Deuxième séance du vendredi 27 juin 2025
- Présidence de M. Roland Lescure
- 1. Programmation pour la refondation de Mayotte
- Discussion des articles (suite)
- Article 25 (appelé par priorité)
- Article 30 (appelé par priorité)
- Amendement no 503
- Mme Estelle Youssouffa, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République pour les titres V et VI
- M. Manuel Valls, ministre d’État, ministre des outre-mer
- Amendements nos 504 et 690
- Sous-amendement no 723
- Amendements nos 722, 659, 205 et 364
- M. Philippe Vigier, rapporteur général de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République
- Amendements nos 508, 509, 209, 392, 402, 501, 667, 666, 656, 512 et 657
- Article 31 (appelé par priorité)
- Article 32 (appelé par priorité)
- Article 33 (appelé par priorité)
- Article 34 (appelé par priorité)
- Avant l’article 14
- Article 14
- Article 15
- Suspension et reprise de la séance
- M. Antoine Léaument
- Mme Estelle Youssouffa
- M. Davy Rimane
- Amendements nos 104, 105
- Rappel au règlement
- Article 15 (suite)
- Suspension et reprise de la séance
- Après l’article 15
- Amendements nos 336 deuxième rectification, 471 deuxième rectification, 615 deuxième rectification, 335, 470, 556, 660 rectifié, 567 rectifié, 107 et 106
- Article 15 bis
- Amendements nos 433 rectifié, 151, 353, 154, 152 et 554
- Article 16
- Amendements nos 289, 411
- Article 17
- Amendement no 575
- Après l’article 17
- Article 17 bis A
- Amendement no 569
- Article 17 bis
- Article 18
- Article 26
- Amendement no 74
- Rappels au règlement
- Article 26 (suite)
- Article 27
- Article 28
- M. Elie Califer
- Amendements nos 450, 568, 202 et 588
- Rappel au règlement
- Suspension et reprise de la séance
- Rappel au règlement
- Article 28 (suite)
- Amendement no 199
- Article 29
- Articles 35 à 41
- Après l’article 41
- Article 1er et rapport annexé (précédemment réservés)
- Rappel au règlement
- Article 1er et rapport annexé (précédemment réservés - suite)
- Mme Anchya Bamana
- Mme Aurélie Trouvé
- Amendements nos 96, 358 deuxième rectification, 524 deuxième rectification, 623 deuxième rectification, 223, 474, 645 et 525
- Mme Agnès Firmin Le Bodo, suppléant M. Florent Boudié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République
- Amendements nos 228, 414, 230, 416, 475, 476 et 459
- Sous-amendement no 737
- Amendements nos 22, 415, 241, 23, 417, 478, 17, 665, 664, 390, 460, 243, 247, 352, 249, 362, 479, 258, 480, 24, 327, 25, 18, 229, 481, 26, 27, 28 et 20
- Discussion des articles (suite)
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de M. Roland Lescure
vice-président
M. le président
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Programmation pour la refondation de Mayotte
Suite de la discussion d’un projet de loi
M. le président
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte (nos 1470, 1573).
Discussion des articles (suite)
M. le président
Ce matin, l’Assemblée a poursuivi la discussion des articles du projet de loi, s’arrêtant à l’article 25.
Article 25 (appelé par priorité)
(L’article 25 est adopté.)
Article 30 (appelé par priorité)
M. le président
La parole est à Mme Estelle Youssouffa, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République pour les titres V et VI, pour soutenir l’amendement no 503.
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République pour les titres V et VI
Nous proposons de reprendre la formulation de l’article L. 7152-1 du code général des collectivités territoriales pour la collectivité de Guyane. En effet, cet article précise explicitement que l’assemblée de Guyane est saisie pour avis, par le préfet, au sujet des orientations générales de la programmation des aides de l’État au logement, après avis donné par le conseil territorial. Il nous semble important que la nouvelle assemblée de Mayotte puisse s’exprimer sur la programmation des aides de l’État en faveur de l’habitat, compte tenu des enjeux actuels de la reconstruction.
M. le président
Sur les amendements nos 503 et 504, je suis saisi par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. le ministre d’État, ministre des outre-mer, pour donner l’avis du gouvernement.
M. Manuel Valls, ministre d’État, ministre des outre-mer
Avis favorable.
M. le président
Puis-je mettre aux voix l’amendement no 503 ? (Assentiment.)
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 23
Nombre de suffrages exprimés 21
Majorité absolue 11
Pour l’adoption 21
Contre 0
(L’amendement no 503 est adopté.)
M. le président
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 504.
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Il vise à supprimer l’alinéa 78 selon lequel le département-région de Mayotte « fait partie de la République et ne peut cesser d’y appartenir sans le consentement de sa population ». Cette disposition n’existe pour aucune collectivité d’outre-mer et pour aucun département de l’Hexagone. Il s’agit donc d’harmoniser les dispositions relatives à Mayotte pour les rapprocher autant que possible du droit commun.
Je n’ignore pas le sous-texte de cet alinéa, qui renvoie en réalité à une revendication comorienne. Néanmoins, cette disposition ouvrirait la porte à une énième demande de référendum à Mayotte, à laquelle nous ne souhaitons pas faire droit.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Favorable.
M. le président
Avec votre accord, je mets aux voix l’amendement no 504.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 26
Nombre de suffrages exprimés 26
Majorité absolue 14
Pour l’adoption 26
Contre 0
(L’amendement no 504 est adopté.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements, nos 690 et 722, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. le ministre d’État, pour soutenir l’amendement no 690 du gouvernement, qui fait l’objet d’un sous-amendement de Mme la rapporteure.
M. Manuel Valls, ministre d’État
L’enjeu de cet amendement est de préserver, pour Mayotte, la lisibilité et le caractère opérationnel du code général des collectivités territoriales. Vous le savez, l’ordonnance relative au compte financier unique publiée le 12 juin 2025 a eu pour effet de créer, en première partie de ce code, des dispositions de portée générale. Dès lors que celles-ci s’appliquent à Mayotte, il n’y avait pas lieu qu’elles figurent dans le livre dédié à Mayotte créé par l’article 30, d’autant que la rédaction initiale était ancienne, parfois inadaptée, voire caduque.
La rédaction proposée respecte l’esprit de la rédaction initiale en inscrivant, dans le livre dédié à Mayotte, l’ensemble des dispositions budgétaires et comptables qui lui sont spécifiques. Chacun d’entre vous, je pense, comprend le sens de cet amendement du gouvernement.
M. le président
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir le sous-amendement no 723.
Je vous invite à soutenir également l’amendement no 722, chère collègue, mais aussi à donner l’avis de la commission sur l’amendement no 690.
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Le gouvernement propose de supprimer la moitié de l’article 30, pourtant introduit par ses soins en commission au Sénat. Si j’entends la nécessité d’adapter le texte aux nouvelles exigences introduites par l’ordonnance du 12 juin 2025, notamment au compte financier unique, l’amendement conduirait à ne faire figurer dans l’article que les exceptions, plutôt que l’ensemble des dispositions qui s’appliquent à la collectivité de Mayotte, ce qui pose à mon sens un problème de lisibilité.
J’ai proposé une première solution – je suis une femme de compromis, c’est ma grande qualité ! – avec l’amendement no 722, qui prend en compte l’ordonnance sans supprimer la moitié de l’article 30. En guise de repli, j’ai également déposé un sous-amendement pour limiter les suppressions proposées par le Gouvernement.
Mon avis sur l’amendement du gouvernement est défavorable, sauf si mon sous-amendement est adopté.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement sur le sous-amendement no 723 et l’amendement no 722 ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Madame la rapporteure, votre sens du compromis ne m’a pas échappé, mais sur ce sujet, nous aurons exceptionnellement un désaccord profond et frontal. Votre amendement a pour objet de tirer les conséquences de la publication, le 12 juin dernier, de l’ordonnance relative à la génération du compte financier unique en actualisant les dispositions financières applicables à la collectivité de Mayotte prévues à l’article 30 du projet de loi : sur ce sujet très technique, votre amendement vise donc le même objectif que l’amendement no 690 du gouvernement. Ce dernier a toutefois ma préférence – cela arrive parfois – en ce sens qu’il renvoie plus systématiquement aux dispositions financières du code général des collectivités territoriales et ne conserve de la septième partie que les dispositions propres à la collectivité de Mayotte, dans le livre qui lui est dédié.
C’est la logique retenue à l’article 30 du projet de loi afin de prendre en compte les spécificités de Mayotte, comme pour la Guyane et la Martinique, et cela facilitera, dans le temps, la mise à jour de ces dispositions applicables dans un souci de simplification et de lisibilité des dispositions budgétaires et comptables. Ainsi, pour l’exercice budgétaire 2025, Mayotte continuera d’appliquer le régime budgétaire et comptable des métropoles, la collectivité ayant choisi, par droit d’option, de mettre en œuvre le référentiel M57, que tous les responsables de collectivité connaissent bien, et le compte financier unique. Pour l’exercice budgétaire 2026, Mayotte appliquera le régime général figurant en première partie du code général des collectivités territoriales tout en conservant ses dispositions spécifiques.
Dans ces conditions, madame la rapporteure, je vous propose de retirer votre amendement au profit de l’amendement no 690 du gouvernement.
(Le sous-amendement no 723 n’est pas adopté.)
(L’amendement no 690 est adopté ; en conséquence, l’amendement no 722 tombe.)
M. le président
La parole est à M. le ministre d’État, pour soutenir l’amendement no 659.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Le plan d’aménagement et de développement durable, adopté en 2008, n’a pas vocation à être révisé et doit être remplacé par un schéma d’aménagement régional (SAR). Il se trouve que la procédure d’évolution du schéma prévoit l’association d’une commission d’élaboration du schéma d’aménagement régional (Cesar), dont la composition comprend des membres de droit – représentant de l’État, établissements publics et communes compétents en matière d’urbanisme, établissement foncier, chambres consulaires – et des membres associés sur demande des intéressés – agences d’urbanisme, organisations professionnelles, associations agréées de protection de l’environnement.
À ce titre, le conseil scientifique du patrimoine naturel (CSPN) de Mayotte, ainsi que les naturalistes et les gestionnaires d’aires protégées, peuvent d’ores et déjà solliciter leur intégration à la Cesar. Par ailleurs, le CSPN peut être saisi pour avis par le préfet ou le président de l’exécutif local sur toute question relative à l’inventaire et à la conservation du patrimoine naturel.
Voilà donc un amendement sur la Cesar, mais il n’y a pas de Brutus !
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Vous voulez revenir sur un amendement adopté par la commission prévoyant l’association du conseil scientifique du patrimoine naturel de Mayotte à l’élaboration du plan d’aménagement et de développement durable. Vous estimez que son objectif est satisfait dès lors que ce conseil a la possibilité de demander son intégration, mais la rédaction adoptée par la commission va plus loin puisqu’il s’agit de garantir sa participation, et non de l’obliger à la réclamer – ce qui, dans le contexte actuel, post-Chido, me paraît indispensable. Je donnerai par ailleurs un avis favorable à l’amendement suivant, no 614, qui vise également à associer les gestionnaires d’aires protégées mahoraises. Au total, mon avis est défavorable sur l’amendement de suppression de l’alinéa 93 présenté par le gouvernement.
(L’amendement no 659 est adopté ; en conséquence, l’amendement no 614 tombe.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 205 et 364.
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 205.
Mme Sandrine Nosbé
Nous ne souhaitons pas instituer un conseil cadial parmi les organes officiels du département-région de Mayotte. Lors de l’examen de l’article 30 en commission, un amendement en ce sens a été adopté. Le conseil cadial donnerait son avis sur des projets ou des propositions de délibération de l’assemblée de Mayotte. Il pourrait être saisi par l’assemblée, son président, par le conseil économique, social, environnemental, de la culture et de l’éducation de Mayotte ou par le préfet, ou même se saisir lui-même.
Mayotte est le département des exceptions légales notamment parce que la loi de 1905 concernant la séparation des Églises et de l’État ne s’y applique pas. Sans remettre en question l’importance du rôle de médiateurs des cadis et leur fonction sociale dans la société, nous souhaitons que cette loi s’applique partout sur l’ensemble du territoire de la République. C’est pourquoi nous demandons la suppression de la disposition ajoutée en commission.
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 364.
Mme Dominique Voynet
La rémunération des cadis par le département les place dans une situation de subordination à l’égard de l’exécutif local, alors même qu’ils sont supposés jouer un rôle de conseil auprès de l’assemblée délibérante. Ce lien organique et financier soulève un problème manifeste d’indépendance et de lisibilité institutionnelle.
Par ailleurs, ce dispositif revient à reconnaître officiellement, au sein d’une collectivité territoriale de la République, une autorité religieuse dotée d’un statut institutionnel, ce qui crée une confusion entre la sphère religieuse et la sphère publique.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Permettez-moi de clarifier plusieurs points. Tout d’abord, le conseil cadial est reconnu par le ministère de l’intérieur comme une institution officielle représentative des musulmans de Mayotte. Les cadis sont des salariés du conseil départemental, comme le sont les religieux en Alsace, ce qui n’empêche personne de dormir, ni la République de fonctionner. Il ne s’agit donc pas, dans cet article, d’institutionnaliser le conseil cadial, puisque cette institution existe déjà. L’objectif est simplement de procéder à un toilettage institutionnel, de pérenniser cette institution et de l’encadrer. Tel est le sens des amendements que je défendrai dans quelques instants.
Je rappelle ensuite que les cadis n’exercent plus officiellement de responsabilités religieuses. Ils ont conservé un rôle coutumier important, garanti par les décrets Mandel qui régissent les pratiques religieuses dans les territoires d’outre-mer et qui permettent la survivance des règles coutumières. À Mayotte, les cadis jouent un rôle très important dans la médiation sociale, la résolution des conflits et la lutte contre la radicalisation religieuse.
Je vous rappelle quand même que Mayotte se trouve à 500 kilomètres de Daech, au Mozambique, et que, la nature ayant horreur du vide, j’ai du mal à comprendre comment la République et les services de l’État, qui travaillent étroitement avec le Conseil cadial, pourraient en venir aujourd’hui à souhaiter leur disparition.
Ce sur quoi nous devons légiférer, c’est sur la manière de protéger cette institution, dans le respect des équilibres, sur la meilleure façon de lier et d’ancrer les cadis dans la République, d’institutionnaliser leur existence par la loi, avec un périmètre d’intervention qui soit respectueux de la séparation des pouvoirs et de l’assemblée de Mayotte.
Plusieurs amendements indiquent que ce toilettage institutionnel doit être l’occasion d’appliquer la loi de 1905. Je crois qu’il faut plutôt s’inspirer de ce qui est prévu dans les autres territoires ultramarins – je pense notamment à la Guyane, qui a institutionnalisé un grand conseil coutumier des populations amérindiennes et bushinenges.
Vous vous inquiétez des éventuels blocages : mais il est bien prévu que le conseil cadial exerce simplement un rôle consultatif. Il n’est en aucun cas question qu’il puisse bloquer une délibération ou un acte de l’assemblée de Mayotte.
Vous avez évoqué les possibles conflits d’intérêts chez des cadis salariés de l’assemblée de Mayotte, qu’ils sont par ailleurs amenés à conseiller. Je note simplement que cela ne pose de problème à personne que le Conseil économique, social et environnemental de Mayotte (Cesem) dispose de moyens de fonctionnement mis à disposition par l’assemblée de Mayotte, alors même qu’il a pour rôle d’assister cette même assemblée. Curieusement, personne n’a soulevé un éventuel conflit d’intérêts.
Je termine enfin en vous indiquant que j’ai déposé deux amendements pour adapter le dispositif, afin qu’il soit le plus proche possible des pratiques en vigueur à Mayotte. Ce sera donc un avis défavorable sur l’ensemble des amendements qui visent à supprimer le conseil cadial.
M. le président
La parole est à M. Philippe Vigier, rapporteur général de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République.
M. Philippe Vigier, rapporteur général de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République
Nous légiférons pour faire évoluer les institutions de Mayotte qui, de département, devient département-région et qui, à ce titre, comme chaque région depuis les grandes lois de décentralisation, restera dotée d’un conseil économique, social et environnemental régional, voué à être régulièrement mobilisé, sollicité pour des avis et susceptible de s’autosaisir, bref pleinement engagé dans la vie de la collectivité.
Se pose en parallèle la question de la spécificité du conseil cadial. Je connais le rôle d’intermédiation qu’il peut jouer comme l’autorité morale dont peuvent se prévaloir les cadis. Sur des sujets compliqués ou sensibles, leur influence est réelle et s’exerce souvent à bon escient – ce fut notamment le cas, comme cela est mentionné dans le rapport de la commission des lois, sur la vaccination.
La difficulté tient au fait qu’ils sont salariés de l’assemblée de Mayotte. Nombre d’entre nous ont insisté, depuis le début de nos débats, sur la nécessité d’associer les élus locaux à nos travaux. Or, selon certains d’entre eux, le fait d’être salarié de l’assemblée peut créer un lien de subordination et entraver l’objectivité d’un organe rémunéré par la collectivité qu’il conseille, notamment sur des sujets politiques. L’articulation des différents organes doit donc être définie en tenant compte des risques de conflit d’intérêts, et c’est la raison pour laquelle, il faudra donc, d’ici l’étape de la commission mixte paritaire (CMP), y réfléchir en prenant en considération l’avis des élus locaux. Pour ma part, je ne suis pas favorable à l’heure actuelle à ce que le conseil cadial fasse partie des « institutions » de Mayotte. C’est un terme très fort. Il faut savoir qui portera, demain, le fonctionnement institutionnel.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Il ne faut évidemment pas occulter la place importante des cadis dans la société mahoraise ni leur rôle de médiateurs sociaux. Que les choses soient claires, personne ne propose de supprimer ces cadis, qui participent d’une tradition qu’il nous faut respecter et qui, le cas échéant, peuvent être des interlocuteurs. Je rappelle d’ailleurs que les mosquées ont joué un rôle essentiel après le passage du cyclone, notamment en fournissant des abris ou en s’impliquant dans la distribution d’eau.
Cependant, nos échanges me conduisent, après réflexion, à me ranger à l’avis du rapporteur général, compte tenu de son expérience et de son analyse des institutions. Je donnerai donc un avis favorable à ces amendements.
(Les amendements identiques nos 205 et 364 sont adoptés ; en conséquence, les amendements nos 442, 447, 673, 506, 564, 675, 676, 677, 507 et 514 tombent.)
M. le président
Je vous indique qu’il nous reste 352 amendements à examiner. Nous avons donc intérêt à faire vite et bien, et nous allons essayer d’accélérer.
Les amendements nos 508 et 509 de Mme Estelle Youssouffa, rapporteure, sont rédactionnels.
(Les amendements nos 508 et 509, acceptés par le gouvernement, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
M. le président
Nous en venons à cinq amendements identiques, nos 209, 392, 402, 501 et 667.
Sur ces amendements, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 209.
Mme Sandrine Nosbé
Nous souhaitons supprimer la disposition adoptée en commission et qui vise à exclure de toute coopération avec l’assemblée de Mayotte les États qui ne reconnaissent pas l’appartenance de Mayotte à la République.
Cette disposition vise très clairement les Comores, qui revendiquent régulièrement Mayotte, mais exclure de toute coopération régionale et diplomatique les Comores alors qu’il s’agit du pays le plus proche géographiquement de Mayotte n’a pas de sens. En effet, le dialogue entre les Comores et Mayotte est nécessaire, notamment au regard des enjeux de développement, si l’on veut s’attaquer aux causes de la migration. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
La parole est à Mme Léa Balage El Mariky, pour soutenir l’amendement no 392.
Mme Léa Balage El Mariky
Nous avons déjà eu la discussion en commission ; il nous paraît fondamental que l’assemblée de Mayotte puisse participer aux discussions et négociations régionales. C’est essentiel pour elle mais aussi pour la reconnaissance du rôle de la diplomatie des collectivités territoriales. Nous sommes plusieurs à vouloir aller dans ce sens.
M. le président
L’amendement no 402 de Mme Anchya Bamana est défendu.
La parole est à Mme Béatrice Bellay, pour soutenir l’amendement no 501.
Mme Béatrice Bellay
Il s’agit en effet de soutenir l’idée d’une coopération régionale et de la participation de Mayotte à cette coopération et au dialogue qui l’accompagne.
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 667.
M. Davy Rimane
À l’instar de nos collègues, Émeline K/Bidi et moi-même considérons qu’on ne peut envisager le développement de Mayotte au sein de sa zone géographique en excluant son assemblée des discussions, même si les Comores revendiquent la souveraineté sur l’archipel. Mayotte est sans ambiguïté un territoire français, conformément à son choix, mais on ne peut l’isoler de ses voisins.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Ces amendements visent à supprimer un nouvel article que j’ai introduit en commission des lois et qui exclut la possibilité pour l’assemblée et son président de participer à des négociations, de conclure des accords avec les États qui ne reconnaissent pas l’appartenance de Mayotte à la France. Cela n’empêche pas le Quai d’Orsay de travailler à la coopération régionale, et il faut qu’il soit clair pour tous que cette disposition concerne uniquement l’assemblée de Mayotte.
Loin de moi l’idée de minimiser l’importance pour l’assemblée de Mayotte d’être associée aux négociations des accords internationaux. J’entends également que la coopération régionale est importante. Le conseil départemental a protesté en expliquant que cet amendement l’empêcherait, par exemple, de travailler avec Madagascar et le Kenya. C’est pour cela que je vous propose l’amendement no 510, qui suit cette série et qui exclurait de cette coopération uniquement les États qui expriment des revendications territoriales sur Mayotte.
Cela restreint le champ des limitations et permettrait à Mayotte de s’engager dans une coopération régionale intelligente et respectueuse. Je parle de respect parce que les Comores ne respectent pas le choix qu’a fait Mayotte de rester française. Dans un contexte d’ingérence comorienne avérée, assumée, revendiquée, il ne me semble pas sage de permettre à l’assemblée de Mayotte d’entamer seule des discussions, alors que l’on observe une instrumentalisation dangereuse des flux migratoires et un renversement démographique à Mayotte.
C’est parce qu’il faut tenir compte de ce contexte spécifique et compliqué que je vous invite à retirer ces amendements au profit de l’amendement no 510. À défaut, ce sera un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Avis favorable.
M. le président
Je mets aux voix les amendements identiques nos 209, 392, 402, 501 et 667.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 36
Nombre de suffrages exprimés 36
Majorité absolue 19
Pour l’adoption 34
Contre 2
(Les amendements identiques nos 209, 392, 402, 501 et 667 sont adoptés ; en conséquence, l’amendement n° 510 tombe.)
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 666.
M. Davy Rimane
Il vise à supprimer l’alinéa aux termes duquel l’assemblée de Mayotte pourrait se prononcer sur les actes de l’Union européenne. Compte tenu de la taille de l’assemblée et de son fonctionnement, nous estimons cela compliqué, sachant que la consultation des textes qui émanent du gouvernement se fait déjà toujours dans l’urgence. Que l’assemblée de Mayotte se saisisse, en plus, des textes européens nous paraît donc fortement illusoire et serait surtout source de difficultés.
M. le président
Sur l’article 30, je suis saisi par le groupe Horizons & indépendants d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
J’entends votre inquiétude mais vous proposez de supprimer l’intégralité de l’alinéa, ce qui reviendrait à priver Mayotte de la possibilité d’être consultée, même sur les actes de l’Union européenne qui la concernent. Je ne peux donc pas y être favorable.
En revanche, je me rallie à la position du Gouvernement, qui souhaite revenir à l’écriture initiale. Je mesure les risques d’encombrement, bien que l’absence de délibération ne bloque pas le reste de la procédure.
Ce sera donc un avis de sagesse à titre personnel, la commission ayant donné un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Je comprends parfaitement le sens de cet amendement mais, pour les raisons qui viennent d’être évoquées par Mme la rapporteure, je propose son retrait au profit de mon amendement no 656, qui permet d’éviter les risques évoqués.
M. le président
Monsieur Rimane, maintenez-vous votre amendement ?
M. Davy Rimane
La collègue qui l’a déposé n’est pas là et je ne souhaite pas décider à sa place : dans le doute, je le maintiens.
(L’amendement no 666 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 656 du gouvernement est défendu.
(L’amendement no 656, accepté par la commission, est adopté.)
M. le président
L’amendement no 512 de Mme Estelle Youssouffa, rapporteure, est rédactionnel.
(L’amendement no 512, accepté par le gouvernement, est adopté.)
M. le président
La parole est à M. le ministre d’État, pour soutenir l’amendement no 657.
M. Manuel Valls, ministre d’État
La remise d’un rapport similaire à celui demandé à l’alinéa 390 de cet article est déjà prévue dans le rapport annexé, aux alinéas 342 à 344, insérés par un amendement adopté en commission des lois. Il convient donc de supprimer l’alinéa 390 de l’article 30.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Vous souhaitez supprimer un alinéa qui prévoit la remise d’un rapport visant à évaluer les ressources allouées à la collectivité territoriale de Mayotte. Je crois au contraire que ce rapport est complémentaire de celui prévu au nouveau paragraphe du rapport indexé. Ce dernier prévoit de faire un état des lieux des compétences exercées par la collectivité et des transferts financiers associés.
Avis défavorable. (M. le ministre d’État feint de fondre en larmes.)
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé.
Mme Sandrine Nosbé
Je souhaite préciser que le département de Mayotte perçoit quatre fois moins de financements de l’État que le reste du territoire français. Nous avons donc besoin de ce rapport.
(L’amendement no 657 n’est pas adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 30, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 37
Nombre de suffrages exprimés 37
Majorité absolue 19
Pour l’adoption 36
Contre 1
(L’article 30, amendé, est adopté.)
Article 31 (appelé par priorité)
M. le président
L’amendement no 446 de M. Jiovanny William est défendu.
(L’amendement no 446, repoussé par la commission et le gouvernement, est adopté ; en conséquence, les amendements identiques nos 658, 213 et 538 tombent.)
M. le président
L’amendement no 449 de Mme Estelle Youssouffa, rapporteure, est rédactionnel.
(L’amendement no 449, accepté par le gouvernement, est adopté.)
(L’article 31, amendé, est adopté.)
Article 32 (appelé par priorité)
(L’article 32 est adopté.)
Mme Dominique Voynet
Mais sur quoi vient-on de voter ?
M. le président
Sur les articles, madame la députée ! Vous les connaissez ! Je pense que vous maîtrisez ce texte parfaitement, si ce n’est mieux que personne ! (Sourires.)
J’essaie de simplifier la vie de tout le monde en accélérant quand les sujets évoqués ne font pas l’objet de débats. Je prendrai tout le temps qu’il faut quand cela ne sera plus le cas.
La parole est à Mme Estelle Youssouffa, rapporteure.
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Comme nous allons très vite, ce que je comprends, la portée de l’article 31 n’a pas été bien comprise, ce qui explique le vote. Nous venons de modifier le mode de scrutin. Or le gouvernement et la commission ainsi qu’une partie significative de l’Assemblée s’y opposaient.
M. Antoine Léaument et Mme Léa Balage El Mariky
Il faut demander une seconde délibération !
M. Manuel Valls, ministre d’État
C’est ce que je vais faire !
M. le président
Le gouvernement demandera une seconde délibération. Par ailleurs, il sera possible de faire évoluer le texte à la faveur de la navette.
Article 33 (appelé par priorité)
(L’article 33 est adopté.)
Article 34 (appelé par priorité)
(L’article 34 est adopté.)
Avant l’article 14
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 540.
Mme Dominique Voynet
En commission, nous avons eu de longues discussions sur le sens du mot « Mahorais ».
Par cet amendement, nous proposons de substituer au mot « Mahorais » les mots « habitants de Mayotte » dans l’intitulé du chapitre Ier. La rapporteure s’en est émue car elle considère que cela revient à mettre en avant les droits extravagants des étrangers, qu’ils soient en situation régulière ou non.
Pourtant, une part importante de la population de Mayotte qui réside sur le territoire de façon parfaitement régulière est d’origine étrangère. Surtout, beaucoup d’habitants sont originaires d’autres territoires d’outre-mer ou de l’Hexagone.
Si l’on cherche à assurer la sécurité des personnes vivant sur ce territoire, on ne s’intéresse pas seulement à celle des Mahorais originaires de Mayotte, mais aussi aux m’zoungous, qui viennent travailler à l’hôpital, dans les écoles et pour les autres services publics. Nous nous adressons à l’ensemble d’une population : qu’on soit en situation régulière ou non, on a le droit de ne pas mourir dans le contexte d’une rixe ou à la suite d’un incident impliquant une arme à feu.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République pour le titre IV
Il sera défavorable. Nous avons eu ce débat en commission : j’entends ce que vous dites, madame Voynet, et je peux le comprendre, mais il s’agit d’un projet de refondation de Mayotte. Il faut donc dire que ce texte concerne les Mahorais et les Mahoraises.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
La parole est à M. Emeric Salmon.
M. Emeric Salmon
Madame Voynet, je comprends mal votre intervention. Quand on parle des Mahorais, on parle des habitants de Mayotte ! Le terme est précis.
Je ne suis pas né en Franche-Comté. Aujourd’hui, j’y habite et je suis et me sens franc-comtois. Je ne saisis pas bien vos arguments. Nous voterons donc contre votre amendement, qui est décidément surprenant.
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet
Il suffit de remplacer « Mahorais » par « Bretons » ou « Corses » pour se rendre compte du caractère saugrenu de ce titre.
M. Emeric Salmon
Mais non, justement !
Mme Dominique Voynet
Il s’agit bien d’assurer l’accès de tous les habitants aux biens fondamentaux. Les médecins, les infirmiers, les enseignants qui vivent à Mayotte n’auraient-ils donc pas le droit de bénéficier d’une eau du robinet propre ? Franchement !
M. le président
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Madame Voynet, la terminologie évoquée ici n’a pas de portée normative. Mais pour assurer l’intelligibilité de la loi, il importe de continuer à parler de Mahorais.
Plus globalement, pensons d’abord aux défis que posent la reconstruction de Mayotte et sa refondation ainsi qu’aux Mahorais, et ne perdons pas trop de temps sur ces sujets – j’y participe malheureusement. Quand on parle de Mayotte, on parle des Mahorais. Chacun comprend bien de qui il s’agit. L’expression n’a pas de portée juridique, mais elle est claire et nette.
M. le président
La parole est à M. Antoine Léaument, qui a visiblement retrouvé sa voix !
M. Antoine Léaument
J’interviens en soutien de cet amendement.
Je prendrai un exemple beaucoup plus simple : les mots « les Français » désignent les personnes de nationalité française, alors que l’expression « les habitants de la France » renvoie à l’ensemble de la population française. Or ici, il est question d’accès à des droits fondamentaux. Pour le développement des services publics notamment, il est plus efficace et plus précis de parler des habitants de Mayotte, plutôt que des seuls Mahorais.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Non !
M. Antoine Léaument
Ne nous lançons pas forcément dans de grands débats idéologiques : la formulation proposée par Mme Voynet rend simplement la loi plus précise et efficace.
M. le président
La parole est à Mme Estelle Youssouffa.
Mme Estelle Youssouffa
Si la question n’a pas de portée légistique, elle a une portée symbolique extrêmement importante.
Madame Voynet, vous êtes revenue à la charge en expliquant que l’objectif est d’inclure les enseignants, les médecins et le reste des soignants, comme s’il n’y avait pas de Mahorais parmi eux ! Cela en dit long sur votre vision de ce que sont les Mahoraises et les Mahorais. En utilisant des termes qui nous font disparaître, vous souhaitez nous effacer symboliquement, mais avec force, de la surface de Mayotte.
On a beau vous expliquer que ce n’est pas le sujet, vous revenez à la charge. Votre insistance sur la question ainsi que le reste de vos interventions, au fil desquelles vous égrenez tous les défauts que vous trouvez à la population qui vous a accueillie et vous a permis de faire renaître votre carrière, forcent l’admiration. Nous rejetons cet amendement car il est d’une violence symbolique inouïe.
(L’amendement no 540 n’est pas adopté.)
Article 14
M. le président
La parole est à M. Philippe Naillet, pour soutenir l’amendement no 295.
M. Philippe Naillet
Il ne peut pas y avoir de politiques publiques efficaces en matière de logement, d’éducation, de santé ou d’équipement sans un recensement démographique fiable. On connaît la natalité qui est celle de Mayotte aujourd’hui. Or actuellement, on ne dispose pas de données de recensement précises. Le sens de cet amendement est de fournir des éléments concrets aux collectivités notamment afin qu’elles puissent mener des politiques publiques.
M. le président
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public : sur l’article 14, par le groupe Horizons & apparentés et sur l’amendement no 81, par le groupe Rassemblement national.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Je crois que je l’ai déjà dit en commission : cet amendement me laisse un peu circonspecte. Un recensement consiste justement à aboutir à une « représentativité statistique la plus fidèle possible » ! Je donne donc un avis défavorable.
Par ailleurs, vous évoquez le sujet de la date. Il est bien prévu que ce recensement exhaustif commencera le 27 novembre et se terminera au plus tard début janvier 2026. Ces dates ont été choisies à la demande des élus mahorais, qui ont souhaité que le recensement débute un peu plus tôt que prévu initialement, pour ne pas perturber les élections municipales de mars.
M. le président
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Nous nous apprêtons enfin à procéder à ce recensement exhaustif qui nous permettra de disposer de chiffres exacts. Je veux souligner l’implication entière des dix-sept communes de Mayotte : pas moins de 700 agents recenseurs et 70 encadrants conduiront cette opération à la fin de l’année, comme l’a dit Agnès Firmin Le Bodo. Les premiers chiffres sont attendus pour le mois de juin 2026.
Cela me permet de répondre à M. de Lépinau : ce recensement permettra de disposer de données fiables sur la situation démographique, ce qui permettra notamment d’ajuster les dotations de la collectivité. C’est donc une avancée très importante.
(L’amendement no 295, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet, pour soutenir l’amendement no 81.
M. Yoann Gillet
Cet amendement vise à mieux orienter le recensement évoqué à l’article 14, en garantissant qu’il sera effectué en priorité dans les secteurs de Mayotte où se concentrent la population étrangère et l’habitat informel.
Le groupe Rassemblement national défend l’urgence d’effectuer un recensement de la population étrangère à Mayotte depuis la loi du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte, car c’est la condition sine qua non de tout projet de refondation de ce département français.
En effet, toutes les mesures de reconstruction dont nous parlons dépendent de la jauge de population : il faut savoir si la puissance publique reconstruira pour 300 000, 400 000 ou 500 000 habitants.
L’urgence requiert qu’on se concentre sur les populations étrangères, afin d’expulser au plus vite les personnes en situation irrégulière.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Je vous demande de retirer l’amendement, qui est satisfait. C’est l’objet même de ce recensement exhaustif. L’Insee nous a précisé que des cartographies seraient réalisées en amont pour identifier toutes les zones, notamment celles marquées par l’habitat informel. Je crois que c’est ce qui était sous-tendu par vos propos.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Avis défavorable.
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet.
M. Yoann Gillet
J’entends l’argument…
M. Manuel Valls, ministre d’État
Non, vous n’entendez pas.
M. Yoann Gillet
…suivant lequel l’Insee opérerait un recensement exhaustif. Je salue ceux qui y travaillent et qui suivent nos débats, mais il faut pointer les lacunes de cet institut.
L’Insee est-il capable de faire un recensement en l’état ? La réponse est non.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
C’est justement à cela que sert la cartographie !
M. Yoann Gillet
Il y a des territoires ultramarins – en Guyane par exemple – où le recensement est très mal effectué, où l’Insee sort des chiffres ahurissants. Ce n’est pas le collègue guyanais en face de moi qui dira l’inverse.
L’Insee ne sait pas – ou ne veut pas savoir – faire correctement un recensement. C’est le cas aussi en métropole. Dans certaines communes de moins de 20 000 habitants, dans ma circonscription, l’écart entre les chiffres donnés par l’Insee, et la réalité, est de l’ordre de plusieurs milliers de personnes.
Il faut avoir conscience des failles de l’Insee. Cet amendement est une manière de souligner que l’Insee doit revoir sa façon de faire. Je ne sais pas si ce sont les méthodes de l’Insee qui sont à revoir, ou si les consignes données à l’Insee visent à minorer volontairement le nombre d’habitants dans certains territoires…
M. Manuel Valls, ministre d’État
Ah bon ?
M. Yoann Gillet
…peut-être pour ne pas trop gonfler les dotations globales de fonctionnement. (Mme. Béatrice Roullaud applaudit.)
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Je ne peux pas vous laisser dire ça !
M. le président
La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Je ne peux pas ne pas répondre à vos propos. L’Insee ferait volontairement – c’est ce que vous avez dit – des recensements minorant le nombre d’habitants ?
M. Yoann Gillet
C’est un constat.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Il ne faut pas tenir ce genre de propos sur un institut national.
Je suis vraiment opposée à votre amendement, et je veux vous redire que l’Insee s’est engagé, avant de lancer le recensement, à établir des cartographies précises, afin que les personnes qui seront recrutées par les collectivités territoriales puissent faire ce recensement dans les meilleures conditions, et en toute sécurité. On ne peut pas laisser passer vos propos, qui sont assez scandaleux.
Mme Béatrice Roullaud
Il a seulement dit qu’il fallait se poser la question.
M. le président
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Pour compléter ce que vient de dire Mme Agnès Firmin Le Bodo : l’Insee a, à notre demande, déployé une méthodologie particulière. Lors des auditions, nous avons acté, étant donné la cartographie à établir, qu’une formation de six semaines aurait lieu en amont, que les employés municipaux apporteraient leur soutien et que des tiers de confiance interviendraient pour faire le maillage. L’Insee a souhaité déployer quelque chose de nouveau, qui permettra de sécuriser les agents recenseurs, en laissant à la police municipale, voire à d’autres effectifs, la possibilité d’intervenir.
M. Emmanuel Fouquart
Bonne chance !
M. Philippe Vigier, rapporteur
Tout cela permettra d’avoir une vue précise du nombre d’habitants du territoire de Mayotte.
M. le président
La parole est à M. Antoine Léaument.
M. Antoine Léaument
On ne peut pas laisser dire n’importe quoi sur le travail réalisé par les chercheurs de l’Insee. C’est toujours difficile de mener un recensement, d’abord parce qu’une partie des gens ne participent pas de manière pleine et entière à ces travaux. Mais si vous le voulez, vous pouvez regarder les travaux de l’Insee dans le détail…
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Bien sûr !
M. Antoine Léaument
…notamment ce qu’ils disent sur l’immigration. Vous y verrez qu’une partie des dispositions que vous avez voulu inscrire dans les articles qui concernaient l’immigration sont sans effet sur les mécanismes migratoires.
Nous aussi, nous voulons qu’un recensement précis de la population de Mayotte soit effectué, parce qu’il permettra de déployer des services publics à la hauteur – s’il existe une volonté politique pour le faire.
Mais l’idée sous-jacente de votre amendement est claire : vous parlez de cibler prioritairement l’habitat informel et les personnes étrangères, en liant les deux, alors que ce ne sont pas toujours des personnes étrangères qui vivent dans des quartiers d’habitat informel. Il serait temps de vous en rendre compte.
Si l’on veut améliorer l’habitat à Mayotte, il faut d’abord un recensement efficace – qui ne cible pas prioritairement des gens plutôt que d’autres, parce qu’il faut un recensement global de la population – et ensuite, il faudra déployer des moyens pour s’adapter à ce niveau de population.
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane.
M. Davy Rimane
Nous serons attentifs à la nouvelle méthodologie de recensement qui sera mise en œuvre par l’Insee…
M. Philippe Vigier,, rapporteur général
Oui, l’expérience mahoraise servira à la Guyane.
M. Davy Rimane
…parce que tous les élus de Guyane ont écrit au directeur général de l’Insee pour évoquer l’écart substantiel observé par les élus locaux entre les chiffres de l’Insee, et ce à quoi ils sont confrontés au quotidien. Nous avons donc demandé qu’il y ait un recensement exhaustif en Guyane – qui présente des similitudes avec Mayotte en matière d’habitat spontané établi sur tout le territoire – afin que l’on sache exactement combien de personnes se trouvent sur place, et que les politiques publiques puissent répondre au mieux aux besoins de tous.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Je tiens à souligner trois points. D’abord, le recensement sera exhaustif, comme l’a dit madame la rapporteure, au moment de la cartographie et au moment de la collecte auprès des habitants.
Ensuite, les modalités de recensement seront adaptées à Mayotte. Un agent recenseur pourra recenser 150 logements, au lieu de 300 dans l’Hexagone. À partir de cette expérimentation, il faudra travailler ainsi – vous avez raison, monsieur Rimane – sur la Guyane. Il convient d’avoir suffisamment d’agents pour aider les personnes qui ne parlent pas français. Les agents recenseurs pourront ainsi se déplacer à deux, pour des raisons de sécurité. Parmi les gens qui ne parlent pas français, ne figurent pas que des étrangers…
M. Davy Rimane
Bien sûr.
M. Manuel Valls, ministre d’État
…et encore moins des étrangers en situation irrégulière.
Enfin, le recensement est préparé en lien avec les maires. Ce sont d’ailleurs les communes qui recrutent et encadrent les agents recenseurs. Les questions de sécurité seront prises en compte.
Par ailleurs, en application de l’article 101 du règlement de l’Assemblée nationale, le gouvernement souhaite élargir la seconde délibération, prévue sur l’article 11, à l’article 31.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 81.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 45
Nombre de suffrages exprimés 45
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 19
Contre 26
(L’amendement no 81 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 294 de M. Philippe Naillet est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet.
M. Yoann Gillet
On parle d’un recensement à Mayotte. Je rappelle que l’Insee demande aux collectivités de recruter ou de trouver des agents recenseurs. Certaines collectivités nomment, au sein de leur personnel, des agents recenseurs ou embauchent du personnel contractuel. Ensuite, la méthodologie est fixée par l’Insee, qui définit des IRIS (îlots regroupés pour l’information statistique), soit des secteurs donnés sur lesquels les agents recenseurs font leur travail. On peut bien y joindre des policiers municipaux ou des effectifs supplémentaires, mais si la méthode fixée par l’Insee n’est pas retravaillée, le résultat sera toujours le même.
On a connu la même chose en Guyane, où l’Insee prétendait disposer d’une méthode qui lui était propre, afin d’améliorer la qualité des données. Les agents recenseurs ont regardé le nombre de téléphones portables connectés aux antennes, le nombre de kilos de riz consommés, etc.
La vérité, c’est que, si on compare les estimations, on constate un écart de plusieurs dizaines de milliers d’habitants sur la seule commune, par exemple, de Saint-Laurent du Maroni. J’ai passé beaucoup de temps avec la maire de cette commune. Elle m’a montré ses calculs et ceux de l’Insee : l’incohérence entre le nombre d’enfants scolarisés et la population recensée était flagrante. L’Insee doit totalement revoir ses méthodes.
Je vous l’ai dit, dans une commune de ma circonscription, on trouve un écart de plusieurs centaines d’habitants sur une commune de 16 000 habitants. Tant que vous n’admettrez pas les failles de l’Insee, vous n’avancerez pas.
En ce qui concerne Mayotte, j’avais eu une discussion avec les services de l’éducation nationale – vous pourriez échanger avec eux sur ce sujet – et là aussi, les chiffres des enfants scolarisés par rapport au nombre d’habitants recensés à Mayotte montraient que les chiffres de l’Insee n’étaient pas fiables. Cela allait du simple au double.
M. le président
La parole est à M. Antoine Léaument.
M. Antoine Léaument
Je m’amuse du fait que M. Gillet nous parle de son expérience en Guyane parce que, lorsque je suis allé à Saint-Laurent-du-Maroni, pour ma part dans le cadre du rapport sur la lutte contre le trafic de stupéfiants, j’ai évoqué avec la maire les questions associées à ce trafic, et notamment la pauvreté qui amène un certain nombre de personnes, ensuite, à se mettre des boulettes de cocaïne dans le ventre pour traverser l’Atlantique en avion.
Pour ceux qui ne se représentent pas bien Saint-Laurent-du-Maroni, je rappelle qu’un fleuve large de 1,5 km sépare la ville du Suriname. Tous les jours, des embarcations traversent dans un sens et dans l’autre. Les habitants de Saint-Laurent-du-Maroni disent que la ville est à cheval entre deux fragments de frontière, si bien qu’une tolérance des services de la police aux frontières (PAF) sur le passage du fleuve s’est peu à peu imposée.
Des députés du Rassemblement national ont demandé à des agents de la PAF de fermer la frontière. Ce n’est pas possible. La discussion avec ces agents de la PAF, qui s’est notamment faite avec M. Fabrice Leggeri, a montré à quel point le programme du Rassemblement national, du fait de son inapplicabilité, était ridicule.
L’enjeu est posé. Je vous le dis de manière amusante, mais lorsque l’on parle des questions de migration, il faut être capable de le faire de façon sérieuse. Bien sûr qu’il faut que l’Insee opère un recensement, mais lorsque les populations bougent…
M. Yoann Gillet
En tout cas, les agents de la PAF ne votent pas pour LFI !
M. Antoine Léaument
À Saint-Laurent-du-Maroni, posez-vous la question monsieur Gillet ! (Le temps de parole étant écoulé, M. le président coupe le micro.)
M. le président
Il nous reste un peu plus de 300 amendements. Ce que j’aimerais, c’est que l’on puisse prendre du temps sur les débats importants, que l’on accélère sur les autres et que l’on évite de partir d’un amendement pour lancer un débat plus large, y compris sur des sujets qui ne concernent pas ce texte, et qui risquent de nous faire dériver.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Très bien !
M. le président
Je suis à votre service, mais si nous voulons voter ce texte ce soir, dans de bonnes conditions, il faut que l’on accélère.
Mme Claire Marais-Beuil
Il faut leur dire à eux, en face !
M. le président
Cela s’adresse à tout le monde.
La parole est à Mme Fimin Le Bodo, rapporteure.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Le recensement est un enjeu majeur de ce texte. Cela fait dix ans que Mayotte n’a pas bénéficié d’un recensement exhaustif. Je vous le redis, monsieur Gillet, l’Insee propose, dans le cadre de ce recensement, une nouvelle méthode.
M. Yoann Gillet
Laquelle ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Allez les interroger. J’ai évoqué la cartographie…
M. Yoann Gillet
C’est la même.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Pas de procès d’intention. L’Insee a même proposé d’évaluer cette méthode à l’issue du recensement.
M. Yoann Gillet
Chiche !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Il l’a demandé. Il est important de faire confiance à l’Insee et aux agents recenseurs qui seront recrutés pour réaliser ce recensement.
Dès lors que les chiffres auront été transmis aux collectivités territoriales en août, puis publiés en décembre 2026, vous réviserez peut-être les propos que vous avez tenus de manière éhontée sur l’Insee.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Très bien !
(L’amendement no 294 n’est pas adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 14.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 51
Nombre de suffrages exprimés 51
Majorité absolue 26
Pour l’adoption 51
Contre 0
(L’article 14 est adopté.)
Article 15
M. le président
La parole est à M. Jean-Hugues Ratenon.
M. Jean-Hugues Ratenon
Ce texte doit avoir pour seul objectif le mieux-être des Mahoraises et des Mahorais ainsi que la mise en place des conditions pour une harmonie dans les pays de l’océan Indien. Mayotte est française depuis 1841 et elle est devenue un département en 2011. Elle mérite donc un virage net et clair, une rupture avec le mépris que l’État lui a témoigné jusqu’à présent.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Oh là là !
M. Jean-Hugues Ratenon
Il est temps d’harmoniser avant qu’il ne soit trop tard – même si c’est probablement déjà trop tard ! Le smic et le RSA à Mayotte sont plus faibles qu’à La Réunion, malgré la proximité géographique. Ce n’est pas acceptable… Excusez-moi, je ne me sens pas bien. Je vais m’arrêter là.
Suspension et reprise de la séance
M. le président
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures, est reprise à seize heures dix.)
M. le président
La séance est reprise.
M. Antoine Léaument a accepté de lire la fin de l’intervention de M. Jean-Hugues Ratenon.
Mme Maud Petit
Merci !
M. le président
Je lui donne la parole.
M. Antoine Léaument
Je me fais la voix de mon collègue Jean-Hugues Ratenon.
« Le smic et le RSA à Mayotte sont plus faibles qu’à La Réunion, malgré la proximité géographique. Ce n’est pas acceptable, d’autant que la vie y est plus chère.
Le texte propose l’égalité du smic et des prestations sociales ainsi que la fin de la rotation scolaire, mais dans seulement six ans ! Non ! Nous voulons l’égalité maintenant !
Face à la misère et au manque de services publics, les Mahorais sont obligés de migrer, notamment à La Réunion, le département le plus proche. C’est donc l’instinct de survie qui crée des tensions.
La France doit cesser cette maltraitance sociale et agir vite.
M. Yoann Gillet
Oh là là !
M. Antoine Léaument
Les députés mahorais, qui passent leur temps à insulter les Comoriens, à totocher les Réunionnais et qui prônent un transfert volontaire des gens vers La Réunion, savent très bien que cela entraînerait une explosion, car La Réunion est aussi en grande difficulté.
M. Yoann Gillet
Oh là là !
M. Antoine Léaument
Ne refusez pas l’égalité dès 2026. Stoppez votre obsession pour le chaos et votre incitation à la violence dans l’océan Indien ! Je vous le dis avec gravité : stop, ça suffit !
Collègues du bloc central et du RN, sachez que si l’égalité n’est pas au cœur de l’action publique, l’insécurité ne fera que grandir.
M. Yoann Gillet
Pour les Français !
M. Antoine Léaument
Mayotte et La Réunion vous regardent ; votez nos amendements, votez pour l’harmonisation ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et GDR.)
M. le président
La parole est à Mme Estelle Youssouffa.
Mme Estelle Youssouffa
L’enjeu d’égalité sociale, au cœur de l’article 15, est fondamental. À Mayotte – française depuis 1841, département depuis 2011 –, seule la moitié des prestations sociales existant dans l’Hexagone sont appliquées. Celles qui existent le sont seulement à hauteur de la moitié du montant national, alors que le coût de la vie y atteint 150 % de celui dans l’Hexagone.
Cela veut dire que pour les Mahoraises et les Mahorais en grande difficulté, les aides de l’État à destination des plus vulnérables sont quasi inexistantes. Et je ne parle même pas des retraites.
L’égalité sociale est exigée par Mayotte depuis plusieurs décennies, pourtant, le projet de loi vise à la convergence sociale à l’horizon de 2031. Cela nous paraît bien lointain – c’est peut-être le seul point sur lequel je tombe d’accord avec M. Ratenon.
Lors des discussions qui ont présidé à l’écriture de ce projet de loi, le gouvernement a seulement mis sur la table les prestations sociales contributives, excluant de fait les prestations sociales non contributives des avancées prévues par le texte. Il ne tient qu’au gouvernement d’y remédier. Ce serait le premier pas vers l’égalité immédiate.
De plus, l’alignement des prestations sociales conduira à une hausse importante des cotisations patronales. Or le gouvernement n’envisage pas d’étendre à Mayotte le dispositif d’exonération de cotisations patronales créé par la loi pour le développement économique des outre-mer (Lodeom) et dont peuvent bénéficier des entreprises à La Réunion, à la Martinique, en Guadeloupe ou en Guyane. Quand on parle d’égalité, il faut que ce soit l’égalité réelle. Nous la voulons maintenant ! Nous voulons bénéficier de dispositifs qui existent dans d’autres territoires ultramarins et dans le pays.
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane.
M. Davy Rimane
M. le ministre a fait des annonces fortes pour nos territoires. Il s’est toujours prononcé en faveur d’une évolution claire, si ce n’est d’une rupture, des relations entre l’État et les territoires d’outre-mer.
Monsieur le ministre, nous devons rendre justice à Mayotte : l’île ne doit pas subir ce qui s’est produit dans d’autres territoires qui, après la départementalisation de 1946, ont attendu l’alignement des minima sociaux pendant quarante ans, voire quarante-cinq ans. Mayotte est un département depuis 2011, nous sommes en 2025. Il est anormal que cette discussion soit toujours d’actualité.
Pour être en phase avec les propos que vous tenez depuis quelque temps et que beaucoup d’entre nous accueillent favorablement, la moindre des choses serait que vous rendiez définitivement justice à Mayotte. Il en est temps.
Aligner les minima sociaux en vigueur à Mayotte avec ceux en vigueur ailleurs en France ne serait que justice pour un territoire qui n’a que trop souffert.
(La séance, suspendue quelques instants, est immédiatement reprise.)
M. le président
La parole est à M. Philippe Naillet, pour soutenir les amendements nos 104 et 105, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
M. Philippe Naillet
Chacun a bien compris que ces deux amendements vont dans le sens des propos d’Estelle Youssouffa, de Davy Rimane et de Jean-Hugues Ratenon.
L’amendement no 104 vise à assigner à la nation un objectif d’alignement des droits sociaux entre Mayotte et l’Hexagone. Rappelons que depuis son accession au statut de département Français en 2011, Mayotte demeure confrontée à des inégalités profondes dans l’accès aux droits sociaux, si bien que le fossé se creuse entre ce territoire et les autres. La protection sociale offerte dans l’île, qui inclut les cotisations, la gestion des régimes et les règles applicables à l’offre de soins, demeure partiellement – j’irai même jusqu’à dire totalement – décalée par rapport à celle de l’Hexagone.
Le centre hospitalier de Mayotte illustre les conséquences concrètes de cette disparité. En 2022, la densité de médecins dans le territoire mahorais était de 83 médecins pour 100 000 habitants, alors qu’elle atteignait 330 médecins pour 100 000 habitants dans l’Hexagone. La situation est critique. En outre, 50 % des séjours hospitaliers concernent des personnes non affiliées à un régime de sécurité sociale et 90 % des consultations en protection maternelle et infantile (PMI) concernent une population vulnérable. De l’absence de l’Aide médicale de l’État (AME) à Mayotte, il résulte un engorgement des services d’urgences et des autres services hospitaliers, qui doivent faire face à une demande croissante de soins non pris en charge par la protection sociale.
Au-delà du secteur sanitaire, l’inégalité d’accès aux droits sociaux fragilise durablement la cohésion sociale et freine le développement économique et humain de Mayotte.
L’amendement no 105 tend à rédiger ainsi l’article 15 : « La Nation affirme son attachement au principe d’égalité devant la loi et à l’universalité de la protection sociale sur l’ensemble du territoire national.
« Elle reconnaît l’importance de poursuivre, dans le respect des spécificités locales de Mayotte, un rapprochement progressif et adapté des règles applicables en matière de prestations de sécurité sociale, d’aide sociale, de prise en charge des frais de santé, d’organisation de l’offre de soins, ainsi que de contrôle et de contentieux avec celles en vigueur dans les autres départements. »
M. le président
Je suis saisi de deux demandes de scrutin public : sur les amendements nos 73 et 356, par le groupe Rassemblement national ; sur l’article no 15, par les groupes Horizons & indépendants et Rassemblement national.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Il est défavorable, pour les deux amendements.
Sur le fond, nous sommes d’accord, monsieur Naillet, et l’article 15 vise justement à organiser la convergence sociale – c’est l’objectif que s’est fixé le gouvernement. Les ordonnances, que nous aimons peu, nous les parlementaires, sont le seul moyen qui permettra de la réaliser.
Les rapporteurs et le gouvernement se sont efforcés d’avancer sur certaines mesures, mais l’adoption des deux amendements empêcherait d’agir par ordonnances et ne permettrait plus la convergence sociale de Mayotte, que tous les groupes soutiennent et qui est au cœur de nos débats.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Il est défavorable.
Le président Rimane et Estelle Youssouffa ont relayé une attente très forte en matière de convergence sociale et d’égalité des droits sociaux, et le gouvernement s’est engagé à avancer de cinq ans l’échéance de cette convergence, c’est-à-dire à la réaliser en 2031.
Nous devons la réalité aux Mahorais, c’est pourquoi je rejette toute démagogie qui nous amènerait à faire des annonces qui resteraient sans suite sur le terrain.
L’aspiration à l’égalité est très forte et ancienne. La départementalisation y répond et notre méthode permettra d’avancer, année après année et avec la plus grande responsabilité, jusqu’à être à la hauteur de cette attente.
La convergence sociale concerne également les allocations familiales, mais, nous l’avons dit dès le début des débats, nous priorisons le travail, donc la mise à niveau du smic.
Enfin, le rapport transmis au Parlement sur le fondement de l’article 36 donne un calendrier précis de convergence de l’allocation aux adultes handicapés (AAH), du revenu de solidarité active et d’autres prestations familiales.
Nous avançons, avec un objectif clair et une exigence de vérité qui nous commande de rejeter la démagogie. J’espère que les négociations avec les partenaires sociaux permettront d’avancer vite sur tel ou tel point.
M. le président
La parole est à Mme Estelle Youssouffa.
Mme Estelle Youssouffa
Pour la parfaite information de notre assemblée, je rappelle que le code de la sécurité sociale et le code de la santé publique ne s’appliquent pas à Mayotte. On en est là, dans ce désert sanitaire, médical et juridique.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Ce n’est pas un désert, fort heureusement !
Mme Estelle Youssouffa
Voilà de quelle situation on parle.
Il est difficile de constater que la conférence sociale que les élus de Mayotte appellent de leur vœu depuis des années a été engagée par le général Facon : il n’a certainement que cela à faire, lui qui n’a toujours pas sorti des fonts baptismaux l’établissement public de reconstruction dont il a la charge ! On vient de lui confier le pilotage de la convergence sociale. C’est à croire que ce sujet n’est pas si complexe et qu’il n’a pas à être traité par un spécialiste : l’armée ne prépare-t-elle pas à tout ?
Autre problème : on entend parler de convergence, alors que nous voulons l’alignement et l’égalité. Une convergence est un processus dont on ne connaît pas exactement l’objectif et encore moins le calendrier.
Nous avons demandé un échéancier – Mayotte est impatiente – et je le répète, il n’est pas possible d’aligner les prestations sociales contributives sans application du dispositif prévu par la Lodeom. Cette non-application constitue un handicap manifeste et expose les entreprises mahoraises à une concurrence déloyale : celles-ci n’y résisteront pas si l’État ne traite pas Mayotte à égalité avec les autres départements ultramarins.
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane.
M. Davy Rimane
Monsieur le ministre, je regrette que nous devions encore avoir cette discussion. Je ne remets pas votre parole en doute – je la crois inspirée des meilleurs sentiments – mais pour avoir connu des conditions comparables à celle des Mahorais, je la trouve elle est entendable, mais irrecevable
Comment expliqueriez-vous à nos compatriotes de l’Hexagone une éventuelle différence de prestations sociales entre le Nord et les Bouches-du-Rhône ou entre l’Île-de-France et la Nouvelle-Aquitaine ? Vous n’y parviendriez pas ! Or vous demandez aux habitants d’un territoire français à part entière de comprendre que la convergence sociale n’aura lieu que dans cinq ans : ce n’est pas normal ! En 2011, Mayotte est devenue un département – c’est ce qu’ont choisi les Mahorais, à qui on a demandé ce qu’ils souhaitaient. Depuis, l’État semble n’avoir manifesté aucune volonté particulière de faire ce qu’il faut.
Je n’arrive pas à comprendre qu’on demande encore à nos compatriotes d’attendre cinq ans de plus ! Il y va de la justice sociale, de l’égalité et de l’équité de traitement : nous devons aligner tout de suite les droits sociaux !
Vous devriez être en capacité d’entendre et de comprendre ce que défendent les députés ultramarins à ce sujet : nous ne voulons plus que Mayotte soit dans cette situation, ce département doit être traité comme tous les autres !
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet.
M. Yoann Gillet
Nous sommes favorables à l’alignement, c’est une évidence. Mayotte est un département français à part entière.
Nous nous opposerons aux amendements nos 104 et 105 pour d’autres raisons – ils tendent à instaurer l’Aide médicale de l’État à Mayotte, ce qui aurait un effet très négatif, alors que nous souhaitons la supprimer dans tout le territoire national.
Monsieur le ministre, comment voulez-vous que nous ayons confiance ? Comment voulez-vous que les Mahorais aient confiance ? Vous promettez une convergence en 2031, mais dans le document stratégique « Mayotte 2025, une ambition pour la République », que nous avons brandi à plusieurs reprises et que vous aviez présenté en grande pompe alors que vous étiez premier ministre, vous annonciez cette convergence pour 2025 !
M. Manuel Valls, ministre d’État
Oh ça va !
M. Yoann Gillet
Nous sommes en 2025 et l’alignement n’a pas eu lieu. Vous avez menti pendant des années aux Mahorais, vous avez raconté des craques, vous ne faites que de la politique politicienne et que de la communication ! Nous sommes en 2025 et vous voudriez aujourd’hui nous faire croire que vous êtes prêt à tenir des promesses que vous n’avez pas tenues hier. Vous nous promettez leur réalisation en 2031, mais où serez-vous alors pour en répondre, monsieur le ministre ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Ici !
M. Emeric Salmon
À Barcelone !
M. Yoann Gillet
Vous serez à Barcelone ou ailleurs, mais en tout cas plus aux responsabilités ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
M. Manuel Valls, ministre d’État
Vous, vous n’y serez pas !
M. le président
La parole est à M. Philippe Naillet.
M. Philippe Naillet
J’entends la volonté du ministre d’État et ne doute pas de son engagement et de son honnêteté sur le sujet, mais mon scepticisme est réel.
Le rapport de la commission indique en effet que : « Depuis la départementalisation, plusieurs ordonnances ont rapproché le régime mahorais de celui du droit commun. Toutefois, comme le remarque l’étude d’impact du présent projet de loi, à onze ans de l’échéance initiale de 2036, la sécurité sociale ainsi que les prestations de solidarité présentent encore des écarts importants avec les règles en vigueur dans les autres territoires, soit moins favorables, soit plus favorables. Les divergences ne portent pas uniquement sur le montant des prestations, mais aussi sur leurs modalités ou conditions d’éligibilité. »
M. Manuel Valls, ministre d’État
La grande différence, c’est que nous passons cette fois par la loi et pas par un plan !
M. Philippe Naillet
M. Gillet a annoncé qu’il ne voterait pas les amendements nos 104 et 105 au motif qu’ils tendent à faire appliquer l’AME à Mayotte. Je regrette que son idéologie…
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Ou plutôt sa nostalgie.
M. Philippe Naillet
…l’empêche de voir la réalité. Or la réalité, c’est qu’à Mayotte, l’absence d’AME pèse sur le centre hospitalier de Mamoudzou.
M. Yoann Gillet
Ce n’est pas vrai !
M. Philippe Naillet
Ne dites pas n’importe quoi. Je l’ai visité pendant une demi-journée et on m’y a expliqué que 40 % de ses ressources servaient à payer des soins dispensés à des personnes en situation irrégulière.
Mayotte est le plus grand désert médical, non pas des territoires français dans l’océan indien ou des départements ultramarins, mais de France. L’Aide médicale de l’État pourrait favoriser un rattrapage.
M. le président
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Monsieur Gillet, on essaie de vous expliquer que ce texte est équilibré. Il comporte plusieurs volets, relatifs à l’immigration, aux infrastructures, à la convergence sociale et aux institutions.
Nous avons fait en sorte d’éviter de régler tous les problèmes par des ordonnances et je remercie le ministre d’État de nous y avoir aidés.
C’est la première fois que l’objectif de convergence sociale figure, non dans un rapport annexé dépourvu de valeur normative, mais dans la loi. Ce n’était d’ailleurs pas prévu initialement, chacun doit en prendre conscience, d’autant qu’on connaît la propension de l’administration à se réserver le traitement des dossiers.
Un cran a été franchi, avec la valeur travail en première ligne – 87,5 % du smic national, ce n’est pas rien. (M. Yoann Gillet fait mine de tourner une manivelle.) Ne soyez pas toujours dubitatifs ! Vous vous concentrez sur le passé et le passif…
M. Manuel Valls, ministre d’État
Ah, l’homme du passif !
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Je m’attache pour ma part aux avancées, le regard tourné vers l’avenir. Vous insistez en permanence sur ce qui n’a pas fonctionné, comme si vous étiez gênés… Au départ, la convergence sociale était prévue pour 2036.
M. Yoann Gillet
Non, 2025 ! (Mme Anchya Bamana brandit un exemplaire du plan « Mayotte 2025 : une ambition pour la République ».)
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Elle a été avancée à 2031. Il a fallu auditionner les partenaires sociaux, qui se sont inquiétés de sa soutenabilité économique pour les entreprises – Mme Youssouffa a bien fait d’aborder ce point tout à l’heure. Nous parlons de 15 000 entreprises. J’ai rappelé avant-hier que la valeur ajoutée créée par l’ensemble des entreprises de Mayotte s’établit à 28 millions d’euros, tandis que 95 % d’entre elles ont moins d’un salarié. La convergence n’est donc pas soutenable si on ne les accompagne pas en diminuant leurs charges sociales – nous en reparlerons un peu plus loin. L’article 15 présente l’avantage de donner la main au Parlement, qui sera de surcroît associé à la rédaction des ordonnances. Avec cet horizon de 2031 qui ne reculera plus à mesure que l’on avance, puisqu’il sera inscrit dans la loi, il me semble que nous progressons résolument vers la convergence !
M. le président
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Je ne répondrai pas à M. Gillet, sinon avec un peu d’humour. J’ai quitté le gouvernement en 2016. La différence avec cette époque est que nous passons aujourd’hui par un texte de loi. Je ne m’attarderai pas sur les raisons pour lesquelles tous les éléments de la convergence sociale n’ont pas été réalisés dès 2016 ou 2017. Je ne cherche pas à polémiquer, même si je comprends ce que peuvent ressentir les Mahorais en voyant que les progrès effectués restent encore très loin de l’objectif. Je comprends que le débat politique soit émaillé de mensonges, cela ne me pose pas de problème. À l’époque, de nombreuses personnes s’étaient réjouies de mon départ du gouvernement ; elles me retrouvent aujourd’hui au banc en tant que ministre des outre-mer. Que voulez-vous que je vous dise ? Je suis très honoré de présenter ce texte très attendu, le deuxième consacré à Mayotte, qui concrétise un engagement pris par le premier ministre juste après Chido. Il résulte de nombreux travaux, menés par M. Vigier quand il était ministre ou par Mme Youssouffa dans sa proposition de loi, ainsi que d’une concertation. Nous pourrions au moins nous accorder sur le fond. Le reste relève de la polémique. Vous pouvez me traiter de tous les noms d’oiseaux, cela n’a aucune importance. Pour ma part, je vous respecte, mais ce n’est pas le sujet.
Actuellement, les allégements de charges prévus par la Lodeom ne sont pas en vigueur à Mayotte, madame Youssouffa. En contrepartie, l’archipel bénéficie toujours du crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE). Sur ces deux points, selon l’étude d’impact, il est nécessaire d’aligner la législation applicable à Mayotte sur le droit commun. Le gouvernement s’y est engagé. En ce qui concerne la méthode, je suis attaché à la concertation avec les acteurs économiques et sociaux. Tout transposer immédiatement pourrait cependant, comme vient de l’expliquer M. Vigier, fragiliser les entreprises. Ne cédons pas à la démagogie, n’ignorons pas la réalité économique et sociale du territoire en cherchant à aller trop vite ; nous risquerions de nous y heurter. Je présenterai dans quelques instants l’amendement no 692, qui vise à renforcer les allégements de cotisations sociales des employeurs à Mayotte en relevant le point de sortie de 1,4 à 1,6 smic ; ainsi la hausse du smic au 1er janvier 2026 sera-t-elle soutenable.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Très bien !
M. Manuel Valls, ministre d’État
Je rappelle les étapes prévues sur le chemin de la convergence, qui prouvent que, contrairement à ce que j’entends, nous n’attendons pas 2031 pour la mettre en œuvre : le smic à Mayotte connaîtra une première hausse en 2026, à 87,5 % de sa valeur dans l’Hexagone ; en 2027, l’allocation aux adultes handicapés (AAH) connaîtra à son tour une première augmentation ; en 2028, l’Ircantec sera étendu à Mayotte ; en 2029 sont prévus un alignement de l’AAH et une première hausse du RSA – laquelle pourrait intervenir jusqu’à deux ans plus tôt, selon l’issue de la concertation ; en 2030 est programmé l’alignement de l’allocation de rentrée scolaire (ARS) ; enfin, 2031 verra l’aboutissement de la convergence et la réalisation de l’égalité. Ce calendrier obéit à une logique cohérente – je parlerais même de stratégie.
Enfin, nous débattons et chacun manie l’humour comme il l’entend, mais l’équipe du préfet a été renforcée, madame Youssouffa ; quant au général Facon, il a servi notre pays avec un grand engagement et beaucoup de sérieux.
Mme Estelle Youssouffa
Je ne le remets pas en cause !
M. Emeric Salmon
Elle n’a jamais dit le contraire !
M. Manuel Valls, ministre d’État
Il est pleinement investi sur place, avec une mission interministérielle à ses côtés, et à même de mener les négociations car il dispose de l’équipe appropriée pour ce faire, avec l’aide de mon cabinet, notamment de François Garcia. Respectons-le, tâchons d’œuvrer ensemble afin que cette négociation aille à son terme, même si je ne doute pas que vous travaillez bien avec lui.
Monsieur Rimane, j’espère que ces précisions vous auront convaincu que précipiter les choses n’est pas un gage de réussite. Le délai de cinq ans permet de réaliser la convergence sociale dans les meilleures conditions possibles.
Rappel au règlement
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet, pour un rappel au règlement.
M. Yoann Gillet
Il se fonde sur l’article 100, relatif à la bonne tenue des débats. Notre rôle de parlementaires consiste aussi…
Mme Dominique Voynet
À ne pas dire n’importe quoi !
M. Yoann Gillet
…à contrôler l’action du gouvernement. Il me paraît plutôt déplacé qu’un ministre de la République, ministre d’État, se permette d’envoyer un baiser à Mme Anchya Bamana pour se moquer d’elle lorsque celle-ci brandit le plan Mayotte 2025. C’est honteux et indigne de la fonction qui est la vôtre, monsieur le ministre !
Mme Dominique Voynet
Le baiser était pour vous, monsieur Gillet ! (Sourires sur les bancs du groupe EcoS.)
M. Yoann Gillet
Ma collègue mériterait des excuses de votre part.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
C’était un baiser bienveillant !
M. le président
Chers collègues, permettez-moi de vous rappeler que seule l’expression orale fait foi dans l’hémicycle : en pratique, l’utilisation de quelque document que ce soit y est proscrite. Je n’ai pas vu Mme Bamana montrer l’exemplaire du plan que vous évoquez, monsieur Gillet, mais vous l’avez vous-même fait à l’appui de la défense d’un amendement. Je vous prierai de vous en tenir à une expression orale, comme le prévoit notre règlement.
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Ce petit geste affectueux s’adressait à vous, monsieur Gillet (Rires sur les bancs des groupes EcoS et GDR), parce que vous m’avez traité de menteur et rappelé mon passé. J’en suis fort désolé : je retire ce geste, qui était de pure amitié. (Sourires sur les bancs du groupe RN.) Il n’était évidemment pas à la hauteur de vos insultes à mon encontre ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR, Dem, EcoS et GDR.)
Article 15 (suite)
M. le président
Les amendements nos 104 et 105 nous ont occupés durant vingt minutes. Ils étaient importants, monsieur Naillet, à n’en pas douter ; mais, à ce rythme de six amendements à l’heure, sachant qu’il en reste 300, nous y passerons le week-end. Je vais les mettre aux voix. Considérant qu’ils ont fourni l’occasion d’un débat plus large sur l’article 15, j’aimerais que nous observions désormais une discipline collective afin d’accélérer la discussion.
(Les amendements nos 104 et 105, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le président
L’amendement no 386 de Mme Émeline K/Bidi est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée pour ce qui concerne cet amendement qui vient clore en beauté le débat que nous venons d’avoir. Nous n’aimons pas les lois bavardes. Or l’amendement propose d’ajouter au début de l’alinéa 1 les mots : « Afin de garantir l’égalité réelle des citoyens de Mayotte en matière d’accès aux droits sociaux ». C’est en effet l’objectif que nous cherchons collectivement à atteindre. Une telle formulation démontre bien la force de l’engagement que traduiront les ordonnances prises par le gouvernement ; elle permet au Parlement de conforter cet engagement, qui sera désormais inscrit – contrairement au plan Mayotte 2025 – dans le marbre de la loi.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Sagesse.
(L’amendement no 386 est adopté.)
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 427.
M. Davy Rimane
Il vise à faire évoluer la sémantique en substituant au mot « métropole », qui rappelle un passé qui n’existe plus, le mot « Hexagone » lorsqu’il s’agit d’identifier la France continentale. Cette évolution a déjà été défendue dans l’hémicycle.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Demande de retrait. En principe, on pourrait croire qu’il s’agit d’un amendement rédactionnel, mais il pourrait malheureusement avoir des conséquences juridiques défavorables à l’application de l’alinéa 1 de l’article 15.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Le sujet n’est pas négligeable. Je considère que les termes « métropole » ou « France métropolitaine », qui figurent dans la Constitution française, devraient être remplacés dans les textes par des termes que l’on pourrait qualifier de neutres, tels que « France hexagonale » ou « territoire européen de la France ».
Je me suis récemment prononcé en faveur de la « démétropolisation » des outre-mer dans l’hémicycle de la collectivité territoriale de Guyane à Cayenne – je crois que nous étions présents tous les deux ce jour-là, monsieur Rimane. C’est le Conseil d’État lui-même qui a rétabli le terme « métropole » dans le présent projet de loi, conformément à son utilisation dans la Constitution et la plupart des codes. Le débat n’est donc pas le même que celui introduit plus tôt par Mme Voynet.
Quoi qu’il en soit, nous devons avoir une discussion globale à ce sujet, plutôt que de procéder à des modifications au cas par cas. Il est vrai que derrière ces appellations se pose la question de la place symbolique des territoires ultramarins vis-à-vis de l’Hexagone, mais également de la perception qu’a l’Hexagone de ceux-ci. Alors que j’entends refonder ces relations, cette question mérite d’être posée dans un cadre adapté. À titre personnel, je préfère la terminologie « territoire européen de la France », qui me paraît la plus juste parce qu’elle inclut les îles françaises situées à proximité immédiate de l’Hexagone, comme la Corse. Commençons ce travail de fond avec les parlementaires et les élus des territoires concernés afin de déterminer la désignation susceptible de faire consensus. D’ici là, je vous demande de retirer votre amendement, car, comme l’a expliqué Mme la rapporteure, il risque de poser des problèmes.
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane.
M. Davy Rimane
Je suis un peu étonné : nous avons déjà voté en séance la modification de ces termes au sein d’autres textes.
Mme Maud Petit
En effet !
M. Davy Rimane
C’est la première fois que j’entends ces arguments de la part d’un ministre. Ils n’avaient jamais été invoqués auparavant. Je suis donc assez surpris par votre réponse et je maintiens mon amendement.
M. le président
La parole est à Mme Estelle Youssouffa.
Mme Estelle Youssouffa
Le collègue Olivier Serva a fait de l’utilisation du terme « Hexagone » son combat – à juste titre.
M. Davy Rimane
Oui !
Mme Estelle Youssouffa
« Métropole » est en effet chargé de sous-entendus coloniaux évidents. « Hexagone » l’a remplacé dans la loi de programmation militaire, par exemple, sans que cette modification rencontre le moindre obstacle.
M. Davy Rimane
Voilà !
Mme Estelle Youssouffa
Par ailleurs, monsieur le ministre, loin de moi l’idée de manquer de respect au général Facon. Fille et sœur de militaire, j’ai le plus grand respect pour ceux qui ont servi et qui servent encore notre pays. Sans amalgame, je voulais simplement insister sur le fait qu’il est déjà chargé d’une mission très importante sur la reconstruction de Mayotte.
M. Emeric Salmon
En effet.
Mme Estelle Youssouffa
Le chantier de l’égalité sociale est tout autre, beaucoup plus complexe. Préférer qu’une personne expérimentée soit dédiée à cette tâche, plutôt que de confier celle-ci à celui qui a déjà la responsabilité de préfigurer l’établissement public de reconstruction de Mayotte, ne me semble pas trop demander.
(L’amendement no 427 est adopté.)
M. le président
Sur l’amendement no 73, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Yoann Gillet, pour soutenir cet amendement.
M. Yoann Gillet
L’amendement no 73 vise à exclure l’AME des prestations sociales susceptibles d’être étendues à Mayotte par voie d’ordonnance.
Mme Léa Balage El Mariky
L’AME est une belle chose !
M. Yoann Gillet
L’AME coûte 1,3 milliard d’euros chaque année aux Français ; 500 000 étrangers en bénéficient tous les ans. L’AME couvre des interventions non urgentes, y compris certaines interventions de chirurgie de confort…
M. Davy Rimane
C’est faux !
M. Yoann Gillet
…ou de transition. Pendant ce temps, plus d’un tiers des Français renoncent à des soins faute de moyens. Notre système de santé s’effondre partout en France, et particulièrement à Mayotte où près de la moitié de la population est étrangère. Dans ce territoire, la pression migratoire est massive et incontrôlée ; les services publics sont saturés ; la santé est littéralement en crise. L’hôpital de Mayotte accueille chaque année 85 000 étrangers.
Mme Léa Balage El Mariky
C’est parce qu’il n’y a pas d’AME qu’ils sont à l’hôpital !
M. Yoann Gillet
Il serait irresponsable d’étendre l’AME à Mayotte. Cela créerait un appel d’air et l’AME ne viendrait pas renflouer les caisses du centre hospitalier de Mayotte (CHM), puisque ce dernier bénéficie déjà d’une prime en raison du grand nombre d’étrangers qu’il accueille. Il est donc nécessaire non seulement de ne pas étendre l’AME à Mayotte, mais de supprimer l’AME sur l’ensemble du territoire national afin de la remplacer par une aide médicale d’urgence. C’est ce que nous proposons et c’est ce que propose Marine Le Pen. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Le Sénat avait exclu l’AME du champ de cet article ; elle y a été réintroduite en commission, pour une application immédiate. Mon attachement à l’AME n’est plus à démontrer ; vous connaissez la défense fervente de ce dispositif que j’ai eu l’occasion de produire ici même. Néanmoins, je donne un avis favorable à cet amendement.
D’abord, comme je l’ai dit en commission, l’AME ne permettra pas, eu égard au faible nombre de professionnels de santé présents sur place, de désengorger l’hôpital de Mamoudzou – ce qui devrait constituer notre principal objectif.
En second lieu, il ne faut pas négliger l’appel d’air que pourrait éventuellement provoquer l’introduction de l’AME à Mayotte.
M. Davy Rimane
C’est faux ! C’est n’importe quoi !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Là encore, selon ce qui a été voté en commission, l’AME devrait s’appliquer immédiatement. Or ce n’est pas l’objet du texte, même si cela ne signifie pas que, dans le cadre de la convergence des prestations sociales d’ici à 2036, la question de l’AME ne doive pas être posée. Mais la priorité des priorités est de développer l’accès aux soins de ville pour les Mahoraises et les Mahorais, afin de désengorger l’hôpital. Introduire l’AME dès à présent n’aurait aucune incidence sur l’accès aux soins.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis. Je reprends à mon compte les propos de Mme la rapporteure, qui s’est exprimée sur ce sujet avec la conviction qu’on lui connaît.
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet
Je ne faisais pas partie de ceux qui suspectaient le gouvernement d’abuser du mécanisme des ordonnances pour réintroduire par la bande l’AME, alors qu’il s’est prononcé à maintes reprises, au cours de l’examen de ce projet de loi, contre son instauration à Mayotte.
Je considère d’une part que les arguments avancés à propos de l’AME sont erronés et d’autre part, madame la rapporteure, qu’il n’est pas nécessaire de donner des gages au Rassemblement national, qui vient d’argumenter en faveur de la suppression de l’AME partout et pour tout le monde.
Contrairement à ce qui a été dit, on ne rase pas gratis avec l’AME et on ne se fait pas opérer pour des motifs de confort : le panier de soins est limité, avec une liste d’actes et de molécules accessibles aux bénéficiaires.
Par ailleurs, si le CHM est saturé, c’est d’abord parce que le système libéral est très faible…
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
C’est bien ce que j’ai dit !
Mme Dominique Voynet
…et parce que les personnes qui n’en ont pas les moyens ne peuvent y accéder, d’autant qu’elles ne peuvent bénéficier de l’AME. De plus, le budget du CHM est indépendant de l’AME : le CHM est financé par une dotation globale, négociée chaque année avec le ministère de la santé. Cependant, comme c’est la sécurité sociale qui finance la dotation globale, alors que c’est l’État qui finance l’AME, l’instauration de cette dernière à Mayotte introduirait une plus grande transparence dans le financement des actes médicaux et de l’activité de soin.
Madame la rapporteure, je me trouve assez désolée et désappointée par les arguments que vous avez exposés,…
M. Guillaume Florquin et M. Frédéric Weber
Ouin, ouin !
Mme Dominique Voynet
…qui ne sont pas de nature à éclairer le débat. (Applaudissements sur les bancs du groupe EcoS.)
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 73.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 47
Nombre de suffrages exprimés 47
Majorité absolue 24
Pour l’adoption 31
Contre 16
(L’amendement no 73 est adopté.)
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 359 rectifié, 368 et 541.
(L’amendement no 359 rectifié est retiré.)
M. le président
La parole est à M. Elie Califer.
M. Elie Califer
M. le ministre venant de s’engager à instaurer des dispositifs d’exonération, nous retirons l’amendement no 368.
(L’amendement no 368 est retiré.)
(L’amendement no 541 est retiré.)
M. le président
La parole est à M. le ministre d’État, pour soutenir l’amendement no 692.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Le gouvernement s’est engagé, dans le cadre de la convergence sociale, à donner la priorité à la hausse du smic. En effet, c’est le travail qui crée la richesse économique. Cette priorité se traduit concrètement et rapidement par une revalorisation du smic net à Mayotte, dès le 1er janvier 2026, à hauteur de 87,5 % du montant national. Il sera ensuite revalorisé chaque année. Cette progressivité et cette visibilité sont deux conditions essentielles à la soutenabilité de la hausse du smic pour les entreprises, dont on connaît la fragilité à Mayotte.
Je réaffirme que notre objectif est de créer les conditions du développement le plus prospère possible à Mayotte, même si je mesure tout le travail qu’il reste à accomplir. Une troisième condition doit impérativement être remplie pour permettre cette prospérité : le déploiement des mesures d’accompagnement de la hausse du smic.
Une première mesure figurait dans la version initiale du projet de loi : l’instauration d’une zone franche globale, qui constitue un engagement important et concret, de nature à rassurer ceux qui s’inquiètent de la mise en œuvre des mesures annoncées.
En complément, les rapporteurs ont effectué un travail remarquable afin de déterminer les mesures pertinentes pour accompagner la hausse du smic. Cela a conduit la commission à voter le déploiement des allégements dits Lodeom au 1er janvier 2026 à Mayotte, avec en contrepartie la suppression du CICE.
Depuis, les acteurs économiques et sociaux appellent notre attention sur les effets que provoquerait une suppression rapide du CICE. Un dispositif alternatif a ainsi été préparé, visant le même objectif – accompagner au mieux la hausse du smic net au 1er janvier 2026. C’est l’objet de cet amendement. Il consiste à renforcer, à Mayotte, la réduction générale de cotisations sur les bas salaires : d’une part, en portant le point de sortie des allégements de cotisations à 1,6 smic au lieu de 1,4 ; d’autre part, en étendant le champ de la réduction générale de cotisations aux contributions d’assurance chômage, alors qu’elles concernent aujourd’hui uniquement les cotisations maladie, maternité, vieillesse et famille. Cette mesure consiste à avancer de dix ans ce qui était prévu en matière d’allégements de cotisations.
Le dispositif proposé a pour principal mérite de ne faire aucun perdant parmi les entreprises. Autant l’association d’un déploiement des allégements Lodeom avec la suppression du CICE pouvait faire des gagnants et des perdants, autant le renforcement des allégements généraux ne laisse aucune entreprise de côté.
En outre, le dispositif est conçu comme une véritable mesure d’accompagnement de la hausse du smic au 1er janvier 2026, car il cible des niveaux de rémunération proches de ceux concernés par la hausse. Il se concentre sur le besoin créé au 1er janvier 2026 ; l’adopter laisse la discussion ouverte pour les étapes ultérieures. Autrement dit, le déploiement des allégements Lodeom à Mayotte et la suppression du CICE interviendront ensuite, selon des modalités à définir dans le cadre de la concertation et de la négociation avec les acteurs économiques et sociaux.
Enfin, je tiens à affirmer que le gouvernement est engagé en faveur du déploiement du droit commun à Mayotte, au plus tard au 1er janvier 2031. Le droit commun correspond au déploiement des allégements Lodeom et à la suppression du CICE. L’amendement vise un objectif plus modeste : pourvoir aux besoins qui seront créés le 1er janvier 2026. Ensuite, les acteurs économiques et sociaux proposeront les modalités les plus adéquates concernant le déploiement des allégements Lodeom et la fin du CICE. L’amendement tend à instaurer un socle à partir duquel les travaux avec les acteurs économiques et sociaux pourront être approfondis.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Très bien !
M. le président
Quel est l’avis de la commission sur cet amendement du gouvernement ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Je donnerai un avis personnel, puisque nous n’avons pas pu examiner cet amendement en commission.
Les rapporteurs ont travaillé à sortir du champ des ordonnances certaines mesures, pour les inscrire dans le marbre du texte. La première mesure significative à avoir bénéficié de ce traitement est la hausse du smic net, pour qu’il représente 87,5 % du montant national au 1er janvier 2026. Cette mesure représentait un coût pour les entreprises ; notre travail a consisté à trouver le moyen de le combler.
Après avoir auditionné le Medef et la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) de Mayotte, il est apparu que le dispositif dit Lodeom, qui n’était pas appliqué à Mayotte, constituait la meilleure voie pour compenser l’augmentation des charges pour les entreprises. Nous avons ainsi adopté, en commission, un amendement en ce sens.
Cet amendement a eu le mérite d’obliger l’administration à fournir ce que nous n’avions pas : une mesure permettant de ne pas faire de perdants au 1er janvier 2026 – car tel est notre objectif. En effet, le déploiement du dispositif Lodeom voté en commission aurait fait des perdants et des gagnants à cette date.
À titre personnel, je donne un avis favorable sur cet amendement du gouvernement, qui ne fera aucun perdant parmi les entreprises à compter du 1er janvier 2026. L’engagement de l’État, dans le cadre de la convergence sociale, est de poursuivre le travail destiné à transférer progressivement le CICE vers le dispositif Lodeom, dont Mayotte doit bénéficier comme les autres territoires.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Très bien !
(L’amendement no 692 n’est pas adopté.)
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Oh, il n’est pas adopté ! Le RN a voté contre ! Certains n’ont pas entendu la mise aux voix : peut-on la refaire, monsieur le président, ou procéder à un scrutin public ?
M. le président
Je suis désolé, monsieur le rapporteur général, il n’y a eu aucune ambiguïté sur ce vote. C’est la procédure.
Mes chers collègues, nous avons examiné quarante-six amendements en deux heures. Plus précisément, nous avons examiné un peu moins de quarante amendements pendant la première heure, et seulement huit pendant la deuxième. À ce rythme, je le dis à titre d’information, il nous reste douze heures quarante de débats, ce qui vous obligera à y passer la nuit.
Je vous laisse le soin de vous autoréguler : au banc, la parole n’est pas limitée. On ne mesure pas toujours le temps que l’on peut passer sur des sujets importants ; des parlementaires peuvent aussi prendre chacun leurs deux minutes. Le choix vous revient désormais ; je n’interviendrai plus à ce sujet, pour me concentrer sur mon travail.
L’amendement no 565 de Mme la rapporteure est un amendement de coordination.
(L’amendement no 565, accepté par le gouvernement, est adopté.)
M. le président
L’amendement no 426 de M. Davy Rimane est défendu.
(L’amendement no 426, repoussé par la commission et le gouvernement, est adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 148.
Mme Sandrine Nosbé
Il tend à accélérer la convergence des prestations sociales et du smic entre Mayotte et l’Hexagone, afin que l’égalité des droits soit atteinte d’ici 2026. Mon collègue Ratenon a eu l’occasion de le dire avant son malaise : Mayotte demeure le département des exceptions et des dérogations à la loi, en dépit de sa situation socio-économique affligeante. C’est là une atteinte aux droits fondamentaux des personnes – droits depuis trop longtemps bafoués. À Mayotte, se soigner est 16,9 % plus cher que dans l’Hexagone ; le montant du RSA y est deux fois moins élevé et le smic horaire brut y est de 8,98 euros, contre 11,88 ailleurs en France.
Si nous saluons l’esprit de cet article, nous déplorons que l’alignement du smic et des prestations sociales ne soit pas immédiat. Nous déplorons également qu’il se fasse par ordonnance, selon le bon vouloir du gouvernement, et que le Sénat ait adopté un amendement visant à exclure l’AME du champ de ces ordonnances– je regrette d’ailleurs que vous veniez de faire de même.
Nous avons eu l’occasion de le rappeler de nombreuses fois avant-hier : les Mahoraises et les Mahorais sont profondément attachés à notre devise républicaine – Liberté, Égalité, Fraternité. La fraternité a enregistré un recul, avec le report à 2030 de la suppression du visa territorialisé. L’égalité, elle, doit advenir immédiatement ; les Mahorais attendent depuis bien trop longtemps. Il y a d’autant moins de raisons de ne pas procéder maintenant à ces alignements que le projet de zone franche, lui, verra le jour tout de suite.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Avis défavorable. Nous en avons déjà débattu à l’occasion de l’examen des premiers amendements : la convergence se fera progressivement. Prétendre qu’elle pourrait être achevée au 1er janvier 2026 serait mentir. Vous seriez d’ailleurs les premiers à venir vous plaindre, en 2027, qu’elle n’ait pas été réalisée dès 2026.
(L’amendement no 148, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 428 de M. Davy Rimane, qui fait l’objet d’un sous-amendement no 698, est défendu.
Le sous-amendement no 698 de Mme la rapporteure est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Avis favorable à l’amendement no 428, sous réserve de l’adoption de mon sous-amendement.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
(Le sous-amendement no 698 est adopté.)
(L’amendement no 428, sous-amendé, est adopté.)
M. le président
La parole est à M.Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 431.
M. Davy Rimane
Il tend à préciser le contenu du rapport que le gouvernement remettra chaque année au Parlement.
(L’amendement no 431, repoussé par la commission et le gouvernement, est adopté.)
M. le président
Sur l’amendement no 356, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
M. le président
La parole est à Mme Estelle Youssouffa, pour le soutenir.
Mme Estelle Youssouffa
Il vise à ce que les parlementaires de Mayotte soient associés aux travaux portant sur la convergence vers l’égalité sociale. Il me semble important de le préciser.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Avis défavorable. Il est important que les parlementaires soient associés à la rédaction des ordonnances et il conviendra de désigner dans un deuxième temps, selon la règle habituelle, ceux qui seront appelés à suivre ce travail. Il n’est pas opportun de préciser que ces parlementaires doivent être mahorais.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 356.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 40
Nombre de suffrages exprimés 39
Majorité absolue 20
Pour l’adoption 20
Contre 19
(L’amendement no 356 est adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 15, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 42
Nombre de suffrages exprimés 36
Majorité absolue 19
Pour l’adoption 36
Contre 0
(L’article 15, amendé, est adopté.)
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet.
M. Yoann Gillet
Je demande une suspension de séance de dix minutes – et je propose qu’ensuite, nous ne nous arrêtions plus avant 20 heures.
M. le président
La suspension est de droit – mais dix minutes, vraiment ?
Mme Prisca Thevenot
Ça va trop vite, peut-être ? (Sourires.)
M. Gabriel Attal
Allez, cinq minutes !
Suspension et reprise de la séance
M. le président
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures dix.)
M. le président
La séance est reprise.
Après l’article 15
M. le président
Nous en venons à plusieurs amendements portant article additionnel après l’article 15.
Je suis saisi de six amendements, nos 336 deuxième rectification, 471 deuxième rectification, 615 deuxième rectification, 335, 470 et 556, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 336 deuxième rectification, 471 deuxième rectification et 615 deuxième rectification sont identiques, de même que les amendements nos 335, 470 et 556.
Sur l’ensemble de ces amendements, je suis saisi par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
M. le président
L’amendement no 336 deuxième rectification de Mme Estelle Youssouffa est défendu.
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet, pour soutenir l’amendement no 471 deuxième rectification.
M. Yoann Gillet
Il vise à renforcer temporairement l’attractivité salariale à Mayotte en élargissant l’assiette du CICE aux rémunérations annuelles allant jusqu’à trois fois et demie le smic pour les années 2025 à 2027.
Actuellement, dès que la rémunération d’un salarié dépasse le plafond de 2,5 smic, elle est intégralement exclue du dispositif. Ce mécanisme crée un effet de seuil dissuasif, qui freine les revalorisations salariales et contribue au maintien de salaires bas pour les travailleurs.
Cet amendement a été rédigé avec la Fédération des entreprises des outre-mer. (Sourires)
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Merci M. Mariton !
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 615 deuxième rectification.
Mme Dominique Voynet
Ces trois amendements identiques ont en effet été déposés à l’initiative de la Fédération des entreprises des outre-mer. Afin d’attirer des profils hautement qualifiés à Mayotte et de structurer l’économie de l’archipel, où le coût de la vie est élevé, ils prévoient que les entrepreneurs mahorais bénéficient du CICE pour les salariés dont la rémunération ne dépasserait pas le plafond de 3,5 fois le smic.
Je conserve un doute sur l’efficacité de cette mesure, mais le seuil actuel est un couperet ; on passe brutalement de l’exonération totale à aucune exonération. On pourrait imaginer un mécanisme progressif – je le dis avec précaution, car je ne voudrais pas m’attirer des critiques acerbes.
M. le président
Nous en venons à la deuxième série d’amendements identiques.
L’amendement no 335 de Mme Estelle Youssouffa est défendu, de même que l’amendement no 470 de Mme Anchya Bamana.
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 556.
Mme Dominique Voynet
Il s’agit d’éviter l’effet cliquet du CICE autour de 2,5 smic, afin de ne pas créer de trappe à bas salaires alors même que le territoire doit attirer et fidéliser des talents pour assurer sa reconstruction. Cette mesure serait provisoire : elle prendrait fin en 2027. Elle serait utile pour donner une impulsion à l’attractivité de Mayotte.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Je suis surprise que ces amendements ne soient pas tombés, mais c’est pour des raisons formelles. Sur le fond, ils n’ont plus lieu d’être. Vous n’avez pas voté l’amendement no 692 du gouvernement, dont je redis qu’il ne faisait aucun perdant – je croyais que c’était là un objectif commun à tout l’hémicycle, mais visiblement je me trompais. Dès lors, nous en restons au dispositif voté en commission : dès le 1er janvier, le dispositif Lodeom est étendu à Mayotte et le CICE disparaît.
Je vous invite donc à retirer ces amendements, qui seraient de toute façon inapplicables. Sinon, mon avis sera défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Je mets aux voix les amendements identiques nos 336 deuxième rectification, 471 deuxième rectification et 615 deuxième rectification.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 35
Nombre de suffrages exprimés 33
Majorité absolue 17
Pour l’adoption 19
Contre 14
(Les amendements identiques nos 336 deuxième rectification, 471 deuxième rectification et 615 deuxième rectification sont adoptés ; en conséquence, les amendements nos 335, 470 et 556 tombent.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 660 rectifié et 567 rectifié.
La parole est à M. le ministre d’État, pour soutenir l’amendement no 660 rectifié.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Je l’ai présenté tout à l’heure : il s’agit d’étendre à Mayotte la protection universelle maladie (Puma) et d’attribuer automatiquement le volet gratuit de la complémentaire santé solidaire (C2S) aux bénéficiaires de l’allocation aux adultes handicapés (AAH) et de l’allocation de solidarité aux personnes âgées (Aspa), c’est-à-dire le minimum vieillesse.
M. le président
L’amendement no 567 rectifié de Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure, est défendu.
(Les amendements identiques nos 660 rectifié et 567 rectifié sont adoptés.)
M. le président
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 107.
M. Elie Califer
Toujours pour avancer vers l’égalité réelle dans les meilleurs délais, car c’est ce qu’attendent les Mahorais, cet amendement tend à instituer une conférence sociale pour Mayotte afin d’assurer à terme un alignement des droits sociaux, notamment en matière de rémunération et de protection sociale.
Il est libellé de la façon suivante : « Le représentant de l’État à Mayotte peut réunir régulièrement une conférence territoriale visant à favoriser l’harmonisation progressive des règles sociales applicables à Mayotte avec celles en vigueur sur le territoire hexagonal. »
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Je veux d’abord dire au groupe Rassemblement national, qui vient de s’abstenir sur l’alignement de la C2S pour les Mahoraises et les Mahorais, que c’est une position étrange quand on demande une convergence sociale immédiate.
Sur l’amendement no 107, demande de retrait car l’amendement est satisfait : nous en avons débattu en commission, la concertation a commencé.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
(L’amendement no 107 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 106.
M. Elie Califer
Il est dans le même esprit que le précédent. Nous pensons qu’il faut avancer le plus vite possible vers la convergence sociale. Ce texte ne propose pas ce qu’attendent les Mahorais.
Une conférence sociale permettrait d’accélérer mais aussi de rétablir la confiance. Nous le disons depuis quelques jours : tant que la confiance ne sera pas rétablie, il sera difficile d’apaiser la situation – d’autant que ce que nous votons n’est pas accompagné de réels moyens financiers, mais plutôt d’intentions et de calendriers flous.
Il faut donc un geste.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Avis défavorable. Le calendrier existe, je l’ai avec moi et je vous invite à le consulter.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
(L’amendement no 106 n’est pas adopté.)
Article 15 bis
M. le président
Sur cet article, je suis saisi par le groupe Horizons & indépendants d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
L’amendement no 433 rectifié de M. Davy Rimane est défendu.
(L’amendement no 433 rectifié, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
Sur l’amendement n° 554, je suis saisi par le groupe UDR d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je suis saisi de quatre amendements, nos 151, 353, 154 et 152, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 151 et 353 sont identiques.
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 151.
Mme Sandrine Nosbé
Nous souhaitons que le niveau du smic à Mayotte soit fixé à 100 % du niveau national dès 2026, afin d’atteindre l’égalité des droits dès cette date.
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 353.
M. Davy Rimane
Mon amendement est identique au précédent : il s’agit d’aligner le smic à Mayotte sur celui de l’Hexagone dès 2026, au lieu de le fixer à 87,5 % du niveau national comme le gouvernement le propose.
M. le président
Les amendements nos 154 et 152 de Mme Mathilde Hignet sont défendus.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Avis défavorable. Nous avons inscrit dans la loi, je le redis, l’objectif d’un smic à 100 % du niveau national en 2031 ainsi que cette première étape d’un taux net de 87,5 %. C’est là un effort important, notamment pour les entreprises, pour qui ces augmentations doivent être acceptables.
Achever la convergence en 2031 est un objectif réaliste et réalisable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
(Les amendements identiques nos 151 et 353 ne sont pas adoptés.)
(Les amendements nos 154 et 152, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le président
L’amendement no 554 de Mme Anchya Bamana est défendu.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Défavorable.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 554.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 36
Nombre de suffrages exprimés 31
Majorité absolue 16
Pour l’adoption 18
Contre 13
(L’amendement no 554 est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 15 bis, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 35
Nombre de suffrages exprimés 35
Majorité absolue 18
Pour l’adoption 26
Contre 9
(L’article 15 bis, amendé, est adopté.)
Article 16
M. le président
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir les amendements nos 289 et 411, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
M. Elie Califer
Cet amendement vise à avancer la mise en œuvre du régime de retraite complémentaire à Mayotte, initialement prévue dans un délai de deux ans à compter de la promulgation de la présente loi. Cette anticipation répond à une urgence sociale et économique manifeste, liée à la faiblesse extrême des pensions de retraite dans le département.
Vous comprenez nos demandes ; le niveau des retraites est particulièrement bas à Mayotte : les données récentes nous disent que la pension moyenne s’y élève à 273 euros par mois, contre plus de 650 euros dans l’Hexagone.
M. le rapporteur général a fait une belle démonstration depuis quelques jours : je crois qu’on peut accélérer l’amélioration des retraites afin que Mayotte sorte du sous-développement. Cette réforme aurait aussi un impact économique favorable.
L’amendement no 411 est un amendement de repli.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Je ne comprends pas pourquoi vous avez redéposé l’amendement no 289, dont nous avons déjà débattu en commission : il est moins-disant que le texte, qui prévoit que le régime de retraite complémentaire est applicable à Mayotte « à une date fixée par décret, et au plus tard deux ans après la promulgation de la loi ». Votre amendement ne permet qu’une application dans deux ans.
Quant à l’amendement no 411, la formule « dans les meilleurs délais » est trop imprécise.
Avis défavorable aux deux amendements.
(L’amendement no 289 est retiré.)
M. le président
Sur les articles 16, 17 et 17 bis A, je suis saisi par le groupe Horizons & indépendants de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis du gouvernement sur l’amendement no 411 ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Défavorable.
(L’amendement no 411 n’est pas adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 16.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 40
Nombre de suffrages exprimés 36
Majorité absolue 19
Pour l’adoption 36
Contre 0
(L’article 16 est adopté.)
Article 17
M. le président
L’amendement no 575 de Mme Anchya Bamana est défendu.
(L’amendement no 575, repoussé par la commission et le gouvernement, est adopté ; en conséquence, l’article 17 est ainsi rédigé et les amendements suivants tombent.)
Après l’article 17
M. le président
Je suis saisi de deux amendements portant article additionnel après l’article 17.
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 549.
Mme Dominique Voynet
Avec quatre fois moins de médecins que dans l’Hexagone, Mayotte constitue le désert médical le plus important du territoire français. L’offre et la qualité des soins n’y sont pas à la hauteur des enjeux sanitaires auxquels sont confrontés les habitants, qui peinent à se soigner dans des délais suffisants. Pourtant, l’archipel, particulièrement vulnérable, connaît une prévalence des maladies chroniques, qui interviennent en général plus précocément au cours de la vie que dans beaucoup d’autres territoires ; ses habitants sont exposés à de nombreux risques infectieux, à des recrudescences de certaines épidémies, comme le choléra en 2024.
Cet amendement vise à ce que soient prises des dispositions facilitant l’installation de professionnels de santé ou de centres de santé, dont l’archipel a grand besoin. Il s’agit pratiquement d’un amendement de principe : les dispositions concrètes à négocier avec l’Ordre des médecins, avec les partenaires sur place, sont de nature plutôt réglementaire que législative, mais il faut, je le répète, en arrêter le principe.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Chers collègues, permettez-moi de dire qu’en adoptant l’amendement no 575 de Mme Bamana, qui revient à supprimer l’article 17 tel qu’il était rédigé, vous avez réduit à néant tout le travail accompli pour essayer d’implanter des officines à Mayotte.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Eh oui !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Ne serait-ce qu’en réintroduisant l’« avis conforme du conseil central de la section E de l’Ordre national des pharmaciens », alors que, par un travail partenarial, nous avions réussi à obtenir un avis simple, vous avez pris le risque de développer les contentieux ayant trait à l’ouverture d’officines. La remise en ordre du circuit de distribution des médicaments – objectif travaillé avec l’Ordre, avec l’agence régionale de santé (ARS), laquelle demandait à opérer à l’échelle du territoire de santé et non des intercommunalités, qui bloquent ces ouvertures –, vous venez de la réduire à néant !
M. Gabriel Attal
C’est totalement irresponsable !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Quant à l’amendement de Mme Voynet, avis défavorable : ces aides existent déjà – ce sont celles qui sont applicables dans l’Hexagone.
(L’amendement no 549, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
Sur l’amendement no 569, je suis saisi par le groupe UDR d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 111.
M. Elie Califer
Il vise à instaurer à Mayotte une stratégie territoriale globale de santé, centrée sur le renforcement de l’hôpital de Mamoudzou et du maillage sanitaire du territoire, afin d’améliorer l’accessibilité, la qualité et la continuité des soins. Il est bon de le redire, cette qualité et cette accessibilité sont affectées par les nombreuses fragilités de la situation sanitaire ; l’hôpital de Mamoudzou, principal établissement de santé de l’île, qui joue un rôle central, se trouve confronté à d’importantes difficultés structurelles, notamment en matière de capacités techniques et humaines.
Étant donné ces constats, une telle stratégie est indispensable. Cette approche intégrée vise à garantir une offre de soins équilibrée, accessible, de qualité, à la hauteur des besoins spécifiques de la population ; en outre, elle s’inscrirait pleinement dans l’engagement pris par l’État de renforcer les services publics et sociaux afin de réduire les inégalités et d’améliorer durablement la qualité de vie des Mahorais, comme nous ne cessons de le demander.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Ce que vous réclamez existe : c’est le schéma régional de santé. Refaire un schéma ne produirait rien de plus. Par conséquent, demande de retrait ; à défaut, avis défavorable.
(L’amendement no 111, repoussé par le gouvernement, est adopté.)
M. Philippe Vigier, rapporteur général et M. Manuel Valls, ministre d’État
Bravo, monsieur Califer !
Article 17 bis A
M. le président
L’amendement no 569 de Mme Anchya Bamana, tendant à supprimer l’article 17 bis A, est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Avis défavorable : je suis extrêmement surprise que Mme Bamana ait pu déposer cet amendement. L’article, issu de l’adoption d’un amendement en commission, vise à ce que l’on travaille le circuit légal de distribution des médicaments – c’est tout ! Plus de 50 % des médicaments partent de l’hôpital – sur le budget de celui-ci, mais cela ne gêne apparemment personne – pour être distribués dans des centres. Jamais vous n’arriverez à faire ouvrir des pharmacies si nous ne commençons pas, ne serait-ce que pour des raisons de sécurité, par remettre droit ce circuit, si je puis dire. Encore une fois, tel est l’unique objectif de l’article ; il est étrange que vous proposiez sa suppression.
M. Gabriel Attal
Évidemment ! C’est incompréhensible !
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 569.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 46
Nombre de suffrages exprimés 46
Majorité absolue 24
Pour l’adoption 26
Contre 20
(L’amendement no 569 est adopté ; en conséquence, l’article 17 bis A est supprimé.)
M. Gabriel Attal
C’est n’importe quoi !
Article 17 bis
(L’article 17 bis est adopté.)
Article 18
(L’article 18 est adopté.)
Article 26
M. le président
Sur les articles 26, 27 et 28, je suis saisi par le groupe Horizons & indépendants de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Yoann Gillet, pour soutenir l’amendement no 74.
M. Yoann Gillet
Il vise à introduire dans le texte une précision essentielle, celle consistant à réserver le bénéfice du passeport pour la mobilité des études aux élèves de nationalité française…
M. Davy Rimane
Mais arrêtez…
M. Yoann Gillet
…dans le cadre spécifique de Mayotte. Il ne s’agit pas d’exclusion, mais de responsabilité. Mayotte traverse une situation exceptionnelle, subit une pression démographique sans commune mesure, nourrie par une large part d’immigration irrégulière qui désorganise profondément l’équilibre des politiques publiques. Nous avons tous vu, parfois dans le silence, les effets de cette tension sur la santé, la sécurité, le logement et désormais l’école, où le nombre d’inscrits a augmenté de 22 % en seulement cinq ans.
L’académie de Mayotte fait face à une explosion des effectifs ; les filières professionnelles sont saturées au point que seul un tiers des élèves de troisième peuvent y accéder. Les entreprises locales, après le passage de Chido, peinent à proposer les stages nécessaires. Résultat : des élèves orientés par défaut, des filières engorgées, une jeunesse laissée sans perspectives. Face à cela, devons-nous encore diluer l’effort public, disperser sans discernement les moyens de la solidarité nationale ? La réponse est évidemment non. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Je pourrais qualifier cet amendement d’inopportun.
Mme Prisca Thevenot
C’est encore trop gentil !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Je dirais même qu’il est inconstitutionnel, mais puisque vous venez de voter en faveur de la distribution illégale des médicaments, vous pourrez bien adopter un amendement contraire à la Constitution. Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Ce n’est pas la responsabilité du Rassemblement national qui est en cause, mais l’absence, notamment, même si je salue le fait que le président Attal soit là, de la majorité, du socle commun.
Un député du groupe RN
Il n’y a personne !
M. Manuel Valls, ministre d’État
Cette réalité a une vertu : elle révèle la démagogie du Rassemblement national s’agissant par exemple, contre toute idée de l’économie, des entreprises, tout esprit de sérieux, d’aligner le smic sur celui de l’Hexagone dès 2027. Ce sont des mesures scandaleuses – j’aimerais que Mme Bamana nous explique pourquoi elle a déposé un amendement de suppression de l’article 17 bis A –,…
Mme Dominique Voynet
Il y a là un lobby !
M. Manuel Valls, ministre d’État
…scandaleuses et contraires à la santé publique ! En outre, elles sont totalement inconstitutionnelles. C’est votre programme, votre conviction ; elles passeront parce que vous êtes les plus nombreux dans l’hémicycle, ce qui nécessitera du travail ensuite. Je ne m’adresse pas aux parlementaires présents, je respecte la séparation des pouvoirs législatif et exécutif, mais je le constate. Cela donne un aperçu de votre vision, y compris, en l’occurrence, pour Mayotte ! Avis défavorable.
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane.
M. Davy Rimane
Au-delà de son inconstitutionnalité, l’amendement est incompréhensible. Des enfants réussissent à aller à l’école, ils font des études, ils pourraient, avec L’Agence de l’outre-mer pour la mobilité (Ladom), bénéficier de ce passeport. Parce qu’ils ne sont pas Français, ils n’y auraient pas droit ? Vous rendez-vous compte du message que vous adressez à tous les jeunes qui s’intègrent avec force, vigueur et respect – ils sont nombreux dans mon territoire – et à qui vous refusez l’accès aux hautes études ? C’est totalement contre-productif ! Il convient de dire à cette jeunesse que lorsqu’on va à l’école, que l’on fait des études, on est accompagné jusqu’au bout, que l’on soit Français ou non. C’est le brassage culturel qui fait la richesse de nos territoires, et vous êtes en train d’envoyer un message qui va à l’encontre de cette réalité. En montrant du doigt à longueur de temps celles et ceux qui n’ont pas la nationalité française, vous allez même, monsieur Gillet, contre les principes de solidarité et d’égalité de ce pays ! (Mme Sandrine Nosbé applaudit.)
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet
À travers le monde, on nous regarde ! Pas assez, car nous ne sommes pas assez nombreux aujourd’hui (Sourires sur quelques bancs du groupe RN) pour donner de l’écho à ce qui vient de se produire, mais je voudrais vous raconter comment les choses se passent à Mayotte. Depuis des années, une sorte de tradition consiste à donner un exeat aux lycéens comoriens qui ont le bac avec mention « très bien », afin qu’ils puissent poursuivre leurs études en métropole ; chaque année, ils sont plusieurs dizaines à bosser dur pour obtenir ce bon de sortie. Apprendre, se former, constitue la façon la plus évidente de s’intégrer, de prendre sa place dans la société,…
M. Davy Rimane
Bien sûr !
Mme Dominique Voynet
…et vous voulez y couper court !
Tout à l’heure, nous avons entendu quelqu’un nous reprocher de ne pas faire confiance aux Mahorais et de sous-estimer la présence de médecins mahorais. Or les médecins mahorais sont très peu nombreux à Mayotte ; ils se comptent sur les doigts de mes deux mains.
En revanche, il y a beaucoup de personnes nées aux Comores (Exclamations sur les bancs du groupe RN) qui ont fait des études et sont ensuite revenues travailler à l’hôpital de Mayotte. Nous les connaissons tous, et certains services remarquables sont même dirigés par ces médecins comoriens qui ont pris leur place dans la société mahoraise. Ce que vous faites est donc absolument répugnant. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Par ailleurs, je m’interroge sur l’état de santé des membres de votre groupe. Les délégations de vote sont accordées pour remplacer un collègue malade : je suis curieuse de savoir quelle épidémie frappe le groupe RN pour justifier un tel nombre de malades ! (Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à Mme Anchya Bamana.
Mme Anchya Bamana
Madame Voynet, vous êtes bien placée pour savoir que s’il n’y a pas de médecins à Mayotte aujourd’hui, c’est parce que les directions successives de l’ARS Mayotte, depuis 2010, n’ont jamais voulu mettre en place la première année de médecine sur l’île ! (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
Mme Dominique Voynet
L’ARS n’existait pas en 2010 !
Mme Anchya Bamana
Vous avez œuvré pour annexer Mayotte à La Réunion…
M. Manuel Valls, ministre d’État
Annexer ? Mais enfin, La Réunion, c’est la France !
Mme Anchya Bamana
…en matière de santé numérique. Vous avez acheté un avion pour nous annexer à la Réunion, l’Air Voynet !
Mme Dominique Voynet
Je n’étais pas là en 2010 !
Mme Anchya Bamana
Voilà pourquoi on a un désert médical : parce que les directions successives de l’ARS Mayotte ne se sont pas occupées de l’île ! Comme vous ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à Mme Estelle Youssouffa.
Mme Estelle Youssouffa
Cela a dû être un calvaire, madame Voynet, ces années à vous engraisser à Mayotte alors que vous haïssez autant les Mahorais ! On se demande vraiment pourquoi vous n’avez pas été à la tête de l’ARS des Comores, si les Comoriens sont aussi géniaux. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
À chaque fois qu’on parle de Mayotte, vous trouvez systématiquement le moyen non seulement de rabaisser les Mahoraises et les Mahorais, mais d’encenser les Comoriens, qui ne sont pas chez eux à Mayotte ! (« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Ils ne sont pas chez eux, parce qu’il y a une frontière !
M. Stéphane Rambaud
Ils ne connaissent rien à Mayotte !
Mme Estelle Youssouffa
Si vous avez envie d’abolir la frontière ou d’être fidèle à vos prises de position qui remettent depuis des années en cause le fait que Mayotte soit française, assumez-le et déclarez-le publiquement ici ! Cessez de nous humilier, de nous insulter, de nous rabaisser et d’affirmer devant la représentation nationale que nous n’avons pas les capacités intellectuelles nécessaires pour avoir suffisamment d’enseignants et de médecins ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. Manuel Valls, ministre d’État
Non !
Mme Estelle Youssouffa
Votre mandat à la tête de l’ARS a laissé les Mahoraises et les Mahorais sur le carreau. Nous avons incessamment demandé l’accès à des formations pour nos futurs médecins et ingénieurs mahorais, mais à chaque fois, c’était non ! Maintenant, on nous traite d’incapables et on nous dit qu’il vaut mieux accueillir des Comoriens ! C’est quoi, ce discours ? Et dire que vous avez dirigé une institution publique ! Cela en dit long sur les raisons du retard qui est le nôtre aujourd’hui !
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Oh là là !
Mme Estelle Youssouffa
J’ai honte d’être assise à vos côtés dans cette assemblée et de vous entendre défendre les Comoriens matin, midi et soir alors même que nous examinons une loi pour Mayotte, simplement pour nous humilier ! Nous humilier ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR. – M. Stéphane Rambaud se lève.)
M. Julien Rancoule
Elle devrait demander la nationalité comorienne !
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé.
Mme Sandrine Nosbé
Honnêtement, je suis choquée par les propos qui ont été tenus. Comment peut-on traiter ainsi une collègue députée ? (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Mme Estelle Youssouffa
Et les Mahoraises et les Mahorais ?
Mme Sandrine Nosbé
Et comment peut-on traiter ainsi des jeunes, des étudiants, que l’on empêche de s’émanciper et de venir dans l’Hexagone pour faire leurs études, tout cela parce qu’ils ne sont pas Français ? Que vous ont-ils fait ? (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. François-Xavier Ceccoli
On ne peut pas accueillir toute la misère du monde !
Mme Sandrine Nosbé
Pourquoi n’auraient-ils pas la possibilité de venir jusqu’ici pour étudier ? Vous voulez qu’on les confine à Mayotte, où ils ne pourront pas faire d’études ? Vous savez bien qu’il manque des universités !
M. Stéphane Rambaud
La faute à qui ?
Mme Sandrine Nosbé
Beaucoup d’entre eux ne pourront pas quitter le territoire après leurs 18 ans faute de titre de séjour, puisque vous avez repoussé la suppression du titre de séjour territorialisé à l’année 2030. Que feront ces jeunes ?
M. Yoann Gillet
Et les jeunes Mahorais, vous en faites quoi ?
Mme Sandrine Nosbé
Comment peut-on avoir l’esprit assez tordu pour vouloir empêcher des jeunes d’étudier ? Vraiment, cet amendement est dégueulasse ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Yoann Gillet
Vous sacrifiez la jeunesse mahoraise !
Rappels au règlement
M. le président
La parole est à Mme Léa Balage El Mariky, pour un rappel au règlement.
Mme Léa Balage El Mariky
Sur le fondement de l’article 70, alinéa 3. Nous assistons depuis plusieurs jours à une mise en cause personnelle de ma collègue Dominique Voynet portant notamment sur le travail qu’elle a accompli au sein de l’ARS. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme Anchya Bamana
Catastrophique !
Mme Léa Balage El Mariky
J’aimerais donc vous donner lecture d’un rapport d’information de la commission des affaires sociales du Sénat sur l’accès aux soins à Mayotte.
M. Gabriel Attal
Ce n’est pas un rappel au règlement !
Mme Léa Balage El Mariky
Si, car je voudrais clarifier les choses – il me semble que nous sommes tous attachés aux faits. Voici ce que dit ce rapport : « L’action de l’ARS de Mayotte a été unanimement reconnue par les acteurs locaux rencontrés lors du déplacement et considérée comme en phase avec les enjeux du territoire. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Mme Estelle Youssouffa
C’est faux ! C’est mensonger !
Mme Léa Balage El Mariky
« Force est de constater que le pilotage de l’ARS par Dominique Voynet dans les deux premières années suivant la création – qui est postérieure à 2010, madame Bamana – a permis de structurer les missions et l’action de l’agence.
Mme Estelle Youssouffa
C’est une honte !
Mme Léa Balage El Mariky
« Qualifié parfois de politique, il a surtout été reconnu comme efficace,…
Mme Anchya Bamana
Zéro !
Mme Léa Balage El Mariky
… permettant souvent de débloquer des situations enlisées, quitte parfois à forcer la main au ministère. »
Au sein de l’ARS, Mme Voynet était au service des habitantes et des habitants de Mayotte ; cela a été son honneur et cela a été reconnu par le Sénat.
Mme Anchya Bamana
Zéro !
Mme Léa Balage El Mariky
Cela devrait aussi être le cas ici, à l’Assemblée nationale, sans insultes et sans quolibets. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. Frédéric Weber
Zéro, ce n’est pas une insulte…
M. le président
S’il vous plaît, écoutez-vous les uns les autres ! Nous sommes vendredi après-midi, la soirée va être longue ; écoutez-vous avec respect.
La parole est à M. Emeric Salmon, pour un rappel au règlement.
M. Emeric Salmon
Sur le fondement de l’article 70, alinéa 3. Une fois de plus, notre groupe est mis en cause pour de prétendues fausses délégations de vote. J’ai regardé la liste des votants aux derniers scrutins publics : il me semble qu’il n’y a qu’une ou deux délégations. Il se trouve que j’en porte une, celle de ma collègue Tiffany Joncour, qui est en congé de maternité. Je suppose, madame Voynet, que vous approuvez le droit d’une femme à prendre un congé de maternité après son accouchement ? (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Article 26 (suite)
M. le président
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Si certaines dispositions importantes de ce texte ne sont pas votées, nous le devons aussi, M. le ministre d’État l’a rappelé, à nous-mêmes et à la faiblesse de notre mobilisation.
Permettez-moi tout de même de revenir sur quelques points. Vous avez balayé d’un revers de la main tout le travail effectué par Agnès Firmin Le Bodo, notamment sur les questions de santé à Mayotte. Je pense en particulier aux dispositions visant à faciliter l’ouverture de pharmacies.
M. Gabriel Attal
C’est incompréhensible !
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Les pharmacies sont, par définition, des espaces d’accès aux soins de proximité où l’on trouve de véritables professionnels. Ces dernières années, nous avons d’ailleurs été bien contents de leur confier des tâches toujours plus importantes. Je ne comprends donc pas, chers collègues du Rassemblement national, pourquoi vous avez balayé ces dispositions d’un revers de la main.
De même, vous êtes très attachés à la légalité des circuits de distribution. On sait bien que la moitié des médicaments en circulation ne respectent pas les obligations légales en matière de sécurisation. La sécurité de la distribution des médicaments est en jeu ; pourtant, vous avez supprimé l’article qui la garantissait. Je n’arrive pas à le comprendre.
La proposition du ministre qui a été rejetée tout à l’heure était le fruit d’un travail collectif. La revalorisation du smic au 1er janvier 2026 aura des incidences en termes de coûts pour les entreprises. Aussi avions-nous adopté en commission un amendement visant à étendre le dispositif d’exonération Lodeom à Mayotte. Certains membres du RN – pas tous – avaient voté pour. Aujourd’hui, alors que le gouvernement nous propose dans l’amendement no 692 un dispositif plus intéressant de baisse des cotisations sur les bas salaires, vous l’écartez ! Mieux : vous avez voté contre un amendement de M. Rimane proposant de porter le montant du smic à 100 % de sa valeur applicable dans l’Hexagone, mais vous en déposez un derrière qui propose la même chose.
M. Davy Rimane
Oui !
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Permettez-moi d’y voir quelques incohérences.
Un dernier mot sur le CICE. Je rappelle que dans l’Hexagone, le plafond du CICE est fixé à 2,5 smic. Parler d’alignement, ce n’est donc pas proposer un plafond à 3,5 smic.
Là encore, combien d’occasions perdues ? C’est tellement dommage !
Ma collègue rapporteure a effectué un travail considérable sur le problème de l’accès aux soins à Mayotte. Je vais vous raconter un dernier souvenir : nous avons mobilisé la réserve sanitaire tant et tant de fois… Bien sûr, il manque des médecins. Je suis élu dans un des départements où il y a le moins de médecins, où la désertification médicale est très prononcée.
Mme Anchya Bamana
Le système est effondré !
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Puis-je terminer sans que vous me coupiez ? Je ne vous coupe jamais, madame Bamana. Ayez la gentillesse d’en faire autant.
Vous savez que nous avons exercé ces métiers. Vous avez balayé d’un revers de la main le travail considérable que nous avions accompli ensemble. Je le regrette profondément.
M. le président
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État
L’Assemblée nationale travaille dans les conditions que nous connaissons. J’ai fait le commentaire que j’avais à faire tout à l’heure. Je salue évidemment tous les députés présents en séance ; ils font le travail. Nous avons encore quelques heures devant nous pour examiner ce texte et je ne doute pas que la présidence de l’Assemblée nous permettra d’avancer dans des conditions sereines.
Permettez-moi de réagir aux propos que j’ai entendus. Ayant moi-même participé à de nombreux débats, je ne donnerai aucune leçon à quiconque sur la confrontation des idées et l’expression des différences politiques. Cependant, je tiens à répondre aux propos de Mme Youssouffa ainsi qu’à ceux émanant des bancs du Rassemblement national. S’ils avaient été tenus sur d’autres bancs, ma réponse aurait été la même ; nous nous efforçons tous de construire le meilleur texte possible pour les Mahorais.
D’abord, j’ai entendu vis-à-vis de La Réunion des propos que je ne supporte plus. La Réunion, c’est la France, tout comme Mayotte ! Faites attention quand vous dites que La Réunion aurait annexé Mayotte ; c’est la confrontation que vous êtes en train de créer.
Ensuite, la mise en cause de l’engagement personnel de Mme Voynet, une femme que je connais depuis longtemps, n’est pas acceptable. Nous n’avons pas toujours été d’accord, mais elle a été ministre de la République,…
M. Emmanuel Maurel
C’était le bon temps !
M. Manuel Valls, ministre d’État
…maire d’une grande ville, parlementaire ; elle a dirigé l’ARS Mayotte au moment de sa création – puisque, je le confirme, celle-ci n’existait pas en 2010.
Mme Voynet a commencé à faire de la politique avant vous. Elle a fait preuve d’un engagement républicain, patriotique. (Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme Estelle Youssouffa
Elle a un passif ! Un bilan !
M. Manuel Valls, ministre d’État
Elle a un parcours d’écologiste. Vous pouvez être en désaccord avec elle, mais jamais vous n’avez à vous permettre de contester dans cet hémicycle le patriotisme ou l’engagement de quiconque ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN. – Mme Estelle Youssouffa s’exclame aussi.)
Elle est Française tout autant que vous.
C’est insupportable d’entendre ces propos dans votre bouche, madame Youssouffa.
On ne remet pas en cause l’engagement et le patriotisme d’un député, quel qu’il soit ! C’est insupportable ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, EcoS et GDR. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Attention, hein ! J’ai entendu ! Ne remettez pas en cause mon patriotisme !
Plusieurs députés du groupe RN
Ce sont des menaces ? Vous nous menacez ?
M. Yoann Gillet
Il n’est pas acceptable qu’un ministre parle comme cela aux députés !
M. le président
Je comprends que les esprits s’échauffent sur un sujet aussi important, qui crée de vrais clivages. J’ai donné la parole à tous et j’ai entendu des mots que je regrette de la part de plusieurs orateurs. Maintenant, je voudrais que l’on puisse poursuivre l’examen de ce texte. Les Mahoraises et les Mahorais, pour qui nous nous divisons tant sur les amendements, l’attendent avec impatience. J’en appelle donc à la responsabilité de chacun : mettons cet amendement aux voix, et quel que soit le résultat, continuons d’avancer pour que ce texte puisse être voté rapidement. Il y a urgence.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 74.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 58
Nombre de suffrages exprimés 58
Majorité absolue 30
Pour l’adoption 31
Contre 27
(L’amendement no 74 est adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 26, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 56
Nombre de suffrages exprimés 56
Majorité absolue 29
Pour l’adoption 31
Contre 25
(L’article 26, amendé, est adopté.)
Article 27
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 434.
M. Davy Rimane
Cet amendement vise à préciser la vocation du fonds de soutien au développement des activités périscolaires instauré pour les communes et intercommunalités de Mayotte. Il répond à une demande des élus locaux et des acteurs éducatifs du territoire.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Vous souhaitez établir la liste des dispositifs éligibles à ce fonds et l’inscrire dans la loi. Cela reviendrait à figer les choses, ce qui limiterait la flexibilité au niveau local. Avis défavorable.
(L’amendement no 434, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 121.
M. Elie Califer
Il s’agit d’étendre la diffusion du fonds de soutien au développement des activités périscolaires en faveur des communes de Mayotte, afin de favoriser le développement de projets locaux.
Cela garantirait un accès équitable à des temps éducatifs de qualité pour tous les enfants, car nous plaidons pour la réussite de tous les enfants mahorais. Ce soutien contribuerait également à celui de l’emploi dans le secteur de l’animation, ce qui est particulièrement nécessaire à Mayotte.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Vous souhaitez inscrire dans la loi que le déblocage des crédits du fonds est conditionné au développement de projets éducatifs. C’est déjà le cas, puisque ces crédits visent à soutenir de tels projets.
En outre, il faut laisser de la flexibilité aux bénéficiaires dans la conception de leurs projets éducatifs.
Enfin, quatorze communes sur dix-sept ont déjà mis en place ce dispositif, et deux autres ont manifesté leur intérêt. La couverture du territoire est donc en très bonne voie.
Je vous demande de bien vouloir retirer votre amendement : l’objectif visé est satisfait, puisqu’il ne reste qu’un seul territoire sans projet éducatif. À défaut, mon avis sera défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
La parole est à M. Elie Califer.
M. Elie Califer
Je retire mon amendement.
Plusieurs députés du groupe RN
Il est repris !
(L’amendement no 121 est adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 27, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 53
Nombre de suffrages exprimés 53
Majorité absolue 27
Pour l’adoption 53
Contre 0
(L’article 27, amendé, est adopté.)
Article 28
M. le président
Monsieur Gillet, vous êtes inscrit sur l’article. Maintenez-vous votre prise de parole ?
M. Yoann Gillet
Non.
M. le président
Monsieur Califer, vous êtes également inscrit, mais vous défendrez ensuite des amendements. Maintenez-vous votre prise de parole ?
M. Elie Califer
Oui.
M. le président
J’aurai essayé… La parole est à M. Elie Califer.
M. Elie Califer
Merci, monsieur le président. On sent que vous essayez, et vous avez l’air de réussir. (Sourires.)
M. le président
Pas sûr !
M. Elie Califer
Vos avis sont parfois assez tranchants, madame la rapporteure. Mais nous ne faisons qu’exprimer une ambition forte pour Mayotte, une ambition que nous partageons avec la population mahoraise, et nous avons malgré tout le sentiment d’avancer.
L’article 28 aborde une question cruciale pour le fonctionnement des services publics à Mayotte : celle de l’attractivité et de la fidélisation des agents de l’État dans un territoire particulièrement exposé à de nombreuses contraintes professionnelles et personnelles – coût de la vie, insécurité, accès à l’eau, sans oublier les séquelles du cyclone Chido.
Le résultat, c’est un renouvellement constant et massif des effectifs, et une absence de stabilité qui désorganise l’action publique : quand un enseignant ne reste qu’un trimestre, c’est préoccupant ; quand un cadre hospitalier demande sa mutation dès son arrivée, c’est triste ; et quand des postes restent vacants faute de candidats, alors là, nous sommes sans voix.
Les Mahoraises et les Mahorais en paient le prix : leurs enfants accumulent du retard scolaire ; les patients peinent à obtenir des rendez-vous ; les collectivités locales attendent en vain des interlocuteurs pérennes. Ce matin encore, on rappelait qu’elles manquent d’ingénierie.
L’article 28 apporte une réponse ciblée, mais structurante : accorder une priorité de mutation aux fonctionnaires ayant effectué au moins trois ans de services à Mayotte. Ce n’est pas un privilège, c’est une incitation équilibrée, un outil de justice territoriale.
Il s’agit de reconnaître l’engagement de celles et ceux qui acceptent de rester, de s’investir, de construire l’avenir de Mayotte avec sa population.
Ce dispositif ne remet pas en cause les autres priorités de mutation prévues dans la fonction publique. Il les complète dans une logique d’efficacité car fidéliser, c’est aussi permettre à l’administration d’être humaine.
M. le président
Deux minutes vingt secondes, monsieur le député : vous abusez de ma patience. (Sourires.)
Sur les amendements identiques nos 450 et 568, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
L’amendement no 450 de Mme Anchya Bamana est défendu.
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 568.
Mme Dominique Voynet
Un fonctionnaire nommé en métropole – en Hexagone – et souhaitant revenir à Mayotte bénéficie d’une priorité pour retrouver un poste sur l’île. En revanche, cela ne fonctionne pas dans l’autre sens. De ce fait, beaucoup – je pense aux médecins, mais cela vaut pour d’autres professions – hésitent à franchir le pas. Ils ne sont pas certains de pouvoir retrouver un poste en métropole s’ils souhaitent y revenir, ni de bénéficier d’un accès prioritaire à un poste métropolitain.
Mon amendement vise donc à s’inspirer de ce qui existe en sens inverse.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Vous proposez de créer une forme de priorité de mutation pour les fonctionnaires originaires de Mayotte afin qu’ils puissent y être affectés.
Or une telle priorité existe déjà.
M. Davy Rimane
Cela ne marche pas !
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Elle est prévue au quatrième alinéa de l’article L. 512-19 du code de la fonction publique, qui prévoit une priorité de mutation pour tout fonctionnaire pouvant justifier du centre de ses intérêts matériels et moraux dans une des collectivités régies par les articles 73 et 74 de la Constitution.
Je vous renvoie d’ailleurs au bilan d’application de cette disposition, publié par la direction générale de l’administration et de la fonction publique en 2021. Ce document souligne non seulement le faible nombre de recours contre les affectations, mais surtout l’efficacité du dispositif : les agents qui mobilisent cette priorité obtiennent plus facilement une affectation outre-mer. C’est pourquoi j’émets un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet
Au temps pour moi, madame la rapporteure. En réalité, je pensais avoir déposé un amendement visant les fonctionnaires métropolitains. Je le retire.
(L’amendement no 568 est retiré.)
Mme Anchya Bamana
Je ne retirerai pas le mien !
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 450.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 52
Nombre de suffrages exprimés 47
Majorité absolue 24
Pour l’adoption 27
Contre 20
(L’amendement no 450 est adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Aurélie Trouvé, pour soutenir l’amendement no 202.
Mme Aurélie Trouvé
Il s’agit d’inclure la fonction publique territoriale dans le champ de cet article. Cela nous semble essentiel, notamment pour les hôpitaux, mais aussi pour l’ensemble des services relevant de cette fonction publique. Le même dispositif doit pouvoir s’appliquer, car la présence accrue de soignants et de divers agents territoriaux est nécessaire à Mayotte.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Avis défavorable. En commission, nous avons déjà élargi le dispositif à la fonction publique hospitalière, alors qu’il concernait initialement la seule fonction publique d’État. Cette extension permettra aux professionnels exerçant à Mayotte de bénéficier des priorités de mutation prévues.
En revanche, l’élargir à la fonction publique territoriale ne nous paraît pas possible. Cela reviendrait à s’immiscer dans la libre administration des collectivités locales.
(L’amendement no 202, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme Aurélie Trouvé
Mais si, il est adopté !
M. Davy Rimane
Les députés du groupe RN ont voté pour !
M. le président
Non, il n’est pas adopté. Mme Bamana, notamment, a voté contre. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes RN et LFI-NFP.)
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
C’est bon !
M. le président
Je vous confirme que Mme Bamana a voté contre. Il est dommage qu’on ne vous ait pas filmée à ce moment, car je vous ai bien vue lever la main quand j’ai demandé qui était contre. (« Non ! » sur plusieurs bancs du groupe RN.)
M. Yoann Gillet
On a voté pour !
M. Gabriel Attal
Vous n’allez quand même pas remettre en cause la présidence !
M. le président
Monsieur Gillet, jusqu’à présent, vous pouvez difficilement remettre en cause la neutralité de ma présidence. Cela arrive à tout le monde.
Plusieurs députés du groupe EcoS
Ils ont voté pour !
M. le président
La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure, pour soutenir l’amendement no 588.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
En commission, nous avons voté l’extension du dispositif à la fonction publique hospitalière. Cela permettra aux personnes qui souhaitent venir travailler à Mayotte de bénéficier d’une priorité de mutation.
Mon amendement vise simplement à préciser que la liste des emplois éligibles à cette priorité sera fixée par décret.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Favorable.
Rappel au règlement
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet, pour un rappel au règlement.
M. Yoann Gillet
Il n’y a aucun doute sur le fait que notre collègue Bamana a voté pour l’amendement précédent, et nous avons tous levé la main exactement au même moment.
Il est normal que vous soyez fatigué après quelques heures de présidence, mais il faut remettre cet amendement au vote – il était très largement approuvé.
M. le président
L’amendement a été rejeté et il n’est évidemment ni possible ni envisageable de le remettre aux voix.
M. Yoann Gillet
Dans ce cas, je vous demande une suspension de séance de trente minutes.
M. le président
Elle est de droit. Je vous l’accorde pour trois minutes – et ce sera votre dernière pour cette séance, monsieur Gillet.
Suspension et reprise de la séance
M. le président
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à dix-huit heures dix, est reprise à dix-huit heures quinze.)
M. le président
La séance est reprise.
Rappel au règlement
M. le président
La parole est à M. Aurélien Saintoul, pour un rappel au règlement.
M. Aurélien Saintoul
Il se fonde sur l’article 100, relatif au bon déroulement de nos débats – que je ne veux pas perturber. Je prends la parole très modestement car, comme chacun a pu le constater, je viens d’arriver dans l’hémicycle. Néanmoins, il y a eu un petit raté lors du vote de l’amendement no 202. Afin de le corriger, nous suggérons au gouvernement de demander une seconde délibération sur cet amendement. Ce serait élégant de sa part et cela éviterait toute frustration.
Article 28 (suite)
(L’amendement no 588 est adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 199.
Mme Sandrine Nosbé
Par cet amendement, nous souhaitons renforcer le critère de la compétence locale ultramarine dans le recrutement des agents publics, afin de remédier aux difficultés persistantes de retour des ultramarins dans leur territoire d’origine. Ainsi, la reconnaissance de la compétence et de l’expérience professionnelles acquises localement par les candidats ultramarins, notamment Mahorais, serait consacrée dans la loi : à qualifications égales, la connaissance du contexte local et le lien avec le territoire deviendraient un atout explicite dans les décisions de recrutement ou d’affectation, en complément du critère du centre des intérêts matériels et moraux (CIMM).
Il s’agit de garantir que les dispositions officielles en faveur du retour des ultramarins seront effectivement appliquées et renforcées, en valorisant les agents ayant une expertise du terrain local. Cette mesure contribuerait à lutter contre les pratiques de recrutement non transparentes et à promouvoir l’emploi des Mahorais dans leur territoire au sein de la fonction publique de l’État.
M. le président
Sur cet amendement no 199, je suis saisi par le groupe UDR d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Agnès Firmin Le Bodo, rapporteure
Défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Êtes-vous d’accord pour que nous procédions au scrutin public sans attendre les cinq minutes réglementaires ?
Plusieurs députés
Oui !
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 199.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 45
Nombre de suffrages exprimés 25
Majorité absolue 13
Pour l’adoption 19
Contre 6
(L’amendement no 199 est adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’article 28, tel qu’il a été amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 47
Nombre de suffrages exprimés 47
Majorité absolue 24
Pour l’adoption 47
Contre 0
(L’article 28, amendé, est adopté.)
Article 29
(L’article 29 est adopté.)
Articles 35 à 41
(Les articles 35, 36, 37, 38, 39, 40 et 41 sont successivement adoptés.)
Après l’article 41
M. le président
Nous en venons à une série d’amendements portant article additionnel après l’article 41.
Sur les amendements nos 523, 112, 113, 511, 620 et 60, je suis saisi par le groupe UDR de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
L’amendement no 523 de Mme Anchya Bamana est défendu.
La parole est Mme Estelle Youssouffa, rapporteure pour les titres V et VI, pour donner l’avis de la commission.
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Je suis défavorable à cet amendement, qui prévoit la remise d’un rapport annuel sur la mise en œuvre de la présente loi. Le texte que nous examinons aborde de nombreux sujets. Il nous reviendra de contrôler l’action du gouvernement. Nous pourrons lancer une mission pour évaluer l’application de la loi six mois après sa promulgation. De plus, des demandes de rapports sur différents sujets ont déjà été introduites dans le texte.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Nous avons beaucoup débattu de ces questions. Je partage évidemment le souci légitime des auteurs des amendements de suivre la mise en œuvre de la présente loi et, plus largement, de la reconstruction de Mayotte. Le texte prévoit des garanties, notamment la création d’un comité de suivi composé de parlementaires, d’élus locaux et de représentants de l’État, qui informera régulièrement les assemblées des avancées et des difficultés rencontrées dans cette mise en œuvre.
Ne rigidifions pas le cadre de notre action. C’est d’ailleurs généralement la position exprimée par le Sénat à propos des demandes de rapport – mais c’est vous qui décidez. Nous souhaitons tous créer les conditions d’une reconstruction rapide et efficace de Mayotte. J’émets un avis défavorable à tous les amendements portant article additionnel après l’article 41, ce qui me dispensera de prendre la parole sur chacun d’entre eux.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 523.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 49
Nombre de suffrages exprimés 47
Majorité absolue 24
Pour l’adoption 26
Contre 21
(L’amendement no 523 est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 112.
M. Elie Califer
Dans un objectif d’apaisement, nous aimerions qu’au plus tard trois mois après la promulgation de la loi, un rapport fasse le point sur les différentes options envisagées pour l’aéroport et donne les raisons du choix effectué. Il s’agit notamment d’informer les élus, avec qui il convient d’établir une communication féconde et responsable.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Vous le savez, le projet de prolongement de la piste existante a commencé à être étudié en 2011, alors qu’il avait été promis quelques décennies plus tôt. (M. le ministre d’État sourit.) Après de nombreuses études, la question du site a été tranchée par le chef de l’État : le projet d’allongement de la piste n’a pas été l’option choisie. Votre demande de rapport me met mal à l’aise : en revenant sur ce choix, elle risquerait d’entretenir un malentendu et de provoquer des dissensions dans le territoire sur une question structurante. L’enjeu n’est pas de savoir si l’aéroport sera situé à Grande-Terre ou à Petite-Terre, mais de disposer d’un aéroport pour Mayotte. Je demande le retrait de l’amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
M. le président
Je rappelle que M. le ministre a donné un avis défavorable.
La parole est à M. Elie Califer.
M. Elie Califer
Je comprends vos arguments, madame la rapporteure. Simplement, vous le savez, il faut apaiser la situation à Mayotte. Les élus ont exprimé un point de vue. Nous sommes nous aussi des élus, et nous aimerions que l’on respecte leur volonté. Leur donner une information sur les raisons du choix, ce n’est pas revenir sur celui-ci. Au moment où nous abordons une nouvelle phase pour Mayotte, il est important que tout le monde joue le jeu.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 112.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 54
Nombre de suffrages exprimés 54
Majorité absolue 28
Pour l’adoption 46
Contre 8
(L’amendement no 112 est adopté.)
M. le président
L’amendement no 113 de M. Philippe Naillet est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Défavorable.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
Je mets aux voix l’amendement no 113.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 53
Nombre de suffrages exprimés 51
Majorité absolue 26
Pour l’adoption 44
Contre 7
(L’amendement no 113 est adopté.)
M. le président
La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 511.
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
J’ai déposé cet amendement, et j’y suis favorable en tant que rapporteure. Il prévoit que la commission permanente du conseil départemental – la future assemblée de Mayotte – se prononce, dans un délai d’un an à compter de la promulgation de la présente loi, sur l’opportunité d’un transfert des compétences départementales et régionales aujourd’hui exercées par l’État, y compris la gestion des fonds européens. Le toilettage institutionnel nous amène à poser la question du transfert des compétences non exercées par la collectivité de Mayotte. Ce transfert doit faire l’objet d’une discussion ; il importe notamment d’aborder la question de la gestion des fonds européens, sur lesquels la reconstruction de Mayotte repose en partie.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
Je mets aux voix l’amendement no 511.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 55
Nombre de suffrages exprimés 54
Majorité absolue 28
Pour l’adoption 40
Contre 14
(L’amendement no 511 est adopté.)
M. le président
L’amendement no 620 de Mme Anchya Bamana est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Avis défavorable.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
Je mets aux voix l’amendement no 620.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 55
Nombre de suffrages exprimés 55
Majorité absolue 28
Pour l’adoption 29
Contre 26
(L’amendement no 620 est adopté.)
M. le président
L’amendement no 60 de M. Yoann Gillet est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Ce projet de loi prévoit des mesures pour lutter contre la reconnaissance frauduleuse de paternité. Nous pourrons en évaluer les effets. Je vous invite à retirer votre amendement, sans quoi mon avis sera défavorable.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
Je mets aux voix l’amendement no 60.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 52
Nombre de suffrages exprimés 52
Majorité absolue 27
Pour l’adoption 27
Contre 25
(L’amendement no 60 est adopté.)
(Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 149.
Mme Sandrine Nosbé
Nous souhaitons que, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant les aides concernées par l’alignement prévu à l’article 15 du texte.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Votre amendement est satisfait par l’article 15, auquel je vous renvoie. À défaut d’un retrait, j’émettrai un avis défavorable.
(L’amendement no 149, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 173 de M. Jean-Hugues Ratenon est défendu.
(L’amendement no 173, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 194.
Mme Sandrine Nosbé
Nous demandons la remise par le gouvernement d’un rapport évaluant l’offre de filières disponibles dans le second cycle de l’enseignement secondaire à Mayotte. Ouvrir le passeport pour la mobilité des études (PME) aux élèves du second cycle de l’enseignement secondaire à Mayotte permettrait d’assurer l’égalité des droits. Malheureusement, à cause du Rassemblement national, des élèves seront exclus de ce dispositif.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Défavorable.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
Je mets aux voix l’amendement no 194.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 50
Nombre de suffrages exprimés 18
Majorité absolue 10
Pour l’adoption 9
Contre 9
(L’amendement no 194 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à M. Aurélien Taché, pour soutenir l’amendement no 195.
M. Aurélien Taché
Par cet amendement, nous demandons que le gouvernement remette au Parlement un rapport évaluant le taux de scolarisation à Mayotte et formulant des recommandations pour l’améliorer. Depuis le début de l’année, l’école a fait l’objet de nombreux débats à l’occasion de l’examen des textes relatifs à l’île. Beaucoup d’enfants ne vont en classe qu’une demi-journée et, avant même le passage du cyclone Chido, au moins 15 000 enfants n’étaient pas scolarisés. La situation n’a fait qu’empirer depuis.
La destruction des habitats informels complique davantage encore la scolarisation des enfants. Or ce texte comporte malheureusement des dispositions allant dans ce sens. Nous demandons donc au gouvernement de nous indiquer ce qu’il compte faire pour que, dans toute la République, y compris à Mayotte, tous les enfants puissent aller à l’école.
(L’amendement no 195, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 366 et 579.
L’amendement no 366 de Mme Maud Petit est retiré.
(L’amendement no 366 est retiré.)
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 579.
Mme Dominique Voynet
Je le retire également. En effet, il n’est pas très raisonnable de voter, par charretées entières, des demandes de rapports à produire dans les six mois.
Cet amendement, élaboré en concertation avec la Fédération des entreprises d’outre-mer, visait à évaluer l’impact du rattrapage rapide du smic sur l’économie mahoraise. De toute façon, ce sujet fera certainement l’objet de discussions entre le ministère de l’économie et des finances, le ministère des outre-mer et les entreprises mahoraises.
(L’amendement no 579 est retiré.)
M. le président
Sur les amendements nos 456, 469, 552, 566, 585 et 521, je suis saisi par le groupe UDR de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Anchya Bamana, pour soutenir l’amendement no 456.
Mme Anchya Bamana
Par cet amendement, je souhaite répondre à la remarque du ministre d’État au sujet du mot que j’ai employé tout à l’heure, celui d’« annexion ». Cet amendement vise à jeter les bases d’une réorganisation indispensable de la présence de l’État à Mayotte. Il prévoit que le gouvernement remette au Parlement, dans un délai de deux ans après la promulgation de la loi, un rapport établissant un calendrier précis pour l’installation sur le territoire mahorais de tous les services déconcentrés de l’État.
Aujourd’hui encore, plus de dix ans après la départementalisation, de nombreux services compétents pour Mayotte demeurent implantés à La Réunion. Cette situation est à la fois absurde et injustifiable. Elle affaiblit la réactivité de l’État face aux urgences, nuit à la coordination des politiques publiques et alimente le sentiment d’abandon exprimé par une large part de la population mahoraise.
Cette anomalie doit cesser, d’autant que Mayotte est appelée à devenir un département-région à part entière. Ce changement institutionnel majeur exige une présence pleine, stable et permanente des administrations de l’État sur place. Un département-région ne saurait être administré depuis une autre île.
Ce rapport devra dresser un état des lieux précis, identifier les obstacles éventuels et définir une trajectoire de retour de l’État à Mayotte, dans ses missions, ses moyens et ses implantations. C’est un enjeu de justice territoriale, d’efficacité administrative et de respect du statut futur de Mayotte. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée car, si je partage votre diagnostic, je déplore l’inflation de demandes de rapports, dont nous savons, hélas, qu’ils ne seront jamais établis par le gouvernement.
La question que vous soulevez est essentielle : de nombreux services de l’État que l’on affiche comme présents à Mayotte ne sont en réalité que des antennes d’un service central installé à La Réunion. Un exemple parmi tant d’autres : les professeurs de l’éducation nationale, autrefois rémunérés par le rectorat de Mayotte, le sont désormais par la paierie de La Réunion. Il en va de même pour la fonction publique territoriale, dont la gestion relève de la direction régionale des finances publiques de La Réunion. L’enjeu est réel, mais je ne suis pas convaincue qu’un rapport suffise à apporter une réponse.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
Je mets aux voix l’amendement no 456.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 50
Nombre de suffrages exprimés 48
Majorité absolue 25
Pour l’adoption 28
Contre 20
(L’amendement no 456 est adopté.)
(Applaudissements sur quelques bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
L’amendement no 469 de Mme Anchya Bamana est défendu.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Défavorable.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
Je mets aux voix l’amendement no 469.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 47
Nombre de suffrages exprimés 44
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 27
Contre 17
(L’amendement no 469 est adopté.)
M. le président
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 517.
M. Elie Califer
Nous souhaitons que le gouvernement remette au Parlement, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi, un rapport évaluant le rôle et les fonctions des cadis à Mayotte en tant qu’acteurs traditionnels de médiation sociale et de conseil.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Je trouve savoureux qu’après avoir voté pour la suppression du conseil cadial, votre groupe demande un tel rapport. S’il n’y a plus de cadis, ce sera en réalité un rapport d’autopsie !
M. Elie Califer
C’est bon à savoir, merci !
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Avis défavorable, par souci de cohérence.
(L’amendement no 517, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 552 de Mme Anchya Bamana est retiré.
(L’amendement no 552 est retiré.)
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 559.
Mme Dominique Voynet
À plusieurs reprises, le gouvernement comorien a été critiqué pour son manque de détermination pour ce qui est d’empêcher le départ de ses ressortissants vers Mayotte. Il y a quelques années, le gouvernement français avait pris l’initiative de lancer un plan de développement France-Comores visant à stabiliser les populations non seulement à Anjouan, mais aussi en Grande Comore et à Mohéli. Ce plan comprenait quatre volets : l’éducation, la santé, l’agriculture et la formation professionnelle. Il prévoyait en outre le renforcement des capacités des forces maritimes comoriennes, notamment par la construction d’un radar.
À ma connaissance, aucun bilan de ce plan de développement, dont le coût a été de 150 millions d’euros du côté français, n’a jamais été établi ni rendu public. Le rapport que je sollicite vise à évaluer dans quelle mesure ce plan a été efficace – un peu, beaucoup, passionnément ou pas du tout –…
Un député du groupe RN
À la folie !
Mme Dominique Voynet
…au regard des objectifs affichés.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
À défaut d’un rapport, nous disposons des chiffres relatifs aux reconduites à la frontière. En 2019, lors de la signature de cet accord, on dénombrait 27 000 reconduites vers les Comores ; on en compte aujourd’hui 24 000. Efficacité : 3 000 reconduites en moins, pour 150 millions versés à ce pays. C’est ce qui explique ma position, que vous connaissez : mettons fin à la farce qu’est la coopération avec les Comores !
Entre-temps, les Comores ont internationalisé leur revendication sur Mayotte. La Russie soutient plus que jamais cette revendication et l’Azerbaïdjan est désormais entré en scène, par l’intermédiaire du Groupe d’initiative de Bakou.
J’émets donc un avis défavorable sur votre demande de rapport. Quelques recherches suffiraient à vous éclairer sur la question.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet
Au contraire, il importe de comprendre les raisons de l’échec : ce plan de développement a-t-il été inefficace tout simplement parce qu’il n’a pas été appliqué ? Parce que l’argent s’est perdu dans les sables ? Parce que les actions n’étaient pas adaptées ? Il serait utile d’en établir un bilan et d’identifier les volets qui ont fonctionné ou non. Refuser cet exercice permet de continuer à dire n’importe quoi ; je constate que certains ne s’en privent pas.
(L’amendement no 559 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 566 de Mme Anchya Bamana est défendu.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Défavorable.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
Je mets aux voix l’amendement no 566.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 49
Nombre de suffrages exprimés 47
Majorité absolue 24
Pour l’adoption 28
Contre 19
(L’amendement no 566 est adopté.)
M. le président
L’amendement no 585 de Mme Anchya Bamana est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Je demande le retrait de l’amendement.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
Maintenez-vous l’amendement, madame Bamana ?
Mme Anchya Bamana
Je le maintiens.
M. le président
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Madame Bamana, permettez-moi un mot sur l’amendement no 566, que j’ai examiné avec beaucoup d’attention. Vous pensez encourager le développement de la télémédecine, mais en réalité, vous allez favoriser la financiarisation de la médecine. Prenons l’exemple de La Réunion : 40 % de l’imagerie médicale qui y est réalisée est analysée dans l’Hexagone. Je n’ai pas envie de cela pour Mayotte. Au contraire, je veux qu’il y ait des professionnels de santé sur place. On ne peut pas déplorer la pénurie de soignants tout en organisant l’externalisation de la médecine, ce qui profitera à d’autres acteurs. Ce n’est pas une bonne chose.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 585.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 50
Nombre de suffrages exprimés 48
Majorité absolue 25
Pour l’adoption 30
Contre 18
(L’amendement no 585 est adopté.)
M. le président
L’amendement no 586 de Mme Dominique Voynet est retiré.
(L’amendement no 586 est retiré.)
M. le président
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 293.
M. Elie Califer
Je le retire.
M. Yoann Gillet
Je le reprends !
(L’amendement no 293, repoussé par la commission et le gouvernement, est adopté.)
M. le président
L’amendement no 521 de Mme Anchya Bamana est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
Mme Estelle Youssouffa, rapporteure
Sagesse.
M. le président
M. le ministre a donné un avis défavorable.
Je mets aux voix l’amendement no 521.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 53
Nombre de suffrages exprimés 51
Majorité absolue 26
Pour l’adoption 31
Contre 20
(L’amendement no 521 est adopté.)
Article 1er et rapport annexé (précédemment réservés)
M. le président
Nous en venons à l’examen de l’article 1er et du rapport annexé au projet de loi, précédemment réservés. Il nous reste à examiner 239 amendements, ce qui pourrait nous mener, au gré du vent, jusqu’au bout de la nuit. J’invite donc chacun à faire un usage raisonnable de son temps de parole, des demandes de scrutin public et des suspensions de séance. Bien entendu, votre liberté demeure entière.
Rappel au règlement
M. le président
La parole est à M. Emeric Salmon, pour un rappel au règlement.
M. Emeric Salmon
Il se fonde sur l’article 100 du règlement. S’agissant de l’article 1er, qui tend à approuver le rapport annexé, je relève une petite différence de présentation entre le dérouleur de séance et l’application Eliasse, ce qui m’amène à vous demander une précision : mettrez-vous aux voix l’article 1er avant ou après le rapport annexé ?
M. le président
Votre question est pertinente. Nous examinerons d’abord l’amendement no 96, le seul qui se rapporte à l’article 1er lui-même, puis la série d’amendements qui portent sur le rapport annexé. Nous procéderons ensuite à un vote global sur l’article 1er et le rapport annexé.
Article 1er et rapport annexé (précédemment réservés - suite)
M. le président
La parole est à Mme Anchya Bamana.
Mme Anchya Bamana
L’article 1er constitue le socle symbolique et politique du texte. Il affirme la volonté de l’État de reconstruire Mayotte de manière durable, coordonnée et partenariale. À la défiance qui mine depuis des années la relation entre l’État et les Mahorais, l’article tend à opposer un principe de clarté : il s’agit de reconnaître que l’approche antérieure a échoué et qu’un changement de méthode s’impose. Depuis la départementalisation de 2011, Mayotte a été le théâtre de promesses multiples et a fait l’objet de plans successifs, qui ont tous échoué faute de suivi, de financement clair ou de volonté politique. La défiance qui en résulte n’est pas théorique, elle est palpable sur le terrain. L’article 1er vise donc à briser cette spirale de promesses sans lendemain.
Certes, le rapport annexé est contestable en l’état. Il mêle projets anciens et financements recyclés, en l’absence de garanties exécutoires. Toutefois, il engage le gouvernement à revoir sa méthode. Il rappelle l’importance d’associer les élus et les forces vives locales à la gouvernance des projets comme à leur mise en œuvre.
L’article doit fixer une exigence : celle d’un pilotage concerté, d’un calendrier respecté et de moyens garantis. Il doit aussi ouvrir un débat de vérité quant aux grands enjeux – immigration, sécurité, foncier, accès à l’eau, traitement des déchets, égalité sociale –, car s’ils ne sont pas pris en considération, il n’y aura pas de refondation possible. S’il est enrichi, renforcé et suivi d’effets, l’article 1er peut devenir le point de bascule vers une nouvelle ère pour Mayotte. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
M. le président
Je suis saisi de demandes de scrutin public : sur les amendements identiques nos 358 deuxième rectification, 524 deuxième rectification et 623 deuxième rectification, par les groupes Horizons & indépendants et Libertés, indépendants, outre-mer et territoires ; sur les amendements identiques nos 645 et 525, par le groupe Horizons & indépendants.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Aurélie Trouvé.
Mme Aurélie Trouvé
Je regrette que l’essentiel des dispositions concernant le développement économique de Mayotte soient reléguées à un rapport annexé sans portée normative, alors qu’il y a tant à faire et que l’État, la République, ont tant failli. Il y a tant à faire pour l’agriculture, pour l’industrie locale, pour le tourisme, pour la pêche ! Tous ces sujets sont abordés dans le rapport annexé, ce qui explique d’ailleurs le grand nombre d’amendements déposés sur ce rapport, qui n’a pourtant pas, je l’ai dit, de portée normative. Je rappelle tout de même que le taux de chômage à Mayotte est de 37 %, alors que le territoire dispose de ressources considérables, qu’il compte beaucoup de jeunes et qu’il y a de nombreux chantiers à mener.
Malheureusement, le texte ressemble davantage à un projet de loi sur les migrations à Mayotte qu’à une loi de programme pour sa refondation. Enfin, une part significative des 4 milliards d’investissements programmés correspond en réalité à des actions qui auraient déjà dû être menées par l’État. Cet engagement financier est donc clairement insuffisant. La Cour des comptes l’a rappelé, les plans d’action pour Mayotte lancés sous les présidences de François Hollande et d’Emmanuel Macron n’ont pas été respectés, ce que je déplore. Le projet de loi me semble bien insuffisant en la matière.
M. le président
Le caractère peu normatif du rapport annexé peut nous inciter à avancer rapidement dans l’étude des amendements. Je dis cela, je ne dis rien. J’aurai au moins essayé…
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 96.
M. Elie Califer
Le rapport annexé constitue un document programmatique fondamental. Il trace les grandes orientations de la refondation de Mayotte et formule des engagements concrets à l’égard de la population. Pour les Mahoraises et les Mahorais, ces promesses n’ont de valeur que si elles sont suivies d’effets réels et mesurables.
C’est pourquoi nous estimons qu’il est indispensable d’instaurer une évaluation annuelle de l’application du rapport annexé. Il s’agit d’une exigence de clarté, de constance et de justice à l’égard d’un territoire trop longtemps relégué aux marges de la République. C’est la condition d’un renforcement durable du lien entre l’État et les citoyens de Mayotte. Cette évaluation annuelle permettra d’informer la population sur les crédits et autorisations d’engagement votés et sur toutes les mesures prises. Nous devons réussir, cette fois, une réelle refondation de Mayotte, permettant de reconstruire le territoire.
M. le président
La parole est à M. Philippe Vigier, rapporteur général et rapporteur pour le titre Ier, pour donner l’avis de la commission.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Nous avons eu ce débat en commission. Le projet de loi prévoit la création d’un comité de suivi, où siégeront des représentants des élus locaux et des parlementaires. L’amendement est donc satisfait. Je vous invite à le retirer.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
(L’amendement no 96 est adopté.)
M. le président
Nous en venons aux amendements au rapport annexé, en commençant par trois amendements identiques, nos 358 deuxième rectification, 524 deuxième rectification et 623 deuxième rectification.
La parole est à Mme Estelle Youssouffa, pour soutenir l’amendement no 358 deuxième rectification.
Mme Estelle Youssouffa
Il vise à préciser que le texte est conçu pour les « Mahorais », plutôt que pour les « habitants de Mayotte ». Cela devrait être inutile mais, à entendre les discussions précédentes, ce n’est pas superflu. Compte tenu des velléités comoriennes, du déséquilibre démographique sur notre île et du sentiment très fort que la reconstruction ne se fait par pour nous et se fait sans nous, il est important que l’Assemblée nationale indique – les mots ont un sens – qu’il s’agit de travailler pour les Mahoraises et les Mahorais.
M. le président
L’amendement no 524 deuxième rectification de M. Jean Moulliere est défendu.
La parole est à M. le rapporteur général, pour soutenir l’amendement no 623 deuxième rectification.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Il est identique aux précédents. Nous avons tranché ce débat tout à l’heure : nous retiendrons le terme « Mahorais » plutôt que les mots « habitants de Mayotte ».
M. le président
L’avis de la commission est donc favorable.
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Je mets aux voix les amendements identiques nos 358 deuxième rectification, 524 deuxième rectification et 623 deuxième rectification.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 45
Nombre de suffrages exprimés 45
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 36
Contre 9
(Les amendements identiques nos 358 deuxième rectification, 524 deuxième rectification et 623 deuxième rectification sont adoptés ; en conséquence, les amendements nos 239, 477, 21, 301, 271 et 320 tombent.)
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 223.
Mme Sandrine Nosbé
Par cet amendement, nous souhaitons rappeler la responsabilité des gouvernements successifs tant dans la catastrophe sociale dans laquelle Mayotte est plongée depuis des décennies que dans l’impréparation de ce territoire face aux aléas climatiques, tels que le cyclone Chido.
Le gouvernement rappelle à juste titre que les Mahorais vivaient déjà dans des conditions très difficiles avant les passages successifs du cyclone Chido et de la tempête tropicale Dikeledi. Ce constat occulte pourtant deux faits majeurs.
Tout d’abord, les circonstances économiques et sociales dans lesquelles vivent les Mahorais sont intrinsèquement dues au délaissement de ce territoire par l’État, qui le traite comme une annexe lointaine de la République. Plusieurs chiffres ont été cités au cours de nos débats. Les Mahorais sont asphyxiés par la vie chère : certains produits alimentaires coûtent 30 % plus cher que dans l’Hexagone, les soins reviennent 16,9 % plus cher et les communications sont facturées 11,9 % de plus. Cette situation n’est pas le fruit d’un hasard géographique mais bien d’une politique structurelle de désengagement de l’État, qui a laissé ce territoire en marge de la République. Un rapport interministériel de 2022 affirme d’ailleurs que la situation de Mayotte est la conséquence d’une « faillite généralisée » de l’État.
Par ailleurs, le gouvernement semble vouloir faire croire que le cyclone Chido serait le fruit du hasard, alors même que le réchauffement climatique en est une cause directe. Si les phénomènes météorologiques extrêmes, comme les cyclones, gagnent en intensité et en fréquence, c’est précisément à cause du dérèglement climatique, auquel la France, comme les autres grandes puissances industrielles, contribue largement. Faire abstraction de cette réalité, c’est refuser d’assumer une responsabilité à la fois environnementale et politique.
M. Emeric Salmon
C’est faux ! Au contraire, la France est exemplaire !
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Avis défavorable. Nous avons tous évoqué en termes clairs le retard considérable pris à Mayotte, mais on ne saurait parler de « délaissement ». Certes, des plans insuffisants se sont succédé, mais nous débattons depuis le début de la semaine d’un plan extrêmement ambitieux. Nous avons d’ailleurs ressenti une certaine frustration en voyant que cette ambition n’était pas soutenue par tous.
Je donnerai un seul exemple. En décembre 2023, pour aider le conseil départemental à faire face à la montée en charge des dépenses sociales, l’État a dégagé plus de 120 millions d’euros. Chacun reconnaît qu’il faut amplifier les efforts, mais le mot « délaissement » ne me paraît pas justifié.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
(L’amendement no 223 n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de trois amendements, nos 474, 645 et 525, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 645 et 525 sont identiques.
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 474.
Mme Dominique Voynet
Dans la version initiale du texte, le gouvernement avait inscrit que l’État avait « répondu présent » pour gérer la crise qui a suivi le passage du cyclone Chido. La commission, sur proposition de nos collègues communistes, a écrit que l’État avait « partiellement répondu présent ».
Je n’ai pas l’intention de créer de polémique, mais j’ai l’impression que le texte qui nous est présenté ne tient pas compte du fait que la France en général, les départements et territoires d’outre-mer en particulier, ne disposent pas d’une réelle culture de crise. Lors du passage du cyclone Belna, nous avons constaté la même difficulté : nous n’étions pas prêts.
Les plans Orsec – organisation de la réponse de sécurité civile – doivent être actualisés et renforcés à la lumière de ce qui s’est passé lors du cyclone Chido. Ce que nous avons constaté, ce n’est pas que l’État a répondu, même partiellement ! Des zones entières de l’archipel ont été coupées du monde pendant des jours, voire des semaines. Les zones dévastées n’ont pas été déblayées à temps. Les débris qui obstruaient et polluaient les cours d’eau sont restés en place très longtemps. Une grande partie des habitants s’est trouvée démunie, sans eau ni nourriture, et n’a pu accéder aux soins que difficilement et tardivement. C’est la réalité. Ce n’est de la faute de personne, mais il faut être lucide et dire la vérité pour repartir du bon pied.
M. le président
La parole est à M. le ministre d’État, pour soutenir l’amendement no 645.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Je laisserai le soin à Mme Firmin Le Bodo présenter l’amendement, car il est identique. Je me fie à ses talents de conviction.
M. le président
La parole est à Mme Agnès Firmin Le Bodo, suppléant M. Florent Boudié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République, pour soutenir l’amendement no 525.
Mme Agnès Firmin Le Bodo, suppléant M. Florent Boudié, président de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l’administration générale de la République
Merci de votre délicatesse, monsieur le ministre. L’amendement vise à supprimer le mot « partiellement ». À première vue, on pourrait penser qu’il est purement rédactionnel, mais il a une portée symbolique : il ne faut pas minimiser l’action de l’État dans la phase de gestion de l’urgence. Reconnaissons le rôle de tous les acteurs de l’État qui y ont pris part et remercions-les pour leur engagement.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Je suis à l’unisson de M. le ministre et de Mme Firmin Le Bodo. L’État a mobilisé 500 millions d’euros de dépenses d’urgence ; n’a-t-il pas répondu présent ? Le 30 décembre, le premier ministre, en présence du ministre d’État, a annoncé le plan Mayotte debout. Un fonds d’amorçage doté de 100 millions d’euros a été créé en faveur des collectivités. La crise a été gérée en totale solidarité avec La Réunion – je le dis devant M. Rimane, président de la délégation aux outre-mer de l’Assemblée nationale. Tout cela montre que l’État a pleinement joué son rôle. Si la commission a adopté l’amendement de Mme Voynet,…
Mme Dominique Voynet
Non, elle a adopté un amendement du groupe GDR !
M. Philippe Vigier, rapporteur
…je suis, à titre personnel, favorable aux amendements identiques nos 645 et 525.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
La parole est à Mme Estelle Youssouffa.
Mme Estelle Youssouffa
Au-delà de la question sémantique, le débat trouve son origine dans l’erreur fondamentale commise par les services de l’État à Mayotte : ils n’ont pas admis qu’eux-mêmes avaient été atteints par le cyclone Chido. Ce point est très important. Il faut rappeler que le cyclone a détruit la préfecture, la gendarmerie, les bâtiments de la Légion étrangère, les stocks de secours de la Croix-Rouge et une partie de l’hôpital. Si les autorités officielles avaient admis qu’elles-mêmes avaient été touchées, cela aurait diminué les attentes de la population et permis d’expliquer les difficultés qu’il y a eu à déployer les secours. Tout le monde aurait pu le comprendre.
Je ne saurais souscrire aux propos tenus par certains, car ils mettent en cause les services de l’État, qui étaient sur place et qui ont fait de leur mieux. On ne peut nier que celles et ceux qui étaient sur place et qui sont venus à notre secours ont fait de leur mieux.
Cela a-t-il été suffisant ? Non, et il faut l’entendre aussi. Cela s’explique par les conditions exceptionnelles, celles d’une destruction totale. L’aéroport aussi a en partie été détruit ; par conséquent, faire atterrir les avions a été très compliqué, même pour acheminer de l’aide et des secours.
Ces nuances sont très importantes, car il faut reconnaître que la situation était exceptionnelle. Mme Voynet et moi ne sommes d’accord sur quasiment rien, mais elle a raison de vouloir que nous ne gâchions pas cette crise : il faut que les services de l’État apprennent à mieux répondre à des situations de catastrophe. Par exemple, l’hôpital de campagne déployé à Mayotte n’avait pas des capacités suffisantes pour l’afflux des patients et les conditions météorologiques. Plus généralement, il faut bien constater que les secours n’ont pas pu être déployés à hauteur des besoins.
M. le président
La parole est à Mme Geneviève Darrieussecq.
Mme Geneviève Darrieussecq
Je voudrais simplement témoigner, car je faisais partie du gouvernement qui a eu à gérer le début de la crise à Mayotte, quand le cyclone s’est abattu sur l’archipel. Une cellule de crise a immédiatement été créée à Paris ; elle a contacté tout de suite – quand c’était possible, car les communications étaient très difficiles – tous les acteurs à Mayotte et à La Réunion, qui était la zone épargnée d’où pouvaient venir les secours. Je comprends que la réponse ait pu sembler tardive aux Mahorais, mais l’importance des destructions était telle qu’il n’était pas possible d’être plus rapide.
Quand j’étais maire, j’ai connu la violente tempête Klaus, qui a isolé complètement certains villages, lesquels sont restés sans électricité ni téléphone pendant au moins une semaine.
Mme Estelle Youssouffa
Ça a duré plusieurs semaines à Mayotte !
Mme Geneviève Darrieussecq
Nous étions dans l’Hexagone et les infrastructures n’ont pas pu être rétablies immédiatement – cela a semblé très long à tout le monde.
Étant donné l’importance des destructions à Mayotte, je peux vous assurer que tout a été mis en œuvre immédiatement, avec tous les acteurs, pour apporter un soutien aux Mahoraises et aux Mahorais. Nous avions parfaitement conscience de la détresse des populations, mais notre action a été entravée par la destruction de l’aéroport, du port et, plus généralement, de toutes les infrastructures. Je sais que le temps a dû sembler long, mais on ne peut pas dire que la réponse de l’État a été partielle. Elle a été aussi rapide et entière qu’il était possible.
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet.
Mme Dominique Voynet
Madame la ministre Darrieussecq, je comprends votre émotion. Chacun, à sa place, a tenté de faire de son mieux. Ce qui est en cause ici, c’est le manque de culture du risque. Après un événement, nous nous congratulons, soulagés, de ce qui a pu être fait, mais nous ne réalisons pas de véritable retour d’expérience pour établir ce qui a marché ou non, et ce qu’on doit changer.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Ce n’est pas vrai !
Mme Dominique Voynet
Certains services le font en interne, mais en tirons-nous les conséquences sur le plan budgétaire, sur celui des effectifs des services censés se préparer aux menaces et aux risques ?
À La Réunion, par exemple, les services ont une grande expérience des cyclones et savent s’y préparer – même si on ne parvient pas toujours ensuite à en effacer les stigmates. À Mayotte, c’est nouveau. Je n’ai donc pas l’impression de faire une proposition particulièrement scandaleuse en invitant à écrire dans le rapport annexé que l’État a « tenté de répondre » présent pour gérer la crise – il ne s’agit pas de dire qu’il n’a rien fait, comme vous semblez le penser. Il a agi, mais dans la mesure des moyens mobilisés à l’époque, et il faut prendre en considération – je suis d’accord avec vous, madame Youssouffa, et j’aurai dû le signaler – que beaucoup des services de l’État ont été eux-mêmes dévastés.
M. le président
La parole est à M. le ministre d’État.
M. Manuel Valls, ministre d’État
Je n’étais pas au gouvernement à ce moment-là, mais je voudrais remercier Mme Darrieussecq pour ses propos. Elle a vécu cette crise et elle a eu, quand elle était ministre, à affronter des situations particulièrement difficiles. Je voudrais ainsi répondre à Mme Voynet : nous tirons des leçons des expériences passées. Pensez à toutes les tempêtes qui ont frappé la côte ouest ou la Méditerranée. L’État et les collectivités locales s’adaptent, et c’est d’autant plus nécessaire avec le changement climatique.
À Mayotte, c’était depuis très longtemps une vraie préoccupation, à plus forte raison du fait des constructions dont nous avons parlé et de la croissance de la population. Je tiens à le souligner, l’État, le préfet et l’ensemble des services de l’État, des collectivités et des acteurs de la santé ont particulièrement bien réagi.
Nous tirons de nombreux enseignements. Frantz Gumbs a évoqué ce matin la situation à Saint-Martin. Le collège 900 de La Savane, dont nous avons visité ensemble le chantier il y a trois mois et qui devrait être inauguré dans quelques mois, tire toutes les leçons de l’ouragan Irma – qui n’était pourtant pas le premier à toucher l’île –, avec des dispositifs de protection de la population. Nous pouvons nous inspirer de cette expérience pour Mayotte.
Je n’entre pas dans le débat sémantique ; chacun fera ce qu’il voudra. Je tiens néanmoins à souligner que l’État doit tirer toutes les leçons des crises – il le fait – et les intégrer dans cette phase de reconstruction et de refondation du territoire.
(L’amendement no 474 n’est pas adopté.)
M. le président
Je mets aux voix les amendements identiques nos 645 et 525.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 51
Nombre de suffrages exprimés 45
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 11
Contre 34
(Les amendements identiques nos 645 et 525 ne sont pas adoptés.)
M. le président
Sur les amendements nos 228 et 230, je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 228.
Mme Sandrine Nosbé
Nous souhaitons supprimer le mot « principal » à la deuxième phrase de l’alinéa 5. Nous entendons souligner ainsi que la loi du 24 février 2025 d’urgence pour Mayotte ne constitue pas « l’outil législatif principal au service de la reconstruction de Mayotte ». Depuis son adoption, la situation n’a que peu évolué sur l’archipel. En avril, le fonds de secours pour les outre-mer n’avait toujours pas été activé, pas plus que le prêt à taux zéro – le PTZ l’a été ensuite, mais à peine 10 % des sinistrés en ont bénéficié à ce jour. L’État n’a pas rémunéré les entreprises qui ont œuvré à l’enlèvement des déchets à la suite du passage du cyclone Chido ou ne l’a fait que très tardivement. L’eau est toujours coupée deux jours sur trois.
Six mois après la catastrophe, les Mahorais et Mahoraises se sentent trahis, car les promesses n’ont pas été tenues. Aucune aide n’a encore été versée à Mayotte ; la reconstruction ne peut pas être menée, faute d’argent.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
La loi d’urgence, adoptée très rapidement après le passage du cyclone Chido, a été un outil législatif efficace et puissant. Elle a créé l’établissement public attendu depuis si longtemps, qui sera bientôt opérationnel – je salue à mon tour le travail formidable accompli par le général Facon et la mission interministérielle. J’ai également évoqué le fonds d’amorçage pour les collectivités. Il était indispensable de faire ce que nous avons fait. J’estime qu’il faut conserver le mot « principal » et suis donc défavorable à l’amendement.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 228.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 53
Nombre de suffrages exprimés 21
Majorité absolue 11
Pour l’adoption 12
Contre 9
(L’amendement no 228 est adopté.)
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 414.
M. Davy Rimane
Il tend à insérer le mot « décemment » après le mot « vivre » à l’alinéa 6. En effet, il est très important de rappeler que les Mahorais, les Mahoraises, les personnes qui vivent et œuvrent sur ce territoire ont le droit de vivre décemment.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Cher président de la délégation aux outre-mer, nous partageons la volonté que les Mahorais et les Mahoraises puissent vivre décemment. Ainsi, nous avons eu tout un débat sur la convergence sociale. Vous souhaitez naturellement qu’elle soit accélérée, mais nous avons cranté des mesures de relèvement progressif du smic à partir du 1er janvier 2026, ce qui constitue une réponse forte. Le ministre a détaillé les mesures prévues pour l’ensemble des aides sociales et leur calendrier. Il ne s’agit plus d’incantations, puisque ces dispositions ont été votées. Elles figurent également dans le rapport annexé.
Je vous demande donc de retirer l’amendement, sans quoi j’émettrai un avis défavorable. Je pense que vous êtes compréhensif et attentif à cette démarche enfin réalisée.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Monsieur Rimane, maintenez-vous ou retirez-vous l’amendement ?
M. Davy Rimane
Je le maintiens. Vous considérez que les mesures sont en train de se matérialiser et monteront en puissance, mais cela n’empêche pas d’inscrire le terme « décemment » après « vivre », d’autant qu’au moment où nous parlons, ce n’est pas le cas pour tous à Mayotte. Du reste, si vous me passez l’expression, un tel rappel ne mange pas de pain.
(L’amendement no 414 est adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 230.
Mme Sandrine Nosbé
La deuxième phrase de l’alinéa 7 énonce que l’État « accordera une importance particulière à l’association des élus mahorais et des forces vives du territoire ». Selon nous, ce n’est pas suffisant : nous souhaitons que l’État s’engage à les associer. Aussi proposons-nous, par cet amendement, la rédaction suivante : « L’État s’engage à améliorer considérablement » l’association des élus mahorais et des forces vives du territoire.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
L’amendement est satisfait. Non seulement nous avons créé un établissement public chargé de la reconstruction et de la refondation de Mayotte, mais nous l’avons doté d’une présidence exécutive. Or le conseil d’administration sera présidé par le président du conseil départemental de Mayotte. D’autre part, le comité de suivi sera composé non seulement de parlementaires mais aussi de représentants des élus locaux. Vous voyez que les élus sont pris en considération de manière forte et concrète. Je vous demande donc de retirer l’amendement, sans quoi j’émettrai un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 230.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 50
Nombre de suffrages exprimés 47
Majorité absolue 24
Pour l’adoption 38
Contre 9
(L’amendement no 230 est adopté.)
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 416.
M. Davy Rimane
Il vise à mentionner, dans le rapport annexé, l’importance de l’intégration de Mayotte dans son bassin régional, conformément aux conclusions du comité interministériel des outre-mer (Ciom) de 2023. M. le ministre des outre-mer ici présent réaffirme lui-même l’importance de cette intégration lors de ses déplacements dans les différents territoires. Un ancrage fort dans notre bassin géographique est nécessaire pour notre avenir et pour un développement optimal.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Vous connaissez parfaitement les conclusions du Ciom de juillet 2023, qui affirmaient pour la première fois l’importance de la coopération régionale.
M. Davy Rimane
Oui, nous sommes d’accord !
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Ce n’est pas la peine d’être redondant en le mentionnant dans le rapport annexé, d’autant que celui-ci n’a pas de portée normative. En outre, l’article 30, que nous avons adopté, porte précisément sur les accords de coopération régionale. L’amendement est donc doublement satisfait. Je vous demande donc de le retirer, sans quoi j’émettrai un avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
(L’amendement no 416 est adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir les amendements nos 475 et 476, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Mme Dominique Voynet
La décision de faire de Mayotte un département a été prise dans des conditions au fond assez ambiguës. Pour l’État, il s’agissait d’envoyer un signal fort, de donner une sorte de preuve d’amour aux Mahorais, comme pour leur dire : ne vous inquiétez pas, nous ne vous laisserons pas tomber. Pour les Mahorais, c’était une manière de s’arrimer à la République française et de conjurer la menace de se voir un jour abandonnés et de devoir retourner aux Comores.
Je pense cependant que rares étaient les personnes qui avaient conscience de l’ensemble des compétences que le nouveau département allait devoir prendre en charge. Le transfert des compétences ne s’est pas fait dans des conditions totalement satisfaisantes. Par exemple, la protection maternelle et infantile (PMI) a été d’emblée sous-financée.
Si nous dressons le bilan lucide de ce qui s’est passé, voici ce que nous pouvons dire : le fait d’avoir confié au département nouvellement créé des compétences très lourdes, tout en lui accordant des moyens limités, a sans doute permis de commencer à rattraper le retard, mais sans y parvenir entièrement. La départementalisation n’a pas porté tous ses fruits et elle a sans doute déçu, pour de nombreuses raisons sur lesquelles je ne reviens pas ici.
Je défends surtout l’amendement de repli, le no 476, qui vise à inscrire dans le rapport annexé que « la départementalisation n’a pas suffi à rattraper le retard de développement de Mayotte ». J’en veux pour preuve qu’au fil du temps, l’État a été amené à reprendre un certain nombre de compétences – par exemple, la gestion des routes ou le traitement des déchets. Je voudrais simplement que le rapport annexé ne soit pas totalement exalté : la départementalisation n’a pas été le miracle espéré.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
En ses quatorze ans d’existence, le département n’a pas relevé tous les défis. Il n’exerce pas toutes les compétences qui lui reviennent, notamment la gestion des fonds européens et la construction et l’entretien des collèges et lycées. L’enjeu est de développer l’ingénierie nécessaire. Avec cette loi et ses quatre piliers solides, nous nous donnons enfin les moyens d’avancer.
Pardonnez-moi, mais 4 milliards d’euros programmés sur dix ans, ce n’est pas rien ! J’espère que nous pourrons les consommer. Ils permettront notamment à la collectivité de renforcer son ingénierie et d’exercer davantage de compétences. Elle pourra s’appuyer sur le nouvel établissement public, qui est véritablement novateur, comme je le disais au président Rimane. Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
La parole est à Mme Estelle Youssouffa.
Mme Estelle Youssouffa
Les mots ont un sens : Mayotte ne peut pas retourner aux Comores ni leur être rendue, puisqu’elle n’en a jamais fait partie. Nous n’avons jamais été Comoriens. Nous sommes Français depuis 1841. Quant à la départementalisation, c’est un combat engagé par les Mahorais depuis les années 1950.
Mme Dominique Voynet
Je n’ai pas dit le contraire !
Mme Estelle Youssouffa
Il y a quelque chose qui n’est pas très clair : on nous explique que les frontières sont une passoire, que Mayotte est pauvre et que rien ne fonctionne, tout cela à cause de la départementalisation. Or la départementalisation nous a accordé un statut qui n’exonère pas l’État de ses obligations ; au contraire, il en crée. C’est précisément pour obtenir cela que les Mahoraises et les Mahorais se sont battus.
Surtout, la départementalisation garantissait l’ancrage de Mayotte dans la République. Déjà, à l’époque, il y avait à Paris des personnes qui pensaient savoir mieux que nous ce qui était bon pour nous. En l’occurrence, à celles et ceux qui nous souhaitent un avenir prospère au sein de la dictature comorienne, je répondrai ce que nos anciens, qui avaient vu les choses arriver, ont déjà dit alors : non merci. Les Mahoraises et les Mahorais ont souhaité s’ancrer dans la République, afin que tout le monde respecte le fait qu’ils sont Français depuis 1841.
C’est ça, la départementalisation. Aujourd’hui, la question majeure, qui n’est pas abordée dans le toilettage institutionnel, c’est le transfert des compétences. À Mayotte, l’État décentralise sans avoir centralisé auparavant. Nos collectivités locales et le conseil départemental, qui va devenir l’assemblée de Mayotte, doivent tout construire, contrairement aux collectivités locales de l’Hexagone, qui gèrent un héritage. À Mayotte, nous devons bâtir la production d’eau potable, l’assainissement et les routes ; dans l’Hexagone, les mairies, les conseils départementaux et les conseils régionaux n’ont pas cette charge.
(Les amendements nos 475 et 476, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le président
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 459, qui fait l’objet d’un sous-amendement, no 737.
M. Elie Califer
Nous souhaitons remplacer systématiquement le mot « convergence » par le mot « alignement », afin de traduire plus précisément les exigences d’égalité et de justice sociale spécifiques à Mayotte.
C’est le sens de la demande de Mayotte depuis des décennies. Ce n’est pas qu’une question de sémantique. La notion de convergence suggère un processus progressif, voire incertain, où les écarts se réduiraient de manière graduelle.
Or, à Mayotte, territoire ultramarin marqué par des inégalités profondes et des besoins sociaux urgents, ce terme ne reflète pas suffisamment la volonté politique d’atteindre dans les meilleurs délais un niveau équivalent à celui des autres départements français – et non pas seulement les départements d’outre-mer, ou les Drom, comme dirait M. Gumbs.
Par ce choix terminologique, le législateur affirmerait clairement sa détermination à réduire rapidement les écarts de développement et à garantir à Mayotte un niveau d’accès aux droits, aux services publics, à l’emploi et au développement économique comparable à celui des autres territoires français, conformément aux engagements pris et à l’esprit de la République.
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet, pour soutenir le sous-amendement no 737.
M. Yoann Gillet
Je le retire.
(Le sous-amendement no 737 est retiré.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Avis défavorable. Le mot « convergence » explique bien ce que nous sommes en train de faire. Nous avons besoin non pas de mots, mais de réponses fortes, et c’est ce que nous proposons. J’espère que vous serez sensible à mon argument.
(L’amendement no 459, repoussé par le gouvernement, est adopté.)
M. le président
Je suis saisi de plusieurs demandes de scrutin public : sur les amendements nos 22 et 23, par le groupe Rassemblement national ; sur l’amendement no 241, par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Yoann Gillet, pour soutenir l’amendement no 22.
M. Yoann Gillet
Cet amendement d’appel vise à rappeler que la pression migratoire incontrôlée à Mayotte constitue une atteinte grave non seulement à la paix civile, mais aussi à la sécurité intérieure de la République et à la souveraineté nationale, éléments essentiels à l’ordre public et à l’autorité de l’État.
Face à l’implantation de réseaux criminels, à la récurrence des violences urbaines, à la multiplication des trafics en tout genre et des agressions envers les forces de l’ordre, il est essentiel que cette loi affirme, sans ambiguïté, l’impératif de protection de la sécurité intérieure à Mayotte et de la souveraineté nationale.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Quand on porte des projets aussi ambitieux en matière de lutte contre l’immigration et de convergence sociale, il ne faut pas s’attendre à ce que tout soit réglé au 1er janvier 2026 ou 2027. C’est en agissant simultanément dans ces deux domaines que nous résoudrons les problèmes. Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 22.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 49
Nombre de suffrages exprimés 48
Majorité absolue 25
Pour l’adoption 29
Contre 19
(L’amendement no 22 est adopté.)
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 415.
M. Davy Rimane
Cet amendement tend à rappeler qu’à l’instar d’autres territoires, Mayotte souffre d’un sous-investissement chronique. En outre, les politiques régaliennes, qui relèvent de la compétence de l’État, y sont très souvent en échec. Voilà ce qui explique la situation actuelle. S’il a aggravé cette situation, le cyclone Chido ne l’a pas créée ; il n’a fait que révéler au monde la réalité de ce que vivait Mayotte depuis des décennies.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Monsieur Rimane, j’imagine que nous nous retrouverons au moment du vote final. Vous ne pouvez pas proposer ainsi, par un amendement, d’écrire que l’État n’a pas fait assez. Certes, nous l’avons constaté comme vous. Toutefois, il faut prendre en compte les 4 milliards d’euros qui sont engagés pour les prochaines années. Un tel effort n’avait jamais été déployé jusqu’à présent. C’est important de le dire, parce que tout le monde regardera ce que chacun aura voté. Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
La parole est à M. Davy Rimane.
M. Davy Rimane
Nous verrons qui votera quoi. Je rappelle juste des éléments factuels, sans verser dans le dogmatisme ou l’idéologie. Quatre milliards sur dix ans, cela fait 400 millions par an.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
C’est pas mal, déjà !
M. Davy Rimane
Justement, on entend très souvent ces phrases : « c’est déjà pas mal » ; « c’est mieux que rien ». J’espère que ces 400 millions par an sur dix ans permettront à l’ensemble du territoire de Mayotte de sortir de cette situation et d’aller vers un avenir prospère. Moi, j’attends de voir.
(L’amendement no 415 est adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 241.
Mme Sandrine Nosbé
Nous souhaitons supprimer l’alinéa 15, qui fait de la lutte contre l’immigration l’axe principal de la refondation de Mayotte. Il témoigne de l’obsession migratoire du gouvernement, qui s’entête à faire de l’étranger le bouc émissaire à Mayotte.
Le renforcement de la répression migratoire ne réduira pas drastiquement le nombre d’entrées sur le territoire. Cependant, il conduira, à coup sûr, au maintien dans la précarité et dans l’irrégularité de personnes déjà en grande difficulté.
La multiplication des dérogations au droit des étrangers à Mayotte ne fait pas diminuer les flux migratoires. Les personnes migrantes sont en détresse : elles fuient la guerre et des conditions de vie atroces. Elles ne viennent pas au gré d’une législation complexe qu’elles ne connaissent pas.
Mayotte est devenue une île-test des exceptions légales : il s’agira ensuite d’étendre à la France entière de telles restrictions xénophobes. Nous le refusons catégoriquement.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Nous avons une divergence politique à ce sujet, mais nous l’assumons, car les faits sont là : 50 % de la population de l’île n’est pas mahoraise. C’est pourquoi nous créons un certain nombre d’outils. Vous déplorez le fait qu’il n’y ait pas suffisamment de services publics calibrés. C’est vrai, mais ne nous racontons pas d’histoires : il n’est pas possible de continuer à vivre sous une telle pression migratoire. Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Défavorable.
M. le président
La parole est à M. Emeric Salmon.
M. Emeric Salmon
J’ai été surpris d’entendre Mme Nosbé dire que les migrants quittaient leur pays en raison de la guerre. L’immigration qui submerge Mayotte venant principalement des Comores, je pose la question : y a-t-il une guerre aux Comores ? Il me semble que non. Mmes Bamana et Youssouffa pourront confirmer mon propos.
M. le président
La parole est à M. Aurélien Taché.
M. Aurélien Taché
Il n’y a pas de conflit aux Comores, mais des guerres terribles ravagent la Corne de l’Afrique et la république démocratique du Congo. À Mayotte, il y a de nombreux réfugiés de la région des Grands Lacs. Si la France dénonçait ce conflit avec un peu plus de force et ne laissait pas M. Trump régler toutes les guerres du monde, nous pourrions peut-être avancer. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 241.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 48
Nombre de suffrages exprimés 48
Majorité absolue 25
Pour l’adoption 12
Contre 36
(L’amendement no 241 n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de quatre amendements, nos 23, 417, 478 et 17, pouvant être soumis à une discussion commune.
L’amendement no 23 de M. Yoann Gillet est défendu.
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 417.
M. Davy Rimane
La pression migratoire que subit Mayotte est un problème. Dès le départ, le pouvoir régalien ne l’a pas géré comme il aurait dû le faire ; il n’a pas organisé les choses comme il aurait dû le faire. On en est arrivé à une situation extrême, qui met en tension des gens sur un même territoire.
Aujourd’hui, les autorités affichent leur volonté de mettre fin à la vague migratoire sur Mayotte. Ce sont des envolées lyriques : vous savez très bien que vous n’empêcherez jamais des hommes et des femmes de se rendre d’un territoire à un autre.
Depuis l’examen du premier texte consacré à Mayotte, je ne cesse de vous poser la même question, sans obtenir de réponse. Vous estimez que 50 % de la population est étrangère et n’a pas vocation à rester à Mayotte. À partir du moment où vous avez décidé que ces personnes ne doivent bénéficier d’aucun droit à Mayotte, à partir du moment où vous avez décidé qu’il faut détruire les bidonvilles et évacuer les étrangers, où les mettez-vous, que faites-vous d’eux ?
M. Yoann Gillet
Dehors !
M. Emeric Salmon
Si ce sont des Comoriens, retour aux Comores !
M. Davy Rimane
Jusqu’à présent, vous n’avez jamais expliqué comment, concrètement, vous comptiez procéder, à moins qu’il suffise d’un coup de baguette magique ! C’est bien beau de dire « dehors ! », monsieur Gillet, mais vous n’expliquez pas comment ! Si l’on estime à 500 000 habitants la population de Mayotte, cela veut dire qu’il y en aurait 250 000 à mettre « dehors », comme vous dites.
M. Gaëtan Dussausaye
Oui !
M. Davy Rimane
Mais de quelle manière et à quel rythme ? Les reconduites à la frontière en une année ne dépassent pas les 10 000, et vous prétendez mettre 250 000 personnes dehors en cinq ans ? Arrêtez de raconter n’importe quoi !
J’en termine en rappelant que nous sommes en train de parler d’êtres humains, pas d’un troupeau de bœufs. Quelle que soit notre position sur le fond du problème, nous devons le traiter avec le respect et la dignité dus à l’espèce humaine. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 478.
Mme Dominique Voynet
L’alinéa 15 donne l’impression que l’immigration est l’alpha et l’oméga de la lutte pour la reconstruction de Mayotte. Or je voudrais rappeler, dans le prolongement de ce que vient de dire Davy Rimane, qu’année après année, on a raccompagné à Anjouan plus que sa population totale. Ce n’est donc pas d’une efficacité folle, et on a surtout l’impression d’une sorte d’agitation permettant de montrer que l’on expulse des gens, dont on sait qu’ils vont revenir car ils ont parfois laissé à Mayotte de la famille, un emploi, des biens.
Tel qu’il est rédigé, cet alinéa masque que la reconstruction passe aussi par d’autres pistes. C’est pourquoi je propose, sans même supprimer des termes qui me choquent mais auxquels vous tenez, de faire référence à la grande pauvreté et au mal-logement. Ce qui nous intéresse tous en effet, c’est de sortir l’ensemble des habitants de Mayotte de leur situation de misère. L’amalgame opéré en permanence entre les problèmes de Mayotte et les immigrés doit être dépassé car, si je ne nie pas qu’il y a des difficultés dans le domaine de l’immigration à Mayotte, une bonne partie des habitants des bidonvilles sont des immigrés en situation régulière ou des Français, et tous partagent le même sort : la pauvreté, l’absence d’habitat digne, le manque d’accès à l’eau et aux soins.
M. Emeric Salmon
C’est parce que vous ne prenez pas les bonnes mesures !
Mme Dominique Voynet
À défaut de le supprimer – ce que je souhaiterais pourtant –, on pourrait donc muscler un peu cet alinéa 15. (Mme Léa Balage El Mariky applaudit.)
M. le président
L’amendement no 17 de Mme Elsa Faucillon est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Avis défavorable. D’un côté, M. Gillet nous dit qu’il faut détruire tout habitat informel ; de l’autre, Mme Voynet et ses collègues nous disent que l’habitat insalubre n’est pas acceptable – sur ce point, nous pouvons nous retrouver. Mais les uns et les autres convergent à certains moments pour supprimer des outils, notamment les expropriations, qui permettraient de créer des établissements publics et des services publics destinés à la population. Je suis un peu surpris que, pour des raisons politiques totalement différentes, vous vous rapprochiez ainsi.
Mme Dominique Voynet
On parle de principes !
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet.
M. Yoann Gillet
Le collègue Rimane demande comment nous comptons faire sortir du territoire national des personnes qui y sont présentes illégalement, à savoir des clandestins, donc des gens qui ne respectent pas les lois de la République française. C’est très simple, et à Mayotte, c’est encore plus simple, puisque l’État a passé un marché, un marché public à bons de commande pour être précis, avec un prestataire privé – que j’ai d’ailleurs rencontré lorsque je me suis rendu là-bas. Chaque jour, ce prestataire organise des rotations entre Mayotte et les Comores, pour renvoyer chez elles les personnes en situation irrégulière, la police aux frontières montant dans le bateau pour les raccompagner jusqu’à bon port.
Le nombre de rotations permet aujourd’hui de raccompagner ainsi chez eux plus de 25 000 personnes par an, mais la société a la capacité d’augmenter la cadence, et l’on pourrait en raccompagner trois, voire quatre ou cinq fois plus chaque année. Il suffit de le vouloir. Vous vouliez savoir ce qu’on fait des personnes en situation irrégulière ? Eh bien, on les ramène chez elles, tout simplement ! (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)
Mme Dominique Voynet
Gros malin !
M. le président
La parole est à Mme Estelle Youssouffa.
Mme Estelle Youssouffa
Il n’y a en effet pas de guerre aux Comores ; il y a juste les Comores qui revendiquent Mayotte et instrumentalisent les flux migratoires. Cela, nos collègues de LFI l’oublient aussi systématiquement qu’ils défendent des droits imaginaires que devraient avoir les Comoriens à Mayotte. Permettez-moi de rétablir les faits : non, les Comoriens n’arrivent pas à Mayotte parce qu’ils fuient la guerre mais parce qu’ils y sont encouragés par leur État, qui a des revendications territoriales sur Mayotte.
Pour ce qui est de l’avenir des personnes qui sont en situation irrégulière à Mayotte, la loi est très claire : elles n’ont pas vocation à rester sur le territoire national. Quant à celles et ceux qui sont régularisés, l’abrogation du titre de séjour territorialisé leur permettra de se répartir sur l’ensemble du territoire national, qui a tout à fait la capacité de les absorber, quand Mayotte n’y arrive plus.
La question migratoire est enfin prise à bras-le-corps par le gouvernement, même si c’est un peu tard. On engage enfin une réflexion sur la base navale et la mobilisation de la marine nationale pour la protection de notre frontière, on entend enfin que le droit du sol agit comme un appel d’air à Mayotte, où huit parturientes sur dix sont étrangères. La démographie de Mayotte est une démographie comorienne, et cela empêche – personne ne peut le nier – l’élaboration et le déploiement de toute politique publique. Il me semble donc normal que ce soit mentionné dans le rapport annexé, et j’espère que cela y restera.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 23.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 53
Nombre de suffrages exprimés 53
Majorité absolue 27
Pour l’adoption 30
Contre 23
(L’amendement no 23 est adopté ; en conséquence, les amendements nos 417, 478 et 17 tombent.)
M. le président
L’amendement no 665 de Mme Émeline K/Bidi est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Avis défavorable. Je rappelle que, dans le rapport annexé, on prévoit 400 millions d’euros pour les écoles.
(L’amendement no 665, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 664 de Mme Émeline K/Bidi est défendu.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Avis défavorable. Un délai de cinq ans pour créer de tels services publics est très court. Nous espérons y arriver, mais si cela ne devait se faire qu’en six ans, nous nous exposerions à des réprimandes. Soyons prudents !
(L’amendement no 664, repoussé par le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements, nos 390 et 460, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à M. Davy Rimane, pour soutenir l’amendement no 390.
M. Davy Rimane
Il s’agit d’une question de sémantique. Nous voulons substituer au terme « convergence » le terme « égalité », car nous ne voulons pas nous contenter de simplement converger vers un objectif qui devrait déjà être une réalité ; nous voulons l’égalité.
M. le président
La parole est à M. Elie Califer, pour soutenir l’amendement no 460.
M. Elie Califer
Faisons un petit retour en arrière, jusqu’en 1946 : on nous annonce un big bang, et quatre territoires ultramarins deviennent des départements. En 1974, devant l’état de ces territoires, le président Giscard d’Estaing décrète la départementalisation économique. Et, tenez-vous bien, en 2017, quelques mois avant le « en même temps », le Parlement vote la loi de programmation relative à l’égalité réelle outre-mer. Nous étions sur un chemin de convergence…
C’est la raison pour laquelle nous sommes toujours méfiants quand il s’agit de convergence. L’article 1er tend à approuver le rapport annexé, qui constitue la colonne vertébrale du projet de loi. Il est temps d’envoyer un signal fort et clair à nos compatriotes. Nous sommes sur le bon chemin, mais osons aller au-delà des 440 millions d’euros prévus et affirmons que nous sommes pour l’« alignement ».
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Convergence, alignement, égalité… ça y est, nous l’avons inscrit dans la loi, tout à l’heure. À l’horizon 2031, ce n’est plus renvoyé aux calendes grecques, c’est réel. (M. Elie Califer a une moue dubitative.)
(Les amendements nos 390 et 460, repoussés par le gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
M. le président
Je suis saisi de demandes de scrutin public : sur les amendements nos 243, 247, 249, 254, 258 et 327, par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire ; sur les amendements nos 24 et 25, par le groupe Rassemblement national.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Nous en venons à quatre amendements, nos 243, 247, 352 et 249, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Aurélie Trouvé, pour soutenir l’amendement no 243.
Mme Aurélie Trouvé
Par cet amendement, nous proposons tout simplement l’alignement immédiat – c’est-à-dire en décembre 2025 – du smic sur son niveau hexagonal car rien ne justifie cette inégalité majeure de droit entre les habitants de Mayotte et ceux du reste de la France.
Je rappelle que le coût de la vie et les prix sont bien supérieurs à Mayotte. Les Mahorais ont le droit, comme tous les Français, de vivre à peu près décemment de leur travail. Nous avons adopté tout à l’heure un amendement précisant que l’ambition est de donner aux Mahorais les moyens de vivre « décemment » ; celui-ci renforcera donc la cohérence du texte.
Nous avons aussi déposé des amendements de repli, mais il nous semble que la convergence doit s’opérer au plus vite.
M. le président
La parole est à M. Aurélien Taché, pour soutenir l’amendement no 247, dont je comprends que c’est un amendement de repli.
M. Aurélien Taché
On l’a dit à plusieurs reprises, dès lors qu’il s’agit de restreindre le droit au séjour, le droit à vivre en famille, tous ces droits extrêmement importants pour les gens, les mesures prévues par ce texte sont d’application immédiate. En revanche, quand il s’agit d’assurer l’égalité sociale, c’est renvoyé à un horizon de plusieurs années.
Le rapporteur général expliquait il y a quelques minutes que cinq ans constituaient un délai bien court, même s’il fallait s’efforcer de s’y tenir. Non ! Il y a déjà des décennies que cela aurait dû être fait ! Ce n’est pas très compliqué, nous ne réclamons pas d’argent public ; nous demandons simplement aux entreprises de Mayotte de faire un effort en payant le même niveau de salaire minimum que dans l’ensemble de la République française, avec entrée en vigueur le 1er janvier 2026. Cela me paraît une bonne date de repli.
M. le président
Les amendements nos 352 de Mme Elsa Faucillon et 249 de Mme Mathilde Hignet sont défendus.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en discussion commune ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Ce que vous proposez d’écrire dans le rapport annexé n’est pas conforme à ce que nous avons voté tout à l’heure ; nous ne pouvons donc pas l’accepter. Avis défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
La parole est à Mme Maud Petit.
Mme Maud Petit
Nous sommes bien sûr tous d’accord pour qu’il y ait un alignement. Là où je ne vous suis pas en revanche, c’est lorsque vous dites que c’est aux entreprises de faire un effort. Comment vont-elles faire, elles qui sont parfois exsangues, si on ne leur permet pas de procéder par étapes ? Nous voulons tous ici que le smic soit le même partout en France, mais j’ai peur, dans ces conditions, qu’elles soient obligées de se séparer de certains salariés. Je tenais à vous faire part de mon inquiétude.
M. le président
La parole est à Mme Aurélie Trouvé.
Mme Aurélie Trouvé
J’entends ce que vous dites, mais une des principales difficultés que rencontrent ces entreprises, c’est précisément la faiblesse de la demande et du pouvoir d’achat des Mahorais. La hausse du smic créera une boucle vertueuse, en offrant aux salariés un meilleur pouvoir d’achat, ce qui leur permettra d’acheter davantage de fruits et légumes, par exemple. Par ailleurs, l’élargissement des exonérations de cotisations patronales – dont il est normal qu’elles soient alignées sur le régime de l’Hexagone car le droit doit être le même à Mayotte – permettra aussi et dès à présent aux entreprises de faire face à cette hausse.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 243.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 42
Nombre de suffrages exprimés 21
Majorité absolue 11
Pour l’adoption 12
Contre 9
(L’amendement no 243 est adopté ; en conséquence, les amendements nos 247, 352, 249, 254, 255 et 257 tombent.)
M. le président
Je suis saisi de deux amendements identiques, nos 362 et 479.
L’amendement no 362 de Mme Maud Petit est retiré.
(L’amendement no 362 est retiré.)
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 479.
Mme Dominique Voynet
Cet amendement vise à sécuriser la convergence sociale à Mayotte en deux volets : d’abord, en engageant une réforme des exonérations de cotisations patronales construite avec les acteurs économiques du territoire, car l’alignement progressif du smic, conjugué à la hausse des cotisations, représente un choc de compétitivité majeur ; ensuite, en maintenant temporairement le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE), qui reste un outil vital pour les entreprises mahoraises, notamment dans des secteurs structurants comme le bâtiment et travaux publics ou la distribution. La suppression brutale du CICE serait un coup dur. Or l’économie locale reste fragile.
Il ne s’agit pas d’appliquer un régime standardisé issu de la Lodeom – loi pour le développement économique des outre-mer –, mais de bâtir un dispositif adapté aux réalités mahoraises. C’est une question de justice et d’efficacité.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
J’émets un avis défavorable, pour les raisons que j’ai évoquées tout à l’heure. Le ministre avait fait une proposition qui permettait le tuilage : augmenter le smic tout en baissant les charges sociales et en élevant le taux de défiscalisation, afin que l’impact soit nul pour les entreprises. Je regrette qu’elle ait été balayée d’un revers de la main.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
(L’amendement no 479 est adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 258.
Mme Sandrine Nosbé
Nous souhaitons, à la seconde phrase de l’alinéa 23, supprimer les mots « telles que la mise en place d’une zone franche globale ». Nous remettons en cause le recours à ce dispositif : il est censé relancer l’économie locale, mais il a déjà montré ses limites.
La création d’une zone franche globale conduirait à exonérer toutes les entreprises de taxes pendant cinq ans. Pourtant, dans un rapport conjoint remis en 2020, l’Inspection générale des finances et l’Inspection générale des affaires sociales ont souligné les limites de tels dispositifs : « les exonérations sociales et fiscales zonées n’ont pas démontré leur efficacité en matière de création d’entreprises et d’emplois ».
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Cale ne vous surprendra pas : je ne suis pas favorable à votre amendement. Une zone franche globale, c’est l’assurance de mieux accompagner le tissu économique ; c’est plus d’activité, plus de richesses et plus d’emplois à la clé. Elle coûtera 24 millions d’euros, ce qui oppose un démenti à ceux qui parlent de « délaissement » de la part de l’État. Rappelons que la valeur ajoutée des entreprises de Mayotte est actuellement de 26 millions d’euros par an ; cette mesure sera donc un coup de pouce significatif à l’économie de l’île.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 258.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 41
Nombre de suffrages exprimés 41
Majorité absolue 21
Pour l’adoption 11
Contre 30
(L’amendement no 258 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Dominique Voynet, pour soutenir l’amendement no 480.
Mme Dominique Voynet
À maintes reprises, nous avons regretté que le projet de loi et le rapport annexé marquent une obsession à l’égard de l’immigration. Nous proposons donc de remplacer l’alinéa 25, qui insiste encore sur le sujet, par la phrase suivante : « La reconstruction de Mayotte impose de prendre des mesures fortes visant à rattraper le retard avec les autres départements d’outre-mer puis avec l’Hexagone. » Cela donnerait un peu d’air à ce texte.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Je donne un avis défavorable, parce que la lutte contre l’immigration fait partie des mesures fortes que nous prenons.
Mme Dominique Voynet
Ce n’est pas ça !
M. Philippe Vigier, rapporteur général
C’est un ensemble de mesures, dont nous essayons de démontrer la cohérence depuis le début de nos débats. Oui, il faut absolument lutter contre cette immigration massive et clandestine – que vous connaissez très bien – à Mayotte.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
(L’amendement no 480 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Edwige Diaz, pour soutenir l’amendement no 24.
Mme Edwige Diaz
Il y a un temps pour constater, et un temps pour nommer. Nous considérons, au Rassemblement national, que le temps de nommer les choses est arrivé. À Mayotte, l’immigration n’est pas simplement illégale, elle échappe à toute maîtrise. Mes collègues Yoann Gillet et Anchya Bamana n’ont cessé de rappeler des chiffres qui devraient vous faire rougir de honte eu égard à la situation qu’ils font subir aux Mahorais.
Des dizaines de milliers de clandestins arrivent par des filières de passeurs parfaitement structurées, avec une logique bien rodée. Ils s’attaquent non seulement à nos frontières, mais également à nos institutions, avec la complicité et les encouragements de l’extrême gauche, et avec la complaisance déconcertante du bloc central.
L’objet de cet amendement de mon collègue Gillet n’est ni de bouleverser le texte ni de créer une polémique ; il vise tout simplement à compléter une formule trop timide en précisant que l’immigration clandestine est aussi « hors de contrôle ». Il est temps que la loi en prenne acte. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Madame la députée, n’imaginez pas que nous restons les bras croisés face à l’immigration clandestine ! Je vous rappelle que 95 % des expulsions faites à partir des territoires ultramarins le sont à partir de Mayotte. Je tiens d’ailleurs à remercier publiquement les forces de l’ordre pour le travail formidable qu’elles accomplissent au quotidien. C’est une tâche des plus difficiles, et ils l’assument avec courage. Je pense que l’on peut les applaudir. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et RN.)
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
La parole est à M. Yoann Gillet.
M. Yoann Gillet
Effectivement, nous applaudissons le travail réalisé par les forces de l’ordre, qui est remarquable. En revanche, ceux qui n’ont pas fait leur travail, ce sont les gouvernants actuels et les précédents. Certes, de nombreux retours à la frontière sont organisés depuis Mayotte. Mais les clandestins reviennent systématiquement parce que le fameux « rideau de fer » promis par un certain Gérald Darmanin s’est transformé, comme l’a qualifié ma collègue Bamana, en rideau de fumée.
Rien n’a été fait. Où sont les fameux radars couvrant l’ensemble des côtes de l’île afin de protéger réellement les Mahorais de l’immigration irrégulière ? Où est la volonté d’engager un véritable bras de fer avec le gouvernement des Comores en lui coupant tout argent public venant de France s’il se refuse à toute prise de conscience et continue à encourager ses ressortissants à venir polluer notre pays ?
Il faut dire les choses, il faut de la fermeté. Nous félicitons encore une fois les forces de l’ordre, qui font un travail remarquable, mais elles sont les premières à se plaindre des gouvernements successifs qui ne font strictement rien, si ce n’est de la communication. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
M. Emeric Salmon
Eh oui !
M. Manuel Valls, ministre d’État
Ah bon ? Ils se plaignent ?
M. le président
La parole est à M. le rapporteur général.
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Merci, monsieur Gillet, de m’avoir emboîté le pas en remerciant à votre tour les forces de l’ordre. Pour les avoir vus agir, je peux vous assurer qu’ils font vraiment les choses. Faire repartir 25 000 étrangers en une année, vous imaginez le travail que cela représente.
Vous évoquez le « rideau de fer ». Si vous étiez honnête, vous relèveriez que le rapport annexé prévoit 52 millions d’euros pour financer des moyens de sécurité complémentaires. D’autre part, vous savez très bien que le cyclone Chido a fortement dégradé nos moyens d’interception.
Nous déployons des efforts considérables. J’entends bien que ce n’est jamais assez à vos yeux – c’est normal : c’est la petite saillie juste avant 20 heures. Je vous rappelle qu’en ne votant pas en faveur de la facilitation des procédures d’expropriation, vous avez créé un arc électrique qui nous prive de moyens pour les services publics de demain.
M. Yoann Gillet
Pipeau !
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 24.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 44
Nombre de suffrages exprimés 44
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 21
Contre 23
(L’amendement no 24 n’est pas adopté.)
M. le président
La parole est à Mme Sandrine Nosbé, pour soutenir l’amendement no 327.
Mme Sandrine Nosbé
Nous souhaitons, à la fin de l’alinéa 25, supprimer les mots « et l’habitat illégal ». Nous rappelons qu’il n’existe pas de lien direct entre habitat précaire et immigration. En insérant la question de l’habitat précaire dans la partie dédiée à l’immigration, le gouvernement alimente l’idée selon laquelle l’habitat illégal serait une conséquence directe de l’immigration.
Compte tenu de la prolifération des bangas à Mayotte, il est urgent que les pouvoirs publics consentent un investissement massif pour garantir un logement digne à toutes et tous. Or l’exécutif choisit plutôt d’embrasser les thèses de l’extrême droite en désignant les personnes migrantes comme responsables de la crise du logement. Une telle approche occulte les véritables causes structurelles de la précarité et déresponsabilise l’État en dépit de son inaction.
En faisant un lien entre immigration et habitat illégal, le gouvernement entretient un discours antipauvres et raciste, fondé sur l’idée fausse que les bidonvilles n’accueilleraient que des personnes en situation irrégulière.
M. Manuel Valls, ministre d’État
On se fait traiter de racistes, tout est normal…
Mme Sandrine Nosbé
Le Rassemblement national n’a cessé de dire que des clandestins occupaient les bangas,…
M. Emeric Salmon
Ah ! Il n’y a pas de clandestins ?
Mme Sandrine Nosbé
…alors que les chercheurs ont prouvé que ces bidonvilles sont aussi occupés par des Français et par des étrangers en situation régulière.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Défavorable.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 327.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 46
Nombre de suffrages exprimés 46
Majorité absolue 24
Pour l’adoption 14
Contre 32
(L’amendement no 327 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 25 de M. Yoann Gillet est défendu.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Défavorable.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 25.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 45
Nombre de suffrages exprimés 44
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 21
Contre 23
(L’amendement no 25 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 18 de Mme Elsa Faucillon est défendu.
(L’amendement no 18, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
Nous en venons à l’amendement no 229 de Mme Sandrine Nosbé, sur lequel je suis saisi par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
L’amendement est défendu.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
Défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Défavorable.
M. le président
Êtes-vous d’accord pour procéder au scrutin public sans attendre les cinq minutes réglementaires ?
Plusieurs députés
Oui !
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 229.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 44
Nombre de suffrages exprimés 44
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 15
Contre 29
(L’amendement no 229 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 481 de Mme Dominique Voynet est défendu.
(L’amendement no 481, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
M. le président
Nous en venons à trois amendements, nos 26, 27 et 28, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Sur ces amendements, je suis saisi par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Yoann Gillet, pour les soutenir.
M. Yoann Gillet
L’amendement no 26 vise à réaffirmer que la lutte contre l’immigration clandestine doit être la première des priorités de l’État à Mayotte.
L’amendement no 27 tend à renforcer le dispositif opérationnel de lutte contre l’immigration clandestine en proposant le déploiement d’un navire de la marine nationale dans les eaux internationales. Cette proposition est défendue par ma collègue Anchya Bamana, députée de Mayotte, et elle est inscrite dans le programme présidentiel de Marine Le Pen.
Mme Agnès Firmin Le Bodo
Un point bonus !
M. Yoann Gillet
C’est une nécessité si l’on veut réellement lutter contre l’immigration.
L’amendement no 28 vise à renforcer l’ambition du gouvernement – il y a du travail – en matière de lutte contre l’immigration par voie maritime, en précisant que l’augmentation du nombre d’intercepteurs opérationnels devra aller jusqu’au doublement de la flotte actuelle. Ce doublement est nécessaire, car les intercepteurs sont utilisés vingt-quatre heures sur vingt-quatre à Mayotte. N’étant pas conçus pour tourner ainsi en continu, ils se détériorent très rapidement. C’est ce que disent non seulement les policiers, mais aussi le personnel de maintenance.
M. le président
Quel est l’avis de la commission ?
M. Philippe Vigier, rapporteur général
J’émets un avis défavorable sur les amendements no 26 et no 28. J’ai dit tout à l’heure à M. Gillet qu’un effort de 52 millions d’euros était prévu.
Quant à l’amendement no 27, relatif au déploiement d’un navire de la marine nationale, il est satisfait par l’alinéa 37 du rapport annexé. J’en demande donc le retrait ; à défaut, mon avis sera défavorable.
M. le président
Quel est l’avis du gouvernement ?
M. Manuel Valls, ministre d’État
Même avis.
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 26.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 45
Nombre de suffrages exprimés 45
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 21
Contre 24
(L’amendement no 26 n’est pas adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 27.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 45
Nombre de suffrages exprimés 45
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 21
Contre 24
(L’amendement no 27 n’est pas adopté.)
M. le président
Je mets aux voix l’amendement no 28.
(Il est procédé au scrutin.)
M. le président
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 45
Nombre de suffrages exprimés 45
Majorité absolue 23
Pour l’adoption 21
Contre 24
(L’amendement no 28 n’est pas adopté.)
M. le président
L’amendement no 20 de Mme Elsa Faucillon est défendu.
(L’amendement no 20, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
2. Ordre du jour de la prochaine séance
M. le président
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
Suite de la discussion du projet de loi de programmation pour la refondation de Mayotte et du projet de loi organique relatif au département-région de Mayotte.
La séance est levée.
(La séance est levée à vingt heures.)
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra