Équité entre les obligés alimentaires lors de la liquidation d'une succession
Question de :
M. Jean-Michel Jacques
Morbihan (6e circonscription) - Ensemble pour la République
M. Jean-Michel Jacques attire l'attention de Mme la ministre du travail, de la santé, des solidarités et des familles sur la prise en considération sur la succession de l'obligation alimentaire et des sommes versées par les héritiers, envers leurs parents en établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes (EHPAD). Un administré l'a interpellé en mars 2025, pour lui faire part de sa situation concernant la pension alimentaire versée par les descendants dont les parents âgés séjournent en EHPAD. En effet, le code civil impose l'obligation alimentaire des enfants pour leurs ascendants étant dans le besoin. Une contribution proportionnelle aux revenus est alors mise en place, mais la loi ne prévoit pas cette disparité de contributions entre les descendants, au moment de la succession. De fait, les sommes versées par chacun des héritiers au titre de l'obligation alimentaire ne sont pas prises en compte et l'héritier ayant la contribution financière la plus importante ne voit pas ses efforts budgétaires pris en considération. Les parents ne sont pas admissibles à l'allocation de solidarité aux personnes âgées (ASPA), qui prévoit qu'aucun des enfants n'engage de dépenses nécessaires pour leurs parents avant le règlement de leur succession. De ce fait, les obligés alimentaires financent les frais d'hébergement en fonction de leurs revenus, mais ces contributions ne sont manifestement pas récupérables à la succession. Dans un contexte d'augmentation des frais d'EHPAD, cette personne considère que le principe d'équité entre les héritiers et plus largement entre les citoyens, n'est pas respectée. Aussi, il lui demande si le Gouvernement compte prendre des mesures pour inscrire dans la loi, la prise en compte des versements au titre d'une pension alimentaire lors de la liquidation d'une succession.
Réponse publiée le 19 août 2025
Il résulte de l'article 205 du code civil que les enfants doivent, au titre de la solidarité familiale fondée sur le lien de filiation, des aliments à leur père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin. Cette obligation alimentaire, qui permet à son créancier de subvenir à ses besoins, présente un caractère d'ordre public (Cass, 11 janvier 2027, arrêt non publié). En outre, l'article 205 du code civil ne prévoit aucune hiérarchie entre débiteurs d'aliments de sorte que le créancier n'est pas contraint d'agir contre tous les débiteurs d'aliments ou d'agir selon un ordre déterminé (1er civ, 2 janvier 1929, arrêt non publié). L'obligation alimentaire, qui constitue une dette personnelle du débiteur (1ère Civ, 25 avril 2007, n° 06-12.614), n'a donc pas vocation à être récupérée au stade du règlement de la succession et reste due même si le débiteur renonce à la succession du créancier d'aliments (1er civ, 31 mars 2021, pourvoi n° 20-14.107). Toutefois, tout débiteur d'aliments dispose, contre ses coobligés, d'un recours pour ce qu'il a payé (en argent ou en nature) au-delà de sa part contributive (1er civ, 16 mars 2016, pourvoi n° 15-13.403), de sorte que le débiteur pourra en obtenir le remboursement de la part de ses coobligés. Le recours peut être exercé contre chacun des codébiteurs et est recevable même après le décès du créancier d'aliments (1er civ, 21 juin 1989, pourvoi n° 87-15.986). Ainsi, dès lors que le droit positif limite l'obligation alimentaire du débiteur à ses facultés contributives et lui offre le cas échéant des voies de recours évitant qu'il soit lésé dans l'exécution de son obligation alimentaire, il n'y a pas de réforme envisagée.
Auteur : M. Jean-Michel Jacques
Type de question : Question écrite
Rubrique : Donations et successions
Ministère interrogé : Travail, santé, solidarités et familles
Ministère répondant : Justice
Dates :
Question publiée le 22 avril 2025
Réponse publiée le 19 août 2025