Deuxième séance du jeudi 03 juillet 2025
- Présidence de Mme Clémence Guetté
- 1. Transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l’emploi des salariés expérimentés et évolution du dialogue social
- Après l’article 3
- Amendements nos 49, 116, 50, 111
- Article 4
- Rappel au règlement
- Article 4 (suite)
- Suspension et reprise de la séance
- Après l’article 4
- Amendement no 51
- Article 5
- Article 6
- Amendements nos 65, 120
- Article 7
- Article 8
- Après l’article 8
- Amendement no 62
- Article 9
- Amendement no 79
- Après l’article 9
- Amendement no 71
- Article 10
- Amendements nos 61 et 126 rectifié
- Sous-amendement nos 133, 140 rectifié, 141, 135 rectifié, 134, 136 rectifié, 137
- Après l’article 10
- Amendements nos 151 et 127 rectifié
- Sous-amendement nos 145, 146, 149, 150, 148, 147
- Amendements nos 122, 5, 123, 124, 70, 67 et 107
- Vote sur l’ensemble
- 2. Ordre du jour de la prochaine séance
Présidence de Mme Clémence Guetté
vice-présidente
Mme la présidente
La séance est ouverte.
(La séance est ouverte à quinze heures.)
1. Transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l’emploi des salariés expérimentés et évolution du dialogue social
Suite de la discussion d’un projet de loi
Mme la présidente
L’ordre du jour appelle la suite de la discussion du projet de loi portant transposition des accords nationaux interprofessionnels en faveur de l’emploi des salariés expérimentés et relatif à l’évolution du dialogue social (nos 1526, 1617). Ce matin, l’Assemblée a commencé l’examen des articles, s’arrêtant à l’amendement no 73 à l’article 3.
La parole est à M. Stéphane Viry, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour soutenir l’amendement no 73.
M. Stéphane Viry, rapporteur de la commission des affaires sociales
L’adoption en commission d’un amendement de Mme Taillé-Polian a conduit à préciser que l’employeur ne peut avoir accès aux résultats de la visite médicale.
Les données médicales couvertes par le secret médical ne doivent pas pouvoir être communiquées à l’employeur – nous sommes bien d’accord. Toutefois, la visite médicale peut aboutir à la formulation par le médecin du travail de « mesures individuelles d’aménagement, d’adaptation ou de transformation du poste de travail ou de[s] mesures d’aménagement du temps de travail » prévues à l’article L. 4624-3 du code du travail. Il est pertinent que l’employeur ait connaissance de ces préconisations pour pouvoir les appliquer.
L’article 3 vise à mieux articuler la visite médicale et l’entretien professionnel de mi-carrière. Pour éviter toute confusion, je propose de préciser que c’est aux données de santé du salarié que l’employeur n’a pas accès, et non aux résultats de la visite médicale dans leur ensemble.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi, pour donner l’avis du gouvernement.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre auprès de la ministre du travail, de la santé, de la solidarité et des familles, chargée du travail et de l’emploi
Avis favorable.
(L’amendement no 73 est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir les amendements nos 98, 102 et 104, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Mme Sophie Taillé-Polian
Ces trois amendements visent à donner plus de consistance à l’entretien de mi-carrière. Pour l’heure, cet entretien permet au salarié de parler de sa situation, d’évoquer sa santé, la place qu’il occupe dans l’entreprise et ses perspectives de carrière. Pour exploiter pleinement le potentiel de cet entretien, il faut que d’autres problématiques puissent y être abordées de manière systématique.
Par l’amendement no 98, nous proposons que le contenu technique du travail, son organisation, les conditions de travail et les relations au travail soient analysés en détail lors de cet entretien, afin de disposer d’une vision à 360 degrés de la situation du salarié.
Par l’amendement no 104, nous proposons que le salarié puisse solliciter lors de l’entretien l’intervention de professionnels de la santé au travail et de la prévention des risques professionnels pour évaluer l’organisation collective du travail. En effet, le maintien des seniors en emploi dans des conditions qui permettent leur plein épanouissement, donc l’exploitation optimale de leur expérience, ne dépend pas uniquement de leur organisation individuelle, mais de l’organisation globale du travail dans l’entreprise. Il nous semble donc essentiel que ces entretiens soient l’occasion de déclencher une réflexion collective.
Enfin, l’entretien de mi-carrière doit permettre d’informer chaque salarié sur le compte professionnel de prévention (C2P). Ce dispositif n’est pas assez utilisé : peu de salariés en bénéficient, non seulement parce que les critères d’accès sont très restrictifs, mais aussi en raison du non-recours aux droits, qui s’explique notamment par un déficit d’information.
Ces trois propositions permettraient de rendre cet entretien encore plus efficace pour encourager le maintien des seniors dans l’emploi et pour qu’ils soient pleinement épanouis dans l’entreprise.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Stéphane Viry, rapporteur
Ces amendements ont été déposés avant l’adoption, ce matin, de l’amendement no 128 du gouvernement, qui a apporté des réponses à vos préoccupations. L’accord national interprofessionnel (ANI) du 25 juin 2025 a également clarifié les questions relatives à l’organisation et aux conditions de travail, notamment à travers la mise en place de cet entretien de mi-carrière. Vos amendements sont donc quelque peu redondants : nous avons déjà légiféré dans la direction que vous indiquez. Je vous demande donc de les retirer, à défaut de quoi je donnerai un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
L’adoption de l’amendement no 128 du gouvernement, qui a précisé les modalités de l’entretien de mi-carrière, répond en partie à vos préoccupations. Je donne donc un avis défavorable sur les amendements nos 98 et 104.
En revanche, je m’en remets à la sagesse de l’Assemblée sur l’amendement no 102, qui vise à intégrer une information sur le C2P à l’entretien de mi-carrière. Comme vous l’avez très justement dit, ce dispositif n’est pas assez utilisé : on dénombre seulement 675 000 comptes professionnels de prévention. Nous pouvons mieux faire. Il est déjà prévu que le salarié reçoive une information sur ses droits au C2P par courrier, mais utiliser l’entretien de mi-carrière pour que les employeurs et les salariés connaissent mieux ce dispositif est une bonne idée.
(Les amendements nos 98, 102 et 104, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
(L’article 3, amendé, est adopté.)
Après l’article 3
Mme la présidente
Les amendements nos 49 de M. Louis Boyard, 116 de Mme Sophie Taillé-Polian, 50 de M. Louis Boyard et 111 de Mme Sophie Taillé-Polian, pouvant être soumis à une discussion commune, sont défendus.
Les amendements nos 49 et 116, d’une part, ainsi que les amendements nos 50 et 111, d’autre part, sont identiques.
Quel est l’avis de la commission ?
M. Stéphane Viry, rapporteur
Vous souhaitez rétablir une visite médicale d’aptitude. Cette proposition dépasse largement le champ de l’ANI et même la question de l’emploi des seniors. Cette question peut être discutée, mais pas dans le cadre de ce projet de loi. Vous voulez évoquer la loi El Khomri de 2016, mais ce n’est pas le sujet d’aujourd’hui : je souhaite que nous nous en tenions à la transcription de l’ANI.
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
Si on veut vraiment mettre en place une prévention, et donc anticiper les accidents ou les situations de rupture, par exemple les burn-out, la visite médicale préalable à l’embauche et les visites annuelles ou bisannuelles – selon que vous voterez l’amendement no 49 ou le no 50 – contribuent à détecter les situations de détresse avant qu’elles ne deviennent inextricables, voire irréparables. Il faut donc revenir sur la suppression de ces visites.
Madame la ministre, avez-vous entendu les médecins du travail qui s’expriment sur la situation dans les entreprises ? Si les médecins pouvaient rencontrer les travailleurs et les travailleuses plus régulièrement, on pourrait faire baisser le nombre d’affections de longue durée (ALD), donc réduire les dépenses sociales. Pour améliorer la prévention, faire des économies sur le long terme et sauver la vie de travailleurs et de travailleuses, je vous invite à voter ces amendements.
(Les amendements identiques nos 49 et 116 et les amendements identiques nos 50 et 111, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Article 4
Mme la présidente
Sur les amendements nos 52, 53, 25 et identiques, 2 et identiques, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 52, qui tend à supprimer l’article 4.
M. Louis Boyard
Vous avez tenté de faire passer la pilule de la réforme des retraites, mais comme vous avez fini par vous rendre compte que vous aviez fait n’importe quoi, vous avez eu une idée : le CDI senior. En apparence, c’est génial, puisque cela vise à favoriser l’emploi des seniors. Pour pouvoir signer ce type de contrat, il faudra fournir un document de la Caisse nationale d’assurance vieillesse (Cnav). Lors de l’examen en commission, nous vous avons fait remarquer qu’obtenir un document auprès de la Cnav pouvait demander deux à quatre mois, et parfois plusieurs années – on connaît des gens dans cette situation. Comme ce contrat permettra aux employeurs d’économiser de l’argent, ils ne proposeront plus d’autres types de contrat aux seniors – sans le document de la Cnav, pas d’emploi pour les seniors !
Actuellement, après avoir dépassé l’âge qui permet de toucher une retraite à taux plein, vous pouvez continuer à travailler pour bénéficier d’une surcote. Avec le CDI senior, l’employeur pourra décider de mettre fin au contrat dès que le salarié aura atteint l’âge ouvrant droit à une retraite à taux plein. Certains seniors devront donc fournir un document très difficile à obtenir pour réussir à décrocher un emploi, emploi qui ne leur permettra pas de bénéficier de la surcote. Une fois retraités, ils toucheront donc des pensions plus faibles. C’est complètement stupide !
Par ailleurs, tout cela coûtera de l’argent à l’État, en raison des exonérations de cotisations. Pour tenter d’éviter les dérives, vous avez interdit de réembaucher un salarié en CDI senior dans les six mois qui suivent son départ d’une entreprise. Certains employeurs licencieront donc leurs salariés seniors pour les réembaucher six mois plus tard, une fois qu’ils auront récupéré le document auprès de la Cnav. En fin de compte, ces salariés toucheront une retraite à taux plein, mais sans possibilité de surcote.
Le CDI senior, c’est le moyen que vous avez trouvé pour faire passer la pilule de la réforme des retraites, mais cela ne fonctionnera pas car c’est aberrant. Vous vous apprêtez à enfermer les seniors dans des contrats précaires qui leur enlèvent la possibilité de décider s’ils veulent continuer ou arrêter de travailler. Voilà la nouvelle trouvaille macroniste pour essayer de faire passer une pilule qui ne passe pas : abrogez la réforme des retraites, ce sera plus rapide ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
Mme Gabrielle Cathala
Exactement !
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Turquois, rapporteur de la commission des affaires sociales, pour donner l’avis de la commission.
M. Nicolas Turquois, rapporteur de la commission des affaires sociales
Cette disposition, soutenue pas des organisations patronales comme salariales, est une mesure essentielle de l’accord national interprofessionnel. Cela nous engage – nous en avons longuement discuté lors des auditions, mon corapporteur Stéphane Viry et moi-même, avec les représentants des organisations professionnelles.
Ce dispositif, d’autre part, est expérimental. Il ne concernera pas tous les salariés de plus de 60 ans, comme vous l’avez laissé entendre, mais seulement ceux d’entre eux qui seraient au chômage. Ces derniers – les statistiques en attestent – éprouvent beaucoup plus de difficultés que les autres salariés à trouver un emploi, parce que les employeurs ont des réticences à leur proposer un CDI. Sans disposition particulière, en effet, un salarié de plus de 60 ans peut souhaiter – c’est compréhensible – continuer de travailler jusqu’à 70 ans, âge de la mise à la retraite d’office.
Le CDI que l’article tend à instituer est un compromis élaboré par les partenaires sociaux. Il a le mérite d’être visible. Plutôt que de déplorer – comme je l’ai entendu en commission – qu’un tel contrat discrimine certains salariés, voyons-y une solution opérationnelle et expérimentale pour que des personnes à qui cela n’arrive pas souvent se voient proposer un emploi.
J’en fais l’expérience sur le terrain : dans une zone rurale où la main-d’œuvre est plutôt rare, il pourrait être très pertinent de proposer un tel contrat à des personnes de 60 ans et plus, riches de leur expérience. Mais l’appréhension de ne pas pouvoir mettre fin au contrat avant leurs 70 ans est une des raisons pour lesquelles on ne cherche pas à les embaucher.
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian
Il convient, en effet, de respecter un accord passé entre les organisations syndicales et patronales. L’État, cependant, est concerné par cet accord : puisqu’il prévoit une exonération de cotisation, nous avons notre mot à dire.
Or ce contrat, d’après nous, pose un certain nombre de problèmes assez importants.
On peut craindre, tout d’abord, des effets d’aubaine – nous y reviendrons.
M. Nicolas Sansu
C’est sûr !
Mme Sophie Taillé-Polian
On peut redouter aussi des reculs pour les salariés. Choisir l’âge de son départ à la retraite est un droit. Avec ce contrat, cependant, le salarié s’entendra dire : on t’embauche, mais tu partiras du moment que tu auras droit au taux plein. De cette manière, on empêchera un certain nombre de salariés de partir plus tard et d’accéder à d’éventuelles surcotes – pour ceux qui en ont la force et l’envie.
M. Sylvain Berrios
Il faudrait savoir : voulez-vous qu’ils puissent partir à la retraite plus tôt ou bien plus tard ?
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
Je trouve assez fabuleux que vous prétextiez l’inquiétude des employeurs à l’idée d’embaucher un travailleur expérimenté s’approchant de l’âge de la retraite pour justifier une discrimination ! On ne va pas proposer une pommade pour apaiser chacune des craintes des employeurs. Ils sont aussi inquiets, après tout, des charges dans leur ensemble, de la nécessité d’améliorer les conditions de travail ou simplement du fait qu’il faille payer les salaires – on ne va pas prendre tout cela en charge pour rassurer les patrons !
De surcroît, vous faites de ces discriminations un argument pour instaurer un dispositif qui créera de nouvelles. M. Boyard l’a dit, lorsque des entreprises licencieront pour pouvoir rembaucher, à moindre coût, quelques mois plus tard, ce sera encore de la discrimination, puisque cette pratique visera des employés proches de l’âge de la retraite.
Il faudrait donc cesser de passer de la pommade aux patrons et arrêter de les exonérer de cotisations, pour enfin commencer à les sanctionner. Les inspecteurs et les inspectrices du travail doivent ainsi être plus nombreux à pouvoir vérifier ce que font les entreprises. Vous avez manqué l’occasion de voter un amendement qui leur aurait permis d’être informés de tout licenciement d’une personne de plus de 45 ans, et de vérifier ainsi que les employeurs ne discriminent pas leurs salariés. (Mme Mathilde Feld applaudit. – M. Nicolas Sansu fait signe qu’il demande la parole.)
Mme la présidente
Je ne peux pas vous donner la parole, monsieur Sansu, puisque j’ai déjà donné la parole à deux orateurs contre.
Mme Sophie Taillé-Polian
Je m’abstiendrai sur ce vote !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Nous avons parlé, ce matin, du maintien en activité des salariés et nous abordons maintenant la question de leur recrutement. Un tiers des chômeurs de longue durée sont des personnes de plus de 50 ans. La durée moyenne du chômage, pour les actifs de plus de 50 ans, est de 588 jours.
M. Nicolas Sansu
Eh oui !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
La question se pose donc sérieusement de savoir comment faciliter leur recrutement – non pas avec de petits contrats précaires, mais avec de véritables CDI qui permettraient aux salariés, dont c’est l’aspiration première, de partir à la retraite à taux plein.
M. Hadrien Clouet
Pas en les précarisant !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
C’est de cela qu’ils s’inquiètent, avant que de savoir s’ils veulent travailler plus longtemps, par le dispositif du cumul emploi-retraite par exemple. Le contrat de valorisation de l’expérience – que quatre organisations syndicales représentatives de 75 % des salariés ainsi que les organisations patronales ont accepté – tend précisément à cela. À partir de 60 ans – voire de 58 ans pour les branches qui l’ont accepté –, un salarié pourra être embauché en CDI, tandis que l’employeur conservera la possibilité de mettre fin au contrat de travail à compter du jour où le salarié pourra partir à la retraite à taux plein – sans préjudice de la possibilité de poursuivre, si les deux parties sont d’accord, au-delà de cette date.
C’est une réponse concrète et opérationnelle au problème du chômage,…
Mme Ségolène Amiot
Précaire, surtout !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
…notamment de longue durée, des personnes de plus de 58 ans.
Au sujet de l’indemnité de départ de mise à la retraite, permettez-moi, monsieur Sansu, de corriger ce que vous avez dit, ce matin, dans la discussion générale. Vous y avez avancé le chiffre de 120 millions d’euros : mais c’est là le montant total des indemnités de mise à la retraite. Nous parlons ici d’une exonération de charges sur les 57-64 ans, laquelle représente 60 millions d’euros – loin du cadeau que vous évoquiez. Cette exonération, encore une fois, vise à faciliter le recrutement de personnes qui, quand elles sont au chômage, y restent en moyenne plus de dix-huit mois.
Une telle expérimentation, prévue pour cinq ans, vaut la peine d’être tentée. Elle sera, je pense, plus efficace que les dispositifs mis en place les années précédentes, qui n’ont pas porté tous leurs fruits.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 52.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 54
Nombre de suffrages exprimés 52
Majorité absolue 27
Pour l’adoption 17
Contre 35
(L’amendement no 52 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement no 80.
M. Nicolas Sansu
Il touche au cœur de l’article 4 : ce nouveau contrat « boomer ». Drôle de CDI que ce contrat dont on connaît la fin dès le début : embauchez-moi, et vous pourrez me virer à ce moment-là, en payant moins de cotisations sociales sur les indemnités retraite – c’est tout de même pas mal !
Puisque je n’ai pas pu prendre la parole à l’occasion de l’amendement précédent, je vais en profiter, madame la ministre, pour vous poser quelques questions.
France Travail a le droit de radier les personnes privées d’emploi après qu’elles ont refusé par deux fois une offre dite « raisonnable ». Est-ce que ce sera également le cas pour nos boomers ? C’est toujours le même problème : en repoussant l’âge de la retraite de 62 à 64 ans, vous avez plongé dans la précarité des dizaines de milliers de travailleuses et de travailleurs. Ce n’est pas ce contrat, qui n’a de CDI que le nom puisqu’on en connaît la fin, qui résoudra ce problème !
Dans ce texte, madame la ministre, vous vous trompez complètement de solution, solution qu’il faut chercher dans le départ progressif payé à taux plein. C’est ainsi que l’on permettra aux seniors de s’en sortir et aux jeunes de trouver un emploi.
Ce nouveau contrat – autre difficulté – créera également un effet d’aubaine qui empêchera d’autres personnes de rentrer dans l’emploi.
Vous avez écarté très rapidement, tout à l’heure, la contribution « Delalande » en prétendant qu’elle n’avait pas marché. Il faut pourtant bien responsabiliser les employeurs et les sanctionner quand ils licencient les plus de 50 ans. Il serait opportun de revenir au principe de cette contribution, qui a existé entre 1987 et 2008. L’amendement vise à la rétablir.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas Turquois
Permettez-moi, monsieur Sansu, de revenir sur quelques erreurs dans votre propos.
M. Stéphane Vojetta
Quand c’est volontaire ce n’est pas une erreur, c’est un mensonge !
M. Nicolas Turquois
Le fait de signer un contrat de valorisation de l’expérience n’oblige en rien l’employeur à se séparer du salarié le jour où ce dernier peut partir à taux plein : il lui en donne simplement la possibilité, ce qui est bien différent. (M. Nicolas Sansu et Mme Ségolène Amiot s’exclament.)
Le senior – à qui on ne propose pas, sinon, de CDI – y gagne en visibilité sur quatre, cinq ou six ans : c’est une amélioration majeure.
Vous évoquez des effets de bord. Si le dispositif est bien cadré, on ne peut en effet pas les exclure, raison pour laquelle la disposition est de nature expérimentale. Il faudra donc l’évaluer – nous y reviendrons.
Vous souhaitez un retour à la contribution « Delalande ». Regardez pourtant ce qui s’était passé alors : beaucoup d’entreprises, entretenant des doutes sur le futur de leurs activités, se sont séparées de leurs salariés avant leur cinquantième anniversaire, pour ne pas prendre le risque d’avoir à payer, ultérieurement, cette contribution.
Il faut donc faire preuve de responsabilité en cette matière. Sur l’emploi des seniors, le regard des entreprises et des citoyens évolue. De nombreuses politiques publiques, portées par des gouvernements de toutes obédiences, ont eu tendance à traiter les seniors comme une variable d’ajustement. C’était une erreur : le taux d’emploi reste faible chez les jeunes, et mauvais chez les seniors. Nous devons changer notre approche de l’emploi des seniors. Cette expérimentation, contrairement à la méthode que vous préconisez, me semble aller dans le bon sens.
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
L’offre raisonnable d’emploi concernera-t-elle les travailleurs de plus de 60 ans ? On ne vit peut-être pas dans le même monde, monsieur Sansu, mais je suis convaincue que beaucoup de travailleurs de plus de 60 ans aimeraient recevoir une ou deux offres raisonnables d’emploi.
M. Nicolas Sansu
Des travailleurs de plus de 60 ans, j’en rencontre plus que vous dans ma circonscription !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Moi aussi, je parle de la vraie vie ! Après 588 jours de chômage, qui ne voudrait pas recevoir une ou deux offres d’emploi ?
M. Nicolas Sansu
Vous ne répondez pas à ma question !
Mme Ségolène Amiot
Ces offres d’emploi, sont-elles vraiment raisonnables ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Ces offres sont raisonnables, car elles doivent concerner un poste dont le métier, la qualification et le salaire sont comparables à ceux du poste précédemment occupé par le demandeur d’emploi. En outre, l’offre raisonnable d’emploi concerne un poste proposé dans le même territoire et la même région – les rémunérations peuvent en effet varier en fonction du lieu d’habitation des travailleurs.
Sachant que le taux de chômage de longue durée atteint un niveau très élevé chez les travailleurs expérimentés du pays, tester pendant cinq ans une disposition soutenue par les organisations syndicales et patronales me semble valoir la peine.
Mon avis est donc défavorable.
Mme la présidente
La parole est à M. Louis Boyard.
M. Louis Boyard
Nous nous trompons de débat. On compte actuellement 6 millions de demandeurs d’emploi dans notre pays, pour un nombre d’emplois non pourvus estimé entre 500 000 et 600 000. Le véritable problème, c’est la pénurie d’emplois !
Pour relancer l’emploi, vous faites des cadeaux fiscaux et exonérez les entreprises des cotisations sociales, mais vous constatez que ça ne marche pas. Vous décidez alors qu’il faut faire des économies, ce qui ralentit l’activité : ne cherchez pas plus loin les causes du marasme dans lequel on se trouve ! Pour faire des économies, vous faites par exemple travailler les gens plus longtemps, ce qui augmente le nombre de demandeurs d’emploi, alors que la France connaît une pénurie de postes. Le CDI senior est un non-sens !
Et pensez-vous que la Cnav sera en mesure de fournir le document confirmant l’éligibilité du salarié à ce dispositif, alors qu’elle est déjà surchargée de travail ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Oui !
M. Louis Boyard
Certes, le CDI senior fait l’objet d’une expérimentation. Mais une expérimentation qui dure cinq ans et permet une telle exonération de cotisations, ça s’appelle une aubaine, qui sera utilisée massivement !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Tant mieux !
M. Sylvain Berrios
C’est précisément l’objectif !
M. Stéphane Vojetta
C’est ce que les entreprises et les seniors espèrent.
M. Louis Boyard
Les seniors qui ne pourront pas produire le document demandé se verront refuser le CDI. Quant à ceux qui espéraient bénéficier d’une surcote, ils ne l’obtiendront pas parce que leur employeur aura mis fin au contrat avant.
Résumons. Vous accordez des cadeaux fiscaux, qui ralentissent l’activité économique sans relancer l’emploi ; vous faites ensuite des économies et faites travailler les gens plus longtemps, grâce à des exonérations de cotisations. Vous avez créé une boucle !
On débat comme s’il y avait profusion d’emploi dans notre pays, mais ce texte n’aidera pas les seniors. Vous refaites constamment les mêmes erreurs, sans jamais en tirer les leçons ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
(L’amendement no 80 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de quatre amendements, nos 53, 25, 54 et 90, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 25, 54 et 90 sont identiques.
La parole est à M. Bérenger Cernon, pour soutenir l’amendement no 53.
M. Bérenger Cernon
Ce que vous appelez le contrat de valorisation de l’expérience n’est rien d’autre qu’un contrat qui créera encore plus de précarité, notamment pour les seniors.
Nous refusons qu’un tel contrat soit inscrit durablement dans le droit du travail. Si vous aviez réellement voulu valoriser l’expérience, vous auriez promu des dispositifs existants, comme le glissement vieillesse technicité (GVT) ; au lieu de quoi, vous avez préféré inventer le CDI senior.
Derrière l’expérimentation se cache la pérennisation. Notre amendement de repli tend à limiter à un an la durée de cette expérimentation, prévue pour cinq ans. En effet, si on ne connaît pas la suite, on peut la deviner : dans trois ans, un discret article du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS), adopté sans débat, prolongera la durée de validité de ce cadeau fiscal au patronat. Voilà l’idée qui sous-tend le dispositif !
On me dira qu’il ne s’agit que d’un cadeau parmi d’autres : on compte aujourd’hui plus de 90 milliards d’euros d’exonérations sociales par an, autant d’argent qui manque cruellement et tous les jours aux hôpitaux, aux retraités, aux services publics essentiels.
Un peu de bon sens : voter la limitation de cette expérimentation à un an, c’est nous doter d’un garde-fou et empêcher que la dérégulation systématique du monde du travail ne s’installe durablement dans la loi, sans même que ses conséquences aient jamais été évaluées sérieusement ! Ce contrat précarise les seniors, coûte cher à la sécurité sociale et ne fait l’objet d’aucune étude d’impact budgétaire : il n’y a donc aucune raison de l’imposer durant cinq ans ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Hadrien Clouet
Excellent !
Mme la présidente
La parole est à M. Nicolas Sansu, pour soutenir l’amendement no 25.
M. Nicolas Sansu
Pourquoi fixer à cinq ans la durée de l’expérimentation du CDI senior, alors que la loi organique du 14 mars 2022 relative aux lois de financement de la sécurité sociale prévoit qu’une expérimentation dure trois ans et que sa prolongation suppose un vote du Parlement ?
Cette règle devrait être intangible. Aussi proposons-nous de ramener à trois ans la durée de cette expérimentation, comme c’est le cas de toutes celles qui relèvent du champ d’application des lois de financement de la sécurité sociale ou du code du travail.
Mme la présidente
La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir l’amendement identique no 54.
M. Hadrien Clouet
Il s’agit de revenir au droit commun. Une expérimentation n’est pas censée durer vingt-cinq, quarante ou cinquante ans, mais doit permettre d’évaluer à court terme un dispositif, pour le réorienter si nécessaire. Si nous nous donnions rendez-vous dans cinq ans, devrions-nous, le cas échéant, passer quatre ans et demi à constater que le CDI senior ne fonctionne pas ? Non, ce serait évidemment absurde !
Madame la ministre, vous avez affirmé qu’à 60 ans, beaucoup seraient contents de recevoir une offre raisonnable d’emploi. D’abord, à 60 ans, beaucoup seraient contents d’être en retraite ! Ensuite, vous dites que les offres d’emploi sont rares – c’est vrai –, mais pourquoi radiez-vous ceux qui ne les acceptent pas ? Ce n’est pas nécessaire, puisque les offres ne sont pas assez nombreuses pour répondre à tous les demandeurs ! Votre politique de restriction n’a pas de sens sur le plan de la logique à strictement parler.
Quand on en parle, on a l’impression que les offres raisonnables d’emploi sont vraiment raisonnables. Or ce n’est pas le cas ! Avec le décret du 20 mars 2025, vous avez rendu raisonnable toute offre faite à un demandeur d’emploi, sans aucun critère géographique ou kilométrique. Une offre d’emploi concernant un poste à Marseille resterait raisonnable même si elle était adressée à un Brestois !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Non !
M. Hadrien Clouet
Si ! Depuis le décret du 20 mars, le caractère raisonnable d’une offre d’emploi n’est plus apprécié en fonction d’un critère géographique – votre conseillère hoche la tête en signe d’approbation, je vous invite à l’écouter. (M. Louis Boyard applaudit.)
Jusqu’en 2019, l’ancien salaire était pris en considération et il n’était pas possible d’obliger un demandeur d’emploi à bosser pour un salaire inférieur à sa précédente rémunération. C’est maintenant possible, puisque les offres raisonnables d’emploi tiennent compte du salaire moyen pratiqué pour l’emploi visé, dans sa région de localisation.
Ainsi, on peut, sous peine de radiation, obliger une chômeuse, un chômeur de 60 ans ou 61 ans à accepter un nouvel emploi et perdre ainsi 300 ou 400 euros de salaire.
Faire semblant, ça va bien deux minutes ! Il n’y a pas d’offre raisonnable d’emploi. Il y a des offres pour des postes à l’autre bout du pays, payés 300 balles de moins, et vous radiez ceux qui les refusent ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP).
M. Nicolas Sansu
Exactement !
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 90.
Mme Sophie Taillé-Polian
Dans la suite de la discussion de l’article, nous reviendrons sur les différents problèmes que pose le contrat de valorisation de l’expérience et sur l’effet d’aubaine qu’il pourrait provoquer.
La durée de trois ans est celle fixée par la règle commune. En ces temps de disette budgétaire, vous nous rebattez les oreilles de la nécessité de faire des économies : nous devrions vraiment être parcimonieux et dépenser au plus juste.
Une commission d’enquête sénatoriale, dont le communiste Fabien Gay était rapporteur, a montré dans ses conclusions combien nous peinions à déterminer le montant de toutes les aides accordées aux entreprises et à mesurer l’effet de ces aides publiques – nous sommes toutefois convaincus que beaucoup s’engraissent grâce à cet argent public, par les dividendes.
Dépensons avec parcimonie et limitons à trois ans l’expérimentation. Évaluons-la correctement, pour vérifier si elle provoque des effets d’aubaine et si elle a des résultats réels.
Je ne suis pas contre l’idée que la lutte contre des discriminations structurelles, comme celle que subissent les seniors à l’embauche, passe par la dépense publique, mais soyons attentifs aux effets de bord et aux effets d’aubaine. Veillons à ne pas dilapider l’argent public en aides aux entreprises, peu efficaces et qui contribuent à l’enrichissement de certains.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Il a été dit que le contrat de valorisation de l’expérience précariserait les seniors. Dans la discussion générale, on a aussi entendu que les travailleurs de plus de 60 ans ou de plus de 65 ans étaient les plus nombreux dans la catégorie des actifs ni en emploi ni en retraite. Or nous proposons une solution, certes imparfaite à vos yeux, pour faciliter leur retour à l’emploi : salariés, ils seront certainement moins précaires que lorsqu’ils étaient ni en emploi ni en retraite.
Vous dites que cela coûte cher, mais tout actif qui revient à l’emploi génère par son travail des cotisations fiscales et sociales, qui viennent abonder les comptes publics et ceux de la sécurité sociale.
L’expérimentation est prévue pendant cinq ans. Premièrement, les partenaires sociaux se sont accordés sur cette durée. Deuxièmement, il faut du temps pour qu’un nouveau dispositif produise ses effets : si dans les grands groupes, les services de ressources humaines s’approprieront rapidement ce contrat, les très petites, petites et moyennes entreprises (TPE-PME) des territoires ruraux en entendront parler dans plus longtemps.
Enfin, l’exonération des cotisations sur les indemnités de départ en retraite ne sera valable que pendant trois ans, durée maximale dans le cadre d’un projet de loi – il aurait fallu l’inscrire dans un PLFSS pour l’appliquer plus longtemps. D’ici trois ans, dans le cadre de l’examen du PLFSS, nous devrons évoquer à nouveau cette disposition.
J’achèverai mon propos sur une note plus caustique. Monsieur Boyard, comme d’autres députés de votre groupe, vous nous dites à longueur de temps que vous serez au pouvoir en 2027.
M. Emeric Salmon
Ce ne sera pas le cas !
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Si votre prédiction était avérée, vous seriez libres, dans deux ans, de revenir sur les règles dont nous discutons. (Sourires.)
Avis défavorable.
M. Louis Boyard
Nous aurions dû être au pouvoir dès 2025 !
M. Emeric Salmon
On est en 2025. Vous ne savez pas compter !
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Vous dites « votre contrat de valorisation de l’expérience », « votre CDI senior ». Ces dispositions ne sont pas celles du gouvernement, elles ont été négociées et proposées par quatre organisations syndicales – la CFDT, Force ouvrière, la CFE-CGC et la CFTC – et trois organisations patronales.
Ensuite, le rapporteur a rappelé que si l’expérimentation devait durer cinq ans, l’exonération ne serait appliquée que pendant trois ans, avant d’être rediscutée dans le cadre du PLFSS.
Enfin, monsieur Clouet, le décret auquel vous faites référence et que j’ai signé au début du mois de mars concerne les travailleurs transfrontaliers.
M. Hadrien Clouet
Pas du tout !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
C’est parce que 77 000 de ces travailleurs coûtent 800 millions d’euros chaque année en assurance chômage qu’il a été décidé de rappeler que la référence du salaire dans l’offre raisonnable d’emploi doit être déterminée de notre côté de la frontière et non pas du côté allemand, luxembourgeois ou suisse. (M. Jérôme Legavre mime le geste d’un rameur.)
M. Hadrien Clouet
C’est faux.
Mme la présidente
La parole est à M. Stéphane Vojetta.
M. Stéphane Vojetta
Sachant qu’on nous écoutait au dehors de cet hémicycle et que des jeunes et des enfants étaient présents dans les tribunes, je suis revenu sur ma décision de ne pas m’exprimer sur ce texte. Il ne faut pas laisser croire que la vision du travail de nos collègues de La France insoumise est la seule qui vaille dans cette assemblée.
Il y a ici des parlementaires convaincus que le travail peut être noble, libérateur, qu’il peut donner de la dignité à la personne, quel que soit son âge. Le travail peut apporter la dignité, c’est un propos qu’un Louis Boyard ne comprendra jamais. (Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback applaudit.)
Comment peut-on dire qu’un chômeur de 60 ou 61 ans, que quelques mois séparent de la retraite, sera précarisé par un contrat, même un CDI senior ?
M. Jérôme Legavre
À cet âge, il devrait être en retraite !
M. Stéphane Vojetta
Au contraire, ce contrat l’aidera à sortir de la précarité, il lui donnera de nouvelles perspectives, lui permettra de participer à nouveau à la collectivité et de prendre part à l’effort collectif.
Le travail, c’est digne, c’est beau, ce n’est pas une punition ! Être employeur, ce n’est pas un crime contre l’humanité. (Exclamations sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Je m’opposerai à tous les amendements qui viendront de vos bancs ! (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian
Monsieur Vojetta, je vous invite à mesurer vos propos. Un crime contre l’humanité ? Ce n’est pas possible d’utiliser de tels mots !
Quant à nous, nous défendons le travail quand il est émancipateur,…
M. Théo Bernhardt
Vous ne savez même pas ce que c’est !
Mme Sophie Taillé-Polian
…c’est-à-dire quand il offre la possibilité de remplir ses missions en étant rémunéré à la hauteur de son engagement et dans le respect de sa santé. (Applaudissements sur quelques bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations sur plusieurs bancs du groupe RN.) C’est essentiel ! Mais nous ne le défendons pas quand il expose à des conditions de travail qui détruisent et qui conduisent à être viré sans avoir plus droit à rien. Alors pas de leçons, monsieur Vojetta, je vous en prie ! (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
Madame la ministre, vous nous parlez de dépenses publiques et d’une exonération qui représenterait environ 60 millions d’euros. Avez-vous prévu de la compenser dans le budget de l’État ? Certaines exonérations ne le sont jamais, ce qui met la protection sociale en grande difficulté et justifie ensuite les mesures revenant sur les droits. Quels moyens envisagez-vous pour assurer l’équilibre budgétaire ? Vous avez sans doute de nombreuses propositions pour limiter les services publics…
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Madame Taillé-Polian, les exonérations de cotisations sur les indemnités de mise à la retraite des 57-64 ans représentent aujourd’hui 60 millions, mais c’est en réalité un maximum. Seules 20 % des personnes pourraient être concernées. Il ne s’agit donc que d’une première indication de quantum.
En outre, lorsque les personnes sortent du chômage, parfois du chômage de longue durée, cela fait moins d’assurance chômage et plus de contributions sociales côté employeur et côté salarié, ce dont, je crois, nous nous félicitons tous.
Mme la présidente
La parole est à M. Louis Boyard.
M. Louis Boyard
Cher collègue Vojetta, si vous aimez votre travail, tant mieux pour vous ! Vous êtes banquier d’affaires et nous le respectons, mais en tant que député, nous ne représentons pas uniquement les personnes qui font notre métier.
M. Paul Christophle
Et vous, c’est quoi votre travail ?
M. Louis Boyard
Il y a des gens qui se cassent le dos quand ils sont au travail (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP) et qui ne sont pas capables de travailler au-delà de 60 ans parce qu’ils ont exercé un métier physique pendant toute leur vie. Si vous vous voulez travailler jusqu’à 70 ou 75 ans, cela vous regarde, mais dans cette assemblée, nous devons aussi parler pour les gens qui se cassent le dos au travail ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Nous devons parler pour les gens qui doivent partir à la retraite à 60 ans parce que, pour eux, c’est une question de vie ou de mort !
Mme Mathilde Feld
Eh oui !
M. Louis Boyard
Par ailleurs, je ne vous reproche pas d’être un banquier d’affaires, je vous reproche de mener une politique de banquier d’affaires. Avec vous, nous sommes dans une boucle infernale. Il faut faire des économies avec la réforme des retraites, alors on fait travailler les gens plus longtemps, donc plus de seniors doivent travailler – mince ! le chômage des seniors augmente, comment faire ? On crée un contrat spécial pour faire des cadeaux aux patrons, qui vont vider les caisses – mince encore ! ça ne fonctionne pas, qu’est-ce qu’on fait ? (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LFI-NFP.)
M. Nicolas Forissier
C’est du grand n’importe quoi ! Dramatique !
M. Louis Boyard
Mince ! il faut refaire des économies, refaire des cadeaux aux patrons, et tout cela en boucle…
Rappelons que 6 millions de personnes recherchent un emploi dans notre pays et qu’entre 500 000 et 700 000 emplois sont non pourvus. Le marché du travail est en crise, les emplois manquent, il faut donc faire la retraite à 60 ans pour partager le temps de travail et préserver le corps de ceux qui ne peuvent pas travailler après cet âge ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Eux aussi ont besoin qu’on parle pour eux à l’Assemblée nationale.
M. Frédéric Weber
Commencez par travailler !
M. Louis Boyard
Voilà pourquoi nous vous appelons à ne pas instaurer le CDI senior : vous répétez en boucle la même erreur et, à la fin, ce n’est pas vous qui paierez, mais les Françaises, les Français et les retraités.
Vous nous dites de ne pas nous inquiéter car, comme nous le répétons, La France insoumise sera au pouvoir en 2027. Mais nous devrions y être depuis 2024, puisque nous avons gagné les élections ! (Applaudissements sur les bancs du groupe LFI-NFP. – Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 53.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 63
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 16
Contre 47
(L’amendement no 53 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 25, 54 et 90.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 61
Nombre de suffrages exprimés 61
Majorité absolue 31
Pour l’adoption 18
Contre 43
(Les amendements identiques nos 25, 54 et 90 ne sont pas adoptés.)
Rappel au règlement
Mme la présidente
La parole est à M. Stéphane Vojetta, pour un rappel au règlement.
M. Stéphane Vojetta
Sur le fondement de l’article 70, pour mise en cause personnelle.
J’ai été mis en cause au titre de ma carrière antérieure. Je tiens à rappeler à notre collègue Louis Boyard que je suis député comme lui, et élu par des électeurs après un processus démocratique.
M. Louis Boyard
Oui, c’est vrai.
M. Nicolas Sansu
Il a quand même battu Manuel Valls, il ne faut pas l’oublier !
M. Louis Boyard
Mais Manuel Valls est toujours là…
M. Stéphane Vojetta
Je suis extrêmement fier d’avoir travaillé et cotisé, d’avoir été employé et d’avoir créé des sociétés, d’avoir employé des personnes, que j’ai parfois dû licencier parce que le contexte était difficile, mais… (Mme la présidente coupe le micro de l’orateur.)
Mme la présidente
Monsieur Vojetta, vous pourrez intervenir dans le cours du débat si vous le souhaitez.
Article 4 (suite)
Mme la présidente
La parole est à M. Frédéric Weber, pour soutenir l’amendement no 16.
M. Frédéric Weber
Le contrat de valorisation de l’expérience est présenté par le gouvernement comme un outil majeur de soutien à l’emploi des seniors. L’intention est juste et nécessaire, mais pourquoi réserver ce dispositif aux personnes de 60 ans et plus, ou exceptionnellement aux personnes de 57 ans ? Ce seuil est mal calibré et rate sa cible. En effet, l’exclusion professionnelle liée à l’âge ne commence pas à 60 ans, mais hélas bien plus tôt. Ce constat ne relève pas d’une intuition, mais d’une réalité documentée. Le Défenseur des droits et France Stratégie ont montré cette discrimination silencieuse : à compétences égales, un candidat de 55 ans a trois fois moins de chance qu’un trentenaire d’être rappelé pour un entretien.
L’amendement propose un ajustement indispensable pour abaisser l’âge d’accès au contrat à 55 ans. C’est une mesure pragmatique, conforme à la réalité du marché du travail et au comportement des employeurs. Nous ne pouvons nous satisfaire que ce dispositif ignore la réalité à laquelle il est censé répondre. Réserver le contrat de valorisation de l’expérience aux plus de 60 ans, c’est refuser de voir que le déclassement professionnel commence dès 55 ans et que c’est précisément à cet âge que l’intervention publique serait la plus utile, la plus efficace et la moins coûteuse. Je vous invite donc à soutenir cet amendement, en conscience et en raison. (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas Turquois, rapporteur
J’entends vos arguments, mais avant d’être une mesure présentée par le gouvernement, le contrat de valorisation de l’expérience est d’abord une initiative des partenaires sociaux. De ce point de vue, il faut le souligner, la mesure est assez novatrice.
C’est un fait, plus on vieillit, plus il est plus difficile de trouver du travail, mais c’est aussi une question de représentation. En ouvrant le dispositif dès 55 ans, nous risquerions de sortir de l’expérimentation simple et d’entrer dans un champ d’application beaucoup plus large. Le projet de loi réserve le contrat aux personnes de 60 ans et plus, mais il sera possible de descendre à 57 ans dans le cadre d’un accord de branche. Il nous semble donc que cette mesure est équilibrée.
C’est toute la société qui doit changer de regard sur l’emploi des seniors.
Mme Ségolène Amiot
Ce n’est pas à la société mais aux employeurs de changer de regard !
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Je l’ai dit tout à l’heure, l’emploi des seniors a trop souvent été considéré comme une variable d’ajustement. Des réflexes ont été pris par les employeurs et par les salariés eux-mêmes, mais les auditions organisées par la commission ont mis en lumière un changement dans la manière de considérer le sujet, y compris de la part des organisations salariales, qui manifestent désormais la volonté de développer l’emploi des salariés expérimentés.
Restons-en à l’équilibre trouvé par les partenaires sociaux. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Louis Boyard.
M. Louis Boyard
C’est étonnant, le Rassemblement national soutient encore une fois la politique d’Emmanuel Macron en matière de retraites ! Vous en voulez même plus !
M. Théo Bernhardt
C’est vous qui votez avec les macronistes !
M. Louis Boyard
On ne comprend vraiment plus ce que vous voulez faire sur la réforme des retraites. (Exclamations sur les bancs du groupe RN.)
M. Charles Sitzenstuhl
Qu’est-ce que vous racontez ? Vous avez voté ensemble sur cette réforme !
M. Louis Boyard
Avant les élections, évidemment, vous êtes pour son abrogation, mais quand vous pensez que vous allez être élus, alors là, Jordan Bardella jette tout par la fenêtre et appelle à surveiller l’état des finances publiques. Et quand les macronistes proposent un CDI senior – une pommade à passer sur la réforme des retraites, un cadeau aux employeurs, une machine à précariser les retraités –, que dit le Rassemblement national ? « On en veut plus ! » Chaque fois que les macronistes font une proposition sur les retraites, le Rassemblement national en redemande. Je ne suis pas certain que ce soit le cas des Français. (Mêmes mouvements.)
Quant à nous, nous avons une position claire depuis le début : nous voulons la retraite à 60 ans.
M. Eddy Casterman
Vous êtes des démagos ! Vous avez voté pour eux !
M. Louis Boyard
Il fut un temps où vous souteniez cette position. Apparemment, vous êtes maintenant pour la retraite à 64 ans, voire à 67 ans. Ce n’est pas très lisible. Il faut en tout cas que ce soit clair pour tout le monde : quand les macronistes présentent un CDI senior pour les personnes de 57 ans et plus, qui les précarisera, vous proposez d’aller plus loin et d’abaisser l’âge à 55 ans. Vous êtes comme les macronistes, mais en pire ! (M. Hadrien Clouet applaudit.)
M. Frédéric Weber
Pourquoi vous avez voté pour eux, alors ?
Mme la présidente
La parole est à M. Gaëtan Dussausaye.
M. Gaëtan Dussausaye
Je suis ravi de prendre la parole après Louis Boyard, je vais ainsi pouvoir lui répondre.
Je commencerai toutefois par m’exprimer sur cet excellent amendement – tâchons d’avoir des débats à la hauteur des enjeux ! Le taux d’inemployabilité et de non-activité des seniors entre 55 et 60 ans est de 19 %. Évidemment, ce taux augmente de manière exponentielle plus on avance en âge. Si les partenaires sociaux ont reconnu l’intérêt d’ouvrir le dispositif aux 57 ans dans le cadre d’un accord de branche, c’est que nous avons raison sur le fond : il faut étendre le dispositif aux personnes sans travail âgées de 55 ans et plus.
J’en viens aux retraites. Lors des dernières élections législatives, plus de 12 millions d’électeurs ont parfaitement compris le programme de Marine Le Pen et Jordan Bardella, mais Louis Boyard en est toujours incapable aujourd’hui – c’est fascinant.
M. Louis Boyard
Abrogation ou pas ?
M. Gaëtan Dussausaye
Notre programme est très clair : nous voulons mettre le paquet sur ceux qui ont commencé à travailler jeune – avant 20 ans, ils partent à la retraite à 60 ans avec quarante annuités. Nous le répétons depuis 2022, c’est écrit noir sur blanc dans le programme de Marine Le Pen.
M. Aurélien Saintoul
Et la capitalisation, c’est dans votre programme ou pas ?
M. Gaëtan Dussausaye
Il faut simplement prendre la peine de se connecter au meilleur des sites qui soit, rassemblementnational.fr, et de cliquer sur l’onglet « Le projet ». (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) Au moins, maintenant, vous savez comment faire !
Vous parlez de ce dispositif comme d’une pommade. Je suis d’accord : le bilan de la Macronie en matière d’emploi, de lutte contre le chômage et de justice sociale pour les Français les plus âgés est loin d’être reluisant.
M. Charles Sitzenstuhl
Nous avons fait baisser le chômage !
M. Gaëtan Dussausaye
Mais si cette pommade est le fruit d’une négociation, c’est d’une négociation uniquement entre La France insoumise et la Macronie.
Mme Mathilde Feld
Le RN est la béquille de la Macronie !
M. Gaëtan Dussausaye
À aucun moment le Rassemblement national n’a passé d’accord avec les macronistes dans le cadre d’élections. Vous, au contraire, c’est ce que vous avez fait pour vous partager les places et empêcher une majorité RN à l’Assemblée. (Exclamations sur les bancs du groupe LFI-NFP.) Cela, c’est votre enfant, un enfant hideux et mauvais pour le pays, nous sommes tous d’accord là-dessus ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.)
(L’amendement no 16 n’est pas adopté.)
(M. Gaëtan Dussaussaye désigne les bancs du groupe EPR et ceux du groupe LFI-NFP.)
M. Emeric Salmon
Et voilà !
M. Théo Bernhardt
Vous voyez !
Mme la présidente
Je suis saisie de trois amendements identiques, nos 2, 63 et 81.
La parole est à Mme Océane Godard, pour soutenir l’amendement no 2.
Mme Océane Godard
Je l’ai dit ce matin, les députés du groupe Socialistes et apparentés sont dubitatifs concernant le contrat de valorisation de l’expérience. En effet, il ne suffit pas d’un contrat de travail ciblant un public en particulier et reposant sur une baisse du coût du travail pour donner du sens à l’emploi des seniors.
Par cet amendement, nous souhaitons cadrer le dispositif pour éviter tout effet d’aubaine : seules les personnes sans lien antérieur avec l’entreprise ou le groupe pourront signer ce contrat.
En ce qui concerne le rapport au travail, je trouve insupportable et indécent que certains projettent leur propre vision sur l’ensemble des Français. Chacun a un rapport au travail singulier, selon son vécu, son parcours, la difficulté du métier qu’il a exercé. Aujourd’hui, on ne souhaite plus forcément sacrifier sa vie pour la gagner. Beaucoup n’ont pas le choix et subissent leur vie professionnelle. Beaucoup aussi souhaitent exister autrement que par leur travail, à travers ce qu’ils sont plutôt que ce qu’ils font. Une telle approche doit être respectée et nous inciter à faire preuve d’innovation sociale en imaginant d’autres formes de sécurisation des parcours. Nous devons être conscients aussi que le marché du travail n’est pas constitué uniquement de CDI à temps plein, mais j’y reviendrai. (M. Jacques Oberti applaudit.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 63.
Mme Ségolène Amiot
Imaginons un salarié qui a rendu de bons et loyaux services pendant cinq, dix ou vingt ans et qui voit la retraite approcher. Comme il sera éligible au dispositif proposé, il sera gentiment licencié, après quoi on lui proposera de passer trois ou six mois au chômage, indemnisé aux frais de la princesse. Puis on lui demandera de se procurer le document lui permettant de bénéficier de ce nouveau contrat à cotisation réduite, le CDI senior. Voilà ce qu’engendrera ce type de contrat : des licenciements à seule fin de permettre une réembauche à moindre coût.
L’amendement vise à prévenir un tel effet d’aubaine et à ne pas inciter au licenciement de salariés dans le seul but de les réembaucher dans le cadre d’un contrat moins coûteux pour l’employeur. Il faut protéger les salariés de cet effet, sans quoi la boîte de Pandore sera ouverte – et vous ne pourrez la refermer.
Par ailleurs, le CDI que vous créez contient une date de péremption qui ne profitera qu’à l’employeur : passée celle-ci, lui seul pourra décider de maintenir, ou non, le senior en emploi. Si bien que ce dernier se trouvera dans une situation précaire, celle de ne pas savoir s’il conservera ou non son travail. Franchement, c’est dangereux !
Mme la présidente
L’amendement no 81 de Mme Karine Lebon est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces trois amendements identiques ?
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Madame Godard, vous avez raison de souligner que le rapport au travail est propre à chacun et dépend des expériences vécues. De même, le rapport à la retraite diffère selon qu’on a exercé un travail épanouissant, dans lequel on s’est construit, ou un travail subi.
Cependant, c’est précisément pour ces personnes qui, à 57 ou 60 ans, se retrouvent privées d’emploi – ce peut être très violent, j’en connais personnellement – et qui souhaitent retrouver un travail, que ce soit pour une question de reconnaissance, de salaire ou de sentiment d’utilité, que ce dispositif est intéressant. En effet, en l’état actuel du marché du travail, ces personnes ont peu de chance d’obtenir un emploi ; elles en auront davantage si elles sont volontaires pour ce nouveau type de contrat.
Tels qu’ils sont rédigés, les amendements priveront quiconque aura travaillé dans une entreprise – quelle que soit la durée de cette expérience – de la possibilité d’y retourner dans le cadre de ce nouveau contrat. Or nous connaissons tous des gens qui ont fait des allers-retours dans une entreprise, par exemple parce qu’ils ont dû temporairement déménager pour des motifs familiaux, ou parce qu’ils ont créé leur entreprise sans que l’expérience soit concluante. Il me semble dommage de priver toute personne qui aura, à un moment donné, travaillé dans une entreprise, de la possibilité d’y retourner grâce à un CDI senior.
Par ailleurs, Mme Amiot a affirmé que ce dispositif allait engendrer des licenciements, uniquement destinés à permettre une réembauche six mois plus tard. Je ne sais pas dans quelle entreprise vous avez travaillé, mais un licenciement, cela a un coût !
M. Aurélien Saintoul
Un coût plafonné par le barème Macron !
M. Nicolas Turquois, rapporteur
De plus, licencier quelqu’un pour le réembaucher six mois plus tard constitue un abus de droit évident.
Enfin, le CDI senior n’entraîne pas une exonération de cotisation salariale : il exonère seulement de la contribution patronale sur la prime de départ à la retraite. Si vous avez bénéficié d’un contrat senior durant cinq ans, la prime de départ à la retraite correspondra à 1,25 mois de salaire – un quart de mois par année d’ancienneté. L’exonération portera uniquement sur ce montant-là, ce qui ne représente rien du tout. Avis défavorable.
Mme Ségolène Amiot
Si cela ne représente rien, pourquoi le faites-vous ?
M. Nicolas Sansu
Si cela ne représente rien, cela ne marchera pas !
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à M. Charles Sitzenstuhl.
M. Charles Sitzenstuhl
Je suis opposé à ces amendements. Il faut rétablir certaines vérités, même si c’est difficile de les faire entendre au milieu des nombreuses prises de parole de l’extrême droite et de la gauche radicale.
M. Emeric Salmon
Et du centre nul !
M. Charles Sitzenstuhl
Ces interventions ont donné lieu à des moments surréalistes. D’abord, M. Boyard nous a expliqué que l’extrême droite était en réalité alliée au bloc central sur la réforme des retraites. C’est oublier que l’extrême droite était l’alliée de la gauche pendant cette réforme : rappelons qu’à cette époque, ce n’est pas le discours d’Emmanuel Macron que validait l’extrême droite, mais celui de Jean-Luc Mélenchon !
M. Emeric Salmon
Tu t’es allié à l’extrême gauche pendant les législatives !
M. Charles Sitzenstuhl
La France insoumise et le Rassemblement national ont exactement la même position sur la question des retraites ; cela vous fait peut-être mal au cœur – à nous aussi ! – mais c’est votre problème.
Mme Sophie Taillé-Polian
Je pourrai faire la liste de tous les sujets sur lesquels vous êtes d’accord avec eux, vous verrez que ce n’est pas glorieux !
M. Charles Sitzenstuhl
Sur la question des retraites, j’y insiste, Jean-Luc Mélenchon, Marine Le Pen et Jordan Bardella ont exactement la même position.
Puis, de l’autre côté de l’hémicycle, le collègue Dussausaye, élu des Vosges, nous a expliqué que nous n’avions rien fait contre le chômage. Pardon ! Lorsque nous sommes arrivés aux responsabilités, en 2017, le taux de chômage en France s’élevait à 10 % ; il s’établit aujourd’hui à 7 %.
Mme Sophie Taillé-Polian
Et le taux de pauvreté ?
M. Théo Bernhardt
Vous avez tout bien fait !
M. Emeric Salmon
Et les Français ne le voient pas !
M. Charles Sitzenstuhl
Voilà le résultat de notre politique économique et sociale.
Enfin, contrairement à ce que pensent vos électeurs, vous n’avez soutenu aucune de nos réformes de l’assurance chômage et aucune des réformes du marché du travail depuis 2017. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et Dem.) Vous faites campagne en mentant à vos électeurs !
M. Nicolas Dragon
N’importe quoi !
Mme la présidente
La parole est à M. Gaëtan Dussausaye.
M. Gaëtan Dussausaye
Monsieur Sitzenstuhl, il est vrai que nous n’avons pas soutenu vos réformes de l’assurance chômage et nous ne nous en cachons pas : c’est pour nous un motif de grande fierté puisque vous en êtes à votre troisième réforme, avec des résultats toujours aussi piteux ! (Applaudissements sur les bancs des groupes RN et UDR.) Vous aurez beau en faire une quatrième et une cinquième, à mon avis les résultats resteront inchangés.
Mme la présidente
J’aimerais qu’on en revienne aux amendements, si vous n’y voyez pas d’inconvénient. Et M. Boyard fera de même, j’imagine.
M. Nicolas Forissier
Ça m’étonnerait !
M. Gaëtan Dussausaye
S’agissant des retraites, nous ne sommes pas seulement d’accord pour abroger l’injuste réforme que vous avez fait passer en force en 2023, en recourant à l’article 49.3 : nous sommes d’accord avec 90 % des Français, qui estiment que cette réforme est mauvaise et ne veulent pas la maintenir en l’état.
M. Stéphane Vojetta
Votre boussole, c’est la démagogie !
M. Théo Bernhardt
Non, c’est la France !
M. Gaëtan Dussausaye
Nous voterons contre ces amendements pour plusieurs raisons. D’abord parce que je suis, moi aussi, inquiet des effets d’aubaine susceptibles d’être créés. Nous avons d’ailleurs voté en commission pour l’un de vos amendements, madame Godard, visant à allonger de six mois à deux ans la période qui court entre le moment où une personne a quitté l’entreprise qui lui propose ce nouveau contrat et le moment où elle peut en bénéficier, afin d’éviter les effets d’aubaine.
Néanmoins, il convient de prêter attention aux effets de bord : la réalité du terrain, ce sont des usines, des entreprises ou des groupes qui constituent parfois les plus gros pourvoyeurs d’emploi d’un territoire. Si vous empêchez à vie une personne qui y aurait travaillé quelques mois d’y retourner avec ce nouveau contrat, vous créerez un angle mort dans le dispositif ; il faut absolument l’éviter.
Mme la présidente
La parole est à M. Louis Boyard.
M. Louis Boyard
Madame la ministre, il est faux de présenter cette mesure comme une initiative des syndicats. En effet, l’accord national interprofessionnel ne fait que reprendre un dispositif qui avait été inclus dans le texte de 2023 relatif à la réforme des retraites, et qui avait été censuré ensuite par le Conseil constitutionnel. Il s’agissait d’un mécanisme similaire : une exonération de cotisations au-delà de 60 ans, puis la possibilité pour l’employeur de vous licencier à partir du moment où vous pouviez prétendre à la retraite à taux plein.
De plus, ce CDI senior présente de très nombreux effets de bord. Le premier, c’est qu’il devient impossible à une personne de partir à la retraite avec une surcote. En effet, soit cette personne ne trouve tout simplement plus à s’embaucher hors du cadre du CDI senior, plus favorable aux employeurs, soit elle se trouve en CDI senior et elle sera mise à la retraite dès qu’elle sera éligible au taux plein, ce qui la privera d’une surcote. Si le CDI senior a du succès, ce qui serait malheureux, il détruira le système de la surcote.
Le deuxième effet de bord, à propos duquel nous n’avons obtenu aucune réponse, tient à la nécessité d’obtenir un document de la Caisse nationale d’assurance vieillesse pour pouvoir bénéficier d’un CDI senior. Dès lors, si certains seniors ne parviennent pas à obtenir ce document, ils ne pourront pas retrouver de travail : il leur sera en effet impossible de bénéficier d’un CDI senior et les entreprises ne voudront pas les embaucher en dehors de ce cadre. Or des gens qui se retrouvent dans un imbroglio administratif en matière d’assurance vieillesse, soit parce que la Caisse met du temps à leur répondre, soit parce qu’il leur manque certains documents, nous en avons tous dans nos permanences !
Un troisième effet de bord tient au délai de carence de six mois, qui est bien trop court – un délai de deux ans constitue déjà une meilleure proposition.
Quoi qu’il en soit, il n’est pas vrai de dire que ce CDI senior provient d’une initiative des syndicats, alors qu’il ne fait que reprendre une mesure, issue d’un accord passé entre les macronistes et Les Républicains, qui avait été censurée par le Conseil constitutionnel, et dont les effets de bord sont multiples – vous ne pouvez pas le nier et nous n’avons obtenu, madame la ministre, monsieur le rapporteur, aucune réponse de votre part sur ce point.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Monsieur Boyard, vous présentez ce document à obtenir comme une paperasserie insurmontable ; or il s’agit simplement pour le salarié d’obtenir sa date de départ à la retraite à taux plein.
Mme Ségolène Amiot
Il faut parfois un an pour l’obtenir ! Et parfois ils se trompent !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Compte tenu des circonstances, ces demandes seront évidemment traitées en priorité.
Si cet élément doit être demandé, c’est parce qu’un point est revenu régulièrement dans les discussions entre partenaires sociaux : l’un des freins à l’embauche des personnes de plus de 60 ans – ou de plus de 57 ans en cas d’accord de branche –, c’est l’incertitude pour l’employeur, qui ne sait pas s’il doit conserver cette personne dans ses effectifs jusqu’à 70 ans, qui est l’âge de départ à la retraite d’office. Expérimentons ce contrat qui a été demandé par quatre organisations syndicales et trois organisations patronales !
Enfin, s’agissant du risque d’effet d’aubaine signalé sur différents bancs, je tiens à rappeler que le délai de carence de six mois existe déjà en droit du travail, où il est précisément utilisé, dans d’autres circonstances, pour prévenir les effets d’aubaine. Par exemple, dans le cadre d’un plan de sauvegarde de l’emploi, il est impossible de réembaucher des personnes en CDD, pour accroissement temporaire d’activité, sur les postes supprimés durant les six mois qui suivent leur suppression. De même, lorsqu’un salarié souhaite bénéficier d’un cumul emploi-retraite sur le poste qu’il occupe, il ne peut le faire que six mois après son départ à la retraite. Nous devrions nous montrer cohérents avec les dispositifs existants.
Je le répète, le contrat de valorisation de l’expérience correspond au souhait de quatre organisations syndicales et de trois organisations patronales ; donnons-lui une chance ! Il doit permettre la réembauche de personnes âgées au minimum, selon les cas, de 57 ou de 60 ans, afin qu’elles puissent partir à la retraite à taux plein, comme le souhaitent de nombreux salariés expérimentés dans notre pays.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 2, 63 et 81.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 67
Nombre de suffrages exprimés 67
Majorité absolue 34
Pour l’adoption 21
Contre 46
(Les amendements identiques nos 2, 63 et 81 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 77.
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Il vise à revenir à la rédaction établie par les partenaires sociaux, c’est-à-dire à un délai de carence de six mois.
Contrairement à ce qui a été dit, un tel délai ne présente pas d’effet d’aubaine : on ne licencie pas quelqu’un pour l’embaucher six mois après. En effet, si vous licenciez un salarié, vous devez lui verser des indemnités légales de licenciement, qui seront bien supérieures au gain espéré ; de même, si vous procédez à une rupture conventionnelle, son coût sera bien supérieur au bénéfice escompté. Il n’y a donc aucun intérêt, pour une entreprise, à se séparer volontairement d’un salarié pour le réembaucher six mois après dans le cadre d’un CDI senior.
Le député Boyard s’est plaint de ne pas avoir obtenu de réponse sur la surcote. Un senior confronté au chômage de longue durée n’obtiendra pas la surcote – c’est un fait ; ce nouveau contrat lui fournira l’occasion de retrouver un travail, sans aucunement obliger l’employeur à mettre fin au contrat lorsque l’intéressé aura atteint l’âge de départ à taux plein ; il en aura la possibilité, mais il ne sera pas obligé de le faire – ce n’est pas la même chose.
J’ai régulièrement aidé des gens qui venaient dans ma permanence à obtenir l’estimation de leur âge de départ à taux plein : c’est très facile en se rendant sur le site maretraite.fr.
Je ne suis pas favorable à votre idée de rallonger le délai de carence et vous invite donc à voter mon amendement.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Favorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
Sans surprise, le groupe LFI votera contre l’amendement. Nous ne parlons pas de la même chose, monsieur le rapporteur : sur maretraite.fr, on n’obtient pas le document de la Cnav mentionnant la date prévisionnelle dont auront besoin les demandeurs d’emploi concernés que nous accompagnons nous aussi dans nos permanences. Ce document ne leur parvient parfois qu’au bout de six mois, un an, voire dix-huit mois ! Il leur arrive aussi de recevoir plusieurs courriers, parfois jusqu’à cinq lettres, mentionnant cinq dates différentes, parce qu’il a fallu recalculer, par exemple pour prendre en compte des expériences professionnelles à l’étranger, ce qui complique encore la compilation des documents relatifs aux différents emplois occupés.
Par ailleurs, les gens qui arrivent aujourd’hui à l’âge de la retraite ne disposent pas de toutes leurs fiches de paie numérisées. Bref, réunir toutes les pièces prend du temps, ce qui rallonge d’autant la réception du document de la Cnav. Que se passera-t-il si l’intéressé envoie un premier document mentionnant une date prévisionnelle de départ à taux plein et qu’un nouveau courrier donne une date postérieure ? Le salarié aura-t-il l’obligation de prévenir son employeur, après le début du contrat, que la date qu’il avait indiquée au départ n’est plus la bonne ? N’allons-nous pas créer de l’incertitude pour les employeurs ?
M. Sylvain Berrios
Vous vous inquiétez pour les employeurs, maintenant ?
Mme Ségolène Amiot
Au bout du compte, vous allez créer pour les seniors des CDD beaucoup plus longs que ceux qui sont actuellement autorisés et vous allez les maintenir dans une situation précaire, ignorant s’ils pourront ou non aller au-delà de la date prévisionnelle de départ à taux plein. Tous ne désirent pas forcément arrêter de travailler à ce moment-là, surtout après avoir connu un parcours haché – comme ce sera nécessairement le cas des personnes visées par le dispositif ; certains pourraient avoir envie de bénéficier d’une meilleure retraite que celle qui leur était promise.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur.
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Si la date prévisionnelle de départ à taux plein change en cours de route, il reviendra au salarié d’en informer l’employeur, qui pourra retarder d’autant sa mise à la retraite. Il n’y a rien là-dedans de définitif. D’ailleurs, j’invite vraiment tous les citoyens qui nous regardent et qui approchent de la soixantaine à vérifier auprès des caisses de retraite qu’elles ont bien connaissance de l’ensemble des droits qu’ils ont acquis.
M. Emeric Salmon
Il n’est pas inutile de commencer avant !
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Cela leur donnera, au-delà du CDI senior, une idée du montant de leur retraite et de leur âge de départ potentiel.
(L’amendement no 77 n’est pas adopté.)
M. Sylvain Berrios
Le RN vote avec LFI ? Ne me dites pas que c’est vrai !
M. Emeric Salmon
Nous sommes décidément au centre de l’attention !
Mme la présidente
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 56, 57, 58, 59, 8, 60 et 106, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 8, 60 et 106 sont identiques.
Sur l’ensemble de ces amendements, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire de demandes de scrutin public.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 56.
M. Louis Boyard
Selon vous, vu le niveau du chômage des seniors, nous n’aurions pas d’autre choix que de créer des dispositifs particuliers, leur conférant moins de droits qu’à d’autres, afin qu’ils puissent retrouver du travail. C’est trop facile ! D’où viennent les difficultés des seniors ? Notre assemblée refuse de discuter de ce point essentiel : alors que 6 millions de personnes recherchent un emploi, seuls 500 000 à 700 000 postes sont vacants. Le stock d’emplois disponibles dans notre pays n’est pas suffisant par rapport au nombre de demandeurs d’emploi. Bref, la France connaît une crise de l’emploi ! Pour y remédier, vous cherchez à relancer l’activité économique en distribuant des cadeaux fiscaux et des exonérations de cotisations sociales, sauf qu’ils créent des trous dans les caisses que vous devez ensuite combler en réformant les retraites pour faire travailler les gens plus longtemps… Et vous venez ensuite vous plaindre, alors même que vous êtes responsables du fait qu’ils doivent travailler plus longtemps, de l’augmentation du taux de chômage des seniors ? Comprenez que votre logique ne mène nulle part !
Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback
Vous dites n’importe quoi !
M. Louis Boyard
Par cette série d’amendements, nous proposons de lutter contre la discrimination à l’embauche des seniors : c’est un phénomène systémique, qui ne relève pas des seuls comportements individuels. Pour éviter que la création du CDI senior ne crée un effet d’aubaine, nous demandons que le dispositif soit réservé aux entreprises qui ne pratiquent pas cette discrimination et qui ont une politique d’emploi transparente.
M. Emeric Salmon
De telles entreprises existent-elles ?
M. Louis Boyard
Telle est notre contribution au débat, tout en sachant que le seul moyen de mettre fin à cette situation serait d’instaurer la retraite à 60 ans ! Lorsqu’il y a davantage de demandeurs d’emploi que d’emplois disponibles, il faut réduire le nombre des demandeurs d’emploi : avec une retraite plus précoce, les jeunes obtiendront les places, c’est logique !
Mme la présidente
La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir l’amendement no 57.
M. Hadrien Clouet
J’irai dans le même sens que mon excellent collègue. Il s’agit, là encore, de vous protéger de vos propres turpitudes. Le texte va en effet entraîner un effet d’aubaine, puisque le CDI senior permet – c’est un fait, que l’on y soit favorable ou non – de diminuer de 30 % l’indemnité de mise à la retraite versée par l’employeur. Cela signifie que ce contrat pourra tout à fait être signé dans une entreprise où il ne restera plus qu’un ou deux seniors, après que les autres auront été mis à la porte. Le texte ne prévoit en l’état aucun garde-fou. Imaginez une boîte qui compte quatre-vingts seniors, dont soixante-dix-huit sont licenciés par discrimination : veut-on prévoir pour l’employeur une exonération sur l’indemnité de mise à la retraite des deux seniors restants ? Un tel dispositif s’apparenterait à un cadeau offert aux licencieurs, à ceux qui discriminent les seniors.
L’amendement vise donc à imposer un pourcentage minimum de travailleurs seniors dans l’entreprise qui voudrait recruter une personne sous contrat de valorisation de l’expérience. Nous avons choisi le seuil de 17 % parce qu’il correspond à la part des seniors actifs dans le pays. Ce taux peut bien sûr être discuté, mais ne faisons pas de cadeau à l’entreprise qui ne compte plus qu’un senior après avoir viré tous les autres !
Madame la ministre, notre discussion sur l’offre raisonnable d’emploi était intéressante. Durant trente secondes, vous m’avez presque fait douter, mais après vérification, j’avais raison : en matière d’offre raisonnable d’emploi, il n’y a plus aucun critère relatif à la distance géographique séparant le lieu de résidence du chômeur et celui de l’offre d’emploi. Inscrit à France Travail, un chômeur de 62 ans peut donc être obligé d’aller bosser à l’autre bout du pays ! L’article L. 5411-6-3 du code du travail, créé en 2008, prévoyait bien un critère de ce type : « est considérée comme raisonnable une offre d’emploi entraînant, à l’aller comme au retour, un temps de trajet en transport en commun, entre le domicile et le lieu de travail, d’une durée maximale d’une heure ou une distance à parcourir d’au plus 30 kilomètres ». Mais vous l’avez supprimé en 2019 ! Et le décret pris le 20 mars 2025, précise quant à lui les éléments constitutifs de l’offre raisonnable d’emploi… (Le temps de parole étant écoulé, Mme la présidente coupe le micro de l’orateur.)
Mme la présidente
La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 58.
M. Emeric Salmon
C’est un duo, en fait !
M. Louis Boyard
Nous nous renvoyons la balle comme au ping-pong, avec mon collègue Clouet, en attendant que ça rentre !
M. Emeric Salmon
Je dirais même : un duo de comiques troupiers, au théâtre des Deux Ânes !
M. Louis Boyard
Vous cherchez à nous rassurer, madame la ministre, en disant que vous demanderez aux caisses d’assurance vieillesse de faire du traitement de ces demandes une priorité. Mais laquelle de leur mission n’est pas prioritaire ? Vous prévoyez 40 milliards d’économies pour l’année prochaine, alors que ces caisses sont déjà en manque d’effectifs ! Comment comptez-vous concrétiser ce qui n’est à ce stade qu’une annonce de votre part, formulée ici pour la première fois ?
Vous n’abordez toujours pas le problème de fond, que j’évoquais précédemment, à savoir le fait qu’il y a seulement 500 000 à 700 000 postes non pourvus pour 6 millions de personnes à la recherche d’un emploi. Après avoir augmenté le nombre de demandeurs d’emploi, vous proposez à présent des CDI senior. Or ils vont coûter cher ! N’êtes-vous pas les grands tenants du contrôle de la dépense publique ? Quand il s’agit de corriger les effets de bord de vos précédentes réformes – nous vous avions pourtant expliqué que vous faisiez n’importe quoi ! –, vous vous montrez soudain très dépensiers !
M. Clouet proposait un seuil de 17 % de travailleurs seniors, correspondant à la moyenne nationale des seniors actifs. Notre proposition se veut consensuelle, car nous cherchons à coconstruire… (Exclamations et sourires sur les bancs du groupe HOR.) Oui, nous voulons « coconstruire avec les territoires » et « libérer les énergies » ! (L’orateur sourit à son tour.)
M. Sylvain Berrios
Vous n’y croyez pas vous-même !
M. Louis Boyard
Le présent amendement propose de fixer ce seuil à 15 %. Cependant, même s’il était adopté, il ne résoudrait pas le problème du chômage des seniors, qui tient au manque d’emplois disponibles par rapport au taux de chômage. Il faut donc faire la retraite à 60 ans. Problème : nous n’avons pas pu déposer un amendement en ce sens, car il aurait été irrecevable – maudit article 40 ! (Sourires.)
Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback
Allez, disons 55 ans, ça passe bien !
Mme la présidente
La parole est à M. Hadrien Clouet, pour soutenir l’amendement no 59.
M. Hadrien Clouet
Au cas où subsisterait un doute, l’amendement vise à prévenir l’effet d’aubaine suscité par le texte, autrement dit à éviter que des entreprises qui licencient des seniors (« Oh les méchants ! » sur les bancs du groupe HOR) puissent bénéficier d’exonérations au titre de l’embauche de CDI senior. J’entends « Oh les méchants ! » sur ma gauche – façon de parler, ce n’est que géographique. Vous trouvez que c’est bien, correct et justifié de faire des cadeaux à des boîtes qui licencient des seniors ? (Exclamations sur les bancs du groupe HOR.) Vous vous marrez, alors que des gens se font licencier à 63 ans !
Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback
Parce qu’à 55 ans, c’est mieux ?
M. Hadrien Clouet
Vous trouvez marrant et utile de donner en plus à ces employeurs l’argent du contribuable ou du cotisant ? C’est intéressant, ça en dit long ; les gens ne l’entendent pas forcément, car vous le dites hors micro – on comprend votre honte ! – mais il y a clairement un débat entre ceux qui veulent arroser à l’aveugle les licencieurs, et ceux qui veulent un minimum de protection de l’emploi des seniors. Chacun son camp…
Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback
Ça, c’est sûr !
M. Hadrien Clouet
Nous appartenons au second.
Mme la présidente
La parole est à Mme Océane Godard, pour soutenir l’amendement no 8.
Mme Océane Godard
Il vise à renforcer la crédibilité et l’efficacité du contrat de valorisation de l’expérience, en instituant de la transparence et de la réciprocité – un peu à la manière de la pratique du name and shame – avec les entreprises qui voudraient y recourir ; et ce, afin d’éviter les effets d’aubaine. Pour bénéficier de ce contrat, nous proposons que l’entreprise intéressée soit obligée de publier chaque année des indicateurs relatifs à l’emploi des salariés expérimentés en son sein.
M. Hadrien Clouet
Tout comme nous !
Mme la présidente
La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 60.
M. Louis Boyard
Nous n’avons toujours pas obtenu les réponses de la ministre !
Mme la présidente
C’est normal, il s’agit d’une discussion commune : pour l’instant, la ministre ne peut pas vous répondre.
M. Louis Boyard
Nous avons déjà eu plusieurs discussions et je n’en ai jamais reçu, mais j’en viens à l’amendement : après avoir proposé 15 %, nous proposons un seuil de 13 %… (Sourires sur plusieurs bancs des groupes EPR et HOR.) Je vous vois sourire, mais le sujet n’est pas drôle ! À chaque fois que l’on évoque l’emploi des seniors, vous proposez des exonérations qui non seulement ne changeront rien à la situation, mais créeront en outre des effets d’aubaine… Il faut que j’arrête de vous regarder, chers collègues, je ne trouve plus mes mots…
Mme Béatrice Bellamy, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback et M. Stéphane Vojetta
C’est vous qui nous faites rire !
M. Louis Boyard
L’amendement propose de limiter l’effet d’aubaine en réservant le dispositif aux entreprises qui emploient un taux minimum de seniors… Bon, disons que l’amendement est défendu. (Sourires et applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR et HOR.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 106.
Mme Sophie Taillé-Polian
J’ai moi aussi envie de discuter de cet effet d’aubaine potentiel. Le sujet est important. Certains de nos collègues ne cessent de souligner la fraude sociale, considérant que les assurés sociaux, dans leur grande majorité, seraient des fraudeurs invétérés qu’il conviendrait de traquer.
Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback
Personne ne dit ça !
Mme Liliana Tanguy
C’est caricatural !
M. Nicolas Forissier
Vous tenez des propos de comptoir !
Mme Sophie Taillé-Polian
Ces collègues ne cessent de demander davantage de contrôles et expliquent que les aides sociales, notamment du fait de l’ampleur de la fraude, coûtent un « pognon de dingue ». Vous me reprochez de vous caricaturer ? Vous faites exactement la même chose en balayant d’un revers de main nos inquiétudes quant à l’effet d’aubaine potentiel provoqué par ce texte.
Il existe en effet des employeurs – pardonnez-moi de vous le dire ! – qui étudient les dispositifs que nous votons et qui les contournent à leur profit. Ce n’est pas si rare que cela… Il est donc de notre devoir, parce que nous avons à cœur d’utiliser l’argent public à bon escient, de faire en sorte que ce dispositif, s’il voyait le jour, ne puisse pas être utilisé pour opérer un tri entre les mauvais seniors – ceux qui seraient dans l’entreprise depuis longtemps, qui ne seraient pas assez efficaces et qu’on licencierait – et les bons seniors – ceux qu’on embaucherait pour effectuer les mêmes tâches, ou d’autres, en bénéficiant d’exonérations de cotisations sociales, mais aussi avec la certitude de pouvoir s’en débarrasser une fois atteint l’âge de départ à la retraite à taux plein ! Il est donc rien moins que normal que nous présentions notre vision, très claire, de ce que nous voulons éviter en créant ce nouveau contrat : oui, il faut border le dispositif de tous les côtés pour éviter les effets d’aubaine.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Nous arrivons au moment que je redoutais.
Mme Sophie Taillé-Polian
Il ne faut pas avoir peur !
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Avec le rapporteur Stéphane Viry, lors des auditions, nous avons été clairement chargés d’une mission par les partenaires sociaux, syndicats comme patronat. Ils ont prononcé des mots très forts en nous expliquant qu’ils s’étaient mis d’accord sur un geste qui leur semblait fondateur. Tant du côté des syndicats de salariés que de celui des représentants patronaux, chacun pense en effet qu’il faut faire bouger les lignes concernant les seniors.
Ils nous ont simplement demandé de transcrire l’accord sur ce sujet sans y ajouter de la politique.
Mme Ségolène Amiot
Mais nous sommes là pour faire de la politique !
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Il est vrai que le spectacle que nous donnons semaine après semaine est en effet pitoyable. On nous confie une mission simple, et qu’entendons-nous ? Que ce serait drôle, qu’on va ridiculiser. Décidément, nous ne sommes pas à la hauteur de cet accord interprofessionnel.
Sur le fond, vous évoquez la nécessité d’une évaluation. Je l’entends. Cependant, une évaluation spécifique risque de bloquer les PME qui ne comptent parfois qu’un, deux ou trois, salariés. Nous sommes ici dans une logique d’expérimentation, et non dans un dispositif définitif.
La meilleure solution, à mon sens, serait de signaler ce contrat grâce à une case spécifique dans la déclaration sociale nominative (DSN). Cela permettrait un suivi statistique rigoureux – nombre de contrats, conditions d’embauches, etc. Ces données pourraient nous être présentées année après année, afin d’identifier les évolutions ou des effets de bord. Cela me paraît plus pertinent que ce que proposent les amendements, auxquels je suis donc défavorable.
De grâce, pourrait-on revenir à l’esprit initial de la transcription de cet ANI, et à la responsabilité que les partenaires sociaux nous ont confiée ?
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Plusieurs d’entre vous ont souligné la pénurie d’offres d’emploi dans notre pays. Par conséquent, favoriser la reprise d’activité des travailleurs les plus âgés ne résoudrait pas le problème du chômage. Cette approche très malthusienne ici (Mme la ministre s’adresse aux bancs de gauche) nous a conduits à de nombreuses erreurs stratégiques pendant des années, voire des décennies.
Selon vous, en faisant partir les seniors plus tôt, on favoriserait l’emploi des jeunes. Pourriez-vous m’expliquer, alors, comment des pays comme la Suède, le Danemark, les Pays-Bas ou encore l’Allemagne parviennent à avoir des taux d’activité plus élevés à la fois chez les jeunes et chez les plus de 55 ou 60 ans ?
Mme Ségolène Amiot
Il y a juste plus d’emplois !
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Au contraire de ce que vous croyez, nous pensons que le travail crée le travail. Votre analyse est une erreur. En fait, plutôt que parler d’erreur, je dirais que nous avons sur ce point une divergence fondamentale.
Vos amendements visent à rendre obligatoire la publication d’une série d’indicateurs sur l’emploi des salariés expérimentés – notamment le nombre de fins de contrat des salariés de plus de 50 ans – et à conditionner le recours aux contrats de valorisation à l’obtention de certains résultats.
Il faut revenir à l’intention initiale : pourquoi ce contrat de valorisation a-t-il été souhaité par les quatre organisations syndicales et les trois organisations patronales ? Précisément pour inciter au maintien en emploi des salariés expérimentés, ou pour favoriser leur recrutement. Conditionner son utilisation à l’obtention de bons résultats ou à des indicateurs d’emploi des seniors risque, au contraire, d’empêcher les entreprises concernées – celles qui ont justement de tels besoins et la volonté d’avancer – d’y recourir.
C’est pourquoi je suis défavorable à tous ces amendements car ce contrat fait l’objet d’une expérimentation pour cinq ans – l’exonération valant pour trois ans.
Mme la présidente
La parole est à M. Louis Boyard.
M. Louis Boyard
Reprenons depuis le début. (« Oh non ! » sur plusieurs bancs des groupes RN et HOR et sur quelques bancs du groupe EPR.) Le CDI senior est né du 49.3 sur la réforme des retraites – d’un accord entre les macronistes et Les Républicains. La mesure a ensuite été censurée par le Conseil constitutionnel.
M. Barnier, devenu premier ministre, a alors annoncé dans son discours de politique générale qu’il souhaitait réunir les partenaires sociaux autour d’une table, histoire – disons-le franchement – de faire passer la pilule de la réforme des retraites.
M. Stéphane Vojetta
Il n’a pas dit ça !
M. Louis Boyard
Les partenaires sociaux se réunissent, discutent et trouvent un accord – à l’exception de la CGT, qui quitte les négociations en affirmant qu’il y a plus à perdre qu’à gagner avec cet ANI. Et, aujourd’hui, les rapporteurs nous expliquent qu’ils auraient reçu une mission de la part des syndicats – retranscrire fidèlement cet accord.
Eh bien non, chers collègues ! Vous n’avez reçu aucune mission des syndicats. La seule que vous ayez reçue date du 7 juillet, c’est d’être au service du peuple français et seulement du peuple français !
M. Stéphane Vojetta
Vous niez le dialogue social, et le travail des syndicats !
M. Louis Boyard
Lorsque vos collègues vous parlent de tels ou tels sujets à ne pas oublier, de pénibilité ou de seuils, vous ne pouvez pas leur répondre : « Ah non, ce sont les syndicats qui décident ! » Ici, ce sont les représentants du peuple français qui décident, au nom du peuple français, pour le peuple français.
Mme Liliana Tanguy
Non, dans l’entreprise, ce sont les syndicats qui décident !
M. Louis Boyard
C’est un principe constitutionnel.
M. Stéphane Vojetta
N’invoquez plus jamais le dialogue social, alors !
M. Louis Boyard
Monsieur le rapporteur, vous ne pouvez pas tenir de tels propos. En réalité, vous vous cachez et, au fond, vous êtes des libéraux – il y en a assez dans cette assemblée, vous n’avez pas besoin de le dissimuler !
Madame la ministre, vous qui aimez tant les comparaisons internationales et évoquiez l’Allemagne, parlons-en : ce pays lance un plan d’investissement de 500 milliards d’euros pour relancer son économie.
À la dernière élection présidentielle, quand nous avons proposé un plan à 100 milliards, vous nous avez ri au nez, et vous avez choisi l’austérité. Quel est désormais l’état de notre pays ? Quel est notre taux de chômage ? Et le taux d’emploi des seniors ?
Il y a deux trajectoires possibles et avec la nôtre, nous défendons la retraite à 60 ans et nous soutenons la planification écologique. Peut-être devriez-vous effectivement vous comparer à l’Allemagne ?
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 56.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 64
Nombre de suffrages exprimés 60
Majorité absolue 31
Pour l’adoption 13
Contre 47
(L’amendement no 56 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 57.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 66
Nombre de suffrages exprimés 62
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 13
Contre 49
(L’amendement no 57 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 58.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 66
Nombre de suffrages exprimés 62
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 14
Contre 48
(L’amendement no 58 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 59.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 65
Nombre de suffrages exprimés 61
Majorité absolue 31
Pour l’adoption 12
Contre 49
(L’amendement no 59 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 8, 60 et 106.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 67
Nombre de suffrages exprimés 67
Majorité absolue 34
Pour l’adoption 18
Contre 49
(Les amendements identiques nos 8, 60 et 106 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
Avant de suspendre la séance, je fais un point sur le rythme de notre travail. Il est un peu plus de seize heures trente ; en une heure et demie, nous avons examiné dix-neuf amendements. Nous avons examiné la moitié des amendements déposés sur ce texte.
Suspension et reprise de la séance
Mme la présidente
La séance est suspendue.
(La séance, suspendue à seize heures quarante, est reprise à seize heures quarante-cinq.)
Mme la présidente
La séance est reprise.
Je suis saisie de quatre amendements, nos 3, 27, 64 et 96, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 3, 27 et 64 sont identiques.
Ils font l’objet d’une demande de scrutin public par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire, de même que les amendements nos 4 et identiques.
Les scrutins sont annoncés dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Les amendements identiques nos 3 de Mme Océane Godard et 27 de Mme Karine Lebon sont défendus.
La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 64.
M. Louis Boyard
Nous retombons sur l’effet de bord que nous avons déjà pointé. Le contrat proposé nécessite en effet la présentation par le salarié d’un document qui n’est pas toujours facile à obtenir, notamment pour les personnes dont la situation administrative est complexe. Si l’entreprise tient absolument à recruter en CDI senior, alors certains verront l’emploi leur échapper, faute d’avoir pu fournir ledit document. C’est la raison pour laquelle nous demandons la suppression de cette exigence.
Cela ne résoudra néanmoins pas le problème de fond qui est qu’il y a davantage de demandeurs d’emploi que d’emplois disponibles. J’ai entendu vos explications, madame la ministre, mais on parle de 500 000 à 700 000 emplois non pourvus – et encore ne sont-ce que des estimations –, à mettre en regard des 6 millions de personnes en recherche d’emploi !
Face à cette disproportion, le partage du temps de travail, notamment grâce à la retraite à 60 ans, n’est pas une petite question, d’autant que certains seniors ont arrêté de travailler parce que leur emploi était bien trop dur physiquement pour le tenir sur la durée – je pense, par exemple, à un employé communal en charge du nettoyage ou aux métiers du BTP – bâtiment et travaux publics. Lorsqu’on a passé sa vie à travailler dans ce type d’emploi, on a le corps cassé. Non seulement cela n’aide pas à retrouver un emploi mais surtout cela devrait ouvrir le droit de partir à la retraite.
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 96.
Mme Sophie Taillé-Polian
Si vous le permettez, madame la présidente, ma défense vaudra également pour l’amendement no 95, qui suit. Ils visent tous les deux l’alinéa 8 de l’article 4.
Nous nous opposons à ce que le salarié éligible au contrat de valorisation de l’expérience soit obligé de fournir un document précisant à son futur employeur la date à laquelle il atteindra une retraite à taux plein. Nous considérons que la retraite est un droit, un droit dont on peut faire usage, ou non. Le salarié peut tout à fait souhaiter prolonger sa carrière pour diverses raisons, souvent parce que, les pensions étant inférieures aux salaires, cela nécessite de s’adapter financièrement. C’est un point d’une extrême importance à nos yeux, mais aussi aux yeux de certaines organisations syndicales qui n’ont pas validé l’accord pour ce motif. En effet, il y a ici un recul, alors qu’un accord national interprofessionnel a normalement vocation à offrir des droits nouveaux aux salariés. Vous voulez que ce qui constitue un droit puisse leur être imposé.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission sur les amendements identiques ?
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Ces amendements reviennent sur un élément essentiel de ce contrat senior : la transmission par le salarié d’un document indiquant la date prévisionnelle à laquelle il remplira les conditions pour bénéficier d’une retraite à taux plein.
Dans un contexte où on ne propose pas, ou trop peu, d’emplois aux seniors, c’est une mesure qui doit permettre de lever les freins à l’embauche, et votre proposition est donc totalement contraire à l’esprit du CDI senior. Je rappelle qu’il est mis en œuvre à titre expérimental, et je n’exclus pas moi-même qu’il y ait des effets de bord, comme vous le présumez légitimement. Il devra donc faire l’objet d’une évaluation mais, en l’occurrence, la fourniture de ce document est censée constituer un élément majeur pour favoriser l’embauche. C’est donc un avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
Monsieur le rapporteur, ce que vous appelez frein à l’embauche, c’est une discrimination à l’embauche en raison de l’âge. Pour lutter contre cette discrimination, vous proposez la remise d’un document, qui va en fait opérer une nouvelle discrimination, puisque le salarié ne pourra choisir librement de partir ou non à la retraite. Or les personnes qui ont le plus intérêt à aller au-delà de l’âge légal de départ à la retraite, ce sont les femmes, qui ont travaillé pour un salaire inférieur à celui de leurs homologues masculins et toucheront donc une petite pension. Ce sont elles qui, pour gagner des trimestres bonifiés, auront tendance à travailler au-delà de l’âge légal.
Pour lutter contre une discrimination, vous créez donc un dispositif discriminant ! Je pense que vous vous fourvoyez. Nous avons déjà énuméré toutes les raisons pour lesquelles ce document n’était pas une bonne idée : difficulté et délais d’obtention, incertitudes sur l’authenticité ou la véracité des informations qui y sont portées, sans compter les problèmes de mise à jour dont vous êtes conscient puisque vous incitez les salariés à mettre leurs données à jour dès 60 ans. Il nous semble donc, si vous voulez réellement lutter contre les discriminations, qu’il est indispensable de supprimer l’obligation de fournir ce document.
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian
Quelques mots quand même sur la politique de l’emploi. Comme l’ont rappelé certains de mes collègues, il y a, dans notre pays, un problème sur le marché du travail où, avec un niveau de chômage important, beaucoup de demandeurs et demandeuses d’emploi souffrent de discrimination ou ne trouvent pas d’offres leur correspondant. L’économie tourne au ralenti et, si nous sommes prêts à discuter de propositions pour lutter contre les discriminations que subissent les seniors face à l’emploi, il ne faut pas perdre de vue que notre principal problème aujourd’hui est que le nombre d’emplois proposés est très nettement inférieur au nombre de demandeurs et demandeuses d’emploi, sans même parler de l’adéquation de ces emplois qu’il s’agisse, entre autres, de localisation ou de qualification.
Dans un moment où les plans sociaux se multiplient dans les grandes entreprises, à coups de centaines d’emplois détruits qui vont faire parler d’eux, et où, dans des secteurs où le tissu d’entreprises est surtout composé de petites et moyennes entreprises – je pense notamment à la culture et aux associations –, les nombreux licenciements se font à bas bruit, la société doit se mobiliser autour de cette question de l’emploi, qui ne pourra se résoudre que si l’on investit dans la transition écologique et dans l’avenir.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 3, 27 et 64.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 52
Nombre de suffrages exprimés 52
Majorité absolue 27
Pour l’adoption 17
Contre 35
(Les amendements identiques nos 3, 27 et 64 ne sont pas adoptés.)
(L’amendement no 96 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 95 de Mme Sophie Taillé-Polian a été défendu.
(L’amendement no 95, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Je suis saisie de quatre amendements identiques, nos 4, 28, 66 et 94.
La parole est à M. Jérôme Guedj, pour soutenir l’amendement no 4.
M. Jérôme Guedj
Nous souscrivons à la philosophie de l’article 4 mais l’alinéa 12 nous pose un problème dans la mesure où il crée une nouvelle niche sociale. En effet, pour inciter au développement de ces contrats de valorisation, vous prévoyez une exonération de la contribution patronale de 30 % sur les indemnités de licenciement.
Nous pointons le paradoxe de cette mesure, au moment où les niches sociales et les exemptions de cotisations sont au cœur du débat public. Pas plus tard qu’hier, le Haut Conseil du financement de la protection sociale, saisi par le premier ministre, a pointé, dans les recettes possibles pour financer le redressement de la sécurité sociale, ces fameuses niches sociales constituées par les compléments de salaire, que la Cour des comptes elle-même avait identifiées dans le RALFSS – rapport sur l’application des lois de financement de la sécurité sociale – de mai 2024. Ce sont 85 milliards d’euros de compléments de salaire qui font aujourd’hui l’objet de régimes sociaux dérogatoires, dont une partie issue des ruptures de contrat de travail non soumises au taux normal destiné au financement de la sécurité sociale.
Au moment où les niches sociales doivent être mobilisées dans la trajectoire de redressement des finances sociales, créer, même à titre dérogatoire et expérimental, une nouvelle niche sociale nous paraît incohérent. C’est pour cela que nous proposons de la supprimer.
Mme la présidente
L’amendement no 28 de M. Yannick Monnet est défendu.
La parole est à M. Louis Boyard, pour soutenir l’amendement no 66.
M. Louis Boyard
Monsieur Turquois, vous avez avancé l’argument de la lisibilité, mais ces amendements ne proposent pas de supprimer la date de retraite à taux plein du salarié senior, à partir de laquelle l’employeur peut mettre fin au contrat de travail – ce qui fait plutôt de votre CDI senior un CDD senior.
Vous créez une niche sociale, qui avait déjà été prévue lors de la dernière réforme des retraites parce qu’elle correspond à son coût. Ce texte n’existerait pas sans le 49.3 grâce auquel la réforme est passée. C’est un serpent qui se mord la queue : vous faites des réformes pour faire des économies, vos réformes ne fonctionnent pas et donc vous créez des niches sociales qui vident les caisses et vous obligent à de nouvelles réformes pour redresser les comptes ! Nous sommes dans une spirale infernale parce que, manifestement, vous n’avez toujours pas compris la leçon. Ces amendements, qui proposent de supprimer cette niche sociale, vous donnent l’occasion de vous rattraper.
Mme la présidente
L’amendement no 94 de Mme Sophie Taillé-Polian est défendu.
Quel est l’avis de la commission sur ces amendements identiques ?
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Les employeurs seront toujours taxés de la même manière sur l’indemnité de mise à la retraite des salariés bénéficiant d’un contrat classique. L’exonération ne concernera que les salariés ayant souscrit un CDI senior. L’indemnité de départ à la retraite correspond à un quart de salaire mensuel par année d’ancienneté. Si les salariés ont signé le contrat à 60 ans et qu’ils partent à 64 ans…
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Pas nécessairement.
M. Nicolas Turquois, rapporteur
C’est vrai, il n’y a pas d’automaticité, mais admettons qu’ils partent à 64 ans : au bout de quatre ans, l’indemnité représentera un mois de salaire – quatre fois un quart. L’exonération de 30 % sur un mois de salaire ne va pas représenter une somme extraordinaire. C’est incitatif, certes, mais cela reste très limité, et c’est d’abord pour redonner un emploi aux personnes qui en sont privées. Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Une précision pour le député Jérôme Guedj. Nous ne serons pas d’accord, mais j’insiste sur le fait que cette exonération est de nature à favoriser le retour à l’emploi des salariés expérimentés et à augmenter ainsi le taux d’emploi. Elle doit contribuer à la diminution du taux de chômage des salariés de plus de 60 ans. Or, en retrouvant un emploi, les personnes concernées peuvent contribuer, par les cotisations patronales et salariales sur leur salaire, à financer la sécurité sociale.
Je l’ai déjà dit dans la discussion générale et dans une réponse que j’ai faite au député Sansu : à titre de comparaison, le montant total des indemnités de mise à la retraite versées aux 57-64 ans représente environ 60 millions d’euros. Les montants restent donc limités : si 1 % des salariés au chômage rejoignaient le marché du travail via le contrat de valorisation, cela représenterait environ 35 millions d’euros.
Cela vaut donc la peine d’expérimenter ce contrat pour cinq ans ; je rappelle que l’exonération, elle, ne durera que trois ans. Si ce dispositif nous donne une chance de réduire le taux de chômage, en particulier de longue durée – je rappelle que la durée moyenne de maintien au chômage des plus de 55 ans est de 588 jours –, cela en vaut la peine. Avis défavorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
Monsieur le rapporteur, madame la ministre, je ne comprends pas. Vous dites que l’exonération sociale des employeurs sera si faible qu’elle couvrira à peine le coût du pot de départ du salarié concerné. En quoi, alors, sera-t-elle incitative ? Et si elle n’a pas de poids financier pour les employeurs, pourquoi appliquer une telle mesure, qui coûtera 35 millions d’euros ? Il faut être logique. Si cette mesure présente un intérêt, ne minimisez pas son effet ; mais ne dites pas qu’elle sera peu coûteuse pour la sécurité sociale, alors qu’elle aura un coût.
Il faut être cohérent. Vous utilisez tous les deux des arguments contradictoires. Si cette disposition présente un intérêt réel, alors il faut chiffrer la dépense et se donner les moyens d’atteindre l’objectif visé. Si elle n’a aucun intérêt, il faut la supprimer – et je pense que c’est ce qu’il convient de faire.
Mme la présidente
Je mets aux voix les amendements identiques nos 4, 28, 66 et 94.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 61
Nombre de suffrages exprimés 61
Majorité absolue 31
Pour l’adoption 18
Contre 43
(Les amendements identiques nos 4, 28, 66 et 94 ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
L’amendement no 29 de Mme Karine Lebon est défendu.
(L’amendement no 29, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 97 de Mme Sophie Taillé-Polian est défendu.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Défavorable.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 97.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 63
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 24
Contre 39
(L’amendement no 97 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 125.
Mme Sophie Taillé-Polian
Nous demandons que le rapport d’évaluation aborde la question des équilibres financiers, notamment concernant l’assurance chômage. On nous dit en effet que les exonérations seront en partie compensées par le non-versement d’allocations chômage : il faudra le vérifier.
Alors que nous achevons l’examen de l’article 4, nous n’avons été rassurés sur aucune de nos interrogations concernant ce contrat réservé aux travailleurs expérimentés : risques d’effet de bord et d’effet d’aubaine, conséquences sur les finances publiques, atteinte au droit de choisir le moment de son départ à la retraite. Nous voterons donc contre cet article.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas Turquois, rapporteur
D’une façon générale, je serai défavorable aux demandes de rapport. Je l’ai dit à plusieurs reprises : il est possible que ce contrat expérimental provoque des effets de bord, qu’il conviendra d’évaluer. Je fais confiance aux partenaires sociaux, notamment aux organisations syndicales, pour pointer d’éventuels dysfonctionnements.
Avis défavorable à cette demande de rapport, comme aux suivantes. Je suis en revanche très favorable à ce qu’une évaluation aussi exhaustive que possible ait lieu à la fin de l’expérimentation.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Les partenaires sociaux ont déjà prévu une évaluation à partir de la déclaration sociale nominative (DSN), en lien avec la direction de l’animation de la recherche, des études et des statistiques (Dares), la direction générale du travail (DST) et la direction de la sécurité sociale (DSS). Cette évaluation s’ajoutera à celle qui aura lieu dans trois ans, au moment où prendra fin l’exonération – si celle-ci doit être renouvelée, elle ne pourra l’être que dans le cadre d’une loi de financement de la sécurité sociale.
(L’amendement no 125 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Sur l’article 4, je suis saisie par le groupe La France insoumise-Nouveau Front populaire d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
Je mets aux voix l’article 4.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 63
Nombre de suffrages exprimés 63
Majorité absolue 32
Pour l’adoption 49
Contre 14
(L’article 4 est adopté.)
Après l’article 4
Mme la présidente
L’amendement no 51 de M. Louis Boyard, portant article additionnel après l’article 4, est défendu.
(L’amendement no 51, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
Article 5
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 82.
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Il s’agit d’ajouter le mot « notamment », comme le demandent les partenaires sociaux.
(L’amendement no 82, accepté par le gouvernement, est adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 68 de M. Louis Boyard est défendu.
(L’amendement no 68, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 69 de M. Louis Boyard est défendu.
(L’amendement no 69, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
(L’article 5, amendé, est adopté.)
Article 6
Mme la présidente
Les amendements identiques nos 65 de M. Louis Boyard et 120 de Mme Taillé-Polian sont défendus.
(Les amendements identiques nos 65 et 120, repoussés par la commission et le gouvernement, ne sont pas adoptés.)
(L’article 6 est adopté.)
Article 7
(L’article 7 est adopté.)
Article 8
(L’article 8 est adopté.)
Après l’article 8
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir l’amendement no 62, portant article additionnel après l’article 8.
Mme Ségolène Amiot
Il s’agit de réduire la durée du mandat des membres de la délégation du personnel au sein du comité social et économique.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Avis défavorable. Vous proposez d’abaisser la durée du mandat de quatre à deux ans. Or les partenaires sociaux ont signalé, à l’occasion de l’évaluation des ordonnances de 2017, qu’un raccourcissement de la durée du mandat empêchait la création de liens entre les délégués, mais aussi entre les délégués et l’employeur. Ils ont également indiqué qu’une certaine expérience était nécessaire. Il faut être fidèle à l’accord auquel sont parvenus les partenaires sociaux et s’opposer à cet abaissement de la durée du mandat, qui ne facilite ni l’acquisition d’expérience et de compétences, ni les relations entre les délégués et leurs employeurs.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Même avis.
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
En l’occurrence, ce qui ne facilite pas la relation et l’acquisition d’expérience, c’est la limitation à deux mandats consécutifs. Par contre, il peut être difficile de se projeter dans un mandat de quatre ans – on le voit aussi avec les mandats électifs locaux, comme celui de maire. Il n’est pas forcément évident de s’engager quatre ans dans une entreprise. On assiste à une crise de l’engagement dans le milieu syndical, notamment des élus dédiés aux questions de santé et de sécurité au travail. Il convient donc de revoir ce système de représentation en limitant la durée du mandat, sans limiter le nombre de mandats consécutifs.
(L’amendement no 62 n’est pas adopté.)
Article 9
Mme la présidente
L’amendement no 79 de M. le rapporteur est rédactionnel.
(L’amendement no 79, accepté par le gouvernement, est adopté.)
(L’article 9, amendé, est adopté.)
Après l’article 9
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement no 71, portant article additionnel après l’article 9.
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Nous avons déposé cet amendement avec le corapporteur, M. Stéphane Viry, car certaines situations intégrées dans le calcul du bonus-malus semblaient éloignées de la philosophie du dispositif, notamment les licenciements pour faute lourde ou pour inaptitude. Il nous semblait important d’être fidèles à l’accord national interprofessionnel sur le sujet, en retirant ces deux dispositions du calcul.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
L’accord d’avenant à la convention d’assurance chômage, signé en mai, a notamment acté, à la demande des partenaires sociaux, l’extension du dispositif bonus-malus qui avait été expérimenté dans plusieurs secteurs. La précision introduite par le rapporteur est importante. Je suis favorable à l’utilisation d’un tel dispositif pour pénaliser les entreprises qui recourent de façon abusive aux contrats courts, mais il ne faut pas qu’il s’applique à des ruptures de contrats pour faute lourde ou inaptitude. Avis favorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Ségolène Amiot.
Mme Ségolène Amiot
Exclure du dispositif les licenciements pour faute grave ou lourde nous paraît cohérent, mais en faire de même pour les licenciements pour inaptitude est une tartufferie. La plupart des salariés ont un mal fou à faire reconnaître l’origine professionnelle de leur inaptitude, parce que son développement s’étale sur une carrière entière ou que la maladie n’est pas reconnue comme une maladie professionnelle dans leur branche. Pour preuve, le nombre de saisies du conseil de prud’hommes qui ont pour objet d’invalider un licenciement pour inaptitude, en réalité abusif, parce que le salarié arrive finalement à faire reconnaître l’origine professionnelle de sa maladie très longtemps après le licenciement.
Vous nous proposez de ne pas pénaliser les employeurs qui abuseraient de licenciements pour inaptitude, alors même qu’il faut parfois plusieurs années pour faire reconnaître sa responsabilité. Ce n’est pas ainsi que nous arriverons à rétablir, comme vous le souhaitez, l’équilibre entre les bons et les mauvais employeurs par un recours au bonus-malus. Monsieur le rapporteur, il faut que vous retiriez l’inaptitude de votre amendement.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 71.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 68
Nombre de suffrages exprimés 48
Majorité absolue 25
Pour l’adoption 38
Contre 10
(L’amendement no 71 est adopté.)
Article 10
Mme la présidente
Sur l’amendement no 126 et le sous-amendement no 133, je suis saisie par le groupe Ensemble pour la République d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
L’amendement no 61 de M. Louis Boyard, qui tend à supprimer l’article 10, est défendu.
(L’amendement no 61, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 126 rectifié, qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Il vise à transposer les dispositions relatives à la création d’une période de reconversion professionnelle pour les salariés prévues par l’ANI du 25 juin 2025, comme s’y était engagé le gouvernement.
Cette transposition s’inscrit dans un contexte contraint, notamment par le besoin de mieux accompagner les reconversions professionnelles, compte tenu des mutations importantes du marché du travail et des aspirations des actifs, et par le besoin de simplification des dispositifs, afin que chaque acteur – salarié ou entreprise – puisse y recourir facilement.
L’amendement tend à introduire la période de reconversion prévue par l’ANI. Il s’agit d’un nouveau dispositif qui vise à remplacer, en les fusionnant, les dispositifs existants : promotion par alternance, pour la mobilité interne, et Transitions collectives, Transco, pour la mobilité externe. Un certain nombre d’entre vous a déjà dû entendre parler de ce dernier, que les employeurs et salariés jugeaient compliqué à utiliser.
À titre indicatif, Transco, salué par tous à sa création en 2019, n’a permis la reconversion que de mille salariés, en raison même de sa complexité. Raison pour laquelle nous avons voulu faciliter les choses.
Le nouveau dispositif permettra aux employeurs de proposer, en accord avec les salariés, d’utiliser la période de reconversion, soit au sein de leur entreprise, soit dans une autre entreprise, pour s’adapter aux besoins de nouvelles compétences.
À l’issue d’une formation, le salarié pourra obtenir une certification professionnelle, un certificat de qualification professionnelle ou bien un ou plusieurs blocs de compétences pour valider l’acquisition de savoir-faire, que ce soit dans son entreprise ou dans une entreprise située dans un territoire qui recrute. Que la reconversion soit interne ou externe, la durée de la formation sera comprise entre 150 et 450 heures en moyenne, soit 6 à 18 semaines.
Ce dispositif s’appuie sur le dialogue social, en fonction de la taille des entreprises, afin de s’adapter aux contraintes et de le rendre le plus opérationnel possible. Dans le cadre d’une mobilité interne, la reconversion se fait pendant le temps de travail et elle est formalisée par un accord écrit entre salarié et employeur. À l’issue de cette période de reconversion, le salarié pourra occuper un nouveau poste au sein de l’entreprise.
Dans le cadre d’une mobilité externe, la reconversion sera opérée par la mise en place d’accords collectifs portant gestion prévisionnelle des emplois et des compétences ou rupture conventionnelle collective. Les mesures d’accompagnement de ces reconversions pourront être précisées.
Après identification d’une entreprise d’accueil, le contrat de travail liant le salarié à son entreprise d’origine est suspendu pendant la période de reconversion et un contrat de travail à durée déterminée ou indéterminée sera conclu avec l’entreprise d’accueil. Le salarié bénéficiera d’un droit de retour dans son entreprise d’origine pendant la durée de sa période d’essai. À l’issue de celle-ci et si elle est concluante, le salarié est recruté par l’entreprise d’accueil, sinon, il retourne dans son entreprise d’origine ou bien, s’il ne souhaite pas la réintégrer, son contrat de travail est rompu et lui ouvre droit aux indemnités légales.
Cet amendement, en transposant l’ANI, répond à un impératif de simplification des dispositifs de reconversion professionnelle et à un impératif d’efficacité dans un contexte économique contraint.
Aujourd’hui, ces dispositifs de reconversion sont surtout utilisés par des entreprises qui détruisent des emplois, que ce soit à cause de mutations technologiques ou économiques, comme pour l’automobile thermique. Il y a eu des cas, notamment dans le Nord, où des salariés qui travaillaient dans le secteur automobile ont été embauchés par des entreprises fabriquant des batteries électriques, dans le cadre du dispositif Transco.
Il est important de simplifier ce dispositif pour y recourir massivement, comme l’exigeaient tant les syndicats que le patronat, et pour qu’il s’adresse aussi à des entreprises qui ne détruisent pas d’emplois, notamment pour les métiers à forte usure professionnelle – ceux dont il serait déraisonnable et vain de prétendre que l’on peut les exercer durant toute une vie, comme ripeurs ou égoutiers par exemple. Ces salariés pourront, à l’occasion de l’entretien de mi-carrière, qui dresse un bilan de santé et de compétences, souhaiter bénéficier de ce dispositif de reconversion afin d’aménager leur poste ou de se former pour se reconvertir en interne ou en externe.
Mme la présidente
La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir les sous-amendements nos 133, 140 rectifié, 141, 135 rectifié, 134, 136 rectifié et 137, à l’amendement no 126, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
M. Nicolas Turquois, rapporteur
La plupart sont rédactionnels. La commission ne les a pas examinés, ni l’amendement du gouvernement, mais il me semble qu’encourager les reconversions et éviter aux salariés d’être bloqués à vie sur un poste, à moins de démissionner, est une évolution souhaitable pour limiter l’exposition des salariés à certains risques ou facteurs de pénibilité ainsi que pour leur propre satisfaction. Les partenaires sociaux ont trouvé un accord permettant cette évolution. J’y suis très favorable à titre personnel.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement sur les sous-amendements ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Avis favorable.
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian
Il est compliqué de délibérer dans ces conditions, puisque cet amendement nous a été transmis hier soir et que l’encre de l’ANI est à peine sèche. Je comprends votre volonté d’aller vite, mais nous sommes peut-être en train de bâcler nos débats. D’autant plus que nous aurions aimé pouvoir discuter des dispositions que vous proposez avec les différentes organisations syndicales et les entreprises afin de mieux comprendre ce qui est proposé. Il nous semble qu’il y a là des enjeux importants.
Évidemment, nous sommes extrêmement favorables que des dispositifs soient créés pour favoriser les reconversions professionnelles, afin de répondre au besoin de changer de métier et d’acquérir de nouvelles compétences ou au souhait de se former pour un poste de travail plus adapté. Trois fois oui !
Cependant, si je comprends bien, l’ANI instaure un plafonnement à 950 heures, et non plus 1 200, de la prise en charge des parcours de formation par les associations Transitions pro, soit une perte de 250 heures. Cet abaissement du nombre d’heures de formation à disposition du salarié revient à brader le projet de transition professionnelle. C’est incompréhensible.
En outre, vous abusez des droits du salarié en les retournant contre lui d’une seconde façon, notamment en mobilisant le compte personnel de formation (CPF) pour financer les besoins de formation des entreprises. Son utilisation n’est plus laissée au libre choix du travailleur, mais peut faire l’objet d’un accord entre lui et son employeur. Cette utilisation du CPF s’apparente à une forme de captation du droit du salarié pour répondre aux besoins de formation des entreprises.
Mme Ségolène Amiot
Eh oui !
Mme Sophie Taillé-Polian
Nous sommes très dubitatifs et puisque nous n’avons pas eu le temps de conduire une expertise, nos craintes restent lourdement fondées. Nous voterons contre l’amendement du gouvernement.
Mme Ségolène Amiot
Elle a raison !
M. Roland Lescure
C’est dommage, l’accord est bon !
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
L’ANI a été signé par quatre organisations syndicales et trois organisations patronales. La transposition de ces points précis a été revue avec elles – en tout cas pour ce qui est du fonctionnement. Néanmoins, je comprends vos réticences.
Si nous avons voulu instaurer ce dispositif, c’est parce qu’il est demandé par touts les syndicats et toutes les organisations patronales. Ils ont besoin d’outils plus efficaces et plus opérationnels dès maintenant. Il vise non seulement à répondre aux besoins des salariés qui sont exposés à l’usure professionnelle et qui souhaitent recourir à une reconversion interne ou externe, mais aussi à faire face aux restructurations économiques et à la hausse de 11 % des inscriptions à France Travail qu’elles ont provoquée l’année dernière.
L’abaissement à 950 heures ne concerne pas les formations médico-sociales. C’est important, car ceux qui souhaitent se reconvertir dans le secteur médico-social, qui est en tension, ne seront pas concernés.
Nous devons nous interroger sur le fonctionnement de la formation professionnelle continue en France. J’ai constaté qu’elle s’appuie principalement sur des formations longues, alors que ce qui marche, ce sont des formations concentrées sur quatre mois, très opérationnelles et pratiques, à hauteur de 35 heures par semaine – à plein temps, si j’ose dire –, orientées vers les secteurs en tension et suivies d’une mise en pratique de deux à trois mois dans une entreprise. La réussite de cette méthode est attestée par des taux d’insertion très élevés, à hauteur de 80 % à 85 %.
C’est pourquoi, conformément à une recommandation de l’Igas, l’Inspection générale des affaires sociales, nous avons choisi de réduire la durée de la formation – à l’exception des formations médico-sociales.
En outre, proposer aux salariés d’une entreprise en cours de restructuration de mobiliser leur CPF pour un maintien dans l’emploi – que ce soit au sein de l’entreprise, sur des métiers en développement, ou en dehors – ne me paraît en rien constituer un détournement du CPF, d’autant que ce dispositif montre toute son efficacité dans les branches où les Opco, les opérateurs de compétences, et les employeurs le coabondent. Le CPF s’inscrit en effet dans une logique de développement des compétences de l’entreprise. C’est dans ces conditions qu’il trouve sa véritable valeur ajoutée.
Pour ces deux raisons, quatre organisations syndicales ont signé l’ANI du 25 juin 2025, qui crée des outils indispensables, attendus tant par les salariés que par les organisations professionnelles. Nous en avons besoin maintenant.
Mme la présidente
La parole est à M. Roland Lescure.
M. Roland Lescure
Il faut adopter cet amendement. Les organisations syndicales ont conclu un accord. Nous vivons la transition historique des secteurs en déclin vers des secteurs d’avenir. Dans celui de l’automobile par exemple, des entreprises spécialisées dans la fabrication de moteurs diesel, menacées de fermeture, signent ce type d’accord pour former leurs salariés, qui pourront être employés dans les usines qui produisent les batteries des véhicules électriques. Ce dispositif contribue ainsi à maintenir une industrie automobile en France.
Dans le secteur du commerce de détail, confronté à des fermetures de magasins, un accord a été signé – chez Monoprix, si ma mémoire est bonne – pour financer des formations permettant aux salariés de travailler dans les Ehpad.
Mme Sophie Taillé-Polian
On ne propose pas de supprimer les transitions !
M. Roland Lescure
Ce dispositif fonctionne et les partenaires sociaux sont d’accord pour simplifier un système aujourd’hui très complexe. Je ne comprends pas qu’on puisse s’y opposer.
Mme Sophie Taillé-Polian
250 heures de moins, c’est bien ?
M. Roland Lescure
Il y va de l’intérêt général et du maintien en France des activités d’avenir. Votez pour cet amendement, mes chers collègues !
Mme la présidente
Madame Taillé-Polian, j’ai vu que vous demandiez la parole mais je ne peux pas vous la donner une seconde fois sur cet amendement. Je n’invente pas les règles : ce n’est pas un dialogue.
Mme la présidente
Je mets aux voix le sous-amendement no 133.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 62
Nombre de suffrages exprimés 39
Majorité absolue 20
Pour l’adoption 31
Contre 8
(Le sous-amendement no 133 est adopté.)
(Les sous-amendements nos 140 rectifié, 141, 135 rectifié, 134, 136 rectifié et 137, successivement mis aux voix, sont adoptés.)
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 126 rectifié, tel qu’il a été sous-amendé.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 68
Nombre de suffrages exprimés 67
Majorité absolue 34
Pour l’adoption 55
Contre 12
(L’amendement no 126 rectifié, sous-amendé, est adopté ; en conséquence, l’article 10 est ainsi rédigé.)
Après l’article 10
Mme la présidente
Nous en venons aux amendements portant article additionnel après l’article 10.
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 151.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Il vise lui aussi à transposer l’accord relatif aux transitions et reconversions. Les partenaires sociaux ont souhaité créer un espace stratégique national afin de définir les orientations et les priorités nationales en matière d’orientation et de formation professionnelles, pour le développement des compétences des actifs.
Ce nouvel espace de concertation aura une composition quadripartite associant des représentants de l’État, des régions – qui jouent un rôle important en matière de formation –, des organisations syndicales et des organisations d’employeurs, comme l’ont souhaité les signataires de l’accord.
Il organisera ses travaux en lien avec le Comité national pour l’emploi et bénéficiera de l’appui de Certif Pro, qui en assurera le secrétariat. Ces précisions visent donc à transposer fidèlement l’accord, conformément à nos engagements.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Je ne donnerai pas l’avis de la commission, puisqu’elle n’a pas examiné cet amendement. Je partage néanmoins les propos de plusieurs de nos collègues, en particulier ceux de Sophie Taillé-Polian : il est difficile de se prononcer sur un sujet aussi complexe, que nous ne traitons pas au quotidien, d’autant plus lorsque les éléments nous parviennent tardivement.
Mme Sophie Taillé-Polian
Merci !
M. Nicolas Turquois, rapporteur
Je suis partagé. D’un côté, les partenaires sociaux que nous avons auditionnés nous ont clairement demandé de transposer l’intégralité de leurs accords, notamment celui relatif aux transitions professionnelles – l’article 10 pouvait servir à cela. De l’autre, j’ai le sentiment que nous créons une structure supplémentaire, avec cet espace stratégique doté d’un acronyme comme on sait si bien les faire – CNOFDC, que je ne sais même pas prononcer. Je suis donc un peu perplexe mais puisque nous avons donné notre parole aux partenaires sociaux, je m’en remettrai, à titre personnel, à la sagesse de notre assemblée.
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian.
Mme Sophie Taillé-Polian
Ce n’est pas parce que nous avons voté contre les dispositions réécrites précédemment que nous sommes opposés aux transitions professionnelles ou à la formation des salariés et des ouvriers de l’automobile en vue de leur reconversion. Ne mélangeons pas tout ! Ce que nous contestons, c’est la baisse du nombre d’heures de formation proposées. Même si j’entends que le nouveau dispositif est plus efficace dans certains secteurs, ce n’est pas forcément le cas dans tous.
La transposition visant à créer ce nouveau conseil nous semble intéressante, car elle permettrait de disposer d’une vision stratégique des évolutions du marché de l’emploi. Si notre pays menait vraiment une politique industrielle, ce conseil pourrait l’accompagner. Nous sommes donc favorables à cet amendement du gouvernement…
M. Roland Lescure
Très bien !
Mme Sophie Taillé-Polian
Vous n’avez pas tout écouté, monsieur Lescure, mais vous repasserez la bande ! (Sourires.)
M. Roland Lescure
Mais c’était un bon début !
Mme Sophie Taillé-Polian
En revanche, nous regrettons une fois de plus que nous ne disposions pas de cette vision stratégique.
(L’amendement no 151 est adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre, pour soutenir l’amendement no 127 rectifié, qui fait l’objet de plusieurs sous-amendements.
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Il vise toujours à transposer l’accord relatif aux transitions et reconversions et à améliorer la gouvernance paritaire et le projet de transition professionnelle.
En matière de gouvernance, l’amendement consacre l’existence d’une instance paritaire nationale dédiée aux transitions professionnelles, conformément aux souhaits des partenaires sociaux. Elle s’appuiera sur l’association paritaire existante avec laquelle l’État signera désormais une convention d’objectifs et de moyens, qui permettra, en lien avec les partenaires sociaux, de définir notamment les publics cibles ou les formations souhaitées. Cette consécration renforce la place des partenaires sociaux dans le pilotage des transitions professionnelles, conformément au texte de l’accord interprofessionnel.
Par ailleurs, cet amendement vise à clarifier le financement du projet de transition professionnelle, en intégrant les fonds issus de la mobilisation du compte personnel de formation dans le financement des projets de transition professionnelle et en sécurisant le parcours du salarié. Ce dernier sera informé par son employeur, trois mois avant la fin de sa formation, de son droit à réintégrer son poste ou, à défaut, un poste équivalent. S’il n’apporte pas de réponse, le salarié sera réputé accepter sa réintégration dans son ancien poste ou à un poste équivalent. Dans le cas d’un refus de sa part, il pourra démissionner tout en bénéficiant du droit aux allocations chômage.
Ces avancées sont conformes aux souhaits exprimés par les partenaires sociaux dans l’accord du 25 juin dernier et répondent au souci du gouvernement de renforcer la gouvernance paritaire, en vue de sécuriser davantage les transitions professionnelles des salariés, sans complexifier outre mesure le paysage institutionnel.
Mme la présidente
Les sous-amendements nos 145, 146, 149, 150, 148 et 147 de M. Nicolas Turquois, rapporteur, sont rédactionnels.
(Les sous-amendements nos 145, 146, 149, 150, 148 et 147, acceptés par le gouvernement et successivement mis aux voix, sont adoptés.)
(L’amendement no 127 rectifié, sous-amendé, accepté par la commission, est adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 122 de Mme Sophie Taillé-Polian est défendu.
(L’amendement no 122, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Océane Godard, pour soutenir l’amendement no 5.
Mme Océane Godard
Nous proposons d’insérer un article additionnel qui prévoit que le gouvernement remette au Parlement un rapport, dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la présente loi.
(L’amendement no 5, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
La parole est à Mme Sophie Taillé-Polian, pour soutenir l’amendement no 123.
Mme Sophie Taillé-Polian
Vous nous avez indiqué votre volonté d’aller jusqu’au terme des cinq ans d’expérimentation. Dans ce cadre, nous proposons que le gouvernement remette chaque année un rapport au Parlement, afin de suivre l’évolution du dispositif et d’en vérifier l’efficacité.
J’ai déjà évoqué le rapport Gay sur les aides aux entreprises, qui souligne à quel point celles-ci constituent un véritable maquis, rendant impossible de savoir si elles sont véritablement efficaces. Ne tombons pas dans ce travers avec ce nouveau dispositif.
Mme la présidente
Quel est l’avis de la commission ?
M. Nicolas Turquois
Avis défavorable.
Mme la présidente
Quel est l’avis du gouvernement ?
Mme Astrid Panosyan-Bouvet, ministre
Même avis.
Mme la présidente
Je mets aux voix l’amendement no 123.
(Le vote à main levée n’ayant pas été concluant, il est procédé à un scrutin public.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 70
Nombre de suffrages exprimés 64
Majorité absolue 33
Pour l’adoption 32
Contre 32
(L’amendement no 123 n’est pas adopté.)
Mme la présidente
L’amendement no 124 de Mme Sophie Taillé-Polian est défendu.
(L’amendement no 124, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Sur le projet de loi, je suis saisie par les groupes Ensemble pour la République et Horizons & indépendants d’une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l’enceinte de l’Assemblée nationale.
La parole est à Mme Ségolène Amiot, pour soutenir les amendements nos 70 et 67, qui peuvent faire l’objet d’une présentation groupée.
Mme Ségolène Amiot
Ils sollicitent tous deux la remise d’un rapport du gouvernement. Le premier porte sur l’opportunité de la création d’un droit opposable à la retraite progressive ; le second concerne les disparités dans la prise en charge des cotisations vieillesse par les employeurs des salariés en retraite progressive et leur incidence sur les droits à la retraite.
Ce dernier point a fait l’objet de nombreuses remontées par des salariés concernés. Il nous semble donc pertinent de disposer d’un rapport qui pourrait, le cas échéant, permettre une adaptation du droit.
(Les amendements nos 70 et 67, repoussés par la commission et le gouvernement, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.)
Mme la présidente
L’amendement no 107 de Mme Sophie Taillé-Polian est défendu.
(L’amendement no 107, repoussé par la commission et le gouvernement, n’est pas adopté.)
Mme la présidente
Nous avons achevé l’examen des articles du projet de loi.
Vote sur l’ensemble
Mme la présidente
Je mets aux voix l’ensemble du projet de loi.
(Il est procédé au scrutin.)
Mme la présidente
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 69
Nombre de suffrages exprimés 66
Majorité absolue 34
Pour l’adoption 57
Contre 9
(Le projet de loi est adopté.)
(Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes EPR, DR, Dem et HOR.)
2. Ordre du jour de la prochaine séance
Mme la présidente
Prochaine séance, lundi 7 juillet, à quinze heures :
Discussion de la proposition de loi relative à la restitution d’un bien culturel à la république de Côte d’Ivoire ;
Discussion, en nouvelle lecture, de la proposition de loi visant à réformer le mode d’élection des membres du conseil de Paris et des conseils municipaux de Lyon et Marseille.
La séance est levée.
(La séance est levée à dix-sept heures quarante-cinq.)
Le directeur des comptes rendus
Serge Ezdra