas les plus complexes affectant violemment la vie familiale.
    Environ 20 000 familles sollicitent l’allocation journalière de présence parentale destinée aux parents qui doivent arrêter de travailler pour s’occuper de leurs enfants. Vous le savez, le nombre réel de familles concernées est bien plus important si l’on considère l’ensemble des familles qui doivent moduler leur temps de travail – il s’agit principalement des femmes – pour s’occuper de leurs enfants pour cause de handicap ou de maladie, sans parler de celles qui ne sollicitent rien, problématique classique de l’accès aux droits. Ces familles demandent plusieurs évolutions que l’on peut résumer ainsi : l’effacement le plus important possible des contraintes administratives et financières qui éloignent de l’essentiel, à savoir être aux côtés de leurs enfants.
    Je sais que le rapporteur, avec qui nous avons dialogué de manière constructive et exigeante, y est attaché, comme, je pense, l’ensemble des collègues qui se sont exprimés sur le sujet en commission. Cette volonté commune s’inscrit également dans la continuité de l’action entreprise précédemment par Paul Christophe, qui avait défendu en 2020, puis en 2023, des avancées importantes. (M. le rapporteur applaudit.)
    Il faut le rappeler, car il s’agit, ici, d’une étape supplémentaire et non pas finale. La proposition de loi n’épuisera pas en effet les efforts que notre pays doit encore faire pour répondre aux besoins des familles percutées par l’annonce, pour leur enfant, d’un cancer, d’une leucémie, d’une maladie dégénérative, d’une paralysie cérébrale, d’un autisme sévère ou d’un accident grave. La liste n’est malheureusement pas exhaustive, et des progrès importants resteront à accomplir pour améliorer d’autres situations qu’il serait trop long d’énumérer ici, mais qui devront mobiliser notre attention et nos efforts dans les mois à venir.
    De nombreux parlementaires y sont d’ores et déjà prêts sur tous les bancs de cet hémicycle ; je salue particulièrement Sébastien Peytavie, qui s’est absenté, et j’en profite pour lui dire ma hâte que sa très belle proposition de loi sur le remboursement intégral des fauteuils roulants soit débattue et adoptée.
    Le groupe socialiste a travaillé en se référant à deux boussoles. D’abord, nous sommes guidés par l’humilité, car, quel que soit le niveau d’accompagnement, les aides qui soulagent les contraintes administratives et financières sont peu de chose au regard du poids des inquiétudes et des nuits blanches d’angoisse. Certains sur ses bancs l’ont vécu dans leur chair. Soulager le fardeau administratif ou financier n’est finalement que peu de chose face à la violence et à l’injustice de l’annonce d’une maladie grave.

    M. Thibault Bazin

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    C’est vrai !

    M. Sébastien Saint-Pasteur

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    Ensuite et surtout, nous visons l’utilité. La proposition de loi abordera des points techniques sur l’ouverture des droits, les délais, le logement, les transports et le crédit, en somme, la vie réelle et la façon dont elle peut être violemment percutée par l’annonce d’une maladie ou d’un handicap. Le choc de l’annonce, l’irruption de la maladie dans la vie d’une famille ne doit pas s’accompagner de démarches administratives trop lourdes et complexes. Chaque année, ce bouleversement fait basculer dans un nouveau monde, du jour au lendemain, des milliers de familles. Elles y entendent souvent pour la première fois les sigles AJPP, AEEH, CMI-S – pour la carte mobilité inclusion stationnement –, ou découvrent ce que recouvre le terme « complément ». C’est malheureusement dans cette forêt de sigles que nous devons chercher à cultiver les améliorations. Notre groupe agira donc de manière responsable.
    Plusieurs de nos amendements ont été adoptés dès le stade de l’examen en commission, et nous en proposerons dans cet hémicycle de nouveaux, qui sont largement attendus par les familles. Nous tâcherons ainsi de faire œuvre utile et de contribuer de manière humble, modeste, mais, je l’espère, réelle et effective, au progrès social, à la solidarité.
    Enfin, alors que nous avons été nombreux à participer aux manifestations organisées dans le cadre du Téléthon le week-end dernier, je souhaite terminer par une note positive. La recherche progresse et les prises en charge sont de plus en plus importantes. Je salue l’incroyable engagement des soignants, la solidarité de celles et ceux qui, dans les entreprises, donnent de leurs jours de congé, celle des entreprises elles-mêmes dont beaucoup soutiennent des salariés concernés, celle des militants dans le champ associatif qui aident les familles et récoltent des fonds pour la recherche, ainsi que la solidarité qui s’exerce au sein même de ces familles. Nous tâcherons d’être à la hauteur de leurs attentes et de nous montrer fidèles à leur engagement. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, DR et EcoS ainsi que sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sylvie Bonnet.

    Mme Sylvie Bonnet

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    Chacun imagine le bouleversement que représente, pour les parents et la famille dans son ensemble, l’annonce de la maladie ou du handicap d’un enfant. L’enfant malade a besoin d’une attention accrue et les autres enfants de la fratrie ont eux aussi besoin de stabilité et de disponibilité de la part de leurs parents. Ces derniers doivent assumer une multitude de rôles : parents, mais aussi soignants, taxis, accompagnateurs, experts administratifs, instituteurs, afin d’aider au mieux leurs enfants.
    Face à cette crise intimement bouleversante, faite d’angoisse et de fatigue, un grand nombre de parents sont obligés de réduire leur temps de travail ou d’interrompre leur activité professionnelle pour s’occuper à plein temps de leur enfant. D’autres continuent de travailler, mais souvent parce qu’ils sont dans la nécessité de garantir un revenu à leur famille plutôt que par choix.
    Le 15 novembre 2021, le Parlement a adopté une proposition de loi visant à améliorer les conditions de présence parentale auprès d’un enfant dont la pathologie nécessite un accompagnement soutenu. Cette loi a facilité le quotidien des familles en réformant le congé de présence parentale et l’allocation journalière de présence parentale, pour permettre aux parents d’interrompre leur activité professionnelle et de bénéficier d’une compensation de la perte de revenus associée. Si ce texte a constitué une indéniable avancée, beaucoup restait à faire pour mieux soutenir les familles pour qui l’accompagnement d’un enfant atteint de graves problèmes de santé ou en situation de handicap demeure un véritable parcours du combattant. C’est dans la continuité de ces travaux que notre ancien collègue Paul Christophe a fait adopter la loi du 19 juillet 2023.
    La proposition de loi que nous examinons vise à apporter des réponses concrètes aux familles dont l’enfant est victime d’une maladie grave, reconnue comme affection de longue durée (ALD), ou d’un accident de la vie, pour renforcer leur protection. Elle étend notamment l’aide apportée par la collectivité pour accéder à un logement décent et indépendant et suspend le remboursement d’un crédit en cas d’obtention de droit à l’allocation journalière de présence parentale.
    Avec l’augmentation des divorces, chacun des deux parents est parfois amené à s’occuper de manière continue d’un enfant handicapé ou gravement malade. Les modalités actuelles de versement de l’allocation journalière de présence parentale obligent les parents séparés à prendre des jours de congés payés, voire des congés sans solde. Il est donc important d’adapter le versement de l’allocation journalière de présence parentale aux cas des enfants en résidence alternée.
    La proposition de loi permet aussi aux établissements de santé de proposer des solutions d’hébergement aux parents à proximité de l’établissement de soins de l’enfant, ou encore d’appliquer un reste à charge zéro pour les enfants atteints de maladies graves.
    Cela peut sembler anecdotique, mais depuis que les parkings d’hôpitaux sont gérés par des opérateurs extérieurs, ils coûtent parfois très cher.

    M. Thibault Bazin

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    Elle a raison !

    Mme Sylvie Bonnet

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    Par exemple, pour dix heures de stationnement, il faut payer 14,80 euros au centre hospitalier universitaire (CHU) de Saint-Étienne, dans la Loire,…

    M. Thibault Bazin

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    C’est la même chose au CHU de Nancy !

    Mme Sylvie Bonnet

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    …et jusqu’à 50 euros à l’hôpital Lyon Sud. Bien évidemment, les parents d’enfants malades ne peuvent pas les laisser au dépose-minute pour se garer plus loin. C’est pourquoi il est urgent de leur accorder la gratuité du stationnement sur les parkings des établissements de santé. Ces dispositions sont certes coûteuses pour les finances publiques, mais c’est à l’État de renforcer la législation pour soutenir et accompagner les milliers de parents concernés en France, car la détresse de ces familles nous oblige.
    L’action des structures associatives est remarquable et indispensable ; le dévouement des personnels qui accompagnent les enfants est admirable ; mais ils n’ont pas la puissance ou les moyens de se substituer à l’État.
    Les députés du groupe Droite républicaine ont toujours soutenu les mesures de solidarité pour les familles confrontées à la maladie ou au handicap.

    M. Thibault Bazin

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    C’est bien vrai !

    Mme Sylvie Bonnet

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    Nous voterons donc pour ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR ainsi que sur les bancs des commissions.)

    M. Thibault Bazin

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    Excellent !

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandrine Rousseau.

    Mme Sandrine Rousseau

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    Les difficultés croissantes rencontrées par les familles d’enfants gravement malades sont nombreuses. Il y a les soins supplémentaires non pris en charge et financés par les familles, qui sont pourtant des soins d’accompagnement rendant la vie plus douce. Il y a ce dossier qu’il faut encore remplir et ces papiers à compléter, en attendant cette aide qui ne vient pas. Alors, on s’adapte – toute la famille s’adapte.
    De toute façon, tout tourne désormais autour de cela : quand un enfant est malade, c’est l’ensemble de la famille qui se met en mode survie et qui consacre son énergie, ses moyens et tout son temps au soutien de cet enfant. Parfois, cette famille est monoparentale, ce qui rend tout plus complexe encore. Entre les autres enfants et les rendez-vous de partout, c’est beaucoup d’organisation, de stress et d’angoisse. Il y a ces congés sans solde qui rendent tout plus compliqué, mais, bien sûr, tenir la main de son enfant malade, c’est tellement important.
    En collaboration étroite avec les associations de familles, cette proposition de loi transpartisane tente de répondre à ce problème. Pour cela, quelques mesures très concrètes sont proposées : des expérimentations pour accélérer l’obtention des aides, de meilleures garanties pour le maintien dans le logement, un soutien à l’hébergement des parents d’enfants hospitalisés et un reste à charge nul pour la prise en charge des séances avec un ergothérapeute, un psychomotricien ou un psychologue. Beaucoup pourraient se demander si tout cela n’est pas déjà en place, tant ces mesures semblent évidentes et les situations rencontrées sur le terrain inconcevables. Par exemple, comment imaginer qu’on ne propose pas d’hébergement aux parents d’un enfant malade à proximité de l’hôpital où ce dernier est traité ?
    Plusieurs amendements de mes collègues du Nouveau Front populaire sont de nature à enrichir le texte : opposition aux expulsions locatives, extension des dispositifs et prolongation de la durée des congés après l’annonce d’un handicap ou d’une pathologie chronique chez un enfant. Toutefois, ce texte ne pouvant pas répondre à l’ensemble des problèmes rencontrés, interrogeons-nous aussi sur le système de santé que nous souhaitons promouvoir, car la précarisation et l’affaiblissement de l’offre de soins ont des conséquences très concrètes pour ces enfants et leurs proches. Certains territoires manquent cruellement de structures de soins, de médecins et de pharmaciens, obligeant les familles à parcourir de nombreux kilomètres pour faire soigner leur enfant.
    Cette situation est le résultat de choix politiques et budgétaires. Je rappelle qu’à plusieurs reprises, nombre d’entre vous se sont opposés à des propositions visant, par exemple, à rembourser les frais de déplacement des parents des enfants ultramarins devant être hospitalisés dans l’Hexagone, faute d’infrastructures de santé sur leur lieu de vie.
    Enfin, nous devons nous pencher sur la prévention et insister sur l’importance de la santé environnementale. En Bretagne, à Saint-Rogatien en Charente-Maritime ou dans les territoires ultramarins, les scientifiques nous alertent sur les liens entre les maladies pédiatriques graves et l’exposition à certaines substances, notamment aux pesticides. Il est crucial d’accroître massivement les moyens alloués à la recherche et de réduire drastiquement l’exposition aux pesticides, aux substances polyfluoroalkylées ou perfluoroalkylées (PFAS) et autres perturbateurs endocriniens qui menacent notre santé.
    À ce titre, la cohérence doit guider nos votes. Nous ne pouvons pas voter cette proposition de loi et voter contre les mesures de prise en compte de la santé environnementale dans le budget de financement de la sécurité sociale. Nous ne pouvons pas voter cette proposition de loi et voter contre l’interdiction des pesticides ou, pire encore, voter pour leur épandage aérien par drone. Nous ne pouvons pas voter la proposition de loi et voter contre l’interdiction des PFAS et autres perturbateurs endocriniens, et contre le financement de notre système de santé à la hauteur des besoins.

    M. Thibault Bazin

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    Si, on peut voter !

    Mme Sandrine Rousseau

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    En attendant, nous, nous voterons cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et SOC.)

    M. Vincent Thiébaut, rapporteur

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    Ah, ouf !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    Très bien !

    M. le président

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    La parole est à Mme Delphine Lingemann.

    Mme Delphine Lingemann

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    Je suis très honorée de m’exprimer au nom du groupe Les Démocrates sur la proposition de loi visant à optimiser la protection et l’accompagnement des parents d’enfants atteints de cancers, de maladies graves et de handicaps. En France, chaque année, plusieurs milliers d’enfants et d’adolescents sont touchés par des maladies graves telles que le cancer ou par un handicap majeur. En septembre, mobilisée sur le sujet, j’ai eu l’honneur de signer, au côté de mes collègues Vincent Thiébaut, Michel Lauzzana et Sandrine Josso, une tribune appelant à une mobilisation pour améliorer la prise en charge des cancers pédiatriques.
    Avec la fédération Grandir sans cancer, nous avons travaillé à un amendement au projet de loi de finances pour 2025, visant à augmenter les crédits en faveur de la recherche clinique sur les cancers pédiatriques. Les chiffres sont éloquents : les enfants de moins de 12 ans représentent 14 % de la population française, mais seulement 5 % des dépenses d’assurance maladie leur sont consacrées.
    Au-delà de la prise en charge médicale de ces maladies pédiatriques et du handicap des enfants, il est essentiel de mieux accompagner les familles. La situation douloureuse vécue par ces dernières est souvent aggravée par des complexités administratives et une diminution significative de leurs ressources financières. Cette situation est profondément injuste : prendre soin de ses proches, en particulier de ses enfants, ne devrait jamais être synonyme de sacrifice. Le groupe Les Démocrates soutient ainsi les avancées substantielles contenues dans cette proposition de loi, qui vise à alléger les contraintes pesant sur des familles déjà éprouvées.
    Ces contraintes sont d’abord normatives. À ce titre, il est indispensable de simplifier leur vie administrative, afin qu’elles puissent se concentrer sur le bien-être de leurs enfants, sans être accablées par les formalités. La proposition de loi s’y emploie en permettant plusieurs avancées. D’abord, avec la simplification des procédures d’hébergement temporaire non médicalisé, à proximité de l’établissement de soins de l’enfant, lorsque l’éloignement et la durée de l’hospitalisation le justifient. Ensuite, avec l’allongement de la durée des congés pour les événements familiaux graves, ainsi que du congé de présence parentale.
    Les contraintes pesant sur les familles sont également d’ordre financier. En effet, ces dernières subissent souvent des baisses de ressources substantielles, les parents étant contraints de réduire, voire d’arrêter leur activité professionnelle.
    D’une part, les dispositions prévues dans le texte faciliteront l’accès aux dispositifs de soutien. De trop nombreuses familles rencontrent des difficultés pour bénéficier des aides auxquelles elles ont pourtant droit. Les modifications apportées aux règles de renouvellement de l’AJPP et la prolongation de sa durée éviteront aux parents un inutile stress administratif. L’expérimentation visant à réduire les délais de traitement des demandes d’AEEH permettra aussi aux familles d’obtenir une réponse plus rapide.
    D’autre part, l’exonération – sous conditions de revenus – de la taxe foncière pour ces parents, la gratuité du stationnement dans les établissements de santé ou la prise en charge des soins psychologiques sont des dispositifs de soutien bienvenus.
    Enfin, je salue la prise en compte des difficultés spécifiques rencontrées par les conjoints séparés et les familles monoparentales.
    Il est de notre responsabilité collective de veiller à ce que toutes ces familles, déjà éprouvées, bénéficient d’un soutien de l’État à la hauteur de chacune de ces situations. Assurément, un tel sujet mérite la mobilisation la plus large de tous les acteurs. En premier lieu, une mobilisation des acteurs politiques, à commencer par le législateur : l’adoption à la quasi-unanimité de ce texte en commission montre bien qu’il est toujours possible de trouver des majorités transpartisanes quand l’intérêt général est en jeu. En second lieu, une mobilisation des professionnels de santé et des associations. À cet égard, je tiens à saluer les associations de parents – comme Eva pour la vie et la fédération Grandir sans cancer – qui ont joué un rôle crucial dans l’élaboration de cette proposition de loi, mais aussi l’ensemble des chercheurs, des médecins, des soignants, des assistantes sociales et des professionnels pour leur apport.
    Comme le disait Winston Churchill, « l’un des problèmes de notre société aujourd’hui, c’est que les gens ne veulent pas être utiles, mais importants ». L’essence même de notre engagement, c’est pourtant bien cela : être utile aux autres et améliorer leur quotidien. C’est pourquoi le groupe Démocrates votera pour ce texte empreint d’humanité, qui est une étape supplémentaire pour mieux protéger nos enfants et mieux accompagner leurs parents. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et EPR, ainsi que sur les bancs des commissions. – Mme Sandrine Rousseau applaudit également.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Nathalie Colin-Oesterlé.

    Mme Nathalie Colin-Oesterlé

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    Le groupe Horizons & indépendants tient à saluer l’examen en séance publique de cette proposition de loi, défendue et rapportée par notre collègue Vincent Thiébaut. Soutenu unanimement en commission le 27 novembre dernier, ce texte traduit une ambition noble et essentielle : celle de ne laisser aucune famille à l’abandon lorsqu’elle est confrontée à l’épreuve terrible de la maladie ou du handicap d’un enfant.
    Élaborée dans un esprit transpartisan, cette proposition de loi incarne ce que l’action publique peut offrir de meilleur : une réponse concrète et humaine aux souffrances des familles. Les mesures proposées ne relèvent pas simplement de l’amélioration technique de notre système social, mais elles sont un acte de dignité et un message d’espoir envoyé aux milliers de parents qui, chaque jour, affrontent l’impensable.
    Ce texte apporte des réponses immédiates aux besoins concrets des familles. L’article 1er garantit qu’elles puissent accéder à un logement décent et indépendant, condition souvent vitale pour ces parents déjà accablés par le poids de la maladie de leur enfant. L’article 2 suspend temporairement les crédits contractés par les parents bénéficiant de l’allocation journalière de présence parentale. L’article 3 prévoit une solution d’hébergement proche des établissements de soins, parce que l’éloignement géographique ne doit jamais devenir un obstacle au soutien parental. L’article 4 tend à réduire les délais pour l’obtention d’allocations spécifiques. L’article 5 porte à quatorze mois la durée maximale de l’allocation journalière de présence parentale, évitant ainsi aux parents de devoir réitérer des démarches administratives épuisantes en pleine période de crise familiale.
    Ce texte ne se contente pas d’agir sur le court terme, car il apporte une vision. Il ne se réduit pas à une série de mesures ; il est un acte politique fort. Quand une famille affronte le cancer, la maladie ou le handicap d’un enfant, elle traverse l’une des épreuves les plus terribles de l’existence. En votant cette loi, nous disons à ces parents : « Vous n’êtes pas seuls. La République est là. Elle vous soutient. » Nous disons aussi que l’épreuve de la maladie ne doit jamais se doubler d’une autre peine – financière, administrative ou logistique. En allégeant les charges des parents et en simplifiant leurs démarches, ce texte leur permet de se consacrer à l’essentiel : l’accompagnement et l’amour de leur enfant.
    Nous avons l’occasion d’envoyer un message clair : celui d’une république solidaire, qui protège. En adoptant ce texte, nous affirmons que la maladie ou le handicap d’un enfant ne peuvent ni ne doivent jamais être vécus dans la solitude et l’abandon. Notre groupe votera bien sûr en faveur de cette proposition de loi, parce que c’est notre devoir, notre honneur et l’essence même de la République : porter la justice, la solidarité et l’espoir. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR, sur quelques bancs du groupe EPR et sur les bancs des commissions.)

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    Très bien !

    M. le président

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    La parole est à M. Laurent Panifous.

    M. Laurent Panifous

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    Les enfants atteints d’une maladie grave, d’un handicap ou victimes d’un accident ont besoin de la présence de leurs parents pour traverser un traitement lourd, une prise en charge ou des soins continus. Cette présence est indispensable, mais un tel engagement est aussi extrêmement exigeant sur tous les plans. Pour les parents, la conciliation de la vie professionnelle et de la vie personnelle devient presque impossible, alors que s’ajoutent les contraintes matérielles et financières.
    Ces difficultés supposent un effort de solidarité nationale, qui demeure insuffisant, envers les parents et, plus largement, envers les 8 à 11 millions de proches aidants. Les dispositifs existants, comme l’allocation journalière de présence parentale ou l’allocation d’éducation de l’enfant handicapé, permettent de surmonter certaines de ces difficultés et de passer du temps auprès de l’enfant, tout en compensant, pour partie, la perte de revenus occasionnée. Ces dispositifs sont essentiels, mais ils ne suffisent pas dans de nombreuses situations, en particulier si le besoin d’être auprès de l’enfant perdure ou est très important.
    Des améliorations ont déjà pu être adoptées grâce aux deux lois portées par notre ancien collègue Paul Christophe. La présente proposition de loi souhaite aller plus loin. Il serait peut-être opportun de renforcer la communication auprès des dispositifs existants et d’assouplir les procédures, qui nuisent encore trop souvent aux familles qui n’osent pas – ou ne peuvent pas – faire leurs demandes d’allocation.
    Notre ancienne collègue Béatrice Descamps avait déposé un texte similaire au cours de la précédente législature, avec une ambition forte, notamment en matière d’accès au logement, de protection contre les licenciements et de recouvrement des créances. Nous aurions souhaité pouvoir intégrer certaines de ces mesures au texte, mais nous regrettons de ne pouvoir le faire sous peine d’irrecevabilité financière.
    Notre groupe insiste également sur le cas des familles ultramarines ou corses, qui souvent doivent s’établir sur le continent, interrompre leur activité et faire face à des frais considérables que les mécanismes d’aide ne suffisent pas à couvrir. En 2023, nous avions fait adopter en première lecture la proposition de loi visant à renforcer le principe de la continuité territoriale en outre-mer, qui prévoyait notamment la possibilité d’un cumul ; mais un dispositif ad hoc pourrait aussi être créé à l’intention de ces familles car la double peine qu’elles subissent n’est pas acceptable.
    En revanche, nous avons milité pour la suppression de l’exonération de taxe foncière initialement prévue. D’une part, elle ne profiterait, sans limitation de durée ni condition de ressources, qu’aux familles propriétaires de leur bien ; d’autre part, instaurer des exceptions dans ce domaine nuit aux ressources des collectivités territoriales. Notre soutien doit être bien ciblé sur les besoins des parents et des enfants, ce qui suppose de trouver des dispositifs adaptés. Je pense en priorité à l’accès rapide au logement, aux aides financières, à la facilitation des démarches administratives, à l’allongement des congés de présence parentale et de proche aidant.
    Notre groupe soutiendra bien entendu cette proposition de loi ; reste que la réflexion sur le statut de l’aidant devrait être plus globale et lui assurer une véritable protection – au lieu de cela, nous ne faisons, texte après texte, que modifier à la marge des dispositifs existants. Par ailleurs, dans un grand nombre de cas, la présence des parents est rendue nécessaire par un défaut de prise en charge ou d’accompagnement directement lié aux carences de notre système de santé : c’est également sur ce plan que nous devons agir afin de soutenir ces enfants et leur famille. (M. le président de la commission des affaires sociales applaudit.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sophie Ricourt Vaginay.

    Mme Sophie Ricourt Vaginay

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    La proposition de loi que nous examinons revêt une importance particulière, car elle concerne les enfants les plus fragiles de notre société, ceux atteints de cancers, de maladies graves ou de handicaps. Leur courage force notre admiration, mais nous rappelle aussi notre devoir : agir pour alléger autant que possible les épreuves que traversent ces familles. Ce texte transpartisan prouve que lorsqu’il s’agit de protéger les plus vulnérables, nos divergences politiques s’effacent devant l’urgence de l’action. Ce texte est essentiel pour surmonter des obstacles concrets et injustes car les familles doivent non seulement affronter l’angoisse liée à la maladie de leur enfant mais aussi des difficultés administratives, financières et logistiques qui aggravent une situation déjà insoutenable. En proposant des mesures pragmatiques et adaptées et en traduisant le vécu des familles en solutions concrètes, le texte leur offre une bouffée d’oxygène.
    Il nous incombe d’examiner avec attention, responsabilité et humanité ses principales dispositions. L’article 1er tend à étendre l’aide au logement à celles de ces familles qui sont en difficulté : nous soutiendrons cette mesure, dans une logique d’équité sociale, tout en émettant des réserves au sujet du nouvel article 1er bis – lequel prévoit l’interdiction de toute expulsion locative – surtout lorsque le propriétaire est un particulier. Si cette mesure obéit à une intention louable, elle crée un déséquilibre injuste en faisant porter la charge d’enjeux de santé publique sur des citoyens qui sont personnes privées.
    L’article 2 concerne la suspension des mensualités de crédit pour les bénéficiaires de l’AJPP : il s’agit là d’une mesure pragmatique. L’article 3, visant à garantir aux parents un hébergement proche de l’établissement de soins, remédiera à un problème logistique essentiel ; destiné à s’appliquer sans délai administratif inutile, ce dispositif constitue une avancée de bon sens, que nous soutenons sans réserve. L’article 4 inversera la logique administrative en matière d’attribution de l’AEEH : désormais, le silence de la CDAPH au bout de deux mois vaudra accord, simplification bienvenue pour des familles souvent épuisées par leurs démarches.
    L’article 5, en mettant la durée maximale de l’AJPP en harmonie avec la réalité des traitements, et l’article 6, en adaptant cette allocation aux cas de garde alternée, apportent des solutions justes et adaptées : là encore, nous les soutiendrons. Nous approuvons aussi la gratuité des parkings hospitaliers, prévue par l’article 8, et l’absence de reste à charge pour les soins.
    Les enfants malades et leur famille méritent notre soutien inconditionnel. Cette proposition de loi répondra à leurs besoins dans un souci de justice et de solidarité ; la soutenir, c’est affirmer que notre société ne laisse personne de côté, et certainement pas ses membres les plus vulnérables. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à Mme Sandrine Dogor-Such.

    Mme Sandrine Dogor-Such

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    Cette proposition de loi traite d’un sujet douloureux : l’accompagnement de la famille des enfants victimes d’une maladie grave ou d’un handicap. Élaborée avec l’association Eva pour la vie et la fédération Grandir sans cancer, elle vise à franchir une nouvelle étape dans l’optimisation de cet accompagnement en tenant compte des difficultés rencontrées au quotidien.
    Le groupe Rassemblement national tient néanmoins à souligner que, si cette proposition de loi a été cosignée par plus de 140 députés de divers horizons, si elle est le fruit d’un large travail collaboratif, elle aurait gagné à inclure dans sa phase d’élaboration des députés siégeant sur tous les bancs. Il est dommage que l’universalité de la cause n’ait pas transcendé tous les clivages ni exclu tout sectarisme, comme l’aurait réclamé un sens profond de l’intérêt commun. Notre groupe a en effet été tenu entièrement à l’écart de l’élaboration d’un texte sur lequel nous avions envie de travailler et auquel nous aurions souhaité être associés.
    Chaque année, des milliers d’enfants sont touchés par une maladie majeure ou par un grave accident de la vie, nécessitant des soins importants, des hospitalisations. L’annonce du diagnostic constitue toujours pour leur famille un moment extrêmement douloureux : en un instant, l’existence bascule. Il faut comprendre cette nouvelle donne, apprendre à la gérer ; les adultes doivent se rendre totalement disponibles durant parfois des semaines, des mois, des années, non seulement en vue du suivi de la maladie, mais pour rassurer, consoler leur enfant. Cela implique des choix, des sacrifices, car l’accompagnement reste malheureusement très incomplet et inadapté à la complexité des situations vécues.
    La proposition de loi vise à pallier certains de ces problèmes : lourdeurs administratives, baisse substantielle des ressources, difficulté à concilier vie professionnelle et vie personnelle. Il s’agit entre autres de faciliter l’accès des parents à un logement décent et indépendant, mais aussi à un hébergement pris en charge lorsque l’éloignement de l’hôpital est important. Ainsi l’hôtel hospitalier, mis par les établissements de santé à la disposition des patients dont l’état ne nécessite pas une hospitalisation complète, leur sera-t-il ouvert : il faudra pour cela un accord tacite de l’agence régionale de santé, et que la durée de la prestation soit fixée en fonction de celle de l’hospitalisation de l’enfant.
    Un autre point peut susciter de nombreuses difficultés : le remboursement d’un crédit à la consommation, voire d’un crédit immobilier – dont les mensualités s’élèvent en moyenne à 1 000 euros, avec de fortes disparités territoriales. Dans certains cas particuliers, comme un licenciement, la loi prévoit la possibilité, sur décision du juge, de suspendre ces versements, sans majoration ni pénalité de retard, durant un délai de grâce pouvant aller jusqu’à deux ans : la proposition de loi prévoit d’étendre ces dispositions aux bénéficiaires de l’AJPP.
    Il s’agit ensuite de résoudre le problème de l’accès aux parcs de stationnement des hôpitaux. De plus en plus d’établissements rendent payants leurs parkings, confiés à des sociétés privées avec qui ils partagent les bénéfices à égalité, la principale raison avancée étant d’éviter l’engorgement qui résulte de stationnements abusifs. Nombre de patients et d’accompagnants se plaignent de ces frais supplémentaires. La proposition de loi tend à ce que le stationnement des personnes ayant la charge d’un enfant malade ou handicapé soit gratuit pendant toute la durée de son hospitalisation de celui-ci.
    L’objectif de ce texte, consistant à soulager et soutenir les parents en simplifiant et en améliorant leur quotidien, est très louable, et nous sommes favorables à la majorité des mesures : il est urgent d’apporter des réponses concrètes, opérationnelles, à ceux de nos concitoyens qui vivent une telle situation. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. le président

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    La parole est à M. Michel Lauzzana.

    M. Michel Lauzzana

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    Lorsque la maladie ou le handicap touche un enfant, au-delà du drame qui bouleverse toute la famille, ses parents sont en première ligne pour l’accompagner. Depuis 2017, le Parlement s’est largement mobilisé, de manière transpartisane, sur deux fronts consistant, d’une part, à renforcer la recherche et la prise en charge des maladies infantiles, notamment des cancers – d’où le projet de centres de recherche intégrée d’excellence en cancérologie pédiatrique, destinés à développer des traitements pour des cancers aujourd’hui sans solution thérapeutique –, et, d’autre part, à mieux accompagner les familles. Je pense en la matière à la réforme du congé de présence parentale et de l’AJPP, à l’expérimentation du baluchonnage, dispositif qui offre aux aidants un répit précieux, soutenue et prolongée par le groupe Ensemble pour la République.
    Ces avancées sont essentielles, mais il reste encore beaucoup à accomplir en vue de simplifier les démarches administratives et d’alléger les contraintes financières pesant sur ces familles. C’est pourquoi notre groupe salue, monsieur le rapporteur, votre proposition de loi, laquelle vise à répondre à des besoins concrets, identifiés par les acteurs de terrain. Je tiens d’ailleurs à saluer également, depuis cette tribune, les collectifs et associations dont l’engagement est essentiel aux côtés des enfants malades, de leur famille, mais aussi pour collecter des fonds et faire progresser la recherche.
    Parmi les mesures contenues dans ce texte, j’insisterai sur l’alignement de la durée annuelle du versement de l’AJPP sur celle prévisible du traitement de l’enfant, l’application du reste à charge zéro pour celui-ci, la gratuité du stationnement sur le parking de l’hôpital pour les familles concernées.
    La proposition de loi ouvre en outre un débat concernant des enjeux sociétaux, notamment les modalités de service des prestations sociales aux parents séparés ou divorcés, en cas de garde alternée. Nous devrons amorcer sur ce point une réflexion plus globale, structurelle, et proposer, là encore, des solutions concrètes. Plus largement, notre groupe appelle à améliorer la connaissance des dispositifs d’aide, ainsi qu’à assouplir les procédures administratives, qui restent trop souvent un frein pour les familles, dissuadées ou incapables de solliciter les allocations auxquelles elles ont droit ; il faudra tous nous y atteler.
    Nous espérons que ce texte nécessaire sera adopté à l’unanimité par l’Assemblée nationale avant de poursuivre son chemin au Sénat. Le groupe Ensemble pour la République le votera, et restera pleinement mobilisé en vue d’engager ou de soutenir toutes les initiatives possibles afin d’améliorer l’accompagnement de la famille des enfants malades. (M. le rapporteur et Mme Constance Le Grip applaudissent.)

    M. le président

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    5. Ordre du jour de la prochaine séance

    M. le président

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    Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
    Suite de la discussion de la proposition de loi visant à optimiser la protection et l’accompagnement des parents d’enfants atteints de cancers, de maladies graves et de handicaps ;
    Discussion de la proposition de loi sur le remboursement intégral des fauteuils roulants par l’assurance maladie ;
    Discussion de la proposition de loi visant à prévenir les litiges relatifs aux obligations de décence énergétique et à sécuriser leur application en copropriété.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à vingt heures.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra