XVIIe législature
Session ordinaire de 2024-2025

Deuxième séance du jeudi 23 janvier 2025

Sommaire détaillé
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Deuxième séance du jeudi 23 janvier 2025

Présidence de Mme Nadège Abomangoli
vice-présidente

Mme la présidente

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    La séance est ouverte.

    (La séance est ouverte à quinze heures.)

    1. Instauration d’un nombre minimum de soignants par patient hospitalisé

    Suite de la discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la suite de la discussion de la proposition de loi relative à l’instauration d’un nombre minimum de soignants par patient hospitalisé (nos 104, 697).

    Discussion générale (suite)

    Mme la présidente

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    Ce matin, l’Assemblée a commencé d’entendre les orateurs inscrits dans la discussion générale.
    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    Monsieur le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins, cette proposition de loi nous donne l’occasion d’aborder un sujet important : celui de nos soignants. Je connais bien le travail de M. le rapporteur en la matière. Étant moi-même professionnel de santé et ayant commencé ma vie politique par un engagement syndical pour défendre le statut des internes, je suis naturellement sensible au sort de ces soignants dont nous avons tant besoin. N’oublions pas la pandémie de covid-19, qui n’est pas si lointaine.
    Monsieur le rapporteur, je connais votre combat pour l’accès aux soins. Je suis d’ailleurs très heureux que nous partagions la même ligne quant à la lutte contre les déserts médicaux ; j’étais bien seul pendant une quinzaine d’années, mais nous sommes maintenant plus nombreux, ayant réuni plus de 200 signataires pour un nouveau texte.
    La proposition de loi concerne donc un sujet majeur. Nous permettra-t-elle ou non d’avancer ? L’intention est certes louable ; en proposant d’instaurer des quotas, vous cherchez à vous assurer que chaque service sera en mesure de fonctionner convenablement. Néanmoins, les soignants n’ont pas besoin de plus de normes ou d’encadrement. Ce qu’ils veulent, c’est qu’on leur fasse confiance et que leurs effectifs augmentent, comme cela a été dit ce matin. Or depuis la loi du 13 août 2004 qui a pleinement transféré cette compétence aux régions, nous avons augmenté les effectifs d’infirmiers ou encore d’aides-soignants en formation. Reste un problème majeur d’attractivité du métier.
    Je ne voudrais pas que la promesse d’un jour, fût-elle relayée par les sénateurs, soit la tristesse du lendemain.

    M. Guillaume Garot, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    C’est beau !

    M. Philippe Vigier

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    Nous ne saurions avancer à coups de quotas et de normes qui ne seront pas respectés. En lisant attentivement le texte, je vois que ces ratios seraient établis par décret ministériel après consultation de la Haute Autorité de santé (HAS). Or la France, comme nous l’a rappelé ce matin notre débat au sujet des outre-mer, n’est pas uniforme. Elle n’est pas identique selon qu’on se trouve dans l’Hexagone ou en outre-mer, dans une grande ville dotée d’un centre hospitalier universitaire (CHU) ou dans une petite ville dotée d’un petit centre hospitalier. Cette réalité me frappe tous les jours de plein fouet dans mon territoire.
    Nous sommes d’accord sur le fait qu’il faut améliorer les conditions de travail des soignants. Permettez-moi d’ailleurs d’évoquer le Ségur de la santé, puisque personne n’en a dit un seul mot. Pardonnez-moi, mais il y a eu des difficultés avant 2017 ! Vous étiez député comme moi, et force est de constater qu’à l’époque, cet effort n’avait pas été fait dans le budget de la sécurité sociale. Soulignons donc que l’effort singulier du Ségur était indispensable.
    Par ailleurs, si les établissements de santé ne respectent pas les quotas –⁠ ce qui sera le cas toujours aux mêmes endroits, c’est-à-dire dans les services des petits centres hospitaliers ruraux en manque d’effectifs –, que se passera-t-il ? Fermera-t-on les services ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    J’ai bien dit que non !

    M. Philippe Vigier

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    Tel est le problème qui se pose. Or la tension est déjà grande. Comme vous l’avez souligné ce matin, des quotas existent déjà pour certaines activités comme la dialyse ou la réanimation ; mais si ces quotas avaient été appliqués, comment aurions-nous fait pendant la pandémie de covid-19, période à laquelle les personnels étaient mobilisés jour et nuit et où les établissements subissaient une tension absolue ? Les quotas n’ont pas été respectés, car ils étaient secondaires par rapport à la décision de soigner, par rapport au serment d’Hippocrate –⁠ M. le ministre et M. le président de la commission savent bien de quoi je parle – qui a mené les soignants à faire preuve d’abnégation, de courage et d’un dévouement de tous les instants.
    Ce qu’il faut, c’est mieux former, former davantage et fidéliser les soignants. Posons-nous la question : pourquoi 30 ou 35 % d’infirmières décrochent-elles au bout de quelques années ? Pourquoi plus de 40 % d’entre elles ne vont-elles pas jusqu’à la fin de carrière ? C’est là qu’est le problème. Je ne voudrais pas que ce texte, si nous le votions, fasse figure d’un ballon d’oxygène temporaire qui aggrave la situation à long terme.
    En outre, cette mesure serait perçue comme une norme supplémentaire, dans un pays déjà envahi par les normes. Non, ce qu’il faut, c’est une réforme profonde et structurelle du système de santé, vous le savez bien. Cela passe par le décloisonnement entre le public et le privé et par la loi pluriannuelle que nous appelons de nos vœux. Je crains que votre texte ne crée davantage de problèmes dans les établissements qui en connaissent déjà le plus ; je pense que vous me comprenez, vous qui avez souvent, lors des questions au gouvernement, évoqué la situation de Laval.
    Votre proposition risque de se révéler contreproductive. C’est pourquoi, même s’ils laisseront sa chance au débat d’amendements, les députés du groupe Les Démocrates ne sont a priori pas favorables au texte. Soucieux de la qualité du travail des soignants, nous appelons à améliorer leur nombre, leur formation et leur rémunération pour rendre ces métiers plus attractifs.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean Moulliere.

    M. Jean Moulliere

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    Le groupe Horizons & indépendants reconnaît également l’intention louable qui a présidé à la rédaction de la proposition de loi.

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Ah !

    M. Jean Moulliere

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    Celle-ci vise à renforcer la qualité des soins et à garantir des conditions d’exercice adaptées dans les établissements hospitaliers. Malheureusement, on ne saurait atteindre cet objectif en imposant des quotas de soignants par patient hospitalisé. C’est une fausse bonne idée. Ses nombreuses limites techniques, opérationnelles et juridiques nous empêchent de soutenir le texte. Nous considérons que la méthode et les moyens envisagés ne correspondent pas aux réalités du terrain ni aux défis que rencontre notre système de santé. Si la définition de ratios peut paraître séduisante sur le papier, une telle réforme serait complexe à mettre en œuvre et risquerait de devenir contreproductive.
    Le problème fondamental auquel sont confrontés les hôpitaux est non l’absence de normes ou de ratios –⁠ si c’était le cas, ils auraient été instaurés depuis longtemps –, mais le manque de personnel disponible. Fixer des seuils minimaux ne résoudra jamais la pénurie de soignants, ni n’améliorera l’attractivité des métiers hospitaliers. Cette pénurie est avant tout liée à des difficultés structurelles de recrutement et de fidélisation.

    M. Damien Maudet

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    D’où l’importance d’agir sur les conditions de travail !

    M. Jean Moulliere

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    Imposer des seuils sans résoudre ces problèmes risque de créer des contraintes insoutenables pour les hôpitaux, voire de conduire à des fermetures de lits et de services, faute de personnel en nombre suffisant.

    M. Damien Maudet

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    Comment faire pour en recruter ?

    M. Jean Moulliere

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    Des exemples très concrets confirment mes propos. Ainsi, d’autres pays ont instauré la mesure qui nous est proposée, comme l’Allemagne en 2018. Or une étude menée par l’Association allemande des hôpitaux démontre que 62 % des hôpitaux consultés ont fermé des lits en raison de cette réglementation et que 80 % des soignants interrogés déclarent que la réglementation n’a pas réduit leur charge, bien au contraire. Vous voyez : c’est une fausse bonne idée.
    C’est par la formation, le recrutement et par une meilleure valorisation des carrières…

    Mme Marianne Maximi

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    Et des salaires !

    M. Jean Moulliere

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    …que nous pourrons répondre aux défis actuels. Le travail déjà engagé par le gouvernement dans ces domaines prioritaires a mené à des signes encourageants comme l’augmentation récente des recrutements.
    L’approche que vous proposez aboutirait à rigidifier la gestion des établissements, ce qui entre en contradiction avec la souplesse nécessaire pour s’adapter aux spécificités locales. Les risques d’effets pervers –⁠ contentieux massif, surcharge administrative pour la HAS et les agences régionales de santé (ARS) – n’ont pas été suffisamment anticipés. Ces lacunes soulèvent des interrogations quant à la viabilité et à l’efficacité du dispositif. Enfin, l’application exclusive de ces ratios aux établissements assurant des missions de service public hospitalier crée une disparité notable avec les autres acteurs de la santé. Pour toutes ces raisons, nous considérons que la proposition de loi ne répond pas aux besoins actuels.
    Mon groupe regrette l’adoption sans modification du texte en commission, alors même que sa forme actuelle présente selon nous des limites importantes. Le groupe Horizons & indépendants ne pourra donc le voter en l’état. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR. –⁠ Mme Pauline Levasseur applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Panifous.

    M. Laurent Panifous

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    Il est difficile de nier les problèmes rencontrés par l’hôpital public et la nécessité d’y apporter une réponse pratique. Les défis sont immenses. Cette proposition de loi qui pointe la désorganisation et la suradministration de l’hôpital tente d’y apporter une solution certes partielle, mais attendue par les personnels soignants et les patients.
    L’un des principaux facteurs nuisant à l’attractivité des métiers de l’hôpital réside dans les conditions de travail. Depuis plusieurs années – cela a commencé avant la crise sanitaire, mais celle-ci a décuplé les problèmes –, les soignants dénoncent un cercle vicieux : les nombreuses vacances de postes, l’épuisement des équipes et la dégradation des conditions d’exercice entraînent de nouveaux départs qui dégradent encore les conditions de travail. Briser ce cercle vicieux impose de proposer des rémunérations et des conditions de travail à même de garantir la sécurité et la qualité des soins. Les expériences étrangères ont démontré que l’existence de ratios d’encadrement permettait d’améliorer les conditions de soin et de stabiliser les effectifs. C’est pourquoi le groupe Libertés, indépendants, outre-mer et territoires soutiendra le texte, dont l’adoption permettrait d’envoyer un signal clair : le fonctionnement d’un service public hospitalier de qualité repose sur des personnels soignants en nombre suffisant.
    Bien entendu, l’adoption de cette proposition de loi n’améliorera pas automatiquement le taux d’encadrement à l’hôpital ; il ne faudrait pas nourrir de faux espoirs qui tourneraient à la déception. Néanmoins, la mesure doit être pensée comme un outil visant à restaurer l’attractivité des métiers hospitaliers par l’instauration de référentiels produits par la HAS.
    De tels outils doivent évidemment être adaptés aux besoins, donc aux spécificités des territoires, des établissements et des activités. C’est pourquoi il était important que le texte précise que les établissements et les soignants pourront s’approprier les ratios dans le cadre du schéma d’organisation des soins.
    Plusieurs écueils doivent toutefois être évités. D’abord, il convient de s’assurer que l’application de ratios ne se traduira pas par un recours supérieur aux heures supplémentaires ou par des fermetures de lit. L’objectif est bien d’améliorer le recrutement, pas de restreindre la prise en charge ou d’alourdir la charge de travail des soignants. En outre, il ne faudrait pas que le non-respect des ratios de qualité entraîne une diminution ou une suspension de l’activité, comme c’est le cas pour les ratios de sécurité requis pour le fonctionnement.
    Plus largement, nous pensons que cette question mériterait une loi de programmation. Le premier ministre a d’ailleurs pris position en ce sens lors de sa déclaration de politique générale, et nous serons attentifs à l’exécution de cet engagement. En attendant, il nous faut prouver aux soignants et aux patients que nous avons pris la mesure de la crise que traverse l’hôpital et que nous sommes capables de donner à celui-ci les moyens nécessaires à son bon fonctionnement dans la durée. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Karine Lebon.

    Mme Karine Lebon

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    Un hôpital en souffrance, ce sont des vies humaines sacrifiées. Nous alertons en vain depuis des années les gouvernements successifs sur l’état catastrophique de l’hôpital public, en première ligne pour soigner les Françaises et les Français. Nous le répétons : investissons massivement dans notre système de santé et donnons tous les moyens nécessaires à l’hôpital public pour réaliser ses missions d’intérêt général. Ne cédons pas à l’obsession austéritaire du président de la République et des gouvernements antisociaux qu’il ne cesse de nommer.

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Il ne faut quand même pas exagérer !

    Mme Karine Lebon

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    Nous voici une fois de plus à la veille d’un projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) qui ne fera qu’aggraver la situation déjà chaotique de notre système de soins. Mais au-delà des questions budgétaires, les questions d’organisation de l’hôpital public doivent être mises sur la table.
    L’état de crise de l’hôpital est principalement caractérisé par les difficultés liées au manque de personnel soignant. Près de 10 % des emplois d’infirmiers ne sont pas pourvus, ce qui entraîne de grandes difficultés dans le fonctionnement des services. La présence d’un nombre insuffisant de soignants auprès des patients se traduit par une hausse de la mortalité hospitalière et des risques physiques et psychiques pour les soignants, ce qui a nécessairement pour résultat une dégradation des conditions de travail et de la qualité des soins. La commission d’enquête conduite au Sénat en 2022 l’exposait parfaitement : l’hôpital doit sortir d’un pilotage erratique et d’un quotidien où soignants et dirigeants ne cessent de courir après le temps et les moyens, de gérer les urgences jusqu’à l’épuisement.
    Cette proposition de loi vise un objectif essentiel : l’amélioration des conditions de travail des soignants et de la prise en charge des patients, laquelle ne peut passer que par la détermination d’un nombre minimum de soignants par patient. Quand des standards capacitaires auront été définis au moyen d’outils de mesure objectifs de la charge en soins, un mécanisme d’alerte pourra être déclenché dès le dépassement d’un seuil critique. L’instauration de ratios de soignants par patient pour chaque spécialité et chaque activité de soins est très attendue par les professionnels de santé ainsi que par les associations de patients. Ces dernières, en nombre considérable, avaient d’ailleurs publié une tribune dans Le Monde en février 2023, pour appeler à l’adoption de la proposition de loi.

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Absolument !

    Mme Karine Lebon

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    L’une des causes majeures des difficultés de recrutement et de la fuite de personnel soignant, en particulier infirmier, tient, plus encore qu’au faible niveau des salaires, à l’augmentation de la charge de travail due au manque d’effectifs. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et LFI-NFP.)

    M. Damien Maudet

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    Elle a raison !

    Mme Karine Lebon

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    Fixer un nombre minimum, c’est reconnaître le travail des soignants, redonner du sens à leur métier et le rendre un peu plus attractif. Étant donné que le premier ministre lui-même disait qu’il voulait un pays de solidarité et non pas d’abandon, que vous-même, monsieur le ministre, vous êtes dit favorable à la proposition de loi, nous pensons qu’un large accord qui rassemble des députés siégeant sur tous les bancs de cet hémicycle est possible. C’est suffisamment rare pour être souligné.
    L’hôpital public n’est pas une dépense, mais un investissement, commandé par un devoir de solidarité impératif. Dominique Méda le rappelait : selon les ratios retenus, il pourrait être nécessaire de recruter jusqu’à 100 000 infirmiers pour un montant qui s’élèverait à 5 milliards d’euros. Les ressources existent ; c’est aux politiques, à nous, de prendre nos responsabilités.
    Nous remercions vivement le groupe Socialistes et apparentés d’avoir bien voulu mettre ce texte à l’ordre du jour de sa niche parlementaire. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SOC.) Merci également au rapporteur Guillaume Garot pour le travail qu’il a réalisé en concertation avec les équipes soignantes pour enfin apporter une solution à ce problème récurrent. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)
    Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine se doit toutefois de vous alerter sur un certain nombre de sujets. La détermination d’un nombre minimum de soignants par patient pourrait provoquer trois conséquences que nous devons éviter : la fermeture de lits ou une remise en cause de la durée de travail pour les personnels, souvent déjà sollicités au-delà de 35 heures, des déplacements d’effectifs d’un service à un autre pour respecter les ratios, et une possible concurrence entre les services pour obtenir des ratios plus importants. Il sera essentiel de déployer tous les efforts afin d’éviter ces risques pour notre système de soins. Les ratios doivent effectivement servir à rétablir les capacités de l’hôpital en faisant revenir les soignants, non à fermer des lits. Nous sommes conscients que l’objectif de ce texte est d’enclencher une dynamique en fixant des cibles à atteindre et que les résultats apparaîtront à long terme.
    Le nombre minimum qui sera imposé devra en réalité être optimal. Il devra permettre de faire face aux absences de personnel, de garantir à chacun le respect de ses droits au repos et à des congés, et de garantir l’accès à la formation pour toutes et tous. Il apportera enfin toute l’humanité que nous devons aux patients. Il faut que les personnes hospitalisées ne soient plus abandonnées à leur triste sort dans leur chambre pendant des heures entières en raison du manque de personnel et qu’on n’empêche plus les familles de rendre visite à leurs proches pour ne pas déstabiliser le fonctionnement des services.
    Les députés du groupe Gauche démocrate et républicaine voteront donc pour ce texte.
    Enfin, pour améliorer durablement les conditions de travail des soignants et la prise en charge des patients, ces ratios doivent trouver une traduction concrète dans une grande loi de santé publique, reposant sur une programmation des besoins de formation et de recrutement, et prévoyant des moyens correspondants. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR ainsi que sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Serge Muller.

    M. Serge Muller

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    Ce texte aborde une question essentielle, celle de la qualité des soins et les conditions de travail des soignants. Je connais bien ces enjeux car j’ai été aide-soignant durant vingt-deux années de ma vie. Je sais à quel point les équipes médicales sont les piliers de notre système de santé et je mesure chaque jour l’impact des décisions que nous prenons ici sur leur expérience quotidienne.
    Depuis des années, les soignants subissent une pression insoutenable, conséquence directe des politiques de rationalisation budgétaire. Ces politiques, guidées par une logique comptable indigne de notre nation, se sont traduites par des fermetures massives de lits et de services, affaiblissant ainsi notre capacité de prise en soin. Elles ont aussi dégradé les conditions de travail de ceux qui restent, au point de les pousser parfois jusqu’à l’épuisement ou de les amener à quitter leur métier. Il est en effet inadmissible que le métier d’infirmier, véritable vocation au service des autres, voie 30 % de ceux qui l’exercent le quitter dans les cinq premières années qui suivent le diplôme. Cette situation est la preuve criante que le système ne fonctionne plus, car nous avons trop longtemps ignoré les besoins réels des soignants et de nos concitoyens.
    Les ratios minimaux qui existent actuellement ne visent pas à améliorer la qualité des soins. Ils ne servent qu’à justifier des économies budgétaires, sans jamais prendre en compte les besoins réels des patients ni la complexité croissante des soins. C’est bien là que réside le problème. Lorsqu’on réduit des moyens en se basant uniquement sur des chiffres, on détruit progressivement l’hôpital public. Ce qui devrait être une institution forte et protectrice est devenu un système en souffrance, dans lequel la confiance de nos citoyens diminue. Bien que cette confiance reste élevée, elle ne cesse de s’éroder ; cela ne peut plus durer.
    Par ailleurs, nous savons que le manque de personnel soignant a des conséquences directes et graves, comme le montre l’ensemble des études. Lorsqu’un soignant doit s’occuper de trop de patients, les risques de complications augmentent : escarres, chutes, thromboses, infections nosocomiales ou encore erreurs médicamenteuses. Ce sont des vies qui sont en jeu.
    Les infirmiers et aides-soignants, débordés par l’urgence permanente, sont obligés de prendre des initiatives rapides –⁠ en fait des glissements de tâches – pour pallier des situations critiques. Tout doit se faire rapidement, dans l’urgence, et cette accélération perpétuelle dénature leur mission. Un bon soin nécessite en effet de la minutie, de l’attention et du temps. Cette surcharge de travail, ces responsabilités déplacées, sont non seulement injustes, mais aussi dangereuses, à la fois pour les soignants et pour les patients.
    Cette proposition de loi, qui pose la question des ratios minimaux, va donc dans le bon sens. Mais elle est loin d’être suffisante. Pour relever véritablement notre système de santé, il est impératif de revaloriser massivement les métiers de la santé. Cela passe par une augmentation significative des rémunérations et par un effort ambitieux de recrutement et de formation. Ce n’est qu’en redonnant aux soignants des conditions de travail dignes que nous pourrons redonner du sens à leur métier et garantir la sécurité des patients.
    Ces ratios doivent également être déterminés sur des bases scientifiques solides, validées par des experts, et surtout élaborées en concertation avec les professionnels de santé de terrain. Ce sont eux qui connaissent les spécificités de chaque service et de chaque territoire. Nous devons aussi tenir compte des réalités spécifiques des territoires ruraux ou insulaires, souvent oubliés dans les politiques nationales. La santé n’est pas uniforme. Elle exige des réponses adaptées et flexibles. Enfin, ces ratios ne doivent pas devenir un fardeau supplémentaire pour des établissements déjà en tension. L’État doit impérativement accompagner leur déploiement par des moyens financiers conséquents. La santé publique doit redevenir une priorité nationale, car elle est la clé d’une société forte et solidaire.
    Mesdames et messieurs les députés, il nous faut marquer une rupture avec les politiques de gestion aveugle. Nous devons impérativement repenser notre système de santé, non comme une dépense, mais comme un investissement essentiel pour l’avenir de notre pays. En redonnant aux soignants la reconnaissance et les moyens qu’ils méritent, nous pouvons leur permettre de retrouver le sens profond de leur mission et de servir à nouveau dans des conditions dignes. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal.

    Mme Annie Vidal

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    Nous avons toutes et tous, sur ces bancs, la volonté de favoriser la qualité et la sécurité des soins et celle d’améliorer les conditions de travail des soignants qui s’engagent au quotidien dans les établissements de santé. Je veux ici les en remercier, leur dire notre reconnaissance et la conscience que nous avons de la difficulté de leur métier.
    Votre proposition de loi, cher collègue, vise à répondre à ces enjeux à travers la fixation de ratios de soignants par patient minimaux. Toutefois, tel qu’il est rédigé, son article unique ouvre un champ très large qui concerne toutes les spécialités, tous les soignants, toutes les activités, qui s’appuie sur le nombre de lits ouverts et sur le nombre de passages pour les activités ambulatoires. Nous souhaitons avant tout nous assurer que les solutions proposées seront réalistes, applicables et efficaces.
    En l’état, cette proposition de loi, bien qu’animée par une volonté louable que nous partageons, me semble poser plusieurs difficultés. En premier lieu –⁠ et c’est à mon sens un des points les plus importants –, elle se heurte à la pénurie marquée des professionnels du secteur, ce qui limite considérablement la possibilité de l’appliquer de manière à atteindre les objectifs qui auront été déterminés.
    Si fixer des ratios peut être un facteur d’attractivité, dont nous avons besoin pour pourvoir les nombreux postes vacants de soignants, l’opposabilité de ces ratios crée un risque non négligeable de produire l’effet inverse à celui recherché : l’adaptation du nombre de lits au personnel disponible, qui imposerait de fermer des lits.

    M. Jean-François Rousset

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    Et voilà !

    Mme Annie Vidal

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    Ensuite, confier la responsabilité de déterminer ces ratios à la Haute Autorité de santé est selon moi une approche trop centralisée et uniforme, éloignée des services de soins. Elle entraînerait une rigidité et une complexité qui contreviendraient à notre volonté de permettre aux établissements une certaine souplesse, qu’ils attendent. Il convient donc, à mon sens, de donner aux établissements la responsabilité de fixer eux-mêmes ces ratios.
    Il me semble aussi nécessaire, dans une première phase en tout cas, de limiter le périmètre aux unités de médecine, chirurgie et obstétrique, pour une application ciblée plus efficace, qui pourrait servir d’expérimentation, et de préciser que les seuls soignants concernés sont les infirmières diplômées d’État et les aides-soignants, qui constituent avec les médecins le socle de base du service au chevet du patient. Cela permettrait de répondre à la demande de ratio minimal sans créer une rigidité excessive dans l’organisation des établissements. Je n’oublie pas qu’au moment de la crise sanitaire, les soignants ont exprimé très clairement leur souhait d’être davantage impliqués dans les décisions qui concernent leur quotidien ; c’est aussi un gage de sécurité, nous l’avons vu.
    Je voudrais également citer l’exemple allemand : la fixation de ratios en 2018 a eu pour conséquence la fermeture de lits,…

    M. Damien Maudet

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    Ils en avaient plus que nous pendant la crise du covid !

    Mme Annie Vidal

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    …le report de rendez-vous, l’allongement des listes d’attente et des coûts de personnels supplémentaires au titre de la documentation et du contrôle. L’évaluation du dispositif en 2024 atteste que le non-respect des ratios est principalement dû à la pénurie de professionnels, que nous connaissons également. Dans 67 % des hôpitaux évalués, le manque de souplesse empêche un bon fonctionnement et, dans 62 % des hôpitaux, il a fallu fermer des lits. Enfin, 80 % des soignants soulignent que leur charge de travail n’a pas été réduite et que les conditions de travail n’ont pas été améliorées.
    Le groupe Ensemble pour la République présentera donc des amendements qui visent à rendre la proposition de loi plus opérante. Il faudra ajouter au dispositif que nous élaborerons une impulsion forte, monsieur le ministre, pour créer une dynamique de formation et d’attractivité des métiers –⁠ celle-ci est indispensable.
    J’appelle donc tous mes collègues à privilégier une approche pragmatique et à voter ces amendements. L’adoption d’un texte inopérant sera source de déception, car elle desservira les patients, les soignants et nos établissements de santé. L’enfer est pavé de bonnes intentions. Si nous sommes tous favorables à une augmentation du nombre de soignants, nous souhaitons aussi être prudents : évitons d’aggraver, par une bonne intention dépourvue d’étude d’impact et d’expérimentation préalable, une situation déjà complexe. Si les amendements sont adoptés, nous pourrons voter le texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. –⁠ M. Philippe Vigier applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Damien Maudet.

    M. Damien Maudet

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    Il y a cinq jours, à Limoges, un infirmier m’a expliqué ceci : « Tout à l’heure, aux urgences, j’avais un patient de 63 ans qui était là depuis trois jours, treize heures et quarante-cinq minutes. Quand on arrive à sept heures trente, les couloirs sont pleins. On accueille parfois jusqu’à quatre-vingts personnes, soit vingt patients par infirmière, et on stocke les gens à l’entrée dans la zone d’accueil. »
    Nos hôpitaux et leurs services d’urgences, déjà asphyxiés, doivent en plus faire face à l’épidémie de grippe. Parfois, les soignants des urgences ont la charge de vingt patients, parce qu’il n’y a plus de place dans les services pour les hospitaliser et parce que, depuis trente ans, vous supprimez des lits –⁠ 34 000 lits depuis qu’Emmanuel Macron est président de la République. L’hôpital est toujours plus malade, mais vous prescrivez invariablement le même traitement : des économies, qui surchargent les soignants. Ces derniers ne s’y retrouvent plus, alors ils partent, comme en témoigne Christelle, infirmière : « Depuis le Covid, j’ai toujours eu l’espoir que ça change, mais je vois qu’il n’y a pas de changement, donc je m’en vais. »
    Entre 2020 et 2022, nous sommes passés de 7 500 à 60 000 postes d’infirmière vacants. Il n’y a plus personne pour gérer les lits, donc ces derniers ferment. Les conséquences sont nombreuses. Premièrement, selon Anthony, infirmier dans l’Est : « On hospitalise mes patients dans les couloirs, à touche-touche avec d’autres brancards. Résultat : au bout de trois jours, ils attrapent la grippe. » Des gens tombent donc malades aux urgences.
    Deuxièmement, les patients sont maltraités, selon Tristan, qui travaille dans mon coin : « Avec autant de patients, vous ne pouvez pas bien traiter les gens. L’autre jour, un patient m’a demandé de l’accompagner aux toilettes. Je lui ai dit que je revenais dans cinq minutes. Or avec la charge de dix-neuf autres patients, les cinq minutes se transforment en trois heures ; quand vous repassez, le patient s’est fait dessus. » (Exclamations sur les bancs du groupe EPR.)

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    C’est la réalité !

    M. Damien Maudet

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    Troisièmement, les patients sont mis en danger. D’après l’enquête flash de Samu-Urgences de France menée ce mois-ci, un établissement sur trois a déclaré des incidents graves en raison de cette surcharge de travail. Précisons la définition des incidents graves : dans un hôpital sur trois, des patients finissent handicapés à vie, frôlent la mort ou décèdent. Comme l’explique la Haute Autorité de santé elle-même, ces incidents sont liés à la surcharge de travail, à la fatigue des professionnels et au manque de lits. Enfin, du fait de cette surcharge de travail, des gens meurent aux urgences. Ce sont des fils, des sœurs, des maris –⁠ Lucas, 25 ans, à Hyères ; Sélim, à Toulouse ; Frances, à Grasse.
    Il est donc urgent de changer de cap. D’abord, regardons la réalité en face : il est insupportable d’entendre les ministres attribuer le problème aux Français qui viennent aux urgences pour rien, alors que ces mêmes ministres ne font rien pour l’hôpital.
    Ensuite, arrêtons les économies. Dans le dernier budget, heureusement censuré, vous proposiez près de 5 milliards de coupes sur la santé.
    Enfin, et surtout, il faut faire revenir les soignants. Comment faire ? Dans toutes les enquêtes, les infirmières demandent de meilleurs salaires, davantage de collègues et de meilleures conditions de travail. Il suffisait de leur poser la question. (Mme Marianne Maximi et M. Maxime Laisney applaudissent.)

    M. François Cormier-Bouligeon

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    On les a augmentées avec le Ségur !

    M. Sébastien Peytavie

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    Le Ségur n’est pas financé !

    M. Damien Maudet

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    Nous avons l’opportunité de redonner des perspectives aux soignants. Si nous y mettons les moyens nécessaires, la fixation d’un nombre maximum de patients par soignants peut améliorer drastiquement les conditions de travail. Les organisations sont nombreuses à nous le demander–⁠ je pense au comité interministériel du handicap (CIH), au syndicat national des professionnels infirmiers (SNPI), au collectif Inter-Urgences (CIU) et au Samu-Urgences de France, dont je salue la présence en tribune. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et GDR.)
    Dans la tribune que nous avons cosignée, monsieur le ministre, nous expliquons qu’un tel texte améliorerait la qualité des soins. J’espère que vous y resterez fidèle. Les pays qui ont appliqué ces ratios en sont satisfaits. De plus, les expériences menées à l’étranger montrent que cette politique permet de recruter. Au reste, savez-vous que ces ratios existent même en France ? Certes, pas à Limoges, à Saint-Julien ou dans les hôpitaux de Seine-Saint-Denis, mais à l’hôpital américain de Neuilly, où se font soigner Bernard Arnault, Vincent Bolloré et Brigitte Macron. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EPR.)

    M. François Cormier-Bouligeon

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    Et Mélenchon aussi ?

    M. Damien Maudet

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    Un responsable de l’hôpital a expliqué avoir réussi à attirer des soignants en appliquant des ratios : l’hôpital emploie une infirmière pour sept patients, contre une infirmière pour quinze patients dans les autres hôpitaux. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP, dont plusieurs députés se lèvent, et sur quelques bancs des groupes EcoS et GDR.)

    Mme Sophie Taillé-Polian

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    Tout se passe bien à Neuilly, nous voilà rassurés !

    M. Sylvain Berrios

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    Ils connaissent bien l’hôpital de Neuilly, parce qu’ils le fréquentent !

    M. Damien Maudet

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    La proposition de loi est simple : nous voulons que tous les Français puissent être soignés dans les mêmes conditions que Bernard Arnault, Vincent Bolloré ou Brigitte Macron. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Bien sûr, ce texte n’est pas parfait, mais il envoie un signal aux patients –⁠ vous serez bien pris en charge à l’hôpital – et aux soignants –⁠ vous aurez de meilleures conditions de travail. Je veux croire que nous posons la première pierre pour reconstruire notre système hospitalier, à condition que le gouvernement arrête d’économiser sur la santé. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP, dont plusieurs députés se lèvent.)

    M. Philippe Vigier

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    La nouvelle référence de LFI, c’est l’hôpital américain de Neuilly !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Gérault Verny.

    M. Gérault Verny

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    Depuis le début de cette nouvelle année, notre pays a contracté environ 4,5 milliards d’euros de dette. Pendant les cinq minutes de mon intervention, 9 millions d’euros s’additionneront aux 3 400 milliards de dette déjà accumulés. Ce montant que nous n’avons pas, nos enfants devront le payer.

    M. Sébastien Peytavie

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    Il faut prendre l’argent là où il est ! Taxons les riches !

    M. Gérault Verny

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    Pourtant, cet argent continue d’être dilapidé dans des circuits administratifs inefficaces, au lieu d’être consacré à ce qui compte vraiment : les soignants, les patients et la santé de nos concitoyens. Le problème de notre hôpital est qu’il manque non de moyens, mais de bon sens. Ainsi, 35 % –⁠ un tiers – du personnel de la fonction publique hospitalière est affecté à des fonctions de support administratif. Pendant ce temps, nos infirmières s’épuisent, nos aides-soignants sont à bout de souffle et nos médecins accumulent 70 heures de travail par semaine, par conscience professionnelle. Cette suradministration étouffe notre système. Il est donc temps d’agir selon la règle suivante : moins d’administratifs, plus de soignants. Avec la technologie dont nous disposons, l’automatisation et la numérisation des tâches administratives ne sont pas une option ; c’est une nécessité. Nous pouvons y arriver.
    Le numerus clausus est l’absurdité érigée en système. Pendant des décennies, nous avons volontairement fermé la porte des études de médecine, tout en regardant se vider les rangs de nos soignants. C’était une folie pure ; aujourd’hui, notre pays croule sous le manque de personnel médical. À titre de comparaison, la Suisse, qui n’atteint que 38 % de dépenses publiques, soit 20 % de moins que nous, compte 30 % de médecins par habitant de plus que nous. Au même moment, nos universités forment à la chaîne des étudiants dans des disciplines sans débouchés réels. En sociologie, par exemple, il n’y a que deux débouchés : devenir professeur de sociologie ou se réorienter.

    Mme Marianne Maximi

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    Oh là là ! N’importe quoi !

    M. Hadrien Clouet

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    Il est marrant !

    M. Gérault Verny

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    Il faut ajuster nos priorités et ouvrir des places là où elles sont vitales : en médecine. La situation est d’autant plus absurde que nous disposons de personnels très qualifiés, notamment d’infirmières hautement diplômées et compétentes, mais dont le potentiel est sous-utilisé. C’est du gâchis pur et simple. Pendant que nous gaspillons ainsi les talents de nos soignants, des patients attendent des mois pour obtenir une consultation dans certaines spécialités. Certains renoncent même à se soigner, faute de rendez-vous disponibles, ce qui aggrave des pathologies qui auraient pu être prises en charge à temps.
    De plus, nous chassons nos propres médecins. Leur pouvoir d’achat s’effondre, étouffé par une fiscalité écrasante, des charges démesurées et des contraintes administratives incessantes –⁠ comme pour toutes les professions libérales, d’ailleurs. Résultat : les médecins désertent la France pour aller exercer ailleurs, là où on les respecte. La paupérisation de ceux qui sauvent des vies est un scandale. Il faut inverser la tendance, leur redonner l’envie et surtout les moyens d’exercer leur métier avec dignité, en abaissant massivement les charges qui pèsent sur les professions libérales.
    Il est temps d’en finir avec les demi-mesures. Plafonnons les fonctions administratives à 20 % des effectifs, comme l’a proposé le groupe UDR, et allouons nos ressources aux soins plutôt qu’à la bureaucratie. Simplifions les processus, numérisons ce qui peut l’être et ouvrons davantage de places en médecine pour former les soignants dont nous avons besoin. Enfin, valorisons ces professionnels essentiels et redonnons-leur les moyens d’exercer dignement leur métier.
    Chaque euro dépensé est l’argent des Français ; chaque centime doit être investi avec responsabilité. Dans un système à bout de souffle, chaque ressource mal utilisée est une trahison envers ceux qui financent notre système de santé et ceux qui en dépendent. La suppression des postes de fonctionnement administratif des ARS apportera près de 1 milliard d’économies, soit 20 000 postes de soignants. Ainsi, chaque minute gaspillée dans d’inutiles méandres administratifs est une minute de soin volée à des patients qui attendent, à des vies que l’on pourrait sauver ou à des douleurs que l’on pourrait soulager. Ces gaspillages ne sont pas abstraits ; ils doivent cesser, parce qu’ils ont des conséquences bien réelles et humaines. Nous voterons donc pour ce texte.

    Mme la présidente

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    La discussion générale est close.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Guillaume Garot, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour apporter des éléments de réponse.

    M. Guillaume Garot, rapporteur de la commission des affaires sociales

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    Permettez-moi de remercier les intervenants pour la qualité de nos échanges et des arguments avancés. Je souhaite retrouver ici l’esprit de consensus que nous avons su trouver et cultiver en commission.

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    J’ai repéré des points de convergence clairs entre nous : il faut agir sur la rémunération et la formation des soignants pour redonner de l’attractivité aux métiers du soin, en particulier à l’hôpital. Je souhaite voir la traduction réelle, concrète et tangible de ces propositions dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS).

    M. Sébastien Peytavie

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    Tout à fait !

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Chiche ! Intégrons au PLFSS les crédits qui permettront de mieux rémunérer les soignants et d’embaucher davantage de personnels mieux formés. Ne nous contentons pas de discours tenus à la tribune en janvier et vite oubliés en février. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme Karine Lebon applaudit également.)
    J’ai aussi entendu des points de divergence. Au sein du socle commun, deux familles d’arguments se contredisent : certains, comme Philippe Vigier, nous alertent sur l’ajout excessif de normes, au motif que celles-ci seraient écrasantes, en particulier pour le secteur public ; d’autres, comme Mme Corneloup, pensent que la norme valorise trop le secteur public et que le secteur privé devrait y être associé. Mettons-nous d’accord : la norme est-elle écrasante ou valorisante ? En tout cas, elle protège les soignants comme les patients, en leur garantissant que le soin sera de meilleure qualité. C’est cela que nous devons tous rechercher.
    Il reviendra au ministre d’appliquer ce que nous aurons collectivement décidé. Comme je l’ai dit ce matin, j’ai confiance en Yannick Neuder, non seulement parce qu’il a signé une tribune, mais aussi parce qu’il s’est prononcé en faveur de ce texte lors des débats en commission.
    J’aimerais conclure en abordant l’opposabilité de la proposition de loi. Non, en cas d’adoption, nous ne serons pas amenés à fermer des lits et des services si le quota de soignants n’est pas atteint.
    Je le répète pour la énième fois : ce sont des ratios relatifs à la qualité, et non à la sécurité des soins, qu’il s’agit d’introduire. Nous devons tous viser cette qualité, car c’est ce qui nous fera progresser, mais cela suppose que nous nous en donnions les moyens, Ondam (objectif national de dépenses d’assurance maladie) après Ondam, année après année, budget après budget. Il faut nous en donner les moyens en termes de formation : c’est le travail qu’il nous faudra mener avec les régions. Il faudra sans doute aussi nous en donner les moyens en termes de rémunération : c’est le travail que nous aurons à faire dans le PLFSS.
    Je veux redire publiquement, comme je l’avais déjà fait en commission : le Ségur a été un sacré pas un avant.

    M. Philippe Vigier

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    Ah, quand même !

    Mme Prisca Thevenot

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    Merci !

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Je pense que nous avons les moyens de faire du bon travail aujourd’hui. Je souhaite qu’aucun amendement ne soit adopté, car cela ralentirait le processus d’adoption de la proposition de loi, qui a trouvé un équilibre au Sénat. Ce texte est non un point d’arrivée, mais le point de départ d’un chemin sur lequel nous allons nous engager pour quatre, cinq, six, peut-être sept ans. Ce à quoi nous devons veiller, en tant que législateur, c’est que le jour où il s’appliquera dans les hôpitaux, il soit adapté aux réalités locales et qu’il garantisse la qualité des soins à tous les Français. Nous allons à présent examiner les amendements déposés sur ce texte, mais je répète que je souhaite une adoption conforme. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, EcoS et GDR.)

    M. Sébastien Peytavie

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    Nous aussi !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins.

    M. Yannick Neuder, ministre chargé de la santé et de l’accès aux soins

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    Je serai bref, car je sais que le temps est compté les jours de niche parlementaire.
    Monsieur Maudet, je vous confirme que je n’ai pas changé de position. Je n’ai pas pour habitude d’abandonner une idée lorsqu’elle me semble aller dans le bon sens, et c’est le cas de ce texte, qui doit améliorer à la fois la sécurité des patients et l’attractivité du métier de soignant à l’hôpital.
    En dix ans, 20 % de nos effectifs soignants ont quitté nos établissements de santé. Cette situation, je l’ai vécue en tant que médecin hospitalier pendant vingt-cinq ans et j’y ai réfléchi en tant que député : les idées que je me suis forgées alors, je ne vais pas en changer maintenant que je suis ministre. Je confirme que je suis favorable à l’introduction de ces quotas, mais dans de bonnes conditions. Il faut éviter de faire peser sur les directeurs d’établissement une responsabilité insupportable : cela pourrait avoir des effets délétères que Mme Lebon a très bien exposés. Il ne faudrait pas qu’un directeur décide de fermer des lits, simplement pour ne pas s’exposer. C’est exactement ce qu’il ne faut pas faire.
     
    Je fais confiance à cet hémicycle pour améliorer les choses, en mettant notamment l’accent sur la formation. Je l’ai dit, il faut former 60 000 nouveaux infirmiers, ce qui nécessitera plusieurs promotions : sachant que l’on forme quelque 24 000 diplômés chaque année en France, je vous laisse faire le calcul. Cet effort de formation est la condition de la réforme structurelle dont l’hôpital a besoin. C’est ainsi que nous pourrons soigner plus et mieux, dans de bonnes conditions. Nos soignants auront le sourire, car ils seront heureux au travail, et lorsqu’on soigne en étant heureux, on a des patients heureux.
    Tout cela ne va pas se faire en un claquement de doigts, et si vous attendez des changements dans trois mois, mieux vaut changer de ministre, car ce ne sera pas le cas. Mais si nous nous faisons confiance et si nous nous inscrivons dans la durée, nous pourrons, d’ici à 2027, augmenter chaque année le nombre d’infirmiers formés. Comme plusieurs d’entre vous l’ont dit, il nous faudra définir une cible et procéder à une évaluation financière.
    J’entends, madame Vidal, vos réserves concernant la HAS, que vous trouvez trop éloignée du terrain et je suis favorable à ce que l’on introduise un peu de flexibilité au niveau des établissements.
    Monsieur Panifous, vous êtes le seul à avoir évoqué la question des heures supplémentaires : il faudra effectivement veiller à ce que l’application de ratios ne se traduise pas par un accroissement intenable du nombre d’heures supplémentaires. On sait que nombre de soignants en font déjà énormément et ne profitent pas de leur compte épargne-temps (CET).
    Mme Lebon a également évoqué le risque d’une concurrence entre les services. C’est un phénomène que j’ai constaté jusqu’en décembre, y compris, comme chef de pôle, au sein même des pôles hospitaliers. Dans mes secteurs de soins intensifs et de soins continus, je n’avais pas de mal à recruter, mais dans les unités traditionnelles, où la charge de travail était peut-être plus lourde, on pouvait manquer de soignants.
    L’introduction de quotas pourrait réduire les risques d’infections nosocomiales, alléger la charge des soignants, réduire la durée moyenne de séjour à l’hôpital et, surtout, les risques de réhospitalisation. Cela fait partie des réformes structurelles que l’hôpital et ses soignants attendent et je remercie le sénateur Bernard Jomier d’avoir su convaincre le Sénat.

    Discussion des articles

    Mme la présidente

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    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, l’article unique de la proposition de loi.

    Article unique

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marietta Karamanli.

    Mme Marietta Karamanli

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    J’aimerais apporter quelques précisions. D’abord, l’indicateur qu’il s’agit d’introduire a pour fonction d’alerter lorsqu’il y a un risque pour la sécurité : je pense que nous pouvons tous nous mettre d’accord là-dessus. C’est un instrument de politique publique, dont les bienfaits ont été rappelés à la tribune.
    Je voulais également rappeler que la qualité des soins dépend de l’organisation des services et de l’environnement dans lequel ils sont dispensés. C’est pourquoi, monsieur le ministre, il est essentiel de mettre fortement l’accent sur la formation professionnelle et continue dans les établissements. Il faut permettre aux personnels soignants de valoriser leurs compétences et leurs connaissances, et leur offrir des perspectives de carrière, qui sont facteurs de reconnaissance et d’attractivité des carrières hospitalières, comme le rapporteur l’a rappelé.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le président de la commission des affaires sociales.

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    Nous ne pouvons que partager tous l’objectif de la proposition de loi, qui entend à la fois améliorer la qualité des soins et le travail au quotidien des soignants, notamment à l’hôpital. Mais, telle qu’elle est rédigée, elle apporte de mauvaises solutions à un vrai problème.
    La question du ratio est intéressante et mérite d’être posée, mais l’approche très bureaucratique et centralisée qui a été adoptée risque selon moi d’accroître le poids et les contraintes qui pèsent sur l’hôpital. Or ce que nous cherchons tous –⁠ et c’était l’esprit de certaines propositions qui ont aussi été défendues par la gauche –, c’est d’alléger les contraintes qui pèsent sur l’hôpital, ce qui suppose de faire confiance aux acteurs de terrain. C’est, du reste, un des grands enseignements de l’épidémie de covid : les hospitaliers, lorsqu’on leur a un peu lâché la bride, ont su, avec le monde libéral et les élus locaux, bâtir sur le terrain des réponses adaptées.
    Vous voulez définir des ratios à Paris, dans les bureaux de la rue de Ségur, et les imposer aux quatre coins du territoire, alors que la situation est très différente d’un hôpital à l’autre, en fonction de leur organisation, mais aussi de leur histoire. Je serais assez favorable à ce que l’on fasse évoluer le texte dans un sens plus pragmatique, au plus près du terrain.
    Par ailleurs, je ne comprends pas cette approche partielle. Pourquoi exonérer le privé et le privé non lucratif des pesanteurs que l’on va imposer à l’hôpital ? On charge toujours plus la barque de l’hôpital, et après, on se plaint qu’il a trop de contraintes. Je veux bien que l’on introduise des ratios, mais alors faisons-le pour tout le monde !

    M. Philippe Vigier

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    Eh oui !

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    C’est le directeur de l’hôpital américain qui définit ses propres ratios : le fait-il en fonction des besoins de la population ou selon des critères de rentabilité ? Je n’en sais rien, mais il me semble qu’une telle disposition devrait embarquer tout le monde soignant…

    Mme la présidente

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    Merci de conclure.

    M. Frédéric Valletoux, président de la commission des affaires sociales

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    Faisons évoluer le texte : il est perfectible.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Vigier.

    M. Philippe Vigier

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    Monsieur le rapporteur, vous avez reconnu tout à l’heure que le Ségur avait constitué une avancée et nous sommes d’accord au sujet de la formation et de l’attractivité du métier. Mais, comme l’a bien dit Frédéric Valletoux, on ne peut pas exclure le privé : la santé, c’est le public et le privé.
    Quand serons-nous capables de proposer une refonte complète du système de santé ? Si vous voulez que les soignants retrouvent le sourire, il faudrait d’abord en finir avec la suradministration, qui s’incruste chaque jour dans leur vie quotidienne. Il faudrait qu’on cesse de leur donner des ordres et des contre-ordres ou de leur demander des comptes rendus en permanence.
    La vérité, c’est que des médecins et des infirmières perdent 20 à 30 % de leur temps à faire des tâches administratives, au lieu d’être auprès des patients. C’est ce verrou qu’il faut faire sauter. Nous avons le même objectif, mais vous me faites peur quand vous parlez d’établir des ratios en fonction de la qualité. Comment allez-vous faire pour établir de tels ratios, service par service ? Quelle complexité ! Et si le ratio n’est pas bon, on fermera le service ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Mais non…

    M. Philippe Vigier

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    Cela va favoriser l’intérim et les heures supplémentaires, dont les hôpitaux souffrent déjà terriblement. Alors, mettons-nous autour d’une table pour imaginer une refonte totale du système en abordant tous les sujets : la formation, la rémunération et la qualité d’encadrement. Si vous ne redonnez pas la main aux soignants, le système continuera de dériver dans la main des administratifs, et ce n’est plus acceptable. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et Dem.)

    M. Sylvain Maillard

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Naïma Moutchou.

    Mme Naïma Moutchou

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    Je tiens à exprimer une position personnelle, qui diverge de celle de mes collègues. Je soutiendrai ce texte (Mme Karine Lebon et M. Sébastien Peytavie applaudissent, suivis par quelques députés du groupe SOC), même si je sais que ce n’est pas une baguette magique et qu’il nous faudra refondre en profondeur le système de soins. En attendant, il trace une voie et un cadre qui semblent intéressants et je crois qu’il faut essayer ce système de ratios.
    Quand il manque une infirmière dans un hôpital, dans un Ehpad ou dans un service d’urgence, ce sont des diagnostics qui sont retardés, des vies qui sont mises en danger et des équipes qui sont épuisées. Le ratio minimal, c’est le moyen de dire, à la fois aux soignants et aux patients, qu’ils ne sont pas seuls.

    M. Sébastien Peytavie

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    Tout à fait !

    Mme Naïma Moutchou

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    Cette disposition n’est pas une lubie technocratique, mais un impératif éthique pour essayer d’améliorer la prise en charge des patients et le quotidien des soignants. Elle a un coût, c’est vrai, mais quel est le coût de l’inaction ? Combien coûtent les difficultés actuelles ? Combien coûte l’épuisement des équipes et des soignants, qui abandonnent un métier dont on sait qu’ils sont amoureux mais qui, en retour, ne les aime plus ? (Mme Karine Lebon applaudit.) Derrière les ratios, il y a des vies et je considère que nous devons nous tenir aux côtés de ceux qui, tous les jours, malgré les doutes, malgré les obstacles, malgré les difficultés, continuent de soigner et de se tenir debout pour alléger le fardeau des autres. Cette proposition de loi n’est pas une réponse parfaite mais c’est un début de réponse : c’est pourquoi je soutiens cette initiative. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Mme Karine Lebon applaudit également.)

    M. Sébastien Peytavie

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement n° 5, je suis saisie par les groupes La France insoumise-Nouveau Front populaire et Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 5.

    Mme Annie Vidal

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    Nous proposons que les ratios de professionnels soient déterminés, non par la Haute Autorité de santé, mais par les pôles d’activités, car le dispositif prévu par la rédaction actuelle risque de s’emboliser. La HAS devra élaborer un référentiel d’une densité folle pour chaque service, chaque spécialité et chaque catégorie de soignants, ce qui est à peu près irréalisable.
    À l’inverse, et tout en conservant l’esprit du texte, on injecterait de la fluidité dans la proposition de loi en confiant aux pôles d’activités le soin de déterminer ces ratios. Ils sont mieux placés pour le faire, car plus près de la réalité du terrain. Une validation par les autorités de tutelle serait requise.
    Le caractère centralisé de l’organisation de l’hôpital est souvent synonyme de lourdeur administrative et il entraîne une déconnexion de la réalité de celles et ceux qui y travaillent.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Je vous remercie pour votre amendement, madame Vidal, mais j’émettrai, et c’est une position de principe, un avis défavorable sur tous les amendements, car je souhaite que ce texte soit voté conforme, dans la rédaction issue du Sénat, afin d’en hâter l’application, en lien avec la Haute autorité de santé et les services du ministère de la santé.
    Je ne dis pas que certains de ces amendements ne posent pas des questions intéressantes, lesquelles nourriront notre réflexion et celle du ministre de la santé, mais si nous voulons un texte conforme, je ne peux, encore une fois, en cohérence avec notre position en commission, que demander le retrait de chaque amendement ou, à défaut, émettre un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Nous avons déjà eu ce débat en commission. Je conçois que vous souhaitiez rapprocher du terrain la prise de décision, mais pour avoir dirigé jusqu’en décembre l’un de ces pôles d’activité que vous évoquez, je peux vous affirmer que d’un territoire à l’autre, d’un hôpital à l’autre, leur périmètre diffère beaucoup, ce qui rendrait problématique le fait de leur confier cette tâche. La loi dite HPST du 21 juillet 2009, qui a instauré ces pôles, prévoyait la signature d’un contrat de pôle par le chef de pôle et le directeur de l’établissement ; cette mesure tombe malheureusement en désuétude depuis quelques années. C’est pourquoi je préférerais –⁠ il en sera question tout à l’heure – un avis de la commission médicale d’établissement (CME), laquelle a une vision globale de l’organisation polaire de ces activités. Sur l’amendement, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 5.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        164
            Nombre de suffrages exprimés                164
            Majorité absolue                        83
                    Pour l’adoption                32
                    Contre                132

    (L’amendement no 5 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir les amendements nos 6, 8 et 21, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    Mme Annie Vidal

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    Cette discussion ressemble quelque peu à la parodie d’un débat parlementaire (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR) :…

    M. Pierre Cazeneuve

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    Elle a raison !

    Mme Annie Vidal

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    …le rapporteur voulant une adoption conforme, il est évident qu’il s’opposera à tous les amendements, alors même que nous n’avons pas d’autre objectif que de modifier le texte pour qu’il soit appliqué, dans une mesure raisonnable, aussi rapidement et efficacement que possible.

    Mme la présidente

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    Laissez parler Mme Vidal, chers collègues !

    Mme Annie Vidal

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    L’amendement no 6 vise ainsi à en restreindre la portée, dans un premier temps, à la médecine, la chirurgie et l’obstétrique, afin de tester le dispositif du ratio avant sa montée en charge au lieu d’y soumettre tous les services en même temps.
    Le no 8 vise à substituer aux mots « des soignants », à l’alinéa 5, la formule « pour chaque catégorie de professionnels composant l’équipe soignante ». Dans le même souci de pragmatisme et d’efficacité, le no 21 vise à préciser quels sont les soignants concernés : infirmiers diplômés d’État et aides-soignants. Le terme de soignants étant relativement vague, son emploi nuit à l’intelligibilité du texte, donc à sa mise à exécution. Si l’on applique ces ratios à tous les professionnels susceptibles d’être ainsi désignés, je ne sais pas comment la HAS parviendra à rédiger son référentiel ! (Mme Joséphine Missoffe applaudit.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces amendements en présentation groupée ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Demande de retrait, à défaut avis défavorable, afin que nous puissions avancer.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Madame Vidal, je vous remercie de votre courage et de votre volonté de faire progresser le texte. (Murmures sur quelques bancs du groupe SOC.) Nous devons pouvoir en discuter : on ne peut à la fois réclamer que le Parlement prenne toute sa place et refuser le débat ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et HOR.)
    Au sujet de l’amendement no 6, je m’en remettrai à la sagesse de l’Assemblée. En tant que ministre de la santé, il me serait difficile d’accepter qu’on établisse une différence entre les soins et de renoncer aux quotas, garants de leur qualité, dans les secteurs de la réadaptation, de la rééducation, de la psychiatrie ; pour autant, comme vous l’avez dit, la proposition présente l’intérêt de constituer une forme d’expérimentation.
    Pour l’amendement no 8, je préconise un retrait au bénéfice du no 21, sur lequel j’émets un avis favorable, puisqu’on ne pourra pas tout faire en même temps. La logique de la proposition de loi est tout de même d’améliorer le binôme des soignants qui sont au plus près du lit du malade, à savoir l’infirmier et l’aide-soignant. Mieux vaut circonscrire le texte à ces catégories, puisqu’on entreprend une réforme structurelle afin d’améliorer la qualité des soins et l’attractivité des formations et des filières. Je rappelle que 20 % des infirmiers quittent nos hôpitaux au bout de dix ans.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Gabrielle Cathala.

    Mme Gabrielle Cathala

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    Il est savoureux d’entendre Mme Vidal nous accuser de tenir un simulacre de débat, alors qu’elle a soutenu tous les 49.3 portant sur des projets de loi de financement de la sécurité sociale (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC), l’obstruction lors des tentatives d’abrogation de la réforme des retraites, et qu’elle vient de soutenir trois amendements. Il y en a eu dix-sept retenus pour l’examen en séance de cette proposition de loi : dix provenant du groupe EPR, trois de la Droite républicaine, quatre du Rassemblement national –⁠ tous reprenant des propositions déjà étudiées en commission et ne visant qu’à empêcher l’adoption conforme du texte.
    Rappelons que celui-ci, relativement consensuel –⁠ le Sénat l’a adopté à une large majorité –, est soutenu par Action praticiens hôpital, le Samu-Urgences de France (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et EcoS. –⁠ M. Marcellin Nadeau applaudit également), le Syndicat national des praticiens hospitaliers anesthésistes-réanimateurs élargi, le Syndicat national des professionnels infirmiers, le Collectif inter-hôpitaux, le Collectif inter-urgences. Compte tenu du régime d’austérité que vous imposez à l’hôpital depuis sept ans, peut-être pensez-vous que les soignants ne pourront pas vous détester davantage ; ce n’est pas une raison pour en rajouter par une manœuvre grossière. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC et GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal.

    Mme Annie Vidal

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    Sans répondre à ce procès d’intention, je vais, dans un esprit constructif, retirer mon amendement de repli no 8 au profit du no 21, afin, je le répète, d’obtenir un texte plus opérant, efficace et adaptable.

    (L’amendement no 8 est retiré.)

    (Les amendements nos 6 et 21, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Serge Muller, pour soutenir l’amendement no 1.

    M. Serge Muller

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    Il vise à garantir que les ratios de personnels soignants seront non seulement justes, mais adaptés aux réalités de nos établissements de santé. Les chiffres ne suffisent pas : déterminer un ratio minimal sans s’appuyer sur de solides fondements scientifiques, validés par la HAS, conduirait à des décisions déconnectées des besoins des patients et de la complexité croissante des soins.
    Notre système de santé ne doit pas se construire sur des approximations : chaque territoire, chaque service, chaque situation présente des spécificités, et qui pourrait mieux nous éclairer à ce sujet que les professionnels de terrain ? Infirmiers, aides-soignants, praticiens, tous les jours en première ligne, connaissent mieux que quiconque les défis, les contraintes, les solutions possibles. Inspiré par une approche pragmatique, responsable, l’amendement prévoit l’utilisation de données scientifiques validées et le recours à ces professionnels en vue de fixer les ratios minimaux, qui deviendraient ainsi un outil réellement utile, un levier d’amélioration des conditions de travail des soignants et de la qualité des soins prodigués à nos concitoyens. Il y va non seulement de la crédibilité du texte, mais de notre responsabilité collective envers les soignants et les patients ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Bien entendu, la HAS –⁠ c’est son travail – fondera ses estimations sur les données scientifiques disponibles. Quant aux adaptations locales, soyez rassuré : elles figurent d’ores et déjà dans la proposition de loi. Encore une fois, demande de retrait ; à défaut avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Monsieur Muller, j’ai bien entendu –⁠ vous l’avez évoqué dans le cadre de la discussion générale – que, tout en analysant scientifiquement les besoins, il importait de ne pas se couper du terrain. C’est globalement le travail de la HAS, chargée des accréditations et certifications des établissements. Des référents qualité, médicaux ou paramédicaux, sont présents au sein de chaque service, chaque pôle hospitalier ; c’est par leur intermédiaire que se poursuivent les discussions avec la HAS, y compris lors de ces procédures d’accréditation, de validation. L’amendement est donc satisfait. Je vous demande de le retirer ; à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Monsieur Muller, maintenez-vous votre amendement ?

    M. Serge Muller

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    Je le maintiens, madame la présidente ; puis-je ajouter quelques mots ?

    Mme la présidente

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    La parole est d’abord à M. Sylvain Maillard, qui s’était inscrit : je vous la donnerai ensuite, monsieur Muller. Monsieur Maillard, allez-y.

    M. Sylvain Maillard

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    Monsieur le rapporteur, nous pouvons bien prendre dix minutes ou un quart d’heure afin de répondre aux questions. Même si ce n’est pas la configuration la plus satisfaisante en matière de débat parlementaire, je ne trouve rien à redire à votre position de principe, d’autant qu’il nous est également arrivé de souhaiter l’adoption conforme d’un texte. En revanche, vous voyez bien que les problèmes pointés par Annie Vidal nous inquiètent. Nous ne sommes pas réticents : nous voulons seulement des réponses ! Vous objectez que ces points ont été abordés lors de l’examen de la proposition de loi par la commission des affaires sociales : nous n’y siégeons pas tous, c’est pourquoi, je le répète, nous aimerions que vous consacriez quelques minutes ne serait-ce qu’à l’amendement no 21, sur lequel le ministre a émis un avis favorable.
    Enfin, pour répondre à notre collègue qui nous a expliqué tout à l’heure que tout le monde est favorable au texte, je rappelle que nous exerçons le pouvoir depuis 2017 et que, depuis lors, nous avons octroyé 32 milliards supplémentaires par an à l’hôpital.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Serge Muller.

    M. Serge Muller

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    J’entends bien que cette proposition est consensuelle. Néanmoins, gravons cette disposition dans le marbre dès maintenant et adoptons l’amendement no 1, qui est primordial.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le rapporteur.

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Je remercie M. Maillard de ses leçons de savoir-vivre parlementaire, mais j’ai déjà répondu ce matin, lors de la discussion générale, aux questions que Mme Vidal vient de poser. Il fallait être là ! Le débat n’a pas commencé à quinze heures, mais à midi. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Si vous aviez été présent, vous auriez entendu ces réponses. (M. Sylvain Maillard s’exclame. –⁠ Exclamations également sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    Quel mépris !

    (L’amendement no 1 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l’amendement no 16.

    M. Thibault Bazin

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    Nous soutenons l’esprit du texte. Néanmoins, il faut l’adapter aux réalités locales et aux nécessités d’organisation des établissements : parfois, certains services fonctionnent ensemble ; la taille des structures joue également un rôle. C’est pourquoi je propose aux alinéas 2 et 5 de l’article unique d’exprimer le ratio sous forme de fourchettes, plutôt que de déterminer un ratio cible. Je ne sais pas si le décret pourra le faire, mais j’aimerais entendre vos réponses sur ce point.

    M. Hadrien Clouet

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    Demande à Sylvain Maillard : il a suivi !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Ratio ou fourchettes ? Vaste débat ! La discussion a déjà eu lieu au Sénat, où la question a été tranchée –⁠ je l’indique d’ailleurs en présence de collègues du Sénat.

    M. Hadrien Clouet

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    Les débats y sont filmés, aussi !

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Je considère qu’il revient à la Haute Autorité de santé de faire des propositions ; ces professionnels sont sans doute plus qualifiés que le législateur pour définir quel type de ratio doit être retenu.

    M. Thibault Bazin

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    Cela pourrait être des fourchettes !

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Je n’élude pas la question, mais j’estime qu’elle relève des compétences de la HAS. C’est pourquoi je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j’émets un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Je suis plutôt favorable à votre amendement, monsieur le rapporteur général de la commission des affaires sociales. En effet, l’activité d’hospitalisation n’est pas identique selon les territoires ni selon les saisons, qui nécessitent de recourir à des renforts spécifiques à certaines périodes de l’année –⁠ nous le constatons notamment avec l’épidémie de grippe. Il existe aussi une saisonnalité touristique : j’exerce dans un CHU situé en montagne, qui connaîtra un surcroît d’activité dans quelques semaines, en raison de la période des vacances de ski, ce qui implique une organisation appropriée.
    L’idée est donc de redonner de la flexibilité aux chefs de service et aux cadres de santé pour adapter les effectifs nécessaires. Il s’agit d’une proposition de bon sens, qui permettra de redonner de la souplesse, tout en maintenant l’objectif du texte.
    Si le présent amendement n’est pas adopté, nous prendrons ces dispositions sous forme réglementaire ; toutefois, j’aurais préféré que le Parlement tranche cette question plutôt que le ministre, qui agit seul dans son bureau.

    M. Arthur Delaporte

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    C’est rare !

    (L’amendement no 16 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christine Loir, pour soutenir l’amendement no 2.

    Mme Christine Loir

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    La crise sanitaire et les tensions que subit régulièrement le système de santé français ont montré les limites des établissements hospitaliers en période de forte activité. Dans ces moments particuliers, les équipes soignantes se retrouvent débordées et les moyens actuels ne leur permettent pas toujours de s’adapter rapidement, d’autant que près de 4 900 lits d’hospitalisation ont été fermés dernièrement. En tant que députée de l’Eure, j’ai d’ailleurs une pensée particulière pour le centre hospitalier Eure-Seine et son personnel, qui connaît encore des difficultés.
    Si nous voulons améliorer les conditions de travail des praticiens et des soignants et leur permettre de remplir leur mission de soin, nous devons intégrer dans ces ratios les épisodes qui reviennent chaque année, tels que la grippe. Introduire la notion de surcroît d’activité dans l’élaboration des ratios permettrait aux établissements d’ajuster leurs ressources humaines et d’ouvrir des lits ou des services supplémentaires en cas de besoin. Il ne s’agit pas seulement de réagir à des crises, mais de les anticiper en matière de capacités hospitalières, afin de garantir en toutes circonstances une prise en charge de qualité pour l’ensemble des patients. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Je ferai la même réponse que précédemment. La loi n’entre pas dans ce degré de détail et c’est la HAS qui devra effectuer ce travail. De grâce, ne confondons pas les ratios de sécurité avec les ratios de qualité ; cela doit être notre ligne. Je vous invite à retirer votre amendement ; à défaut, j’émets un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Vous venez d’évoquer, madame Loir, plusieurs sujets que j’ai moi-même abordés, tels que la saisonnalité ou le pic d’activité. J’entends votre volonté et je considère en effet que ces critères méritent d’être précisés. C’est pourquoi je m’en remets à la sagesse de l’assemblée sur cet amendement.

    (L’amendement no 2 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir les amendements nos 15 et 17, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    M. Thibault Bazin

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    Actuellement, le texte ne s’applique qu’aux établissements qui assurent le service public hospitalier. Par l’amendement no 15, je propose d’étendre les obligations à tous les établissements de santé ; c’est une question d’équité.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Eh oui !

    M. Thibault Bazin

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    Imaginez que les ratios ne s’appliquent qu’à certains établissements et pas à d’autres ! Cela pourrait entraîner des effets de bord qui iraient à l’encontre de notre objectif, à savoir que tous les établissements de santé assurent une qualité des soins dans l’ensemble du territoire.
    L’amendement no 17 revient sur un point qui nous pose problème. En effet, la proposition de loi prévoit l’approbation de l’organisation des soins par la CME et la commission des soins infirmiers, de rééducation et médico-techniques (CSIRMT). Or ces instances disposent non d’une compétence d’approbation, mais seulement d’une compétence consultative. L’amendement vise donc à attribuer à la CME et à la CSIRMT une nouvelle compétence de consultation obligatoire et à modifier les deux articles dans lesquels sont listés leurs champs d’intervention. En effet, il serait problématique de les charger d’une mission pour laquelle elles ne sont pas compétentes et qu’elles ne pourront pas remplir.
    Enfin, cet amendement propose que l’on consulte également les comités sociaux d’établissement (CSE). Je sais que vous êtes sensibles au dialogue social : or derrière la définition de ratios, il y a des enjeux d’organisation des ressources humaines ; la moindre des choses serait donc de consulter les CSE sur les conséquences qui découleraient de la publication du décret par le ministre.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Je remercie M. le rapporteur général de ses amendements. Sur le fond, nous avions compris que les représentants de l’hospitalisation privée n’avaient pas souhaité être associés à la démarche –⁠ c’était du moins le cas il y a deux ans, lorsque le texte a été examiné au Sénat. Nous nous sommes donc concentrés –⁠ c’est normal – sur l’hôpital public. Si les représentants de l’hospitalisation privée souhaitent désormais adhérer à ce mouvement, tant mieux ! Ce sera aussi la tâche du ministre de la santé d’engager les concertations pour y parvenir –⁠ je vous rejoins sur ce point.
    Ensuite, s’agissant de l’application des dispositions contenues dans la proposition de loi sur le plan local, vous proposez une consultation plutôt qu’une approbation. Toutefois, l’approbation correspondait au point d’équilibre trouvé au Sénat. Cette approbation, à la fois de la CME et de la CSIRMT, me semble être un bon point d’équilibre pour aboutir à un dispositif le mieux adapté possible aux réalités locales. C’est pourquoi je vous invite, de nouveau, à retirer vos amendements ; à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Je suis favorable à ces deux amendements. En effet, le ministre de la santé que je suis est le garant de la sécurité et de la qualité des soins. Il ne doit pas prendre ses avis en fonction de la nature juridique de l’établissement de santé dans lequel le patient est hospitalisé, quels que soient les secteurs concernés –⁠ qu’il s’agisse de la médecine, de la chirurgie, de l’obstétrique, de la psychiatrie ou encore des soins de suite de réadaptation. C’est une question d’équité et de qualité des soins pour l’ensemble des patients.
    Le deuxième amendement apporte une réponse aux interrogations soulevées précédemment sur les avis de la HAS, qui ne doivent pas être déconnectés du terrain : à travers la CME, la CSIRMT et les CSE, c’est donc bien le cœur de la gouvernance hospitalière qui sera consulté –⁠ il est normal que ces instances le soient sur des mesures qui modifieront leur organisation professionnelle.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    Soyons clairs : le périmètre de la proposition de loi, dans sa rédaction actuelle, concerne les établissements qui assurent un service public hospitalier. Par conséquent, des établissements privés tels que les établissements de santé privés d’intérêt collectif (Espic) entreraient dans le champ du texte. En revanche, les établissements qui ne répondent pas à la notion de service public hospitalier, telle que définie par le code de la santé publique, n’y entreraient pas. À terme, cela peut poser, à mon avis, un problème d’équité.
    En ce qui concerne l’approbation, je suis d’accord avec vous. Un point d’équilibre a été trouvé et cette approbation est nécessaire. Le problème est que les instances citées ne disposent pas de cette compétence, qu’il faudrait leur attribuer pour que le texte soit opérant. Tel est le sens de l’amendement. Le but est non qu’elles soient simplement consultées, mais qu’elles obtiennent la compétence d’approbation. J’ai bien compris que vous visiez l’adoption du texte dans une version conforme à celle du Sénat. Néanmoins, nous courons le risque que le texte, une fois adopté, ne soit pas effectif.

    (Les amendements nos 15 et 17, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir les amendements nos 9 et 10, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.

    Mme Annie Vidal

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    L’amendement no 9 vise à modifier la durée du délai d’information du directeur général de l’ARS en cas de non-respect des ratios. En effet, le texte prévoit actuellement que le directeur général soit prévenu dans un délai de trois jours, sans tenir compte toutefois du nombre de personnels manquants –⁠ s’agit-il d’une personne, de deux, de trois ? –, ni de la durée de l’absence –⁠ une journée ou plus ? –, ni même de la période à laquelle l’absence est constatée. Que se passe-t-il lorsqu’il s’agit de la prise de fonctions du samedi soir ou du dimanche, par exemple ? Cette disposition me semble, encore une fois, peu opérante. C’est pourquoi je propose que la durée du délai d’information soit déterminée par décret, en fonction de l’écart constaté et en fonction de la période.
    L’amendement no 10 est un amendement de repli, qui propose d’allonger le délai d’information de trois à sept jours, afin de donner un peu de souplesse au système et d’en faciliter l’application.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur les deux amendements ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Le délai de trois jours pour alerter l’ARS est suffisant : il ne faut pas l’allonger de façon inconsidérée. C’est ensuite que les bonnes réponses seront trouvées et que l’ARS pourra aider l’hôpital à revenir à des ratios qualitatifs. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement sur les deux amendements ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Le délai de trois jours est trop court, surtout s’il débute un vendredi, quand il est impossible de restructurer les équipes le week-end. Il convient de donner de la souplesse aux établissements vis-à-vis de l’ARS et de ne pas leur imposer une contrainte trop forte, dont les effets pourraient être inverses de ceux escomptés –⁠ des fermetures de lits plutôt qu’une amélioration de la qualité. Je vous demande de retirer l’amendement no 10 au profit de l’amendement no 9.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Nicole Dubré-Chirat.

    Mme Nicole Dubré-Chirat

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    Par expérience, je sais que disposer de ratios est très confortable pour un service et je ne pense pas que quiconque conteste l’objectif de ce texte.
    J’aimerais cependant revenir sur le calcul du ratio, qui sera basé sur la charge de travail. Or celle-ci varie, comme le nombre de lit d’ailleurs, d’une unité à l’autre. La HAS devra, pour ce faire, consulter les organisations professionnelles et cela prendra du temps –⁠ les placards regorgent d’études sur la charge de travail !
    Les ratios, c’est une très bonne idée mais soyons vigilants quant à sa mise en œuvre. Évitons d’adopter un texte inopérant et décevant pour les soignants, puisque ses dispositions ne seront appliquées que dans trois ou dix ans. Tous les établissements peuvent y arriver, mais avec des délais plus longs et une application progressive, qui, loin de viser tous les personnels, cible seulement les plus importants. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    Très juste !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Damien Maudet.

    M. Damien Maudet

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    Si j’étais plus naïf, j’aurais du mal à comprendre les amendements de notre collègue Annie Vidal. Le texte prévoit que le chef d’établissement informe l’ARS quand le ratio n’est plus respecté depuis trois jours. Pourquoi porter ce seuil d’alerte à sept jours ?

    Mme Annie Vidal

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    Je vais retirer l’amendement !

    M. Damien Maudet

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    Le plus important, c’est que l’ARS soit informée rapidement de la situation, afin qu’elle puisse évaluer le problème avec le directeur de l’hôpital et les services et prendre rapidement des mesures. Pourquoi attendre encore quand on peut agir concrètement ?
    Ma naïveté a cependant des limites : l’objet de l’amendement, comme des dix autres de Mme Vidal, est d’allonger les débats dans une visée d’obstruction et, surtout, d’éviter un vote conforme. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    (Les amendements nos 9 et 10, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 20.

    Mme Annie Vidal

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    Sincèrement, si nous devions adopter un seul amendement pour la cohérence et la sincérité du texte (Exclamations, sur les bancs du groupe SOC), ce serait celui-ci ! En effet, la proposition de loi prévoit que la HAS aura établi les référentiels pour les ratios au 31 décembre 2024. Je sais bien que vous m’accusez d’obstruction, mais comment faire autrement que de modifier cet alinéa ?
    Par cet amendement qu’on pourrait presque qualifier de rédactionnel, je propose de reporter la date d’établissement des ratios par la HAS au 31 décembre 2027. Il ne s’agit pas ici de faire de l’obstruction,…

    M. Sébastien Peytavie

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    Ailleurs, oui !

    Mme Annie Vidal

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    …mais de laisser à la HAS le temps d’accomplir un travail qu’elle aurait dû terminer il y a trois semaines, selon le texte.
    En cohérence avec cette nouvelle date, je propose que l’entrée en vigueur de la mesure soit reportée au 1er janvier 2029.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Si votre amendement devait être adopté, rien n’indique que les délais qui y sont mentionnés pourraient être tenus. Le cycle politique mouvant et incertain que nous traversons –⁠ vous le savez aussi bien que moi –, pourrait rendre ces dates obsolètes.
    L’important est que le texte soit adopté conforme. Laissons ensuite la HAS établir les ratios et le ministère prendre les décrets nécessaires, sur le fondement du rapport rendu par la HAS. Agissons, car c’est ce qui compte aux yeux des soignants et des patients. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    À cette étape du processus législatif, chacun doit prendre ses responsabilités. Je pense que les ratios doivent s’appliquer –⁠ cela fait partie des réformes structurelles pour améliorer les conditions de travail et la qualité des soins –, mais que nous devons aussi tenir compte du principe de réalité.
    Monsieur le rapporteur, la date du 31 décembre 2024 n’est pas tenable –⁠ nous sommes en janvier 2025. Vous dites qu’en adoptant ces dispositions conformes, le ministre pourra prendre les décrets pour les rendre applicables, moyennant la formation de soignants en nombre suffisant. J’entends votre argument et je veux bien prendre mes responsabilités.
    Cependant, si vous conservez de telles échéances, vous coincerez le gouvernement. Nous souhaitons tous, au-delà de nos divergences politiques, l’instauration de ces ratios, soutenue par l’ensemble des soignants. Mais soyons réalistes : de tels délais pourraient m’empêcher d’agir. Vous le savez, pour former une aide-soignante ou un infirmière, il faut respectivement un et trois ans.
    Je ne suis responsable ni de l’agenda parlementaire, ni des dissolutions, ni de la censure. Et pardonnez-moi, le ministre que je suis –⁠ votre collègue il y a encore un mois – ne peut soutenir une disposition dont l’échéance est dépassée !
    J’en appelle à la responsabilité de tous les parlementaires. Je souhaite vraiment que ce texte aboutisse, comme différents députés qui estiment, en désaccord avec leur groupe, qu’il s’agit là d’une mesure de bon sens. Permettez au ministre d’agir, n’inscrivez pas dans le texte une date déjà obsolète ou il faudra que j’explique aux soignants que vous m’avez imposé un délai déjà dépassé !
    Avis favorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Romain Eskenazi.

    M. Romain Eskenazi

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    Avant d’être élu député, je travaillais à la direction d’un groupement d’hôpitaux publics, dans le Val-d’Oise et la Seine-Saint-Denis. La qualité des soins et le recrutement étaient, au quotidien, nos principales préoccupations.
    Lors de la crise sanitaire, beaucoup de soignants, traumatisés, ont fui le métier et 10 % des postes d’infirmiers et d’aides-soignants ne sont pas pourvus aujourd’hui –⁠ les hôpitaux de banlieue ne sont évidemment pas épargnés. Les salaires insuffisants constituent un obstacle, mais ces femmes et ces hommes ne font pas ces métiers pour l’argent. Ce sont les conditions de travail qui les dissuadent. Pour recruter, nous avons dû recourir davantage à l’intérim et aux vacataires : ces frais, multipliés par quatre, ont plombé le budget.
    Il y a urgence. Cette mesure de bon sens agit à la fois sur la qualité des soins et l’attractivité, qu’il faut toutes deux améliorer pour renforcer l’hôpital public. En Australie et aux États-Unis, les ratios ont eu des effets positifs sur ces deux volets.
    Nous vous demandons de rejeter l’amendement, qui reporte à 2029 l’application du nombre minimum de soignants. La situation de l’hôpital public est telle qu’il n’y a plus de temps à perdre ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Cazeneuve.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Personne, ici, se désintéresse de l’état des hôpitaux ou considère que les métiers du soin sont suffisamment attractifs.

    M. Sylvain Maillard

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    Bien sûr ! Il a raison !

    M. Pierre Cazeneuve

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    Tout au long de ce débat, nous avons opposé des arguments qui nous semblaient légitimes, s’agissant de l’applicabilité et de l’opposabilité de cette mesure. Mais là, on marche sur la tête ! On est en train de conserver dans un texte une échéance antérieure à son adoption. Je comprends qu’il faille un vote conforme pour accélérer le processus législatif, mais pas au détriment de la justesse et de la cohérence d’un texte qui, de surcroît, pourrait être retoqué. Cela ne justifie pas de bafouer la loi.
    Aux collègues du groupe La France insoumise qui accusent depuis tout à l’heure notre collègue Annie Vidal, je souhaite d’avoir le même engagement sur ces questions. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.) Les mêmes nous parlent d’obstruction ? Nous avons défendu cet après-midi neuf amendements, quand vous en avez déposé 20 000 lors de l’examen de la réforme des retraites. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Sylvain Maillard

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    Il a raison !

    M. Hadrien Clouet

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    Le ratio macroniste est dépassé !

    M. Pierre Cazeneuve

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    Je vous demande de faire preuve d’un petit peu d’humilité et de cohérence. Je crains que vous en soyez incapables, mais, dans le doute, je vous tends la perche. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sylvain Berrios.

    M. Sylvain Berrios

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    M. le rapporteur a souligné qu’il existait une très forte convergence ici pour que ce texte soit adopté. Mais il serait dommage que cet engouement retombe du fait de l’adoption d’une disposition qui empêche l’application même du texte ! Adopter l’amendement, en réalité rédactionnel, relève du bon sens. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    Madame Vidal, maintenez-vous votre amendement ?

    Mme Annie Vidal

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    Je maintiens bien évidemment cet amendement de bon sens, qui renforce la cohérence et la sincérité du texte.

    (L’amendement no 20 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux demandes de scrutin public : sur l’amendement no 14, par le groupe Rassemblement national ; sur l’article unique, par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 12.

    Mme Annie Vidal

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    L’impact du ratio minimal de soignants par patient doit être évalué avant que la mesure ne soit étendue à l’ensemble du territoire. L’expérimentation vise à anticiper ses conséquences éventuelles sur la qualité de la prise en charge des patients, l’organisation des services hospitaliers ou encore les coûts de gestion pour les établissements de santé.
    Encore une fois, nous sommes favorables au principe, mais en désaccord sur les modalités. Par cet amendement de bon sens, nous souhaitons pouvoir disposer d’une vision claire de la situation et nous assurer que le dispositif est efficace et opérant. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    (L’amendement no 12, repoussé par la commission, accepté par le gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est encore à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 13.

    Mme Annie Vidal

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    Oui, c’est encore à moi, madame la présidente, je ne sais pas comment je dois interpréter ce mot !

    Mme la présidente

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    Ce n’était pas du tout malveillant, n’y voyez aucune malice !

    Mme Annie Vidal

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    Et je vais encore défendre un amendement qui vise à rendre le dispositif plus efficace. La proposition de loi n’étant pas accompagnée d’une étude d’impact, nous ignorons quelles en seront les conséquences financières. Compte tenu du contexte budgétaire national, le bon sens voudrait que l’on connaisse l’effet de la mesure sur les finances publiques, pour déterminer une programmation budgétaire et trouver les financements nécessaires à la réalisation de ce projet pertinent.

    (L’amendement no 13, accepté par le gouvernement, repoussé par la commission, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Matthieu Marchio, pour soutenir l’amendement no 14.

    M. Matthieu Marchio

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    Nous proposons d’assurer l’application progressive et adaptée des ratios de soignants, en tenant compte des disparités régionales. Une évaluation préalable effectuée par la HAS permettrait d’identifier les zones où leur application immédiate pourrait nuire à la qualité des soins, en raison d’un manque structurel de personnel. Cette démarche préventive éviterait les effets contre-productifs dans les territoires les plus touchés par les pénuries, tout en garantissant les plans de recrutement ciblés pour pallier ces déficits. L’amendement concilie donc les objectifs fixés par la loi avec les réalités locales, assurant ainsi une transition équitable et efficace. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    La loi n’a pas à préciser la méthode de travail de la HAS. Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Votre proposition produirait l’effet inverse de son objectif : elle dégraderait la qualité des soins dans les zones qui connaissent déjà des difficultés. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 14.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        191
            Nombre de suffrages exprimés                190
            Majorité absolue                        96
                    Pour l’adoption                32
                    Contre                158

    (L’amendement no 14 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article unique.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        196
            Nombre de suffrages exprimés                133
            Majorité absolue                        67
                    Pour l’adoption                126
                    Contre                7

    (L’article unique est adopté.)

    Mme la présidente

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    Nous allons vérifier si tous nos collègues ont pu voter.

    Rappel au règlement

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sylvain Maillard, pour un rappel au règlement.

    M. Sylvain Maillard

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    Il se fonde sur l’article 100 de notre règlement, relatif au déroulement des débats. Plusieurs d’entre nous n’ont pas pu voter, semble-t-il, car le système ne fonctionnait pas. (Protestations.)

    M. Vincent Descoeur

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    Ce n’était pas allumé !

    M. Sylvain Maillard

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    Pouvons-nous disposer de la liste de ceux qui ont pu voter ? C’est important puisqu’il s’agit de l’article unique. Nous suivons le débat, même si nous ne sommes pas tous heureux de la tournure qu’il prend. Peut-on vérifier si le scrutin a fonctionné ou à défaut, procéder tranquillement à un nouveau vote ?

    Mme la présidente

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    Il est légitime que nos collègues souhaitent que leur nom apparaisse sur les résultats d’un scrutin public. Des vérifications ont été faites : votre vote, monsieur Maillard, a été pris en compte et le scrutin a bien eu lieu de façon régulière.

    Après l’article unique

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements portant article additionnel après l’article unique.
    La parole est à Mme Annie Vidal, pour soutenir l’amendement no 4.

    Mme Annie Vidal

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    Le code de la santé publique prévoit que le conseil de surveillance des établissements publics délibère au moins une fois par an sur la politique de l’établissement en matière de droit des usagers, de la qualité de l’accueil et de la prise en charge. À l’issue de cette délibération, un rapport est transmis à l’ARS. Avec ce dernier amendement (« Ah ! » sur quelques bancs du groupe LFI-NFP), je propose que ce rapport inclue un bilan sur le ratio effectivement pratiqué par l’établissement pour l’année écoulée.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    On ne peut pas à la fois reprocher au dispositif d’être trop contraignant et bureaucratique, et vouloir ajouter une contrainte supplémentaire.

    Mme Annie Vidal

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    C’est de la transparence !

    M. Guillaume Garot, rapporteur

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    Demande de retrait ou, à défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Yannick Neuder, ministre

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    Sagesse.

    (L’amendement no 4 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Christine Loir, pour soutenir l’amendement no 3.

    Mme Christine Loir

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    Il s’agit d’une demande de rapport pour connaître l’efficacité –⁠ ou pas – de cette mesure.

    Un député du groupe SOC

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    Encore un rapport, encore une contrainte ! (Sourires.)

    (L’amendement no 3, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’article unique, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    Explications de vote

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Serge Muller.

    M. Serge Muller (RN)

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    Dans un contexte de crise des personnels soignants, ce texte porte sur un enjeu majeur pour notre système de santé et la qualité des soins prodigués à nos concitoyens.
    Si nous saluons la volonté d’introduire un ratio de soignants par patient hospitalisé, nous estimons qu’un tel indicateur doit être conçu comme un levier pour garantir la qualité des soins, non comme un prétexte pour réaliser des économies budgétaires ou optimiser les moyens au détriment des patients et des professionnels.
    Trop souvent, les logiques comptables ont contribué à affaiblir notre système de santé et à pousser nos soignants à bout. Afin que le dispositif proposé soit favorable à tous, nous estimons essentiel que ces ratios soient élaborés sur des bases scientifiques solides, validées par des experts, et en concertation étroite avec les professionnels de santé.

    M. Sébastien Peytavie

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    Vous n’aimez pas la science !

    M. Serge Muller

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    En l’état, ce texte ne propose pas ces garanties, ce qui constitue pour nous une insuffisance majeure. Les députés du groupe Rassemblement national s’abstiendront. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Annie Vidal.

    Mme Annie Vidal (EPR)

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    Vous ne serez pas surpris de la décision finale de notre groupe : nous ne voterons pas cette proposition de loi en l’état. Nous aurions voté le texte s’il avait été amendé, pour faire avancer un projet important, dont nous approuvons le principe.

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Vous vous cachez derrière votre petit doigt !

    Mme Annie Vidal

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    En l’état actuel des choses, il ne pourra pas être appliqué. Inopérant, inefficace, source de lourdeurs administratives importantes, il ne provoquera que de la déception. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EPR.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    Eh oui, elle a raison !

    Mme Annie Vidal

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    Je ne veux pas créer de nouvelles difficultés aux établissements ; ce texte est un coup supplémentaire sur leur tête. Nous refusons de nous y associer mais nous ne voterons pas contre lui.
    En effet, nous partageons votre objectif d’augmenter le nombre de soignants au chevet des patients. Pour aboutir à une organisation robuste, il faudra que cette évolution se fasse dans le temps, accompagnée par la formation, à l’issue d’une réflexion collective. Les députés du groupe Ensemble pour la République s’abstiendront. (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Gabrielle Cathala.

    Mme Gabrielle Cathala (LFI-NFP)

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    En septembre 2023 à Hyères, Lucas, 25 ans, est mort d’une septicémie aux urgences, après des heures d’agonie dans un couloir. En février 2024, Josiane, 66 ans, est morte après dix heures passées aux urgences de l’hôpital d’Eaubonne, dans le Val-d’Oise. Le 8 janvier dernier, une jeune femme de 20 ans est décédée aux urgences de Longjumeau, après avoir passé la journée sur un brancard. Coup sur coup, nous sommes endeuillés par ces drames évitables auxquels nous refusons de nous habituer. Ce sont les témoins macabres d’un hôpital public qui approche de son point de rupture, après trente ans de coupes budgétaires et de management néolibéral. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
    Au nom de la rationalisation et de l’efficacité –⁠ autant de dogmes qui cachent la destruction du service public de la santé –, vous n’avez pas cessé de supprimer des lits d’hôpital : 94 000 lits ont disparu en vingt ans et leur suppression s’est même accélérée après le covid –⁠ 6 700 lits supprimés en 2022 et encore 4 900 en 2023. (Mêmes mouvements.)
    Vous prétendez ne plus vouloir faire des économies sur le dos de la santé des Français mais votre hausse de 1 milliard de l’Ondam est de la poudre aux yeux, car le sous-Ondam hospitalier reste largement en deçà des besoins : dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2025, il manque toujours près de 4 milliards pour l’hôpital. Ce chiffre à lui seul justifiera toutes les censures. (Mêmes mouvements.)
    Derrière vos mensonges, les conséquences sont concrètes pour les soignants et les patients : la non-compensation de l’inflation subie par les hôpitaux se chiffre actuellement à 1,3 milliard, soit l’équivalent de plus de 20 000 postes d’infirmières à temps complet. Le déficit des trente-deux CHU a explosé à cause des Ondam insuffisants et atteint aujourd’hui plus de 1 milliard. Quant à la dette sanitaire, on compte 3,3 millions de séjours hospitaliers en retard ou en attente de reprogrammation –⁠ retard qui ne se résorbe pas depuis la sortie du covid.
    La démolition de l’hôpital public permet la bascule de la santé vers le privé. Quand l’hôpital est au bord de l’effondrement, votre réaction est de chercher comment en vendre les ruines. (Mêmes mouvements.) Cette politique de détérioration volontaire de l’hôpital produit une profonde crise de recrutement du personnel médical. Les soignants quittent en masse le navire ; les départs se chiffrent en dizaines de milliers, à tel point qu’on compte 60 000 postes d’infirmières vacants, soit six fois plus qu’avant le covid. Voilà le résultat d’une gestion qui traite les êtres humains comme des chiffres de tableaux Excel ! Voilà ce qui arrive quand on réduit le soin à une série d’actes abattus à la chaîne, sans temps ni moyens suffisants pour écouter, comprendre et soigner les patients selon leurs besoins !
    Cette crise du recrutement est à la fois la cause et la conséquence de la dégradation de l’offre de soins. Parce qu’ils ne veulent plus participer à une institution maltraitante qui les rend maltraitants, les soignants démissionnent. Parce qu’ils démissionnent, la pénurie de soignants vous sert à justifier de nouvelles suppressions de lits et de nouvelles baisses de moyens. Ce cercle mortifère doit cesser. Les Français veulent des soins de qualité, rapides et gratuits, comme ceux dont ils jouissaient en l’an 2000, lorsque nous bénéficiions du meilleur système de santé, envié par le monde entier. (Mêmes mouvements.)
    Quelle est la première étape pour y parvenir ? Est-ce un ratio minimum de soignants par patient hospitalisé ? Ce n’est pas une mauvaise idée ; ce n’est pas une révolution non plus.
    Partout où il a été adopté, en Californie comme en Corée du Sud, le ratio de qualité a eu de nombreux effets bénéfiques, notamment la diminution de la mortalité des patients, mais aussi celle des complications et des durées d’hospitalisation.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Ah oui ? Allez-y en ce moment en Californie !

    Mme Gabrielle Cathala

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    Pourquoi ? Car les soignants sont moins exposés à l’épuisement professionnel et aux accidents du travail, et font donc moins d’erreurs parce qu’ils ne sont pas pressés par le temps.
    Les conditions de travail s’améliorant, les vocations se multiplient et les recrutements augmentent. Le nombre de postes vacants a diminué de 69 % en Californie grâce aux nouveaux étudiants en médecine –⁠ voilà un résultat encourageant. (Mêmes mouvements.)
    Encourageant, oui, mais en trompe-l’œil : l’adoption du ratio n’explique pas, à lui seul, ce résultat. Rien ne peut remplacer une hausse du budget du système hospitalier –⁠ une hausse des moyens est nécessaire.

    M. Jean-François Coulomme

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    Exactement !

    Mme Gabrielle Cathala

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    C’est, à vrai dire, l’un des intérêts de la mesure : en rendant visible le manque criant de personnel, elle met les gouvernants face à leurs responsabilités. (Mêmes mouvements.)

    M. Damien Maudet

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    Eh oui !

    Mme Gabrielle Cathala

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    Les macronistes ne pourront plus prétendre qu’il n’y a pas de crise du recrutement.
    Ainsi, qu’elle soit symbolique ou serve d’indicateur, qu’elle reste lettre morte ou aboutisse à une prise de conscience chez ceux qui font semblant de ne pas voir les besoins de financement de l’hôpital public, la proposition de loi va dans le bon sens, même si ses objectifs sont très modestes. Nous la voterons. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – M. Olivier Faure applaudit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sylvain Berrios.

    M. Sylvain Berrios (HOR)

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    Le débat a été fourni, nous avons proposé des amendements, le gouvernement s’en est remis à la sagesse de notre assemblée car une des échéances est antérieure à l’adoption de la loi. Les choses sont donc complexes…

    M. Arnaud Le Gall

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    Quand on a fait la T2A, on est disqualifié ; on ne peut plus parler de l’hôpital public !

    M. Sylvain Berrios

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    Mais, surtout, cette proposition de loi ne trouvera son sens que si l’Assemblée nationale adopte le PLFSS pour 2025 : que ceux qui prétendent défendre les soignants aujourd’hui ne censurent pas le gouvernement demain ! (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)

    M. Sylvain Maillard

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    Eh oui !

    M. Sylvain Berrios

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    Dans ces conditions, nous nous abstiendrons.

    Vote sur l’article unique

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article unique de la proposition de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        211
            Nombre de suffrages exprimés                141
            Majorité absolue                        71
                    Pour l’adoption                138
                    Contre                3

    (L’article unique est adopté, ainsi que l’ensemble de la proposition de loi.)

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-sept heures cinq, est reprise à dix-sept heures dix.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    2. Repas à 1 euro pour tous les étudiants

    Discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de Mme Fatiha Keloua Hachi et plusieurs de ses collègues visant à rendre accessible à tous les étudiants le repas à 1 euro (nos 519, 701).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Fatiha Keloua Hachi, présidente et rapporteure de la commission des affaires culturelles et de l’éducation.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure de la commission des affaires culturelles et de l’éducation

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    Les étudiants ont faim. Les chiffres témoignent d’une précarité étudiante grandissante. En réalité, ce n’est qu’une nouvelle forme de pauvreté.
    En restreignant le tarif de 1 euro institué pendant la crise sanitaire aux seuls étudiants boursiers ou identifiés comme précaires par les services sociaux des centres régionaux des œuvres universitaires et scolaires (Crous), vous avez privé les étudiants d’un dispositif dont ils avaient besoin.
    En accordant ces repas à 1 euro en priorité aux étudiants boursiers, vous persistez à fonder cette mesure de justice et d’égalité sur le statut de boursier, pourtant largement dépassé. Ses lacunes sont connues –⁠ effets de seuil, prise en compte injuste des revenus des parents, calcul fondé sur les revenus de l’année précédant la demande – mais la réforme structurelle des bourses annoncée par Sylvie Retailleau ne verra sûrement pas le jour.
    Pour les étudiants non boursiers mais précaires, l’accès au dispositif reste plus que limité. Constitution du dossier, prises de rendez-vous auprès des assistants sociaux du Crous et hétérogénéité des procédures –⁠ souvent longues, dissuasives et stigmatisantes malgré les efforts des personnels – représentent des freins réels.
    Enfin, la faible information des étudiants sur les aides auxquelles ils pourraient prétendre restreint également l’intérêt du dispositif.
    Seul un étudiant non boursier sur dix y recourt, soit 40 000 jeunes à peine sur plus de 400 000 qui en auraient besoin. Comment nous accommoder d’un tel taux de non-recours, ou prétendre apporter des aides alors qu’elles ne seront pas sollicitées par leurs destinataires ?
    La loi, dite Levi, du 13 avril 2023 visant à favoriser l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré a le mérite de prendre en compte les étudiants les plus éloignés des centres de restauration universitaire. Mais elle présente une lacune : elle ne définit pas ce qui constitue une « offre de restauration à tarif modéré ».
    En outre, la compensation financière de 40 euros par mois qu’elle prévoit pour les boursiers sans site de restauration proche de leur lieu d’études est très insuffisante. N’avons-nous que cela à offrir à nos étudiants ?
    Il y a deux ans, j’ai déposé une proposition de loi visant à étendre le repas à 1 euro à tous les étudiants. En février 2023, elle a été rejetée dans l’hémicycle à une voix près. Depuis, la précarité étudiante s’est encore accrue, rendant hélas plus nécessaire encore cette mesure.
    J’ai l’honneur de la défendre à nouveau (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR), après avoir rencontré de nombreux acteurs de la restauration étudiante. Je tiens à les remercier car cela m’a permis de consolider le dispositif de mon texte.

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Bravo !

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    De campus en campus, j’ai eu l’occasion de l’enrichir. Je peux également confirmer ce qui est, depuis de trop nombreuses années, une certitude : la pauvreté ne cesse d’augmenter.
    Je remercie les directions des Crous de La Réunion, de Corse, de Bordeaux, d’Aquitaine et de Bretagne pour leur contribution. Je remercie également les représentants de l’Union nationale des syndicats CGT des Crous et les syndicats des organisations étudiantes –⁠ Fédération des associations générales étudiantes (Fage), Union nationale des étudiants de France (Unef), l’Union étudiante – ainsi que France Universités et l’association Cop1 pour leur travail quotidien et sans relâche sur le terrain. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP)
    Je réitère mes remerciements à tous ceux qui œuvrent quotidiennement sur le terrain pour une université publique qui émancipe notre jeunesse. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe EcoS. –⁠ Mme Marie-José Allemand applaudit également.)
    J’en profite pour remercier aussi ceux qui travaillent dans l’ombre, les administrateurs de l’Assemblée nationale. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
    L’instauration d’un tarif unique à 1 euro comporte plusieurs avantages. D’abord, un tel tarif efface les différences de traitement injustifiées entre les étudiants, liées au système des bourses.
    C’est également une première étape vers le soutien universel à l’émancipation des jeunes, décorrélé des ressources de leurs parents, que mon groupe promeut depuis plusieurs années.
    Un tel système effacerait aussi les effets de seuil et résoudrait le problème du non-recours. Ouvert à tous les étudiants, il bénéficierait avant tout aux plus précaires, puisque les Crous sont principalement fréquentés par des étudiants modestes, le prix étant leur premier facteur d’attractivité.
    Croire qu’une masse d’étudiants privilégiés va se ruer vers les restaurants universitaires si la mesure est votée, c’est méconnaître la sociologie des universités, avant tout composées de jeunes des classes modestes et moyennes.
    En outre, la proposition de loi vise à assurer un meilleur maillage territorial du dispositif. Beaucoup d’étudiants n’ont pas de restaurant universitaire à proximité de leur lieu d’études.
    Pour y remédier, ce texte prévoit d’étendre l’offre de restauration à 1 euro à tous les points de vente gérés par les Crous, notamment les cafétérias, afin que ce service public soit proposé sur tous les campus, même les plus petits, mais aussi à tous les sites agréés par les Crous, dans la continuité de la loi Levi.
    Enfin, ce texte doit être envisagé comme une première étape, une alerte, un appel à renforcer les moyens alloués au réseau des œuvres universitaires. Il s’agit en particulier de soulager les agents, qui font face à de nombreuses difficultés et auxquels je tiens à réitérer mon total soutien.
    Le coût de cette proposition de loi, estimé à 90 millions par an, inclut une hausse des moyens mis à disposition des Crous, à hauteur d’environ 30 millions.
    La précarité étudiante est un phénomène d’ampleur, qui appelle une réponse forte des pouvoirs publics. Le budget présenté à l’automne n’était pas à la hauteur de l’enjeu. Les amendements déposés par le nouveau gouvernement lors de l’examen du projet de loi de finances au Sénat sont encore plus inquiétants. De nouvelles annulations de crédits sont prévues pour l’enseignement supérieur, plus de 8 millions étant retirés du seul programme Vie étudiante.
    Le sursaut dont nous avons besoin pour soutenir nos étudiants est pourtant à portée de main. En commission, en décembre, notre texte a été largement adopté, en partie grâce au vote favorable de collègues qui ne sont pas forcément issus de nos rangs. J’aimerais saluer l’attitude constructive de plusieurs d’entre eux, qui ont pris conscience de la gravité de la situation et ont su être force de proposition pour améliorer le texte que j’avais déposé. Je pense notamment à un amendement visant à introduire la possibilité d’une offre de restauration à emporter.
    La généralisation du repas à 1 euro pour tous les étudiants sera la première étape du long chemin qu’il nous faut emprunter pour mettre fin à la pauvreté étudiante. Un pays comme le nôtre doit traiter correctement ses étudiants, lesquels rendront largement à l’État, au cours de leur vie professionnelle, ce qu’ils auront perçu.
    Comme l’a dit François Mitterrand, si la jeunesse n’a pas toujours raison, la société qui la méconnaît et qui la maltraite a toujours tort. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NFP, EcoS et GDR.) Alors, soyons à la hauteur pour les étudiants et notre jeunesse –⁠ notre avenir. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NFP, EcoS et GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. le ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche.

    M. Philippe Baptiste, ministre chargé de l’enseignement supérieur et de la recherche

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    J’ai eu l’occasion de m’exprimer hier devant votre assemblée, pour répondre à la question de Jimmy Pahun sur la recherche polaire, mais permettez-moi d’exprimer, au moment où je monte pour la première fois à la tribune, l’honneur qui est le mien. Je suis convaincu de l’importance de ce beau ministère de l’enseignement supérieur et de la recherche, au service de l’avenir, de notre jeunesse mais aussi de notre nation.
    La proposition de loi qui vous est soumise par le groupe Socialistes et apparentés touche à une question très importante. L’accès de tous les étudiants à une alimentation de qualité constitue un enjeu majeur, sur le plan social mais aussi du point de vue de l’équilibre alimentaire, de la santé, du bien-être et, in fine, de la réussite des études.
    Pour relever ce défi, nous avons la chance de disposer d’un levier formidable : le réseau des restaurants universitaires gérés par les Crous. Il réunit 950 points de vente à travers la France, qui ont servi plus de 43 millions de repas l’an dernier, un chiffre en forte croissance puisqu’il a augmenté de 10 millions en trois ans. La qualité du service apporté est reconnue puisque 71 % des étudiants recommandent les structures de restauration des Crous.
    Cette situation est aussi le fruit du déploiement très large, à compter de 2020, du repas à 1 euro, ouvert aux étudiants boursiers et aux étudiants précaires qui en font la demande, et qui représente aujourd’hui un repas servi sur deux et a bénéficié à plus de 480 000 boursiers l’an dernier, soit plus de la moitié d’entre eux.
    Notre première responsabilité consiste donc avant tout à poursuivre le développement de cette offre pour la rendre accessible à davantage d’étudiants encore, quel que soit le territoire où ils se trouvent, tout en continuant de travailler sur sa montée en qualité. Telles sont les tâches auxquelles, avec les Crous, nous nous sommes d’ores et déjà attelés.
    Le premier défi est celui de l’accessibilité territoriale. Nous l’avons relevé grâce à la loi Levi, qui nous a conduits à signer plus de 200 conventions entre les Crous et des offres de restauration collective de proximité pour offrir des solutions à tarif modéré dans les zones peu denses.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Ce n’est pas grand-chose, il ne faut pas se vanter !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Ce dispositif sera complété dès cette année par une aide financière individuelle, allant de 20 à 50 euros par mois, pour les étudiants en zone blanche. Je saisis cette occasion pour vous informer que les étudiants concernés recevront leur aide, avec effet rétroactif au 1er janvier, entre le 10 et le 15 février.
    Le deuxième défi est de combattre la saturation dans les villes universitaires. De trop nombreux étudiants renoncent à manger en raison des files d’attente interminables.

    Mme Marie Mesmeur

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    Ce n’est pas seulement à cause des files d’attente !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Tel est, à mon sens, le défi majeur qui se pose à nous : que l’offre de restauration, là où les besoins sont les plus importants, ne soit plus en tension.

    Mme Marie Mesmeur

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    Et les prix ? Et la précarité ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    C’est pourquoi le budget initial pour 2025 voté par le conseil d’administration du Cnous, le Centre national des œuvres universitaires et scolaires, prévoyait bien des moyens supplémentaires pour porter à près de 6 000 le nombre de nouvelles places entre les rentrées 2024 et 2025.
    Le troisième défi est de poursuivre la montée en qualité. C’est tout l’enjeu de la mise en œuvre de la loi Egalim 1, déployée de manière particulièrement volontariste par le réseau des œuvres universitaires. Le budget voté par le conseil d’administration du Cnous pour 2025 visait à progresser encore en la matière, avec, dès cette année, une hausse de 4 points du taux de repas certifiés sous label de qualité.
    Face à tous ces défis, la généralisation du repas à 1 euro est en réalité une mesure injuste socialement (MM. Laurent Croizier et Charles Sitzenstuhl applaudissent). Elle passe à côté de l’ambition sociale que je partage avec vous et fragiliserait durablement les Crous.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    C’est bien du socialisme !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Cette généralisation entraînerait une perte de recettes considérable –⁠ plus de 50 millions pour les seuls coûts directs – pour le réseau des Crous, le privant des moyens nécessaires au développement de nouvelles solutions de restauration.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Ce n’est pas nous qui sommes responsables du trou de 60 milliards !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    La priorité est de développer l’offre pour la rendre accessible à davantage d’étudiants et, en particulier, à ceux qui ont en le plus besoin.

    Mme Marie Mesmeur

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    La priorité, c’est de lutter contre la précarité : un étudiant sur cinq ne mange pas à sa faim !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Je passe rapidement sur les problèmes matériels immédiats que créerait une hausse subite de la fréquentation des restaurants : construire de nouvelles places prend plusieurs années, quels que soient les moyens mobilisés.

    Mme Marie Mesmeur

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    Ils ont le temps de mourir de faim.

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Nous nous retrouverions face à un problème de saturation plus important, qui empêcherait de nombreux étudiants boursiers d’accéder aux restaurants universitaires.

    Mme Marie Mesmeur

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    Donc on ne fait rien !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Je veux marquer ici une différence d’approche fondamentale. Je ne crois pas en un système qui ferait jouer cette solidarité au bénéfice des plus privilégiés. Je crois en la justice d’un système au sein duquel chacun contribue en fonction de ses moyens.

    M. Laurent Croizier

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    Exactement !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Je crois en la solidarité nationale au bénéfice des plus précaires.

    Mme Marie Mesmeur

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    Vous préférez la charité familiale !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Avec votre dispositif, les étudiants les plus aisés paieraient moins et les étudiants qui en ont le plus besoin auraient plus difficilement accès à l’offre de restauration. La mesure serait d’autant plus injuste que les autres activités perdraient leurs financements, à commencer par la réhabilitation et la construction de logements, dont les étudiants les plus précaires sont les premiers bénéficiaires.
    Pour autant, le système actuel est-il parfait ? Non. Est-il perfectible ? Oui, j’en suis convaincu.
    Vous évoquez la part grandissante des étudiants qui ont recours à l’aide alimentaire, voire qui sautent des repas pour des raisons financières. C’est une réalité, nous ne pouvons la nier.
    Deux axes, sur lesquels nous pourrions nous retrouver, guident l’action de mon ministère. D’abord, nous poursuivons de manière volontariste le déploiement de l’offre. Nous donnons la priorité à la construction de places en zone tendue pour diminuer les files d’attente et permettre à davantage d’étudiants de bénéficier d’un repas : 25 millions dans la loi de finances initiale pour 2024, reconduits dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2025. Nous renforçons le maillage territorial avec des structures conventionnées, pour mieux couvrir les zones peu denses.
    Ensuite, nous luttons contre le non-recours en renforçant les actions de communication pour que les étudiants non-boursiers qui en ont besoin accèdent au repas à 1 euro.

    Mme Marie Mesmeur

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    C’est faux !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Je vous soumets une piste à laquelle nous pourrions réfléchir. Certains amendements prévoient une meilleure progressivité de la tarification des repas : cela permettrait, à l’image de ce qui existe presque partout dans le secteur de la restauration collective, de disposer d’une tarification adaptée aux moyens de chacun et de respecter ainsi les principes de justice et d’efficacité sociale auxquels je suis attaché.
    En tout état de cause, c’est à la seule condition d’une concertation avec l’ensemble des parties prenantes, à commencer par les organisations étudiantes, que le dispositif pourra être réformé.

    Mme Marie Mesmeur

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    Elles sont toutes pour le repas à 1 euro !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Enfin, je rappelle que le logement est la première source d’inégalités parmi les étudiants. Comme l’a indiqué le premier ministre lors de son discours de politique générale, nous construirons 15 000 logements étudiants par an en mobilisant le foncier d’État, dossier sur lequel je travaille avec Valérie Létard.

    M. Matthias Tavel

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    On n’attendait rien et on n’est pas déçus !

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Florence Herouin-Léautey.

    Mme Florence Herouin-Léautey

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    Il est une réalité brutale et quotidienne que nous ne pouvons ignorer : la précarité étudiante atteint des niveaux alarmants. Dans notre pays, 44 % des étudiants doivent travailler pour pouvoir étudier, 11 % rencontrent de graves difficultés pour se loger, 34 % renoncent à des soins et 41 % présentent des symptômes dépressifs.
    La précarité, ce sont aussi ces 22 % de jeunes qui déclarent sauter des repas faute de moyens. Ce sont des files d’attente interminables –⁠ vous l’avez dit, monsieur le ministre – devant les distributions alimentaires. Ce sont des épiceries solidaires qui se sont ouvertes partout en France, sur tous les campus. Ce sont des étudiants qui peinent à se loger et vivent dans des conditions insalubres.
    La précarité de notre jeunesse, ce n’est pas une question abstraite qui se résumerait à de simples chiffres. Ce sont des vies sacrifiées, des ambitions brisées, des espoirs étouffés. Ce phénomène, symptôme de difficultés financières, met surtout en jeu les conditions de la construction de leur citoyenneté. Comment prétendre défendre l’égalité des chances quand tant de jeunes doivent choisir entre manger et étudier ? Cette situation inacceptable et injuste est évitable. C’est une question de choix politique : investir dans l’avenir et croire en sa jeunesse ou favoriser une logique comptable de court terme ?
    Pendant la crise du covid-19, nous avons vu à quel point des dispositifs exceptionnels, comme le repas à 1 euro, permettaient à des milliers d’étudiants de tenir bon. Cette mesure, qui a constitué une véritable bouée de sauvetage, a bénéficié à celles et ceux qui en avaient besoin.
    En effet, quand vous avez les moyens, vous ne fréquentez que peu les restaurants universitaires ; quand vous avez beaucoup de moyens, vous n’étudiez que trop peu dans les universités publiques ! (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NFP et EcoS. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.) Je dis cela parce que je me doute qu’on nous resservira le mythe des étudiants fortunés qui viendraient grever le budget en abusant du repas à 1 euro –⁠ une façon de dépeindre un monde de fiction loin des réalités. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Mme Marie Mesmeur applaudit également.)

    M. Vincent Jeanbrun

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    Cette mesure coûterait 90 millions par an !

    Mme Florence Herouin-Léautey

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    Depuis la crise du covid, les besoins alimentaires ne se sont pas taris –⁠ bien au contraire – et la demande, toujours croissante, dépasse désormais les moyens des associations étudiantes, pourtant largement mobilisées. Je veux ici saluer leur action et les en remercier. (Mêmes mouvements.)
    Cette situation doit nous indigner mais surtout nous mobiliser : s’alimenter n’est pas un privilège, mais une nécessité. Il s’agit d’un enjeu de santé publique. Les bénéfices d’une alimentation saine ne sont plus à démontrer : meilleure santé physique, meilleure concentration, meilleurs résultats académiques et, à terme, meilleure insertion professionnelle et sociale. En investissant dans l’alimentation des étudiants, nous investissons dans leur réussite.
     
    Cette loi représente un investissement de 30 millions d’euros pour les Crous, pour les étudiants, pour la jeunesse. Soutenir nos étudiants, c’est soutenir l’avenir de notre pays.
    Dois-je vous rappeler que nous attendons encore la réforme du système des bourses ? Que les maigres revalorisations ne sont pas suffisantes ? Que notre jeunesse, contrairement à celles de bien des pays européens –⁠ l’Allemagne, le Portugal, les Pays-Bas, la Suède, pour ne citer qu’eux –, ne bénéficie pas d’un revenu minimum ni même d’une allocation d’autonomie ?
    Et pendant que nous, socialistes, proposons cet investissement utile à la vie étudiante, le gouvernement retire, par amendement au Sénat, 8 millions d’euros des budgets qui lui sont consacrés. Il est regrettable que s’illustre ainsi, aujourd’hui encore, la différence criante qui oppose nos deux visions pour la jeunesse.
    En dix ans, le nombre d’étudiants est passé de 2,4 millions à plus de 3 millions, soit une augmentation de près de 25 %. Réjouissons-nous de ce que l’enseignement supérieur se démocratise, qu’il ne soit pas réservé à celles et ceux dont les parents ont eu la chance d’en bénéficier, qu’il rompe avec les déterminismes sociaux et qu’il soit le lieu d’une mixité sociale dont la richesse est inestimable ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC. –⁠ M. Jean-Claude Raux applaudit également.) Cette explosion démographique dans l’enseignement supérieur doit être une fierté nationale, une réussite de la République. Il ne faut pas qu’elle se transforme en fardeau.
    En instaurant le repas à 1 euro pour tous les étudiants, nous affirmons que la solidarité n’est pas un vain mot, que chaque jeune, à l’âge où il entre dans la vie adulte, où il fait l’expérience de l’autonomie et parfois d’une indépendance qu’il n’a pas choisie, a droit à des conditions de vie dignes pour construire son avenir. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.)
    Nous affirmons que la République ne doit laisser personne de côté, qu’aucun étudiant ne doit avoir à choisir entre se nourrir et réussir ses études. Derrière chaque repas sauté, derrière chaque étudiant qui abandonne faute de moyens, c’est une part de l’avenir de notre pays qui s’éteint.

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Bravo !

    Mme Florence Herouin-Léautey

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    Je vous appelle à voter cette proposition de loi avec le sourire, non seulement parce qu’elle est juste mais parce qu’elle est nécessaire. La jeunesse nous regarde, ne la décevons pas, soyons ensemble à la hauteur de ses ambitions ! (Mmes et MM. les députés du groupe SOC se lèvent et applaudissent. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.)

    M. Aurélien Rousseau

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    Bravo !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Vincent Jeanbrun.

    M. Vincent Jeanbrun

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    La précarité étudiante est une réalité que personne ne peut nier, qui met en jeu la dignité de notre jeunesse. Que de trop nombreux étudiants sautent leurs repas faute de moyens constitue un drame dans notre beau pays. Cependant, à la détresse de notre jeunesse étudiante, vous répondez par une proposition de loi à laquelle nous ne pouvons souscrire, pour des raisons à la fois philosophiques et pratiques.
    Vous constatez qu’exception faite des étudiants boursiers, seul un faible nombre d’étudiants en situation précaire recourent à l’aide qui leur est déjà accordée sous la forme de repas à 1 euro.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Ah tiens !

    M. Vincent Jeanbrun

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    Mais –⁠ c’est là que commencent nos désaccords – plutôt que de vous intéresser aux causes de ce taux important de non-recours et de tâcher d’y apporter une solution, vous en tirez la conclusion qu’il faudrait généraliser un régime aujourd’hui dysfonctionnel.

    Mme Marie Mesmeur

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    Il faut donc réserver l’aide aux boursiers ? C’est comme ça, c’est normal ?

    M. Vincent Jeanbrun

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    Aux termes de votre proposition, tout le monde y aura droit, les étudiants précaires aussi. Nous vous l’accordons, c’est une manière de régler le problème.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Merci !

    M. Vincent Jeanbrun

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    Mais nous y voyons quelques inconvénients. En premier lieu, vous appliquez un tarif préférentiel unique à des étudiants aux moyens très disparates, ce qui est, d’une part, inutilement coûteux, d’autre part, en contradiction avec l’objectif d’équité et de justice sociale qui devrait guider la loi.

    Mme Marie Mesmeur

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    Tous les étudiants sont pauvres dans votre système !

    M. Vincent Jeanbrun

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    Comment trouver normal qu’un étudiant privilégié bénéficie des mêmes aides qu’un étudiant boursier ? À cet égard, je m’étonne que le président Hollande ici présent, qui déclarait ne pas aimer les riches, ait consenti à signer cette proposition de loi qui leur fait, somme toute, un beau cadeau.

    Mme Dominique Voynet

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    Il a bien fait !

    M. Arthur Delaporte

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    C’est pitoyable !

    M. Vincent Jeanbrun

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    Ensuite, nous vous faisons remarquer que les Crous servent déjà à l’ensemble des étudiants des repas à un prix très inférieur à leur coût réel. Les étudiants non-boursiers paient ainsi leur repas 3,30 euros, une somme très inférieure à sa valeur réelle de plus de 8 euros.
    Nous, membres du groupe Droite républicaine, préférerions nous pencher d’abord sur la mauvaise connaissance du dispositif actuel, sur la complexité administrative que présente la procédure de création du dossier, sur la lourdeur de son instruction par les services, sur l’absence de Crous près du lieu de formation et de résidence des jeunes.
    Telles sont les difficultés qu’il faudrait s’atteler à résoudre pour aider nos étudiants. Nous croyons aux vertus d’une politique d’aides ciblées en faveur des plus fragiles. Nous ne voulons pas l’étendre à tous : nous voulons la rendre efficace !
    Nous nous opposerons donc à ce texte démagogique, qui propose une réponse facile, coûteuse et mal calibrée au problème réel de la précarité alimentaire étudiante. (M. Charles Sitzenstuhl applaudit.)

    M. Arthur Delaporte

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    Et c’est le parti de Bruno Retailleau qui s’exprime !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Claude Raux.

    M. Jean-Claude Raux

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    Deux ans après, il nous est accordé une seconde chance. Nous pouvons faire un pas, sans doute pas décisif –⁠ car il reste beaucoup à faire s’agissant du logement, des bourses, de l’accès aux soins – mais au moins symbolique contre la précarité étudiante, après tant de débats, d’alertes, de manifestations et parfois de vrais drames.

    M. Laurent Croizier

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    Ce n’est pas symbolique !

    M. Jean-Claude Raux

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    La généralisation du repas à 1 euro est une nécessité quand 26 % des jeunes de 18 à 24 ans vivent sous le seuil de pauvreté ; quand par manque d’argent, plus d’un étudiant ou d’une étudiante sur trois –⁠ plutôt deux sur trois dans certains territoires ultramarins – affirme avoir déjà sauté un repas ; quand enfin 20 % des étudiants ont recours à l’aide alimentaire. Ce texte constitue une réponse immédiate à la pauvreté des étudiants et des étudiantes, qui s’accroît sans que soient prises les mesures qui s’imposent.
    On nous fait trop souvent cette réponse : personne n’a jamais fait autant que les derniers gouvernements pour les étudiants. Allons donc le demander à tous ces jeunes qui attendent dans les files de distribution alimentaire, à celles et ceux qui sont forcés de travailler en plus d’étudier : leur vie et leurs études sont-elles plus faciles depuis l’élection Emmanuel Macron ? Évidemment, la réponse est non.
    Le budget défendu par le gouvernement Bayrou ne risque pas d’arranger quoi que ce soit puisqu’il prévoit 850 millions d’euros de coupes dans le budget de l’enseignement supérieur, dont 8,3 millions dans le programme Vie étudiante. Encore un signal déplorable qui en dit long ses priorités !
    En espérant l’adoption du repas à 1 euro pour tous, je pense à toutes les étudiantes et tous les étudiants qui se sentent honteux d’être précaires, bénéficient de l’aide alimentaire, demandent l’aide des services sociaux ou n’osent pas la demander. Recevoir de l’aide ne devrait jamais susciter de honte. On ne répétera jamais assez à ces jeunes qu’ils et elles ne sont pas responsables de leur précarité mais victimes d’une absence de justice sociale criante et insupportable.
    La généralisation du repas à 1 euro constitue précisément une réponse immédiate aux attaques dont l’université publique et le système de protection sociale font constamment l’objet, aux carences de l’État en matière de protection de la jeunesse.
    Cette mesure urgente doit ouvrir un nouveau chapitre de réformes structurelles contre la pauvreté des jeunes, parce que jeunesse ne devrait plus jamais rimer avec détresse et que la pauvreté ne doit plus faire office de rite initiatique pour une partie des jeunes de ce pays. Certaines et certains, bien trop nombreux, n’en sortent pas indemnes.
    La généralisation du repas à 1 euro est le minimum que nous devons à notre jeunesse. C’est pourquoi le groupe Écologiste et social plaide pour un investissement conséquent en faveur des Crous, qui doivent disposer des moyens d’assurer leurs missions, notamment pour appliquer cette mesure ; pour une réforme globale du système de bourses, promise et surtout attendue depuis trop longtemps ; pour le respect et le renforcement des plans de construction des logements des Crous ; pour en finir avec les clichés relatifs à l’assistanat et miser sur la confiance et l’avenir, grâce à une garantie d’autonomie pour chaque jeune.
    Le combat des syndicats étudiants, les alertes et les actions des associations étudiantes qui luttent contre la précarité ont rendu ce texte possible. Je tiens à saluer le travail et l’abnégation de Mme la rapporteure, Fatiha Keloua Hachi. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.)
    Le groupe Écologiste et social approuvera évidemment ce texte. Quand nous l’adopterons, rappelons-nous bien qu’en étendant les droits des étudiants, nous ne leur faisons pas un cadeau : nous faisons notre devoir.
    De grâce, qu’on nous épargne le couplet sur les étudiants les plus riches qui profiteraient indûment du tarif de ces repas ! Qui pourrait y croire, à moins d’être totalement déconnecté du monde réel ?

    M. Laurent Croizier

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    C’est pourtant le cas !

    M. Jean-Claude Raux

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    Pour évoquer d’un clin d’œil le texte qui suivra, l’ascenseur social est en panne depuis trop longtemps en raison des fortes inégalités d’accès à l’enseignement supérieur dont pâtissent les jeunes des classes populaires. Pour celles et ceux qui ont eu la chance d’y accéder, la précarité étudiante ne doit pas être un obstacle supplémentaire à leur réussite. Pour leur éviter de redescendre, à défaut de réparer l’ascenseur, acceptez au moins le principe du monte-plats, en rendant accessible à tous les étudiants le repas à 1 euro. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et GDR ainsi que sur quelques bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Croizier.

    M. Laurent Croizier

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    La précarité étudiante est un fléau. Les députés du groupe Démocrate refusent de s’y résoudre. Nous sommes fiers que la France soit le seul pays du monde à proposer une restauration à tarif social pour tous les étudiants.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Qu’est-ce qu’il raconte ?

    M. Laurent Croizier

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    Depuis 2019, le tarif du repas étudiant, fixé à 3,30 euros, reste inchangé, alors que son coût réel est compris entre 8 et 10 euros. Durant la crise sanitaire, c’est notre majorité qui a instauré le repas à 1 euro pour tous les étudiants. Après la crise, c’est encore notre majorité qui a maintenu ce repas à 1 euro pour tous les étudiants boursiers et tous les étudiants non boursiers se déclarant en situation de précarité. Pendant l’année universitaire qui vient de s’écouler, plus de 500 000 étudiants ont ainsi bénéficié du repas à 1 euro ; 43 millions de repas ont été servis au tarif maximum de 3,30 euros.
    Conformément à cette logique de lutte contre la précarité et à cette volonté de justice sociale, nous avons toujours apporté des réponses concrètes et justes aux étudiants.

    M. Marc Fesneau

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    C’est vrai !

    M. Laurent Croizier

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    Selon le groupe Démocrate, chaque euro dépensé doit avoir du sens, être utile.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Il faut donc laisser les étudiants crever de faim ? Ce n’est pas utile de manger ?

    M. Laurent Croizier

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    Dès lors, la seule et unique question à laquelle nous devons répondre dans ce débat est la suivante : le repas à 1 euro pour tous les étudiants permet-il de lutter contre la précarité étudiante ?

    Mme Marie Mesmeur

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    Eh oui !

    M. Laurent Croizier

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    La réponse nous semble négative pour trois raisons. D’abord, la généralisation du repas à 1 euro n’aurait aucun effet sur les étudiants identifiés par le Crous comme boursiers ou en situation de précarité, puisqu’ils y ont déjà accès.

    M. Alexis Corbière

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    C’est une blague ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Pourquoi avoir pris cette mesure pendant la crise sanitaire, alors ?

    M. Laurent Croizier

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    Ensuite, elle bénéficierait indifféremment aux étudiants issus de familles très modestes –⁠ je rappelle qu’ils y ont déjà droit – et à ceux qui viennent de familles plus aisées, sans tenir compte de la situation sociale de chacun.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Comme les fils Arnault, sans doute !

    M. Alexis Corbière

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    Elle bénéficierait à tous, au même titre que l’université, la police, l’école…

    M. Laurent Croizier

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    Souffrez que je fasse usage de ma liberté d’expression et de la pluralité des opinions.

    Mme la présidente

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    Je vous prie de laisser l’orateur s’exprimer.

    M. Alexis Corbière

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    L’argument est tout de même étrange !

    M. Laurent Croizier

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    Enfin, le coût de cette mesure s’élèverait à près de 90 millions d’euros par an, qu’il nous semble éminemment plus utile de consacrer à l’aide aux étudiants précaires ou à la construction et à la rénovation de résidences étudiantes, tant la question du logement étudiant est majeure.

    M. Inaki Echaniz

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    200 millions en moins au Sénat !

    M. Laurent Croizier

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    Au principe d’égalité que propose le groupe socialiste –⁠ la même aide pour tous –, nous préférons l’équité –⁠ l’aide la plus juste pour ceux qui en ont réellement besoin.
    C’est cette philosophie que défend notre groupe car de bonnes intentions ne suffisent pas à bâtir une politique juste et efficace. La proposition de loi manque sa cible en oubliant que l’enjeu est non d’offrir un repas à 1 euro aux étudiants des familles les plus aisées, mais de répondre efficacement à la précarité des étudiants les plus fragiles.
    Nous nous interrogeons aussi sur le principe de graver dans la loi un montant pour une tarification de restauration. Ce type de texte n’a pas vocation à souffrir du temps qui passe ni de la conjoncture économique… 1 euro, 2 euros, ces montants auront-ils encore du sens dans deux ans, cinq ans ou a fortiori dans dix ans ? Nous en doutons fortement. Aujourd’hui, l’enjeu est de défendre non un tarif, mais bien l’accès de chaque étudiant à une tarification qui tienne compte de sa situation sociale et qui réponde à la précarité dans laquelle il se trouve ! Voilà l’enjeu de justice sociale auquel nous souhaitons répondre aujourd’hui.
    Le groupe Démocrate défendra donc des amendements qui répondent aux principes d’équité et de solidarité qui nous sont chers. Nous avons ici l’occasion d’aller plus loin qu’en inscrivant une tarification dans la loi. Nous pouvons graver dans le marbre un principe fort. Les étudiants les plus précaires, les plus fragiles comptent sur nous ; ne manquons pas ce rendez-vous. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Béatrice Piron.

    Mme Béatrice Piron

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    Cette proposition de loi répond à une problématique essentielle : la lutte contre la précarité étudiante. C’est un enjeu majeur, les chiffres en témoignent : en France, près de 700 000 étudiants perçoivent une bourse sur critères sociaux et, en 2023, près de 22 millions de repas à 1 euro ont été servis, un dispositif vital pour les plus fragiles et mis en place depuis 2020 par la majorité présidentielle. Cependant, une politique publique ne peut se résumer à une intention louable. Elle doit s’appuyer sur des mesures efficaces et responsables répondant à des besoins réels sans compromettre l’équilibre global du système. La généralisation des repas à 1 euro à tous les étudiants, indépendamment de leur situation, soulève à cet égard plusieurs questions fondamentales.
    Tout d’abord, une telle mesure remet en cause un principe de justice sociale ; offrir le même avantage aux étudiants aisés et à ceux en situation de précarité revient à diluer les ressources disponibles. Ce choix, bien que généreux en apparence, réduirait l’efficacité du dispositif actuel, conçu pour cibler les plus vulnérables.
    Ensuite, l’impact budgétaire serait considérable puisque le coût de production d’un repas représente aujourd’hui entre 7 et 8 euros tandis que le prix de vente, déjà fortement subventionné, est de 3,30 euros, ce qui reste abordable.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Ça dépend pour qui.

    Mme Béatrice Piron

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    Étendre la mesure ferait exploser les coûts pour les Crous, alourdissant leur budget de plusieurs centaines de millions d’euros par an. Dans un contexte de finances publiques déjà tendu, serait-il raisonnable de faire peser une telle charge sur nos ressources collectives ? Et cette nouvelle pression financière aurait inévitablement des répercussions puisque, pour maintenir l’équilibre, les Crous pourraient être contraints de réduire leurs coûts de production, ce qui risquerait de compromettre l’intégration de produits bio ou locaux pourtant essentiels à une alimentation saine et durable, et largement plébiscités par les étudiants.

    M. Inaki Echaniz

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    Et qu’en sera-t-il de l’agence Bio ?

    Mme Béatrice Piron

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    De plus, dans un contexte où de nombreuses filières agricoles traversent des difficultés, il est essentiel de soutenir ces acteurs clés. Or la généralisation du repas à 1 euro risquerait d’exercer une pression excessive sur les prix de production et sur la rémunération des agriculteurs, mettant en péril leur viabilité à long terme. Il est donc impératif que l’équilibre entre la qualité des repas servis et une rémunération juste des producteurs soit au cœur de notre réflexion.
    Enfin, une telle extension de cette mesure risquerait de saturer les infrastructures des Crous. Aujourd’hui, le réseau compte près de 1 000 points de restauration qui ont servi 43 millions de repas pendant l’année universitaire 2023-2024, soit une augmentation de 23 % par rapport à l’année précédente. Si cette demande de repas continue d’augmenter, les étudiants les plus précaires pourraient pâtir de temps d’attente plus longs et d’une baisse de la qualité des services.
    Au lieu d’une généralisation coûteuse et inefficace, il est crucial de mieux cibler les aides afin de répondre aux besoins des publics les plus fragiles, par exemple dans le cadre de la réforme des bourses, véritable occasion pour corriger les effets de seuil et mieux soutenir les étudiants issus des classes moyennes.
    Il est également essentiel d’intensifier les efforts d’information et d’accompagnement car trop d’étudiants ignorent encore qu’ils peuvent bénéficier d’une tarification réduite dès leur inscription, notamment les étudiants précaires non boursiers. Ce déficit d’information est un frein que nous devons lever.
    Enfin, n’oublions pas que la France se distingue par son modèle unique en Europe : des repas complets proposés à 3,30 euros dans tous les sites de restauration des Crous depuis 2019. Ce système, qui combine accessibilité et qualité, est un motif de fierté.
    Pour toutes ces raisons, le groupe Horizons & indépendants considère que la proposition de loi, bien qu’animée de louables intentions, manque de réalisme. Elle risque de fragiliser notre système tout en accentuant les inégalités. Nous ne pouvons nous permettre de diluer nos ressources au détriment des plus précaires. C’est pourquoi notre groupe votera contre ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Salvatore Castiglione.

    M. Salvatore Castiglione

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    La précarité étudiante n’a pas été créée par la crise sanitaire, mais cette dernière l’a profondément aggravée. Avant le premier confinement, 20 % des étudiants vivaient déjà sous le seuil de pauvreté et 40 % dépendaient d’au moins une aide financière ; les confinements ont cessé depuis plusieurs années, mais des étudiants continuent de faire la queue devant les épiceries solidaires. En raison de l’inflation de ces dernières années, la hausse du coût de la vie des étudiants se poursuit, due notamment à l’augmentation des loyers, du prix d’internet et, bien sûr, de l’alimentation.
    Aujourd’hui, 65 % des étudiants interrogés déclarent avoir recours à l’aide alimentaire et plus d’un tiers sauter parfois un repas par manque d’argent. Ce chiffre, supérieur de sept points à la moyenne nationale, est le signe que malheureusement, la précarité alimentaire est structurellement ancrée dans la population étudiante.
    Dans un tel contexte, le groupe LIOT a toujours défendu le maintien du tarif du restaurant universitaire à 1 euro pour tous et non pour les seuls boursiers. En effet, la précarité étudiante est une double peine : non seulement les difficultés financières empêchent des étudiants d’accéder aux biens et services les plus élémentaires –⁠ se nourrir, se loger, se vêtir, se déplacer, se soigner ou encore se cultiver –, mais elles conduisent en outre la moitié d’entre eux à exercer une activité rémunérée, au détriment de leur réussite universitaire.
    Ainsi, en étendant à tous les étudiants le repas équilibré à 1 euro, nous ferons un pas en avant pour l’amélioration de leurs conditions de vie et donc pour leur réussite. Certains collègues prétendent qu’un repas à 3,30 euros n’est pas cher. Ils ont sans doute raison, mais pour un étudiant, payer 1 euro plutôt que 3,30 euros est loin d’être anecdotique : cela représente entre 70 euros et 140 euros d’économies par mois.
    En outre, la solution ici proposée a le mérite d’être plus simple que le dispositif actuel pour les étudiants non boursiers précaires, qui doivent aujourd’hui déposer un dossier en ligne sur le site du Crous, avec les justificatifs requis. De plus, une enquête de l’Ifop a montré que les étudiants connaissaient très mal les aides disponibles et leurs droits, ce qui en entrave significativement l’accès pour nombre d’entre eux.
    Selon, nous, cette disposition doit s’appliquer au moins le temps qu’intervienne une vraie réforme des bourses, laquelle tarde à venir depuis son annonce en 2022. Le gouvernement vient ainsi de repousser une réforme structurelle du dispositif à 2026 au lieu de 2024 comme prévu initialement, au terme d’une concertation au printemps 2025… En attendant, il faut agir ! Notre système boursier souffre de vraies lacunes : 60 % des étudiants en sont exclus et parmi eux, ceux issus des classes moyennes, que touche de plein fouet l’inflation. La priorité est de cibler les étudiants situés dans la zone de fragilité en révisant les critères et en luttant contre les effets de seuil. La situation des étudiants ultramarins doit aussi être particulièrement scrutée : certains sont parfois privés de bourse du fait de l’existence de primes d’installation dans certains départements et autres collectivités.
    Bien sûr, pouvoir accéder à un resto U n’est pas seulement une question de prix : les horaires et les inégalités territoriales sont aussi des problèmes sur lesquelles il faudra se pencher. De nombreux étudiants effectuent leurs études sur des sites éloignés ou ne disposant pas de structures de restauration universitaire. Ainsi, 750 points de vente sont assurés par les Crous aujourd’hui alors qu’il existe 3 500 établissements d’enseignement supérieur.
    Si cette mesure visant à rendre accessible à tous les étudiants le repas à 1 euro ne réglera pas tout, elle est indispensable dans l’attente d’une vraie réforme des bourses et de la restauration universitaire. Le repas étudiant à 1 euro, s’il n’est pas le remède miracle à la précarité pour tous les étudiants sera, nous en sommes certains, une bouffée d’air frais pour beaucoup d’entre eux. C’est pourquoi le groupe LIOT votera en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes LIOT, SOC, EcoS et GDR. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Soumya Bourouaha.

    Mme Soumya Bourouaha

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    Il y a deux ans, nous examinions dans cet hémicycle une proposition de loi semblable, visant à rendre accessible à tous les étudiants le repas à 1 euro. La discussion intervenait alors dans un contexte encore très marqué par la crise du Covid.
    La crise sanitaire a eu un impact majeur sur les étudiants : nombre d’entre eux ont perdu leur emploi et ainsi leur revenu, d’autres ont dû quitter leur logement pour retourner vivre chez leurs parents ; et nous avons tous en mémoire ces images de files d’attente interminables pour percevoir l’aide alimentaire, images qui nous ont tous heurtés. Eh oui, cela se passait en France, au XXIe siècle…
    Cette prise de conscience n’a pourtant pas suffi à convaincre les députés de la majorité et le texte a été rejeté à une voix près, au prétexte qu’il aurait bénéficié à l’ensemble des jeunes. Pourtant, l’universalité est un des fondements de notre système de protection sociale.
    Cinq ans après le début de la pandémie, la précarité en milieu étudiant n’a pas disparu. Les enquêtes de l’Observatoire de la vie étudiante montrent qu’au moins un quart des étudiants vivent en situation de précarité ; ce sont souvent ceux issus des classes populaires, les étudiants étrangers ou les plus âgés. Elle est telle que quasiment la moitié des étudiants exerce une activité rémunérée à côté de leurs études, ce qui constitue pourtant, on le sait, le premier facteur d’échec dans leur parcours académique.
    En septembre, les étudiants non boursiers ont subi de plein fouet l’augmentation des frais spécifiques de rentrée, dont une hausse de 2,9 % des frais d’inscription pour la première fois depuis 2018 et de 3 % de la CVEC –⁠ la contribution à la vie étudiante et de campus. De plus, les frais de logement, le plus grand poste de dépense des étudiants, ont augmenté de 2,5 %. Face à cette envolée des prix, les dépenses alimentaires deviennent la principale variable d’ajustement budgétaire des étudiants, alors même que 20 % d’entre eux ne mangent pas à leur faim et que 36 % sautent régulièrement un repas par manque d’argent.
    La mise en place d’un repas à 1 euro avait été généralisée à tous les étudiants en janvier 2021, durant la crise du covid. Cependant, malgré l’opposition de la grande majorité des organisations étudiantes, le tarif a été réévalué à 3,30 euros dès la rentrée suivante pour les non-boursiers. Le repas à 1 euro dans les restaurants universitaires est aujourd’hui restreint aux boursiers sociaux du Crous, ainsi qu’aux étudiants non boursiers en situation de précarité, sous réserve d’une évaluation sociale.
    Dans le cadre du débat sur le projet de loi de finances pour 2025, un amendement de Hendrik Davi visant à instaurer le repas à 1 euro a été adopté en commission. Malheureusement, le rejet de la première partie du PLF par le socle commun et l’extrême droite a empêché son examen en séance.
    En offrant à tous les étudiants des repas variés, équilibrés et de qualité à 1 euro, l’adoption de la proposition de loi défendue par Fatiha Keloua Hachi –⁠ dont je salue l’engagement et la détermination contre la précarité des jeunes (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS) – permettra d’améliorer concrètement leurs conditions de vie.
    Le dispositif a été précisé afin que ce tarif soit également appliqué dans l’ensemble des centres de restauration agréés par les Crous, pour des repas à emporter. La politique d’agrément des Crous permet aux étudiants éloignés d’un restaurant universitaire de bénéficier d’un repas complet à tarif social dans une structure privée, associative ou gérée par une collectivité. Alors que 72 % des restaurants universitaires ne sont pas ouverts le soir, que 85 % sont fermés le week-end et que 23 % des étudiants déclarent ne pas s’y restaurer en raison de leur éloignement, cela permettra d’accroître l’accès midi et soir à cette offre de restauration.
    Le groupe GDR votera évidemment en faveur de cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP et EcoS. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Hanane Mansouri.

    Mme Hanane Mansouri

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    Nous sommes appelés à examiner une proposition de loi visant à généraliser le repas étudiant à 1 euro. Le groupe UDR est opposé à ce texte, bien que l’intention dont il procède puisse sembler louable. Inadapté et déconnecté des réalités économiques et sociales, il porte atteinte à des équilibres essentiels pour les étudiants.
    Tout d’abord, rappelons que le système de restauration universitaire actuel propose des tarifs sociaux très avantageux. Un repas complet et équilibré est proposé pour 3,30 euros à tous les étudiants, tandis que les boursiers et ceux qui rencontrent des difficultés financières bénéficient du repas à 1 euro. Les repas des Crous restent ainsi parmi les plus accessibles, surtout dans le contexte inflationniste actuel. Pourquoi généraliser une mesure sans même vérifier si les dispositifs existants sont pleinement utilisés ?
    Une étude de l’Ifop sur la précarité alimentaire révèle que seulement 54 % des étudiants profitent des repas à 3,30 euros proposés par les Crous…

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Profitent ?

    Mme Hanane Mansouri

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    …et que seuls 13 % les évitent pour des raisons financières. Cela indique clairement que le problème ne trouve pas sa source dans le coût mais, peut-être, dans une insuffisance de la communication ou dans une méconnaissance des aides existantes. Avant de baisser encore davantage les tarifs, ne devrions-nous pas d’abord nous assurer que tous les étudiants connaissent ces dispositifs ?
    Nous ne pouvons non plus ignorer les conséquences qu’une telle mesure aurait sur les producteurs agricoles et les éleveurs français.

    M. Jean-François Coulomme

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    Pas du tout !

    Mme Hanane Mansouri

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    Ces hommes et ces femmes, qui travaillent sans relâche pour nourrir la nation, font face à une précarité croissante. Créer une distorsion supplémentaire entre le prix réel des denrées alimentaires et leur coût pour les étudiants en augmentant encore le soutien public serait non seulement injuste mais aussi irresponsable. Rémunérer à leur juste valeur ceux qui produisent notre alimentation doit rester une priorité.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    On est tous d’accord là-dessus !

    Mme Hanane Mansouri

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    Cette proposition de loi ne s’inscrit pas dans cette logique.
    Notre opposition à ce texte ne signifie pas que nous devons rester sourds aux difficultés des étudiants. Notre groupe est pleinement conscient de leur situation. Nous avons d’ailleurs proposé, dans le cadre de la discussion du PLF, la suppression de la CVEC, qui est un véritable impôt sur les étudiants.
    Plutôt que d’alourdir le poids de l’État, nous proposons une alternative réaliste et plus juste : le ticket-restaurant étudiant, une idée portée depuis 2004 par le syndicat étudiant Union nationale inter-universitaire (UNI). (« Ah ! » sur divers bancs.) Ce dispositif fonctionnerait sur le modèle des titres-restaurant d’entreprise. L’étudiant achèterait au tarif actuel des repas des Crous –⁠ 1 euro pour les boursiers, 3,30 euros pour les autres – un ticket qui aurait une valeur marchande de 6,60 euros.
    L’État subventionnerait la différence entre valeur marchande et prix d’achat du ticket, lequel pourrait être utilisé pour faire des courses ou se restaurer dans le secteur privé.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    C’est vrai qu’on mange sainement, dans les kebabs !

    Mme Hanane Mansouri

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    Je ne doute pas qu’à leur âge, les étudiants sachent se nourrir de façon équilibrée. Ce système présente plusieurs avantages. D’abord il est gage d’équité entre étudiants, qu’ils soient dans une grande ville universitaire ou dans une formation délocalisée, qu’ils aient facilement accès à un restaurant universitaire ou non. Il offre de plus de la flexibilité car il permettrait aux étudiants de choisir où se nourrir en fonction de leurs contraintes et de leurs préférences. Enfin, il est économiquement soutenable puisqu’il maintiendrait le coût pour l’État à son niveau actuel tout en renforçant l’autonomie des étudiants.
    La proposition de loi qui nous est soumise n’est pas la solution adaptée à la situation. Elle alourdit les charges publiques et propose une réponse simpliste à une problématique plutôt complexe. Le groupe UDR votera donc contre ce texte tout en appelant à des solutions mieux pensées, comme le ticket-restaurant étudiant proposé par l’UNI. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Clavet.

    M. Bruno Clavet

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    Si nous nous sommes engagés en politique, c’est bien sûr pour améliorer le quotidien des Français mais aussi pour préparer l’avenir des générations futures. Les décisions que nous prenons aujourd’hui seront des héritages que nous laisserons demain à nos jeunes, à leurs enfants et à leurs petits-enfants. Or, après sept ans de macronisme, l’héritage qui se profile est plutôt un fardeau, celui d’une dette abyssale de plus de 3 300 milliards d’euros.
    En cela, la politique budgétaire menée ces dernières années par Emmanuel Macron constitue une spoliation des générations futures. Et pour cause : le président de la République et ses gouvernements n’ont jamais eu l’ambition de préparer l’avenir. Ils ont seulement eu celle de gagner du temps. En effet, malgré 6 premiers ministres, 8 remaniements et 146 ministres, il n’a jamais été capable d’assurer aux jeunes Français un présent stable et de leur donner les moyens de nous succéder.
    Au contraire, dès son élection, en 2017, Emmanuel Macron a baissé les aides personnalisées au logement (APL), mettant les loyers devenus exorbitants hors de portée des étudiants. Dans le même temps, les frais de scolarité se sont envolés, l’accès aux soins est devenu un parcours du combattant et la précarité alimentaire a atteint des niveaux alarmants. En effet, même la satisfaction du besoin vital de se nourrir n’est plus garantie en France puisque plus d’un tiers des étudiants déclarent sauter régulièrement un repas. Nous avons tous en tête ces images de files d’attente devant les distributions alimentaires, comme si l’on était un pays en pleine crise humanitaire et non la septième puissance mondiale. Le quotidien d’un étudiant est donc fait d’arbitrages constants entre se soigner ou payer son loyer, entre payer son loyer ou, tout simplement, manger. Voilà le bilan de la start-up nation macroniste, qui n’a de leçon de progressisme à donner à personne étant donné ce qu’elle a produit.
    La proposition de loi visant à instaurer le repas à 1 euro pour tous les étudiants est intéressante puisqu’elle répond à une urgence sociale. Mais, pour remettre honnêtement les choses dans leur contexte, la mesure que vous présentez, chers collègues socialistes, est un pansement sur une plaie que vos propres politiques ont contribué à ouvrir. Car, pendant le quinquennat de François Hollande,…

    M. François Hollande

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    Ça faisait longtemps !

    M. Bruno Clavet

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    …vous avez laissé se dégrader la situation des étudiants. En conséquence, même si nous soutenons votre proposition de loi, nous n’oublions pas que vous faites davantage partie du problème que de la solution.
    Mais qu’importe ! C’est l’intérêt des Français, et en particulier celui des étudiants, qui nous mobilise aujourd’hui. Dans cet esprit, nous allons proposer des amendements destinés à équilibrer la proposition de loi. L’un vise à instaurer un repas à 1 euro pour les étudiants boursiers ou en situation de précarité et un repas à 2 euros pour les autres. L’objectif est de préserver un avantage pour ceux qui ont le plus besoin d’un soutien financier et d’éviter un engorgement des Crous.
    Un autre amendement vise à réserver le tarif le plus bas aux étudiants français, européens ou issus de pays extra-européens avec lesquels la France a signé des accords en matière d’enseignement supérieur.

    Mme Marie Mesmeur

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    Et revoilà la préférence nationale !

    M. Bruno Clavet

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    Il nous semble normal qu’il bénéficie à ceux qui ont un lien avec la France et non à ceux qui viennent simplement pour profiter des aides qu’elle dispense. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Applaudissements en réponse sur les bancs des groupes RN et UDR.)
    Je présenterai également un amendement qui étend le bénéfice de la mesure aux étudiants en brevet de technicien supérieur (BTS) vivant hors des villes universitaires –⁠ qui semblent être les grands oubliés de cette proposition de loi –, comme ceux inscrits au lycée Condorcet de Lens, dans ma circonscription.
    Nous espérons que vous serez dans la même logique constructive que nous et voterez ces amendements. En effet, comme vous pouvez le constater, nous ne sommes pas sectaires puisque nous ajouterons nos voix aux vôtres. J’espère que cela n’empêchera ni François Rebsamen ni Éric Lombard de trouver cette proposition de loi respectable une fois qu’elle aura été adoptée grâce au Rassemblement national. Notre soutien est d’autant plus déterminant qu’une mesure identique avait été rejetée en 2023 à une voix près, à cause de l’opposition des macronistes. Cela montre bien que, quand on veut défendre des avancées sociales, mieux vaut croiser la route des députés du Rassemblement national que ceux qui soutiennent Emmanuel Macron. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)
    Puisque je parle d’avancées, je rappelle que le Rassemblement national, sous l’impulsion de Marine Le Pen et de Jordan Bardella, a construit un programme en faveur des étudiants qui vise à leur redonner des raisons de se projeter avec optimisme dans l’avenir. Nous proposons de prendre à bras-le-corps le sujet de leur santé mentale. Nous leur proposons la gratuité des transports aux heures creuses.

    M. Jean-François Coulomme

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    Avec quel argent ?

    M. Bruno Clavet

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    Nous souhaitons également faciliter leur accès à un logement décent à un prix abordable en donnant la priorité aux étudiants français, européens et issus des pays extra-européens avec lesquels nous avons des accords. Enfin, nous proposons d’exonérer d’impôt sur le revenu les jeunes de moins de 30 ans et d’impôt sur les sociétés les entreprises qu’ils créent.
    En résumé, le Rassemblement national votera cette proposition de loi et souhaite aller plus loin avec les mesures que je viens d’exposer. Le Rassemblement national fixe un cap clair : rompre avec toutes les années d’immobilisme pour offrir aux étudiants français les moyens de se nourrir, de s’épanouir et de se construire ainsi que pour leur donner des raisons de croire à nouveau en l’avenir. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Graziella Melchior.

    Mme Graziella Melchior

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    Qui n’a pas en mémoire les images de ces files de jeunes attendant une aide alimentaire ? C’est bien pour faire face aux difficultés des étudiants qu’en 2020, au plus fort de la crise du covid, le gouvernement a déployé un plan de soutien sans précédent pour lutter contre la précarité, garantir la continuité pédagogique, maintenir le lien social et accompagner les plus fragiles.
    Naturellement, les difficultés économiques ont affecté en premier lieu le poste de dépense incontournable de l’alimentation. En réponse, dès la rentrée de septembre 2020, le gouvernement a mis en place un repas à 1 euro pour tous les étudiants, dans tous les Crous. Pleinement consciente d’une précarité étudiante structurelle, la majorité d’alors a souhaité que cette mesure d’urgence soit pérennisée pour tous les étudiants boursiers, sans aucune démarche de leur part, et pour tous les non-boursiers en difficulté qui en font la demande auprès de leur Crous.
    Nous avons défendu cette mesure, nous l’avons obtenue et nous en sommes fiers.

    Mme Marie Mesmeur

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    C’est vous qui l’avez annulée, aussi !

    Mme Graziella Melchior

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    Après cinq ans de mise en œuvre, nous pouvons constater que ce dispositif atteint sa cible. Les Crous ont en effet connu une forte augmentation de la fréquentation de leurs espaces de restauration. Ainsi, au cours de l’année universitaire 2022-2023, plus de 19 millions de repas à 1 euro ont été servis, soit 10 % de plus que l’année précédente. Dans le même temps, le nombre de repas servis à des étudiants précaires non-boursiers a triplé. Cela démontre que l’information sur ce dispositif a bien circulé.
    Actuellement, outre ce repas à 1 euro toujours accessible aux mêmes conditions, un repas complet est délivré à tous les autres étudiants, sans condition de ressources, pour 3,30 euros –⁠ un tarif dont vous conviendrez qu’il est peu élevé. Ce prix est gelé depuis 2019, malgré l’inflation et alors que le coût moyen de production d’un repas se situe entre 7 et 9 euros. Par ailleurs, en 2023, nous avons adopté la loi Levi, qui vise à favoriser l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré. Elle prévoit notamment une aide financière pour les quelque 100 000 étudiants qui se trouvent dans une zone ne comportant pas de restaurant universitaire.
    Les gouvernements successifs ont également pris leurs responsabilités. Je vous remercie, monsieur le ministre, de vous être battu pour obtenir des augmentations dans le budget 2025, malgré le contexte économique contraint que nous connaissons. Je pense notamment aux 42 millions d’euros de crédits nouveaux du programme Vie étudiante.
    Le projet de loi de finances pour 2025 maintient le repas à 1 euro pour les étudiants boursiers et non-boursiers en situation de précarité. Il augmente par ailleurs de 30 millions d’euros la subvention accordée au réseau des œuvres universitaires et scolaires pour répondre à la hausse de la fréquentation des restaurants universitaires et améliorer la qualité des repas.
    Enfin, je n’oublie pas qu’en 2023, la ministre chargée de l’enseignement supérieur, Sylvie Retailleau, a décidé de la plus forte revalorisation des bourses depuis dix ans. Toutes ont augmenté, en moyenne de 500 euros par an, et 35 000 étudiants supplémentaires ont été reconnus comme boursiers.
    Aujourd’hui, nous examinons une proposition de loi qui vise à mettre à disposition de tous les étudiants des repas à 1 euro dans les Crous, ce qui suscite chez moi plusieurs interrogations.
    Répond-elle aux files d’attente que j’évoquais au début de mon propos et cible-t-elle vraiment les étudiants qui sont dans la précarité ?
    Ouvrir ce droit à tous n’aura-t-il pas mécaniquement un effet négatif sur ceux qui en ont le plus besoin ? Cela ne provoquera-t-il pas des files d’attente plus longues et, à moyens constants, une baisse de la qualité des repas ?
    Les restaurants universitaires réussiront-ils à absorber le flux et à répondre à la hausse de la fréquentation ? Certains m’ont alertée à ce sujet.
    Quel message envoie-t-on à tous ces jeunes, y compris à ceux dont les parents sont aisés, en leur disant que l’on peut manger pour 1 euro au moment même où, nouvellement autonomes, il importerait qu’ils prennent conscience du coût de l’alimentation ? (« Quelle mauvaise foi ! » sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Pensons à nos agriculteurs, dont nous défendons les rémunérations et l’engagement pour fournir une alimentation toujours plus saine et de qualité.
    Enfin, cette généralisation est-elle raisonnable vu le contexte budgétaire contraint ?
    Les débats permettront peut-être de répondre à ces questions. Pour ma part, je proposerai un amendement visant à inscrire dans le code de l’éducation le droit à un repas à 1 euro pour tous les étudiants boursiers et pour les étudiants non boursiers précaires qui en feraient la demande.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie Mesmeur.

    Mme Marie Mesmeur

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    Dans les amphithéâtres, la misère a fait son nid : un étudiant sur cinq ne mange pas à sa faim. Je tiens à remercier le parti socialiste d’avoir inscrit à l’ordre du jour de sa niche parlementaire une proposition de loi visant à rendre accessible à tous les étudiants le repas au Crous à 1 euro. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) C’est la preuve que la solidarité est une meilleure vitrine que la retraite par points, que 32 milliards d’austérité –⁠ dont 630 millions pour l’enseignement supérieur – ou que le soutien à un gouvernement ouvertement compatible avec l’extrême droite !
    En 2023, à une voix près, l’Assemblée nationale avait rejeté cette proposition de bon sens. Je n’étais pas là ; j’étais en assemblée générale dans mon université, où nous réclamions non pas une faveur, mais un droit, vu que l’on apprend mieux le ventre plein. (Mêmes mouvements.)
    Aujourd’hui, je suis députée, le Parlement est recomposé et le Nouveau Front populaire, dont le programme contient cette mesure, est arrivé en tête.

    M. Théo Bernhardt et Mme Hanane Mansouri

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    C’est faux !

    Mme Marie Mesmeur

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    Collègues macronistes, quelles justifications hors-sol trouverez-vous cette fois-ci pour voter contre cette proposition de loi ? Que le repas au Crous à 1 euro existe déjà pour les étudiants les plus pauvres ? Mensonge : 90 % des étudiants précaires n’y ont pas accès ! Qu’ils n’ont qu’à bosser pendant leurs études ? Vous devriez pourtant savoir que le salariat concerne déjà un étudiant sur deux et est la première cause d’échec en licence. La société a besoin de nouvelles générations formées pour répondre aux grands enjeux de demain, à commencer par la planification écologique. (Mêmes mouvements.) C’est une chose de permettre aux jeunes d’accéder à l’université, c’en est une autre de leur permettre de réussir !
    Vous allez encore me dire que les tarifs du Crous sont déjà sociaux. Dans ce cas, pourquoi les banques alimentaires débordent-elles d’étudiants ? (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Je vais vous le dire : parce que les prix des repas sont trop chers et parce que, dans votre système, tous les étudiants sont pauvres, tous subissent l’inflation. Depuis 2017 et l’avènement d’Emmanuel Macron, le coût de la vie a grimpé de 30 % pour les étudiants ; il s’élève désormais à 1 200 euros par mois. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP.) Pensez-vous vraiment que les familles peuvent assumer un tel coût ? Tous les étudiants doivent payer leur loyer, leurs charges, leur matériel informatique, leurs vêtements, leur titre de transport, leurs frais d’inscription et leurs repas sans aide à la hauteur de leurs dépenses, puisque la bourse maximale est très loin du seuil de pauvreté.
    Le système de bourses est aussi archaïque qu’injuste. Entre 2020 et 2022, le nombre de boursiers a chuté de 73 000. Entre la réalité des étudiants et le mode de calcul des bourses, il y a un gouffre. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme la rapporteure et M. Benjamin Lucas-Lundy applaudissent également.) C’est le système entier de protection sociale qu’il faut refondre !
    J’ai aussi entendu qu’il ne fallait pas protéger tous les étudiants, au motif que certains auraient des parents riches. Je vais vous répondre avec pédagogie. Considérer un étudiant comme un « enfant de… » est infantilisant. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également. –⁠ Exclamations sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    M. Laurent Croizier

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    Vous voulez donner des bourses aux plus riches ? C’est ridicule !

    Mme Marie Mesmeur

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    Contrairement à vous, nous considérons l’étudiant comme ce qu’il est : un adulte émancipé, à part entière. Personne n’imaginerait moduler le montant des aides perçues par les retraités en fonction du revenu de leurs enfants ! Le principe d’universalité des droits est un principe de la République.
    Aujourd’hui, l’Assemblée nationale peut donner corps aux aspirations de la jeunesse. Partout, celle-ci se prononce majoritairement pour le repas au Crous à 1 euro. Collègues macronistes, serez-vous de nouveau du mauvais côté de l’histoire, comme lorsque vous avez imposé de relever l’âge de départ à la retraite, contre l’avis de 93 % des actifs ?
    Le repas au Crous à 1 euro coûtera seulement 90 millions d’euros, soit 0,4 % des bénéfices réalisés par Total en une année ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) La taxe sur les superprofits, que l’Assemblée a adoptée en octobre, rapportera 166 fois cette somme tous les ans !
    La vérité, c’est que vous préférez la charité familiale à la solidarité nationale, parce que cela impliquerait de faire payer les riches. Ne faites pas croire que l’État n’en a pas les moyens : c’est une question de choix ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ M. Benjamin Lucas-Lundy applaudit également. –⁠ Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    C’est vous qui avez décidé de dépenser des milliards d’euros en cadeaux fiscaux plutôt que d’en consacrer une infime partie à protéger les étudiants. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    C’est vous qui avez permis aux milliardaires français d’encaisser 2 000 milliards de dollars supplémentaires pour la seule année 2024, soit trois fois plus qu’en 2023, sans qu’une poussière de cette richesse ne soit partagée. (Mêmes mouvements.)

    M. Yoann Gillet

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    C’est quoi, le rapport ?

    Mme Marie Mesmeur

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    C’est vous qui gavez les riches et affamez les étudiants !

    M. Laurent Croizier

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    Populisme !

    Mme Marie Mesmeur

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    Je veux maintenant m’adresser aux étudiants. Bientôt, nous arriverons au pouvoir. Nous reconnaîtrons alors ce nouvel âge de la vie, la jeunesse, et nous le protégerons par la solidarité nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) De même qu’après la guerre, la création de la retraite avait permis de reconnaître aux plus âgés le droit au repos, nous mettrons en place une allocation d’autonomie universelle, au niveau du seuil de pauvreté, pour le droit d’étudier.

    M. Laurent Croizier

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    Arrêtez de leur mentir !

    Mme Marie Mesmeur

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    Pas de marquage au fer rouge en fonction de vos origines sociales. Pas d’humiliations paternalistes. Pas de contreparties capitalistes. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
    Étudiants, si cette mesure ne passe pas ici, vous seuls pourrez l’arracher. Unissez-vous ! Battons-nous ! Comme le disait Victor Hugo, « aucune armée n’est plus puissante qu’une idée dont l’heure est venue ». (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Aujourd’hui, la mobilisation ; demain, la justice. (Les députés du groupe LFI-NFP se lèvent pour applaudir. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.)

    Mme la présidente

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    La discussion générale est close.

    Discussion des articles

    Mme la présidente

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    J’appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles de la proposition de loi.

    Article 1er

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Théo Bernhardt.

    M. Théo Bernhardt

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    Je voudrais vous faire part de mon expérience.
    Il y a peu, j’étais étudiant et, pendant cinq ans, j’ai côtoyé d’autres étudiants –⁠ des amis, pour certains – qui n’avaient qu’un paquet de pâtes par semaine pour se nourrir. Pendant la crise du covid, j’étais étudiant et j’ai vu ces files d’attente interminables de centaines d’étudiants qui cherchaient désespérément un colis alimentaire pour se nourrir. Jamais les étudiants n’ont été aussi pauvres que sous la France de Macron. Vous entendre, chers collègues du bloc macroniste, vous autocongratuler montre votre déconnexion avec la réalité. (Mme Anna Pic s’exclame.)
    Cependant, tous les étudiants, même les non-boursiers, peuvent se retrouver en difficulté. Aussi baisser le prix du repas pour ces derniers tout en maintenant une faible différence avec les étudiants boursiers serait une mesure de justice sociale.
    Je tiens à saluer le travail des bénévoles étudiants qui se sont mobilisés, qui se mobilisent encore et qui donnent de leur temps à des associations et à des épiceries solidaires –⁠ comme les Agoraé.
    Sous la France de Macron, les étudiants ont faim : permettons-leur de manger. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Cette proposition de loi est en réalité profondément injuste. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et SOC.) C’est pour cette raison que je pense, comme d’autres collègues, qu’il ne faut pas l’adopter ; j’ai par ailleurs déposé plusieurs amendements.
    Pourquoi est-elle injuste ? Parce que dans une république sociale, on ne donne pas la même chose à tout le monde. (Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    Très bien !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Donner la même chose à tout le monde de façon indiscriminée, cela s’appelle de l’égalitarisme.

    M. Jean-François Coulomme

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    Votre politique, c’est de donner aux plus riches !

    Mme la présidente

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    Chers collègues, laissez parler l’orateur, s’il vous plaît !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Dans une république sociale, on donne à ceux qui ont besoin d’être aidés. C’est pourquoi nous avons un système de bourse et c’est pourquoi, en 2021, avec le président de la République, Emmanuel Macron, nous avons, après quelques mois durant lesquels il avait fallu aider tout le monde, fait le choix de cibler, pour le repas à 1 euro, les étudiants boursiers et ceux qui se trouvent en difficulté –⁠ ces derniers pouvant y accéder après discussion avec le Crous.
    La vérité, c’est qu’il y a de très nombreux étudiants qui n’ont pas besoin d’être aidés dans notre pays. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et SOC.) Si vous généralisez le repas à un euro, vous allez de fait léser les étudiants qui ont vraiment besoin d’être aidés. (Mêmes mouvements.) Eh oui, puisque vous allez donner indirectement de l’argent à des gens qui n’en ont pas besoin !
    L’autre difficulté, c’est la mise en œuvre de la mesure. Les Crous ne sont pas prêts. D’ailleurs, la rapporteure est passée très rapidement sur ce point. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et DR.)

    M. Vincent Jeanbrun

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    Discours de vérité !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Boris Vallaud.

    M. Boris Vallaud

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    Ce n’est pas la première fois que nous avons ce débat dans l’hémicycle. La dernière fois, il était concomitant avec le relèvement de l’abattement sur les transmissions. D’un côté, c’était injuste socialement, de l’autre, cela ne l’était pas ; d’un côté, c’était de l’assistanat, de l’autre, c’était la reconnaissance du mérite –⁠ celui d’être un héritier. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)
    Depuis plusieurs mois, nous continuons de fréquenter les banques alimentaires et les associations étudiantes –⁠ peut-être est-ce aussi votre cas – et nous n’avons pas vu se dégarnir les rangs des personnes sans rides faisant la queue devant les banques alimentaires, rangs qui s’étaient constitués pendant la crise de la covid.
    En réalité, faire justice à beaucoup, c’est faire injustice à personne. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et EcoS.) Je crois fondamentalement que ce vers quoi nous devrions revenir, c’est vers l’universalité : des droits pour tous plutôt que des allocations pour certains, avec des prélèvements sociaux et fiscaux permettant d’assurer cette redistribution. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. –⁠ Mme Soumya Bourouaha applaudit également.) Personnellement, cela ne me dérange pas que le fils de Bernard Arnault bénéficie d’un repas à 1 euro dès lors que son père paie les impôts qu’il doit à la République. (Plusieurs députés des groupes SOC et EcoS se lèvent pour applaudir –⁠ Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Rodrigo Arenas.

    M. Rodrigo Arenas

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    Ce débat est sain parce qu’il marque des appréciations différentes de la relation qui lie les parents à leurs enfants. De fait, nous ne sommes pas d’accord –⁠ peut-être n’avons-nous pas la même conception de la famille.
    Pour ce qui nous concerne, nous considérons qu’un étudiant majeur ne doit pas dépendre de ses parents –⁠ c’est la conception qui prévaut d’ailleurs en France. La République doit garantir cette émancipation et donner aux étudiants la liberté de choisir leur vie.
    Tel est l’objet de cette proposition de loi, qui vise à permettre aux étudiants d’étudier, de construire leur parcours de vie, de choisir leur orientation, tout simplement grâce à leur statut (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC), sans avoir à dépendre de la richesse de leurs parents ou, pire, du territoire dans lequel ils habitent, l’offre universitaire n’étant pas égale sur l’ensemble du territoire national –⁠ nous en avons eu la pire des démonstrations avec Mayotte.
    C’est pourquoi ce texte est une bonne chose. Tout étudiant, indépendamment de la famille dans laquelle il est né, indépendamment du territoire dans lequel il habite, doit pouvoir manger à sa faim et faire ce que la République attend de lui, à savoir son travail, étudier, sans avoir à trouver des petits boulots pour pouvoir suivre sa scolarité au sein de l’université française, qu’elle soit d’ailleurs publique ou privée –⁠ mais tenons-nous en au service public, sans évoquer le cas des agences qui se nourrissent des niches que vous avez créées pour leur permettre de bénéficier de fonds d’État, ce qui crée une inégalité de traitement entre les étudiants en fonction de l’établissement dans lequel ils se trouvent. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sylvain Berrios.

    M. Sylvain Berrios

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    Tout cela est assez piquant –⁠ c’est un débat à front renversé. Le président Vallaud nous explique tout le bien qu’il pense de l’universalité alors même que la gauche a combattu pendant longtemps l’universalité des allocations familiales !

    M. Hadrien Clouet

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    Pas tous ! Et Ambroise Croizat ?

    M. Sylvain Berrios

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    Il existe déjà un dispositif. Avec Vincent Jeanbrun, nous avons organisé nous-mêmes à l’université Paris-Est Créteil des collectes pour les étudiants et nous les avons informés de son existence. Un dispositif méconnu ne peut fonctionner. Vincent Jeanbrun l’a souligné tout à l’heure : nous devrions nous demander si nous avons suffisamment communiqué à son sujet.
    En manière de boutade finale, je rappellerai que, dans les collectivités que nous gérons, les élus de gauche demandent avant tout l’application systématique d’un quotient familial. Alors que c’est précisément ce que vous faites dans toutes les collectivités, vous voudriez aujourd’hui nous convaincre qu’il faut faire le contraire. En vérité, votre incohérence est totale, d’autant qu’au moment de voter le budget de la France vous allez nous expliquer qu’il faut voter la censure ! (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Croizier.

    M. Laurent Croizier

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    Intéressant débat, qui oppose les tenants de l’égalité et ceux de l’équité. J’ai en tête deux images bien connues, représentant des enfants montés sur des caisses derrière une palissade :…

    M. Hadrien Clouet

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    Lisez des livres au lieu de vous contenter d’internet !

    M. Laurent Croizier

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    …sur l’une, les caisses sont à la même hauteur et le plus petit ne peut voir par-dessus la palissade ; sur l’autre, des caisses de hauteurs différentes permettent à tous de voir au-delà.

    M. Rodrigo Arenas

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    Il faut surtout retirer la palissade !

    M. Laurent Croizier

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    Le débat sur l’universalisme est intéressant aussi. En accordant à tous le repas à 1 euro, vous le donnez aussi aux enfants de députés. Nos enfants doivent-ils avoir accès aux repas à 1 euro ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.) Pour ma part, je pense que non, car nous avons les moyens de payer un repas à son juste prix. (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)
    Comme beaucoup d’entre vous, je suis élu local. Or dans les villes de gauche, je ne vois pas le repas à 1 euro pour tous. (Mêmes mouvements.) Dans les villes de gauche, et dans d’autres villes, on pratique une tarification sociale : chacun paie selon ses besoins et ses capacités. Nous préférons l’équité à l’égalité. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR. –⁠ M. Sylvain Berrios applaudit également.)

    M. Emeric Salmon

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    La devise de la République n’est pas Liberté, Équité, Fraternité !

    Mme la présidente

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    Nous en venons à l’examen des amendements.
    Sur l’amendement no 18, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés, ainsi que par le groupe Droite républicaine, de demandes de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Laurent Croizier, pour soutenir l’amendement no 18.

    M. Laurent Croizier

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    L’enjeu de la précarité étudiante excède largement celui du repas à 1 euro pour tous,…

    Mme Ayda Hadizadeh

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    Commencez déjà par là !

    M. Laurent Croizier

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    …mesure sans effet sur les étudiants boursiers ou en situation de précarité puisqu’ils y ont déjà accès. Pour répondre au véritable enjeu, celui de la précarité étudiante, il convient de proposer une tarification qui tienne compte de la situation sociale de chacun. Notre amendement vise donc à inscrire dans la proposition de loi le principe d’une tarification progressive et sociale qui combatte la précarité et résolve le problème du non-recours des étudiants les plus précaires.
    Madame la rapporteure, que voulons-nous collectivement ?

    Mme Ségolène Amiot

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    Que plus aucun étudiant n’ait faim !

    M. Laurent Croizier

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    Que voulons-nous inscrire dans ce texte : le prix d’un repas ou, sans renoncer à l’objectif légitime que vous vous fixez, le principe plus grand, plus juste et plus ambitieux d’une tarification progressive et sociale pour tous les étudiants ? Par cet amendement, nous vous proposons la seconde solution. (Applaudissements sur les bancs des groupes Dem et EPR. –⁠ Mme Béatrice Piron applaudit également.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Chers collègues, ne vous fiez pas aux termes utilisés par M. Croizier : son amendement tend en réalité à dépouiller la proposition de loi de son contenu. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NFP, EcoS et GDR. –⁠ Exclamations sur plusieurs bancs des groupes EPR et DR.) En effet, il procède du postulat erroné que les étudiants précaires mangeraient tous dans les restaurants universitaires. Or d’après les chiffres de la DGESIP (direction générale de l’enseignement supérieur et de l’insertion professionnelle), 90 % d’entre eux n’ont pas accès au repas à 1 euro. C’est un constat. Je ne peux donc que rejeter votre amendement.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Au fond, ce que vous voulez, c’est le macronisme à vie : en 2017, en 2022, en 2027, jusqu’à la fin de l’humanité ! Navrée, mais quant à nous, nous voulons que les étudiants mangent. Je veux qu’en France tous les étudiants puissent manger ! Point barre. (Applaudissement sur les bancs des groupes SOC, LFI-NFP, EcoS et GDR.)

    M. Hadrien Clouet

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    Elle a tout dit !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    La question de la progressivité est essentielle. Déjà appliqué dans les cantines scolaires, ce système de tarification permettrait de maintenir les recettes des Crous tout en proposant des tarifs à la portée de chacun. Pour ces raisons, le gouvernement émet un avis favorable sur l’amendement.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Croizier.

    M. Laurent Croizier

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    Madame la rapporteure, votre réponse me surprend par son agressivité.

    M. Jean-François Coulomme

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    C’est votre politique qui agresse les Français !

    M. Laurent Croizier

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    D’un tel sujet, nous devrions pouvoir parler calmement, sincèrement et humblement : on a le droit d’avoir des désaccords, mais il convient aussi de faire des compromis. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. –⁠ Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.) Nous proposons d’introduire dans le texte plus de justice sociale.

    M. Rodrigo Arenas

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    Quelle honte !

    M. Laurent Croizier

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    Ne me dites pas que cela revient à dépouiller votre texte. Je ne peux pas croire qu’une députée défendant les valeurs socialistes puisse dire une chose pareille.

    Mme Dominique Voynet

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    Vous ne connaissez rien au socialisme !

    M. Laurent Croizier

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    Que voulons-nous ? S’agit-il seulement de faire l’affichage et de pouvoir dire demain, sur les réseaux sociaux, que vous avez fait adopter les repas à 1 euro ? Tout le monde sait ici qu’en l’état, le texte ne passera pas au Sénat. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Matthias Tavel

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    Et alors ?

    M. Rodrigo Arenas

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    On n’a qu’à se passer de l’Assemblée nationale !

    M. Laurent Croizier

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    Ce texte ne vous servira donc qu’à faire des images et des captures sur les réseaux sociaux ! (Les exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR vont crescendo.) Nous pensons, quant à nous, que le principe de progressivité et de tarification sociale a plus d’ampleur et d’ambition que l’inscription d’un simple prix dans la loi. (Bruit.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Vincent Jeanbrun.

    M. Vincent Jeanbrun

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    Au groupe Droite républicaine, nous soutenons l’amendement de notre collègue Croizier. Une fois de plus –⁠ Sylvain Berrios le dénonçait à juste titre –, nous assistons au « faites ce que je dis, pas ce que je fais. » J’ai regardé ce que fait une commune que vous connaissez bien : la Ville de Paris. Mme Castets, l’égérie du NFP, ne semble pas y avoir mené votre combat puisque la municipalité dispose d’un quotient familial et applique donc à la cantine, aux vacances scolaires, aux activités sportives, bref à tous les services publics facultatifs, une tarification tenant compte du revenu des familles. (M. Sylvain Berrios applaudit. –⁠ Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)

    Mme Dominique Voynet

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    Ils concernent des enfants mineurs !

    M. Vincent Jeanbrun

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    Nous ne le leur reprochons pas ; nous faisons de même dans toutes nos collectivités. Mais c’est incroyable qu’il revienne au bloc central de défendre l’idée de demander un peu plus aux riches qu’à ceux qui n’ont rien. Que d’hypocrisie et de démagogie : honte à vous ! (Huées sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Sabrina Sebaihi.

    Mme Sabrina Sebaihi

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    J’aimerais vraiment savoir dans quel monde vous vivez.

    M. Vincent Jeanbrun

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    Je parle de la ville de Paris !

    Mme Sabrina Sebaihi

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    N’avez-vous pas vu, devant les banques alimentaires, ces énormes files d’étudiants qui meurent de faim ? (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et LFI-NFP.) Alors que près d’un étudiant sur deux ne mange qu’un seul repas par jour dans notre pays, vous prétendez que votre dispositif fonctionne ! Sérieusement ? (Mêmes mouvements.)

    M. Vincent Jeanbrun

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    Il n’y a pas de quotient familial à la Ville de Paris ?

    Mme Sabrina Sebaihi

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    Tout le monde sait bien que le repas à 1 euro pour tous les étudiants ne réglera pas tous les problèmes. C’est un point de départ. Si, comme nous, vous estimez que les étudiants souffrent d’une grande précarité, faites des propositions pour améliorer leur situation au lieu de nous critiquer quand nous essayons de faire avancer les choses. C’est scandaleux ! (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et LFI-NFP. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.)
    Arrêtez de nous donner des leçons, après ce que vous avez fait pour les étudiants : Parcoursup,…

    M. Sylvain Maillard

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    Quelle démagogie !

    Mme Sabrina Sebaihi

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    …la discrimination, les inégalités, voilà votre programme ! Ce n’est pas le nôtre et nous voterons contre cet amendement. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS et LFI-NFP ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SOC. –⁠ Exclamations sur plusieurs bancs des groupes EPR et DR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Emmanuel Grégoire.

    M. Emmanuel Grégoire

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    Monsieur Jeanbrun, je vous confirme qu’il existe des tarifs par tranches de revenus à la Ville de Paris. Peut-être avez-vous oublié que la première tranche fixe le repas à 13 centimes d’euro et la deuxième à moins d’1 euro également ? Vous n’écoutez pas ce que nous disons et vous connaissez mal la vie des étudiants : un enfant est sous l’autorité de ses parents, un étudiant est libre. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs des groupes EcoS et GDR.)

    Mme Dominique Voynet

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    Voilà !

    M. Emmanuel Grégoire

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    Quant au système des bourses, allez voir les syndicats étudiants et les organisations représentatives de la jeunesse étudiante : tous dénoncent ses nombreux problèmes. Il y a des trous dans la raquette, des trappes à précarité qui concernent précisément les non-boursiers, notamment lorsque l’étudiant appartient à une famille qui rencontre des difficultés conjoncturelles ou que se produit une rupture du lien familial, affaire dans laquelle nous n’avons d’ailleurs pas à nous immiscer. C’est à ces difficultés que nous voulons remédier aujourd’hui. Mais merci de vous inquiéter de la cantine à Paris : elle va très bien ! (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur plusieurs bancs des groupes EcoS et GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-Victor Castor.

    M. Jean-Victor Castor

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    Nous nous égosillons en vain ; ce n’est pas un problème d’arguments. Comment accepter que des personnes qui refusent de taxer le CAC40 et qui ont supprimé l’impôt sur la fortune nous donnent des leçons ? (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS.) Il suffirait de taxer un tout petit peu les multimilliardaires pour que plus un étudiant n’ait à dépenser le moindre euro pour se nourrir. Telle est la réalité !

    M. Sylvain Maillard

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    Démagogie !

    M. Jean-Victor Castor

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    Les arguments que vous invoquez sont surréalistes : vous savez aussi bien que nous qu’il y a un malaise, un mal-être même, chez les étudiants et qu’ils n’arrivent pas à s’alimenter. Et vous brandissez encore des arguments qui ne tiennent pas la route. Taxez les milliardaires du CAC40 et nous réglerons bien des problèmes. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, LFI-NFP, SOC et EcoS. –⁠ Exclamations sur plusieurs bancs du groupe EPR.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    Mais voilà la solution ! On n’y avait jamais pensé !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Jean-François Coulomme.

    M. Jean-François Coulomme

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    Il est stupéfiant de vous voir adopter une posture sociale en critiquant une mesure de salubrité publique au motif que tout le monde en profiterait, quand tant d’étudiants font la queue à la banque alimentaire. Après tout, si vous ne souhaitez pas qu’un tel avantage profite aux riches, rien ne vous empêche de payer vous-mêmes à manger à vos enfants dans des restaurants de luxe.

    M. Vincent Jeanbrun

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    Où est l’argument ?

    M. Jean-François Coulomme

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    Quant à votre approche sociale, elle est tout de même douteuse : après sept ans de macronisme, le taux marginal d’imposition des grandes entreprises françaises est deux fois inférieur à celui des artisans et des petits commerçants. On ne voit pas où vous avez établi tant soit peu de justice sociale, même entre les entreprises. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP et sur plusieurs bancs des groupes EcoS et GDR.)

    M. Sylvain Maillard

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    Quel rapport avec le texte ?

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 18.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        160
            Nombre de suffrages exprimés                158
            Majorité absolue                        80
                    Pour l’adoption                25
                    Contre                133

    (L’amendement no 18 n’est pas adopté.)
    (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Graziella Melchior, pour soutenir l’amendement no 21.

    Mme Graziella Melchior

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    L’amendement que je vous propose vise à inscrire dans le code de l’éducation le droit des étudiants boursiers et des étudiants non boursiers en situation de précarité qui en font la demande à un repas à 1 euro. En l’inscrivant dans la loi, nous souhaitons soustraire ce droit aux aléas politiques.
    Cet amendement précise, en outre, que tous les étudiants sont informés de la tarification prévue par le réseau des œuvres universitaires lors de l’ouverture de ses droits. Je saisis d’ailleurs cette occasion pour remercier les services des universités chargés de l’identification des étudiants en situation de précarité, qui les orientent vers le Crous pour qu’ils y déposent une demande. Cinq ans après son déploiement, on constate que ce dispositif atteint sa cible et que la fréquentation des Crous a connu une forte augmentation.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Eh oui !

    Mme Graziella Melchior

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    D’après les chiffres de l’année universitaire 2022-2023, les derniers dont nous disposons, le nombre de repas à 1 euro à destination des boursiers a augmenté de 10 % cependant que triplait le nombre de repas à 1 euro destinés aux étudiants en situation de précarité qui en font la demande. Cela prouve que les étudiants ont été bien informés, qu’ils ont pu bénéficier du dispositif et que la mesure est bonne.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Je vais essayer de ne pas paraître agressive. Je ne suis pas agressive, mais passionnée, parce qu’ayant été professeure à l’université, je sais ce qu’est la précarité et je crois à ce que je fais.
    Il faudrait vous mettre d’accord au sein de la majorité :…

    M. Sylvain Berrios

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    Au NFP aussi !

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    …souhaitez-vous inscrire la mesure dans la loi, oui ou non ? Certains ne le veulent surtout pas, d’autres le réclament. Je tenterai de vous mettre d’accord en rappelant un précédent : un chiffre a déjà été inscrit dans la loi, celui de la CVEC.

    M. Vincent Jeanbrun

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    Les tarifs de piscine aussi !

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Le montant de la CVEC est inscrit dans le code de l’éducation. Ce sont les macronistes qui l’ont fait : 90 euros, indexés sur l’inflation.
    Votre amendement vise à inscrire le droit au repas à 1 euro dans la loi, mais pour certaines catégories d’étudiants seulement. Avis défavorable. (Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, LFI-NFP, EcoS et GDR.)

    M. Sylvain Maillard

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    Vous êtes donc contre les étudiants boursiers !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Le gouvernement est plutôt favorable à la proposition sur le fond, mais l’amendement vise à pérenniser le système actuel de tarification en le fixant dans la proposition de loi ; or cela relève du domaine réglementaire et non du domaine législatif. C’est donc pour des raisons purement légistiques que je vous demande de le retirer ; à défaut, l’avis sera défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Graziella Melchior.

    Mme Graziella Melchior

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    Je le maintiens parce que je veux que l’on sache que nous défendons le repas à 1 euro, dont nous voulons qu’il apparaisse dans la loi. (M. Gabriel Attal applaudit.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    Très bien !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bastien Lachaud.

    M. Bastien Lachaud

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    Cet amendement est une plaisanterie ! Vous voulez donner le repas à 1 euro aux boursiers, puis demander aux étudiants en situation de précarité de bien vouloir aller se signaler auprès du Crous pour bénéficier eux aussi du dispositif.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    C’est déjà le cas !

    M. Sylvain Maillard

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    C’est déjà comme ça !

    M. Bastien Lachaud

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    Ce que vous nous proposez, c’est d’admettre que certains étudiants sont en situation de précarité sans bénéficier d’une bourse. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Vous reconnaissez que le système de bourses dont vous êtes responsables ne fonctionne pas et maintient des étudiants dans la précarité.
    Ensuite, vous oubliez qu’il y a dans notre pays un grave problème de non-recours aux prestations sociales. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme la rapporteure applaudit également.) Rappelons que 35 % des gens éligibles au RSA n’en bénéficient pas parce qu’ils n’en font pas la demande ! Vous pensez réellement que des étudiants en situation de précarité, bien informés, vont aller se signaler auprès du Crous ? C’est une vue de l’esprit. Votre objectif est de nous enfumer en vidant la proposition de loi de sa substance. Nous voterons contre l’amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    (L’amendement no 21 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour soutenir l’amendement no 7.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il vise à affaiblir la portée de cette proposition de loi…

    M. Sébastien Peytavie

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    Au moins, c’est clair !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    …et à débattre. Il y a un élément qui n’a pas été rappelé depuis longtemps, même si certains orateurs l’ont évoqué lors de la discussion générale : ce que coûte à la collectivité un repas au Crous. Pour arrondir, nous dirons qu’il coûte 8 euros.

    M. Hadrien Clouet

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    Au hasard !

    M. Jean-François Coulomme

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    Quand il n’y a pas de homard !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il faut savoir que les étudiants, eux, paient 3,30 euros. Cela signifie que la collectivité prend déjà en charge 60 % du coût du repas !

    M. Hadrien Clouet

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    Alors que pour Laurent Wauquiez, on prend en charge 100 % !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Un repas à 3,30 euros, on peut tout de même considérer que c’est un tarif social. Contrairement à ce que vous laissez entendre, dans la situation actuelle, le prix que paie un étudiant pour un repas au Crous est donc déjà largement subventionné. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Marie Mesmeur

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    Pourquoi il y a des étudiants en situation précaire, alors ?

    M. Charles Sitzenstuhl

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    S’agissant du repas à 1 euro, je vous laisse faire la règle de trois : on ne serait plus très loin d’une prise en charge à 100 %.

    M. Emeric Salmon

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    À 87 % !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Pour répondre ensuite aux arguments qui ont été avancés, notamment par Rodrigo Arenas et Boris Vallaud, vous inversez en réalité la charge de la preuve ! (Mêmes mouvements.)

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Nous sommes au tribunal ?

    M. Charles Sitzenstuhl

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    En effet, ce que paie l’étudiant, c’est aussi, d’une certaine façon, la contribution qu’il apporte au coût total du repas. Quand l’étudiant boursier paie 1 euro, c’est une petite contribution dont vous souhaitez étendre le bénéfice à tous les autres, qui paient actuellement un peu plus –⁠ 3,30 euros. Si vous faites payer 1 euro à tout le monde, ceux qui devraient contribuer davantage, parce que leur situation financière et familiale est bonne, contribueront finalement moins. Ce n’est pas cela, la justice ! Ce n’est pas cela, une république sociale ! (Applaudissements sur les bancs du groupe EPR. –⁠ M. Vincent Jeanbrun applaudit également.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Je me pose une question : vos amendements sont-ils des blagues, monsieur Sitzenstuhl ? (Exclamations sur les bancs du groupe EPR.)

    M. Pierre Cazeneuve

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    Oh là là !

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Lisez les amendements de votre collègue ! Ils me paraissent un peu pernicieux. Je suis défavorable à celui-là, et j’aimerais que vous respectiez davantage les auteurs des propositions de loi en déposant des amendements un peu plus intéressants et constructifs. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    M. Thibault Bazin

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    Respectez-nous, vous aussi !

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Il fait des jeux de mots dans ses amendements ! À un moment, il faut savoir s’arrêter. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS. –⁠ Mme Florence Herouin-Léautey applaudit également.)

    M. Gabriel Attal

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    Vous sortez de votre rôle !

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    L’adaptation du tarif en fonction des ressources des étudiants pourrait rendre possible une tarification du repas inférieure à 1 euro. Fixer définitivement le plancher à 1 euro dans la loi serait donc contre-productif. Avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Rodrigo Arenas.

    M. Rodrigo Arenas

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    Notre collègue Charles Sitzenstuhl exprime un vrai désaccord de fond.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    C’est le clivage gauche-droite !

    M. Rodrigo Arenas

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    C’est d’ailleurs bien pour cela que nous ne siégeons pas sur les mêmes bancs. Pour notre part, nous pensons que la différenciation en matière d’effort national doit être mise en œuvre par l’impôt sur le revenu. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) À ce titre, nous pensons qu’une partie de la population française ne participe pas suffisamment à l’effort national ; or quand nous demandons que cet effort soit mieux réparti, vous votez contre !

    M. Pierre Cazeneuve

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    50 % des Français ne paient pas d’impôts !

    M. Rodrigo Arenas

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    Il me semble d’ailleurs que nous viendra du Sénat un impôt supplémentaire, qui s’appliquera aux tranches les plus hautes et sur lequel nous devrons nous prononcer. Nous parlons ici de l’université : par principe, tous les étudiants doivent y être traités de façon égalitaire ! Je trouve d’ailleurs assez cocasse que vous vous opposiez à cette manière de concevoir les repas étudiants alors que votre gouvernement, dans un passé pas si lointain, avait incité tant les fédérations de parents que les syndicats d’enseignants, les chefs d’établissement et les collectivités territoriales, à mettre en œuvre le petit-déjeuner gratuit pour tous les enfants, sans discrimination ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme la rapporteure et Mme Ayda Hadizadeh applaudissent également.)
    Notre conception idéologique de l’alimentation des élèves, cher collègue Charles Sitzenstuhl, ne fait aucune différence entre eux, qu’ils soient en maternelle, à l’école élémentaire, au collège, au lycée, mais aussi à l’université, où les étudiants ne doivent pas dépendre du revenu de leurs parents ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Madame la rapporteure, j’aurais pu faire un rappel au règlement, mais il est inutile de perdre du temps. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Je déplore le ton que vous avez utilisé pour me répondre.

    M. Vincent Jeanbrun

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    C’est clair !

    M. Sylvain Maillard

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    Mais oui !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    J’ai travaillé sur ce texte ; en outre, je suis rapporteur du budget de l’enseignement supérieur au sein de la commission des finances depuis deux ans, donc je connais bien la question –⁠ nous en avons d’ailleurs débattu en commission à l’automne. (Exclamations sur les bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) J’ai déposé des amendements, c’est vrai, pour atténuer la portée de votre proposition de loi, pour l’affaiblir. Je l’ai dit : je suis contre ce texte ! (Mêmes mouvements.) J’en ai le droit et comme le dit Rodrigo Arenas, le débat est passionnel parce qu’il illustre le clivage gauche-droite, qui existe encore !

    Mme Marie Pochon

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    C’est fini, le « en même temps » ?

    M. Benjamin Lucas-Lundy

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    Il n’a pas eu le mémo !

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il est donc normal que nous ayons ce débat. Mais, s’il vous plaît, madame la rapporteure, je ne vous ai pas agressée ni attaquée, et je regrette que vous traitiez mon travail parlementaire, qui est sérieux, de la sorte. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et HOR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Alexis Corbière.

    M. Alexis Corbière

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    Je n’interviendrai qu’une fois car je souhaite que l’examen du texte soit rapide, afin que la niche parlementaire de nos collègues socialistes puisse avancer. Il y a là un débat de fond : premièrement, nous ne parlons pas d’enfants dont les conditions sociales sont liées à celles de leurs parents, mais de jeunes –⁠ parfois salariés – en formation, dont l’existence matérielle, à un moment d’émancipation, ne doit pas dépendre du revenu de leurs parents. (« Exactement ! sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Mme Dominique Voynet applaudit.) C’est un premier principe philosophique auquel nous sommes attachés. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EcoS et LFI-NFP.)
    Deuxièmement, votre indignation me fait penser à quelque chose. Quand M. Bernard Arnault se fait agresser, il peut gratuitement faire appel à la police nationale, sans considération de ses revenus ; celle-ci poursuivra bien évidemment ses agresseurs.

    Mme Hanane Mansouri

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    Mais arrêtez avec ça !

    M. Alexis Corbière

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    De la même manière, si les enfants de M. Bernard Arnault vont à l’école publique, je ne suis pas favorable, quelle que soit sa rémunération, à ce qu’ils paient davantage que les autres, parce qu’il s’agit d’un service public.

    Mme Hanane Mansouri

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    Ça n’a aucun sens !

    M. Alexis Corbière

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    Le principe du service public, dont la logique est émancipatrice, est le suivant : c’est à travers l’impôt que chacun contribue à la nation. Le service public, ensuite, pratique des tarifs qui sont les mêmes pour tous, sans que le niveau de rémunération entre en compte. C’est le cas, par exemple, quand on envoie une lettre ou quand on prend le train. Et selon nous –⁠ c’est le principe qui préside à la proposition de loi –, le succès éventuel aux examens est lié aux conditions matérielles d’existence de l’étudiant, c’est-à-dire à la manière dont il se loge et se nourrit. Nous voulons, pour l’intérêt général de la nation, que tous aient la possibilité de réussir leurs examens ; pour ce faire, nous souhaitons élargir le principe de gratuité –⁠ ou, en l’occurrence, de quasi-gratuité – du service public à l’alimentation des étudiants, qui doivent pouvoir se nourrir décemment.
    Voilà donc le principe philosophique qui nous guide : quelles que soient les conditions matérielles d’existence de ses parents, chaque étudiant, qui paie des droits d’inscription à l’université –⁠ dont nous souhaitons d’ailleurs qu’ils soient les moins élevés possible –, doit pouvoir se nourrir pour 1 euro. Par conséquent, cessez d’agiter l’argument selon lequel une telle proposition serait inéquitable ! Je le répète : je suis favorable à des services publics qui ne coûtent pas plus ou moins cher selon votre rémunération. C’est cette conception que nous défendons et dont témoigne le texte de notre collègue. (Applaudissements sur les bancs des groupes EcoS, LFI-NFP, SOC et GDR.)

    (L’amendement no 7 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’amendement no 14, je suis saisie par le groupe Rassemblement national d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisie de deux amendements, nos 14 et 3, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à Mme Tiffany Joncour, pour soutenir l’amendement no 14.

    Mme Tiffany Joncour

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    Le prix d’un repas pour les étudiants non boursiers dans les restaurants universitaires s’élève actuellement à 3,30 euros. Généraliser le repas à 1 euro pour tous représenterait un surcoût de 90 millions par an, soit une dépense difficilement justifiable dans le contexte budgétaire actuel. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme Florence Herouin-Léautey

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    Mais c’est vital !

    Mme Tiffany Joncour

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    C’est pourquoi nous proposons un amendement équilibré et responsable, qui vise à réserver le repas à 1 euro aux étudiants boursiers et précaires, ceux qui en ont le plus besoin, tout en réduisant le tarif pour les autres à 2 euros. Cela représenterait une baisse significative par rapport au tarif actuel de 3,30 euros, tout en maintenant une gestion financière raisonnable.
    Introduire une telle distinction serait à la fois juste et réaliste, car cela permettrait de concentrer les ressources publiques sur les étudiants les plus en difficulté tout en réduisant significativement le coût du repas pour les autres. Investir dans notre jeunesse est essentiel, mais cela doit se faire avec discernement. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    M. Emeric Salmon

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    C’est du « en même temps » !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Graziella Melchior, pour soutenir l’amendement no 3.

    Mme Graziella Melchior

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    Depuis la rentrée 2020 et afin de lutter contre la précarité étudiante, accentuée par la crise sanitaire inédite du covid-19, qui a privé de nombreux étudiants de source de revenu, le gouvernement a instauré une tarification dite sociale, à hauteur de 1 euro, pour les repas distribués par les Crous aux étudiants boursiers. Face à la persistance de la crise sanitaire, son périmètre a été provisoirement étendu à tous les étudiants au deuxième semestre de l’année universitaire 2020-2021. À compter de la rentrée 2021, le dispositif a été recentré sur les étudiants boursiers ou en situation de difficulté financière.
    Aujourd’hui, le repas à 1 euro est accessible aux étudiants boursiers sans qu’aucune démarche ne soit nécessaire. Quant aux étudiants qui rencontreraient des difficultés financières, ils peuvent y accéder en suivant une démarche en ligne. Les autres étudiants, enfin, se voient proposer un tarif social de 3,30 euros pour accéder à un menu complet.
    L’objectif du texte est d’inscrire dans la loi la possibilité d’accéder à une offre de restauration dont le coût ne peut excéder 1 euro. Le présent amendement vise à préciser que le dispositif s’adresse aux boursiers et aux étudiants en situation de précarité, ce qui est déjà le cas en pratique. Il s’agit donc de pérenniser, dans le code de l’éducation, le dispositif existant des repas à 1 euro pour tous les étudiants boursiers et pour ceux, non boursiers, qui seraient en situation de précarité.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Inscrire dans la loi la distinction entre les étudiants boursiers et les autres nous pose problème. Avis défavorable à ces deux amendements, car nous sommes persuadés que l’universalisme est la seule réponse possible à la précarité alimentaire de nos étudiants. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et EcoS.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement sur ces deux amendements en discussion commune ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    D’une part, faire passer le tarif de 3,30 euros à 2 euros engendrerait une perte de revenu significative pour les Crous ; d’autre part, nous ne sommes pas favorables au fait de l’inscrire dans la loi, comme je l’ai expliqué tout à l’heure. Une telle mesure doit être prise par voie réglementaire : avis défavorable sur les deux amendements.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Rodrigo Arenas.

    M. Rodrigo Arenas

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    Le rapport de notre collègue Fatiha Keloua Hachi montre bien que 90 % des étudiants précaires n’ont pas accès au repas à 1 euro. En outre, je trouve assez curieux que nous ne parvenions pas à nous accorder sur l’égalité de traitement entre les étudiants en matière d’accès à l’alimentation alors que nous sommes tous d’accord pour que le péage des autoroutes soit au même prix pour toutes les voitures. Soyez un peu cohérents !

    M. Laurent Croizier

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    Oh là là !

    M. Rodrigo Arenas

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    Alors que prévaut un traitement égalitaire dans plusieurs services publics, par exemple celui de la santé, on établirait, pour l’accès à une alimentation correcte, des distinctions entre les étudiants ? Faites preuve de cohérence !
    De deux choses l’une : soit il y a une inégalité de traitement pour tout ce que l’État fait –⁠ or ce n’est pas le cas –, soit vous envisagez de voter ce texte qui prévoit, comme nous l’avons exposé, une mesure d’égalité entre les étudiants. Je vous invite à prendre le problème au sérieux : trop d’étudiants n’ont pas accès au repas à 1 euro, et cela met leurs études en péril. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Croizier.

    M. Laurent Croizier

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    Certains proposent de fixer le tarif à 1 euro ; d’autres, à 2 euros… Ces amendements sont intéressants, car nous voyons bien qu’inscrire un tarif dans la loi n’a absolument aucun sens ! (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Madame la rapporteure, vous avez repoussé ma proposition d’instaurer une tarification progressive et sociale. Pourtant, elle aurait permis à M. le ministre d’abaisser le tarif à 80 centimes pour les plus précaires et, le cas échéant, de le relever à 5, 6 ou 7 euros pour les plus aisés,…

    M. Jean-François Coulomme

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    Faites-le pour l’impôt sur le revenu !

    M. Laurent Croizier

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    …à l’image de ce qui se fait dans les cantines à Paris pour les tranches de revenus les plus élevées. Nous aurions été en mesure d’aider davantage ceux qui en ont véritablement besoin.

    Mme Marie Mesmeur

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    Ils en ont tous besoin !

    M. Laurent Croizier

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    Je regrette votre refus.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Pierre Cazeneuve.

    M. Pierre Cazeneuve

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    Monsieur Arenas, vous avez évoqué les petits-déjeuners gratuits dans les écoles. Or ce dispositif a été ciblé sur les établissements du réseau d’éducation prioritaire (REP) et du réseau d’éducation prioritaire renforcé (REP+). Vous avez pris cet exemple pour montrer que certaines prestations sont universelles.

    M. Rodrigo Arenas

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    C’est donc possible !

    M. Pierre Cazeneuve

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    En l’espèce, c’est faux. Je me permets donc de corriger votre propos.
    Pour notre part, nous avons une vision très simple de l’action sociale déployée par la puissance publique :…

    M. Hadrien Clouet

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    Pour être simple, elle est simple !

    M. Pierre Cazeneuve

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    …elle est efficace quand elle est ciblée. Les dispositifs non ciblés coûtent très cher et sont parfaitement inefficaces.
    Si l’on suit votre raisonnement, tout le monde, sans aucune différenciation, devrait toucher l’ensemble des prestations sociales, notamment l’APL et l’allocation personnalisée d’autonomie (APA). (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Vous voyez bien que c’est absurde. L’universalisme est, par définition, aveugle, donc non pertinent.
    Nous sommes partisans de la république sociale que mon collègue Sitzenstuhl a évoquée à plusieurs reprises : chacun contribue en fonction de ses moyens. Nous sommes très fiers d’appartenir à un pays où 50 % des actifs ne paient pas d’impôt sur le revenu et où l’impôt est extrêmement progressif. (Mêmes mouvements.) Notre pays est celui qui redistribue le plus au monde. Nous souhaitons que ceux qui le peuvent contribuent pour ceux qui ne le peuvent pas. Nous aidons ceux qui en ont besoin, de manière ciblée et intelligente.

    Mme Dominique Voynet

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    On dirait un cours à la fac Léonard-de-Vinci !

    M. Pierre Cazeneuve

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    Vous proposez de donner de l’argent à tout le monde, ce qui est complètement absurde. (Applaudissements sur les bancs des groupes EPR et sur quelques bancs du groupe Dem.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 14.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        153
            Nombre de suffrages exprimés                152
            Majorité absolue                        77
                    Pour l’adoption                23
                    Contre                129

    (L’amendement no 14 n’est pas adopté.)

    (L’amendement no 3 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Charles Sitzenstuhl, pour soutenir l’amendement no 8.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Il vise à supprimer l’alinéa 3 de l’article 1er, car il y est question des Crous. Madame la rapporteure, j’ai travaillé sur votre proposition de loi et, aux pages 13 et 14 de votre rapport, vous expliquez bien, en creux, que les Crous ne sont pas prêts à l’appliquer. Que vous a dit le Cnous à ce propos ? Je doute qu’il soit enthousiaste, car il voit bien les problèmes de gestion et les difficultés matérielles que risque de produire un afflux de personnes dans les restaurants universitaires.
    D’autre part, une hausse significative des budgets et un important recrutement d’agents publics seront nécessaires. Tout cela est évoqué très rapidement, toujours aux pages 13 et 14 de votre rapport. J’ai déposé le présent amendement pour que nous consacrions à ce sujet quelques minutes de débat.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Je vous concède que les Crous ne sont pas prêts à ce stade. (« Ah ! » sur les bancs du groupe EPR.) C’est pourquoi j’ai demandé, par amendement, un rapport sur la mise à niveau des Crous. Depuis quelques années, le nombre d’équivalents temps plein (ETP) qui leur est alloué par la loi de finances est gelé.
    Pour financer la proposition de loi, autrement dit pour mettre à niveau les Crous, il faut effectivement une somme importante : 30 millions d’euros par an. C’est le montant cité par le syndicat UN CGT Crous, qui nous a dit clairement : « Nous sommes sous l’eau, nous souffrons, mais si vous abondez les Crous en agents… » (M. Sylvain Berrios s’exclame.)
    Monsieur Berrios, nous avons aussi auditionné le Cnous et plusieurs directeurs généraux de Crous. Certes, les Crous ne sont pas prêts, mais cela ne signifie pas que l’on ne doit pas rendre accessible à tous les étudiants le repas à 1 euro. Il faut le faire dès à présent : il faut abonder financièrement tous les Crous de France pour qu’ils soient prêts rapidement, afin que les étudiants se nourrissent.
     
    Au demeurant, monsieur Sitzenstuhl, votre amendement ne porte pas sur ce sujet : il tend à empêcher les étudiants d’emporter le repas à 1 euro.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    Parce que les Crous ne sont pas prêts !

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Je ne suis pas d’accord avec l’amendement. Mon avis est donc défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Le fait de pouvoir emporter le repas proposé par le Crous poserait des problèmes logistiques et induirait des coûts additionnels par rapport à un repas pris sur place. Il y a donc une question de faisabilité de la mesure. En outre, celle-ci contreviendrait à l’objectif de réduction de l’impact environnemental des emballages de la restauration.

    M. Charles Sitzenstuhl

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    C’est un bon argument !

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Pour l’ensemble de ces raisons, nous sommes favorables à l’amendement.

    (L’amendement no 8 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 15.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    C’est un amendement rédactionnel, qui apporte une précision concernant les repas à emporter.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Pour les raisons que j’ai indiquées à propos de l’amendement précédent, notre avis est défavorable.

    (L’amendement no 15 est adopté ; en conséquence, l’amendement no 9 tombe.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Graziella Melchior, pour soutenir l’amendement no 4.

    Mme Graziella Melchior

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    Cet amendement de mon collègue Bertrand Sorre vise à compléter le dispositif proposé en inscrivant dans le code de l’éducation l’obligation pour les Crous d’informer les étudiants sur les tarifications possibles pour les boursiers et pour ceux qui rencontreraient des difficultés financières.
    Je vous prie de m’excuser, madame la présidente, je ne vous ai pas remerciée, et je n’ai salué non plus ni M. le ministre ni Mme la rapporteure.

    M. Sylvain Maillard

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    Précis et élégant !

    M. Thibault Bazin

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    C’est rare dans cet hémicycle !

    Mme la présidente

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    Ce n’est pas grave, ma chère collègue.
    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    J’apprécie votre courtoisie, madame Melchior. Merci beaucoup.
    L’amendement n’a plus vraiment de sens car, s’agissant des repas, il n’y aura plus de distinction à faire entre les boursiers, les étudiants en situation précaire et les autres. Je vous invite à le retirer, sans quoi j’émettrai un avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Les étudiants sont déjà informés grâce aux dispositifs actuels. Cependant, nous comprenons l’objectif de l’amendement. Le gouvernement s’en remet donc à la sagesse de l’Assemblée.

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Graziella Melchior.

    Mme Graziella Melchior

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    Je maintiens l’amendement, car c’est mon collègue qui en est l’auteur.

    (L’amendement no 4 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’article 1er, je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    Je suis saisie de deux amendements, nos 12 et 13, pouvant être soumis à une discussion commune.
    La parole est à M. Laurent Croizier, pour soutenir l’amendement no 12.

    M. Laurent Croizier

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    Si les étudiants s’acquittent d’un tarif de 1 euro ou de 3,30 euros, le coût réel d’un repas se situe, nous l’avons dit, entre 8 et 10 euros. Par cet amendement, nous souhaitons que ce coût réel soit porté à la connaissance des étudiants, par respect pour le personnel qui prépare les repas, par respect pour le Crous, par respect aussi pour nos agriculteurs qui produisent les denrées alimentaires utilisées.

    M. Jean-François Coulomme

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    Oh là là…

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Violette Spillebout, pour soutenir l’amendement no 13.

    Mme Violette Spillebout

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    Cet amendement de M. Philippe Fait tend à obliger les Crous et les lieux délégués qui en dépendent à afficher le coût réel d’un repas.
    Le sujet du repas à 1 euro mérite la discussion que nous avons, de bon niveau même si elle est difficile. En effet, bien que notre majorité ait institué le repas à 1 euro, de nombreux étudiants qui sont dans la précarité ne bénéficient pas de ce tarif, et font la queue devant les distributions alimentaires, y compris pendant les périodes très froides, comme en ce moment.
    L’affichage que nous proposons serait une mesure de pédagogie et de responsabilisation : les étudiants bénéficiant du tarif à 1 euro sauraient que le repas coûte en réalité 8 euros.
    Ce serait en outre une réponse à l’argument selon lequel les restaurants des Crous risquent d’être engorgés par des étudiants qui n’ont pas besoin d’un tel tarif. Selon moi, viendront dans ces restaurants les étudiants qui, tout en sachant que le repas coûte plus cher, n’ont pas d’autre choix que d’utiliser le repas à 1 euro. C’est aussi pour limiter l’engorgement que j’avais présenté un amendement, adopté par la commission, prévoyant la possibilité d’emporter le repas. L’engorgement sera limité si les étudiants qui viennent bénéficier du repas à 1 euro sont ceux qui en ont réellement besoin, et si les autres étudiants, ceux qui le peuvent, vont dans un établissement de restauration rapide ou consomment un repas fait à la maison.
    Enfin, comme l’a indiqué M. Croizier, un tel affichage valorisait les circuits courts et le travail des agriculteurs locaux.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission sur ces deux amendements ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée. Informer, oui, mais peut-être faut-il alors informer sur le coût de chaque service public,…

    M. Laurent Croizier et M. Sylvain Maillard

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    Oui, très bien !

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    …par exemple dire combien coûte l’intervention des pompiers lorsque la personne qui les a appelés n’a pas fait de malaise.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Nous comprenons parfaitement l’intérêt d’afficher le coût réel, afin de montrer l’effort consenti par la collectivité en faveur des étudiants bénéficiaires de ces tarifs peu élevés. Cependant, on risque de brouiller les messages les plus importants, le moment du passage en caisse étant utilisé pour parler aux étudiants de l’importance d’une alimentation saine et équilibrée. C’est pourquoi je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Théo Bernhardt.

    M. Théo Bernhardt

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    Quel est l’objectif de ces amendements sinon de culpabiliser les étudiants ? Quand un étudiant a faim, il a faim ! Qu’importe ce que le repas coûte réellement et ce que l’étudiant paye effectivement –⁠ 1 euro, 2 euros ou 3,30 euros.
    Vous parlez de respect et de responsabilisation, mais quel respect manifestez-vous aux étudiants quand vous présentez des amendements de ce genre ? Les étudiants connaissent l’effort consenti par l’État en leur faveur, ou plutôt, certaines fois, son manque d’effort.
    Ces amendements sont vraiment lunaires ! Culpabiliser les étudiants comme vous le faites en leur signifiant qu’ils payent leur repas 1 euro alors que celui-ci coûte tel ou tel montant à la collectivité, c’est leur manquer de respect. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. Laurent Croizier

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    Vous le direz aux agriculteurs !

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bastien Lachaud.

    M. Bastien Lachaud

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    Ces amendements sont tout de même assez hypocrites. Seuls les étudiants devraient connaître le coût des mesures sociales prises en leur faveur ? Dans ce cas, il faudrait que vous expliquiez aux actionnaires combien coûtent aux finances publiques toutes les aides que vous déversez sur eux depuis 2017 ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
    Ce sont des centaines de milliards que vous distribuez tous les ans aux plus riches, et vous ne leur indiquez absolument pas le coût qu’ont ces mesures pour nous tous !
    Les autres services publics ont tous, eux aussi, un coût réel. Dans votre logique, ces dépenses pour la collectivité ne sont pas un facteur de valeur, mais un coût à supprimer. Vous voulez saborder les services publics et les aides sociales. Je trouve donc que ces amendements sont hypocrites, et nous nous prononcerons en conséquence.

    (Les amendements nos 12 et 13, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’article 1er, tel qu’il a été amendé.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        164
            Nombre de suffrages exprimés                149
            Majorité absolue                        75
                    Pour l’adoption                141
                    Contre                8

    (L’article 1er, amendé, est adopté.)
    (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS.)

    Après l’article 1er

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de deux amendements, nos 19 et 20, portant article additionnel après l’article 1er.
    Sur ces amendements, je suis saisie par le groupe Rassemblement national de demandes de scrutin public.
    Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
    La parole est à M. Bruno Clavet, pour soutenir l’amendement no 19.

    M. Bruno Clavet

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    Il vise à corriger ce qui paraît être un oubli du texte, ou au minimum un manque de clarté : les étudiants en brevet de technicien supérieur (BTS), bien que relevant pleinement de l’enseignement supérieur, ne semblent pas pouvoir bénéficier du repas à 1 euro lorsque leur formation se déroule dans un lycée trop éloigné du Crous. Pourtant, leur réalité économique, leurs besoins et leurs difficultés sont identiques à ceux des étudiants en université. Il n’y a donc aucune raison pour qu’ils soient laissés de côté.
    Ce problème n’est pas théorique ; on me l’a signalé sur le terrain, plus précisément au lycée Condorcet de Lens, qui n’est situé à proximité d’aucun restaurant universitaire. Les étudiants de ce lycée doivent payer leur repas plus cher à la cantine que d’autres étudiants ne le paient au Crous. Cette situation injuste ne peut être ignorée, c’est pourquoi je vous propose de clarifier définitivement les choses en adoptant cet amendement. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    L’utilité de l’amendement consiste à faire bénéficier du dispositif les étudiants en section BTS. La loi répond déjà à cette problématique, l’amendement est donc satisfait.

    M. Anthony Boulogne et M. Bruno Clavet

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    Non !

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Elle y répond d’une part par la loi du 13 avril 2023 visant à favoriser l’accès de tous les étudiants à une offre de restauration à tarif modéré, la loi Levi, qui, certes, est encore trop récente pour qu’on en voie les effets, d’autre part par des systèmes de conventionnement, qui, je vous le concède, ne sont pas assez nombreux. L’amendement étant satisfait, je vous demande de le retirer. À défaut, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Tout d’abord, les étudiants en BTS, s’ils sont boursiers et peuvent accéder à un restaurant universitaire à proximité, bénéficient déjà du repas à 1 euro. Ensuite, au sein des lycées qui accueillent les BTS, des tarifs progressifs sociaux s’appliquent, qui peuvent parfois porter le prix du repas au-dessous de 1 euro. Pour ces raisons, avis défavorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Clavet.

    M. Bruno Clavet

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    Madame la rapporteure, vous avez cité deux dispositifs tout en reconnaissant qu’ils n’étaient pas réellement efficaces. Il me semble important et cohérent d’adopter l’amendement dans l’intérêt de ces étudiants. La réalité du terrain m’a été signalée par des agents de l’enseignement supérieur qui dénoncent l’inégalité entre les étudiants en cycle universitaire et les étudiants en BTS éloignés des Crous. Vous qui parlez d’universalisme et d’égalité entre tous les étudiants, joignez donc l’acte à la parole ! Vous n’avez pas le monopole du cœur. (Sourires et applaudissements sur les bancs du groupe RN. –⁠ Exclamations sur quelques bancs des groupes SOC et EcoS.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Croizier.

    M. Laurent Croizier

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    J’apporte mon soutien à l’amendement. Un étudiant de BTS n’a pas le temps de quitter son lycée pour déjeuner dans un Crous entre deux cours ; les emplois du temps de BTS sont souvent extrêmement chargés. Je vous entends dire, madame Herouin-Léautey, que les lycées sont systématiquement à côté des Crous, mais c’est totalement faux.

    Mme Florence Herouin-Léautey

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    Ce n’est pas ce que j’ai dit !

    M. Laurent Croizier

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    Le diagnostic de M. Clavet me semble pertinent. À titre personnel, je voterai donc pour l’amendement, car je ne vois aucune raison pour qu’il y ait une différence entre les étudiants en BTS et les étudiants en faculté. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    M. Emeric Salmon

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    Ils n’aiment pas le BTS !

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 19.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        152
            Nombre de suffrages exprimés                149
            Majorité absolue                        75
                    Pour l’adoption                29
                    Contre                120

    (L’amendement no 19 n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Clavet, pour soutenir l’amendement no 20.

    M. Bruno Clavet

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    Il vise à réserver le bénéfice du repas à 1 euro aux étudiants français, européens (Exclamations sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS)…

    Mme Sabrina Sebaihi

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    Ah, voilà !

    M. Bruno Clavet

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    …ou issus de pays extra-européens avec lesquels la France a conclu une convention en matière d’accueil des étudiants. C’est une question de bon sens. Au Rassemblement national, nous pensons que la solidarité ne doit pas être un guichet ouvert à tous sans distinction. Chaque euro dépensé doit aller en priorité à ceux qui contribuent à notre pays, qui partagent nos engagements et qui construisent l’avenir de la France. D’ailleurs, chers amis de l’extrême gauche,…

    Mme Dominique Voynet

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    Les socialistes sont d’extrême gauche, maintenant ! (Sourires.)

    M. Bruno Clavet

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    …cette logique est appliquée partout dans le monde : en Allemagne, au Danemark, en Suède ou encore au Canada. À ma connaissance, c’est votre famille politique qui gouverne ces pays. Or ils conditionnent tous l’accès aux aides étudiantes à des critères de nationalité ou à l’existence d’un accord spécifique. Cela prouve que la mesure que je propose n’est ni de droite, ni de gauche, mais relève simplement du bon sens pour tout pays ayant la volonté de protéger ses concitoyens. C’est pourquoi je vous invite à voter l’amendement. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Défavorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Exclure les étudiants étrangers du bénéfice du repas à 1 euro serait contraire à la Constitution. Pour cette raison, l’avis du gouvernement est défavorable. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

    M. Théo Bernhardt

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    Quel argument !

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie Mesmeur.

    Mme Marie Mesmeur

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    Nous ne pouvons pas accepter les propos de M. Clavet, dont l’amendement illustre bien l’obsession raciste du Rassemblement national et son fétichisme de la préférence nationale ! (Exclamations sur les bancs du groupe RN.) Les étudiants étrangers font partie des plus précaires, puisqu’ils ne bénéficient pas du système de bourses français. (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
    Selon l’enquête de l’Observatoire national de la vie étudiante (OVE), les étudiants étrangers sont particulièrement vulnérables. Ils sont deux à trois fois plus nombreux que les autres à se trouver dans un état de détresse psychologique et dans des difficultés financières insolubles. Seules les aides sociales indirectes leur permettent de supporter le coût de la vie étudiante, qui augmente.
    Vous les accusez d’engendrer des coûts pour les finances publiques. Premièrement, les étudiants étrangers ne sont pas un coût, mais une richesse pour la France, comme nous vous l’avons maintes fois démontré ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.) Deuxièmement, le vrai problème, c’est justement l’austérité dans les services publics. Troisièmement, vous vous montrez fidèles à vous-mêmes : encore une fois, vous déshonorez la République ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. –⁠ Protestations sur plusieurs bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Hanane Mansouri.

    Mme Hanane Mansouri

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    Quelle jolie caricature, madame Mesmeur ! Avez-vous une seule fois demandé aux étudiants s’ils avaient envie d’aller manger au Crous ? (« Oui ! » sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.) Comme je l’ai dit plus tôt –⁠ visiblement, vous n’avez pas bien entendu –, 13 % des étudiants qui ne vont pas au Crous s’en abstiennent pour des raisons qui ne sont pas financières. A-t-on encore en France, oui ou non, le droit de manger où on veut ? (Vives exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Puisque vous nous expliquez depuis tout à l’heure que les étudiants sont suffisamment grands pour payer ce qu’ils veulent manger, laissez-les choisir, et arrêtez avec vos délires antiracistes ! (Applaudissements sur les bancs du groupe UDR et sur plusieurs bancs du groupe RN. –⁠ Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’amendement no 20.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        158
            Nombre de suffrages exprimés                158
            Majorité absolue                        80
                    Pour l’adoption                23
                    Contre                135

    (L’amendement no 20 n’est pas adopté.)

    Article 1er bis

    (L’article 1er bis est adopté.)

    Après l’article 1er bis

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Marie Mesmeur, pour soutenir l’amendement no 11 rectifié portant article additionnel après l’article 1er bis.

    Mme Marie Mesmeur

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    Il est rédactionnel. (Sourires.)

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis de la commission ?

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Favorable.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Sagesse.

    (L’amendement no 11 rectifié est adopté.)

    Article 1er ter

    Mme la présidente

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    L’amendement no 10 de M. Charles Sitzenstuhl est défendu.

    (L’amendement no 10, accepté par le gouvernement, repoussé par la commission, n’est pas adopté.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la rapporteure, pour soutenir l’amendement no 16.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    L’article 1er ter consiste en une demande de rapport ; l’amendement vise à intégrer dans ce rapport une description des moyens alloués au personnel des Crous. Combien d’agents travaillent dans chaque centre ? Chaque Crous est indépendant, mais il est impératif de faire l’état des lieux.

    Mme la présidente

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    Quel est l’avis du gouvernement ?

    M. Philippe Baptiste, ministre

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    Favorable.

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Sylvain Maillard.

    M. Sylvain Maillard

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    Le groupe Ensemble pour la République a toujours eu la même position : nous sommes défavorables aux demandes de rapport dans le cadre d’une proposition de loi car nous considérons qu’il revient au Parlement, et non au gouvernement, de contrôler les lois d’initiative parlementaire. Suivant cette logique, nous sommes défavorables à l’amendement.

    (L’amendement no 16 est adopté.)

    (L’article 1er ter, amendé, est adopté.)

    Mme la présidente

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    Sur l’ensemble de la proposition de loi, je suis saisie par les groupes Socialistes et apparentés et Les Démocrates d’une demande de scrutin public.
    Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.

    Articles 1er quater et 2

    (Les articles 1er quater et 2 sont successivement adoptés.)

    Titre

    Mme la présidente

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    Je suis saisie de l’amendement no 17 de M. Laurent Croizier.

    (L’amendement no 17 est retiré.)

    Mme la présidente

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    Nous avons achevé l’examen des articles de la proposition de loi.

    Explications de vote

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Graziella Melchior.

    Mme Graziella Melchior (EPR)

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    Je remercie Mme la rapporteure, ainsi que celles et ceux qui ont participé au débat sur cette proposition de loi. Je souhaite rappeler qu’aucun député du groupe Ensemble pour la République n’est opposé par principe au repas à 1 euro ; c’est d’ailleurs nous qui l’avons créé. Nous avons défendu sa pérennisation pour les étudiants boursiers et pour les non-boursiers en situation de précarité qui en font la demande, et nous sommes fiers de cette mesure de justice sociale.
    Malgré les débats qui se sont tenus, nous sommes nombreux à ne pas avoir été convaincus du sens qu’il y aurait à généraliser ce dispositif à tous les étudiants (Mme Marie Mesmeur s’exclame vivement), y compris à ceux dont les parents ont les moyens de financer un repas dont le tarif social reste fixé à 3,30 euros. Nous sommes aussi nombreux à ne pas avoir été convaincus de la capacité des Crous à absorber une fréquentation qui pourrait s’accroître considérablement et brutalement. Enfin, nous sommes nombreux à nous inquiéter du message que nous envoyons aux jeunes quant au coût réel de l’alimentation et aux agriculteurs quant à la considération de leur travail.
    Nous continuons de défendre le repas à 1 euro, mais nos réserves n’ont pas été levées. En outre, le contexte budgétaire est contraint. C’est pourquoi notre groupe s’abstiendra. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Bruno Clavet.

    M. Bruno Clavet (RN)

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    Le groupe Rassemblement national votera en faveur de cette proposition de loi visant à étendre à tous les étudiants le bénéfice du repas à 1 euro. Nous ne sommes pas sectaires et nous prouvons une nouvelle fois que nous sommes capables de dépasser les clivages dès lors qu’il s’agit d’améliorer la vie des Français, en l’occurrence celle des étudiants. Nous regrettons toutefois que vous ne partagiez pas cet état d’esprit –⁠ je m’adresse notamment au groupe socialiste –, puisque vous avez rejeté tous nos amendements sans leur accorder beaucoup de crédit. Votre méthode n’est donc pas à votre honneur.
    Cependant, nous pouvons nous réjouir collectivement de l’adoption de cette proposition de loi et du droit qu’elle ouvre aux étudiants qui sont plongés dans la précarité alimentaire, et qui le sont plus encore depuis qu’Emmanuel Macron est à l’Élysée.

    M. Sylvain Maillard

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    Oh, c’est gratuit, ça !

    M. Bruno Clavet

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    Je note cependant que cette adoption ne se fera pas avec les macronistes, qui ont annoncé qu’ils ne voteront pas le texte, de la même façon qu’ils s’y étaient opposés en 2023. Il y a une forme d’ironie, de cynisme, dans votre positionnement politique, chers collègues qui siégez dans le groupe EPR. Vous n’avez pas hésité à vous vanter de la nomination du premier ministre le plus jeune de la Ve République en la personne de Gabriel Attal alors que vous êtes résolument un parti antijeunes. Vos décisions sont en total décalage avec l’image que vous tentez de nous vendre. Les étudiants pourront en tout cas constater que le Rassemblement national est de leur côté (Rires sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP) en se souvenant de notre vote sur cette proposition de loi et en prenant connaissance de toutes les propositions concrètes que nous formulons pour eux. (Applaudissements sur les bancs du groupe RN.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Christophe Bex.

    M. Christophe Bex (LFI-NFP)

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    À l’heure du dîner, saisissons l’occasion de parler du repas à 1 euro au Crous ! « Un esprit sain dans un corps sain », écrivait le célèbre poète Juvénal au Ier siècle de notre ère. Cette maxime sonne plus vrai que jamais. Alors que les défis sanitaires et alimentaires que rencontre notre société semblent plus insurmontables les uns que les autres, c’est notre jeunesse qui est en première ligne pour élaborer des solutions alternatives afin de préserver notre avenir en commun. Quel plus beau message pouvons-nous envoyer que de lui offrir la possibilité d’étudier sans se ruiner en nourriture ? Quelle meilleure solution apporter aux étudiants et aux étudiantes qui souffrent de la faim dans notre pays ? Mais vous le refusez. Quelle déchéance pour le pays qui se prétend le pays des droits de l’homme et dont le développement avancé ne l’empêche pas de laisser délibérément dans la misère une partie de sa population !
    J’ai dirigé un restaurant universitaire du Crous de Nancy-Metz. Je sais que la question des moyens alloués aux Crous pour remplir leurs missions se pose nécessairement. Je veux saluer ici les personnels ouvriers et administratifs engagés et dévoués de ces structures (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP, ainsi que sur les bancs des commissions) et rappeler, à la tribune de l’Assemblée nationale, qu’ils subissent l’éternelle injonction du « faire toujours plus avec toujours moins » et qu’ils manquent cruellement de moyens, comme l’ensemble des services de la fonction publique de ce pays, pour réussir pleinement leurs missions dans le respect des besoins des étudiants.
    Je souhaite remercier nos camarades socialistes d’avoir déposé de nouveau cette proposition de loi dans leur niche parlementaire. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe SOC.) Presque deux ans après son premier examen, nous voyons toujours les mêmes tentatives, venant des mêmes bords politiques, de dévitaliser ce texte.
    Non, mesdames et messieurs les macronistes, vous ne ferez jamais croire que vous souhaitez réellement le bien-être de tous les étudiants. Au vu de votre bilan, vous ne ferez jamais croire que vous souhaitez réellement leur réussite : Parcoursup, la réforme du bac, le service national universel (SNU). Les amendements que vous avez déposés révèlent votre duplicité : vous proposez de transformer l’obligation du repas à 1 euro en une simple option, de réserver le repas à 1 euro aux étudiants et boursiers qui en font la demande, ou de le soumettre à une condition de ressources.

    M. Sylvain Maillard

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    Quelle caricature !

    M. Christophe Bex

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    Et que dire du Rassemblement national, fidèle à ses obsessions racistes et xénophobes ? (Protestations sur les bancs du groupe RN.) Vous avez osé déposer un amendement pour réserver cette mesure aux étudiants de nationalité française et européenne.

    M. Théo Bernhardt

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    Aucun argument !

    M. Christophe Bex

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    Vous rejoignez les macronistes…

    M. Matthieu Marchio

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    Nous votons pour la proposition de loi !

    M. Christophe Bex

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    …en demandant une augmentation du prix maximum de 1 à 2 euros. Au contraire, avec la NUPES, puis avec le Nouveau Front populaire, nous nous sommes emparés de cette question et nous l’avons inscrite dans notre programme commun.
    Pour toutes ces raisons, nous voterons évidemment la proposition de loi défendue par notre collègue Fatiha Keloua Hachi, que nous remercions. (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Laurent Croizier.

    M. Laurent Croizier (Dem)

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    Mes chers collègues, nous sommes fiers et heureux que les étudiants boursiers et les étudiants se déclarant en situation de précarité puissent aujourd’hui bénéficier d’un repas à 1 euro. L’enjeu de la précarité étudiante excède de beaucoup la question du montant du repas. La disposition instaurée par la proposition de loi n’aura aucun effet sur les étudiants qui ont déjà accès au repas à 1 euro. Dans ce débat, nous avons défendu la justice sociale et je regrette que nous n’ayons pas pu nous retrouver sur ce sujet. Nous avons manqué un rendez-vous.

    M. Jean-François Coulomme

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    Au restaurant avec Wauquiez !

    M. Laurent Croizier

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    Et un rendez-vous peut-être historique (Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP), puisqu’il s’agissait d’inscrire le montant d’un repas dans la loi, ce qui, finalement, est très peu ambitieux. Nous avions l’occasion d’inscrire un principe dans ce texte : celui de la progressivité, de la tarification sociale,…

    M. Jean-François Coulomme

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    Appliquez la progressivité à la TVA !

    M. Laurent Croizier

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    …qui nous aurait permis d’aider encore plus ceux qui en ont besoin, en aidant peut-être un peu moins –⁠ mais je pense qu’il faut l’accepter – ceux qui n’en ont pas besoin du tout. Finalement, ce que vous avez fait aujourd’hui, c’est donner accès au repas à 1 euro aux riches. Je le regrette. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem et sur quelques bancs du groupe EPR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme Soumya Bourouaha.

    Mme Soumya Bourouaha (GDR)

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    Je l’ai dit dans mon intervention liminaire : bien évidemment, le groupe GDR votera pour cette proposition de loi, car elle répond à une urgence alimentaire. En effet, la précarité des étudiants ne cesse de s’aggraver et 80 % d’entre eux ne mangent pas correctement.

    Mme Christine Le Nabour

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    D’où viennent ces chiffres ?

    Mme Soumya Bourouaha

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    J’espère que ce texte ouvrira la voie à une proposition de loi-cadre sur l’avenir de notre jeunesse abordant les multiples enjeux auxquels les jeunes sont confrontés : l’accès au logement, l’enseignement supérieur, la santé mentale, la réforme des bourses et le revenu étudiant, lequel permettrait de garantir une autonomie financière à tous durant leurs études –⁠ cette mesure, défendue par le groupe communiste, me tient particulièrement à cœur. Bien évidemment, nous voterons pour la proposition de loi et nous vous félicitons, madame la rapporteure ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR, sur plusieurs bancs des groupes SOC et EcoS, ainsi que sur les bancs des commissions.)

    Vote sur l’ensemble

    Mme la présidente

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    Je mets aux voix l’ensemble de la proposition de loi.

    (Il est procédé au scrutin.)

    Mme la présidente

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    Voici le résultat du scrutin :
            Nombre de votants                        173
            Nombre de suffrages exprimés                154
            Majorité absolue                        78
                    Pour l’adoption                149
                    Contre                5

    (La proposition de loi est adoptée.)
    (Les députés des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR se lèvent et applaudissent.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la rapporteure.

    Mme Fatiha Keloua Hachi, rapporteure

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    Chers collègues, je veux vous remercier et je veux vous dire que l’acharnement paie, que l’union paie ! Nous étions unis aujourd’hui et nous avons réussi. Merci à tous, merci pour les étudiants ! (Applaudissements sur les bancs des groupes LFI-NFP, SOC, EcoS et GDR.)

    Suspension et reprise de la séance

    Mme la présidente

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    La séance est suspendue.

    (La séance, suspendue à dix-neuf heures trente-cinq, est reprise à dix-neuf heures quarante.)

    Mme la présidente

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    La séance est reprise.

    3. Lutte contre les pannes d’ascenseurs non prises en charge

    Discussion d’une proposition de loi

    Mme la présidente

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    L’ordre du jour appelle la discussion de la proposition de loi de M. Philippe Brun et plusieurs de ses collègues visant à lutter contre les pannes d’ascenseurs non prises en charge (nos 518, 704).

    Présentation

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Philippe Brun, rapporteur de la commission des affaires économiques.

    M. Philippe Brun, rapporteur de la commission des affaires économiques

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    Je serai bref, car l’heure avance, et nous souhaitons, au groupe Socialistes et apparentés, que l’excellente proposition de loi de notre collègue Céline Hervieu, relative aux crèches privées, soit débattue et votée avant minuit. (M. Gérard Leseul applaudit.)
    En France 1,7 million de pannes d’ascenseur ont lieu tous les ans. Or les délais de réparation sont de plus en plus longs à mesure que le marché des ascensoristes se concentre. Ce marché regroupe quatre acteurs majeurs, tous étrangers, dont le taux de rentabilité excède 15 %, ce qui fait des ascensoristes les sociétés de maintenance les plus rentables. Les pannes sont de plus en plus nombreuses et de plus en plus longues à réparer. Elles sont un calvaire pour les personnes concernées, privées de leur liberté élémentaire de se mouvoir, d’aller et venir. C’est à ce calvaire que nous voulons mettre fin avec la proposition de loi.
    Ce texte contient trois dispositions principales. Premièrement, il vise à imposer aux sociétés ascensoristes, dans le cadre des contrats qui les lient aux copropriétés et aux bailleurs, des délais d’intervention et de réparation précis, afin que celle-ci soit effectuée dans les meilleurs délais.
    Deuxièmement, afin que ces délais soient respectés, nous proposons d’instaurer une obligation de stock de pièces, comme le permet déjà le décret d’application de la loi du 2 juillet 2003 urbanisme et habitat, dite loi de Robien, que nous généralisons à l’ensemble des contrats afin de mettre fin à la stratégie de stock zéro et de flux tendus des grandes entreprises ascensoristes. Ces dernières fabriquent leurs pièces à l’étranger, ce qui explique leur indisponibilité et empêche de très nombreuses réparations.
    Troisièmement, la société ascensoriste devra prendre des mesures de substitution en cas de panne prolongée, à savoir un service de portage des courses, des repas ou même des personnes.
    À ces trois obligations, les membres de la commission des affaires économiques, que je remercie, en ont ajouté d’autres. Paul Vannier, qui s’est illustré depuis plusieurs années en défendant une meilleure prise en charge des pannes d’ascenseur et l’extension du régime de responsabilité civile aux accidents d’ascenseur, a proposé d’inscrire dans la proposition de loi des dispositions nouvelles, qui ont été –⁠ je m’en réjouis – adoptées par la commission.
    Il s’agit d’un texte de compromis, qui ne résout pas à lui seul l’immense problème, le sujet orphelin de la vie politique française que sont les pannes d’ascenseur, mais qui, je le crois, apportera un remède utile à ce drame quotidien auquel nous sommes confrontés dans tous les territoires. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC et sur quelques bancs du groupe GDR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à Mme la ministre chargée du logement.

    Mme Valérie Létard, ministre chargée du logement

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    Les pannes d’ascenseur sont une réalité insupportable pour les locataires. Les chiffres qui ont été rappelés sont éloquents : 645 000 ascenseurs et 100 millions de trajets quotidiens pour près de 2 millions de pannes par an. Je n’ai donc rien à redire à la démarche du groupe socialiste, tentative louable de résoudre ces situations –⁠ nous discuterons plus tard de ses chances de succès.
    Dans le cadre de la loi du 23 novembre 2018 portant évolution du logement, de l’aménagement et du numérique, dite loi Elan, le gouvernement a promu une logique d’adaptabilité et d’accessibilité des logements. L’une des mesures portait sur l’obligation d’installer des ascenseurs dans les bâtiments de plus de trois étages. Afin d’être cohérents avec cette ambition et de sécuriser au maximum les ménages, nous devons être plus exigeants à l’égard des ascensoristes comme des propriétaires.
    L’année dernière, le gouvernement a lancé le plan Ascenseur, afin d’obtenir des indicateurs quantitatifs et qualitatifs dans les parcs témoins de quartiers prioritaires de la politique de la ville (QPV). Son bilan, que nous recevrons dans les prochaines semaines, nourrira nos réflexions.
    Le Parlement et le gouvernement ne peuvent pour autant pas se contenter de dénoncer la situation ; les solutions proposées doivent être opérationnelles. L’enjeu est de responsabiliser l’ensemble des acteurs et d’éviter que le remède soit pire que le mal. Or la version actuelle du texte présente le risque que les entreprises ne souhaitent plus investir dans le marché ou s’en retirent, notamment dans les quartiers et les bâtiments particulièrement dégradés. C’est d’autant plus vrai dans le parc social, où il faut aussi –⁠ et surtout – préserver le pouvoir d’achat des ménages en empêchant le système de porter les nouvelles obligations sur les charges des locataires.
    Tel est l’équilibre que le travail parlementaire doit trouver, en appréhendant toutes les situations : l’entretien courant est différent du traitement du vandalisme ; la gestion de la maintenance d’une copropriété de 150 lots n’est pas la même que celle d’une copropriété de 10 ou 12 lots ; pour une réparation importante, l’intervention n’est pas aussi rapide que pour une négligence. Il n’y a de méchants ni chez les propriétaires ni chez les ascensoristes. De nombreux acteurs agissent pour le maintien du parc au quotidien –⁠ je pense aux visites régulières des techniciens, qui ont un métier difficile et souvent dangereux. Cette filière se modernise et s’adapte pour améliorer la sécurité et la qualité de service. Il y a donc réellement un enjeu économique.
    La situation politique nous impose de nouvelles méthodes. Je souhaite que l’examen de ce texte en soit le terrain d’exercice. Aussi, afin d’améliorer la proposition de loi, le gouvernement a déposé plusieurs amendements qui devront être examinés attentivement.
    Je commencerai par le montant des pénalités fixées par jour de retard dans la résolution de la panne. Le prix des contrats de maintenance varie entre 1 500 et 2 500 euros par an et entre 800 et 2 000 euros dans le parc social. J’ai bien noté l’abaissement de la pénalité à 300 euros par jour de retard en commission. Si cette somme reste trop élevée au regard du prix des contrats, nous comprenons la nécessité de maintenir un montant dissuasif. Nous proposons donc un système d’astreinte croissante, dont nous aurons l’occasion de discuter.
    Deuxièmement, pour certaines réparations, du temps est nécessaire pour déterminer la meilleure option technique possible et identifier la vraie cause de la panne. Il arrive aussi que les appareils ne soient pas remis en service parce que les devis sont discutés par le propriétaire. Nous proposons donc de faire courir le délai de huit jours ouvrés pour la résolution de la panne à compter de l’acceptation par le propriétaire de l’ascenseur de la proposition formulée par la société.
    Troisièmement, les ascensoristes ont l’obligation de constituer un stock de pièces de rechange. Or, comme l’a souligné le rapporteur, les contrats dits étendus fixent déjà des obligations de stock. Le décret issu de la loi de 2003 dispose également que tous les contrats doivent en prévoir. Toutefois, la liberté contractuelle protège la manière dont les contrats sont conclus, ce qui peut aboutir à des stipulations contractuelles peu exigeantes, dans le but de baisser le prix des contrats. Dans ce cas, les délais d’intervention peuvent être accrus. Je note aussi la difficulté de stocker certaines pièces faites sur mesure ou très anciennes parce que le propriétaire ne souhaite pas changer de modèle d’ascenseur. Ce sujet doit être appréhendé à la frontière entre le discours et l’opérationnel. La liste des composants doit être fixée par un décret de mon ministère, qui approfondira la question. Je proposerai également de prendre en compte le potentiel de réparabilité des pièces, ainsi que leurs substituts possibles –⁠ il est inutile de stocker un rotor des années 1970 si un rotor plus moderne peut lui être substitué.
    Enfin, nous proposons de remplacer les amendes pénales et administratives par la prise en charge des travaux aux frais du mainteneur, en cas de dépassement du délai de huit jours pour non-respect de l’obligation des stocks. Cette pratique, déjà utilisée, le plus souvent à l’amiable, me semble être une saine incitation. Dans le cadre de la navette, nous devrons interroger l’articulation entre les différents niveaux de sanctions afin d’éviter de déséquilibrer complètement le système.
    Ces propositions sont de nature à permettre un compromis : travaillons ensemble, dans le cadre du débat parlementaire, afin que l’ambition de ce texte prospère au-delà de cette chambre, au service de nos concitoyens. Je vous remercie pour votre travail et vos propositions. (Applaudissements sur les bancs du groupe DR.)

    Discussion générale

    Mme la présidente

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    Dans la discussion générale, la parole est à M. Laurent Lhardit.

    M. Laurent Lhardit

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    Il est fréquent de se poser la question de l’opportunité d’une nouvelle loi. Dans le cas des pannes d’ascenseur, qui durent de plus en plus longtemps, les acteurs de la chaîne de responsabilité, des propriétaires aux ascensoristes, ont prouvé qu’ils ne savaient pas résoudre les difficultés. La situation dure depuis trop longtemps. Il revient donc au législateur de fixer un cadre, dont j’ai la conviction qu’il assurera la mobilisation de tous les acteurs de la chaîne, dans l’intérêt des habitants des immeubles concernés. L’objectif est de résoudre des situations qui restreignent de manière insupportable la liberté de se déplacer de nos concitoyens, partout en France. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Thibault Bazin.

    M. Thibault Bazin

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    La question des pannes d’ascenseurs ne doit pas être ignorée : nos compatriotes âgés, les femmes enceintes et les personnes à mobilité réduite subissent directement ces dysfonctionnements. Toutefois, le problème doit être traité sous le bon angle, en prenant en compte la réalité du terrain pour apporter des solutions réellement efficaces et éviter de pénaliser davantage sans résultat.
    Il est nécessaire de renforcer la fréquence du contrôle des ascenseurs et de réduire les délais de réparation. Hélas, dans ce texte, les mesures contraignantes, pour les propriétaires comme pour les ascensoristes, s’accumulent pour former un enfer normatif, dans une course à la sanction, sans résoudre concrètement les problèmes. Nous émettons donc de fortes réserves sur les mesures prévues.
    Premièrement, le délai de réparation de deux à huit jours semble déconnecté des réalités du terrain, en particulier pour les ascenseurs anciens. Comme l’a dit Mme la ministre, plus d’un quart des ascenseurs étant vieux de plus de 40 ans, de nombreuses pièces nécessaires aux réparations sont devenues introuvables sur le marché actuel. Ces pièces de rechange sont fabriquées à la demande, ce qui nécessite parfois bien plus que huit jours.

    M. Vincent Jeanbrun

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    C’est clair !

    M. Thibault Bazin

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    Deuxièmement, l’exigence de constitution d’un stock de pièces de rechange pour les ascensoristes soulève une question de coût, mais surtout une question de faisabilité. Il n’est pas raisonnable d’attendre de ces entreprises qu’elles maintiennent un inventaire complet de pièces pour des ascenseurs anciens, dont les composants ne sont plus produits en série, mais à la demande. De plus, cela aurait des conséquences financières importantes pour les copropriétés. Les contrats de maintenance variant entre 1 500 et 2 500 euros par an et par immeuble, la gestion d’un stock de pièces de rechange entraînerait une augmentation des charges de copropriété.
    Troisièmement, la responsabilisation des communes pose problème : en cas de carence prolongée de l’entreprise de maintenance, vous proposez que la commune se substitue à cette dernière pour prendre en charge l’obligation de portage et de réparation de l’appareil. La commune pourrait ensuite demander un remboursement à l’entreprise. Cette mesure représente un coût supplémentaire de gestion pour les communes et une porte ouverte à un risque croissant de litiges.
    Quatrièmement, il est dommage de ne pas avoir pris en compte le grand problème du vieillissement des ascenseurs –⁠ je rappelle que plus de 25 % d’entre eux ont au moins 40 ans. Cela aurait été très utile pour réduire le nombre de pannes.
    Enfin, votre texte n’aborde pas l’endommagement croissant des pièces en raison de dégradations volontaires, d’usages anormaux, de malveillance ou de vandalisme. Il serait injuste que les entreprises chargées de l’entretien soient considérées comme responsables de ces dégâts.
    Votre proposition de loi impose des contraintes disproportionnées et injustes qui risquent de pénaliser financièrement les copropriétaires. Notre groupe votera donc contre ce texte dans son état actuel, mais je forme le vœu qu’il soit corrigé pendant son examen, afin de pouvoir le soutenir. Nous devons œuvrer de concert pour remédier aux dysfonctionnements liés aux pannes d’ascenseur et réduire les délais d’intervention. (Applaudissements sur les bancs des groupes DR et EPR.)

    Mme la présidente

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    La parole est à M. Éric Martineau.

    M. Éric Martineau

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    Je souhaite tout d’abord remercier M. le rapporteur pour cette initiative, qui met en lumière un réel problème : l’état alarmant de nos ascenseurs qui, pour des millions de nos concitoyens, représentent bien plus qu’un simple moyen de déplacement.
    Parce qu’il existe 637 000 ascenseurs en France, dont 60 % situés dans des logements, le bon fonctionnement de ces appareils est un sujet essentiel pour notre quotidien. Il l’est encore plus pour les personnes à mobilité réduite, les familles avec des enfants en bas âge, ou encore pour nos aînés, dont la mobilité dépend souvent de ces équipements. Et pourtant, on recense chaque année 1,5 million de pannes, dont certaines immobilisent des ascenseurs jusqu’à dix mois.
    Cette situation est d’autant plus préoccupante que 50 % des ascenseurs en France ont plus de 30 ans et que 25 % dépassent les 40 ans. Ces chiffres témoignent d’un parc vieillissant, dont le maintien et l’utilisation dépassent largement la durée de vie maximale, estimée à 20 ans. C’est donc la vétusté des ascenseurs qui est au cœur du problème. En effet, peut-on raisonnablement espérer qu’un ascenseur âgé de 40 ans fonctionne de manière fiable et sûre ?
    Les conséquences d’une panne durable d’ascenseur sont particulièrement problématiques pour les personnes vulnérables : risque d’isolement, perte d’autonomie, dégradation de l’accès aux soins et de la vie sociale. Les mesures proposées dans ce texte méritent toutefois d’être interrogées. Certes, le fait d’imposer des délais plus courts pour les réparations et la constitution d’un stock de pièces détachées semble répondre à une impérieuse nécessité, face à une situation de blocage incompréhensible. Mais ces mesures, qui semblent prises dans l’urgence, soulèvent de nombreuses difficultés.
    Demander à des entreprises de maintenir des stocks d’équipements souvent obsolètes, dont certains nécessitent une fabrication sur mesure, est une contrainte qui nous paraît disproportionnée. Exiger cela, c’est risquer de les fragiliser davantage et durablement. Et ne nous y trompons pas : les coûts insoutenables qui en découleraient seraient inévitablement répercutés sur les copropriétaires, déjà victimes d’une inflation galopante.
    Les délais et les sanctions que vous fixez sont eux aussi démesurés. Ils vont faire courir un risque aux entreprises qui, au mieux, le répercuteront sur leurs prix et, au pire, feront faillite, faute de pouvoir payer. Plutôt que d’imposer des obligations rigides, pourquoi ne pas encourager la modernisation de nos équipements ? Des mécanismes fiscaux ou financiers incitatifs permettraient de renouveler le parc d’ascenseurs et de prendre le problème à la racine, en remédiant à la vétusté de ce parc. Nous pourrions aussi intégrer l’entretien des ascenseurs dans les plans pluriannuels de travaux. Cela permettrait d’anticiper les besoins en maintenance et de garantir un suivi régulier.
    Je m’inquiète également de l’impact financier que votre texte pourrait avoir sur nos collectivités. En cas de défaillance d’une entreprise, ce sont en effet les communes qui devront garantir aux administrés un accès à ces services essentiels. Or cette compensation représentera une lourde charge et elles n’auront aucune garantie de récupérer les coûts engagés.
    Ainsi, malgré ses louables intentions, ce texte ne répond pas pleinement aux problèmes qui se posent. Nous partageons votre indignation face aux 1,5 million de pannes annuelles et pensons comme vous qu’il est urgent d’agir pour nos concitoyens vulnérables. Mais, au sein du groupe Les Démocrates, nous croyons en une approche différente : celle d’une modernisation du parc des ascenseurs reposant sur des mécanismes incitatifs et sur l’anticipation.
    Dans sa forme actuelle, et malgré ses bonnes intentions, ce texte est lourd de conséquences : pour les entreprises, il est un fardeau ; pour les copropriétaires, il est une charge ; pour les collectivités, il est une menace financière. Au groupe Les Démocrates, nous souhaitons un texte qui améliore la situation sans l’aggraver, avec des mesures qui garantissent la sécurité et la fiabilité des matériaux, tout en respectant la capacité des entreprises, des copropriétaires et des collectivités à relever ce défi –⁠ qui est réel. En l’état, vous l’aurez compris, le groupe Les Démocrates votera contre ce texte.

    Mme la présidente

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    La suite de la discussion est renvoyée à la prochaine séance.

    4. Ordre du jour de la prochaine séance

    Mme la présidente

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    Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures trente :
    Suite de la discussion de la proposition de loi visant à lutter contre les pannes d’ascenseurs non prises en charge ;
    Discussion de la proposition de loi prenant des mesures d’urgence pour protéger nos enfants accueillis en crèches privées à but lucratif ;
    Discussion de la proposition de loi portant accélération de la rénovation énergétique des logements ;
    Discussion de la proposition de loi visant à former les jeunes aux premiers secours en santé mentale ;
    Discussion de la proposition de loi pour plus de sport et moins de sucre.
    La séance est levée.

    (La séance est levée à vingt heures.)

    Le directeur des comptes rendus
    Serge Ezdra