Question de : M. Philippe Gosselin
Manche (1re circonscription) - Droite Républicaine

M. Philippe Gosselin attire l'attention de M. le garde des sceaux, ministre de la justice, sur le transfèrement de détenus et résidents européens pour diminuer la surpopulation carcérale. La France connaît depuis de nombreuses années un taux de surpopulation carcérale parmi les plus élevés d'Europe, avec des conséquences importantes sur les conditions de détention et la réinsertion des personnes détenues. Alors que des accords existent déjà entre certains pays européens pour le transfèrement des détenus vers leur pays d'origine, le nombre de transferts effectifs reste relativement faible. Or une meilleure coopération européenne en la matière pourrait à la fois alléger les établissements pénitentiaires français et faciliter la réinsertion des détenus dans leur pays d'origine. En effet, environ 3 000 détenus ressortissants d'un État de l'Union européenne, ou y ayant leur résidence habituelle, exécutent une ou plusieurs peines définitives d'emprisonnement ferme au sein des établissements pénitentiaires. Ces condamnés peuvent faire l'objet d'un transfèrement intraeuropéen en application de la décision-cadre 2008/909/JAI du Conseil du 27 novembre 2008 transcrite dans le droit français aux articles 728-10 à 728-17 du code de procédure pénale. Or il doit être souligné que la moitié des condamnés étrangers exécutent leur peine en entier puisqu'ils ne se voient pas octroyer d'aménagement en raison de leur situation personnelle, de leur absence d'attache sur le territoire et par manque de projet sérieux. Ainsi, les détenus étrangers purgent en moyenne des peines d'emprisonnement de 11,8 mois contre 10,2 mois pour les condamnés français. Alors que la plupart des pays de l'Union européenne appliquent systématiquement la décision cadre 2008/909/JAI, les parquets le font insuffisamment, pour des raisons auxquelles des solutions peuvent être apportées. Des solutions techniques peuvent être rapidement mises en œuvre en adaptant les applicatifs, notamment le logiciel « DOT » auquel il n'a pas été jugé bon d'y intégrer cette procédure dès sa phase de développement. En outre, la facilitation du transfèrement des condamnés concernés devrait permettre à ceux-ci de pouvoir purger leurs peines à proximité de leurs familles, sans rupture d'égalité entre ressortissants européens et français. Il lui demande donc quelles initiatives sont actuellement envisagées par le Gouvernement pour renforcer et accélérer les transfèrements de détenus européens.

Réponse publiée le 26 août 2025

Le ministère de la Justice poursuit son engagement afin d'améliorer les conditions de travail des personnels pénitentiaires, ainsi que les conditions de détention des personnes placées sous main de justice (PPSMJ). Le service public pénitentiaire prend en charge les PPSMJ prévenues ou condamnées, en milieux ouvert et fermé. Il contribue à leur insertion ou réinsertion et concourt à la sauvegarde de l'ordre public. Les décisions judiciaires dont il assure l'exécution relèvent de la seule compétence de l'autorité judiciaire en vertu des articles 64 et 66 de la Constitution du 4 octobre 1958. Au 1er décembre 2024, le nombre de personnes écrouées détenues s'élevait à 80 792 pour 62 404 places opérationnelles. Le programme immobilier pénitentiaire annoncé par le président de la République en 2018 prévoyait initialement la livraison de 15 000 places supplémentaires pour 2027. 22 établissements sur les 50 que prévoit le plan ont déjà été livrés, pour un total d'environ 4 500 places nettes. Dans le cadre de la révision du calendrier de livraison du plan 15 000, les projets d'établissements demeurant en étude devraient être livrés à l'horizon 2029 et non plus 2027. Le 3 décembre 2024, une mission stratégique d'accélération du programme immobilier pénitentiaire a également été initiée. Par ailleurs, dans le cadre de la mission d'urgence « mieux exécuter les peines », annoncée le 20 novembre 2024, un groupe de travail composé de professionnels des milieux judiciaire et pénitentiaire a mené une réflexion sur le développement de nouveaux outils pour faire face à la surpopulation carcérale, tels que les mesures alternatives à l'incarcération, tout en veillant à prévenir la commission de nouvelles infractions et à favoriser la réinsertion. Son rapport a été remis et les recommandations viennent d'être restituées au ministre d'Etat, garde des Sceaux, ministre de la Justice. En parallèle, la direction de l'administration pénitentiaire, particulièrement vigilante à la régulation des effectifs des établissements les plus suroccupés, continue d'appliquer une politique volontariste d'orientation des personnes détenues, y compris à faible reliquat de peine, vers les établissements pour peine. Les actions de pilotage mises en œuvre permettent un suivi en temps réel des besoins et capacités d'accueil des établissements pénitentiaires. Cette politique produit des résultats significatifs puisqu'au 1er décembre 2024, le taux d'occupation des quartiers centre de détention (QCD) et des centres de détention (CD) s'élevait à 98,5 %, alors qu'au 1er octobre 2020 il était de 87 %. S'agissant des transfèrements intraeuropéens, en vertu des articles 728-10 et suivants du code de procédure pénale, la procédure de reconnaissance et d'exécution des condamnations dans l'Union européenne permet à un ressortissant, condamné par un Etat à une peine privative de liberté, d'exécuter cette peine dans l'Etat dont il est ressortissant, afin de faciliter sa réinsertion sociale. En France, l'opportunité de mettre en œuvre cette procédure appartient au représentant du ministère public. Il peut requérir un rapport du service pénitentiaire d'insertion et de probation pour la compléter. Il est à noter que le parquet compétent est celui près la juridiction ayant prononcé la condamnation. Il ne correspond pas nécessairement au parquet du ressort sur lequel se trouve l'établissement hébergeant la personne détenue concernée. Les limites géographiques des ressorts judiciaires induisent également une limite en termes de compétences. L'implémentation de cette procédure dans le dossier d'orientation et de transfert (DOT) est donc inadaptée. Pleinement conscient de ces enjeux, le ministre d'Etat, garde des Sceaux, ministre de la Justice, a pris une circulaire en date du 21 mars 2025 relative à la prise en charge des personnes détenues de nationalité étrangère définitivement condamnées. Outre le renforcement de la coopération aux fins de repérage des personnes détenues de nationalité étrangère définitivement condamnées et la mise en oeuvre de protocoles pour améliorer la coordination entre les services pénitientaires et ceux du ministère de l'Intérieur pour la mise en oeuvre des mesures d'éloignement du territoire national, la circulaire appelle au renforcement de la mise en oeuvre des possibilités d'exécution transfrontalière des condamnations à une peine ou mesure de sûreté privative de liberté au sein de l'Union européenne. A cette fin, les greffes pénitentiaires transmettront aux procureurs de la République la liste d'aide au repérage des personnes concernées. 

Données clés

Auteur : M. Philippe Gosselin

Type de question : Question écrite

Rubrique : Lieux de privation de liberté

Ministère interrogé : Justice

Ministère répondant : Justice

Dates :
Question publiée le 12 novembre 2024
Réponse publiée le 26 août 2025

partager