Question écrite n° 4980 :
Arrêté municipal interdisant la circulation de poids lourds en agglomération

17e Législature

Question de : M. Jean-Louis Thiériot
Seine-et-Marne (3e circonscription) - Droite Républicaine

M. Jean-Louis Thiériot interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la possibilité pour un maire d'interdire la circulation de poids lourds sur une route départementale traversant son agglomération et dans la positive, sur quels fondements et selon quelles modalités. Il attire son attention sur le cas particulier des communes de Sivry-Courty et du Châtelet-en-Brie (Seine-et-Marne), qui subissent chaque jour la circulation de centaines de poids lourds transitant par leur centre-ville sur la route départementale D605 entre la région parisienne et le reste de l'Europe et causant des embouteillages insupportables aux heures de pointe, alors même que l'autoroute A5 parallèle à celle-ci et située à moins de 5 kilomètres constitue un itinéraire totalement substituable que cependant les entreprises de transport demandent à leurs chauffeurs de ne pas emprunter car payante. Il lui demande donc si un maire peut valablement prendre un arrêté municipal permanent interdisant la circulation des poids lourds en transit à l'intérieur d'une agglomération sur une route départementale dans les conditions suivantes : la circulation concerne des centaines à des milliers de poids lourds par jour portant une atteinte certaine à la tranquillité des riverains (nuisances sonores, pollution) et causant des dommages incontestables à la chaussée ; il existe une autoroute à péage à proximité constituant un itinéraire substituable ; la création par la collectivité d'une nouvelle route contournant l'agglomération coûterait plusieurs millions d'euros et consommerait des terres agricoles ; l'arrêté ne concernerait pas les dessertes locales ni les engins et matériels agricoles.

Réponse publiée le 29 juillet 2025

En application de l'article L. 2213-1 du code général des collectivités territoriales (CGCT), le maire exerce, à l'intérieur des agglomérations, la police spéciale de la circulation « sur les routes nationales, les routes départementales et l'ensemble des voies publiques ou privées ouvertes à la circulation publique », sous réserve des pouvoirs dévolus au représentant de l'Etat dans le département sur les routes à grande circulation. Ces prérogatives peuvent être exercées par le président de l'établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre lorsque celui-ci a bénéficié d'un transfert de cette police spéciale dans les conditions prévues à l'article L. 5211-9-2 du CGCT. Dans ce cadre, l'autorité détentrice du pouvoir de police de la circulation peut, par arrêté motivé : - « interdire à certaines heures l'accès de certaines voies de l'agglomération ou de certaines portions de voie ou réserver cet accès, à certaines heures ou de manière permanente, à diverses catégories d'usagers ou de véhicules », eu égard aux nécessités de la circulation et de la protection de l'environnement, conformément au 1° de l'article 2213-2 du CGCT ; - « interdire l'accès de certaines voies ou de certaines portions de voies ou de certains secteurs de la commune aux véhicules dont la circulation sur ces voies ou dans ces secteurs est de nature à compromettre soit la tranquillité publique, soit la qualité de l'air, soit la protection des espèces animales ou végétales, soit la protection des espaces naturels, des paysages ou des sites ou leur mise en valeur à des fins esthétiques, écologiques, agricoles, forestières ou touristiques », sur le fondement de l'article 2213-4 du même code. Il en résulte qu'une mesure d'interdiction de circulation, sur une partie des voies, aux véhicules dépassant un poids déterminé peut être prise sous réserve qu'elle soit nécessaire et proportionnée à l'objectif poursuivi, et justifiée par des éléments circonstanciés. A cet égard, le juge administratif a notamment reconnu la légalité de mesures d'interdiction de l'utilisation de voies par des poids lourds dans un objectif de sécurité publique, lorsque celles-ci sont justifiées par la configuration des lieux et ne constituent pas des interdictions générales et absolues (CE, 13 juin 1979, n° 05767 ; 9 décembre 1983, n° 26813). Une interdiction de circulation des poids lourds peut également être justifiée par des motifs de conservation de la voirie et de sécurité de la circulation (CE, 2 décembre 1977, n° 00437 ; 22 octobre 2003, nos 242195 et 243328). En outre, la jurisprudence a considéré qu'une interdiction faite aux transports routiers de marchandises d'un poids total en charge supérieur à 6 tonnes, d'emprunter la route nationale traversant des communes est légale, dès lors qu'elle est justifiée par l'intérêt de la sécurité et de la tranquillité publiques et que les véhicules peuvent aisément contourner l'agglomération par une autoroute à péage (CE, 5 novembre 1980, n° 10148 ; 14 novembre 1980, n° 13410).

Données clés

Auteur : M. Jean-Louis Thiériot

Type de question : Question écrite

Rubrique : Transports routiers

Ministère interrogé : Intérieur

Ministère répondant : Aménagement du territoire et décentralisation

Dates :
Question publiée le 11 mars 2025
Réponse publiée le 29 juillet 2025

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