Question de : M. Paul Molac
Morbihan (4e circonscription) - Libertés, Indépendants, Outre-mer et Territoires

M. Paul Molac attire l'attention de Mme la ministre de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire sur la mise en œuvre concrète de la contractualisation au sein de la filière bois. Dans un contexte de développement de l'énergie bas-carbone en France et d'augmentation des risques liés au réchauffement climatique, la filière bois se trouve aujourd'hui en situation de tension. Devant une demande en bois accrue et des difficultés d'approvisionnement établies, il est nécessaire d'offrir aux acteurs de la filière la possibilité de nouer des partenariats de longue durée, afin de garantir un approvisionnement pérenne et une meilleure visibilité sur les objectifs attendus et les limites pressenties. Un tel mouvement de contractualisation doit pouvoir s'accompagner, en amont, d'une véritable concertation au sein de la filière bois et d'un dialogue élargi à l'ensemble des acteurs, sans aucune exclusion. Doivent pouvoir être concernés, exploitants forestiers, mérandiers, entrepreneurs de travaux forestiers, scieurs-transformateurs, industriels et négociants. Largement considérée par les acteurs du secteur comme un élément central pour la refondation de la filière bois, la contractualisation a d'ailleurs fait l'objet, en 2022, d'un rapport du Conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux (CGAAER). Concluant à la nécessité de développer des contrats d'approvisionnement, le rapport en pointait également les faiblesses structurelles. Ainsi, dans l'optique d'en constituer la pierre angulaire des relations commerciales du secteur, M. le député demande à Mme la ministre quels moyens le Gouvernement entend mobiliser afin d'améliorer la contractualisation au sein de la filière bois. Aussi, pour bâtir une véritable concertation, il l'interroge sur la possibilité de création d'une interprofession réunissant l'ensemble des acteurs, sous l'autorité du ministère de l'agriculture et de la souveraineté alimentaire.

Réponse publiée le 1er juillet 2025

Afin de renforcer la chaîne de valeur localisée en France, au bénéfice de l'ensemble de la filière, du propriétaire forestier aux industries de transformation, plusieurs options se présentent pour le vendeur de bois brut. Lors de la vente de bois issus de forêts publiques ou privées, les bois sont : - soit vendus sur pied et l'acheteur se charge de l'exploitation forestière et de l'enlèvement des bois ; - soit vendus façonnés en bord de route, permettant d'effectuer des tris, par essence et qualité. L'exploitation, le tri et la manutention sont effectués à l'initiative et sous la responsabilité du vendeur ; - soit vendus livrés à l'usine de transformation. L'exploitation, le tri, la manutention et le transport des bois jusqu'à l'usine sont effectués sous la responsabilité du vendeur. Plus le vendeur intervient dans la chaîne de valeur, plus il peut majorer son prix de vente. Il lui appartient d'assurer les prestations d'exploitation, de tri, de classement, éventuellement de livraison, à un coût de revient compétitif, eu égard à son prix de vente et aux prix pratiqués par les autres acteurs du marché. Si le vendeur des bois souhaite vendre prioritairement à des transformateurs français de première et peut-être de seconde transformation, il a toute latitude pour contractualiser avec eux des volumes, des essences et des qualités de bois, à fournir dans le cadre d'un contrat d'approvisionnement annuel ou pluriannuel, comportant des prix et des clauses acceptées par les deux parties. Dans le cadre du marché commun européen, il n'est pas possible d'imposer aux vendeurs de bois la vente exclusive, sous contrats d'approvisionnement, à des transformateurs de proximité. Il est également impossible d'interdire la libre-circulation des produits bois au sein de l'Union européenne (UE), d'imposer des niveaux minimum de transformation aux entreprises du bois ou d'interdire l'exportation. Le principe de la libre-circulation des biens et des personnes constitue un principe fondateur de l'UE. Toute mesure de restriction des ventes à des clients situés dans l'UE pourrait être jugée contraire aux engagements de la France en tant qu'État membre de l'UE et de l'organisation mondiale du commerce. Afin de permettre la réalisation d'une plus grande valeur ajoutée au sein de l'UE, les autorités françaises ont, pour le cas particulier du marché du chêne, introduit une modification dans la réglementation nationale, donnant la possibilité à l'office national des forêts (ONF) de réserver la première présentation de certains produits forestiers de qualité à des opérateurs s'engageant à les transformer ou à les faire transformer dans l'UE. Face à l'impossibilité juridique d'empêcher les exportations de chêne par les acteurs du négoce international et afin de sécuriser l'approvisionnement en bois des entreprises de transformation, l'État encourage depuis plusieurs années les partenaires de la filière à développer la contractualisation : c'est à cet effet que l'accord de filière chêne a été signé en 2022 et renouvelé en 2023. Considérant que des progrès significatifs ont aussi été réalisés dans le recours à la contractualisation et à la vente sous label UE, le ministère chargé des forêts a signé en 2023 avec les acteurs de la filière un avenant prolongeant cet accord jusqu'à 2025. L'ensemble des signataires s'engage donc à promouvoir et à soutenir le développement des contrats, qu'il s'agisse de nouveaux contrats ou de l'augmentation des volumes dans le cadre de contrats existants. Les signataires prévoient ainsi de maintenir les trajectoires d'accroissement de la contractualisation, telles que définies dans l'accord initial, en les prolongeant jusqu'en 2025. Les volumes vendus en forêts publiques, en contrats d'approvisionnement, montrent une progression, avec un total de 5,04 millions de mètres cubes (m3) en 2024, toutes essences confondues, soit une augmentation de 6,4 % par rapport à 2023. Le volume de chêne contractualisé augmente significativement, passant de 169 000 m3 en 2023 (21 % du volume total vendu) à 184 000 m3, soit 24 % du total vendu. Cette augmentation se concentre dans les forêts des collectivités et résulte du travail en commun mené par la fédération nationale des communes forestières (FNCOFOR) et l'ONF depuis 2022. Il vise à promouvoir auprès des propriétaires publics l'intérêt de la contractualisation (déploiement du kit de contractualisation, généralisation des rencontres entre les industriels et les collectivités propriétaires de forêts). Enfin, en termes de représentation institutionnelle, le paysage interprofessionnel de la filière forêt-bois française est complexe. La majorité des acteurs de l'amont de la filière (sylviculture, production forestière, exploitation forestière, première transformation du bois) est regroupée au sein de l'interprofession nationale France Bois Forêt, créée en 2004. Plusieurs rapports ont suggéré de simplifier ce paysage et de rapprocher les différents acteurs au sein d'une fédération interprofessionnelle unique, en vue de préparer à moyen terme une grande interprofession unifiée. Ces conclusions ont été reprises dans le programme national de la forêt et du bois (PNFB), approuvé par décret en 2017. Lors des assises de la forêt et du bois (octobre 2021-mars 2022), cet objectif a été retenu, afin de faire évoluer les modes de gouvernance et de prise de décision, dans un contexte où de nombreux défis doivent être relevés. Le Gouvernement soutient ces travaux qui s'inscrivent de façon cohérente dans les orientations du PNFB et les conclusions des assises de la forêt et du bois. L'interprofession est un lieu de dialogue constant entre professionnels, où peuvent être discutées notamment les stratégies et priorités communes en matière de contrats d'approvisionnement, mais aussi d'anticipation et d'adaptation aux événements climatiques ayant des conséquences sur la filière forêt-bois.

Données clés

Auteur : M. Paul Molac

Type de question : Question écrite

Rubrique : Bois et forêts

Ministère interrogé : Agriculture, souveraineté alimentaire

Ministère répondant : Transition écologique, biodiversité, forêt, mer et pêche

Dates :
Question publiée le 28 janvier 2025
Réponse publiée le 1er juillet 2025

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