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N
° 3805

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ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

TREIZIÈME LÉGISLATURE

Enregistré à la Présidence de l’Assemblée nationale le 12 octobre 2011.

RAPPORT

FAIT

AU NOM DE LA COMMISSION DES FINANCES, DE L’ÉCONOMIE GÉNÉRALE ET DU CONTRÔLE BUDGÉTAIRE SUR LE PROJET DE loi de finances pour 2012 (n° 3775),

PAR M. Gilles CARREZ,

Rapporteur Général,

Député.

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ANNEXE N° 40 

SÉCURITÉ

Rapporteur spécial : M. Michel DIEFENBACHER

Député

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SYNTHÈSE 7

INTRODUCTION 9

I.– 2002-2011 : UNE POLITIQUE VOLONTARISTE ET INNOVANTE 11

A.– L’ENGAGEMENT DE MOYENS TECHNIQUES NOUVEAUX 11

1.– Le développement de la police technique et scientifique 11

a) Les fichiers d’indices 11

b) L’activité de recueil et de traitement des indices 12

c) Les structures de police technique et scientifique 14

d) Les propositions de la Cour des comptes 14

2.– D’autres moyens modernes au service de la sécurité 15

a) La vidéoprotection 15

b) La lecture automatisée des plaques d’immatriculation (LAPI) 17

B.– UNE « REFONDATION » DES RELATIONS ENTRE POLICE ET GENDARMERIE 18

1.– Le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur 18

2.– Les redéploiements des zones de compétences 19

3.– La mutualisation des fonctions 21

a) Mutualisation des fonctions support 22

b) Mutualisation opérationnelle 26

4.– Vers une harmonisation des conditions : la « parité globale » 27

C.– UNE CONSTANTE ADAPTATION DES STRUCTURES 29

1.– La réorganisation de la gendarmerie 29

2.– Les nombreuses réorganisations dans la police 30

a) Répondre à une délinquance multiforme 30

b) La réorganisation de la police dans le cadre des bassins de vie : la police d’agglomération 33

c) La création de la direction centrale du Renseignement intérieur 34

d) L’adaptation constante des moyens de sécurisation 35

D.– DES RÉSULTATS INCONTESTABLES 37

1.– Une baisse sensible de la délinquance et une forte augmentation des taux d’élucidation 38

a) Des résultats remarquables 38

b) Un surprenant rapport de la Cour des comptes 40

c) L’amélioration des taux d’élucidation 42

2.– L’amélioration de la disponibilité opérationnelle 43

II.– LES MOYENS ET LA GESTION BUDGÉTAIRES ONT CONSIDÉRABLEMENT ÉVOLUÉ DEPUIS 2002 45

A.– LE TEMPS DE LA REMISE À NIVEAU : LA LOPSI 1 (2002-2007) 45

1.– Une exécution très positive concernant la police nationale 45

2.– Un bilan satisfaisant s’agissant de la gendarmerie nationale 46

B.– LE TEMPS DE LA RÉVISION GÉNÉRALE DES POLITIQUES PUBLIQUES, DEPUIS 2007 47

1.– La révision générale des politiques publiques 47

a) Les objectifs 47

b) Les résultats 48

2.– La recherche d’une optimisation des moyens 49

a) Pression de la masse salariale, diminution des effectifs, et affaiblissement des moyens de fonctionnement et des investissements 49

b) La réorganisation du dispositif de formation 50

c) La restructuration des moyens de maintien de l’ordre 51

C.– LE PROJET DE BUDGET DE LA SÉCURITÉ POUR 2012 53

1.– L’exécution 2011 et le plan de mobilisation 53

a) Des économies sur les rémunérations 53

b) Le plan de mobilisation 54

2.– Un aménagement de la programmation triennale 55

3.– La maîtrise des charges de personnels 57

a) Les rémunérations 57

b) Les effectifs 59

4.– Les moyens de fonctionnement et les investissements 60

a) Les crédits de fonctionnement et d’investissement de la police 60

b) Les moyens de fonctionnement et les investissements de la gendarmerie 62

CONCLUSION 65

COMPTE RENDU DE LA COMMISSION ÉLARGIE DU 25 OCTOBRE 2011 À 21H00 66

EXAMEN EN COMMISSION 93

ANNEXE 1 : LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL 95

ANNEXE 2 : RAPPORT D’ENQUÊTE DE LA COUR DES COMPTES SUR LA REDÉFINITION DES ZONES DE COMPÉTENCE DE LA POLICE ET LA GENDARMERIE NATIONALES 97

ANNEXE 3 : RAPPORT D’ENQUÊTE DE LA COUR DES COMPTES SUR LA MUTUALISATION ENTRE LA POLICE ET LA GENDARMERIE NATIONALES 273

L’article 49 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

Au 10 octobre 2011, 100 % des réponses concernant le programme Gendarmerie nationale et 100 % des réponses concernant le programme Police nationale, étaient parvenues au Rapporteur spécial.

SYNTHÈSE

Le montant des crédits de la mission Sécurité inscrits dans le projet de loi de finances pour 2012 s’élève à 17,17 milliards d’euros en autorisations d’engagement et 17,06 milliards en crédits de paiement, ces derniers progressant de 1,53 % par rapport à 2011.

Ces dotations sont adaptées à un cadrage budgétaire global contraignant. La progression des crédits résulte pour l’essentiel du dynamisme de la masse salariale et surtout des contributions au compte d’affectation spéciale des Pensions. Les crédits de personnel (titre 2) sont prévus en progression de 2,04 %, par rapport à 2011. La progression des seules rémunérations d’activité est strictement contenue avec une augmentation de 0,10 % sur le programme Police nationale et une baisse de 1,24 % sur le programme Gendarmerie nationale. Les pensions de retraite progressent pour leur part de 5,6 %. Elles ont augmenté de 32 % depuis 2007.

La programmation triennale 2011-2013 n’est pas totalement respectée puisque des abondements interviennent pour renforcer la capacité opérationnelle des services. Il est donc confirmé que le dynamisme des dépenses de rémunérations a pour effet la limitation des autres moyens (fonctionnement et investissement), en particulier dans la police.

En conséquence, la part des crédits de personnel, déjà très élevée, sera encore en augmentation en 2012 pour représenter, sur le programme Police nationale, près de 90 % des dotations, et sur le programme Gendarmerie nationale près de 85 % du total. Les crédits hors personnel de la mission sont prévus en diminution de 1,86 % en 2012, malgré des abondements exceptionnels, et ne représentent maintenant que moins de 13 % des crédits sur l’ensemble de la mission.

Le contexte budgétaire contraint impose donc une démarche de performance renouvelée que l’on peut résumer, comme l’an dernier, dans les termes suivants : faire mieux pour moins cher, alors que des progrès considérables ont déjà été faits depuis 10 ans.

Les crédits du programme Police nationale s’élèveront en 2012 à 9,28 milliards d’euros en autorisations d’engagement (+ 1,51 %), et à 9,21 milliards d’euros en crédits de paiement (+ 1,40 % par rapport à 2011). Le plafond d’ETPT est de 143 714 (en diminution de 1 573 ETPT nets des transferts, par rapport à 2011).

Les crédits du programme Gendarmerie nationale s’élèveront en 2012 à 7,89 milliards d’euros en autorisations d’engagement (+ 2,95 %), et à 7,85 milliards d’euros en crédits de paiement (+ 1,69 %). Le plafond d’ETPT est de 95 883 (soit une baisse nette des transferts de 1 033 ETPT par rapport à 2011).

*

* *

Le Rapporteur spécial considère que trois priorités doivent être clairement identifiées afin de poursuivre et amplifier les progrès déjà réalisés en matière de gestion :

– la mobilisation des avancées scientifiques et technologiques au service de l’investigation judiciaire. Cette évolution est d’autant plus nécessaire que la réforme de la garde à vue rend plus difficile la recherche de l’aveu et que dans ces conditions seul l’établissement de preuves irréfutables permettra d’améliorer encore le taux d’élucidation ;

– la mutualisation des moyens de tous les services, en particulier la police et la gendarmerie. Autant la maîtrise de deux forces séparées s’impose, autant leur coopération est une nécessité pour des raisons opérationnelles mais aussi pour des raisons budgétaires. La performance de la gestion et en particulier la maîtrise des charges salariales est une condition incontournable de la poursuite d’une amélioration des résultats ;

– l’amélioration de la disponibilité des services et en particulier le renforcement de la présence des policiers et des gendarmes sur la voie publique. Nos concitoyens le demandent. Il est essentiel de répondre à cette attente, ce qui nécessite une adaptation constante des structures et de l’organisation du temps de travail.

INTRODUCTION

Depuis 2002 des changements très profonds sont intervenus dans la politique conduite en matière de sécurité publique. Ces changements concernent aussi bien l’organisation des actions que leurs méthodes et leurs moyens.

La restructuration des services, avec le rattachement de la gendarmerie au ministère de l’Intérieur, le redéploiement des zones de compétence, la mutualisation des moyens, la fusion des services de renseignement, la création d’une police d’agglomération, la généralisation des communautés de brigades, la réorganisation des chaînes de commandement, ont permis d’apporter des réponses rapides aux évolutions d’une délinquance plus mobile, plus professionnelle, plus imprévisible et faisant de plus en plus souvent appel à des moyens technologiques nouveaux.

La modernisation des méthodes par le recours systématique aux moyens de la police scientifique, par le développement de la vidéosurveillance, a littéralement révolutionné les moyens d’investigation, accru l’efficacité des services et permis le passage d’une culture de l’aveu à une culture de la preuve.

Le renforcement des moyens matériels, des véhicules, des systèmes radios, de l’informatique a accompagné la revalorisation de la condition des agents. Policiers et gendarmes gardent leurs statuts particuliers. Si la « fusion » des corps est clairement exclue, la « parité globale » est une nécessité unanimement soulignée.

Cette politique a porté ses fruits en termes de diminution de la délinquance, d’amélioration des taux d’élucidation et de renforcement de la présence sur la voie publique. Elle a par ailleurs permis une baisse remarquable du nombre des accidents et des tués sur les routes.

Le Rapporteur spécial a tenu à préciser cet excellent bilan dans une première partie du rapport.

Depuis 2008, la révision générale des politiques publiques, dont le domaine de la sécurité n’a pas lieu d’être exonéré, conduit, dans la police et la gendarmerie comme dans les autres services de l’État, à une remise en question très profonde des pratiques budgétaires antérieures.

Alors que les effectifs sont revus à la baisse, la masse salariale continue d’augmenter, ce qui nécessite une recherche constante de l’optimisation de la gestion.

Concilier la performance opérationnelle et la contrainte budgétaire est l’enjeu principal des prochaines années.

I.– 2002-2011 : UNE POLITIQUE VOLONTARISTE ET INNOVANTE

Depuis 2002, la politique de sécurité constitue une priorité gouvernementale majeure. Le Gouvernement ne s’est pas contenté de renforcer les moyens des services. Il a tenu à revoir en profondeur les structures, les méthodes et la gestion. La police et la gendarmerie sont progressivement passées d’une politique quantitative à une politique qualitative, tournée vers la performance.

Cet effort a porté et les résultats sont à la mesure des moyens mis en œuvre : baisse de la délinquance, amélioration des taux d’élucidation, renforcement de la disponibilité opérationnelle, amélioration de la sécurité routière.

Il convient donc, dans un premier temps, de dresser le bilan de dix ans d’une politique particulièrement volontariste et innovante.

Le Rapporteur spécial souhaite insister d’abord sur les progrès techniques qui ont été mis en œuvre pour l’amélioration des méthodes employées par la police et la gendarmerie. Il évoquera ensuite la forte politique d’adaptation des structures, le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur, les redéploiements territoriaux et la réponse toujours renouvelée aux formes évolutives de la délinquance.

A.– L’ENGAGEMENT DE MOYENS TECHNIQUES NOUVEAUX

Les progrès techniques ont été remarquables depuis 2002. Il convient de distinguer la police technique et scientifique des autres facteurs de progrès.

1.– Le développement de la police technique et scientifique

a) Les fichiers d’indices

La police technique et scientifique (PTS) a connu une montée en puissance importante, avec le développement du fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) et du fichier automatisé des empreintes génétiques (FNAEG), ainsi que la création de l’institut national de la police scientifique (INPS) et de la chaîne de génotypage de masse de Lyon.

Cette orientation est essentielle pour la sécurité des personnes et des biens : la recherche des auteurs d’infractions est facilitée et ceux-ci savent que l’on peut les retrouver, des années après, à raison des empreintes qu’ils ont laissées sur les scènes de crime. Elle est essentielle à la police judiciaire pour permettre le passage d’une culture de l’aveu à celle de la preuve, et ainsi prévenir les éventuelles erreurs judiciaires.

Le FAED a été créé en 1987 et le FNAEG en 1998. Ces fichiers ont connu une très forte extension depuis 2002.

Les fichiers d’empreintes permettent aux forces de sécurité intérieure de disposer des preuves techniques et contribuent fortement à l'élucidation des crimes et délits. Les fichiers FAED et FNAEG s’inscrivent dans le cadre d’une modernisation des systèmes d’information et d’investigation et permettent la résolution d’affaires de plus en plus nombreuses.

Le FAED permet l’identification des personnes et des traces papillaires relevées sur les lieux d’infractions, et contenait au 31 juillet 2011 3,98 millions de références individuelles à comparer à 1,5 million en 2002.

Le FNAEG était initialement destiné à recevoir les empreintes génétiques dans le seul cadre de la délinquance sexuelle, il a vocation aujourd’hui à contenir le génotype de tout auteur d’une infraction qualifiée de crime ou délit et punie de peine d’emprisonnement, et de tout condamné définitif pour l’une de ces infractions. En juillet 2011, la base contenait plus de 1,8 million de profils à comparer à 4 000 profils en 2002, il avait permis 54 705 rapprochements à comparer à 2 rapprochements en 2002.

b) L’activité de recueil et de traitement des indices

L'activité de police scientifique couvre deux volets, d'une part le recueil des traces et indices sur une scène d'infraction qui est principalement du ressort des services de police technique et scientifique (PTS) rattachés aux services d'enquête, d'autre part, l'analyse de ces prélèvements qui est de la responsabilité des services de deuxième niveau (services régionaux d’identité judiciaire, services locaux d’identité judiciaire et services locaux de police technique) ainsi que des laboratoires de police scientifique (service de niveau 3).

Par ailleurs, sur l’ensemble du territoire 9 926 policiers polyvalents exercent ponctuellement des missions de PTS.

Le nombre d’individus ayant fait l’objet d’une signalisation papillaire par la police nationale s’est élevé, en 2010, à 669 879 (contre 662 032 en 2009, soit une progression de + 1,18 %), tous types d’infractions confondus. Au premier semestre 2011, 361 508 individus ont été signalisés.

Le taux de signalisation établi à partir du nombre de personnes mises en cause est de 83,51 % pour l’année 2010 (contre 80,42 % en 2009, soit une progression de + 3,09 %) et de 86,51 % pour le 1er semestre 2011.

Le nombre de signalisations biologiques s’élève à 221 914 en 2010 (contre 228 839 en 2009, soit une baisse de 3,03 %). Au cours du 1er semestre 2011, 114 715 signalisations biologiques ont été réalisées.

Le recours à la PTS devient banal sur les scènes d’infraction. Le nombre de transports (pour la police nationale) pour les cambriolages s’est élevé en 2010 à 176 675, soit un taux de transport de 93,54 %. Au cours du 1er semestre 2011, 93 472 transports ont été effectués sur des cambriolages, soit un taux de transport de 96,27 %. Le nombre de transports pour les découvertes de véhicules volés était de 31 353 en 2010, soit un taux de transport de 41,45 %. Au cours du 1er semestre 2011, 16 179 transports pour des découvertes de véhicules volés ont été effectués, soit un taux de transport de 42,50 %.

L’effort très important consenti en matière de transports sur les scènes d’infraction se traduit par une augmentation des traces relevées : de 6,20 % pour le nombre de traces papillaires relevées par les services de la police nationale en 2010 (281 594 traces en 2010 contre 264 919 en 2009) et 151 327 traces papillaires ont été relevées au cours du 1er semestre 2011 ; de 27,80 % pour le nombre de traces biologiques relevées par les services de la police nationale en 2010 (101 304 traces en 2010 contre 79 246 en 2009). 63 857 traces biologiques ont été relevées au cours du 1er semestre 2011.

Le nombre de traces papillaires exploitables (41 392 en 2010 et 30 177 en 2009) connaît une hausse de 37,16 %. 24 666 traces papillaires exploitables sont dénombrées au cours du 1er semestre 2011.

La forte activité déployée par les services en matière de police technique et scientifique de masse (alimentation des bases de comparaison et recueil des traces sur les scènes d’infraction) se traduit par des résultats directement exploitables par les services d’enquête. En 2010, l’exploitation des traces papillaires recueillies a conduit à l’identification de 26 315 traces papillaires relevées sur des scènes d’infraction (contre 19 075 en 2009, soit une augmentation de 37,96 %) ; 14 536 individus (contre 10 375 en 2009, soit une augmentation de 40,11 %). Au 1er semestre 2011 : 15 442 traces papillaires ont été identifiées et 8 464 individus identifiés.

Par ailleurs, au cours du 1er semestre 2011, les services de PTS spécialisés en traces technologiques ont exploité 5 501 supports en téléphonie, 1 360 supports en informatiques et 1 535 vidéos.

Le renforcement des équipements des services locaux et territoriaux se traduit par des développements techniques dans les services territoriaux pour apporter aux enquêteurs et aux magistrats, au plus près du terrain et en amont des travaux menés dans les laboratoires, une analyse de premier niveau dans les différents domaines que sont les traces papillaires, aussi bien par la police judiciaire que par la sécurité publique, les documents, les écritures manuscrites, la balistique, le portrait-robot et l’odorologie.

À la formation des personnels se sont ajoutées la définition de plateaux techniques « type » et la préparation d’un marché d’équipement (publié fin juillet 2011). Ces investissements permettront à la fois une modernisation des équipements détenus et le développement des techniques disponibles au sein des différents services. Pour les services territoriaux de la DCPJ, des équipements nécessaires à la mise en place de plateaux techniques « type » orientés « traces technologiques » ont été mis au point et un marché d'équipements destiné à faciliter ces acquisitions été publié fin juillet 2011.

c) Les structures de police technique et scientifique

L’institut national de police scientifique (INPS), créé par l’article 58 de la loi n° 2001-1062 du 15 novembre 2001 relative à la sécurité quotidienne, est l’établissement public administratif qui fédère (depuis 2004) les laboratoires de police scientifique (LPS) de Lille, Lyon, Marseille, Paris et Toulouse, le laboratoire de toxicologie de police scientifique et le service central des laboratoires. Son siège est situé à Écully dans le Rhône. L’organisation de l’INPS tend à une relative spécialisation des laboratoires.

L’INPS a pour mission de procéder à tous les examens, recherches et analyses d’ordre scientifique et technique qui lui sont demandés par les autorités judiciaires et les services de la police et de la gendarmerie nationales, aux fins de constatation des infractions pénales et d’identification de leurs auteurs.

Quant à la gendarmerie, le pôle judiciaire de la gendarmerie nationale (PJGN) dispose de l’institut de recherche criminelle de la gendarmerie nationale (IRCGN) et du service technique de recherches judiciaires et de documentation (STRJD). L’IRCGN réalise des examens scientifiques et des expertises, sur un seul site. Avec l’unité nationale d’investigation criminelle (UNIC) qui dispose d’un laboratoire mobile et l’unité gendarmerie d’identification des victimes de catastrophes (UGIVC), l'IRCGN offre également des capacités de projection et peut assister les enquêteurs sur le terrain (crimes complexes, catastrophes...) par l'envoi de personnels hautement qualifiés et de matériels adaptés et spécialisés.

L’IRCGN contribue à l’alimentation du FNAEG : le service central d’analyses génétiques (SCAGGEND) a analysé 64 600 échantillons en 2010, tant pour les traces que pour les individus. Pour répondre aux enjeux de lutte contre la délinquance de masse, une nouvelle chaîne de génotypage de masse des traces de scènes d’infraction sera fonctionnelle au second semestre 2011 (36 000 analyses par an).

La question de la coexistence de structures de police scientifique différentes au sein de la police et de la gendarmerie pose au moins les problèmes de leur coordination, de la mutualisation de leurs moyens, voire de leur unification sous une autorité unique.

d) Les propositions de la Cour des comptes

La Cour des comptes, dans le rapport sur la mutualisation des moyens entre la police et la gendarmerie nationales, qu’elle a réalisé à la demande de la commission des Finances en application de l’article 58-2° de la LOLF et transmis le 14 octobre 2011, a abordé ces questions (1).

Dans le domaine de la police technique et scientifique, la Cour propose de relancer le fonctionnement du conseil supérieur de la police technique et scientifique (CSTP) ; d’assurer une meilleure complémentarité des laboratoires et des structures de deuxième niveau, notamment celles implantées dans les villes chefs-lieux de département ; de définir dans un cadre mutualisé les réponses aux exigences d’accréditation et de normalisation des installations ; de rapprocher les recensements de leurs équipements faits par les deux forces afin que les décisions soient prises dans un souci d’efficacité et d’économie des moyens ; de développer la mutualisation des achats en matière d’équipement, y compris ceux destinés aux laboratoires ; et d’établir un schéma directeur portant sur le développement des applications et bases de données de police technique et scientifique afin de favoriser la convergence de celles qui ne sont pas encore mutualisées ainsi que la programmation de nouvelles bases et applications communes.

2.– D’autres moyens modernes au service de la sécurité

Parmi ces moyens modernes, le Rapporteur spécial souhaite saluer le développement de la vidéoprotection qui s’inscrit par ailleurs dans un partenariat de sécurité avec les polices municipales et la lecture automatisée des plaques d’immatriculation.

a) La vidéoprotection

La vidéoprotection a connu un développement très important depuis 2002 puisque, sur 77 873 autorisations préfectorales délivrées depuis 1997 et jusqu’en 2006, 22 584 (soit environ 30 %) l’ont été en 2004, 2005 et 2006.

Le Président de la République a décidé en 2009 d’accélérer la mise en place du programme national d'équipement en vidéoprotection. Il a demandé qu’aux projets financés chaque année sur les crédits du Fonds interministériel de prévention de la délinquance soit ajouté, en 2009 et 2010, un programme exceptionnel de mise en place de 75 systèmes municipaux « types » de vidéoprotection urbaine.

Les rapports de l’INHES (mai 2008) et de l’IGA/IGPN/IGN (juillet 2009) font apparaître que la délinquance a baissé en moyenne plus fortement dans les communes équipées de dispositifs de vidéoprotection de voie publique que dans celles qui n’en disposent pas. Les atteintes à l’intégrité physique y ont, en outre, été mieux contenues. L’effet des caméras est encore plus accentué en zone rurale.

Dans un deuxième temps, lors de la présentation du plan national de prévention de la délinquance, le 2 octobre 2009, le Premier ministre a précisé les mesures complémentaires suivantes : l’achèvement en 2010 du déploiement des 75 systèmes municipaux types et poursuite du développement des dispositifs prévus dans les établissements scolaires les plus exposés ; l’extension et l’amplification, à partir de 2010, du déploiement de la vidéoprotection à d’autres applications possibles et pertinentes, dans le respect des libertés publiques (parties communes des immeubles, commerces, transports...), et enfin le développement d’autres projets de vidéoprotection présentés chaque année par les maires.

L’accélération des mesures de déploiement de la vidéoprotection et la mise en œuvre de nouvelles orientations, dans le cadre du plan national de prévention de la délinquance, a pu être constatée en 2010.

À la fin du 1er semestre 2011, pour la seule zone de compétence de la sécurité publique, 318 communes étaient pourvues de caméras dédiées à la surveillance de la voie publique (+ 7,55 % au cours des six premiers mois de l’année). 127 villes disposent en outre d’un centre de supervision urbain (CSU), dont 96 raccordés aux services de la police nationale.

Le déploiement des dispositifs de vidéoprotection dans les établissements scolaires les plus exposés est en cours, avec, pour ce qui touche au ressort de la sécurité publique, 76 établissements publics locaux d’éducation (EPLE) déjà équipés dans le courant de l’année 2010.

La gendarmerie est engagée avec les élus dans le développement de la vidéoprotection. À cet effet, elle s'appuie notamment sur ses 146 référents sûreté pour conseiller les collectivités territoriales dans la réalisation de leurs projets, au regard des problématiques de délinquance et de sécurité locales. À ce jour, en zone de compétence gendarmerie, 880 communes ont fait le choix de la vidéoprotection. Cela représente un total de 8 100 caméras, dont 25 sont déportées entre un centre de supervision urbain et une brigade territoriale ou un centre opérationnel et de renseignement de la gendarmerie (CORG).

Depuis 2007, l'État prend en charge, via le fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), les raccordements vers les unités de gendarmerie et les services de police ainsi qu'une partie des matériels.

Il est à noter que le plan de vidéoprotection pour Paris est en cours de réalisation. Il prévoit la mise en œuvre d’un système d’exploitation d’images vidéos provenant de 1 106 caméras de voie publique, déployées en fonction des objectifs de sécurité, sur Paris et reliées à 55 sites d’exploitation par 400 km de fibre optique.

2 500 opérateurs spécifiquement formés exploiteront les images de ces caméras ainsi que des quelque 10 000 caméras des réseaux partenaires (RATP, SNCF, grands magasins, musées). Le système permet, outre l’archivage numérique de séquences réquisitionnées, le stockage des images durant 30 jours.

Il est étonnant que certains mettent en doute l’efficacité des dispositifs de vidéosurveillance, qui présentent par ailleurs l’avantage majeur d’organiser et d’approfondir le nécessaire partenariat entre les services de l’État, chargés de la sécurité publique et les autres acteurs de la sécurité, en particulier les polices municipales et les entreprises de transport public. Sur le réseau RATP-SNCF, la vidéoprotection et l’action de la police régionale des transports ont permis une diminution spectaculaire de la délinquance dans les réseaux ferrés souterrains et les autobus.

b) La lecture automatisée des plaques d’immatriculation (LAPI)

Le programme de lecture automatique des plaques d’immatriculation (LAPI), qui associe la police nationale, la gendarmerie et les douanes, assure la coordination et l’évaluation de tous les projets d’expérimentation de dispositifs LAPI fixes ou mobiles mis en œuvre sur le fondement de l’article 26 de la loi du 18 mars 2003 pour la sécurité intérieure.

Différentes expérimentations de dispositifs LAPI (embarqués sur des véhicules de patrouille ou dans un hélicoptère de la gendarmerie, mobiles sur trépied, piétons ou fixes en milieu urbain et autoroutier) ont été menées depuis décembre 2007. Dans le cadre de ces expérimentations, et jusqu’à l’automne dernier, plus de 5 millions de plaques avaient été lues par les 11 systèmes LAPI expérimentaux embarqués dans les véhicules de police, de gendarmerie ou des douanes ; 623 véhicules volés ont été retrouvés, 375 véhicules mis sous surveillance ont été détectés et 441 individus ont été interpellés.

La phase de déploiement devrait se terminer au cours du mois de novembre 2011. 263 véhicules seront alors équipés pour un coût total de 4 417 millions d’euros. Au 1er octobre 2011, 31 véhicules restaient encore à équiper.

Les résultats probants des capteurs LAPI mobiles expérimentés ont permis de pérenniser le dispositif en équipant de nouveaux véhicules sérigraphiés afin d’améliorer l’efficacité des patrouilles de police et de renforcer notamment la lutte contre le terrorisme, la criminalité organisée ainsi que le vol et le recel de vol de véhicules.

Bien que prévu à l’origine pour détecter les véhicules volés, il peut, tout en respectant le cadre réglementaire fixé à la LAPI, être également utilisé dans des cas bien spécifiques. Ainsi, un service en inscrivant localement le numéro de la voiture d’une personne disparue a pu retrouver celle-ci grâce à la LAPI.

B.– UNE « REFONDATION » DES RELATIONS ENTRE POLICE ET GENDARMERIE

Le rattachement organique de la gendarmerie nationale au ministère de l'Intérieur depuis le 1er janvier 2009 a permis aux deux forces de sécurité de développer de nouvelles synergies. Cette stratégie est empreinte à la fois de pragmatisme et de détermination, elle consiste en une mobilisation permanente des forces de sécurité contre toutes les formes d’insécurité et leur adaptation aux mutations des phénomènes de délinquance.

1.– Le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur

Le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur est l’aboutissement d’un processus engagé depuis le début de la précédente législature. Le ministre de l’Intérieur était, depuis 2002, responsable de l’emploi de la gendarmerie pour l’exercice de ses missions de sécurité intérieure. Depuis mai 2007, les ministères de l’Intérieur et de la Défense définissaient conjointement les moyens budgétaires de la gendarmerie et en assuraient le suivi, procédant aux mesures individuelles de manière concertée.

Le principe du rattachement de la Gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales (MIOMCT) a été annoncé par le Président de la République dans son discours du 29 novembre 2007. Ce rattachement traduit la volonté de lutter plus efficacement contre la délinquance en unifiant le commandement et en coordonnant mieux les moyens. Au demeurant les missions militaires ne représentent plus aujourd’hui que 2 % des moyens de la gendarmerie, tout le reste étant consacré à la sécurité publique.

Une première étape a été franchie le 1er janvier 2009 par le rattachement du budget de la Gendarmerie nationale qui est devenu le programme 152 au budget du ministère de l’Intérieur au sein de la mission sécurité composée également du programme 176 Police nationale. Une deuxième étape a été franchie par l’adoption de la loi n° 2009-971 du 3 août 2009 qui consacre dans son article 1er le rattachement effectif de la gendarmerie au ministère de l’Intérieur et précise son articulation avec le ministère de la Défense :

– la gendarmerie reste une arme. Elle conserve son statut militaire. Elle continue à relever du ministre de la Défense en matière de discipline. Soumise à l’autorité du ministre de l’Intérieur en matière de sécurité publique et à la direction du parquet en matière judiciaire, elle continue d’exercer ses missions militaires, y compris les interventions extérieures. Il n’est pas question d’aller vers la création d’une « force unique » ;

– en matière de sécurité publique (ordre public et lutte contre la délinquance), le ministre de l’Intérieur fixe l’organisation, le budget et les règles d’intervention de la gendarmerie, comme il le fait pour la police nationale. En matière d’ordre public, le ministre de l’Intérieur et les préfets n’ont plus recours aux réquisitions pour utiliser les moyens de la gendarmerie. La direction générale de la gendarmerie nationale devient un service du ministère de l’Intérieur ;

– les deux forces sont appelées à resserrer leur coopération et à mutualiser, autant que faire se peut, leurs moyens dans un souci à la fois d’efficacité opérationnelle et de rationalisation budgétaire.

2.– Les redéploiements des zones de compétences

La majorité a entrepris dès 2002 de procéder à des redéploiements territoriaux de façon à harmoniser les zones de compétence de la gendarmerie et de la police.

● Conduite entre 2003 et 2005 en métropole et achevée outre-mer en 2009 (à La Réunion), cette opération a consisté à élargir les zones de compétence de la Police nationale à la périphérie des grandes villes et à donner une compétence générale à la Gendarmerie nationale sur les zones rurales, y compris les villes moyennes, jusqu’à 20 000 habitants.

Le redéploiement a concerné 343 communes relevant de 66 départements et regroupant près de 1,8 million d’habitants :

– 222 communes ont été transférées à la Police nationale (pour environ 1 million d’habitants), par extension de 81 circonscriptions de sécurité publique et création de 3 nouvelles circonscriptions ;

– 121 communes ont été transférées à la Gendarmerie nationale (pour environ 800 000 habitants), par suppression de 41 circonscriptions de sécurité publique, ou resserrement de l’assise territoriale de 21 autres.

Les redéploiements entre zones supposaient un accompagnement dans le domaine immobilier, les gendarmes et leurs familles étant logés en caserne, à la différence des policiers. Ont donc été décidés :

– la prise à bail sur le marché locatif de logements supplémentaires pour les militaires affectés en renfort, dans l’attente de la réalisation des casernements et ensembles immobiliers nécessaires à leur regroupement ;

– l’extension ou la création de locaux de service et techniques pour les unités renforcées ou créées ;

– enfin, le changement d’affectation, à titre onéreux, de douze commissariats, au profit du ministère de la Défense, pour 7,5 millions d’euros, et de cinq brigades de gendarmerie au profit du ministère de l’Intérieur, pour 4,5 millions d’euros.

En 2007, ces mutations domaniales ont toutes été réalisées.

Le Rapporteur spécial préconise toujours de poursuivre la politique de redéploiement des circonscriptions de police et de gendarmerie et cette recommandation a également été formulée dans le cadre de la RGPP. En effet, il restait encore en mai 2011 42 circonscriptions de sécurité publique de moins de 20 000 habitants, au lieu de 47 un an plus tôt. Sur ces 42 circonscriptions, 7 sont le siège d’une préfecture (Foix, Basse-Terre, Mende, Privas, Guéret, Tulle, Digne-les-bains). Les plus petites sont Le Touquet Paris Plage (5 438 habitants en 2011) et Coutances (9 896 habitants en 2011).

Port Saint-Louis du Rhône, Graulhet, Tarascon, Beaucaire, Pertuis et Montbrison ont été rattachés à des circonscriptions plus importantes ou bien transférées en zone de gendarmerie. Il est à noter que, malgré ces transferts, le nombre de ces villes peine à diminuer, car de nouvelles circonscriptions rejoignent la liste par affaiblissement de leur population.

Une nouvelle vague de redéploiements a été déployée en 2007, dans le cadre de la mise en œuvre de la police d’agglomération. Indépendamment des mesures de réorganisation prises dans ce cadre, il convient de poursuivre cet effort qui vise à tenir compte des inéluctables évolutions démographiques.

Lors de son audition du 22 juin 2011 par la commission des Finances (2), le général Jacques Mignaux, directeur général de la Gendarmerie nationale, a considéré qu’il faut se poser la question de l’évolution de ce critère de population dans le cas de petites agglomérations, qui peuvent comprendre plus de 20 000 habitants, mais qui devraient cependant logiquement être transférées à la gendarmerie nationale. Il faut agir au cas par cas avec souplesse.

● Dans le rapport que la Cour des comptes a communiqué à la commission des Finances le 14 octobre 2011, et qui porte sur la redéfinition des zones de compétence de la police et de la gendarmerie nationales (3), la Cour observe notamment que des CSP de moins de 20 000 habitants, malgré un niveau de délinquance modeste, bénéficient d’une densité élevée de policiers au regard de leur population. La Cour préconise, qu’à l’avenir, les prochaines opérations de redéploiement portent particulièrement sur les petites CSP « isolées ».

Les conditions de prise en charge en 2011 par la gendarmerie de communes issues de telles CSP comme le niveau actuel de ses effectifs dans les communes provenant des CSP fermées de 2003 à 2006 montrent que, grâce à sa doctrine d’emploi et à son modèle d’organisation, elle est en mesure d’y exercer les missions de sécurité publique avec des moyens en personnels sensiblement inférieurs à ceux de la police nationale.

La Cour considère, comme la DGGN, que les critères d’instauration du régime de la police d’État, inscrits dans le décret du 16 septembre 1996, seraient à réviser. Elle recommande que soit étudiée la possibilité de porter le seuil de population à 50 000 habitants, voire davantage.

La Cour ajoute que l’instauration de nouveaux redéploiements entre les deux zones serait facilitée si l’on renonçait à rechercher, pour chaque force, un impact globalement compensé, en termes de population couverte comme d’effectifs. La recherche de cet équilibre, surtout s’il se fait à l’intérieur de chaque département, peut en effet bloquer des redéploiements qui permettraient un emploi globalement plus efficient des policiers et des gendarmes.

La Cour considère qu’il n’y a en effet pas de raison a priori pour que l’extension de la zone de police dans les grands pôles urbains et celle de la zone de gendarmerie dans les petites CSP, qui répondent à des logiques différentes, mobilisent des moyens équivalents au sein de chaque force. Le solde des emplois dégagés et mobilisés par ces opérations serait à évaluer au plan national, sans exclure des mouvements d’emplois d’un programme à l’autre, au sein de la mission Sécurité.

Le Rapporteur spécial estime que l’organisation des services doit être constamment adaptée aux évolutions très rapides de la délinquance, que le seuil de 20 000 habitants ne doit pas être regardé comme intangible, mais que l’engagement d’un nouveau programme de redéploiement nécessite un bilan précis des opérations conduites jusqu’ici et une étroite concertation avec les élus des communes concernées.

3.– La mutualisation des fonctions

Le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur trouve tout son sens dans le développement de structures mutualisées entre la police et la gendarmerie, non seulement en ce qui concerne les fonctions support, mais également en matière opérationnelle.

Il s’agit d’accroître les complémentarités, la mise en commun des compétences et des moyens. Tout en préservant leur identité, la police et la gendarmerie nationales approfondissent les mutualisations engagées et en étendent le principe à de nouveaux domaines, en cohérence avec les mesures engagées en matière de révision générale des politiques publiques (RGPP).

La recherche systématique de mutualisations des fonctions support a déjà permis d’identifier d’importants gisements d’économies. La mutualisation ou la réorganisation des fonctions support (systèmes d’informations et de communication, immobilier, achat public...) offre encore des perspectives de rationalisation qu’il convient d’approfondir.

a) Mutualisation des fonctions support

Trois domaines se prêtent tout particulièrement à la mutualisation des fonctions support : la politique d’achats groupés, la mutualisation des structures et les fichiers de police.

● La politique d’achats groupés est devenue systématique. Elle se traduit par la passation de marchés communs d’acquisition de matériels principalement en matière d’armement mais aussi dans le domaine des moyens mobiles. Les procédures sont pilotées, soit par la police nationale (pistolet automatique SIG Sauer, pistolet à impulsions électriques, munitions, boucliers pour le maintien de l'ordre, pièces détachées pour motocyclettes, pneumatiques, etc.), soit par la gendarmerie nationale (fusil de précision, gilet pare-balles à port apparent, lots de protection pour le maintien de l’ordre, kits de prélèvements biologiques, effets d’habillement adaptés pour les montagnards, etc.).

Les politiques d’achat groupés (avec la gendarmerie nationale, les services des douanes, l’administration pénitentiaire, et parfois la Préfecture Île-de-France) mises en œuvre en 2011 concernent essentiellement les domaines de l’armement, de la police technique et scientifique, des technologies et systèmes d’information et de communication, des moyens généraux, des moyens mobiles.

● À cette mutualisation des achats s’ajoute une mutualisation des structures permettant notamment la mise en commun de garages de maintenance automobile. Depuis 2008, 33 opérations ont été réalisées, entraînant la fermeture de 8 ateliers SGAP et d'un centre de soutien automobile de la gendarmerie (CSAG). Plus de 2 000 véhicules de la police nationale sont entretenus aujourd'hui dans les ateliers de la gendarmerie, soit environ 7 % du parc total de la police nationale et près de 700 véhicules de la gendarmerie nationale sont désormais soutenus par des ateliers SGAP. 36 personnels « police » travaillent en CSAG et 9 mécaniciens « gendarmerie » au sein des ateliers des SGAP. 67 opérations de ce type sont inscrites au calendrier prévisionnel jusqu’en 2015, dont 33 en cours d’étude ou de réalisation dès 2011. Elles entraîneront également des fermetures d’ateliers et des mouvements de personnels.

Le service de diffusion de la gendarmerie, implanté à Limoges, travaille également au profit d’unités de la police nationale. En 2011, la direction centrale de la sécurité publique a commandé l’impression de 10 millions d’avis d’information du procès-verbal électronique.

La maintenance des armes de la Gendarmerie nationale est assurée par le Centre technique de l’armement (CTA) de la Police nationale à Limoges.

Le centre de recherche, d’expertise et d’appui logistique (CREAL) regroupe sur un même site (Le Chesnay – 78) les laboratoires et départements de balistique, chimie, matériaux et textile de la gendarmerie et de la police au sein d'une structure commune, depuis septembre 2010. Il est chargé des études amont, des expertises dans le cadre des marchés publics (aide à l’élaboration des cahiers des clauses techniques particulières, analyse d’échantillons...) et plus largement du contrôle qualité, ainsi que de toute autre mission qui lui serait confiée en rapport avec sa technicité.

L’atelier central automobile (ACA), installé à Limoges, constitue un pôle commun de production et d’aménagement de séries limitées pour la police et la gendarmerie, il procède également aux études puis, le cas échéant, à l’installation d'équipements techniques opérationnels et de sécurité (pré-installation des équipements radio, vidéo, biométrie, matériels de mesure...) sur les véhicules. La structure équivalente de la gendarmerie, initialement installée à Rosny-sous-Bois, a intégré l’ACA.

La plate-forme d’harmonisation, d’analyse, de recoupement et d’orientation des signalements (PHAROS) est dédiée au traitement des signalements portant sur des messages et comportements illicites sur Internet, qu’il s’agisse de contenus racistes ou négationnistes, d’appels à la haine, de pédophilie ou d’incitations à commettre des crimes. Elle est composée à parité de policiers et de gendarmes et est pleinement opérationnelle depuis le début de l’année 2009. En 2011, 1 500 à 2 000 signalements par semaine sont parvenus sur le site internet dédié (77 646 signalements pour l’année 2010).

● La mutualisation progressive des fichiers de police a déjà été évoquée pour le FAED et le FNAEG. Pour le FNAEG, la mise en commun des moyens s’est concrétisée par une répartition des tâches entre police et gendarmerie nationales : la police nationale assure la gestion du traitement automatisé du fichier, la gendarmerie nationale assure la conservation des scellés avec le service central de préservation des prélèvements biologiques (SCPPB), deux chaînes de génotypage permettent de faire procéder aux analyses des profils d’individus par des laboratoires publics de la police ou de la gendarmerie.

La création de la base de données TPJ (ex ARIANE) a pour but de remplacer les fichiers STIC et JUDEX. dans leurs fonctions de recherches et de rapprochements criminels. Elle constitue un outil moderne d'aide à l'enquête utilisant des technologies innovantes (analyse textuelle, reconnaissance faciale, ...) et permet un suivi des phénomènes de délinquance dans une perspective opérationnelle. L'expérimentation de TPJ est prévue courant octobre 2011. L’exploitation technique de TPJ sera assurée par la gendarmerie au sein d'une plate-forme unique basée à Rosny-sous-Bois et son administration fonctionnelle s'effectuera sous l'autorité conjointe du DGPN et du DGGN au moyen d'une unité composée de policiers et de gendarmes. Les actuels fichiers des objets signalés (FOS et son équivalent police STIC - Objets), ainsi que le fichier des véhicules volés (FVV), en cours de refonte, seront remplacés par le fichier des objets et véhicules signalés (FOVeS).

Le fichier national des objectifs stupéfiants (FNOS) doit permettre à partir de 2011 d'avoir une vision exhaustive des enquêtes en cours dans le domaine des stupéfiants et de faciliter les recoupements entre les dossiers traités par la police judiciaire et les autres administrations (sécurité publique, gendarmerie, douane).

● Le rapport de la Cour des comptes précité sur la mutualisation en matière de police technique et scientifique, d’achats et de gestion des véhicules, des réseaux de transmission et des achats et de la gestion des armes et équipements, entre la police et la gendarmerie nationales, considère que les mutualisations ne sont devenues prioritaires qu’en 2008, avec la RGPP.

La Cour considère que les économies imputées à la mise en œuvre des mutualisations entre la police et la gendarmerie sont encore trop modestes pour en faire un levier stratégique de la maîtrise des dépenses de la mission Sécurité. Elles ne représentent en effet qu’une part marginale de la réduction globale des crédits de fonctionnement alors qu’aucune estimation n’a été faite des économies budgétaires éventuellement réalisées en matière de dépenses de personnel.

La mutualisation a été relativement poussée pour les achats de véhicules comme pour le soutien automobile. La rationalisation des réseaux d’ateliers de maintenance automobile, préalable au rattachement de la gendarmerie à l’Intérieur, a été efficace. Globalement, la mutualisation de la maintenance automobile a encore une portée limitée.

Dans le domaine des transmissions et des systèmes d’information, la mutualisation entre la police et la gendarmerie a donné lieu à la création d’un service commun, baptisé le STSI2. Les deux forces étant dotées de réseaux mobiles de transmission distincts (RUBIS et ACROPOL), une stratégie reste à définir pour la constitution d’un réseau unifié avec des étapes de mise en cohérence au plan technique et organisationnel.

La Cour concède que les achats d’armements sont apparus, à la suite de la LOPSI, comme le symbole des premières mutualisations réussies entre les deux forces. De fait, une proportion importante des achats d’armements est aujourd’hui mutualisée. Selon la Cour, les économies induites par cette mutualisation sont néanmoins difficiles à évaluer.

En conclusion, la Cour émet un certain nombre de propositions.

Dans le domaine de l’achat et de la maintenance des véhicules :

– poursuivre les réflexions en cours visant à étendre le périmètre de la mutualisation des achats (système de transmissions radio commun sur les motocyclettes, véhicule de patrouille commun de nouvelle génération ; approvisionnement partagé en carburant) ;

– engager une démarche de rationalisation de la fonction achat dans la police et dans la gendarmerie et une réflexion sur la perspective de création d’une fonction achat unique pour les deux forces ;

– définir conjointement, au niveau du ministère de l’Intérieur, l'organisation cible du réseau de maintenance automobile, en termes d'implantations, d'effectifs (nombre, statuts, qualifications), d'activités (amplitude horaire, enregistrement des opérations, tâches effectuées) ;

– établir un bilan précis des coûts et des bénéfices de la mutualisation pour chacune des forces ;

– valoriser au coût complet les prestations croisées effectuées afin de répartir les économies réalisées entre les deux programmes.

Dans le domaine des transmissions :

– clarifier et simplifier les rôles respectifs de la DSIC et du ST(SI)², notamment dans le domaine de l’étude prospective concernant la convergence des réseaux ;

– finaliser l’étude relative à la convergence entre les réseaux fixes SAPHIR 3G et RGT afin de mieux identifier les économies induites et d’engager la procédure d’élaboration d’un cahier des charges commun ;

– finaliser l’élaboration du marché unique qui permettra de disposer d’un seul support relatif à la maintenance des deux réseaux mobiles RUBIS et INPT ;

– poursuivre les chantiers relatifs au remplacement des liaisons louées par des faisceaux hertziens sur l’INPT et à la migration du sous-système de commutation de l’INPT en version IP ;

– poursuivre la réflexion relative à la convergence des réseaux RUBIS et INPT et sur la constitution d’un réseau unique à l’horizon 2020-2025 (choix techniques et fonctionnels à arrêter, modes de gouvernance et de financement de l’INPT à préciser) ;

– étudier différents scénarios d'organisation, internes à l'administration, externes (recours à un opérateur) ou mixtes (structure publique-privée).

Dans le domaine de l’achat et de la maintenance des armes et équipements :

– évaluer le coût complet des activités de la chaîne logistique (entretien des armes et des gilets pare-balles, notamment) et la possibilité d’une externalisation de ces fonctions, au regard des économies induites mais aussi des contraintes opérationnelles des deux forces ;

– conduire une réflexion sur l’harmonisation des règles de fonctionnement en vigueur dans les deux forces (transport des armes, conditions de stockage des munitions) afin de lever certains obstacles au développement des mutualisations ;

– définir une méthode d'achat conjointe afin de rationaliser les structures dédiées des deux forces et faciliter l'expression des besoins communs.

b) Mutualisation opérationnelle

La mutualisation opérationnelle rassemble les policiers et les gendarmes dans un grand nombre de domaines.

● La coopération entre la police et la gendarmerie nationales n’a cessé de se développer depuis le rattachement fonctionnel (hors missions strictement militaires) de la gendarmerie au ministère de l’intérieur en 2002. Ce rapprochement s’est accéléré depuis le rattachement organique consacré par la loi du 3 août 2009.

Policiers et gendarmes coopèrent dans plusieurs services spécialisés : Ils travaillent ensemble au sein des groupes d’intervention régionaux (GIR) (22 relevant de la police, 14 de la gendarmerie), créés en mai 2002, pour lutter contre les trafics et l’économie souterraine, notamment dans les quartiers sensibles. Afin de garantir une meilleure cohérence du dispositif, une coordination nationale unique police-gendarmerie a été mise en place en septembre 2008. Elle est dirigée alternativement pour deux ans par un commissaire de police ou un officier supérieur de la gendarmerie dont l’adjoint appartient à l’autre force.

Des militaires de la gendarmerie sont affectés au sein des offices centraux relevant de la police et des fonctionnaires de police dans ceux relevant de la gendarmerie. 77 militaires de la gendarmerie sont affectés à la direction centrale de la police judiciaire : 49 dans les offices centraux, 28 au sein de section centrale de coopération opérationnelle de police et 6 sont mis à disposition de l’antenne Caraïbes de l’office central pour la répression du trafic illicite de stupéfiants. 3 sont affectés à l’office central pour la répression de l’immigration irrégulière et de l’emploi d’étrangers sans titre de la police aux frontières. 12 policiers sont affectés dans les offices centraux relevant de la gendarmerie : 7 au sein de l’office central pour la répression de la délinquance itinérante, 2 au sein de l’office central de lutte contre le travail illégal et 3 au sein de l’office central de lutte contre les atteintes à l’environnement et à la santé publique.

Depuis le début de l’année 2010, environ 120 gendarmes sont affectés au sein des services départementaux d’information générale (SDIG) de la sécurité publique, ainsi qu’à l’échelon central, afin d’améliorer la qualité et la fluidité des échanges d’informations entre les deux forces.

Plusieurs unités mixtes ont été créées récemment sur le modèle de l’unité de coordination des forces mobiles (UCFM) instituée en 2002 pour coordonner l’emploi des 108 escadrons de gendarmerie mobile et des 60 compagnies républicaines de sécurité et placée auprès du directeur général de la police nationale. L’UCFM est dirigée par un inspecteur général de la police nationale, dont l’adjoint est un colonel de gendarmerie.

Des unités de coordinations ont été créées dans plusieurs domaines clés : les forces mobiles et d’intervention (Unité de coordination des forces d’intervention, créée en juin 2010), l’insécurité routière (Unité de coordination de la lutte contre l’insécurité routière UCLIR), la sécurité des transports publics, les cellules anti-cambriolages (2009), l’information générale, déjà évoquée.

Le rapprochement des deux forces a franchi une étape supplémentaire le 1er septembre 2010 avec la mise en place de deux services communs.

● Une direction commune en matière de coopération : la direction de la Coopération internationale (DCI), issue de la fusion du service de coopération technique internationale de police et de la sous-direction de la coopération internationale de la gendarmerie nationale, qui dispose d’un réseau unique d’attachés de sécurité intérieure issus des deux forces. Codirigée par les deux directeurs généraux, elle est rattachée administrativement à la direction générale de la police nationale. 99 militaires de la gendarmerie sont affectés à la DCI, dont 39 expatriés (attachés de sécurité intérieure et adjoints).

● Un service commun chargé de la conduite des projets dans les domaines clés des technologies et des systèmes d’information et de communication : le service des Technologies et des systèmes d’information de la sécurité intérieure (STSI²). Codirigé par les deux directeurs généraux, il est rattaché administrativement à la direction générale de la gendarmerie nationale. Il compte 288 agents dont 149 militaires de la gendarmerie et 139 policiers.

Un exemple d’initiative locale de coopération opérationnelle est constitué par l’unité mixte d’intervention rapide (UMIR) à Grenoble. Le préfet de l’Isère a créé le 30 décembre 2010 une force conjointe (23 fonctionnaires de police et 15 militaires de la gendarmerie) destinée à constituer une réponse immédiate en cas de graves violences urbaines dans le département : l’unité mixte d’intervention rapide (UMIR). Son commandement opérationnel est confié à un commissaire de police lorsque l’intervention a lieu en zone de police et à un officier de gendarmerie lorsque l’intervention a lieu en zone de gendarmerie.

4.– Vers une harmonisation des conditions : la « parité globale »

● Le rapprochement organique et opérationnel des deux forces pose le problème des différences qui existent entre le statut des militaires et celui des fonctionnaires de police, avec des régimes très différents en matière de rémunération, de retraite, d’horaires ou de logement.

Dans son discours du 29 novembre 2007, le Président de la République a souhaité la réalisation de la parité globale entre policiers et gendarmes, et le rapport final conjoint « Police/Gendarmerie : vers la parité globale au sein d’un même ministère », du groupe de travail réuni de janvier à mars 2008, a constitué la mise en état technique du processus de rapprochement statutaire.

Ce processus se développe alors qu’ont été conclus auparavant deux accords statutaires propres à la police et à la gendarmerie.

● Prévue par le protocole d’accord du 17 juin 2004, signé entre le ministre de l’Intérieur et 17 organisations syndicales, la réforme des corps et des carrières dans la police nationale doit s’achever en 2012.

Elle a pour objectifs :

– de préciser le rôle de chaque corps (commissaires, officiers, gradés et gardiens, personnels administratifs, techniques et scientifiques) ;

– d’opérer un repyramidage du corps d’encadrement et d’application afin de renforcer l’encadrement intermédiaire (gradés), tout en opérant une déflation des corps de conception et de direction (commissaires) et de commandement (officiers) ;

– de rehausser le niveau de recrutement ;

– de renforcer la motivation et d’encourager les progressions de carrière.

Le coût du protocole Corps et carrières (hors pensions) s’est élevé à 47,38 millions d’euros en 2007, 39,26 millions d’euros en 2008, 33,2 millions d’euros en 2009, 30,2 millions d’euros en 2010, 39,67 millions d’euros en 2011 et est prévu à 55,9 millions d’euros en 2012, compte tenu de mesures additionnelles.

● Le plan d’adaptation des grades aux responsabilités exercées (PAGRE) dans la gendarmerie nationale, présenté le 27 mai 2004, vise notamment, dans sa version initiale, à transformer 5 000 postes de sous-officiers en officiers, à augmenter le taux d’encadrement des sous-officiers sur la période 2005-2012 et à améliorer l’avancement des officiers et sous-officiers en fin de carrière. Il vise ainsi à relever le niveau hiérarchique de commandement des unités élémentaires (communautés de brigades et brigades autonomes) tout en portant le taux d’encadrement supérieur à un niveau comparable à celui de la police. Il constitue le pendant, pour la gendarmerie nationale, de la réforme des corps et carrières de la police nationale.

Le coût du PAGRE (hors pensions) s’est élevé à 20,6 millions d’euros en 2005, 15,4 millions d’euros en 2006, 15,5 millions d’euros en 2007, 8,5 millions d’euros en 2008, 20 millions d’euros en 2009, 20 millions d’euros en 2010, 23,31 millions d’euros en 2011 et est prévu à 23,2 millions d’euros en 2012.

C.– UNE CONSTANTE ADAPTATION DES STRUCTURES

La délinquance évolue. L’organisation des services de sécurité doit en permanence s’adapter.

La police supporte, dans les circonscriptions de sécurité publique et à Paris, l’essentiel du traitement de la délinquance et des atteintes au maintien de l’ordre ; alors que la gendarmerie, au surplus de son rôle également irremplaçable en matière de police judiciaire, assure une présence territoriale essentielle. C’est ainsi que l’indicateur de délinquance générale réalisé à partir de l’état 4001 a recensé 2 463 255 crimes et délits en zone de police en 2010 et 984 648 en zone de gendarmerie.

1.– La réorganisation de la gendarmerie

La réorganisation de la gendarmerie a porté principalement sur deux points : le dispositif de commandement territorial et la constitution des communautés de brigades.

Sur le premier point, la gendarmerie nationale a profondément réorganisé son dispositif opérationnel. Cette évolution a concerné aussi bien son organisation territoriale que la chaîne de commandement.

Les dispositions de la réorganisation du commandement territorial de la gendarmerie sont entrées en application au 1er juillet 2005. Le dispositif métropolitain de la gendarmerie ne s’appuie plus désormais que sur trois niveaux hiérarchiques de commandement : la direction générale de la gendarmerie nationale ; les régions de gendarmerie ; les groupements de gendarmerie départementale. Directement subordonnées au directeur général de la gendarmerie, les 22 nouvelles régions de gendarmerie se substituent aux 7 états-majors de région, aux 7 légions de gendarmerie mobile et aux 22 légions de gendarmerie départementale.

Ce dispositif resserré met en cohérence l’organisation territoriale de la gendarmerie nationale avec celle de ses différentes autorités d’emploi. Cette réorganisation privilégie une meilleure réactivité, car plus proche des groupements de gendarmerie départementale qui demeurent les maillons essentiels de conduite des opérations.

Quant à la mise en œuvre des communautés de brigades, elle vise à consolider les petites brigades et à améliorer leur efficacité en mutualisant leurs moyens. Au 1er juillet 2010, on dénombrait 1 067 communautés de brigades réparties dans 97 groupements de gendarmerie départementale et 8 commandements de la gendarmerie outre-mer (COMGEND). Sur l’ensemble du territoire français, 809 brigades territoriales sont restées autonomes, dont 154 outre-mer.

Les communautés de brigades permettent d’optimiser les moyens disponibles, tout en garantissant la qualité et la rapidité des interventions. M. Claude Guéant, ministre de l’Intérieur, a rappelé devant la commission des Finances (4) que, lorsqu’il était préfet en Franche-Comté, la brigade de Pierrefontaine-les-Varans, dans le Doubs, devait assurer une permanence, quand bien même elle ne recevait en moyenne qu’un usager par semaine. Le système des communautés de brigades a mis fin à ce genre d’anomalie.

2.– Les nombreuses réorganisations dans la police

a) Répondre à une délinquance multiforme

Les plans opérationnels ciblés sur les phénomènes délinquants les plus préoccupants constituent la réponse pertinente à aux mutations des phénomènes de délinquance. Ces plans nationaux sont déclinés dans chaque département afin d’adapter les efforts aux réalités locales.

● La lutte contre les bandes violentes a bénéficié du développement de la vidéo protection et de l’application des mesures prévues par la loi du 2 mars 2010 renforçant la lutte contre les violences de groupe et la protection des personnes chargées d’une mission de service public.

34 groupes « dérives urbaines », chargés du renseignement, ont été mis en place au sein des services d’information générale de la sécurité publique dans les départements les plus touchés par les violences urbaines, tandis que 35 groupes spécialisés d’investigations sur les bandes (GSIB) relèvent de la sécurité publique et de la préfecture de police pour donner des suites judiciaires aux renseignements obtenus sur les bandes.

En 2010, 472 groupes ont été identifiés après leur participation à un affrontement et 401 affrontements entre bandes ont été répertoriés sur le territoire national. Avec 312 faits, l’Île-de-France concentre 78 % des cas. 196 blessés et 7 décès sont à déplorer. 1 096 personnes, dont 438 mineurs, ont été interpellées.

● L’action est également poursuivie de façon résolue contre le hooliganisme. La création de sections d’intervention rapide, la coopération internationale ou encore l’optimisation de la remontée de l’information opérationnelle vers la division nationale de lutte contre le hooliganisme (DNLH) de la direction centrale de la sécurité publique (DCSP) sont autant de mesures fortes mises en œuvre dans le cadre de ce plan d’action, qui s’appuie par ailleurs sur un partenariat étroit entre les pouvoirs publics et les instances nationales du football.

Au cours de la saison 2010-2011, 946 personnes ont été interpellées lors des rencontres de football, contre 696 durant la saison précédente. À la fin du championnat, le nombre d’interdits de stade s’élevait à 389 (226 interdictions administratives et 163 interdictions judiciaires).

● La lutte contre le trafic de drogue a été amplifiée et la coordination de l’action des services a été améliorée dans le cadre d’un plan global de lutte contre la drogue, adopté en décembre 2009. Les mesures engagées ont contribué à renforcer les moyens humains et matériels dédiés à la lutte contre le trafic de drogue (nomination d’un délégué national à la lutte contre le trafic de drogue, opérations « coup-de-poing » dans les quartiers sensibles, accroissement du rôle de la marine nationale, etc.). Cette mobilisation s’est accompagnée d’une intense action partenariale, notamment avec le ministère du budget pour briser la rentabilité des trafics. Les opérations « coup-de-poing » visent à déstabiliser le « deal » de proximité, garantir la tranquillité publique en réduisant ses effets sur la vie locale et à « reconquérir le terrain ».

La coopération internationale a été renforcée par l’adoption le 3 juin 2010, à l’initiative de la France, d’un Pacte européen de lutte contre le trafic international de drogue. La loi du 9 juillet 2010 visant à faciliter la saisie et la confiscation en matière pénale et la loi du 14 mars 2011 d’orientation et de programmation relative à la performance de la sécurité intérieure apportent des moyens juridiques et matériels accrus aux services enquêteurs. L’application des mesures du plan global de lutte contre le trafic de drogue a permis d’obtenir des résultats significatifs, tant en matière de saisies de produits que d’infractions relevées et de personnes mises en cause.

● La lutte contre la violence en milieu scolaire, a donné lieu à de nouvelles actions communes avec l’éducation nationale, afin de sécuriser les établissements. Dans ce cadre, différentes mesures ont été prises : la désignation de « correspondants sécurité-école », la réalisation de diagnostics de sécurité (réalisés en totalité pour les 184 établissements réputés les plus exposés et à 98 % pour les autres), l’installation à la rentrée scolaire 2010 de référents sécurité-école dans 53 établissements scolaires jugés prioritaires (mise en place de permanence au sein de l’établissement), la création d’équipes mobiles de sécurité (EMS) dans les académies par l’éducation nationale, la désignation de conseillers pour la sécurité (policiers ou gendarmes) auprès des recteurs, mise en œuvre du dispositif de sanctuarisation globale de l'espace scolaire (SAGES) par des actions de prévention et de sensibilisation à l’intérieur et aux abords des établissements dans 12 établissements sensibles situés en zone de gendarmerie.

● Le plan national pour la sécurisation des transports en commun présenté le 14 avril 2010 monte progressivement en puissance. Il a pour objectif d’améliorer le sentiment de sécurité, de renforcer la lutte contre les violences et les dégradations, tout en veillant au bon fonctionnement du service public. Afin de mieux coordonner l’action des services et d’optimiser la diffusion des informations opérationnelles entre les forces de l’ordre et les transporteurs, une unité de coordination de la sécurité dans les transports en commun (UCSTC), structure mixte police-gendarmerie, a été créée le 17 mai 2010 auprès du directeur général de la police nationale.

Le plan national se décline à l’échelon zonal (7 plans zonaux de sécurisation des réseaux ferrés) et départemental (90 plans départementaux de sécurisation des réseaux de surface), sur la base des diagnostics de sécurité effectués par les services de police et de gendarmerie. Pour renforcer l’efficacité du dispositif, le ministre de l’Intérieur a diffusé deux circulaires relatives respectivement à la stratégie d’action à mettre en œuvre en cas d’incidents dans les transports en commun (29 juillet 2011) et à la réévaluation des plans zonaux (5 juillet 2011). Dans ce cadre, l’accent est mis sur le recours à la vidéoprotection, en partenariat avec les principaux transporteurs (SNCF, RATP et régies privées en province), afin de renforcer la couverture du réseau (installations fixes et vecteurs de transport).

● Le plan d’action contre l’insécurité des personnes âgées, a pour objectif d’améliorer la sécurité des seniors, axé autour de quatre actions concrètes : la mise en place d’une opération « tranquillité seniors », le lancement d’une campagne de sensibilisation et de communication autour des « réflexes sécurité » du quotidien, l’aggravation des peines encourues pour les délits commis au préjudice des personnes âgées, une meilleure surveillance des missions de sécurité privée dont bénéficient les personnes âgées. Les acteurs concernés ont été mobilisés dans le cadre d’un partenariat renforcé, impliquant particulièrement les polices municipales, appelées à jouer un rôle majeur dans ce dispositif.

Ces mesures font l'objet d'indicateurs de suivi et d'évaluation avec, notamment, la mise en place d'un tableau de bord trimestriel faisant apparaître l'évolution des faits de délinquance commis à l'encontre des personnes de plus de 65 ans, le nombre de personnes ayant sollicité une attention particulière et le nombre d'opérations réalisées à leur bénéfice. En 2010, 8 268 opérations ont été menées en direction des seniors (dont 2 653 en zone gendarmerie) et 83 622 personnes (dont 13 599 en zone de gendarmerie) ont été sensibilisées.

● La lutte contre les cambriolages, déjà évoquée, a été accrue avec la mise en place d’un plan d’action en septembre 2009. Des cellules anti-cambriolages mixtes police/gendarmerie ont été créées par circulaire du 14 septembre 2009, soit 99 cellules départementales, 8 cellules outre-mer et une cellule au niveau de l’agglomération parisienne. Structures à vocation opérationnelle, elles permettent d’adapter le dispositif répressif en fonction du constat établi à partir de cartographies locales. Au plan national, une cellule d’analyse assure le suivi mensuel des résultats obtenus. Le recours à la police technique et scientifique, qui contribue pour une part importante à l’élucidation des faits, se systématise.

Par ailleurs, le dispositif « opérations tranquillité vacances » a été étendu à toutes les vacances scolaires. L’approche interdépartementale est également privilégiée, en application de la circulaire du 2 novembre 2010 relative à la lutte contre les cambriolages. Les cellules anti-cambriolages apportent une réelle plus-value, comme en témoignent les résultats enregistrés depuis leur mise en place.

b) La réorganisation de la police dans le cadre des bassins de vie : la police d’agglomération

La mise en place de la police d’agglomération a été annoncée par le Président de la République, dans le discours de Gagny du 18 mars 2009.

Devant les préfets et les responsables de la police et de la gendarmerie nationales, le Président de la République a fixé le 28 mai 2009, les priorités opérationnelles des forces de sécurité intérieure autour d’un certain nombre d’axes forts, en particulier une meilleure adaptation aux bassins de délinquance par la mise en œuvre de la « police d’agglomération » et l’instauration d’un principe d’unicité de commandement.

● Dès le 14 septembre 2009, le ministre de l’Intérieur a créé une police d'agglomération pour Paris et les départements de la petite couronne. La compétence du Préfet de Police en matière d’ordre public a été étendue aux départements de la petite couronne (Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis et Val-de-Marne). Désormais les policiers de l’agglomération parisienne sont placés sous un commandement unique, dans un souci de mutualisation des moyens, d’échange accru d’informations, d’efficacité et de réactivité. Aujourd’hui, avec 34 000 agents, la police d’agglomération s’applique à 6,5 millions d’habitants et exerce sa compétence sur les deux tiers de la délinquance régionale.

Une nouvelle direction a été mise en place, la direction de la sécurité de proximité de l’agglomération parisienne (DSPAP), composée de 24 000 fonctionnaires. Son organisation a été réformée pour harmoniser structures et méthodes de travail à Paris et en petite couronne, au service de deux priorités : présence sur la voie publique et investigation.

Elle a achevé sa réorganisation avec l’harmonisation et la simplification des structures territoriales de la DSPAP par la mise en place au premier trimestre 2011 d’une nouvelle organisation des circonscriptions via une dénomination et des dispositions communes aux 4 directions territoriales. Cette organisation repose sur l’emploi de 7 brigades spécialisées de terrain (BST) qui s’ajoutent aux 5 qui existaient sur le ressort territorial de la préfecture de police en septembre 2010 ; sur la définition de périmètres à sécurisation renforcée (PSR) permettant de lutter, de façon souple et réactive, contre les problématiques locales de délinquance, sur une zone sensible déterminée, sur le dispositif des patrouilleurs déployés en fonction des analyses cartographiques de la délinquance et des besoins exprimés par les commerçants et les riverains.

La réforme de la police d’agglomération, mise en œuvre avec succès à Paris et dans les trois départements de la petite couronne en septembre 2009, a été étendue à Lille et à Lyon au premier semestre 2011. Elle sera appliquée à Marseille et à Bordeaux dans les prochaines semaines.

● Dans le département du Nord, où la circonscription de Lille agglomération existe depuis février 2009, la mise en place de la police d’agglomération s’est traduite début janvier 2011 par l’intégration de la circonscription de sécurité publique de Bailleul à celle de Lille agglomération, par la création de quatre circonscriptions de sécurité publique d’agglomération (Dunkerque agglomération, Maubeuge agglomération, Valenciennes agglomération et Douai agglomération) et par le transfert en avril 2011 de la circonscription de sécurité publique de Fourmies en zone de gendarmerie nationale. Parallèlement, il sera procédé en 2011 au transfert de la commune de Marck sous le régime de la police d’État.

● Dans le département des Bouches-du-Rhône, la circonscription de sécurité publique de Port-Saint-Louis-du-Rhône a été transférée en août 2011 en zone de gendarmerie nationale. Par ailleurs, une circonscription interdépartementale de sécurité publique (CISP) a été créée en juillet 2011, qui regroupe Beaucaire et Tarascon et qui est intégrée au district d’Arles. Le transfert des communes de Cabriès et de Septèmes-les-Vallons en zone de police nationale est également prévu en 2011.

Au titre de la police d’agglomération de Marseille, la circonscription de sécurité publique de Pertuis, mono-communale, a été transférée début août 2011 en zone de gendarmerie nationale.

● Dans le département du Rhône, les communes de Feyzin, Chassieu, Ecully et Rillieux-la-Pape ont été rattachées à la circonscription de sécurité publique de Lyon.

● Dans le département de la Gironde, sont programmés d’ici fin 2011 les transferts de la circonscription de sécurité publique de Libourne à la gendarmerie nationale et des communes de Le Haillan, Eysines, Artigues-Près-Bordeaux et Bouliac en zone de police nationale, elles doivent être rattachées à la circonscription de sécurité publique de Bordeaux.

Parallèlement, ont été transférées début août 2011 à la gendarmerie nationale des circonscriptions de sécurité publique isolées, comme celle d’Annonay, et Graulhet, l’objectif étant que les deux forces de sécurité de l’État disposent en matière d’ordre et de sécurité publics de zones de compétence les plus homogènes et les plus cohérentes possibles. À ce titre, est également programmé d’ici fin 2011 le transfert en zone de gendarmerie nationale de la circonscription de sécurité publique de Montbrison.

c) La création de la direction centrale du Renseignement intérieur

Conformément aux orientations du Livre blanc sur la défense et la sécurité nationale, approuvé par le Président de la République le 17 juin 2008, la réforme du renseignement est effective depuis le 1er juillet 2008. Le Livre blanc préconise un renforcement des moyens de renseignement et la mise en œuvre d’une approche globale associant renseignements intérieur et extérieur, sécurité intérieure et défense nationale.

La direction centrale du Renseignement intérieur (DCRI), réunit les missions et personnels de l’ancienne direction de la Surveillance du territoire (DST) et celles de la direction centrale des Renseignements généraux (DCRG) qui touchaient directement la sécurité nationale. La DCRI exerce quatre grandes missions : le contre-espionnage et la contre-ingérence, le contre-terrorisme et la protection des institutions, la protection du patrimoine et la sécurité économique, l’analyse des mouvements de contestation à potentialité violente. La DCRI assure les liaisons avec les services étrangers, la coordination avec ces services en matière de renseignement est évidemment particulièrement importante.

La DCRI dispose d’un budget opérationnel de programme national avec 14 unités opérationnelles (deux pour l’échelon central, 1 par zone, 1 pour les structures de niveau international, 4 pour l’ensemble des départements et collectivités d’Outre-mer).

d) L’adaptation constante des moyens de sécurisation

Contrairement à la généralisation de la « police de proximité » en 2000, qui avait détourné les policiers de leur mission première –la lutte contre la délinquance– et qui avait dégradé les résultats de la politique de sécurité publique, la politique conduite menée depuis 2002 tend à développer le potentiel opérationnel et à renforcer la présence de la police nationale sur le terrain afin de lutter plus efficacement contre la délinquance et de rassurer la population.

● Dans la période récente, les principales mesures en matière de sécurité publique ont consisté à réorienter des moyens à partir d’unités de maintien de l’ordre et d’effectifs de voie publique en renforcement de structures de lutte contre la délinquance. Elles se sont traduites il y a trois ans par le développement des compagnies de sécurisation (CS) et des unités territoriales de quartier.

Le développement des compagnies de sécurisation avait pour objet d’apporter des moyens spécifiquement dédiés à la lutte contre les violences urbaines, afin de permettre l’interpellation des auteurs d’agressions et de dégradations. Il a été décidé de les transformer en compagnies de sécurisation et d’intervention (CSI). En effet, un audit mené par l’inspection générale de l’Administration, l’inspection générale de la Police nationale et l’inspection générale des Services sur le fonctionnement des compagnies de sécurisation, a constaté qu’une bonne part de leurs missions était commune à celles des compagnies départementales d’intervention. Aussi, il a été décidé de regrouper les compagnies de sécurisation, les compagnies départementales d’intervention mais également les brigades anti-criminalité départementales (BAC D) dans de nouvelles unités : compagnies de sécurisation et d’intervention (CSI), à compter der septembre 2010.

● Le même audit a conduit à modifier la doctrine d’emploi des unités territoriales de quartier (UTEQ), créées à partir du printemps 2008, et elles ont été transformées en brigades spécialisées de terrain (BST) à partir de l’été 2010. La police nationale dispose à ce jour de trente-huit BST. Déployées dans des zones sensibles au périmètre clairement circonscrit mais évolutif en fonction de la délinquance, les BST ont des missions précises et ciblées de prévention, de dissuasion et de répression, avec pour objectifs de lutter contre la délinquance et les violences urbaines, de rechercher le renseignement opérationnel tout en développant le lien de confiance avec la population. Les BST ne sont plus rattachées systématiquement à un seul quartier mais déployées dans des zones sensibles pouvant comporter un ou plusieurs quartiers au sein d’une agglomération.

● Les BST s’intègrent dans le dispositif des patrouilleurs de la police nationale, créé au printemps 2011 afin d’accroître la présence des forces de l’ordre en uniforme sur le terrain, dans le cadre d’un schéma rénové de couverture des circonscriptions de sécurité publique établi en fonction des spécificités locales. Il permet d’optimiser l’emploi et l’efficacité opérationnelle des policiers et de couvrir le territoire au plus près des besoins. La politique de sécurité exige en effet d’agir aussi sur le climat de sécurité, par une visibilité accrue, dissuasive et rassurante des forces de l’ordre sur le terrain. Cette politique correspond à une attente forte des Français.

La patrouille est prioritairement constituée de deux patrouilleurs issus des unités de voie publique. Contrairement au dispositif de la « police de proximité » qui existait avant 2002, celui des patrouilleurs ne se limite pas à la prévention et à la dissuasion mais il inclut également les missions de répression. Les patrouilles en binôme sont organisées à partir d’une cartographie de la délinquance enregistrée quotidiennement sur la circonscription. Elle apporte une réponse cohérente et adaptée aux événements de voie publique et permet de remédier à des phénomènes d’insécurité bien identifiés. Les patrouilleurs exercent leurs missions sur un périmètre défini et signalé en raison de sa sensibilité et des difficultés recensées. Ce secteur est défini en tenant compte de l’importance de la délinquance et des actes d’incivilité, du sentiment d’insécurité de la population, de la densité ainsi que de la nature et de l’importance des flux de population. Les patrouilleurs assurent les missions de police-secours et répondent à toute réquisition de la population. Les patrouilleurs de secteur (PDS) sont constitués d’effectifs des unités de secteurs et des groupes de sécurité de proximité (GSP). Ils exercent leurs missions sur un territoire bien précis, qualifié de « secteur à surveillance renforcée », nécessitant une visibilité et une vigilance accrue de la police nationale.

Les BST remplissent les missions des patrouilleurs sur leurs secteurs de compétence.

Le dispositif des patrouilleurs de la police nationale a d’abord été expérimenté à compter du mois de mai 2011 à Marseille, Nice, Mantes-la-Jolie, Poitiers, Strasbourg, à Paris dans huit arrondissements et dans le département de la Seine-Saint-Denis. Les résultats très concluants de cette expérimentation ont conduit le ministre de l’Intérieur à décider la généralisation de ce dispositif le 1er juillet 2011. L’impact de cette réforme sur les capacités opérationnelles des services et sur les chiffres de la délinquance apparaît déjà très positif. Dans le ressort des services de la sécurité publique par exemple, le nombre de patrouilles a augmenté depuis le 1er juillet 2011 de 17 % et de 90 % pour les seules patrouilles pédestres. S’agissant de la lutte contre la délinquance, l’accroissement de la présence policière sur le terrain s’accompagne d’une nette baisse de la délinquance de voie publique, qui a régressé de 3,6 % au cours du troisième trimestre 2011 par rapport à la même période de l’année 2010.

D.– DES RÉSULTATS INCONTESTABLES

Les crimes et délits portés à la connaissance des services de police et de gendarmerie ou constatés à leur initiative sont comptabilisés dans un document statistique appelé l’« état 4001 ». Mis au point en 1972, ce document n’a connu depuis lors que des modifications limitées.

Il comptabilise exclusivement les faits faisant l’objet d’une procédure judiciaire transmise au parquet (à la suite d’une plainte ou d’une enquête de police). Il exclut les contraventions de toute nature et les délits routiers qui, tout en étant portés à la connaissance des services, ne sont pas enregistrés dans l’outil de statistique officiel ; l’intégralité des infractions au séjour des étrangers et des faits portés sur la main courante ; les infractions constatées par d’autres institutions (douanes, inspections du travail, répression des fraudes).

Cet outil statistique comporte donc des imperfections. Celles-ci ont été dénoncées notamment par la Cour des comptes (5), qui conteste la pertinence du chiffre de la « délinquance globale », constitué par la somme de tous les faits constatés. Il est de fait que le chiffre de la « délinquance globale » résulte de l’addition de faits de délinquance très différents par leur nature et par leur gravité. Cela étant, si l’on peut discuter de la pertinence de la délinquance ainsi mesurée, la statistique, dès lors qu’elle est établie chaque année à partir des mêmes données, présente l’avantage de mettre en lumière une tendance qui, elle, n’est pas contestable.

Ainsi, on peut émettre des doutes sur le niveau de la délinquance établi par l’état 4001, mais pas sur l’évolution de cette délinquance d’une année à l’autre.

Depuis une vingtaine d’années, un agrégat a été créé, qui récapitule tous les faits qui constituent la « délinquance de proximité » : il s’agit des cambriolages, des vols d'automobiles, des vols à la roulotte, des destructions et dégradations de biens qui ont pour caractéristique commune d’importuner fortement les citoyens dans leur vie quotidienne. La diminution de cette délinquance reflète donc très directement la mobilisation des services de police pour garantir à nos concitoyens une meilleure sécurité dans leur cadre de vie familier.

À l’initiative et sous le contrôle de l’observatoire national de la délinquance, un travail plus précis a été entrepris et a conduit en 2010 à établir quatre grands agrégats :

– les atteintes aux personnes, qui regroupent les violences physiques non crapuleuses, les violences physiques crapuleuses, les violences sexuelles et les menaces de violences ;

– les atteintes aux biens, où sont répertoriés les vols à main armée (armes à feu), les autres vols avec violences sans armes à feu, les vols avec entrée par ruse, cambriolages, ceux liés à l’automobile et aux deux-roues à moteur, les autres vols simples au préjudice de particuliers, les autres vols simples (à l’étalage, chantiers..), les destructions et les dégradations de biens ;

– les escroqueries et infractions économiques et financières, dont les faux en écritures, les contrefaçons, les falsifications, le travail clandestin et l’emploi d’étranger sans titre de travail, les fraudes fiscales et les autres délits économiques et financiers ;

– les infractions révélées par l’action des services, dont les recels, le proxénétisme, les infractions à la législation sur les stupéfiants, les délits à la police des étrangers, le port ou la détention d’armes prohibées, les délits des courses et jeux, les atteintes à l’environnement, la fraude documentaire, le travail clandestin, le travail clandestin, l’emploi d’étrangers sans titre de travail, le prêt de mains-d'œuvre et les délits d’interdiction de séjour et de paraître.

Les indicateurs anciens de délinquance générale et de délinquance de proximité restent incontournables car eux seuls permettent d’apprécier sur une longue durée les évolutions de la délinquance.

1.– Une baisse sensible de la délinquance et une forte augmentation des taux d’élucidation

a) Des résultats remarquables

Alors que, d’une manière générale, la délinquance générale et la délinquance de proximité avaient augmenté respectivement de 17,8 et 9,8 % entre 1997 et 2002, elles ont diminué respectivement de 16,2 % et 37,2 % entre 2002 et 2010.

En zone de police, la délinquance générale et la délinquance de proximité avaient augmenté respectivement de 13,3 et 1,4 % entre 1997 et 2002, elles ont diminué respectivement de 16 % et 36,1 % entre 2002 et 2010.

En zone de gendarmerie, la progression de la délinquance générale et de la délinquance de proximité a été respectivement de 30,6 et 40,8 % entre 1997 et 2002, et la diminution respectivement de 16,7 % et 40 % entre 2002 et 2010.

Si on se réfère aux quatre agrégats constitués en 2010, les évolutions sont les suivantes.

De 2002 à 2010, le nombre de crimes et délits en matière d’atteinte aux biens a diminué de 28,6 % : 2 184 460 crimes et délits en 2010 au lieu de 3 059 062 en 2002. La diminution a été de 1,9 % entre 2009 et 2010. La prévision actualisée pour 2011 est une nouvelle baisse de 1,5 %, celle pour 2012 de 2 %. On a constaté une nouvelle diminution des atteintes aux biens de 1,8 % du premier semestre 2010 au premier semestre 2011.

L’indicateur d’évolution des atteintes volontaires à l’intégrité physique des personnes, qui porte sur des nombres beaucoup plus limités, connaît en pourcentage une évolution défavorable. De 2002 à 2010, l’indicateur AVIP a progressé de 22,6 % : 467 348 AVIP en 2010 au lieu de 381 053 en 2002. La progression a été de 2,5 % entre 2009 et 2010. La prévision actualisée pour 2011 est une baisse de 0,5 %, celle pour 2012 de 1 %. On a constaté une progression des AVIP de 1,3 % du premier semestre 2010 au premier semestre 2011.

Il est remarquable que dans son récent rapport sur l’organisation et la gestion des forces de sécurité publique, la Cour des comptes ne conteste pas les mesures statistiques de la délinquance dans leur globalité, elle évoquait cependant des résultats « contrastés ». On ne peut admettre la présentation de la Cour, qui prétend que le recul des atteintes aux biens est compensé par l’augmentation « d’amplitude presque équivalente » des atteintes aux personnes. En effet, ces dernières, même si elles sont préoccupantes, ne représentent que 13 % de l’ensemble de la délinquance. Il convient en outre de distinguer parmi celles-ci entre les atteintes de caractère crapuleux et celles qui ont été commises dans le cercle familial ou amical. Les atteintes aux personnes à caractère crapuleux ont diminué de 10 % depuis 2002.

Les crimes et délits en matière d’escroqueries et d’infractions économiques et financières sont globalement stables entre 2002 et 2010 (- 0,2 %) avec un objectif de baisse de 1,5 % en 2011). Les E.I.E.F. baissent de 4,34 % en 2010 par rapport à 2009 (16 072 faits en moins).

L’indicateur d’évolution du nombre d’infractions révélées par l’action des services rend compte non pas de l’évolution de la délinquance, mais de l’action répressive conduite à l’initiative des services de sécurité sans plainte préalable de la part d’une présumée victime. Il traduit la mobilisation des unités et l’investissement des personnels dans la lutte contre l’insécurité.

Le nombre d’infractions révélées par l’activité des services a diminué de 3,7 % de 2009 à 2010, mais les prévisions d’augmentation sont de 3 % pour chacune des années 2011 et 2012.

b) Un surprenant rapport de la Cour des comptes

La Cour des comptes a publié le 7 juillet 2011 un rapport thématique qui porte sur l’organisation et la gestion des forces de sécurité publique. Il est à noter que l’enquête de la Cour s’est limitée à un échantillon de préfectures, de services territoriaux de la police nationale chargés de la sécurité publique (directions départementales DDSP et circonscriptions de sécurité publique CSP), de formations compétentes de la gendarmerie nationale (régions et groupements départementaux) et des procureurs de la République. Son contrôle s’est par ailleurs exercé sur les services centraux des directions générales de la police nationale et de la gendarmerie nationale.

Cette enquête n’a pas porté sur les activités de la police aux frontières, de la police judiciaire, de la direction centrale du renseignement intérieur, ni sur les forces mobiles, sauf en ce qui concerne leur participation aux missions de sécurisation.

Le champ d’investigation de la Cour est donc partiel. Le rapport, qui se limite à la période 2003-2009, porte sur une période peu pertinente, les changements majeurs dans la lutte contre la délinquance étant intervenus en 2002.

La période 1997-2002 a en effet été caractérisée par une explosion de la délinquance. La période 2002-2010 est marquée par un net retournement de tendance, avec un recul de la délinquance constaté tant au niveau de la direction centrale de la sécurité publique (périmètre retenu par la Cour) qu’au niveau de l’ensemble des services de police.

DÉLINQUANCE SÉCURITÉ PUBLIQUE ET POLICE NATIONALE

 

Sécurité publique

1997

2 002

2010

1997-2002

2002-2010

Atteintes volontaires à l'intégrité physique

144 882

221 932

272 216

+ 53,18 %

+ 22,66 %

Atteintes aux biens

1 630 211

1 695 963

1 187 901

+ 4,03 %

– 29,96 %

Escroquerie et infractions économiques et financières

113 115

174 885

180 725

+ 54,61 %

+ 3,34 %

Total des crimes et délits (107 index)

1 973 007

2 205 924

1 825 453

+ 11,81

– 17,25

Taux d'élucidation globale

22,17 %

22,97 %

34,42 %

+ 0,80

+ 11,72 %

Infractions révélées par l'action des services

79 334

103 201

153 314

+ 30,08 %

+ 48,56 %

Personnes mises en cause

360 343

435 755

545 505

+ 20,93 %

+ 25,19 %

   

Police nationale

 

1997

2002

2010

1997-2002

2002-2010

Atteintes volontaires à l'intégrité physique

193 998

305 188

371 801

+ 57,32 %

+ 21,83 %

Atteintes aux biens

2 084 893

2 197 836

1 556 764

+ 5,42 %

– 29,17 %

Escroquerie et infractions économiques et financières

164 309

244 375

239 678

+ 48,73 %

– 1,92 %

Total des crimes et délits (107 index)

2 588 444

2 931 709

2 463 255

+ 13,26 %

– 15,98 %

Taux d'élucidation globale

23,03 %

23,91 %

36,55 %

+ 0,88

+ 12,64

Infractions révélées par l'action des services

149 490

198 454

280 346

+ 32,75%

+ 41,26%

Personnes mises en cause

511 542

634 224

802 104

+ 23,98%

+ 26,47%

Source : Direction générale de la police nationale.

Les crimes et délits constatés en zone de police, en augmentation de 13,26 % sur la première période, ont baissé de près de 16 % sur la seconde. La tendance à l’augmentation des violences a marqué un net ralentissement. Le taux d’élucidation, qui traduit l’efficacité des services, n’avait augmenté que de 0,8 point sur la première période, il augmente de 12 points sur la seconde. L’activité des services, mesurée par le nombre des IRAS et des personnes mises en cause, avait connu une augmentation sur la première période. Cette augmentation s’est nettement accélérée sur la seconde.

Dans son rapport, la Cour dénonce des effets pervers qui s’attacheraient à la « culture du résultat ». Elle prend en particulier l’exemple de la lutte contre la drogue et fait valoir que l’action des services dans ce domaine serait devenue une « variable d’ajustement » des résultats statiques. Cela veut dire :

– que lorsque le taux d’élucidation serait insuffisant, les services augmenteraient le nombre des constatations, tout fait constaté étant un fait élucidé ;

– qu’à l’inverse, lorsque le niveau général de la délinquance serait trop élevé, les services ralentiraient leur action de manière à éviter une dégradation des statistiques.

Cette analyse n’est fondée sur aucun fait objectif. Elle est tout à fait incompatible avec la pratique des services et les exigences du code de procédure pénale. Elle ne tient pas compte du fait que la compétence en matière de lutte contre la drogue est essentiellement celle de la Police judiciaire, qui sort du champ de l’étude de la Cour des comptes.

Il faut par ailleurs observer que, si les infractions relevées par l’action des services (IRAS) étaient restées au niveau atteint en 2002, la diminution de la délinquance générale constatée par l’état 4 001 en zone police, aurait été non pas de 16 %, mais de 13 % environ.

Sur ce point, l’analyse de la Cour des comptes est pour le moins surprenante.

c) L’amélioration des taux d’élucidation

Plus révélatrice de l’efficacité des services est l’évolution du taux d’élucidation des affaires.

Le taux d’élucidation des crimes et délits est présenté maintenant sous une forme détaillée, selon la nature de l’infraction, et pour chacun des trois grands agrégats servant de base à la constatation des crimes et délits : les atteintes aux biens, les atteintes volontaires à l’intégrité physique (AVIP) ainsi que les escroqueries et infractions économiques et financières » (EIEF).

L’amélioration s’explique essentiellement par un recours accru aux nouvelles technologies et à la police technique et scientifique. Les services disposent à cet effet de deux indicateurs :

● Le taux d'identification des traces papillaires exploitables recueillies sur les scènes d'infraction qui renseigne sur un résultat opérationnel ayant un réel impact sur l’élucidation des crimes et délits. Il est directement lié à tous les maillons de la chaîne criminalistique et exige que les efforts portent sur tous les aspects : capacité de recueil des traces, qualité des traces recueillies, alimentation en signalisations de la base de référence du FAED, performance technique du FAED et de ses spécialistes. L’objectif est d’atteindre à l’horizon 2012 un taux global (police et gendarmerie) supérieur à 20 %.

● Le taux de signalisation au fichier national des empreintes génétiques des individus mis en cause traduit l’effort (organisation, ressources humaines, moyens matériels) consacré par les services territoriaux à une alimentation exhaustive des grands fichiers criminalistiques à partir des mis en cause. Cette alimentation est un facteur primordial de l’élucidation des affaires.

L’amélioration des taux d’élucidation est le résultat le plus concret de la politique menée en faveur de la police scientifique et technique.

De 2002 à 2009, le taux d’élucidation tous services confondus (indicateur ancien est passé de 26,27 à 37,70 %, l’augmentation la plus marquée étant celle de la police nationale.

Les taux d’élucidation sont en nette progression pour chacun des indicateurs, sauf celui des EIEF. Le taux est passé de 51,13 % en 2002 à 59,81 % en 2010 en matière d’atteintes volontaires à l’intégrité physique, de 10,45 % à 15,33 % sur la même période pour les affaires d’atteintes aux biens et de 56,11 % à 51,89 % en matière d’escroqueries et infractions économiques et financières.

Les taux d’élucidation ont connu une amélioration remarquable, due au développement de la police scientifique et technique, et à une meilleure diffusion dans les services de la culture de la preuve qui aura pour effet de rendre plus difficile le recueil des aveux, aux dépens de la culture de l’aveu, traditionnelle en France en matière d’investigation judiciaire. Cette politique doit être poursuivie, notamment du fait de la rénovation du régime de la garde à vue.

Il convient d’insister sur les résultats très remarquables obtenus dans le domaine de la sécurité routière : après un maximum de 8 253 tués en 2001 du fait des accidents de la route, la mortalité a été ramenée à 3 292 en 2010 (6), selon les statistiques de l’observatoire national interministériel de la sécurité routière (ONISR). Sur la période la plus récente, le nombre d’accidents a diminué de 2009 à 2010 en passant de 74 207 à 65 863 (– 11,2%) ; celui des tués de 4 434 à 4 160 (- 6,2 %) et celui des blessés de 93 259 à 82 736.

Ce sont donc au total près de 5 000 vies qui ont été épargnées entre 2002 et 2010.

2.– L’amélioration de la disponibilité opérationnelle

Depuis 2002, une politique déterminée a été menée pour améliorer la disponibilité opérationnelle des forces de sécurité, sous plusieurs aspects : le redéploiement sur la voie publique des fonctionnaires de police affectés à des tâches administratives, l’abandon des charges indûment supportées par les personnels et la mise en œuvre de la réforme des transfèrements entamée cette année.

● La gendarmerie a mené en 2009 un audit interne recensant les missions exercées hors du cœur de métier afin d'en évaluer l'impact et d'en réduire les coûts. Répertoriées au nombre de 54, ces missions sont de portée très variable, tant au niveau des moyens déployés que de leur portée symbolique. Il s’agit notamment des gardes des centres de rétention administrative, transférées depuis à la police aux frontières, des extractions et transfèrements judiciaires, des extractions médicales, de la garde de détenus hospitalisés en milieu ouvert, de la police des audiences, de différentes gardes statiques.

● Il n’apparaît pas sur ce dernier point que des progrès significatifs soient observés même si la police nationale fait état de progrès sensibles depuis 2009. S’agissant de la police nationale, des discussions ont été engagées avec les préfets dans certains départements afin de mettre en place un système de vidéosurveillance en remplacement des gardes statiques, ce qui a été réalisé sur certains sites. Un plan d’équipement des préfectures et sous-préfectures en vidéoprotection est en cours de déploiement (gain de 80 ETPT, réparti sur 2010 et 2011). Lorsque la garde ne répond pas à un impératif de sécurité et de protection, des solutions alternatives peuvent être développées afin de soulager les services de police de cette charge en faisant appel à des sociétés privées de surveillance ou en utilisant des dispositifs de vidéo-surveillance et/ou d’alarmes.

Pour la période la plus récente, la Préfecture de police a établi un plan de réduction des gardes statiques (gain de 11 ETPT en 2009, 48 ETPT en 2010, 23 ETPT en 2011). Un accord de principe a été trouvé, le 6 mai 2010, avec le ministère de l’Écologie, du développement durable, des transports et du logement, sur l’externalisation des missions d’escorte motorisées (gain de 40 ETPT en 2011).

Le plan de substitution engagé en octobre 2008 a déjà permis de remplacer, nombre pour nombre, plusieurs centaines de policiers actifs employés dans des missions non-opérationnelles par des agents des corps de soutien.

● La rationalisation des fonctions support engagée dès janvier 2009 dans le cadre de la RGPP, s’est également traduite par le recentrage de plusieurs dizaines de policiers actifs sur des missions de lutte contre la délinquance. Elle sera amplifiée dans la seconde phase de la RGPP (2012-2013) dont les réformes s’appliquent principalement aux fonctions non opérationnelles.

● Enfin le Premier ministre a décidé en 2009 que les transfèrements des détenus entre leur cellule et le palais de justice et les missions d’escorte et de garde des détenus hospitalisés dans les unités hospitalières sécurisées interrégionales (UHSI) sera assurée par l’administration pénitentiaire du ministère de la Justice. La charge des transfèrements judiciaires reviendra au ministère de la Justice à compter de l’écrou, selon un calendrier échelonné de 2011 à 2013. La charge actuelle pour le ministère de l’Intérieur a été estimée à 1 200 emplois, 800 emplois devant être transférés au ministère de la Justice, compte tenu des gains de productivité attendus de l’unité de gestion et de la visioconférence.

L’échelonnement des transferts sera de 200 emplois en 2011, 250 en 2012 et 350 en 2013. Le transfert des missions a débuté, pour la police, en septembre 2011 dans les régions Lorraine et Auvergne. Il s’étendra à la Basse-Normandie en décembre 2011 puis aux autres départements en 2012 et 2013. La préfecture de police, afin de rationaliser la prise en compte des transfèrements des détenus, a redéfini les compétences de la compagnie des transferts, escortes et protections sur le ressort des quatre départements composant l’agglomération parisienne (Paris, Hauts-de-Seine, Seine-Saint-Denis, Val-de-Marne). Pour la gendarmerie également, la mise en œuvre de cette mesure a fait l'objet d'une planification triennale de transfert de cette mission par zone géographique. Ainsi, trois régions de gendarmerie sont concernées en 2011, 14 régions en 2012, les dernières régions procédant au transfert en 2013.

II.– LES MOYENS ET LA GESTION BUDGÉTAIRES ONT CONSIDÉRABLEMENT ÉVOLUÉ DEPUIS 2002

Depuis 2002, les moyens dévolus à la sécurité publique ont considérablement évolué.

La loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure du 29 août 2002 (dite « LOPSI 1 ») avait prévu de renforcer d’une manière très significative les moyens alloués à la sécurité intérieure.

La loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite LOPPSI 2, s’inscrit dans le contexte de la révision générale des politiques publiques (RGPP) et procède d’une approche moins quantitative et plus sélective.

Le cadre budgétaire est désormais beaucoup plus contraint. La sécurité publique n’échappe pas à l’effort de rigueur qui s’impose à toutes les administrations. Il s’agit de « faire mieux pour moins cher ». Il importe de veiller à ce que ces deux impératifs ne soient pas contradictoires, l’optimisation des moyens devant avoir pour conséquence la poursuite d’une amélioration des résultats. Le cadre contraint des programmations triennales 2009-2011 et 2011-2013 oblige à des choix budgétaires forts.

A.– LE TEMPS DE LA REMISE À NIVEAU : LA LOPSI 1 (2002-2007)

Le bilan de l’exécution de la première loi d’orientation et de programmation pour la sécurité intérieure du 29 août 2002 (dite « LOPSI 1 »), qui couvrait la période 2003-2007, est très positif, en particulier en ce qui concerne la police nationale. Pour la première fois, une loi de programmation pluriannuelle aura été quasiment respectée sur toute sa durée. Un tel résultat était loin d’être acquis, notamment au regard du précédent malheureux de la loi d’orientation et de programmation relative à la sécurité (LOPS) du 21 janvier 1995.

Les effectifs des forces de sécurité ont progressé de 8,6 % entre 2003 et 2007.

1.– Une exécution très positive concernant la police nationale

Fin 2007, les objectifs budgétaires fixés par la LOPSI pour la police nationale avaient presque tous été atteints, en ce qui concerne aussi bien les moyens de fonctionnement, d’équipement et d’investissement que les effectifs.

Les effectifs de la police nationale sont passés de 132 411 (hors adjoints de sécurité) en 2003 à 148 474 ETPT en 2007 (taux de réalisation de 99 % du plafond d’emplois) et 147 650 ETPT en 2008 (taux de réalisation de 99 %).

Ces effectifs supplémentaires ont permis de renforcer les moyens et également facilité les redéploiements territoriaux entre les circonscriptions de police et de gendarmerie. Cette augmentation des effectifs s’est accompagnée de la mise en œuvre de la réforme des corps et carrières de la police nationale, à partir de 2004.

Les crédits de fonctionnement, d’équipement et d’investissement ont représenté 1 180 millions d’euros en crédits de paiement, sur la période 2003-2007, soit un taux de réalisation de 100 % de la LOPSI. Ces crédits ont permis d’achever en 2007 les grands programmes d’investissement prévus : dotation d’une nouvelle tenue, équipement de gilet pare-balles personnel à port dissimulé, déploiement d’armements individuels nouveaux (pistolet SIG Sauer, lanceurs de balles de défense), accroissement du parc automobile.

La police technique et scientifique a connu une montée en puissance importante, comme précédemment indiqué.

S’agissant de la gestion immobilière, la LOPSI 1 avait pour objectif de porter progressivement le nombre de mises en chantier de 45 000 à 100 000 m2 par an. Le total des mises en chantier sur la période 2003-2007 a atteint 357 376 m2. Alors que les objectifs de dépenses immobilières de la LOPSI s’élevaient à 375 millions d’euros, les réalisations devaient en fait dépasser les 528 millions d’euros sur la période 2003-2007, soit un taux de réalisation supérieur à 140 %, et qui s’explique notamment par la hausse très significative des prix du foncier et des coûts de construction.

Entre 2002 et 2007, le nombre de départements couverts par le réseau de communication numérique sécurisé ACROPOL (automatisation des communications radiotéléphoniques opérationnelles de la police) est passé de 15 à 96. Tous les départements métropolitains en bénéficient désormais.

C’est également dans le cadre de la LOPSI 1 que la modernisation des centres d’information et de commandement (CIC) a été engagée.

2.– Un bilan satisfaisant s’agissant de la gendarmerie nationale

La LOPSI 1 (2003-2007) s’est combinée, pour la gendarmerie nationale, avec la loi de programmation militaire 2003-2008. Les créations de postes sur les cinq années (6 050) sont plus éloignées de la cible LOPSI 1 (7 000) que pour la police, avec un taux d’exécution de 86,4 %.

L’effectif global de la gendarmerie nationale est passé de 96 724 militaires et civils en 2003 à 100 410 ETPT en 2007 (soit un taux de réalisation de 98,3 % du plafond d’emplois) et 100 542 ETPT en 2008 (soit un taux de réalisation de 99 %).

Le redéploiement des circonscriptions s'est réalisé simultanément à des redécoupages territoriaux internes à la gendarmerie, comme la mise en place des communautés de brigades.

Le taux de réalisation prévisible des crédits d’investissement, seulement de 70 %, est lié au retard constaté dans la passation d’un marché relatif aux 92 nouveaux véhicules blindés de la gendarmerie.

Les crédits d’équipement de la LOPSI 1 ont cependant permis d’améliorer l’équipement individuel des gendarmes (gilet pare-balles à port discret, nouvelle tenue de service, nouveau pistolet automatique) et d’achever, en 2007, le remplacement des 996 véhicules de groupe de la gendarmerie mobile.

B.– LE TEMPS DE LA RÉVISION GÉNÉRALE DES POLITIQUES PUBLIQUES, DEPUIS 2007

La révision générale des politiques publiques a été entreprise dès l’élection du Président de la République en 2007.

La diminution des moyens budgétaires ne résulte pas seulement des nouvelles contraintes budgétaires. Elle traduit également l’existence des gains de productivité.

Malgré le caractère prioritaire de la politique de sécurité publique, les services de police et de gendarmerie restent soumis à la règle du non remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant à la retraite. Les effectifs globaux sont ainsi passés de 248 884 à 240 397 de 2007 à 2010. Cette baisse étant compensée par un recours croissant aux réservistes.

1.– La révision générale des politiques publiques

a) Les objectifs

La RGPP a fait l’objet de plusieurs réunions du conseil de la modernisation des politiques publiques (CMPP), les trois premières ont procédé à l’établissement des mesures retenues (12 décembre 2007, 4 avril 2008 et 11 juin 2008).

Le CMPP du 4 avril 2008 avait prévu le transfert de la gendarmerie nationale sous l’autorité organique et fonctionnelle du ministre de l’Intérieur, dans le respect du statut militaire des gendarmes.

Le CMPP du 11 juin 2008 prévoyait de concentrer l’action de la police et de la gendarmerie sur leur cœur de métier : la sécurité et la lutte contre toutes les formes de délinquance. Les missions périphériques ou annexes devaient être supprimées, externalisées ou reprises à leur compte par les donneurs d’ordre (gardes statiques, protection des personnes, escortes et transfèrement judiciaires, convoyages motorisés). Dans les cas contraires, ces services devaient être facturés ; chaque fois que c’est possible, des personnels administratifs devaient être substitués aux policiers et aux gendarmes, ces derniers se consacrant intégralement à la lutte contre la délinquance.

Les marges de manœuvre dégagées sur certaines missions connaissant une baisse d’activité, telle que l’ordre public, devaient permettre de renforcer la présence des forces de sécurité dans les agglomérations qui en ont le plus besoin.

Les efforts en termes de sécurité routière devaient se traduire par un redéploiement des moyens vers les lieux et dans les créneaux horaires où surviennent le plus d’accidents. Les conduites addictives au volant seraient ciblées.

Le même conseil de modernisation du 11 juin 2008 avait souligné les enjeux qui s’attachent à la mise sous une même autorité organique et fonctionnelle des forces de police et gendarmerie : elle devait permettre une efficacité accrue dans la lutte contre la délinquance et s’accompagner du redéploiement des zones de compétence.

La mutualisation des moyens de la police et de la gendarmerie, la fusion des services de renseignement au sein de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI), la restructuration des services, structures qui n’ont désormais plus la taille critique (les plus petites unités de police aux frontières, les brigades de moins de six gendarmes, voire certaines circonscriptions de sécurité publiques très proches ou imbriquées), l’adaptation du format des forces mobiles (escadrons de gendarmerie mobile et compagnies républicaines de sécurité) étaient annoncées.

Par ailleurs, un objectif de 40 % a été fixé par le même CMPP pour le taux d’élucidation des crimes et délits, grâce notamment aux actions suivantes : mise à niveau des laboratoires, émergence de pôles d’excellence, certification selon les normes ISO des procédures, rationalisation et modernisation des fichiers partagés : fichier national des empreintes génétiques (FNAEG), fichier automatisé des empreintes digitales (FAED).

b) Les résultats

Le quatrième rapport d’étape sur la mise en œuvre de la RGPP (conseil de modernisation des politiques publiques du 30 juin 2010) permet de faire le point sur l’application de la RGPP en matière de sécurité.

Le rattachement de la gendarmerie nationale au ministère de l’Intérieur afin d’accroître l’efficacité de la politique de sécurité a été concrétisé par la loi du 3 août 2009, qui a consacré le rattachement organique et opérationnel des gendarmes au ministère de l’Intérieur, dans le respect de leur statut militaire.

Le recentrage des forces de sécurité sur leur cœur de métier et sur leur mission prioritaire de protection des citoyens réduire les missions périphériques assurées par les services de sécurité s’est traduit par des études, dans 22 préfectures, destinées à l’installation de dispositifs de vidéosurveillance et permettant de réduire progressivement les gardes statiques. Les agents qui étaient affectés à la garde de bâtiments administratifs devront être redéployés sur la voie publique. Enfin, les postes administratifs sont progressivement pourvus par des personnels administratifs libérant ainsi des policiers et des gendarmes pour des activités opérationnelles. Près de 600 postes ont été ainsi transformés en 2009 et 1 000 personnels administratifs, techniques et scientifiques ont été recrutés dans la police nationale.

L’adaptation des forces de sécurité aux évolutions de la délinquance par une meilleure couverture du territoire s’est traduite par la mise en œuvre de la police d’agglomération et l’adaptation des dispositifs de sécurisation.

La lutte contre l’insécurité routière a été renforcée grâce à une réorganisation des forces et à l’amélioration de leurs outils. Les forces dédiées à la sécurité routière ont pu concentrer leur action sur les zones les plus risquées. Début 2010, plus de 80 % de l’activité de sécurité routière de la gendarmerie nationale est réalisée hors autoroute, où les risques d’accidents sont les plus élevés. La lutte contre l’insécurité routière passe également par la modernisation des outils à disposition des forces de sécurité. Près de 125 000 kits salivaires ont été déployés en 2009 pour faciliter le dépistage des conduites addictives, tandis que la modernisation de la flotte de radars automatisés embarqués se poursuit.

Le conseil de modernisation des politiques publiques a décidé de poursuivre le déploiement du procès-verbal électronique afin de permettre aux forces de sécurité de se concentrer sur leurs missions prioritaires.

Le tableau de synthèse d’application des réformes issues des quatre premiers CMPP met en évidence que la quasi-totalité des mesures ont été mises en œuvre, à quelques exceptions notables : premièrement, et principalement, la réduction de la mobilisation des forces de sécurité assurant la garde des dépôts et la police des audiences grâce au recours aux réservistes de la police nationale et de l’administration pénitentiaire, aux prestataires privés et à de nouveaux outils.

2.– La recherche d’une optimisation des moyens

Les contraintes budgétaires limitent, depuis 2008, les moyens de la sécurité publique, mais de façon inégale selon les postes de dépenses.

a) Pression de la masse salariale, diminution des effectifs, et affaiblissement des moyens de fonctionnement et des investissements

La comparaison des données de l’exécution des crédits de 2008 et du projet de loi de finances 2012 est éclairante. Les crédits de paiement sur l’ensemble de la mission sont supérieurs de 7,7 % en 2012 par rapport à 2008, mais les dépenses de rémunérations augmentent de 11,2 % alors que les moyens de fonctionnement et d’investissement régressent de 11,6 %. Dans le même temps, les emplois (ETPT) sont ramenés de 248 192 en exécution 2008 à 239 597 en projet de loi de finances 2012, la suppression est de 8 595 ETPT (3,5 %).

Le budget est donc contraint doublement : les effectifs doivent baisser pour alléger des charges de rémunérations qui augmentent continûment (la part des rémunérations dans l’ensemble du budget est passée de 84,6 % en 2008 à 87,4 % en projet de loi de finances 2012) et par ailleurs la diminution des moyens de fonctionnement et d’investissement risque d’empêcher les services d’être efficaces.

L’adaptation des structures s’est appliquée à divers postes : le dispositif de formation et celui des forces mobiles de maintien de l’ordre. Comme l’a indiqué le directeur général de la Police nationale (DGPN), M. Frédéric Péchenard, à la commission des Finances, lors de son audition du 22 juin 2011, il convient à l’avenir de sanctuariser les effectifs dédiés à l’investigation judiciaire, en particulier ceux de la PTS car l’investigation judiciaire permet d’augmenter les mis en cause et les taux d’élucidation. Il faut également préserver les effectifs de la DCRI, compte tenu de la menace constante du terrorisme islamiste. Il faut enfin sanctuariser les effectifs des services généraux, compte tenu de la nécessité de déployer sur le terrain des policiers visibles comme les « patrouilleurs ».

Cette définition des priorités et symétriquement des secteurs où l’on pourrait se résoudre à réaliser des économies correspond peu ou prou à ce qui a été pratiqué depuis le début de la mise en œuvre de la RGPP.

b) La réorganisation du dispositif de formation

Aussi bien dans la police que dans la gendarmerie, la réduction du dispositif de formation a permis son adaptation à des flux de recrutements en diminution. Le volume des actions de formation a donc globalement diminué mais non celui des formations individuelles.

Dans la police nationale, l’allègement du dispositif de formation a été engagé dès 2008. Dans le cadre de la RGPP et du redimensionnement du réseau de la direction de la formation de la police nationale, plusieurs fermetures de structures ont été décidées afin de rationaliser les moyens et d’améliorer l’emploi des personnels, et notamment des formateurs.

Le 1er septembre 2010, a été créée la direction des ressources et des compétences de la police nationale (DRCPN), qui a intégré les anciens éléments de la direction de la formation, supprimée. En son sein, la sous-direction de la formation et du développement des compétences (SDFDC) a poursuivi le travail, engagé en 2008, de redimensionnement du réseau de la formation.

En 2009, 8 centres de formation avaient été fermés. Les personnels de ces centres ont été réaffectés, et les locaux remis à disposition de la direction centrale des CRS. 3 autres centres de formation ont été transformés ou intégrés au sein d’autres structures de la formation.

En 2010, deux écoles nationales de police, situées à Marseille et à Vannes, ont été fermées. Ces deux fermetures ont permis le reclassement au sein d’autres directions de la police nationale et de structures du ministère de l’intérieur de 83 personnels actifs et de 61 personnels administratifs et techniques, auxquels s’ajoutent 13 départs à la retraite. Les ENP de Draveil et de Paris ainsi que le CNEF (centre national d’études et de formation) de Gif-sur-Yvette ont été transformés en centres régionaux de formation.

En 2011, la mise en place des délégations interrégionales au recrutement à la formation (DIRF) et des délégations au recrutement et à la formation (DRF) ont permis de regrouper les structures de formation initiale et continue d’un même ressort géographique sous l’autorité d’un délégué zonal dans l’objectif de réaliser, grâce à une plus grande synergie et la mise en commun de moyens humains et matériels, des économies d’échelle.

En région parisienne, la DRF de Paris-Île de France constitue le regroupement territorial de deux anciennes DRRF. Les deux écoles nationales de police (Paris et Draveil) ont été transformées en centres régionaux de formation (CRF). Le centre national d’études et de formation (CNEF) et l’ancienne délégation régionale au recrutement et à la formation (DRRF) d’Île de France ont fusionné pour constituer le centre régional de formation de Gif-sur-Yvette.

Par ailleurs à la fin de 2011, l’école nationale de police de Châtelguyon sera fermée. Le reclassement des 71 agents (37 policiers actifs et 34 administratifs et techniques) est en cours.

Dans la gendarmerie nationale, les écoles de gendarmerie de Montargis, Le Mans, Châtellerault et Libourne ont été fermées le 1er septembre 2009. Celles de Melun, Chaumont, Montluçon, Châteaulin et Tulle constituent désormais le dispositif de formation initiale des officiers, sous-officiers et gendarmes adjoints volontaires de la gendarmerie nationale.

c) La restructuration des moyens de maintien de l’ordre

En 2007, l’effectif global des forces mobiles était de 33 600 agents, 15 000 pour les CRS, 18 600 pour la gendarmerie mobile. Les travaux de la RGPP ont mis en lumière que la restructuration des forces mobiles procède du constat de relativement moindres besoins de forces de maintien de l’ordre, dans le contexte de la révision générale des politiques publiques. Police et gendarmerie ont procédé différemment : la police a opéré une réduction des effectifs au sein de chaque unité en maintenant, jusqu’à récemment, le nombre de compagnies de CRS, la gendarmerie a supprimé des escadrons de gendarmerie mobile.

● Pour la police nationale, La RGPP a conduit la direction centrale des CRS, conformément aux décisions prises lors du conseil de modernisation du 4 avril 2008, à un réexamen à la fois du potentiel global des unités de service général mais aussi de leur contrat capacitaire. Ce dernier concerne le nombre minimum d'agents qu'une compagnie est capable de rassembler en toutes circonstances pour l'accomplissement d'une mission. Correspondant aux trois-cinquièmes de l'effectif de la compagnie, cette capacité subit directement l'impact de la réduction du nombre de fonctionnaires affectés dans les compagnies.

Bien que le nombre de compagnies de service général (dédiées au maintien de l’ordre) reste à 60, l’effectif qui leur est affecté a été réduit de 870 ETPT depuis la mise en œuvre de la RGPP, ce qui représente 10 unités opérationnelles ou 6,2 unités organiques (à 140 gradés et gardiens).

Ainsi, les effectifs opérationnels de l'ensemble des unités de service général ont diminué pour passer de 150 à 140 par unité. Cette situation implique des aménagements dans le fonctionnement même des compagnies (régime de prise de repos en déplacement modifié, prise de repos par unité ou demi-unité) afin de garantir une véritable capacité opérationnelle.

La doctrine d’emploi des CRS a également évolué. Depuis novembre 2002, la doctrine d'emploi des compagnies républicaines de sécurité répondait au principe de la zonalisation ; à l'exception des missions nationales assurées au titre de la réserve générale et pour lesquelles une décision de la direction générale de la police nationale est nécessaire, les unités CRS sont engagées au niveau des zones de défense.

Une nouvelle doctrine d’emploi des forces mobiles, accompagnée d’une nouvelle instruction commune d’emploi, a été élaborée en décembre 2009. Cette nouvelle doctrine conforte le principe de déconcentration de l’emploi des unités au niveau du préfet de zone de défense hors missions nationales. La nouveauté réside dans la rationalisation de l’emploi des unités, au travers des 3 points suivants :

– sécabilité des unités en mission de maintien de l’ordre (MO) ;

– réversibilité missionnelle (passage d’une mission de MO à une mission de sécurisation) ;

– fongibilité des zones de compétence gendarmerie/police en matière de sécurisation, pour les forces mobiles.

● Pour la gendarmerie nationale, la diminution des unités a été significative. En 2007, la gendarmerie mobile comptait 123 escadrons (EGM) totalisant un effectif de 14 082 militaires. En 2010 et 2011, 15 unités ont été dissoutes, portant le nombre d’escadrons à la fin 2011 à 108, pour un total de 12 373 militaires.

La doctrine d’emploi des forces mobiles est commune à la police nationale et à la gendarmerie nationale. La coordination nationale de l'emploi des forces mobiles est assurée par l'Unité de coordination des forces mobiles (UCFM). Celle-ci est rattachée au cabinet du DGPN mais est placée sous l'autorité conjointe du DGPN et du DGGN.

La déconcentration de l'emploi des unités de forces mobiles (UFM) au niveau de la zone de défense (reliquat zonal) est réaffirmée, la coordination étant assurée sous l'autorité du préfet de zone par l'unité zonale de coordination des forces mobiles (UZCFM) en liaison avec le commandant de région de gendarmerie pour la zone de défense et de sécurité (RGZDS) et le directeur Zonal des compagnies républicaines de Sécurité (DZCRS).

C.– LE PROJET DE BUDGET DE LA SÉCURITÉ POUR 2012

Pour la mission Sécurité comme pour l’ensemble du budget général, le projet de loi de finances pour 2012 s’inscrit dans un nouveau cadre pluriannuel qui tend à plafonner, à l’horizon 2013, les dotations en autorisations d’engagement et crédits de paiement.

Aussi bien dans la police que la gendarmerie, le poids des rémunérations augmente encore en 2012 alors que les plafonds d’emplois sont une nouvelle fois abaissés. D’un budget à l’autre depuis 2009, on peut réitérer les mêmes observations : la croissance extrêmement soutenue des dépenses de personnel rigidifie la gestion budgétaire et rend difficile une programmation réaliste des moyens de la mission Sécurité.

1.– L’exécution 2011 et le plan de mobilisation

L’exécution 2011 est plus favorable que prévu en matière de rémunérations, mais il n’empêche que le financement de différents avantages catégoriels maintient la pression sur ce poste de dépenses en 2012. La maîtrise de la masse salariale permet de consacrer un effort particulier pour les investissements de la police.

a) Des économies sur les rémunérations

Au cours de l’exécution 2011, les économies constatées sur les rémunérations ont été redéployées dans le cadre du plan de mobilisation des forces de sécurité, annoncé en juin 2011.

Ainsi, la prévision de dépense de titre 2 de la police pour l’année 2011, présentée lors de l’examen, par le contrôleur budgétaire et comptable ministériel, de la prévision budgétaire initiale (PBI), s’élevait à 8 074,9 millions d’euros. Le point de situation budgétaire réalisé en mai (PSB) a porté la prévision à 8 095,9 millions d’euros : cette hausse s’explique essentiellement par la prise en compte du plan de mobilisation décidé en gestion. En programmation budgétaire rectificative de septembre 2011, la prévision s’établit à 8 077,2 millions d’euros, donc à un niveau très proche de la prévision initiale.

b) Le plan de mobilisation

Une réserve de 40,5 millions d'euros a donc été constituée en gestion 2011. Cette réserve a permis de financer le plan de mobilisation, avec pour objectif l’augmentation de la présence et de la visibilité de la police par le recrutement de 800 ADS, le financement de 35 000 vacations supplémentaires de réservistes et un paiement d’heures supplémentaires ciblées. Le dégel de la réserve de précaution a été demandé ainsi qu’un abondement des crédits hors titre 2, au titre de la fongibilité asymétrique, à hauteur de 10 millions d'euros.

Les montants obtenus au titre du plan de mobilisation des forces de sécurité pour la police nationale sont récapitulés par le tableau ci-joint.

PLAN DE MOBILISATION JUIN 2011

(en millions d’euros)

a) Recrutement de 800 adjoints de sécurité

4,9

17,9

b) 35 000 vacations de réservistes

4

c) Heures supplémentaires

9

d) Redéploiement par fongibilité asymétrique

10

20,5

e) Abondement LFR (garde à vue)

10,5

TOTAL

38,4

 

Source : direction générale de la police nationale.

Les 800 adjoints de sécurité prévus devaient être recrutés à raison de 176 au premier semestre, 324 en juillet, 300 à la mi-septembre devant sortir de formation fin décembre.

Les 35 000 jours de réservistes supplémentaires sont répartis de la manière suivante : 27 650 jours au profit de la sécurité publique dont 3 080 pour la préfecture de police ; 1 730 jours à la direction centrale des CRS (DCCRS) ; 1 050 jours à la direction centrale de la police judiciaire (DCPJ) ; 2 190 jours à la direction centrale de la police aux frontières (DCPAF) et 2 380 jours au profit d’autres directions de police.

Les 10 millions d’euros de crédits hors rémunérations obtenus par fongibilité asymétrique sont destinés à l’amélioration de la sécurité en intervention (3,4 millions d’euros) par l’acquisition de 5 000 gilets pare-balles, de 1 000 boucliers balistiques, de 200 lanceurs de balles de défenses et de dispositifs de géo-localisation des patrouilleurs à pied. La livraison de l’ensemble de ces équipements est prévue en novembre 2011.

Il s’y ajoute l’amélioration de la visibilité de la police et des conditions de travail par l’acquisition de 330 véhicules neufs sérigraphiés (6,55 millions d’euros).

Les 10,5 millions d’euros de crédits obtenus en loi de finances rectificative au titre de la mise en œuvre du nouveau régime de garde à vue (GAV) sont destinés l’aménagement de locaux d’avocats et d’auditions ainsi que des travaux de rénovation des locaux de garde à vue, au déploiement de la visio-conférence, et à l’acquisition de détecteurs de métaux.

Le plan de mobilisation, pour la gendarmerie, comprend un volet de rémunérations (titre 2) et un volet hors rémunérations.

15,5 millions d’euros hors CAS doivent être financés par un dégel de la réserve de précaution pour le recrutement de 200 gendarmes adjoints volontaires (0,9 million hors CAS) ; pour le déploiement de 100 000 jours de réservistes supplémentaires (9,5 millions d’euros hors CAS) ; et l’optimisation opérationnelle des effectifs disponibles par le rachat de jours de repos hebdomadaire (5,1 millions d’euros hors CAS).

Le redéploiement de 10 millions d’euros de crédits de rémunérations sur les moyens de fonctionnement permettra de mettre en œuvre les actions suivantes : l’amélioration des conditions de vie des militaires et de leurs familles par l’abondement des budgets des régions pour les besoins urgents en matière d’entretien et de maintenance courante immobilière (2,4 millions d’euros) pour 63 opérations programmées ; l’amélioration de la sécurité en intervention par l’acquisition de 350 bulles tactiques (1,5 million d’euros) ; l’acquisition de 400 pistolets à impulsion électrique (0,8 million d’euros) ; l’installation d’un parcours de tir en situation dans les écoles de gendarmerie de Châteaulin et Montluçon (0,3 million d’euros) et l’amélioration des conditions de travail et de visibilité par l’acquisition de 270 véhicules neufs sérigraphiés (5 millions d’euros).

2.– Un aménagement de la programmation triennale

Le projet annuel de performances présente, pages 10 et 11, le cadrage de la programmation triennale et une évolution des crédits pour 2012 sensiblement plus favorable que le cadrage triennal retenu l’an dernier, principalement pour le programme Police nationale.

Des moyens supplémentaires en hors titre 2 sont prévus en 2012 afin de renforcer la capacité opérationnelle des services, pour un montant de 284,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 90 millions d’euros en crédits de paiement. Ils seront consacrés à des opérations et dépenses immobilières (221,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et 27,2 millions d’euros en crédits de paiement), à l’acquisition de véhicules supplémentaires (35,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement), à l’achat de matériel informatique (7 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement) et au fonctionnement courant des services (20,5 millions d’euros en autorisations d’engagement et en crédits de paiement). Compte tenu de la nouvelle évaluation de la masse salariale qui, à schéma d'emplois inchangé, est inférieure de 40 millions d’euros à la prévision initiale, les crédits de la mission progressent au global de 244,3 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 50 millions d’euros en crédits de paiement.

Par ailleurs un effort supplémentaire est réalisé en titre 2 à hauteur de 40 millions d’euros par rapport à la LPFP.

Sur le seul poste des moyens de fonctionnement et d’investissement de la police, la prévision initiale du budget triennal 2011-2013 prévoyait un budget 2012 de 889 millions d’euros, soit une diminution de près de 8 % entre 2011 et 2012.

Le montant inscrit en projet de loi de finances 2012 représente 956 millions d’euros de crédits hors titre 2. Les crédits de fonctionnement, d’équipement et d’investissement (hors titre 2) alloués à la police nationale pour 2012 ont fait l’objet d’un abondement de 66 millions d’euros, par rapport aux montants prévus par la loi de programmation pluri annuelle des finances publiques (LPFP) 2011-2013 afin d’accroître les capacités opérationnelles des services.

Ainsi, 20 millions supplémentaires seront attribués au fonctionnement courant, ce qui permettra de maintenir le budget de fonctionnement des services de la police nationale au même niveau qu’en 2011.

Parallèlement, un complément de 22 millions d’euros sera dédié au renouvellement du parc automobile léger, pour atteindre 36 millions d’euros au titre des crédits de l’année et 50 millions d’euros de livraisons neuves en 2012. Un effort significatif sera fait au profit des véhicules sérigraphiés.

Le renouvellement de l’informatique des services fera également l’objet d’un effort adapté au vieillissement du parc. Ainsi, 7 millions d’euros compléteront les prévisions de la LPFP 2011-2013, permettant un doublement de l’enveloppe initialement prévue.

Enfin, 17 millions d’euros de crédits de paiement viendront abonder les crédits immobiliers. Ils permettront d’assurer l’entretien du parc immobilier de la police nationale et de financer 40 millions d’euros d’autorisations d’engagement supplémentaires par rapport aux prévisions de la LPFP 2011-2013.

Selon la direction générale de la Gendarmerie nationale, le calibrage du budget 2012 est globalement en adéquation avec la programmation triennale, l'abaissement du T2 de 7,8 millions d’euros ayant été compensé par une hausse du HT2 à due concurrence.

3.– La maîtrise des charges de personnels

a) Les rémunérations

L’augmentation des charges de personnel s’inscrit dans le cadre d’une tendance constante depuis plusieurs années. La part des dépenses de rémunérations inscrites au titre 2 avait représenté 84,64 % du total des crédits de paiement consommés en exécution 2008.

En loi de finances initiale pour 2010, la part des rémunérations représentait 85,96 % des dotations prévues pour l’ensemble de la mission, part portée à 86,20% en exécution. En projet de loi de finances pour 2012, la part des dépenses de rémunérations inscrites au titre 2 est prévue pour l’ensemble de la mission à 87,39 %.

Les dotations de titre 2 s’élèvent à 14 911 millions d’euros sur 17 063 millions d’euros de crédits inscrits pour l’ensemble de la mission, en augmentation de 2 % en autorisations d’engagement et en crédits de paiement. L’an dernier, la progression des crédits de rémunérations du projet de loi de finances 2011 sur le projet de loi de finances 2010 était de 3,8 %.

Sur 14,9 milliards d’euros de crédits de personnels, 5,28 milliards, soit 37,4 %, sont consacrés à la contribution de la mission Sécurité au compte d’affectation spéciale (CAS) des pensions pour le financement des pensions de retraite, soit une augmentation de 5,6 % par rapport à 2011. Pour la police, la croissance est de 5,4 % par rapport à 2011 ; et pour la gendarmerie nationale de 5,9 %.

La progression des dotations de rémunérations d’activité connaît un certain ralentissement au sein du programme Police nationale (+ 0,1 %), alors que les rémunérations d’activité diminuent au sein du programme Gendarmerie nationale (– 1,2 %).

Il s’agit d’une inflexion significative par rapport aux tendances des précédentes années.

L’année 2011 se traduit pour la police et dans une moindre mesure pour la gendarmerie par une consommation de crédits de rémunérations inférieure aux prévisions. Pour la police nationale, la prévision d’exécution 2011 est de 5 638 millions d’euros au lieu de 5 656,5 millions d’euros ouverts par la loi de finances initiale ; pour la gendarmerie, les prévisions d’exécution, de 3 676,6 millions d’euros sont globalement en adéquation avec les dotations de loi de finances initiale, de 3 676,9 millions d’euros.

Nonobstant sa très faible progression, l’enveloppe de rémunérations d’activité de la police pour 2012 est réputée en adéquation avec la nécessité de financer des mesures catégorielles conséquentes.

CRÉDITS DE LA MISSION SÉCURITÉ PAR PROGRAMME ET TITRE

(en millions d’euros)

 

Autorisations d’engagement

Crédits de paiement

Numéro et intitulé du
programme et du titre

LFI 2011

PLF 2012

Évolution
(%)

LFI 2011

PLF 2012

Évolution
(%)

176 – Police nationale

9 137,7

9 275,9

+ 1,5

9 083,3

9 210,4

+ 1,4

Titre 2 : Dépenses de personnel

8 118,1

8 253,8

+ 1,7

8 118,1

8 253,8

+ 1,7

Autres dépenses dont :

1 019,6

1 022

+ 0,2

965,3

956,5

– 0,9

Titre 3 : Dépenses de fonctionnement

884,3

703,8

- 20,4

761

743,7

– 2,3

Titre 5 : Dépenses d’investissement

90,9

279,9

+ 207,9

159,9

174,5

+ 9,1

Titre 6 : Dépenses d’intervention

44,4

38,3

– 13,7

44,4

38,3

– 13,7

152 – Gendarmerie nationale

7 666,5

7 892,4

+ 2,9

7 722,1

7 852,9

+ 1,7

Titre 2 : Dépenses de personnel

6 494,2

6 657,1

+ 2,5

6 494,2

6 657,1

+ 2,51

Autres dépenses dont :

1 172,3

1 235,3

+ 5,4

1 227,9

1 195,8

– 2,6

Titre 3 : Dépenses de fonctionnement

1 043,6

1 058

+ 1,4

1 054,8

1 061,6

+ 0,6

Titre 5 : Dépenses d’investissement

114,1

161,9

+ 42

160,8

122,2

– 23,9

Titre 6 : Dépenses d’intervention

14,7

15,3

+ 4,7

12,3

11,9

– 3

Total pour la mission

16 804,2

17 168,3

+ 2,2

16 805,4

17 063,3

+ 1,5

Indépendamment des 5,5 millions d’euros prévus au titre de l’indemnité dite de garantie individuelle de pouvoir d’achat et du GVT solde de 24,3 millions d’euros, l’enveloppe prévue pour les mesures catégorielles et indemnitaires s’élève à 62,5 millions d’euros. Elle vise, notamment, à financer la poursuite de la mise en œuvre des protocoles d’accord relatifs à la réforme des corps et carrières lancée en 2004 et du relevé de conclusions relatif à l’adaptation de la nouvelle grille de la catégorie B au corps d’encadrement et d’application (55,9 millions d’euros hors CAS Pensions) ainsi que la rénovation du régime indemnitaire du corps de commandement dans le cadre de la parité avec la gendarmerie (6,6 millions d’euros).

L’enveloppe de rémunérations d’activité de la gendarmerie pour 2012, en diminution de 1,2 %, doit permettre de financer 40,8 millions d’euros de mesures catégorielles (62,8 millions d’euros en année pleine), soit les moyens correspondant à la poursuite du PAGRE rénové (23,2 millions d’euros) ; à la dernière annuité de la nouvelle grille indiciaire défense (1,4 million d’euros) ; au nouvel espace statutaire (transposition de la grille B type : 15,2 millions d’euros) ainsi qu’à l’application des mesures ministérielles au personnel civil : 0,9 million d’euros.

b) Les effectifs

Les plafonds d’emplois de la mission continuent de diminuer, après les réductions des années précédentes, de 3 598 ETPT (hors transferts) en loi de finances initiale 2009, de 2 632 ETPT (hors transferts) en loi de finances initiale 2010 et de 170 ETPT hors transferts en loi de finances initiale 2011. Il s’agit en 2011 du solde de deux mouvements inverses : la création nette de 790 emplois sur le programme Police nationale, et la suppression nette de 960 emplois sur le programme Gendarmerie nationale.

Les suppressions d’emplois hors transferts sont prévues en 2012 à hauteur de 1 573 ETPT dans la police et 1 033 ETPT dans la gendarmerie (2 606 au total).

Il n’en demeure pas moins (7) que les effectifs de la police restent en 2011 supérieurs à ceux de 2002, du moins pour les corps actifs de la police. Certes, le plafond d’emplois pour 2012 est fixé à 143 714 ETPT à comparer avec un effectif réel de 143 855 au 31 décembre 2002, mais la prévision de consommation d’ETPT pour la police nationale est de 145 504 en 2011.

Si l’on retient comme agrégat de référence non pas la totalité des effectifs mais ceux des corps actifs de la police nationale (hors ADS) depuis 1997, on constate que la période 1995-2002 s’est certes soldée par la création de 2 941 emplois de policiers actifs, mais, dans le même temps, la mise en place des 35 heures se traduisait pour la police nationale par la perte d’un potentiel opérationnel équivalent à près de 8 000 ETPT. Cette perte n’a été que partiellement compensée par le recours massif aux adjoints de sécurité, créés en 1998, qui ne peuvent assumer l’ensemble des missions dévolues aux corps actifs, notamment dans la lutte contre la délinquance.

Malgré la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques, à partir de janvier 2009, la période 2002-2010 s’est soldée par la création de 1 514 emplois de policiers actifs. Si la police participe à l’effort de maîtrise des déficits publics comme chaque administration de l’État, les réformes entreprises ont porté au maximum sur les fonctions support pour préserver le potentiel opérationnel des services. L’évaluation de la politique de sécurité ne saurait en effet se limiter au nombre des fonctionnaires : le service rendu à la population dépend avant tout de l’organisation et de l’efficacité des services opérationnels ainsi que de la présence effective des policiers sur la voie publique.

Alors qu’entre 1997 et 2002 la mise en place de la police de proximité a eu pour effets la multiplication des petites unités et la dispersion des effectifs au détriment de l’efficacité, une politique pragmatique a permis, depuis 2002, de renforcer les effectifs présents sur le terrain en optimisant l’organisation des services, en réduisant les missions périphériques sans valeur ajoutée afin de recentrer les policiers sur les tâches de lutte contre la délinquance, en améliorant la coordination et les synergies opérationnelles avec la gendarmerie, en rationalisant les fonctions support et en développant le recours aux nouvelles technologies.

Les effectifs réels dans la gendarmerie s’élevaient à 96 724 au 31 décembre 2002 et la prévision d’ETPT pour 2011 est de 95 317. Le plafond d’ETPT prévu pour 2012 est de 95 883.

L’augmentation de la part des rémunérations opère donc un effet d’éviction sur les autres postes de dépenses, moyens de fonctionnement et investissements, qui ont atteint un niveau préoccupant selon les déclarations à la commission des finances du DGPN et du DGGN lors de leur audition du 22 juin 2011.

Le DGPN a considéré que sa principale crainte s’était déplacée sur les moyens de fonctionnement et l’investissement, car le triennal consacre et accélère la baisse du budget de fonctionnement. Cette situation implique des choix drastiques. La nécessité de maintenir la capacité opérationnelle de la police a conduit à une baisse de l’investissement logistique, technologique et immobilier, a-t-il ajouté, et cette situation n’est pas durable.

Le DGGN a insisté sur la contraction des crédits prévue par la programmation triennale 2011-2013. En 2011, pour préserver la capacité opérationnelle des unités, il a tenu à maintenir en volume les dotations de fonctionnement, au détriment de l’investissement dont les crédits ont subi une baisse de 50 % en 4 ans. Concrètement, il a considéré ne pas être en capacité de lancer de grand programme immobilier alors que le parc domanial vieillit, ni de procéder au renouvellement naturel des véhicules dont l’âge moyen est de 6 ans. De même, le renouvellement et la mise à niveau du parc informatique prennent du retard. En définitive, le DGGN a considéré que si les perspectives budgétaires ne s’amélioraient pas, la baisse du budget d’investissement de la gendarmerie constituerait la principale préoccupation.

4.– Les moyens de fonctionnement et les investissements

Les dépenses hors titre 2 (fonctionnement et investissement) ne représentent plus qu’une faible partie des crédits prévus pour la mission, compte tenu du dynamisme de la masse salariale, exactement 12,6 %, et cette part diminue d’année en année. Les crédits correspondants sont prévus à 2 152,4 millions d’euros pour l’ensemble de la mission, en baisse de 1,9 %.

Il est à noter qu’aussi bien pour la police que pour la gendarmerie, aucune dotation spécifique n’est prévue en 2012 pour l’aménagement des locaux en conséquence de la réforme de la garde à vue.

a) Les crédits de fonctionnement et d’investissement de la police

Le projet de loi de finances pour 2012 prévoit pour la police nationale l’ouverture de 1 022 millions d’euros en autorisations d’engagement (+ 0,2 %) et de 956,5 millions d’euros en crédits de paiement (– 0,9 %) en moyens de fonctionnement et d’investissement.

Même s’ils sont en baisse, ces moyens sont supérieurs aux prévisions de la programmation triennale et ils ont fait l’objet, comme précédemment indiqué, d’un abondement exceptionnel de 66 millions d’euros, afin d’accroître les capacités opérationnelles des services.

Une part importante de l’effort demandé est supportée par les budgets d’investissement immobilier et le domaine de l’informatique et des télécommunications.

Sur les 66 millions d’euros, 20 millions supplémentaires sont prévus pour le fonctionnement courant, ce qui permet une stabilisation de ces crédits par rapport à 2011.

Parallèlement, un complément de 22 millions d’euros est dédié au renouvellement du parc automobile léger, ce qui porte à 36 millions d’euros les crédits prévus à ce titre pour 2012. Un effort significatif est fait au profit des véhicules sérigraphiés.

Le renouvellement de l’informatique des services fait également l’objet d’un effort adapté au vieillissement du parc ; de 7 millions d’euros, qui permettent un doublement de l’enveloppe initialement prévue.

Enfin, 17 millions d’euros de crédits de paiement supplémentaires viennent abonder les crédits immobiliers. Ils permettront d’assurer l’entretien du parc immobilier de la police nationale et de financer 40 millions d’euros d’autorisations d’engagement nouvelles par rapport aux prévisions de la programmation triennale.

En contrepartie de l’effort accompli pour assurer le maintien du budget de fonctionnement des services, une forte contrainte pèse sur le titre 5 consacré aux systèmes d’information et de communication. Ainsi, une demande de dégel intégral de la réserve de précaution, dès le début de la gestion 2012, sera nécessaire pour financer des projets informatiques structurants pour la police nationale, ainsi que d’autres obligations budgétaires, telles le paiement des fourrières.

Il est à noter que sur 956 millions d’euros de crédits de paiement pour les moyens de fonctionnement et les investissements, 107 millions d’euros sont prévus pour les investissements immobiliers, et environ 130 millions d’euros pour les loyers, dont 61 millions d’euros de loyers budgétaires, ce qui met en évidence une nouvelle fois le caractère incontournable de ces postes de dépenses.

b) Les moyens de fonctionnement et les investissements de la gendarmerie

Le projet de loi de finances pour 2012 prévoit pour la Gendarmerie nationale l’ouverture de 1 235,3 millions d’euros d’autorisations d’engagement (+ 5,4 %) et de 1 195,8 millions d’euros de crédits de paiement (– 2,6 %) en moyens de fonctionnement et d’investissement hors titre 2.

Dans un contexte de diminution des moyens, le DGGN a fait le choix de préserver les crédits de fonctionnement courant des unités en limitant l’impact de la baisse des dotations globales à 1,5 % en périmètre constant, hors dépenses de loyers et d’énergie. L’objectif est de permettre aux unités de mener leurs missions opérationnelles et ainsi de préserver le niveau de performance de la gendarmerie.

Au sein du titre 3 qui regroupe les moyens de fonctionnement, la gendarmerie distingue les dépenses de fonctionnement courant (« titre 3 FC ») et les dépenses hors fonctionnement courant (« titre 3 HFC ») correspondant à des investissements inscrits en titre 3 (maintien en condition opérationnelle des systèmes d’information et de communication, MCO des moyens aériens, équipements dont le coût unitaire est inférieur à 10 000 euros, comme l’habillement, l’armement et les munitions, et les véhicules de la gamme commerciale). Cette distinction est opérée dans le projet annuel de performances depuis 2010.

D’un montant de 946,4 millions d’euros après transferts et changement de périmètre, l’évolution du T3 FC est marquée par une hausse des loyers. Toutefois, les suppressions d’effectifs et les transformations d’emplois permettent de contenir l’augmentation des dotations sur ce poste. Pour ce qui concerne les autres dépenses, les montants inscrits en loi de finances initiale 2011 ont été reconduits.

Les prévisions de dépenses de loyers (hors loyers budgétaires) en loi de finances initiale 2010 et en loi de finances initiale 2011 étaient respectivement de 432 millions d’euros et 434 millions d’euros. La prévision pour 2012 est de 442,7 millions d’euros (soit 37 % des dotations hors titre 2), hors loyers budgétaires. On peut s’interroger sur le caractère réaliste de ces prévisions en considération de la dépense constatée en 2010, de 440,2 millions. Les seuls loyers ont ainsi représenté en 2010 36 % des dépenses de fonctionnement et d’équipement de la gendarmerie (hors titre 2). Il s’y est ajouté 22 millions d’euros de loyers budgétaires.

Les dotations de titre 3 HFC comprennent le maintien en condition opérationnelle (MCO) des hélicoptères et des systèmes d’information et de communication (SIC), les terminaux informatiques, l’habillement, l’armement, les matériels de protection, les munitions, les matériels techniques et divers, le mobilier, la maintenance courante immobilière ainsi que les véhicules de brigade et de police route.

Les crédits alloués en 2012 au titre 3 HFC augmentent pour atteindre 111 millions d’euros d’autorisations d’engagements et 115 millions d’euros de crédits de paiement, à comparer à 83 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 82 millions d’euros de crédits de paiement en 2011. La dotation nouvelle en titre 3 HFC permettra de couvrir des dépenses incompressibles.

Le périmètre du titre 5 comprend les gros équipements et les moyens mobiles (véhicules lourds ; véhicules de transport ; hélicoptères ; motocyclettes ; moyens nautiques…), les programmes des systèmes d’information et de communication et les opérations immobilières domaniales.

L’enveloppe 2012 s’élève à 162 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 122 millions d’euros de crédits de paiement, contre 107 millions d’euros d’autorisations d’engagement et 167 millions d’euros de crédits de paiement en 2011.

Il est à noter que le recours par la gendarmerie au financement par opérations AOT-LOA (Autorisations d’occupation temporaire-Location avec option d’achat) a permis de lancer sept opérations (Châteauroux, Laval, Caen, Issy-les-Moulineaux, Sathonay-Camp, Mulhouse et La Valette du Var) qui intègrent une prestation complète sur une période d’environ 30 ans : construction, financement, maintenance, entretien courant.

Ces opérations n’auraient pu être initiées en construction domaniale classique en raison des contraintes budgétaires. Elles représentent un coût incommensurablement plus élevé que les partenariats public-privé recensés pour la police (192 millions d’euros) : la dépense en 2012 doit être de 16 millions d’euros, mais le coût total de 1 268 millions d’euros dont 540 millions d’euros pour l’investissement, 478 millions d’euros au titre du financement et 250 millions d’euros pour le fonctionnement.

Il est à noter qu’à elle seule, l’opération de construction de la nouvelle direction générale de la gendarmerie nationale à Issy-les-Moulineaux représente 408 millions d’euros.

Ces éléments sont de nature à augmenter encore la part des dépenses obligatoires dans le budget de la gendarmerie à l’avenir.

CONCLUSION

En moins de dix ans, c’est une très profonde transformation qui s’est opérée dans les services de l’État chargés de la sécurité publique : transformation des méthodes, des moyens, des structures, des esprits. Et cette évolution s’est traduite par une très remarquable amélioration des résultats, dont témoigne tout particulièrement le bond en avant constaté en matière d’élucidation des crimes et délits.

Cet effort doit être poursuivi dans un cadre financier désormais beaucoup plus contraint. À la performance opérationnelle, il importe donc d’ajouter une performance en matière de gestion. D’importants progrès ont d’ores et déjà été faits dans ce domaine. Il est essentiel de les poursuivre et de les amplifier.

Trois priorités doivent à cet égard être clairement identifiées :

– la mobilisation des avancées scientifiques et technologiques au service de l’investigation judiciaire. Cette évolution est d’autant plus nécessaire que la réforme de la garde à vue rend plus difficile la recherche de l’aveu et que dans ces conditions seul l’établissement de preuves irréfutables permettra d’améliorer encore le taux d’élucidation ;

– la mutualisation des moyens de tous les services, en particulier la police et la gendarmerie. Autant la maîtrise de deux forces séparées s’impose, autant leur coopération est une nécessité pour des raisons opérationnelles mais aussi pour des raisons budgétaires. La performance de la gestion et en particulier la maîtrise des charges salariales est une condition incontournable de la poursuite d’une amélioration des résultats ;

– l’amélioration de la disponibilité des services et en particulier le renforcement de la présence des policiers et des gendarmes sur la voie publique. Nos concitoyens le demandent. Il est essentiel de répondre à cette attente, ce qui nécessite une adaptation constante des structures et de l’organisation du temps de travail.

Au moment de voter le dernier budget de la législature, le Rapporteur spécial ne peut que souhaiter que les efforts considérables accomplis depuis 2002 se poursuivent avec autant de volontarisme au cours des années à venir.

COMPTE RENDU DE LA COMMISSION ÉLARGIE DU 25 OCTOBRE 2011 À 21H00

(application de l’article 120, alinéa 2 du Règlement)

M. Jean Launay, suppléant M. le président Jérôme Cahuzac. Mes chers collègues, le président Jérôme Cahuzac, retenu, m’a prié de l’excuser auprès de vous et m’a demandé de coprésider cette réunion.

Monsieur le ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration, je suis heureux de vous accueillir, avec Guy Teissier, président de la Commission de la défense nationale, et Jean-Luc Warsmann, président de la Commission des lois, afin d’examiner en commission élargie les crédits de la mission « Sécurité » pour 2012.

L’organisation des débats en commission élargie a été affinée : désormais, ceux-ci seront chronométrés afin de s’assurer du respect de la durée prévue. Pour la mission « Sécurité », le temps de parole total a été fixé à trois heures. Les rapporteurs disposent de cinq minutes pour poser leurs questions, contre deux minutes pour les autres députés – un peu plus, le cas échéant, pour les porte-parole des groupes. Les auteurs de question disposeront par ailleurs d’un droit de suite en cas de réponse incomplète.

M. le président Guy Teissier. Je souhaite la bienvenue à M. le ministre, dont j’attends en particulier qu’il fasse le point sur l’intégration de la gendarmerie au ministère de l’intérieur. Nous disposons désormais d’un recul suffisant pour évaluer cette réforme, à laquelle notre collègue Alain Moyne-Bressand a récemment consacré un rapport.

Cette séance sera également l’occasion d’évoquer la mise en œuvre de la LOPPSI 2 (loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure) et les mesures d’amélioration des équipements prises notamment en faveur de la gendarmerie.

La Commission de la défense a par ailleurs constaté avec inquiétude, après l’audition du général Jacques Mignon, une diminution importante, par rapport à 2011, des crédits d’investissement pour l’année à venir.

M. le président Jean-Luc Warsmann. La mission « Sécurité » est évidemment particulièrement suivie par la Commission des lois. Je salue le travail effectué par tous les fonctionnaires de police et de gendarmerie dans notre pays et leur engagement au service de la sécurité de nos concitoyens.

Dans un cadre budgétaire contraint comme il ne l’a jamais été depuis des décennies, vous nous proposez, monsieur le ministre, des crédits en augmentation de 1,4 %, essentiellement à cause de l’accroissement de la masse salariale. Nos unités disposeront-elles des moyens nécessaires pour fonctionner ? Où en est-on du recentrage des forces de sécurité sur leur métier de base, alors qu’un certain nombre de réorganisations ont déjà été effectuées ?

M. Michel Diefenbacher, rapporteur spécial. Depuis 2002, des changements très profonds sont intervenus dans la politique de sécurité publique. Ils concernent aussi bien l’organisation que les méthodes et les moyens des services : rattachement de la gendarmerie au ministère de l’intérieur, redéploiement des zones de compétence, mutualisation des moyens, fusion des services de renseignement, création d’une police d’agglomération, généralisation des communautés de brigade, réorganisation de la chaîne de commandement de la gendarmerie ont permis de traiter une délinquance plus mobile, plus violente et plus imprévisible.

S’agissant des méthodes, le recours systématique aux moyens de la police scientifique et le développement de la vidéosurveillance ont accru l’efficacité des moyens d’investigation et préparé le passage d’une culture de l’aveu à une culture de la preuve. Le renforcement des moyens matériels, des véhicules, des systèmes radio, de l’informatique a accompagné la revalorisation de la condition des agents.

Cette politique a porté ses fruits : diminution constante de la délinquance, amélioration des taux d’élucidation, renforcement de la présence des forces de sécurité sur la voie publique et, par ailleurs, baisse remarquable du nombre des accidents et des tués sur les routes.

Le budget de 2012 vise à poursuivre et à amplifier ces actions. Il se monte à 17,17 milliards d’euros, dont 9,28 milliards pour la police et 7,89 milliards pour la gendarmerie. Les effectifs diminuent de 2 606 équivalents temps plein travaillé hors transferts : c’est la conséquence de l’application à la police et à la gendarmerie du non-remplacement d’un fonctionnaire sur deux partant en retraite. La masse salariale, malgré tout, continue d’augmenter de 2,04 %, tandis que les moyens de fonctionnement progressent de 2,2 %.

La police technique et scientifique (PTS), la recherche systématique des indices sur les lieux où les infractions ont été commises, l’effort considérable de formation des agents à ces nouvelles disciplines et la constitution de nouveaux fichiers, le fichier automatisé des empreintes digitales (FAED) et le fichier national automatisé des empreintes génétiques (FNAEG) expliquent pour une large part l’amélioration remarquable du taux d’élucidation, qui est passé de 26,2 % en 2002 à 37 % en 2010. Mais, d’une certaine façon, la police scientifique a parfois été victime de son propre succès. La multiplication des relevés entraîne un véritable embouteillage des laboratoires publics, lequel impose un recours fréquent à la sous-traitance et s’accompagne souvent d’un allongement des délais d’attente. Il faut donc renforcer, moderniser, peut-être à terme réinstaller nos laboratoires. Il faudra par ailleurs poursuivre les avancées scientifiques – je pense en particulier à la reconnaissance faciale.

Monsieur le ministre, comment voyez-vous, dans les années qui viennent, l’évolution de la police technique et scientifique ?

Les mutualisations entre police et gendarmerie – commandes publiques, gestion des moyens logistiques – sont probablement un gisement important, non seulement d’économies, mais également d’efficacité, amenant les services à travailler davantage ensemble. Mais il faut éviter qu’elles en viennent à gommer la spécificité des deux forces, qui doivent rester séparées et garder chacune leur statut, leurs règles de fonctionnement et leur culture. Pouvez-vous, monsieur le ministre, préciser votre position sur ce point, faire un premier bilan des mutualisations opérées jusqu’ici et tracer les perspectives dans ce domaine pour 2012 ?

Les policiers et les gendarmes n’échappent pas à la règle du « un sur deux », mais il est essentiel que la diminution des effectifs qui en résulte ne se traduise pas par une baisse de la disponibilité opérationnelle des services et par une moindre présence des agents sur la voie publique. Quels sont les mesures de réorganisation intervenues et leur impact précis sur la disponibilité effective des agents ? La présence des forces de police et de gendarmerie sur la voie publique est une attente forte de la population, à laquelle il est important que le Gouvernement réponde en dépit des contraintes budgétaires.

Je finirai par la réforme de la garde à vue. Celle-ci était nécessaire pour les raisons que l’on sait, mais elle a eu pour effet de rendre les enquêtes plus difficiles et par conséquent plus lentes. En outre, une adaptation des locaux des brigades et des commissariats s’est révélée nécessaire pour que les avocats puissent intervenir dans des conditions satisfaisantes. La première loi de finances rectificative de 2011 avait d’ailleurs ouvert un crédit de 15 millions d’euros à cet effet.

Quel est le bilan de la réforme de la garde à vue ? Risque-t-elle d’entraîner, comme certains le craignent, une baisse des taux d’élucidation ? Les investissements destinés à l’aménagement des locaux pourraient-ils être beaucoup plus lourds que prévu ? Une seconde réforme, dont la nécessité est évoquée par certains, est-elle à l’ordre du jour ?

M. Alain Moyne-Bressand, rapporteur pour avis de la Commission de la défense. Je me réjouis que, dans un cadre de réduction des dépenses publiques, les crédits du programme « Gendarmerie nationale » soient maintenus, ce qui témoigne de la priorité accordée par le Gouvernement à la sécurité.

Ces dernières années, la gendarmerie a connu de nombreuses réformes structurelles, au premier rang desquelles son intégration au ministère de l’intérieur. Ces réformes, elle les a assimilées avec succès, comme j’ai pu le constater lors de la mission d’évaluation de la loi du 3 août 2009 que j’ai conduite avec Mme la sénatrice Anne-Marie Escoffier.

L’ensemble des acteurs que j’ai rencontrés à cette occasion m’a d’ailleurs confirmé leur souhait de voir la gendarmerie conserver son statut militaire, gage d’efficacité et de réactivité. J’en profite pour adresser toutes mes félicitations à la gendarmerie pour l’action qu’elle mène, tant sur le territoire national que sur des théâtres d’opérations extérieurs.

Je souhaite cependant attirer l’attention du Gouvernement sur l’aggravation des conditions de logement des gendarmes, qui doivent pourtant être logés par nécessité absolue de service. L’état du parc domanial, qui représente plus de 40 % du parc immobilier de la gendarmerie, est particulièrement préoccupant. En effet, 70 % des logements domaniaux ont plus de vingt-cinq ans et nécessitent des travaux de rénovation importants. Or, dans ce domaine, l’insuffisance des crédits est récurrente.

À la question de l’entretien des casernes s’ajoute celle de leur construction. Sur ce point, force est de constater que le développement de procédures de financement innovantes n’a pas permis de résorber l’ampleur du problème. Certaines d’entre elles, comme les baux emphytéotiques administratifs ou les partenariats public-privé (PPP), génèrent même des surcoûts importants.

La situation est d’autant plus préoccupante que le projet de loi de finances pour 2012 ne prévoit de consacrer que 40,78 millions d’euros à la réhabilitation des casernes et 15,9 millions d’euros à leur construction.

S’agissant de l’équipement, je me réjouis que près de 16 millions d’euros soient dégagés en 2012 pour l’acquisition de trois EC135, qui vont permettre de poursuivre la modernisation du parc d’hélicoptères de la gendarmerie – des appareils dont j’ai pu mesurer l’importance, notamment pour le GIGN, en me rendant récemment au groupement central des forces aériennes de la gendarmerie, à Villacoublay.

J’appelle toutefois votre attention, monsieur le ministre, sur la question du renouvellement des véhicules blindés à roues de la gendarmerie mobile, qui ont plus de quarante ans et pour lesquels aucun financement n’a encore été débloqué.

Enfin, je souhaiterais connaître la situation des mutualisations avec la police nationale – qui doivent permettre de réaliser des économies et d’améliorer l’efficacité du service –, notamment dans les domaines du soutien des véhicules et du développement des systèmes d’information.

M. Guy Geoffroy, rapporteur pour avis de la Commission des lois. Nous allons entrer dans l’avant-dernière année de mise en œuvre de la LOPPSI 2.

Les échéanciers et les objectifs de cette loi de programmation ont-ils été respectés et vont-ils continuer de l’être en 2012 et en 2013 ?

La police technique et scientifique est un des grands enjeux de cette loi, et nous en attendons beaucoup en termes de performance. Or, si l’augmentation du nombre de scientifiques est visible dans la police nationale comme dans la gendarmerie, des interrogations, voire des inquiétudes demeurent. La « PTS de masse » repose sur les prélèvements sur site effectués par des agents de terrain dits « polyvalents », dont ce n’est pas la mission principale et qui, en toute logique, sont moins performants que les scientifiques spécialisés. En dépit de ces difficultés, estimez-vous, monsieur le ministre, que le système de la polyvalence donne satisfaction ? Quel est selon vous le nombre de scientifiques supplémentaires qu’il faudra envisager de recruter dans les années à venir ?

D’une façon générale, les effectifs vont à nouveau être réduits en 2012 à concurrence de 1 682 équivalents temps plein. Je rappelle que les services de police et de gendarmerie ont dû consentir de gros efforts depuis le début de la mise en œuvre de la révision générale des politiques publiques. Pour maintenir une présence constante sur le terrain, vous avez donc opéré des redéploiements internes, réduit le format de certaines forces, comme les forces mobiles, et redéfini certains concepts relatifs à la présence sur le terrain. Compte tenu des efforts déjà engagés, pouvez-vous confirmer que le nombre de policiers et de gendarmes sur la voie publique sera maintenu en 2012, voire augmenté ? Qu’en sera-t-il les années suivantes ?

En ce qui concerne les personnels administratifs, le ministère a mis en œuvre une politique tendant à affecter des personnels dédiés aux tâches qui ne requièrent pas de disposer d’un statut actif, afin d’améliorer l’efficacité de nos forces de sécurité et de réduire les coûts. Des efforts notables ont déjà été accomplis en ce domaine, si bien que, cette année, le nombre de recrutements de personnels administratifs, techniques et scientifiques est désormais supérieur à celui des gardiens de la paix. Pourtant, l’effort en faveur de ces personnels devrait et pourrait être renforcé. Cela permettrait en particulier de valoriser leurs fonctions et de les rendre plus attractives, surtout depuis la fusion de ce corps avec ceux des préfectures. Quels sont vos projets en ce domaine ?

On l’a dit, les dépenses de fonctionnement et d’investissement s’inscrivent dans un contexte très contraint. Le budget de fonctionnement de la gendarmerie est globalement stabilisé à périmètre constant, et la police a obtenu un abondement bienvenu de ses dotations pour 2012. Ces deux forces auront-elles des moyens suffisants sur le terrain pour accomplir leurs missions essentielles ? Estimez-vous possible que ces budgets puissent être à nouveau limités sans que les capacités opérationnelles en soient affectées ?

Je note qu’un effort notable sera accompli cette année en faveur de l’immobilier. Cette question est essentielle pour le « moral des troupes ». Une telle politique pourra-t-elle être poursuivie dans les années à venir ?

Le rapprochement entre police et gendarmerie semble se dérouler correctement. Je me félicite des initiatives qui tendent à améliorer la coordination de ces deux forces, notamment grâce à la CORAT (coordination opérationnelle renforcée dans les agglomérations et les territoires) bientôt mise en œuvre dans chaque département. Quels efforts reste-t-il à accomplir en ce domaine ?

Le recentrage sur le cœur de métier se poursuit : la prise en charge des transfèrements judiciaires par l’administration pénitentiaire est en cours ; des mesures ont été prises pour réduire le nombre de gardes statiques ; l’encadrement des convois exceptionnels ne sera plus assuré par l’État. Quelles sont, si elles existent, les marges supplémentaires dont vous pouvez disposer ?

Enfin, où en est la mise en œuvre de la réforme de la médecine légale ?

M. Jean Launay, président. Pour sa part, le président Cahuzac souhaitait vous interroger sur les remarques concernant la politique de rémunération dans la police exprimées par la Cour des comptes dans sa note d’exécution budgétaire sur le budget de 2010, ainsi que sur la partie du rapport de la Cour sur la sécurité publique relative aux effectifs de la police et de la gendarmerie.

Quant à moi, je m’interroge sur les conditions de mise en œuvre de la réforme de la garde à vue.

M. Éric Ciotti. Au moment où nous examinons les crédits de la mission « Sécurité », permettez-moi de saluer l’action des forces de police et de gendarmerie et d’avoir une pensée particulière pour la famille d’Anne Pavageau. L’assassinat de cette policière, il y a quelques jours à la préfecture du Cher, nous rappelle l’importance et la difficulté du travail qu’accomplissent au quotidien, avec beaucoup de courage, les policiers et les gendarmes.

Au nom du groupe UMP, je voudrais apporter mon soutien à ce budget. Réalisé dans le contexte financier difficile que l’on connaît, il n’en traduit pas moins la volonté forte du Gouvernement en faveur de la sécurité dans notre pays, puisque les crédits connaissent une augmentation de 1,55 %, soit 50 millions d’euros de plus par rapport à la loi de programmation des finances publiques adoptée l’année dernière.

Ce budget nous permettra donc de poursuivre une politique dont les résultats très positifs ont déjà été soulignés – en particulier la baisse de 17 % de la délinquance générale depuis 2002. Il permettra également la mise en œuvre concrète des objectifs défini par la LOPPSI 2, notamment en termes de modernisation, qu’il s’agisse de la police technique et scientifique – entre 2002 et 2011, le nombre d’empreintes dans le FNAEG est passé de 2000 à plus de 2,2 millions, ce qui a contribué à l’augmentation de 26 à 37 % du taux d’élucidation –, de la vidéoprotection ou des fichiers d’analyse sérielle.

En dépit de ce que l’on entend de façon récurrente – mais mensongère –, les effectifs ont augmenté de 1 700 depuis 2002. Nous mesurons l’effort engagé au titre de la RGPP dans le budget de 2012, mais nous constatons aussi que la présence sur le terrain de la police et de la gendarmerie sera accrue grâce à la mobilisation des réserves et à une meilleure coordination entre les deux forces permise par l’application de la loi d’août 2009.

Je note enfin l’effort particulier consenti en faveur de l’immobilier et l’acquisition de plus de 4 000 véhicules neufs.

Le groupe UMP soutien donc ce budget, qui permettra aux forces de police et de gendarmerie d’accomplir les missions toujours plus difficiles qui leurs sont assignées.

M. Jean-Jacques Urvoas. J’aurais pu concentrer mon propos sur ce qui restera la marque de cette législature, à savoir l’éradication des effectifs de policiers et de gendarmes. En effet, si l’on considère le nombre de fonctionnaires – et non celui des adjoints de sécurité, de gendarmes adjoints ou de réservistes –, vous en avez supprimé 12 500 depuis 2007, dont 3 148 dans ce seul budget.

Ce sujet ayant été largement traité ailleurs, je préfère vous interpeller sur ce que vous avez présenté comme un effort exceptionnel en faveur de l’équipement des forces de sécurité.

Le projet annuel de performance nous indique que la gendarmerie est censée financer l’achat de véhicules à hauteur de 20 millions d’euros, et la police à hauteur de 40 millions d’euros. Mais la plaquette de communication éditée par votre ministère évoque une enveloppe globale de 100 millions d’euros. Ou sont passés les 40 millions manquants ?

Si les chiffres transmis annuellement par le ministère sont exacts, entre 2007 et 2012 la part d’investissement a chuté de 40 % dans la police et de 75 % dans la gendarmerie – les capacités d’investissement de cette dernière ont été divisées par quatre en quatre ans. Ainsi, cette année, tant pour la police que pour la gendarmerie, les dotations en crédits de paiement ne serviront en réalité qu’à couvrir des engagements antérieurs, notamment ceux pris au titre de la LOPPSI 1. Il s’agit donc seulement de solder les factures du passé !

Les autorisations d’engagement sont certes en hausse, mais, pour la police, les crédits supplémentaires seront principalement affectés – à hauteur de 131 millions d’euros – à une seule opération, le projet de relogement de la police judiciaire, à Paris, sur la ZAC des Batignolles. En comparaison, les 40 millions d’euros destinés aux opérations de réhabilitation et de construction pèsent peu.

En cinq ans, la baisse des crédits dédiés à l’immobilier est impressionnante : 40 % ! Les crédits passeront en effet de 350 millions d’euros en 2007 à 210 millions en 2012. Vous visitez des commissariats de police, monsieur le ministre, mais vous devriez aussi voir ce que l’on ne veut pas vous montrer : dans le Val-d’Oise, notamment, certains commissariats sont indignes de recevoir les personnels comme les autres personnes amenées à les fréquenter.

De la même manière, il faudrait 250 millions par an pour l’entretien courant des casernes de la gendarmerie. Or seulement 50 millions d’euros y seront affectés en 2012. Lorsqu’on traverse les bâtiments de la caserne Babylone où logent les gardes républicains – le rapporteur spécial pourra le confirmer –, on croise des rats ! Quant à l’installation électrique, elle date des années 1960 !

Le budget de 2012 ne redressera pas, évidemment, une situation que l’impéritie gouvernementale a laissé se dégrader continûment.

Pour le groupe SRC, il s’agit d’un budget de renoncement, qui s’accommode de la paupérisation des forces de sécurité, de la clochardisation de bien des services et du déclin de l’État dans l’exercice d’une de ses missions fondamentales.

M. Claude Guéant, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration. Je classerai mes réponses par thèmes.

Je tiens tout d’abord à signaler que les engagements pris sont scrupuleusement respectés. Vous avez voté une LOPPSI dont les crédits sont bien inscrits dans le projet de loi de finances.

Du reste, monsieur Urvoas, deux LOPPSI ont été successivement adoptées. La première était une loi de rattrapage, la seconde une loi de consolidation, ce qui rend difficiles les comparaisons entre les deux textes. Depuis 2002, l’effort de modernisation de l’équipement des services de police s’est élevé à 3,4 milliards d’euros. D’ailleurs, et je m’en étonne, alors que les crédits prévus dans le cadre de la LOPPSI 1 étaient importants, vous ne les avez jamais votés.

Les accords signés par les ministres de l’intérieur successifs et les organisations représentatives du personnel ont été, eux aussi, respectés de manière scrupuleuse. De plus, par souci de parité et d’équité de traitement, ils sont déclinés également en faveur des militaires de la gendarmerie nationale.

Monsieur Moyne-Bressand, la gendarmerie a la capacité d’acheter trois hélicoptères C135, qui seront livrés en 2012 et 2013.

Par ailleurs, au-delà même des engagements pris par la LOPPSI, deux programmes sont privilégiés cette année.

Il s’agit tout d’abord d’un programme d’acquisition de véhicules, à hauteur de 100 millions d’euros, lesquels résultent des inscriptions de 2012 et de réservations de crédit sur l’exercice 2011. Il est très important pour les forces de police et de gendarmerie de disposer d’un parc satisfaisant de véhicules : 4 400 véhicules seront livrés l’année prochaine, moitié pour la police nationale et moitié pour la gendarmerie.

D’autres éléments forts de modernisation sont également prévus. Outre la police scientifique et technique, sur laquelle je reviendrai, le développement de la lecture automatisée des plaques d’immatriculation : 350 véhicules sont en cours d’équipement. Ce programme donne des résultats remarquables. Deux gendarmes dans l’Ain m’ont confié récemment qu’ils faisaient en deux jours le travail de cent gendarmes en un an. Ce dispositif permet de lire les plaques de tous les véhicules visés et de les confronter au fichier des véhicules volés. La détection est immédiate.

L’évolution des effectifs tient compte de la nécessité de maîtriser les finances publiques. J’ai remarqué que la gauche confirmait sa propension à dépenser de l’argent : tel n’est pas le choix du Gouvernement ni de la majorité. Parler d’ « éradication » des effectifs me paraît bien excessif. Nous faisons la démonstration, monsieur Urvoas, qu’en dépit de la diminution des effectifs la délinquance recule tous les ans. La police et la gendarmerie ne sont donc pas si mal administrées que cela ! De plus, les gendarmes et les policiers français sont des militaires et des fonctionnaires compétents et ardents au travail.

La police technique et scientifique est en grande partie à l’origine de l’amélioration du taux d’élucidation des affaires délictuelles et criminelles, qui est passé de 26 % à 37 %, ce qui est considérable. Je pense notamment au fichier des empreintes génétiques, évoqué à l’instant par M. Éric Ciotti, ainsi qu’au développement de nouvelles technologies, comme la préservation des odeurs, qui est appelée à un grand développement, ou à l’augmentation du régime du fichier des empreintes digitales.

Mais l’équipement n’est pas tout. La préparation de la police et de la gendarmerie à l’utilisation des technologies de la police technique et scientifique est tout aussi importante. Monsieur Geoffroy, des gendarmes à l’origine polyvalents sont formés au relevé des traces et équipés de kits qui leur permettent de faire ces relevés. Les équipes sont beaucoup plus nombreuses que par le passé et tous les services sont désormais capables de faire immédiatement des relevés.

Vous avez également évoqué l’équilibre entre les fonctionnaires de police ou les gendarmes affectés à des tâches de police technique et scientifique et les fonctionnaires ou militaires exclusivement spécialisés dans ces tâches : le sens de l’histoire conduit au renforcement des équipes spécialisées.

Plusieurs d’entre vous ont évoqué la réforme de la garde à vue, qui est inéluctable et ne saurait être remise en cause : le Conseil constitutionnel a clairement indiqué que les droits de la défense devaient être renforcés et la loi que vous avez votée va dans ce sens. Le Conseil constitutionnel, sollicité par une question prioritaire de constitutionnalité, rendra un avis d’ici à quelques jours. Il nous faut donc progresser encore dans le passage d’une culture de l’aveu à une culture de la preuve, ce qui implique de développer la police technique et scientifique.

De nouvelles technologies sont très prometteuses à cet égard. L’un de vous a évoqué la reconnaissance faciale. La semaine dernière se tenait à Paris le salon Milipol – le salon mondial de la sécurité intérieure des États – : les technologies de la reconnaissance faciale, développées notamment par les entreprises françaises, atteindront très vite un degré de fiabilité d’autant plus intéressant que les différents fichiers déjà possédés par la police et la gendarmerie comptent déjà quelque 5 millions de photographies. Assez rapidement, l’acquisition de ces nouvelles technologies aura des effets opérationnels considérables.

Monsieur le rapporteur spécial, vous avez évoqué la mutualisation des services de police et de gendarmerie, le président de la commission de la défense, M. Guy Teissier, et M. Moyne-Bressand ayant plus précisément évoqué le cas de la gendarmerie.

Comme ont pu le constater M. Moyne-Bressand et Mme Escoffier, sénatrice, qui ont travaillé ensemble sur l’évaluation du rapprochement de la police et de la gendarmerie, celui-ci est, à mes yeux, un véritable succès. Après avoir longtemps fréquenté le ministère lui-même, je suis devenu ministre de l’intérieur après l’adoption de la loi de 2009 : j’ai été très agréablement surpris du caractère aisé, naturel, voire spontané des coopérations entre policiers et gendarmes. C’est très satisfaisant pour la qualité du service public rendu à nos concitoyens.

Des conventions CORAT sont déjà en vigueur dans soixante-huit départements. Des services sont devenus communs au niveau central, notamment la Direction de la coopération internationale : un seul service fonctionne désormais à la plus grande satisfaction de chacun, ambassadeurs compris.

Le Service des technologies et des systèmes d'information de la sécurité intérieure du ministère de l’intérieur a, quant à lui, été confié à la gendarmerie, qui avait plus d’expertise et de moyens en ce domaine : ce service fonctionne, lui aussi, à la satisfaction de la gendarmerie comme de la police nationale, qui se consacre par ailleurs à un grand nombre de tâches des services centraux.

Il en est de même sur le terrain : c’est de manière tout à fait naturelle qu’aujourd'hui policiers et gendarmes se prêtent main forte – il y a même des exemples de coopération très poussée dans le département de l’Isère entre les unités d’intervention. Sans plus aucun problème, les policiers peuvent désormais compter, en cas de difficulté, sur un regroupement rapide de gendarmes, rendu possible par les règles d’emploi et de disponibilité de la gendarmerie. À l’inverse, une brigade de gendarmerie en difficulté peut faire appel à la BAC du commissariat le plus proche, qui arrive aussitôt.

Cette coopération se fait bien sûr – j’y veille particulièrement – dans le respect de l’identité de chaque corps. Il n’est pas question de toucher au caractère militaire de la gendarmerie et il faut veiller à ne pas conforter tout ce qui pourrait être interprété de manière contraire.

S’agissant de la disponibilité des services, notamment de leur présence sur la voie publique, elle s’accroît, comme l’a constaté le rapport de la Cour des comptes sur la sécurité publique, qui a noté une augmentation avoisinant les 10 % – vous vous rappelez que j’étais loin d’être en accord avec l’ensemble de ses conclusions. Je continue d’œuvrer en ce sens en renforçant les moyens mis sur le terrain : 800 adjoints de sécurité et 200 gendarmes adjoints volontaires ont été recrutés et seront opérationnels avant la fin de l’année 2011. De plus, 3 000 autres équivalents temps plein de fonctionnaires ou de militaires sont rendus actuellement disponibles grâce au recours à des heures supplémentaires ainsi qu’à la réserve, qui est un moyen aussi souple qu’efficace de répondre aux besoins. Pour l’essentiel, la réserve de la police nationale et celle de la gendarmerie reposent sur le recours à des fonctionnaires de police ou des militaires fraîchement retraités, la gendarmerie pouvant, en sus, faire appel à des civils volontaires. Demain, le conseil des ministres adoptera un projet de décret, que je lui présenterai, sur les réserves civiles de la police nationale afin de les aligner sur les modalités de la gendarmerie.

Outre les moyens humains à développer, il convient de renouveler les méthodes. J’ai demandé aux deux directeurs généraux de la police nationale et de la gendarmerie nationale de développer les patrouilles sur le terrain. Une politique de sécurité doit en effet comporter plusieurs éléments : une politique de prévention, une politique visant à faire reculer la délinquance et la criminalité – elles ont reculé de quelque 17,5 % depuis 2002, ce qui a fait 500 000 victimes en moins en 2010, en dépit d’un accroissement de la population de 3,5 millions d’habitants – et une politique visant à rassurer nos concitoyens. À cette fin, les forces de sécurité doivent être présentes et visibles sur le terrain. C’est pourquoi la quasi-totalité des nouveaux véhicules seront sérigraphiés, et donc identifiables par nos concitoyens. Les véhicules banalisés, qui sont nécessaires dans certaines missions, ne sauraient, en effet, être ressentis comme appartenant aux forces de sécurité. Tel est le sens de la politique de patrouilleurs, que j’ai développée à partir du mois de juillet. Le nombre de patrouilles a d’ores et déjà augmenté de 17 % sur l’ensemble du territoire par rapport au mois de juin, le nombre des patrouilles pédestres ayant connu un accroissement significatif. J’ai pu mesurer sur le terrain combien la formule était appréciée.

En ce qui concerne la gendarmerie nationale, le directeur général a décidé de demander à ses effectifs de renouer avec la grande tradition des patrouilles à deux, qui avait été délaissée au profit de l’utilisation de l’automobile. Cette mesure est aussi appréciée de nos concitoyens.

M. le rapporteur spécial m’a demandé d’évaluer la loi sur la garde à vue, notamment en matière de taux d’élucidation. Nous sommes dans les premiers mois d’application du texte : il faut attendre le rapport qui doit être rendu par les ministres de la justice et de l’intérieur, auquel participent, pour l’Assemblée nationale, MM. Sébastien Huyghe et Philippe Gosselin. Une mission de l’inspection générale travaille également sur le sujet.

On a d’ores et déjà pu remarquer que la nouvelle garde à vue impose aux enquêteurs des charges très importantes de procédure : ils doivent rédiger dix procès-verbaux supplémentaires par garde à vue, ce qui, à la fois, est consommateur de temps et tend à transformer la garde à vue, de moment privilégié de l’enquête qu’elle était, en une étape de la procédure.

De plus, selon les enquêteurs, leurs relations avec les avocats n’ont pas encore trouvé leur rythme de croisière. Sans évoquer des esclandres, les enquêteurs ne travaillent plus aussi facilement qu’auparavant, surtout lorsqu’ils ont affaire à des avocats qui, bien qu’ils n’aient pas le droit d’intervenir dans les auditions, se montrent bavards : deux enquêteurs sont alors nécessaires pour faire face, ce qui consomme des effectifs.

Nous avons noté dans les premiers mois d’application de la loi une petite diminution du taux d’élucidation. Peut-être s’agit-il d’un résultat provisoire, les enquêteurs devant, eux aussi, s’adapter au nouveau dispositif. Traditionnellement, on procédait à la garde à vue immédiatement après l’interpellation. Les praticiens estiment aujourd'hui qu’il vaut mieux procéder à une garde à vue après avoir rassemblé quelques éléments de preuve, afin de la rendre plus productive. Les enquêteurs doivent s’adapter à cette nouvelle démarche. Il convient également de recourir davantage à la preuve scientifique et d’apporter quelques corrections de détail aux textes actuellement en application. Il faut toutefois attendre la décision du Conseil constitutionnel pour nous déterminer de manière plus précise.

Monsieur Geoffroy, la médecine légale a fait l’objet d’une modification de son fonctionnement, en début d’année, laquelle ne donne pas satisfaction. Le garde des sceaux et moi-même avons pris la décision de principe de revenir dessus, une fois que nos directions générales, qui travaillent en commun, auront rendu leur rapport.

Cette modification, dois-je le rappeler, a tendu à spécialiser des services dans l’accueil de la médecine légale. J’ai entendu en début d’année à la radio – je n’étais pas encore ministre de l’intérieur – un syndicaliste de la police expliquer que tous les véhicules de patrouille disponibles étaient affectés au transport d’interpellés vers l’hôpital, ce qui prenait beaucoup de temps. Nous avons le même problème pour la thanatologie, qui consomme elle aussi beaucoup du temps des fonctionnaires de police et immobilise trop de véhicules de patrouille. Auparavant, on demandait au médecin de passer.

Un autre inconvénient, très regrettable, concerne les victimes, qui sont désormais priées d’aller dans des services si éloignés qu’elles ne s’y rendent pas, ce qui nuit à l’expression de leurs droits.

M. Jacques Alain Bénisti. Monsieur le ministre, permettez-moi d’abord de me réjouir de l’effort financier consenti par le Gouvernement cette année encore en faveur de la sécurité, surtout en cette période de rigueur budgétaire.

La sécurité de nos concitoyens est une des missions fondamentales de l’État, qui les concerne au quotidien et qui continue de les préoccuper, comme l’indiquent les derniers sondages de l’IFOP.

Le budget que vous nous proposez cette année indique que les forces de sécurité continueront de s’impliquer dans les dispositifs de prévention de la délinquance mis en œuvre par les maires dans le cadre de la loi du 5 mars 2007, que je connais bien. Je ne peux qu’approuver votre démarche, prônant moi-même cette prévention depuis des années, et encore dans le rapport que j’ai remis au Premier ministre au début de l’année.

La sécurité passe aussi par la prévention de la délinquance. Y mettre les moyens, c’est, paradoxalement, économiser beaucoup sur les conséquences de la délinquance, évaluée pour 2010 à quelque 117 milliards d’euros.

Je me félicite que, déjà, un grand nombre de propositions aient été concrétisées dans différents textes adoptés comme la LOPPSI 2 ou, dernièrement, le service citoyen. Il aurait toutefois fallu que les actions de prévention de la délinquance soient réellement mises en œuvre dans un programme dédié spécifiquement à celle-ci. La prévention de la délinquance, ce n’est pas que la vidéoprotection qui, certes, est essentielle pour élucider les affaires mais dont les subventions devraient être proportionnées au potentiel financier ou fiscal des différentes villes. La prévention repose également sur toute une série d’actions sur le terrain, souvent financées en grande partie par les villes pauvres.

La loi de 2007 est encore trop peu appliquée par les maires qui, par manque de moyens ou de pédagogie, n’ont pas encore pris la mesure des outils mis à leur disposition. La prévention de la délinquance des mineurs doit devenir une priorité clairement affichée car, les chiffres le montrent, les crimes et délits sont désormais commis par des délinquants de plus en plus jeunes et de plus en plus violents. Il nous faut donc nous adapter à cette évolution et redéfinir et les objectifs et les moyens sur le terrain.

Il importera également de mettre l’accent sur les actions des Conseils locaux de sécurité et de la prévention de la délinquance (CLSPD) et du Fonds interministériel de prévention de la délinquance (FIPD), et de favoriser les villes qui ont fait des efforts en ce sens et qui, elles, appliquent la loi.

Pensez-vous, monsieur le ministre, développer ces différentes mesures qui ont fait largement leurs preuves ces dernières années ? Allez-vous dégager enfin, dans le budget global, un vrai budget pour la prévention de la délinquance juvénile ?

M. Philippe Goujon. Monsieur le ministre, le Président de la République a engagé un grand plan national de vidéoprotection afin de combler l’énorme retard de la France en la matière : où en est le déploiement de ce plan ?

À Paris, l’État le finance à plus de 95 % : les études nécessaires pour engager un deuxième plan de 1 000 caméras supplémentaires – à Londres 75 000 caméras sont reliées à Scotland Yard – sont-elles envisagées ?

Vous avez vous-même étudié aux Halles un dispositif dit de vidéopatrouilleurs : a-t-il vocation à s’étendre ?

Quelles sont par ailleurs les perspectives d’extension de la police d’agglomération, notamment avec les départements contigus aux trois départements de la petite couronne parisienne ?

Le législateur est intervenu pour combattre les incivilités en créant de nouvelles infractions, comme les occupations illicites des halls d’immeubles, les délits de vente à la sauvette, la mendicité agressive ou le racolage passif. Or c’est un contentieux de masse qui ne donne pas encore lieu de la part de la justice à un traitement satisfaisant. Quelle est votre analyse en la matière ? Quelles améliorations apporter ?

M. Patrice Calméjane. Je vous interroge en mon nom et au nom de M. Gérard Gaudron, qui a eu un empêchement de dernière minute.

La lutte contre l’insécurité constitue une des priorités de votre action. Les résultats obtenus dans ce domaine dans le département de la Seine-Saint-Denis sont encourageants puisque la délinquance de proximité a baissé de 3,96 % pour les huit premiers mois de 2011 et de 12,64 % en 2010, alors qu’elle avait augmenté de 22 % entre 1997 et 2001. La mobilisation des forces de sécurité dans le département de la Seine-Saint-Denis, sous l’impulsion du préfet Lambert, permet d’obtenir des résultats prometteurs qui devront être pérennisés en 2012.

Dans le projet de loi de finances que nous examinons, il est prévu d’inscrire un crédit de 73 millions d’euros pour l’immobilier de la police, ce qui correspond à une augmentation de 60 % par rapport à 2011. Ces crédits seront affectés à la construction, aux restructurations et à la modernisation des commissariats. Pouvez-vous nous donner quelques exemples significatifs des réalisations prévues dans le budget de 2012 pour le département de la Seine-Saint-Denis – je pense notamment au commissariat du Raincy-Villemomble ? De même, est-il envisagé d’inscrire le déplacement et la reconstruction du commissariat d’Aulnay-sous-Bois, réclamé par tous les Aulnaysiens et les fonctionnaires de police de ce commissariat ?

M. Jacques Valax. La répartition spatiale des forces de l’ordre sur notre territoire devrait être adaptée au nombre d’habitants et à l’importance de la délinquance constatée, plutôt qu’à la « qualité » de la population. La présence de la police de l’État devrait être renforcée là où la délinquance est la plus grave et la plus importante, et là où les agressions, ne serait-ce que verbales, sont quotidiennes, faute de quoi l’égalité des citoyens au regard de leur droit à la sécurité se trouverait compromise. Monsieur le ministre, que pouvez-vous faire en la matière, sachant que l’effectif global des forces de l’ordre ne cesse de diminuer ?

Mme Marylise Lebranchu. Je voudrais vous faire part de mon inquiétude concernant l’augmentation continue du nombre des infractions économiques et financières, en hausse de 8,2 % cette année. Malheureusement, je crains que ce chiffre ne soit encore fort éloigné de la réalité, dans la mesure où nous manquons de policiers et de magistrats spécialisés, notamment dans les pôles compétents, pour traquer cette forme de délinquance. Il s’agit là d’un vrai recul !

Vous estimez, monsieur le ministre, que tout se passe bien entre policiers et gendarmes, chacun étant dans son rôle. Il est certain que les policiers et les gendarmes font en ce sens des efforts très importants, qui leur semblent parfois excessifs, et les gendarmes que nous rencontrons sur le terrain ne font pas montre du même enthousiasme que vous !

Votre projet de budget ne les rassurera pas, car on note une précarisation et une déqualification des personnels. Il est ainsi prévu, pour compenser le nombre important des départs en retraite, de recruter près de 60 % du nouveau personnel sous le statut de volontaire des armées, avec un contrat d’un an renouvelable quatre fois. On voit mal comment des officiers de police judiciaire pourraient être remplacés par des jeunes peu qualifiés et interdits de maintien de l’ordre !

Les gendarmes, ayant un statut militaire et n’ayant pas droit au refus, se sentent obligés de compenser les absences de leurs collègues policiers, lesquels ne peuvent répondre à toutes les demandes. Il s’agit d’une spirale dangereuse, que les collectivités territoriales tentent de contrecarrer au moyen des polices municipales, mais cette réponse ne pourra jamais être considérée comme satisfaisante.

M. Daniel Boisserie. Lors de son audition devant la Commission de la défense, le 12 octobre dernier, le général Mignaux, directeur général de la gendarmerie nationale, notait que la zone de compétence de ses services était actuellement soumise à une forte pression en matière de petite délinquance et de cambriolage des résidences principales. La diminution des effectifs – avec une réduction de 1 185 équivalents temps plein travaillé par rapport à l’année dernière – n’est-elle pas à l’origine cette hausse considérable de la délinquance ? Le général Mignaux précisait que le budget de fonctionnement des unités opérationnelles était déjà sous tension et ne pouvait être réduit davantage.

En ce qui concerne l’immobilier, les ressources ne suffisent pas à combler les besoins, et la dotation pour les loyers est nettement insuffisante. Il en résulte que les logements des gendarmes sont de plus en plus petits et que l’on ne construit plus de garages. Les collectivités locales sont obligées d’aménager des terrains à leurs frais, en utilisant notamment, quand elles le peuvent, la Dotation d’équipement des territoires ruraux (DUTR), qui n’est pas faite pour cela. Cela pose d’énormes problèmes !

Enfin, j’ai cru comprendre que l’État financerait à hauteur de 95 % la vidéoprotection à Paris ; mais qu’en sera-t-il dans les communes rurales ?

M. Claude Guéant, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration. Monsieur Bénisti, je considère, comme vous, que nous n’avons pas suffisamment tiré parti, au plan national, du dispositif prévu par la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance – toiletté par la loi d’orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure (LOPPSI 2) –, qui avait pour objet de créer dans nos communes des conseils des droits et devoirs des familles (CDDF). Alors que les comités de prévention de la délinquance déterminent, de façon globale, les orientations à décliner par les services, ces conseils – dont les noms peuvent varier suivant les lieux – regroupent, autour du maire, les représentants du parquet, de l’éducation nationale et des services sociaux, afin de rappeler à l’ordre, avec effet immédiat – ce qui est un avantage par rapport aux procédures judiciaires –, les personnes qui dévient du droit chemin. Lorsqu’il s’agit de mineurs, cela se fait en présence des parents, ce qui permet de responsabiliser ces derniers. J’ai noté, depuis le printemps, une multiplication du nombre de ces conseils sur l’ensemble de notre territoire ; je crois qu’il faut aller encore plus loin.

Comme vous, je constate que la délinquance des mineurs continue d’augmenter, qu’elle commence de plus en plus jeune et qu’elle est de plus en plus violente. La délinquance des très jeunes adolescents de treize ans me soucie tout particulièrement. Il faut trouver le moyen de les remettre dans le droit chemin dès qu’ils dérapent. D’après une étude du célèbre criminologue Sébastien Roché, si un mineur commet un dérapage avant l’âge douze ans, il y a 75 % de chances qu’il récidive en commettant des actes graves ; cette probabilité tombe à 15 % si le dérapage survient plus tard, par exemple à quatorze ans.

Nous devons donc assister les parents défaillants. Des réponses peuvent certainement être trouvées du côté de l’éducation nationale. Je propose en outre de sanctionner les parents qui laissent leurs enfants de moins de treize ans traîner la nuit dans la rue, afin de les inciter à exercer pleinement leurs responsabilités. Ce serait la suite logique de la disposition que vous avez votée, à l’initiative d’Éric Ciotti, sur la suspension des allocations familiales. Je note à ce sujet que seulement une cinquantaine de suspensions ont été prononcées sur l’ensemble du territoire, alors que les autorités académiques ont prononcé quelque 30 000 avertissements, ce qui démontre l’efficacité du dispositif.

Monsieur Goujon, la vidéoprotection est très efficace, puisqu’elle permet à la fois de faire de la prévention et d’apporter une preuve judiciaire : chacun d’entre nous se souvient du tabassage en région parisienne dont les auteurs ont été très rapidement retrouvés grâce aux images de vidéoprotection.

La vidéoprotection peut en outre être un guide extrêmement utile pour l’action policière. Vous faisiez ainsi référence à la vidéo patrouille utilisée dans le forum des Halles. Dans un lieu aussi complexe, qui comporte de nombreuses voies de circulation étagées sur plusieurs niveaux, la trentaine de fonctionnaires de police qui y sont affectés de façon permanente ne peuvent surprendre des actes de délinquance que de façon aléatoire, en déambulant à l’aveuglette. Le système de vidéoprotection permettra de remarquer les comportements anormaux ainsi que la préparation d’affrontements entre bandes rivales et, par conséquent, d’orienter les effectifs de police vers les lieux concernés.

Le mouvement doit donc être poursuivi : 1 000 caméras de vidéosurveillance seront déployées dans Paris d’ici à la fin de l’année prochaine. La Ville de Paris refusant d’assurer le financement de ce programme, l’État s’en chargera.

J’en viens à la police d’agglomération. Après Paris et les trois départements de la petite couronne, ce dispositif gagne d’autres sites, dont Marseille et Lyon. L’objectif reste inchangé : il s’agit d’assurer la continuité de la gestion de la sécurité d’un territoire. Les résultats en sont très positifs. Ainsi, tout match ou tout spectacle organisé au Stade de France mobilisait auparavant la quasi-totalité des forces de l’ordre de Seine-Saint-Denis ; depuis la mise en place de la police d’agglomération, elles restent au service des habitants du département, tandis que les compagnies de sécurité de la préfecture de police assurent la sécurité du Stade de France. Tout le monde y gagne.

Les « contentieux de masse » sont effectivement un souci. La prostitution visible déplaît aux Parisiens, et j’ai donné ces derniers jours des instructions pour mener de nouvelles actions, qui semblent avoir été efficaces. La mendicité agressive insupporte nos concitoyens, qui ressentent une pression physique à l’origine d’un fort sentiment d’insécurité ; elle fait l’objet depuis 2003 d’une répression particulière, avec l’instauration d’un nouveau délit. La LOPPSI 2 a par ailleurs créé le délit de vente à la sauvette, qui constitue non seulement une concurrence déloyale, mais aussi une forme d’insécurité, car on ne vend pas que des reproductions de la tour Eiffel près du Champ de Mars : il s’agit aussi, dans les arrondissements de l’est parisien, de se débarrasser d’objets volés, issus de la contrebande ou dangereux pour la santé. Il convient donc de réprimer ces pratiques.

Il est vrai qu’il existe des problèmes d’articulation entre l’action de la police et les capacités de la justice. Je me suis entretenu récemment à ce sujet avec le garde des sceaux, en présence du procureur de Paris, afin qu’une réponse judiciaire minimale permette de faire vivre les textes et de dissuader les auteurs d’infractions.

Monsieur Calméjane, les 73 millions inscrits au budget de cette année – soit une augmentation de 60 % par rapport à l’année dernière – devraient permettre, en sus de la poursuite des opérations en cours, la restructuration, l’extension ou la construction des commissariats de Sarcelles, Boulogne-Billancourt, Évry, Torcy, Wattignies, Gap, Saint-Chamond, Livry-Gargan, Valenciennes, Le Raincy, ainsi qu’un certain nombre de mises aux normes.

Monsieur Valax, croyez que nous veillons en permanence à ce que les effectifs soient répartis de façon équitable. Il convient de prendre en compte, non seulement les effectifs des circonscriptions, mais aussi ceux des départements. Il faut en outre utiliser les vrais chiffres ; récemment, des élus ont comparé dans la presse les effectifs de la Seine-Saint-Denis et ceux des Hauts-de-Seine : outre le fait que ce dernier département n’est pas aussi uniforme qu’on veut bien le dire, les chiffres cités étaient erronés. Nous faisons indubitablement porter notre effort sur la Seine-Saint-Denis, qui a de grands besoins.

Madame Lebranchu, il convient de distinguer deux types d’infractions économiques et financières. J’ai le sentiment que vous aviez à l’esprit les grandes infractions, qui sont du ressort des juridictions spécialisées ; or ce ne sont pas celles-là qui se multiplient, mais les infractions liées à l’utilisation d’internet pour l’achat à distance d’objets. J’espère que, dans quelques semaines, le Parlement votera la création de la carte nationale d’identité électronique, qui permettra de garantir l’authenticité de la signature électronique et de sécuriser le commerce sur internet.

Il est vrai que la gendarmerie fait beaucoup d’efforts – tout comme la police, d’ailleurs. Je rencontre pour ma part surtout des gendarmes heureux, et je ne crois pas que ce soit ma seule présence qui les réjouisse ! Mes prédécesseurs et moi-même avons toujours eu le souci de faire en sorte que ces deux forces soient traitées de façon équitable, dans le respect de leurs singularités.

L’arrivée de la gendarmerie au ministère de l’intérieur a permis un repyramidage des grades, qui n’aurait pas été facile à obtenir dans un autre cadre. Quand je vais – comme vous – sur le terrain, j’observe qu’une brigade d’une vingtaine d’hommes a désormais fréquemment à sa tête un gendarme lieutenant, souvent un ancien sous-officier, ce qui semble logique étant donné qu’un chef de section ou de peloton est responsable d’un effectif équivalent. Le rapprochement a donc ouvert des possibilités de promotion aux gendarmes.

Monsieur Boisserie, cette année, nous remettrons en état 2 200 logements de gendarmes. Néanmoins, beaucoup d’efforts sont faits pour rénover les logements en dehors du secteur domanial. Je rends hommage aux collectivités locales qui en prennent l’initiative. Il m’est agréable de visiter les nouvelles gendarmeries, composées de petits pavillons, où les gendarmes sont logés comme des cadres moyens.

Les crédits sont évidemment limités. Nous allons pouvoir faire davantage cette année : pour la gendarmerie, les dotations immobilières réservées au casernement sont en augmentation de 45 % par rapport à l’année dernière. Il faut aussi imaginer des formules innovantes : par exemple, une partie du terrain disponible au cantonnement de Satory sera vendue à la ville de Versailles, le produit de la cession permettant de rénover les logements existants.

M. Jean-Claude Bouchet. L’une des prérogatives fondamentales de l’État est d’assurer de manière continue la protection et la sécurité de nos concitoyens sur l’ensemble du territoire. C’est pourquoi nous devons aborder l’examen de la mission « Sécurité » en étant conscients que nous touchons au cœur du pacte républicain. À ce titre, je salue, monsieur le ministre, votre engagement et votre travail, qui permettent de faire de la lutte contre l’insécurité une action prioritaire de notre Gouvernement.

Le bulletin mensuel de l’Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) fait toutefois apparaître une forte augmentation du nombre de cambriolages des habitations principales enregistrés entre octobre 2010 et septembre 2011, par rapport à la période correspondante en 2009 et 2010, avec une hausse de 17,5 % et 28 726 cambriolages en plus. Il semblerait que ces cambriolages, commis pour la plupart en zones rurales ou pavillonnaires, mais aussi en zone urbaine, offrent en ces temps de crise un rapport qualité-prix plutôt intéressant pour les voyous ; la flambée du cours de l’or entre également en ligne de compte, les gens conservant chez eux nombre de bijoux.

Selon la même source, le nombre des violences contre les personnes – point noir de la délinquance depuis plusieurs années – augmente de 1,6 %. Il s’agit à 70 % de violences physiques crapuleuses, c’est-à-dire de vols avec violence, et d’infractions connexes, dont la hausse sur la même période est de 4,3 %.

Monsieur le ministre, ces cambriolages et autres vols de biens nourrissent un fort sentiment d’insécurité chez nos concitoyens. Les crédits de la mission « Sécurité » progressent cette année de 1,53 % – je m’en réjouis, mais cela suffira-t-il pour lutter efficacement contre ce type de délinquance ?

M. Bernard Carayon. La délinquance est concentrée dans les grandes métropoles, mais elle tend depuis quelques années à se diffuser à la périphérie de celles-ci, en territoire rural. En raison de leur étendue, la réponse de l’État y est difficile à apporter, même si la réorganisation des zones de compétence respectives de la police et de la gendarmerie ainsi que la mutualisation de leurs moyens ont accru la disponibilité opérationnelle des forces de sécurité.

L’occasion nous est offerte ce soir de saluer la disponibilité, le dévouement et l’engagement des policiers et des gendarmes, qui sont souvent l’objet d’agressions de toute nature. Vous apparaissent-ils suffisamment protégés juridiquement ?

En revanche, je ne saluerai pas le rapport de la Cour des comptes sur l’organisation et la gestion des forces de sécurité, qui a été élaboré dans un esprit militant inédit. Il ne met pas en perspective les bons résultats obtenus depuis 2007 – une diminution de 17 % – avec l’examen de la situation antérieure et la progression inverse de 17 % de la criminalité et de la délinquance sous le gouvernement de Lionel Jospin.

Enfin, à titre d’exemple d’un territoire rural, je souhaiterais attirer votre attention sur la situation particulière du département du Tarn, situé à proximité de la métropole toulousaine et traversé par des réseaux routiers à grande circulation. Quel sera, pour ce département, l’effort de l’État en termes d’effectifs et de moyens matériels ? Confirmez-vous la rénovation du commissariat de Castres, ainsi que la pérennité des effectifs de police affectés à Castres et à Mazamet, issus pour l’essentiel du redéploiement des effectifs du commissariat de Graulhet, qui a fermé à la satisfaction de tous ?

M. Jean Proriol. Nous avons adopté la loi du 5 mars 2007 relative à la prévention de la délinquance. Le maire doit-il jouer un rôle de premier plan dans la mise en place des politiques locales de prévention, sachant qu’il dispose des instances locales que sont le conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance et les observatoires locaux de la délinquance et, bien sûr, de la police municipale, pour faire respecter la législation et ses arrêtés ?

S’agissant des addictions, les communes sont également aux premières loges pour constater le développement de la consommation d’alcool, notamment – mais pas seulement – chez les jeunes, ainsi que l’évolution de l’usage des stupéfiants.

Vous proposez une coopération renforcée de l’ensemble des acteurs de la sécurité dans chaque bassin de délinquance. Les cambriolages se développent, en milieu urbain, en milieu rural, et surtout en milieu semi-rural et péri-urbain. Pour y remédier, des actions telles que les opérations « Tranquillité vacances » ou « Tranquillité seniors » ont été engagées.

Le colonel de gendarmerie de mon département a fait, samedi dernier, un certain nombre de suggestions aux maires. Il a souhaité des contacts plus fréquents entre les gendarmes et les maires. Nous y sommes quant à nous favorables, mais peut-être faudrait-il inciter les gendarmes à l’être tout autant ! Il a également encouragé les maires à mettre en place des caméras de vidéoprotection, qui permettent d’élucider les affaires plus rapidement et de dissuader les infractions. Enfin, il a signalé le développement des cambriolages dans les lotissements dortoirs, désertés durant le jour par les habitants.

Monsieur le ministre, pouvez-vous nous indiquer quel rôle le maire doit jouer dans ces différentes matières ?

Mme Sylvia Pinel. La délinquance augmente dans notre pays et les grandes villes ne sont plus les seules concernées par les violences, les affaires de stupéfiants et les cambriolages : c’est l’ensemble du territoire qui est touché, y compris les zones rurales.

Les policiers et les gendarmes doivent s’adapter à ces évolutions. Or, malgré leur courage, ils sont aujourd’hui désabusés. Vous laissiez entendre, il y a quelque temps, qu’ils pourraient être épargnées par la RGPP en 2012, mais ce n’est pas du tout ce que nous constatons : il est prévu de réduire les effectifs de 1 148 postes, soit quatre fois plus qu’en 2011. Ne pensez-vous pas que les moyens devraient plutôt être augmentés ou redéployés, notamment dans les grandes banlieues et les zones rurales, aujourd’hui moins bien couvertes par les forces de police que les quartiers aisés des grandes agglomérations ?

Ne faudrait-il pas, en particulier, augmenter les moyens des brigades en charge de lutter contre les trafics de stupéfiants, qui sont à l’origine de nouvelles formes de criminalité organisée, toujours plus violentes ? Ne pensez-vous pas qu’il serait également urgent de moderniser les équipements et les matériels ? La légère hausse du budget de fonctionnement qui nous est proposée ne suffira pas.

Les forces de police sont, en outre, découragées de constater que leurs efforts ne sont pas toujours suivis d’effets parce que les sanctions ne sont pas systématiques ou bien parce qu’elles ne sont pas nécessairement exécutées. Une réponse pénale proportionnée et immédiate ne devrait-elle pas être apportée dès le premier acte délictueux ? N’est-ce pas votre responsabilité d’y veiller ?

En dernier lieu, ne pourrait-on pas imaginer une meilleure collaboration entre le ministère de l’intérieur et celui de la justice ? Les policiers, les gendarmes et les magistrats ne devraient-ils pas unir leurs efforts pour travailler avec plus d’efficacité ?

M. Alain Vidalies. J’avais l’intention de vous demander grâce à quelle recette miracle vous espériez améliorer la sécurité avec moins de policiers, mais j’ai constaté, en suivant les différents budgets, que c’était en fait une règle générale du Gouvernement : Luc Chatel va améliorer l’enseignement avec moins d’enseignants et Xavier Bertrand la couverture sociale avec moins de prestations.

Même si l’on est encore loin de ce que nous souhaitons en matière de police de proximité, et même si vous avez recours à un autre nom pour éviter de montrer que vous revenez en arrière, vous avez commencé à avouer, en créant les « patrouilleurs » qu’il était nécessaire de redéployer les forces sur le terrain. J’aimerais savoir qui sont les personnels concernés par ce redéploiement et quelles missions leur étaient précédemment dévolues. Par ailleurs, comment comptez-vous concilier la généralisation de cette mission nouvelle avec la RGPP ?

M. Dominique Raimbourg. Chacun sait que les chiffres de la police et de la gendarmerie ne mesurent pas la délinquance, mais l’activité des services. Que comptez-vous faire pour que les statistiques soient plus objectives ? Tant que nous n’aurons pas avancé dans ce domaine, il sera toujours possible de prétendre que la délinquance augmente ou qu’elle se réduit, mais ces affirmations resteront dénuées de sens.

La Cour des comptes a observé, par exemple, que les statistiques s’étaient améliorées pour la seule raison que l’on avait refusé d’enregistrer les plaintes en cas d’escroquerie à la carte bancaire, au motif que les véritables victimes étaient les banques. Sans être forcément critiquable en tant que tel, ce choix a une incidence sur les statistiques. Procède-t-on à des rectifications ?

J’en viens au fonds interministériel de prévention de la délinquance, auquel on reproche souvent d’être centré sur la vidéosurveillance au détriment des crédits précédemment consacrés à la prévention de la délinquance. Indépendamment de la discussion sur la vidéosurveillance, que pourrait-on faire pour que ce sujet n’absorbe pas entièrement les moyens de ce fonds ?

M. Claude Guéant, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration. Tous types de cambriolages confondus, on enregistre cette année une augmentation d’environ 5 % – et même un peu plus en ce qui concerne les résidences. Nous avons désormais affaire à une nouvelle espèce de cambrioleurs, des raiders, notamment issus d’Europe centrale, qui sont organisés en réseaux internationaux parfois très développés, avec de véritables chefs de mafia à leur tête. La gendarmerie a ainsi procédé à l’interpellation de 23 personnes qui avaient commis une centaine de cambriolages en Alsace et plus de 400 en Allemagne. Installés à Strasbourg, ces individus se rendaient, dans des voitures puissantes, à Hambourg ou à Berlin pour y opérer pendant quelques heures, avant de revenir en France avec leur butin.

Jean Proriol évoquait tout à l’heure le souhait d’un colonel de gendarmerie d’obtenir le concours des maires pour lutter contre ces cambriolages, mais il faut aussi utiliser pleinement les moyens de la police technique et scientifique, ainsi que ceux de la vidéoprotection, dont j’ai encore pu constater, la semaine dernière, les résultats dans l’Ain. J’ai également demandé le déploiement de six unités mobiles dans les secteurs les plus touchés. À cela doivent s’ajouter des moyens nouveaux de solidarité : la gendarmerie nationale a ainsi lancé une opération dite des « voisins vigilants », qui consiste à demander à nos concitoyens de se préoccuper de ce qui se passe à côté de chez eux, dans les lotissements et les zones pavillonnaires, en prêtant attention aux allées et venues anormales ou aux stationnements prolongés de véhicules. Le maire a naturellement un rôle à jouer dans ce domaine, car la gendarmerie nationale ne développe ces structures de coopération avec la population qu’avec son accord et son concours.

Selon une idée reçue, la hausse des violences aux personnes serait un échec de ce gouvernement. Or c’est inexact : ces violences ont augmenté de 72 % sous le gouvernement de Lionel Jospin, contre seulement 22 % depuis 2002.

Il faut, par ailleurs, distinguer plusieurs types de violences : il n’est pas facile d’intervenir pour éviter les débordements dans le cercle familial ou amical, même si nous réalisons des efforts très importants pour prévenir les difficultés et pour aider les victimes à se confier – les brigades de protection des familles sont ainsi dotées de psychologues et d’assistantes sociales. Nous pouvons plus facilement lutter, en revanche, contre les violences crapuleuses, commises par des voyous. Depuis 2002, nous avons constaté une diminution de 10 % dans ce domaine. Je le répète : il est faux de dire que les violences aux personnes sont en hausse !

M. Carayon a raison de souhaiter une égalité de traitement entre les territoires. Ce gouvernement accorde autant d’intérêt à la sécurité des habitants des territoires ruraux qu’à celle des habitants des quartiers difficiles, car tout le monde a droit à la sécurité, en ville comme à la campagne. À cet effet, la gendarmerie a développé des méthodes modernes, elle s’est dotée d’équipements supplémentaires et elle s’organise pour être plus disponible – la création des communautés de brigades, hier contestée, avait précisément pour but de faire en sorte que les effectifs disponibles soient plus présents. M. Binetruy pourra vous confirmer que la brigade de gendarmerie de Pierrefontaine-les-Varans ne recevait qu’une visite par semaine, alors qu’un gendarme y était affecté en permanence ; il nous a semblé préférable qu’il sillonne en voiture le territoire.

S’agissant de la protection juridique contre les agressions, le dispositif me paraît aujourd’hui satisfaisant, à condition que l’on utilise les moyens prévus par la loi. C’est ce que le ministère de l’intérieur a fait contre le site scandaleux Copwatch, malheureusement répliqué par d’autres. Il faudra donc engager de nouvelles procédures judiciaires pour interdire aux fournisseurs d’accès de transmettre ces informations.

En ce qui concerne le rapport de la Cour des comptes, j’ai déjà eu l’occasion d’indiquer, en particulier devant la Commission des finances, que certains éléments étaient extrêmement critiquables. Il est ainsi affirmé que la baisse des atteintes aux biens a été compensée par une augmentation équivalente des atteintes aux personnes. Sans répéter ce que je vous indiquais tout à l’heure, je tiens à rappeler que les atteintes aux personnes représentent 13 % du total, et les atteintes aux biens 87 %. La comparaison était donc fallacieuse et malvenue de la part de la Cour des comptes, même si elle n’intervenait pas en l’espèce comme juridiction.

Quant à la criminalité dans le Tarn, je peux vous dire que la délinquance générale a encore diminué d’environ 2 % en 2011, et que la délinquance de proximité, notamment les vols et les agressions, a reculé de presque 9 %. Nous continuons donc à aller dans le bon sens. Un montant de 150 000 euros a, par ailleurs, été dégagé pour remettre en état les locaux de garde à vue. Je suis prêt à examiner avec vous d’autres cas particuliers si vous le souhaitez.

Comme l’a indiqué Jean Proriol, la question des addictions est très préoccupante : on observe aujourd’hui des phénomènes d’alcoolisation massive, notamment chez les jeunes et en milieu urbain. Nous devons nous mobiliser sur ce sujet comme nous le faisons en matière de stupéfiants.

Pour ce qui est des moyens, dont Mme Pinel a regretté l’insuffisance, je dois rappeler que l’impératif du Gouvernement et de la majorité est de rétablir l’équilibre des finances publiques pou parvenir à rembourser la dette dans quelques années. C’est notre priorité absolue, car nous devons éviter une hausse du coût du crédit – ses conséquences seraient catastrophiques tant pour les particuliers que pour notre économie. Les fonctionnaires de la police et de la gendarmerie doivent s’adapter, mais cela ne nous condamne pas à l’immobilisme : nous pouvons nous efforcer d’utiliser les forces de l’ordre aussi efficacement que possible.

Si nous parvenons à faire mieux avec moins d’effectifs, monsieur Vidalies, ce n’est pas grâce à une quelconque recette miracle, mais grâce une plus grande efficacité et une volonté de se remettre en cause, qui est partagée par les policiers et les gendarmes.

Contrairement à ce que vous avez affirmé, il existe une différence considérable entre les « patrouilleurs » et la police de proximité : le seul élément commun est la présence sur le terrain. Comme pourraient le montrer différents rapports datant du gouvernement de Lionel Jospin, la police de proximité tendait à venir au contact des populations sans assumer de fonctions de répression, à savoir l’interpellation des délinquants en vue de les déférer à la justice. Les « patrouilleurs » exercent, en revanche, l’ensemble des missions de prévention, de dissuasion et de répression. Il y a là une différence fondamentale et ce n’est pas un hasard si l’instauration de la police de proximité a correspondu à une explosion de la délinquance dans notre pays !

Si nous écoutions Dominique Raimbourg, l’évolution des statistiques importerait peu en réalité. Or je pense que nos concitoyens sont sensibles à une évolution négative de 17 % de la délinquance ou à une baisse du nombre des victimes de 500 000. C’est une réalité qui est perceptible et qui compte en matière de gouvernance. Je crois, en outre, que la demande d’instruments de mesure supplémentaires est satisfaite : le ministère de l’intérieur finance, depuis plusieurs années, des enquêtes de victimation réalisées par des organismes indépendants. Au demeurant, les conclusions de l’enquête qui sera rendue publique au mois de novembre sont encore plus favorables à l’action du Gouvernement que les statistiques de la police.

M. Lionnel Luca. La politique de sécurité menée depuis 2002 a largement fait ses preuves : l’évolution des chiffres de l’insécurité a, en effet, été inversée. Nous le devons à la qualité des personnels, policiers et gendarmes, qui font honneur à notre pays. Personne ne peut sérieusement remettre en cause les résultats obtenus, mais il reste des sujets de préoccupation : la politique budgétaire drastique qui est aujourd’hui menée connaît ses limites. La rigueur est certes indispensable en ce qui concerne les dépenses de fonctionnement, mais elle ne doit pas conduire à une réduction des effectifs et des moyens matériels, car cela ne permettrait plus aux personnels d’être efficaces et cela les démotiverait.

La mise en place de la culture du résultat, en 2002, était certes nécessaire et légitime – elle a produit les effets que l’on connaît –, mais elle me paraît conduire, dans un trop grand nombre de cas, à une politique du chiffre pour le chiffre qui va à l’encontre des objectifs fixés. On constate ainsi des excès de zèle commis par une hiérarchie qui n’a pas toujours le sens du discernement dans son désir de satisfaire aux attentes placées en elle.

Une jeune policière du commissariat de Cagnes-sur-Mer, qui était bien notée et ne souffrait d’aucun problème personnel, s’est ainsi suicidée en « zone gendarmerie » après avoir laissé une lettre très explicite sur la pression qu’elle avait subie – celle-ci a d’ailleurs été confirmée par tous ses collègues, de tous bords syndicaux, que j’ai rencontrés. Il y a aujourd’hui, chez de trop nombreux personnels, un malaise et un doute sur le sens de leur engagement. Je voudrais que vous puissiez les rassurer, monsieur le ministre. Ceux qui ont le commandement doivent, par ailleurs, faire preuve de discernement en veillant à rester dans le cadre de la culture du résultat que l’actuel Président de la République a inculquée lorsqu’il était ministre de l’intérieur – elle ne doit pas être confondue avec la politique du chiffre.

Enfin, je le répète, les moyens nécessaires pour obtenir les bons résultats que nous avons connus doivent être maintenus.

M. Yves Nicolin. Nous avons effectivement obtenu, depuis quelques années, des avancées significatives dans notre combat quotidien pour la sécurité, même si ces avancées sont sans doute insuffisamment perçues par nos concitoyens.

Je rappelle que le développement de la vidéoprotection est un des moyens utilisés par le Gouvernement. Pourriez-vous dresser le bilan de ce projet depuis son lancement ? J’aimerais savoir combien il y a de caméras et combien de faits ont été élucidés. Va-t-on continuer dans cette voie et, dans l’affirmative, à quel rythme ?

Mme Chantal Berthelot. Étant ministre de l’intérieur, vous n’ignorez certainement pas ce qui se passe actuellement en Guyane.

Lorsque je vous ai interrogé sur la sécurité dans l’Ouest guyanais, au mois de mai dernier, vous vous êtes placé sur le terrain de l’orpaillage illégal, ce qui était quelque peu hors sujet. Depuis dix jours, on constate une recrudescence des actes les plus violents contre les personnes – le directeur de la poste de Saint-Georges-de-l’Oyapock s’est ainsi fait sauvagement agresser, puis ce fut le tour des commerçants de Saint-Laurent-du-Maroni ; les communes de Mana et d’Iracoubo ont ensuite été touchées et un homme de quatre-vingt-neuf ans a été retrouvé mort, avant-hier, après avoir été ligoté sur son lit et volé.

Pour avoir rencontré toutes les brigades de Guyane, la semaine dernière, je peux témoigner qu’elles sont à leur poste et qu’elles travaillent durement. Cela étant, on ne peut pas attendre qu’elles puissent sécuriser un territoire aussi grand que ce département. Quels moyens comptez-vous donc déployer pour permettre aux Guyanais d’avoir la sécurité qu’ils sont en droit d’attendre ?

Mme Brigitte Barèges. La question du rapprochement entre la police et la gendarmerie et celle de la mutualisation des moyens ont été abordées à plusieurs reprises ce soir. Vous avez ainsi rappelé, monsieur le ministre, les succès obtenus dans le respect de l’identité de chacun – il existe un véritable attachement aux différents statuts.

Pour ma part, j’aimerais savoir dans quelle mesure nous pourrions encore avancer : tout n’est pas encore mis en commun sur le terrain – je pense, en particulier, aux parcs automobiles, aux garages et aux fournisseurs d’équipement. De plus, il n’existe pas partout des salles opérationnelles départementales, permettant à toutes les forces de sécurité de se réunir, comme c’est aujourd’hui le cas à Paris dans le cadre de la Direction de l’ordre public et de la circulation. J’ajoute qu’on pourrait aussi mutualiser les centres de formation et d’entraînement.

Tout cela prendra sans doute un peu de temps, mais ce gisement d’efficacité et d’économies ne permettrait-il pas de déplacer certains crédits pour réaliser des efforts en faveur des personnels et des rémunérations, ou d’enrayer, dans une certaine mesure, les effets de la RGPP ?

Je rappelle, en dernier lieu, que vous vous êtes fixé comme objectif de conforter la coopération avec l’ensemble des partenaires de la sécurité. Qu’avez-vous prévu en ce qui concerne la police municipale ? Peut-on envisager, par exemple, une mutualisation de la consultation des fichiers en matière d’immatriculation automobile, comme c’est déjà le cas pour les garages mécaniques ?

M. Claude Bodin. Dans le cadre de la loi d'orientation et de programmation pour la performance de la sécurité intérieure, dite LOPPSI 2, le Parlement a adopté plusieurs mesures tendant à assouplir, sans laxisme, les règles de récupération des points du permis de conduire. Pouvez-vous nous dire si ces dispositions, qui étaient particulièrement attendues par nos concitoyens, sont entrées en application ?

Sous la pression des associations et en réaction à l’augmentation des accidents de la route, laquelle s’est heureusement atténuée depuis, il a été décidé de remplacer les panneaux signalant la présence des radars par des panneaux dits « pédagogiques ». Pouvez-vous nous indiquer où en est la mise en place de ce dispositif et quel est le budget prévu en la matière ?

Je rappelle, en dernier lieu, que l’Assemblée a adopté à l’unanimité, au mois de janvier dernier, une proposition de loi tendant à moderniser profondément la législation sur les armes. Or, ce texte, qui bénéficiait du soutien du Gouvernement, n’a pas encore été inscrit à l’ordre du jour du Sénat. Souhaitez-vous, monsieur le ministre, qu’il soit rapidement examiné par cette assemblée et qu’il soit adopté avant la fin de la législature ?

M. le président Guy Teissier. Le commissariat central des quartiers sud et est de Marseille, qui regroupe les services de sécurité publique pour les 8e, 9e, 10e, 11e et 12e arrondissements – cet ensemble d’arrondissements constitue à lui seul une ville plus grande que Dijon –, est situé dans le 10e arrondissement de la ville. Je crois savoir que, dans le cadre de la rationalisation des missions et des moyens, ce commissariat est appelé à accueillir de nouveaux services, dont un service de police judiciaire. Afin d’accompagner le développement des missions dévolues à ce commissariat, et compte tenu de l’ancienneté, voire de la vétusté de ses locaux, avait été évoquée la réfaction du bâtiment actuel et son extension. Mais depuis plusieurs mois, je n’ai plus aucune information sur ce dossier, ce qui m’inquiète d’autant plus que vous avez été appelé à plusieurs reprises à venir à Marseille pour mesurer nos difficultés en matière de sécurité.

Pouvez-vous, monsieur le ministre, me confirmer le renforcement du commissariat du 10e arrondissement de Marseille par des fonctionnaires de la police judiciaire ? Si oui, pouvez-vous me préciser le nombre d’effectifs supplémentaires sur site, et les autres services qui pourraient y être implantés ?

Pouvez-vous me confirmer l’extension de ce commissariat, et selon quel échéancier ? En tant que député-maire de ces arrondissements, je serai sensible à la précision de votre réponse, s’agissant d’un secteur municipal malheureusement confronté à une augmentation des actes de délinquance de voie publique.

M. Claude Guéant, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration. Je déplore autant que vous, monsieur Luca, le passage de la culture du résultat à une culture du chiffre. Si j’adhère sans réserve à la culture du résultat, la police et la gendarmerie, comme n’importe quelle organisation, ayant besoin d’objectifs qui guident leur action, il peut arriver que sa traduction confine au ridicule. Il faut agir avec discernement.

Quant au suicide que vous avez évoqué, il s’agit d’un événement douloureux qui s’est inscrit dans un contexte particulier, le climat qui régnait dans le commissariat de la jeune femme concernée pouvant expliquer les choses. J’en ai d’ailleurs tiré les conclusions en termes d’affectation des personnels.

Monsieur Nicolin, les services de vidéoprotection disposent aujourd’hui d’environ 40 000 caméras, l’objectif étant de porter ce nombre à 60 000 en 2012. J’ai demandé aux inspections générales du ministère de dresser un bilan de ce dispositif, que je vous communiquerai dès que j’en disposerai. Ce travail vise à opposer aux critiques une démonstration incontestable de l’intérêt de la vidéoprotection, à la fois en termes de prévention, de guidage de l’action policière et de fourniture de la preuve judiciaire.

Il est vrai, madame Berthelot, que la situation en Guyane est préoccupante, et il faut que nous trouvions des réponses. Il faudra très certainement envisager des réorganisations afin que la répression de la délinquance gagne en efficacité, notamment autour de Cayenne. C’est un dossier dans lequel il faut que je me plonge, quitte à me rendre éventuellement sur place.

Vous avez, madame Barèges, appelé de vos vœux un approfondissement de la mutualisation des actions et des moyens de fonctionnement de la police et de la gendarmerie. Sachez que les achats sont déjà presque systématiquement mutualisés dès que c’est possible. S’agissant des missions à caractère strictement militaire de la gendarmerie, il ne saurait évidemment y avoir d’achats en commun. En revanche, les achats de véhicules, de matériels informatiques, de consommables divers, etc., sont mutualisés. Des ateliers de maintenance automobile communs aux deux forces ont même été créés, qui me semblent donner tout à fait satisfaction.

Quant à la possibilité de salles opérationnelles communes, on peut y réfléchir, tout en gardant à l’esprit la nécessité de respecter les besoins opérationnels et les spécificités de chacun. Il arrive d’ores et déjà que des gendarmes soient affectés dans des salles de commandement de la police, mais de vastes salles opérationnelles ne sont pas forcément gage d’efficacité.

Vous m’invitiez par ailleurs à faire preuve d’audace en matière de comptabilité publique, jusqu’à envisager l’affectation de crédits de fonctionnement à la rémunération d’effectifs. C’est déjà le cas s’agissant de la rémunération des heures supplémentaires ou des réservistes, mais vous n’ignorez pas que les emplois budgétaires sont strictement définis par le Parlement, sans que nous puissions y déroger.

La loi, ainsi que tous les observateurs reconnaissent maintenant que les polices municipales sont un acteur important de la sécurité en France. Il est temps désormais de définir le champ de compétence privilégié des polices municipales. Même si ce n’est évidemment pas à l’État de définir leurs missions, cela ne nous empêche pas d’élaborer une doctrine situant le rôle de la police municipale dans l’ensemble de la production de sécurité en France. À cet égard, la décision du Conseil constitutionnel annulant certaines dispositions de la LOPPSI 2 relatives aux polices municipales nous a donné un cadre juridique. D’ores et déjà, les polices municipales peuvent, par exemple, accéder au fichier des véhicules volés.

Monsieur Bodin, l’article 18 de la LOPPSI 2 n’est pas encore entré en vigueur, non du fait de la mauvaise volonté du Gouvernement, évidemment tenu d’appliquer la loi, mais à la suite d’une concertation avec l’Assemblée nationale : celle-ci a souhaité que soient mises à plat les décisions du conseil interministériel de sécurité routière, et la mission diligentée sur ce sujet vient de nous transmettre ses conclusions.

En 2011, 26 millions d’euros ont été réservés pour financer la mise en place de radars pédagogiques, et 20 millions supplémentaires y seront affectés en 2012, cette dépense devant être financée par le produit des amendes. Ce sont 4 000 radars pédagogiques qui seront installés en 2012. Les 300 radars pédagogiques qui se sont d’ores et déjà substitués à des panneaux indicateurs de radars traduisent un état d’esprit différent, puisqu’ils ne sont pas installés aussi près des radars fixes. Je crois que cette substitution s’est déroulée dans de bonnes conditions.

Les dispositions de la directive européenne sur les armes seront transposées dans le respect de l’accord issu d’une concertation particulièrement productive que nous avons menée notamment avec le comité Guillaume Tell, qui fédère l’ensemble des associations d’utilisateurs d’armes à feu, au premier chef les 1,3 million de chasseurs, mais aussi les organisations de tir sportif, les amateurs et collectionneurs d’armes anciennes, etc. À cet égard, il est essentiel que la proposition de loi à laquelle vous faites allusion trouve un débouché au Sénat. Je crois qu’elle est déjà inscrite à son ordre du jour. Notre objectif est que ce texte soit adopté au cours de cette législature.

Monsieur Teissier, les travaux d’extension et de modernisation du commissariat du 10e arrondissement de Marseille seront entièrement financés sur 2012, pour un montant de 2,8 millions d’euros. Par ailleurs, les renforts de police judiciaire sur Marseille sont de 41 unités.

M. Yves Vandewalle. L’état des logements de la gendarmerie à Satory est particulièrement mauvais. Pouvez-vous me préciser les modalités et le calendrier de l’opération de rénovation que vous allez conduire avec la ville de Versailles et que vous avez évoquée très brièvement ?

M. Michel Hunault. Il n’est pas inutile d’exprimer notre reconnaissance et notre solidarité envers ceux et celles qui assurent la sécurité des biens et des personnes.

Peut-on dresser un bilan des groupes d’intervention régionaux (GIR), et des moyens qui y sont affectés ? Qu’en est-il notamment de l’application des dispositions législatives autorisant la confiscation du produit du crime, un des outils dont, au cours de ces dix dernières années, le Gouvernement a demandé l’adoption au législateur pour renforcer la lutte contre le crime organisé ?

Je voudrais par ailleurs vous interpeller sur l’avis de la CNIL relatif à la vidéosurveillance. La CNIL y regrette la possibilité d’installer des dispositifs de vidéosurveillance aux abords des cités scolaires. Il me semble pourtant que la vidéosurveillance contribue à la sécurité, notamment à la prévention des délits et des crimes. Et l’on sait très bien que les rackets et les trafics de drogue sévissent autour des cités scolaires. Avons-nous les moyens juridiques de passer outre l’avis de la CNIL ?

M. Philippe Armand Martin. Le budget de la mission « Sécurité » pour 2012 traduit la poursuite des engagements de la majorité. Je me félicite que des mesures d’amélioration de la condition des personnels et de rénovation et d’amélioration des équipements figurent parmi les principales orientations de ce budget. Si j’attache une attention particulière au respect de ces deux engagements, c’est que j’ai constaté que les personnels ont le sentiment que leur travail n’est pas reconnu à sa juste valeur, et qu’ils doivent assumer toujours plus de tâches induites et périphériques, au détriment de leurs missions premières.

J’attire cependant votre attention, monsieur le ministre, sur la nécessaire présence des forces de sécurité publique sur le terrain, même si des efforts ont déjà été consentis dans ce domaine. Les habitants des communes rurales sont eux aussi victimes de certains délits, rendant le maintien des effectifs tout autant nécessaire que la revalorisation des carrières et le renouvellement des moyens matériels. Pouvez-vous me confirmer que les effectifs des communautés de brigades de gendarmerie officiant en milieu rural demeureront stables ?

Je tiens par ailleurs à vous remercier des renforts, notamment de gendarmerie à cheval, que vous avez accordés à ma circonscription pour y assurer la sécurité durant les vendanges.

Enfin, puisque vous avez parlé de rénovation et de reconstruction, je profite de l’occasion pour vous signaler l’état déplorable dans lequel se trouve le commissariat de la ville d’Épernay et qui interdit aux forces de police d’exercer leurs missions dans les meilleures conditions. L’accompagnement d’une nouvelle construction fait-il encore partie de vos priorités ?

M. Patrice Verchère. La tarification de la pratique des services d’ordre indemnisés – dispositifs mis en place par la police ou la gendarmerie pour assurer la sécurité des événements sportifs ou culturels importants – et les coûts facturés aux organisateurs de ces événements ont récemment fait l’objet d’une révision. Pouvez-vous nous indiquer si le coût de ces dispositifs est aujourd’hui compensé par les recettes engendrées par les indemnisations, notamment lors de matches de football, qui génèrent une présence très importante des forces de l’ordre aux abords des stades ?

Il est normal que des réformes soient engagées dans le cadre de la RGPP pour optimiser le potentiel opérationnel des forces de sécurité intérieure, avec l’objectif de mieux répondre aux attentes de nos compatriotes en matière de sécurité, tout en participant à l’effort de maîtrise des dépenses publiques. On peut comprendre à ce titre la réduction du nombre de fonctionnaires. Il me paraît cependant important de préserver les moyens matériels nécessaires aux services de police et de gendarmerie pour que ces derniers puissent mener à bien leurs missions.

Or les interventions de la gendarmerie en zone rurale, qui nécessitent de parcourir de grandes distances, entraînent une usure prématurée des véhicules. Pouvez-vous assurer aux élus ruraux que les crédits consacrés aux moyens matériels, notamment au parc automobile, permettent de doter les unités opérationnelles de gendarmerie des matériels modernes et efficaces nécessaires à l’accomplissement de leurs missions ?

M. Christophe Guilloteau. Pourriez-vous nous faire le point des cybermenaces et de la cyberdélinquance ? De quels moyens dispose la gendarmerie pour lutter contre ces nouveaux fléaux ?

Mme Marie-Christine Dalloz. Vous avez souligné, monsieur le ministre, les avancées permises par le rattachement organique de la gendarmerie à votre ministère depuis le 1er janvier 2009. En effet, la mutualisation des moyens de tous les services qui concourent à la sécurité, notamment ceux de la police et de la gendarmerie, est porteuse de synergie, et constitue certainement une meilleure adaptation aux mutations de la délinquance. Elle a également permis d’importantes économies quant aux fonctions support – systèmes d’information et de communication, commande publique. Mais qu’en est-il du parc immobilier ? Reste-il des marges de progression dans ce domaine ?

Quel bilan tirez-vous de l’action de l’unité mixte d’intervention rapide mis en place il y a quelques mois par le préfet de l’Isère ? Ce dispositif est-il appelé à être étendu à tout le pays ?

M. Marc Francina. Pouvez-vous préciser quelles sont les responsabilités des maires en matière de police ? Comment se répartit la charge financière des patrouilles franco-suisses ?

M. Claude Guéant, ministre de l’intérieur, de l’outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration. Je voudrais vous rappeler, monsieur Vandewalle, que, depuis 2005, 29 millions d’euros ont été consacrés à la rénovation des logements de Satory. C’est vrai qu’il reste beaucoup à faire, et d’autres rénovations sont prévues, notamment dans le quartier Delpal. Les ascenseurs seront également rénovés dans un millier de logements. Quant à la cession de foncier dont nous avons parlé, je dois, avec Valérie Pécresse, signer dans quelques semaines le document qui nous permettra d’amorcer l’opération et de financer par conséquent d’autres rénovations.

Les confiscations des avoirs criminels, monsieur Hunault, sont extrêmement morales. Surtout, elles ont permis d’améliorer de façon significative les budgets de la police ou de la gendarmerie. Il me semble qu’il est encore possible d’améliorer la loi, afin de permettre la saisie des avoirs criminels dissimulés dans des sociétés écrans.

Je connais mal l’avis de la CNIL que vous avez évoqué. Il est vrai cependant qu’il faudrait pouvoir protéger plus efficacement les jeunes victimes de rackets ou de trafics de stupéfiants aux abords des cités scolaires.

Monsieur Martin, le budget de 2010 avait déjà consacré une enveloppe de 110 000 euros au commissariat d’Épernay. Cela étant, je suis tout à fait d’accord pour engager dès 2012 l’étude d’un déménagement de ce commissariat.

Vous me demandez de maintenir les effectifs des forces de sécurité dans le département de la Marne. J’observe cependant que la délinquance de proximité a baissé de 7 % depuis le début de l’année. En outre, en dépit de la diminution des effectifs budgétaires depuis 2007 dans la police et la gendarmerie, nous faisons l’impossible pour maintenir les effectifs opérationnels. En dépit de la réduction des effectifs de toutes les CRS et de la suppression de quinze escadrons de gendarmerie mobile, priorité sera donnée à la sécurité quotidienne de nos concitoyens plutôt qu’à l’ordre public. La suppression des gardes statiques et le transfert des transfèrements judiciaires à l’administration pénitentiaire obéissent au même objectif.

Une démarche est actuellement en cours, monsieur Verchère, pour que la facturation des dispositifs chargés de la sécurité des manifestations sportives ou culturelles se rapproche de leur coût réel. On peut d’ores et déjà observer que la sollicitation des forces de l’ordre diminue en proportion.

Par ailleurs, les budgets de fonctionnement de la gendarmerie et de la police seront maintenus en 2012, afin que les moyens matériels soient à la hauteur des besoins, notamment dans le cadre du plan de rénovation des véhicules automobiles.

Face à l’explosion de la cyberdélinquance, monsieur Guilloteau, les services s’organisent, notamment via la création d’un office central de police judiciaire dédié à la lutte contre cette nouvelle forme de délinquance.

Madame Dalloz, l’expérimentation en cours en Isère d’une unité mixte police-gendarmerie constitue sans doute une réponse à la situation dans ce département. Je ne pense pas cependant que cette expérience doive être systématisée, dès lors que des unités homogènes exécutent déjà leur mission.

Je crois, monsieur Francina, que les polices municipales doivent être davantage insérées dans le paysage de la sécurité d’aujourd’hui, notamment sur le plan juridique. Quant à la répartition de la charge financière des patrouilles franco-suisses, elle est très simple : chacun finance ses propres policiers.

M. Jean Launay, président. Nous vous remercions de vos réponses, monsieur le ministre.

EXAMEN EN COMMISSION

Après l’audition de M. Claude Guéant, ministre de l’Intérieur, de l’outre-mer et des collectivités territoriales, lors de la commission élargie (voir le compte rendu de la réunion du 25 octobre 2011), sur la mission Sécurité, la commission des Finances examine les crédits de cette mission.

Conformément à l’avis favorable de M. Diefenbacher, Rapporteur spécial, la Commission adopte les crédits de cette mission sans modification.

ANNEXE 1 :
LISTE DES AUDITIONS RÉALISÉES
PAR LE RAPPORTEUR SPÉCIAL

– MM Georges-François Leclerc, directeur adjoint, Stanislas Cazelles et Sébastien Daziano, conseillers techniques au cabinet du ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer, des collectivités territoriales et de l’immigration ;

– M. le préfet Frédéric Péchenard, directeur général de la Police nationale, M. Serge Boulanger conseiller budgétaire au cabinet du directeur général, M. Gérard Clerissi, sous-directeur à la direction des Ressources et des compétences de la police nationale ;

– M. Christian Lothion, directeur central de la Police judiciaire, M. Frédéric Dupuch, directeur de l’Institut national de police scientifique, M. Bruno Pereira-Coutinho, sous-directeur de la police technique et scientifique ;

– M. le général Jacques Mignaux, directeur général de la Gendarmerie nationale ; M. le colonel Jean-Luc Payrard, chef du bureau de la planification, de la programmation et de la préparation du budget à la DGGN ;

– MM. Gérard Ganser et Christian Martin, conseillers maîtres à la Cour des comptes, sur les corps d’inspection de la police nationale.

ANNEXE 2 :


RAPPORT D’ENQUÊTE DE LA COUR DES COMPTES
SUR LA REDÉFINITION DES ZONES DE COMPÉTENCE
DE LA POLICE ET LA GENDARMERIE NATIONALES

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ANNEXE 3 :


RAPPORT D’ENQUÊTE DE LA COUR DES COMPTES
SUR LA MUTUALISATION ENTRE LA POLICE
ET LA GENDARMERIE NATIONALES

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© Assemblée nationale

1 () Voir copie en annexe 3 ci-après.

2 () Voir le compte rendu n° 90 de cette réunion :

http://www.assemblee-nationale.fr/13/cr-cfiab/10-11/c1011090.asp#P9_503.

3 ()Voir en annexe 2 ci-après.

4 () Voir le compte rendu de son audition le 27 septembre 2011 ; CR n° 105 : http://www.assemblee-nationale.fr/13/cr-cfiab/10-11/c1011105.asp#P3_91.

5 () Rapport public thématique sur l’organisation et la gestion des forces de sécurité publique, publié le 7 juillet 2011. Voir les auditions réalisées le 27 septembre 2011 par la commission des Finances : http://www.assemblee-nationale.fr/13/cr-cfiab/10-11/c1011104.asp#P12_471.

6 () Source : observatoire national interministériel de la sécurité routière ; ces données sont différentes et plus favorables que celles du projet annuel de performances.

7 () Contrairement à ce qu’affirme la Cour des comptes dans son rapport public thématique concernant l’organisation et la gestion des forces de sécurité publique.