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le 31 juillet 2002

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N° 157

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

DOUZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale le 30 juillet 2002.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES LOIS CONSTITUTIONNELLES, DE LA LÉGISLATION ET DE L'ADMINISTRATION GÉNÉRALE DE LA RÉPUBLIQUE SUR LE PROJET DE LOI, ADOPTÉ PAR LE SÉNAT APRÈS DÉCLARATION D'URGENCE (N° 154), d'orientation et de programmation pour la justice,

PAR M. JEAN-LUC WARSMANN,

Député.

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EXAMEN DES ARTICLES
(2ème partie : titres IV à VIII)


SOMMAIRE GÉNÉRAL DU RAPPORT

INTRODUCTION - AUDITIONS

EXAMEN DES ARTICLES (titres Ier à III)

EXAMEN DES ARTICLES (titres IV à VIII)

TABLEAU COMPARATIF

TEXTE DU RAPPORT ANNEXE - ANNEXE AU TABLEAU COMPARATIF - AMENDEMENTS NON ADOPTES PAR LA COMMISSION - LISTE DES PERSONNES ENTENDUES PAR LE RAPPORTEUR


EXAMEN DES ARTICLES (suite)

Titre IV - Dispositions tendant à simplifier la procédure pénale et à accroître son efficacité

Article 21 A (nouveau) (art. 2-15 du code de procédure pénale) : Constitution de partie civile des associations défendant les victimes d'accidents collectifs

Articles additionnels après l'article 21 A (art. 77-2, 77-3, 63-1 et 706-71 du code de procédure pénale) : Suppression de l'autorisation du juge des libertés et de la détention pour la prolongation d'une enquête et utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle pour la présentation aux fins de prolongation de la garde à vue ou de la retenue judiciaire

Chapitre 1er - Disposition relatives à la composition pénale

Avant l'article 21

Article 21 (art. 41-2, 41-3, 768 et 769 et 775 du code de procédure pénale) : Aménagement de la composition pénale

Après l'article 21

Chapitre II - Dispositions relatives à la détention provisoire et à l'instruction

Section 1 - Dispositions relatives à la détention provisoire 

Paragraphe 1 : Dispositions renforçant la cohérence des règles relatives aux conditions de placement en détention provisoire ou de prolongation des détentions 

Article 22 (art. 137-4, 137-5, 143-1, 144, 145-1 et 145-2 du code de procédure pénale) : Placement et prolongation de la détention provisoire

Paragraphe 2 : Dispositions relatives aux demandes de mise en liberté et instituant la procédure de référé-détention  

Article 23 (art. 148-1-A [nouveau], 187-3 [nouveau], 148-2, 183 et 199 du code de procédure pénale) : Procédure de référé-détention - Conditions d'examen des demandes de mise en liberté 

Après l'article 23 

Section 2 - Dispositions relatives à l'instruction

Article 24 (art. 80-2, 82-2, 86, 177-3 [nouveau], 706-58 du code de procédure pénale et 435-15-1 du code pénal) - Dispositions diverses relatives à l'instruction

Chapitre III - Dispositions relatives au jugement des délits

Section 1 - Dispositions relatives à la procédure de comparution immédiate

Article 25 (art. 395, 396, 397-1, 397-3, 397-4 du code de procédure pénale) : Aménagement de la procédure de comparution immédiate 

Section 2 - Dispositions étendant la compétence du juge unique en matière correctionnelle 

Article 26 (art. 398-1 du code pénal) - Extension de la compétence du juge unique en matière correctionnelle 

Articles additionnels après l'article 26 (art. 399 du code de procédure pénale) Fixation des audiences correctionnelles 

(art. 395 à 495-6 [nouveaux] du code de procédure pénale) Extension de la procédure de l'ordonnance pénale aux délits prévus par le code de la route 

Chapitre IV - Dispositions relatives à la procédure criminelle et à la cour d'assises 

Article 27 (art 215, 215-2, 268 et 367 du code de procédure pénale) Simplification de la procédure criminelle - Délais d'audiencement des appels

Chapitre V - Disposition relative à l'application des peines 

Article 28 (art. 722 du code de procédure pénale) : Possibilité de déroger au débat contradictoire pour les mesures d'aménagement de peines 

Articles additionnels après l'article 28 (art. 421-4 et 421-5 du code pénal) : Création d'une infraction d'association de malfaiteurs aggravés pour certains actes de terrorisme 

(art. L. 215-4 du code rural) :Renforcement des sanctions contre les propriétaires d'animaux dangereux 

Après l'article 28

Titre V - Dispositions relatives à l'amélioration du fonctionnement et de la sécurité des établissements pénitentiaires 

Chapitre Ier - Disposition relative à la sûreté des communications téléphoniques

Article 29 (art. L. 33-3 du code des postes et télécommunications) : Neutralisation des téléphones mobiles dans l'enceinte des établissements pénitentiaires

Chapitre II - Dispositions relatives à l'hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux 

Article 30 (Chapitre IV du titre premier du livre II de la troisième partie du code de la santé publique) : Hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux

Chapitre III - Dispositions relatives au placement sous surveillance électronique 

Article 31 (art. 138, 144-2, 723-7, 723-9 et 723-13 du code de procédure pénale) : Placement sous surveillance électronique dans le cadre d'un contrôle judiciaire - contrôle à distance par des personnes de droit privé 

Chapitre IV - Dispositions relatives à la répartition des détenus 

Article 32 (art. 717 du code de procédure pénale) : Classification des établissements pénitentiaires

Chapitre V (nouveau) - De la réinsertion professionnelle des détenus 

Article 32 bis (nouveau) (art. 720 du code de procédure pénale) : Suppression du prélèvement pour frais d'entretien en établissement pénitentiaire 

Article 32 ter (nouveau) (art. 720-1 du code de procédure pénale) : Travail des détenus pour leur propre compte 

Titre VI (nouveau) - Dispositions relatives à la justice administrative 

Article 33 A (nouveau) (art. L. 222-5 du code de justice administrative) : Abrogation d'une disposition relative à l'affectation des magistrats administratifs dans les cours administratives d'appel 

Article additionnel après l'article 33 A (art. L. 232-2 du code de justice administrative) : Participation des agents en position de détachement au sein du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel à l'élection du Conseil supérieur 

Article 33 B (nouveau) (art. L. 232-4-1 du code de justice administrative) : Fonctionnement du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel 

Article 33 (art. L. 233-6 du code de justice administrative) :Recrutement complémentaire des membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel 

Article 34 (art. L. 233-7 du code de justice administrative) : Maintien en activité des membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel 

Article 35 (art. L. 233-9 du code de justice administrative) : Fin de fonctions des membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel 

Article 36 (art. 1er, 2 et 5 de la loi n° 80-511 du 7 juillet 1980 relative au recrutement des membres des tribunaux administratifs) : Abrogations par coordination 

Article 37 (art. L. 122-2 du code de justice administrative) : Recrutement d'assistants de justice au Conseil d'État

Article 38 (art. L. 227-1 du code de justice administrative) Recrutement d'assistants de justice dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel

Titre VI bis (nouveau) - Disposition relative aux assistants de justice des juridictions judiciaires

Article 38 bis (nouveau) (art. 20 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative) : Allongement de la durée des fonctions d'assistants de justice dans les juridictions judiciaires 

Après l'article 38 bis

Titre VII - Dispositions relatives à l'aide aux victimes  

Article 39 (art. 53-1 et 75 du code de procédure pénale) : Amélioration de l'information des victimes d'infractions

Article 39 bis (nouveau) (art. 40-1 [nouveau] du code de procédure pénale) : Modalités de désignation de l'avocat de la victime d'infraction qui s'est constituée partie civile 

Article 40 (art. 9-2 [nouveau] de la loi n° 91-657 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique) : Extension du bénéfice de l'aide juridictionnelle de plein droit au profit des victimes d'infractions graves

Après l'article 40 

Article 41 (art. 74-1 et 80-4 [nouveaux] du code de procédure pénale et art. 26 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité) Recherche des personnes disparues - Renforcement des moyens d'investigation

Titre VIII - Dispositions relatives à l'application à l'outre-mer

Article 42 (Article L. 142-5 du code de la route) : Constatation des infractions routières à Mayotte

Article 43 (art. L. 142-5 du code de la route) : Application en outre-mer et habilitation du Gouvernement au titre de l'article 38 de la Constitution

Article 44 (nouveau) (art. 140 du code minier) : Compétence du procureur de la République pour ordonner la destruction des matériels ayant servi à commettre une infraction au code minier


TITRE IV

DISPOSITIONS TENDANT À SIMPLIFIER LA PROCÉDURE PÉNALE
ET À ACCROÎTRE SON EFFICACITÉ

Le titre IV regroupe diverses dispositions ayant pour objet l'amélioration de l'efficacité de la procédure pénale, notamment grâce à des mesures de simplification. Les modifications proposées ne remettent pas en cause les acquis de la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence, mais procèdent à des aménagements à la marge destinés à redonner un peu de souplesse à une procédure pénale dont on critique trop souvent les rigidités et le formalisme excessifs.

Le chapitre Ier (article 21) modifie la procédure de composition pénale, afin notamment de la rendre applicable aux délits de recel et aux contraventions et de permettre l'inscription au casier judiciaire des compositions pénales exécutées.

Le chapitre II, qui rassemble les dispositions relatives à la détention provisoire et à l'instruction, comporte deux sections.

La section 1, relative à la détention provisoire, oblige le juge d'instruction à statuer par ordonnance motivée lorsqu'il ne suit pas les réquisitions du procureur de la République tendant au placement en détention provisoire, fixe à trois ans d'emprisonnent le seuil autorisant le placement en détention provisoire en matière correctionnelle, quelle que soit la nature de l'infraction et l'état de récidive du prévenu, et allonge respectivement de huit mois et un an les délais butoirs de détention en matière correctionnelle et criminelle (article 22). Elle met également en place une procédure de référé-détention, qui permet de conférer un caractère suspensif à l'appel du parquet d'une décision de mise en liberté (article 23).

Les modifications apportées à l'instruction, rassemblées dans la section 2 (article 24), permettent notamment au juge d'instruction de prononcer une amende civile à l'égard de la partie civile lorsqu'il rend une ordonnance de refus d'informer, suppriment la possibilité pour l'avocat d'une partie d'assister aux actes demandés et étendent la procédure de témoignage anonyme aux délits punis de trois ans d'emprisonnement, au lieu de cinq ans actuellement.

Le chapitre III, consacré au jugement des délits, comporte une section 1 qui rend la procédure de comparution immédiate applicable aux délits punis d'une peine d'emprisonnement comprise entre six mois et dix ans et rétablit, pour cette procédure, les délais de jugement en vigueur avant la loi du 15 juin 2000 (article 25). La section 2 (article 26), quant à elle, étend la compétence du juge unique aux délits de rébellion et aux délits pour lesquels une peine d'amende n'est pas encourue.

La principale des modifications apportées à la procédure criminelle, objet du chapitre IV (article 27), est la suppression du délai d'audiencement devant la cour d'assises d'appel lorsque l'accusé est détenu.

Enfin, le chapitre V (article 28), relatif à l'application des peines, permet de supprimer le débat contradictoire préalable à la décision du juge de l'application des peines en matière d'aménagement de peines lorsque le procureur de la République et le détenu ont exprimé leur accord.

Le Sénat a ajouté une nouvelle disposition, relative aux constitutions de parties civiles d'associations défendant les victimes d'accidents collectifs (article 21 A).

Article 21 A (nouveau)

(art. 2-15 du code de procédure pénale)

Constitution de partie civile des associations défendant les victimes d'accidents collectifs

L'article 2-15 du code de procédure pénale reconnaît aux associations ayant pour objet statutaire la défense des victimes d'un accident survenu dans les transports collectifs ou dans un lieu ou un local ouvert au public et regroupant plusieurs de ces victimes d'exercer les droits reconnus à la partie civile en ce qui concerne cet accident lorsque l'action publique a été mise en mouvement par le ministère public ou la partie lésée.

Ces associations doivent auparavant avoir été agréées selon une procédure très stricte. Aux termes de l'article D. 1 du code de procédure pénale, l'agrément n'est accordé par le ministère de la justice, après avis du ministère public, qu'aux associations qui ont un nombre représentatif de membres adhérents victimes de l'infraction, disposent de garanties suffisantes d'une activité effective pour défendre les victimes, notamment par l'intervention d'un avocat, et ont un caractère désintéressé. L'agrément peut être suspendu ou retiré à tout moment lorsque l'association ne remplit plus l'une des conditions ayant justifié l'agrément.

Ces dispositions, tout en garantissant les droits des victimes, permettent d'éviter la multiplication de constitutions de partie civile isolées dans les affaires d'accidents collectifs.

Sur proposition de M. Laurent Béteille, le Sénat a étendu l'application de cet article aux accidents survenus dans une propriété privée à usage d'habitation ou à usage professionnel.

Ces nouvelles dispositions pourront notamment trouver à s'appliquer dans la procédure concernant la catastrophe de Toulouse.

La Commission a adopté l'article 21 A sans modification.

Articles additionnels après l'article 21 A

(art. 77-2, 77-3, 63-1 et 706-71 du code de procédure pénale)

Suppression de l'autorisation du juge des libertés et de la détention
pour la prolongation d'une enquête et utilisation de moyens
de télécommunication audiovisuelle pour la présentation
aux fins de prolongation de la garde à vue ou de la retenue judiciaire

Après avoir rejeté l'amendement n° 1 présenté par M. Patrick Hoguet offrant la possibilité au maire de saisir le procureur de la République pour tout acte commis dans la commune susceptible de porter atteinte à la tranquillité publique et à l'intégrité des personnes et des biens, la Commission a adopté un premier amendement présenté par M. Alain Marsaud (amendement n° 172) supprimant la disposition introduite par la loi du 15 juin 2000 soumettant la prolongation d'une enquête placée sous la direction du procureur de la République, en certaines circonstances, à l'autorisation du juge des libertés et de la détention saisi par le suspect et faisant obligation aux enquêteurs de notifier ce droit à la personne placée en garde à vue. Elle a également adopté deux amendements du même auteur, le premier permettant la présentation au procureur de la République aux fins de prolongation de la garde à vue par l'utilisation de moyens de télécommunication audiovisuelle (amendement n° 173), le second de coordination (amendement n° 174).

chapitre 1er

Disposition relatives à la composition pénale

Avant l'article 21

La Commission a rejeté l'amendement n° 34 de M. Guy Teissier.

Article 21

(art. 41-2, 41-3, 768 et 769 et 775 du code de procédure pénale)

Aménagement de la composition pénale

Cet article propose plusieurs modifications de la procédure de la composition pénale, destinées à « étendre son champ d'application et l'efficacité » de cette mesure.

a) La procédure de composition pénale

La composition pénale, introduite dans le code de procédure pénale par la loi du 23 juin 1999, est une procédure alternative aux poursuites qui permet au délinquant ayant reconnu sa culpabilité d'exécuter une mesure contre l'extinction de l'action publique.

L'article 41-2 autorise ainsi le procureur de la République, tant que l'action publique n'a pas été mise en mouvement, à proposer une composition pénale à une personne majeure qui reconnaît avoir commis l'un des délits limitativement énumérés.

Les délits susceptibles de faire l'objet d'une composition pénale sont des délits punis d'une peine d'emprisonnement d'une durée maximum de trois ans, correspondant pour une majorité d'entre eux aux actes de délinquance urbaine. Il s'agit des violences aggravées (articles 222-11 et 222-13 du code pénal), des appels téléphoniques malveillants (article 222-16), des menaces (articles 222-17 et 222-18), de l'abandon de famille (article 227-3) et des atteintes à l'exercice de l'autorité parentale (articles 227-4 à 227-7 et 227-9 à 227-11), du vol (article 311-3), de la filouterie (article 313-5), du détournement de gage ou d'objet saisi (articles 314-5 et 314-6), des destructions ou dégradations (articles 322-1 et 322-2), des menaces de destruction, de dégradations et des fausses alertes (articles 322-12 à 322-14), des outrages à personne chargée d'une mission de service public et la rébellion (articles 433-5 à 433-7), des sévices graves envers les animaux (article 521-1), de la détention irrégulière d'une arme (décret du 18 avril 1939), de la conduite sous l'empire d'un état alcoolique (article L. 1er du code de la route) et de l'usage de stupéfiants (article L. 628 du code de la santé publique). Les violences et les dégradations contraventionnelles peuvent également faire l'objet de cette mesure transactionnelle (article 41-3 du code de procédure pénale).

La composition pénale se traduit ou l'une ou plusieurs des obligations suivantes :

· Verser une amende de composition, qui ne peut excéder 3 750 € ni la moitié du maximum de l'amende encourue. Sur décision du procureur de la République, ce versement peut être échelonné sur une période qui ne peut être supérieure à un an.

· Se dessaisir de la chose qui a servi ou était destiné à commettre l'infraction ou qui en est le produit.

· Remettre au greffe du tribunal son permis de conduire ou son permis de chasser pour une période maximale de quatre mois.

· Effectuer un travail non rémunéré d'une durée maximale de soixante heures, dans un délai qui ne peut être supérieur à six mois.

Lorsque la composition pénale porte sur une contravention, le montant de l'amende de composition ne peut excéder 750 € ni la moitié de l'amende encourue, la durée de remise du permis de conduire ou du permis de chasser ne peut dépasser deux mois et la durée du travail non rémunéré ne peut être supérieure à trente heures, dans un délai maximum de trois mois.

L'accord de la personne, qui peut se faire assister par un avocat, sur la proposition de composition pénale est recueilli par procès verbal. Le procureur de la République transmet ensuite la proposition de composition pénale au président du tribunal correctionnel (au juge d'instance pour les contraventions) aux fins de validation. Ce magistrat ne peut que valider la proposition, ce qui rend la composition pénale exécutoire, ou la rejeter, celle-ci devenant alors caduque. Lorsque l'intéressé ou la victime, le cas échéant assistés de leur avocat, le demandent, leur audition est de droit. La décision du magistrat n'est susceptible d'aucun recours.

Lorsque la personne n'exécute pas intégralement les mesures prévues par la composition pénale ou lorsque la demande de validation est rejetée, le procureur de la République « apprécie la suite à donner à la procédure », ce qui peut se traduire par l'engagement de poursuites.

L'exécution de la composition pénale éteint l'action publique mais ne fait pas échec au droit de la partie civile de délivrer citation directe devant le tribunal correctionnel, qui statue alors sur les seuls intérêts civils.

b) Les modifications apportées par le projet de loi

L'article 21 du projet de loi aménage ce dispositif sur quatre points.

Il étend tout d'abord le champ d'application de la composition pénale au délit de recel (1° du paragraphe I). Rappelons que l'article 321-1 du code pénal définit le recel comme le fait de dissimuler, de détenir ou de bénéficier en toute connaissance de cause du produit d'un crime ou d'un délit. Si le recel est puni de cinq ans d'emprisonnement, soit une durée supérieure à celle des autres délits susceptibles de faire l'objet d'une composition pénale, il entre bien en revanche dans la catégorie des infractions de délinquance urbaine. L'application de la composition pénale au délit de recel devrait permettre de sanctionner plus efficacement les auteurs de vols simples, pour lesquels il est parfois difficile de prouver qu'ils sont à l'origine du vol du bien trouvé en leur possession.

Il est également proposé d'étendre l'application de cette procédure à des contraventions dont la liste sera fixée par décret en Conseil d'Etat (paragraphe II). La composition pénale pourrait ainsi être proposées pour des infractions telles que l'intrusion dans un établissement scolaire (article R. 645-12 du code pénal), le racolage (article R. 625-8) ou encore les mauvais traitements envers un animal (article R. 654-1).

L'article 21 porte ensuite de quatre à six mois la durée maximum de retrait du permis de conduire ou du permis de chasser (2° du paragraphe I). Cette modification est principalement destinée à renforcer la lutte contre l'alcool au volant, puisque, rappelons le, la conduite sous l'empire d'un état alcoolique fait partie de la liste des infractions susceptibles de faire l'objet d'une composition pénale.

Dans le même ordre d'idée, il propose de compléter les différentes mesures susceptibles d'être prononcées dans le cadre d'une composition pénale par l'obligation de suivre un stage ou une formation dans une structure sanitaire, sociale ou professionnelle, pour une durée maximale de trois mois et dans un délai qui ne pourra être supérieur à dix-huit mois (3° du paragraphe I). Cette obligation pourra non seulement s'appliquer aux conducteurs en état d'alcoolémie, mais également aux usagers de stupéfiants.

Enfin, il est proposé d'inscrire au casier judiciaire de l'intéressé les compositions pénales exécutées (4° du paragraphe I et paragraphe III). Cette inscription sera limitée au bulletin n°1, qui n'est accessible qu'aux autorités judiciaires. Le paragraphe V complète pour cela l'article 775 du code de procédure pénale, qui définit le contenu du bulletin n°2, afin d'exclure expressément de ce bulletin les compositions pénales exécutées, ce qui les limite, par voie de conséquence, au bulletin n°1.

Il est, par ailleurs, précisé que cette inscription sera sans incidence sur l'application des règles sur la récidive, ce qui semble aller de soit puisque la récidive prend en compte uniquement les peines prononcées, ce qui n'est pas le cas de la composition pénale. Cette inscription devrait néanmoins permettre aux magistrats de connaître les antécédents judiciaires des personnes déférées.

Le Sénat a adopté une nouvelle rédaction du 4° du paragraphe I, afin d'indiquer plus clairement que les compositions pénales exécutées seront inscrites au bulletin n°1 du casier judiciaire et de supprimer la référence inutile aux règles sur la récidive.

Par cohérence, le paragraphe IV de l'article 21 complète l'article 769 du code de procédure pénale, relatif au retrait des fiches du casier judiciaire, afin de permettre le retrait des mentions relatives à la composition pénale à l'expiration d'un délai de trois ans à compter de leur exécution, lorsque l'intéressé n'a pas, pendant ce délai, été condamné pour un crime ou un délit ou exécuté une nouvelle composition pénale. On observera que le délai retenu est celui prévu par l'article 769 pour le retrait des dispenses de peines ou des condamnations pour contraventions.

La Commission a adopté un amendement de précision du rapporteur (amendement n° 175).

La Commission a adopté l'article 21 ainsi modifié.

Après l'article 21

La Commission a examiné trois amendements présenté par M. Michel Hunault, le premier portant à vingt ans le délai de prescription des crimes commis à l'encontre d'un mineur ou d'une personne vulnérable ou par une personne ayant autorité, le deuxième à six ans ce délai lorsqu'il concerne des délits commis contre et par ces mêmes personnes et le troisième de coordination. Après que M. Michel Hunault eut fait valoir que ces amendements visaient à renforcer les droits de la victime et à éviter le renouvellement d'affaires du type de celles des disparues de l'Yonne, le rapporteur s'est déclaré défavorable à ces amendements au motif qu'il n'était pas opportun de modifier au fond la matière pénale dans le cadre de l'examen d'une loi de programmation sur la justice. M. Xavier de Roux ayant estimé que ces amendements concernaient le problème plus général des délais de prescription en matière pénal, sur lequel il serait d'ailleurs nécessaire de débattre à l'avenir, M. Michel Hunault a retiré ses amendements, tout en prenant acte du fait que ce débat devrait être traité dans un autre cadre.

CHAPITRE II

Dispositions relatives à la détention provisoire et à l'instruction

Section 1

Dispositions relatives à la détention provisoire

Paragraphe 1

Dispositions renforçant la cohérence des règles relatives aux conditions de placement en détention provisoire ou de prolongation des détentions

Article 22

(art. 137-4, 137-5, 143-1, 144, 145-1 et 145-2 du code de procédure pénale)

Placement et prolongation de la détention provisoire

Cet article simplifie, sur plusieurs points, les conditions de placement et de prolongation de la détention provisoire.

-  Le rôle du procureur de la République (paragraphes 1°et 2°)

Si l'article 137-1 du code de procédure pénale prévoit que le juge des libertés et de la détention est saisi par une ordonnance motivée du juge d'instruction, l'article 137-4 dispose que ce dernier n'est pas tenu de statuer par ordonnance lorsque, saisi de réquisitions du procureur de la République tendant au placement en détention provisoire ou demandant la prolongation de celle-ci, il ne transmet pas le dossier au juge des libertés et de la détention ou lorsqu'il ne suit pas les réquisitions du parquet tendant au placement sous contrôle judiciaire. Lorsqu'il n'a pas été fait droit à ses réquisitions, le procureur de la République peut saisir directement le président de la chambre de l'instruction dans les dix jours (article 137-5).

La circulaire du 20 décembre 2000 justifie ces dispositions par le fait que « puisque la liberté constitue le principe et la détention (ou le contrôle judiciaire) l'exception, il n'était pas nécessaire de statuer par ordonnance dans une telle hypothèse ».

On observera cependant que l'article 137-3 oblige le juge des libertés et de la détention à statuer par ordonnance motivée, même lorsqu'il décide de ne pas placer l'intéressé en détention ou sous contrôle judiciaire.

Le paragraphe 1° de l'article 22 renforce le rôle du procureur de la République, qui, rappelons-le, représente les intérêts de la société, en proposant une nouvelle rédaction de l'article 137-4.

Désormais, lorsque, saisi de réquisitions du parquet tendant au placement en détention provisoire, le juge d'instruction estime que cette détention n'est pas justifiée et ne transmet pas le dossier de la procédure au juge des libertés et de la détention, il devra statuer par ordonnance motivée, celle-ci étant immédiatement portée à la connaissance du procureur de la République. Ce dernier pourra alors faire appel de l'ordonnance du juge d'instruction dans les conditions de droit commun définies à l'article 185 (délai de cinq jours).

Le paragraphe 2° supprime, par ailleurs, l'article 137-5 relatif à la saisine directe du président de la chambre de l'instruction. Ces dispositions sont en effet inutiles : lorsqu'il s'agit d'une mise en liberté, le procureur de la République pourra saisir le président de la chambre de l'instruction d'un référé-détention, conformément à la procédure prévu par l'article 187-3 (article 23 du projet de loi) ; dans les autres cas (refus de placement sous contrôle judiciaire), l'article 82 lui permet, lorsque le juge d'instruction ne suit pas ses réquisitions, de saisir dans les dix jours la chambre de l'instruction.

-  Les seuils de placement en détention provisoire (paragraphe 3°)

Jusqu'en janvier 2001, une personne mise en examen ne pouvait être placée en détention provisoire que si elle encourait une peine criminelle ou une peine correctionnelle égale ou supérieure à deux ans d'emprisonnement, ce seuil étant ramené à un an en cas de flagrance.

La loi du 15 juin 2000 avait modifié ces seuils : la détention provisoire ne pouvait être ordonnée que si la personne mise en examen encourait une peine criminelle ou une peine correctionnelle égale ou supérieure à trois ans d'emprisonnement, ce seuil étant porté à cinq ans lorsque la personne était mise en examen pour une atteinte aux biens et qu'elle n'avait pas déjà été condamnée à une peine d'emprisonnement sans sursis supérieure à un an (article 143-1 du code de procédure pénale).

Conscient des difficultés suscitées par ces seuils élevés, qui empêchaient le placement en détention provisoire des délinquants réitérants, le législateur, à la fin de la dernière législature, a modifié ces dispositions.

La loi du 4 mars 2002 a complété l'article 143-1 afin de rendre possible la détention provisoire d'une personne mise en examen pour une atteinte aux biens punis de trois ans d'emprisonnement seulement si, dans les six mois qui précèdent, celle-ci a fait l'objet, pour un délit puni d'une peine d'emprisonnement supérieure à deux ans, soit d'une mesure alternative aux poursuites, soit d'une poursuite pénale qui n'a pas été clôturée par une décision de non-lieu, de relaxe ou d'acquittement.

Le paragraphe 3° de l'article 22 simplifie ce dispositif extrêmement complexe en supprimant toutes les exceptions prévues par le quatrième alinéa de l'article 143-1 : désormais, la détention provisoire sera possible lorsque le quantum de la peine correctionnelle encourue est égal ou supérieur à trois ans, quelle que soit la nature de l'infraction en cause et les antécédents judiciaires de la personne mise en examen. La suppression de la distinction entre les délits contre les biens et les autres délits et l'absence de prise en compte d'une éventuelle récidive devrait simplifier le travail des magistrats, tout en permettant le placement en détention provisoire des délinquants réitérants qui n'offrent pas de garanties de représentation.

-  Les critères de placement ou de prolongation de la détention provisoire (paragraphe 4°)

L'article 144 du code de procédure pénale énumère les critères de placement ou de prolongation de la détention provisoire. Cette mesure ne peut, en effet, être ordonnée que si elle constitue l'unique moyen de conserver les preuves ou d'empêcher une pression sur les témoins et les victimes ou une concertation entre les complices de l'infraction, de protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à la disposition de la justice ou de mettre fin à l'infraction ou encore de mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public.

La loi du 15 juin 2000 a complété ce dispositif afin de limiter le recours au critère de l'ordre public pour la prolongation de la détention provisoire aux seules peines criminelles et aux peines correctionnelles d'une durée égale à dix ans d'emprisonnement.

Le paragraphe 4° de l'article 22 supprime cette restriction, autorisant ainsi la prolongation de la détention provisoire pour mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public, quelle que soit le quantum de la peine encourue.

Cette modification permettra, par exemple, de maintenir en détention les auteurs d'agressions sexuelles sur mineurs de quinze ans, qui encourent une peine de sept ans d'emprisonnement, pour lesquels il était parfois difficile de justifier la prolongation de la détention sans recourir à ce critère.

-  Les « délais butoirs » de la détention provisoire (paragraphes 5°et 6°)

La loi du 15 juin 2000 a institué des délais butoirs en matière de détention provisoire.

En matière correctionnelle, l'article 145-1 du code de procédure pénale limite ainsi à quatre mois la détention provisoire d'une personne mise en examen qui n'a pas déjà été condamnée à une peine criminelle ou à une peine d'emprisonnement ferme d'une durée supérieure à un an et qui encourt une peine d'emprisonnement inférieure ou égale à cinq ans. Dans les autres cas, la détention provisoire peut être prolongée de quatre mois, renouvelable une fois, soit une durée totale d'un an. Cette durée maximum est portée à deux ans lorsque l'un des faits constitutifs de l'infraction a été commis à l'étranger ou lorsque la personne est poursuivie pour trafic de stupéfiants, terrorisme, association de malfaiteurs, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour une infraction commise en bande organisée et qu'elle encourt une peine de dix ans d'emprisonnement.

En matière criminelle, l'article 145-2 limite la détention provisoire à un an, celle-ci pouvant être prolongée pour une durée de six mois renouvelable. La durée totale de la détention ne peut toutefois dépasser deux ans lorsque la peine encourue est inférieure à vingt ans de réclusion ou de détention criminelles et à trois ans dans les autres cas. Ces durée sont portées respectivement à trois et quatre ans lorsque l'un des faits constitutifs de l'infraction a été commis à l'étranger. Cette durée est également portée à quatre ans lorsque la personne est poursuivie pour plusieurs crimes portant atteinte aux personnes ou à la sécurité publique ou pour trafic de stupéfiants, proxénétisme, extorsion de fonds ou pour un crime commis en bande organisée.

Les paragraphes 5° et 6° de l'article 22 ne remettent pas en cause ces délais butoirs, qui permettent d'intégrer la notion de « délai raisonnable » de la Cour européenne des droits de l'homme, mais met en place une « soupape de sécurité permettant d'éviter la remise en liberté des délinquants dangereux ».

Ils complètent pour cela les articles 145-1 et 145-2 par un alinéa précisant que, à titre exceptionnel, lorsque les investigations du juge d'instruction doivent être poursuivies et que la mise en liberté de la personne mise en examen causerait pour la sécurité des personnes et des biens un risque d'une particulière gravité, la chambre de l'instruction, saisie par ordonnance motivée du juge des libertés et de la détention, pourra prolonger la détention pour une durée de quatre mois.

En matière correctionnelle, cette prolongation, qui pourra être renouvelée une fois, ne pourra concerner que les auteurs d'infractions commises à l'étranger ou qui encourent une peine de dix ans d'emprisonnement pour des délits graves, pour lesquels la détention provisoire est actuellement limitée à deux ans. En matière criminelle, la prolongation, qui pourra être renouvelée deux fois, soit une durée supplémentaire d'un an, concernera toutes les infractions. Ces modifications portent donc les durées maxima de détention provisoire à deux ans et huit mois en matière correctionnelle et cinq ans en matière criminelle.

Souhaitant conférer un caractère vraiment exceptionnel à ces prolongations, le Sénat a exclu tout renouvellement de la prolongation de quatre mois en matière correctionnelle et a limité ce renouvellement à une seule fois en matière criminelle. Les durées maxima de détention provisoire seront donc désormais de deux ans et quatre mois en matière correctionnelle et de quatre ans et huit mois en matière criminelle, au lieu des deux ans et huit mois et cinq ans prévus par le projet de loi.

Le Sénat a enfin introduit un nouveau paragraphe 7°, qui procède à une coordination rendue nécessaire par la suppression de l'article 137-5 proposée par le paragraphe 2°.

Après que le rapporteur eut souligné l'importance de l'intervention de deux magistrats du siège pour décider le placement en détention provisoire d'une personne mise en examen, M. Alain Marsaud a retiré son amendement tendant à prévoir la saisine directe du juge des libertés et de la détention par le procureur de la République. La Commission a ensuite adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 176) prévoyant la saisine directe de la chambre de l'instruction par le juge d'instruction, et non le juge des libertés et de la détention, lors de la mise en _uvre de la procédure de la prolongation exceptionnelle de la détention provisoire, après que son auteur eut souligné que cet amendement avait pour objectif de simplifier une procédure complexe, tout en préservant les droits de la défense grâce à la garantie apportée par la collégialité de la chambre de l'instruction.

La Commission a adopté l'article 22 ainsi modifié.

Paragraphe 2

Dispositions relatives aux demandes de mise en liberté
et instituant la procédure de référé-détention

Article 23

(art. 148-1-A [nouveau], 187-3 [nouveau], 148-2, 183 et 199 du code de procédure pénale)

Procédure de référé-détention - Conditions d'examen
des demandes de mise en liberté

Cet article apporte des modifications aux conditions d'examen des demandes de mise en liberté. Il créé une nouvelle procédure, appelée référé-détention, qui permet au procureur de la République d'obtenir du président de la chambre de l'instruction que son appel formé contre une décision de mise en liberté contraire à ses réquisitions ait un caractère suspensif (paragraphes I et II). Il allonge, par ailleurs, les délais dans lesquels il doit être statué sur une demande de mise en liberté (paragraphe III) et permet au président de la chambre de l'instruction de refuser dans certains cas la comparution personnelle de l'intéressé (paragraphe V).

-  La procédure du référé-détention (paragraphes I, II et II bis)

Les paragraphes I et II de l'article 23 mettent en place une procédure de référé-détention, qui est le pendant de la procédure de référé-liberté, créée par la loi du 24 août 1993 et améliorée par la loi du 30 décembre 1996.

· Le référé-liberté

L'article 187-1 du code de procédure pénale, qui institue la procédure de référé-liberté, permet à la personne mise en examen ou au procureur de la République, en cas d'appel d'une ordonnance de placement en détention provisoire interjeté au plus tard le jour suivant la décision de placement en détention, de demander au président de la chambre de l'instruction ou, en cas d'empêchement, au magistrat qui le remplace, d'examiner immédiatement l'appel sans attendre l'audience de cette juridiction, cette demande devant, à peine d'irrecevabilité, être formée en même temps que l'appel.

La personne mise en examen, son avocat ou le procureur de la République peut joindre toutes observations écrites à l'appui de la demande. L'avocat de la personne mise en examen et le procureur de la République peuvent présenter oralement leurs observations et réquisitions lors d'une audience de cabinet. Le président de la chambre de l'instruction doit statuer au plus tard le troisième jour de la demande, au vu des éléments du dossier de la procédure, par une ordonnance motivée non susceptible de recours. Lorsque ce magistrat infirme l'ordonnance du juge d'instruction et ordonne la remise en liberté de la personne, la chambre de l'instruction est alors dessaisie ; il peut également ordonner le placement sous contrôle judiciaire de la personne mise en examen. Lorsqu'il confirme l'ordonnance, il doit renvoyer l'examen de l'appel à la chambre de l'instruction, cette décision étant portée à la connaissance du procureur général et notifié à la personne mise en examen par le greffe de l'établissement pénitentiaire.

Enfin, le dernier alinéa de l'article 187-1 précise que la déclaration d'appel et la demande de référé-liberté peuvent être constatées par le juge d'instruction à l'issue du débat contradictoire et que la transmission du dossier de la procédure au président de la chambre de l'instruction peut s'effectuer par télécopie.

· Le dispositif proposé par le projet de loi

S'inspirant de cette procédure, les paragraphes I et II de l'article 23 mettent en place une procédure de référé-détention.

Le paragraphe I insère dans le code de procédure pénale, après les dispositions relatives aux juridictions compétentes pour examiner les demandes de mise en liberté, un nouvel article 148-1-A qui organise les conditions de saisine du président de la chambre de l'instruction d'un référé-détention.

Désormais, lorsque le juge d'instruction ou le juge des libertés et de la détention ordonnera la mise en liberté de la personne détenue contre les réquisitions du procureur de la République, l'ordonnance de mise en liberté sera immédiatement communiquée à ce dernier, qui la retournera sans délai au magistrat concerné s'il ne s'oppose pas à cette mise en liberté. Dans le cas contraire, il devra former sans délai appel de la décision devant le greffier du juge d'instruction ou du juge des libertés et de la détention, en saisissant le président de la chambre de l'instruction d'un référé-détention. La personne mise en examen sera informée de cette procédure en même temps que lui sera notifiée l'ordonnance. Elle restera détenue jusqu'à la décision du président de la chambre de l'instruction et, lorsqu'il sera fait droit aux réquisitions du procureur de la République, jusqu'à celle de la chambre de l'instruction.

L'article 187-3, créé par le paragraphe II, définit les modalités d'examen du référé-détention.

Il rappelle que le procureur de la République, en cas d'appel d'une ordonnance de mise en liberté formé sans délai, pourra demander au président de la chambre de l'instruction ou, en cas d'empêchement, au magistrat que le remplace, que cet appel ait un caractère suspensif, cette demande devant, à peine de nullité, être formée en même temps que l'appel. Le procureur de la République devra joindre à sa demande les observations écrites justifiant le maintien en détention, la personne mise en examen ou son avocat pouvant également présenter toutes observations écrites qu'ils jugent utiles.

Le président de la chambre de l'instruction devra statuer dans les trois jours de la demande, le non respect de ce délai entraînant la remise en liberté de la personne détenue. Il est rappelé que, pendant ce délai, les effets de l'ordonnance de mise en liberté seront suspendus, la personne restant détenue. Le président devra rendre sa décision, au vu des éléments du dossier, par une ordonnance motivée non susceptible de recours, l'avocat de la personne mise en examen et le procureur de la République pouvant présenter leurs observations et réquisitions lors d'une audience de cabinet.

Si le président de la chambre de l'instruction estime que la personne doit rester détenue, il ordonnera la suspension de l'exécution de l'ordonnance de mise en liberté jusqu'à ce que la chambre de l'instruction ait statué sur l'appel du parquet. Dans le cas contraire, il ordonnera la mise en liberté de la personne.

Enfin, le renvoi au dernier alinéa de l'article 187-1 du code de procédure pénale permet l'envoi par télécopie au président de la chambre de l'instruction du dossier de la procédure.

Si cette procédure rapide renforce sensiblement les pouvoirs du parquet, permettant ainsi de « rétablir un juste équilibre de la procédure pénale entre les droits de la société et ceux de la défense », il convient de noter qu'elle ne concerne que le maintien en détention provisoire et non les placements initiaux, qui font l'objet d'un appel dans les conditions de droit commun (article 185 du code de procédure pénale).

Ces dispositions soulèvent néanmoins un certain nombre de difficultés.

L'article 148-1-A semble faire du référé-détention une obligation dès lors que le procureur de la République fait appel de la décision de mise en liberté, alors que le premier alinéa de l'article 187-3 indique qu'il s'agit une simple possibilité pour le magistrat.

Ce même article 148-1-A utilise par ailleurs à deux reprises l'expression « sans délai », qui risque de susciter un important contentieux en raison de son imprécision.

Enfin, le dispositif proposé présente un risque d'inconstitutionnalité. Dans sa décision n° 93-326 DC du 11 août 1993, le Conseil constitutionnel n'a admis la constitutionnalité de la procédure de référé-liberté, qui confie au président de la chambre de l'instruction le soin d'examiner l'ordonnance de placement en détention provisoire soumise par la suite à la chambre de l'instruction, que parce que « il ne revient au président de la chambre d'accusation que de déterminer si la détention n'est manifestement pas nécessaire alors qu'il incombe à la chambre d'accusation d'apprécier la légalité des conditions d'applications de l'article 144 du code de procédure pénale ». De même, dans sa décision n° 97-389 DC du 22 avril 1997, la haute juridiction a déclaré constitutionnelle la procédure permettant au procureur de la République de demander au premier président de la cour d'appel de déclarer suspensif son appel formé contre l'ordonnance du président du tribunal de grande instance refusant la prolongation du maintien de l'étranger en rétention administrative, en considérant qu'un magistrat du parquet pouvait, dans le cadre d'une procédure spécifique et pour des motifs précis (absence de garanties de représentation de l'étranger), faire obstacle à une décision d'un magistrat du siège.

· Les modifications apportées par le Sénat

Le Sénat a donc adopté un nouveau dispositif permettant de remédier à ces difficultés. La rédaction proposée modifie le texte initial sur cinq points :

-  Le nouvel article 148-1-1, qui remplace l'article 148-1-A, donne au procureur de la République un délai de quatre heures, au lieu du « sans délai » initial, pour faire appel de l'ordonnance de mise en liberté, cet appel devant être accompagné d'un référé-détention. Pendant ce délai, la personne ne pourra être mise en liberté et l'ordonnance ne pourra être adressée pour exécution au chef de l'établissement pénitentiaire. A l'issue des quatre heures, en l'absence de référé-détention, l'ordonnance de mise en liberté, sur laquelle le greffier aura signalé l'absence de référé-détention, sera adressée au chef d'établissement pénitentiaire pour être mise à exécution, la personne étant libérée sauf si elle est détenue pour une autre cause.

Lorsque le procureur de la République n'estimera pas nécessaire de s'opposer à la mise en liberté immédiate, il retournera l'ordonnance, comme dans le texte initial, au magistrat qui l'a rendue. La nouvelle rédaction précise que le procureur devra mentionner sur l'ordonnance qu'il ne s'oppose pas à sa mise à exécution. Elle rappelle également que le procureur de la République aura toujours le droit de former ultérieurement un appel, dans le délai de cinq jours prévus à l'article 185.

-  Ce même article 148-1-1 confie au premier président de la cour d'appel ou au magistrat qui le remplace, et non plus au président de la chambre de l'instruction, le soin d'examiner le référé-détention. Le dernier alinéa du nouvel article 187-3 précise que le magistrat qui aura statué sur la demande de référé-liberté ne pourra, à peine de nullité, fait partie de la chambre de l'instruction qui statuera sur l'appel de l'ordonnance de mise en liberté.

-  Le nouvel article 187-3 précise également que la saisine du premier président de la cour d'appel d'un référé-détention sera obligatoire lorsque le procureur de la République aura fait appel de l'ordonnance de mise en liberté dans le délai de quatre heures.

-  Il donne au premier président de la cour d'appel un délai de deux jours ouvrables, au lieu de trois, pour statuer sur le référé-détetention.

- La nouvelle rédaction de l'article 187-3 précise enfin que l'appel de l'ordonnance de mise en liberté ne pourra être déclaré suspensif que si au moins deux critères de placement en détention provisoire posés par l'article 144 du code de procédure pénale sont réunis. Rappelons que ces critères sont la nécessité de conserver des preuves, d'empêcher une pression sur les témoins ou les victimes ou une concertation frauduleuse entre les auteurs de l'infraction, de protéger la personne mise en examen, de garantir son maintien à la disposition de la justice, de mettre fin à l'infraction ou de mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public. L'appel du procureur de la République ne pourra donc avoir un caractère suspensif que si la détention provisoire paraît particulièrement nécessaire.

Signalons enfin que le Sénat a remplacé la référence au dernier alinéa de l'article 187-1, inadaptée puisqu'elle vise également la possibilité de demander l'application de la procédure de référé-liberté à l'issue du débat contradictoire, par un alinéa indiquant que la transmission du dossier de procédure au premier président de la cour d'appel ou au magistrat qui le remplace pourra être effectuée par télécopie.

Afin de permettre la mise en place de cette nouvelle procédure, il est précisé qu'elle n'entrera en vigueur que le 1er novembre 2002 (paragraphe II bis).

Après avoir adopté un amendement du rapporteur corrigeant une erreur matérielle (amendement n° 177), la Commission a adopté un amendement de M. Jérôme Bignon précisant que le nouvel article 148-1-1 ne s'applique que lorsque le procureur de la République a pris des réquisitions de maintien en détention provisoire (amendement n° 178).

-  Les délais d'examen d'une demande de mise en liberté présentée après le renvoi devant la juridiction de jugement (paragraphe III)

A l'issue de l'instruction, la personne placée en détention provisoire peut demander à tout moment sa mise en liberté. C'est la juridiction de jugement saisie qui statue sur la demande. Toutefois, en matière criminelle, la cour d'assises n'est compétente que lorsque la demande est formée durant la session au cours de laquelle elle doit juger l'accusé ; dans les autres cas, la demande est examinée par la chambre de l'instruction. En cas de pourvoi et jusqu'à l'arrêt de la Cour de cassation, il est statué sur la demande par la juridiction qui a été saisie en dernier lieu de l'affaire. Si le pourvoi a été formé contre un arrêt de la cour d'assises, la demande est examinée par la chambre de l'instruction. De manière plus générale, dans tous les cas où aucune juridiction n'est saisie, c'est la chambre de l'instruction qui est compétente pour connaître des demandes de mise en liberté (article 148-1 du code de procédure pénale). Ces dispositions s'appliquent aux demandes de mainlevée du contrôle judiciaire (article 141-1)

L'article 148-2 définit les conditions d'examen de ces demandes de mise en liberté ou de mainlevée du contrôle judiciaire.

La juridiction saisie statue après audition du ministère public, du prévenu ou de son avocat. Lorsqu'il s'agit d'une juridiction du premier degré, elle dispose d'un délai de dix jours suivant la réception de la demande pour rendre sa décision, ce délai étant porté à vingt jours pour les juridictions du second degré.

Toutefois, lorsqu'il n'a pas encore été statué sur une précédente demande de mise en liberté ou sur l'appel d'une précédente décision de refus de mise en liberté au jour de la réception de la demande, le délai de dix ou vingt jours ne commence à courir qu'à compter de la décision rendue par la juridiction compétente.

Lorsque ces délais ne sont pas respectés, il est mis fin au contrôle judiciaire ou à la détention provisoire de la personne concernée, sauf si cette dernière est détenue pour une autre cause.

Le paragraphe III de l'article 23 allonge les délais prévus par l'article 148-2 pour statuer sur les demandes de mise en liberté ou de mainlevée du contrôle judiciaire, en partant du principe que ces délais doivent être de plus en plus importants « au fur et à mesure que la présomption d'innocence dont bénéficie la personne poursuivie s'amenuise du fait des condamnations successives prononcées contre elles ».

Ainsi, lorsque la personne n'aura pas encore été jugée en premier ressort, la juridiction saisie devra statuer, comme actuellement, dans un délai de dix ou vingt jours suivant la réception de la demande selon qu'il s'agit d'une juridiction de premier ou de second degré. Lorsque la personne aura été jugée en première instance et sera en appel, la juridiction devra statuer dans les deux mois de la demande. Enfin, lorsque la personne aura déjà été jugée en appel et qu'elle aura formé un pourvoi en cassation, le délai sera porté à quatre mois.

Les délais actuels de dix et vingt jours, difficiles à respecter et qui n'ont pas de réelles justifications lorsque la personne détenue a vu sa condamnation confirmée, sont donc sensiblement allongés.

La nouvelle rédaction de l'article 148-2 maintient, en revanche, les dispositions relatives au moment où commencent à courir les délais, lorsqu'il n'a pas été encore statué sur une précédente demande de mise en liberté ou sur l'appel d'une précédente décision de refus de mise en liberté, au jour de réception de la nouvelle demande, en les complétant par une référence aux demandes de mainlevée du contrôle judiciaire, oubliées dans l'actuelle rédaction de l'article 148-2.

Le Sénat a complété ces dispositions, afin de préciser, comme dans le texte actuel de l'article 148-2, que faute de décision à l'expiration de ces délais, il est mis fin au contrôle judiciaire ou à la détention provisoire, le prévenu, s'il n'est pas détenu pour une autre cause, étant d'office remis en liberté.

La Commission a adopté deux amendements de précision du rapporteur (amendements nos 179 et 180).

-  La limitation de la comparution personnelle de la personne détenue devant la chambre de l'instruction (paragraphe V)

Le cinquième alinéa de l'article 199 du code de procédure pénale dispose qu'en matière de détention provisoire, la comparution personnelle de la personne concernée devant la chambre de l'instruction est de droit si celle-ci ou son avocat en fait la demande, cette requête devant, à peine d'irrecevabilité, être présentée en même temps que l'appel ou la demande de mise en liberté.

Ces dispositions, destinées à garantir les droits de la personne détenue, sont souvent utilisées de façon abusive par les prévenus qui y voient un moyen de sortir de leur établissement pénitentiaire. Ce « tourisme pénitentiaire » mobilise d'importantes forces de l'ordre qui pourraient sans doute être utilisées de manière plus pertinente.

Le paragraphe V de l'article 23 complète donc l'article 199 afin d'autoriser le président de la chambre de l'instruction à refuser la comparution personnelle du détenu en cas d'appel d'une ordonnance rejetant une demande de mise en liberté, lorsque celui-ci a déjà comparu devant cette juridiction moins de quatre mois auparavant. La décision de ce magistrat, qui devra être motivée, ne sera pas susceptible de recours.

Signalons, enfin, que le paragraphe IV de l'article 23 procède à une coordination formelle à l'article 183 du code de procédure pénale relatif à la notification des décisions susceptibles de faire l'objet de recours, qui avait été oubliée lors de l'examen de la loi du 15 juin 2000.

La Commission a adopté l'article 23 ainsi modifié.

Après l'article 23

La Commission a été saisi de l'amendement n° 16 de M. Christian Estrosi tendant à obliger les magistrats plaçant sous contrôle judiciaire des personnes mises en examen pour trafic de stupéfiant, trafic d'armes ou trafic d'êtres vivants, à vérifier la provenance des fonds destinés au cautionnement, la personne mise en examen demeurant en détention provisoire dans l'attente de cette vérification. Son auteur a indiqué que ces dispositions devaient être rapprochées de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure qui prévoit de renforcer la lutte contre l'économie souterraine et l'argent sale. M. Claude Goasguen a souligné les effets pervers qu'aurait cet amendement, qui risquerait de se traduire par un allongement sensible de la durée des procédures. M. Jérôme Bignon a rappelé l'importance du cautionnement pour les victimes, puisqu'il sert en partie à garantir le paiement des dommages et intérêts qui leur sont alloués. Après que le rapporteur eut souligné les risques de blocage induits par cette procédure, la Commission a rejeté cet amendement.

Section 2

Dispositions relatives à l'instruction

Article 24

(art. 80-2, 82-2, 86, 177-3 [nouveau], 706-58 du code de procédure pénale
et 435-15-1 du code pénal)

Dispositions diverses relatives à l'instruction

Cet article procède à un certain nombre de modifications, destinées « à simplifier ou à renforcer la cohérence » des règles de l'instruction.

Il allonge le délai de convocation pour l'interrogatoire de première comparution (1° du paragraphe I), supprime la possibilité pour l'avocat de la personne mise en examen ou de la partie civile d'être présent lors d'une audition ou d'un interrogatoire (2°paragraphe I), permet au juge d'instruction de prononcer une amende civile lorsqu'il rend une ordonnance de refus d'informer (3° du paragraphe I) et autorise le prononcé d'une amende civile contre le représentant légal de la personne morale (4° du paragraphe I), élargit le recours à la procédure du témoin anonyme (5° du paragraphe I) et fait du refus de déférer à une convocation d'un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire un délit puni d'une amende de 3 750 € (paragraphe II)

-  Délai de convocation pour l'interrogatoire de première comparution (1° du paragraphe I)

L'article 80-2, inséré dans le code de procédure pénale par la loi du 15 juin 2000, permet au juge d'instruction d'informer par lettre recommandée une personne de sa convocation, dans un délai qui ne peut être inférieur à dix jours ni supérieur à un mois, à un interrogatoire de première comparution, la mise en examen de cette personne ne pouvant intervenir qu'à l'issue de cette première comparution.

Cette procédure, destinée à remplacer l'ancienne mise en examen par lettre recommandée, est difficile à mettre en _uvre en raison de la brièveté du délai prévu entre l'envoi de la lettre recommandée annonçant l'intention du juge d'instruction de mettre la personne en examen et la date de l'interrogatoire de première comparution. Ces difficultés ont été soulignées dans le rapport d'évaluation de la loi du 15 juin 2000 de Mme Christine Lazerges, qui évoque l'impossibilité de procéder à l'interrogatoire dans le délai prévu, « la personne convoquée tardant souvent à désigner son avocat ».

Le 1° du paragraphe I de l'article 24 remédie à ces difficultés en portant le délai maximum à deux mois. Cette modification permettra de renforcer les droits de la défense, puisque les avocats disposeront d'un délai plus important pour préparer leur dossier.

-  Présence de l'avocat de la personne mise en examen ou de la partie civile lors d'un acte réalisé à leur demande (2° du paragraphe I)

L'article 82-2 du code de procédure pénale, créé par la loi du 15 juin 2000, donne la possibilité à la personne mise en examen ou à la partie civile qui demande, en application de l'article 82-1, un transport sur les lieux, l'audition d'un témoin, d'une partie civile ou d'une personne mise en examen, de demander également que cet acte soit effectué en présence de son avocat.

Lorsqu'il ne fait pas droit à cette demande, le juge d'instruction doit statuer par ordonnance motivée dans le délai d'un mois, faute de quoi la personne mise en examen ou la partie civile peut saisir directement le président de la chambre de l'instruction. En cas de réponse positive, l'avocat, qui est autorisé à poser des questions aux personnes auditionnées, est convoqué au plus tard dans les deux jours ouvrables avant le transport sur les lieux ou l'audition.

Ces nouvelles dispositions peuvent dans certains cas avoir des répercussions négatives sur la conduite des instructions, dans la mesure où elle contribue à l'intimidation des témoins, notamment dans les affaires de proxénétisme ou d'abus sexuels.

Le 2° du paragraphe I de l'article 24 supprime donc l'article 82-2 et, par coordination, modifie l'article 116 relatif aux droits de la personne mise en examen afin de faire disparaître la référence à cet article.

Le Sénat a supprimé ces dispositions, en invoquant le principe de l'égalité des armes, le procureur de la République pouvant assister aux transports sur les lieux (article 92 du code de procédure pénale), aux interrogatoires et confrontations de la personne mise en examen et aux auditions de la partie civile (article 119 du même code).

-  Amende civile en cas de constitution de partie civile abusive (3° et 4° du paragraphe I)

La loi du 15 juin 2000 a inséré dans le code de procédure pénale un nouvel article 177-2 qui permet au juge d'instruction qui rend une ordonnance de non-lieu à l'issue d'une information ouverte sur constitution de partie civile de prononcer, sur réquisitions du parquet et par ordonnance motivée, une amende civile lorsqu'il estime que la constitution de partie civile a été abusive ou dilatoire. Le montant de l'amende prononcée ne peut excéder 15 000 €.

Cette décision ne peut intervenir qu'à l'issue d'un délai de vingt jours après l'envoi à la partie civile et à son avocat, par lettre recommandée ou par télécopie, des réquisitions du procureur de la République, afin de permettre au juge de prendre connaissance des éventuelles observations écrites de la partie civile. La partie civile peut faire appel de cette décision dans les mêmes conditions que l'ordonnance de non lieu (délai de dix jours), tout comme le parquet lorsque le juge d'instruction ne suit pas les réquisitions de ce dernier.

Afin de lutter plus efficacement contre les constitutions de parties civiles abusives, les 3° et 4° du paragraphe I de l'article 24 étendent ces dispositions.

Le 4° créé ainsi un nouvel article 177-3, qui permet au juge d'instruction, lorsque la partie civile est une personne morale, de prononcer l'amende civile contre le représentant légal de cette personne morale, et non contre la personne morale elle-même, lorsque la mauvaise foi de ce dernier est établie.

Cette disposition devrait contribuer à limiter les constitutions de partie civile uniquement destinée à bloquer une instance civile, comme par exemple les plaintes pour vols à l'encontre d'employés licenciés ayant introduit une instance devant les prud'hommes, déposées pour permettre la suspension du litige salarial jusqu'à la décision de la juridiction pénale. En faisant courir un risque financier personnel au représentant de la personne morale, elle devrait dissuader ce type de constitution de partie civile.

Dans le même esprit, le 3° du paragraphe I complète l'article 86 afin d'autoriser le juge d'instruction qui rend une ordonnance de refus d'informer de faire application des articles 177-2 et 177-3, c'est-à-dire de prononcer une amende civile contre la partie civile ou éventuellement le représentant légal de la personne morale, lorsqu'il considère comme abusive ou dilatoire la constitution de partie civile. Rappelons que l'ordonnance de refus d'informer ne peut se fonder que sur la prescription des faits ou leur absence de qualification pénale.

Cette disposition devrait permettre de limiter les plaintes fantaisistes auxquelles doivent faire face les juges d'instruction. En effet, les décisions d'irrecevabilité des magistrats permettent aux plaignants de récupérer le montant de leur consignation et de se servir de ces fonds pour déposer de nouvelles plaintes, souvent aussi infondées que les précédentes. Seule une amende civile sera à même de dissuader ces plaignants de se constituer à nouveau partie civile.

La Commission a adopté un amendement de M. Alain Marsaud modifiant le dernier alinéa de l'article 186 du code de procédure pénale, afin de permettre au président de la chambre de l'instruction de déclarer irrecevable un appel hors délai ou devenu sans objet (amendement n° 181). Elle a ensuite repoussé un amendement du même auteur autorisant le président de la chambre d'instruction à rendre d'office une ordonnance de non-admission d'un appel d'une ordonnance de refus de mise en liberté ou d'une demande de mise en liberté, lorsqu'il n'a pas encore été statué définitivement sur le précédent appel ou la précédente demande, après que le rapporteur eut souligné les risques d'inconstitutionnalité d'un tel dispositif et rappelé que le paragraphe III de l'article 23 prévoyait que les délais d'examen d'une demande de mise en liberté ne commençaient à courir qu'à compter de la décision sur la précédente demande.

Elle a ensuite adopté un amendement du même auteur modifiant l'article 197 du code de procédure pénale, afin de permettre la convocation des avocats devant la chambre d'instruction par télécopie (amendement n° 182).

-  Extension du recours à la procédure du témoin protégé (5° du paragraphe I)

La loi du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne a créé une nouvelle procédure permettant à des personnes, dans des conditions très strictes destinées à garantir les droits de la défense, de témoigner sans révéler leur identité.

Les personnes susceptibles d'apporter des éléments de preuve intéressant la procédure peuvent, sur autorisation du procureur de la République ou du juge d'instruction et lorsqu'elles ne sont pas soupçonnées d'avoir commis une infraction, déclarer comme domicile l'adresse du commissariat ou de la gendarmerie (article 706-57 du code de procédure pénale)

Lorsque l'infraction en cause est un crime ou un délit puni d'au moins cinq ans d'emprisonnement et que l'audition de la personne ayant déclaré comme domicile l'adresse du commissariat ou de la gendarmerie est susceptible de mettre gravement en danger sa vie ou son intégrité physique ou celles de sa famille ou de ses proches, le procureur de la République ou le juge d'instruction peuvent saisir le juge des libertés et de la détention afin que ce dernier autorise, par décision motivée, que les déclarations de cette personne soient recueillies sans que son identité apparaisse (article 706-58).

La décision du juge des libertés et de la détention, qui ne fait pas apparaître l'identité de la personne concernée, est jointe au procès-verbal d'audition. L'identité et l'adresse de cette dernière sont inscrites dans un autre procès-verbal, signé par l'intéressé et qui est versé dans un dossier distinct du dossier de la procédure.

La révélation de l'identité ou de l'adresse d'un témoin ayant bénéficié de cette procédure est punie de cinq ans d'emprisonnement et de 75 000 € d'amende (article 706-59).

L'article 706-60 précise toutefois que cette procédure n'est pas applicable lorsque la connaissance de l'identité de la personne est indispensable à l'exercice des droits de la défense, en raison des circonstances de la commission de l'infraction ou de la personnalité du témoin. La personne mise en examen peut contester devant le président de la chambre de l'instruction, dans les dix jours à compter de la date où il a connaissance du contenu de l'audition réalisée, le recours à cette procédure. Ce magistrat, par une décision motivée qui n'est pas susceptible de recours, peut annuler l'audition ou ordonner que l'identité du témoin soit révélée, à condition toutefois que ce dernier ait donné son accord.

La personne mise en examen peut également demander à être confrontée avec le témoin par l'intermédiaire d'un dispositif à distance permettant le brouillage de la voix du témoin (article 706-61).

Enfin, l'article 706-62 précise qu'aucune condamnation ne pourra être prononcée sur le seul fondement des déclarations du témoin protégé.

Comme le souligne l'exposé des motifs du projet de loi, ce dispositif permet de lutter efficacement contre la délinquance dans des quartiers où les témoins hésitent à déposer, par peur de représailles.

C'est pourquoi le 5° du paragraphe I de l'article 24 propose de modifier l'article 706-58 afin d'autoriser le recours à cette procédure lorsque le délit en cause est puni de trois ans d'emprisonnement, au lieu cinq actuellement. Cette modification permettra notamment l'utilisation de la procédure du témoin protégé pour des faits de dégradations commis en réunion.

-  Sanction du refus de déférer à une convocation d'un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire (paragraphe II)

L'article 434-15-1 du code pénal puni de 3 750 € d'amende le fait de ne pas comparaître, de ne pas prêter serment ou de ne pas déposer devant le juge d'instruction sans excuse ni justification.

Par souci de cohérence, le paragraphe II de l'article 24 étend cette sanction au refus de déférer à une convocation d'un officier de police judiciaire agissant sur commission rogatoire du juge d'instruction. Il est, en effet, logique de sanctionner le refus de déposer devant l'officier de police judiciaire agissant par délégation du juge d'instruction comme celui de déposer devant le juge d'instruction lui-même.

La Commission a adopté l'article 24 ainsi modifié.

chapitre III

Dispositions relatives au jugement des délits

Section 1

Dispositions relatives à la procédure de comparution immédiate

Article 25

(art. 395, 396, 397-1, 397-3, 397-4 du code de procédure pénale)

Aménagement de la procédure de comparution immédiate

Cet article étend le champ d'application de la procédure de comparution immédiate et rétablit les délais de jugement en vigueur avant le vote de la loi du 15 juin 2000

a) La procédure de comparution immédiate

La comparution immédiate, définie aux articles 395 et suivants du code de procédure pénale, est une procédure de jugement rapide applicable aux majeurs dans les cas suivants :

· En cas de flagrant délit, lorsque la peine d'emprisonnement encourue est comprise entre un et sept ans ;

· Lorsque les charges réunies sont suffisantes et que l'affaire est en état d'être jugée, la peine encourue devant alors être comprise entre deux et sept ans.

C'est le procureur de la République devant lequel le prévenu est déféré qui choisit de recourir à cette procédure, le procès-verbal par lequel il matérialise sa décision saisissant le tribunal.

Le prévenu est retenu jusqu'à sa comparution qui doit avoir lieu le jour même. Si la réunion du tribunal est impossible le jour même et si le placement en détention provisoire du prévenu jusqu'à sa comparution devant la juridiction de jugement lui semble justifié, le procureur de la République peut saisir le juge des libertés et de la détention afin de ce dernier ordonne ce placement. Le prévenu doit alors comparaître devant le tribunal au plus tard dans les deux jours, faute de quoi il est remis en liberté (article 396).

Le tribunal, après avoir constaté l'identité du prévenu, l'avertit qu'il ne peut être jugé le jour même qu'avec son accord, ce dernier ne pouvant être recueilli qu'en présence d'un avocat (article 397).

Lorsque le prévenu ne consent pas à être jugé séance tenante ou si l'affaire ne paraît pas en état d'être jugée, le tribunal, après avoir recueilli les observations des parties et de leur avocat, renvoie l'affaire à une prochaine audience, qui doit se tenir dans un délai compris entre deux et six semaines. A la demande des parties ou d'office, la juridiction peut demander un supplément d'information. Elle peut également, lorsque la complexité de l'affaire nécessite des investigations supplémentaires approfondies, renvoyer le dossier au procureur de la République (articles 397-1 et 397-2).

Le tribunal peut alors placer ou maintenir le prévenu en détention provisoire par une décision spécialement motivée jusqu'au jugement sur le fond, qui doit avoir lieu, depuis la loi du 15 juin 2000, dans le mois qui suit la première comparution du prévenu devant le tribunal. Ce délai peut toutefois être prolongé d'un mois à la demande du prévenu. Le non respect de ces délais entraîne la mise en liberté d'office de ce dernier (article 397-3).

Lorsque le prévenu a été condamné à une peine d'emprisonnement sans sursis, le tribunal peut décider son placement ou son maintien en détention provisoire par une décision spécialement motivée. La cour doit alors, depuis la loi du 15 juin 2000, statuer dans les deux mois de l'appel du jugement sur le fond interjeté par le prévenu détenu, faute de quoi celui-ci est mis en liberté d'office (article 397-4).

Cette procédure de jugement rapide, efficace pour sanctionner au plus vite les actes de délinquance urbaine, n'a été utilisée en 2001 que pour 8, 5 % des décisions rendues par les tribunaux correctionnels, les convocations par procès-verbal étant utilisée dans plus de 60 % des affaires. Le parquet est parfois obligé d'ouvrir une instruction pour des infractions simples ne nécessitant pas d'investigations particulières, uniquement en raison du quantum de la peine encourue.

Le Gouvernement a donc souhaité étendre et simplifier l'utilisation de la procédure de comparution immédiate, tout en mettant en _uvre les garanties nécessaires pour préserver les droits de la défense.

b) Les modifications apportées par le projet de loi

-  Les délits susceptibles de faire l'objet d'une procédure de comparution immédiate (paragraphes I et III)

Le paragraphe I l'article 25 modifie l'article 395 du code de procédure pénale afin d'étendre le champ d'application de la comparution immédiate.

Lorsque l'affaire est en état d'être jugée, cette procédure pourra être utilisée pour tous les délits punis d'une peine d'emprisonnement supérieure à deux ans (1° du paragraphe I).

En cas de flagrance, cette procédure sera applicable aux délits punis d'une peine d'emprisonnement supérieure à six mois (2° du paragraphe I).

Cette extension du champ d'application de la comparution immédiate devrait permettre de juger plus rapidement des délits comme l'outrage à personne dépositaire de l'autorité publique (article 433-5 du code pénal) ou la rébellion (article 433-7), punis de six mois d'emprisonnement, le trafic de stupéfiants ou encore les destructions volontaires par incendie, punis de dix ans d'emprisonnement (articles 222-37 et 322-6), lorsque ces infractions ne demandent pas d'investigations.

Afin de préserver les droits de la défense, le paragraphe III complète l'article 397-1 par un alinéa qui permet au prévenu encourant une peine d'emprisonnement supérieure à sept ans, soit le seuil actuel maximum pour la comparution immédiate, de demander que l'affaire soit renvoyée à une audience qui devra se tenir dans un délai compris entre deux et quatre mois.

Il convient de souligner que cet élargissement du champ d'application de la procédure de comparution immédiate est accompagné de dispositions destinées à aider les victimes à faire valoir leurs droits (titre VII du projet de loi).

-  Les délais de jugement des personnes détenues (paragraphes IV et V)

Le 2° du paragraphe IV et le paragraphe V rétablissent les délais dans lesquels les personnes détenues doivent être jugées en vigueur avant l'adoption de la loi du 15 juin 2000.

Désormais, le jugement sur le fond devra être rendu dans les deux mois suivant le jour de la première comparution du prévenu détenu, au lieu d'un mois actuellement. De même, la cour d'appel disposera de quatre mois pour statuer sur l'appel du jugement rendu sur le fond, au lieu de deux mois actuellement.

Cet allongement des délais permettra notamment aux experts éventuellement désignés de disposer du temps nécessaire à la réalisation de leur mission.

Le 3° du paragraphe IV comporte une disposition spécifique pour les prévenus encourant une peine d'emprisonnement supérieure à sept ans et ayant demandé le report de l'audience. Il complète pour cela l'article 397-3 par un alinéa précisant que lorsque le report de l'audience a été demandé, le délai de deux mois prévu pour le jugement sur le fond est porté à quatre mois.

Signalons enfin que le paragraphe II et le 1° du paragraphe IV procèdent à des modifications de référence aux articles  396 et 397-3, oubliées lors de l'adoption de la loi du 15 juin 2000.

La Commission a rejeté l'amendement n° 38 de M. Michel Bouvard tendant à doubler la peine d'emprisonnement prévu par l'article 414 du code des douanes lorsque les faits de contrebande portent sur des marchandises dangereuses pour la santé ou la sécurité, le rapporteur ayant fait valoir que l'extension de la procédure de comparution immédiate permettrait désormais de sanctionner rapidement le trafic de stupéfiants, sans avoir recours à ce délit douanier.

La Commission a adopté l'article 25 sans modification.

Section 2

Dispositions étendant la compétence du juge unique
en matière correctionnelle

Article 26

(art. 398-1 du code pénal)

Extension de la compétence du juge unique en matière correctionnelle

Par dérogation au principe de la collégialité, le deuxième alinéa de l'article 398 autorise le tribunal correctionnel à être composé d'un seul magistrat pour juger un certain nombre de délits énumérés à l'article 398-1, à condition toutefois que la peine encourue, compte tenu de l'état de récidive du prévenu, soit inférieure à cinq ans, que le prévenu ne soit pas en détention provisoire lors de sa comparution à l'audience et qu'il ne soit pas poursuivi selon la procédure de comparution immédiate.

Les délits relevant de la compétence du juge unique sont les suivants : délits prévus par le décret-loi sur les chèques, délits prévus par le code de la route ou commis à l'occasion de la conduite d'un véhicule (blessures involontaires, mise en danger de la vie d'autrui, délit de fuite), délits en matière de coordination des transports, délits prévus l'article 32 du décret loi sur les matériels de guerre, violences, menaces, exhibition sexuelle, abandon de famille et atteintes à l'exercice de l'autorité parentale, vol, filouterie, détournement de gage ou d'objet saisi, recel, destructions, dégradations ou détériorations, menaces de destructions ou dégradations et fausses alertes, menaces à l'égard d'une personne dépositaire de l'autorité publique, sévices graves envers les animaux, usage de stupéfiants, délits de chasse et de pêche et délits prévus par le code forestier et le code de l'urbanisme pour la protection des bois et forêts.

Le 1° de l'article 26 complète cette liste en y ajoutant les délits de rébellion simple et armée et de provocation à la rébellion, prévus aux articles 433-6 à 433-8 (premier alinéa) et 433-10 du code pénal. Rappelons que la rébellion est définie comme le fait d'opposer une résistance violente à une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public agissant, dans l'exercice de ses fonctions, pour l'exécution des lois, des ordres de l'autorité publique, des décisions ou mandats de justice.

Le 2° de l'article 26 étend également la compétence du juge unique à l'ensemble des délits pour lesquelles une peine d'emprisonnement n'est pas encourue, à l'exception des délits de presse qui traditionnellement sont exclus de ce type de mesure. Cette procédure pourra donc désormais s'appliquer aux outrages envers une personne dépositaire de l'ordre public, aux dégradations légères de biens par inscription (tags) ainsi qu'à toutes une série de délits relevant par exemple du code de l'urbanisme ou du code de commerce.

Après avoir rejeté l'amendement n° 10 de M. Pierre Albertini tendant à la suppression de l'article, la Commission a adopté un amendement du rapporteur (amendement n° 183) excluant de la compétence du juge unique la provocation à la rébellion commise par voie de presse, son auteur ayant rappelé que les délits de presse étaient traditionnellement exclus de cette procédure.

La Commission a ensuite adopté l'article 26 ainsi modifié.

Articles additionnels après l'article 26

(art. 399 du code de procédure pénale)

Fixation des audiences correctionnelles

La Commission a adopté un amendement de M. Alain Marsaud prévoyant que le nombre et le jour des audiences correctionnelles sont fixés par décision conjointe du président du tribunal de grande instance et du procureur de la République prise après avis de l'assemblée générale du tribunal (amendement n° 184). Elle a adopté un amendement de coordination du même auteur insérant une nouvelle section (amendement n° 185).

(art. 395 à 495-6 [nouveaux] du code de procédure pénale)

Extension de la procédure de l'ordonnance pénale
aux délits prévus par le code de la route

La Commission a été saisie d'un amendement du rapporteur étendant la procédure de l'ordonnance pénale aux délits prévus par le code de la route. Son auteur a indiqué que les dispositions proposées permettraient de respecter les droits de la défense et les droits des victimes en exigeant la motivation de l'ordonnance, en fixant à quarante-cinq jours, au lieu de trente actuellement, le délai prévu pour former opposition à cette ordonnance et en rappelant que cette procédure ne serait pas applicable lorsque la victime a formulé une demande de dommages et intérêts ou a fait citer directement le prévenu avant que n'ait été rendue l'ordonnance. A la suite d'un débat au cours duquel sont intervenus M. Georges Fenech, M. Jérôme Bignon et M. Xavier de Roux, le rapporteur a rectifié son amendement afin qu'il apparaisse clairement que, lorsque le magistrat estime qu'un débat contradictoire est utile ou qu'une peine d'emprisonnement doit être prononcée, le renvoi du dossier au ministère public est obligatoire. M. Alain Gest a estimé que le principe tendant au report à une discussion ultérieure des amendements sans lien avec le texte devrait s'appliquer à l'amendement proposé, rappelant qu'un projet de loi sur la sécurité routière serait bientôt déposé. Mme Brigitte Barèges et M. Xavier de Roux se sont interrogés sur la portée de l'article 495-5, qui prévoit que l'ordonnance pénale n'a pas autorité de la chose jugée à l'égard de l'action civile en réparation des dommages causés par l'infraction. M. Alain Vidalies a expliqué que cette disposition s'appliquait en cas d'ordonnance pénale portant relaxe. M. Emile Blessig a regretté que le dispositif prévoie un délai spécifique pour faire opposition à l'ordonnance pénale, différent de celui en vigueur en matière contraventionnelle, faisant valoir que cette différence risquait d'entraîner une certaine confusion pour les justiciables. Après que le rapporteur eut fait valoir qu'il s'agissait d'une disposition innovante présentant un lien avec le texte, puisqu'il permet d'éviter le recours à la procédure complexe de la composition pénale, la Commission a adopté son amendement (amendement n° 186).

chapitre iv

Dispositions relatives à la procédure criminelle et à la cour d'assises

Article 27

(art 215, 215-2, 268 et 367 du code de procédure pénale)

Simplification de la procédure criminelle - Délais d'audiencement des appels

Cet article apporte des modifications à la procédure criminelle sur plusieurs points. Il remplace le signification par huissier des décisions de mise en accusation par une simple notification (paragraphes I et III), précise le point de départ du délai d'audiencement devant la cour d'assises pour les accusés détenus (paragraphe II) et supprime le délai d'audiencement pour les accusés détenus ayant fait appel de la décision rendue en premier ressort (paragraphe IV).

-  Communication des décisions de mise en accusation (paragraphes I et III)

L'article 268 du code de procédure pénale dispose que l'ordonnance du juge d'instruction ou l'arrêt de la chambre de l'instruction portant mise en accusation doit être signifié par exploit d'huissier à l'accusé ; lorsque ce dernier est détenu, l'ordonnance ou l'arrêt peut néanmoins être notifié par le chef de l'établissement pénitentiaire. A l'inverse, le deuxième l'article 183 prévoit que les décisions du juge d'instruction susceptibles de faire l'objet de voie de recours de la part d'une partie à la procédure ou d'un tiers leur sont notifiées dans les plus brefs délais soit verbalement, avec émargement au dossier de la procédure, soit par lettre recommandée, une copie de l'acte étant laissé à l'intéressé.

Afin de mettre un terme à cette contradiction et éviter des lourdeurs procédurales inutiles, l'article 27 supprime l'article 268 (paragraphe III) et complète l'article 215, relatif à l'arrêt de mise en accusation de la chambre de l'instruction, afin de préciser que cet arrêt doit être notifié, avec une copie, à l'accusé, conformément au deuxième alinéa de l'article 183 (paragraphe I).

La Commission a adopté un amendement du rapporteur, tendant à supprimer une disposition inutile, l'article 183 du code de procédure pénale prévoyant d'ores et déjà qu'une copie de l'acte sera remise à l'intéressé (amendement n° 187).

-  Délais d'audiencement devant la cour d'assises des accusés détenus (paragraphes II et IV)

Souhaitant limiter au maximum la détention avant la condamnation définitive, la loi du 15 juin 2000 a fixé des délais d'audiencement des affaires devant la cour d'assises de premier ressort et la cour d'assises d'appel pour les accusés détenus.

L'article 215-2 a ainsi prévu la remise en liberté de l'accusé détenu qui n'a pas comparu devant la cour d'assises dans un délai d'un an à compter de la date à laquelle la décision de mise en accusation est devenue définitive. Ce délai peut toutefois être prolongé de six mois, renouvelable une fois, sur décision motivée de la chambre de l'instruction, soit une durée totale de deux ans.

De même, le deuxième alinéa de l'article 367 fixe à la cour d'assises d'appel un délai d'un an, qui peut être prolongé une fois pour une durée de six mois par décision motivée de chambre de l'instruction, soit une durée totale de dix-huit mois, à compter de la date à laquelle a été interjeté l'appel pour examiner l'affaire, faute de quoi l'accusé est remis en liberté.

Faisant valoir qu'il n'était pas justifié de prévoir des délais en appel plus courts que ceux prévus en première instance, alors même que l'accusé a déjà été condamné par une cour d'assises composé d'un jury souverain, et se fondant sur la procédure correctionnelle, qui ne connaît des délais d'audiencement que pour la première instance, les auteurs du projet de loi ont souhaité supprimer le délai d'audiencement des affaires en appel.

Le paragraphe IV supprime donc les dispositions de l'article 367 relatives au délai d'audiencement de l'appel lorsque l'accusé est détenu (2°) et complète cet article par une phrase rappelant que l'accusé a, en tout état de cause, le droit de demander sa mise en liberté à tout moment de la procédure, conformément aux articles 148-1 et 148-2 (1°).

Le délai d'audiencement de deux ans devant la cour d'assises de première instance est, en revanche, maintenu. Le paragraphe II modifie néanmoins l'article 215-2, afin de préciser que ce délai d'audiencement ne court, lorsque la détention a été ordonnée postérieurement à la décision de mise en accusation, qu'à compter de cette détention et non pas de la décision de mise en accusation.

La Commission a adopté un amendement du rapporteur corrigeant une erreur matérielle (amendement n° 188).

La Commission a adopté l'article 27 ainsi modifié.

chapitre v

Disposition relative à l'application des peines

Article 28

(art. 722 du code de procédure pénale)

Possibilité de déroger au débat contradictoire pour les mesures
d'aménagement de peines

La loi du 15 juin 2000 a juridictionnalisé les mesures d'aménagement de peines.

Le sixième alinéa de l'article 722 du code de procédure pénal dispose, en effet, que les mesures de placement à l'extérieur, de semi-liberté, de fractionnement et de suspension de peines, de placement sous surveillance électronique et de libération conditionnelle (1) sont accordées, ajournées, refusées, retirées ou révoquées par décision motivée du juge de l'application des peines saisi d'office, par le condamné ou par le procureur de la République.

La décision du juge de l'application des peines est rendue après avis du représentant de l'administration pénitentiaire, à l'issue d'un débat contradictoire tenu en chambre du conseil au cours duquel le magistrat entend les réquisitions du ministère public et les observations du condamné ainsi que, le cas échéant, celles de son avocat. Ce débat contradictoire a lieu au sein des établissements pénitentiaires.

Comme le soulignait Mme Christine Lazerges dans son rapport d'évaluation de la loi du 15 juin 2000, le temps consacré aux débats contradictoires est beaucoup plus long que celui initialement envisagé. Le rapport cite ainsi le cas de la juridiction d'Evry, où le délai d'examen des affaires oscille entre quarante et cinquante minutes, rédaction et notification du jugement compris.

Afin d'éviter des débats formels qui alourdissent inutilement la charge de travail des magistrats, l'article 28 du projet de loi autorise la suppression du débat contradictoire lorsque celui-ci n'apparaît pas nécessaire.

Il complète pour cela l'article 722 par un nouvel alinéa permettant au juge de l'application des peines de ne pas organiser de débat contradictoire, lorsque le procureur de la République et le condamné ou son avocat ont donné leur accord.

Rappelons que, en tout état de cause, la décision du juge de l'application des peines peut faire l'objet d'un appel du condamné, du procureur de la République ou du procureur général dans les dix jours suivant sa notification. L'appel est alors porté devant la chambre des appels correctionnels.

La Commission a adopté l'article 28 sans modification.

Articles additionnels après l'article 28

(art. 421-4 et 421-5 du code pénal)

Création d'une infraction d'association de malfaiteurs
aggravés pour certains actes de terrorisme

La Commission a adopté, avec l'avis favorable du rapporteur, un amendement présenté par M. Alain Marsaud (amendement n° 189) portant création d'une infraction d'association de malfaiteurs aggravés pour certains actes de terrorisme particulièrement graves et alourdissant les peines encourues en cas d'association de malfaiteurs destinée à préparer une attaque biologique. Elle a ensuite adopté un amendement de coordination du même auteur créant un nouveau chapitre (amendement n° 190).

(art. L. 215-4 du code rural)

Renforcement des sanctions contre les propriétaires d'animaux dangereux

La Commission a adopté l'amendement n° 2 présenté par M. Jérôme Rivière renforçant les sanctions encourues par les propriétaires d'animaux dangereux, mais a rejeté l'amendement n° 3 présenté par le même auteur, devenu inutile.

Après l'article 28

Sur l'avis défavorable du rapporteur, la Commission a rejeté l'amendement n° 35 présenté par M. Guy Teissier tendant à permettre à la partie civile d'intervenir dans l'examen des demandes de libération conditionnelle. Elle a également rejeté l'amendement présenté par Mme Maryse Joissains-Masini tendant à imposer l'épuisement de tous les pourvois en cassation avant le prononcé définitif d'une décision.

TITRE V

DISPOSITIONS RELATIVES À L'AMÉLIORATION DU FONCTIONNEMENT
ET DE LA SÉCURITÉ DES ÉTABLISSEMENTS PÉNITENTIAIRES

chapitre ier

Disposition relative à la sûreté des communications téléphoniques

Article 29

(art. L. 33-3 du code des postes et télécommunications)

Neutralisation des téléphones mobiles
dans l'enceinte des établissements pénitentiaires

Cet article modifie l'article L. 33-3 du code des postes et télécommunications afin d'autoriser la neutralisation des téléphones mobiles dans les enceintes des établissements pénitentiaires.

La présence de téléphones mobiles en prison constitue un phénomène récent qui a pris ces dernières années une ampleur inégalée : on comptait ainsi en 1997 28 téléphones portables saisis en détention par l'administration, contre 313 en 2001. Ces téléphones sont introduits dans les établissements par projection au dessus des murs d'enceinte ou lors des parloirs avec les familles, les portails de sécurité par lesquels passent les visiteurs étant inefficaces pour détecter de tels appareils.

La présence de portables en détention est incontestablement un facteur de perturbation de la vie en détention. Elle est, en premier lieu, source d'un trafic important, qui permet de contrevenir aux règlements. En effet, l'accès au téléphone en détention est en principe strictement encadré(2) : il est interdit pour les personnes détenues en maison d'arrêt et autorisé, une fois par mois, pour les condamnés en centre de détention ou pour tous les détenus en établissement pour peines, lors de circonstances familiales ou personnelles importantes. Dans tous les cas, les conversations sont contrôlées, avec des pratiques variables en fonction des établissements (3).

La présence de portables est également un facteur majeur d'insécurité ; il est ainsi très probable que ces téléphones sont utilisés pour préparer des évasions ou au cours de celles-ci. Même si le taux d'évasion reste relativement faible en France, il est presque certain que les récentes opérations spectaculaires, telles que les évasions de Moulins-Yzeure, de Borgo ou de Fresnes ont nécessité l'utilisation de portables.

Il est, dès lors, apparu indispensable de mener une politique plus active en la matière, les fouilles de cellules organisées régulièrement par l'administration pénitentiaire se révélant insuffisantes pour lutter contre la prolifération des appareils.

Adopté au Sénat avec un amendement de précision rédactionnelle faisant référence aux appareils de télécommunication mobiles de tous types, et non plus seulement aux téléphones mobiles, l'article 29 du projet de loi propose de mettre en place un dispositif technique d'installations radioélectriques permettant de rendre inopérants dans l'enceinte des établissements pénitentiaires, tant pour l'émission que pour la réception, les téléphones mobiles de tous types. La rédaction retenue complète, par l'introduction d'un 7°, l'article L. 33-3 du code des postes et télécommunications qui énumère la liste des installations radioélectriques dont l'établissement est libre ; cette rédaction est très directement inspirée de celle adoptée en 2001 pour le brouillage des téléphones portables dans l'enceinte des salles de spectacles, et qui constitue actuellement le 6° de l'article L. 33-3 (4).

Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 33-3 du code des postes et télécommunications, qui renvoie à l'article L. 36-6 du même code, les conditions d'utilisation de ces installations doivent être déterminées par une décision de l'Autorité de régulation des télécommunications soumise à l'homologation du ministre chargé des télécommunications et publiée au Journal officiel. Une telle procédure apparaît singulièrement lourde : ainsi, la disposition de l'article L. 33-3 relative aux salles de spectacles, pourtant adoptée en juillet 2001, n'est toujours pas opérationnelle faute d'une décision de l'ART ; celle-ci s'est en effet inquiétée du risque de multiplication des dispositifs de brouillage et a émis la crainte qu'ils ne soient étendus à d'autres lieux tels que bibliothèques, salles d'attente ou établissements scolaires. Elle a également considéré que de tels dispositifs étaient de nature à remettre en cause les obligations de permanence, de qualité et de disponibilité du réseau mises à la charge des opérateurs de téléphonie mobile.

Les enjeux de la neutralisation des téléphones mobiles en prison sont d'une toute autre nature ; il s'agit de prévenir des évasions, de préserver des vies humaines et non de garantir la tranquillité des spectateurs dans une salle de spectacles. L'urgence et la confidentialité qui s'attachent à cet impératif de sécurité publique exigent de procéder de façon dérogatoire en rendant le dispositif législatif applicable dès la publication de la loi, sans recourir à une décision de l'ART. Tel est le sens de l'amendement présenté par le rapporteur, qui a été adopté par la Commission (amendement n° 191).

Le financement des dispositifs de neutralisation est déjà prévu dans la loi de programmation à hauteur de 25 millions d'euros ; l'équipement complet des établissements les plus exposés se fera sur cinq ans, avec, dans le même temps, un remplacement des équipements de téléphonie mobile du personnel pénitentiaire pour les communications internes. Ce programme de remplacement est également financé à hauteur de 20 millions d'euros.

À ces mesures de sécurité viendront s'ajouter, conformément aux propositions du groupe de travail sur la sécurité dans les établissements pénitentiaires présidé par M. Jean-Marc Chauvet, un renforcement des dispositifs de filins anti-hélicoptères et une sécurisation des miradors. Ces mesures sont extrêmement attendues par le personnel.

Il est certain que la sécurité des établissements doit constituer une des priorités de l'Etat en matière pénitentiaire ; les récentes évasions ont, en effet, fortement marqué l'opinion publique et très certainement contribué au sentiment d'insécurité. Il faut néanmoins se garder de voir dans le progrès technique la solution à tous les problèmes sécuritaires rencontrés en détention. Comme l'a rappelé M. Jean-Louis Daumas, directeur du centre pénitentiaire de Caen, lors de la table ronde qui s'est déroulée devant la Commission des lois, la neutralisation des portables, l'équipement en filins anti-hélicoptères ou en tunnels à rayons X ne peuvent remplacer la présence humaine. Le taux d'encadrement des détenus par le personnel pénitentiaire constitue toujours le meilleur indice de sécurité ; la création de 3190 postes supplémentaires annoncée dans le rapport annexé du projet de loi apporte à ce sujet une réponse très satisfaisante.

La Commission a adopté l'article 29 ainsi modifié.

chapitre ii

Dispositions relatives à l'hospitalisation des personnes
détenues atteintes de troubles mentaux

Article 30
(Chapitre IV du titre premier du livre II de la troisième partie
du code de la santé publique)

Hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux

L'accroissement du nombre de détenus atteints de troubles mentaux est incontestablement un facteur majeur de perturbation de la vie dans les établissements pénitentiaires ; sous la précédente législature, la commission d'enquête de l'Assemblée nationale sur la situation dans les prisons françaises (5), à laquelle avait participé le rapporteur, réclamait dans ses conclusions, adoptées à l'unanimité, une réforme rapide des procédures d'hospitalisation psychiatrique en milieu pénitentiaire. Le gouvernement précédent ayant sans cesse promis puis reporté ce qui était annoncé comme une « grande loi pénitentiaire », les recommandations de la commission d'enquête sont malheureusement restées lettre morte.

Le projet de loi présenté aujourd'hui répond à ce travail d'investigation très approfondi des parlementaires en proposant à la fois une réforme institutionnelle et une modification des procédures d'hospitalisation psychiatrique. Il crée, à cette fin, dans le code de la santé publique, au sein du livre II consacré à la lutte contre les maladies mentales, un chapitre spécifique consacré à l'hospitalisation des personnes détenues.

Le constat, décrit tant dans l'exposé des motifs du projet de loi que dans le rapport de la commission d'enquête, est alarmant ; face à l'accroissement continu de détenus atteints de troubles mentaux, à la dangerosité que représentent ces personnes, tant pour eux-mêmes que pour le personnel surveillant ou les autres détenus, la réforme des services médico-psychologiques régionaux (SMPR) mise en place en 1986 n'a pas apporté de réponse satisfaisante.

I. La place croissante des problèmes mentaux en détention

Il est très difficile de chiffrer cet accroissement, faute d'une étude sur la santé mentale des détenus menée sur le plan national ; seules existent des études régionales menées au sein d'établissement pénitentiaires se fondant sur la demande de soins ou la consommation de médicaments : le rapport conjoint de l'inspection général des services judiciaires et de l'inspection générale des affaires sociales publié en avril 2002 sur l'organisation des soins aux détenus (6) fait ainsi état de plusieurs de ces études menées par les établissements de Fresnes, de Strasbourg et de Fleury-Mérogis. Pour ne reprendre que cette dernière, le nombre de patients détenus placés sous traitement psychotrope dans cet établissement était de 39 % en 1996 ; il s'élevait à 80 % en 2000. Le rapport conjoint des inspections insiste, en outre, sur la gravité croissante des cas traités en prison, faisant état, dans l'étude menée à Strasbourg, d'un accroissement de plus de 170 % du nombre de détenus psychotiques entre 1989 et 2000.

Au total, en extrapolant les chiffres issus des différentes études, le rapport évalue à 25 % la proportion des personnes présentant des troubles mentaux en prison. C'était, à peu de choses près, les chiffres retenus par la commission d'enquête parlementaire, qui avait noté que 20 % des détenus souffraient de troubles mentaux, 10 % de ces malades présentant, en outre, une pathologie mentale sévère.

La question du traitement de ces détenus dangereux est ainsi revenue comme un leitmotiv dans les visites de prison effectuées par les parlementaires (7).La vie quotidienne dans les établissements pénitentiaires se trouve, en effet, fortement perturbée par la présence de ces malades ; elle se traduit notamment par un accroissement très sensible du nombre d'agressions contre le personnel, celles-ci ayant été multipliées par 2,7 en cinq ans, ainsi que par des incidents très graves entre détenus. Face à cette dangerosité, l'administration pénitentiaire n'a bien souvent d'autre choix que la mise en _uvre de procédures disciplinaires ou le transfèrement dans d'autres établissements.

Les raisons de l'accroissement de ce phénomène sont multiples ; les auditions menées par la commission d'enquête parlementaire avaient ainsi particulièrement mis en avant l'évolution de la psychiatrie moderne qui, dans les années soixante, a souhaité sortir de sa vocation asilaire pour s'ouvrir sur l'extérieur ; les hospitalisations de long séjour diminuant en conséquence, le nombre de lits en psychiatrie a subi une réduction de 32 % ces dix dernières années. Dès lors, la prison est devenue en vingt ans le lieu d'accueil de personnes qui, sans relever forcément de la catégorie de malades mentaux, souffrent de troubles du comportement importants à l'origine de leur passage à l'acte. Cette évolution institutionnelle de la psychiatrie a coïncidé avec une évolution doctrinale fondée sur la responsabilisation des patients ; de nombreux psychiatres estiment ainsi, lors des expertises judiciaires, que la condamnation et la confrontation à la loi pourront jouer un rôle thérapeutique en rappelant au condamné les notions de bien et de mal.

La réforme du code pénal en 1990 est venue conforter cette analyse doctrinale en établissant désormais une distinction entre l'abolition et l'altération du discernement ; alors que l'ancien article 64 du code pénal disposait qu'il « n'y a ni crime ni délit lorsque le prévenu était en état de démence au temps de l'action, ou lorsqu'il a été contraint par une force à laquelle il n'a pu résister », l'article 122-1 du nouveau code comprend deux alinéas, le premier qui exonère pénalement la personne dont le discernement a été aboli, le second qui permet de tenir compte des circonstances dans la détermination de la peine lorsque le discernement n'a été qu'altéré (8). Les conséquences de cette modification législative sur le nombre de détenus malades en prison sont difficilement quantifiables ; il est certain néanmoins qu'elle a ouvert la voie aux experts pour ne retenir que l'altération du discernement dans les cas de psychoses avérées et conduit, en conséquence, à un recul du nombre de non-lieux prononcés pour irresponsabilité. De nombreux psychiatres ont, en outre, signalé que le deuxième alinéa de l'article 122-1 du code pénal, lorsqu'il était retenu, ne se traduisait pas par une atténuation de la peine, comme cela peut être le cas par exemple pour l'excuse de minorité, mais au contraire par des condamnations plus lourdes. Dans bien des cas, il apparaît, en effet, que les jurés sont effrayés à la fois par le mode opératoire du prévenu et par l'expertise qu'en a faite le psychiatre ; les réquisitions du parquet sont en conséquence souvent dépassées par les cours d'assises et le malade condamné à une peine beaucoup plus longue que s'il avait été reconnu sain d'esprit.

Il s'ajoute à cela le caractère profondément anxiogène de la vie carcérale pour un public qui est déjà très fragile à son arrivée en prison ; le rapport conjoint des inspections générales fait ainsi état d'une étude menée par le service médico-psychologique régional de Fresnes, qui évalue la survenue de troubles mentaux en cours de détention à 10 % des patients suivis.

Face aux besoins croissants de la population carcérale, l'organisation actuelle de la prise en charge psychiatrique des patients détenus, mise en place en 1986, est apparue inadaptée.

II. L'inadaptation du dispositif de santé mentale

Le dispositif de santé mentale au plan national a été réglementé par un décret du 14 décembre 1986, qui a créé trois secteurs de psychiatrie : le secteur de psychiatrie générale - un secteur pour 60 000 à 70 000 habitants - le secteur de psychiatrie infanto-juvénile - un pour trois ou quatre secteurs de psychiatrie générale - et un secteur de psychiatrie en milieu pénitentiaire. Celui-ci comporte une structure de base : le secteur médico-psychologique régional (SMPR), qui se voit confier une mission générale de prévention de l'affection mentale en milieu pénitentiaire, ainsi que la mise en _uvre des traitements psychiatriques nécessaires aux détenus et le suivi psychiatrique de la population post-pénale en coordination avec les équipes des autres secteurs de psychiatrie.

Il existe 26 SMPR sur le plan national, tous implantés au sein d'un établissement pénitentiaire ; dans les établissements qui ne sont pas siège d'un service de ce type, une équipe psychiatrique est désignée par l'établissement hospitalier de rattachement pour prendre en charge la santé des détenus à travers des consultations régulières. Lorsque l'état de santé du détenu justifie une hospitalisation, celle-ci est réalisée au sein du SMPR si le détenu donne son consentement. Les hospitalisations sans consentement relèvent, en revanche, en application de l'article D. 398 du code de procédure pénale, du secteur général de psychiatrie.

En dépit de cette organisation récente, la prise en charge psychiatrique des détenus souffre de nombreuses carences ; les lacunes constatées par les parlementaires de la commission d'enquête tiennent tout d'abord au manque de moyens et de personnels qui affecte la psychiatrie en général ; de nombreux postes restant vacants dans cette spécialité, les interventions de médecins psychiatres en milieu pénitentiaire sont souvent réduites à quelques heures mensuelles ; le suivi des patients s'en ressent, d'autant plus qu'il est très souvent assuré par des médecins vacataires qui ne restent que peu de temps au même poste.

Les établissements dotés d'un SMPR sont moins confrontés à cette absence de suivi ; néanmoins, leur fonctionnement n'est pas dépourvu de toutes critiques. Le rapport conjoint des inspections note ainsi que leur implantation privilégiant les maisons d'arrêt - seuls deux établissements pour peine, Caen et Chateauroux, étant dotés d'un SMPR - ne correspond pas à la réalité des besoins : en effet, ce sont les établissements pour peine qui accueillent un nombre important de psychotiques et la majorité des délinquants sexuels. Du fait de cette implantation, il est très fréquent qu'un détenu débute un traitement en maison d'arrêt et soit contraint de l'interrompre une fois affecté en centre de détention.

En outre, l'implantation actuelle des SMPR a négligé la demande de soins et d'hospitalisation des femmes, puisque seul le SMPR de Fleury-Mérogis comprend des lits destinés à les accueillir. Or, s'il est vrai que les femmes sont beaucoup moins nombreuses en prison, elles présentent néanmoins davantage de troubles mentaux.

Outre ces difficultés liées au choix de l'implantation des SMPR, le rapport conjoint des inspections met également en avant les dysfonctionnements dus à une mauvaise coordination entre établissements pénitentiaires, SMPR de rattachement et services de psychiatrie générale, de nombreux SMPR se montrant réticents pour accueillir des détenus ne provenant pas de leur propre établissement. Le nombre de transferts entre établissements pénitentiaires pour hospitalisation dans un SMPR parait en effet très faible - de l'ordre de 317 en 1999 - compte tenu des besoins.

L'hospitalisation au sein même des SMPR n'est pas non plus exempte de critiques du fait des contraintes inhérentes à la vie carcérale ; ainsi, les cellules de SMPR paraissent inadaptées à la prise en charge psychiatrique dans la mesure où elles ne diffèrent pas des autres cellules de la prison et sont, pour la plupart, dépourvues de surveillance médicale la nuit ; les conditions d'entretien, de nettoyage et de désinfection des lieux d'hospitalisation, assurés par les détenus affectés au service général, ne sont parfois pas conformes aux règles d'hygiène très strictes en vigueur dans les hôpitaux.

Enfin, l'hospitalisation dans les SMPR est liée au consentement du malade ; les hospitalisations sans consentement font appel au secteur de psychiatrie générale, que ce soit dans les centres hospitaliers spécialisés (CHS) ou les unités de malades difficiles (UMD). Or, ces hospitalisations se heurtent également à de nombreuses difficultés : de nature juridique d'abord, puisque la seule hospitalisation sans consentement existant pour un détenu souffrant de troubles mentaux est l'hospitalisation d'office, sur ordre du préfet, pour des troubles nécessitant des soins et compromettant la sûreté des personnes ou portant atteinte, de façon grave, à l'ordre public (9) ; ainsi, lorsque le détenu ne pose pas de problème sécuritaire, mais souffre de troubles graves qui affectent son consentement, tels que par exemple une dépression sévère, il n'existe pas, contrairement à ce qui se fait à l'extérieur,de possibilité d'hospitalisation sous la forme d'hospitalisation à la demande d'un tiers.

Les hospitalisations d'office de détenus dans les hôpitaux psychiatriques se heurtent également au respect des normes de sécurité. L'organisation interne de ces hôpitaux se caractérise en effet par la disparition progressive des secteurs fermés ; du fait de cette évolution, les médecins et le personnel de ces établissements montrent de la réticence à prendre en charge la garde des malades dans des conditions identiques à celles qui existent en milieu pénitentiaire. Le nombre d'évasions de détenus lors d'une hospitalisation d'office est en conséquence cent fois plus élevé que lors d'hospitalisation pour motifs somatiques (10).

Il existe cependant une possibilité de placer le détenu en secteur sécurisé : lorsque la dangerosité du malade le justifie, le détenu peut en effet être hospitalisé dans une unité pour malade difficile (UMD), qui répond à des normes de surveillance très strictes, que le malade soit détenu ou non ; aux termes de l'article 1er de l'arrêté du 14 octobre 1986, « les patients relevant d'une UMD doivent présenter pour autrui un danger tel qu'ils nécessitent des protocoles thérapeutiques intensifs adaptés et des mesures de sûreté particulières mis en _uvre dans une unité spécialement organisée à cet effet ». Les faibles capacités d'accueil de ces unités (11) ne permettent toutefois d'envisager leur recours que dans les cas de dangerosité extrême ; une utilisation extensive de leur capacité d'accueil poserait en effet des problèmes de principe, dans la mesure où ces centres sont consacrés à la psychiatrie en secteur fermé, et se heurterait en outre à des obstacles budgétaires.

Afin de répondre aux besoins croissants de la population pénale, le projet de loi propose une réforme globale des modalités d'accueil des détenus souffrant de troubles mentaux.

III. Le projet de loi : une réforme des procédures d'hospitalisation et des institutions d'accueil

Le projet de loi répond aux difficultés actuelles des intervenants en prison en proposant une réforme globale de la psychiatrie pénitentiaire qui touche à la fois son organisation et ses procédures.

Le premier paragraphe propose pour cela la création d'un chapitre IV au sein du livre II du code de la santé publique consacré à la lutte contre les maladies mentales.

Avant d'aborder le dispositif législatif proposé, le rapporteur souhaiterait faire deux remarques sur la démarche générale poursuivie par le Gouvernement ; il est incontestable, en premier lieu, que l'inscription dans la loi des mesures d'hospitalisation des détenus atteints de troubles mentaux constitue une avancée majeure pour les droits des détenus : s'agissant de mesures de contraintes pouvant porter atteinte à la liberté individuelle, il était tout à fait anormal, mais ô combien symptomatique des carences du droit en prison, que ces dispositions restent régies par la voie réglementaire. Il faut, en outre, également se féliciter que les dispositions en cause soient insérées dans le code de la santé publique, et non dans le code de procédure pénale ; en dépit des termes de la loi du 18 janvier 1994 qui assurent aux détenus le même accès aux soins que la population générale, la prison a trop longtemps été régie par des règles spécifiques. L'insertion dans le code de la santé publique traduit ainsi la volonté du gouvernement de normaliser le fonctionnement des établissements pénitentiaires, en alignant leurs règles sur les règles de droit commun.

Le nouveau chapitre IV est composé de cinq articles numérotés de L. 3214-1 à L. 3214-5 ; l'actuel chapitre IV avec les quatre articles qui le constituent devient le chapitre V avec la numérotation des articles correspondante.

L'article L. 3214-1 prévoit l'hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux dans des établissements de santé au sein d'unités spécialement aménagées. Sont ainsi désormais exclues, aux termes de cet article, les hospitalisations à temps complet dans des établissements pénitentiaires. La prise en charge psychiatrique exige, en effet, comme on a pu le constater, un environnement, des normes sanitaires et des méthodes de soins qui se révèlent incompatibles avec le cadre pénitentiaire. La fin annoncée des hospitalisations dans les SMPR doit néanmoins présenter toutes les garanties en matière de sécurité ; c'est pourquoi le projet précise, à juste titre, que l'accueil de ces patients se fera au sein d'unités spécialement aménagées.

L'administration pénitentiaire prévoit, au terme du délai fixé par la loi de programmation, soit cinq ans, la mise en service de dix unités aménagées, réparties sur l'ensemble du territoire. L'implantation de ces unités n'est pas encore arrêtée ; il est probable cependant que les implantations dans les centres hospitaliers spécialisés seront préférées aux hôpitaux généraux, compte tenu du patrimoine immobilier des hôpitaux spécialisés. Au total, 244 lits d'hospitalisation seraient ainsi créés, fonctionnant selon le même modèle que les unités d'hospitalisation sécurisées inter-régionales (UHSI) existant pour les hospitalisations somatiques (12). L'administration pénitentiaire prévoit par ailleurs de doter chaque structure d'une équipe de surveillants de 14 agents.

L'article L. 3214-1 n'opère pas de distinction, comme c'est actuellement le cas avec l'article D. 398 du code de procédure pénale, entre les détenus hospitalisés avec leur consentement et ceux hospitalisés d'office. En fait, les unités spécifiquement aménagées auront vocation à accueillir tous les détenus atteints de troubles mentaux nécessitant une hospitalisation, comme l'indique explicitement plus loin le nouvel article L. 3214-3. Les détenus présentant toutefois une dangerosité caractéristique continueront à être internés dans les unités pour malades difficiles.

Les critères d'affectation dans les différentes unités resteront à déterminer par voie réglementaire.

Sur cet article, le Sénat a adopté un amendement d'ordre rédactionnel que le rapporteur propose de reprendre sans modification.

L'article L. 3214-2 précise les droits reconnus au détenu en tant que patient ; il pose le principe général selon lequel les restrictions aux droits des personnes détenues hospitalisées ne peuvent être que celles imposées par les décisions judiciaires privatives de liberté ou rendues nécessaires par la qualité de détenu ou, pour les malades hospitalisés sans consentement, par l'état de santé. Ainsi, le détenu hospitalisé se voit appliquer en termes de droits et de libertés individuelles ce qui apparaît comme le plus petit dénominateur commun entre son statut de détenu et celui de patient hospitalisé dans une unité psychiatrique.

Sur cet article, le Sénat a adopté un amendement d'ordre rédactionnel permettant de regrouper dans un même alinéa l'ensemble des droits reconnus au détenu, que celui-ci fasse l'objet d'une hospitalisation libre ou d'une hospitalisation sans consentement. Le rapporteur propose de reprendre cette rédaction sans modification.

Le deuxième alinéa précise ce qui, dans le chapitre premier du livre premier consacré aux droits des personnes hospitalisées, est applicable au détenu : sont ainsi explicitement cités six articles du code de la santé publique :

- l'article L. 3211-3, qui permet, pour les hospitalisations d'office, un certain nombre de restrictions à l'exercice des libertés individuelles en fonction de l'état de santé du patient. Ces restrictions doivent cependant être prescrites dans le respect de la dignité de la personne hospitalisée et dans l'objectif de sa réinsertion. En tout état de cause, elles ne peuvent porter atteinte à un certain nombre de droits énumérés de façon limitative : il s'agit du droit de communiquer avec les autorités mentionnées à l'article L. 3222-4 , qui sont le Procureur de la République, le juge du tribunal d'instance, le président du tribunal de grande instance, le maire de la commune et le représentant de l'Etat ; du droit de saisir la commission départementale des hospitalisations psychiatriques ; de prendre conseil d'un médecin ou d'un avocat de son choix ; d'émettre ou de recevoir des courriers ; de consulter le règlement intérieur de l'établissement ; d'exercer son droit de vote ; de pratiquer une activité religieuse ou philosophique de son choix.

L'article L. 3211-3 reconnaît ainsi au patient hospitalisé d'office des droits inaliénables ; pour le détenu hospitalisé, l'exercice de ces droits reste cependant soumis au respect des règles de sécurité imposées par sa condition de détenu et précisées tant dans le code de procédure pénale que par le règlement intérieur des établissements pénitentiaires.

- L'article L. 3211-4, qui précise les conditions de mise en _uvre des protocoles thérapeutiques dans le strict respect des règles déontologiques et thérapeutiques en vigueur.

- L'article L. 3211-6, qui permet, sur constatation du médecin, de placer le malade sous sauvegarde de justice.

- L'article L. 3211-8, qui prévoit le placement sous tutelle ou curatelle des patients hospitalisés.

- L'article L. 3211-9, qui autorise la désignation d'un curateur chargé de veiller à ce que les revenus disponibles du malade soient employés à adoucir son sort, à accélérer sa guérison et à favoriser son insertion, ainsi qu'à favoriser son retour au plein exercice de ses droits.

- L'article L. 3211-12, qui précise les conditions de sortie immédiate d'une hospitalisation sans consentement ; aux termes de cet article, la personne hospitalisée, son curateur ou son tuteur lorsqu'il en existe, ou tout parent ou personne susceptible d'agir dans l'intérêt du malade peuvent se pourvoir par simple requête auprès du juge des libertés et de la détention pour obtenir une sortie immédiate ; le juge statue par référé, après vérifications nécessaires et débat contradictoire. Lorsqu'il sera fait application de cette disposition à l'encontre d'un patient détenu, l'article L. 3214-2 précise que l'établissement pénitentiaire devra aussitôt être prévenu par le Procureur de la République afin d'organiser son retour en détention.

Certains articles du code de la santé publique relatifs aux droits des personnes hospitalisées sont absents de l'énumération opérée par l'article L. 3214-2. Il apparaît ainsi que les dispositions relatives aux mineurs, à la sortie définitive des patients, aux sorties d'essai et autorisations de sortie ne seront pas applicables aux détenus. Pour importantes qu'elles soient, ces exclusions répondent à la logique de l'incarcération. S'agissant des autres dispositions devenues désormais applicables, il s'agit d'une avancée considérable puisque sont reconnus et inscrits dans la loi les droits des détenus en tant que patients hospitalisés.

L'article L. 3214-3 réforme les procédures d'hospitalisation sans consentement des détenus souffrant de troubles mentaux.

Issue du décret du 8 décembre 1998, la procédure actuelle d'hospitalisation des détenus souffrant de troubles mentaux a été alignée sur celle des autres malades en faisant référence aux dispositions générales du code de la santé publique ; alors que l'ancien texte visait « les détenus en état d'aliénation mentale » et prévoyait que l'internement devait être effectué d'urgence s'il s'agissait « d'individus dangereux pour eux-mêmes ou pour autrui », la procédure actuelle, précisée à l'article D. 398 du code de procédure pénale, dispose que les détenus relevant de l'article L. 342 du code de la santé publique (13), c'est-à-dire répondant aux critères de l'hospitalisation d'office, ne peuvent être maintenus dans un établissement pénitentiaire et doivent, en conséquence, être hospitalisés. Les critères de l'hospitalisation d'office concernent des troubles qui nécessitent des soins et compromettent la sûreté des personnes ou portent atteinte de façon grave à l'ordre public. La décision est prise par le représentant de l'Etat dans le département au vu d'un certificat médical circonstancié.

Pour justifié qu'il soit, l'alignement de la procédure d'hospitalisation des détenus sur celle de l'hospitalisation d'office suscite de nombreuses difficultés dans la mesure où l'hospitalisation d'office ne représente qu'une modalité marginale d'hospitalisation en établissement psychiatrique. Comme l'a déjà noté le rapporteur, il existe de nombreux cas où le détenu, tout en ne répondant pas aux critères de l'hospitalisation d'office, exige des soins nécessitant une hospitalisation.

Dans cet objectif, le projet de loi réforme les critères d'hospitalisation en créant une nouvelle procédure spécifique aux détenus, différente de l'hospitalisation d'office ou de l'hospitalisation à la demande d'un tiers.

L'hospitalisation des détenus souffrant de troubles mentaux devra ainsi désormais répondre à une triple condition :

- le détenu nécessite des soins immédiats assortis d'une surveillance constante en milieu hospitalier ;

- ses troubles mentaux constituent un danger pour lui-même ou pour autrui ;

- les troubles doivent également rendre impossible son consentement.

Cette notion d'hospitalisation sans consentement est inédite dans le code de la santé publique ; elle préfigure, comme l'indique l'exposé des motifs du projet de loi, une refonte de la loi du 17 juin 1990 relatives aux procédures d'hospitalisation sous contrainte. Conformément aux recommandations du Conseil de l'Europe et aux conclusions de la Commission présidée par Mme Hélène Strohl sur la réforme de la loi de 1990, les deux régimes d'hospitalisation d'office et d'hospitalisation à la demande d'un tiers seraient fusionnés afin de ne retenir que le critère de la nécessité des soins.

Reposant sur des critères différents, la procédure reste cependant identique à celle prévue actuellement pour l'hospitalisation d'office : le préfet de police à Paris ou le représentant de l'Etat du département siège de l'établissement dans lequel est affecté le détenu prononce, par arrêté, au vu d'un certificat médical circonstancié, l'hospitalisation du détenu dans l'une des unités créées spécialement à cet effet à l'article L. 3214-1 du code de la santé publique. Le certificat médical ne peut émaner d'un psychiatre exerçant dans l'établissement d'accueil.

L'arrêté préfectoral doit être motivé et énoncer avec précision les circonstances qui ont rendu l'hospitalisation nécessaire. Dans les vingt-quatre heures suivant l'admission, le directeur de l'établissement d'accueil transmet au préfet ou au préfet de police pour Paris et à la commission départementale des hospitalisations psychiatriques un certificat médical établi par le psychiatre de l'établissement. Les arrêtés préfectoraux doivent être inscrits sur le registre que tient l'hôpital pour les personnes atteintes de troubles mentaux hospitalisées sous contrainte.

Sur cet article, le Sénat a adopté deux amendements d'ordre rédactionnel que le rapporteur propose de reprendre sans modification.

L'article L. 3214-4 rend applicable aux détenus hospitalisés les articles L. 3213-3 à L. 3213-5 du code de la santé publique relatifs aux conditions de prolongement des hospitalisations d'office :

- dans les quinze jours, puis un mois après l'hospitalisation et ensuite au moins tous les mois, le malade doit être examiné par un psychiatre de l'établissement qui établit un certificat médical circonstancié confirmant ou infirmant, s'il y a lieu, les observations contenues dans le précédent certificat, chaque certificat étant transmis au représentant de l'Etat et à la commission départementale des hospitalisations psychiatriques (article L. 3213-3) ;

- le préfet doit être informé par le directeur de l'établissement, dans les vingt-quatre heures, de la décision d'un psychiatre déclarant sur un certificat médical ou sur le registre de l'hôpital que la sortie peut être ordonnée, et statuer sans délai (article L. 3213-5) ;

- dans les trois jours précédant l'expiration du premier mois d'hospitalisation, le représentant de l'Etat dans le département peut prononcer, après avis motivé d'un psychiatre, le maintien de l'hospitalisation d'office pour une nouvelle durée de trois mois. Au-delà de cette durée, il peut maintenir l'hospitalisation pour des périodes de six mois maximum renouvelables selon les mêmes modalités. Faute de décision à l'issue de chacun de ces délais, la mainlevée de l'hospitalisation est acquise. Enfin, le représentant de l'Etat dans le département peut, à tout moment, mettre fin à l'hospitalisation après avis d'un psychiatre ou sur proposition de la commission départementale des hospitalisations psychiatriques (article L. 3213-4).

Sur cet article, le Sénat a adopté un amendement d'ordre rédactionnel que le rapporteur propose de reprendre sans modification.

L'article L. 3214-5 renvoie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les modalités de garde, d'escorte et de transport des détenus hospitalisés en raison de leurs troubles mentaux.

La répartition des missions de surveillance et d'accompagnement des détenus nécessitant des soins a fait l'objet d'une décision du Conseil de sécurité intérieure en date du 6 décembre 1999 ; l'administration pénitentiaire est ainsi chargée de l'escorte et de la garde des détenus lorsqu'il s'agit de consultations médicales, les forces de police et de gendarmerie devenant compétentes pour tout ce qui concerne les hospitalisations. Cette répartition ne parait pas cependant totalement satisfaisante dans la mesure où la frontière entre l'hospitalisation et la consultation n'est pas claire.

L'enjeu est particulièrement important ; les parlementaires de la commission d'enquête ont tous pu constater en effet à quel point les détenus souffrent d'une absence de coopération entre les différents intervenants.

Le rapport annexé de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, actuellement en cours de discussion au Sénat, prévoit, dans le chapitre consacré aux tâches indues exercées par les policiers et les gendarmes auxquelles il faudra mettre un terme, qu'une réflexion soit menée sur les moyens de transférer à l'administration pénitentiaire la charge des extractions et transfèrement des détenus, ainsi que la garde des détenus hospitalisés. Lors de la discussion du projet de loi en séance à l'Assemblée nationale, le ministre de l'Intérieur a indiqué que de telles missions d'escorte et de garde mobilisaient 4 000 personnes. Compte tenu des enjeux en présence, une coopération entre services est absolument nécessaires ; le rapport annexé précise que des premières propositions devront être faites dans un délai de six mois. Pour sa part, l'administration pénitentiaire prévoit d'affecter 14 personnels de surveillance par unité spécialement aménagée.

Le paragraphe II dispose qu'à titre transitoire, dans l'attente de la prise en charge des détenus atteints de troubles mentaux par les unités hospitalières spécialement aménagées, les hospitalisations continueront d'être assurées par un service médico-psychologique régional, pour les hospitalisations librement consenties, ou par un établissement de santé du service public hospitalier, pour les hospitalisations sans consentement. Il est prévu que cette période transitoire s'étalera sur cinq ans, période de programmation du projet de loi.

Sur ce paragraphe, le Sénat a adopté un amendement d'ordre rédactionnel que le rapporteur propose de reprendre sans modification.

En conséquence, la Commission a adopté l'article 30 sans modification.

Chapitre III

Dispositions relatives au placement sous surveillance électronique

Article 31

(art. 138, 144-2, 723-7, 723-9 et 723-13 du code de procédure pénale)

Placement sous surveillance électronique dans le cadre d'un contrôle
judiciaire - contrôle à distance par des personnes de droit privé

Cet article a pour objet de modifier les possibilités de placement sous surveillance électronique et d'en préciser plusieurs dispositions.

La loi du 19 décembre 1997 a prévu, en cas de condamnation à une ou plusieurs peines privatives de liberté dont la durée totale n'excède pas un an ou lorsqu'il reste à subir par le condamné une ou plusieurs peines dont la durée n'excède pas un an, qu'il peut être décidé que la peine sera exécutée sous le régime du placement sous surveillance électronique. La décision est prise par le juge de l'application des peines, à son initiative ou à la demande du Procureur ou du condamné. La décision ne peut toutefois être prise sans le consentement du condamné recueilli en présence de son avocat.

Destiné à lutter contre la surpopulation carcérale, le procédé du placement sous surveillance électronique s'est inspiré des expériences étrangères menées dès le début des années 90 aux Pays-Bas, en Suède, au Canada, en Grande-Bretagne et aux États-unis. Il a d'abord fait l'objet d'une expérimentation sur quatre sites (Loos, Agen, Aix-en-Provence et Grenoble), à raison de vingt bracelets par établissement, puis a été étendu, en décembre 2001, à cinq autres établissements (Osny, Colmar, Angers, Dijon).

Dans le même temps, la loi du 15 juin 2000 renforçant la protection de la présomption d'innocence et les droits des victimes a étendu la possibilité de placement sous surveillance électronique aux mesures de détention provisoire.

Le procédé du placement sous surveillance électronique fait l'objet d'une description détaillée dans le décret du 3 avril 2002 (14) : «  la personne assignée porte un bracelet comportant un émetteur. Cet émetteur transmet des signaux à un récepteur placé au lieu d'assignation dont le boîtier envoie, par l'intermédiaire d'une ligne téléphonique, à un centre de surveillance relevant d'un ou plusieurs établissements pénitentiaires, des messages relatifs au fonctionnement du dispositif et à la présence de l'intéressé dans le lieu où il est assigné. Le bracelet porté par la personne assignée est conçu de façon à ne pouvoir être enlevé par cette dernière sans que soit émis un signal d'alarme. »

La fiabilité du dispositif technique, confirmée par les phases d'expérimentation, permet d'envisager dorénavant la généralisation du dispositif à l'ensemble du territoire national. Dans cet objectif, il parait nécessaire aujourd'hui de préciser ou de modifier certaines dispositions du code de procédure pénale

Les deux premiers paragraphes de l'article ont pour objet de modifier les conditions de placement sous surveillance électronique : le bracelet devient une des modalités du contrôle judiciaire et ne peut plus être prescrit dans le cadre d'une détention provisoire.

L'article 138 du code de procédure pénale prévoit qu'une personne mise en examen encourant une peine d'emprisonnement correctionnel ou une peine plus grave peut être placée sous contrôle judiciaire. Celui-ci peut se traduire notamment par l'obligation de ne s'absenter de son domicile ou de la résidence fixée par le juge d'instruction qu'aux conditions et pour les motifs déterminés par ce magistrat (2° de l'article 138 du code de procédure pénale). Le premier paragraphe de l'article 31 prévoit que cette assignation à résidence peut faire l'objet d'un placement sous surveillance électronique, après accord de l'intéressé recueilli en présence de son avocat. Dans ce cas, le juge d'instruction exerce les compétences attribuées au juge de l'application des peines dans le cadre d'un placement sous surveillance électronique faisant suite à une condamnation. Compte tenu des contraintes psychologiques que fait peser le placement sous surveillance électronique sur la personne assignée, il est possible que cette dernière renonce au bénéfice de la mesure ; il appartiendra alors au juge, conformément aux articles 139 et 141-2 du code de procédure pénale, de modifier les obligations du contrôle judiciaire et d'apprécier s'il est opportun de décerner un mandat de dépôt en vue de sa détention provisoire.

Le deuxième paragraphe revient sur la disposition introduite par la loi du 15 juin 2000 faisant du placement sous surveillance électronique une modalité d'accomplissement de la détention provisoire. L'article 144-2 du code de procédure pénale se trouve, en conséquence, supprimé, l'exposé des motifs indiquant qu'une telle mesure se heurtait à des difficultés pratiques et de principe.

Sur le plan juridique, il faut effectivement reconnaître que les critères de placement en détention provisoire paraissent pour la plupart difficilement compatibles avec un placement sous surveillance électronique : aux termes de l'article 144 du code de procédure pénale, la détention provisoire ne peut être prononcée que dans l'objectif d'empêcher des pressions sur les témoins ou les victimes, d'éviter une concertation frauduleuse entre personnes mises en examen, de garantir le maintien du mis en examen à la disposition de la justice ou de mettre fin à un trouble exceptionnel et persistant à l'ordre public provoqué par la gravité de l'infraction. Le placement sous surveillance électronique ne permet en aucune façon de lutter contre de tels agissements ou d'apporter une réponse satisfaisante en une telle circonstance ; seul l'enfermement prononcé dans le cadre d'une détention provisoire est efficace. A ce sujet, la loi du 15 juin 2000 présentait incontestablement une contradiction puisqu'elle avait en même temps renforcé les critères de placement en détention provisoire et permis qu'elle puisse être effectuée sous la forme d'une surveillance électronique à domicile.

Sur le plan pratique, le placement sous surveillance électronique dans le cadre d'une détention provisoire n'évitait pas les formalités inhérentes à une mise sous écrou. Ces formalités, qui nécessitent une incarcération de la personne, pouvant durer plusieurs jours, le bénéfice du placement sous surveillance électronique s'en trouvait, en conséquence, fortement réduit.

Le paragraphe III complète l'article 723-7 du code de procédure pénale afin de préciser les obligations pesant sur la personne faisant l'objet d'un placement sous surveillance électronique ; la rédaction actuelle de l'article prévoit déjà que le placement sous surveillance électronique emporte interdiction pour le condamné de s'absenter de son domicile ou de tout autre lieu désigné par le juge de l'application des peines en dehors des périodes fixées par celui-ci. Aux termes du projet de loi, le placement sous surveillance électronique emportera également pour le condamné obligation de répondre aux convocations de toute autorité publique désignée par le juge de l'application des peines.

Le paragraphe IV modifie les modalités de contrôle de la personne placée sous surveillance électronique ; dans sa rédaction actuelle, l'article 723-9 du code de procédure pénale précise que le contrôle à distance du placement sous surveillance électronique est assuré par des fonctionnaires de l'administration pénitentiaire. Le projet de loi ne modifie pas cette disposition mais ajoute que la mise en _uvre du dispositif technique peut être confiée à une personne de droit privé habilitée dans les conditions fixées par décret en Conseil d'Etat. L'objectif de cette mesure est de pouvoir déléguer à une ou plusieurs sociétés privées la surveillance des écrans de contrôle et la pratique des contre-appels. Grâce à cette externalisation, le placement sous surveillance électronique va pouvoir être généralisé à l'ensemble du territoire national ; la rationalisation des procédures qui en est attendue permet, en effet, d'envisager à court terme un objectif de 3 000 placements.

Rien ne s'oppose juridiquement à cette externalisation des tâches de surveillance ; définie notamment lors des débats sur la loi du 22 juin 1987 relative au service public pénitentiaire, la mission qui incombe à l'administration pénitentiaire s'articule autour des notions de discipline, de coercition et d'usage des armes. En dehors de ces missions, pour lesquelles la responsabilité de l'administration pénitentiaire est engagée, les modalités d'exécution des peines peuvent être confiées à des personnes privées habilitées.

Dans cet esprit, le paragraphe modifie le troisième alinéa de l'article 723-9 afin de préciser explicitement que les visites à domicile permettant de s'assurer de la présence de la personne assignée ne peuvent être effectuées que par des agents de l'administration pénitentiaire. Ces derniers doivent immédiatement faire un rapport auprès du juge de l'application des peines des résultats de leur contrôle.

Le dernier paragraphe de l'article modifie l'article 723-13 du code de procédure pénale qui concerne les cas de retrait de la décision de placement sous surveillance électronique. Dans la rédaction actuelle de l'article, une telle mesure ne peut intervenir qu'en cas d'inobservation des conditions d'exécution constatée au cours d'un contrôle, d'inobservation des mesures prononcées, de nouvelle condamnation ou de refus, par le condamné, d'une modification nécessaire des conditions d'exécution. Elle peut également être prononcée à la demande du condamné.

Le présent paragraphe permet d'ajouter à ces critères de révocation les cas d'inconduite notoire ; il peut, en effet, arriver qu'une personne assignée se conforme à toutes les obligations imposées par le placement sous surveillance électronique mais perturbe de façon grave son environnement par un comportement inacceptable. Calquée sur les motifs de révocation de la libération conditionnelle, cette disposition permet de redonner au juge un pouvoir d'appréciation dans le maintien d'un placement sous surveillance électronique.

La Commission a adopté l'article 31 sans modification.

Chapitre iv

Dispositions relatives à la répartition des détenus

Article 32

(art. 717 du code de procédure pénale)

Classification des établissements pénitentiaires

L'article 717 du code de procédure pénale affirme le principe selon lequel les condamnés purgent leur peine dans un établissement pour peines ; il procède ensuite à une classification des établissements pénitentiaires suivant les peines à effectuer ou restant à effectuer par les condamnés ; il prévoit enfin une dérogation à cette classification en autorisant le maintien dans les maisons d'arrêt des condamnés à des peines inférieures à un an.

La classification opérée par l'article 717 du code de procédure pénale permet d'affecter les condamnés à l'emprisonnement d'une durée inférieure ou égale à cinq ans, ou les condamnés à une peine inférieure ou égale à sept ans et n'ayant plus à purger qu'un reliquat de peine de cinq ans, dans des établissements spécialement réservés. Ces établissements ont pris le nom de centres de détention régionaux, par opposition aux centres de détention nationaux ou aux maisons centrales, qui ont vocation à accueillir les détenus condamnés à des peines plus lourdes.

L'article 32 du projet de loi a pour objet de supprimer cette classification entre établissements pour peine ; la distinction entre centres de détention nationaux, centres de détention régionaux et maisons centrales ne revêt plus de grande signification dans la mesure où le quantum de la peine d'un détenu n'a pas de lien avec sa dangerosité ou sa capacité de réinsertion. Le régime de détention, censé être plus ouvert en centre de détention régional qu'en centre de détention national, ne correspond pas à la réalité ; comme le précise l'exposé des motifs du projet de loi : « ces nouvelles dispositions, qu'il conviendra de préciser par décret simple, auront un impact sur la sécurité. Elles permettront en effet d'affecter les condamnés dans des établissements adaptés sur la base de critères liés à leur éventuelle dangerosité et à leur personnalité et non plus sur celui du seul quantum de leur peine qui n'est pas un révélateur en soi de la réelle dangerosité du condamné ».

La suppression des distinctions entre établissements pour peines permettra également d'accélérer les procédures d'affectation dans les établissements ; la commission d'enquête parlementaire sur la situation dans les prisons françaises, à laquelle avait participé le rapporteur, faisait état de délais supérieurs à 18 mois pour le transfert d'un condamné de la maison d'arrêt vers l'établissement pour peines. La procédure d'affectation a fait l'objet d'une procédure de simplification par la voie d'un décret en date du 9 décembre 1998. La classification entre établissements pour peines constituait cependant un facteur de rigidité supplémentaire que le projet de loi s'attache à supprimer.

La Commission a adopté l'article 32 sans modification.

chapitre v (nouveau)

De la réinsertion professionnelle des détenus

Auteur d'un rapport fait au nom de la Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation sur le travail dans les établissements pénitentiaires (15), M. Paul Loridant a déposé douze amendements ayant pour objet de donner au détenu un véritable statut de travailleur. Seuls deux d'entre eux ont été retenus par le Sénat, l'un pour supprimer le prélèvement pour frais d'entretien en établissement pénitentiaire, l'autre pour autoriser les personnes détenues à travailler pour leur propre compte.

Article 32 bis

(art. 720 du code de procédure pénale)

Suppression du prélèvement pour frais d'entretien
en établissement pénitentiaire

Le travail dans les établissements pénitentiaires se présente sous trois formes : le service général consiste dans l'exécution de missions liées au fonctionnement et à l'entretien de l'établissement ; le travail fourni par la Régie industrielle des établissements pénitentiaires (RIEP) permet de produire les fournitures et les équipements de l'administration pénitentiaire ; enfin, le travail en concession consiste à travailler pour une entreprise extérieure dans le cadre d'un contrat passé avec l'administration.

Quelle que soit sa forme, le travail en prison donne lieu à rémunération ; cette dernière fait cependant l'objet de deux prélèvements ; le premier concerne les frais d'entretien en établissement pénitentiaire : versés au profit du Trésor public sous la forme d'une somme forfaitaire calculée selon un coût mensuel de 45,73 euros pour 30 jours, ou journalier de 10 euros, ces prélèvements sont limités à 30 % de la rémunération nette ; les détenus ne travaillant pas ou travaillant au service général en sont exemptés. Le second prélèvement consiste à provisionner 20 % de la rémunération, la moitié de ces 20 % étant destinée à l'indemnisation des parties civiles, l'autre moitié au pécule de libération récupéré par le détenu à sa sortie de prison.

Comme le note le rapport de M. Paul Loridant, un nombre croissant de juges de l'application des peines incitent les détenus à verser, pour l'indemnisation des parties civiles davantage que les 10 % obligatoires, afin de donner des gages de réinsertion et de bonne conduite ; au total, les prélèvements bruts peuvent atteindre jusqu'à 50 % de la rémunération.

Or le montant de la rémunération a une importance essentielle pour le détenu : elle lui permet en effet de « cantiner », c'est à dire d'améliorer ses conditions de détention par l'achat d'aliments, de cigarettes ou par la location d'un poste de télévision.

En conséquence, M. Paul Loridant a proposé un amendement, adopté avec l'avis favorable du rapporteur et l'avis réservé du Gouvernement, afin d'inscrire explicitement dans la loi que le produit du travail du détenu ne peut faire l'objet d'aucun prélèvement pour frais d'entretien en établissement pénitentiaire. Il a ajouté en séance une modification retardant l'entrée en vigueur du dispositif au 1er janvier 2003. Le second paragraphe de l'amendement vise à compenser la perte de recettes induite par la suppression du prélèvement. Comme l'a indiqué l'auteur de l'amendement en séance, cette suppression permettra d'augmenter de près de 30 % le pouvoir d'achat des détenus.

La Commission d'enquête parlementaire sur la situation dans les prisons françaises avait, en son temps, dénoncé les conditions de travail des détenus et la faiblesse des rémunérations compte tenu du niveau élevé des prix constatés en prison ; elle avait également plaidé pour une suppression du prélèvement pour frais d'entretien : « la perception de frais d'entretien par l'administration pénitentiaire apparaît comme une mesure sans justification, puisqu'elle ne s'applique qu'à certains détenus et désincitative à l'exercice d'un travail ; sa suppression s'impose ». Un nombre important de directeurs de prison rencontrés lors des visites d'établissement s'était également prononcé en faveur de cette suppression.

La Commission a adopté l'article 32 bis sans modification.

Article 32 ter

(art. 720-1 du code de procédure pénale)

Travail des détenus pour leur propre compte

Le Sénat a adopté, à l'initiative de M. Paul Loridant, un amendement insérant dans le code de procédure pénale un nouvel article autorisant le détenu à travailler pour son propre compte ; serait ainsi introduite en prison une quatrième forme de travail, après celles du service général, de la RIEP et de la concession.

Il est certain que le travail pour son propre compte développe chez le détenu le sens de l'initiative et de l'autonomie et constitue à cet égard un gage très probant de réinsertion. C'est d'ailleurs pour ces raisons que le Gouvernement s'est déclaré favorable à l'adoption de l'amendement, en dépit d'un avis contraire du rapporteur de la commission des Lois du Sénat. Le secrétaire d'État aux programmes immobiliers de la justice a cependant souhaité qu'en soit rectifiée la rédaction afin de n'autoriser cette forme de travail qu'après décision préalable du chef d'établissement.

Ainsi rectifiée, la disposition introduite par le Sénat offre toutes les garanties de sécurité.

La Commission a adopté l'article 32 ter sans modification.

TITRE VI

DISPOSITIONS RELATIVES À LA JUSTICE ADMINISTRATIVE

L'encombrement de la justice administrative et la nécessité de réduire les délais, fixée dans le rapport annexé au présent projet de loi, appellent un renforcement de ses moyens, prévu dans la programmation fixée par l'article 2 du présent projet de loi. L'augmentation des effectifs est facilitée par la prorogation du recrutement complémentaire, la pérennisation du maintien en surnombre après l'âge de la retraite des conseillers et l'assouplissement des règles relatives à la fin des fonctions des membres des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel. Elle s'accompagne, sur le modèle de ce qui existe depuis 1995 dans les juridictions judiciaires, de la mise en place auprès des magistrats administratifs d'assistants de justice chargés de les aider dans la préparation de leurs décisions.

Article 33 A (nouveau)

(art. L. 222-5 du code de justice administrative)

Abrogation d'une disposition relative à l'affectation des magistrats
administratifs dans les cours administratives d'appel

Introduit par le Sénat, avec l'avis favorable du Gouvernement, cet article additionnel vise à supprimer la règle fixée dans l'article L. 222-5 du code de justice administrative suivant laquelle les magistrats administratifs ne peuvent être affectés dans une cour administrative d'appel que s'ils justifient, au 1er janvier de leur nomination, d'au moins quatre ans de fonctions juridictionnelles dans ce corps. Cette règle interdit donc aux magistrats administratifs de recevoir une première affectation dans les juridictions d'appel.

Introduite à l'époque de la création des cours administratives d'appel, ce dispositif visait à donner à ces nouvelles juridictions, dès l'origine, une légitimité forte incarnée par des magistrats ayant un minimum d'expérience et donc rompus aux pratiques des tribunaux administratifs.

Aujourd'hui, cette interdiction ne se justifie plus. En raison de la montée en charge des recrutements complémentaires, la moyenne d'âge de la majorité des nouveaux magistrats est devenue plus élevée. Ils disposent, en général, d'ores et déjà, d'une expérience professionnelle, soit dans l'administration, soit dans les juridictions judiciaires, soit dans des métiers juridiques. Par ailleurs, la nature du travail en juridiction d'appel présente plusieurs garanties susceptibles d'avoir un effet pédagogique sur les nouveaux magistrats : la collégialité y est plus systématique ; les questions et les réponses posées par l'affaires ont été présentées en premier ressort.

En outre, à l'heure où les cours administratives doivent faire face à des stocks relativement plus importants que les autres juridictions administratives, les besoins en personnel doivent impérativement être comblés. L'abrogation de l'article L. 225-2 du code de justice administrative en facilitant les recrutements permettra de réduire au minimum les taux de vacance.

La Commission a adopté l'article 33 A sans modification.

Article additionnel après l'article 33 A

(art. L. 232-2 du code de justice administrative)

Participation des agents en position de détachement au sein du corps
des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel
à l'élection du Conseil supérieur

La Commission a adopté un amendement du rapporteur tendant à permettre aux agents détachés dans le corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel de participer à l'élection des membres représentants du personnel au Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel. Cette participation est soumise à une condition d'ancienneté minimale de deux ans. Elle semble justifiée dès lors que les agents en détachement représentent plus du tiers du recrutement du corps depuis 1995 (amendement n° 192).

La prochaine élection devant se tenir à l'automne prochain, il est apparu nécessaire de reporter l'entrée en vigueur de cette disposition au 1er janvier 2003.

Article 33 B (nouveau)

(art. L. 232-4-1 du code de justice administrative)

Fonctionnement du Conseil supérieur des tribunaux administratifs
et cours administratives d'appel

Adopté par le Sénat, avec l'avis favorable du Gouvernement, cet article additionnel permet au Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel de siéger toujours dans la même composition, quel que soit le niveau hiérarchique des magistrats dont le cas est évoqué.

Le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel (CSTACAA), contrairement au Conseil supérieur de la magistrature, n'a pas un statut constitutionnel. Il a été créé par la loi du 6 janvier 1986 fixant les règles garantissant l'indépendance des membres des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel. Présidé par le vice-président du Conseil d'État, le Conseil supérieur comprend, aux termes de l'article L. 232-2 du code de justice administrative : quatre fonctionnaires désignés en raison des fonctions qu'ils exercent, le secrétaire général du Conseil d'État, le chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives, le directeur de la fonction publique, le directeur des services judiciaires du ministère de la justice, cinq représentants élus des magistrats, et trois personnalités indépendantes nommées par le président de la République et par les présidents de l'Assemblée nationale et du Sénat.

Réuni une fois par mois, le Conseil supérieur est investi d'un pouvoir de proposition auprès du Président de la République pour les nominations des présidents de juridiction, les avancements et les mesures disciplinaires touchant les membres du corps. Il donne son avis sur les mutations, le détachement, l'intégration après le détachement et enfin, connaît de toute question, notamment de tout projet de loi ou de décret, intéressant le corps. Ses pouvoirs sont tantôt de décision, tantôt de proposition, tantôt d'avis.

L'article R. 232-23 dispose que les représentants des membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel ne peuvent tous délibérer, dès lors qu'est évoqué le cas personnel d'un magistrat dont le grade est supérieur ou égal au leur. Ce mode de fonctionnement se rapproche de celui des commissions administratives paritaires dans la fonction publique, à la différence près que, dans ces dernières, lorsqu'un représentant du personnel doit quitter la réunion, un représentant de l'administration la quitte également, afin de préserver la parité.

Mais, chargé de garantir l'indépendance du corps des magistrats administratifs, le Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel devrait, dans son fonctionnement, se rapprocher, dans une certaine mesure, du Conseil supérieur de la magistrature ou encore du Conseil supérieur des chambres régionales des comptes. Dans ces deux institutions, la composition ne varie pas en fonction des cas individuels examinés ou ne varie, s'agissant de la seconde, que dans des cas limités.

Dans une décision en date du 10 mai 1999, « Syndicat de la juridiction administrative », le Conseil d'État a indiqué qu'il appartenait au seul législateur de déroger au principe général du droit selon lequel, lorsque sont examinées les questions relatives à la situation individuelle d'un agent public, ne peuvent siéger au sein des organismes compétents que les représentants des personnels détenant un grade égal ou supérieur à celui de l'agent concerné. Le présent article lève donc cet obstacle et bloque la composition du Conseil supérieur.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel tendant à rétablir l'appellation exacte du Conseil supérieur des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel (amendement n° 193).

Puis elle a adopté l'article 33 B ainsi modifié.

Article 33

(art. L. 233-6 du code de justice administrative)

Recrutement complémentaire des membres du corps
des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel

Pour répondre aux contraintes nées de la croissance continue du contentieux, il est apparu nécessaire de compléter le recrutement statutaire des membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, recrutement statutaire qui s'effectue par la voie de l'École nationale d'administration et par celle du tour extérieur.

Dans son article premier, la loi n° 80-511 du 7 juillet 1980 relative au recrutement des membres des tribunaux administratifs a ainsi ouvert la possibilité de recruter, par voie de concours, des conseillers en complément du recrutement statutaire. Institué à titre temporaire jusqu'au 31 décembre 1985, ce recrutement complémentaire a été, depuis lors, prolongé à quatre reprises :

· jusqu'au 31 décembre 1990 par l'article 9 de la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986 fixant les règles garantissant l'indépendance des membres des tribunaux administratifs ;

· jusqu'au 31 décembre 1995 par loi n° 87-1127 portant réforme du contentieux administratif dans son article 7 ;

· jusqu'au 31 décembre 1999 par l'article 80 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative ;

· enfin, jusqu'au 31 décembre 2004 par l'article 18 de la loi n° 98-1163 du 18 décembre 1998 relative à l'accès au droit et à la résolution amiable des conflits ; ce dispositif a été codifié dans l'article L. 233-6 du code de justice administrative.

Le principe du recrutement complémentaire est prorogé jusqu'au 31 décembre 2007 par le deuxième alinéa du présent article, c'est-à-dire jusqu'au terme prévisible d'application de la loi de programmation. Cette prolongation devrait permettre, notamment, de répondre aux besoins en personnels résultant de l'ouverture annoncée dans le rapport annexé de nouveaux tribunaux et d'une nouvelle cour administrative d'appel.

Le second alinéa de l'article premier de la loi du 7 juillet 1980 précitée limite le nombre de recrutements complémentaires au nombre de postes offerts chaque année aux élèves de l'École nationale d'administration (ENA). Un dispositif semblable existe pour les magistrats des chambres régionales des comptes. Mais, pour répondre à des besoins ponctuels, cette règle a souffert plusieurs exceptions au prix de l'équilibre de la composition du corps.

Ainsi, dans un premier mouvement, le législateur a autorisé le Gouvernement à dépasser le plafond constitué par le nombre de postes offerts à la sortie de l'ENA pour les années 1980 et 1981, tout en limitant le nombre de recrutements complémentaires à celui des recrutements statutaires (y compris donc les postes pourvus par le tour extérieur).

Dans un deuxième mouvement, à partir de 1986, il a repoussé la limite légale marquée par le nombre de postes offerts à la sortie de l'ENA au nombre de recrutements statutaires.

Dans un troisième mouvement, il a prévu des exceptions temporaires à ce nouveau plafond, qui a disparu en conséquence pour les budgets 1988, 1989 et 1990, puis pour les exercices 1995, 1996 et 1997 et, enfin, dernièrement, pour la période 2000-2002.

Dans le troisième alinéa du présent article, il est proposé de fixer un nouveau plafond, qui serait égal à trois fois le nombre de postes offerts chaque année aux élèves sortant de l'École nationale d'administration et aux candidats au tour extérieur. Il est prévu de recruter en moyenne 30 nouveaux magistrats par an par la voie du concours, entre 2003 et 2007.

Au-delà des questions d'équilibre du corps que pose la seule prorogation continuelle de ce dispositif depuis plus de vingt ans, il faut sans doute s'interroger sur l'effet de l'augmentation régulière du plafonnement du nombre de recrutements complémentaires sur la composition de ce corps. Exceptionnelle et temporaire, cette voie de recrutement tend à devenir habituelle et normale, puisque 40 % des membres du corps en sont issus aujourd'hui.

Il serait peut-être préférable d'élargir à terme le nombre de postes offerts dans les tribunaux administratifs et les cours d'appel à l'issue de la scolarité à l'École nationale d'administration, sous peine de faire de ce mode ordinaire de recrutement l'exception.

 

LES VOIES DE RECRUTEMENT DES CONSEILLERS
DE COURS ADMINISTRATIVES D'APPEL ET DE TRIBUNAUX ADMINISTRATIFS
(1995-2002)

Année

École nationale d'administration

Tour
extérieur

Recrutement complémentaire

Détachement (1)

Loi n° 70-2(2)

Total

1995

10

7

18

19

2

56

1996

10

6

17

17

2

52

1997

9

6

19

16

2

52

1998

12

6

20

22

2

64

1999

12

7

19

21

2

61

2000

11

6

17

14

2

51

2001

11

10

23

18

2

64

2002

11

9

26

10

3

59

Total

85

57

159

137

17

459

(1) De 1995 à 1999, les 71 magistrats recrutés à titre temporaire au titre de la loi de programme relative à la justice figurent dans cette catégorie.

(2) Loi n° 70-2 du 2 janvier 1970 tendant à faciliter l'accès des militaires à des emplois civils

Source : Conseil d'État.

Le présent article codifie, par ailleurs, des dispositions qui se trouvent dans la loi du 7 juillet 1980 susmentionnée et qui énumèrent de manière limitative les catégories de candidats susceptibles de postuler. Les concours complémentaires sont ouverts :

1° aux fonctionnaires et autres agents publics appartenant à un corps de catégorie A ou assimilé et justifiant de sept ans de services publics effectifs, dont trois ans dans la catégorie A ;

2° aux magistrats de l'ordre judiciaire ;

3° aux titulaires de l'un des diplômes exigés pour se présenter au concours externe d'entrée à l'École nationale d'administration, c'est-à-dire un diplôme national de l'enseignement supérieur au moins égal à la licence (16).

Les modalités d'organisation du concours sont fixées par le décret n° 80-1023 du 18 décembre 1980 modifié ; il prévoit deux épreuves d'admissibilité, l'une consistant en l'étude d'un dossier administratif, l'autre en une composition portant sur le droit public, auxquelles s'ajoute une épreuve orale d'admission. Tous les candidats admis sont nommés et titularisés dès leur nomination au grade de conseiller, les fonctionnaires admis à ce concours ne conservant pas les anciennetés d'échelons acquises précédemment.

La Commission a adopté l'article 33 sans modification.

Article 34

(art. L. 233-7 du code de justice administrative)

Maintien en activité des membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel

L'article 8 de la loi n° 87-1127 du 31 décembre 1987 portant réforme du contentieux administratif a aligné la procédure de maintien en activité des membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel au-delà de l'âge de la retraite sur celle prévue pour les conseillers d'État par l'article premier de la loi n° 86-1304 du 23 décembre 1986.

Valable jusqu'au 31 décembre 1995, prolongé une première fois par la loi n° 95-125 du 8 février 1995 jusqu'au 31 décembre 1999 et une seconde fois par la loi n° 98-1163 jusqu'au 31 décembre 2004, ce dispositif a été codifié à l'article L. 233-7 du code de justice administrative, qui permet, « à titre exceptionnel », la possibilité de maintenir en activité les membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel au-delà de l'âge de départ à la retraite, tel que fixé par la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, soit au-delà de soixante-cinq ans.

Ces maintiens, valables trois ans et non renouvelables, viennent s'ajouter, en surnombre, aux postes budgétaires. Les intéressés conservent la rémunération afférentes aux grade, classe et échelon qu'ils détenaient lorsqu'ils ont atteint la limite d'âge. Pour lutter contre les difficultés endémiques de la juridiction administrative et selon la même philosophie que celle qui sous-tend l'article 33 du projet de loi, le présent article propose de pérenniser ce dispositif. Il apparaît comme un facteur de souplesse particulièrement utile pour favoriser la formation et l'insertion des nouveaux magistrats qui arriveront au cours des cinq années que durera la programmation. Telle qu'elle, la rédaction de ces dispositions conduit à faire droit à toutes les demandes, sans pouvoir d'appréciation.

Il reste que le nombre de magistrats maintenus en surnombre est traditionnellement très faible : 7 ont été maintenus en surnombre depuis 1995. On peut rappeler que l'usage de cette formule est beaucoup plus fréquent au Conseil d'État ; la limite d'âge y demeure d'ailleurs fixée à soixante-huit ans pour le vice-président et, en vertu de la loi du 23 décembre 1986, pour les présidents de section et les conseillers d'État qui le souhaitent. Le nombre des départs à la retraite dans les prochaines années conduira à augmenter le nombre de magistrats susceptibles d'obtenir un surnombre : ils seront 10 en 2002, 7 en 2003, 6 en 2004, 10 en 2005, 6 en 2006 et 19 en 2007.

La Commission a adopté l'article 34 sans modification.

Article 35

(art. L. 233-9 du code de justice administrative)

Fin de fonctions des membres du corps des tribunaux administratifs
et cours administratives d'appel

Dans le sens d'une plus grande souplesse dans la gestion des effectifs permettant de répondre aux besoins croissants des juridictions administratives, le présent article, adopté par le Sénat sans modification, insère un nouvel article L. 233-9 dans le code de justice administrative, qui codifie l'article 5 de la loi n° 80-511 du 7 juillet 1980 en mettant à jour la dénomination du corps en vigueur depuis la création des cours administratives d'appel. Il précise que :

-  les membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, qui atteignent lors du premier semestre de l'année la limite d'âge, c'est-à-dire soixante-cinq ans, sont maintenus en fonctions jusqu'au 30 juin de l'année en cours ;

-  ceux qui atteignent la limite d'âge au cours du second semestre sont maintenus jusqu'au 31 décembre.

Ces maintiens de droit peuvent être refusés par les intéressés ; dans ce cas ils quittent leurs fonctions dans les conditions du droit commun, c'est-à- dire le jour où ils atteignent l'âge de soixante-cinq ans. Le départ à la retraite de magistrats chevronnés a des conséquences inévitables sur l'ensemble de la chaîne et multiplie les risques de vacance sur les postes libérés par la montée en grade de leurs titulaires. Le dispositif introduit par le présent article permet d'accroître la prévisibilité des départs en retraite, de rendre possible la gestion prévisionnelle des emplois et d'éviter les à-coups liés aujourd'hui aux départs échelonnés tout au long de l'année.

La Commission a adopté l'article 35 sans modification.

Article 36

(art. 1er, 2 et 5 de la loi n° 80-511 du 7 juillet 1980 relative
au recrutement des membres des tribunaux administratifs)

Abrogations par coordination

La codification aux articles L. 233-6 (recrutement complémentaire), L. 233-7 (maintien en surnombre), L. 233-9 (fin de fonctions), modifiés ou ajouté par le présent projet de loi, du code de justice administrative, des dispositions auparavant inscrites dans les articles 1er, 2 et 5 de la loi n° 80-511 du 7 juillet 1980 relative au recrutement des membres des tribunaux administratifs impose que ces trois articles soient abrogés.

Cette abrogation, adoptée par le Sénat sans modification, aura néanmoins pour conséquence de faire disparaître de la loi la composition du jury qui préside au recrutement complémentaire des membres du corps des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, qui était composé, selon l'article premier de la loi du 7 juillet 1980, du chef de la mission permanente d'inspection des juridictions administratives, d'un représentant du ministre de l'intérieur, d'un représentant du ministre de la justice, ainsi que de deux professeurs titulaires d'université et deux membres du corps des tribunaux administratifs. Il n'apparaît pas déraisonnable de laisser le pouvoir réglementaire maître de la composition des jurys de concours.

La Commission a adopté l'article 36 sans modification.

Article 37

(art. L. 122-2 du code de justice administrative)

Recrutement d'assistants de justice au Conseil d'État

Sur le modèle de ce qui existe dans les services judiciaires, dans un article L. 122-2 nouveau du code de justice administrative, cet article crée, auprès des membres du Conseil d'État la fonction d'assistants de justice, qu'il convient de ne pas confondre avec les assistants juridiques mis à disposition des juridictions administratives par différents ministères depuis 1995.

La loi n° 95-125 du 8 février 1995 prévoit, dans son article 20, la possibilité de recruter, de manière temporaire, des assistants de justice auprès des magistrats d'instance, des tribunaux de grande instance et des cours d'appel. La loi organique n° 2001-539 du 25 juin 2001 relative au statut des magistrats et au conseil supérieur de la magistrature a complété le dispositif législatif initial en incluant la possibilité de recruter des assistants de justice auprès des membres de la Cour de cassation. Ils sont choisis parmi les personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant quatre années d'études juridiques supérieures.

Collaborateurs de haut niveau des magistrats, ils sont chargés, sous réserve de certaines incompatibilités, d'apporter leur concours aux travaux préparatoires réalisés par les magistrats du siège et du parquet, d'effectuer des recherches documentaires, des analyses juridiques, de rédiger des notes de jurisprudence et des notes de synthèse des dossiers et des projets de décisions sur les instructions et indications des magistrats. Entre 1995 et 2002, le nombre de postes d'assistants de justice dans les juridictions judiciaires a été progressivement porté à 1 250. Au 1er janvier 2002, 1 232 étaient effectivement en poste. Un rapport d'évaluation, produit en 1999, a montré que cette aide en personnel avait reçu l'adhésion des cours d'appel, chargées de gérer les assistants. Les magistrats ont exprimé leur satisfaction de pouvoir bénéficier de cette aide, même si certains regrettent un taux de rotation important et si les assistants manquent de perspective, faute de disposer d'un véritable statut.

Il apparaît donc particulièrement judicieux de permettre la mise en place d'un tel dispositif dans les juridictions administratives, à condition que les assistants de justice ne deviennent pas un mode de régulation des flux d'affaires ou un palliatif des éventuels dysfonctionnement dans l'organisation des services ou des problèmes de personnel. Ils pourront _uvrer aux côtés des membres du Conseil d'État qui travaillent à la section du contentieux. Nommés pour une durée de deux ans renouvelable une fois, ils seront soumis comme leurs collègues des juridictions judiciaires au secret professionnel, sanctionné selon les modalités prévues à l'article 226-13 du code pénal, et seront recrutés, comme l'indique le renvoi à l'article L. 227-1 nouveau du code de justice administrative (article 38 du présent projet de loi), parmi les personnes titulaires d'un diplôme sanctionnant une formation juridique d'une durée au moins égale à quatre années d'études supérieures après le baccalauréat.

Limitée à quatre ans, la durée maximale de la mission confiée aux assistants de justice n'est pas apparue suffisante au Sénat, qui a adopté un amendement tendant à permettre de renouveler deux fois le contrat. La mission d'information sur l'évolution des métiers de la justice (17) avait, en effet, insisté sur la nécessité de doter les assistants de justice d'un statut plus pérenne. Cette mesure vise donc à allonger à six ans la durée totale d'exercice de la fonction d'assistants de justice. Parallèlement, le Sénat a émis le souhait de voir augmenter le nombre d'heures de travail susceptibles d'être effectuées par les assistants, nombre aujourd'hui limité à 80 heures par mois et 720 heures par an, ainsi que le montant des vacations horaires.

La Commission a adopté l'article 37 sans modification.

Article 38

(art. L. 227-1 du code de justice administrative)

Recrutement d'assistants de justice dans les tribunaux
administratifs et les cours administratives d'appel

Créant un article L. 227-1 dans le code de justice administrative, le présent article étend aux tribunaux administratifs et aux cours administratives d'appel la possibilité de recourir à des assistants de justice, sur le modèle de ce qu'autorise l'article précédent pour le Conseil d'État.

Le texte proposé dispose que les assistants de justice placés auprès des membres du corps des tribunaux administratifs et cours d'appel, comme ceux qui sont placés auprès des membres du Conseil d'État, sont nommés pour une durée de deux ans, renouvelable une fois, et sont soumis, comme eux, au secret professionnel. Il précise qu'ils devront être titulaires d'un diplôme sanctionnant au moins quatre années d'études supérieures juridiques.

Il sera procédé au recrutement de 230 assistants de justice sur cinq ans, à raison d'un agent par sous-section du contentieux du Conseil d'État ou par chambre de tribunal administratif ou cour administrative d'appel, pour un coût total de 6,25 millions d'euros. Il reste à savoir quel sera l'accueil fait à ces nouveaux venus par les fonctionnaires des greffes des juridictions administratives. Le rapporteur souligne à cet égard que l'arrivée d'assistants dans les palais de justice a parfois suscité la réticence des greffiers en chef et les greffiers qui exercent également des fonctions d'aide à la décision des magistrats.

Comme à l'article 37, le Sénat a allongé la durée maximale d'exercice, au sein des tribunaux administratifs et cours administratives d'appel, des fonctions d'assistant de justice à six ans, en permettant aux contrats d'être renouvelés deux fois, au lieu d'une seule dans le texte original.

La Commission a adopté l'article 38 sans modification.

TITRE VI bis

DISPOSITIONS RELATIVES AUX ASSISTANTS DE JUSTICE
DES JURIDICTIONS JUDICIAIRES

Article 38 bis (nouveau)

(art. 20 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation
des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative)

Allongement de la durée des fonctions d'assistants de justice
dans les juridictions judiciaires

Pour assurer le parallélisme avec l'allongement de la durée des fonctions d'assistant de justice dans les juridictions administratives, le Sénat a adopté cet article additionnel visant à accorder les mêmes droits aux assistants de justice exerçant dans les juridictions judiciaires.

La Commission a adopté l'article 38 bis sans modification.

Après l'article 38 bis

La Commission a rejeté un amendement de M. Christophe Caresche tendant à interdire le prononcé d'une mesure d'éloignement du territoire à l'encontre d'un condamné étranger ayant résidé habituellement en France depuis l'âge de six ans ou d'un condamné étranger parent d'un enfant français résidant en France.

TITRE VII

DISPOSITIONS RELATIVES À L'AIDE AUX VICTIMES

Article 39

(art. 53-1 et 75 du code de procédure pénale)

Amélioration de l'information des victimes d'infractions

Les auteurs d'infractions ne doivent pas bénéficier, au cours de la procédure pénale, d'un traitement plus favorable que celui accordé aux victimes. Or, en dépit de certaines améliorations intervenues ces dernières années, le sort de ces dernières demeure insatisfaisant. En effet, alors que les personnes placées en garde à vue, donc suspectées d'avoir commis ou tenté de commettre une infraction, peuvent, dès le début de leur placement, s'entretenir avec un avocat (18), puis, dans les trois heures, doivent se voir notifier leur droit de prévenir un proche ou de s'entretenir avec un médecin, les victimes, pour leur part, ne sont informées que de leur droit « d'obtenir réparation du préjudice subi et d'être aidées par un service relevant d'une ou plusieurs collectivités publiques ou d'une association conventionnée d'aide aux victimes » (19). Cette différence de traitement constitue, comme l'indique à juste titre l'exposé des motifs du projet de loi, une « anomalie choquante » qui contribue au sentiment d'abandon et de solitude que ressentent nombre de victimes.

Afin de replacer les victimes au centre des préoccupations de l'institution judiciaire, le Gouvernement a l'intention d'arrêter un plan d'action quinquennal tendant, notamment, à améliorer leur information sur leurs droits, sur le déroulement de l'ensemble de la procédure ainsi que sur l'exécution de la peine de l'auteur de l'infraction en mettant en place des dispositifs de renseignements d'urgence accessibles à tout moment. L'annexe I du projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure rappelle, fort justement, en effet, que « derrière les faits constatés de criminalité et de délinquance, il y a d'abord les victimes. Lorsqu'on indique que les faits constatés ont globalement progressé de 13,92 % entre 1998 et 2001, cela signifie qu'il y a eu 487 267 victimes supplémentaires, soit plus que la population de la ville de Lyon. La prise en compte par l'Etat de cette dimension humaine de la délinquance, à tous les stades de la procédure, est aussi un devoir. L'accueil, l'information et l'aide aux victimes sont donc pour les services de sécurité intérieure une priorité. Une " charte de qualité " en fixant les modalités sera établie pour la police nationale et pour la gendarmerie nationale (20) ».

Sans attendre la mise en _uvre de l'ensemble de ces mesures, qui relèvent pour nombre d'entre elles du pouvoir réglementaire, le présent article propose une nouvelle rédaction de l'article 53-1 du code de procédure pénale relatif à l'information des victimes par les officiers de police judiciaire, intervenant dans le cadre d'une enquête de flagrance, de leur droit d'obtenir réparation du préjudice subi. Par coordination, l'article 75 du même code, relatif à l'information des victimes entendues dans le cadre d'une enquête préliminaire, est également modifié.

Dans leur nouvelle rédaction, ces deux articles prévoient que les victimes d'infractions devront être informées « par tout moyen » de leur droit :

« D'obtenir réparation du préjudice subi ». Déjà en vigueur, cette disposition signifie, notamment, que les officiers de police judiciaire doivent présenter aux victimes les différents recours dont elles disposent, qui peuvent être de nature juridictionnelle ou relever d'une procédure de règlement amiable ; la circulaire du 14 mai 2001 précise la nature des informations qui doivent être délivrées par les policiers et établit un formulaire type à remettre aux victimes.

2° De se constituer « partie civile ». Le dispositif proposé rappelle qu'une telle constitution est possible lorsque l'action publique est mise en _uvre par le procureur de la République, ou peut également s'effectuer en citant directement l'auteur des faits devant le tribunal correctionnel, ou en déposant plainte devant le juge d'instruction en application, respectivement, des dispositions des articles 87, 551 et 85 du code de procédure pénale.

3° « D'être assistées d'un avocat » de leur choix ou qui, à leur demande, sera désigné par le bâtonnier des avocats près la juridiction compétente. Cette disposition constitue une mesure nouvelle importante pour les victimes lorsque le prévenu est renvoyé devant le tribunal correctionnel dans des délais particulièrement brefs. En effet, actuellement ce n'est que dans le cadre judiciaire de l'instruction que la partie lésée est entendue, interrogée ou confrontée en présence de son avocat, sauf si elle y renonce expressément (21). Or, dans la majorité des cas, les parquets privilégient le recours aux procédures « rapides », telles que la comparution immédiate, la convocation par un officier de police judiciaire ou la citation directe du prévenu et, dans ce cadre, les parties lésées ne sont pas nécessairement présentes à l'audience ni assistées d'un avocat. Ainsi, selon les données figurant dans l'annuaire statistique de la Justice pour 2002, sur les 628 000 affaires poursuivies par les parquets en 2000 (22), 452 950 l'ont été en application de procédures « rapides », ce qui correspond à près de 72 % des cas, tandis que les instructions, avec 37 768 affaires, ne représentent que 6 % de celles-ci. Dès lors, l'amélioration de l'information communiquée aux victimes sur leur droit de se constituer partie civile et de bénéficier de l'aide d'un avocat devrait contribuer, sans conteste, à renforcer leur accès au droit et à améliorer la réparation du préjudice qu'elles ont subi.

Bénéficiant désormais, « si elles le souhaitent » comme l'a précisé le Sénat, des services d'un avocat, les victimes en supporteront néanmoins la charge financière, à moins, comme le précise le dernier alinéa du présent article, qu'elles « remplissent les conditions d'accès à l'aide juridictionnelle ou [qu'elles] bénéficient d'une assurance de protection juridique ». S'agissant des conditions d'accès à l'aide juridictionnelle, les articles 3 et 7 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 indiquent, notamment, que le demandeur doit être de nationalité française, ou ressortissant des Etats membres de l'Union européenne, ou bien de nationalité étrangère résidant habituellement et régulièrement en France et que son action ne doit pas être dénuée de fondement. En outre, en application de l'article 4 de la même loi, le demandeur sans enfants doit justifier que ses ressources mensuelles sont inférieures à 789 euros pour l'aide juridictionnelle totale et 1 184 euros pour l'aide partielle. En ce qui concerne les assurances de protection juridique, elles sont définies et encadrées par les articles L. 127-1 à L. 127-7 du code des assurances. Leur objet est, moyennant le paiement d'une prime par l'assuré, de prendre en charge les frais de procédure en cas de différend ou de litige l'opposant à un tiers, en vue, notamment, de le défendre ou de le représenter dans une procédure civile, pénale ou administrative ou bien d'obtenir réparation à l'amiable du dommage qu'il a subi. Selon les informations figurant dans le rapport de la commission de réforme de l'accès au droit et à la justice (23), ce type de service d'assurance, bien qu'en développement « rapide », demeure « encore modeste » puisqu'il ne représentait qu'un chiffre d'affaires de 320 millions d'euros en 1999. La Commission a rejeté un amendement de M. Philippe Houillon tendant à supprimer l'information de la victime, par les officiers de police judiciaire, du fait que les frais induits par sa décision de se constituer partie civile seront à sa charge sauf si elle bénéficie d'une assurance de protection juridique.

4° « D'être aidées par un service relevant d'une ou plusieurs collectivités publiques ou par une association conventionnée d'aide aux victimes ». Cette dernière disposition reprend, sur ce point, la rédaction de l'article 53-1 en vigueur. Actuellement, 149 associations _uvrent en cette matière, qui emploient 1 013 personnes et ont traité 176 158 demandes en 2000, contre 104 974 en 1999 (24). 105 117 d'entre elles avaient été victime d'infractions pénale et 49 919 ont nécessité un suivi, dont 28 072 pour des atteintes aux personnes. A titre complémentaire, on rappellera qu'à l'initiative du ministère de la justice, un numéro azur (25)a été mis en place en octobre 2001 dont la gestion a été confiée à une association. Ainsi, lorsqu'elle appelle, la victime est orientée vers l'association d'aide aux victimes la plus proche de son domicile ou, si elle le souhaite, vers un service spécialisé, médico-psychologique ou social par exemple.

5° De saisir, le cas échéant, «  la commission d'indemnisation des victimes d'infractions [CIVI] lorsqu'il s'agit d'une infraction mentionnée aux articles 706-3 à 706-14 du code de procédure pénale ». Introduite par le Sénat, cette disposition a pour objet de faire mieux connaître les CIVI afin de faciliter leur saisine par les victimes. Toutefois, on rappellera, qu'en application des dispositions du 2° de l'article 706-3, la demande de la victime, ou de ses ayants droit, n'est recevable par la commission que si les faits : soit ont entraîné la mort, une incapacité permanente ou une incapacité totale de travail personnel égale ou supérieure à un mois ; soit sont constitutifs d'une agression sexuelle, d'un viol ou d'une atteinte sexuelle, simple ou aggravés prévus et réprimés par les articles 222-22 à 222-30 et 227-25 à 227-27 du code pénal. Instituées dans le ressort de chaque tribunal de grande instance, les CIVI ont reçu 13 910 demandes en 2000 contre 9 918 en 1996 tandis que le montant des indemnités qu'elles ont versées a atteint 147,5 millions d'euros en 2000 contre 89,6 millions d'euros en 1996.

Au total, le rapport annexé au présent projet indique que 262 millions d'euros et 115 emplois seront alloués à l'amélioration de l'aide aux victimes et de l'accès au droit.

La Commission a adopté un amendement rédactionnel du rapporteur (amendement n° 94).

Puis elle a adopté l'article 39 ainsi modifié.

Article 39 bis (nouveau)

(art. 40-1 [nouveau] du code de procédure pénale)

Modalités de désignation de l'avocat de la victime d'infraction
qui s'est constituée partie civile

Les articles 53-1 et 75 du code de procédure pénale, tels que modifiés par le précédent article, prévoient, notamment, que la victime d'une infraction entendue par les officiers ou les agents de police judiciaire est informée de son droit de se constituer partie civile et, si elle le souhaite, d'être assistée d'un avocat désigné par le bâtonnier. Or, les modalités pratiques de cette désignation ne sont pas précisées. Tel est l'objet du présent article introduit par le Sénat qui insère à cette fin un nouvel article 40-1 dans le code de procédure pénale.

Le dispositif proposé prévoit que « lorsque la victime souhaite se constituer partie civile et demande la désignation d'un avocat après avoir été informée de ce droit », l'officier ou l'agent de police judiciaire en avise le procureur de la République. Deux hypothèses sont alors être envisagées : si le procureur de la République décide de mettre l'action publique en mouvement, il en informe « sans délai » le bâtonnier de l'ordre des avocats pour que la victime puisse être immédiatement assistée par un avocat de permanence, notamment en cas de poursuites de l'auteur de l'infraction par comparution immédiate ; s'il décide, au contraire, de classer la plainte, il informe cependant la victime de son droit d'adresser directement « sa demande de désignation auprès du bâtonnier si elle maintient son intention d'obtenir la réparation de son préjudice ».

La Commission a adopté l'article 39 bis sans modification.

Article 40

(art. 9-2 [nouveau] de la loi n° 91-657 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique)

Extension du bénéfice de l'aide juridictionnelle de plein droit
au profit des victimes d'infractions graves

L'aide juridictionnelle a pour objet d'aider les personnes dont les ressources sont insuffisantes à faire valoir leurs droits en justice. A cet effet, elle peut être totale, le bénéficiaire ne supportant alors aucun frais, ou partielle, en fonction des revenus de l'intéressé. Ainsi, l'article 4 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 dispose qu'une personne seule ne peut bénéficier de l'aide juridictionnelle totale que si ses ressources mensuelles sont inférieures à 789 euros et à 1 184 euros pour l'aide juridictionnelle partielle, sachant que chaque personne à charge supplémentaire entraîne une majoration de 90 euros de ces montants. Toutefois, l'article 6 de la même loi prévoit que l'aide juridictionnelle peut, à titre exceptionnel, être accordée aux personnes dont les revenus sont supérieurs « lorsque leur situation apparaît particulièrement digne d'intérêt au regard de l'objet du litige ou des charges prévisibles du procès ». De même, l'article 9-1 de la loi dispose que, dans toute procédure, le concernant, le mineur entendu par le juge dans le cadre d'une procédure civile bénéficie de droit de l'aide juridictionnelle s'il est assisté d'un avocat. Enfin, en application des dispositions de l'article 7 du décret n° 59-327 du 20 février 1959 (26), l'aide juridictionnelle est accordée de droit à toute personne formulant une demande devant le tribunal départemental des pensions.

Hormis ces trois dispositions, aucune autre dérogation aux conditions de ressources n'est prévue par le droit en vigueur, quelque soit la nature de la procédure, la qualité d'auteur ou de victime d'infraction du demandeur, ce qui n'est pas satisfaisant. En effet, s'agissant des victimes d'infractions particulièrement graves, qui sont durablement affectées ou meurtries par les faits qu'elles ont subis, il est regrettable que de telles conditions leur soient opposables alors même qu'elles devraient pouvoir bénéficier, de droit, de l'ensemble des dispositifs de solidarité mis en place par l'Etat.

C'est pourquoi, le présent article a pour objet de faire bénéficier de l'aide juridictionnelle totale de plein droit les victimes, ou leurs ayant droit, « des infractions les plus graves », selon l'expression figurant dans l'exposé des motifs du présent projet. A cette fin, il insère dans la loi du 10 juillet 1991 un article 9-2 nouveau qui énumère lesdites infractions dont la liste est établie selon un double critère : il s'agit exclusivement d'infractions criminelles, donc punies d'une peine d'emprisonnement supérieure à dix ans, commises contre les personnes.

Ainsi, ne seront pas assujetties au respect de la condition de ressources prévue en matière d'aide juridictionnelle, les victimes, ou leurs ayants droits, des crimes de :

-  meurtre ou empoisonnement, définis par les articles 221-1 à 221-5 du code pénal ;

-  tortures et actes de barbarie, prévus et réprimés par les articles 222-1 à 222-6 du même code ;

-  violences aggravées ayant entraîné la mort sans l'intention de la donner, réprimées par les articles 222-8 et 222-10. Il s'agit notamment, des violences commises sur : un mineur de quinze ans ; une personne dont la particulière vulnérabilité, due à son âge, à une maladie, à une infirmité, à une déficience physique ou psychique ou à un état de grossesse, est apparente ou connue de l'auteur ; un ascendant légitime ou naturel ; un magistrat, un juré, un avocat, un gendarme ou un policier ; un témoin, une victime ou une partie civile afin de l'empêcher de dénoncer les faits ou d'agir en justice. Sont également incluses dans ces dispositions, les violences ayant entraîné la mort sans l'intention de la donner commises par une personne dépositaire de l'autorité publique ou par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice. Toutefois, le rapporteur regrette que les ayants droit de la personne décédée de violences simples ayant entraîné sa mort ne figurent parmi les bénéficiaires de plein droit de l'aide juridictionnelle. C'est pourquoi, la Commission, suivant la proposition du rapporteur, a adopté un amendement en ce sens (amendement n° 95) ;

-  violences habituelles sur un mineur de quinze ans ou sur un personne particulièrement vulnérable ayant entraîné la mort, une mutilation ou une infirmité permanente réprimées par les dispositions du 1° et 2° de l'article 222-14 ;

-  viol aggravé, selon les modalités prévues par les articles 222-24 à 222-26 du code pénal. Il s'agit, notamment, du viol : ayant entraîné la mort, une mutilation ou une infirmité permanente ; accompagné ou précédé d'actes de barbarie ; commis sur un mineur de quinze ans ou sur une personne particulièrement vulnérable ; commis par un ascendant ou une personne qui abuse de l'autorité que lui confèrent ses fonctions. Le Sénat a décidé d'élargir au viol simple le champ d'application des dispositions du présent article, ce que le rapporteur approuve sans réserves compte tenu du préjudice moral et physique que subissent les victimes de cette infraction ;

-  séquestration ou enlèvement, atteintes volontaires à la vie ou à l'intégrité de la personne et de détournement d'aéronef ou de toute autre moyen de transport, en lien avec une entreprise terroriste, en application des dispositions du 1° de l'article 421-1 du même code.

Selon les informations communiquées au rapporteur, le coût total de ces nouvelles dispositions serait de 4,2 millions d'euros pour un nombre de victimes concernées estimé à 5 300 par les services de la Chancellerie.

Les dispositions du présent article devraient être complétées par des mesures réglementaires tendant à simplifier la procédure d'admission à l'aide juridictionnelle afin de réduire les délais d'examen des demandes. Il est notamment envisagé de supprimer l'évaluation de certains avantages en nature du demandeur et de clarifier les prestations sociales prises en compte. En outre, un effort particulier sera entrepris afin d'harmoniser les pratiques des bureaux d'aide juridictionnelle, s'agissant, en particulier, de l'admission des mineurs au bénéfice de l'aide.

Pour répondre à certaines inquiétudes qui se sont exprimées, le rapporteur souhaite qu'une réflexion soit engagée sur les modalités de rémunération des avocats intervenant dans le cadre de l'aide juridictionnelle, qui devraient être davantage sollicités compte tenu des mesures nouvelles résultant du présent article.

La Commission a adopté l'article 40 ainsi modifié.

Après l'article 40

La Commission a rejeté deux amendements de Mme. Maryse Joissains-Masini, l'un tendant à punir le délit d'offense au Président de la République, prévu par l'article 26 de la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, d'une peine d'emprisonnement de deux ans et d'une amende de 80 000 euros, le second de coordination. Elle a également rejeté l'amendement n° 17 de M. Christian Estrosi prévoyant que le maire peut, sans préjudice des droits de la victime et au nom de sa commune, se constituer partie civile lorsque l'infraction a été commise sur la voie publique.

Article 41

(art. 74-1 et 80-4 [nouveaux] du code de procédure pénale et art. 26 de la loi n° 95-73
du 21 janvier 1995 d'orientation et de programmation relative à la sécurité)

Recherche des personnes disparues -
Renforcement des moyens d'investigation

Chaque année en France, 6 565 personnes, mineures et majeures, disparaissent dans des circonstances qui peuvent faire craindre qu'elles aient été victimes d'un crime ou d'un délit susceptibles de mettre leur vie en danger. 6 474 d'entre elles sont retrouvées, dans 51% des cas moins de 8 jours après le signalement de leur disparition. Cependant, près d'une centaine de personnes demeurent introuvables. Or, lorsque les services de police ou de gendarmerie sont sollicités par les familles ou les proches des personnes disparues, ils ne bénéficient pas des instruments juridiques leur permettant de mener toutes les investigations nécessaires.

En effet, lorsqu'une personne disparaît, rien n'indique qu'une quelconque infraction ait été commise, la disparition pouvant être tout autant la conséquence de sa volonté délibérée que l'acte préparatoire d'un crime ou d'un délit dont elle serait la victime. Dès lors, les policiers ne bénéficient d'aucun des pouvoirs qui leurs sont reconnus par la loi en matière d'enquête judiciaire qui requiert, précisément, la commission d'un crime ou d'un délit. Sollicités par les familles, ils ne peuvent donc procéder qu'à une enquête de police administrative ; dans ce cadre, ils sont dépourvus de tout moyen de contrainte, qu'il s'agisse de la possibilité de requérir auprès du procureur de la République le concours de la force publique à l'encontre d'un témoin refusant de comparaître, de placer une personne suspecte en garde à vue ou, dans le cadre d'une enquête de flagrance, de perquisitionner un domicile privé.

Le cadre légal de l'enquête administrative, qui est défini par les dispositions de l'article 26 de la loi n° 95-73 du 21 janvier 1995, évoque, certes, « l'enquête » menée par les services de police ou de gendarmerie mais sans véritablement en préciser le contenu, si ce n'est l'inscription d'office de la personne déclarée disparue au fichier des personnes recherchées. En pratique, les policiers ou les gendarmes procèdent à des enquêtes de voisinage ou interrogent d'autres administrations qui peuvent refuser de leur communiquer des informations. Or, lorsque la disparition est soudaine et revêt un caractère inquiétant, ces pouvoirs de police administrative ne sont pas suffisants puisqu'ils ne permettent pas aux enquêteurs d'agir de façon adaptée. L'inexistence d'une procédure intermédiaire, entre l'enquête administrative et l'enquête judiciaire constitue donc une lacune de notre droit qui a également été relevée par le rapport de l'inspection générale des services judiciaires diligenté à la suite de l'affaire dite des « disparues de l'Yonne ».

Le présent article a précisément pour objet de la combler en créant deux procédures judiciaires d'enquête ou d'information pour recherche des causes d'une disparition suspecte. En outre, afin de procéder à l'articulation de l'enquête administrative avec ces deux nouvelles procédures judiciaires, des modifications des dispositions de l'article 26 de la loi 21 janvier 1995 sont également proposées.

a) Une procédure d'enquête judiciaire pour recherche des causes d'une disparition est créée

Par analogie avec l'enquête ou l'information judiciaires pour recherche des causes de la mort prévues par l'article 74 du code de procédure pénale, le paragraphe I du présent article introduit un nouvel article 74-1 relatif à l'enquête judiciaire pour identification des causes d'une disparition suspecte. Ainsi, lorsque la disparition d'un « mineur ou d'un majeur protégé vient d'intervenir ou d'être constatée », les officiers de police judicaire, assistés le cas échéant des agents de police judiciaire, devraient pouvoir, sur instruction du procureur de la République, enquêter selon les modalités prévues par les articles 56 à 62 du code de procédure pénale aux fins de découvrir la personne disparue.

Les références précitées visent exclusivement des prérogatives dévolues aux officiers de police judiciaire dans le cadre des enquêtes de flagrance ce qui est logique puisque, la disparition venant de survenir ou d'être constatée, la situation est équivalente à celle qui existe en cas de crime ou de délit flagrants. Toutefois, à l'issue d'un délai de huit jours à compter des instructions du procureur de la République, les investigations menées par les policiers ne pourront se poursuivre que dans les formes de l'enquête préliminaire ainsi que le précise la dernière phrase du premier alinéa de l'article 74-1. En pratique, pendant les huit premiers jours suivant les instructions du procureur, les officiers de police judiciaire pourront donc, notamment : procéder à des perquisitions (articles 56 à 59 du code de procédure pénale) ainsi qu'à des constatations ou à des examens techniques ou scientifiques en ayant recours aux personnes qualifiées nécessaires (article 60) ; défendre à toute personne de s'éloigner (article 61) ; entendre toute personne susceptible de fournir des renseignements sur les faits ou sur les objets et documents saisis, celle-ci étant tenue de comparaître et, à défaut, pouvant être contrainte de le faire par la force publique (article 62).

En revanche, ils ne pourront placer une personne en garde à vue. En effet, en application des dispositions des articles 63 et 77 du code de procédure pénale, une personne ne peut être placée en garde à vue que s'il « existe une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu'elle a commis ou tenter de commettre une infraction. » Or, l'objet même de l'article 74-1 nouveau est de déterminer les causes d'une disparition inexpliquée ce qui suppose que les services de police ne sont pas en mesure d'identifier un quelconque suspect auteur d'infraction. Bien évidemment, si à l'occasion de leur enquête sur les causes de la disparition, les officiers de police judiciaire découvrent des faits laissant à penser qu'une infraction a été commise à l'encontre de la personne disparue, par exemple un enlèvement ou une séquestration, ils changeront alors immédiatement de procédure judiciaire. Dans cette hypothèse, ils agiront, selon les cas, dans le cadre de l'enquête de flagrance ou préliminaire et, le cas échéant, placeront en garde à vue la personne suspectée d'être l'auteur de l'infraction.

Par ailleurs, les dispositions de l'article 74-1 seront également applicables en cas de disparition « d'un majeur présentant un caractère inquiétant ou suspect eu égard aux circonstances, à l'âge de l'intéressé ou à son état de santé » ainsi que le précise son dernier alinéa. Les critères retenus tendent, notamment, à exclure du champ d'application de cet article les disparitions non inquiétantes, par exemple celle de l'un des conjoints d'un couple de majeurs lorsque son intention de se séparer était notoire. En revanche, la disparition d'une personne âgée isolée, parce qu'elle est inquiétante, relèvera de la procédure prévue par l'article 74-1.

Enfin, le procureur de la République saisi des faits pourra également requérir l'ouverture d'une information pour recherche des causes de la disparition, les modalités de cette procédure étant précisées par l'article 80-4 nouveau du code de procédure pénale, inséré par le paragraphe II du présent article.

b) La possibilité de saisine du juge d'instruction par le procureur de la République est prévue

On relèvera, au préalable, que la nouvelle procédure d'information prévue par l'article 80-4 du code de procédure pénale sera applicable aux recherches des causes de la disparition d'une personne disparue dans les conditions prévues par l'article 74-1 mais aussi à celles entreprises sur le fondement des dispositions de l'article 74, qui ont pour objet de déterminer les raisons d'un décès dont les causes sont inconnues ou suspectes.

Le premier alinéa de l'article 80-4 prévoit que, saisi par le procureur de la République, le juge d'instruction procède « conformément aux dispositions du chapitre Ier du titre III du livre Ier » du code de procédure pénale, c'est-à-dire l'ensemble des dispositions relatives au juge d'instruction. Toutefois, dans la mesure où l'information judiciaire est ouverte, non pour élucider un crime ou un délit mais pour rechercher les causes d'une mort ou d'une disparition, nombre des pouvoirs reconnus au juge d'instruction ne trouveront pas à s'appliquer. Par hypothèse, à ce stade, il n'y a pas d'infraction constatée ni, encore moins, de personne mise en cause. En outre, la jurisprudence a précisé au sujet de l'instruction pour cause de mort suspecte (27), que la saisine du juge d'instruction ne mettait pas en mouvement l'action publique.

Pour permettre au juge d'instruction, saisi en application des dispositions des articles 74 et 74-1 du code de procédure pénale, de procéder à certains actes utiles qui ne peuvent, dans le cadre de l'instruction, être mis en _uvre que si la peine encourue atteint un certain quantum, il était nécessaire de le prévoir expressément dans la loi. Tel est l'objet de la seconde phrase du premier alinéa de l'article 80-4 qui indique que le juge d'instruction peut requérir l'interception des correspondances émises par la voie des télécommunications. Ces opérations « d'écoutes téléphoniques » se feront sous l'autorité et le contrôle du magistrat instructeur et selon les modalités de droit commun prévues par les articles 100-1 à 100-7 du code de procédure pénale. Toutefois, les interceptions ordonnées dans ce cadre ne pourront excéder une durée de deux mois renouvelables, alors que l'article 100-2, dans le régime de droit commun fixe cette durée à quatre mois renouvelables. Ces nouvelles dispositions prendront toute leur importance notamment dans l'hypothèse d'une fugue de mineur. En effet, le placement sur « écoutes » de ses proches pourrait améliorer l'efficacité des recherches en facilitant la localisation du jeune disparu. Par ailleurs, le juge d'instruction saisi sur le fondement des dispositions de l'article 80-4 pourra également, selon les modalités de droit commun, procéder lui-même à tous les actes d'information utiles à la manifestation de la vérité ou donner commission rogatoire aux officiers de police judicaire afin qu'ils exécutent tous les actes rendus nécessaires par l'information.

Comme c'est le cas dans le cadre de toute instruction, la première phrase du second alinéa de l'article 80-4 rappelle que « les membres de la famille de la personne décédée ou disparue peuvent se constituer partie civile à titre incident ». Outre une modification de portée rédactionnelle, le Sénat a également souhaité, par analogie avec la procédure d'enquête administrative, élargir aux « proches » de la personne disparue la possibilité de se constituer partie civile, ce que le rapporteur approuve. Toutefois, la dernière phrase du second alinéa de l'article dispose que l'adresse de la personne majeure disparue qui est retrouvée par les enquêteurs ne peut être communiquée sans son accord à la partie civile. S'agissant d'un mineur ou d'un majeur protégé, sa nouvelle adresse ne pourra être communiquée qu'avec l'accord du juge d'instruction. Il faut souligner, en effet, que la jouissance de la liberté individuelle implique également le droit de disparaître.

c) Les pouvoirs d'enquête de la police administrative sont clarifiés et renforcés

Le premier alinéa de l'article 26 de la loi du 21 janvier 1995 détermine le champ d'application de la procédure de recherche administrative des personnes disparues qui s'applique « à la disparition d'un mineur ou d'un majeur protégé, où à celle d'un majeur dont les services de police ou de gendarmerie estiment qu'elle présente un caractère inquiétant ou suspect, eu égard aux circonstances, à son âge ou à son état de santé ».

Saisis par les proches d'une personne disparue les policiers ou les gendarmes auront donc le choix, soit de mener une enquête administrative, soit de solliciter le procureur de la République afin qu'il les autorise à procéder à une enquête judiciaire sur le fondement des dispositions de l'article 74-1 du code de procédure pénale. Bien évidemment, lorsque le procureur de la République retiendra cette dernière solution, il sera mis fin aux éventuelles recherches administratives déjà entreprises ainsi que le précise le 5° du IV du présent article qui modifie, en conséquence, le dernier alinéa de l'article 26 de la loi du 21 janvier 1995. Dans les faits, les policiers apprécieront l'adéquation entre les circonstances de l'affaire dont ils sont saisis et les moyens d'investigations dont ils disposent dans les cadres respectifs de l'enquête administrative ou judiciaire et agiront en conséquence. Ainsi, les enquêteurs pourront désormais répondre avec davantage de souplesse et de pertinence aux sollicitations provenant des personnes déclarant une disparition. On soulignera, cependant, qu'en cas de désaccord entre le déclarant et les services de police ou de gendarmerie sur la qualification de la disparition, le procureur de la République, à la demande du déclarant, sera saisi sans délai « aux fins de décision ». Inchangée par le présent projet de loi, cette disposition du deuxième alinéa de l'article 26 recouvre, à titre d'exemple, l'hypothèse d'un désaccord entre le déclarant soutenant qu'un enlèvement a été commis et les services de police ou de gendarmerie estimant qu'il s'agit simplement d'une disparition dont la cause demeure, pour l'heure, inexpliquée.

Dès lors que le représentant du parquet sera saisi par les policiers ou les gendarmes, de toute demande tendant à l'application de la procédure d'enquête judiciaire pour recherche des causes d'une disparition, d'une part, et d'un éventuel désaccord avec un déclarant sur la qualification d'une disparition, d'autre part, il paraît inutile qu'il soit, en outre, systématiquement prévenu de toute disparition. C'est pourquoi, le 3° du III du présent article supprime la disposition en ce sens qui figurait au 4e alinéa de l'article 26 de la loi du 21 janvier 1995. En revanche, le représentant du parquet sera informé de la disparition d'une personne « dès la découverte d'indice laissant présumer la commission d'une infraction ou lorsque les dispositions de l'article 74-1 du code de procédure pénale sont susceptibles de recevoir application » ainsi que le prévoient les dispositions du 7e alinéa nouveau de l'article 26 précité, inséré par le 3e alinéa du 4° du III du présent article.

S'agissant des personnes susceptibles de déclarer la disparition, le troisième alinéa de l'article 26 en vigueur vise le « conjoint, concubin, descendant, ascendant, frère, s_ur ou proche » pour préciser qu'il « bénéficie du concours immédiat des services de police ou de gendarmerie ». Le 2° du III du présent article ajoute à cette énumération des déclarants « le partenaire lié par un pacte civil de solidarité » ainsi que « le représentant légal ou l'employeur » et précise que la disparition « doit immédiatement faire l'objet d'une enquête ».

En ce qui concerne l'enquête administrative proprement dite, ses modalités sont précisées et renforcées par les dispositions des 5e et 6e alinéas nouveaux de l'article 26 insérés par les deux premiers alinéas du 4°  du III du présent article. Désormais, les policiers ou les gendarmes pourront procéder à « toutes recherches et auditions utiles à l'enquête ». En outre, les enquêteurs en dresseront un « rapport détaillé ou un procès -verbal si nécessaire », respectivement, communiqué à leur supérieur hiérarchique ou au procureur de la République.

Par ailleurs, les chefs de service de la police nationale ou des unités de la gendarmerie pourront « directement », et non plus « sur autorisation et dans les limites prescrites par l'autorité judiciaire » comme le prévoit le droit en vigueur, requérir des organismes publics détenant des fichiers nominatifs la communication de tout renseignement permettant de localiser la personne. De surcroît, le dispositif proposé étend cette possibilité aux « établissements privés » détenant de tels fichiers. En outre, quelle que soit la nature publique ou privée de l'organisme, l'éventuelle obligation de secret des personnels employés ne pourra plus être opposée aux demandes des enquêteurs. En pratique, les policiers ou les gendarmes pourront donc obtenir des organismes de sécurité sociale, d'enseignement, mais aussi des établissements bancaires ou de crédit, les données à caractère personnel en leur possession concernant la personne disparue. Les recherches entreprises s'en trouveront considérablement facilitées, de sorte que l'on peut espérer une augmentation du nombre de personnes retrouvées. Pour le reste, le dispositif de l'article 26 de la loi du 21 janvier 1995 demeure inchangé. Ainsi, les enquêteurs saisis d'une déclaration de disparition devront continuer d'inscrire immédiatement la personne concernée au fichier des personnes recherchées, sauf si les circonstances de la disparition ou les nécessités de l'enquête s'y opposent.

Au-delà de ces modifications législatives, le rapporteur tient également à rappeler que le Gouvernement a créé, par le décret n° 2002-732 du 3 mai dernier, l'office central chargé des disparitions inquiétantes des personnes qui a pour mission d'animer et de coordonner sur le plan national les recherches des personnes disparues dans des circonstances suspectes. Rattaché au ministère de l'intérieur et à la direction générale de la police nationale, cet office est composé de policiers spécialistes de ce type d'investigations et peut, le cas échéant, également associer des gendarmes à ses travaux.

La Commission a adopté l'article 41 sans modification.

TITRE VIII

DISPOSITIONS RELATIVES À L'OUTRE-MER

Article 42

(Article L. 142-5 du code de la route)

Constatation des infractions routières à Mayotte

Le présent article concerne la constatation des infractions routières à Mayotte ; l'ordonnance n° 2000-1255 du 21 décembre 2000 a donné compétence aux fonctionnaires de police à Mayotte pour constater par procès-verbal les contraventions prévues par la partie réglementaire du code de la route ou par d'autres dispositions réglementaires si elles se rapportent à la circulation routière.

L'article 12 de la loi n° 2002-3 du 3 janvier 2002 relative à la sécurité des infrastructures et systèmes de transport a supprimé, par erreur, cette disposition relative à Mayotte ; l'article 42 du projet de loi se limite donc à rétablir dans le code de la route les dispositions supprimées. Par rapport à la rédaction antérieure, le projet de loi précise simplement que la liste des contraventions que les fonctionnaires de police à Mayotte sont habilités à constater est fixée par décret en Conseil d'Etat.

La Commission a adopté un amendement de précision rédactionnelle présenté par le rapporteur (amendement n° 96). Puis elle a rejeté l'amendement n° 39 de M. Mansour Kamardine déjà satisfait.

La Commission a adopté l'article 42 ainsi modifié.

Article 43

(art. L. 142-5 du code de la route)

Application en outre-mer et habilitation du Gouvernement
au titre de l'article 38 de la Constitution

Cet article prévoit l'adaptation du présent projet de loi aux territoires d'outre-mer, à la collectivité départementale de Mayotte et à la Nouvelle-Calédonie ainsi que l'actualisation du droit applicable outre-mer en matière judiciaire.

Le premier paragraphe avait initialement pour objet de faire une liste des dispositions du projet de loi applicables à Mayotte ; étaient ainsi explicitement mentionnées comme étant applicables les titres III (réforme du droit pénal des mineurs) et IV (simplification de la procédure pénale), l'article 29 (brouillage des téléphones portables dans les établissements pénitentiaires) et le I et II de l'article 41 (recherche des personnes disparues). En vertu de l'article 3 de la loi n °2000-616 du 11 juillet 2001, la collectivité départementale de Mayotte est soumise pour un grand nombre de matières au principe de l'assimilation législative : ainsi, dans les domaines concernés, les lois sont applicables de plein droit sans nécessiter de mentions d'applicabilité. Le droit pénal, la procédure pénale, la procédure administrative contentieuse et non contentieuse font partie de ces domaines relevant de l'assimilation législative ; en conséquence, le Sénat a jugé inutile la mention d'applicabilité spécifique à Mayotte.

Il est exact que pour pédagogique que soit une telle mention, elle est en contradiction avec la loi statutaire du 11 juillet 2001 ; elle risque effectivement, comme l'a souligné le rapporteur de la Commission des lois au Sénat, de créer un précédent fâcheux qui reviendrait à exiger des mentions d'applicabilité lorsque la loi est applicable d'emblée. Le principe d'assimilation, souhaité par tous les mahorais, serait, dès lors, battu en brèche au profit d'un retour au principe de spécialité.

Le rapporteur propose dès lors de retenir la rédaction adoptée par le Sénat.

Les trois autres paragraphes de l'article prévoient une habilitation du Gouvernement, en application de l'article 38 de la Constitution, à prendre par ordonnances les mesures législatives nécessaires à l'actualisation et à l'adaptation du présent projet de loi ainsi que de diverses dispositions en matière de procédure judiciaire à la Nouvelle-Calédonie, la Polynésie française, les îles Wallis-et-Futuna, à Mayotte et dans les Terres australes françaises.

Le premier alinéa de l'article 38 de la Constitution dispose à cet effet que « le gouvernement peut, pour l'exécution de son programme, demander au Parlement l'autorisation de prendre par ordonnances, pendant un délai limité, des mesures qui sont normalement du domaine de la loi. » Ainsi, à la demande du Gouvernement, le Parlement peut se dessaisir momentanément de sa compétence, à la condition, comme l'a rappelé le Conseil constitutionnel, pour le Gouvernement « [d']indiquer avec précision au Parlement, lors du dépôt d'un projet de loi d'habilitation et pour la justification de la demande présentée par lui, quelle est la finalité des mesures qu'il propose de prendre ».

Dans le projet de loi présenté, le domaine de l'habilitation est précisément déterminé et la finalité clairement définie ; la modernisation et l'adaptation du droit outre-mer constitue, en effet, un « classique » des lois d'habilitation.

Les domaines de l'habilitation proposée avec cet article concernent d'abord l'adaptation du présent projet de loi ; seront ainsi étendus à l'outre-mer les titre Ier (programmation) et II (justice de proximité), les chapitres II à IV du titre V (hospitalisation des personnes détenues atteintes de troubles mentaux, placement sous surveillance électronique, répartition des détenus), les articles 38 à 40 (assistants de justice au tribunal administratif, droit des victimes d'être assistées d'un avocat commis d'office, aide juridictionnelle sans condition de ressources pour les victimes de certains crimes) et le III de l'article 41 (recherche des personnes disparues).

Les autres ordonnances permettront également l'extension dans les mêmes collectivités des articles 20 à 26 de la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile, pénale et administrative ; ces articles concernent essentiellement les assistants de justice et les procédures de conciliation et de médiation. Les ordonnances auront, en outre, pour objet d'intégrer dans la fonction publique d'Etat le personnel pénitentiaire du territoire de la Polynésie française et de Mayotte et de supprimer le conseil du contentieux administratif des îles Wallis-et-Futuna pour rendre applicables les dispositions législatives du code de justice administrative.

Le paragraphe III de l'article prévoit la consultation des autorités locales concernées sur les projets d'ordonnances.

Enfin, le paragraphe IV fixe, conformément à l'article 38 de la Constitution, le délai pendant lequel le Gouvernement est habilité à légiférer par ordonnances, ainsi que le délai dans lequel il devra déposer le ou les projets de loi portant ratification. Le calendrier retenu est le suivant : publication des ordonnances avant douze mois à compter de la promulgation de la présente loi ; dépôt des projets de loi de ratification quinze mois après cette promulgation.

La Commission a adopté l'article 43 sans modification.

Article 44 (nouveau)
(art. 140 du code minier)

Compétence du procureur de la République pour ordonner la destruction
des matériels ayant servi à commettre une infraction au code minier

L'article 140 du code minier précise que les infractions aux dispositions du livre premier de ce code et des textes pris pour leur application sont constatées par des procès-verbaux adressés au parquet.

Introduit par le Sénat en première lecture sur amendement de M. Georges Othily, cet article donne compétence au procureur de la République pour ordonner la destruction des matériels ayant servi à commettre ces infractions, dès lors qu'il n'existe pas de mesures techniques raisonnablement envisageables pour empêcher définitivement leur renouvellement.

De fait, il s'agit ainsi de remédier aux difficultés rencontrées pour neutraliser des matériels d'orpaillage clandestins utilisées dans les exploitations minières illicites en Guyane. Donnant un avis favorable à l'adoption de cet amendement, le Ministre de la justice a, en effet, indiqué en séance publique que les matériels pourront donc désormais être détruits sur place « alors qu'à l'heure actuelle, l'Etat français est obligé de saisir le matériel, de la ramener à Cayenne, où il est en général volé et revendu ».

La Commission a adopté l'article 44 sans modification.

*

* *

La Commission a adopté l'ensemble du projet de loi ainsi modifié.

En conséquence, la commission des Lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République vous demande d'adopter le projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice (n° 154) modifié par les amendements figurant au tableau comparatif ci-après.

N° 0157 -  Rapport de M. Jean-Luc Warsmann sur le projet de loi d'orientation et de programmation pour la justice (Sénat, 1ère lecture)

1 () Lorsque la peine prononcée est inférieure ou égale à dix ans ou que la peine restant à subir est inférieure à trois ans.

2 () Article D. 417 du code de procédure pénale.

3 () Enregistrement des conversations, vérification des numéros composés, écoutes simultanées par des surveillants.

4 () Loi n° 2001-624 du 17 juillet 2001 portant diverses dispositions d'ordre social, éducatif et culturel.

5 () « La France face à ses prisons », rapport n° 2521 de M. Jacques Floch fait au nom de la commission d'enquête sur la situation dans les prisons françaises, juin 2000.

6 () « L'organisation des soins aux détenus », rapport conjoint de l'inspection générale des services judiciaires et de l'inspection générale des affaires sociales, juin 2001.

7 () Il convient de rappeler que, sous la précédente législature, à l'initiative du rapporteur, a été adopté à l'unanimité un amendement à la loi relative à l'action publique puis à la loi du 15 juin 2000 sur la présomption d'innocence autorisant les députés et les sénateurs à visiter à tout moment les établissements pénitentiaires, ainsi que les locaux de garde à vue, les centres de rétention et les zones d'attente.

8 () Article 122-1 du code pénal : « n'est pas pénalement responsable la personne qui était atteinte au moment des faits d'un trouble psychique ou neuro-psychique ayant aboli son discernement ou le contrôle de ses actes.

La personne qui était atteinte au moment des faits d'un trouble psychique ayant altéré son discernement ou entravé le contrôle de ses actes demeure punissable ; toutefois, la juridiction tient compte de cette circonstance lorsqu'elle détermine la peine et en fixe le régime. »

9 () Article L. 342 du Code de la Santé publique, auquel fait référence l'article D. 398 du code de procédure pénale pour les détenus atteints de troubles mentaux.

10 () D'après le rapport conjoint des inspections générales, on dénombrait en 1999 20 évasions pour 56 834 extractions en hôpital général, contre 19 évasions pour 600 à 700 hospitalisations d'office.

11 () Quatre UMD existent actuellement, à Villejuif, Montfavet, Cadillac et Sarreguemines, représentant au total 416 lits d'hospitalisation.

12 () Un schéma national d'hospitalisation des détenus a prévu la création d'unités d'hospitalisation sécurisées inter-régionales (UHSI) destinées à accueillir les hospitalisations des détenus en dehors des situations d'urgence. D'ici la fin de l'année 2003, 8 unités seront créées offrant une capacité totale de 182 lits.

13 () Renuméroté dans le nouveau code de la santé publique à l'article L. 3213-1.

14 () Décret n° 2002-479 du 3 avril 2002.

15 () « Le travail à la peine : contrôle budgétaire de la Régie industrielle des établissements pénitentiaires ».

16 () Arrêté du 7 Avril 1972 modifié fixant la liste des diplômes ou certificats exigés des candidats aux concours externes d'entrée à l'École nationale d'administration.

17 () M. Christian Cointat, Rapport sur l'évolution des métiers de la justice, Sénat, 2001-2002, n° 34.

18 () Cette disposition a été introduite par la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000.

19 () Cf. articles 53-1 et 75 du code de procédure pénale introduits par la loi n° 2000-516 du 15 juin 2000.

20 () Cité page 91 du rapport n° 53 de M. Christian Estrosi sur le projet de loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure.

21 () Cf. article 114 du code de procédure pénale.

22 () Cf. page 103. 2000 est la dernière année dont les données sont disponibles.

23 () Page 22 du rapport. Présidée par M. Paul Bouchet, la commission a rendu son rapport au Garde des Sceaux en mai 2001.

24 () Source, annuaire statistique de la justice 2002, page 133.

25 () Il s'agit du : 0 810 09 86 09 géré par l'Institut National d'Aide aux Victimes (INAVEM).

26 () Modifié par le décret n° 2001-728 du 31 juillet 2001.

27 () Amiens, 8 août 1974. Voir le recueil Dalloz,1974, sommaire 122.


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